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Droit des sociétés

Première partie : Cas pratique (10 points)


Carine et son compagnon Bertrand sont passionnés de cuisine et de design. A la fin de leur
école de commerce dans le sud-ouest de la France, ils ont tous les deux commencé une
carrière de contrôleurs de gestion dans une entreprise du CAC 40. Mais au bout d’une
quinzaine d’années dans la même entreprise ils souhaitent changer de vie et décident, sur
les conseils de leurs amis, qui trouvent leur cuisine et leur table à la fois raffinées et
originales de créer un site internet pour commercialiser des articles de cuisine design et
humoristiques.
Profitant d'un plan de restructuration de l'entreprise dans laquelle ils travaillent, ils passent
au 3/5eme ce qui leur permet de consacrer du temps pour lancer leur activité tout en
conservant un revenu fixe.
Un ami leur conseille de créer une société en nom collectif (SNC) car cette forme ne
nécessite pas de capitaux minimums et elle permet surtout de pouvoir imputer les déficits
sur les autres types de revenus ; or ils prévoient que la société sera certainement déficitaire
au moins durant les deux premiers exercices.
Bertrand souhaiterait que son fils Boris, âgé de 17 ans, qu'il a eu avec une autre femme,
participe à la société et Carine pense utiliser le savoir-faire en matière de site internet de sa
fille Mathilde, âgée de 22 ans, qui a une formation de webmaster et qui n'a qu’enchainé
stages sur stages sans pouvoir pour l’instant trouver un emploi.
La société est immatriculée le 10 octobre 2011 sous la dénomination Soyonsfood, avec pour
objet social la commercialisation d’articles de cuisine, et Bertrand et Mathilde sont co-
gérants.
Le site internet est opérationnel dès la fin octobre 2011. Bertrand, désirant profiter de la
période propice des fêtes de fin d’année pour la vente de ce genre de produits, passe une
commande de 32 000 € début novembre 2011 auprès du fournisseur Foodesign que Carine
connaît bien pour l’avoir rencontré à plusieurs reprises dans divers salons et lui avoir déjà
acheté plusieurs articles en tant que particulière.
Le 22 novembre 2011, son compte personnel étant à découvert de 1 250 €, Mathilde utilise
la carte de la société pour payer les 3 200 € de billets d’avion pour le voyage qu’ils ont
décidé de faire, son compagnon et elle-même, en janvier 2012, pour retourner à Sidney, la
ville où ils se sont rencontrés il y a deux ans.
Le 16 décembre 2011, Carine reçoit une injonction de payer concernant la facture de 32 000
€ de la part de la société Foodesign. Très étonnée, elle appelle Monsieur Arrezzo, le
directeur général de la SA Foodesign et celui-ci lui dit que la facture était à échéance au 30
novembre, qu’il a envoyé une lettre de rappel restée sans réponse à la société, et que
comme il s’agissait d’une SNC, il pouvait au bout de 8 jours demander à n’importe quel
associé de payer. Elle appelle aussitôt Bertrand, qui est depuis 15 jours en déplacement au
Gabon pour auditer une filiale du groupe de son employeur. Bertrand lui dit qu’il n’avait en
effet pas eu le temps de s’occuper de cela et qu’il le ferait quand il rentrerait en France dans
deux jours.
A son retour, il s’occupe des comptes de la société et s’aperçoit alors du paiement de 3 200 €
effectué par Mathilde à l’agence de voyage. Furieux, il appelle immédiatement Mathilde et
la menace de porter plainte si elle ne rembourse pas immédiatement la somme à la société.
Il la prévient que de toutes manières il va demander la nullité de l’achat des billets car elle

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n’avait pas le droit de le faire.
Questions

1) Boris pourra-t-il être associé de la SNC Soyonsfood ?


2) Mathilde pourra-t-elle faire valoir son savoir-faire pour être associée de la SNC
Soyonsfood et recevoir des parts sociales ?
3) Mathilde pourra-t-elle être à la fois associée de la SNC Soyonsfood et avoir un
contrat de travail en tant que responsable du site internet ?
4) La SNC Soyonsfood devra-t-elle avoir un commissaire aux comptes ?
5) M. Arrezzo est-il en droit de demander à Carine de payer la facture de
32 000 € ?
6) Bertrand pourra-t-il obtenir la nullité de l’achat des billets d’avion par Mathilde ?

Deuxième partie : Etudiez les statuts – 6 points


Après avoir étudié l’extrait du projet de statuts de la Société en Nom Collectif « LES
VÊTEMENTS ALPINS » présenté ci-dessous, vous identifierez les clauses, apprécierez leur
validité et les re rédigerez si nécessaire.

PROJET DE STATUTS

Les soussignés :

- Mr Derosiers Gael, né le 16 janvier 1964 à Lyon, marié, demeurant 42 rue Saint-Jacques à Grenoble
(38)
- Melle Prieur Fanny, née le 13 novembre 1979 à Valence, célibataire, demeurant 25 rue des Alizées à
Varces (38)
- Mr Faure Anatole, né le 6 décembre 1982 à Strasbourg, marié, demeurant 9 rue des Arts à Crolles
(38)

Ont établi ainsi qu’il suit, les statuts d’une société en nom collectif devant exister entre eux.

ARTICLE 1 - Forme
Il est formé entre les soussignés une société en nom collectif régie par le Code de commerce et les
textes subséquents ainsi que par les présents statuts.

ARTICLE 2 – Objet
La société a pour objet la commercialisation de vêtements techniques pour les sports de montagne
et, plus généralement, toutes opérations industrielles ou commerciales se rapportant directement à
l’objet social ou susceptibles d’en faciliter l’extension ou le développement.

ARTICLE 3 – Dénomination sociale


La dénomination sociale est « LES VÊTEMENTS ALPINS »

ARTICLE 4 – Siège social


Le siège social est fixé à Grenoble, 210 rue de la liberté.
Il ne pourra être transféré en tout autre endroit qu’en vertu d’une décision collective des associés.

ARTICLE 5 – Durée

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La durée de la société est fixée à 50 ans à compter de son immatriculation au registre du commerce
et des sociétés de Grenoble sauf dissolution anticipée décidée par le gérant.
ARTICLE 6 – Apports
Apports en numéraire :
Mr Gael Derosiers apporte la somme de treize mille euros (13 000 €)
Melle Fanny Prieur apporte la somme de huit mille euros (8 000 €)
Mr Anatole Faure apporte la somme de quatre mille euros (4 000 €).

Les apports en numéraire doivent être libérés sur appel du gérant dans un délai librement déterminé
par lui.

Apport en industrie :
Melle Fanny Prieur apporte sa notoriété auprès des magasins de sport des stations des Alpes.
Cet apport est libéré dès le début d’activité de la société.

ARTICLE 7 – capital social


Le capital social est fixé à la somme de 25 000 €.
Il est divisé en 2 500 parts sociales de 10 euros chacune réparties en proportion des apports
respectifs, à savoir :
- Mr Gael Derosiers : 1300 parts
- Melle Fanny Prieur : 800 parts
- Mr Anatole Faure : 400 parts

ARTICLE 10 – Droit de vote


Chaque part sociale donne droit à une voix dans les votes et délibérations.

ARTICLE 11 – Cession des parts sociales


Les parts sociales sont librement cessibles entre associés ou au profit d’un conjoint. Elles ne peuvent
être cédées à des tiers qu’avec le consentement des associés représentant les ¾ des parts sociales.

ARTICLE 12 – Transmission des parts sociales


Le décès d’un associé n’entraîne pas la dissolution de la société.
La société continue entre les associés survivants. Les parts sociales de l’associé décédé sont en
conséquence annulées de plein droit. Cette annulation entraîne la réduction du capital sans
remboursement des parts.

ARTICLE 18 – Responsabilité des associés


Dans les rapports entre les associés, chacun est tenu des dettes sociales dans la proportion du
nombre de parts lui appartenant. Mais vis-à-vis des créanciers sociaux, chacun des associés est tenu
indéfiniment et solidairement responsable des engagements pris par le gérant, même en dehors de
l’objet social.

ARTICLE 19 – Répartition du résultat


S’il résulte des comptes de l’exercice, tels qu’ils sont approuvés par l’assemblée générale, l’existence
d’un bénéfice distribuable, celui-ci est réparti entre tous les associés, ainsi qu’il suit :
- Mr Gael Derosiers : 45 % du bénéfice distribuable
- Melle Fanny Prieur : 42 % du bénéfice distribuable
- Mr Anatole Faure : 13 % du bénéfice distribuable

En cas de pertes non reportées, la participation des associés aux pertes est calculée ainsi qu’il suit :
- Mr Gael Derosiers : 50 % des pertes
- Melle Fanny Prieur : 35 % des pertes
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- Mr Anatole Faure : 15 % des pertes

ARTICLE 25 – Nomination et révocation du gérant


La société est administrée par un gérant, associé, nommé dans les statuts. Mr Gael Derosiers est
désigné gérant pour une durée de 5 ans. Son mandat est renouvelable.
Le gérant est révocable à l’unanimité des associés.
Il est révocable par les tribunaux pour cause légitime.
Sa révocation n’entraîne pas la dissolution de la société.

ARTICLE 26 – Pouvoirs du gérant


Dans les rapports avec les tiers, le gérant engage la société par les actes entrant dans l’objet social.
Dans les rapports avec la société et les associés, le gérant peut faire tous actes de gestion dans
l’intérêt de la société, à l’exception toutefois de certains actes pour lesquels il doit avoir obtenu
préalablement l’autorisation de la majorité des associés : acquisition ou vente d’un immeuble, vente
du fonds de commerce, hypothèque ou nantissement sur un bien de la société.

Troisième partie. Conseils – 4 points


A l’aide de l’arrêt fourni, vous expliquerez quelles sont les modalités de la cession de parts sociales
dans une SNC et quelles précautions il faut prendre quand un associé cède ses parts sociales.

Cour de Cassation, Chambre commerciale, du 27 janvier 1998, 95-18.751, Publié au bulletin

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 19 mai 1995), que la société Natiocrédibail a donné un
immeuble en location à la société en nom collectif Aghotel ayant pour associés les sociétés DHCV et
Joseph X... ; que les loyers étant impayés, elle lui a fait délivrer un commandement de payer visant la
clause résolutoire, qui est resté infructueux ; qu'elle a assigné la société Aghotel et les sociétés DHCV
et Joseph X... en référé pour voir constater l'acquisition de la clause résolutoire, ordonner l'expulsion
de la société Aghotel et obtenir sa condamnation et celle de ses deux associés au paiement d'une
certaine somme à titre de provision ;
Sur le premier moyen :
Attendu que les sociétés DHCV et Joseph X... reprochent à l'arrêt d'avoir dit qu'elles avaient la qualité
d'associés de la société en nom collectif Aghotel et de les avoir condamnées solidairement avec cette
société à verser à la société Natiocrédibail une indemnité contractuelle de résiliation du contrat de
crédit-bail, alors, selon le pourvoi, que la connaissance par des tiers d'une cession de parts sociales
les prive de toute possibilité d'exciper de son inopposabilité à leur endroit pour défaut de publicité
au registre du commerce ; que dans leurs écritures d'appel elles avaient expressément indiqué que la
société Natiocrédibail avait été informée de la cession de leurs parts dans la société Aghotel ce qui
résultait notamment de la signification du commandement de payer les arriérés de loyer au nouveau
gérant de la société ; qu'en se bornant, dès lors, à écarter comme non probante la signification de
l'acte d'huissier sans rechercher, ainsi qu'il lui était clairement demandé, si la société de crédit-bail
n'avait pas eu une connaissance effective de cette cession par tout autre moyen, la cour d'appel a
privé sa décision de base légale au regard des articles 20 de la loi du 24 juillet 1966 et 873 du
nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu que cette cession qui n'avait pas été publiée au registre du commerce et des sociétés
n'était, en application de l'article 20 de la loi du 24 juillet 1966, pas opposable aux tiers, la cour
d'appel n'était pas tenue de rechercher si la société Natiocrédibail en avait eu autrement
connaissance ; d'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen : (sans intérêt) ;
PAR CES MOTIFS :
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REJETTE le pourvoi.

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