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9. A.-M. ORENDO SOSSA, Contribution à l’histoire des Pove des origines à 1912, mémoire
de maîtrise d’histoire, Université Omar-Bongo de Libreville, 1987, p. 1.
L’histoire africaine en Afrique noire francophone 287
10. M. DIOUF, « Entre l’Afrique et l’Inde : sur les questions coloniales et nationales.
Écritures de l’histoire et recherches historiques », dans L’Historiographie indienne en
débat. Colonialisme, nationalisme et sociétés postcoloniales, M. DIOUF dir., Paris, 2000,
p. 6.
11. A.-M. ORENDO SOSSA, Contribution à l’histoire des Pove, op. cit., p. 1.
288 Clotaire MESSI ME NANG
1998 2 4 1 3 4 3 0 1 4 1 23
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Ainsi, dans les travaux des jeunes chercheurs gabonais, les sources
orales sont largement valorisées et font l’objet d’un véritable plaidoyer pour
la reconnaissance de leur valeur informative. En revanche, les sources écrites
coloniales sont critiquées pour leur nombrilisme et leur manque
d’objectivité. Les historiens nationalistes les considèrent comme des sources
secondaires plus ou moins indignes et recommandent l’extrême méfiance à
tout « historien professionnel » (pour reprendre la formule d’un étudiant)
qui voudrait étudier le passé africain. Car de ces sources « il ressort une
mauvaise appréciation des sociétés endogènes. Les informations sont souvent
15
muettes sur les mœurs et la condition réelle des populations » .
La démarche des historiens nationalistes me semble critiquable à
plusieurs points de vue. D’abord, en opposant les sources orales aux sources
coloniales, ils ont fait une grave entorse à la pratique historique. L’historien
n’a pas à chercher à établir une hiérarchie entre ses sources, mais à les croiser
afin de dégager la réalité historique recherchée. Ensuite, la critique
historique exige que le chercheur évoque non seulement les limites d’une
source mais aussi ses qualités. Or en ne soulignant que les défauts des
sources coloniales sans en présenter les apports et en valorisant les sources
orales sans en montrer les failles, les chercheurs nationalistes ont fait une
autre entorse aux méthodes de critique historique posées par les pères
fondateurs. Car « l’historien professionnel » est astreint à la sage et essentielle
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Précoloniale
5%
Coloniale/postcoloniale
17%
Précoloniale/postcoloniale
5%
Coloniale
Précoloniale/coloniale 41%
8%
Postcoloniale
24%
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17. F. MEYE ME NZE, Évolution de la vie politique dans la région du Woleu-Ntem (1945-
1960), mémoire de maîtrise d’histoire, Université Omar-Bongo de Libreville, 1985,
p. 2.
292 Clotaire MESSI ME NANG
historiographique, tel que l’histoire nationale l’a fait à des fins opposées. En
effet, la démarche des historiens nationalistes a eu pour conséquence
d’enfermer l’histoire africaine dans un ghetto historiographique qui l’éloigna
18
des « progrès de la science historique et de l’école braudélienne » , freinant
19
la visibilité des spécialistes dans le champ des disciplines générales .
Certes pendant longtemps, l’histoire de l’Afrique francophone s’est
refermée sur elle-même. Mais aujourd’hui, la nouvelle génération
d’historiens de l’Afrique (aussi bien les Africains que les Européens) entend
20
écrire autrement cette histoire . Elle postule la complexité de l’histoire
21
africaine et proclame la nécessité d’une histoire déchromatisée . De même,
la nouvelle génération d’africanistes plaide pour la banalité de l’histoire
africaine ; « banalité non pas aplatissante ou méprisante, mais outil
herméneutique permettant de délivrer le continent de son bagage exotique,
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de ses frilosités scientifiques et de son piédestal méthodologique » . Tout
compte fait, l’histoire africaine (au-delà des passions) est une histoire comme
les autres, qui doit suivre l’évolution de la science historique et à laquelle il
faut appliquer les méthodes critiques héritées des pères fondateurs.
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