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EPILOGUES DE MEMOIRES D’HADRIEN

Les pseudo-mémoires ou  mémoires apocryphes, sont


les mémoires fictifs d’un personnage historique dont l’identité est assumée
par un auteur qui invente le récit de sa vie à sa place.
Les Mémoires d'Hadrien est un roman publié en 1951 de Marguerite
Yourcenar. C'est un récit faussement autobiographique, de pseudo-
mémoires ou encore mémoires ficitifs d'un personnage historique.
Marguerite Yourcenar imagine la vie de l'empereur Hadrien en reconstituant
l'atmosphère de la fin de l'Empire romain.

Les Mémoires d’Hadrien se présentent comme une lettre adressée par


l’empereur Hadrien  vieillissant (76-138) à son petit-fils adoptif de dix-sept
ans, 

Nous allons étudier l'épilogue, les derniers moments de l'empereur. Nous


nous demanderons comment l'auteur fait-elle percevoir au lecteur
l'empereur Hadrien ?

I – L'image d'un empereur

– assimilé à un Dieu qui a tout pouvoir

"L'aigle chargé de porter aux dieux l'âme de l'empereur est tenu en réserve
pour la cérémonie" : Il y a sacralisation de la personne, l'empereur et ce
qu'il représente, le pouvoir sont sacralisés, « pyramide noire » comme pour
les pharaons = rite funéraire honorifique qui élève le défunt au rang des
Dieux dans la Rome antique.

Il a les honneurs divins, le pouvoir absolu, celui des Dieux au point de


diviniser son épouse "J'ai prié Antonin" (le fils d'Hadrien et de Sabine) qu'il
y fasse ensuite transporter Sabine ; j'ai négligé de lui faire décerner à sa
mort les honneurs divins, qui somme doute lui sont dus ; il ne serait pas
mauvais que cet oubli fût réparé." "Et je voudrais que les restes d'Aelius
César (fils d'Hadrien) soient placés à mes côtés."

Ses volontés sont exaucées, ses désirs sont des ordres, il est craint, obéi et
décide de tout quant à l'organisation de ses funérailles

II – L'image d'un homme


- assimilé à un homme vieillissant, sensible et sympathique capable
d'humanité

De l'empereur divinisé, sacralisé à l'homme vulnérable

On le voit victime de la vieillesse et de la maladie tout comme le commun


des mortels ce qui donne au lecteur une image qui entre en contraste avec
la première. L'empereur tout puissant s'oppose à l'homme sensible et
vulnérable : « Ils m'ont emmené à Baïes; par ses chaleurs de juillet, le trajet
a été pénible, mais je respire mieux au bord de la mer. » - « je ne tiens
plus ces tablettes que pour occuper mes mains, qui s'agitent malgré moi. »

Un homme capable de ressentir et de transcrire la poésie de la vie et qui


semble quitter ce monde avec regret : "La vague fait sur le rivage son
murmure de soie froissée et de caresse. Je jouis encore des longs soirs
roses..."

Un empereur obéi mais un homme respecté et aimé : "petit groupe


d'intimes" qui "se pressent à son chevet" -

« Diotime sanglote, la tête enfouie dans les coussins. J'ai assuré son
avenir « 

"Hadrien jusqu'au bout aura été humainement aimé."

III – L'image d'Hadrien face à la mort


«Petite âme, âme tendre et flottante, compagne de mon corps, qui fut ton
hôte, tu vas descendre dans ces lieux pâles, durs et nus, où tu devras
renoncer aux jeux d'autrefois. Un instant encore, regardons ensemble les
rives familières, les objets que sans doute nous ne reverrons
plus...Tâchons d'entrer dans la mort les yeux ouverts."

Il s'agit des mots d'Hadrien lui-même. En fait il dialogue avec son âme et le
lecteur comprend sa philosophie sur le concept de la mort. Le corps est le
tombeau de l'âme, la « compagne de son corps ». Philosophie
platonicienne dans laquelle l'homme apprend à mourir sa vie durant mais
qui est contredite dans la suite du texte car Hadrien n'est en fait pas
platonicien du tout. Cependant la mort n'est pas ici perçue comme
délivrance mais privation, renoncement, «"tu devras renoncer aux jeux
d'autrefois"- Il regrette la beauté du monde qu'il voudrait savourer
davantage et aspire à la contemplation des « rives familières », «des objets
que nous ne reverrons plus » mais dont il peut encore profiter tant que
l'âme reste unie au corps. L'âme de l'homme et non celle de l'empereur
sacralisé du 1er paragraphe. L'homme impuissant face au tragique de la
vie, conscient de quitter ce monde « de descendre dans ces lieux pâles,
durs et nus"

Conclusion :

Nous avons l'image d'un empereur divinisé, sacralisé et celle d'un homme
très humain, sensible et aimant/aimé.

Tourmenté par la mort il s'invite au courage « tâchons d'entrer dans la mort


les yeux ouverts » en dialoguant avec son âme comme pour se rassurer.
CHRISTINE MONTALBETTI

Marchant dans les brumes de Londres, le docteur Jekyll, homme


ambitieux, important, respecté, et la silhouette dissociée, chétive,
maléfique de Hyde, hantent depuis plus d’un siècle la littérature, le
cinéma, l’inconscient, dont Hyde même, serait une version solidifiée,
incorporée, libre. Il y a fort à faire. C’est une mine explosive de
métaphores, d’associationsd’idées, de cauchemars, de visions horribles,
poétiques et philosophiques mêlées. Un mythe. Ce mythe est d’abord un
roman de Stevenson, dont le dernier chapitre est une splendeur. C’est la
confession de Jekyll. À l’instant de mourir, ne parvenant plus à rester lui-
même, envahi définitivement par Hyde, devenu presque absolument
Hyde, il raconte les étapes de sa folie démiurgique, dont l’ambition
sociale, jointe aux désirs de débauche, fut le premier moteur. Mélancolie
des aveux et des regrets, derniers efforts de raison et de justification
scientifique, implacable logique du pire sous la poussée du démon,
tendent ce texte hyper concentré. Christine Montalbetti le reprend et le
fait sien. Fait siens l’hiver londonien, les rues vides la nuit, la brume. Fait
sienne l’angoisse de Jekyll, mais aussi l’humour de Hyde, la jeunesse et
l’éducation de Jekyll, les pas légers de Hyde, la souterraine et
souveraine séduction de Hyde, sa poussée dans la voix de Jekyll, son
envahissement inexorable du corps de Jekyll. La métamorphose n’est
pas établie dans le texte. Elle est le texte. Le laboratoire où s’enferme le
docteur pour y boire le fameux breuvage n’est pas le décor, mais
l’espace sonore, l’énonciation elle-même de ce texte. Deux voix
travaillent jusqu’au bout ce texte à une voix. Borgès se désolait qu’au
cinéma on ait toujours confié les deux rôles au même acteur, tandis que
le roman les sépare absolument. Là même en est le principe. Hyde n’a ni
la silhouette, ni la taille, ni le visage, ni rien de commun avec Jekyll. Le
spectateur, découvrant Hyde, ne peut ni ne doit imaginer Jekyll en lui.
Telle est précisément la réussite et la malédiction du savant. Or la
tentation l’a toujours emporté de les confondre dans le même interprète.
On le comprend aisément. L’acteur se réjouit de cette composition qui
s’offre à lui, ne peut que succomber à ce désir de dédoublement; qui ne
rêve pareil rôle? Cette pulsion de jeu ne m’est pas étrangère. Quel
comédien ne sent pas en lui-même le pas inquiétant et dansant de Hyde,
l’envie degrimacer épouvantablement, de nouer en un seul bloc, en un
seul personnage, les désirs insolents, farcesques, outrés, de jouer enfin
le plus malin des méchants, de faire et de se faire peur? Nous viserons
moins le fantasme réalisé, la métamorphose accomplie, le personnage
malingre et incarné, que la pulsion elle-même, la saillie du petit
bonhomme perçant sous le masque sobre de Jekyll, la pression
fantastique et contradictoire qui en résulte et s’exerce alors. C’est elle
que nous appelons Hyde. Notons que, dans le roman, il est moins
monstrueux par son aspect que par le malaise et la répugnance
qu’éprouve celui qui le rencontre, plus immédiatement effrayé de sa
hideur morale absolue et sans mélange que de sa relative laideur
physique. Coup de génie de Stevenson, dont la créature échappera
désormais à toute incarnation satisfaisante. On ne peut donc pas voir
Hyde. Il sera néanmoins bien présent, et règnera, si possible, je l’espère,
au final, jusque dans le cœur même du spectateur.Denis Podalydès

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