Vous êtes sur la page 1sur 179

République Tunisienne

Ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche


Scientifique
Université de Sousse
Faculté de Droit et des Sciences Politiques de Sousse

LA SAISIE DU COMPTE COURANT

Mémoire pour l’obtention du Diplôme de Mastère de Recherche en


Droit Privé

Élaboré et soutenu par : Sous la direction du :


Borhène BEN LAZREG Pr Khélifa KHARROUBI

Membres du jury :
Président : ……………………………
Membre : Pr Khélifa KHARROUBI
Membre : ……………………………

ANNÉE UNIVERSITAIRE : 2015-2016


A la mémoire de ma grand-mère (Mamie) qui nous

a quittés avant que ce travail ne voie le jour.

I
(William Arthur Ward)

II
‫" ال يكتب إنسان كتابا يف يومه إال قال يف غده‬

‫‪‬لو غري هذا لكان أحسن؛ ولو زيد لكان‬

‫يستحسن؛ ولو قدم هذا لكان أفضل؛ ولو ترك‬

‫لكان أمجل؛ وهذا من أعظم العرب‪ ،‬وهو دليل على‬

‫استيالء النقص على مجلة البشر "‪.‬‬

‫القاضي الفاضل عبد الرحيم البيساني العسقالني‬

‫‪III‬‬
J’aimerais adresser tous mes remerciements aux personnes qui
m’ont aidé, de près ou de loin, à l’élaboration de ce mémoire

Je citerais particulièrement mon Professeur Khélifa


KHARROUBI, Directeur de recherche de ce mémoire, qui a bien voulu
diriger mes premiers pas sur les sentiers de la recherche, pour son aide
précieuse et ses conseils pertinents. Qu’il trouve ici l’expression de ma
profonde reconnaissance.
Je tiens aussi à exprimer toute ma gratitude aux membres du jury
qui me font le grand honneur d’évaluer ce travail.
Mes remerciements s'adressent également à tous les enseignants
et le personnel de la Faculté de Droit et des Sciences Politiques de
Sousse.
Enfin, je remercie ma famille et mes amis qui se reconnaîtront,
pour m'avoir soutenu, et qui ont ainsi contribué, d’une façon ou d’une
autre, à l'élaboration de ce mémoire.

IV
« La Faculté de Droit et des Sciences Politiques de Sousse

n'entend donner aucune approbation ni improbation aux

opinions émises dans ce mémoire. Ces opinions doivent

être considérées comme propres à leur auteur ».

V
§ Paragraphe
B.C.T. La Banque Centrale de Tunisie
C.C. Code de Commerce
C.C.P. Code de Comptabilité Publique
C.D.I.P. Code de Droit International Privé
C.D.R. Code des Droits Réels
C.O.C. Code des Obligations et des Contrats
C.P. Code Pénal
C.P.C.C. Code des Procédures Civiles et Commerciales
C.P.U. Centre de Publication Universitaire
C.S.C. Code des Sociétés Commerciales
C.S.P. Code du Statut Personnel
C.T. Code du Travail
Cass. Civ. Cour de cassation Chambre Civile
Cass. Com. Cour de cassation Chambre Commerciale
D. Recueil Dalloz
Dir. Sous la direction de
Éd. Édition
Fasc. Fascicule
Ibid. Ibidem (au même endroit)
J.-CI. Com. JurisClasseur Commercial
J.-CI. Pr. Civ. JurisClasseur Procédures Civiles et Commerciales
J.O.R.T. Journal Officiel de la République Tunisienne
JCP JurisClasseur périodique (La semaine juridique)

VI
L.G.D.J. La Librairie Générale de Droit et de Jurisprudence
LPA Les Petites Affiches
N° Numéro
Op. cit. Opere citato (dans l'œuvre citée)
P. Page
R.D. Bancaire et Bourse Revue de Droit Bancaire et de la Bourse
R.T.D. Com. Revue Trimestrielle de Droit Commercial
Rev. Crit. D.I.P. Revue Critique de Droit International Privé
V° Voir

VII
‫قائمة املختصرات باللغة العربية‬

‫الصفحة‬ ‫ص‪.‬‬
‫الطبعة‬ ‫ط‪.‬‬
‫مجلة القضاء والتشريع‬ ‫ق‪.‬ت‪.‬‬
‫املجلة القانونية التونسية‬ ‫م‪.‬ق‪.‬ت‪.‬‬
‫نشرية محكمة التعقيب‬ ‫ن‪.‬م‪.‬ت‪.‬‬

‫‪VIII‬‬
Partie I : L’indisponibilité, un effet direct de la saisie

Chapitre I : L’étendue de l’indisponibilité

Section I : Le domaine de la saisie du compte courant

Section II : La nature de l’indisponibilité

Chapitre II : Les effets de l’indisponibilité

Section I : Le fonctionnement ultérieur du compte

Section II : Les obligations du banquier

Partie II : Les modalités de l’indisponibilité du compte saisi

Chapitre I : La levée de l’indisponibilité

Section I : La levée de l’indisponibilité sans jugement

Section II : La levée de l’indisponibilité avec un

jugement sur le fond

Chapitre II : La régularisation des opérations en cours

Section I : Les opérations susceptibles de régularisation

Section II : La mise en œuvre des opérations de

régularisation

IX
Introduction

INTRODUCTION

Le droit des voies d’exécution « recouvre les moyens juridiques dont


dispose le créancier pour obtenir de son débiteur le paiement de ce qui lui est dû
et pour garantir sa créance par des mesures conservatoires affectant le
patrimoine de ce dernier, lorsque ce règlement tarde à se réaliser »1.
En effet, le créancier face à son débiteur dispose d’un droit de gage général
qui signifie, qu’en présence d’une créance le créancier dispose du droit de se
désintéresser sur n’importe quels bien et valeur dans le patrimoine du propriétaire.
Ainsi, le législateur met à la disposition des créanciers une procédure d’exécution
pour atteindre l’argent de leur débiteur même s’il se trouve entre les mains des
tiers, il s’agit de la saisie-arrêt2.
L’ouverture d’un compte courant bancaire remplit les conditions
fondamentales exigée par l’article 330 du C.P.C.C. relatif à la saisie-arrêt.
Cependant, lorsque le débiteur saisi se trouve dans une situation de compte
courant avec le tiers saisi, des spécificités sont alors à respecter
Le banquier étant débiteur des fonds existants, on parle de saisie de compte
courant par commodité de langage. En effet, l’expression usuelle « saisie d’un

1
J.-M. DELLECI, « La Réforme des Procédures Civiles d'Exécution : Son application aux
opérations de banque », 2ème éd., Paris, La Revue "Banque" Éditeur, 1997, p. 1.
2
Voir à ce propos :
.185 .‫ ص‬،2015 ،‫ مجمع األطرش للكتاب المختص‬:‫ تونس‬،3 .‫ ط‬،"‫ طرق التنفيذ‬:‫ "القانون العدلي الخاص‬،‫خليفة الخروبي‬

1
Introduction

compte » est impropre étant donné que l’objet de la saisie n’est pas le compte lui-
même3, mais plutôt, le solde créditeur de ce dernier4.
La saisie-arrêt est l’un des mécanismes juridiques forcés mis à la
disposition du créancier impayé. En vertu de l’article 330 du C.P.C.C., « tout
créancier dont la créance est certaine peut, sur permission du juge cantonal ou
du président du tribunal de première instance du lieu du domicile du débiteur,
chacun dans la limite de sa compétence, saisir-arrêter entre les mains d'un tiers
et dans la limite de sa créance les sommes et objets mobiliers qui sont dûs même
à terme ou sous condition, ou qui appartiennent à ce débiteur ».
Ainsi, la saisie-arrêt est une procédure par laquelle un créancier intercepte
soit des sommes d’argent soit des choses mobilières dues à un débiteur par une
tierce personne et se fait payer sur la valeur des biens saisis5. En fait, le créancier
(saisissant) fait défense à un tiers (tiers saisi), qui est le débiteur de son propre
débiteur (débiteur saisi), de se libérer entre les mains de ce dernier et demande à
la justice d’ordonner attribution à son profit des sommes dues ou du prix de la
vente des objets mobiliers 6.
Cette définition permet de dégager une triple originalité de la saisie-arrêt,
notamment celle opérée dans le cadre du compte courant ; des originalités quant
à la procédure, quant aux sujets de la saisie et quant à son objet 7.

3
F. GEORGES, « La saisie de la monnaie scripturale », Bruxelles, Larcier, 2006, p. 271 n°
181 :
« A proprement parler, on ne saisit jamais un compte ; ce concept désigne en effet la convention
intervenue entre l'établissement de crédit et son client »
4
Pour F. DEKEUWER-DÉFOSSEZ et S. MOREIL, « Droit bancaire », 10ème éd., Paris, Dalloz,
2010, p. 54 :
« Tant que le compte n'est pas clôturé, il n'existe pas de « solde ». … (Il s’agit plutôt)
d’une « position » créditrice ou débitrice du compte, souvent appelée à tort « solde ».
5
J. VINCENT et J. PRÉVAULT, « Voies d’exécution et procédures de distribution », 16ème
éd., Paris, Dalloz, 1987, p. 198, § 238.
6
H. SOLUS, « Cours de voies d’exécution », Paris, Les cours de droit, 1961, p. 76.
7
R. PERROT, « Voies d’exécution », Paris, Les cours de droit, 1978, p. 115.

2
Introduction

La procédure de la saisie-arrêt n’a pas un caractère unique tout au long de


son déroulement. Elle se divise en deux phases. Initialement, elle a un caractère
purement conservatoire qui correspond à un but conservatoire, puis elle devient
une mesure d’exécution tendant à la réalisation du gage.
En fait, l’exploit de la saisie-arrêt signifié par le saisissant au tiers saisi tend
à bloquer entre les mains de ce dernier les sommes dues au débiteur saisi ou les
objets mobiliers lui appartenant et à lui faire défense de se dessaisir des biens qui
sont en sa possession. A ce stade, la saisie-arrêt présente les caractères d’une
mesure conservatoire puisque le créancier saisissant a pour dessein de rendre
indisponibles les biens saisis-arrêtés.
Dans une seconde phase, le créancier saisissant demande que les biens qui
sont entre les mains du tiers saisi, lui soient attribués. A cette fin, le créancier
saisissant doit engager une instance, dite en validité vu qu’elle tend à contrôler la
régularité de la saisie, et à rendre le créancier saisissant attributaire des biens saisis
jusqu’à concurrence des causes de la saisie.
Selon l’article 335 du C.P.C.C., cette instance se limite à vérifier la
régularité de la procédure de la saisie lorsqu’elle est pratiquée en vertu d’un titre
exécutoire. Mais « si la saisie-arrêt a été pratiquée en vertu d’un jugement non
encore exécutoire, il sera sursis à statuer sur la demande en validité jusqu’à ce
que ledit jugement soit devenu exécutoire ».
Par contre, si la saisie est faite en vertu d’une ordonnance sur requête, la
juridiction saisie de la demande en validité doit, en plus de la vérification de la
régularité de la saisie, statuer sur la demande en paiement dans le même jugement.
La deuxième originalité de la saisie-arrêt est relative à ses sujets. En fait, la
définition de la saisie-arrêt fait apparaître qu’elle intéresse normalement trois
personnes et deux liens de droit distincts : le saisissant est créancier du saisi et
celui-ci est créancier du tiers saisi.
Mais, il arrive que la saisie-arrêt perde son caractère triangulaire. Elle peut
mettre en cause deux personnes seulement. Il est ainsi si, deux personnes qui sont

3
Introduction

réciproquement créancières et débitrice l’une et l’autre. Dans ce cas, l’article 369


du C.O.C. autorise la compensation vu que les deux créances s’éteignent.
Néanmoins, l’article 374 du C.O.C. prévoit que « pour opérer la compensation,
il faut que les deux dettes soient liquides et exigibles ».
Ainsi, si l’une des créances n’est pas exigible ou pas liquide, son titulaire
risque de se heurter à l’insolvabilité de son débiteur le jour de l’échéance, alors
qu’actuellement ce dernier est solvable. Cette situation serait celle des banquiers
qui accréditent les comptes courants de leurs clients.
Pour parer à l’éventualité d’une insolvabilité de son client, les banques
pratiquent une saisie-arrêt sur les fonds de leurs clients se trouvant entre leurs
mains en vertu de leurs créances non encore liquides.
En l’absence de texte réglementant la pratique de la saisie sur soi-même, la
jurisprudence admet la saisie-arrêt sur soi-même en affirmant que le tiers au sens
de l’article 330 du C.P.C.C. est tout autre personne que le débiteur saisi, qu’il soit
un créancier saisissant et tiers saisi en même temps ou tout autre établissement
détenant des sommes revenant au débiteur saisi8.
Quoiqu’il en soit, classiquement la saisie-arrêt est d’un schéma
triangulaire. Elle suppose l’intervention de trois personnes et l’existence de deux
liens de droit les unissant. D’un côté, la créance du créancier saisissant contre le
débiteur saisi, appelé la créance cause de la saisie parce qu’elle justifie la saisie.
D’un autre côté, la créance du débiteur saisi contre le tiers saisi, sur l’objet de

8
Voir à ce propos :
:247 .‫ ص‬،1997 ،.‫ت‬.‫م‬.‫ ن‬،1997 ‫ ديسمبر‬17 ‫ مؤرخ في‬،48035 ‫قرار تعقيبي مدني عدد‬
‫ هو كل من سوى المدين المعقول عنه سواء كان دائنا عاقال‬.‫ت‬.‫م‬.‫م‬.‫ من م‬330 ‫"يؤخذ ويفهم من عبارة "غير" الواردة بالفصل‬
‫ فاألموال المودعة لدى المعقب‬،‫ وبالتالي‬.‫ومعقوال تحت يده في اآلن نفسه أو أية مؤسسة يوجد لديها أموال المدين المعقول عنه‬
."‫ضده مع أنه مودعا لديه فهو غيرا‬
:236 .‫ ص‬،1999 ،.‫ت‬.‫م‬.‫ ن‬،1999‫ جانفي‬4 ‫ مؤرخ في‬،59267 ‫قرار تعقيبي مدني عدد‬
‫"يمكن للدائن العاقل أن تكون له صفة الغير المعقول تحت يده إذا قدّم تصريحه على الوجه المطلوب وفي المواعيد المقررة‬
."‫بالقانون إلى كتابة المحكمة وضمنته بدفاترها وكان ذلك التصريح إيجابيا بوجود أموال تابعة للمعقول عنه‬

4
Introduction

laquelle doit porter la saisie-arrêt, appelée la créance saisie-arrêtée ou objet de la


saisie9.
La saisie-arrêt se justifie alors par l’idée que tout créancier a pour gage les
biens qui se trouvent dans le patrimoine de son débiteur. Or, dans ce patrimoine,
figurent non seulement les objets corporels dont il a la possession, mais aussi tous
les biens incorporels constitués par des créances10.
Pour maintes raisons, généralement, la créance objet de la saisie-arrêt est
celle détenue par un banquier contre son client notamment celle née d’une
convention de compte courant.
Au sens de l’article 728 du C.C., « il y a contrat de compte courant quand
deux personnes, dites correspondants, conviennent de faire entrer dans un
compte, par voie de remises réciproques et enchevêtrées, les créances résultant
des opérations qu'elles feront entre elles et de substituer ainsi à des règlements
particuliers et successifs de ces opérations un règlement unique, devant porter
sur le seul solde du compte lors de sa clôture »11.
En définitive, le compte courant produit un ensemble d’opérations
bancaires vu qu’il implique un crédit fait à une personne en vue d’une série de
transactions d’ordre commercial. Mais cela ne signifie pas que la convention de

9
Voir à ce propos :
‫ مرافعات مدنية‬:‫ فقه قضاء محكمة التعقيب‬،‫ عصام األحمر‬،2008 ‫ نوفمبر‬27 ‫ مؤرخ في‬،21330 ‫قرار تعقيبي مدني عدد‬
:126 .‫ ص‬،2013 ‫ تونس‬،‫وتجارية‬
."‫ أي أن يكون المعقول تحت يده مدينا للمعقول عنه بموضوع العقلة‬،‫"يجب أن يكون المعقول ملكا للمدين‬
10
R. PERROT, op. cit., p. 115.
11
Voir définition donnée par, T. BONNEAU, « Droit bancaire », 9ème éd., Paris, Montchrestien,
2011, p. 257, § 333 :
« Le compte courant est un contrat par lequel les parties décident de faire entrer en compte
toutes leurs créances et dettes réciproques de manière à ce que celles-ci soient réglées
immédiatement par leur fusion dans un solde disponible soumis à un régime unitaire. La partie
qui inscrit une créance à son crédit se nomme l’envoyeur ou le remettant ; la partie qui procède
à la même inscription au débit est le récepteur ».

5
Introduction

compte courant ne puisse être qu’avec une banque. A titre d’exemple, deux
commerçants peuvent être en compte courant pour leurs fournitures réciproques12.
Il arrive que la dénomination de compte courant soit parfois appliquée à des
comptes qui n'ont pas ce caractère. Les comptes de chèques ouverts auprès de la
poste sont appelés souvent comptes « courants » postaux alors qu'ils n'en ont pas
la nature 13. En effet les comptes courants postaux sont régis par un texte spécial,
à savoir la loi du 1er Novembre 1990, et constituent une activité postale au sens
de l’article 2 du Code de la Poste14.
On parle aussi, à tort le plus souvent, de compte courant d'associé pour
désigner les dépôts de fonds que des associés effectuent dans l'actif d'une société
pour contribuer à son financement15.
La qualification de « courant » est subordonnée à la réunion de deux
éléments : intentionnel et matériel.
L’élément intentionnel signifie que la preuve doit être faite que les parties
ont entendu, explicitement ou tacitement, organiser leurs rapports financiers selon
la formule du compte courant. Cette preuve n'est soumise à aucune forme
particulière, elle peut être déduite par le juge à partir des conditions dans
lesquelles le compte fonctionne16.

12
G. RIPERT et R. ROBLOT, « Traité de droit commercial, T. 2 : Effets de commerce, banque,
contrats commerciaux, procédures collectives », 16ème éd., Paris, L.G.D.J., 2003, p. 363, n°
2317.
Voir un exemple de convention de compte courant extra-bancaire (Annexe n° 1)
13
J. STOUFFLET, « Compte courant », Rép. Dr. Com. Dalloz, Février 2009, p. 1, n° 2.
14
Loi n° 90-97 du 1er Novembre 1990, « Relative aux comptes courants postaux », J.O.R.T. n°
72 du 9 novembre 1990, p. 1636.
15
J. STOUFFLET, op. cit., p. 1, n° 2.
16
Voir à ce propos :
:285 .‫ ص‬،1985 ،.‫ت‬.‫م‬.‫ ن‬،1985 ‫ جوان‬17 ‫ مؤرخ في‬،11848 ‫قرار تعقيبي مدني عدد‬
‫"إن تكييف الحساب البنكي حسابا جاريا يتطلب توافر عنصرين أولهما معنوي وهو نية الطرفين في فتح حساب جار تلك النية‬
‫التي يمكن أن تكون صريحة أو ضمنية كما يمكن إثباتها بكافة الوسائل ومنها العمليات المسجلة بالحساب وثانيهما أدبي وهو‬
."‫مبدأ عمومية الحساب الجاري أي تبادل الدفوعات وتشابكها‬

6
Introduction

L’effet recherché de la convention de compte courant est la réunion des


créances réciproques des parties dans un cadre juridique unique au sein duquel
elles seront soumises à un régime uniforme et donneront lieu à un règlement
global.
L’article 728 du C.C. n’exige pas l’écrit pour la validité du contrat de
compte courant. Étant une convention, sa formation est parfaite dès l’échange des
consentements en ce sens17. En l’absence d’un contrat d’ouverture de compte
courant, l’élément intentionnel peut être dégagé a priori du fonctionnement du
compte.
Les éléments matériels du compte ne désignent pas les formes de
l’ouverture ou les conditions de tenue de compte, mais les remises qui doivent
répondre à trois conditions imposées par l’article 728 du C.C. Il s’agit de la
généralité, la réciprocité et l’enchevêtrement. Le compte, ne présentant pas ces
caractères, ne peut être traité comme un compte courant, même si cette
qualification lui a été donnée par les parties18.

Le compte courant est destiné au règlement simplifié des créances des


correspondants. Il est normal que l’entrée en compte concerne toutes les créances
des parties. C’est le principe d’affectation générale des créances, appelé encore
principe de la généralité du compte, énoncé par l’article 729 du C.C. Chaque

17
Voir à ce propos :
:145 .‫ ص‬،1997 ،.‫ت‬.‫م‬.‫ ن‬،1997 ‫ جوان‬25 ‫ مؤرخ في‬،53129 ‫قرار تعقيبي مدني عدد‬
‫" إن الحساب الجاري المدعى به وإن لم يكن موضوع إتفاق كتابي بينهما فإن المعاملة التجارية قد إسترسلت بينهم لمدة تزيد‬
."‫عن خمسة أعوام وإن تلك العمليات تفترض وجود ذلك الحساب‬
18
Voir à ce propos :
.‫ ص‬،7_6 ‫ عدد‬،1969 ،.‫ت‬.‫ق‬.‫ م‬،1967 ‫ جوان‬7 ‫ بتاريخ‬،‫ صادر عن محكمة االستئناف بتونس‬،27119 ‫حكم استئنافي عدد‬
:117
‫"الحساب الجاري ال يتكون بين الطرفين ّإال إذا اتفق شخصان على تكوينه بينهما بمعامالت مسترسلة بما يستلزم ذلك من‬
‫ وبناء على ذلك فال يكفي تضمين عبارة‬.‫توفر ركني تبادل دفعات القبض مع عدم قابلية تفكيك الديون المترتبة لكل منهما‬
."‫"كش" أو "قائمة حساب" وتسجيل عبارة "وقف حساب" إلثبات حصول ذلك االتفاق‬

7
Introduction

partie s’engage à faire entrer en compte les créances dont elle est titulaire à
l’encontre de son cocontractant 19.
Ce principe permet au compte courant de jouer son rôle d'instrument de
garantie. Étant toutes affectées au compte, les créances réciproques se servent
mutuellement de garantie, sans qu'on puisse, toutefois, parler de sûreté au sens
technique du terme étant donné que l’affectation n’est pas liée à une position
débitrice du compte au moment de la naissance de la créance 20.
Deux conséquences découlent de ce principe de généralité. D’abord,
l’entrée d’une créance au compte n’implique aucun accord spécial du créancier.
En plus, le créancier ne peut, en principe, s’opposer à l’inclusion d’une créance
dans le compte et en demander un règlement direct21.
Le principe d’affectation générale, édicté dans l’intérêt commun des
parties, peut être écarté par leur accord. Ainsi, les parties peuvent d'un commun
accord faire entrer certaines créances en compte courant et en exclure d'autres,
notamment par le biais d'une affectation spéciale ou lorsque lesdites créances
bénéficient d'une sûreté particulière22.
La qualification de compte courant est également subordonnée à la
réciprocité des remises. Cette condition énoncée par l’article 728 du C.C. signifie
que « le compte doit être conçu de telle manière qu’il puisse recevoir des remises
des deux parties. Chacune d’elles peu prendre la qualité de remettant et de

19
T. BONNEAU, op. cit., p. 264, § 342.
20
J. STOUFFLET, op. cit., p. 3, n° 22.
21
C. GAVALDA et J. STOUFFLET, « Droit bancaire : Institutions, Comptes, Opérations,
Services », 2ème éd., Paris, Litec, 1994, p. 137, n° 293.
22
P. BOUTEILLER, J.-CI. Com., v° « Compte courant », à jour au 8 Mars 2014, fasc. 347, p.
7, n° 13.

8
Introduction

récepteur »23. Cette exigence de réciprocité concerne l’origine des remises et non
la position du compte24.
Toutefois, depuis 1890 la Cour de cassation française n’exige pas que la
réciprocité soit effective, il suffit qu’elle soit possible. Autrement dit, il suffit que
la réciprocité n’ait pas été exclue par la convention des parties.
En plus de la généralité et de la réciprocité des remises, l’article 728 du
C.C. exige l’enchevêtrement de ces dernières. Ces deux conditions, à savoir
l’enchevêtrement et la réciprocité, sont complémentaires. En fait, la réciprocité
des remises peut être successive, mais l’enchevêtrement des remises, appelé
encore l’alternance, écarte la simple succession des remises. Le compte-courant
suppose la possibilité de remises alternées au sens de l’article 728 du C.C. qui
dispose que « les règles relatives au contrat de compte courant que prévoient les
articles 729 et suivants ne sont pas applicables s'il a été stipulé que les remises
de l'une des parties ne devront commencer que lorsque les remises de l'autre
seront terminées ».
Autrement dit, il n'y a pas de compte courant, si l'ordre des opérations et,
par conséquent, les fluctuations sont préétablies. « Si ces fluctuations sont
aménagées de manière rigide dans la convention, le mécanisme du compte
courant est dépourvu de sens et d'intérêt, encore qu'il y ait matériellement une
alternance des remises »25.
L'existence de remises enchevêtrées peut se déduire, d'une part, de l'absence
de stipulation contraire dans la convention de compte-courant, d'autre part, de
l'allure générale du compte 26.

23
C. GAVALDA et J. STOUFFLET, op. cit., p. 138, n° 295.
24
Toutefois, depuis 1890 la Cour de cassation française n’exige pas que la réciprocité soit
effective, il suffit qu’elle soit possible. Autrement dit, il suffit que la réciprocité n’ait pas été
exclue par la convention des parties
Civ., 2 Juillet 1890, cité dans : Ibid., p. 139 n° 295.
25
J. STOUFFLET, op. cit., p. 4, n° 42.
26
P. BOUTEILLER, op. cit., p. 5, n° 9.

9
Introduction

La Cour de cassation affirme que la réciprocité et l’enchevêtrement des


remises en compte courant permettent de distinguer ce dernier du compte de
dépôt27. Le compte de dépôt, appelé aussi compte ordinaire n’enregistre, en
principe que les dépôts effectués par le client déposant. De là, apparaît
l’originalité du régime juridique du compte courant28.
En doctrine, le compte courant serait « assimilable à un creuset dans lequel
viennent se fondre les remises qui perdent totalement leur individualité et leur
spécificité pour ne plus constituer qu’un élément indifférencié du solde »29. Il
découle de cette conception deux règles exprimant l’essentiel du régime juridique
du compte courant à savoir l’effet novatoire et l’indivisibilité.
Par effet novatoire, il faut entendre que les créances entrées en compte
s’éteignent pour être remplacées par la position du compte 30. Cet effet extinctif
et novatoire est souvent exprimé sous l’idée que l’entrée en compte « vaut
paiement », vu que le compte, par compensations successives des crédits et débits,
produit un effet de règlement31.
Il découle de l’extinction de la créance d’abord, selon l’article 737 du C.C.
que les créances cessent d'être soumises aux règles qui leur sont propres en

27
Voir à ce propos :
:128 .‫ ص‬،2008 ،.‫ت‬.‫م‬.‫ ن‬،2008 ‫ أفريل‬2 ‫ مؤرخ في‬،16497 ‫قرار تعقيبي مدني عدد‬
‫"على خالف الحساب الجاري الذي تتداخل فيه المعامالت المسترسلة بين البنك والحريف مع توقف الفوائض على الدفعات‬
‫المسجلة به فإن حساب اإليداع يقتضي التصرف في حدود مقدار الرصيد الدائن وأنه في صورة تجاوز هذا الرصيد فإن البنك‬
."‫يذكر صاحب الحساب بخالص المبلغ الذي تجاوز مقدار الرصيد المودع‬
28
J. LABAT, « Le compte courant bancaire des entreprises : Comment concilier pratique et
théorie ? », Paris, Lamy, 2007, p. 115-116, n° 283.
29
C. GAVALDA et J. STOUFFLET, op. cit., p. 140, n° 298.
30
R. DESGORCES, « Relecture de la théorie du compte courant », R.T.D. Com. 1997, p. 383,
n°1 :
La novation en matière de compte courant n’est pas celle en droit des obligations telle que
définie par l’article 357 du C.O.C. qui dispose que « la novation est l’extinction d’une
obligation moyennant la constitution d’une obligation nouvelle qui lui est substituée ».
Dans le cadre d’un compte courant, la créance novée n’est pas remplacée par un nouveau lien
d’obligation isolé, elle intègre l’obligation initiale exprimé par le solde du compte.
31
S. PIEDEIÈVRE et E. PUTMAN, « Droit bancaire », Paris : Economica, 2011, p. 271 n° 259.

10
Introduction

matière de prescription et d'intérêts. S’agissant des sûretés attachées à la créance


entrée en compte, il est prévu dans l’article 735 du C.C. que « sauf stipulation
contraire insérée dans la convention spéciale et formelle visée à l'article 729
alinéa 2 du C.C., l'effet de la sûreté attachée originairement à une créance entrée
en compte courant est reporté à due concurrence sur le solde éventuel de ce
compte, sans égard aux variations pouvant subvenir dans la position dudit compte
jusqu'à sa clôture ». Ce report de sûreté s’attache au solde du compte courant à la
clôture et non à l’article correspondant du solde, par application du principe
d’indivisibilité.
L’idée d’indivisibilité exprimée par l’article 728 du C.C. qui énonce que la
convention de compte courant permet aux parties de « de substituer ainsi à des
règlements particuliers et successifs de ces opérations un règlement unique,
devant porter sur le seul solde du compte lors de sa clôture »32. De même, l’article
736 du C.C. consacre ce principe en disposant qu’ « aucun article d'un compte
courant ne peut être imputé sur un autre article de sens inverse ».
D’ailleurs, la Cour de cassation déclare que « l’une des spécificités des
comptes courants est qu’il est impossible de déterminer s’ils sont créditeurs ou
débiteurs qu’après leur clôture, et ce conformément à l’article 732 du C.C. ». 33

32
R. DESGORCES, « Relecture de la théorie du compte courant », op. cit., p. 383, n°1 :
« L'emploi de la notion d'indivisibilité est impropre. L’obligation est indivisible (Selon l’article
191 du C.O.C.) lorsque son objet n'est pas susceptible de division. Or, dans la théorie du compte
courant, la notion d'indivisibilité n'a pas été utilisée pour caractériser la prestation due mais
pour définir l'union entre les articles ».
33
Voir à ce propos :
:34 .‫ ص‬،1996 ‫ت‬.‫م‬.‫ ن‬،1996 ‫ أفريل‬4 ‫ مؤرخ في‬،52040 ‫ عدد‬،‫قرار تعقيبي مدني‬
‫" من خصائص الحسابات الجارية أنه ال يمكن الوصول إلى معرفة كونها دائنة أو مدينة إال متى تم قفلها وفق أحكام الفصل‬
".‫ من المجلة التجارية‬732
:278 .‫ ص‬،1983 ‫ت‬.‫م‬.‫ ن‬،1983 ‫ فيفري‬3 ‫ مؤرخ في‬،5308 ‫ عدد‬،‫قرار تعقيبي مدني‬
‫ وما بعده من فصول المجلة التجارية وباألخص‬728 ‫"معاملة البنك الحد حرفائها بطريق عقد الحساب الجاري الوارد بالفصل‬
‫ في قرضه المال مع خصم الفائض واسترسال ذلك دوريا بينهما اخذا وعطاء مع وجود التوثقة فان البنك ال‬729 ‫منها الفصل‬
."‫حق له في عقلة اموال المدين او استصدار حكم عليه في قسط مستقل من أصل ذلك الدين‬

11
Introduction

Les différents articles du compte sont les parties d’un tout ; ils se tiennent
les uns aux autres. Le remettant n’a pas le droit de se déclarer créancier du
récepteur pour la remise qui lui a été faite. On ne saura qu’à la clôture du compte
qui est créancier ou débiteur : la créance sera le solde du compte34.
Par application de l’idée d’absence d’exigibilité avant la clôture du compte
courant, la jurisprudence considère que tant la relation des parties se poursuit et
que le compte enregistre des opérations de débit et de crédit réciproques, la
banque n'a pas le droit d'agir contre son client pour se faire payer séparément sur
l'un des articles du compte 35.
Ainsi, la théorie de l’indivisibilité consacre l’idée d’une compensation
globale à la clôture du compte36. En d’autres termes, aucune créance ne peut être
séparée du compte et traitée isolément37. Autant dire qu’aucune créance n’existe
jusqu’à la clôture de ce dernier, et que le solde final permet à lui seul de déterminer
les qualités de créancier et de débiteur 38.
Etant défini, le compte courant peut-il faire l’objet d’une saisie ?

34
G. RIPERT et R. ROBLOT, op. cit., p. 373, n° 2337.
35
Voir à ce propos :
:278 .‫ ص‬،1983 ‫ت‬.‫م‬.‫ ن‬،1983 ‫ فيفري‬3 ‫ مؤرخ في‬،5308 ‫ عدد‬،‫قرار تعقيبي مدني‬
‫ وما بعده من فصول المجلة التجارية وباألخص‬728 ‫"معاملة البنك الحد حرفائها بطريق عقد الحساب الجاري الوارد بالفصل‬
‫ في قرضه المال مع خصم الفائض واسترسال ذلك دوريا بينهما اخذا وعطاء مع وجود التوثقة فان البنك ال‬729 ‫منها الفصل‬
".‫حق له في عقلة اموال المدين او استصدار حكم عليه في قسط مستقل من أصل ذلك الدين‬
36
J. HAMEL, « Banques et opérations de banque, T. 1 : Les comptes en banques », Paris :
Sirey, 1966 n° 381 (Cité dans J. LABAT, op. cit., p. 148, n° 355.)
L’auteur parle d’un « bloc […] indivisible dans le temps en ce qu’il serait impossible d’y faire
aucune fissure depuis l’ouverture du compte courant jusqu’à la clôture »
37
Voir à ce propos :
:96 .‫ ص‬،2‫ عدد‬،1989 .‫ت‬.‫ق‬.‫ م‬،1988 ‫ ديسمبر‬12 ‫ بتاريخ‬،‫ صادر عن محكمة تونس اإلبتدائية‬،55015 ‫حكم إبتدائي عدد‬
ّ "
‫إن الديون الوقع إدخالها بالحساب الجاري تصبح فصال من فوله وال تقبل التفكيك أو التسوية المنفردة نتيجة لذلك مخالفة‬
".‫ من المجلة التجارية المطالبة المستقلة بمعلوم سندات األمر بعد إدخالها بالحساب الجاري‬729‫ و‬728 ‫ألحكام الفصلين‬
38
M. CABRILLAC et M.-T. RIVES-LANGE, « Le compte courant en droit français », Paris,
Sirey, 1969, p. 145, n° 257.

12
Introduction

Historiquement, la saisissabilité du solde provisoire du compte courant en


droit tunisien ne suscite aucun intérêt particulier, contrairement à d’autres
législations.
En fait, en droit tunisien, le solde provisoire du compte courant est
absolument saisissable. Mais, il convient de noter que cette position a été
largement inspirée des projets de réforme élaborés par la Société d’Études
Législatives Française en 1933-1935, puis en 1944-1946, qui devait
admettre la possibilité de saisir à tout moment du solde créditeur d’un compte
courant. Plus tard, ces travaux avaient inspiré le projet de la Commission de
Réforme du Code de Commerce Français en 1951, qui devrait faire sienne la règle
de la saisissabilité du solde provisoire du compte courant (l’article 13 du projet,
devenu l’article 739 du C.C. Tunisien) 39.
Ce projet de réforme a été rejeté par le législateur français, mais « la Tunisie
s’est approprié l’avant-projet sur le contrat du compte courant et l’a transformé
en loi. Il est assez paradoxal de constater qu’un projet français ait trouvé sa
première consécration législative à l’étranger »40.
Ainsi, l’article 733 du C.C. disposait que l’indivisibilité du compte courant
n’empêchait pas les parties au compte de jouir de « la libre disposition, à tout
moment, du crédit que la position du compte fait apparaître en sa faveur ».
Cette disponibilité du solde provisoire du compte courant permet à l’ayant
compte d’émettre des effets de commerce ayant pour provision le solde dégagé
provisoirement.
Par conséquence logique, ce solde provisoire du compte courant peut-être
saisi arrêté par les créanciers de l’ayant compte. Cette position a été consacrée

39
A. BACHA, « Les effets de la saisie des comptes en banque », Mémoire pour le D.E.A. en
Droit Privé, La Faculté de Droit et des Sciences Economiques et Politiques de Tunis,
1980/1981, p. 4.
40
J. HAMEL, « Banques et Opérations de Banque, T. I : Histoire. Le commerce de banque en
France et à l'étranger. Le compte en banque. Le compte courant. Le chèque », Cité dans Ibid.,
p. 4.

13
Introduction

explicitement depuis le 5 octobre 1959, date de promulgation du code de


commerce, dans l’article 739 41.
Les termes dudit article ne peuvent être plus clairs. En fait, l’article 739 du
C.C. dispose que « la saisie-arrêt d'un compte courant est possible à tout moment
sur la position créditrice de ce compte, selon la procédure du droit commun ».
De là, on remarque que le législateur tunisien a adopté des projets de lois
abandonnés par son homologue français. L’explication de cette contradiction est
que le législateur tunisien adoptait des projets de loi, qui résument toutes les
tendances jurisprudentielles françaises, pour faire face à un vide législatif et
jurisprudentiel.
Par contre, le législateur français a abandonné ces projets de loi car il se
trouvait en présence d’une œuvre de la jurisprudence qui a su déterminer, au fur
et à mesure des besoins, les principes qui régissent le compte courant.

En fait, par application à la théorie de l’indivisibilité, la jurisprudence et la


doctrine française du début du 20ème Siècle estimaient que le solde provisoire ne
fournissait qu’un « renseignement comptable » de la situation juridique des
parties en compte, sans aucune valeur juridique42. Il ne constituait pas une créance
du client sur le banquier, seul le solde final s'il était créditeur, pouvait être saisi et
ce contrairement au solde du compte de dépôt qui était saisissable en cours de
fonctionnement 43.
La saisie-arrêt suppose chez le saisi la qualité de créancier et chez le tiers
saisi la qualité de débiteur de ce dernier. Or, « le dogme de l’indivisibilité du
compte courant » 44 entraînait, comme conséquence logique « qu'il n'y a ni

41
Loi n° 59-129 du 5 Octobre 1959, portant promulgation du Code de Commerce, J.O.R.T. n°
56 des 3, 6, 10 et 13 novembre 1959, p. 1218.
42
J. LABAT, op. cit., p. 148, n° 354.
43
A. LEBORGNE, « Droit de l'exécution : Voies d'exécution et procédures de distribution »,
2ème éd., Paris, Dalloz, 2014, p. 510, n° 1121.
44
J.-L. RIVES-LANGE, « La saisissabilité du compte courant », D. 1974, Chronique., p. 101.

14
Introduction

valeurs à saisir, ni personne sur qui on puisse saisir : L'objet et le sujet manquent
à la fois » 45.
Cette déduction démontre « le caractère artificiel et impraticable » de la
conception classique d’absence de créance tant que le compte fonctionne46.
D’ailleurs, cette conception n’a cessé d’être critiquée pour ses
conséquences néfastes dont la plus importante est l’insaisissabilité du compte
courant 47.
Cette insaisissabilité du compte courant heurtait l’équité. Que la saisie soit
déclarée nulle ou que ses effets soient reportés à la clôture du compte, le débiteur
saisi pouvait disposer librement de son solde provisoire pour retirer les fonds et
ôter à ses créanciers une partie de leur gage général.48
Cette conséquence inéquitable et excessive, pour les créanciers du débiteur,
de l’insaisissabilité de l’avoir au sein du compte courant, a poussé la jurisprudence
française, en première étape, à détourner l’application stricte du principe
d’indivisibilité du compte courant.
Ainsi, la Cour de Paris a engagé la responsabilité du banquier pour avoir
autorisé une diminution anormale du solde créditeur après la saisie 49. Dans une
autre décision, ladite Cour autorisait au créancier, par la voie de l’action oblique,
à demander la clôture du compte courant de leur débiteur50.

45
E. FEITU, « Traité du compte courant », Paris : Marescq, 1873, p. 331 n° 245.
46
M. CABRILLAC et M.-T. RIVES-LANGE, op. cit., p. 146, n° 259.
47
Ibid., p. 145, n° 258 :
La jurisprudence française a « également justifié de la sorte la suspension de la prescription tant
que le compte fonctionne et le fait que, la remise n’étant pas un paiement par compensation ne
tombe pas sous le coup de l’article 447 du code de commerce lorsqu’elle est faite en période
suspecte. »
48
J-L. RIVES-LANGE, « La saisissabilité du compte courant », op. cit., p. 101.
49
Paris, 16 Mars 1943, J.C.P. 1943, II, 2405.
50
Paris, 9 Novembre 1949, J.C.P. 1950, II, 5311.

15
Introduction

Devant la pression des faits, il était difficile à la Cour de cassation française


de maintenir sa position refusant la saisissabilité du compte courant vu son
indivisibilité. Certes, cette dernière empêche l’existence des créances
individuelles en tant que telles après leur entrée en compte. Mais ce n’est pas à
dire qu’aucune créance n’existe 51.
En fait, nier l’existence juridique du solde provisoire allait à l’encontre
d’une pratique bancaire qui a toujours reconnu à l’ayant compte le droit de
disposer de son solde provisoire créditeur en émettant des chèques ou en opérant
un retrait par exemple. Ainsi, en tenant compte de ce solde provisoire, le banquier
paie ou refuse de payer les chèques et les domiciliations de son client52.
D’ailleurs, le solde provisoire était toujours analysé en une créance, et selon
la pratique bancaire, en une créance exigible, il n’y avait plus d’obstacle à le
déclarer saisissable.53
Par un arrêt rendu le 13 Novembre 1973, la chambre commerciale de la
Cour de cassation française opérait un revirement jurisprudentiel en admettant le
nouveau principe de saisissabilité du solde provisoire du compte courant malgré
l’indivisibilité qui le caractérise 54.
En fait, ladite Cour affirme que le solde provisoire est un « élément d’actif
disponible » du titulaire du compte sans qu’il soit nécessaire d’attendre la clôture
de ce dernier. A ce titre, il fait partie du patrimoine du client, et ne peut être
« distrait du gage général » du créancier.
Mais cela ne veut nullement dire que la particularité du mécanisme du
compte courant et notamment la différence entre le solde provisoire et le solde
définitif est nié par cet arrêt. En fait, le compte courant perdrait de son intérêt si à

51
M. CABRILLAC et M.-T. RIVES-LANGE, op. cit., p. 146, n° 259.
52
Ibid., p. 147, n° 260.
53
J.-L. RIVES-LANGE, « La saisissabilité du compte courant », op. cit., p. 101.
54
Cass. Com., 13 Novembre 1973, bull. civ. IV n° 325.

16
Introduction

chaque solde provisoire une exigibilité immédiate est reconnue, voire il ne serait
plus courant 55.
D’ailleurs, une année après cette reconnaissance de la saisissabilité du solde
provisoire du compte courant, la chambre commerciale de la Cour de cassation
française a précisé que « l'existence d'un solde provisoire ne permet pas
l'exercice, par l'autre partie, d'une action en justice contre le titulaire du compte
courant, à défaut d'une convention particulière » 56.
Une lecture concomitante de ces deux arrêts mène à conclure que le solde
créditeur du compte courant peut faire l’objet d’une saisie-arrêt, alors même que
ce solde n’était, par nature, exigible qu’à la clôture du compte57. En d’autres
termes, « l’indivisibilité du compte courant est opposable entre ses
parties », non les tiers 58.
En conclusion, il convient de dire qu’historiquement, le droit tunisien est
en avance par rapport au droit français quant à l’admission de la saisissabilité du
solde provisoire du compte courant. Mais, il convient d’étudier la position actuelle
du droit tunisien par rapport à d’autres droits comparés.

En droit tunisien, la saisie du compte courant se fait selon la procédure du


droit commun, bien évidemment cette procédure est celle de la saisie-arrêt . Par
contre, certains droits comparés, notamment le droit français, ont doté la saisie du
compte courant d’une saisie particulière.
En 1991, le législateur français abandonnait la saisie hybride comme la
saisie-arrêt, et opérait une distinction nette entre les mesures d'exécution forcée
qui ne peuvent être engagées qu'avec un titre exécutoire, et les mesures
conservatoires.

55
J. LABAT, op. cit., p. 150 n° 357.
56
Cass. Com., 25 Novembre 1974, bull. civ. IV n° 298.
57
J.-M. DELLECI, op. cit., p. 202 n° 333.
58
P. BOUTEILLER, op. cit., p. 9, n° 22.

17
Introduction

Ainsi, deux types de saisies sont mises en place. La saisie-vente qui


remplace la saisie-exécution et la saisie-attribution qui remplace la saisie-arrêt.
En définitive, la saisie attribution « est une mesure d’exécution qui permet
à un créancier muni d’un titre exécutoire, constatant une créance liquide et
exigible, de saisir entre les mains d’un tiers les créances de son débiteur portant
sur des sommes d’argent, pour en obtenir le paiement »59.
L’innovation essentielle de la saisie attribution consiste dans son effet
attributif. Cet effet comprend que la créance, objet de la saisie sorte du patrimoine
du débiteur saisi pour être transportée, à concurrence du montant de la créance
cause de la saisie, dans le patrimoine du créancier saisissant. Ainsi, le tiers saisi
devient donc personnellement débiteur des causes de la saisie à due concurrence
de ce qu'il devait au débiteur, vis-à-vis du créancier.
Il en résulte donc pour le créancier saisissant une situation privilégiée, car
cette attribution ne peut être remise en cause par d’autres saisies même si elles
émanent de créanciers privilégiés vu que la créance objet de la saisie sorte du
patrimoine du débiteur dès la notification de la saisie.
La deuxième innovation de la saisie attribution réside dans l’étendue de
l’indisponibilité de la créance saisie déclenché par la saisie. En effet, la saisie

59
S. GUINCHARD et T. MOUSSA, dir., « Droit et pratique des voies d'exécution 2015-2016
», 8ème éd., Paris : Dalloz, 2015, p. 799, n° 800.01.

18
Introduction

attribution de droit commun est de plein droit cantonnée au montant de la créance


cause de la saisie60.
Mais, en ce qui concerne la saisie des comptes bancaires, et en tenant
compte de la particularité de l’objet de ladite saisie, le législateur français lui a
consacré une saisie attribution particulière. En fait, la saisie sur compte bancaire
aura pour objet des créances versées sur des comptes dont le solde varie en
permanence par le jeu des retraits ou des dépôts de monnaie fiduciaire ou
scripturale61.
De là, l’étude de la saisie du compte courant révèle son intérêt théorique.
En fait, la dynamique du compte bancaire, qui enregistre des opérations débitrices
ou créditrices de manière successive, en complique la saisie parce que ces
opérations ne s'inscrivent pas sur le compte en temps réel. Une période de
liquidation est donc nécessaire pour connaître le solde exact au jour de la saisie,
le solde apparent ne reflétant pas nécessairement la réalité.
De plus, lorsque la saisie est pratiquée entre les mains d'un établissement
bancaire, les intérêts du créancier saisissant et ceux du banquier tiers saisi sont
généralement en opposition. Le banquier, en tant que détenteur des sommes
déposées chez lui est débiteur d'une obligation de restitution de ces fonds, mais il

60
L’article 43 de la loi n° 91-650 du 9 juillet 1991 « Portant Réforme des Procédures Civiles
d'Exécution » Française :
« L'acte de saisie emporte, à concurrence des sommes pour lesquelles elle est pratiquée,
attribution immédiate au profit du saisissant de la créance saisie disponible entre les mains du
tiers ainsi que de tous ses accessoires. Il rend le tiers personnellement débiteur des causes de la
saisie dans la limite de son obligation.
La signification ultérieure d'autres saisies ou de toute autre mesure de prélèvement, même
émanant de créanciers privilégiés, ainsi que la survenance d'un jugement portant ouverture d'un
redressement ou d'une liquidation judiciaires, ne remettent pas en cause cette attribution.
Toutefois, les actes de saisie signifiés au cours de la même journée entre les mains du même
tiers sont réputés faits simultanément. Si les sommes disponibles ne permettent pas de
désintéresser la totalité des créanciers ainsi saisissants, ceux-ci viennent en concours.
Toutefois, lorsqu'une saisie-attribution se trouve privée d'effet, les saisies et prélèvements
ultérieurs prennent effet à leur date ».
61
S. GUINCHARD et T. MOUSSA, dir., op. cit., p. 911, n° 920.04.

19
Introduction

est également souvent créancier de son client en vertu de la convention de compte


courant.
Ainsi, l’étude de la saisie du compte courant permettrait d’analyser et
d’étudier l’évolution des différents rapports qui entre-lient le créancier saisissant,
le débiteur saisi, le tiers saisi ainsi que les autres créanciers du débiteur saisi qu’ils
soient saisissants ou pas, tout au long des différentes phases de la saisie.
A cela s’ajoute que le sujet de la saisie du compte courant se trouve à
l’intersection de trois matières juridiques, à savoir les voies d’exécution, le droit
bancaire et le droit cambiaire. Ainsi, le traitement de ce sujet permettra d’analyser
la spécificité de l’objet de la saisie portant sur un compte courant.
S’ajoute à cet intérêt théorique, un autre d’ordre pratique. La saisie du
compte courant est largement utilisée pour sa nature et pour son objet. La
procédure de la saisie-arrêt, d’une façon générale, est couramment utilisée par les
créanciers en raison de, ce que la doctrine appelle, son « effet de surprise ». Cet
effet consiste en ce que le créancier n’est pas obligé d’avoir un titre exécutoire
préalable pour pratiquer la saisie-arrêt , ce qui permet de surprendre le débiteur
saisi.
En plus de cet avantage, la saisie du compte courant est préférée
précisément vu que les comptes en banques constituent de nos jours des éléments
importants du patrimoine du débiteur. Actuellement, l'argent est devenu monnaie
scripturale62. Les deux principaux usages de la monnaie, paiement et épargne, sont
concentrés dans les comptes, entre les mains des banques. Les comptes en banque

62
La B.C.T., « Rapport Annuel 2015 », Juin 2016, p. 173.
A fin 2015, le nombre de banques agréés en Tunisie s’est maintenu à 31 établissements, répartis
entre 22 banques résidentes, 2 banques d’affaires et 7 banques non-résidentes.
En Tunisie le réseau bancaire compte 1774 agences à fin 2015 traduisant une densité d’une
agence pour 6191 habitants. Ainsi, 66% de la population dispose d’un compte bancaire soit
presque 2 comptes bancaires pour 3 habitants.
Le nombre de cartes bancaires émises à fin 2015 s’élève à 3 millions de cartes. Quant au nombre
des distributeurs automatiques de billets, il s’établit à 2249 unités.

20
Introduction

reçoivent l'argent destiné aux paiements, d'où il est distribué par les moyens de
paiement modernes63. De là, la plupart des saisies-arrêts se font entre les mains
des banques, que ces saisies soient pratiquées par la banque sur elle-même ou par
les autres créanciers saisissants.
Mais bien que la plupart des saisie-arrêt s porte sur des comptes courants,
la saisie du compte courant se distingue techniquement des autres saisies-arrêts
par la complexité des mécanismes qui régissent le fonctionnement dudit compte.
D’ailleurs, la spécificité du compte courant va nécessairement affecter sa
saisie. De là il importe de se demander quels effets sont à recenser et qui viennent
affecter le compte courant après sa saisie ?
Deux orientations sont à envisager. Au niveau du fonctionnement du
compte, une perturbation est désormais présente. Elle prend l’allure d’une
indisponibilité sans pour autant porter atteinte au maintien du compte courant
(Partie I). Mais eu égard à la nature même du compte courant caractérisé par
l’enchevêtrement des opérations, il est impératif de retenir des solutions
spécifiques destinées à fournir les modalités de cette indisponibilité du compte
saisi pour savoir s’il y a lieu de lever cette indisponibilité ou régulariser les effets
de certaines opérations sur le solde du compte saisi (Partie II).

63
J.-L. RIVES-LANGE, « La monnaie scripturale : Contribution à une étude juridique », Études
de Droit Commercial à la mémoire de H. CABRILLAC, Paris, Librairies Techniques, 1968, p.
405.

21
Première Partie :

L’indisponibilité, un effet

direct de la saisie
L’indisponibilité, un effet direct de la saisie

Partie I : L’indisponibilité, un effet direct de la


saisie
Comme toute saisie, la saisie du compte courant rend son objet
indisponible. En effet, le C.P.C.C. prévoit une règle générale dans son article 309
en disposant que « toute saisie a pour effet de mettre sous main de justice les biens
sur lesquels elle porte et d'empêcher que le débiteur n’en dispose au préjudice de
ses créanciers ». Cette indisponibilité permet la conservation tant matérielle que
juridique du bien saisi dans l'attente de sa réalisation.
Le banquier tiers saisi est le premier à être atteint par l’acte de saisie et c’est
à son égard que se déclenchent tout d’abord les effets de la saisie. En fait, dès la
réception de l’exploit de saisie-arrêt, la créance saisie entre ses mains est rendue
indisponible. Ainsi, la question qui se pose consiste avant tout à déterminer
l’étendue de cette indisponibilité (Chapitre I) pour voir ensuite ses effets (Chapitre
II).

Chapitre I : L’étendue de l’indisponibilité

Le premier effet de l’exploit de la saisie-arrêt est de rendre la créance saisie-


arrêtée indisponible. Ainsi, il convient au préalable de s’intéresser au domaine de
la saisie du compte courant (Section I) avant de se demander sur la nature de
l’indisponibilité qui atteint ce dernier (Section II).

23
L’indisponibilité, un effet direct de la saisie

Section I : Le domaine de la saisie du compte


courant

En principe, tous les comptes font partie du patrimoine du débiteur saisi et


sont de ce fait saisissables. Mais, vu la spécificité de l’objet de la saisie, à savoir
un compte courant, il convient d’étudier la portée géographique de cette dernière.
On entend par la portée géographique de la saisie, son étendue sur les plans
national et international.
D’abord, pour la portée géographique sur le plan national, il convient de
rappeler que le saisissant n’est pas obligé de signifier sa saisie au siège de la
banque pour que cette dernière produise ses effets sur l’ensemble des comptes
ouverts auprès des différentes agences de la banque.
En fait, la signification aux personnes morales peut être « faite à son siège
principal ou au siège de la succursale, de l'agence ou de la section intéressée »64.
D’ailleurs, la Cour de cassation a déclaré que tant que l’exploit de la saisie-arrêt
contient le cachet du tiers saisi, il est considéré valable à l’encontre de son
représentant légal65.
Mais, la question de l’étendue géographique de la saisie prend de l’intérêt
surtout à l’échelle internationale. Ainsi, s’est posée la question de déterminer si
les comptes du débiteur détenu chez une filiale ou succursale étrangère de la
banque tierce saisie sont susceptibles d’être affectés par la saisie.
En fait, si les comptes revenant au saisi figurent sur les livres d’une filiale
étrangère de la banque, tenant compte que la filiale jouit d’une personne morale

64
L’article 11 du C.P.C.C.
65
Voir à ce propos :
:128 .‫ ص‬،2007 .‫ت‬.‫م‬.‫ ن‬،2007 ‫ سبتمبر‬25 ‫ المؤرخ في‬،9352 ‫قرار تعقيبي مدني عددـ‬
."‫"طالما تضمن محضر العقلة التوقيفية طابع المعقول تحت يدها فإنه يعتبر صحيحا في حق ممثلها القانوني‬

24
L’indisponibilité, un effet direct de la saisie

distincte de la société mère, ils ne sauraient être concernés par la saisie signifiée
à cette dernière66.
En revanche, et comme la succursale étrangère n’est pas dotée d’une
personnalité morale distincte, c’est la société mère qui est tenue en tant que tiers
saisi67. Ainsi, sous l'empire de la saisie-arrêt, la chambre commerciale de la Cour
de cassation française, dans un arrêt rendu à la faveur de la Compagnie Tunisienne
de Navigation, avait jugé que la déclaration affirmative du tiers saisi devait inclure
les sommes déposées par le saisi dans une succursale étrangère attendu que « la
saisie-arrêt s’exerce sur l’ensemble des sommes dont le tiers saisi est débiteur
envers le saisi »68.
Cette solution, réaffirmée sous le régime de la saisie attribution, était
critiquée au motif qu’elle constitue une extraterritorialité des voies d’exécution69.
Or, cette solution se justifie par le fait que la saisie ne porte pas sur les fonds situés
à l'étranger mais sur une créance dont la banque est personnellement débitrice
lorsque les fonds figurent au crédit d'un compte ouvert dans une succursale
étrangère ne disposant pas de la personnalité morale70.
Ainsi, tous les comptes ouverts au nom du débiteur saisi, tant qu’ils sont
détenus personnellement par le tiers saisi sont saisissables par application à la
règle de principe qui veut que tous les biens appartenant au débiteur répondent de
ses dettes.

66
L’article 462 du C.S.C. in fine :
« Est réputée filiale, toute société dont plus de cinquante pour cent du capital est détenu
directement ou indirectement par la société mère, et ce, abstraction faite des actions ne conférant
pas à leur porteur des droits de vote ».
67
J.-M. DELLECI, op. cit., p. 227, n° 362.
68
Cass Com., 30 Mai 1985, Rev. Crit. D.I.P. 1986, p. 329, note Battifol.
69
G. CUNIBERTI, « L’extraterritorialité de la saisie-attribution : l’affaire BNP-Paribas
Monaco », Revue Lamy Droit des Affaires, n°28, Juin 2008, p. 29.
70
S. GUINCHARD et T. MOUSSA, dir., op. cit., p. 915, n° 921.30.

25
L’indisponibilité, un effet direct de la saisie

Néanmoins, et à titre exceptionnel, certains comptes ou sommes peuvent


échapper aux poursuites. Ainsi, il convient d’étudier l’exclusion de certains
comptes de saisissabilité (§I) ainsi que l’insaisissabilité de certaines sommes (§II)
afin de mieux délimiter le champ d’application de la saisie du compte courant.

§ I : L’exclusion de certains comptes de


saisissabilité

Par dérogation à la règle de principe qui veut que tous les biens appartenant
au débiteur répondent de ses dettes, certains de ces biens échappent aux poursuites
par la volonté ou la permission de la loi ; ils sont insaisissables.
L'insaisissabilité, est « la situation juridique d'un bien qui est exception-
nellement soustrait au droit du créancier d'agir en exécution forcée »71. Ainsi
définie, elle s’entend d’un bien qui, pour diverses raisons, est soustrait aux
poursuites par la loi, mais qui demeure aliénable par son propriétaire. Le bien est
mis hors d’atteinte des créanciers sans perdre pour autant son utilité pour son
propriétaire72.
Cette inexécutabilité est autorisée constitutionnellement si elle a un
fondement légal73.

71
A. LEBORGNE, op. cit., p. 277, n° 584.
72
R. PERROT et P. THÉRY, « Procédures civiles d'exécution », 3ème éd., Paris : Dalloz, 2013,
p. 217, n° 216.
73
L’article 111 de la Constitution de la République Tunisienne du 27 Janvier 2014, », J.O.R.T.
n° spécial du 20 Avril 2015, p. 3 :
« Les jugements sont rendus au nom du peuple et exécutés au nom du Président de la
République. Il est interdit, sans fondement légal, d’empêcher ou d’entraver leur exécution ».

26
L’indisponibilité, un effet direct de la saisie

Il importe de ne pas confondre l'insaisissabilité avec d'autres situations qui,


en pratique, paraissent revenir au même parce qu'elles constituent des obstacles
aux poursuites.
Les obstacles à l’exécution peuvent être liés au défaut de la propriété des
sommes saisies, ou à la personnalité même du débiteur. Ainsi, les comptes exclus
de saisissabilité peuvent être soit les comptes professionnels (A) ou les comptes
dont le titulaire bénéficie d’une immunité d’exécution (B).

A- Les comptes professionnels

Certains professionnels sont amenés à recevoir des fonds, non pas en


paiement de ce qui leur est dû, mais seulement à titre d'intermédiaire comme par
exemple, des agents immobiliers qui se font remettre le prix d'une vente ou des
huissiers de justice qui reçoivent une somme à remettre au créancier74.
Pratiquement, ces fonds sont portés sur des comptes ouverts au nom de ces
mandataires professionnels, ainsi, il convient de se demander si ces fonds peuvent
être saisis par les créanciers personnels de ses professionnels ? La jurisprudence
française opère une distinction qui est tout à fait valable en droit tunisien.
En l’absence de disposition législatives ou réglementaires spéciales ou
d’un intitulé du compte permettant au banquier dépositaire de connaitre
l’appartenance réelle des sommes qui y sont inscrites, la recherche de l'origine des
fonds est vaine et les sommes dues au professionnel seront confondues avec celles
appartenant à ses clients75.

74
D. R. MARTIN, « Des comptes bancaires à affectation spéciale ouverts à des
professionnels », R.D. Bancaire et de la Bourse, Janvier / Février 1992, n° 29, p. 2.
75
N. CAYROL, J.-CI. Pr. Civ., v° « Saisie-attribution (Comptes Bancaires : Règles
Spécifiques) », à jour au 14 Janvier 2013, fasc. 2280, p.23, n° 110.

27
L’indisponibilité, un effet direct de la saisie

Dans ce cas, les sommes inscrites au compte du professionnel font partie


de son patrimoine, quelle que soit l'origine des fonds versés, et peuvent dès lors
être saisis par ses créanciers76.
En revanche, si les fonds n'appartenant pas au professionnel sont inscrits
sur un compte dit « réglementé », c'est-à-dire régi par des dispositions législatives
ou réglementaires spécifiques d’affectation spéciale des fonds déposés, ces fonds
échappent aux poursuites des créanciers du professionnel en dépit du fait qu’il soit
titulaire du compte77.
En droit tunisien, parmi les professionnels qui sont tenus par la loi à ouvrir
des comptes professionnels pour y déposer les fonds qu'ils reçoivent de leurs
clients sont on cite les huissiers de justice78, les agents immobiliers79, les
liquidateurs, les mandataires de justice, les syndics et les administrateurs
judiciaires80. En droit français, cette obligation s’impose aux avocats aussi81, mais
en droit tunisien aucun texte ne l’exige.
En plus des comptes professionnels, certains comptes sont insaisissables eu
raison du fait que leurs titulaires jouissent d’une immunité d’exécution.

B- Les immunités d’exécution

76
Cass. 1ère Civ., arrêt n° 82-10.114, du 20 Avril 1983, D. 1984, p. 78, obs. Vasseur.
77
J.-M. DELLECI, op. cit., p. 208, n° 348.
78
L’alinéa 3 de l’article 287 bis du C.P.C.C. :
« L’huissier de justice doit, également, ouvrir un compte courant spécial pour les fonds revenant
à ses clients. Ce compte est soumis au contrôle du procureur de la République ».
79
L’article 8 de la loi n° 81-55 du 23 Juin 1981, « Portant organisation de la profession d'agent
immobilier », J.O.R.T. n° 44 du 26 Juin 1981, p. 1528.
80
Les articles 16 et 31 de la loi n° 97-71 du 11 novembre 1997, « Relative aux liquidateurs,
mandataires de justice, syndics et administrateurs judiciaires », J.O.R.T. n° 91 du 14 Novembre
1997, p. 2047.
81
Les articles 236 et suivants du décret n° 91-1197 du 27 Novembre 1991 organisant la
profession d’avocat en France.

28
L’indisponibilité, un effet direct de la saisie

L’immunité d’exécution est « un privilège personnel accordé à certains


débiteurs qui a pour conséquence de les soustraire à toute mesure d’exécution
forcée, ainsi qu’à toute mesure conservatoire, sur les biens qui leur
appartiennent » 82.
Par ses effets, l’immunité d’exécution équivaut à une interdiction de toute
saisie. Elle se distingue néanmoins d’une véritable insaisissabilité, au sens propre
du terme, en ce que l’immunité d’exécution est liée à la personnalité même du
débiteur, et non point à la nature de certains biens, avec cette conséquence que
tous les biens du débiteur, sont soustraits au gage de ses créanciers 83.
On distingue les immunités d’exécution en droit interne et en droit
international.
La quasi-totalité des immunités d’exécution concerne des personnes
morales ou physiques exerçant une activité de puissance publique, soit dans
l’ordre interne, soit dans l’ordre international 84.
Sur le plan interne, l’article 37 du C.C.P. prévoit qu’ils « sont
insaisissables, même en vertu de titres dûment exécutoires, les deniers, créances
d'impôts ou autres, titres, valeurs, biens meubles ou immeubles et, généralement,
tous les biens, sans aucune exception, appartenant, soit à l'Etat, soit aux
établissements publics ou aux collectivités locales.
Toutes saisies pratiquées et tous actes d'exécution ou autres, faits au mépris
de la disposition qui précède, sont de plein droit nuls et de nul effet ».

Pour justifier l’immunité d’exécution, dont dispose les personnes morales


de droit public on invoque l’absence de risque pour les créanciers au motif que,

82
R. PERROT et P. THÉRY, op. cit., p. 250, n° 247.
83
O. SALATI, J.-CI. Proc. Civ., V° « Biens insaisissables (Biens insaisissables dans le Code
des procédures civiles d’exécution) », à jour au 20 Août 2015, Fasc. 2170, n° 8.
84
S. GUINCHARD et T. MOUSSA, dir., op. cit., p.167, n° 152.10.

29
L’indisponibilité, un effet direct de la saisie

par définition, une personne morale de droit public n’est jamais insolvable, ou
encore le désordre qui pourrait en résulter85.
Mais en réalité, la justification de l’insaisissabilité réside essentiellement
dans le fait que les biens et les deniers publics sont affectés au bon fonctionnement
du service public et qu’ils ne sauraient être détournés de leur affectation au
bénéfice d’un simple particulier sans compromettre gravement la continuité du
service public86.
Avec la loi du 1er Février 198987 et la réaffirmation de la loi de 199688, le
législateur tunisien a adopté une nouvelle distinction89 entre les établissements

85
R. PERROT et P. THÉRY, op. cit., p. 251 :
« Non seulement une collectivité territoriale ou un établissement public peut se révéler
insolvable parce que les crédits sont épuisés, mais en outre, il y a toujours désordre, et désordre
grave pour la crédibilité de la puissance publique, quand un créancier se heurte au mauvais
vouloir d’une administration qui répugne à exécuter les condamnations prononcées contre
elle ».
86
A. LEBORGNE, op. cit., p. 318, n° 688.
87
La loi n° 1989-9 du 1 Février 1989, J.O.R.T. n° 9 du 7 Février 1989, p. 203.
88
La loi n° 1996-74 du 29 juillet 1996, « modifiant et complétant la loi n° 89-9 du 1er février
1989 relative aux participations et entreprises publiques telle que modifiée et complétée par la
loi n° 94-102 du 1er août 1994 », J.O.R.T. n° 62 du 2 Août 1996, p. 1638.
89
Classiquement, et en d’autres droits comparés, on distingue les établissements publics à
caractère administratif et les établissements publics à caractère industriel et commercial. Le
législateur tunisien adoptait cette distinction implicitement dans la loi La loi n° 1972-40 du 1
Juin 1972, « relative au Tribunal Administratif », J.O.R.T. n° 23 du 2 Juin 1972, p. 738.
Mais, ce critère de distinction n’était pas très clair, vu que dans la réalité administrative sont
apparus des établissements publics qualifiés d’établissement à double visage qui tantôt peuvent
avoir une activité administrative et tantôt une activité industrielle et commerciale.
Voir à ce propos :
A. AOUIJ MRAD, « Droit des Entreprises Publiques », Tunis : C.P.U., 2009.

30
L’indisponibilité, un effet direct de la saisie

publics ayant un caractère administratif et ceux ne l’ayant pas, appelés


« entreprises publiques » 90.
Ainsi, il convient de déterminer quelle catégorie d’établissement public est
bénéficiaire de l’immunité d’exécution.
La réponse est donnée par l’article 39 bis du C.C.P. qui dispose qu’il « est
considéré établissement public au sens des articles 37, 38 et 39 du présent code
celui dont le budget et la gestion financière et comptable sont régis par les
dispositions de la loi organique du budget et les dispositions du présent code »91.
Ainsi, sont insaisissables les comptes bancaires ouverts auprès de la
B.C.T.92 ou autre établissement bancaire, au nom de l’Etat, des collectivités
locales93 et des établissements publics au sens de l’article 39 bis du C.P.C.

90
L’article 8 (nouveau) de la loi n° 1989-9 du 1 Février 1989, telle que modifiée par la loi n°
1996-74 du 29 juillet 1996, « modifiant et complétant la loi n° 89-9 du 1er février 1989 relative
aux participations et entreprises publiques telle que modifiée et complétée par la loi n° 94-102
du 1er août 1994 », J.O.R.T. n° 62 du 2 Août 1996, p. 1638 :
« Sont considérés des entreprises publiques au sens de la présente loi :
- les établissements publics à caractère non administratif et dont la liste est fixée par décret
- les sociétés dont le capital est entièrement détenu par l'Etat
- les sociétés dont le capital est détenu par l'Etat, les collectivités locales, les établissements
publics et les sociétés dont le capital est détenu entièrement par l'Etat à plus de 50% chacun
individuellement ou conjointement.
Sont considérées participations publiques, les participations de l'Etat, des collectivités locales,
des établissements publics et des sociétés dont le capital est entièrement détenu par l'Etat ».

91
Ajouté par l’article 13 de la loi n° 123 du 28 Décembre 2001, « Portant loi de finances pour
l'année 2002 », J.O.R.T. n° 104 du 28 Décembre 2001, p. 4251.
92
L’article 9 de la loi n°2016-35 du 25 Avril 2016, « Portant statuts de la Banque Centrale de
Tunisie » (paru uniquement en langue arabe au J.O.R.T. n° 35 du 29 Avril 2016, p. 1643).
93
En vertu de l’article 132 de la Constitution de la République Tunisienne :
« Les collectivités locales sont dotées de la personnalité juridique, de l’autonomie
administrative et financière. Elles gèrent les intérêts locaux conformément au principe de la
libre administration ».

31
L’indisponibilité, un effet direct de la saisie

Pour l’immunité en droit international, il importe de distinguer deux types


d’immunité, celle de juridiction et celle d’exécution, qui sont généralement
englobées dans la notion plus générale d’« immunité diplomatique ».
L’immunité de juridiction est le privilège reconnu à un État de ne pouvoir
être jugé par une juridiction d’un pays étranger 94. En revanche, l’immunité
d’exécution, en soustrait un État étranger à toute procédure d’exécution et toute
mesure conservatoire sur ses biens lorsqu’un tribunal national a reconnu un droit
à son encontre au profit d’une partie95.
Cette règle a pour fondement le respect de la souveraineté étrangère et la
sauvegarde des biens indispensables à l’exercice de ses activités de puissance
étrangère, à quoi s’ajoutent les impératifs de la courtoisie internationale96.
L’article 23 du C.D.I.P. a consacré cette immunité d’exécution non
seulement aux États étrangers, mais aussi aux personnes morales de droit public
agissant au nom de leur souveraineté, ou pour leur compte en leur qualité
d'autorité publique objet de l’article 19 du C.D.I.P.
En plus des États et les personnes publiques objet de l’article 19 du C.D.I.P.,
d’autres personnes peuvent bénéficier de l’immunité d’exécution.
En effet, le C.D.I.P. n’a pas abordé l’immunité d’exécution de certaines
personnes morales telles que les organisations internationales ou certaines
personnes physiques telles que les souverains ou les chefs d’État. Mais cela
n’empêche que ces personnes jouissent de l’immunité d’exécution par la
ratification de la Tunisie de certaines conventions dans ce sens 97.

94
Cette immunité est prévue par l’article 19 du C.D.I.P.
95
S. GUINCHARD et T. MOUSSA, dir., op. cit., p. 169, n° 152.31.
96
R. PERROT et P. THÉRY, op. cit., p. 255, n° 252.
97
Voir à ce propos :
،"‫ إنقليزية معلق عليها‬- ‫فرنسية‬- ‫ عربية‬:‫ "مجلة القانون الدولي الخاص‬،‫لطفي الشاذلي ومالك الغزواني وعدنان األسود‬
.342 .‫ ص‬،2008 ،‫ مركز الدراسات القانونية والقضائية‬:‫تونس‬

32
L’indisponibilité, un effet direct de la saisie

Concernant les organisations internationales, la Tunisie a ratifié la


Convention sur les Privilèges et Immunités des Institutions Spécialisées adoptée
par l’Assemblée générale des Nations-Unies le 21 novembre 1947 98
. Pour les
souverains et les chefs d’états, les missions diplomatiques et consulaires, la
Tunisie est membre de la Convention de Vienne du 18 Avril 1961 sur les relations
diplomatiques qui est complétée en 1963 par la Convention de Vienne sur les
relations consulaires99.
L’immunité d’exécution des États étrangers est devenue source d’un
important contentieux par le fait que, les États ont commencé à exercer des
activités commerciales ou industrielles, à l’occasion desquelles ils peuvent
devenir débiteurs. Or, lorsqu’il en est ainsi, à partir du moment où l’État étranger
se fait commerçant ou industriel, il cesse de se présenter comme un Souverain

98
Par l’article 1er de la loi n° 58-30 du 10 mars 1958, « portant adhésion de la République
Tunisienne à la Convention sur les Privilèges et Immunités des Institutions Spécialisées adoptée
par l’Assemblée générale des Nations-Unies, le 21 novembre 1947, ainsi que les textes finals
des Annexes tels qu’ils ont été approuvés par les Institutions Spécialisées au 29 décembre
1951 », J.O.R.T. n° 20 du 11 Mars 1958, p. 248.
Dans le deuxième article de ladite loi, le législateur précise que :
« Le champ d'application île la Convention visée à l’article 1er intéresse les Institutions
spécialisées suivantes :
a) Organisation Internationale du Travail ;
b) Organisation des Nations-Unies pour l’Alimentation et l’Agriculture ;
c) Organisation des Nations-Unies pour l’Education, ta Science et la Culture ;
d)Organisation de l’Aviation Civile Internationale ;
e) Fonds Monétaire International ;
f) Banque Internationale pour la Reconstruction et le Développement ;
g) Organisation Mondiale de la Santé ;
h) Union Postale Universelle ;
i) Union Internationale des Télécommunications ;
j) Organisation Météorologique Mondiale ».
99
Par l’article 1er de la loi n° 67-40 du 21 Novembre 1967, « Autorisant l'adhésion de la Tunisie
à la Convention de Vienne sur les relations consulaires et au Protocole y annexé concernant
l'acquisition de la nationalité », J.O.R.T. n° 49 du 21 Novembre 1967, p. 1444.

33
L’indisponibilité, un effet direct de la saisie

exerçant des prérogatives de puissance publique que l’immunité d’exécution a


pour but de sauvegarder.
Dans cette logique, l’article 24 du C.D.I.P. écarte l'immunité d’exécution
lorsque le bien que le créancier envisage de saisir se rattache non à une activité de
souveraineté, mais est affecté, par l'État étranger, à l'activité économique,
commerciale ou civile relevant du droit privé.
Ainsi, les sommes appartenant à un État étranger et affectées à une activité
de souveraineté ou de service public déposées en compte bancaire, courant ou de
dépôt, sont insaisissables.
En fait, les comptes bancaires des missions diplomatiques, qui sont une
composante essentielle de la structure même de l'Etat étranger, sont dotés d’une
protection spécifique contre la saisissabilité dans la Convention des Nations Unies
du 2 décembre 2004 sur les immunités juridictionnelles des États et de leurs biens.
Mais, la Cour de cassation française et sans attendre l'entrée en vigueur de
cette Convention a jugé, que « les missions diplomatiques des États étrangers
bénéficiaient, selon le droit international coutumier, pour le fonctionnement de la
représentation de l'État accréditaire et les besoins de sa mission de souveraineté,
d'une immunité d'exécution autonome, à laquelle il ne peut être renoncé que de
façon expresse et spéciale et cette immunité s'étend, notamment, aux fonds
déposés sur les comptes bancaires de l'ambassade ou de la mission diplomatique
»100.
Dans ce même arrêt, la Cour de cassation a consacré une présomption
d'utilité publique au profit des fonds affectés aux missions diplomatiques, en
jugeant que « les comptes bancaires d'une ambassade sont présumés être affectés
à l'accomplissement des fonctions de la mission diplomatique de sorte qu'il
appartient au créancier qui entend les saisir de rapporter la preuve que ces biens
sont utilisés pour une activité privée ou commerciale ».

100
Cass. 1ère Civ., 28 sept. 2011, n° 09-72.057, D. 2011. Actu. 2412.

34
L’indisponibilité, un effet direct de la saisie

Cette immunité prévue pour les Etats étrangers ainsi que les personnes
morales objet de l'article 19 du C.D.I.P. est facultative étant donné qu’ils peuvent
y renoncer, à condition que cette renonciation soit certaine, express et non
équivoque101.

En sus de l’exclusion de certains comptes de saisissabilité, le législateur


prévoit l’insaisissabilité de certaines sommes, qui sont susceptibles d’entrer en
compte courant.

§ II : L’exclusion de certaines sommes de


saisissabilité

Le compte courant est le contrat par lequel les parties décident de faire
entrer en compte toutes leurs créances et dettes réciproques de manière à ce que
celles-ci soient réglées immédiatement par leur fusion dans un solde disponible
soumis à un régime unitaire 102.
A cet effet, l’article 729 du C.C. dispose que « toutes les créances, résultant
des relations d'affaires de correspondants et qui ne sont pas garanties par des
sûretés légales ou conventionnelles, font, de plein droit, l'objet de remises en
compte courant à moins que, par stipulation générales ou spéciales, il n'ait été
convenu d'en exclure certaines ».
Ainsi, à l’exclusion des créances spécialement créées pour servir de
garantie, les créances inscrites au compte courant perdent leur individualité et leur
spécificité pour ne plus constituer qu’un élément indifférencié du solde103.

101
L’article 25 du C.D.I.P.
102
T. BONNEAU, op. cit., p. 262, n° 339.
103
C. GAVALDA et J. STOUFFLET, op. cit., p. 140, n° 298.

35
L’indisponibilité, un effet direct de la saisie

D’ailleurs, l’article 737 du C.C. prévoit que les créances entrant en compte
cessent d'être soumises aux règles qui leur sont propres tout en limitant cet effet
d’entrée en compte courant à la prescription et d'intérêts.
En matière de saisie du compte courant cette idée d’indivisibilité du compte
courant mène à conclure que le paiement d'une créance insaisissable emportait
extinction de celle-ci, de sorte que disparaissait avec elle l'insaisissabilité qui la
caractérisait104.
Ainsi, le paiement d'une créance insaisissable par l'inscription au crédit du
compte du montant d'un chèque ou d'un virement fait disparaître aussitôt le
bénéfice de l'insaisissabilité. Pour échapper à la saisie, le bénéficiaire de
l'insaisissabilité n'a pas d'autre solution que de toucher son argent en espèces105.
Le législateur tunisien, bien qu’il impose le recours au compte bancaire
pour régulariser maintes transactions, il n’a pas prévu expressément
l’insaisissabilité des sommes provenant des créances insaisissables entrées en
compte courant et ce, contrairement à son homologue français106.
Tout de même, il convient de voir quelles sont les créances insaisissables,
susceptibles d’entrer en compte courant (A), et d’étudier l’incidence de la saisie
sur certaines opérations de banque (B).

A- Les sommes d’origines insaisissables

104
R. PERROT et P. THÉRY, op. cit., p. 229, n° 226.
105
N. CAYROL, J.-CI. Pr. Civ., v° « Saisie-attribution (Comptes Bancaires : Règles
Spécifiques) », op. cit., p. 18, n° 92.
106
Voir à ce propos :
I. CORPART, « Le renforcement de la protection des comptes bancaires contre les saisies et la
mise en place du solde bancaire insaisissable », L.P.A, 13 Mai 2003, n°95 P. 4.
Décret n°92-755 du 31 juillet 1992 instituant de nouvelles règles relatives aux procédures
civiles d'exécution française pour l'application de la loi n° 91-650 du 9 juillet 1991 portant
réforme des procédures civiles d'exécution française.

36
L’indisponibilité, un effet direct de la saisie

Dans diverses dispositions, le législateur exige le règlement de certaines


transactions par virement sur compte bancaire107. D’une autre part, il impose
l’insaisissabilité de certaines de ces sommes sans préciser si cette insaisissabilité
demeure après l’entrée de ces créances en compte courant.

En général, ces sommes issues des créances insaisissables se classent en


deux catégories, sommes à échéance périodique et non périodique.
Les créances insaisissables à échéance périodique sont, le plus souvent,
des créances à caractère alimentaire, certaines sont inscrites au C.P.C.C., d’autres
sont inscrites en dehors dudit code.
Pour les créances insaisissables à échéance périodique déclarées ainsi dans
le C.P.C.C. on trouve d’abord les rémunérations de travail. A ce propos, l’article
141 du C.C.P. impose que les dépenses de traitements et salaires à la charge de
l’Etat, des établissements publics administratifs et des collectivités publiques
locales qui dépassent le montant fixé par arrêté du ministre des finances soient
obligatoirement payés par virement, soit à un compte courant postal, soit à un
compte ouvert dans une banque elle-même titulaire d'un compte courant à la
B.C.T.108.
Les rémunérations de travail sont assujetties à un traitement particulier
qui repose sur un principe d’insaisissabilité partielle en fonction d'un barème
déterminé 109, le C.P.C.C. lui consacre une saisie-arrêt de régime particulier au
chapitre V du titre VIII du C.P.C.C. intitulé « de la saisie-arrêt et de la cession
des sommes dues au titre de rémunération d'un travail effectué pour le compte
d'un employeur ».

107
Y. KNANI, « Droit Commercial : Les effets de commerces, le chèque, le virement et la carte
de paiement », Tunis, C.P.U., 2005, p. 355, n° 332.
108
Le montant est fixé à 130 dinars par l’article 1er de l’arrêté du ministre des finances du 8
Janvier 1986, « portant fixation des montants au-dessus desquels les dépenses publiques sont
obligatoirement payables par virement de comptes », J.O.R.T. n° 5 du 24 Janvier 1986, p. 118.
109
A. LEBORGNE, op. cit., p. 291, n° 611.

37
L’indisponibilité, un effet direct de la saisie

En vertu de ce régime, le législateur prévoit dans l’article 354 du C.P.C.C.


une formule progressive qui détermine à chaque fraction annuelle de salaire une
fraction saisissable sauf si la fraction annuelle de salaire dépasse 3000 dinars.
Dans ce cas, toute la rémunération est saisissable110.
De même, si la saisie est faite pour le recouvrement d’une pension
alimentaire, le terme courant de ladite pension sera prélevé intégralement sur la
portion insaisissable de la rémunération. Quant à la portion saisissable de ladite
rémunération, elle pourra être retenue en sus, soit pour sûreté des termes arriérés
de la pension alimentaire et des frais, soit au profit des créanciers ordinaires,
saisissants ou cessionnaires111.
Dans le calcul du quota saisissable, il doit être tenu compte de tous les
accessoires de la rémunération, à l’exception des indemnités déclarées
insaisissables par la loi, des sommes allouées à titre de remboursement de frais
exposés par le travailleur et des allocutions ou indemnités pour charges de
famille112.
Cette solution concomite avec la définition de la rémunération telle que
donnée par l’article 134-2 du C.T. qui prévoit qu’« il est entendu par
rémunération, ce qui est dû au travailleur en contrepartie du travail réalisé au
profit de son employeur.
La rémunération comprend le salaire de base quel que soit le mode de son
calcul et ses accessoires constitués d'indemnités et d'avantages en espèces ou en
nature quel que soit leur caractère, fixe ou variable, générale ou spécifique, à
l'exception des indemnités ayant le caractère de remboursement de frais ».
A part la rémunération de travail, le C.P.C.C. prévoit dans l’article 331 du
C.P.C.C. qu’ils « ne peuvent être saisies-arrêtées :

110
S. MELLOULI, « Voies d'exécution : Procédures juridiques de recouvrement des
créances », Tunisie : CLE, 1991, p. 153.
111
L’article 355 du C.P.C.C.
112
L’alinéa 2 de l’article 354 du C.P.C.C.

38
L’indisponibilité, un effet direct de la saisie

1) les pensions alimentaires allouées par décision de justice ;


2) les provisions à caractère alimentaire allouées sur des dommages-
intérêts dus en réparation du préjudice résultant d'un délit ou d'un quasi-délit ;
3) les sommes allouées par l'Etat, les établissements publics et les
collectivités locales, à titre de secours individuel, périodique ou éventuel, quels
qu'en soient le chiffre et le bénéficiaire ».
Cette disposition répond au souci de sauvegarder les intérêts du débiteur
qui doit pouvoir compter sur le paiement des sommes qui lui sont dues pour
assurer sa subsistance et son entretien, sans que ce paiement puisse être paralysé
par la saisie de l’un de ses créanciers113.
A ce propos, une difficulté provient de ce que certaines créances sont sans
discussion de nature alimentaire, alors que pour d'autres, la nature alimentaire est
plus discutable.
En fait, le caractère alimentaire d'une créance peut être contenu dans le titre
que le créancier cherche à faire exécuter tel un jugement condamnant le débiteur
au paiement d'une pension alimentaire. Mais si tel n'est pas le cas, il appartient au
créancier d'en apporter la preuve, vu que le principe impose que les biens
du débiteur sont le gage commun de ses créanciers sauf exception express 114.
Cette insaisissabilité des pensions, provisions et sommes à caractère
alimentaires s’explique, et se limite d’ailleurs, par le souci d’assurer la subsistance
du débiteur saisi, vu que cette insaisissabilité n’est pas opposable aux créanciers
qui ont fourni au débiteur saisi des denrées, objets ou prestations nécessaires à sa
subsistance115.

113
R. PERROT et P. THÉRY, op. cit., p. 224, n° 223.
114
A. LEBORGNE, op. cit., p. 289, n° 608.
115
L’alinéa 2 de l’article 331 du C.P.C.C.

39
L’indisponibilité, un effet direct de la saisie

S’ajoutent à la liste dressée par l’article 331 du C.P.C.C. d’autres sommes


d’argent provenant de créances insaisissables à échéance périodique, notamment
les prestations en espèce fournies par les caisses nationales de la sécurité sociale.
A cet effet, l’article 50 de la loi du 14 décembre 1960, relative à l'organisation
des régimes de Sécurité Sociale prévoit que « les prestations en espèces fournies
par la Caisse Nationale sont incessibles et insaisissables, sauf s'il s’agit du
paiement des dettes alimentaires ; dans ce cas, la quotité de la cessation ou la
saisie ne peut dépasser celle autorisée sur les salaires »116.
Cette règle est confirmée par d’autres lois, à savoir, celles relatives au
régime de sécurité sociale pour certaines catégories de travailleurs dans les
secteurs agricoles et non agricole 117, et au régime de sécurité sociale des artistes,
des créateurs et des intellectuels 118.

En plus de ces créances insaisissables à échéance périodique, le législateur


prévoit l’insaisissabilité de certaines créances à échéance non périodique.
Les sommes provenant de créances insaisissables à échéance non
périodique, sont d’abord les sommes dues aux entrepreneurs ou aux
adjudicataires de travaux ayant le caractère de travaux publics.

116
La loi n° 30 du 14 décembre 1960, « relative à l'organisation des régimes de Sécurité Sociale
», J.O.R.T. n° 57 du Mardi 13 -Vendredi 16 Décembre 1960, p. 1602
117
L’article 34 de la loi n° 32 du 12 Mars 2002, « Relative au Régime de Sécurité Sociale pour
Certaines Catégories de Travailleurs dans les Secteurs Agricoles et Non Agricole », J.O.R.T.
n° 22 du 15 Mars 2002, p. 603 :
« Les pensions payables par la Caisse Nationale De Sécurité Sociale sont incessibles et
insaisissables tant qu'il ne s'agit pas de paiement de dettes alimentaires. Dans ce cas, la quotité
de la cession ou de la saisie ne peut dépasser celle autorisée sur les salaires ».
118
L’article 30 de la loi n° 104 du 13 décembre 2002, « Relative au Régime de Sécurité Sociale
des Artistes, des Créateurs et des Intellectuels », J.O.R.T. n° 106 du 31 Décembre 2002, p.
3187 :
« Les pensions servies par la Caisse Nationale De Sécurité Sociale sont incessibles et
insaisissables, tant qu'il ne s'agit pas du paiement de dettes alimentaires et à condition que la
quotité cédée ou saisie ne dépasse pas la limite permise pour la saisie des salaires ».

40
L’indisponibilité, un effet direct de la saisie

Il convient de rappeler qu’aux termes de l’article 140 du C.C.P. sont


obligatoirement payées par virement de compte, les dépenses de loyers,
transports, fournitures, travaux, acquisitions, sous quelque forme que ce soit,
d'immeubles ou d'objets mobiliers, lorsqu'elles dépassent une somme dont le
montant est fixé par arrêté du ministre des finances ou ont pour objet le paiement
par fraction d'une dette globale supérieure à ce chiffre119.
L’article 352 du C.P.C.C. prévoit que les sommes dues aux entrepreneurs
ou aux adjudicataires de travaux ayant le caractère de travaux publics ne
sont saisissables « que sous réserve de la réception desdits travaux et après
prélèvement de toutes sommes pouvant être dues aux ouvriers pour leurs salaires
à raison de ces travaux ou aux fournisseurs des matériaux et autres objets ayant
servi à la confection des ouvrages à payer »120.
En deuxième lieu, l’article 58 de la loi du 21 février 1994, « portant régime
de réparation des préjudices résultant des accidents du travail et des
maladies professionnelles » prévoit que « les rentes constituées en vertu de la
présente loi sont incessibles et insaisissables »121.
Pour finir, le législateur prévoit une insaisissabilité se fondant sur l'intérêt
collectif professionnel, notamment pour les sommes relevant des syndicats
professionnels.
En effet, l’article 245 alinéa 3 du C.T. prévoit qu’ils sont insaisissables les
fonds de caisses des syndicats professionnels spéciales de secours mutuels et de
retraites en ce qui concerne les rentes et les capitaux assurés jusqu'à concurrence

119
Le montant est fixé à 500 dinars par l’article 1er de l’Arrêté Du Ministre Des Finances du 8
Janvier 1986, « Portant fixation des montants au-dessus desquels les dépenses publiques sont
obligatoirement payables par virement de comptes », J.O.R.T. n° 5 du 24 Janvier 1986, p. 118.
120
L’article 352 du C.P.C.C.
121
La loi n° 28 du 21 février 1994, « Portant Régime de Réparation des Préjudices Résultant
des Accidents du Travail et des Maladies Professionnelles », J.O.R.T. n° 15 du 22 Février 1994,
p. 308.

41
L’indisponibilité, un effet direct de la saisie

des taux de rentes et des capitaux assurés par les sociétés mutualistes. Ainsi, les
comptes courants détenus par les syndicats professionnels sont a priori
saisissables sauf s’ils sont alimentés par les fonds de caisse objet de l’article 245
du C.T122.

Outre ces sommes insaisissables, le compte courant peut être le support de


certaines opérations de banque qu’il convient d’étudier.

B- L’incidence de la saisie sur certaines


opérations de banque

Le compte courant est le support de certaines opérations de banques, ainsi


il importe d’étudier l’incidence de la saisie sur ces dernières. Les opérations qu’on

122
L’article 245 du C.T. :
« Les syndicats professionnels peuvent affecter une partie de leurs ressources à la création
d'habitations à bon marché et à l'acquisition de terrains pour centres de repos, loisirs, éducation
physique ou hygiène.
Ils peuvent librement créer et administrer des offices de renseignements pour les offres et
demandes de travail, créer, administrer ou subventionner des œuvres de prévoyance,
laboratoires, champs d'expériences, œuvres d'éducation scientifique, agricole ou sociale, de
formation professionnelle, cours et publications intéressant leurs activités.
Les immeubles et objets mobiliers nécessaires à leurs réunions, à leurs bibliothèques et à leurs
cours, sont insaisissables. Il en est de même des fonds de leurs caisses spéciales de secours
mutuels et de retraites en ce qui concerne les rentes et les capitaux assurés jusqu'à concurrence
des taux de rentes et des capitaux assurés par les sociétés mutualistes selon la législation en
vigueur ».

42
L’indisponibilité, un effet direct de la saisie

va étudier sont successivement, l’ouverture de crédit, le gage espèce, le crédit


documentaire et la garantie à première demande.

Généralement, les banques dans le cadre d’une convention de compte


courant autorisent leurs clients à rendre leurs comptes débiteurs pour leur
permettre de faire face à l’insuffisance de leur trésorerie ; il s’agit d’une ouverture
de crédit.
L’ouverture de crédit, aux termes de l’article 705 du C.C. « a pour objet
de mettre directement ou indirectement à la disposition du bénéficiaire des
moyens de paiement à concurrence d'une certaine somme d'argent ».
L'ouverture de crédit en compte est un contrat Intuitu personæ par lequel
un établissement de crédit accorde pour une durée, déterminée ou non, un crédit
à son client, que ce soit sous forme d'autorisation de découvert ou de versement
de fonds123.
En effet, l'ouverture de crédit est une notion générique, qui renvoie à
différentes espèces de contrats : prêt de consommation, autorisation de découvert
en compte, crédit d'escompte d'une lettre de change, etc. 124. Mais, peu importe la
forme que prend l’ouverture de crédit, la question qui se pose est de savoir si cette
créance, que détient le débiteur saisi contre son banquier, peut constituer l’assiette
d’une saisie ?
En fait, l’ouverture de crédit ne se traduit par aucune écriture de crédit au
compte courant du débiteur saisi ; elle « ne constitue qu’une promesse de prêt »
et ne donne donc naissance à un prêt qu'à concurrence des fonds effectivement
utilisés par le client125.

123
A. LEBORGNE, op. cit., p. 515, n° 1126.
124
N. CAYROL, J.-CI. Voies d’Exécution, V° Saisie-Attribution, (Objet de la saisie), à jour au
14 Janvier 2013, fasc. 2242, p. 7, n° 24.
125
Dans son arrêt n° 00-19693 du 14 Novembre 2004, la Cour de cassation française a considéré
que « l'ouverture de crédit en compte courant, à concurrence de sa partie non utilisée, ne
constitue qu'une promesse de prêt à une personne dénommée ».

43
L’indisponibilité, un effet direct de la saisie

Ainsi, le découvert serait porté dans le différé du compte et ne devient


article qu’au fur et à mesure de son utilisation par le titulaire, et en devenant article
du compte il sera porté au débit et non au crédit du compte. Or, l’article 739 du
C.C. prévoit que la saisie est possible sur la « position créditrice » du compte
courant126.
De plus, l’insaisissabilité des ouvertures de crédit se justifie par l'intuitu
personae attaché au droit de créance, et peut aussi s'expliquer par le caractère
réciproque des obligations qui naissent de la convention. En effet, cette dernière
fait entrer une créance dans le patrimoine du client de la banque mais elle met en
même temps à sa charge une obligation de remboursement127.
En définitive, il est difficile de concevoir qu’un créancier pourrait,
indirectement, contraindre son débiteur à s'endetter en saisissant la fraction non
utilisée d'une ouverture de crédit128.
De par cet argumentaire, il convient de conclure que l’ouverture de crédit
est insaisissable. Mais qu’en est-il du gage-espèce ?
Qu’elle apparaisse sous la forme de monnaie fiduciaire ou de monnaie
scripturale, la somme d’argent, comme tout bien, a vocation à constituer l’assiette
de suretés contractuelles129. D’ailleurs, la pratique bancaire utilise, sous diverses
dénominations (provision, compte de garantie, compte bloqué), le nantissement
d'espèces, ou gage-espèces afin de garantir des crédits accordés130.

126
Les sommes promises par la banque dans le cadre de l’ouverture de crédit et qui n’ont pas
été utilisé par le client restent dans le patrimoine de la banque et ne sauraient être saisissable
dans le patrimoine du client.
127
A. LEBORGNE, op. cit., p. 515 n° 1126.
128
Ibid., p. 515 n° 1126.
129
Voir à ce propos : D. FAZAA, « Le nantissement des créances et des comptes », Mémoire
pour le D.E.A. en Droit des Contrats et des Investissements, Faculté de Droit et des Sciences
Politiques de Tunis, 1999/2000.
Voir à ce propos : M. CABRILLAC, « Les sûretés conventionnelles sur l’argent » »,
130

Mélanges offerts à J. DERRUPPÉ, Joly et Litec, 1991, p. 333.

44
L’indisponibilité, un effet direct de la saisie

Ainsi, la somme versée en gage sur le compte reçoit une affectation


spéciale, elle constitue ainsi un privilège pour la banque créancière et n'est donc
pas une créance disponible. A cet effet, l’article 739 du C.C. prévoit que la
« saisie-arrêt ne peut préjudicier aux droits que le correspondant du débiteur
saisi peut avoir sur cette position créditrice, en vertu d'une stipulation retirant à
ce dernier la libre disposition à tout moment du montant de cette position ». De
ce fait, les sommes versées en gage espèce sur un compte courant sont
insaisissables et ce, par application aux termes de l’article 739 du C.C.

Pour le crédit-documentaire, ou lettre de crédit ou encore CREDOC, régi


par les articles 720 à 727 du C.C., est selon l’article 720 du C.C. « un crédit ouvert
par une banque à la demande d'un donneur d'ordre en faveur d'un correspondant
de celui-ci et garanti par la possession des documents représentatifs de
marchandises en cours de transport ou destinées à être transportées »131.
En général, la convention de crédit documentaire est une opération
financière spécifique qui se déroule dans un cadre international et qui met en scène
plusieurs acteurs. D’abord, le client acheteur ou importateur appelé « le donneur
d'ordre » ; ensuite, la banque d'un client importateur ou acheteur dite « émettrice
» ; puis, un bénéficiaire ou l'exportateur ou le vendeur ; finalement, la banque du
vendeur, dite « banque intermédiaire » ou « confirmatrice ».
Par le crédit documentaire, la banque intermédiaire remet à la banque
émettrice des documents qui prouvent que les prestations ont été effectuées. Une

131
Outre les dispositions du code de commerce, le crédit documentaire est régi par les règles et
usances internationales.
En fait, la pratique a été amené, dans un souci d’unification, à définir un certain nombre de
règles qui ont été codifiées sous l’égide de la Chambre de Commerce International. Ce sont les
« Règles et Usances uniformes relatives aux crédits documentaires » qui définissent les
principes applicables en la matière. Bien que d’origine conventionnelle, ces dispositions
s’imposent aux parties qui en décident.
J.-P. MATTOUT, « Droit bancaire international », 3ème éd., Paris : la Revue "Banque" éditeur.,
2004, p. 312, n° 258 et 269.

45
L’indisponibilité, un effet direct de la saisie

fois ces documents sont remis à la banque émettrice, cette dernière paie la banque
intermédiaire, qui elle-même paie le bénéficiaire.
La jurisprudence française a été amenée à préciser les effets de la saisie
pratiquée entre les mains de la banque émettrice d’un crédit documentaire au
préjudice de l’exportateur étranger bénéficiaire. Cette dernière distingue selon que
la saisie est initiée par le donneur d’ordre acheteur des marchandises ou par un
tiers.
En fait, lorsque la saisie a émané du donneur d’ordre, la Cour de cassation
française a censuré une Cour d’appel qui maintenait une saisie-arrêt pratiquée
entre les mains de la banque émettrice du crédit documentaire alors que, selon la
Cour de cassation, cette banque « avait reçu les documents conformes du vendeur
et s'était engagée directement et irrévocablement à son égard d'effectuer le
payement »132.
En revanche, si la saisie est initiée par un tiers à la convention de crédit
documentaire, la saisie entre les mains du banquier émetteur d’un crédit
documentaire doit être admise133. En fait, la réalisation de l’engagement de la
banque est soumise à la remise des documents convenus, le bénéficiaire d’un
crédit documentaire dispose sur le banquier d’une créance conditionnelle jusqu’à
la remise desdits documents à ce dernier. Cette créance conditionnelle est
saisissable par le créancier du bénéficiaire, dès lors que ce créancier n’est pas le
donneur d’ordre134.
Bien plus que cela, certains auteurs estiment que le créancier du bénéficiaire
peut indifféremment, voir simultanément, procéder à une saisie entre les mains
des deux banques à savoir celle du donneur d’ordre et celle du bénéficiaire. En
fait, aux termes de l’article 10 b des Règles et Usances Uniformes en matière de

132
Cass. Com., 14 Octobre 1981, n° 80-12.336,
133
Cass. Com., 5 Juillet 1983, n° 81-12371, Bull. Civ. IV n°. 202, p. 177.
134
J.-M. DELLECI, op. cit., p. 216, n° 357 bis.

46
L’indisponibilité, un effet direct de la saisie

Crédit Documentaire, « l’engagement du banquier confirmateur s’ajoute à celui


de la banque émettrice et que le bénéficiaire jouira ainsi de deux engagements de
banque rigoureusement identiques et autonomes l’un par rapport à l’autre »135.

Lesdites solutions en matière de crédit documentaire « paraissent


également applicables aux garanties autonomes dont les effets juridiques, quant
à la portée de l’engagement de la banque, sont analogues »136.
En fait, la garantie autonome dite aussi la garantie à première demande,
« est un engagement par lequel le garant, à la requête irrévocable d’un donneur
d’ordre, accepte de payer en qualité de débiteur principal, sur simple demande,
une somme d’argent à un bénéficiaire désigné, dans les termes et conditions
stipulées dans la garantie, en renonçant par avance à exercer tout contrôle
externe sur les conditions de mise en jeu de son engagement »137.
En droit tunisien, les textes qui régissent la garantie indépendante utilisent
le terme « cautionnement » pour se référer à la garantie à première demande.
Pourtant l’intention du législateur est claire dans l’article 54 du décret du 17
Décembre 2002, portant réglementation des marchés publics, qui dispose que « le
paiement est fait à la première demande écrite » et la caution solidaire ne peut
exciper d’aucun moyen pour échapper à son obligation de paiement138.
Ainsi, bien que les éléments de la garantie autonome, à savoir le paiement
à première demande, l’interdiction de différer le paiement et l’impossibilité de
contestation soient réunies, les termes employés manifestent la confusion dans
l’esprit des rédacteurs de l’article 54 du décret susmentionné139.

135
J.-P. MATTOUT, p. 312, n° 258 et 269.
136
J.-M. DELLECI, op. cit., p. 216, n° 357 bis.
137
J.-P. MATTOUT, p. 252, n° 203.
138
Décret n° 3158 du 17 Décembre 2012, « Portant réglementation des marchés publics »,
J.O.R.T. n° 103 du 20 Décembre 2002, p. 3036.
139
T. BEN NASR, « Droit bancaire tunisien », Tunis, [L’auteur], 2009, p. 124, n°180.

47
L’indisponibilité, un effet direct de la saisie

Le recours au terme « caution » pour désigner la garantie à première


demande dans le décret de 2002 avait commencé depuis la loi du 20 Juillet 1985
et le décret du22 Avril 1989, qui employait le même terme140.
En effet, l’article 19 de la loi du 20 Juillet 1985 relative aux marchés public
qui est toujours en vigueur dispose que « le cautionnement ainsi que la retenue
de garantie peuvent être remplacés par une garantie bancaire à première
demande »141.

En conclusion, il convient de dire que les sommes qui n’appartiennent pas


au débiteur, peu importe qu’ils reviennent à la banque ou au tiers, sont
insaisissables, de ce fait ils ne sont pas touchés par l’effet d’indisponibilité. Pour
les sommes affectées par l’indisponibilité, il importe de se demander sur la nature
de cette dernière.

140
Décret n° 442 du 22 Avril 1989, « Relatif aux marchés publics », J.O.R.T. n° 30 du 28 Avril
1989, p. 774.
141
La loi n° 73 du 20 Juillet 1985, « Relative aux marchés des établissements publics à caractère
Industriel et commercial et des sociétés dans lesquelles l'Etat ou les collectivités publiques
locales détiennent directement ou indirectement une participation au capital », J.O.R.T. n° 56
du 26-30 Juillet 1985, p. 961.

48
L’indisponibilité, un effet direct de la saisie

Section II : La nature de l’indisponibilité

Après avoir déterminé le domaine de la saisie du compte courant dans la


section précédente, l’étude de la nature de l’indisponibilité consiste à étudier
l’étendue de cette dernière, en tenant compte des solde et compte saisissables, et
à qui elle profite.
A cet effet, il convient d’abord d’étudier la nature de l’indisponibilité
consacré par le C.P.C.C. (§I) pour pouvoir en donner une appréciation (§II).

§ I : La solution du C.P.C.C.

Etudier la solution du Code de Procédure Civile et Commerciale, quant à la


nature de l’indisponibilité, revient à se demander non seulement sur l’étendue de
cette dernière (A) mais aussi sur à qui elle profite (B).

A- L’étendue de l’indisponibilité

De prime abord, il convient de rappeler que si l’indisponibilité est totale,


la banque doit étendre les effets de la saisie-arrêt à tous les soldes disponibles du
saisi, même si son montant dépasse le montant de créance cause de la saisie. Par
contre, si l’indisponibilité est partielle elle va se limiter au montant égal à la
créance cause de la saisie, et le saisi peut disposer librement de l’excédent142.
A cet effet, le C.P.C.C. consacrait le principe de l’indisponibilité totale des
comptes saisis, notamment dans son article 333 ancien (avant la réforme du 1 er
Septembre 1986) qui démontre que « le législateur a bel et bien visé sans

142
A. JOLY, « Procédure civile et voies d’exécution, T. 2 : Voies d’exécution », Paris : Sirey,
1969, p. 69, § 361.

49
L’indisponibilité, un effet direct de la saisie

ambiguïté l’indisponibilité totale en disposant que la saisie-arrêt a pour effet de


bloquer aux mains du tiers saisi la totalité des sommes dues au débiteur saisi »143.
De plus, l’article 347 § 2 est très explicite à ce propos et ne laisse pas de
doute quant à la totalité de l’indisponibilité de la saisie en prévoyant que
« toutefois, les saisies-arrêts ou oppositions pratiquées après un jugement
validant une précédente saisie et devenu exécutoire, n'ont d'effet que sur la partie
des sommes saisies-arrêtées qui dépasse les créances des saisissants ou
opposants antérieurs » 144.
Enfin, l’article 344 du C.P.C.C. qui, en autorisant le cantonnement,
implique que l’indisponibilité est totale.
Cette indisponibilité totale est fâcheuse pour le saisi et risque d’entraîner
un gaspillage de crédit surtout lorsque la créance cause de la saisie est d’un
montant très inférieur au montant d la créance saisie-arrêtée145.
Un commerçant ou un industriel qui dispose d’un compte bien fourni en
banque, peut voir tous ses comptes bloqués à la suite d’une saisie-arrêt qui
pourrait avoir pour cause, une créance insignifiante par rapport à la créance objet
de la saisie146.

143
Voir à ce propos :
:21 .‫ ص‬،1984 ‫ مارس‬/‫ جانفي‬،2 ‫ عدد‬،‫ مجلّة المحاماة‬،"‫ "العقلة التوقيفية على الحساب الجاري‬،‫حمدان غيلب‬
ّ ‫ بصيغة العموم إذ ينص على‬.‫ت‬.‫م‬.‫م‬.‫ من م‬333 ‫"ورد الفصل‬
‫ موقوفة‬... ‫ "جعل جملة المبالغ المالية‬...‫أن العقلة تهدف إلى‬
ّ
‫) يؤكد قصد المشرع وهو تسليط أثر العقلة على جميع المبالغ دون حصر‬Totalité( ‫"فإن لفظ جملة‬...‫يده‬ ‫بيد المعقول تحت‬
".‫أو تحديد‬
144
A. BACHA, op. cit., p. 40.
145
R. PERROT, op. cit., p. 186
146
S. MELLOULI, op. cit., p. 148.

50
L’indisponibilité, un effet direct de la saisie

Ainsi, certains considèrent que l’indisponibilité totale va contre la logique


et le bon sens car le magistrat va statuer ‘ultra petita’ et devenir plus royaliste que
le roi147.
L’étendue de l’indisponibilité a fait l’objet de plusieurs séminaires au sein
du ministère de la justice. Mais le législateur a retenu le principe de
l’indisponibilité totale vu que le premier saisissant est exposé au risque de
concours avec des saisies ultérieures surtout que le débiteur saisi dispose de la
possibilité de cantonner la saisie au sens de l’article 334 pour obtenir mainlevée
partielle de son compte148.
Mais, en 1986, et avec la promulgation de la loi n° 86-87 du 1er Septembre
1986 portant modification de certaines dispositions du code de procédure civile
et commerciale, le législateur a pris une position opposée à celle d’avant149.
L’article 330 (nouveau) du C.P.C.C. a consacré le principe de
l’indisponibilité partielle en précisant que le créancier saisissant ne peut plus

147
Voir à ce propos :
‫ ما هي العراقيل والصعوبات المتسببة عن القانون‬:‫ بعض خواطر عن قانون المرافعات المدنية والتجارية‬،‫البشير زهرة‬
:21 .‫ ص‬،1985 ‫ نوفمبر‬،9 ‫ عدد‬،.‫ت‬.‫ ق‬،"‫الجاري به العمل والمتعلق بالعقل التوقيفية‬
‫ ألن الحاكم حكم بأكثر مما طلب منه بل صار بموجب هذا القانون ملوكيّا‬.‫"يظهر لي أن هذا العمل مخالف للمنطق والمعقول‬
".‫أكثر من الملك‬
148
Voir à ce propos :
‫ بالمعهد األعلى‬2002 ‫ نوفمبر‬28 ‫ مداخلة ألقيت بمناسبة دورة دراسيّة انتظمت يوم‬،"‫" العقلة التوقيفية‬،‫الباشا البجار‬
:13 .‫ ص‬،)‫ (غير منشور‬،"‫للقضاء حول موضوع "العقل حسب التنقيحات الحديثة‬
‫ مبدأ كلية العقلة بمعنى أن العقلة تجري على كامل األموال‬1986 ‫" كان المشرع التونسي يتبنى إلى حدود سبتمبر‬
‫ وعقدت عدة ندوات بوزارة العدل تناولت هذا الموضوع لكن المشرع بقي‬.‫التي يملكها المعقول عليه ولو تجاوزت مبلغ الدين‬
.‫محافظا على هذا التوجه باعتبار أن دين العاقل وإن كان في حدود مبلغ معين ّإال أنه من الممكن أن تظهر عقل أخرى موالية‬
‫ من‬334 ‫وقالوا في األخير أنه بإمكان المدين المعقول عليه أن يؤمن مبلغ الدين بصندوق األمائن والودائع طبق أحكام الفصل‬
".‫ ويتخلص من العقلة‬.‫ت‬.‫م‬.‫م‬.‫م‬
149
Loi n° 86-87 du 1er Septembre 1986, « portant modification de certaines dispositions du
Code de Procédure Civile et Commerciale », J.O.R.T. n° 49 du 9-12 Septembre 1986, p. 980.

51
L’indisponibilité, un effet direct de la saisie

saisir-arrêter que jusqu’à concurrence du montant de sa créance 150. La créance


saisie-arrêtée doit être dans la limite de la créance cause de la saisie151.
Le montant de la créance cause de la saisie est le montant indiqué dans
l’exploit de la saisie-arrêt . En fait, l’article 332 du C.P.C.C. dispose que le
montant de la créance cause de la saisie doit être mentionné dans l’exploit sous
peine de nullité de ce dernier. Cette mention a pour but de déterminer avec
précision l’étendue de l’indisponibilité.

Après avoir déterminé si l’indisponibilité frappant le compte courant est


totale ou partielle il convient de voir à qui elle profite, autrement dit si elle est
relative ou absolue ?

B- Le bénéficiaire de l’indisponibilité

L’indisponibilité est dite absolue si elle profite à tout intéressé, notamment,


si elle résulte d’un premier exploit, elle peut être invoquée par un créancier
pratiquant une opposition postérieure. Par contre, l’indisponibilité est dite
relative lorsqu’elle profite seulement au saisissant qui l’a pratiquée et que les
actes de dispositions ne lui sont pas opposables152.

150
S. MELLOULI, op. cit., p. 146.
151
Voir à ce propos :
:109 .‫ ص‬،3 ‫ عدد‬،1986 ‫ أوت‬29 ‫مداوالت مجلس النواب‬
‫"إن العقلة التوقيفية التي تجرى تحت يد الغير على مكاسب المدين ينبغي أن يقع اجراؤها في حدود ما يفي بمبلغ الدين المجراة‬
‫من أجله العقلة وهكذا يبقى المدين يتصرف في بقية أمواله ريثما تقول المحكمة قولتها في شأن تلك العقلة المضروبة على بقية‬
‫امواله وفي هذا اإلجراء ضمان للدائن في خصوص دينه وفى نفس الوقت ادخال مرونة أكثر على العمل القضائي الذي ليس‬
."‫غايته تجميد أموال الناس بدون مبرر‬
A. JAUFFRET, « Manuel de Procédure Civile et voies d’exécution », Paris : Sirey, 1969, p.
152

233, § 409.

52
L’indisponibilité, un effet direct de la saisie

Généralement, compte tenu de la longueur de la procédure de la saisie-arrêt,


lorsqu’une saisie-arrêt a été pratiquée par un créancier elle peut inciter d’autres à
prendre des initiatives analogues pour réclamer leur part sur le solde provisoire.
Véritablement, les créanciers manifestés ultérieurement à la saisie initiale
n’ont pas le droit de pratiquer une deuxième saisie-arrêt indépendante de et ce par
application au principe général en procédures civile d’exécution qui dispose que
« saisie sur saisie ne vaut »153.
Les créanciers subséquents vont alors faire opposition sur les deniers
arrêtés. A ce propos, l’article 313 du C.P.C.C. dispose que « les créanciers ayant
droit d'exécution forcée ne peuvent, relativement aux biens du débiteur faisant
déjà l'objet d'une saisie-exécution ou d'une saisie-arrêt, que faire opposition sur
le produit de la vente ou les deniers saisis-arrêtés ».
Mais, comme la saisie ne s’étend pas à tout le solde saisi mais juste à la
partie égale à la créance cause de la saisie, d’autres saisies-arrêts ou oppositions
sur le même compte peuvent être pratiquées. On sait d’ailleurs que le tiers saisi
est tenu de comprendre dans sa déclaration toutes les saisies-arrêts déjà formées
entre ses mains154.
Il convient de se demander comment résoudre ce concours entre le premier
créancier saisissant et les créanciers ultérieurs qui vont faire opposition sur la
même somme.
La situation du premier saisissant varie selon qu’il détient un jugement
revêtu de la formule exécutoire validant la saisie-arrêt ou pas.
Le créancier saisissant qui a signifié l’exploit de saisie-arrêt au tiers
saisi, sans disposer d’un jugement validant sa saisie-arrêt ne peut prétendre à
aucune préférence à l’égard des autres créanciers opposants qui se présenteront

153
Voir à ce propos :
،2013 ،‫ مجمع األطرش للكتاب المختص‬:‫ تونس‬،2 .‫ ط‬،"‫صة‬
ّ ‫ "طرق التنفيذ واستخالص الديون العامة والخا‬،‫علي كحلون‬
.109 .‫ص‬
154
L’article 337 du C.P.C.C. tel que modifié par la loi n° 2002-82 du 3 août 2002.

53
L’indisponibilité, un effet direct de la saisie

après lui pour saisir. En un mot, tous les créanciers saisissants quelle que soit la
date de leur saisie et à plus forte raison de leur titre de créance, viendront en
concours155.
Ainsi, selon l’article 314 du C.P.C.C, les opposants vont « participer à la
distribution du produit de la vente ou des deniers saisis arrêtés » et « la saisie ne
peut être annulée et mainlevée totale ou partielle ne peut en être donnée ou
ordonnée que du consentement des créanciers opposants ou en vertu d'une
décision de justice qui leur soit opposable ».
Le solde saisi arrêté sera distribué entre les différents créanciers au prorata
de leurs créances, à moins, bien entendu, que certains créanciers puissent invoquer
en leur faveur une cause de préférences et ce, conformément à l’article 470 du
C.P.C.C.156.
Cette absence de privilège au premier saisissant vis-à-vis des saisies-arrêts
ultérieures est l’application de la règle générale de droit inscrite à l’article 192 du
C.D.R. qui édicte que « les biens du débiteur sont le gage commun de ses
créanciers et le prix s'en distribue entre eux par contribution, à moins qu'il n'y ait
entre les créanciers des causes légitimes de préférence ». Le législateur précise
dans l’article 193 du C.D.R. que « les causes légitimes de préférence sont les
privilèges, le nantissement et le droit de rétention ».

155
Voir à ce propos :
:109 .‫ ص‬،‫ مرجع سابق الذكر‬،‫علي كحلون‬
‫ إجماال على مبدأ أفضلية الدّائن العاقل بمعنى أن يج ّمد المال المعقول‬،‫ بما في ذلك العقلة التوقيفية‬،‫"ال تقوم العقل التحفظية‬
"‫على ذمة الدّائن العاقل فقط دون بقية الدائنين‬
156
Voir à ce propos :
:203 .‫ ص‬،2005 .‫ت‬.‫م‬.‫ ن‬،2005 ‫ ماي‬25 ‫ المؤرخ في‬،8746 ‫قرار تعقيبي مدني عددـ‬
‫ أن العقل الجديدة التي قد تجزى على مكاسب معقولة مع عدم العلم بالعقلة االولى تقوم مقام‬.‫ت‬.‫م‬.‫م‬.‫ من م‬315 ‫"نص الفصل‬
‫االعتراض الذي ينشأ للدائن العاقل الحق في التحاصص بمبلغ دينه مع بقية الدائنين العاقلين والمشاركة في توزيع المال‬
".‫ت‬.‫م‬.‫م‬.‫ من م‬463‫ و‬347 ‫المعقول سواء كان كافيا ام ال وفق مقتضيات الفصلين‬

54
L’indisponibilité, un effet direct de la saisie

En conclusion, le saisissant n’est à l’abri d’un éventuel concours qu’après


l’obtention d’un jugement validant la saisie-arrêt revêtue de la formule
exécutoire157.
Dans l'ensemble, le C.P.C.C. consacre une indisponibilité partielle sur le
solde saisi du compte courant et le saisissant ne dispose d’aucun privilège sur ce
dernier. Cette position suscite quelques critiques.

§ II : Appréciation de la solution du C.P.C.C.

Consacrer une indisponibilité à la fois partielle et absolue est une solution


peu adéquate avec les mécanismes du compte courant (A). Plus encore, le principe
de l’indisponibilité partielle est à remettre en cause pour certains auteurs (B).

A- L’inadéquation de l’indisponibilité
partielle avec les mécanismes du compte courant

La réforme de 1986 qui consacre le principe de l’indisponibilité partielle


est à prendre du bon côté. Mais, il manquait à cette position de faire bénéficier le
premier saisissant d’un effet attributif pour éviter le concours avec les saisissants
ultérieurs et de prendre en considération les mécanismes de fonctionnement du
compte courant.
En fait, la spécificité de la saisie du compte courant réside dans le fait que
son objet ne peut pas être déterminé avec précision au moment de la signification
de l’acte de saisie158. Et ce, vu que le compte courant est alimenté « par voie de
remises réciproques et enchevêtrées »159.

157
Voir infra (La nature du jugement prononçant la validité de la saisie-arrêt).
158
S. GUINCHARD et T. MOUSSA, dir., op. cit., p. 985 n° 923.12.
159
L’article 728 du C.C.

55
L’indisponibilité, un effet direct de la saisie

De ce fait, la détermination définitive du montant de la créance saisie-


arrêtée, dans le cadre d’une saisie de compte courant, ne peut pas être immédiate.
Et ce peu importent les moyens techniques dont dispose le banquier tiers-saisi.
Car, en raison du mécanisme des comptes bancaires, un délai entre une opération
bancaire et son inscription en compte est inévitable160.
Ainsi, le solde existant au jour de la saisie est susceptible d'être affecté par
la prise en compte d'opérations en cours et seul le dénouement de ces opérations
en cours permettra de savoir exactement le solde final du compte saisi161.
En attendant l’apurement des opérations en cours, le débiteur serait en droit
de profiter du surplus, et si le solde de ces opérations devait être affecté au débit
du compte, « le débiteur ayant disposé de l'excédent, le solde négatif ne pourrait
être imputé que sur le montant pour lequel la saisie a été pratiquée. Autrement
dit, les opérations de régularisation se feraient toujours et systématiquement au
détriment du créancier saisissant »162.
On peut dire ainsi, qu’admettre l’indisponibilité partielle avant que la
régularisation des opérations affectant le compte courant ne soit opérée ne valorise
pas les droits du créancier.
D’ailleurs, le droit français qui, avec la réforme de 1991163, a opté pour la
saisie attribution, prévoit que l’indisponibilité en droit commun n’est que partielle
puisqu'elle est limitée au montant de la créance, cause de la saisi 164.
Sauf que, lorsque la saisie est effectuée entre les mains d'un établissement
bancaire, le législateur français a ajusté le principe d'indisponibilité pour tenir

160
L. MINIATO, « Voies d’exécution et procédures de distribution », Paris : Montchrestien,
2010, p.150 n° 199.
161
Voir infra le IIème Chapitre de la IIème Partie (La régularisation des opérations en cours).
162
R. PERROT et P. THÉRY, op. cit., p. 453 n° 448.
163
La loi n° 91-650 du 9 juillet 1991 portant réforme des procédures civiles d'exécution.
164
« L'article L. 211-2 du Code des procédures civiles d'exécution dispose en effet que l'acte
de saisie emporte attribution immédiate de la créance saisie disponible « à concurrence des
sommes pour lesquelles elle est pratiquée ».

56
L’indisponibilité, un effet direct de la saisie

compte de la régularisation des opérations en cours et préserver les intérêts du


saisissant comme du débiteur165.
A cet effet, l’article 47 de la loi n° 91-650 du 9 juillet 1991 prévoit que
l’indisponibilité est totale et qu’il n’y a aucune corrélation entre le montant des
causes de la saisie et le montant des sommes indisponibles166.
Tout de même, il convient de préciser que cette indisponibilité totale des
comptes saisis en droit français est temporaire et « limitée par sa finalité. »167.
Cette finalité est de liquider les opérations initiées avant l’acte de saisie, une fois
les opérations liquidées l’indisponibilité va se limiter au montant égal à la créance
cause de la saisie.
En fait, l’indisponibilité dans la saisie attribution consacrée en droit
français, « n'est qu'une mesure de sauvegarde temporaire rendue nécessaire pour
une raison qui est spécifique à la technique bancaire et à la nécessité d'attendre
l'issue des opérations de régularisation pour connaître de façon précise le
montant de la créance attribuée au créancier » 168.
D’ailleurs, certains considèrent que « la solution de l’indisponibilité de la
totalité du compte saisi semble donc préférable car elle répond mieux aux intérêts
du créancier saisissant, elle satisfait davantage la cohérence de la procédure et
se concilie parfaitement avec les mécanismes du compte »169.

De ce fait, l’indisponibilité totale parait être la solution à retenir en matière


de compte courant voire même pour toutes les voies d’exécution.

165
A. LEBORGNE, op. cit., p. 519, n° 1134.
166
Voir à ce propos :
H. CROZE, « Saisie-attribution bancaire : Les mystères de l’article 47 de la loi du 9 Juillet
1991 », LPA, 6 Janvier 1993 n° 3, p. 71.
167
C. MOULY, « La saisie des comptes bancaires », LPA, 26 Mai 1993 n° 63, p. 10, n°32.
168
R. PERROT et P. THÉRY, op. cit., p. 453 n° 448.
169
J.-M. CALENDINI, « De quelques problèmes liés à la saisie des comptes bancaires », LPA,
26 Février 1992 n° 25, p. 14.

57
L’indisponibilité, un effet direct de la saisie

B- La remise en cause du principe de


l’indisponibilité partielle

Pour certains auteurs, l’indisponibilité totale est la solution à retenir en


général. Ils estiment que l’indisponibilité totale est une menace que le législateur
a voulu faire peser sur la tête de celui-ci afin de l’inciter à payer volontairement
et ponctuellement ses dettes170.
En plus, l'indisponibilité totale de l'ensemble des comptes n'est gênante que
pour les débiteurs qui ont de l'argent en banque. Dès lors, quoi de plus utile et de
plus légitime que le blocage des sommes saisies ?
D’autant plus que, « la loi se préoccupe davantage des intérêts du créancier
que de ceux du débiteur, parce que sur l'inviolabilité des premiers reposent la
sécurité et la confiance du commerce »171.
En outre, si la créance cause de la saisie est minime, quoi de plus facile pour
le débiteur saisi que d'obtenir mainlevée en la payant ? Plus la différence sera
grande entre les causes de la saisie et les sommes saisies, plus on aura de crédit
pour se procurer de quoi désintéresser le saisissant.

Après avoir étudié le domaine de la saisie du compte courant et la nature de


l’indisponibilité qui affecte son objet, il convient de voir quels sont les effets de
cette dernière.

170
N. CAYROL, J.-CI. Pr. Civ., v° « Saisie-attribution (Comptes Bancaires : Règles
Spécifiques) », op. cit., p. 17, n° 78.
171
G.-L.-J. CARRÉ, « Lois de la procédure civile et administrative. T. 4 : Procédure civile »,
4ème éd., Paris : Cosse et Marchal, 1862, p. 605.

58
L’indisponibilité, un effet direct de la saisie

Chapitre II : Les effets de l’indisponibilité

Après avoir étudié l’étendue de l’indisponibilité, il convient de voir quel est


son effet sur le compte courant. En effet, cette dernière n’est pas de nature à
affecter le fonctionnement du compte courant (Section I), mais tout de même, elle
impose au banquier de respecter certaines obligations (Section II).

Section I : Le fonctionnement ultérieur du


compte

Aux termes de l’article 732 du C.C., la saisie en elle-même n’est pas de


nature à clôturer le compte courant (§I), sauf que cette dernière peut être une cause
de dégradation financière suite à laquelle le législateur prévoit la clôture du
compte courant (§II).

§ I : La saisie ne clôture pas le compte

Etant donné que les effets de la saisie sont limités au montant de la créance
qui en est la cause, l’indisponibilité du compte sur lequel figurent les fonds saisis
se trouve limitée à ces fonds (A). À ce propos, on constate une pratique bancaire
qui vaut l’étude (B).

A- Le compte courant saisi n’est pas clos

L’effet de la saisie ne peut pas être étendu au plus que le montant de la


créance qui en est la cause. Mais, et même si l’indisponibilité était totale, elle ne
serait pas de nature à gêner le fonctionnement du compte, car la saisie porte sur le
solde de ce dernier et ne peut en aucun cas le clôturer. Dès lors, rien n’empêche

59
L’indisponibilité, un effet direct de la saisie

de porter le résultat des opérations nouvelles dans le compte saisi et ce dernier


échappera aux conséquences de la saisie.
D’ailleurs, le compte peut être approvisionné postérieurement à la saisie par
des remises nouvelles et fonctionner normalement et les fonds qui s’y trouvent
demeurent la propriété du titulaire qui a le droit de disposer du surplus du solde
rendu indisponible172.
En fait, la saisie-arrêt, du solde par un tiers créancier ne peut pas empêcher
la convention du compte courant de s’appliquer aux remises postérieures.
L’intervention d’un tiers ne peut pas mettre fin aux relations de compte courant,
et ce par application à la règle générale imposée par l’article 240 du C.O.C. qui
consacre l’effet relatif des contrats173.
Ainsi, le compte courant continue à fonctionner normalement même s’il fait
l’objet d’une saisie. Cela est sur le plan juridique, mais sur le plan comptable il y
a une pratique bancaire qui vaut l’étude.

B- La pratique bancaire

En pratique, il semblerait que l'exercice d'une saisie-arrêt provoque le plus


souvent la clôture volontaire du compte. Mais en réalité, il est loin d'en être
toujours ainsi, car les saisies-arrêts ne sont pas uniquement dirigées contre la
clientèle impécunieuse des banques 174.
En effet, la saisie-arrêt peut être utilisée comme un moyen de pression à
l’encontre de clients parfaitement solvables avec lesquels les banques n’entendent
pas rompre leurs relations 175.

172
F. GEORGES, op. cit., p. 280 n° 184.
173
M.-T. CALAIS-AULOY, « L’idée d’indivisibilité et le compte courant », LPA, 14 Avril
2000 n° 75, p. 14.
174
M.-T, RIVES-LANGE, op. cit., p. 169, n° 315.
175
Ibid., p. 169, n° 315.

60
L’indisponibilité, un effet direct de la saisie

Si tel est le cas, et pour éviter toute difficulté, dès la réception de l’exploit
de saisie-arrêt, «la plupart des établissements virent immédiatement les avoirs
saisis sur un compte interne spécial de manière à ne pas gêner le fonctionnement
du compte ouvert au nom du client »176.
Ce nouveau compte est appelé « compte interne » ou « compte d’attente »
ou « compte bis ». Il s'agit d'une simple commodité comptable pour bien
distinguer des opérations postérieures à la saisie, les remises nouvelles créditrices
constituant ce que la pratique appelle « l'argent frais »177.
Ainsi, les banques peuvent soit virer les sommes saisies sur un compte
spécial et le compte ordinaire, alimenté par de l’argent frais, continue à
fonctionner normalement, ou bien, à l’inverse, bloquer le compte ordinaire, les
opérations nouvelles seront alors traitées sur le nouveau compte178.
Au point de vue juridique c'est le même compte courant qui continue à
fonctionner 179. De ce fait, il n’y a pas de raison de modifier cette pratique puisque
l'organisation matérielle de la saisie est laissée à l'initiative du banquier 180.
En conclusion, la saisie d’un compte courant ne peut en aucun cas être une
cause directe de sa clôture. Cependant, la saisie peut être une cause de dégradation
de la situation financière suite à laquelle l’article 732 du C.C. prévoit la clôture
du compte courant.

176
H. CROZE, « Saisie-attribution bancaire : Les mystères de l’article 47 de la loi du 9 Juillet
1991 », op. cit., n° 3, p. 71.
Voir : Annexe n° 5 et n°6.
177
M. VÉRON, « Voies d’exécution et procédures de distribution », Paris, Masson, 1989, p.
158.
178
F. -J. CRÉDOT et Y. GÉRARD, « Aspects bancaires de la réforme des procédures civiles
d’exécution », Revue de Droit Bancaire, Janvier/Février 1993, n° 35, p. 8.
179
M.-T, RIVES-LANGE, op. cit., p. 169, n° 315.
180
H. CROZE, « Saisie-attribution bancaire : Les mystères de l’article 47 de la loi du 9 Juillet
1991 », op. cit., n° 3, p. 72.

61
L’indisponibilité, un effet direct de la saisie

§ II : La saisie, cause de dégradation financière

Bien que la saisie ne puisse porter clôture du compte courant, elle peut être
accompagnée ou être signe d’une dégradation de la situation financière de l’ayant
compte suite à laquelle le législateur prévoit la clôture du compte.

En effet, l’article 732 du C.C. a dispose que le compte courant est clôturé
suite à la dégradation de la situation financière des parties en compte courant,
notamment si l’ayant compte est frappé d’une incapacité d’exercice pour
mauvaise gestion (A). Pour les entreprises en difficultés économiques un aperçu
historique s’impose (B).

A- Les incapacités pour mauvaise gestion

L’alinéa 3 de l’article 732 du C.C. (nouveau), tel que modifié par la loi n°
36 du 29 Avril 2016, « Relative aux Procédures Collectives », prévoit que
l’interdiction du débiteur saisi, sa déconfiture ou sa faillite entrainent de plein
droit la clôture du compte courant181.
Pour l’interdiction, elle peut être soit pour faiblesse d’esprit ou pour
prodigalité.
S’agissant du faible d’esprit, il est défini aux termes de l’article 160 du
C.S.P. comme « celui qui ne jouit pas de la plénitude de sa conscience, qui
conduit mal ses affaires, ne connaît pas les transactions courantes et est lésé dans
ses actes d'achat et de vente ».
Pour la prodigalité, l’article 164 du C.S.P. dispose que « le prodigue est
celui qui ne gère pas convenablement ses biens, s'y livre à des prodigalités ».

181
La loi n° 2016-36 du 29 avril 2016, « Relative aux Procédures Collectives », J.O.R.T. n° 38
du 8 Mai 2016, p. 1724.

62
L’indisponibilité, un effet direct de la saisie

En plus de l’interdiction, l’article 732 du C.C. prévoit que le compte courant


est clos si l’une des parties en compte courant est mise en faillite ou en
déconfiture.
En effet, l’alinéa 3 dudit article dispose que la faillite du titulaire du compte
courant commerçant ou la déclaration du titulaire non commerçant en
déconfiture182 mettent fin au fonctionnement du compte courant.
A ce propos, il convient de noter qu’il ne suffit pas que la cessation des
paiements ou l’endettement aient été révélés, il faut qu’ils soient constatés par un
jugement déclarant cet état183.
Avant la loi relative aux procédures collectives, l’ancien article 732 du C.C.
prévoyait que l’admission au bénéfice du concordat préventif entraine la clôture
du compte courant. Ainsi, il convient de rappeler l’ancienne position du
législateur.

B- Les difficultés économiques

Avant la loi de 2016 Relative aux Procédures Collectives, l’article 732 du


C.C. (ancien) prévoyait que l’admission d’une des parties au compte courant au
bénéfice du régime de concordat préventif est un motif de clôture du compte
courant184.

182
La déconfiture désigne la situation d’un débiteur qui ne peut pas faire face à son passif
exigible par son actif disponible.
‫ يكون معسرا المدين الذي " تكون مكاسبه غير كافية‬،‫ غير منشور‬،1998 ‫ سبتمبر‬28 ‫ المؤرخ في‬،55037 ‫قرار تعقيبي عدد‬
."‫لسداد ما عليه من ديون‬
183
T. BEN NASR, op. cit., p. 298.
184
L’article 739 du C.C. (ancien), publié dans le J.O.R.T. n° 60 du 4 Décembre 1959, p. 1398.

63
L’indisponibilité, un effet direct de la saisie

Sauf que, en réalité le législateur a substitué le régime du concordat


185
préventif par le redressement des entreprises en difficultés économiques
consacré par la loi du 14 Avril 1995 186.
Ainsi, s’est posée la question de savoir si le débiteur saisi passé sous le
régime de redressement des entreprises en difficultés économiques devrait voir
son compte courant clos ?
En effet, l’article 35 de la loi de 1995 tel que modifié en 2003 posait le
principe selon lequel les contrats en cours sont continués187. Ainsi, il paraissait
inopportun de prévoir la clôture du compte courant par l’admission de l’ayant
compte au régime de redressement des entreprises en difficultés économiques.
Surtout que le compte courant est un instrument économique nécessaire au
redressement de l’entreprise pour qu’elle continue à fonctionner tout au long de
la procédure188.
Cette lecture de l’ancien article 732 du C.C. s’est confirmé par la loi n°32
du 29 Avril 2016 Relative aux Procédures Collectives qui a modifié l’article 732

185
L’article 2 de la loi n° 95-35 du 17 Avril 1995 complétant et modifiant certaines dispositions
du C.C., J.O.R.T. n° 33 du 25 Avril 1995, p. 795. :
« Sont abrogées les dispositions des articles 413 à 445 et le paragraphe dernier de l'article 448
du code de commerce. »
186
La loi n° 95-34 du 17 avril 1995, « Relative au Redressement des Entreprises en Difficultés
Économiques », J.O.R.T. n° 33 du 25 Avril 1995, p. 792.
187
L’article 35 (nouveau) de la loi n° 95-34 du 17 avril 1995, relative au redressement des
entreprises en difficultés économiques, telle que modifiée par la loi n° 2003-79 du 29 décembre
2003 :
« L'exécution des contrats en cours liant l'entreprise aux tiers, clients, fournisseurs et autres sera
poursuivie. L'administrateur judiciaire ou le débiteur peuvent demander d'y mettre fin après
autorisation du juge commissaire s'ils ne sont pas nécessaires à l'activité de l'entreprise. Les
contrats de travail restent soumis aux lois et conventions qui les régissent.
L'administrateur judiciaire doit adresser un avis aux cocontractants de l'entreprise dont les
contrats ont fait l'objet d'une décision y mettant fin, et ce, dans les quinze jours suivant leur
extinction, et ce, par lettre recommandée avec accusé de réception. »
188
T. BEN NASR, op. cit., p. 299.

64
L’indisponibilité, un effet direct de la saisie

du C.C. en abandonnant la soumission au régime du concordat préventif comme


cause de clôture du compte courant.

A la fin de ce paragraphe, on peut conclure que la saisie n’est pas de nature


à clôturer le compte courant à moins que cette dernière ne soit accompagnée d’une
interdiction, faillite ou déconfiture.
Ainsi, le compte courant continue à fonctionner normalement et les fonds
non frappés d’indisponibilité demeurent à la disposition du débiteur. En revanche,
il revient au banquier de bloquer les fonds indisponibles. À ce propos, il est tenu
de certaines obligations à cet égard.

Section II : Les obligations du banquier

Lors de la saisie, d’un compte courant, le rôle du banquier tiers saisi est
primordial. Ainsi, certains estiment que « ce sont les banquiers qui mènent la
saisie des comptes bien plus que les huissiers » puisqu’une fois l’exploit de saisie-
arrêt signifié au banquier, celui-ci en tant que spécialiste des comptes, met en
œuvre la saisie, d’abord en rendant indisponible les sommes saisies, puis en
effectuant les opérations de régularisation pour déterminer la partie saisissable du
solde189.
Ainsi, on va s’intéresser aux obligations du banquier quant au
fonctionnement du compte saisi, notamment en rendant le solde saisi indisponible
puisque l’indisponibilité implique une interdiction de paiement au banquier (§I).
Sinon, il en sera tenu pour responsable (§II).

189
N. CAYROL, J.-CI. Pr. Civ., v° « Saisie-attribution (Comptes Bancaires : Règles
Spécifiques) », op. cit., p. 4, n°12.

65
L’indisponibilité, un effet direct de la saisie

§ I : L’interdiction de paiement
L’exploit de saisie-arrêt dès l’instant de sa signification a pour effet de
rendre indisponible la créance du débiteur saisi sur le tiers saisi, et ce jusqu'à
concurrence du montant de la créance cause de la saisie190.
Cette défense de payer est énoncée par l’article 333 du C.P.C.C. et portée à
la connaissance du tiers saisi par l’huissier de justice qui est tenu de reproduire
obligatoirement les termes de cet article dans son exploit et ce conformément aux
dispositions de l’alinéa 2 de l’article 332 du C.P.C.C. sous peine de nullité de la
saisie191.
Ainsi, en opérant le blocage du solde du compte, la saisie-arrêt empêche
toute modification du solde rendu indisponible par les opérations nouvelles192.
Cette interdiction de paiement a une valeur absolue à l’égard de toutes les
parties engagées dans la procédure de saisie-arrêt, à savoir le débiteur saisi (A) et
le créancier saisissant (B).

A- Interdiction face au débiteur saisi

Quant au débiteur saisi, il ne peut soustraire au créancier saisissant une


partie de son gage et il se trouve privé de de disposer des fonds rendus
indisponibles. En effet, le banquier tiers saisi, gardien légal desdites fonds, doit,
sauf pour ce qui concerne les opérations en cours, refuser de se dessaisir par
n’importe quel moyen du solde saisi193.

190
P. MARETTE, « Procédure civile et voies d’exécution », 2ème éd., Paris : Litec, 1986, p.
128.
191
Voir annexe n° 2 (Exemple d’exploit de saisie-arrêt sur compte courant).
192
Voir à ce propos :
.61 .‫ ص‬،1972 ‫ أكتوبر‬،8 ‫ عدد‬،.‫ت‬.‫ق‬.‫ م‬،1972 ‫ فيفري‬18 ‫ مؤرخ في‬،56131 ‫حكم إستعجالي عدد‬
"‫"ال يمكن للمعقول تحت يده أن يغير من حالة الدين من تاريخ العقلة لتعلق حق الغير به‬
193
J.-L. RIVES-LANGE, « La saisissabilité du compte courant », op. cit., p. 102.

66
L’indisponibilité, un effet direct de la saisie

D’ailleurs, le débiteur saisi commet le délit d’émission de chèque sans


provision au sens de l’article 411 du C.C. s’il émet un chèque provisionné par le
solde rendu indisponible par la saisie194.
En fait, il est interdit au banquier d’honorer toute les opérations qui sont de
nature à diminuer le solde rendu indisponible par la saisie-arrêt, comme le retrait
à guichet automatique, ordre de paiement par carte, ordre de virement,
autorisation de prélèvement, etc.
De même pour la compensation, qui, étant analysée comme un mode
d’extinction des obligations, le banquier n’a pas le droit de compenser sa créance
née avant ou après la saisie avec celle du saisi195. Et ce par application à l’article
379 du C.O.C. qui ne reconnait pas la compensation qui porte préjudice aux droits
régulièrement acquis à des tiers196.
En des termes plus généraux, la créance saisie-arrêtée ne peut pas faire
l’objet d’un acte extinctif d’obligation au sens de l’article 339 du C.O.C. qu’il soit
une novation, une remise de dette, ou d’une compensation197.
Cette interdiction de paiement ne s’applique pas seulement au débiteur
saisi, mais elle touche aussi le saisissant.

B- Interdiction face au créancier saisissant

En ce qui concerne le créancier saisissant, le tiers saisi ne peut pas payer le


saisissant qui n’a, encore, aucun droit contre lui. Car, malgré la saisie, le débiteur
saisi conserve sa créance intacte dans son patrimoine. Cette créance est le gage du

194
A. BACHA, op. cit., p. 37.
195
Ibid., p. 35.
196
L’article 379 du C.O.C. :
« La compensation n’a pas lieu au préjudice des droits régulièrement acquis à des tiers ».
197
R. PERROT, op. cit., p. 154.

67
L’indisponibilité, un effet direct de la saisie

saisissant au même titre que tous les autres biens composant le patrimoine du
débiteur saisi198.
En fait, tant que le jugement de validité de la saisie n’est pas rendu
exécutable, le saisissant n’est pas encore reconnu être le créancier du tiers saisi
même si sa créance est constatée par un jugement199. Sauf si, le solde saisi ne suffit
pas à répondre à toutes les créances.
A cet effet, la Cour de cassation avec ses Chambres Réunies, dans un arrêt
rendu le 22 Février 2007, estime que si le solde du compte ne suffit pas de
répondre à toutes les saisies et oppositions, le banquier est tenu de consigner la
totalité du solde indisponible, auprès de la Caisse des Dépôts et des
Consignations, à la disposition de tous les créanciers et opposants qui peuvent à
défaut d’accord recourir au juge commissaire pour la distribution des deniers200.
Dans cet arrêt, le banquier a été déclaré responsable d’un paiement effectué
au bénéfice d’un saisissant disposant d’un jugement validant la saisie-arrêt revêtu
de la formule exécutoire, tandis que le solde du compte est toujours indisponible
en vertu d’une saisie-arrêt antérieure qui produit encore ses effets.

198
C. CÉZAR-BRU, « Théorie et pratique des voies d'exécution, 3ème éd., Paris : Rousseau &
Cie, 1927, p. 130.
199
Voir à ce propos :
:263 .‫ ص‬،1997 .‫ت‬.‫م‬.‫ ن‬،1997 ‫ أفريل‬16 ‫ مؤرخ في‬،47238 ‫ عدد‬،‫قرار تعقيبي مدني‬
"‫"المطالبة باألموال المعقولة قبل رفع العقلة طلب سابق ألوانه وفي غير طريقه‬
200
Voir à ce propos :
،2007 ‫ نوفمبر‬،10 ‫ عدد‬.‫ت‬.‫ ق‬،‫ صدر عن الدوائر المجتمعة‬،2007 ‫ فيفري‬22 ‫ مؤرخ في‬،5735 ‫ عدد‬،‫قرار تعقيبي مدني‬
:167 .‫ص‬
‫"لئن إختلفت إجتهادات المحاكم وتباينت آراءها حول اإلجراء القانوني الملزم بإتخاذه المعقول تحت يده عند تعدد العقل‬
‫التوقيفية وعدم كفاية المال المعقول للوفاء بكافة الديون الثابتة للدائنين والمعترضين فإن األحكام المنظمة للعقل وخاصة‬
‫ واضحة الداللة وصريحة البيان في وجوب تأمين كامل المبلغ المعقول بصندوق الودائع‬.‫ت‬.‫م‬.‫م‬.‫ من م‬464‫ و‬347 ‫الفصلين‬
."‫واألمانات على ذمة الدائنين والمعترضين الذين بإمكانهم اللجوء إلى قاضي التوزيع إن لم يتفقوا رضائيا على المحاصة‬

68
L’indisponibilité, un effet direct de la saisie

En effet, si le tiers paie le créancier saisissant, ce dernier bénéficierait d’un


privilège201. Or, la saisie-arrêt ne confère au saisissant aucun droit de préférence
sur les autres créanciers susceptibles d’intervenir au cours de la procédure202.
Ainsi, le créancier saisissant peut par la saisie « conserver son gage, mais
il ne peut pas le réaliser », il ne peut pas forcer le tiers saisi à payer203.
Cette interdiction de paiement qui s’impose au banquier tiers saisi, face au
débiteur saisi et le créancier saisissant, est assortie de sanction.

§ II : La responsabilité du banquier en cas de


dessaisissement

Au terme de l’article 333 du C.P.C.C. le banquier tiers saisi est dépositaire


des sommes saisies et « il est tenu, sous sa responsabilité personnelle, de ne se
dessaisir desdites sommes ou objets ».
Ainsi, ledit article n’a pas précisé la teneur de la responsabilité du banquier,
mais cette responsabilité peut être double, elle est civile et pénale à la fois.

A- La responsabilité civile du banquier

201
Voir à ce propos :
:1 .‫ ص‬،2006 .‫ت‬.‫م‬.‫ ن‬،2006 ‫ جوان‬22 ‫ مؤرخ في‬،9082 ‫ عدد‬،‫قرار تعقيبي مدني‬
‫" إن القضاء بإلزام المعقول تحت يده بأن يؤدي للدائن العاقل مبلغ دينه من المال الموجود تحت يده رغم تضمن تصريحه أن‬
‫ذلك المال تسلطت عليه عدة عقل توقيفية سابقة الزالت قائمة لعدم اإلذن قضائيا برفعها أو بصحتها يؤدي إلى منح الدين‬
".‫موضوع العقلة التوقيفية األخيرة امتيازا بغير سند قانوني‬
202
L. CAMENSULI-FEUILLARD, « La dimension collective des procédures civiles
d'exécution : Contribution à la définition de la notion de procédure collective », Thèse pour le
doctorat en droit de l'Université de Nantes présentée et soutenue publiquement le 7 décembre
2006, Paris : Dalloz, 2008, p. 71, § 98.
203
C. CÉZAR-BRU, « Théorie et pratique des voies d'exécution », 3ème éd., Paris : Rousseau &
Cie, 1927, p. 130.

69
L’indisponibilité, un effet direct de la saisie

Sur le plan civil, l’article 333 du C.P.C.C., étant la règle spéciale consacrée
à la procédure de saisie-arrêt, n’a pas déterminé la sanction applicable au paiement
effectué malgré la saisie, de ce fait, il faut recourir au texte général.
La règle générale est donnée par l’article 309 du C.P.C.C. qui dispose que
« toute saisie a pour effet de mettre sous main de justice les biens sur lesquels elle
porte et d'empêcher que le débiteur n’en dispose au préjudice de ses créanciers.
En conséquence, toute aliénation, à titre gratuit ou à titre onéreux, et tous baux
de biens saisis, ainsi que toute constitution de nantissement ou de tous autres
droits réels sur ces biens, sont nuls et non avenus à l'égard de créanciers ».
Cet article s’inscrit sous le chapitre intitulé « Disposition Générale » du
titre intitulé « Des Voies D’exécution » du C.P.C.C. et comme il « s’exprime en
termes généraux il faut l’entendre dans le même sens »204. Ainsi, il est applicable
à toutes les saisies, notamment la saisie-arrêt, sauf s’il y exception expresse205.
L’application des termes de l’article 309 du C.P.C.C. à la saisie-arrêt mène
à première vue de frapper de nullité les paiements effectués par le banquier tiers
saisi, malgré l’indisponibilité.
Mais, en réalité, ledit article n’a pas précisé si la nullité qu’il prévoit est
absolue ou totale. Car, en tout état de cause, les effets sont les mêmes. L’intérêt
de distinguer la nullité absolue de celle relative, réside dans la détermination de
qui peut agir en nullité, le délai de prescription, la possibilité de ratification et de
confirmation 206.
Par rapport aux effets, il n’y a pas de distinction entre la nullité absolue ou
relative. A cet égard, l’article 325 du C.O.C. prévoit que « l’obligation nulle de
plein droit ne peut produire aucun effet, sauf la répétition de ce qui a été payé

204
L’article 533 du C.O.C.
205
L’article 534 du C.O.C.
206
Voir à ce propos :
.209 .‫ ص‬،1997 ،‫ مطبعة الوفاء‬:‫ تونس‬،2 .‫ ط‬،"‫ العقد‬:‫ "النظرية العامة لإللتزامات‬،‫محمد الزين‬

70
L’indisponibilité, un effet direct de la saisie

indûment en exécution de cette obligation ». Ainsi, la nullité provoque


l'anéantissement du contrat en entier.
En revanche, l’article 309 du C.P.C.C. prévoit que les actes portant sur un
bien rendu indisponible sont « non avenus à l'égard de créanciers ». Par une
lecture a contrario, l’acte est valable et produit ses effets entre ses parties, ce qui
ne correspond pas aux effets de la nullité.
On en déduit que, l’article 309 C.P.C.C., n’entraîne pas la nullité du
paiement effectué par le banquier, car il est valable entre ses parties mais « non
avenu » à l’égard des créanciers. Conséquemment, la sanction objet de l’article
309 du C.P.C.C. ne peut être que l’inopposabilité du paiement, effectué par le
banquier malgré la saisie, face au créancier saisissant.
De ce fait, si le banquier honorait, les ordres qu’il reçoit de son client, par
erreur, par complaisance, ou par intérêt, aucun des mouvements sur le compte ne
sera opposable au créancier saisissant. Autrement dit, le banquier paierait à ses
risques et périls207.
A cet effet, un adage français expose que celui « qui paie mal, paie deux
fois ». Car, le saisissant, comme le premier paiement lui étant inopposable, peut
obliger le banquier à lui fournir un second s’il en remplit les conditions.
Ainsi, la saisie-arrêt, a l’avantage de rendre inopposables certaines
obligations ou convention liant le débiteur saisi car « il s’agit d’éviter que naissent
ou prospèrent des atteintes à la substance de la créance saisie-arrêt ée,
préjudiciables au créancier saisissant »208.
Indépendamment de l’inopposabilité, le créancier saisissant peut invoquer
la responsabilité civile du banquier tiers saisi s’il transgresse l’interdiction de se
dessaisir des sommes et objets saisis arrêtés entre ses mains. Bien évidemment,

207
N. CAYROL, J.-CI. Pr. Civ., v° « Saisie-attribution (Comptes Bancaires : Règles
Spécifiques) », op. cit., p. 16, n° 77.
208
F. GEORGES, op. cit., p. 117 n° 67.

71
L’indisponibilité, un effet direct de la saisie

cette responsabilité civile ne peut être que délictuelle vu l’absence d’un lien
contractuel entre le saisissant et le tiers saisi.
La mise en œuvre de cette responsabilité obéit à des conditions de
responsabilité de droit commun. Le créancier qui demande la condamnation du
tiers saisi au paiement des dommages et intérêts doit prouver la faute de ce dernier,
qui consiste en le non-respect de l’indisponibilité imposée par l’exploit de saisie-
arrêt, le dommage qu’il a subi et lien de causalité entre la faute et le dommage
réclamé209.
A cet effet, la preuve de la faute peut être faite devant la juridiction civile,
dans le cadre d’une action civile, ou devant la juridiction pénale, si le saisissant
veut se constituer partie civile, car l’irrespect de l’indisponibilité est constitutif
d’une infraction pénale 210.

B- La responsabilité pénale du banquier

Le banquier qui transgresse l’interdiction de paiement commet le délit de


détournement d’objet saisi prévu dans l’article 278 du C.P. qui dispose qu’il
« est puni de deux ans d’emprisonnement et d’une amende de mille dinars,
quiconque détruit, détourne, dissipe, prête ou dissimule des objets qu’il sait saisis.
Et la tentative est punissable.
La peine est portée au double lorsque l’infraction a été commise par la
personne à qui ont été confiés les objets saisis ».

209
Les article 82 et 83 du C.O.C.
210
Voir à ce propos :
:202 .‫ ص‬،2004 ،.‫ت‬.‫م‬.‫ ن‬،2004 ‫ نوفمبر‬4 ‫ مؤرخ في‬،6335 ‫ عدد‬،‫قرار تعقيبي جزائي‬
‫"ان عدم وجود المعقول بالمكان الذي تم ايداعه وتأمينه به في عهدة الحارس الذي لم يسع إلحضاره عند التنفيذ يجعل اركان‬
".‫الجريمة متوفرة دون حاجة الى المطالبة بمكان ومأل المعقول‬

72
L’indisponibilité, un effet direct de la saisie

Le terme « saisi », est un terme général qu’il faut entendre dans sa


généralité. Ainsi, les dispositions dudit article s’étendent à tous les objets qui sont
sous main de justice au sens de l’article 309 C.P.C.C.
De ce fait, l’interprétation stricte de la norme pénale n’est pas de nature à
exclure l’application de l’article 278 du C.P. aux biens objet de saisie-arrêt dans
sa phase conservatoire.
Par conséquent, compte tenu de la circonstance aggravante prévue par le
dernier texte, le banquier qui est « tiers saisi dépositaire » par défaut au sens de
l’article 333 C.P.C.C., risque une peine de quatre ans d’emprisonnement et d’une
amende de deux mille dinars.
Par exception au principe de la personnalité des peines, le représentant légal
de l’établissement bancaire est responsable personnellement du délit en ce qui
concerne la peine physique, mais pour la peine patrimoniale elle est payée par la
banque 211.

211
Voir à ce propos :
.217 .‫ ص‬،2006 ،‫ مركز النشر الجامعي‬:‫ تونس‬،"‫ "القانون الجنائي العام‬،‫فرج القصير‬

73
L’indisponibilité, un effet direct de la saisie

CONCLUSION DE LA PREMIÈRE PARTIE

En fin de cette première partie, il convient de rappeler que le premier effet


de la saisie-arrêt du compte courant est de rendre le solde du compte courant
indisponible. En effet, le domaine de la saisie est, a priori, le solde de tous les
comptes détenus par le débiteur saisi chez la banque tierce saisie même chez une
succursale étrangère.

Mais, sont exclus de ces comptes les comptes de mandataires, dits aussi
professionnels, vu que les sommes inscrites sur ces comptes sont détenues par le
titulaire du compte pour le compte d'autrui. De même, les comptes dont le titulaire
bénéficie d’une immunité d’exécution qui est un privilège personnel que la loi
accorde à certains débiteurs pour les soustraire à toute mesure d’exécution.

En plus de ces comptes, on a étudié les créances susceptibles d’entrer en


compte courant, déclarées par le législateur dans diverses dispositions
insaisissables. De même, l’incidence de la saisie sur certaines opérations de
banque à savoir, l’ouverture de crédit, le gage-espèce, le crédit documentaire et la
garantie à première demande.

Une fois qu’on a délimité le domaine de la saisie du compte courant, on a


étudié la nature de l’indisponibilité engendrée par la saisie. En effet, le C.P.C.C.
consacre une indisponibilité partielle, qui se limite à concurrence du montant de
la créance cause de la saisie. En même temps, elle est relative, et ne confère pas
de privilège au premier saisissant.

Cette position qui consacre l’indisponibilité partielle a été critiquée vu


qu’elle ne semble pas adéquate avec les mécanismes de fonctionnement du
compte courant. D’ailleurs, actuellement, en droit français, s’agissant de la saisie
attribution portant sur des comptes bancaires, l’indisponibilité est totale jusqu’au

74
L’indisponibilité, un effet direct de la saisie

dénouement des opérations en cours. Elle ne devient partielle qu’après la


détermination avec exactitude du solde du compte.

Indépendamment de cela, certains auteurs adressent des critiques au


principe même de l’indisponibilité partielle en estimant que les intérêts à valoriser
sont ceux des créanciers plutôt que ceux du débiteur.

Mais, quoiqu’il en soit, l’indisponibilité totale, soit-elle ou partielle, elle


n’est pas de nature à gêner le fonctionnement du compte courant qui continue à
fonctionner normalement et peut enregistrer des opérations créditrices ou
débitrices ultérieurement à la saisie sous condition de respecter l’indisponibilité
engendrée par cette dernière.

Sauf que, si la saisie est accompagnée d’une dégradation financière l’article


732 du C.C. prévoit la clôture du compte courant, tel est le cas si le débiteur saisi
est atteint d’une incapacité pour mauvaise gestion. Par contre, si ce dernier est
passé sous le régime des procédures collectives, son compte courant continue à
fonctionner normalement.

Après avoir étudié le fonctionnement ultérieur du compte saisi, on a vu les


obligations du banquier qui a la charge de l’organisation matérielle de la saisie.

En effet, le banquier est tenu de respecter l’interdiction de paiement portant


sur les sommes saisies, que ce soit vis-à-vis du débiteur saisi ou même du
saisissant qui n’a aucun droit sur les sommes indisponibles tant qu’il n’y a pas un
jugement validant la saisie-arrêt revêtu de la formule exécutoire.

Cette interdiction de paiement imposée au banquier est assortie de sanctions


qu’elles soient civiles ou pénales. En effet, sur le plan civil, le paiement effectué
par le banquier en violation de l’obligation d’indisponibilité est inopposable au
créancier saisissant. S’ajoute à cela, la possibilité d’une condamnation à payer des
dommages et intérêts. Sur le plan pénal, le banquier commet le délit de

75
L’indisponibilité, un effet direct de la saisie

« détournement d’objet saisi » qui est passible de deux ans d’emprisonnement et


d’une amende de mille dinars.

Néanmoins, le banquier n’est pas obligé de garder les sommes saisies entre
ses mains puisque le C.P.C.C. prévoit certaines modalités qui peuvent affecter le
principe d’indisponibilité. En effet, le principe d’indisponibilité est susceptible de
levée. De même qu’il doit tenir compte de la régularisation des opérations en
cours.

76
Deuxième Partie :

Les modalités de

l’indisponibilité du compte saisi


Les modalités de l’indisponibilité du compte saisi

Partie II : Les modalités de l’indisponibilité du


compte saisi

Après avoir analysé en première partie l’effet d’indisponibilité que produit


la saisie-arrêt , il convient à ce stade d’étudier les modalités qui pourraient affecter
le principe d’indisponibilité. D’abord, cet effet d’indisponibilité peut être levé
(Chapitre I), de même qu’il doit tenir compte des opérations de régularisation qui
peuvent modifier le solde rendu indisponible (Chapitre II).

Chapitre I : La levée de l’indisponibilité

Bien que le banquier tiers saisi soit chargé de bloquer le solde saisi à
concurrence du montant de la créance cause de la saisie, cette indisponibilité peut
être levée par divers mécanismes mais sous certaines conditions. En effet, le
banquier peut se trouver déchargé de l’obligation d’indisponibilité par un
jugement sur le fond (Section 2ème), mais parfois ce jugement n’est pas nécessaire
(Section 1ère).

Section I : La levée de l’indisponibilité sans


jugement

Selon les termes de l’article 333 du C.P.C.C. le banquier tiers saisi peut se
libérer de l’obligation de garder les sommes saisies entre ses mains et sous sa
responsabilité en vertu d’une mainlevée amiable ou par recours au juge des
référés.

78
Les modalités de l’indisponibilité du compte saisi

La mainlevée amiable prend généralement la forme d’une transaction qui


est définie par l’article 1458 du C.O.C. comme étant « un contrat par lequel les
parties terminent ou préviennent une contestation moyennant la renonciation de
chacune d'elles à une partie de ses prétentions réciproques, ou la cession qu'elle
fait d'une valeur ou d'un droit à l'autre partie ».
Cet accord doit être conclu entre, d’une part, tous les créanciers saisissants
et opposants, et d’autre part, le débiteur saisi. Le tiers saisi n’a qu’à se soumettre
à la volonté des parties comme le dispose l’article 333 du C.P.C.C.
Pour les personnes habilitées à conclure la transaction, la Cour de cassation,
dans un arrêt rendu le 17 Avril 2000, a considéré que l’avocat qui a pratiqué une
saisie-arrêt pour le compte de son client, a le droit d’en conclure une transaction
avec le débiteur saisi212.
Pour la forme de la mainlevée amiable, l’article 333 du C.P.C.C. n’a pas
exigé une forme particulière pour la validité de l’accord. Ainsi, il suffit de prouver
la transaction pour lever l’indisponibilité et ce, par application à la règle générale
inscrite dans l’article qui 23 du C.O.C. qui dispose que « la convention n'est
parfaite que par l'accord des parties sur les éléments essentiels de
l’obligation... ».
Ce principe, dit de consensualisme, est déduit de la théorie de l’autonomie
de la volonté en vertu de laquelle un acte juridique n’est soumis à aucune forme

212
Voir à ce propos :
:92 .‫ ص‬،2000 .‫ت‬.‫م‬.‫ ن‬،2000 ‫ أفريل‬17 ‫ مؤرخ في‬،77107 ‫ عدد‬،‫قرار تعقيبي مدني‬
‫"وحيث انه تأسيسا على ذلك إذا قام محام نيابة عن موكله بإجراء عقلة توقيفية على أموال لدى الغير ثم أثناء نشر القضية‬
‫تولى نفس المحامي مراسلة المعقول تحت يدها معلما إياها بوقوع صلح بين منوبه والمدين ويعرب له صراحة عن تراجعه‬
‫في العقلة ويطلب منه تسليم مبلغ ألفي دينار لمنوبه وتسليم الباقي إلى المعقول عليه ووقع استخالص هذا المبلغ فعال فإن ذلك‬
‫محمول على الصحة وال يمكن لمن أجرى العقلة بعد ذلك أن يحتج على المعقول تحت يدها بعدم انبرام الصلح أو ان العقلة ال‬
.‫ترفع إال باتفاق األطراف‬
‫إذ أن المحامي الذي تولى القيام بإجراءات العقلة هو الذي طلب بنفسه رفعها والعقلة تزول إذا رفعها طالبها فضال عن ان‬
‫االتفاق يعتبر حاصال لكون من أجرى العقلة هو الذي طلب رفعها بناء على ما تضمنه الصلح ومحكمة القرار المنتقد لما‬
‫نحت غير هذا المنحى واعتبرت ان المكتوب المحتج به من طرف المستأنفة والمحرر من طرف نائب العاقل ال بقوم مقام‬
."‫ تكون قد أساءت فهم القانون وتعين نقض القرار‬.‫ت‬.‫م‬.‫م‬.‫ م‬333 ‫االتفاق المتحدث عنه بالفصل‬

79
Les modalités de l’indisponibilité du compte saisi

particulière pour sa validité, le consentement, ayant à lui seul, le pouvoir de créer


des obligations.
Mais, en pratique l’accord de mainlevée amiable ne peut être qu’écrit pour
que le banquier puisse en prévaloir en cas de différend.
Cette transaction a pour effet, au terme de l’article 1467 du C.O.C., de
classer l’affaire et de libérer le tiers saisi de l’obligation d’indisponibilité. Même
si la transaction est faite moyennant une partie de la somme due, elle vaut remise
du reste et produit libération du débiteur si elle porte sur une dette.
Mise à part la mainlevée amiable formée par la volonté bilatérale, il y a
mainlevée judiciaire qui peut être faite par autorisation judiciaire.
En fait, la mainlevée judiciaire sans jugement sur le fond est faite par un
acte de juridiction gracieuse. A cet effet, on distingue la consignation (§ I) et le
cantonnement (§ II).

§ I : La consignation au sens de l’article 334 du


C.P.C.C.

Avant le jugement de validité, le tiers saisi n’a pas le droit de payer le saisi,
il lui est interdit aussi de se libérer entre les mains du saisissant. Cette situation
l’oblige à conserver, aussi longtemps que dure la procédure, la créance saisie-arrêt
ée.
A cet effet, le législateur a prévu la procédure de consignation dans l’article
334 du C.P.C.C. qui donne au banquier tiers saisi la possibilité de se décharger de
cette obligation.

80
Les modalités de l’indisponibilité du compte saisi

En définitive, la consignation est « un dépôt d’espèces, de valeurs ou


d’objets entre les mains d’une tierce personne à charge pour elle de les remettre
à qui de droit »213.
Afin de mieux comprendre la consignation il convient de voir les parties à
la consignation (A) ainsi que ses effets (B).

A- Les parties à la consignation

Les parties à la consignation sont d’une part les demandeurs de la procédure


et d’autre part les consignataires.
Selon l’article 334 du C.P.C.C, l’initiative de la demande de consignation
appartient, outre le tiers saisi, à l’huissier de justice, le saisissant et le débiteur
saisi.
Ainsi, toutes les parties engagées dans la procédure de saisie-arrêt ont le
droit de demander la consignation au juge cantonal ou le président du tribunal de
première instance du lieu du domicile du débiteur, chacun dans les limites de sa
compétence.
L’huissier de justice devenu tiers détenteur au sens de l’article 333 du
C.P.C.C. si le banquier tiers saisi décide de lui remettre les sommes saisies, trouve
son intérêt à demander la consignation.
Le banquier, de par sa profession, collecteur de fonds, a intérêt, en principe,
à garder ces fonds.214 Cela n’empêche que le banquier pourrait vouloir liquider

213
S. GUINCHARD, T. DEBARD, dir., « Lexique des termes juridiques 2016-2017 », 24ème
éd., Paris, Dalloz, 2016, p. 275.
214
L’article 4 de la loi n° 48 du 10 juillet 2016 « relative aux banques et aux établissements
financiers ».
(Paru uniquement en langue arabe au J.O.R.T. n° 58 du 15 Juillet 2016, p. 2516).

81
Les modalités de l’indisponibilité du compte saisi

ses affaires avec son client sans attendre le jugement de validité. De là, il peut
recourir à la consignation.
De leur côté, le débiteur saisi et le saisissant jugeront peut-être plus sûre la
consignation quand les premiers indices d’insolvabilité du tiers saisi ou de
l’huissier de justice commencent à apparaitre215.
En général, et peu importe la partie demanderesse de la consignation, il
revient au juge qui autorisait la saisie au sens de l’article 330 du C.P.C.C.
d’ordonner avec ordonnance sur requête la consignation.
A cet effet, le juge jouit de son pouvoir discrétionnaire quant à l’acceptation
de la demande de la consignation et quant à la désignation du consignataire. Au
terme de l’article 334 du C.P.C.C., ce dernier peut être, soit la caisse des dépôts
et consignations, soit un tiers consignataire.
Pour la partie consignatrice, il peut être soit la Caisse des Dépôts et des
Consignations ou un autre tiers signataire.
Pour ce qui est de la Caisse des Dépôts et des Consignations, il faut noter
qu’elle est devenue en 2011 par le décret-loi n° 85-2011 un établissement public
doté de la personnalité morale et de l’autonomie financière216. Elle reçoit « les
dépôts et consignations ordonnés par la loi, par la justice ou par l’administration,
auprès du trésorier général de la Tunisie, conformément aux termes d’une
convention qui sera conclue à cet effet entre le ministère des finances et la caisse
des dépôts et consignations »217.
Pour le tiers consignataire, il peut être n’importe quelle personne physique
ou morale, que le juge estime capable d’assurer la garde des sommes saisies.

215
A. BACHA, op. cit., p. 45.
216
Décret- loi n° 85 du 13 septembre 2011, portant création de la « caisse des dépôts et
consignations », J.O.R.T. n° 71 du 20 Septembre 2011, p. 1846.
217
L’article 3 du Décret- loi n° 85 du 13 septembre 2011, portant création de la « caisse des
dépôts et consignations », J.O.R.T. n° 71 du 20 Septembre 2011, p. 1846.

82
Les modalités de l’indisponibilité du compte saisi

Mais, quel que soit le consignataire désigné par l’ordonnance sur requête,
les effets de la consignation sont les mêmes.

B- Les effets de la consignation

Avant de voir les effets de la consignation, il convient au préalable de


déterminer le montant à consigner. Les sommes à consignées ne peuvent pas
dépasser les sommes rendues indisponibles par la saisie. Autrement dit, le montant
consigné ne peut pas dépasser le montant de la créance cause de la saisie et ce,
depuis la réforme de 1986 qui a consacré le principe de l’indisponibilité partielle.
Une fois la consignation faite, cette dernière a pour effet de transporter les
fonds saisis d’une main à une autre. Ainsi, les obligations relatives à la
préservation des fonds passent au consignataire et le tiers saisi n’a plus aucun rôle
à jouer. La mainlevée est automatique après l’opération.
La consignation est avantageuse pour le banquier qui va se libérer de son
obligation de préservation des fonds, mais elle n’est pas aussi avantageuse pour
le créancier saisissant.
En fait, et comme pas de privilège sans texte, la consignation au sens de
l’article 334 ne confère au saisissant aucun privilège sur les sommes consignées.
Mais, qu’en est-il pour le saisissant bénéficiant de la procédure du cantonnement ?

§ II : Le cantonnement au sens de l’article 344


du C.P.C.C

Le cantonnement « est une mainlevée partielle de la saisie. Il a pour but


d’éviter l’indisponibilité totale de la créance saisie-arrêt ée dans le cas où le
montant de cette créance est supérieur à celui des causes de la saisie »218.

218
J. VINCENT et J. PRÉVAULT, op. cit., p. 253, § 301.

83
Les modalités de l’indisponibilité du compte saisi

Il peut paraitre que l’étude du cantonnement au sens de l’article 344 du


C.P.C.C. a perdu de son intérêt depuis la réforme du 1er septembre 1986 qui
consacre le principe de l’indisponibilité partielle en vertu duquel le saisissant ne
peut pas saisir arrêter qu’à concurrence du montant de sa créance.
Mais, en réalité le créancier saisissant peut se trouver dans l’obligation de
recourir au cantonnement pour limiter les effets de la saisie. Tel est le cas si la
saisie porte sur les biens se trouvant entre les mains de plusieurs tiers saisis219.
Ainsi, le débiteur saisi titulaire de plusieurs comptes chez plusieurs banques verra
tous ses comptes bloqués par la même saisie.
Si tel est le cas, le débiteur saisi peut se faire prévaloir les dispositions de
l’article 344 du C.P.C.C. pour « demander que l’indisponibilité de la créance
saisie-arrêtée soit limitée dans son étendue, qu’elle soit « cantonnée » ; d’où le
mot « cantonnement » utilisé pour désigner cette procédure »220.
Les origines de cette procédure en droit français remontent au cours du
XIXème siècle, où la pratique avait imaginé « le système dit d’affectation spéciale
où le saisi assignait en référé le créancier saisissant et le tiers saisi, demandant
l’autorisation de toucher l’excédent des sommes saisie-arrêt ées sur les causes de
la saisie, moyennant dépôt d’une garantie pour assurer le paiement du
saisissant »221.
Le saisi déclarait, ainsi, consentir au transport cession de ces sommes jusqu’
à concurrence de ce qui serait reconnu être dû au saisissant par le jugement de
validité. Ce procédé impliquait généralement un accord amiable entre les
intéressés, le référé n’ayant d’autre utilité que de donner à cet accord
l’authenticité222.

219
S. MELLOULI, op. cit., p. 149.
220
R. PERROT, op. cit., p. 178.
221
J. VINCENT et J. PRÉVAULT, op. cit., p. 254, § 301.
222
Ibid., p. 254, § 301.

84
Les modalités de l’indisponibilité du compte saisi

Ce système convenait à tous les intervenants dans la saisie-arrêt . Le


débiteur saisi pouvait se faire payer une partie de sa créance, le créancier saisissant
bénéficiait d’une affectation immédiate sur les sommes consignées et était à l’abri
de tout concours avec les créanciers ultérieurs, et le tiers saisi se libérait
définitivement des fonds et n’est plus dépositaire des sommes consignées223. Ce
système a été légalisé, en France par la loi du 17 juillet 1907 modifiant l’article
567 de l’ancien Code de Procédure Civile Français224.
A cet effet, certains considèrent que cette loi a été reprise par le droit
tunisien dans l’article 344 du C.P.C.C.225. qui détermine les conditions du
cantonnement (A) ainsi que ses effets (B).

A- Les conditions du cantonnement

Pour que le débiteur saisi bénéficie du cantonnement, il doit en faire une


demande, avant qu’il ne consigne un certain montant.

223
R. PERROT, op. cit., p. 179.
224
L’article 567 de l’ancien Code de Procédure Civile français tel que modifié par la loi du 17
Juillet 1907 dispose que :
"La demande en validité, et la demande en mainlevée formée par la partie saisie, seront portées
devant le tribunal du domicile de la partie saisie.
En tout état de cause, et quel que soit l'état de l'affaire, la partie saisie arrêtée pourra se pourvoir
en référé afin d'obtenir l'autorisation de toucher du tiers saisi, nonobstant l'opposition, à la
condition de verser à la caisse des dépôts et consignations, ou aux mains d'un tiers commis à
cet effet, somme suffisante, arbitrée par le juge des référés, pour répondre éventuellement des
causes de la saisie - arrêt, dans le cas où le saisi se reconnaîtrait ou serait jugé débiteur.
Le dépôt ainsi ordonné sera affecté spécialement aux mains du tiers détenteur à la garantie des
créances pour sûreté desquelles la saisie-arrêt aura été opérée, et privilège exclusif de tout autre
leur sera attribué sur ledit dépôt.
A partir de l'exécution de l'ordonnance de référé, le tiers saisi sera déchargé et les effets de la
saisie-arrêt transportés sur le tiers détenteur.”.
225
A. BACHA, op. cit., p. 46.

85
Les modalités de l’indisponibilité du compte saisi

Quant à la demande du cantonnement, l’article 344 du C.P.C.C. a précisé


à qui revient de la présenter, quand et auprès de qui le faire.
Contrairement à la consignation objet de l’article 333 du C.P.C.C., le
cantonnement n’est pas laissé à l’initiative de toutes les parties, l’article 344
du C.P.C.C. n’autorisait la faculté de demander le cantonnement qu’au débiteur
saisi et à lui seul.
Le législateur refuse le droit de demander le cantonnement au créancier
saisissant, car dans ce cas il « se constitue un privilège et se crée un avantage par
rapport aux autres créanciers » en infraction au principe de l’égalité entre les
créanciers d’un même débiteur226.
Le tiers saisi, lui aussi, est interdit de demander le cantonnement, il a juste
le droit à la consignation au sens de l’article 333 du C.P.C.C.
Quant au moment où le cantonnement doit être demandé, l’article 344
du C.P.C.C. est libéral à cet égard en disposant que le cantonnement peut être fait
« en tout état de cause ». Cette formule marque la volonté du législateur
d’autoriser le cantonnement dès la délivrance de l’exploit de saisie-arrêt au tiers
saisi jusqu’à l’instance en validité.
Enfin, l’article 344 du C.P.CC.C. dispose que la demande de cantonnement
doit être faite au juge des référés désigné à l’article 330 du C.P.C.C., ce dernier
peut être soit le juge cantonal ou le président du tribunal de première instance du
lieu du domicile du débiteur, selon le montant de la créance cause de la saisie227.
En outre du respect de ces conditions, relatives à la demande de
cantonnement, le débiteur saisi doit consigner une somme d’argent pour
bénéficier du cantonnement.

226
Ibid., p. 47.
227
L’article 39 du C.P.C.C., tel que modifié par la loi n° 94-59 du 23 mai 1994, fixe le taux de
ressort à sept mille dinars.

86
Les modalités de l’indisponibilité du compte saisi

En fait, le cantonnement n’est autorisé que lorsqu’une somme d’argent


est consignée pour garantir au créancier saisissant le paiement de sa créance.
La consignation, au sens de l’article 344 du C.P.C.C. porte sur une somme
d’argent dont le juge des référés va apprécier souverainement le montant en tenant
compte des causes de la saisie-arrêt et les oppositions, mais sans être lié par
l’estimation effectué par le juge qui autorisait la saisie (d’un point de vue
juridique, il est le même, mais la personne peut être différente)228.
Ainsi, le saisi doit consigner lui-même ou faire consigner par le tiers saisi,
la somme estimée par le juge des référés et le montant de cette consignation est
alors déposé à la Caisse des Dépôts et Consignations ou entre les mains d’un tiers
consignataire.
Une fois les conditions de validité du cantonnement réunies, ce dernier va
produire ses effets.

B- Les effets du cantonnement

Les effets du cantonnement peuvent être appréciés tant du côté des parties
saisies, à savoir le débiteur et le tiers saisi, que de celui du créancier saisissant.
Pour les parties saisies, à partir du moment où la consignation est effectuée,
« la saisie-arrêt perd tout effet à l’égard du tiers saisi »229. Ainsi, le tiers saisi se
libère de l’indisponibilité et le débiteur saisi recouvre ses droits et peut exiger le
paiement du tiers saisi. Seules les sommes consignées restent indisponibles230.
Dans ce contexte, la Cour de cassation confirme que la levée de
l’indisponibilité est automatique sous présentation de justificatifs de la

228
A. BACHA, op. cit., p. 47.
229
L’article 344 du C.P.C.C.
230
Voir à ce propos :
.201 .‫ ص‬،‫ مرجع سابق الذكر‬،‫خليفة الخروبي‬

87
Les modalités de l’indisponibilité du compte saisi

consignation, et ce, même si le tribunal est déjà saisi de l’instance en validité de


la saisie231.
Pour le créancier saisissant, l’article 344 du C.P.C.C. prévoit que « la
somme consignée est affectée spécialement au paiement des créances du
saisissant et des opposants ». Ainsi, le créancier saisissant et les créanciers
opposants qui sont intervenus avant la procédure du cantonnement « ne redoutent
plus le concours des créanciers ultérieurs et bénéficient d’une sorte de privilèges
sur les sommes consignées »232.
Cet avantage « se déduit de l’adverbe « spécialement » utilisé par le
législateur. Les saisissants qui se manifestent ultérieurement au cantonnement ne
menacent plus le premier saisissant de leur droit au partage des sommes
saisies »233.
A ce propos, M. PERROT estime que « ce privilège, qui normalement
devrait être la conséquence du jugement de validité, va être accordé au début de
la procédure »234, et ce pour le droit français sous l’égide de l’ancien Code de
Procédure Civile.
L’article 567 dudit code, qui régit le cantonnement, prévoit que « le dépôt
ainsi ordonné sera affecté spécialement aux mains du tiers détenteur à la
garantie des créances pour sûreté desquelles la saisie-arrêt aura été opérée, et
privilège exclusif de tout autre leur sera attribué sur ledit dépôt ».
En droit tunisien, l’article 344 du C.P.C.C., dispose que la somme
consignée « est affectée spécialement au paiement des créances du saisissant et

231
Voir à ce propos :
:240 .‫ ص‬،1997 ‫ت‬.‫م‬.‫ ن‬،1997 ‫ أفريل‬16 ‫ مؤرخ في‬،45346 ‫ عدد‬،‫قرار تعقيبي مدني‬
‫ مما يجعل إثارة‬.‫ت‬.‫م‬.‫م‬.‫ من م‬344 ‫"إن رفع العقلة يكون بعد اإلدالء بما يفيد تأمين المبلغ لفائدة المعقب ضدها تطبيقا للفصل‬
‫المعقب اآلن من أن المحكمة التي تتعهد بالنظر في صحة العقلة هي الت تتعهد بالنظر في سحب المال هو أمر مردود عليها‬
."‫لسابقية وقوع رفع تلك العقلة‬
232
S. MELLOULI, op. cit., p. 148.
233
A. BACHA, op. cit., p. 48.
234
R. PERROT, op. cit., p. 183.

88
Les modalités de l’indisponibilité du compte saisi

des opposants », sans lui attribuer le rang de « privilège exclusif ».


Certainement, il ne s’agit pas d’un oubli de la part du législateur tunisien, mais
plutôt d’un choix volontaire et délibéré.
De même, et compte tenu de l’article 194 du C.D.R. qui définit le privilège
comme étant « un droit réel de préférence que la loi accorde sur les biens du
débiteur à raison de la cause de la créance », le cantonnement n’offre au
saisissant qu’une garantie sûre face aux saisissants ordinaires postérieurs à la
consignation, sans être un privilège tel que défini par le C.D.R.235.

En conclusion, il convient de noter que la levée de l’indisponibilité peut se


faire soit amiablement avec l’accord des parties soit judiciairement. Le recours au
juge peut avoir pour objet soit de consigner les sommes saisies au sens de l’article
334 du C.P.C.C., soit de cantonner la saisie au sens de l’article 344 du C.P.C.C.
La consignation est ouverte à toutes les parties de la saisie mais elle ne
confère rien au saisissant. Par contre, le cantonnement, qui est plus rigoureux,
affecte les sommes consignées spécialement au paiement du saisissant ou
opposant intervenant avant la consignation.
S’ajoute à cette possibilité d’obtenir une mainlevée judiciaire en référé, une
autre avec un jugement sur le fond.

Section II : La levée de l’indisponibilité avec un


jugement sur le fond

235
Voir à ce propos :
:62 .‫ ص‬،9 ‫ عدد‬،1962 ‫ نوفمبر‬.‫ت‬.‫ق‬.‫ م‬،8552 ‫حكم مدني صادر عن المحكمة االبتدائية بتونس عدد‬
‫"وحيث أن التأمين الحاصل على هذه الصورة تنحصر فيه العقلة اذ أنه مخصص باالمتياز للوفاء بالدين الذي من أجله وقعت‬
".‫العقلة وال معنى للحصر غير ذلك‬

89
Les modalités de l’indisponibilité du compte saisi

Les dispositions de l’article 333 du C.P.C.C. donnent au débiteur saisi la


possibilité de libérer son compte de l’effet d’indisponibilité soit par accord
amiable, ou une décision de justice.
Aux termes dudit article, ces décisions de justice sont des jugements qui
statuent sur le fond du litige, comme le confirme la version arabe dudit texte236,
qui prononcent soit la nullité (§ I), soit la validité de la saisie (§ II).

§ I : Le jugement prononçant la nullité de la


saisie

La saisie-arrêt est une procédure juridique très complexe, soumise comme


toute procédure à des conditions de fond et de forme très strictes. En conséquence,
toute irrégularité que ce soit pour la non observation d’une règle de procédure ou
le non accomplissement d’une condition de fond, fera tomber la saisie-arrêt .
Le premier intéressé à réagir pour se libérer des entraves de la saisie-arrêt
est le saisi qui voit ses liquidités rendues indisponibles. Il tentera de prouver
qu’une ou plusieurs conditions exigées par la loi ne sont pas remplies ou ont été
accomplies irrégulièrement.
Ainsi, il importe d’étudier d’abord la procédure en annulation ou en
mainlevée de la saisie (A) pour étudier ensuite quelles sont les causes de nullité
qu’il est possible d’invoquer (B).

A- La procédure en annulation de la saisie

Le débiteur saisi ou le tiers saisi doit invoquer la nullité de la saisie devant


le tribunal compétent et ce, peu importe la forme de la demande en nullité.

236
Voir à ce propos :
‫ ال يتخلى عن المبالغ والمنقوالت المذكورة إال بموجب اتفاق علـى رفـع العقلة أو حكم قاض‬..." :.‫ت‬.‫م‬.‫م‬.‫ من م‬333 ‫الفصل‬
".314 ‫بصحة العقلة التوقيفية أو بطالنها أو رفعها وذلك مع مراعاة أحكام الفصل‬

90
Les modalités de l’indisponibilité du compte saisi

En effet, le débiteur saisi peut demander la nullité de la saisie-arrêt


pratiquée sur son compte soit par une action principale ou par une demande
reconventionnelle237.
Pour ce qui est l’action principale, elle consiste en l’assignation en
mainlevée au sens de l’article 342 du C.P.C.C. qui prévoit que « le débiteur saisi
peut assigner le saisissant en mainlevée de la saisie-arrêt ».
Pour la demande reconventionnelle, elle est une demande « formée par le
défendeur pour servir de défense à l'action principale ou pour obtenir la
compensation judiciaire ou l'allocation de dommages intérêts à raison du
préjudice causé par le procès »238. Ainsi, le débiteur saisi pourra invoquer la
nullité de la saisie, au cours de l’instance en validité, en formant simplement une
demande reconventionnelle qui se greffera sur la demande en validité239.
Mais, que la demande soit une demande principale ou reconventionnelle, la
demande doit être présentée devant le tribunal compétent.
Pour la compétence territoriale, l’article 343 du C.P.C.C. dispose que « les
demandes en validité et en mainlevée de saisie-arrêt sont portées devant la
juridiction compétente du lieu du domicile du débiteur saisi ».
Pour la compétence d’attribution, et en l’absence de règle spécifique, il faut
revenir aux règles de droit commun. L’assignation en validité ou en mainlevée est
portée devant le juge cantonal, si le montant de la demande ne dépasse pas les
sept mille dinars. Si l’objet de la saisie est supérieur à ce taux de ressort, c’est le

237
Voir à ce propos :
:200 .‫ ص‬،‫ مرجع سابق الذكر‬،‫خليفة الخروبي‬
‫"التصريح بالبطالن يمكن أن يحصل في نطاق دعوى التصحيح بأن يحتج المعقول عنه في إطار دعوى معارضة ببطالن‬
‫ وفي كلتا الدعويين فإن المحكمة تأذن‬.‫العقلة أو في إطار دعوى مستقلة يرفعها المدين المعقول عنه أمام المحكمة المختصة‬
."‫برفع العقلة‬
238
L’article 28 du C.P.C.C.
239
Voir à ce propos :
.200 .‫ ص‬،‫ مرجع سابق الذكر‬،‫خليفة الخروبي‬

91
Les modalités de l’indisponibilité du compte saisi

tribunal de première instance qui est appelé à juger, par application aux termes de
l’article 39 du C.P.C.C.
En définitive, que ce soit le juge cantonal ou le tribunal de première
instance, et que ce soit dans le cadre d’une instance en mainlevée ou en instance
de validité, la juridiction compétente doit statuer sur l’existence des causes de
nullité de la saisie.

B- Les causes de la nullité de la saisie

Les causes de nullité de la saisie-arrêt varient selon qu’elle a été pratiquée


en vertu d’un titre exécutoire ou en vertu d’une ordonnance sur requête.
En effet, aux termes de l’article 335 du C.P.C.C. si la saisie-arrêt est
pratiquée en vertu d’un titre exécutoire, le débiteur saisi ne peut invoquer que les
irrégularités tenant à la procédure de la saisie-arrêt . Par contre, si la saisie n’a pas
été pratiquée en vertu d’une ordonnance sur requête, le débiteur saisi peut
contester au créancier saisissant le droit de procéder à une saisie-arrêt ou bien,
prétendre que la procédure a été conduite dans des conditions irrégulières.
S’agissant des contestations portantes sur le droit du saisissant à procéder à
une saisie-arrêt vu l’absence des conditions de fond requises par la loi, le débiteur
saisi peut soutenir que la créance cause de la saisie n’existe plus parce qu’elle a
été déjà payée ou qu’elle est prescrite. Il peut aussi soulever que la saisie a été
effectuée en vertu d’une créance qui n’est pas encore exigible240.
En fait, l’exigibilité n’est pas requise par l’article 330 du C.P.C.C.
expressément mais « admettre la saisie-arrêt pour une créance à terme revient

240
Voir à ce propos :
:21 .‫ ص‬،1974 ‫ت‬.‫م‬.‫ ن‬،1974 ‫ مارس‬12 ‫ مؤرخ في‬،9995 ‫ عدد‬،‫قرار تعقيبي مدني‬
‫"إذا أجرى دائن بدين ثابت عقلة توقيفية على أمالك مدينه فإن المدين ال حق له في طلب الرجوع في هذه العقلة إال متى أثبت‬
".‫عدم وجود الدين المذكور أو الخالص فيه‬

92
Les modalités de l’indisponibilité du compte saisi

pratiquement à priver le saisi du terme, puisque la menace de blocage de ses


fonds l’incitera à payer avant terme »241.
Ainsi, la jurisprudence a rejeté les saisies-arrêts ayant pour cause le solde
d’un compte courant non encore clôturé242 ou irrégulièrement clôturé243, car c’est
la clôture du compte courant qui rend le solde de ce dernier exigible.
Toutefois, l’article 330 du C.P.C.C. permet au créancier de pratiquer une
saisie-arrêt pour une créance affectée ou à terme, à condition qu’elle soit exigible
à la date du jugement de validité244.
Ainsi, le débiteur saisi peut invoquer que la créance est contestée si la saisie
a été effectué en vertu d’un jugement non exécutoire. Mais, la contestation de la
créance ne constitue pas un obstacle à la saisie-arrêt dans sa première phase et le
Tribunal doit surseoir à statuer sur la demande en validité jusqu’à ce que ledit
jugement soit devenu exécutoire 245.
En plus de l’absence des conditions relatives à la créance cause de la saisie,
le débiteur saisi peut demander la nullité de la saisie en contestant la régularité
de la procédure de cette dernière.
Ainsi, il y a nullité de la saisie-arrêt pour motifs de forme si l’exploit n’a
pas été rédigé ou signifié dans les formes prescrites.

241
A. BACHA, op. cit., p. 70.
242
Voir à ce propos :
:175 .‫ ص‬،1985 ‫ت‬.‫م‬.‫ ن‬،1985 ‫ نوفمبر‬4 ‫ مؤرخ في‬،11424 ‫ عدد‬،‫قرار تعقيبي مدني‬
".‫"ان قفل الحساب الجاري يؤلف من نتيجة الحساب الثابتة يوم القفل فاضال مستحق االداء في الحال‬
243
Trib. 1ère Inst. De Tunis : Jugement n° 11033 du 13 Juillet 1978 ; et n° 11557 du 9 Février
1980
(Cité dans : A. BACHA, op. cit., p. 70.)
244
Voir à ce propos :
:188 .‫ ص‬،‫ مرجع سابق الذكر‬،‫خليفة الخروبي‬
‫"إن حلول الدين الذي لم يشترطه المشرع صراحة يبدو بديهيا ألن العقلة التوقيفية يكون مآلها من الناحية اإلجرائية القيام‬
."‫بدعوى في صحة العقلة واألداء وعندئذ يشترط أن يكون الدين حاال حتى يصدر الحكم بأدائه‬
245
L’alinéa 3 de l’article 335 du C.P.C.C.

93
Les modalités de l’indisponibilité du compte saisi

En fait, l’article 332 alinéa 1er du C.P.C.C. dispose que la saisie-arrêt est
faite au moyen d’un exploit d’huissier de justice signifié au tiers saisi et auquel
est annexée une copie du jugement en vertu duquel elle est pratiquée ou de
l'ordonnance qui l'a autorisée et de la requête sur laquelle cette ordonnance a été
rendue.
L’article 332 alinéa 2 du C.P.C.C. exige que, à peine de nullité, l’exploit de
la saisie-arrêt doit énoncer l’ordonnance qui l’a autorisé ou le jugement en vertu
duquel elle est pratiquée, indiquer le montant de la créance du saisissant, énoncer
l’identité complète du débiteur saisi et son domicile, et s’il est une personne
morale ou commerçant, le numéro et le lieu de son immatriculation au registre de
commerce.
Si le débiteur n’y est pas immatriculé, l’exploit doit en faire mention
express, et reproduire les termes des articles 333, 337 à 339 et 341 du C.P.C.C.
En plus de cela, l’article 335 du C.P.C.C. exige que « le saisissant doit, à
peine de nullité de la saisie-arrêt, la signifier au débiteur saisi dans les cinq jours
qui suivent son établissement, par exploit d’huissier de justice comportant
assignation à comparaître devant la juridiction compétente, dans un délai de huit
jours au minimum et de vingt et un jours au maximum, pour valider la saisie-
arrêt.
Il doit, également, enrôler l’affaire au greffe du tribunal compétent dans un
délai ne dépassant pas quarante-huit heures à compter de la date de l’assignation
du saisi ».
Ainsi, l’article 335 du C.P.C.C. règlemente l’acte de dénonciation de la
saisie-arrêt et de l’assignation en validité
Pour la première, elle consiste à reproduire la copie de l’exploit de saisie-
arrêt pour que le débiteur saisi soit au courant de la procédure de saisie-arrêt

94
Les modalités de l’indisponibilité du compte saisi

engagé sur son compte et de la teneur de l’exploit signifié au tiers saisi246. Pour la
deuxième, elle contient une assignation au débiteur en validité de la saisie-arrêt .
L’assignation doit être suivie d’une mise en en cause au tiers saisi dans
l’instance en validité. En fait l’article 336 du C.P.C.C. dispose que « le saisissant
doit, également, mettre en cause le tiers saisi dans l’instance en validité cinq jours
au moins avant la première audience. L’exploit de mise en cause doit, sous peine
de nullité, contenir le numéro de l’affaire et la date de l’audience ».
En des termes généraux, le saisissant est tenu de respecter la forme, le
contenu et les délais de l’exploit de la saisie-arrêt , de la dénonciation et de
l’assignation prescrits par la loi sous peine de nullité.
D’ailleurs, le débiteur saisi peut invoquer soit par action principale ou par
demande reconventionnelle la nullité de la saisie pratiquée sur son compte qui
peut avoir pour objet soit un vice de fond ou un vice de forme.
En tout état de cause, le jugement portant annulation de la saisie va donner
une mainlevée de la saisie. Cette mainlevée peut être aussi obtenue, si la saisie a
été faite en respectant toutes les conditions imposées par la loi. Mais, là le
jugement va porter validation de la saisie.

§ II : Le jugement prononçant la validité de la


saisie

Le jugement de validité a pour but, si la saisie est effectuée sur permission


du juge, de constater l’existence et le montant exact de la créance invoquée et
donner au saisissant le titre exécutoire qui lui faisait défaut247. Par contre si la
saisie est faite en vertu d’un titre exécutoire, l’instance aura pour seul but de
valider la saisie-arrêt .

246
S. MELLOULI, op. cit., p. 138.
247
H. SOLUS, op. cit., p. 123.

95
Les modalités de l’indisponibilité du compte saisi

A ce propos, il convient de noter que le jugement peut valider la saisie-arrêt


mais sans qu’elle aboutisse au saisissant s’il s’avère lors de l’instance en validité
que le banquier tiers saisi déclare qu’il ne détient ou qu’il ne doit aucune somme
appartenant au débiteur248. Ainsi, le jugement n’aura aucun effet puisqu’il n’y a
pas de créance entre les mains d’un tiers249.
Mais si la déclaration du tiers saisi est affirmative, le jugement de validité
va produire ses effets qui se distinguent, selon l’article 345 du C.P.C.C., suivant
que la saisie porte sur des meubles corporels ou sur une créance d’argent.
En effet, « si la saisie-arrêt porte sur des objets mobiliers, il sera procédé
à leur saisie-exécution et à la distribution du prix en provenant »250. Par contre,
si la saisie porte sur une somme d’argent, notamment sur un compte courant, le
tiers saisi « est tenu de verser aux créanciers saisissants et opposants les sommes
dont il s'est reconnu ou a été jugé débiteur envers la partie saisie, à concurrence
du montant de leurs créances »251.
Ainsi, le jugement validant la saisie-arrêt sur un compte courant va
permettre au créancier saisissant de se faire payer directement par le tiers saisi et
ordonnera à ce dernier de vider ses mains entre celles du saisissant, d’où le nom

248
Voir à ce propos :
:201 .‫ ص‬،‫ مرجع سابق الذكر‬،‫خليفة الخروبي‬
‫"قد تكون إجراءات العقلة مستوفاة بدون أن تؤدي إلى نتيجة إيجابية وذلك كلما كان تصريح المعقول تحت يده سلبيا بمعنى‬
‫ أما إذا كان التصريح إيجابيا مع صحة إجراءات العقلة فإن المحكمة المتعهدة تصدر‬.‫عدم وجود مال للمعقول عنه تحت يده‬
."‫حكمها قاضيا بإلزام المعقول تحت يده بتسليم المال الموجود تحت يده والتابع للمعقول عنه مباشرة إلى الدائن العاقل‬
249
Voir à ce propos :
‫ مرافعات مدنية‬:‫ فقه قضاء محكمة التعقيب‬،‫ عصام األحمر‬،2009 ‫ أفريل‬4 ‫ مؤرخ في‬،25072 ‫قرار تعقيبي مدني عدد‬
:126 .‫ ص‬،2013 ‫ تونس‬،‫وتجارية‬
‫"تبين من مظروفات القضية أن التصاريح الصادرة عن المعقول تحت أيديهم وردت جميعها سلبية األمر الذي دعا محكمة‬
."‫الموضوع إلى الحكم برفع العقلة عن كافة المعقول تحت أيديهم وإخراجهم من القضية‬
250
L’alinéa 3 de l’article 345 du C.P.C.C.
251
L’article 345 du C.P.C.C. alinéa 1er.

96
Les modalités de l’indisponibilité du compte saisi

de « jugement de main-vidange » qu’on lui donne couramment en


pratique252.
Ainsi, il convient d’étudier la nature juridique de ce « jugement de main-
vidange » (A) et à quelles conditions il produira ses effets (B) ?

A- La nature juridique du jugement de


main-vidange

En fait, il y a deux manières d'analyser le jugement validant la saisie-arrêt ,


notamment le jugement de main-vidange, et ces deux manières aboutissent à des
résultats pratiques différents253.
Selon une première opinion, le jugement de validité est une indication de
paiement. Ainsi, la créance reste dans le patrimoine du débiteur saisi et le tiers
saisi est seulement informé de se libérer entre les mains du saisissant, qui ne
devient pas le créancier direct du tiers saisi254.
En conséquence, les créanciers qui auraient fait opposition postérieurement
au jugement de validité, viendraient en concours avec le saisissant et participeront
à la distribution des deniers bloqués.
Cette analyse du jugement de validité ne protège pas le premier créancier
saisissant, qui a obtenu un jugement de validité, d’un concours éventuel avec
d’autres créanciers du même débiteur255.
Selon une seconde opinion, le jugement de validité opère une cession
judiciaire de la créance au profit du saisissant. Le tiers saisi cesse d’être le
débiteur du saisi et devient le débiteur direct du saisissant.

252
J. VINCENT et J. PRÉVAULT, « Voies d’exécution et procédures de distribution », op. cit.,
p. 246, § 290.
253
R. PERROT, op. cit., p. 170.
254
J. VINCENT et J. PRÉVAULT, op. cit., p. 246, § 291.
255
R. PERROT, op. cit., p. 171.

97
Les modalités de l’indisponibilité du compte saisi

Ainsi, le débiteur saisi est dessaisi, il n'est plus créancier du banquier pour
les fonds détenus qui sortent définitivement de son patrimoine. Le saisissant est
déclaré créancier direct du tiers saisi.
La conséquence pratique de cette analyse révèle l’intérêt pratique de la
controverse. En effet, vu que la créance objet de la saisie est sortie du patrimoine
du débiteur saisi jusqu’à concurrence des causes de la saisie, le créancier saisissant
a désormais un droit exclusif sur les deniers256.
Ainsi, l’effet principal de ce système est la négation de tout droit aux
saisissants et opposants ultérieurs au jugement de validité, sauf pour la partie des
sommes saisies-arrêtées qui dépasse les créances des saisissants ou opposants
antérieurs.
Par la même, ce système confère au saisissant un droit exclusif sur la
somme qui lui est due, sans avoir à craindre le concours d’autres créanciers qui
n’auraient formé opposition qu’après le jugement de validité.
Ce système, consacré par la jurisprudence française « s’inspire d’une
considération d’ordre pratique qui est de protéger le créancier saisissant, lequel
ayant déjà engagé une procédure longue et difficile, doit être mis à l’abri de toutes
nouvelle saisie »257.
Selon certains, cette jurisprudence a voulu reconnaitre une situation
analogue à celle qui résultait, dans l’ancien droit, du privilège accordé au premier
saisissant : « jura vigilantibus »258.
Mais, cette solution a pour effet de reconnaitre au créancier saisissant un
privilège sur les sommes saisies arrêtées. Or, un privilège ne peut être institué que
par la loi comme l’exige l’article 191 du C.D.R.

256
Ibid., p. 171.
257
Ibid., p. 171.
258
H. SOLUS, op. cit., p. 124.

98
Les modalités de l’indisponibilité du compte saisi

Après avoir abordé les deux conceptions du jugement de validité, il


convient de se demander sur lequel de ces systèmes est consacré par le législateur
tunisien ?

A la lecture de l’article 345 du C.P.C.C. on s’aperçoit que par le jugement


de validité le tiers saisi devient le débiteur direct du saisissant et à défaut de
paiement, le créancier peut poursuivre l’exécution sur ses biens.
Un deuxième texte, à savoir, l’alinéa 2 de l’article 347 du C.P.C.C. dispose
que « toutefois, les saisies-arrêts ou oppositions pratiquées après un jugement
validant une précédente saisie et devenu exécutoire, n'ont d'effet que sur la partie
des sommes saisies-arrêtées qui dépasse les créances des saisissants ou
opposants antérieurs ».
Par cet article, « le législateur a repris "fidèlement" la jurisprudence
française » qui donne au jugement de validité de la saisie-arrêt l’effet d’une
cession judiciaire et met le saisissant à l’abri d’un éventuel concours avec des
opposants ultérieurs259.
Mais, pour produire son effet, certaines conditions doivent être remplies par
le jugement de main-vidange.

B- Les conditions de mise en œuvre du


jugement de main-vidange

L'effet attributif de la créance saisie-arrêtée au saisissant est subordonné à


plusieurs conditions, dont certaines sont relatives au jugement de validité de la
saisie et d’autres à la déclaration faite par le tiers saisi.

259
A. BACHA, op. cit., p. 83.

99
Les modalités de l’indisponibilité du compte saisi

S’agissant du jugement de validité, il faut qu’il soit exécutoire à l’égard


du tiers saisi. Cette condition va donner lieu à de nouvelles conséquences de
nature à différer le moment où le jugement de validité produira ses effets260.
D’abord, pour acquérir la force exécutoire, le jugement de validité doit être
notifié au tiers saisi, car un jugement ne peut pas devenir exécutoire tant qu’il n’a
pas été notifié.
A cet effet, l’article 345 du C.P.C.C, impose la signification du jugement
de validité au tiers saisi, et à cette dernière d’être annexé d’un exploit de la
signification dudit jugement au débiteur saisi comme l’indique l’article 346 du
C.P.C.C.
En plus de cela, l’article susmentionné, impose au saisissant d’annexé à
l’exploit de signification du jugement de validité signifié au tiers saisi « un
certificat de non-appel délivré par le greffier de la juridiction d'appel compétent,
si le jugement de validité a été rendu en premier ressort et n'est pas assorti de
l'exécution provisoire ».
Ce certificat implique qu'en cas d'appel, il faudrait attendre le jour où la
juridiction saisie aura statué, sauf exécution provisoire, si elle e été ordonnée261.
Cette exigence du certificat de non appel se complémente avec la deuxième
condition relative au jugement de validité de la saisie-arrêt exigée par l’article 347
du C.P.C.C.

En fait, ledit article dans son 2ème alinéa dispose que « les saisies-arrêts ou
oppositions pratiquées après un jugement validant une précédente saisie et
devenu exécutoire, n'ont d'effet que sur la partie des sommes saisies-arrêtées qui
dépasse les créances des saisissants ou opposants antérieurs ».

260
A. JOLY, op. cit., p. 72, § 364.
261
A. BACHA, op. cit., p. 83.

100
Les modalités de l’indisponibilité du compte saisi

Ainsi, l’effet attributif du jugement de validité de la saisie-arrêt est différé


jusqu’à la date ou ledit jugement devient exécutoire, soit après l’expiration du
délai d’appel ou en cas de confirmation du jugement en appel.
Le législateur consacre le transport-cession si le jugement de validité est
exécutoire. A contrario, avant que ledit jugement ne soit exécutoire, les opposants
vont venir en concurrence avec le saisissant titulaire d’un jugement de validité
susceptible d’appel.
Ensuite, pour que le jugement de main vidange soit valable, il faut qu’il y
ait une déclaration affirmative.
En fait, le tiers saisi est assigné à faire une déclaration devant le tribunal
chargé de contrôler la procédure de la saisie-arrêt .
Cette déclaration prend la forme d’une réponse écrite déposée au plus tard
le jour de l’audience de plaidoirie, soit au greffe de la juridiction saisie de la
demande en validité, contre récépissé, soit à l’audience même262.
Dans cette réponse, le banquier tiers saisi doit indiquer avec exactitude sa
situation vis-à-vis du débiteur saisi en déclarant :
«1) les causes et le montant de sa dette envers la partie saisie,
2) le cas échéant, les causes d’extinction totale ou partielle de cette dette,
avec l’indication de leur date,
3) les autres saisies-arrêts pratiquées entre ses mains à l’encontre du
débiteur saisi et ayant conservé leurs effets, ainsi que les oppositions faites en
vertu de l’article 313 de ce code, avec l’indication de leur date, de leurs causes
et des nom, prénom et adresse des créanciers saisissants ou opposants,
4) les cessions de créance consenties par la partie saisie et signifiées au
tiers saisi ou acceptées par lui, avec l’indication de leur date et des nom, prénom
et adresse des cessionnaires.

262
Voir à ce propos :
.41‫ ص‬،2008 .‫ت‬.‫ق‬.‫ م‬،‫ آجال تصريح الغير المعقول تحت يده‬،‫جمال بكار‬

101
Les modalités de l’indisponibilité du compte saisi

A cette déclaration doivent être annexées toutes les pièces


justificatives ».263
L’obligation pour le tiers saisi de faire une déclaration non équivoque et
justifiée, est assortie d’une sanction prévue par l’article 341 du C.P.C.C.
Cet article dispose que « si le tiers saisi n'a pas fait sa déclaration dans les
formes et délais légaux, s'il a fait une déclaration mensongère ou s'il a dissimulé
les pièces qu'il est tenu de produire à l'appui de sa déclaration, il sera déclaré
débiteur pur et simple à l'égard des créanciers saisissants et opposants, et
condamné à leur payer le montant de leurs créances, sans préjudice de tous
dommages-intérêts
S'il a ainsi payé plus qu'il ne devait au saisi, le tiers saisi aura un recours
contre ce dernier pour l'excédent ».
Mais, le fait que le tiers saisi présente une déclaration régulière en la forme
n’empêche pas le saisissant ou le saisi de la contestée, notamment si le banquier
fait une saisie sur soi-même, car les deux ont intérêt à voir le saisi reconnu
débiteur264.
La contestation qui tend à rectifier l’inexactitude de la déclaration n’est pas
franchement exprimée par la loi. Cependant elle est déduite de l’article 345 du
C.P.C.C. qui admet que « le tiers saisi est tenu de verser aux créanciers
saisissants et opposants les sommes dont il s'est reconnu ou a été jugé débiteur
envers la partie saisie, à concurrence du montant de leurs créances ».
Ainsi, le créancier saisissant ou le débiteur saisi peuvent demander à la cour
statuant sur la validité de la saisie, une expertise pour contester la déclaration faite

263
L’article 337 du C.P.C.C.
264
A. BACHA, op. cit., p. 84.

102
‫‪Les modalités de l’indisponibilité du compte saisi‬‬

‫‪par le banquier à condition que cette contestation soit sérieuse, comme l’a exigé‬‬
‫‪la Cour de cassation265.‬‬
‫‪La déclaration mensongère du tiers saisi peut porter soit sur les sommes‬‬
‫‪existant au compte le jour de la saisie, soit sur les opérations ultérieures qui vont‬‬
‫‪se régulariser et ainsi affecter le solde initialement saisi. La régularisation des‬‬
‫‪opérations en cours constitue la deuxième modalité dont l’effet d’indisponibilité‬‬
‫‪doit tenir compte.‬‬

‫‪Chapitre II : La régularisation des opérations en‬‬


‫‪cours‬‬

‫‪L’article 333 du C.P.CC., tel que modifié par la loi n° 82 du 3 août 2002,‬‬
‫‪prévoit que « la saisie frappe les sommes existantes au solde que le compte fait‬‬
‫‪apparaître au jour de la saisie ». Ce solde est déterminé en tenant compte des‬‬
‫‪opérations en cours. Ainsi, la saisie ouvre une période de liquidation de ces‬‬
‫‪opérations266.‬‬

‫‪265‬‬
‫‪Voir à ce propos :‬‬
‫قرار تعقيبي مدني‪ ،‬عدد ‪ ،48818‬مؤرخ في ‪ 14‬جانفي ‪ ،1998‬ن‪.‬م‪.‬ت ‪ ،1998‬ص‪:229 .‬‬
‫"حيث تبين مما له أصل ثابت باألوراق وأن المحكمة المطعون في حكمها لم تأخذ بعين االعتبار دفوعات الطاعنة لعدم إدالئها‬
‫بالمؤيد المتمسك بها بما أضحت معه منازعتها غير جدية كما أنها لم تستجب لطلب إعادة اإلختبار لعدم تقديم ولو بداية حجة‬
‫توهن النتيجة التي توصل إليها اإلختبار"‪.‬‬
‫‪266‬‬
‫‪Voir à ce propos :‬‬
‫مداوالت مجلس النواب‪ 16 ،‬و‪ 17‬جويلية ‪ ،2002‬عدد ‪ ،40‬ص‪:2124 .‬‬
‫"‪...‬بسبـــب توالي العمليــات البنكية‪ ،‬وعدم إمكان تقييدها بالحساب بمجـــرد إنجازها‪ .‬ويحصل في كثيرا من األحيان أن‬
‫تجرى العقلة قبل تقييد عدة عمليات بالحساب ‪ ،‬بحيث يجد المعقول تحت يده نفسه مطالبا بتعديل فاضل الحساب على ضوء‬
‫ما ظهر من عمليات ‪ ،‬إال أن غموض النصوص التشريعية في ما يخص هذه المسألة يجعله مترددا حـــول كيفية إدماجها في‬
‫الحساب ‪ ،‬مع أن مراعاتــها هي أمر ضروري ال مــناص منـــه ‪ ،‬إذ أن عمليات سحب المبالغ بوساطة البطاقات البنكية مثال‬
‫تنقل المبلغ المسحوب بصفة فعلية إلى حوزة الحريف ‪ ،‬وال يعقل أن يتجاهل البنك هذه الواقعة لمجرد أنها لم تدرج في الحساب‬
‫بمجرد إجراء العقلة ‪ ،‬إذ أن هذا اإلدراج الحيني مستحيل عمليا‪ ،‬خصوصا إذا وقع السحب من موزع آلي تابع لبنك آخر عدا‬
‫البنك المفتوح لديه الحساب ‪.‬‬
‫وقد راعى المشروع معطى هاما يتمثل في إمكانية وجود عمليات تضيف مبالغ إلى الرصيد الموجود والمسجّل يوم إجراء‬
‫العقلة وعمليات أخرى تنقص من ذلك الرصيد‪ ،‬فوضع قواعد متوازية لهذين الصنفين من العمليات‪.‬‬

‫‪103‬‬
Les modalités de l’indisponibilité du compte saisi

La nécessité d'une période de liquidation est l'élément le plus


caractéristique de la saisie des comptes bancaires en général. Que le compte soit
courant ou de dépôt, il contient un tableau des créances et dettes réciproques des
parties qui y sont affectées, puis ultérieurement inscrites267.
Ainsi, un délai entre l’entrée en compte d’une créance et son inscription est
le plus souvent inévitable. Cette période permet de déterminer le montant exact
du solde créditeur, une fois les opérations en cours traduites sur le compte268.
Cette liquidation est nécessaire pour déterminer le solde du compte quelle
que soit la cause de l’interruption du fonctionnement normal du compte : décès,
clôture unilatérale ou synallagmatique et même saisie269. Elle repose en partie sur
une fiction, puisque l'on raisonne comme si le compte était clôturé, alors que la
saisie n'emporte nullement une telle conséquence 270.
L’article 333 du C.P.C.C. permet de régulariser les opérations en cours, à
savoir celles initiées avant la date de la saisie, pour déterminer l’assiette de la
saisie qui se constitue du solde qui se dégage à l’issue de la période de liquidation
271
.
L'antériorité des opérations devrait être facilement établie pour les
opérations pratiquées avant la saisie. Celle-ci résulte en effet des documents entre
les mains de l'établissement bancaire (bordereau de remise de chèque, ordre de
virement, etc.)272.
Le banquier n’aura pas, à proprement parler, la charge de la preuve, mais il
sera le gardien de son administration, puisqu’en cas de diminution des sommes

267
C. MOULY, op. cit., p. 11 n° 40.
268
R. PERROT et P. THÉRY, op. cit., p. 454 n° 452.
269
C. MOULY, op. cit., p. 11, n°40
270
R. PERROT et P. THÉRY, op. cit., p. 454 n° 452.
271
J.-L. RIVES-LANGE, « La saisissabilité du compte courant », op. cit., p. 102.
272
S. GUINCHARD et T. MOUSSA, dir., op. cit., p. 935 n° 923.31.

104
Les modalités de l’indisponibilité du compte saisi

saisies arrêtées, il devra fournir un relevé de toutes les opérations passées sur le
compte depuis le jour de la saisie273.
Ainsi, il convient de voir quelles sont les opérations susceptibles de
régularisation (Section I) et comment ces opérations seront mises en œuvre
(Section II).

Section I : Les opérations susceptibles de


régularisation

A la lecture de l’article 333 du C.P.C.C., une distinction s'impose entre les


différentes opérations susceptibles de régularisation.
Une première catégorie d'opérations de régularisation ne concerne que des
opérations juridiquement achevées avant la saisie. Il est alors « inexact de parler
de régularisation d'opérations en cours, sinon de manière purement
comptable »274. Il s’agit donc bien de la régularisation des opérations en cours,
non encore traduites en compte au jour de la saisie mais qui doivent produire leurs
effets juridiques avant celle-ci275.
Mais, le texte vise aussi des opérations qui ne sont pas achevées, et qui,
seules, mériteraient stricto sensu la qualification d'opérations en cours (ex. contre-
passation d'effets de commerce non encore échus)276. La régularisation, dans ce

273
H. CROZE, « Saisie-attribution bancaire : Les mystères de l’article 47 de la loi du 9 Juillet
1991 », op. cit., n° 3, p. 72.
274
R. PERROT et P. THÉRY, op. cit., p. 455, n° 453.
275
J.-M. CALENDINI, « La saisie attribution de compte bancaire », LPA, 9 Février 1994 n°
17, p. 17.
276
Voir à ce propos :
:2136 .‫ ص‬،40 ‫ عدد‬،2002 ‫ جويلية‬17‫ و‬16 ،‫مداوالت مجلس النواب‬
‫ هي الصورة التي يقع فيها تقديم أوراق تجارية او شيكات من قبل المدين المعقول‬333 ‫" إن المقصود بالمطة الثانية من الفصل‬
‫ حــيــث يقع تقييد‬،‫عنه الى البنك المفتوح لديه الحساب خالل الفترة السابقة الجراء الـــعقــــلة لـــغاية إدراجــها بــحسابه‬
‫) إال انه قد يتضح أن‬crédit( ‫المــبالغ المــدرجة فـــي األوراق والســندات المذكــورة علـى اعــتبار أنها مــن األصــول‬
‫ فيكون البنك محقا في طرح مبالغها من فاضل الحساب بشرط ان يقع كل ذلك خالل الشهر‬،‫األوراق والسندات ليس لها رصيد‬
."‫ وإال أدى األمر الى جعل العقلة مسلطة على أموال البنك ال على أموال الحريف المعقول عنه‬،‫الموالي إلجراء العقلة‬

105
Les modalités de l’indisponibilité du compte saisi

cas, traduit la situation préférentielle du banquier qui peut faire valoir sur le solde,
et au détriment du créancier saisissant, des droits nés d'opérations non
dénouées277.
Ainsi, on va étudier la régularisation comptable dans un premier temps (§
I), puis celle assurant un droit préférentiel dans un second temps, à savoir la
contre-passation (§ II).

§I : La régularisation comptable

La liquidation des opérations a pour objectif de traduire la « réalité » du


compte en faisant abstraction du temps nécessaire à la traduction des opérations
sur le compte qu’elles soient créditrices (A) ou débitrices (B).

A- Les opérations créditrices

Les opérations de régularisation comptable susceptibles d’augmenter le


solde du compte courant saisi sont, a priori, prévues par l’article 333 du C.P.C.C.,
mais cela n’empêche que d’autres opérations peuvent s’ajouter.

A cet effet, l’article 333 du C.P.C.C. prévoit que le solde créditeur au jour
de la saisie peut être accru du montant des chèques ou des effets de commerce
remis à l'encaissement avant la saisie et « non encore portés au compte ».
Pour la remise des chèques, le banquier tiers saisi doit ajouter au solde du
compte saisi le montant des chèques remis à l’encaissement avant la saisie et non

277
R. PERROT et P. THÉRY, op. cit., p. 455 n° 453.

106
Les modalités de l’indisponibilité du compte saisi

encore portées en compte. Autrement dit, il s’agit des chèques déposés auprès de
la banque par le débiteur saisi mais qui ne seraient pas encore inscrits en compte
le jour où la saisie a été pratiquée278. Ainsi, le banquier sera bien avisé d'attendre
l’encaissement du chèque pour l'inscrire.
Mais, en pratique, la plupart des banques inscrivent les chèques remis au
crédit du compte dès la remise en se réservant le droit de les contrepasser s’ils
sont rejetés (« sauf bonne fin ») de sorte que ne seront concernés par la liquidation
que les chèques remis au guichet mais non encore comptabilisés 279.
Pour la remise d'effets de commerce, il faut distinguer selon que l'effet est
remis à l’encaissement ou à l'escompte. Si l'effet est venu à échéance et a été remis
en paiement, la solution est la même qu'en matière de chèque : il convient de
l'inscrire au crédit sous réserve d'encaissement. Mais si l'effet a été remis à
l'escompte, étant donné que cette dernière est une opération de crédit, le banquier
est en droit de refuser son inscription sur le compte280.
Sauf que, pour certains, il y a une incohérence à inclure dans le solde saisi,
les effets de commerce remis à l’encaissement, car le banquier mandataire n’a pas,
au jour de la saisie, une obligation de paiement envers son client vu que ces effets
sont entrés au différé du compte et non au disponible281.
D’autre part, certains auteurs proposent d’élargir la liste des opération
créditrices en estimant que, « bien que le texte ne vise que les remises faites à
l’encaissement, il n’est pas douteux qu’il concerne tout autant les remises à
l'escompte » 282.

278
A. LEBORGNE, op. cit., p. 521, n° 1140.
279
H. CROZE, « La loi n° 91-650 du 9 juillet 1991 portant réforme des procédures civiles
d'exécution : les règles spécifiques aux différentes mesures d'exécution forcée et mesures
conservatoires », JCP G 1992, I, 3585, p. 236, n° 20.
280
N. CAYROL, J.-CI. Pr. Civ., v° « Saisie-attribution (Comptes Bancaires : Règles
Spécifiques) », op. cit., p. 11, n° 51.
281
C. MOULY, op. cit., p. 11, n° 44.
282
F. -J. CRÉDOT et Y. GÉRARD, op. cit., n° 35, p. 7.

107
Les modalités de l’indisponibilité du compte saisi

Ces opérations sont mentionnées exhaustivement. Mais la doctrine propose


d’en ajouter les ordres de virements effectués au bénéfice du débiteur avant la
saisie non encore inscrits en compte.

Au terme de l’article 678 du C.C., le virement « est l'opération bancaire


par laquelle le compte d'un donneur d'ordre est, sur l'ordre écrit de celui-ci,
débité pour un montant destiné à être porté au crédit d'un autre compte ».
Ainsi, le virement s'analyse en une remise de monnaie scripturale par un jeu
d'écritures de compte à compte283. Mais, à la différence d’une simple remise
d’espèce, le virement se décompose en un jeu d'écritures successives : la banque
du donneur d'ordre débite le compte de ce dernier, et la banque du bénéficiaire qui
reçoit l'ordre de virement formalise l'opération en créditant le compte de son
client284.
L’article 681 du C.C. précise que « le bénéficiaire d'un virement devient
propriétaire de la somme à transférer au moment où la banque en débite le
compte du donneur d'ordre ». Ainsi, le transfert de propriété se réalise au profit
de son bénéficiaire dès que le compte du donneur d'ordre a été débité, sans
attendre que le compte du débiteur saisi soit crédité.
A cet effet, certains auteurs estiment qu’il faut ajouter aux opérations
créditrices les virements effectués au bénéfice du débiteur avant la saisie, mais
qui ne sont pas encore inscrits en compte, puisque, au jour de la saisie, la créance
était entrée dans le patrimoine du débiteur285. Que la saisie du compte destinataire
de la somme intervienne dans l'intervalle, cela n’empêche pas l'écriture au crédit,
et donc la modification du solde dans un sens favorable au créancier saisissant 286.

283
N. CAYROL, J.-CI. Pr. Civ., v° « Saisie-attribution (Comptes Bancaires : Règles
Spécifiques) », op. cit., p. 11, n° 52.
284
R. PERROT et P. THÉRY, op. cit., p. 455 n° 454.
285
A. LEBORGNE, op. cit., p. 521, n° 1140.
286
N. CAYROL, J.-CI. Pr. Civ., v° « Saisie-attribution (Comptes Bancaires : Règles
Spécifiques) », op. cit., p. 11, n° 52.

108
Les modalités de l’indisponibilité du compte saisi

En outre, prétendre que le virement créditeur n’affecte pas l’assiette de la


saisie à l’avantage du saisissant parce qu’elle n’est pas visée à l’article
« reviendrait à lui réserver le sort d’une opérations postérieure disponible au
compte du saisi, alors qu’à la date de la saisie, elle constitue incontestablement
une créance du client sur la banque »287.
Ainsi, tout pousse à admettre qu’« il faut donc considérer, comme tendent
à le faire les banquiers d'ailleurs, que les virements créditeurs reçus avant la
saisie peuvent être inscrits au crédit du compte»288.
En plus des opérations susceptibles d’augmenter l’assiette de la saisie,
l’article 333 du C.P.C.C. évoque les opérations susceptibles de réduire l’assiette
de la saisie.

B- Les opérations débitrices

L’article 333 du C.P.C.C. dispose que le crédit du compte « est diminué par
suite de chèques remis à l’encaissement antérieurement à la saisie, de retraits ou
de paiements par cartes bancaires non encore inscrits en compte à la date de la
saisie, si les bénéficiaires ont été crédités antérieurement à la saisie ».
Ainsi, les opérations comptables susceptibles d’augmenter le solde du
compte courant saisi sont d’abord les chèques tirés par le débiteur, mais aussi les
sommes qui auront été retirées par le débiteur.

287
F. -J. CRÉDOT et Y. GÉRARD, op. cit., n° 35, p. 7.
288
C. MOULY, op. cit., p. 11, n° 44.

109
Les modalités de l’indisponibilité du compte saisi

Pour les chèques tirés par le débiteur, il convient de rappeler qu’avant la


saisie, le débiteur a pu tirer des chèques présentés au paiement dont le montant n'a
pas encore été débité sur le compte289. Le législateur, a pris en considération les
chèques émis par le débiteur avant la saisie, cependant, ces chèques ne seront pas
identiquement traités.

En fait, et depuis la loi de 2002, l'article 333 du C.P.C.C. retient la remise


à l'encaissement comme critère d'antériorité par rapport à la saisie, et non pas
l'émission ou l'endossement290.
Avant ladite loi, le banquier payait les chèques tirés par le débiteur tant
qu’ils sont émis avant la date de la saisie puisque le bénéficiaire acquiert, dès
l’émission ou la transmission du chèque ou de l’effet de commerce, un droit sur
le solde qui limite le droit que viendrait acquérir postérieurement le saisissant 291.
C’est le principe du transfert de la propriété de la provision au porteur,
consacré expressément pour la lettre de change dans l’article 275 du C.C. mais
admis comme applicable au chèque 292.
Ainsi, l’antériorité du chèque se faisait par référence à la date d'émission
du chèque, ce qui ouvrait la porte à des fraudes, puisqu'il suffisait d'antidater le
chèque pour être certain d'être payé avant le créancier saisissant surtout que le

289
Voir à ce propos :
:1 .‫ ص‬،2006 ،.‫ت‬.‫م‬.‫ ن‬،2006 ‫ نوفمبر‬1 ‫ مؤرخ في‬،2395 ‫قرار تعقيبي مدني عدد‬
."‫"إن تسليم الشيك ال يبرئ الذ ّمة إال بالخالص وخروجه من الحساب‬
290
La loi n° 82 du 3 août 2002, modifiant et ajoutant quelques articles au code de procédure
civile et commerciale, J.O.R.T. n° 65, du 9 Août 2002, p. 1840.
291
M. CABRILLAC et M.-T. RIVES-LANGE, op. cit., p. 167, n° 310.
292
Voir à ce propos :
.47 .‫ ص‬.1986 ‫ جويلية‬،7 ‫ عدد‬،.‫ت‬.‫ ق‬،"‫ "انتقال ملكية رصيد الشيك والعقلة التوقيفية‬،‫البشير زهرة‬

110
Les modalités de l’indisponibilité du compte saisi

débiteur saisi bénéficie d’une présomption de véracité de la datation, comme


l’indique l’article 451 du C.O.C 293.
Tenant compte des effets de cette disposition sur les droits du saisissant, le
législateur a changé de position avec la loi n° 82 du 3 Août 2002, en décidant que
l’émission et la remise du chèque à son bénéficiaire avant la saisie est insuffisante,
en soi, pour justifier le débit du solde du compte du débiteur294.
Ainsi, les chèques tirés par le débiteur, remis à l'encaissement avant la date
de la saisie, seront inscrits au débit du compte au titre de leur régularisation
comptable295. Par contre, les chèques émis avant la saisie, mais remis à
l'encaissement après celle-ci ne sont pas susceptibles de diminuer l’assiette de la
saisie 296
. Bien évidemment, on entend par la remise à l’encaissement la remise
des chèques faite à l'établissement bancaire et non au bénéficiaire desdits
chèques297.
Ce recours à la date de remise à l’encaissement comme critère d’antériorité
est considéré par certains comme « illogique et regrettable » puisqu’il se fonde
sur une « présomption irréfragable de fraude », notamment l’anti-datation du

293
Voir à ce propos :
.28 .‫ ص‬،‫ مرجع سابق الذكر‬،‫حمدان غيلب‬
294
N. CAYROL, J.-CI. Pr. Civ., v° « Saisie-attribution (Comptes Bancaires : Règles
Spécifiques) », op. cit., p. 11, n° 53.
295
Dans une espèce, le Tribunal de Grande Instance de Lyon, par référence aux Règles
uniformes de la Chambre de Commerce Internationale relatives aux encaissements, a considéré
que les chèques émis par le débiteur et remis à l'encaissement par leur bénéficiaire auprès d'une
banque de Hong-Kong avant la saisie, mais entrés dans le système bancaire français après la
saisie devaient être considérées comme postérieures à la saisie et insusceptible de modifier
l’assiette de la saisie.
TGI Lyon, JEX, 13 nov. 1997. Cité dans S. GUINCHARD et T. MOUSSA, dir., op. cit., p. 936,
n° 923.51.
296
R. PERROT et P. THÉRY, op. cit., p. 455 n° 454.
297
Cass. Civ., 13 févr. 2003, n° 01-00.543, Bull. civ. Il, n° 40

111
Les modalités de l’indisponibilité du compte saisi

chèque émis, du côté du débiteur saisi 298. De plus, il altère au principe du transfert
immédiat de la propriété de la provision au porteur.
Mais en général, cette solution préconisée par le législateur en 2002
s'explique par une considération de preuve299. Retenir la date de la remise à
l'encaissement est la meilleure solution pour s'assurer que la date du chèque est
bien antérieure à la saisie et pour déjouer l'antidate du chèque300.
A part les chèques tirés par le débiteur et remis à l’encaissement avant la
saisie, le solde du compte courant saisi peut être réduit par d’autres opérations de
paiement.

En tenant compte de l’évolution des moyens de paiement bancaire, le


législateur n’a pas pris en considération seulement les chèques tirés par le
débiteur, mais aussi les autres moyens de paiement bancaire, notamment la carte
bancaire.
La carte bancaire, est définie par la loi du 27 juin 2005, relative au
transfert électronique de fonds, comme étant « tout instrument de transfert
électronique de fonds dont les fonctions sont supportées par une carte magnétique
ou intelligente »301.
La carte bancaire est une carte délivrée par un établissement de crédit
comportant, le plus souvent, une puce électronique et une piste magnétique,
permettant au client titulaire d'un compte d’effectuer des retraits d’espèces auprès
des distributeurs automatiques de billets ou de transférer des fonds au profit du
fournisseur d'un bien ou d'un service302.

298
C. MOULY, op. cit., p. 12, n° 48.
299
Y. KNANI, op. cit., p. 286, n° 258.
300
N. CAYROL, J.-CI. Pr. Civ., v° « Saisie-attribution (Comptes Bancaires : Règles
Spécifiques) », op. cit., p. 11, n° 53.
301
La loi n° 2005-51 du 27 juin 2005, « relative au transfert électronique de fonds », J.O.R.T.
n° 51 du 28 Juin 2005, p. 1428.
302
Y. KNANI, op. cit., p. 366, n° 339.

112
Les modalités de l’indisponibilité du compte saisi

Les opérations effectuées par une carte bancaire peuvent faire diminuer le
solde du compte courant saisi. Ainsi, l’article 333 du C.P.C.C. permet au banquier
de débiter le compte courant saisi « de retraits ou de paiements par cartes
bancaires non encore inscrits en compte à la date de la saisie, si les bénéficiaires
ont été crédités antérieurement à la saisie ».
S’agissant des opérations effectuées par le moyen d’une carte bancaire, se
révèle l'intérêt de porter l'heure de la saisie sur l’exploit de saisie-arrêt .
En effet, l’article 6 du C.P.C.C. exige que « les exploits dressés par les
huissiers de justice doivent contenir la date de leur signification, avec indication
des jour, mois, année et heure ». Cette exigence de l’horodatage n’est pas
spécifique aux exploits de la saisie-arrêt , mais une mention obligatoire générale
dans tous les exploits rédigés par les huissiers de justice.
Ainsi, si les retraits ou les paiements sont effectués avant l'heure
mentionnée sur l'acte de signification de la saisie, ils échapperont à la saisie et
inversement, les retraits ou paiement effectués postérieurement à la saisie seront
inopposables au créancier.
Les retraits par billetterie ne se posent aucun problème puisque la banque
pourra en rapporter la preuve par les relevés d’opérations produits par les
appareils eux-mêmes, bien que ce soit une manière de se constituer une preuve à
soi-même au sens de l’article 548 du C.O.C.303.
Mais, s’agissant des paiements effectués par cartes bancaires. La
soustraction des paiements par carte effectués par le débiteur avant la saisie est
subordonnée à la condition que leurs bénéficiaires aient « été crédités
antérieurement à la saisie », c'est-à-dire à la condition que le banquier ait honoré

303
H. CROZE, « Saisie-attribution bancaire : Les mystères de l’article 47 de la loi du 9 Juillet
1991 », op. cit., n° 3, p. 73.

113
Les modalités de l’indisponibilité du compte saisi

l'ordre de paiement émis par le débiteur. Tant que le banquier n'a rien déboursé,
il n'y a lieu à aucune déduction sur le solde saisi304.
Néanmoins, une distinction aurait dû être faite entre les deux types de
cartes, à paiement immédiat ou différé.
La différence est que si la carte est à débit immédiat, la banque débite son
client du montant de ses achats payés au moyen de la carte au jour le jour, par
contre si elle est à débit différé, elle est débitée généralement en fin de mois305.
Ainsi, dans le premier cas, il est légitime que le banquier puisse demander
sans délai le remboursement. Mais s'il s'agit d'une carte à débit différé, on voit que
le texte confère à la banque l'avantage de pouvoir exercer contre son client un
recours immédiat, alors que ce dernier a payé pour que son compte ne soit pas
débité lors de l'achat. « La régularisation dans ce cas, n'est plus seulement
comptable.
Elle est, pour le banquier, source d'un droit préférentiel dont on n'aperçoit
guère le fondement »306.
En fait, ce droit préférentiel donné au banquier, étant une exception, n’est
prévu par le législateur que pour les escomptes, notamment la contre-passation.

§II : La contre-passation

304
N. CAYROL, J.-CI. Pr. Civ., v° « Saisie-attribution (Comptes Bancaires : Règles
Spécifiques) », op. cit., p. 12, n° 56.
305
F-J. CRÉDOT, « Les aspects bancaires de la loi du 9 Juillet 1991 portant réforme des
procédures civiles d’exécution », LPA, 24 Avril 1992, n°50, p. 10.
306
R. PERROT et P. THÉRY, op. cit., p. 457 n° 452.

114
Les modalités de l’indisponibilité du compte saisi

La contre-passation est l’opération tendant à constater qu’un article du


compte n’a plus d’objet et à rectifier le compte par une écriture au sens
contraire307.
En pratique, la contre-passation est le plus souvent utilisée, non pour
rectifier une erreur, mais en vue de constater l’annulation ou la résolution d’une
obligation, voire d’introduire dans le compte une créance nouvelle, mais liée
étroitement à une créance antérieurement passée en compte308.
En fait, ce jeu d’écriture intervient, souvent, dans le compte courant en cas
de non-paiement des effets de commerce dont le montant avait été porté au crédit
du compte du client par le contrat d’escompte.
D’ailleurs, généralement la convention d’escompte n’est établie par le
banquier qu’avec un client avec lequel il est en relation de compte courant, mais
cela n’empêche qu’elle puisse se faire en dehors de l’existence d’un compte
courant309.
L’escompte, définie par l’article 743 du C.C., est « une convention par
laquelle le banquier s'oblige à payer, par anticipation, au porteur, le montant
d'effets de commerce ou autres titres négociables à échéance déterminée, que ce
porteur lui transmet à charge d'en rembourser le montant, à défaut de paiement
par le principal obligé ».
Si le produit de l’escompte d'effets de commerce a été inscrit au compte
courant et si les effets n'ont pas été payés à présentation, l’article 740 du C.C.
prévoit que le récepteur des effets peut contre-passer ces effets. C'est-à-dire porter
au débit du compte un montant égal au montant nominal des effets augmenté des
frais prévus à l'article 311 du C.C.

307
Voir à ce propos :
H. SYNVET, « La Contre-passation en compte courant : un vieux problème toujours
d’actualité », Mélanges offerts à Jean DERRUPPÉ : « Les activités et les biens de l'entreprise »,
Paris : GLN JOLY et Litec, 1991, p. 193.
308
C. GAVALDA et J. STOUFFLET, op. cit., p. 155, n° 328.
309
T. BEN NASR, op. cit., p. 263.

115
Les modalités de l’indisponibilité du compte saisi

Ainsi, l’article 333 du C.P.C.C., pour préserver le droit du banquier au


recouvrement de sa créance, lui donne le droit de contre-passer les effets de
commerce et les chèques remis à l’escompte avant la saisie. A cet effet, il
conviendra de voir la mise en œuvre de la contre-passation (§I), pour qu’elle
puisse produire ses effets (§II).

A- La mise en œuvre de la contre-passation

L’étude de la mise en œuvre de la contre-passation consiste en l’étude des


caractères généraux de ce mécanisme avant d’étudier ses conditions.
La contre-passation représente « un droit au remboursement » pour le
banquier escompteur lorsque existe une convention de compte courant310. Il s'agit
d'un mécanisme qui lui permet d'exercer un recours contre l'un de ses clients, en
sa qualité de porteur d'effets de commerce ou de titulaire du droit au
remboursement issu du contrat d'escompte ou de la créance fondamentale.
La contre-passation a deux caractères, elle est d’une part facultative, d’une
autre irrévocable.

D’abord, la contre-passation a un caractère facultatif. Elle est une


faculté reconnue au banquier escompteur, et non une obligation. Lorsque l'effet
revient impayé, le banquier a deux options : agir contre le remettant et contre-
passer en inscrivant au débit du compte courant de son client le montant de l'effet
impayé, ou bien ne pas inscrire sa créance au disponible du compte et laisser

310
Cass. Com., n° 68-10.808, du 11 mars 1970 :
« La banque, à l'ordre de laquelle un chèque a été endossé pour encaissement et qui en a porté
le montant au crédit du compte de dépôt de l'endosseur, peut si le chèque n'est pas payé faute
de provision, le contrepasser au débit du même compte, sous réserve d'une faute qui lui
interdirait de se faire rembourser l'avance qu'elle a consentie par l'inscription immédiate au
crédit du remettant. En effet, la nature du chèque, instrument de payement, ne peut faire obstacle
à ce que, dès lors que la banque est en droit d'exiger le remboursement du crédit, l'écriture
faisant apparaître celui-ci soit contrebalancée par une écriture inverse portée au débit ».

116
Les modalités de l’indisponibilité du compte saisi

figurer dans un compte général « effets impayés » ou dans un compte d'attente


au nom du remettant et poursuivre le recouvrement directement contre les
signataires311.
Ainsi, le banquier peut donc exclure du compte sa créance, conserver l'effet
et agir en remboursement contre son client et les autres signataires obligés à la
dette312.
Les recours du banquier peuvent être fondés sur le titre escompté ou sur le
contrat d’escompte.
A cet effet, l’article 746 du C.C. prévoit que « le banquier a, vis-à-vis des
débiteurs principaux des effets, du bénéficiaire de l'escompte et des autres
coobligés, tous les droits attachés aux titres qu'il a escomptés ». Ainsi, la
référence est faite au principe de la solidarité cambiaire prévue à l’article 310 du
C.C. qui donne au banquier porteur la possibilité d’engager des recours
indifféremment à l’encontre du client remettant ou tout autre signataire de l’effet
escompté.
En effet, ce dernier article dispose que « tous ceux qui ont tiré, accepté,
endossé, ou avalisé une lettre de change sont tenus solidairement envers le
porteur.
Le porteur a le droit d'agir contre toutes ces personnes, individuellement
ou collectivement, sans être astreint à observer l'ordre dans lequel elles se sont
obligées ».

En plus des recours liés à sa qualité de porteur, le banquier peut engager un


recours fondé sur le contrat d’escompte.

311
D. GIBIRILA, « Escompte », Rép. Dr. Com. Dalloz, Janvier 2014, n°126.
312
Voir à ce propos :
:181 .‫ ص‬،1962 ،10-9 ‫ عدد‬،.‫ت‬.‫ق‬.‫ م‬،1962 ‫ ديسمبر‬29 ‫ مؤرخ في‬،1949 ‫حكم إبتدائي عدد‬
‫"إذا تسلم صيرفي من عميل له حساب جاري لديه كمبياالت بطريق التظهير قصد خصمها فهو مخير بين أن يتقاضى دينه‬
‫مباشرة من الملتزمين فيها حسب قواعد الرجوع بدعوى الصرف أو أن يدرج مبالغها بالعنوان المقابل في الحساب الجاري‬
."‫الذي سلّمه تلك السندات لعدم الوفاء بقيمتها عند الحلول‬

117
Les modalités de l’indisponibilité du compte saisi

D’ailleurs, l’article 746 du C.C. dispose dans son deuxième alinéa que le
banquier a « à l'égard du bénéficiaire de l'escompte, un droit distinct au
remboursement des sommes mises à la disposition de celui-ci, augmentées des
intérêts et commission perçus ».
Cette action, qui se fonde sur le contrat d’escompte, est une action de droit
commun indépendante de l’action cambiaire exercée sur la base des effets de
commerce escomptés. De ce fait, elle ne peut être intentée que contre le client
remettant, puisque les autres signataires des effets escomptés ne font pas partie de
la convention d’escompte313.
Cette possibilité pour le banquier de demander les paiements des effets
escomptés retournés impayés est consacrée par l’article 743 du C.C. qui prévoit
que sur le porteur, pèse une charge de rembourser le montant de ces effets lorsque
le principal obligé ne paie pas314.
D’une façon générale, pour se faire payer, le banquier est libre de contre-
passer les effets ou d’exercer les recours qui lui semblent utiles, mais s’il opte
pour la contre-passation, son choix devient irrévocable.

En fait, la contre-passation est irrévocable, étant donné que lorsque le


banquier inscrit le montant de l’effet dans le débit du compte du remettant, il ne
peut, en même temps, agir à son encontre en paiement de l’effet315. De ce fait,
lorsque le banquier choisit de contrepasser l’effet escompté son option est
irrévocable et ne peut être rétractée qu’avec l’accord du client contrepassé. Car
une créance ne peut être extraite du compte courant sans le consentement des deux
correspondants316.

313
T. BEN NASR, op. cit., p. 268.
314
Ibid., p. 268.
315
Ibid., p. 265.
316
G. RIPERT et R. ROBLOT, op. cit., p. 373, n° 2336.

118
Les modalités de l’indisponibilité du compte saisi

Ainsi, et après qu’on a vu les caractères de la contre-passation, il convient


de voir ses conditions de validité.

De prime abord, et comme la contre-passation constitue un mode d'exercice


du recours cambiaire, il faut que le porteur remplisse les conditions du droit
cambiaire.
Ainsi, la contre-passation implique premièrement que le banquier soit
créancier. En fait, la banque doit, dans l’exercice de son droit de contre-passer,
observer toutes les règles du droit cambiaire surtout celles relatives à l’échéance
des effets. Elle doit, si le titre n’a pas été payé par le débiteur, attendre l’échéance
pour le contre-passer sur le compte courant. Ainsi, la contre-passation n’est
admise que si la créance invoquée par la banque est exigible.
Cependant, le banquier, en étant porteur, peut consentir au tireur de l’effet
des délais de paiement. Une nouvelle échéance est portée sur le titre et le banquier
ne peut, dans ce cas, contre-passer avant cette nouvelle date. Mais, abstraction
faite de cette prorogation d’échéance, le banquier peut contre-passer le montant
des effets impayés dès qu’ils viennent à échéance317. Sauf que, dans certains cas,
le banquier se trouve en droit de contrepasser les effets escomptés sans attendre
leur échéance.
Les parties à l’escompte peuvent insérer dans leur convention une clause
autorisant au banquier de contrepasser par anticipation. Cette « clause est valable.
Mais, elle s’analyse en une résolution de la convention d’escompte et contraint
ainsi la banque à restituer l’effet escompté »318.
S’ajoute à cette possibilité, une autre prévue par l’article 306 du C.C. qui
autorise la contre-passation avant l’échéance lorsque le porteur est confronté à un
refus d’acceptation total ou partiel, ou lorsque le tiré a été déclaré en faillite ou en

317
T. BEN NASR, « Droit bancaire tunisien », Tunis, [L’auteur], 2009, p. 264.
318
C. GAVALDA et J. STOUFFLET, op. cit., p. 157, n° 332.

119
Les modalités de l’indisponibilité du compte saisi

cessation de paiement même non constatée par un jugement ou lorsque le tireur


d’une lettre change non acceptable a été déclaré en faillite.
Il convient de rappeler à cet effet, que l’article 740 du C.C. prévoit la
possibilité pour le banquier, en cas de faillite du remettant, d’effectuer la contre-
passation de tous les effets restés impayés à la date de leur échéance.

En deuxième lieu, la contre-passation suppose un lien de connexité entre


la créance non entrée en compte et la remise antérieure en sens contraire. En fait,
que le banquier se présente comme porteur de l’effet et exerce les droits
cambiaires ou l’action de provision ou qu’il se fonde sur la convention de crédit
qui est à la base de l’escompte, l’escompteur invoque une créance étroitement liée
à l’écriture de crédit portée en compte lors de la remise de l’effet319.
En troisième lieu, le législateur dans l’article 740 du C.C. a bien déterminé
le montant de la contre-passation en précisant que le banquier a le droit de
contrepasser non seulement le principal de la créance mais également les autres
composantes de sa créance cambiaire, objet de l’article 311 dudit code, tels que
les frais de protêt, d'avis et des intérêts légaux depuis l'échéance.
La contrepassation des créances accessoires se justifie par la connexité
existant avant la remise initiale.
Ainsi, si la contre-passation répond aux dites conditions, elle va produire
certains effets.

B- Les effets de la contre-passation

Quand le banquier opère la contre-passation, deux effets se produisent, le


premier est relatif à la restitution de l'effet, le deuxième est celui de la réduction
des sommes reçues.

319
Ibid., p. 156, n° 331.

120
Les modalités de l’indisponibilité du compte saisi

Une fois la contre-passation effectuée, se pose la question de savoir si le


banquier, après avoir contrepassé un effet de commerce, peut en conserver la
propriété ? deux hypothèses sont à étudier.
Si, lors de la contre-passation, le compte courant présente au profit du client
un solde créditeur suffisant pour éteindre la créance contre-passée par
compensation, le client retrouve la propriété des effets escomptés.
Dans ce cas de figure, la contre passation équivaut à un paiement et prive
ainsi, en raison de l'effet novatoire de l'entrée en compte, le banquier récepteur de
tous ses droits sur les effets contrepassés320.
L'extinction de la créance cambiaire impose au banquier, qui est considéré
comme payé, de restituer l'effet au client endosseur afin qu'il puisse engager
lui-même les recours et ce en vertu de l’alinéa 1er de l’article 741 du C.C.
Le banquier perd la propriété de l'effet et le droit de poursuivre les autres
signataires du titre. La restitution est pour le banquier une obligation de résultat.
En jurisprudence française, le banquier est reconnu responsable, en cas d'envoi
par lettre simple, de la perte de l'effet321.

Si, par contre, le solde du compte révèle un débit à la charge du client


remettant, la créance cambiaire demeure impayée et le banquier conserve la
propriété des effets escomptés et non payés. A cet effet, l’article 741 du C.C. dans
son deuxième alinéa prévoit que « le récepteur est autorisé à conserver les effets
quelle qu'en soit la date d'échéance ».

320
T. BEN NASR, « Droit bancaire tunisien », Tunis, [L’auteur], 2009, p. 266.
321
Cass. com., n˚ 94-10 369 du 7 Mars 2000 :
« En adressant par courrier ordinaire au remettant un effet de commerce revenu impayé après
remise à l'escompte, la banque manque à son obligation de restitution si cet effet ne parvient
pas à son destinataire ».

121
Les modalités de l’indisponibilité du compte saisi

Le banquier qui, après avoir effectué la contre-passation, a conservé le titre


escompté parce qu'il n'a pas été payé, peut poursuivre les tiers débiteurs du titre
afin d'obtenir un paiement.
A ce propos, l’article 741 du C.C. prévoit que le banquier peut cumuler les
sommes qu'il encaissera postérieurement des coobligés par suite de l'exercice des
droits et sûretés attachés aux effets contrepassés, avec le dividende de faillite qu'il
recueillera pour le solde débiteur de son compte arrêté après contre-passation,
sous réserve de l'application des dispositions de l'article 742 du C.C.
L’article 742 du C.C. prévoit qu’ « en aucun cas, le récepteur ne peut
recevoir grâce au cumul prévu à l'article précédent, une somme totale supérieure
au montant du solde débiteur du compte courant après contrepassation, son droit
à dividende dans la faillite du remettant se trouvant réduit de plein droit en
conséquence ».

Lors de la saisie du compte courant, la contre-passation est un des moyens


de remboursement autorisés au banquier pour préserver ses droits vis-à-vis les
autres créanciers de l’ayant compte.
Par un autre souci de protéger les droits du créancier saisissant, le
législateur a déterminé les règles de la mise en œuvre de la régularisation des
opérations en cours.

Section II : La mise en œuvre des opérations de


régularisation

L’étude de la mise en œuvre des opérations de régularisation consiste à


évoquer les délais dans lesquels ces opérations doivent être accomplies (§ I) et la
manière dont vont s’imputer ces dernières (§ II).

122
Les modalités de l’indisponibilité du compte saisi

§ I : Le délai de régularisation

L'alinéa 2 de l’article 333 du C.P.C.C. retient deux délais pour le


dénouement des opérations initiées avant la date de la saisie du compte courant
(A). Ces délais sont d’ordre public et leur expiration produit certains effets (B).

A- La dualité du délai de régularisation

Le délai de la régularisation des opérations en cours varie selon qu’il s’agit


d’une régularisation comptable ou d’une contre-passation.
Concernant la régularisation comptable à savoir, la remise des chèques et
des effets de commerce à l’encaissement et les retraits ou les paiements par cartes
bancaires, l’article 333 du C.P.C.C. prévoit un délai de quinze jours.
En droit tunisien, la computation des délais, en absence de disposition
contraire, se fait de quantième à quantième à partir du jour de la signification de
la saisie. Et ce contrairement au droit comparé, notamment le droit français, qui
calcule le délai en jours ouvrables.
Le délai de quinze jours est un délai relativement long puisqu’il ne prend
pas en compte le système de télécompensation interbancaire qui permet
actuellement la régularisation des opérations comptables, de nos jours, dans des
délais très courts, en 48 heures322.

322
Voir à ce propos :
:122 .‫ ص‬،‫ مرجع سابق الذكر‬،‫علي كحلون‬
48 ‫ والحال أن التطبيق قلص من هذه المدة إلى‬،‫"مازالت مجلة المرافعات المدنية تحتفظ باآلجال القديمة في إتمام المقاصة‬
‫ وكان من المفروض أن تنقح‬،‫ ساعة‬48 ‫ساعة بعدما أصبح من الممكن إتمام المقاصة بالطرق اإللكترونية في أجل ال يتجاوز‬
."‫مجلة المرافعات في اتجاه مراعات آجال المقاصة بالطرق اإللكترونية‬

123
Les modalités de l’indisponibilité du compte saisi

Ce délai est valable pour les régularisations comptables, mais il ne l’est pas
nécessairement pour la contre-passation à laquelle l’article 333 du C.P.C.C.
prévoit un délai plus long.
Lorsqu’il s’agit d’une contre-passation des effets de commerce ou des
chèques revenus impayés après leur inscription au crédit du compte courant saisi,
le délai de régularisation est porté à un mois à compter de la saisie.
Cette disposition permet au banquier, pendant un mois, de faire valoir sur
le solde provisoire des droits nés après la saisie, bien qu’ils résultent d'opérations
non encore dénouées.
Pour contre-passer les chèques revenus impayés, le délai d’un mois ne pose
pas de difficulté mais pour les effets de commerces, certains auteurs estiment que
ce délai est insuffisant eu égard des échéances habituelles de ces dernières323.
L’article 333 du C.P.C.C. prévoit le délai d’un mois sans distinguer entre
les lettres de changes tirées à vue, qui sont payables à leur présentation, et les
traites tirées à un certain délai de vue ou de date ou à jour fixe, qui sont payables
à leur échéance.
En fait, lorsque la lettre est payable à une échéance postérieure au délai d'un
mois qui suit la saisie du compte courant, il est a priori impossible de savoir si elle
sera impayée et donc de soustraire le montant de son escompte324.
Mais, dans ce cas, le banquier peut présenter la lettre à l'acception du tiré.
Si celui-ci accepte, il bénéficie alors de son engagement cambiaire325. Mais si le
tiré refuse d'accepter la lettre, cela « entraîne de plein droit la déchéance du terme,
aux frais et dépens du tiré » comme le prévoit l’article 283 du C.C. in fine.

323
S. GUINCHARD et T. MOUSSA, dir., op. cit., p. 985 n° 937.52.
H. CROZE, « Saisie-attribution bancaire : Les mystères de l’article 47 de la loi du 9 Juillet
1991 », op. cit., n° 3, p. 73.
324
N. CAYROL, J.-CI. Pr. Civ., v° « Saisie-attribution (Comptes Bancaires : Règles
Spécifiques) », op. cit., p. 13, n° 62.
325
Ibid., p. 13, n° 62.

124
Les modalités de l’indisponibilité du compte saisi

Les délais de régularisation prévus par l’article 333 du C.P.C.C. sont des
délais d’ordre public. Leur expiration produit certains effets.

B- L’expiration du délai de régularisation

Qu’il s’agisse d’une régularisation comptable ou de contre-passation, les


délais de régularisation doivent être respectés par le banquier.
En fait, à l’expiration des délais de régularisation, aucune opération de
régularisation n’est tolérée et au cas où le solde du compte serait affecté par ces
opérations, le banquier est tenu d’une obligation de déclaration du solde définitif.

Le législateur n’a pas prévu une sanction spéciale à la régularisation de


l'une des opérations visées par le texte, hors les délais de régularisation donnés
par le texte.
Les délais accordés au banquier pour la régularisation des opérations
initiées avant la saisie constituent une dérogation à l’interdiction de paiement
imposée à ce dernier, et comme toutes dérogations, « elles ne doivent pas être
étendues au-delà du temps et des cas qu’elles expriment »326.
Ainsi, la régularisation des opérations objet de l’article 333 du C.P.C.C., en
dehors du délai de quinze jours pour la régularisation comptable et un mois pour
la contre-passation, constitue une infraction à l’interdiction de paiement imposée
au banquier.
De ce fait, le banquier verra sa responsabilité engagée en dépassant le délai
de régularisation. D’abord, l'inscription en compte d'opérations, pourtant
antérieures à la saisie, sera inopposable au saisissant. De plus, il peut être
condamné à payer des dommages et intérêts au saisissant, en se fondant sur sa
responsabilité délictuelle. Enfin, le banquier en ne respectant pas les délais de

326
L’article 540 du C.O.C.

125
Les modalités de l’indisponibilité du compte saisi

régularisation commet le délit de détournement d’objet saisi prévu dans l’article


278 du C.P.327.

A ce qui précède s'ajoute, qu’à l’expiration du délai de régularisation,


l’article 333 in fine du C.P.C.C. met à la charge du banquier, si le compte s’affecte
par les opérations de régularisation, une autre obligation.

Au cas où le solde du compte serait affecté par les opérations de


régularisation, l’article 333 in fine du C.P.C.C. dispose que « le banquier doit en
présenter un état et remettre une déclaration du solde définitif soit au greffe du
tribunal saisi de la demande en validité contre récépissé, soit à l’audience même,
au cours de l’instance, jusqu’à la clôture des débats ».
Ainsi, le banquier est tenu de rendre compte des modifications de l'assiette
de la saisie et d’en donner une déclaration du solde définitif du montant du solde
du compte.
Le relevé doit comporter toutes les opérations qui ont affecté l’assiette de
la saisie depuis le jour de la saisie qui sont les opérations au crédit et au débit du
compte entrant dans les prévisions de l’alinéa 2 de l’article 333 du C.P.C.C. Il
s’impose au banquier de faire l'inventaire, en précisant leur date et
éventuellement, si elles ont eu lieu le jour même de la saisie, leur heure328.
En droit français, le banquier est dispensé de cette obligation, si la
liquidation des opérations en cours a laissé une somme suffisante pour payer le

327
L’article 278 du C.P. :
« Est puni de deux ans d’emprisonnement et d’une amende de mille dinars, quiconque détruit,
détourne, dissipe, prête ou dissimule des objets qu’il sait saisis.
Et la tentative est punissable.
La peine est portée au double lorsque l’infraction a été commise par la personne à qui ont été
confiés les objets saisis ».
328
N. CAYROL, J.-CI. Pr. Civ., v° « Saisie-attribution (Comptes Bancaires : Règles
Spécifiques) op. cit., p. 15, n° 73.

126
Les modalités de l’indisponibilité du compte saisi

créancier. Aucune raison, dans ce cas, ne justifierait que le créancier connaisse le


fonctionnement du compte de son débiteur329.
La déclaration du solde définitif du compte courant saisi peut se faire, selon
l’article 333 du C.P.C.C., « soit au greffe du tribunal saisi de la demande en
validité contre récépissé, soit à l’audience même, au cours de l’instance, jusqu’à
la clôture des débats ».
Il convient ainsi de se demander si le manquement à l'obligation de rendre
compte des opérations en cours et de donner une déclaration du solde définitif
peut entraîner une condamnation de la banque aux causes de la saisie, sur le
fondement de l'article 341 du C.P.C.C. relatif à l'obligation de déclaration.
La réponse à cette question n’a pas fait l’unanimité en jurisprudence
française.
En effet, la Cour d'appel de Lyon a considéré que le banquier qui omet de
fournir un relevé de toutes les opérations qui ont affecté les comptes depuis le jour
de la saisie est déclaré débiteur pur et simple des causes de la saisie 330.
Au contraire, la Cour d'appel de Montpellier a jugé que le tiers saisi qui
omet d'adresser le relevé commet une faute331. Il ne s'agira cependant pas d'un
manquement aux obligations légales de déclaration, susceptible d'emporter
condamnation du tiers saisi au paiement des causes de la saisie, mais d'un
comportement fautif relevant du régime de la responsabilité civile de droit
commun332.
La Cour de cassation française préfère cette seconde solution et considère
que « le seul manquement à l'obligation de fournir les pièces justificatives ne peut

329
R. PERROT et P. THÉRY, op. cit., p. 461 n° 461.
330
C.A. Lyon, 28 mai 1997 (cité dans N. CAYROL, J.-CI. Pr. Civ., v° « Saisie-attribution
(Comptes Bancaires : Règles Spécifiques) », op. cit., p. 16, n° 75.)
331
C.A. Montpellier, 23 avr. 2001, Dr. et proc. 2001, p. 325.
332
A. LEBORGNE, op. cit., p. 523, n° 1146.

127
Les modalités de l’indisponibilité du compte saisi

donner lieu qu'au paiement, s'il y a lieu, de dommages-intérêts », c'est-à-dire à


condition que si une faute du tiers saisi a causé un préjudice au créancier333.
De même, si le banquier fournit des renseignements inexacts ou frauduleux
dans le cadre des opérations de liquidation, il pourra être condamné à des
dommages et intérêts334.
En droit tunisien, il parait que l’obligation de présenter l’état des opérations
en cours n’est qu’une continuité à l’obligation de l’article 341 du C.C., au cas où
le solde du compte s’affecterait par les opérations de régularisation. D’ailleurs,
elles doivent être faites de la même modalité et dans les mêmes délais, à savoir
contre récépissé, soit à l’audience même, au cours de l’instance, jusqu’à la clôture
des débats
Après avoir étudié les délais de régularisation et l’obligation du banquier
d’en présenter un état et remettre une déclaration du solde définitif, il convient
d’étudier la technique d’imputation de ces opérations.

§ II : L’imputation des opérations de


régularisation

Le législateur prévoit dans l’article 333 du C.P.C.C. que la saisie frappe les
sommes existantes au solde que le compte fait apparaître au jour de la saisie, qui
est déterminé en tenant compte des opérations de régularisation.
La saisie ne donne de droits que sur les sommes dues par le tiers saisi au
jour de la saisie, et non sur ses dettes postérieures ; la période de liquidation ne
permet que de régler le sort d’opérations antérieures, non de mélanger opérations

333
Cass. 2e civ., 13 févr. 2003, n° 01-00.543, JCP G 2003, IV, 1621.
334
Cass. 2e civ., 13 févr. 2003, n° 01-00.543, JCP G 2003, IV, 1621.

128
Les modalités de l’indisponibilité du compte saisi

nouvelles et anciennes et d’imputer des dettes anciennes sur des créances


nouvelles. Le saisissant n’a aucun droit sur les remises postérieures à la saisie.
L’imputation ne peut donc être que sur les sommes existantes au compte le jour
de la saisie335.
Ce, d’une manière générale, car, et contrairement au droit français, le
législateur tunisien n’a pas précisé la manière dont vont s’imputer les opérations
de régularisation336.
Ainsi, il convient de voir d’abord une présentation générale de l’imputation
des opérations en cours (A), pour voir ensuite la possibilité d’une imputation sur
les sommes portées au crédit du compte après saisie (B).

A- Présentation générale de l’imputation


des opérations en cours

A priori, l’imputation ne se fait que sur le solde antérieur à la saisie du


compte courant. Ainsi, d’une manière générale, à l’issue de la régularisation des
opérations en cours, le solde de ces dernières peut révéler soit un résultat positif
ou négatif.
Si le montant des opérations de régularisation s’avère positif, il va
augmenter l’assiette de la saisie. Ainsi, le solde sera affecté à l’avantage du

335
C. MOULY, op. cit., p. 11 ,n°53.
336
L'alinéa 6 de l'article 47 de la loi n° 91-650 du 9 juillet 1991, « portant réforme des
procédures civiles d'exécution », précise les modalités d'imputation des opérations en cours sur
le solde du compte:
« Le solde saisi attribué n'est affecté par ces opérations de débit et de crédit que dans la mesure
où leur résultat cumulé est négatif et supérieur aux sommes non frappées par la saisie au jour
du règlement ».

129
Les modalités de l’indisponibilité du compte saisi

saisissant et les droits du créancier saisissant ne seront pas affectés par les
opérations de régularisation.
Par exemple, soit une saisie pratiquée pour un montant de 100, le solde
créditeur du compte au jour de la saisie se monte à 50. Si, au titre des opérations
de régularisation il n’y a aucune opération débitrice, mais seulement une remise
de chèque par le titulaire du compte avant la saisie pour un montant de 20, le solde
créditeur s'établira finalement à 70. Dans ce cas, la régularisation profite au
créancier337.

Mais, il demeure que, le plus souvent, le solde des opérations de


régularisation s’avère négatif, parce que les opérations de régularisation
traduisent des opérations débitrices.
Il n'en résulte pas pour autant que la situation du créancier saisissant en sera
automatiquement affectée. En fait, si le solde créditeur au jour de la saisie
dépassait le montant des sommes réclamées par le saisissant, l'imputation des
opérations débitrices doit se faire d'abord sur l'excédent au jour de la saisie338.
Ainsi, on suppose une saisie pratiquée pour 100. Le solde créditeur au jour
de la saisie se monte à 150. Les opérations de régularisation font apparaître un
résultat négatif de 50. Cette somme va s'imputer sur la différence existante entre
le solde du compte au jour de la saisie (150) et le montant de la créance du
saisissant (100). Cet excédent (50) est suffisant pour répondre des opérations de
régularisation339.
Ces opérations n'affecteront en rien la situation du créancier saisissant qui
pourra se faire payer le montant de sa créance.

337
R. PERROT et P. THÉRY, op. cit., p. 459 n° 458.
338
Ibid., p. 459 n° 458.
339
Ibid., p. 459 n° 458.

130
Les modalités de l’indisponibilité du compte saisi

Ce n'est que dans le cas où l’excédent au montant de la créance cause de la


saisie se révélerait insuffisant, que les opérations de régularisation affecteraient
les droits du créancier saisissant. En effet, il est normal que la régularisation soit
supportée par le débiteur sur les sommes qui dépassent ce que réclame le
créancier, avant de s'imputer sur celles rendues indisponibles, par la saisie340.

De même, on suppose qu’une saisie soit pratiquée pour 100. Le solde


créditeur au jour de la saisie se monte à 150. Les opérations de régularisation font
apparaître un résultat négatif de 70. Ainsi, la différence entre le solde créditeur et
le montant de la créance du saisissant (50) est insuffisante pour répondre des
opérations de régularisation. La situation du créancier saisissant va donc se
trouver affectée puisque le surplus (20) s'imputera sur la somme rendue
indisponible par la saisie. Il ne pourra donc demander au banquier que 100 - 20 =
80 (au lieu de 100) 341.
Ceci, est la technique de l’imputation en général, qui ne se fait que sur le
solde tel qu’il apparait au jour de la saisie. Sauf que, dans certaines mesures, une
imputation sur les sommes portées au crédit du compte après saisie, est
envisageable.

B- Imputation sur les sommes portées au


crédit du compte après saisie

Dans les exemples qui précèdent, on a raisonné comme si le compte avait


été arrêté au jour de la saisie, sous réserve des opérations de régularisation.

340
Ibid., p. 459 n° 458.
341
Ibid., p. 459 n° 458.

131
Les modalités de l’indisponibilité du compte saisi

Or, la saisie n'entraîne aucun arrêt du compte. Il faut donc se demander s'il
est possible d'imputer le solde de régularisation négatif sur les sommes portées au
crédit du compte à raison d'opérations postérieures à la saisie (tels des chèques
remis à l'encaissement par le débiteur après la saisie) 342.
Une distinction s'impose entre deux situations. Dans la première,
l’imputation est inconcevable alors que dans la deuxième, elle est envisageable.

Le créancier saisissant n'a aucun droit sur les sommes portées au crédit du
compte après la saisie, dès lors qu'elles proviennent d'opérations réalisées
postérieurement à celle-ci. Le principe est que la saisie opère sur les éléments du
patrimoine en l'état où ils se trouvent au jour où elle est pratiquée343.
Soit une saisie pratiquée pour 120. Le solde créditeur au jour de la saisie se
monte à 100. Les opérations de régularisation font apparaître un solde négatif de
60. Lors de la régularisation, le solde du compte s'accroît de 80, en raison
d'opérations postérieures à la saisie.
Le créancier n'aura aucun droit sur les 80 dont le compte a été crédité après
la saisie. Il a saisi 100 et non 180. Il ne pourra donc jamais devenir créancier pour
plus de 100, même si le solde de 180 permettrait de faire face à la fois au paiement
du saisissant (120) et au prélèvement consécutif aux opérations de régularisation
(60). Il ne pourra obtenir paiement que d'une partie de sa créance : 100 - 60 = 40.
Mais, si on admet, au contraire, que la régularisation peut s'imputer sur
n'importe quel article de crédit, le saisissant pourra recevoir l'intégralité de ce qu'il
réclame.
En fait, « rien ne semble interdire d'imputer les opérations de
régularisation sur ce qui viendrait accroître le solde créditeur après la saisie 344.

342
Ibid., p. 459 n° 458.
343
Ibid., p. 459 n° 458.
344
Ibid., p. 459 n° 458.

132
Les modalités de l’indisponibilité du compte saisi

En effet, la saisie n'arrête pas le fonctionnement du compte, ainsi, n'importe


quel article au crédit peut répondre de n'importe quel article au débit. En plus, la
prise en considération des intérêts du saisissant, doit l'emporter sur ceux du
débiteur 345.
Dans l’exemple qui a précédé, il est envisageable d’ajouter au solde du
compte au jour de la saisie, les 80, qui sont venus accroître le compte après la
saisie.
Ainsi, le solde du compte s'établissant à 100 + 80 = 180, est suffisant pour
permettre le prélèvement du solde des opérations de régularisation (60) et payer
le créancier du solde du compte au jour de la saisie (100). Il reste 20 qui reviennent
au débiteur, parce qu'ils ne sont pas inclus dans la saisie.
Cette solution est envisageable et n'affecte en rien les droits des
bénéficiaires des opérations de régularisation puisqu’en toute hypothèse, ils sont
payés. De plus, elle assure l'effectivité des droits du créancier saisissant, sinon le
débiteur pourrait librement disposer des sommes portées au crédit de son compte
après la saisie, alors qu'en vertu des règles de fonctionnement du compte, elles ont
aussi vocation à répondre des opérations débitrices qu'il a effectuées346.

345
Ibid., p. 459 n° 458.
346
Ibid., p. 459 n° 458.

133
Les modalités de l’indisponibilité du compte saisi

CONCLUSION DE LA DEUXIÈME PARTIE

En conclusion de cette partie, il convient de rappeler que le principe


d’indisponibilité est susceptible de levée. Le banquier n’est pas obligé de garder
les sommes saisies entre ses mains puisque le C.P.C.C. prévoit la possibilité de
lever cette indisponibilité par divers mécanismes.

En effet, l’article 333 du C.P.C.C. prévoit que l’indisponibilité peut être


levée par une mainlevée amiable ou une mainlevée judiciaire. Cette dernière peut
être soit avec un jugement sur le fond ou pas.

Pour la mainlevée judiciaire sans jugement, le législateur prévoit deux


mécanismes, à savoir la consignation au sens de l’article 334 du C.P.C.C. et le
cantonnement au sens de l’article 344 du C.P.C.C.

La consignation est un dépôt d’espèce entre les mains d’une tierce personne
à charge pour elle de les remettre à qui de droit. Cette procédure a l’avantage
d’être ouverte à toutes les parties de la saisie, mais elle ne donne aucun avantage
au créancier qui en profite contrairement au cantonnement judiciaire.

Le cantonnement judiciaire objet de l’article 344 du C.P.C.C. est une


mainlevée partielle de la saisie. Il ne peut être demandé que par le débiteur saisi,
en tout état de cause, sous condition de consigner une somme déterminée par le
juge des référés. Le cantonnement a pour effet de lever les effets de la saisie tout
en affectant la somme consignée au paiement de créances des saisissants et des
opposants.

Mise à part, cette possibilité d’obtenir une mainlevée judiciaire en référé,


la mainlevée peut être ordonnée par un jugement sur le fond. Ce dernier peut
prononcer soit la nullité ou la validité de la saisie-arrêt .

Pour le jugement prononçant la nullité de la saisie, le débiteur saisi peut


demander la nullité de la saisie, devant le tribunal compétent, soit par une action

134
Les modalités de l’indisponibilité du compte saisi

principale ou par une demande reconventionnelle. Le jugement prononce la nullité


de la saisie-arrêt si cette dernière est entachée d’un vice qu’il soit de fond ou de
forme.

Quant au jugement validant la saisie-arrêt, notamment le jugement de main-


vidange dans le cadre d’une saisie de compte courant, il a l’effet d’une cession
judiciaire de la somme saisie au profit du saisissant. A condition que ledit
jugement soit exécutoire à l’égard du tiers saisi, autrement dit, notifié et
insusceptible d’appel, et que le banquier tiers saisi déclare un solde positif
suffisant pour répondre aux causes de la saisie.

En fait, la détermination du solde du compte courant saisi ne peut pas être


immédiate, elle demande un laps de temps nécessaire à la liquidation des
opérations en cours initiées avant la date de la saisie. Cette régularisation a fait
l’objet du deuxième chapitre de la deuxième partie de ce travail.

La régularisation des opérations initiées avant la saisie est, en quelque sorte,


une simulation de clôture du compte courant qui sert à déterminer avec exactitude
le solde du compte au moment de sa saisie.

Pour ainsi faire, on a d’abord étudié les opérations bancaires susceptibles


d’être régularisées après la saisie du compte. Ces opérations sont soit des
opérations juridiquement achevées avant la saisie, là il s’agit d’une régularisation
comptable, ou bien des opérations qui ne sont pas vraiment achevées et qui
donnent un droit préférentiel au banquier, à savoir la contre-passation.

Pour la régularisation comptable, l’article 333 du C.P.C.C. permet


d’augmenter le solde du compte courant saisi du montant des chèques remis à
l'encaissement avant la saisie et non encore portés au compte. De même, pour les
effets de commerce échus remis en paiement. En plus de ces opérations, la
doctrine propose d’en ajouter les ordres de virements effectués au bénéfice du
débiteur avant la saisie non encore inscrits en compte.

135
Les modalités de l’indisponibilité du compte saisi

A part, ces opérations qui peuvent augmenter le solde du compte saisi,


certaines d’autres peuvent en réduire.

En effet, les opérations effectuées au débit du compte sont d’abord les


chèques tirés par le débiteur antérieurement à la saisie, présentés à l’encaissement
avant la saisie et non encore portés en compte. Le recours à la date de la remise
des chèques à l’encaissement comme critère d’antériorité a été critiqué au motif
qu’il altère le principe de transfert de la provision du chèque au jour de son
émission. Mais, cette disposition s’explique par la volonté du législateur à parer
au débiteur saisi la possibilité d’antidater ses chèques et ainsi vider son compte au
détriment du créancier saisissant.

En plus, le solde du compte courant saisi doit être débité du montant des
opérations effectuées par le biais d’une carte bancaire, à savoir les paiements ou
les retraits d'espèces aux distributeurs de billets.

A ce propos, le législateur n’a pas distinguer les cartes bancaires à paiement


immédiat ou différé. Pour les cartes bancaires à débit immédiat, le banquier est en
droit de demander sans délai son remboursement. Mais, pour les cartes bancaires
à débit différé, permettre au banquier de débiter le compte saisi des sommes non
encore inscrites au débit du compte revient à lui conférer une situation
préférentielle sans fondement. En fait, le droit préférentiel donné au banquier est
prévu en d’autres situations.

En effet, le législateur donne au banquier un droit préférentiel par rapport


au créancier saisissant en lui permettant de débiter le compte du montant d'une
créance née à son profit après la saisie.

Il s’agit de la contre-passation, qui est une technique consistant à annuler,


par une écriture inverse de la précédente, une opération comptable faite
antérieurement. Ainsi dans le compte-courant, le banquier est en droit de
contrepasser les chèques et effets de commerces portés au crédit du compte avant

136
Les modalités de l’indisponibilité du compte saisi

la saisie s’il s’avère dans le mois suivant la saisie qu’ils sont dépourvus de
provision.

La contre-passation est une faculté reconnue au banquier, qui peut y


renoncer soit pour exercer un recours cambiaire contre son client et les autres
signataires ou bien une action de droit commun sur la base de la convention
d’escompte. Mais, si le banquier décide de contrepasser les effets et chèques
revenus impayés, son choix est irrévocable.

Avant que le banquier puisse contrepasser les effets et chèques revenus


impayés, certaines conditions doivent être respectée. D’abord, il faut que le
banquier soit créancier, autrement dit il faut qu’il attende que les effets soient
échus. De plus, il faut qu’il y ait un lien de connexité entre la créance non entrée
en compte et une remise antérieur au sens contraire. Enfin, le banquier a le droit
de contre-passer non seulement le principal de la créance mais aussi les frais de
protêt et d'avis et des intérêts légaux.

Si lors de la contre-passation s’avère que le client est in bonis, cette dernière


vaut paiement et le banquier se trouve obligé de restituer les effets escomptés. En
revanche, si après contre-passation, le solde du compte courant s’avère débiteur,
le banquier conserve les effets escomptés et non payés.

Après avoir étudié dans la première section les opérations susceptibles de


régularisation, on a vu la mise en œuvre de ces dernières.

En fait, les opérations de régularisation comptable doivent intervenir dans


le délai de 15 jours de la date de la saisie, mais pour la contre-passation elle peut
être faite dans le mois qui suit la saisie.

Pour les opérations comptables, le délai de 15 jours ne pose aucun


problème. De même, pour la contre-passation des effets de commerces échues.
Pour les effets de commerce d’une échéance postérieur au délai d’un mois, le
banquier a la possibilité de présenter les effets de commerces à l’acceptation du

137
Les modalités de l’indisponibilité du compte saisi

tiré. Si le tiré refuse d’accepter la lettre de change, son refus va entrainer la


déchéance du terme.

Les paiements effectués en dehors de ces délais sont inopposables au


créancier saisissant. En outre, l’article 333 du C.P.C.C. impose au banquier, si le
solde du compte est affecté par les opérations de régularisation d’en présenter un
état et remettre une déclaration du solde définitif.

En plus, des délais de régularisation des opérations en cour, l’étude de la


mise en œuvre de ces dernières passes par l’étude leur imputation.

En général, si le solde des opérations de régularisation est positif, le solde


du compte courant saisi va s’affecter à l’avantage du créancier saisissant. Mais, si
le solde des opérations de régularisation s’avère négatif, la situation du créancier
n’est pas automatiquement affectée. Ainsi, la situation du créancier saisissant ne
s’altère que si le solde des opérations en cours est négatif et supérieur aux sommes
non frappées par la saisie.

Grosso modo, l’imputation des opérations de régularisation ne se fait, a


priori, que sur le solde du compte au jour de la saisie. Le saisissant, n’a aucun
droit sur les sommes portées au crédit du compte postérieurement à la saisie. Mais,
cela n’empêche qu’il soit possible d’admettre l’imputation des opérations de
régularisation débitrices sur ce qui viendrait accroitre le solde créditeur après la
saisie

138
CONCLUSION GÉNÉRALE

Tout au long de ce travail, il a été question d’étudier essentiellement les


répercussions de la saisie sur le fonctionnement ultérieur du compte courant qui
est un mécanisme de nature dynamique et instable.

En effet, ce mécanisme regroupe à la fois plusieurs intérêts en conflit, à


savoir ceux du créancier saisissant, ceux du débiteur saisi, ceux du banquier tiers
saisi et ceux des tiers qui sont en relation avec le débiteur saisi.

Dans le but d’assurer un équilibre d’intérêts entre ces différents


intervenants, les effets de la saisie du compte courant prennent en considération
certaines spécificités dudit compte.

En outre les opérations de dépôt et de retrait, le compte courant est


généralement le support de maintes opérations bancaires complexes qui sont
susceptibles d’être affectées par la saisie de ce dernier.

De par sa définition, le compte courant se caractérise par l’enchevêtrement


et la réciprocité des remises. Ainsi, son solde ne peut être déterminé que sous
réserve de régularisation des opérations initiées avant la saisie.

Cette régularisation des opérations en cours nécessite du temps. Mais dès


l’exploit de la saisie-arrêt , la saisie produit son premier effet de rendre
indisponible les fonds déposés auprès du banquier.

La position du législateur, depuis 1986, est de limiter l’effet


d’indisponibilité à concurrence du montant de la créance cause de la saisie. Sauf
que cette position ne semble pas prendre en compte la spécificité du solde du
compte courant qui ne peut pas être déterminé avec précision au moment de la
saisie. Ainsi, les opérations de régularisations sont susceptibles d’être faites au
détriment du créancier saisissant.
Cette solution est discutable, vu son incompatibilité avec les mécanismes
du compte courant. D’ailleurs, en droit français, l’indisponibilité qui est en
principe de nature partielle, est prévue comme totale lorsque la saisie porte sur un
compte bancaire. Sauf que, cette indisponibilité totale devient partielle, une fois
les opérations en cours régularisées pour ne pas nuire aux intérêts du débiteur saisi
tout en préservant les intérêts du créancier saisissant.

Mais, qu’elle que soit, la nature de l’indisponibilité, elle n’entraine pas la


clôture du compte courant. À ce propos, la pratique bancaire qui consiste à ouvrir
un compte bis pour régulariser les opérations initiées avant la saisie, est à prendre
du bon côté tant qu’elle ne déroge pas aux règles prévues par la loi et ne touche
pas aux droits du créancier.

En fait, le législateur est appelé à réaffirmer la protection du créancier en


consacrant d’une manière plus claire la non opposabilité des paiements, effectués
par le banquier tiers saisi, malgré l’interdiction de paiement, à son encontre.

Ainsi, le législateur est appelé à apporter quelques clarifications se


rapportant à la régularisation des opérations en cours. À cet effet, certaines
opérations créditrices, tels que les virements au profit du débiteur saisi, sont à
prévoir pour assurer une meilleure protection du gage général des créanciers.

En plus, et compte tenu de la technique de télécompensation actuelle, le


délai de régularisation comptable peut être revu à la baisse afin de donner plus de
rapidité au processus de la régularisation, notamment si elle ne comprend pas des
effets de commerces à contre-passer.

En dernier lieu, il parait indispensable de déterminer comment doivent


s’imputer les opérations de régularisation du fait que l’imputation est une question
d’une certaine technicité et peut être une source de difficultés pratiques.

140
Ce travail, portant sur la saisie du compte courant, pourrait permettre
d’avoir une idée sur la complexité des mécanismes qui régissent celui-ci et sa
spécificité. Cela permettrait d’envisager, éventuellement, une nouvelle piste de
recherche sur le compte courant.

141
ANNEXE

142
TABLE DES ANNEXES

Annexe N° 1 : Exemple de convention de compte courant Extra-

Bancaire

Annexe N° 2 : Exemple d’exploit de saisie-arrêt sur compte

courant

Annexe N° 3 : Un jugement validant une saisie-arrêt sur compte

courant

Annexe N° 4 : Exemple d’un procès-verbal de levée d’une saisie-

arrêt sur compte courant

Annexe N° 5 : Exemple de déclaration bancaire affirmative

Annexe N° 6 : Exemple de déclaration bancaire négative

Annexe N° 7 : Un jugement en référé ordonnant cantonnement

d’une saisie-arrêt sur compte courant

143
ANNEXE NO 1

144
145
ANNEXE NO 2

146
147
ANNEXE NO 3

148
149
150
151
152
153
ANNEXE NO 4

154
ANNEXE NO 5
6

155
ANNEXE NO 6

156
ANNEXE NO 7

157
158
159
BIBLIOGRAPHIE

BIBLIOGRAPHIE EN LANGUE FRANÇAISE :


Ouvrages Généraux :
 AOUIJ MRAD (A.), « Droit des entreprises publiques », Tunis : C.P.U.,
2009.
 BEN NASR (T.), « Droit bancaire tunisien », Tunis, [L’auteur], 2009.
 BONNEAU (T.), « Droit bancaire », 9ème éd., Paris, Montchrestien, 2011.
 CARRÉ (G.-L.-J.), « Lois de la procédure civile et administrative. T. 4 :
Procédure civile », 4ème éd., Paris, Cosse et Marchal, 1862.
 CÉZAR-BRU (C.), « Théorie et pratique des voies d'exécution », 3ème éd.,
Paris, Rousseau & Cie, 1927.
 DEKEUWER-DÉFOSSEZ (F.) et MOREIL (S.), « Droit bancaire »,
10ème éd., Paris, Dalloz, 2010.
 GAVALDA (C.) et STOUFFLET (J.), « Droit bancaire : Institutions,
Comptes, Opérations, Services », 2ème éd., Paris, Litec, 1994.
 GUINCHARD (S.) et DEBARD (T.), dir., « Lexique des termes juridiques
2016-2017 », 24ème éd., Paris, Dalloz, 2016.
 GUINCHARD (S.) et MOUSSA (T), dir., « Droit et pratique des voies
d'exécution 2015-2016 », 8ème éd., Paris, Dalloz, 2015.
 JAUFFRET (A.), « Manuel de procédure civile et voies d’exécution »,
Paris, Sirey, 1969.
 JOLY (A.), « Procédure civile et voies d’exécution, T. 2 : Voies
d’exécution », Paris, Sirey, 1969.
 KNANI (Y.), « Droit commercial : Les effets de commerces, le chèque, le
virement et la carte de paiement », Tunis, C.P.U., 2005.

 LEBORGNE (A.), « Droit de l'exécution : Voies d'exécution et procédures


de distribution », 2ème éd., Paris, Dalloz, 2014.

160
 MARETTE (P.), « Procédure civile et voies d’exécution », 2ème éd., Paris,
Litec, 1986.
 MELLOULI (S.), « Voies d'exécution : Procédures juridiques de
recouvrement des créances », Tunisie, CLE, 1991.
 MINIATO (L.), « Voies d’exécution et procédures de distribution », Paris,
Montchrestien, 2010.
 PERROT (R.) et THÉRY (P.), « Procédures civiles d'exécution », 3ème
éd., Paris, Dalloz, 2013.
 PERROT (R.), « Voies d’exécution », Paris, Les cours de droit, 1978.
 PIEDEIÈVRE (S.) et PUTMAN (E.), « Droit bancaire », Paris,
Economica, 2011.
 RIPERT (G.) et ROBLOT (R.), « Traité de droit commercial, T. 2 : Effets
de commerce, banque, contrats commerciaux, procédures collectives »,
16ème éd., Paris, LGDJ, 2003.
 SOLUS (H.), « Cours de voies d’exécution », Paris, Les cours de droit,
1961.
 VÉRON (M.), « Voies d’exécution et procédures de distribution », Paris,
Masson, 1989.
 VINCENT (J.) et PRÉVAULT (J.), « Voies d’exécution et procédures de
distribution », 16ème éd., Paris, Dalloz, 1987.

Ouvrages Spéciaux :

 CABRILLAC (M.) et RIVES-LANGE (M.-T.), « Le compte courant en


droit français », Paris, Sirey, 1969.
 DELLECI (J.-M.), « La réforme des procédures civiles d’exécution : son
application aux opérations de banque », 2ème éd., Paris, La Revue "Banque"
éditeur, 1997.

161
 LABAT (J.), « Le compte courant bancaire des entreprises : Comment
concilier pratique et théorie ? », Paris, Lamy, 2007.
 MATTOUT (J.-P.), « Droit bancaire international », 3ème éd., Paris, la
Revue "Banque" éditeur., 2004.

Thèses et Mémoires :
Thèses :
 CAMENSULI-FEUILLARD (L.), « La dimension collective des
procédures civiles d'exécution : Contribution à la définition de la notion de
procédure collective », Paris, Dalloz, 2008.
 GEORGES (F.), « La saisie de la monnaie scripturale », Bruxelles,
Larcier, 2006.

Mémoires :
 BACHA (A.), « Les effets de la saisie des comptes en banque », Mémoire
pour le D.E.A. en Droit Privé, Faculté de Droit et des Sciences
Economiques et Politiques de Tunis, 1980/1981.
 FAZAA (D.), « Le nantissement des créances et des comptes », Mémoire
pour le D.E.A. en Droit des Contrats et des Investissements, Faculté de
Droit et des Sciences Politiques de Tunis, 1999/2000.

Articles :

 BOUTEILLER (P.), J.-CI. Com., v° « Compte courant », à jour au 8 Mars


2014, fasc. 347.
 CABRILLAC (M.), « Les sûretés conventionnelles sur l’argent » »,
Mélanges offerts à J. DERRUPPÉ, Joly et Litec, 1991, p. 333.

162
 CALAIS-AULOY (M.-T.), « L’idée d’indivisibilité et le compte
courant », LPA, 14 Avril 2000 n° 75, p. 14.
 CALENDINI (J.-M.), « De quelques problèmes liés à la saisie des comptes
bancaires », LPA, 26 Février 1992 n° 25, p. 14
 « La saisie attribution de compte bancaire »,
LPA, 9 Février 1994 n° 17, p. 17.
 CAYROL (N), J.-CI. Pr. Civ., V° Saisie-attribution, (Comptes Bancaires :
Règles Spécifiques), à jour au 14 Janvier 2013, fasc. 2280.
 J.-CI. Pr. Civ., V° SAISIE-ATTRIBUTION, (Objet de la
Saisie), à jour au 14 Janvier 2013, fasc. 2242.
 CORPART (I.), « Le renforcement de la protection des comptes bancaires
contre les saisies et la mise en place du solde bancaire insaisissable »,
L.P.A, 13 Mai 2003, n°95 P. 4.
 CRÉDOT (F.-J.) et GÉRARD (Y.), « Aspects bancaires de la réforme des
procédures civiles d’exécution », Revue de Droit Bancaire, Janvier/Février
1993, n° 35, p. 8.
 CRÉDOT (F.-J.), « Les aspects bancaires de la loi du 9 Juillet 1991 portant
réforme des procédures civiles d’exécution », LPA, 24 Avril 1992, n°50, p.
10.
 CROZE (H.), « La loi n° 91-650 du 9 juillet 1991 portant réforme des
procédures civiles d'exécution : les règles spécifiques aux différentes
mesures d'exécution forcée et mesures conservatoires », JCP G 1992, I,
3585, p. 236.
 « Saisie-attribution bancaire : Les mystères de l’article 47 de
la loi du 9 Juillet 1991 », LPA, 6 Janvier 1993, § 3, p. 71.
 CUNIBERTI (G.), « L’extraterritorialité de la saisie-attribution : L’affaire
BNP-Paribas Monaco », Revue Lamy Droit des Affaires, n°28, Juin 2008,
p. 29.

163
 GIBIRILA (D.), « Escompte », Rép. Dr. Com. Dalloz, Janvier 2014.
 DESGORCES (R.), « Relecture de la théorie du compte courant », R.T.D.
Com. 1997, p. 383.
 FEITU (E.), « Traité du compte courant », Paris : Marescq, 1873, p. 331.
 MARTIN (D.-R.), « Des comptes bancaires à affectation spéciale ouverts
à des professionnels », RD bancaire et de la bourse, Janvier / Février 1992,
n° 29, p. 2.

 MOULY (C.), « La saisie des comptes bancaires », LPA, 26 Mai 1993 n°


63, p. 7.
 RIVES-LANGE (J.-L.), « La saisissabilité du compte courant », D.1974,
chronique, p. 101.
 « La monnaie scripturale : Contribution à une
étude juridique », Études de Droit Commercial à la mémoire de H.
CABRILLAC, Paris, Librairies Techniques, 1968, p. 405.
 SALATI (O.), J.-CI. Proc. Civ., V° « Biens insaisissables (Biens
insaisissables dans le Code des procédures civiles d’exécution) », à jour au
20 Août 2015, Fasc. 2170.
 STOUFFLET (J.), « Compte courant », Rép. Dr. Com. Dalloz, Février
2009.
 SYNVET (H.), « La Contre-passation en compte courant : un vieux
problème toujours d’actualité », Mélanges offerts à Jean DERRUPPÉ : «
Les activités et les biens de l'entreprise », Paris : GLN JOLY et Litec, 1991,
p. 193.

164
‫قائمة املراجع باللغة العربية‪:‬‬

‫املراجع العامة‪:‬‬
‫‪ ‬خليفة الخروبي‪" ،‬القانون العدلي الخاص‪ :‬طرق التنفيذ"‪ ،‬ط‪ ،3 .‬تونس‪ :‬مجمع األطرش للكتاب‬
‫المختص‪.2015 ،‬‬

‫‪ ‬علي كحلون‪" ،‬طرق التنفيذ واستخالص الديون العامة والخا ّ‬


‫صة"‪ ،‬ط‪ ،2 .‬تونس‪ :‬مجمع األطرش‬
‫للكتاب المختص‪.2013 ،‬‬
‫‪ ‬فرج القصير‪" ،‬القانون الجنائي العام"‪ ،‬تونس‪ :‬مركز النشر الجامعي‪.2006 ،‬‬
‫‪ ‬محمد الزين‪" ،‬النظرية العامة لإللتزامات‪ :‬العقد"‪ ،‬ط‪ ،2 .‬تونس‪ ،‬مطبعة الوفاء‪.1997 ،‬‬

‫املقاالت‪:‬‬
‫‪ ‬الباشا البجار‪ "،‬العقلة التوقيفية"‪ ،‬مداخلة ألقيت بمناسبة دورة دراسيّة انتظمت يوم ‪ 28‬نوفمبر‬
‫‪ 2002‬بالمعهد األعلى للقضاء حول موضوع "العقل حسب التنقيحات الحديثة"‪( ،‬غير منشور)‬
‫‪ ‬البشير زهرة‪" ،‬انتقال ملكية رصيد الشيك والعقلة التوقيفية"‪ ،‬ق‪.‬ت‪ ،.‬عدد ‪ ،7‬جويلية ‪ .1986‬ص‪.‬‬
‫‪.47‬‬
‫"بعض خواطر عن قانون المرافعات المدنية والتجارية‪ :‬ما هي العراقيل والصعوبات‬ ‫‪‬‬
‫المتسببة عن القانون الجاري به العمل والمتعلق بالعقل التوقيفية"‪ ،‬ق‪.‬ت‪ ،.‬عدد ‪ ،9‬نوفمبر ‪،1985‬‬
‫ص‪.21 .‬‬
‫‪ ‬جمال بكار‪" ،‬آجال تصريح الغير المعقول تحت يده"‪ ،‬م‪.‬ق‪.‬ت‪ ،2008 .‬ص‪.41‬‬
‫‪ ‬حمدان غيلب‪" ،‬العقلة التوقيفية على الحساب الجاري"‪ ،‬مجلّة المحاماة‪ ،‬عدد ‪ ،2‬جانفي‪ /‬مارس‬
‫‪ ،1984‬ص‪.21 .‬‬
‫‪ ‬محمد صالح العياري‪" ،‬التعديل األخير لمجلة المرافعات المدنية والتجارية‪ :‬متعلقه ومرماه"‪،‬‬
‫ق‪.‬ت‪ ،.‬عدد‪ ،1‬جانفي ‪ ،1987‬ص‪.28 .‬‬
‫‪ ‬محمد كمال حالب‪" ،‬تعليق على التنقيحات الجديدة لمجلة المرافعات المدنية والتجارية"‪ ،‬ق‪.‬ت‪.‬‬
‫عدد‪ ،1‬جانفي ‪ ،2003‬ص‪.99 .‬‬

‫‪165‬‬
TABLE DES MATIÈRES

INTRODUCTION ................................................................................................. 1

PARTIE I : L’INDISPONIBILITÉ, UN EFFET DIRECT DE LA SAISIE ...... 23


CHAPITRE I : L’ÉTENDUE DE L’INDISPONIBILITÉ ............................................... 23
Section I : Le domaine de la saisie du compte courant .............................. 24
§ I : L’exclusion de certains comptes de saisissabilité ........................... 26
A- Les comptes professionnels ........................................................... 27
B- Les immunités d’exécution ............................................................ 28
§ II : L’exclusion de certaines sommes de saisissabilité ......................... 35
A- Les sommes d’origines insaisissables ............................................ 36
B- L’incidence de la saisie sur certaines opérations de banque .......... 42
Section II : La nature de l’indisponibilité ................................................... 49
§ I : La solution du C.P.C.C. ................................................................... 49
A- L’étendue de l’indisponibilité ........................................................ 49
B- Le bénéficiaire de l’indisponibilité ................................................ 52
§ II : Appréciation de la solution du C.P.C.C. ........................................ 55
A- L’inadéquation de l’indisponibilité partielle avec les mécanismes
du compte courant ............................................................................... 55
B- La remise en cause du principe de l’indisponibilité partielle ........ 58
CHAPITRE II : LES EFFETS DE L’INDISPONIBILITÉ .............................................. 59
Section I : Le fonctionnement ultérieur du compte ..................................... 59
§ I : La saisie ne clôture pas le compte ................................................... 59
A- Le compte courant saisi n’est pas clos ........................................... 59
B- La pratique bancaire ....................................................................... 60
§ II : La saisie, cause de dégradation financière ..................................... 62
A- Les incapacités pour mauvaise gestion .......................................... 62
B- Les difficultés économiques ........................................................... 63
Section II : Les obligations du banquier ..................................................... 65

166
§ I : L’interdiction de paiement ............................................................... 66
A- Interdiction face au débiteur saisi .................................................. 66
B- Interdiction face au créancier saisissant ......................................... 67
§ II : La responsabilité du banquier en cas de dessaisissement .............. 69
A- La responsabilité civile du banquier .............................................. 69
B- La responsabilité pénale du banquier ............................................. 72
CONCLUSION DE LA PREMIÈRE PARTIE ............................................... 74

PARTIE II : LES MODALITÉS DE L’INDISPONIBILITÉ DU COMPTE


SAISI ................................................................................................................... 78
CHAPITRE I : LA LEVÉE DE L’INDISPONIBILITÉ .................................................. 78
Section I : La levée de l’indisponibilité sans jugement............................... 78
§ I : La consignation au sens de l’article 334 du C.P.C.C. ..................... 80
A- Les parties à la consignation .......................................................... 81
B- Les effets de la consignation .......................................................... 83
§ II : Le cantonnement au sens de l’article 344 du C.P.C.C ................... 83
A- Les conditions du cantonnement .................................................... 85
B- Les effets du cantonnement ............................................................ 87
Section II : La levée de l’indisponibilité avec un jugement sur le fond ...... 89
§ I : Le jugement prononçant la nullité de la saisie ................................ 90
A- La procédure en annulation de la saisie ......................................... 90
B- Les causes de la nullité de la saisie ................................................ 92
§ II : Le jugement prononçant la validité de la saisie ............................. 95
A- La nature juridique du jugement de main-vidange ........................ 97
B- Les conditions de mise en œuvre du jugement de main-vidange .. 99
CHAPITRE II : LA RÉGULARISATION DES OPÉRATIONS EN COURS .................... 103
Section I : Les opérations susceptibles de régularisation ........................ 105
§I : La régularisation comptable ........................................................... 106
A- Les opérations créditrices ............................................................ 106
B- Les opérations débitrices .............................................................. 109

167
§II : La contre-passation ........................................................................ 114
A- La mise en œuvre de la contre-passation ..................................... 116
B- Les effets de la contre-passation .................................................. 120
Section II : La mise en œuvre des opérations de régularisation............... 122
§ I : Le délai de régularisation............................................................... 123
A- La dualité du délai de régularisation ............................................ 123
B- L’expiration du délai de régularisation ........................................ 125
§ II : L’imputation des opérations de régularisation ............................. 128
A- Présentation générale de l’imputation des opérations en cours ... 129
B- Imputation sur les sommes portées au crédit du compte après saisie
........................................................................................................... 131
CONCLUSION DE LA DEUXIÈME PARTIE ............................................ 134
CONCLUSION GÉNÉRALE ..................................................................... 139

ANNEXE........................................................................................................... 142

BIBLIOGRAPHIE ............................................................................................ 160

TABLE DES MATIÈRES ................................................................................ 166

168

Vous aimerez peut-être aussi