Vous êtes sur la page 1sur 7

Exposé sur la vénus d’Urbino 

de Titien :

De son vrai nom Tiziano Vecellio, Titien est un peintre italien du cinquecento né aux
alentours de 1488 ou 1490 au nord de l’Italie, dans une famille de notables. Titien a
commencé sa carrière dans la peinture dès son plus jeune âge. En effet, il a débuté sa
formation d’abord dans l’atelier d’un dessinateur de mosaïques à Venise puis quelques années
plus tard, il s’orientera vers la peinture et intègrera l’atelier de Gentille Bellini et suivra une
formation auprès de son frère, Giovanni Bellini. Durant ces années de formation, il fera la
rencontre de Giorgione et va collaborer avec lui dans beaucoup de travaux tel que la
décoration du Fondaco dei Tedeschi. À sa mort, il terminera même certaines de ses œuvres. En
outre, à la mort de Giovanni Bellini, Titien héritera du titre de : "peintre officiel de la
République de Venise". Dans sa carrière Titien se démarquera pour son talent de portraitiste.
Il réalisera le premier Portrait de Charles-Quint et sera par la suite nommé comte de Palatin par
l’empereur. Ce portrait lui vaudra de nombreuses commandes des plus grands personnages de
l’époque, tel que le Cardinal Hippolyte de Médicis, Isabella d’Este, François Ier ou encore le Duc
d’Urbino. C’est d’ailleurs celui-ci qui commandera en parallèle également à Titien une composition
de nu féminin : la vénus d’Urbino

La venus d’Urbino est une huile sur toile peinte par Titien en 1538. Ses dimensions sont 119
cm sur 165 cm. Elle est conservée aux galeries des offices à Florence en Italie. Son nom lui a
été donné en 1550 lorsque Giorgio Vasari un des plus grands biographes de son époque qui a
vu cette peinture pour la premiere fois à Urbino. Ce tableau a été réalisé pour le duc d’Urbino,
Guidobaldo della Rovere, fils de Francesco Maria Della Rovere et d’Éléonore de
Gonzague qui avait commandé une « donna ignuda » ; une dame nue.

1
Problématique : En quoi la venus d’Urbino est -elle un prototype de la tradition picturale des
nus allongés dans la peinture occidentale ?

I) Une œuvre richement révélatrice 


A) Un nu féminin érotique et sensuelle
B) Un tableau autour du thème du mariage 

II) Une peinture riche de sa composition technique 


A) Un tableau aux couleurs contrastées
B) Une mise en perspective élaborée

III) un tableau inspiré et inspirant : mise en place d’une tradition par Titien du nu couché
A) Un tableau inspiré de la Vénus endormie de Giorgione
B) la venus d’Urbino comme source d’inspiration de l’histoire de l’art occidentale 

I) une œuvre richement révélatrice :

A) Un nu féminin érotique et sensuelle :

Dans ce nu profane, Titien fixe son idéal de beauté féminine. Le tableau mesurant 165
centimètres et la vénus étant cadré de très près, cela procure au spectateur l’effet d’une vraie
femme exposée en face de lui. Au premier plan, une jeune femme nue, avec un corps svelte et
fin, est allongée dans un cadre domestique contemporain nous regardant droit dans les yeux,
tout en couvrant son sexe de la main gauche. C’est une vénus mondaine et heureuse qui vit
dans le luxe. Elle nous regarde fixement avec franchise et séduction. Ses sourcils dessinés, ses
yeux en amandes, son long nez et ses joues rosées montre à quelle point son visage est
harmonieux et font d’elle une beauté incarnée. Elle croise ses jambes sensuellement et
grâcieusement. La vénus de palais présente un beau teint halé, Sa chair est mise en valeur par
le contraste du drap blanc et de l’étoffe rouge et son corps semble parfait sans aucun pli ni
imperfection. Elle possède un corps sublime. Ce tableau dégage une importante composante
sensuelle et érotique avec le regard de la vénus qui semble invitant, à ses long cheveux blond
vénitien dénoués tombant sur ses épaules et encadrant sa poitrine, sa pose ou elle semble
satisfaite avec l’environnement sensuel du lit défait et les draps froissés ainsi que la position
de sa main gauche qui dissimule son sexe tout en ébauchant un geste d’appel. Ce geste est en
réalité ambigu et laisse entrevoir plusieurs interprétations possibles. Il peut être pudique en
imaginant qu’elle cache son sexe avec sa main gauche mais la question ici est : le cache-t-elle
vraiment ou bien joue-t-elle avec ? Quoi qu’il en soit, il symbolise un geste d’érotisme
déclaré. Danielle Arasse dans son ouvrage on n’y voit rien dans son texte intitulé « la vénus
dans le coffre », désignera la vénus d’urbin comme « la matrice du nue érotique féminin ».

B) Un tableau autour du thème du mariage :

S’agit- t-il d’un portrait de l’épouse de Guidobaldo, Giulia, à laquelle les coffres de mariage
pourraient faire référence ? on tend souvent à voir dans ce tableau une sorte de célébration de
l’amour conjugal, en relation avec le mariage célèbre de Guidobaldo et de Guilia Varano
célébré en 1534.  Assurément érotique, le tableau pourrait incarner la fidélité conjugale et
constituer une sorte de manuel à l’usage des jeunes mariées. Au 16 ème siècle dans la chambre
des mariés, on retrouvait beaucoup de tableaux de mariage comme celui-ci. Ils étaient destinés
à stimuler le mari mais aussi la femme sur ce qui pouvait plaire à son époux. Il est nécessaire

2
de se rappeler que Guidobaldo s’est retrouvé face à une très jeune épouse de toute évidence
inexperte et apeurée. Ce tableau destiné à la chambre nuptiale avait donc ainsi pour but de
l’inciter et de l’instruire en lui fournissant un modèle culturellement approprié. Dans ce
tableau, les attributs nuptiaux abondent. En effet, La vénus tient à la main des roses,
symbolisant dans la tradition de la Renaissance, les plaisirs et la constance de l’amour. Autre
allusion à l’amour, le vase de myrte, placé sur le rebord de la fenêtre, est d’ailleurs l’un des
attributs souvent présents dans les représentations de la vénus pour souligner la constance
amoureuse. De même, la présence du chiot qui dort en boule au pied du lit est un clin d’œil au
thème de la fidélité conjugale. Au second plan, Dans le fond qui s’ouvre sur une fenêtre
laissant entrevoir la silhouette d’un arbre avec un ciel crépusculaire, se trouvent deux
servantes dont l’une, agenouillée de dos se penche sur le coffre de mariage ou se trouve les
riches vêtements qui habilleront la vénus. La peinture désigne et célèbre dans chaque détail
l’importance de la dimension érotique dans le mariage. On le remarque en regardant les deux
matelas, les deux coussins, les draps froissées du lit puis, la vénus avec son corps parfait et
son regard langoureux, ses cheveux dénoués sur les épaules, l’anneau de la promise, et une
main qui tient le bouquet des roses de l’amour et l’autre qui, en cachant son sexe, suggère ce
qui ne peut être représenté.

II) une peinture riche de sa composition technique :

a) Un tableau aux couleurs contrastées

Titien à travers la Vénus d’Urbino créer une sensation de douceur grâce aux richesses de
couleurs qui véhicule une certaine sensualité. À l’aide des nombreuses couches de peintures
superposé, le visage de la Vénus brille d’une grande douceur. Titien en superposant les
couches de couleurs sur la toile retranscrit le corps épanoui et allongé de la vénus en la
mettant en valeur par les draps blancs et l’étoffe rouge posé sur le lit. La couleur est très
étudiée ici. En effet, le vert du rideau en haut s’opposant au rouge des coussins en bas permet
de mettre en valeur la partie blanche avec les draps qui entoure le corps doré de la Vénus.
Cela créer un effet chromatique autour du visage et de la chevelure de Vénus. Même effet de
contraste avec cette partie sombre du mur et le blanc des draps qui permettre de mettre en
valeur les nombreuses nuances que Titien a utilisé pour la chair de la vénus. À ce sujet,
Ludovico Dolce, théoricien de la peinture Italienne, commentera dans son dialogue de la
peinture en 1557 « Je crois que dans ce corps Titien a employé la chair pour des couleurs ».

b) Une mise en perspective élaborée

La toile est divisée en deux parties avec une scène qui se déroule en arrière-plan pour que
notre œil se déplace vers le bas de son corps. C’est une composition très simple ou les deux
plans du tableau sont complémentaires. En effet, le premier plan avec la venus d’Urbino
souligne sa nudité marquée par une ligne horizontale marronnée qui marque le bord du lit
entre la jambe de la femme et le chien au bord du lit et le second plan avec les servantes et le
coffre de mariage rempli d’habillements ; contrastant avec la nudité du premier plan, séparé
par un mur sombre et neutre soulignant une verticale permettant de mettre la vénus en premier
plan. Ces deux lignes se croisent perpendiculairement au niveau du sexe de la Vénus. On
pourrait croire qu’un jeu est mis en scène à travers ces lignes pour que notre regard se pose
sur cette zone. C’est une composition très simple qui permet une lecture facile de l’image. Le
tableau mesurant 165cm, on a l’impression qu’on se retrouve presque face à un personnage

3
grandeur nature. Cet effet est également accentué par le fait que la peinture cadre la Vénus de
très près comme s’il elle était réellement face à nous.

III) un tableau inspiré et inspirant : mise en place d’une tradition par Titien du nu couché

A) Un tableau inspiré de la Vénus endormie de Giorgione :

En réalisant la Vénus d’Urbino, Titien s’est clairement inspiré d’une autre beauté
mythologique ; la vénus endormie de Giorgione. En effet, Son attitude et sa posture est
presque littéralement calquée, à l’exception de la tête et du bras droit, sur la vénus endormie
de Giorgione conservé à Dresde. Il faut se rappeler qu’elle a été peinte par Giorgione mais
4
étant mort avant d’avoir pu achever son tableau, Titien l’a terminé une trentaine d’années
auparavant la Vénus d’Urbino en 1510. Dans la vénus de Giorgione, la déesse des chants de
mariage est endormie dans une pose similaire à une statue antique en extérieur dans un
paysage naturel. Elle ne porte pas de bijoux contrairement à la vénus d’Urbino ce qui ne la
rend pas contemporaine. Elle est dans l’ignorance de nos regards puisqu’elle ne regarde pas le
spectateur. S’y dégage un sentiment de silence et de paix atemporel. De ce fait, cette
présentation confère au corps féminin un statut mythique et légitime en outre sa nudité.
Contrairement à la venus pur et innocente de Giorgione, la vénus d’Urbino ne repose pas dans
un vaste paysage agreste. Elle est étendue dans son lit, dans un cadre domestique
contemporain à l’intérieur d’une élégante demeure de la Renaissance tout en nous regardant
droit dans les yeux, et faisant de la main gauche un geste érotique et provoquant. De plus, La
vénus d’Urbino est au contraire bien éveillée et pleine de vivacité, quoique allongée dans une
position de détente. Ses yeux, sous ses fins sourcils arqués, nous fixent avec séduction. Enfin,
son bras gauche, non plus replié sous la tête dans la position caractéristique d’une personne
endormie, s’abandonne avec souplesse sur les coussins. Titien, bien que s’étant inspiré de la
Vénus endormie de Giorgione, propose indéniablement dans ce tableau une Vénus plus
moderne d’une sensualité tout autre par rapport à l’idée de pureté Giorgionesque du tableau
de Dresde.

Si Titien s’est inspiré de Giorgione pour peindre sa Vénus d’Urbino, il n’en reste pas moins
qu’un Cycle d’inspiration va se mettre en place et que d’autres auteur vont s’inspiré de Titien
pour créer eux aussi leurs femmes nues couché.

B) la venus d’Urbino comme source d’inspiration du nu couché dans l’histoire de l’art


occidentale :

La capacité de Titien a sollicité les sens du spectateur explique la postérité de la Vénus


d’Urbino. En effet, elle a été une grande source d’inspiration pour de nombreux peintres
souhaitant produire des nus couchés comme pour la maje nue de Francisco de Goya. Le cas le
plus frappant est celui de l’Olympia du peintre Manet peinte en 1863, héritage certain de la
vénus d’Urbino. En effet lors d’un voyage d’étude en Italie, Manet fera une copie de la Vénus
d’Urbino et l’aura bien en tête lors de la réalisation de son l’Olympia trois cent vingt-cinq ans
plus tard. Le premier à faire le lien entre ces deux œuvres sera Léonce Bénédicte, conservateur
du musée des artistes vivants ; actuellement le musée du Luxembourg, qui au moment de
l’entrée de l’Olympia au musée, commentera l’œuvre comme une « transposition moderne de
la Vénus de Titien ». Julius Meier-Graefe, historien de l’art allemand, parlera d’Olympia dans

5
un ouvrage dédié à Manet en disant qu’elle évoque d’emblée la peinture de Titien. Il est vrai
qu’on peut observer de nombreux points communs entre les deux peintures. Les deux toiles
possèdent un grand format et possède tous deux comme sujet une femme nue étendue dans
une posture similaire dans un intérieur contemporain. Toutes deux par leur titre évoque la
mythologie que ça soit vénus ou Olympia qui évoque naturellement l’olympe dans la
mythologie grec. Pour ce qui est de la composition du tableau, on retrouve une composition
florale dans les deux tableaux. La venus d’Urbino joue avec un bouquet de fleurs dans sa
main droite tandis que dans l’Olympia, la femme les reçoit par sa servante. Il y a également la
présence d’animaux domestiques dans les deux tableaux, dans la vénus d’Urbino le petit chien
au bout du lit et dans l’Olympia, un petit chat noir. On remarque également la présence de
servantes dans les tableaux, seuls le nombre et la couleur de peau change. En effet, nous
sommes en présence de deux servantes occidentales pour la venus d’Urbino et une servante de
peau noire pour l’Olympia. Un Autre point commun entre les deux tableaux existe, leurs
constructions spatiales. En effet, il représente une femme étendue, une grande draperie verte
sur le côté gauche et une ligne verticale qui vient séparer la composition. Un Rassemblement
des deux œuvres a pu avoir lieu en 2013 au palais des Doges à Venise ou l’Olympia a pu être
confronté à son modèle.

La vénus d’Urbino à travers le temps, sera donc un prototype d’une longue série de
somptueuses figures de femmes à demi allongées dans l’histoire de l’art occidentale.

6
Bibliographie :

- Titien,Panofsky, question d’iconographie

-Titien, Flavio Caroli/ Stefano Zuffi, Fayard

- Chronologie de l’histoire de l’art de la renaissance à nos jours, Hatier 

-Titien, Les classiques de l’art, Flammarion 

- Titien, Peter Humfrey 

- Titien, Filippo pedrocco 

- L’art de la renaissance, Gérard Legrand, Larousse 

- La haute renaissance et le maniérisme, Linda Murray

- On n’y voit rien, Daniel Arasse

- Dialogue de la peinture, Ludovico Dolce

Vous aimerez peut-être aussi