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Jean-Claude Driant
Dans Regards croisés sur l'économie 2011/1 (n° 9), pages 187 à 197
Éditions La Découverte
ISSN 1956-7413
ISBN 9782707168931
DOI 10.3917/rce.009.0187
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L a France est l’un des très rares pays européens qui ont fait le choix de
poursuivre le développement quantitatif d’un parc de logements locatifs
sociaux. À ce titre, si l’on en croit les annonces du secrétaire d’État chargé
du logement, Benoist Apparu, l’année 2010 constitue même un record, avec
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1. Annonce faite notamment dans la conférence de presse de Benoist Apparu du 20 janvier 2011
(en ligne sur le site http://www.developpement-durable.gouv.fr/).
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des dernières années. Cette analyse sera l’occasion, in fine, d’interroger les
scénarios d’évolution qui, d’ores et déjà, se dégagent.
5. Le plan de cohésion sociale, renforcé par la loi sur le droit au logement opposable (DALO)
de mars 2007, a programmé un fort accroissement de la production de logements sociaux tout en
maîtrisant la dépense budgétaire en mobilisant fortement le PLS qui ne coûte rien en subvention tout
en rappelant que les taux légaux des subventions PLUS et PLA-I sont des taux maximum et que rien
n’empêche de pratiquer des niveaux inférieurs.
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6. C’est-à-dire par les directions départementales des territoires (DDT), les ex-directions dépar-
tementales de l’équipement (DDE), ou en Île-de-France, par les unités territoriales de la Direction
régionale et interdépartementale de l’hébergement et du logement (DRIHL).
7. En ce qui concerne le logement social, l’ANRU, créée en 2004, finance la démolition d’immeubles
et leur remplacement par des logements neufs selon la règle du « un pour un », avec un programme
quantitatif global de plus de 130 000 unités ente 2004 et 2013. Le programme comporte également
un important effort d’amélioration du parc des quartiers concernés portant sur 300 000 logements à
terme.
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“
Le recul progressif des subventions de l’État impose
aux organismes de logement social de trouver des moyens
complémentaires de financement pour limiter le recours à la dette.
fonds d’État sur leur territoire via la délégation des aides à la pierre. La plu-
part n’ont pas attendu cette innovation législative pour apporter des contri-
butions additionnelles aux aides nationales de droit commun.
De fait, tant les régions que les départements, les établissements publics
de coopération intercommunale (EPCI) et certaines communes ont déve-
loppé, depuis les années 1990, des mécanismes d’aides financières extrê-
mement diverses pour la production de logements sociaux, en complément
des aides d’État. Selon les cas, ces aides prennent une forme de subvention
forfaitaire et automatique, ajoutée aux mécanismes nationaux, ou sont, de
plus en plus souvent, assorties de conditions formulées en fonction des prio-
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Les fonds propres des organismes Regards croisés sur l’économie n° 9 – 2011 © La Découverte
eux aussi, surtout là où les coûts de production sont très élevés, il est pro-
gressivement devenu nécessaire de financer les opérations avec une certaine
dose de fonds propres.
d’une part croissante des dépôts des épargnants 8. Il s’agit pour elles à la fois
de mieux intégrer cette épargne dans leurs stratégies globales et de se poser
comme alternative crédible pour développer un nouveau marché de prêts ban-
caires au financement du logement social.
De telles évolutions, plus incertaines, mais dont les indices se multi-
plient, auraient à plus long terme pour conséquence une mutation radicale
du système français du logement social. Le développement du parc s’en trou-
verait considérablement ralenti, voire stoppé, ou placé sous la responsabilité
d’acteurs banalisés, financés par le système bancaire commercial, bénéficiant
d’avantages fiscaux (TVA réduite, exonération de taxe foncière) et éventuel-
lement soutenus par les collectivités territoriales qui se verraient confier la
pleine responsabilité de l’aide à la pierre.
On rejoindrait ainsi le modèle actuel de la majorité des pays européens,
alors même que plusieurs d’entre eux s’interrogent sur l’opportunité d’un retour
en arrière en constatant les effets de la « résidualisation » du logement social et
de la privatisation globale de la question du logement [Houard, 2011].
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8. A l’heure où nous rédigeons cet article se poursuit un débat à l’issue incertaine entre le lobby
des banques et celui du logement social autour de la fixation du taux de centralisation à la Caisse des
dépôts des ressources du Livret A. De l’issue de ce débat et de la décision qui sera prise par le minis-
tère des Finances dépendra beaucoup de l’avenir des modalités du financement du logement social.