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3/26/2020 Dentons - Ordonnance « COVID-19 » du 25 mars 2020 - Conséquences sur les Contrats Publics

Ordonnance « COVID-19 » du 25 mars 2020 Conséquences


sur les Contrats Publics
26 mars 2020

Afin de faire face aux conséquences économiques, financières et sociales Contacts principaux
de l'épidémie de COVID-19 et aux conséquences des mesures prises pour
limiter sa propagation, le Gouvernement avait été habilité à prendre par Marc Fornacciari
ordonnance, par la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020, toute mesure « Associé
adaptant les règles de passation, de délais de paiement, d'exécution et de Paris
résiliation » figurant dans le code de la commande publique et les contrats D +33 1 42 68 45 44
publics. marc.fornacciari@dentons.com

Le texte annoncé ne s’est pas fait attendre : l’ordonnance n° 2020-319 du


25 mars 2020 portant diverses mesures d'adaptation des règles de Dorothée Griveaux
passation, de procédure ou d'exécution des contrats soumis au code de la Of Counsel
commande publique et des contrats publics qui n'en relèvent pas pendant Paris
la crise sanitaire née de l'épidémie de COVID-19 a été publiée au JO de ce D +33 1 42 68 44 56
jour, le 26 mars 2020. dorothee.griveaux@dentons.com

L’ordonnance s’applique à tous les contrats publics, qu’ils soient soumis au


code de la commande publique (concessions et marchés publics, y compris Inès Tantardini
les marchés de partenariat) ou non. Ce qui implique donc que des contrats Collaboratrice
tels que les conventions d’occupation du domaine public, mais aussi les Paris
baux emphytéotiques administratifs ou baux emphytéotiques hospitaliers D +33 1 42 68 94 01
ines.tantardini@dentons.com
sont également concernés.

En outre, ses dispositions « ne sont mises en œuvre que dans la mesure


où elles sont nécessaires pour faire face aux conséquences » du COVID- Prisca Betesta

19 : le rapport au Président de la République évoque une « analyse au cas Collaboratrice


par cas » des difficultés du cocontractant. Paris
D +33 1 42 68 94 46
Notons que l’idée de qualifier la pandémie de COVID-19 d’évènement de prisca.betesta@dentons.com

force majeure, comme l’avait initialement annoncé le Gouvernement pour


les marchés publics de l’Etat, n’est plus à l’ordre du jour, ce qui
n’empêchera évidemment pas de l’invoquer au cas par cas.

Le présent article donne un aperçu des principales dispositions contenues


dans l’ordonnance, qui peuvent intéresser aussi bien les opérateurs publics
que privés, et emportent des conséquences sur les procédures de
passation en cours (1) et les contrats en cours d’exécution (2), avec,
s’agissant de ces derniers, des spécificités pour les contrats qui arrivent à
expiration (2.2), les marchés (2.3) et les concessions (2.4).

1 Quelles conséquences pour les


procédures de passation en cours ?
Prolongation des délais de procédure

Les délais de réception des candidatures et des offres sont prolongés d’une
« durée suffisante » pour permettre aux opérateurs économiques de
présenter leur candidature ou leur offre, sauf lorsque les « prestations objet
du contrat ne peuvent souffrir aucun retard ».

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La décision appartient à l’administration seule, bien sûr sous le contrôle du


juge.

En pratique, les opérateurs privés étant dans l’incapacité de s’organiser et


de travailler aussi efficacement que d’habitude depuis le début des
mesures de confinement, plusieurs acheteurs avaient déjà pris l’initiative de
prolonger les délais de leurs procédures en cours, par exemple de 2
semaines voire d’un mois, les textes et la jurisprudence les y autorisant
déjà.

Aménagement des modalités de mise en concurrence

Les modalités de la mise en concurrence prévues dans les documents de


la consultation peuvent être aménagées, en cours de procédure, dans le
respect du principe d’égalité de traitement des candidats.

Cette possibilité ne joue que si les modalités de mise en concurrence


initiales ne peuvent pas être respectées par l’autorité contractante. On
pense notamment aux aménagements nécessaires à apporter à
l’organisation des visites, auditions ou négociations, ou encore au dépôt «
physique » de certaines offres.

2 Quelles conséquences pour les contrats


en cours d’exécution ?
En cas de difficultés d'exécution du contrat, l’ordonnance prévoit des
dispositions spécifiques, qui ont vocation à s’appliquer « nonobstant toute
stipulation contraire », sauf bien sûr dans le cas où les stipulations
contractuelles se trouveraient être plus favorables au titulaire du contrat.

2.1 Règles générales d’exécution


Prolongation des délais d’exécution

Lorsque le titulaire ne peut pas respecter le délai d’exécution d'une ou


plusieurs obligations du contrat ou que cette exécution en temps et en
heure nécessiterait des moyens dont la mobilisation ferait peser une charge
« manifestement excessive », ce délai est prolongé jusqu’au 23 juillet 2020,
sur demande du titulaire formulée avant l’expiration du délai contractuel.

Reste à déterminer les situations qui pourront bénéficier de cette mesure,


alors que l’exécution des contrats administratifs – et notamment des
chantiers – est bousculée de jour en jour et nécessite des prises de
décisions rapides.

Sanctions, pénalités et substitution

Lorsque le titulaire se trouve dans l’impossibilité d’exécuter tout ou partie


d’un bon de commande ou d’un contrat, notamment lorsqu’il démontre qu’il
ne dispose pas des moyens suffisants ou que leur mobilisation ferait peser
sur lui une charge « manifestement excessive », l’acheteur ne peut pas lui
infliger de pénalités, de sanctions, ou engager sa responsabilité
contractuelle.

En contrepartie, dans ce cas, l’acheteur peut conclure un marché de


substitution avec un tiers pour satisfaire ceux de ses besoins qui ne
peuvent souffrir aucun retard. Cette possibilité s’applique nonobstant toute
clause d’exclusivité. Attention, il ne s’agit pas d’une mise en régie :
l’exécution du marché de substitution ne peut pas être effectuée aux frais et
risques du titulaire initial.

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2.2 Cas des contrats qui arrivent à


expiration entre le 12 mars et le 23 juillet
Alors qu’en principe les contrats arrivant à expiration doivent être remis en
concurrence et ne peuvent être prolongés que dans des conditions
restrictives, l’ordonnance permet de les prolonger par voie d’avenant «
lorsque l’organisation d’une procédure de mise en concurrence ne peut être
mise en œuvre ».

Cette possibilité n’est offerte qu’aux contrats dont le terme survient entre le
12 mars et le 23 juillet 2020, et la durée de la prolongation ne peut excéder
la date du 23 juillet 2020, augmentée « de la durée nécessaire à la remise
en concurrence », qui est laissée à l’appréciation des acheteurs publics.

2.3 Dispositions spécifiques aux marchés


Octroi d’avances facilité

Les acheteurs peuvent, par avenant, modifier les conditions de versement


de l’avance.

Son taux peut être porté à un montant supérieur à 60 % du montant du


marché ou du bon de commande.

Par ailleurs, les acheteurs ne sont pas tenus d’exiger la constitution d’une
garantie à première demande pour les avances supérieures à 30 % du
montant du marché.

Indemnisation des dépenses engagées par le titulaire en cas de


résiliation du marché

Le titulaire a droit au remboursement des dépenses engagées directement


pour l’exécution d’un marché résilié ou d’un bon de commande annulé en
conséquence des mesures prises par les autorités administratives dans le
cadre de l’état d’urgence sanitaire.

Sur ce point, on peut noter que l’ordonnance ne vise que les marchés.

Encadrement du règlement du prix des marchés forfaitaires


suspendus

En cas de suspension d’un marché à prix forfaitaire, l’acheteur procède


sans délai au règlement du marché selon les modalités et pour les
montants prévus par le contrat.

A l’issue de la suspension, un avenant détermine les modifications du


contrat éventuellement nécessaires, sa reprise à l’identique ou sa résiliation
ainsi que les sommes dues au titulaire ou, le cas échéant, les sommes
dues par ce dernier à l’acheteur.

2.4 Dispositions spécifiques aux


concessions
Suspension des sommes dues au concédant et versement
d’avances en cas de suspension du contrat

Lorsque le concédant est conduit à suspendre l’exécution d’une


concession, tout versement d’une somme au concédant est suspendu et, si
la situation de l’opérateur économique le justifie et à hauteur de ses

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besoins, une avance sur le versement des sommes dues par le concédant
peut lui être versée.

Indemnisation des surcoûts causés par les modifications du contrat

Lorsque, sans que la concession soit suspendue, le concédant est conduit


à modifier significativement les modalités d’exécution prévues au contrat, le
concessionnaire a droit à une indemnité destinée à compenser le surcoût
qui résulte de l’exécution, même partielle, du service ou des travaux,
lorsque la poursuite de l’exécution de la concession impose la mise en
œuvre de moyens supplémentaires qui n’étaient pas prévus au contrat
initial et qui représenteraient une charge manifestement excessive au
regard de sa situation financière.

Il s’agit là d’un assouplissement des conditions d’application de la théorie


de l’imprévision.

3. Appréciation générale
L’ordonnance n’apporte que des innovations limitées, et les solutions
qu’elle apporte vont parfois créer des problèmes nouveaux.

Le texte en effet n’ouvre pas de droits automatiques au profit des parties


publiques ou privées au contrat.

Tout d’abord, les mesures prévues ne sont mises en œuvre que « dans la
mesure où elles sont nécessaires pour faire face aux conséquences » de
l’épidémie et des mesures prises pour limiter sa propagation. L’ordonnance
ne donne donc pas blanc-seing aux intéressés mais réclamera un examen
au cas par cas, ce qui dans le contexte d’urgence actuel, ne facilitera pas la
tâche des partenaires publics et privées lors de leurs discussions
contractuelles.

Ainsi, si les règles posées par l’ordonnance sont claires, tout est affaire de
qualification juridique des faits, c’est-à-dire du point de savoir si les
opérateurs se trouvent vraiment dans une situation de fait pouvant justifier
l’application de la mesure. Tout sera donc affaire de cas d’espèce, et
l’appréciation de l’administration sera évidemment portée sous réserve du
contrôle du juge, dont il est encore trop tôt pour se demander s’il sera entier
ou limité à l’erreur manifeste. Ainsi en va-t-il par exemple de l’appréciation
portée par l’administration sur :

le point de savoir si les mesures à prendre sont nécessaires pour faire


face aux conséquences de l’événement que nous sommes en train de
vivre ;
la prise en charge des conditions financières des mesures ainsi
appliquées, sur laquelle l’ordonnance est silencieuse ;
l’impossibilité pour le co-contractant de l’administration de respecter ses
obligations contractuelles ou le caractère « manifestement excessif » qui
résulterait de l’exécution de cette obligation ;
la détermination des services qui « ne peuvent souffrir aucun retard » et
qui peuvent justifier la substitution du titulaire ou le refus de prolonger les
délais d’exécution ;
en matière de concessions, le point de savoir si la poursuite de
l'exécution de la concession impose la mise en œuvre de moyens
supplémentaires qui n'étaient pas prévus au contrat initial et
l’appréciation du caractère manifestement excessif de ces moyens au
regard de la situation financière du concessionnaire ; ou encore

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le point de savoir si une mise en concurrence ne peut être mise en


œuvre, justifiant ainsi une prolongation des contrats venant à expiration.

Enfin, il faut souligner que certaines des règles édictées sont de bon sens,
ou ne sont que l’illustration de ce que les principes généraux du droit public
permettent ou imposent déjà de faire : ainsi, les délais de procédure
doivent de toute façon, à peine d’irrégularité de la procédure, permettre aux
candidats de présenter utilement leurs candidatures et leurs offres. Et de
façon générale, l’invocation des théories de l’imprévision, de la Force
Majeure ou du Fait du Prince (points que l’ordonnance se garde bien
d’aborder), qu’elles soient ou non prévues par les contrats, auraient suffi à
dispenser au cas par cas les titulaires des marchés et concessions de
l’exécution de leurs obligations contractuelles.

Néanmoins, les discussions des parties publiques et privées aux contrats


publics devront dorénavant s’inscrire dans ce nouveau cadre aménagé des
contrats publics, dont on peut douter toutefois qu’il apporte davantage de
sécurité juridique, à court terme comme à long terme lorsqu’il faudra panser
nos plaies, faire le bilan et reprendre l’exécution « normale » de ces
contrats.

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