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Master spécialisé : Juristes d’affaires / M1

Le régime de la responsabilité du fait d’autrui

Encadré par : Présenté par :

PR EL HAJJAMI Ahmed HAMOUDI Aya


SEMMAR Aya

Année universitaire : 2022/2023


Abréviations :

CAR : Cour d’appel de Rabat


DOC : Dahir des Obligations et des Contrats
CC : Cour de Cassation
CS : Cour Suprême
RC : Responsabilité civile
Plan :

Chapitre 1 : Les régimes spéciaux de la responsabilité délictuelle du


fait d’autrui

Section 1. Les régimes spéciaux de responsabilité du fait d'autrui fondés sur une
présomption de faute.
Section 2. Le Régime de la responsabilité fondée sur la présomption de faute et la
faute prouvée

Chapitre II : Le régime de la responsabilité contractuelle du fait


d’autrui

Section 1. Autour de la responsabilité contractuelle du fait d’autrui : fondement et


régime général
Section 2. L’applicabilité de la responsabilité contractuelle du fait d’autrui
Introduction :

Une personne va être déclarée responsable… alors que c’est une autre qui a causé le dommage!
Ce principe est consacré par la législation marocaine, en l’article 85 du DOC qui dispose qu’ «
on est responsable non seulement du dommage que l’on cause par son propre fait, mais encore
de celui qui est causé par le fait des personnes dont on doit répondre… ».
Cette éventualité ne manque pas d’intérêt pour la victime car d’une part, elle a abouti à
multiplier le nombre des responsables possibles et permet ainsi de choisir le débiteur le plus
solvable, d’autre part elle dispense généralement la victime d’établir la faute du répondant voire
même, parfois, d’établir la faute de l’auteur du fait dommageable.
Ce système oblige la victime à établir la responsabilité de l’auteur du dommage, pour pouvoir
engager celle de son répondant, ce qui engendre la présence d’un risque de dispenser les
responsabilités dont chacun s’efforce de rejeter son obligation sur une autre.
Pendant longtemps, la Cour de cassation a considéré que la responsabilité du fait d’autrui était
exceptionnelle qu’il était impossible de l’étendre par analogie à d’autres cas que ceux prévus
par le Code civil, solution traditionnelle qui a été mise en cause par un arrêt de l’Assemblée
plénière. Cette dernière a adopté une responsabilité générale du fait d’autrui.
Le Code civil français a prévu en son article 1384, alinéa premier, qui a vu le jour en 1804,
qu’une personne peut être responsable « du dommage qui est causé par le fait des personnes
dont on doit répondre », pour énumérer ensuite les hypothèse précises de responsabilités du fait
d’autrui, tel a été le cas de la responsabilité du fait des choses.
Dans l’objectif d’une meilleure compréhension du principe de la responsabilité du fait d’autrui,
il est nécessaire d’effectuer un retour en arrière, et plus précisément sur la décision rendue par
l'Assemblée plénière, dans laquelle la Cour de cassation a, en quelque sorte, « redécouvert »
l'alinéa 1er de l'art. 1384 du Code civil, près de 100 ans après y avoir extrait un principe général
de responsabilité du fait des choses.
En 1804, les rédacteurs du Code civil n’ont nullement envisagé d’instaurer en principe général
de responsabilité du fait d’autrui.
La raison en est que, par principe, l’on estimait que l’on ne pouvait être responsable que de son
propre fait, l’exception étant que l’on puisse répondre des actes d’autrui.
C’est la raison pour laquelle, en 1804, le législateur n’a reconnu que trois cas particuliers de
responsabilité du fait d’autrui, énoncés à l’ancien article 1384 du Code civil, notamment des
parents du fait de leurs enfants mineurs, des commettants du fait de leurs préposés et des
instituteurs et des artisans du fait de leurs apprentis et élèves.
La question s’est posée de savoir si ces articles, 1384 du Code civil et 85 du DOC, posent un
principe général de responsabilité pour autrui ou ne fait qu’annoncer les régimes spéciaux qu’il
développe (fait des commettants, fait des parents) ? La liste des personnes qui doivent répondre
des dommages causés par autrui selon l’article 85 est-elle limitative ? Bien que les tribunaux
appliquent le principe de la responsabilité du fait d’autrui à de nombreuses personnes (Les aéro-
clubs responsables des fautes commises par les moniteurs, le pilote considéré préposé
temporaire et occasionnel de l’armateur, la jurisprudence n’a pas énoncé un principe général de
responsabilité du fait d’autrui.
La doctrine, ainsi que la jurisprudence, ont longtemps débattu sur la nécessité d’adopter un
fondement général portant sur la responsabilité du fait d’autrui. En effet, la doctrine a été
répartie en deux courants, celui souhaitant que la Cour de cassation reconnait un principe
général de responsabilité du fait d’autrui, à une époque où elle consacrait un principe équivalent
pour les dommages causés par une chose. D’autres auteurs ont avancé que la formule « les
personnes dont on doit répondre » à la différence des « choses dont on a la garde » ne se suffit
pas à elle-même puisqu'elle est précisée par les alinéas 4 et suivants qu'il serait bien difficile
d'appliquer un régime juridique précis à un pareil principe, tant les règles diffèrent au fil des
alinéas , qu'il n'y a pas nécessité de se livrer à une telle interprétation, qui risquerait au surplus
de déclencher une évolution jurisprudentielle aussi complexe que celle qui s'est développée à
propos de la responsabilité du fait des choses.
Dans la même perspective, la jurisprudence a répondu à son tour à ce dilemme par le biais de
l’arrêt Blieck, rendu par l'Assemblée plénière de la Cour de cassation le 29 mars 1991, qui a
établi la responsabilité retenue sur l'article 1384 al. 1. en termes mesurés : après avoir constaté
que le centre avait accepté la charge « d'organiser et de contrôler à titre permanent le mode de
vie de l’handicapé », projection à l’arrêt Franck relatif a la responsabilité du fait des choses.
Au lendemain de l'arrêt BLIECK, les commentateurs hésitèrent sur le sens et la portée de cette
décision. Mais la jurisprudence postérieure montre que le nouveau principe est désormais bien
établi.
Par un arrêt de l’assemblée plénière de la Cour de cassation française (29 mars 1991), il a été
décidé que la liste des personnes responsables de l’article 1384 ne présentait pas un caractère
limitatif. Ainsi toute personne qui dispose d’un pouvoir de direction et de contrôle sur l’activité
d’une autre peut engager sa responsabilité pour les dommages que celle-ci viendrait à causer.
Si la responsabilité délictuelle du fait d’autrui a soulevé la problématique de l’existence ou
l’absence d’un principe général du fait d’autrui, la responsabilité contractuelle présente une
nouvelle piste de réflexion sur l’existence même du principe de la responsabilité contractuelle
du fait d’autrui.
Afin de mener notre réflexion il y’a lieu de distinguer entre les deux régimes de responsabilité
civile, celle contractuelle qui sanctionne l’inexécution ou le retard dans l’exécution d’un contrat
constituant le prolongement de la violation d’obligations contractuelles. Et celle dite délictuelle,
qui, sanctionne quant à elle un dommage né en dehors de toute relation contractuelle. Par
délictuelle, il faut entendre responsabilité engagée à la suite d’un délit au sens strict (fait
volontaire et illicite) ou d’un quasi-délit (fait involontaire et illicite).
De ce fait, l’intérêt de notre étude est doublement justifié dans la volonté de s’imprégner dans
le régime de la responsabilité délictuelle du fait d’autrui, d’une part, et d’autre part, dans la
nécessité de démontrer la nuance entre ce régime de responsabilité et celui de la responsabilité
contractuelle du fait d’autrui ainsi que ses spécificités.

Suite à cela, il est nécessaire de poser la problématique suivante : Quelles sont les
particularités distinguant le fondement de la responsabilité du fait d’autrui ?
Dans l’objectif de répondre à cette problématique, il est judicieux de se pencher dans un premier
temps sur le fondement du principe de la responsabilité délictuelle du fait d’autrui, et ce pour
permettre dans un second temps de délimiter le régime de la responsabilité contractuelle du fait
d’autrui.
Chapitre 1 : Les régimes spéciaux de la responsabilité délictuelle du fait
d’autrui :

Section 1. Les régimes spéciaux de responsabilité du fait d'autrui fondés sur une
présomption de faute.

Cette forme de responsabilité inclut la responsabilité des parents du fait de leurs enfants mineurs
(I) ainsi la responsabilité des artisans du fait de leurs apprentis ( II) et la responsabilité des
personnes chargées de la surveillance des aliénés et des malades mentaux ( III).

I. La Responsabilité des père et mère du fait de leur enfant mineur :

Le père et la mère après le décès du mari, sont responsables du dommage causé par leurs enfants
mineurs habitant avec eux, aux termes de l’article 85, alinéa 1 du Dahir des obligations et
contrats.
La responsabilité des parents a lieu à moins que les père et mère ne prouvent qu’ils n’ont pu
empêcher le fait qui donne lieu à cette responsabilité.
La loi fait ainsi peser sur les parents une présomption de faute. Le dommage causé par l’enfant
présume un défaut d’éducation ou de surveillance.
En France, la tendance est à une plus grande sévérité à l’égard des parents, la responsabilité des
parents a connu une évolution dans le sens qu’elle est devenue quasiment automatique que la
responsabilité du gardien du fait des choses.1 Muriel Fabre- Magnan, Droit des obligations,
responsabilité civile et quasi-contrats, Press Universitaires de France, 2ème édition : 2010, Aout

A. Les conditions de la responsabilité des père et mère du fait de leur enfant mineur
Ces conditions sont cumulatives, c’est-á-dire que lorsque l’une ou l’autre n’est pas remplie, la
responsabilité des père ou mère ne peut être engagée, ces conditions concernent notamment les
personnes responsables, l’auteur du dommage, et le fait dommageable.

1. Les personnes responsables :


S’agissant des personnes responsables, la responsabilité des père et mère du fait de leur enfant
mineur pèse sur ceux qui ont avec l’enfant un lien de filiation établi, cette filiation peut être
quelconque dans le mariage, hors mariage, hors adoptive, mais il faut qu’elle soit juridiquement
établie, de ce fait, le père biologique dont la paternité n’a pas encore été établie ne peut dès lors
pas être poursuivi, cela s’applique également pour le père dont la reconnaissance a été annulée

1
(Muriel Fabre- Magnan, Droit des obligations, responsabilité civile et quasi-contrats, Press Universitaires de
France, 2ème édition : 2010, Aout).
, en revanche un père et une mère incapable majeur est civilement responsable de son enfant
mineur.
En France jusqu’à la loi du 22 juillet 1987, on utilisait le terme de la garde de l’enfant,
notamment après divorce, cependant cette loi a systématiquement remplacé ce terme par celui
d’autorité parentale sur l’enfant, sauf précisément dans l’article 1384, alinéa 4 où probablement
par oubli du législateur, on parlait encore de de garde de l’enfant jusqu’à la modification
effectuée par la loi du 4 mars 2002 relative à l’autorité parentale.
Être le père ou la mère du mineur ne suffit pas pour être responsable du fait de ce dernier. La
responsabilité prévue par l’article 1384 alinéa 4 du code civil suppose en effet également
l’autorité parentale sur l’enfant, le père et mère ont l’obligation d’éduquer et de surveiller leur
enfant, et aussi le pouvoir de lui donner des ordres qu’ils sont responsables du dommage causé
par celui-ci.
Le père et la mère ne sont ainsi responsables que dans la mesure où ils ont l’autorité parentale
sur l’enfant.
La question se pose surtout après le divorce ou la séparation des parents. La loi de 1987 a
favorisé le régime de l’autorité parentale commune, c’est-à-dire que les deux parents, malgré le
divorce ou la séparation peuvent conserver leurs droits et devoirs vis-à-vis de l’enfant et par
conséquent leur responsabilité.
La garde alternée où l’autorité parentale appartient alternativement à chacun des deux parents
n’est pas admise, afin de ne pas causer une certaine déstabilisation chez l’enfant.
Lorsque l’autorité parentale n’a été confiée qu’à un seul des parents, l’autre n’ayant qu’un droit
de visite, seul le premier peut être déclaré responsable de l’enfant sur le fondement de l’article
1384, alinéa 4 du code civil. Si le dommage a lieu alors que l’autre parent exerçait son droit de
visite sur l’enfant, la victime ne peut qu’essayer de démontrer la faute de celui-ci sur le
fondement de l’article 1382 du code civil ou éventuellement la garde d’une chose sur le
fondement de l’article 1384 alinéa 1er du code civil.
Dans le cas où les parents ont été déchus de leur autorité parentale et que la garde de l’enfant a
été confiée à un tiers (un tuteur), les père et mère ne peuvent plus être responsables sur le
fondement de l’article 1384 alinéa 4 puisqu’ils n’ont plus l’autorité parentale. Le tuteur ne peut
pas l’être davantage sur ce même fondement puisqu’il n’est pas le père ou la mère.
En se fondant sur l’article 1384 alinéa 4 les grands-parents chez qui l’enfant passe quelques
vacances et qui n’ont donc sur celui-ci qu’une simple autorité de fait, ceux-ci ne peuvent être
poursuivis que sur le fondement de l’article 1382 du code civil et à condition qu’ils aient
commis une faute.2
Cependant, le DOC fait peser la responsabilité sur le père. La mère ne voit sa responsabilité
engagée qu’après le décès du mari. Aux termes de l’article 171 du code de la famille «la garde
est confiée en premier lieu à la mère, puis au père, et puis à la grand-mère maternelle de l'enfant
», c’est à elle qu’est confiée en premier lieu la garde de l’enfant.

2
Muriel Fabre- Magnan, Droit des obligations, responsabilité civile et quasi-contrats, Press Universitaires de
France, 2ème édition : 2010, Aout
La garde, qui consiste à préserver l’enfant de ce qui pourrait lui être préjudiciable, l’éduquer et
veiller à ses intérêts, incombe cependant selon l’article 164 du code de la famille au père et à la
mère tant que les liens conjugaux subsistent.
Le père et la mère ne doivent-ils donc pas être déclarés solidairement responsables des
dommages causés par leurs enfants ? Il faut ajouter que ce sont légalement les parents (père et
mère) qui doivent à leurs enfants un certain nombre de droits dont la garde et l’éducation fondée
sur la bonne conduite, selon l’article 54 du code de la famille. Enfin le mariage vise légalement
la fondation d’une famille stable sous la direction des deux époux.3

2. L’auteur du dommage
L’auteur du dommage, plus particulièrement le mineur, doit réunir deux conditions afin de
pouvoir engager la responsabilité de ses parents sur la base de l’article 85 du DOC, au nombre
desquels figurent :
Tout d’abord, il faut qu'il s'agisse d'un mineur sauf possible émancipation à 16 ans, pour que la
responsabilité des père et mère soit engagée, il faut que l’enfant qui a causé le dommage soit
mineur et non émancipé.
La responsabilité des père et mère cesse à la majorité de l’enfant et même à l’émancipation de
celui-ci qui peut avoir lieu à partir de 16 ans, dans ce dernier cas, la victime doit démontrer que
les parents ont commis une faute en émancipant trop tôt leur enfant.
L’enfant doit être mineur le jour de l’accident. Selon l’article 166 du code de la famille, la garde
de l’enfant se prolonge, aussi bien pour le garçon que pour la fille, jusqu’à sa majorité légale,
dix-huit années, article 209 du code de la famille. La cour suprême a ainsi cassé des arrêts ayant
condamné le mineur à réparation.4
Ensuite, la deuxième condition consiste au fait que l'enfant habite avec ses parents, condition
aujourd'hui sans réelle justification. L'exigence de cohabitation n'a de sens que si la
responsabilité parentale s'explique par une faute (présumée) dans la surveillance et l'éducation
de l'enfant. Or, depuis que la jurisprudence estime qu'il s'agit d'une responsabilité de plein droit5,
2008, cette justification perd presque totalement de sa force. Mais, dans la mesure où la
condition de cohabitation est toujours inscrite dans la loi, la jurisprudence actuelle se contente,
pour l'instant, d'élargir la notion de cohabitation pour raisonner sur une conception purement
juridique avec la résidence habituelle de l'enfant. Avec ce critère l'enfant scolarisé à l'année en
internat cohabite toujours avec ses parents, peu importe que l'enfant n'ait quasiment jamais vécu
avec ses parents.
Pour les parents séparés, seul celui qui a la résidence habituelle de l'enfant sera donc
responsable. Et cela même si au moment fait dommageable l'enfant était avec le parent qui n'a
pas la résidence habituelle, par exemple dans le cadre de son droit de visite et d'hébergement.
Une telle solution confine à l'absurde en cas de résidence alternée. Qui à la résidence habituelle
? Les deux parents ? Chacun à tour de rôle ?

3
Farid El Bacha, Droit des Obligations, Actes juridiques et faits juridiques, 2e édition, 2020.
4
Cass Crim, 15-4-1983, JCS, 1984, n°33-34, p.166
5
Droit des obligations, Christian LAPOYADE DESCHAMPS, Manuel Université de droit, ellipses, 2008
La suppression de cette condition serait donc plus cohérente avec une responsabilité objective
des parents, certes rigoureuse, mais assurément profitable aux victimes d'enfants. Elle serait
également cohérente avec le passage vers une responsabilité de plus en phis claire- ment fondée
sur le risque d'autorité. Après tout, être parents, c'est être responsables, ne serait- ce que pour
protéger ses propres enfants !
Le code civil français précise expressément que le père et la mère sont responsables du
dommage causé par leurs enfants mineurs habitant avec eux. La cohabitation a été interprétée
d’une manière différente, selon qu’elle s’agit du fait d’habiter généralement avec l’enfant ou le
fait d’habiter avec l’enfant au moment du dommage.
La question se pose si les père et mère pouvaient être déclarés responsables au moment du
dommage alors que l’enfant était logé chez un ami ou chez ses grands-parents.
La jurisprudence française a eu tendance à rechercher si le comportement des parents avait ou
non été répréhensible d’une façon ou d’une autre, si au moment du fait dommageable, l’enfant
n’habitait pas sous le toit de ses parents, il fallait examiner si la faute des parents pouvait tout
de même être invoquée.
D’autre part, il fallait ainsi rechercher si la cessation même de la cohabitation était ou non
légitime, cela veut dire que si l’enfant avait figuré par exemple et causait un dommage, la
cessation de la cohabitation n’était pas légitime car les parents auraient dû surveiller davantage
leur enfant et ils demeuraient donc responsables, si en revanche l’enfant était tranquillement en
vacances chez un tiers, les parents pouvaient essayer d’échapper à leur responsabilité, à moins
que le comportement de l’enfant ne révélât une lacune dans l’éducation.6
L’appréciation de la cohabitation pouvait donc se détacher de la notion purement matérielle
d’habitation sous le même toit au moment du fait dommageable.
La condition de cohabitation ne pouvait sans doute pas demeurer identique depuis l’important
arrêt Bertrand de 1997, ce qui a causé le changement du fondement de la responsabilité devenue
une responsabilité de plein droit donc sans faute.
Un autre arrêt rendu le même jour que l’arrêt susmentionné, il s’agit de l’arrêt Samda, qui a
donné certaines indications sur l’appréciation de la condition de cohabitation lorsqu’un seul des
parents s’est vu confier l’autorité parentale sur l’enfant.
L’enfant est en effet hébergé par l’autre parent, mais ce dernier ne peut être responsable sur le
fondement de l’article 1384 alinéa 4 faute d’autorité parentale sur l’enfant, dans ce sens la cour
de cassation a décidé sans doute pour combler le vide qui peut avoir lieu dans la responsabilité
du fait de l’enfant, que le parent gardien serait responsable dans ce cas, selon sa formule, «
l’exercice d’un droit de visite et d’hébergement ne fait pas cesser la cohabitation du mineur
avec celui des parents qui exerce sur lui le droit de garde ».7
En revanche, en cas de simple séparation de fait entre les parents, la cessation de la cohabitation
n’étant pas légitime au sens où elle n’est pas juridiquement reconnue, ceux-ci demeurent tous
les deux responsables de l’enfant.

6
Droit des obligations, Christian LAPOYADE DESCHAMPS, Manuel Université de droit, ellipses, 2008
7
Ibid
Dans ce sens, la cour de cassation énonça dans une espèce où des enfants avaient provoqué un
incendie alors qu’ils avaient été confiés depuis dix jours à la grand-mère de l’un d’entre eux
que « la cohabitation de l’enfant avec ses père et mère visée par l’article 1384 alinéa 4 du code
civil résulte de la résidence habituelle de l’enfant au domicile des parents ou de l’un d’entre eux
» et que ni un changement de résidence de quelques jours, ni la distance entre la résidence de
la gardienne et celles des mères n’avaient fait cesser la cohabitation entre les enfants et celles-
ci.8
La Haute juridiction a jugé dans une affaire où l’enfant avait de fait été élevé par sa grand-mère
depuis 12 années, que cette circonstance qui confiait le mineur à a sa grand-mère par leurs
parents qui exerçaient l’autorité parentale ne fait pas cesser la cohabitation avec ceux-ci ».9
La cohabitation ne redevient donc pas matérielle et est plus que jamais juridique, la cour de
cassation ne cesse d’affirmer ce principe, ainsi par exemple le mineur même placé dans un
établissement scolaire sous le régime de l’internat, cohabite toujours avec ses parents, ce qui
n’était pas le cas auparavant.
Les arrêts cités définissent la condition de la cohabitation comme la résidence habituelle de
l’enfant, ce qui lui donne un sens juridique et non pas matériel, elle est fixée par le juge et les
deux parents peuvent tous deux l’avoir tel est même le principe.
La responsabilité du parent qui a la résidence habituelle ne cesse pas si l’enfant est ailleurs au
moment du fait dommageable, il se peut en revanche qu’en vertu de la décision du juge, un
parent ait l’autorité parentale mais pas la résidence habituelle, par exemple s’il est parti loin à
l’étranger et que s’il a bien toujours l’autorité parentale, la résidence habituelle de l’enfant a été
fixée uniquement chez le conjoint demeuré en France, lui-même n’ayant qu’un droit de visite
ou d’hébergement.
Condition justifiée car en l’absence de cohabitation, il n’y a pas de possibilité réelle de
surveillance et d’éducation. Il a ainsi été jugé que « le père (ou la mère) ne saurait être
responsable du dommage causé par son enfant mineur qui, au cours d’un jeu, a blessé un enfant
de la famille dans laquelle il avait été invité à jouer, le père ayant été dans l’impossibilité
manifeste d’empêcher le fait dommageable de se produire ».10
Le défaut de cohabitation n’écarte la responsabilité des parents qu’autant qu’il a été légitime.
Une faute des parents à l’origine du défaut de cohabitation maintient leur responsabilité. Il est
ainsi de jurisprudence constante que la présomption de faute pesant sur les parents joue à moins
que l’absence de cohabitation ne résulte d’un motif non légitime. Lorsque le mineur n’habite
pas avec son père, la responsabilité de celui-ci reste engagée si le défaut de cohabitation résulte
d’une faute du père, ou si le dommage n’a été rendu possible que par une faute de sa part.11
Faut-il enfin que le mineur ait commis une faute pour engager la responsabilité des parents ?
3. Le fait dommageable de l’enfant.

8
Civ.2e, 20 janvier 2000, nº98-14479
9
Crim, 8 Février 2005, nº 03-87447.
10
CAR, 8-11-1952, RMD, 1954, p.181-182 note Rodière.
11
C.A.R., 9-11-1953, R.MD., 1953, pp.374-378, note R. Rodière, CS, Crim.20-2-1964, RACS, T.4, p.200
Le Dahir des obligations et des contrats n’édicte pas une telle condition, cela peut s’expliquer
par la prééminence de la faute subjective.
Les dommages causés par les mineurs dépourvus de discernement sont, par hypothèse, non
fautifs.
Exiger une faute que le mineur ne peut juridiquement pas commettre rendrait illusoire la
responsabilité des parents pour tous les dommages causés par les enfants dépourvus de
discernement.
Après avoir exigé la faute du mineur comme condition de la responsabilité des parents, la
jurisprudence française a décidé qu’un acte objectivement illicite du mineur permettait
d’engager la responsabilité de parents, alors même qu’il ne lui était pas subjectivement
reprochable.12
Plus récemment, la cour de cassation affirme que « la responsabilité de plein droit encourue
par les pères et mères des dommages causés par leur enfant mineur habitant avec eux n’est pas
subordonnée à l’existence d’une faute de l’enfant »13.
Pour que la responsabilité des père et mère soit engagée, l’article 1384, alinéa 4 du code civil
exige qu’il y ait eu un dommage causé par leurs enfants.
Aucune condition n’est donc posée en ce qui concerne la qualification de l’acte de l’enfant ou
de son comportement, il suffit qu’il ait causé un dommage à autrui.
Pendant longtemps, pour engager la responsabilité des parents soit engagée la jurisprudence
exigeait la responsabilité de leur enfant mineur, cependant le mineur étant souvent en bas âge
et dépourvu de discernement, si la jurisprudence avait exigé que l’enfant ait commis une faute
pour que les parents soient responsables pour lui, ces derniers ne l’auraient jamais été.
Les juges ont donc admis qu’un simple fait objectivement illicite de l’enfant suffisait à engager
la responsabilité de ses parents, ce qui permettait de ne pas avoir à s’interroger sur l’état
d’imputabilité de la faute. Les parents pouvaient être responsables si leur enfant avait causé un
dommage avec une chose bien que la garde exigeait en principe la faculté de discernement avant
l’arrêt Gabillet de 1984.
Les arrêts d’Assemblée plènière de 1984 ont abandonné l’exigence d’imputabilité et donc de
discernement pour retenir la responsabilité que ce soit sur le fondement de la faute ou de la
garde d’une chose.
Il y a lieu de mentionner l’arrêt Fullenwarth, l’assemblée plènière facilite la mise en œuvre de
la responsabilité des parents du fait qu’elle a admis dans cette affaire pour que la responsabilité
du père soit engagée il suffit que celui-ci ait commis un acte qui soit la cause directe du
dommage invoqué par la victime. Il n’était plus nécessaire de caractériser un comportement
fautif de l’enfant, tout acte dommageable de ce dernier suffisait à entrainer la responsabilité de
ses parents. Dans un autre arrêt du 10 Mai 2001, elle a énoncé de façon générale que la
responsabilité de plein droit encourue par les père et mère du fait des dommages causés par leur
enfant mineur habitant avec eux n’est pas subordonnée à l’existence d’une faute de l’enfant.

12
Civ.2ème, 16 juillet 1969, Bull Civ, II, n°255, p 183, RTDCiv, 1970 .575, obs G .Durry
13
Civ 2ème, 10 mai 2001, Bull Civ II, n°96, JCP 2001, II, 10613, note J/Mouly.
Dans un arrêt du 13 décembre 2002, l’assemblée plènière de la cour de cassation confirma la
solution, pour que la responsabilité de plein droit des père et mère exerçant l’autorité parentale
sur un mineur habitant avec eux puisse être recherchée, il suffit que le dommage invoqué par la
victime ait été directement causé par le fait, même non fautif du mineur.
La responsabilité des père et mère se rapproche de la responsabilité du fait des choses, du fait
qu’elles doivent garantir tout dommage causé par le fait de leur enfant mineur, comme le
gardien vis-à-vis du fait des choses dont il a la garde, ce qui marque une rupture importante
avec tous les autres régimes de responsabilité du fait d’autrui, que sont conçus comme des
régimes de garantie d’indemnisation vis-à-vis des victimes supposant tous la responsabilité
préalable de l’autrui dont un autre est responsable.

B- Le régime de la responsabilité des père et mère du fait de leur enfant mineur


La responsabilité des parents repose sur une présomption de faute. Cela signifie que du
dommage causé par l’enfant, la loi déduit une faute des parents, faute d’éducation ou de
surveillance. Il s’agit d’une présomption réfragable, c’est-à-dire que les parents peuvent
l’écarter en prouvant qu’ils n’ont pas commis de faute. C’est ainsi que les tribunaux ont
interprété l’article 85 qui engage la responsabilité des parents à moins qu’ils ne prouvent «
qu’ils n’ont pu empêcher le fait qui donne lieu à cette responsabilité. »
La responsabilité du père en raison des dommages causés par son enfant mineur habitant avec
lui, repose ainsi selon la Cour d’appel de Rabat, sur une présomption de faute et doit être écartée
s’il est établi que tant au point de vue éducation que de la surveillance, le père s’est comporté
comme une personne prudente et n’a pu ainsi empêcher l’acte dommageable.14 La cour suprême
a par la suite confirmé ce fondement.15
En France, la tendance est à une plus grande sévérité à l’égard des parents. Dans un premier
temps, la cour de cassation se contente d’un acte du mineur qui soit la cause directe du dommage
invoqué par la victime .16
Pour que soit présumée, sur le fondement de l’art. 1384 al. 4 du Code civil, la responsabilité
des père et mère d’un mineur habitant avec eux, il suffit que celui-ci ait commis un acte qui soit
la cause directe du dommage invoqué par la victime. En 1997, elle décide que seule la force
majeure ou la faute de la victime pouvait exonérer un père de la responsabilité de plein droit
encourue du fait des dommages causés par son fils mineur habitant avec lui, optant ainsi pour
une certaine objectivisation de cette responsabilité17.
Par la suite, elle affirme en 2001 que la responsabilité des parents n’est pas subordonnée à
l’existence d’une faute de l’enfant.18 Les parents ne peuvent donc pas s’exonérer en prouvant
que l’enfant a eu un comportement normal, licite, irréprochable. Des auteurs ont ainsi pu écrire

14
C.A.R. 24-1-1958, R.M.D., 1961, p. 133-135, note R. Rodière ; R.A.C., T. XIX, p.390 et CAR, 15-7-1938, RAC, T.IX,
p 597
15
CS Crim, 3-XII-1964, RACS, T.IV, p 302
16
Droit des obligations, Christian LAPOYADE DESCHAMPS, Manuel Université de droit, ellipses, 2008
17
arrêt « Bertrand » (Civ. 2ème, 19 février 1997, Bull. n° 55
18
Civ 2ème, 10 mai 2001, Bull Civ II, n°96, JCP 2001, II, 10613, note J /Mouly.
à ce sujet que « la responsabilité de l’anormalité cède la place à la responsabilité de la normalité
».
Le père, la mère, mais aussi les autres parents ou conjoints répondent des dommages causés par
les insensés, et autre infirmes d’esprit, même majeurs habitant avec eux, s’ils ne prouvent:
1- Qu’ils ont exercé sur ces personnes toute la surveillance nécessaire :
2- Ou qu’ils ignoraient le caractère dangereux de la maladie de l’insensé :
3- Ou que l’accident a eu lieu par la faute de celui qui en a été la victime.
La même règle s’applique à ceux qui se chargent, par contrat, de l’entretien ou de la surveillance
de ces personnes. 19
La jurisprudence a interprété cette phrase comme permettant aux parents de s’exonérer en
démontrant qu’ils n’avaient pas commis de faute, plus précisément, la responsabilité des père
et mère du fait de leur enfant mineur pouvant reposer sur deux fondements soit une faute de
surveillance soit une faute d’éducation, les parents ne pouvaient s’exonérer qu’en démontrant
commis ni une faute de surveillance ni une faute d’éducation.
Leur responsabilité reposait ainsi sur une présomption simple de faute, leur permettant
d’apporter la preuve contraire.
La jurisprudence n’admettait que très rarement l’exonération des parents, au moins lorsque leur
enfant était encore jeune. L’un des quatre arrêts du 9 mai 1984, l’arrêt Fullenwarth semblait
avoir voulu effectuer un revirement de jurisprudence puisqu'il ne faisait plus allusion comme
auparavant à une présomption de faute des parents mais à une présomption de responsabilité,
laquelle, on le sait, ne cède plus que devant la démonstration d'un cas de force majeure :
l'Assemblée plénière, commençait en effet sa motivation par les mots : « Pour que soit
présumée... la responsabilité des père et mère ».
D'autres arrêts reprirent par la suite la formule de « présomption de responsabilité » mais sans
que jamais aucune conséquence n'en soit tirée sur les facultés d'exonération des père et mère,
ceux-ci étant toujours admis à démontrer qu'ils n'avaient pas commis de faute
Cependant, la Haute Juridiction ayant, dans l'arrêt Blieck de 1991, découvert un principe
général de responsabilité du fait d'autrui reposant sur une présomption de responsabilité, elle
devait faire évoluer le régime de la responsabilité des père et mère qui reposait toujours sur une
présomption simple de faute. La responsabilité des père et mère du fait de leur enfant mineur
est en effet le cas le plus naturel de responsabilité du fait d'autrui ; il était d'ailleurs l'un des rares
régimes contenus dans le Code civil de 1804.20
Il n'aurait donc pas été logique que la responsabilité des père et mère soit désormais la plus
légère des responsabilités du fait d'autrui et que les parents puissent s'exonérer plus facilement
que les autres.
Un revirement de jurisprudence eut donc lieu avec l'arrêt Bertrand du 19 février 19971. Une
collision s'était produite entre le petit Sébastien Bertrand, 12 ans, qui roulait à bicyclette, et M.
Domingues qui conduisait une motocyclette ; ce dernier, blessé, demanda réparation au père de
19
Farid El Bacha, Droit des Obligations, Actes juridiques et faits juridiques, 2e édition, 2020.
20
Droit des obligations, Christian LAPOYADE DESCHAMPS, Manuel Université de droit, ellipses, 2008
l'enfant en tant que civilement responsable (ainsi qu'à l'assureur de celui-ci); la Cour d'appel de
Bordeaux prit l'initiative du revirement en admettant, contrairement à la jurisprudence jusque-
là constante de la Cour de cassation, que seule la force majeure ou la faute de la victime pouvait
exonérer le père de la responsabilité de plein droit pesant sur lui; la Cour de cassation, entérinant
le revirement, rejeta le pourvoi formé contre cet arrêt en déclarant, dans une formule de
principe, « que seule la force majeure ou la faute de la victime pouvait exonérer [le père] de la
responsabilité de plein droit encourue du fait des dommages causés par son fils mineur habitant
avec lui ».
Désormais, la responsabilité des parents repose non plus sur une présomption simple de faute,
mais sur une présomption de responsabilité ; elle est donc devenue une responsabilité de plein
droit. La solution semble compatible avec la formulation - inchangée - de l'alinéa 7 de l'article
1384 retenant la responsabilité des parents à moins que ceux-ci ne prouvent « qu'ils n’aient pu
empêcher le fait qui donne lieu à cette responsabilité ». Les père et mère peuvent donc
s'exonérer en apportant la preuve d'une cause étrangère : force majeure pour une exonération
totale et éventuellement faute de la victime pour une exonération partielle.

II. La responsabilité des artisans du fait de leurs apprentis

Les artisans sont responsables du dommage causé par leurs apprentis pendant le temps qu’ils
sont sous leur surveillance. Pareillement à la responsabilité des parents du fait de leurs enfants
mineurs, le législateur a établi la responsabilité des artisans du dommage causé par leurs
apprentis sur la base d’une faute présumée susceptible d’être écartée par la preuve du contraire,
aux termes de l’alinéa 4.

A. Le fondement de la responsabilité des artisans du fait de leurs apprentis


Cette responsabilité, précise l’article 85, a lieu à moins que les artisans, comme pour les pères
et mères, ne prouvent qu’ils n’aient pu empêcher le fait qui donne lieu à cette responsabilité.
Aux termes de l'article 1384, alinéa 6 du Code civil, les artisans sont responsables « du
dommage causé par leurs apprentis pendant le temps qu'ils sont sous leur surveillance ». Cette
responsabilité suppose une relation d'artisan à apprenti, laquelle résulte le plus souvent d'un
contrat d'apprentissage.
Cependant, même si ce contrat n'est pas valable par exemple, les juges peuvent tout de même
retenir une relation permettant la mise en œuvre d'une responsabilité du fait d'autrui.
Selon la Cour de cassation, « les différentes responsabilités du fait d'autrui n'étant pas
cumulatives mais alternatives », la responsabilité des parents ne peut pas être recherchée lorsque
les conditions de la responsabilité de l'artisan sont réunies.21
La responsabilité de l’artisan est fondée sur une faute présumée qui implique que l’artisan n’a
pas surveillé son apprenti et ne l’a pas bien dirigé, et de ce fait, il est considéré comme étant à
l’origine de l’acte de l’apprenti, et a offert à l’apprenti la facilité pour causer ce dommage, ce

21
Droit des obligations, Christian LAPOYADE DESCHAMPS, Manuel Université de droit, ellipses, 2008
qui prouve directement la non-surveillance de l’artisan cependant il est toujours possible de
l’écarter en prouvant le contraire.
Les effets de la responsabilité de l’artisan du fait de ses apprentis permet à la victime de
demander à l’artisan directement des dommages-intérêts suite au préjudice causé sans être
obligé de prouver la faute de celui-ci, cependant l’artisan peut écarter sa responsabilité en
prouvant qu’il n’a pas commis une faute et qu’il a exercé la surveillance nécessaire.

B. Les conditions de la mise en œuvre de la responsabilité de l’artisan :


La mise en œuvre de la responsabilité de l’artisan nécessite que :
- L’apprenti ait commis un acte illicite (faute ou fait des choses) ayant causé un préjudice à un
tiers.
- une relation d’apprentissage : L’artisan délivre une formation professionnelle à un apprenti
dans le cadre d’une relation de travail. Il n’est pas important que le responsable ait la qualité
juridique d’artisan ou qu’un un contrat d’apprentissage valable existe.
-Surveillance de l’apprenti : La responsabilité de l’artisan suppose qu’il exerce un pouvoir de
surveillance. Si l’apprenti habite chez l’artisan, la responsabilité est permanente et peut être
engagée même si le fait dommageable a été commis en dehors des heures/ jours de travail. Sa
responsabilité ne s’arrête que lorsque l’apprenti rentre chez ses parents. S’il n’y a pas
cohabitation, la responsabilité n’est engagée que sur le temps du travail de l’apprenti. La nature
de la responsabilité de l ’artisan du fait de l’apprenti s’agit bel et bien d’un régime de
présomption simple de faute. Mais la solution dégagée par l’arrêt Bertrand a été étendue : c’est
une responsabilité objective de plein droit. Seule la force majeure ou la faute de la victime
peuvent exonérer l’artisan.

III. La responsabilité des personnes chargées de la surveillance des aliénés et des


malades mentaux

Le sixième alinéa de l’article 85 du DOC, prévoit ce type de responsabilité, qui repose sur une
faute présumée fondée sur un défaut de maîtrise, et pour démontrer ce type de responsabilité,
on identifie d'abord les personnes responsables, puis on présente les conditions de sa réalisation
et ses effets.

A- Personnes responsables
Selon le sixième alinéa de l'article 85 du DOC, la responsabilité incombe à deux catégories de
personnes :
-Les personnes désignées par la loi, à savoir le père, la mère et les autres conjoints et parents,
y compris ceux ascendants, descendants, frères et tous ceux qui ont un lien avec le patient.
- Les personnes désignées par convention, c'est-à-dire toute personne tierce autre que ceux
susmentionnés, s'il en porte la surveillance et les soins du patient par le biais d’un contrat et
peut être une personne physique ou une personne morale comme un clinique ou un
établissement privé, et non une personne morale publique car cette dernière est soumise à des
règles différentes.22

B- Conditions de responsabilité
La première condition consiste à ce que la personne à qui la surveillance est imposée soit aliénée
ou ait un trouble mental, c'est-à-dire qu'il s'agisse d'une personne qui a totalement ou
partiellement perdu sa capacité mentale, ce qui rend cette surveillance nécessaire pour
l'empêcher de nuire à autrui.
La deuxième condition réside dans le fait que le patient commette une faute qui cause un
dommage à autrui, et que le patient soit au moment de commettre le dommage dans un état de
démence ou de perte de discernement.
La troisième condition prévoit que le patient soit sous la surveillance d'une personne, cela
signifie que l'aliéné ou le malade mental au moment de commettre l'erreur est sous la garde d'un
de ses proches, ou sous la responsabilité d'une personne chargée de sa surveillance et ses soins,
et le patient est considéré sous la surveillance d'un de ses proches s'il réside avec eux, et s'il vit
avec plusieurs membres de sa famille, la responsabilité ne s'applique pas à tous, mais au père
et la mère, puis le mari et ainsi de suite selon le degré de parenté.
Si la surveillance est confiée à un tiers par le biais d'un contrat, la surveillance est retirée aux
membres de la famille susmentionnés.
Si les conditions précitées sont remplies, la personne lésée par un acte commis par un aliéné ou
un malade mental a le droit de demander réparation à la personne chargée de la surveillance de
l'aliéné sans qu'il soit besoin de prouver la faute du responsable de la maladie, et que le
dommage est dû à une cause étrangère.23

22
-Farid El Bacha, Droit des Obligations, Actes juridiques et faits juridiques, 2e édition, 2020.
23
https://www.9anonmaroc.com/2019/11/blog-post_16.html
Section 2. Le Régime de la responsabilité fondée sur la présomption de faute et la faute
prouvée

Il s’agit ici de mettre en avant la responsabilité des commettants du fait de leurs préposés (I)
ainsi que la responsabilité des instituteurs du fait des enfants et des jeunes gens pendant le temps
qu’ils sont sous surveillance (II).

I. La responsabilité des commettants du fait de leurs préposés : présomption de faute

Elles gravitent autour de deux rapports nécessaires : d'une part entre le commettant et le préposé,
d'autre part entre le fait dommageable et la fonction du préposé.

A- Les conditions de la responsabilité des commettants du fait de leurs préposés

Tout régime de responsabilité du fait d'autrui contient certaines conditions tenant au lien qui
doit unir le responsable pour autrui avec l'« autrui » dont il est responsable et d'autres tenant au
comportement de cet « autrui », en d’autres termes un lien de préposition ou une relation de
commettant à préposé, un acte dommageable commis par le préposé et, comme le veut l’article
85, un lien entre cet acte dommageable et les fonctions auxquels le préposé est employé.24

1- Un lien de préposition

Le commettant et le préposé sont deux personnes liées par ce qu'on appelle un lien de
préposition. Ce terme, très large, implique l'existence d'un lien d'autorité entre ces deux
personnes. Il traduit également en principe l'idée que le commettant tire profit de l'activité de
son préposé. Tels sont les deux fondements de la responsabilité du commettant du fait de son
préposé.25

a- Un lien d'autorité
Le lien de préposition vise une relation dans laquelle une personne est en mesure de donner des
ordres à une autre personne qui lui obéit. En effet, les tribunaux ont très tôt tenu à préciser que
« le critérium en matière de responsabilité du fait d’autrui est que la responsabilité est là où est
l’autorité et que le lien de subordination est indispensable dans les rapports de préposé à
commettant. »26

24
Article 85 du DOC
25
Droit Civil, Les Obligations, La Responsabilité civile extracontractuelle, Mireille Becache-Gibeili, Tome V 1ère
édition, Economica Delta, 2011
2626
Trib. 1ère inst. Casablanca, 8-1-1932, G.T.M., 1932, n°485, p. 82, CAR., 10-V-1944, R.A.C., 1. XIII, p. 456
La notion de lien de préposition, propre à la responsabilité du fait d'autrui, ne doit ainsi pas être
confondue avec celle de lien de subordination. Le lien de subordination est en effet le critère du
contrat de travail : il se caractérise par un lien de dépendance juridique entre l'employeur et le
salarié. La notion de lien de préposition est plus large : tout lien de subordination est en principe
un lien de préposition , mais l'inverse n'est pas vrai. La relation de préposition ne résulte pas
nécessairement d'un contrat, ni même, plus largement, d'un lien juridique institué. Le lien de
préposition suppose donc un pouvoir de direction, de surveillance et de contrôle, que ce soit
un pouvoir de droit ou un pouvoir de fait. Il s'agit le plus souvent d'une subordination juridique,
ce qui explique que le contrat de travail crée toujours une relation de préposition. Pour autant,
tous les contrats n'établissent pas ce lien, et notamment le contrat d'entreprise dans lequel un
service est exécuté d'une manière indépendante (artisan, garagiste, chauffeur de taxi, etc). Il
peut s'agir aussi d'une subordination de fait, le lien de préposition existant alors en l'absence de
tout contrat et peut être occasionnel, à titre d’exemple entre le père et son fils en train de
conduire, entre un agriculteur et son voisin venu l'aider27, la personne chargée par des
chauffeurs de taxi de surveiller leurs véhicules en stationnement et de les pousser à la main pour
qu’ils gardent leur place dans la file a pu être considérée comme préposé de ces chauffeurs. 28
Ajoutant à cela que la responsabilité du fait du préposé suppose chez le commettant le droit de
donner au préposé des ordres ou des instructions sur la manière de remplir les fonctions
auxquelles il est employé29, les tribunaux se sont contentés d’une autorité exercée en fait, même
en dehors de toute relation juridique légitime. Le chef d’une bande de malfaiteurs a pu être
considéré responsable en tant que commettant des dommages causés par des membres de sa
bande. Le droit de donner des ordres n’est pas nécessaire, le fait d’en donner suffit.
Il ne suffit pas cependant de recevoir des instructions de la part d'une personne pour être son
préposé : il faut ne pas avoir réellement d'indépendance dans la façon de les mettre en œuvre.
C'est pourquoi les personnes morales sont en principe responsables sur le fondement de l'article
1382 et non pas du fait de leurs organes sur le fondement de l'article 1384 alinéa 5, car ceux-ci
ont en principe une certaine indépendance dans leur gestion et ne sont donc pas préposés la
Cour de cassation a cependant varié sur la question.30
L’article 85 du Doc suit le même chemin, puisqu’il exclut de la notion de préposition les
activités exercées de manière indépendante. A titre d’exemple, l’exercice des professions
médicales par exemple est en principe incompatible avec la préposition et la subordination. On
constate cependant une évolution en jurisprudence. L’indépendance professionnelle dont jouit
le médecin dans l’exercice de son art n’est pas incompatible avec sa soumission à une
organisation des fonctions permettant la qualification de relation de travail.31
Comme pour la responsabilité du fait des choses, il se peut qu'une personne soit sous la direction
de plusieurs autres, mais il faut alors déterminer laquelle de celles-ci avait, au moment du
dommage, autorité sur le préposé : l'autorité sur autrui est en effet également plutôt alternative.
C'est l'autorité sur une personne qui fait donc la position de commettant et qui justifie la
responsabilité du fait d'autrui. Chacun n'est a priori responsable que de ses propres faits,

27 Droit des obligations, Christian LAPOYADE DESCHAMPS, Manuel Université de droit, ellipses, 2008
28 C.S. Civ., 26-1-1960, R.A.C.S., T. 1, p. 137
29 Cass. Crim., 12-VII-1946, R.A.C., T. XIV, p. 220

30
Droit des obligations, Christian LAPOYADE DESCHAMPS, Manuel Université de droit, ellipses, 2008
31
Farid El Bacha, Droit des Obligations, Actes juridiques et faits juridiques, 2e édition, 2020.
précisément parce qu'il est libre et autonome : s'il se place sous l'autorité d'autrui, celui qui
acquiert l'autorité acquiert aussi la responsabilité corrélative.32
Officiellement, cette première condition suffit à caractériser le lien de préposition. En réalité,
depuis l'arrêt Blieck de 1991 ayant posé un principe général de responsabilité du fait d'autrui, il
est nécessaire de trouver un critère permettant de distinguer les deux hypothèses.

b- Le dommage doit être causé dans l’exercice des fonctions du préposé


Traditionnellement, le commettant était responsable du fait de son préposé lorsqu’il commet
une faute : soit dans le choix de son préposé, soit dans la surveillance de celui-ci. Ces
explications sont toutefois peu réalistes dans la mesure où, dès le départ, la responsabilité du
commettant a été une responsabilité de plein droit, où l'absence de faute n'était pas
exonératoire.33
De ce fait, la responsabilité du commettant a été expliquée par la théorie du risque, plus
précisément par la théorie du risque-profit : le commettant profite de l'activité du préposé et
doit par conséquent en assumer les risques, et notamment celui que le préposé cause un
dommage à autrui.
L'idée de profit devrait alors également intervenir dans la définition du lien de préposition
caractéristique de la relation de commettant à préposé. L'admission d'un principe général de
responsabilité du fait d'autrui rend en effet nécessaire de distinguer ce régime du cas spécial de
la responsabilité du commettant. Or le critère de cette distinction ne peut résider dans l'autorité
puisque, dans le régime général de responsabilité du fait d'autrui, il y a bien aussi l'idée d'un
lien d'autorité entre deux personnes qui justifie que celle qui a pour mission « d'organiser, de
diriger et de contrôler » le mode de vie ou l'activité d'autrui en soit responsable. En réalité, dans
toutes les hypothèses où la jurisprudence a fait application de l'alinéa 1er de l'article 1384, le
responsable n'avait pas tiré un quelconque profit de l'activité d'autrui : c'est ainsi par exemple
que, dans l'arrêt Blieck, l'association qui recueillait des handicapés et les aidait en leur
permettant de travailler ne le faisait nullement dans le but de tirer profit de l'activité de ces
personnes. Le commettant trouve en revanche nécessairement, si ce n'est un véritable profit,
tout au moins une utilité dans l'activité de son préposé. Cela est évident dans les relations
employeur/salarié, mais c'est également le cas dans l'exemple du voisin ou du parent qui vient
donner « un coup de main ».34
En revanche, l'alinéa 5 de l'article 1384 du Code civil, ainsi que l’article 85 du DOC posent une
exigence légale : les commettants ne sont responsables du dommage causé par leurs préposés
que « dans les fonctions auxquelles ils les ont employés ».
Il existe des situations où l’application de cette règle ne pose pas de problèmes. Un chauffeur
qui, pendant les heures de travail, blesse un piéton avec le véhicule de l’entreprise, engagera la
responsabilité du commettant. Ce même chauffeur qui, pendant son congé, blesse un piéton
avec son propre véhicule, verra engagée sa propre responsabilité et non celle de son

32
Droit des obligations, Christian LAPOYADE DESCHAMPS, Manuel Université de droit, ellipses, 2008
33
Ibid
34
Ibid
commettant. Il n’y a, disent les tribunaux, aucun lien de connexité entre l’acte dommageable et
la fonction du préposé.35

2- L’acte dommageable par le préposé

- Selon l'alinéa 5 de l'article 1384 du Code civil, les commettants sont responsables « du
dommage causé par leurs...préposés ». Aucune exigence n'est donc posée sur la qualification
du comportement du préposé : il suffit que celui-ci ait causé un dommage à autrui.
Pourtant, comme pour tous les cas de responsabilité du fait d'autrui (sauf depuis 2001 pour la
responsabilité des père et mère), la jurisprudence a toujours exigé, pour que la responsabilité
du commettant puisse être engagée, que celle du préposé puisse l'être également. Il ne suffit
donc pas que l'activité du préposé ait causé un dommage à autrui ; il faut encore que celui-ci ait
commis une faute de nature à engager sa responsabilité personnelle sur le fondement des articles
1382 et 1383 du Code civil.36
Plus précisément, il fallait avant 1984, que le préposé ait commis un acte objectivement illicite.
En effet avant cette date, le discernement étant une condition de qualification de la faute, il
fallait, si l'on voulait que le commettant fût responsable en cas d'absence de discernement de
son préposé (aliénation, même passagère, de ses facultés mentales), exiger simplement que ce
dernier ait commis un acte objectivement illicite et non pas à proprement parler une faute.
Depuis 1984, pour les aliénés comme pour les enfants en bas âge, il est possible de parler de
faute même en cas d'absence de discernement, et la responsabilité d'un commettant est donc
engagée dès lors que son préposé a commis une faute ayant causé un dommage à autrui.
Certes, théoriquement, les préposés pourraient encore être responsables (et donc engager la
responsabilité de leur commettant) en tant que gardiens d'une chose ayant causé un dommage.
Pourtant, en pratique, la jurisprudence n'admet guère qu'un préposé puisse être considéré
comme gardien d'une chose : c'est ce qu'on appelle traditionnellement le principe de
l'incompatibilité des fonctions de gardien et de préposé. En effet, pour être gardien d'une chose,
il faut, selon la formule de l'arrêt Franck, avoir la maîtrise et le contrôle de la chose, c'est-à-dire
un pouvoir autonome sur elle. Or le préposé est au contraire celui qui n'a pas de pouvoir
autonome puisqu'il agit sous l'autorité d'une autre personne dont il reçoit des ordres.37
Le préposé ne peut donc en principe devenir gardien. Si un salarié utilise, pour son travail, des
outils fournis par l'employeur, ce dernier est, en tant que propriétaire, présumé en être demeuré
le gardien ; en cas de dommage causé par la chose, la victime pourra donc poursuivre
directement l'employeur, mais non pas en tant que commettant sur le fondement de l'article
1384, alinéa 5 du Code civil, mais directement en tant que gardien de la chose sur le fondement
de l'alinéa 1°T du même texte. A l'inverse, le préposé qui a acquis un pouvoir autonome et
indépendant sur la chose qu'il utilise en devient gardien, mais il cesse alors d'être préposé, au
moins en ce qui concerne l'utilisation de la chose. La victime ne pourra alors pas poursuivre le

35
CAR., 21-X-1959, R.M.D., 1961, p. 401
36
Droit des obligations, Christian LAPOYADE DESCHAMPS, Manuel Université de droit, ellipses, 2008
37
Ibid
commettant, mais seulement directement le préposé, sur le fondement de la responsabilité du
fait des choses.

3- Un lien entre le fait dommageable et les fonctions du préposé

L'alinéa 5 de l'article 1384 et l’article 85 du DOC du Code civil énoncent expressément que les
commettants ne sont responsables du dommage causé par leurs préposés que « dans les
fonctions auxquelles ils les ont employés ». On traduit cela en disant qu'il faut un lien entre le
fait dommageable du préposé et les fonctions de celui-ci. Cette formule est cependant ouverte
à toutes les interprétations et cette condition a donné lieu à une jurisprudence aussi abondante
que versatile. Il est clair que si le préposé commet un acte à son domicile par exemple, et sans
lien avec ses relations avec le commettant, la responsabilité de ce dernier ne peut être engagée.
Mais quid si l'acte dommageable du préposé est lié d'une façon ou d'une autre à ses relations
avec le commettant, par exemple si le préposé a causé un dommage avec une chose appartenant
au commettant ? À cet égard, il a été admis que le propriétaire d’une automobile, conduite par
un tiers qui a provoqué un accident, ne peut être tenu pour civilement responsable du
conducteur, s’il n’est justifié que ce dernier ait eu la qualité de préposé du propriétaire du
véhicule ou que, au moment de l’accident, le véhicule ait été conduit par ordre ou pour le compte
de son propriétaire.38
Une meilleure indemnisation des victimes voudrait que le commettant fût responsable même
lorsque le préposé a abusé de ses fonctions mais, à partir d'un certain point, il apparaît injuste
de faire peser sur le commettant la responsabilité d'un acte complètement anormal de son
préposé.39
Dans ce cadre, il est nécessaire de se pencher vers une problématique : celle de l’abus de
fonction. Dans cette hypothèse, la jurisprudence expose de multiples situations. Le commettant
doit-il, par exemple, être déclaré responsable de l’accident causé à un tiers par l’explosion d’un
détonateur dont son préposé avait, sans l’en aviser, transporté une caisse à son domicile,
estimant que celui-ci risquait d’être dérobé si elle était laissée dans le chantier de l’entreprise ?
Dans ce cadre, il existe deux courants adoptés par la jurisprudence : ceux qui admettent la
responsabilité du commettant même en présence de l’abus de fonctions et ceux qui écartent sa
responsabilité facilement. Il est à noter que la première hypothèse est la plus adoptée par la
jurisprudence française et marocaine.40
En effet, Les chambres civiles adoptaient une position restrictive qui limitait la responsabilité
du commettant : en interprétant strictement le texte, elles exigeaient au moins « un lien de
causalité ou de connexité » entre l'acte dommageable et la fonction du préposé. »41
Il a été décidé que le commettant ne saurait être déclaré responsable d’un accident dont a été
victime une personne transportée dans un camion lui appartenant et conduit par son préposé,
alors qu’en ayant pris place dans ce camion, qui n’était nullement agencé pour le transport des

38
C.S. Crim., 26-V-1960, R.A.C.S., T. 1, p. 287
39
Droit des obligations, Christian LAPOYADE DESCHAMPS, Manuel Université de droit, ellipses, 2008
40
Farid El Bacha, Droit des Obligations, Actes juridiques et faits juridiques, 2e édition, 2020.
41
Droit des obligations, Christian LAPOYADE DESCHAMPS, Manuel Université de droit, ellipses, 2008
voyageurs, cette personne ne pouvait ignorer qu’elle se trouvait en présence d’un abus commis
par le chauffeur dans son service.42 Il s’agit de la conscience de la victime du danger dans lequel
elle s’expose, et que la faute du préposé est atténuée et peut même être écartée sur le fondement
de la responsabilité partielle ou totale de la victime.
À l’opposé, la chambre criminelle, par une interprétation extensive de l'article 1384 al. 5,
admettait plus largement la responsabilité des commettants, dès lors que le dommage était causé
à l'occasion des fonctions ou même n'était pas indépendant du lien de préposition". Elle prenait
en compte des critères de temps, de lieu et de moyens.43
De ce fait, il a été décidé que la responsabilité du commettant est engagée quand le préposé
abuse de ses fonctions, notamment en matière de délit de contrebande commis par son préposé
avec l’automobile qu’il était chargé de conduire, et il importe peu que le préposé ait agi à l’insu
ou contrairement aux instructions du commettant, ou pour son compte personnel.44. De même,
le propriétaire d’un véhicule est civilement responsable de l’accident causé par son préposé,
conducteur utilisant le véhicule sur un parcours non prévu par le commettant et transportant, au
mépris de l’interdiction formulée par ce dernier, des passagers à titre onéreux, dès lors que c’est
à l’occasion de ses fonctions et en raison des facilités qu’elles lui procuraient que le préposé a
pu commettre le dommage.45
Ces contradictions provoquèrent l'intervention des chambres réunies, qui adoptèrent une
position proche de celle des chambres civiles, mais leur décision fut un coup d'épée dans l'eau
car les divergences persistèrent, la chambre criminelle ne modifiant pas ses solutions, bien au
contraire.46
Les tribunaux exigent parfois une relation de cause à effet entre l’acte dommageable du préposé
et ses fonctions.
Ainsi une personne chargée par des chauffeurs de taxi de surveiller leurs véhicules en
stationnement et de les pousser à la main pour qu’ils gardent leur place dans la file peut être
considérée comme préposée de ces chauffeurs. Mais il n’y a pas de lien de connexité entre ce
rapport de préposition et l’abus de fonction ayant consisté pour cette personne, non titulaire du
permis de conduire, à mettre l’un des taxis en route, à le conduire à une allure folle tous feux
éteints, hors du parc de stationnement, et à renverser un piéton sur le trottoir. Le chauffeur de
ce taxi ne saurait donc être déclaré responsable de l’accident en qualité de commettant. 47 Plus
récemment et confirmant cette tendance, la Cour Suprême exige « une relation de cause à effet
» entre le fait dommageable et les fonctions du préposé.48
La jurisprudence s'est montrée hésitante, et le nombre d'arrêts de l’Assemblée plénière de la
Cour de cassation rendu sur ce seul point est exceptionnellement élevé : de 1960 à 1988, la
Haute Juridiction a rendu pas moins de cinq décisions sur le même point.

42
CAR., 23-VI1959, G.T.M., 1959, n°1257, p. 94
43
Droit des obligations, Christian LAPOYADE DESCHAMPS, Manuel Université de droit, ellipses, 2008)
44
Trib. 1ére Inst. Kenitra, 17-IV-1951, R.M.D., 1952, p. 133-136; CAR., 13-VII-1951, R.M.D., 1952, p. 133
45
C.S. Crim., 18-11-1960, R.A.C.S., T. 1, p. 219
46
Droit des obligations, Christian LAPOYADE DESCHAMPS, Manuel Université de droit, ellipses, 2008
47
C.S. Civ., 26-1-1960, R.A.C.S., T. 1, p. 137
48
CS Soc.18-3-1975, RJL, 1977, n°126, p.20
Par un arrêt du 10 juin 1977 s'efforça de vaincre la résistance de la chambre criminelle en
reprenant la solution des chambres réunies (commettant non responsable lorsque le préposé
utilise le véhicule « sans autorisation, à des fins personnelles ».49
La chambre criminelle refusant de nouveau de céder, un nouvel arrêt de l'Assemblée plénière
fut rendu le 17 juin 1983 dans une affaire où un chauffeur avait détourné du fuel et l'avait
déversé dans une carrière, polluant ainsi les eaux d'une commune : la responsabilité du
commettant a été écartée au motif que le préposé avait agi « sans autorisation, à des fins
étrangères à ses attributions et s'était placé hors des fonctions auxquelles il était employé ».50
Dans le dernier de ces arrêts, en date du 19 mai 1988, l'Assemblée plénière de la Cour de
cassation affirma que « le commettant ne s'exonère de sa responsabilité que si son préposé a agi
hors des fonctions auxquelles il était employé, sans autorisation, et à des fins étrangères à ses
attributions », ce qui n'était pas le cas en l'espèce. Pour n'être pas responsable des dommages
causés par son préposé, trois conditions cumulatives sont donc nécessaires : que le préposé ait
agi hors de ses fonctions, sans autorisation, et à des fins étrangères à ses attributions.
Le bilan de l'évolution jurisprudentielle est délicat. Compte tenu de la précision de la formule
adoptée par la haute Assemblée, toutes les Chambres de la Cour de cassation ont dû la reprendre
expressément, à quelques variantes près. Le débat n'est d'ailleurs semble-t-il pas clos. Le critère
de l'acte hors des fonctions pose toujours difficulté. Ainsi la 2e chambre civile a retenu la
qualification d'abus de fonction dans l'hypothèse suivante : Un employé va poster le courrier de
l'entreprise qui l'emploie, il aperçoit un véhicule en stationnement, à proximité du bureau du
poste. Le véhicule est ouvert. Il s'introduit à l'intérieur, démarre et blesse, celui qui avait garé
le véhicule en question. La victime souhaite agir contre le commettant. À la lumière de
jurisprudence antérieure, il a bien agi dans ses fonctions, puisque en allant poster le courrier
pour l’employeur que dommage la chambre civile tempère un caractère objectif du critère de
l'acte dommageable pour tenir compte d'une initiative personnelle du salarié. De la sorte, l'abus
de fonction deviendrait un peu plus large. Mais là encore ce critère personnel viendrait anéantir
toute jurisprudence qui permet de retenir responsabilité du commettant lorsque, par exemple un
employé utilise les moyens mis en disposition par son employeur pour tromper la victime. On
pense à l’exemple de l'employé qui détourne les fonds. Si l’initiative est personnelle (ce l'on
peut penser) alors il agit hors de ses de fonctions.51
Ces « bégaiements » jurisprudentiels laissent en tout sentiment de malaise... Quelle insécurité
juridique pour la victime d'un préposé, le lui-même le commettant ! Fort heureusement, le
contentieux a été un peu tari par la loi du 5 juillet 1985, qui oblige l'assureur du véhicule à
indemniser la victime d'un accident de circulation, même si celui-ci est occasionnellement
préposé... hors de ses fonctions. D’ailleurs la ligne d'évolution de la jurisprudence semble
précisément être influencée par la présence d'un assureur : d'un côté, plaide systématiquement
l'abus de fonction pour éviter la responsabilité de l’assuré (employeur) engagé, pour esquiver
la garantie; de l'autre, le juge admettra plus facilement la responsabilité de l'employeur, le
sachant assuré. L'ennui, c’est que le commettant n’est pas toujours assuré… et ce n’est pas
forcément une entreprise. 52

49
Droit des obligations, Christian LAPOYADE DESCHAMPS, Manuel Université de droit, ellipses, 2008
50
Ibid
51
Ibid
52
Droit des obligations, Christian LAPOYADE DESCHAMPS, Manuel Université de droit, ellipses, 2008
B- La responsabilité des commettants : ses conséquences et ses effets :

Fondée sur la présomption de faute, la responsabilité du commettant est alors engagée du simple
fait de la réalisation de l’acte dommageable et ne peut s’exonérer que selon des cas précis (A).
Cependant, il est remarquable que le commettant, au fil des années, a obtenu une certaine
immunité (B)

1- Les causes d'exonération de la responsabilité du commettant :


La responsabilité du commettant repose sur une présomption de responsabilité et le fait qu'il
n'ait pas commis de faute n'est donc pas exonératoire. Le commettant, à moins d’un abus de
fonctions, ne peut pas s’exonérer en prouvant qu’il n’a pas commis de faute, qu’il a bien
surveillé son préposé…. Le commettant est présumé responsable et pour écarter sa
responsabilité, il devra prouver que le dommage est dû à un cas de force majeur ou à une faute
de la victime présentant les caractères de la force majeure. Il s’agit d’une présomption de
responsabilité. L’article 85 n’ayant pas prévue, comme il l’a fait pour les parents, de possibilité
d’exonération par la preuve de l’absence de faute ou d’une bonne surveillance du préposé.53
Doit-on en conclure que l’exonération du commettant est écartée ou est-ce une omission de la
part du législateur ?
La responsabilité du commettant, étant une garantie pour la victime, il n'est pas non plus admis
à démontrer que l'acte du préposé a constitué pour lui un cas de force majeure : ce fait concerne
ses seuls rapports avec le préposé et non pas avec la victime qui a droit à l'entière réparation de
son préjudice. La seule possibilité d'exonération pour le commettant dans ses rapports avec la
victime est la démonstration d'une cause étrangère (force majeure ou faute de la victime)
appréciée par rapport au préposé lui-même. En effet, dans l'hypothèse où l'acte dommageable
du préposé avait été rendu nécessaire par un cas de force majeure, c'est que son comportement
ne peut être qualifié de fautif, et donc la responsabilité du commettant ne peut être engagée.54
Cependant, la responsabilité du commettant n’exclut pas celle du préposé. La victime peut agir
directement contre le préposé sur la base de sa responsabilité du fait personnel qui se fonde sur
une faute prouvée. Si le dommage a été commis par l’utilisation d’une chose, le préposé ne peut
être poursuivi en tant que gardien de cette chose car selon la Cour Suprême, « les qualités de
gardien et de préposé sont incompatibles ».55 Il est admis en jurisprudence que la « préposition
implique un lien de subordination et de dépendance incompatible avec les pouvoirs d’usage, de
contrôle et de direction qui constituent la garde.56
Certes, en toute rigueur, on devrait dire plutôt que les conditions de la responsabilité du
commettant ne sont pas réunies (puisqu'il n'y a pas de faute du préposé), mais on parle en
général d'exonération du commettant. En présence d'une faute de la victime, il y a exonération

53
Article 85 du DOC
54
Droit des obligations, Christian LAPOYADE DESCHAMPS, Manuel Université de droit, ellipses, 2008
55
CS Civ, 26-I-1963, RMD, 1963, p.408.
56
CAR, 31-III-1950,RAC, T.XVI, p.236-237
partielle du commettant dans la mesure donnée par la comparaison de la gravité des fautes
respectives de la victime et du préposé.
Pour la Cour d’appel de Rabat, la responsabilité civile du commettant a seulement pour but de
protéger les tiers contre l’insolvabilité de l’auteur du délit ou quasi-délit cause du dommage,
mais non de décharger cet auteur de la responsabilité qui lui incombe et à laquelle il ne peut se
soustraire.57
Le commettant qui a indemnisé la victime du fait de l’acte dommageable de son préposé peut
se retourner contre ce dernier en exerçant une action récursoire. Certes en pratique, les actions
récursoires contre les préposés étaient rarement exercées par les commettants, en particulier en
raison d'une disposition du droit des assurances qui limite de tels recours lorsque ce sont des
compagnies d'assurances qui sont intervenues pour indemniser la victime, ce qui est souvent le
cas lorsque le commettant est un employeur.
En jurisprudence française, depuis un arrêt de la Cour de cassation rendue par l’assemblée
plénière en 200058, le préposé n’engage plus sa responsabilité et est ainsi protégé contre l’action
de la victime ou le recours du commettant.

2- L’immunité du préposé :

Il s’agit de décortiquer le fondement de l’immunité du préposé (A) pour étudier l’impact de


l'articulation des responsabilités du commettant et du préposé (B).

a- Le fondement de l’immunité :
Comme toutes les responsabilités du fait d'autrui, la responsabilité du commettant avait toujours
été conçue comme une garantie posée en faveur de la victime et qui ne profitait qu'à elle : celle-
ci bénéficiait d'un second débiteur en plus du préposé, à qui elle pouvait demander réparation
de la totalité de son dommage.
La victime pouvait aussi préférer, pour une raison ou pour une autre, poursuivre le préposé (seul
ou avec le commettant) sur le fondement de la responsabilité du fait personnel, c'est-à-dire des
articles 85, alinéa 1 du DOC, 1382 ou 1383 du Code civil ou, plus rarement, de l'article 1384
alinéa 1. Si le préposé était poursuivi seul par la victime, il ne pouvait ni appeler en garantie
son commettant, ni même, une fois condamné à réparer le dommage subi par la victime, exercer
une action récursoire contre ce dernier sur le fondement de l'article 1384, alinéa 5, toujours pour
la raison que la responsabilité du commettant n'était posée qu'en faveur de la victime et ne
pouvait en revanche profiter au préposé; ce dernier ne pouvait agir contre le commettant que
sur le fondement du droit commun de la responsabilité civile (par ex. en apportant la preuve
d'une faute du commettant).
Désormais, la responsabilité du commettant instaure au profit du préposé une véritable
immunité

57
CAR., 21-VI-1960, G.T.M., 1961, n° 1286, p. 27
58
Arrêt Costedoat, 25/2/2000, JCP, 2000, II.10295, note Billiau
En effet, au niveau de l’arrêt Rochas du 12 octobre 1993, la Chambre commerciale de la Cour
de cassation déclare que la responsabilité du préposé ne pouvait être retenue à l'encontre du
commettant que s'il avait commis non plus simplement une faute mais une « faute personnelle
», ce qui n'était pas le cas en l'espèce où les préposés à qui on reprochait des actes d'utilisation
illicite de marque et de concurrence déloyale avaient agi dans le cadre de la mission qui leur
avait été confiée par leur employeur. On témoigne alors sur un changement dans les conditions
de la responsabilité du préposé vis-à-vis du commettant.59
Le revirement s'étendit à l'action intentée directement par la victime à l'encontre du préposé, et
ce dans un arrêt Costedoat rendu en Assemblée plénière de la Cour de cassation (saisie sur
premier pourvoi par ordonnance du premier président de la Cour de cassation) le 25 février
2000.En l'espèce, des agriculteurs s'étaient adressés à la société Gyrafrance qui avait accepté de
répandre des produits herbicides sur leur récolte par hélicoptère; mais ce traitement ayant été
réalisé par un jour de fort vent, les herbicides furent disséminés sur des fonds voisins où ils
endommagèrent des végétaux; les juges du fond avaient fait droit à la demande de dommages-
intérêts formée par les voisins, notamment à l'encontre du pilote de l'hélicoptère, M. Costedoat,
qui était le préposé de la société Gyrafrance; selon la Cour d'appel, la responsabilité du préposé
devait être retenue car celui-ci aurait dû, en raison des conditions météorologiques, s'abstenir
de procéder ce jour-là à des épandages de produits toxiques. La haute Assemblée censura cette
décision en énonçant, dans un chapeau préliminaire, « que n'engage pas sa responsabilité à
l'égard des tiers le préposé qui agit sans excéder les limites de la mission qui lui a été impartie
par son commettant » ; ainsi, la responsabilité du préposé ne pouvait en l'espèce être retenue
puisqu'il n'avait pas été prétendu que M. Costedoat avait excédé les limites de la mission dont
l'avait chargé la société Gyrafrance.60
Il résulte ainsi de cet arrêt que, tant sur action récursoire du commettant que sur action directe
de la victime, le préposé, même fautif, ne peut désormais voir sa responsabilité engagée que s'il
a excédé « les limites de la mission qui lui a été impartie par son commettant ».
L'immunité s'applique même lorsque le préposé était conducteur et que la loi de 1985 avait donc
vocation à s'appliquer à lui : selon la Cour de cassation en effet, « n'est pas tenu à indemnisation
à l'égard de la victime le préposé conducteur d'un véhicule de son commettant impliqué dans
un accident de la circulation qui agit dans les limites de la mission qui lui a été impartie ». La
victime sera néanmoins assurée d'être indemnisée soit par l'assureur du commettant soit, en
dernier recours, par le fonds de garantie.
La Cour de cassation avait, pendant une courte parenthèse, ouvert une brèche dans la
jurisprudence Costedoat en jugeant, dans un arrêt du 13 novembre 2002, que l'immunité ne
devait pas jouer lorsque le préposé, en l'occurrence un médecin, était « indépendant »,
qualificatif qui paraissait pourtant à priori peu compatible avec la définition du lien de
préposition et donc avec la qualité de préposé ? 61
La Cour de cassation revient cependant très vite sur cette jurisprudence, et rétablit l'immunité
des préposés médecins ou sage-femmes salariés en énonçant, de façon générale que « le
médecin salarié [la sage-femme salariée) qui agit sans excéder les limites de la mission qui lui

59
Droit des obligations, Christian LAPOYADE DESCHAMPS, Manuel Université de droit, ellipses, 2008
60
Ibid
61
Droit Civil, Les Obligations, La Responsabilité civile extracontractuelle, Mireille Becache-Gibeili, Tome V 1ère
édition, Economica Delta, 2011
est impartie par l'établissement de santé privé, n'engage pas sa responsabilité à l'égard du patient
». La loi du 4 mars 2002 avait pourtant semblé supprimer la difficulté en rendant obligatoire
l'assurance de responsabilité médicale des établissements de santé et en précisant que cette
assurance couvrait nécessairement leurs salariés agissant dans la limite de leurs missions. Les
assureurs vont-ils baisser le montant de leur prime dès lors qu'ils n'ont plus à couvrir ce risque
? Comme souvent pour la responsabilité des commettants, les juges statuent sur le fondement
de la responsabilité délictuelle alors même que les cliniques sont liées à leurs patients par un
contrat médical, ce qui peut laisser penser que l'immunité du préposé devrait être étendue aux
relations contractuelles.62
Pour éviter qu'un préposé pénalement condamné soit irresponsable civilement, l'Assemblée
plénière de la Cour de cassation a précisé, dans un arrêt Cousin du 14 décembre 2001 ', que «
le préposé condamné pénalement pour avoir intentionnellement commis, sur l'ordre du
commettant, une infraction ayant porté préjudice à un tiers, engage sa responsabilité civile à
l'égard de celui-ci »
La responsabilité personnelle du préposé dépend ainsi non seulement des liens de son acte avec
la mission qui lui était impartie, mais également de la nature et de la qualification de cet acte
en lui-même. La Cour de cassation a cependant par la suite atténué cette condition et jugé que
la responsabilité civile du préposé ne requérait pas qu'une condamnation pénale ait été
prononcée contre lui : il suffisait que l'infraction pénale ait été judiciairement déclarée
constituée, et même simplement que la faute dommageable de nature intentionnelle ait été
constatée par un juge des référés
La Chambre criminelle de la Cour de cassation a ensuite élargi la potion d'infraction pénale de
nature à permettre de lever l'immunité du préposé et par conséquent a étendu les cas où la
responsabilité personnelle de ce dernier pouvait être recherchée. Elle a jugé en effet, dans un
arrêt du 28 mars 2003, que l'immunité du préposé devait également être écartée lorsque celui-
ci a commis une faute qualifiée au sens de l’article 121 ,al 3 du Code pénal. En l'espèce, le
préposé avait été condamné pour homicide et blessures involontaires (donc des infractions non
intentionnelles) et la Cour de cassation approuve pourtant la décision des juges du fond d'avoir
retenu que le salarié devait être déclaré civilement responsable des conséquences
dommageables de ses actes, « dès lors que le préposé, titulaire d'une délégation de pouvoir,
auteur d'une faute qualifiée aux sens de l'article 121-3 du Code pénal, engage sa responsabilité
civile à l'égard du tiers victime de l'infraction, celle-ci fût-elle commise dans l'exercice de ses
fonctions ». La « faute qualifiée aux sens de l'article 121-3 du Code pénal » n'est pas une
infraction intentionnelle . Elle requiert simplement ce que les pénalistes appellent un « dol
éventuel», c'est-à-dire que l'agent, sans vouloir en aucune façon le résultat dommageable qui
s'est produit, ou même aucun résultat, l'a simplement prévu comme possible . Le dol éventuel
se situe ainsi entre la faute intentionnelle et la simple faute d'imprudence ou de négligence.
En revanche, quelques arrêts récents ont employé des formules beaucoup plus larges, de nature
à entamer sérieusement l'immunité du préposé; celle-ci serait en effet désormais levée dès lors
que le préposé a commis « une infraction pénale ou d'une faute intentionnelle». L'arrêt de 2008
n'étant pas publié au bulletin, et le pourvoi n'ayant pas dans les deux cas particulièrement
soulevé la question, on peut penser pour instant qu'ils ne feront pas jurisprudence. Cela serait
en tous les cas souhaitables, car l'immunité n'aurait plus guère d'effectivité si la moindre faute

62
Ibid
pénale, mème non intentionnelle (donc par exemple une simple contravention), suffisait à
l'écarter. On peut certes penser que la haute Juridiction a voulu ajouter la faute civile
intentionnelle, qui est effectivement suffisamment grave (on rappelle qu'elle suppose que
l'auteur ait recherché le dommage) pour lever l'immunité, et qu'elle n'a dès lors pas voulu répéter
le qualificatif.
en d'autres termes le préposé n'a plus à répondre de ses comportements même fautifs, et c'est
en ce sens qu'il bénéficie d'une véritable immunité, sauf les exceptions examinées.
La Cour de cassation a cependant jugé que l'immunité du préposé ne fait pas disparaître sa
responsabilité : dès lors, si lui-même est immunisé et n'a donc pas à en subir les conséquences,
il en va différemment pour son commettant ; la solution se comprend car on ne voit pas au nom
de quoi l'assureur de responsabilité serait lui-même immunisé vis-à-vis notamment de l'action
récursoire des autres assureurs. Le fondement de l'immunité réside en effet dans la situation
particulière du préposé et ne justifie pas qu'elle soit étendue à d'autres.63
La justification de cette immunité doit en effet sans doute être trouvée du côté du droit du travail,
dans la mesure où les salariés constituent la grande majorité des préposés. Comme l'avait noté
un auteur, la responsabilité du salarié en tant que préposé apparaissait en contradiction avec
l'immunité de responsabilité reconnue à ce même salarié dans l'exécution de son travail. On sait
en effet que, depuis un arrêt de la Chambre sociale de la Cour de cassation du 27 novembre
1958, le salarié ne peut être poursuivi par l'employeur pour dommage causé par la mauvaise
exécution de son travail qu'au cas où il aurait commis une faute lourde , et la jurisprudence
exige même en fait la preuve d'une intention de nuire, ce qui est classiquement le critère de la
faute intentionnelle. Sur action récursoire du commettant ou sur action directe de la victime, le
salarié se trouvait donc être responsable alors qu'il était couvert par une immunité en cas
d'action directe de l'employeur. Désormais, le salarié bénéficie d'une immunité vis-à-vis de la
victime; en revanche, sur action récursoire de son employeur, le salarié pourrait être responsable
en cas de faute dans l'exécution de son contrat de travail dont l'appréciation relève de la
juridiction prud'hommes, cette faute requérant cependant, ainsi qu'il a été vu, la preuve d'une
intention de nuire.64
L'immunité est étendue à tous les préposés, l'article 1384 alinéa 5 et du Code civil et l’article
85. alinéa 3 du Doc ne distinguant pas entre eux. La solution peut se comprendre si l'on admet
que depuis la « découverte » du principe général de responsabilité du fait d'autrui de l'article
1384, alinéa l°, la qualification de commettant est réservée aux hypothèses où une personne
profite de l'activité d'une autre. Dès lors, la justification traditionnelle de l'immunité du salarié,
tirée de ce que c'est in fine l'employeur qui profite du travail du salarié et doit donc aussi en
assumer les risques, vaut pour tous les préposes. L'immunité ne doit plus jouer en revanche
pour les fautes les plus graves : il s'agit des fautes pénales intentionnelles selon la nouvelle
jurisprudence civile, mais sans doute faudrait-il distinguer plus finement selon les types
d'infraction (le préposé ne devrait par exemple plus être couverts par l'immunité dès lors qu'il a
tiré un profit personnel de son infraction pénale, mais il est vrai qu'il y aura alors sans doute
faute pénale intentionnelle).

63
Droit des obligations, Christian LAPOYADE DESCHAMPS, Manuel Université de droit, ellipses, 2008
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Droit des obligations, Christian LAPOYADE DESCHAMPS, Manuel Université de droit, ellipses, 2008
Résulte de cette jurisprudence une évolution certaine du fondement de la responsabilité des
commettants du fait de leurs préposés : d'une garantie d'indemnisation mise en place au seul
profit de la victime, et sans influence sur la responsabilité propre du préposé, la responsabilité
des commettants se double aujourd'hui d'une atténuation de la responsabilité des préposés, et
même d'une certaine immunité pour ces derniers. Du fait de leur qualité, et donc du fait du lien
de préposition, les préposés voient leur responsabilité limitée par rapport à ce qu'elle serait en
droit commun.65
Cette limitation conduit à une diminution des garanties de la victime : celle-ci n’a plus qu'un
débiteur au lieu de deux précédemment, ce qui peut lui coûter cher lorsque la responsabilité du
commettant est paralysée pour une raison ou pour une autre (faillite par exemple) et qu'une
assurance ne peut être mobilisée; la victime se trouve démunie alors même qu'elle est face à un
préposé qui a commis une faute ? Cette jurisprudence marque ainsi un retrait par rapport à
l'objectif de garantie des victimes qui semblait jusque-là le seul guide de l'évolution du droit de
la responsabilité civile.

b- L'articulation des responsabilités du commettant et du préposé


La question se pose : l'une de l'autre ou y a-t-il encore des hypothèses où la victime pourrait
bénéficier de deux responsables ? Tout allait dépendre de la portée respective donnée aux deux
formules permettant d'une part de ne pas retenir la responsabilité du commettant (lorsque « son
préposé a agi hors des fonctions auxquelles il était employé, sans autorisation, et à des fins
étrangères à ses attributions ») et, d'autre part, permettant de retenir celle du préposé (lorsque
le préposé a « excédé les limites de la mission qui lui a été impartie par son commettant »).
Si les deux formules étaient interprétées de façon à conduire à une notion unique, cela
signifierait que préposé et commettant ne pourraient plus être responsables qu'alternativement
et jamais en même temps : en effet, soit le préposé a agi hors des fonctions auxquelles il était
employé, sans autorisation, et à des fins étrangères à ses attributions (il y a abus de fonction du
préposé), et alors son commettant n'est pas responsable, mais lui-même l'est personnellement
puisqu'il a alors nécessairement excédé les limites de sa mission; soit le préposé n'a pas agi hors
des fonctions auxquelles il était employé, sans autorisation, et à des fins étrangères à ses
attributions (il n'y a pas abus de fonction du préposé), et son commettant est alors responsable,
mais lui-même ne l'est plus dès lors qu'il n'a alors pas excédé les limites de sa mission. L'identité
des deux formules aurait cependant conduit à une exonération excessive du préposé, car on sait
que l'exonération du commettant n'est elle-même admise que dans de très rares hypothèses par
la jurisprudence.66
La formule de l'arrêt Costedoat paraissait en réalité être plus large et donc couvrir davantage
d'hypothèses que celle utilisée dans la jurisprudence sur l'abus de fonction du préposé.
Cependant, la cour de cassation dans un arrêt du 16 juin 2005, a estimé qu'un préposé pouvait
encourir une responsabilité personnelle pour être sorti des limites de sa mission, sans que le
commettant soit pour autant exonéré en l'absence d'abus de fonction du préposé . En présence
en revanche d'un abus de fonction du préposé ne permettant pas d'engager la responsabilité du

65
Ibid
66
Droit des obligations, Christian LAPOYADE DESCHAMPS, Manuel Université de droit, ellipses, 2008
commettant, la responsabilité personnelle du préposé pourrait toujours être recherchée car il
aurait alors nécessairement, à fortiori, excédé les limites de la mission qui lui avait été impartie.
En résumé, le préposé excède les limites de sa mission plus aisément qu'il n'abuse de ses
fonctions : il faut en effet admettre plus restrictivement la seconde notion dans la mesure où
elle permet d'exonérer le commettant, tandis que la première permet au contraire de retenir la
responsabilité du préposé. Pour excéder les limites de ses fonctions, il suffit que le préposé ait
fait autre chose que ce pour quoi il était employé (il vole ou dégrade au lieu de surveiller ou
nettoyer par exemple), tandis que pour que l'on retienne qu'il a abusé de ses fonctions, il faut
qu'il ait été véritablement en dehors de son emploi (en dehors du temps et/ou du lieu de travail
par exemple).
L'abus de fonctions du préposé sert à apprécier la responsabilité du commettant : le fait
d'excéder les limites de sa mission sert à apprécier la responsabilité du préposé.
L'outrepassement des limites de la mission se fait plus facilement que l'abus des fonctions : le
salarié qui abuse de ses fonctions a donc nécessairement par là même excédé les limites de sa
mission, mais l'inverse n'est pas vrai.
1r° situation : le préposé n'a pas excédé les limites de sa mission (il n'est donc pas responsable,
sauf faute pénale intentionnelle ou qualifiée), et il n'a alors, a fortiori, pas abusé de ses fonctions
(le commettant est donc responsable).
2° situation : le préposé a excédé les limites de sa mission (il est donc responsable), mais il n'a
pas abusé de ses fonctions (le commettant est alors également responsable).
3° situation : le préposé a excédé les limites de sa mission (il est donc responsable), et il a même
abusé de ses fonctions (le commettant n'est donc pas responsable).67

Paragraphe 2 : La responsabilité des instituteurs du fait de leurs élèves : la faute prouvée


Ce régime de responsabilité a suscité un large débat suite à la célèbre affaire Leblanc. Il est nécessaire
de se pencher vers les conditions de ce fondement (I), ainsi que sa mise en œuvre en pratique (II)

I- Les conditions de la responsabilité des instituteurs du fait de leurs élèves :

Les instituteurs sont responsables du dommage causé par les enfants et jeunes gens pendant le
temps qu’ils sont sous leur surveillance.
Cette responsabilité est prévue à l’article 85 bis du DOC qui substitue la responsabilité de l’Etat
à celle de l’instituteur : « La responsabilité de l’Etat sera substituée à celle de ces agents qui ne
pourront jamais être mis en cause devant les tribunaux civils par la victime ou ses représentants
».68
L’article 85 bis est applicable “ toutes les fois que, pendant la scolarité ou en dehors de la
scolarité, dans un but d'éducation morale ou physique non interdit par les règlements, les enfants
ou jeunes gens confiés ainsi audits agents se trouveront sous la surveillance de ces derniers”.

67
Ibid
68
Article 85 bis du DOC
Toujours selon l'alinéa 6 de l'article 1384 du Code civil, Les instituteurs sont responsables « du
dommage causé par leurs élèves [...] pendant le temps qu'ils sont sous leur surveillance ». Ce
texte concerne aussi bien les instituteurs de l'enseignement privé que ceux de l'enseignement
public.
Dans le Code civil de 1804, seule cette disposition concernait la responsabilité des instituteurs,
et ce régime était donc le même que celui de la responsabilité des artisans du fait de leurs
apprentis, prévue d'ailleurs dans la même phrase. Les instituteurs pouvaient donc s'exonérer en
démontrant qu'ils n'avaient pas commis de faute.
L'application des paragraphes 4 et 5 de l'article 1384 n'avait donné lieu à aucune difficulté
spéciale jusqu'à la célèbre affaire Leblanc. A la date du 23 janvier 1892, un jugement de la 10e
chambre du tribunal de la Seine déclarait l'instituteur Leblanc, directeur de l'école publique de
Fontenay-sous-Bois, civilement responsable des condamnations pécuniaires encourues par trois
de ses élèves déclarés coupables d'avoir porté conjointement et volontairement des coups à un
de leurs condisciples.69
Les circonstances dans lesquelles le fait originaire s'est produit sont les suivantes : Les enfants
jouaient pendant la récréation dans la cour de l'école ; l'un d'eux, bousculé et frappé par trois de
ses camarades, reçut un coup de pied dans le ventre ; il fut ramené souffrant chez ses parents ;
une péritonite ne tarda pas à se déclarer, et l'enfant mourut au bout de quelques jours. La famille
assigna devant le tribunal correctionnel les pères des trois élèves qui avaient frappé leur
camarade. Elle assigna en même temps le directeur de l'école.
Le tribunal de Seine avait jugé que, malgré que le directeur de l'école, n'a pas été témoin des
faits et ne saurait être reconnu coupable d'y avoir participé, Leblanc, directeur, doit être déclaré
responsable civilement de ce délit, quelles que soient d'ailleurs sa vigilance, habituelle son
honorabilité reconnue et l'impossibilité où il parait s'être trouvé d'empêcher les coups portés à
la victime, et ce par le seul fait que des coups volontaires ont été portés à un enfant dans
l'intérieur de l'école, aux termes de l'article 1384 du Code civil. Elle renvoie alors, Leblanc des
fins de la prévention d'avoir commis un délit ou de s'en être rendu complice.70
Une loi du 5 avril 1937 a voulu supprimer cette présomption de faute pesant sur les instituteurs.
Mais au lieu de supprimer tout simplement l'alinéa 6 de l'article 1384 du Code civil, ce qui
aurait rendu applicable le droit commun de la responsabilité du fait personnel prévu à l'article
1382, la nouvelle loi inséra un alinéa 8 qui ajoutait que « en ce qui concerne les instituteurs, les
fautes, imprudences ou négligences invoquées contre eux comme ayant causé le fait
dommageable, devront être prouvées, conformément au droit commun, par le demandeur, à
l'instance ».
Les accidents dont peuvent être victimes les élèves dans les écoles sont régis par le dahir du 26-
10-1942 relatif à la réparation des accidents survenus aux élèves des établissements scolaires
publics. L’Etat assume une responsabilité de plein droit, uniquement conditionnée par la
survenance du fait dommageable au sein de l’établissement scolaire.71

69
Beurdeley Paul. La responsabilité des instituteurs. In: La revue pédagogique, tome 21, Juillet-Décembre 1892.
pp. 122-138
70
Ibid
71
Farid El Bacha, Droit des Obligations, Actes juridiques et faits juridiques, 2e édition, 2020.
La victime, si tel est son intérêt, peut toujours agir sur la base du droit commun de la
responsabilité civile, en l’occurrence l’article 85 du DOC qui fonde la responsabilité sur la faute
prouvée de l’établissement72.
Un régime de responsabilité pour faute pèse donc désormais sur les instituteurs : leur
responsabilité du fait de leurs élèves ne peut être engagée qu'à la condition de démontrer à leur
charge une faute qui a rendu possible le dommage causé par l'élève. Celle-ci est appréciée de
façon relativement large. Il s'agit le plus souvent d'une faute de surveillance, ou encore du fait
de laisser les élèves - ou a fortiori de les autoriser ou de les aider - à exercer des activités risquées
Comme pour toute responsabilité du fait d'autrui (sauf celle des père portement de l'élève, ou
tout au moins un fait d'une chose dont il était gardien et de nature à engager sa propre
responsabilité.

II- La mise en œuvre de la responsabilité des instituteurs du fait de leurs élèves

En cas de dommage survenu au sein de l’établissement scolaire, et pendant tous les temps où le
personnel d’éducation est en charge des élèves, sa responsabilité civile est mise en jeu dans le
cadre d’une procédure. En pratique, il existe plusieurs cas suivant lesquels les tribunaux ont
statué sur le sort de la responsabilité du corps d’éducation.
Pour les membres de l'enseignement public une loi du 20 juillet 1899 a prévu que la
responsabilité de l'Etat soit substituée à celle de l'instituteur, tant d'ailleurs pour les dommages
causés par les élèves que pour les dommages causés à un élève par les instituteurs, et ce quelle
que soit la nature de la faute de l'instituteur. La victime de ces dommages ne peut donc intenter
son action en réparation que contre l'Etat. Dans la même perspective, un arrêt de la Cour de
cassation française portant numéro 21-82.535 du 2 février 2022, sur le cas des parents d’élèves
qui exercent une action en responsabilité civile à l’encontre d’une enseignante, devant le juge
civil, suite à un harcèlement moral subi au sein de l’établissement scolaire. La Cour d’appel
déclare l’enseignante coupable de harcèlement moral et la condamne à verser des dommages et
intérêts aux parents des victimes. La Cour de cassation annule la décision de la Cour d’appel :
l’enseignant ne peut jamais être mis en cause devant un Tribunal civil, c’est l’État qui s’y
substitue pendant la procédure, les parents d’élèves intentent une action contre l’État devant le
juge civil. De ce fait, un enseignant ne peut pas être condamné par un juge civil à verser des
dommages et intérêts aux parents d’élèves victimes de harcèlement moral.73
En effet, dans un arrêt du 12 mai 2009, portant numéro 07/01901, la Cour d’appel de Grenoble,
a retenu que le défaut de surveillance à l’origine de la blessure d’une élève de 5 ans pendant la
récréation était constitutif d’une faute engageant la responsabilité de l’État, eu égard au jeune
âge de l’enfant.74
La législation marocaine va dans le même sens, et ce dans un arrêt du 20 février 2014, portant
nº180, dossier administratif nº 969/4/2/2012, qui porte sur le fait que la responsabilité du
surveillant de l'établissement d'enseignement est engagée, dans lequel l'accident s'est produit

72
CS, 26 mai 1994, Arrêts de la cour suprême, 1958- 1996, Publications de la Cour Suprême, 1997, p.229
73
arrêt de la Cour de cassation française portant numéro 21-82.535 du 2 février 2022
74
arrêt du 12 mai 2009, portant numéro 07/01901, la Cour d’appel de Grenoble
chaque fois qu'une négligence, une erreur ou un manque de prudence est prouvé contre lui et
que le tribunal prouve que l'accident qui a tué la victime s'est produit après que l'enseignante a
quitté le département avant la fin des cours, ce qui signifie que l'erreur ou la négligence dans le
suivi des élèves attribuée à l'enseignante est établie en son droit et que les conditions de l’article
85 bis du Dahir des obligations et contrats sont réalisés.75
Un autre arrêt marocain, portant numéro 20, du 13 janvier 2015, dossier nº 1524/1/3/2013 que
la demanderesse qui a été blessée suite à l'accident en raison de sa chute d'un balcon dans
l'établissement d'enseignement dans lequel elle étudie, alors qu'elle est sous la surveillance du
professeur qui était chargé de donner la leçon dans la pièce qu’elle a quitté pour reprendre son
souffle suite à une difficulté de respiration, après qu'elle lui ait demandé la permission de le
faire, il est considéré comme négligent de son obligation de surveillance alors qu'elle était dans
cet état, ce qui constitue une erreur de sa part attribué à l’institution.76
En principe, l’État peut engager une action récursoire à l’encontre du personnel d’éducation en
vue d’obtenir le remboursement des dommages et intérêts versés en raison d’une faute
personnelle à l’origine d’un dommage.77
En pratique, l’action récursoire est rarement mise en œuvre sur le fondement d’un défaut de
surveillance. Lorsque la faute du personnel d’éducation est « détachable de ses fonctions »,
pour une infraction pénale, par exemple, l’État en revanche exerce une action récursoire.78
Dans un arrêt du 12 décembre 2008, portant numéro 296982, du Conseil d’Etat en France, 3e
et 8e sous-sections réunies, à titre d’exemple, l’État a demandé à l’enseignant coupable de coups
et blessures sur ses élèves le remboursement des dommages et intérêts versés par l’État aux
victimes. Le jugement confirme que l’action récursoire de l’État est fondée, mais précise que
le montant à rembourser par l’enseignant n’est pas nécessairement identique au montant versé
par l’État.79
Par exception au régime de droit commun, cette action doit en outre être portée devant les
tribunaux judiciaires et être intentée dans un délai de prescription de trois ans. L’Etat peut
ensuite éventuellement se retourner contre l'instituteur lorsque celui-ci a commis une faute
individuelle, ce qui semble correspondre à la faute personnelle du droit administratif (qui est
une faute détachable des fonctions), par opposition à la faute de service.
S'agissant des instituteurs de l'enseignement privé, la victime peut assigner directement
l'instituteur en réparation du dommage que lui a causé un élève, à la condition de démontrer la
faute de l'instituteur ayant rendu possible le fait de l'élève. L'instituteur dispose alors d'une
action récursoire contre l'élève ou éventuellement ses parents.

75
un arrêt du 20 février 2014, portant nº180, dossier administratif nº 969/4/2/2012
76
Arrêt de la Cour de cassation marocaine, du 13 janvier 2015, dossier nº 1524/1/3/2013
77
https://www.autonome-solidarite.fr/articles/la-responsabilite-civile-des-personnels-deducation/#sources

78
Ibid
79
arrêt du 12 décembre 2008, portant numéro 296982, du Conseil d’Etat en France, 3e et 8e sous-sections
réunies
Chapitre 2 : La responsabilité contractuelle du fait d’autrui

Il est constaté dans la pratique que les contractants n’exécutent pas seuls leurs obligations et
engagements qu’ils prennent à l’égard des autres parties du contrat, tout en ayant conscience du
principe que le contrat lie les parties qui ont présenté leur consentement à le conclure, une
question s’impose dans le cas où un dommage est réalisé par l’une des personnes participant à
l’exécution de l’obligation, le contractant serait-il responsable ?
Section 1. Autour de la responsabilité contractuelle du fait d’autrui : fondement et régime
général

Il est indispensable de concevoir dans une première partie le régime général de la


responsabilité contractuelle du fait d’autrui ( I) afin de se pencher dans un second temps
à l’originalité de cette dernière ( II).
I- Le régime général de la responsabilité contractuelle du fait d’autrui :

Le créancier victime de l’inexécution va exiger des indemnités pour réparation du dommage


causé par l’inexécution ou le retard dans l’exécution dans le contrat. Afin d’engager la
responsabilité contractuelle du fait d’autrui, cela nécessite la réalisation d’une faute qui génère
un dommage à la partie lésée, ayant un lien de causalité entre les deux.

A- Le dommage :
La responsabilité est engagée lorsque le créancier subi un dommage : dommage matériel( une
atteinte à l’intégrité corporelle et à la vie), un dommage moral et un dommage futur dès lors
qu’il est certain.
On peut conclure du Doc que les dommages sont la perte effective que le créancier a éprouvée
et le gain dont il a été privé, et qui sont la conséquence directe de l'inexécution de l'obligation.
Les dommages-intérêts sont dus, soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du
retard dans l'exécution, et encore qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de la part du débiteur.
L'appréciation des circonstances spéciales de chaque espèce est remise à la prudence du tribunal
: il doit évaluer différemment la mesure des dommages-intérêts, selon qu'il s'agit de la faute du
débiteur, de son dol ou du créancier. De surplus, la réparation du dommage va différer selon sa
cause : involontaire (faute d’imprudence et de négligence)ou intentionnelle (le dol).80
Il est important à noter que la responsabilité contractuelle a une fonction réparatrice et non
punitive. A cet égard, il existe une possibilité d’inclure des clauses qui peuvent prévoir à
l’avance, le montant des indemnités qui seront dus en cas d’inexécution ou de retard dans
l’exécution, appelées clauses pénales. Il s’agit d’une évaluation conventionnelle et forfaitaire
des dommages-intérêts contractuels, qui permet d’éviter les difficultés d’évaluation judiciaire
des indemnités, et constitue en quelque sorte, un moyen de pression pour le débiteur. Cependant,

80
Article 263 du DOC
selon le DOC, le tribunal peut réduire le montant des dommages-intérêts convenu s'il est
excessif ou augmenter sa valeur s'il est minoré comme il peut réduire le montant des dommages-
intérêts convenu, compte tenu du profit que le créancier en aurait retiré du fait de l'exécution
partielle de l'obligation. Toute clause contraire est réputée nulle.
Il est important à noter qu’en matière contractuelle, seul le dommage prévisible peut être réparé
et que le créancier négligent est sanctionné pour ne pas avoir avisé le débiteur de l’importance
du dommage qu’il pouvait causer. La règle ne reçoit d’exception qu’en cas de dol du débiteur.

B- Le lien de causalité :
Il s’agit de la causalité directe entre le dommage et l’inexécution du contrat. De ce fait, les
dommages dont se plaint le contractant victime de l’inexécution doivent être la conséquence
de l’inexécution de l’obligation81, à titre d’exemple, le marchand qui vend une bête malade, et
qui contamine les autres bêtes est responsable du dommage causé par le marchand. Néanmoins,
Il n’est guère possible de remonter très loin dans la chaine des conséquences et il est injuste de
faire supporter à un contractant les conséquences indirectes de ses actes.
-Dans ce cadre il est nécessaire de poser la question de l’effectivité du lien de causalité entre le
dommage et la faute en présence de force majeure. En effet, il n’y aura pas de responsabilité si
le dommage est imputable à la faute ou au fait exclusif du créancier assimilables à la force
majeure. Ainsi le DOC énonce dans son article 268 qu’il n'y a lieu à aucuns dommages-intérêts,
lorsque le débiteur justifie que l'exécution ou le retard proviennent d'une cause qui ne peut lui
être imputée, telle que la force majeure, le cas fortuit ou la demeure du créancier82. Il définit
également, par le biais de l’article 269 la force majeure comme étant tout fait que l'homme ne
peut prévenir, tel que les phénomènes naturels (inondations, sécheresses, orages, incendies,
sauterelles), l'invasion ennemie, le fait du prince, et qui rend impossible l'exécution de
l’obligation.83
Il n'est point considéré comme force majeure la cause qu'il était possible d'éviter, si le débiteur
ne justifie qu'il a déployé toute diligence pour s'en prémunir. N’est pas également considérée
comme force majeure la cause qui a été occasionnée par une faute précédente du débiteur. De
son côté la jurisprudence admet que la force majeure s’entend uniquement des faits qui rendent
l’exécution de la convention impossible et non des évènements qui la rendent plus difficile.
La force majeure se caractérise par trois traits. Tout d’abord l’imprévisibilité, c’est-à-dire que
le débiteur ne pouvait pas prévoir l’événement ; l’irrésistibilité où le débiteur ne pouvait mettre
aucun moyen en œuvre pour exécuter le C malgré l’évènement ; et enfin l’extériorité, en
d’autres termes un événement extérieur au débiteur.
c- La faute :
Il s’agit de la distinction classique où le DOC distingue les fautes en fonction de leur gravité :
le dol (faute intentionnelle à ne pas confondre avec le dol vice de consentement) la faute lourde
ou grave (faute grossière), la faute non intentionnelle et la faute légère. Il s’agit d’une

81
Article 264 du DOC
82
Art. 268 du DOC
83
Art 269 du DOC
graduation de la faute qui influence sur le montant de la réparation. Les limitations
conventionnelles de responsabilité ne sont pas valables en cas de faute intentionnelle ou lourde.
La faute diffère selon la nature de l’obligation. Lorsque l'obligation consiste à ne pas faire, le
débiteur est tenu des dommages-intérêts par le seul fait de la contravention ; le créancier peut,
en outre, se faire autoriser à supprimer, aux dépens du débiteur, ce qui aurait été fait
contrairement à l'engagement, Il s’agit d’une responsabilité de plein droit en cas d’inexécution
d’obligation de ne pas faire. 84
Une question alors se pose : la faute est-elle une condition exigée pour engager la
responsabilité ?
Il s’agit d’établir une distinction des obligations en fonction de leur intensité : la distinction
classique des obligations de moyens et de résultat. Lorsque le créancier promet un résultat
précis (responsabilité contractuelle objective), si ce résultat n’est pas atteint, sa responsabilité
sera engagée même si aucune faute n’est établie à sa charge. La victime est dans une position
confortable : elle se contentera de prouver le dommage et le lien de causalité pour obtenir
réparation qui incombe au débiteur. Pour s’exonérer, il doit prouver que le dommage est dû à
un cas fortuit ou une force majeure ou à la faute de la victime présentant les caractères de la
force majeure. En effet, Il n'y a lieu à aucuns dommages-intérêts, lorsque le débiteur justifie
que l'exécution ou le retard proviennent d'une cause qui ne peut lui être imputée, telle que la
force majeure, le cas fortuit ou la demeure du créancier.85
En revanche, lorsqu’il n’est guère possible de garantir un résultat, la victime devra, outre le
dommage et le lien de causalité, prouver que le débiteur défaillant ne s’est pas comporté comme
il aurait dû le faire, n’a pas correctement utilisé les moyens dont il disposait, qu’il a commis
une faute. Il s’agit d’une responsabilité contractuelle subjective.
La faute est alors une condition de la responsabilité civile contractuelle dans les contrats qui ne
créent que des obligations de moyens.

II. Le fondement et l’originalité de la responsabilité contractuelle du fait d’autrui :

Existe-t-il une responsabilité contractuelle du fait d’autrui ?


L'expression « responsabilité contractuelle du fait d'autrui » recouvre, à priori, l'ensemble des
hypothèses dans lesquelles le débiteur est contractuellement responsable envers son
cocontractant des dommages causés par le fait matériel d'un tiers. Pourtant, cette expression
n'est pas toujours juridiquement exacte et ne constitue que très rarement une réalité distincte de
la faute contractuelle. Pour le comprendre, il convient de distinguer deux hypothèses. La
première est celle où le débiteur s'est adjoint ou substitué à un tiers dans l'exécution de son
obligation contractuelle. La deuxième, plus exceptionnelle, est celle où le tiers à l'origine du
dommage exécute une prestation dont le contenu ne correspond à aucune obligation issue du
contrat liant le responsable à la victime.

84
Article 262 du DOC
85
Article 268 du DOC
A partir d'un certain nombre de cas particuliers prévus par la loi, la jurisprudence n'a pas hésité
à dégager un principe général selon lequel tout débiteur est responsable du fait de ses substituts
ou auxiliaires. Si ce principe est incontestablement de droit positif, il ne réalise cependant pas
l'avènement d'une responsabilité contractuelle du fait d'autrui. L'analyse est juridiquement
erronée, la responsabilité du débiteur étant toujours, dans ce cas, une responsabilité pour faute.

A. Une simple application de la responsabilité pour faute

La responsabilité du débiteur du fait des personnes qu'il introduit dans l'exécution du contrat
peut, à priori, être analysée comme une responsabilité pour autrui. En effet, la responsabilité
serait, tout d'abord, contractuelle parce que la victime demanderait réparation d'un dommage
résultant de l'inexécution d'un contrat la liant au responsable. Ensuite, la responsabilité serait
du fait d'autrui parce que l'inexécution du contrat serait due, non pas au fait personnel du
débiteur, mais au fait d'un tiers que le premier s'est adjoint ou substitué dans l'exécution de son
obligation contractuelle. 86
Cette analyse est cependant critiquable. La responsabilité du débiteur du fait des personnes qu'il
s'adjoint ou se substitue dans l'exécution de son contrat n'est pas juridiquement, au vrai sens du
responsabilité du fait d'autrui. Cette expression est correcte en matière délictuelle dans la
mesure où une personne, qui n'a pourtant commis aucune faute délictuelle, est rendue
responsable du dommage causé par la faute ou le fait d'un tiers. Or cette observation n'est plus
vérifiée en matière contractuelle. Certes, la violation du contrat dont le débiteur est rendu
responsable est due au fait matériel d'un tiers, à l'intervention d'un tiers dans l'exécution du
contrat. Néanmoins, le fait du tiers à l'origine du dommage réalise en même temps la violation
de l'obligation contractuelle issue du contrat liant le débiteur au créancier. Ce dernier a bien
commis une faute contractuelle au sens de l'inexécution de l'obligation dont il était tenu en vertu
de son contrat. L'inexécution de l'obligation, quelle que soit son origine, même si elle est due
au fait d'un tiers, rend le débiteur personnellement fautif. Etant tenu d'exécuter, l'inexécution
constitue le débiteur en faute, même si elle résulte du comportement d'un tiers, non constitutif
de force majeure. La responsabilité contractuelle est donc personnelle et non du fait d'autrui.
La faute reste le seul fait générateur de responsabilité contractuelle.87
Le résultat de cette analyse est mieux explicite dans le cadre de l’arrêt de la Cour de cassation
marocaine, dossier nº 845/3/3/2009, rendu le 18 Mars 2010. En l’espèce, Il s’agit d’un
détournement de fonds du directeur d’une banque, dont la responsabilité contractuelle de cette
dernière peut être engagée suite à la faute de son directeur. Dans ce cas, la victime a le choix de
suivre le fondement de la responsabilité contractuelle de la banque du fait de son préposé ( le
directeur) ou délictuelle. En effet, la responsabilité contractuelle est fondée sur la violation
d'une obligation contractuelle et la responsabilité délictuelle trouve son fondement dans la
violation d'une obligation légale qui prend la forme de l’abstention de nuire à autrui, lorsque
l'acte constitue à lui seul, une violation d'une obligation légale indépendamment de l'existence

86
Droit Civil, Les Obligations, La Responsabilité civile extracontractuelle, Mireille Becache-Gibeili, Tome V 1ère
édition, Economica Delta, 2011 :

87
Arrêt de la Cour de cassation marocaine, nº 424, dossier nº 845/3/3/2009, rendu le 18 Mars 2010
de contrat ou non et représente en même temps une violation d'une obligation contractuelle, la
partie lésée a le choix d’intenter une action en justice pour dommages- intérêts conformément
aux règles de la responsabilité délictuelle ou contractuelle. 88
Tant qu'il est prouvé que les sommes ont été détournées par le substitut de la banque, ce dernier
est alors responsable dans de l’article 85 du DOC, et de ce fait, la partie lésée a le droit d'intenter
son action dans le cadre des règles de la responsabilité délictuelle au lieu de recourir à une
action en responsabilité contractuelle tant que le dommage réclamé l'est et s'il constitue un
manquement à l'obligation contractuelle résultant du contrat de dépôt, il s’agit également d’un
manquement à l'obligation légale qui incrimine l'acte de détournement de fonds même en cas
d’absence dudit contrat.
Sous cette réserve, l'expression de responsabilité contractuelle du fait d'autrui est utilisée, par
commodité de langage et par emprunt à la responsabilité délictuelle, pour désigner les
hypothèses particulières où la faute du débiteur, à savoir l'inexécution de l'obligation dont il
était tenu en vertu de son contrat, résulte de l'intervention d'un tiers, substitut ou auxiliaire. Mais
elle ne constitue pas alors, comme en matière délictuelle, un fait générateur de responsabilité
autonome. Ce n'est qu'une variété de la faute contractuelle. L'expression étant ainsi précisée,
elle trouve largement à s'appliquer en droit positif, tout débiteur étant contractuellement
responsable du fait de tous les tiers qu'il introduit dans l'exécution du contrat, qu'il s'agisse de
substituts ou d'auxiliaires, préposés ou non préposés.

B. L'existence d'un principe général de responsabilité contractuelle du fait des


auxiliaires et substituts
Le législateur marocain se démarque par rapport au législateur français par son adoption à
l'article 233 du code des obligations et des contrats qui dispose : «Le débiteur répond du fait et
de la faute de son représentant et des personnes dont il se sert pour exécuter son obligation,
dans les mêmes conditions où il devait répondre de sa propre faute, sauf son recours tel que de
droit contre les personnes dont il doit répondre » en consacrant dans cette hypothèse une
cohérence avec les règles générales et bénéficiant de la polémique qui faisait couler beaucoup
d’encre en France et qui a produit d'importantes innovations judiciaires qui ont été un reflet des
exigences de l’article 233 du DOC. 89
Par l’adoption du législateur marocain de cet article, ses exigences vont pousser les
établissements commerciaux et industriels à resserrer le contrôle sur leurs employés et leurs
subordonnés afin d'éviter la négligence et le laxisme dans la prestation des services et la mise
en œuvre des obligations, car ces institutions sont responsables de leurs subordonnés pour les
mêmes fautes personnelles.
Ainsi, lorsqu’on permet au débiteur de s’exonérer de sa responsabilité pour les dommages dus
aux fautes de ses assistants, une exigence générale sera alors violée. Si, en vertu de l’article 232
du DOC, il est interdit au débiteur d'inclure une clause qui exonère sa responsabilité en cas de

88
L’arrêt de la Cour de cassation marocaine, dossier nº 845/3/3/2009, rendu le 18 Mars 2010.
89
2004 ‫ الرباط‬- ‫مطبعة األمنية‬: ‫االتفاق على تعديل أحكام المسؤولية العقدية في القانون المغربي والمقارن إدريس فتاحي‬
faute grave ou de fraude, ce qui va permettre l’ouverture d’une grande porte à l'intérieur de
laquelle il élude sa responsabilité personnelle dans le sens où il confie à ces adjoints l'exécution
de ses obligations personnelles, de sorte que même si leurs actes sont entachés de faute grave
et de dol, le débiteur est dégagé de sa responsabilité ou de son obligation d'indemnisation dès
lors qu'il a prévu dans le contrat une condition d'exonération de responsabilité pour fautes de
ses substituts.90
En revanche, le Code civil français ne définit pas en termes généraux la responsabilité du
débiteur du fait des personnes qu'il se substitue ou s'adjoint dans l'exécution de son contrat.
Seuls des textes spéciaux, relatifs à un type particulier de contrat, mettent à la charge du débiteur
les conséquences de la mauvaise exécution imputable à un tiers. Il en est ainsi de l'article 1735
du Code civil qui rend le preneur responsable du fait de ses sous-locataires ou de l'article 1797
qui engage l'entrepreneur pour les dommages causés par les personnes qu'il emploi. En présence
de textes disparates, la question s'est posée de savoir s'il convenait de retenir une interprétation
a contrario et refuser toute généralisation, ou adopter un raisonnement par analogie, permettant
de dégager un principe général de responsabilité contractuelle pour le fait des personnes que le
débiteur introduit dans l'exécution du contrat.
Prenant appui sur le caractère strictement personnel de la responsabilité en droit français, le
doyen Rodière était opposé, en 1952, à toute tentative de généralisation des hypothèses
particulières de responsabilité contractuelle du fait d'autrui. Cette position est restée toutefois
isolée et la quasi-unanimité de la doctrine contemporaine se prononce en faveur de l'admission
d'un principe général de responsabilité du débiteur du fait de ses auxiliaires et substituts. La
justification de ce principe réside dans le respect de la parole donnée et la force obligatoire du
contrat. En effet, le débiteur ne devrait pas pouvoir se délier unilatéralement de son obligation
en la faisant exécutée par un tiers. Il ne devrait pas avoir le loisir de nier son engagement et de
déjouer les prévisions du créancier en faisant appel aux services d'un tiers pour l'exécution de
son contrat. La force obligatoire du contrat l'oblige à répondre des actes de la personne qui
exécute pour son compte, à ses côtés ou à sa place. Par ailleurs, cette analyse est confortée par
les principes relatifs à l'exonération du débiteur. En effet, le fait d'un tiers que le débiteur a
volontairement introduit dans l'exécution du contrat ne peut être constitutif d'une cause
étrangère exonératoire, faute de présenter le caractère d'extériorité.91
C'est la raison pour laquelle la jurisprudence a pu dégager, en matière contractuelle, à partir de
textes disparates, un principe général de responsabilité du fait des tiers introduits par le débiteur
dans l'exécution du contrat. La Cour de cassation s'est nettement prononcée en faveur de
l'admission d'un tel principe, dans un arrêt du 18 octobre 1960. Elle a, en l'espèce, retenu la
responsabilité d'un chirurgien du fait du médecin anesthésiste dont la piqûre avait provoqué une
paralysie du patient.
Le domaine d'application de ce principe est assez large et recouvre les dommages causés par
tous tiers introduits dans l'exécution du contrat, qu'ils soient substituts ou auxiliaires. Les
substituts sont les personnes chargées d'exécuter à la place du débiteur tout ou partie des
obligations assumées vis-à-vis du créancier. En d'autres termes, le débiteur principal reste
responsable vis-à-vis du créancier du fait des sous-débiteurs. Quant aux auxiliaires, ce sont les

90
Ibid
91
Droit Civil, Les Obligations, La Responsabilité civile extracontractuelle, Mireille Becache-Gibeili, Tome V 1ère
édition, Economica Delta, 2011
personnes qui assistent le débiteur dans l'exécution de son obligation. Il peut s'agir non
seulement de préposés mais également d'auxiliaires non soumis au débiteur par un lien de
subordination. C'est notamment le cas d'un membre d'une profession libérale qui assiste un
confrère dans l'exécution de l'opération confiée par le client. L'une des applications les plus
fréquentes de ce principe concerne le contrat médical, le chirurgien étant responsable des fautes
de toutes les personnes auxiliaires qui collaborent à l'équipe chirurgicale.92
Un arrêt rendu par la première chambre civile le 26 mai 1999 a pourtant semblé remettre en
cause la généralité du principe selon lequel le débiteur est responsable du fait de tous ses
auxiliaires, qu'ils soient ou non préposés. La Cour de cassation estime, à travers cet arrêt, qu'une
clinique ne peut être contractuellement responsable à l'égard du patient du fait d'un médecin
non-salariés. En dépit des apparences, la décision ne remet pas en cause le principe selon lequel
le débiteur est responsable de tous ses auxiliaires que le médecin peut exercer au sein d'une
clinique selon deux modalités, celle du contrat de travail d'une part et celle du contrat d'exercice
à titre libéral d'autre part. Dans le premier cas, lorsque le médecin est salarié, le patient n'est
contractuellement lié qu'à la clinique, le contrat médical étant directement conclu entre celle-ci
et le patient. C'est alors que la clinique fait appel au médecin en tant qu'auxiliaire préposé. Ce
dernier se borne à exécuter une prestation contractuelle dont la clinique est débitrice en vertu
du contrat qui la lie au malade. Il est donc normal que la clinique soit responsable de
l'inexécution de ce contrat, même si elle est due au fait d'un tiers, le médecin. Dans le second
cas, en revanche, le patient est partie à deux contrats distincts, le contrat d'hospitalisation et de
soins qui le lie à la clinique et le contrat médical stricto sensu qui le lie directement au médecin.
Par conséquent, dans cette hypothèse, le contrat médical n'engage pas la clinique, mais le seul
médecin exerçant en son sein à titre libéral. Il n'y a donc aucune raison de rendre la clinique
responsable de l'inexécution d'une obligation à laquelle elle n'était pas contractuellement tenue.
N'étant pas liée au patient par le contrat médical, elle n'a pu faire appel au médecin en tant
qu'auxiliaire pour l'aider à exécuter les obligations qui en sont issues. Le médecin n'a pas, dans
cette hypothèse, la qualité d'auxiliaire. Il est seul débiteur de l'obligation issue du contrat
médical le liant directement au patient. Cet arrêt n'est donc pas une exception au principe
général selon lequel on est responsable du fait de ses auxiliaires, même non préposés.93
Le principe dégagé par la Cour de cassation le 18 octobre 1960 à l'occasion d'un contrat médical,
a par la suite été appliqué à toutes sortes de contrats. Plus récemment, la loi de confiance dans
l'économie numérique du 21 juin 2004 a appliqué ce principe à la responsabilité des vendeurs
et des prestataires de services professionnels à l'égard des consommateurs lorsqu'ils utilisent
des techniques de communication à distance. Selon l'article 15-II de la loi « le professionnel est
responsable de plein droit à l'égard du consommateur de la bonne exécution des obligations,
résultant du contrat conclu à distance, que ces obligations soient à exécuter par le professionnel
qui a conclu ce contrat ou par d'autres prestataires de service, sans préjudice de son droit de
recours contre ceux-ci ». Le même résultat aurait pu être atteint par la jurisprudence, dans le
silence de la loi, par application du principe général selon lequel le débiteur est responsable de
l'exécution des obligations issues de son contrat, même lorsque l'inexécution est le fait d'un tiers
substitut ou auxiliaire. Pareil principe, qui découle nécessairement de la force obligatoire des
contrats, n'est que le reflet de la responsabilité pour faute et n'a pas besoin d'un support législatif

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Ibid
pour exister. En revanche, une disposition légale est nécessaire pour consacrer, de façon
exceptionnelle, une véritable responsabilité contractuelle pour autrui.94

Section 2 : L’applicabilité de la responsabilité contractuelle du fait d’autrui

Il est nécessaire d’étudier dans un premier temps les cas exceptionnels de la responsabilité
contractuelle du fait d’autrui, avant de se pencher vers les cas d’exonération du responsable.

I- Les cas exceptionnels de la responsabilité contractuelle du fait d’autrui :

Il arrive, de façon exceptionnelle, que la loi reconnaisse la responsabilité d'un débiteur pour le
fait de tiers qui ne sont ni ses substituts ni ses auxiliaires. Loin d'aider le débiteur ou de se
substituer à lui pour l'exécution d'obligations que ce dernier avait personnellement assumées à
l'égard de la victime, le tiers intervient pour exécuter une obligation nouvelle issue d'un autre
contrat. Dans ce cas, le fait dommageable du tiers ne réalise pas la violation d'une obligation
issue du contrat liant le responsable à la victime. L'obligation dont la violation par le tiers cause
un dommage n'a pas été personnellement assumée par le responsable. Le fait du tiers ne
constitue pas le contractant en faute. On est alors en présence d'une véritable responsabilité
contractuelle pour autrui, autonome par rapport à la responsabilité pour faute. 95
En effet, n'étant pas juridiquement tenu de l'obligation violée par le tiers, le responsable n'a, par
définition, commis aucune faute contractuelle. En d'autres termes, l'expression responsabilité
contractuelle du fait d'autrui » doit être réservée, pour être correcte, aux hypothèses où une
personne est responsable, à l'égard de son contractant, de la violation par un tiers d'une
obligation à laquelle elle n'était pas personnellement tenue, en vertu de son propre contrat. Ces
hypothèses sont rares. Elles concernent essentiellement la responsabilité des intermédiaires du
fait de la violation des contrats qu'ils concluent avec des tiers, pour les besoins de leurs clients.
C'est ainsi que le commissionnaire de transport est responsable, en vertu des articles L.132-4 et
L.132-5 du Code de commerce, de l'inexécution des contrats de transport conclu par ses soins.
De même, aux termes de l'article 23 de la loi du 13 juillet 1992, l'agence qui organise des
voyages et des séjours est responsable de plein droit de la bonne exécution des obligations
résultant des contrats conclus par ses soins, notamment avec les hôteliers ou les transporteurs.
De la sorte, l'agence est responsable alors qu'elle ne s'est pas personnellement engagée à fournir
la prestation à l'origine du dommage, qu'il s'agisse du transport ou de l'hébergement dans un
hôtel. Les tiers dont le fait est à l'origine du dommage ne sont ni ses substituts ni ses auxiliaires.
On est en présence d'une véritable responsabilité contractuelle pour autrui. Ce constat soulève
la question du régime de cette responsabilité autonome. En effet, il n'est plus question de se
référer au contenu de l'obligation assumée par le débiteur responsable, pour vérifier si elle est
de moyens ou de résultat, pareille obligation n'existant pas. La logique commanderait de se
référer au contenu de l'obligation assumée par le tiers dont la violation a causé le dommage.

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Droit des obligations, Christian LAPOYADE DESCHAMPS, Manuel Université de droit, ellipses, 2008
Pourtant, la Cour de cassation a accepté d'engager la responsabilité de l'agence alors que
l'obligation assumée par le tiers n'était que de moyens et qu'aucune faute n'avait été établie à
l'encontre de ce dernier. Cela signifie que la responsabilité contractuelle du fait d’autrui ne
suppose pas la faute contractuelle du tiers. Un simple fait causal suffit, à l’instar de la
responsabilité des parents du fait de leurs enfants mineurs.96
II. L’exonération du responsable :

Les possibilités d'exonération du débiteur dépendront, comme dans la responsabilité


contractuelle du fait personnel, du point de savoir s'il est tenu d'une obligation de résultat ou de
moyens.
Lorsqu'il invoque une « cause étrangère notamment s'il est tenu d'une obligation de résultat - il
doit classiquement prouver les caractères de la force majeure. La particularité de la
responsabilité du fait d'autrui tient à ce que, outre l'irrésistibilité et l'imprévisibilité (ou
l'inévitabilité), le débiteur devra établir que la cause du dommage ne provient pas d'une
personne dont il répond, c'est-à-dire d'une personne qu'il a volontairement introduite dans
l'exécution. Il en résulte certaines restrictions qui imposent l'identification des personnes
participant à l'exécution du contrat. Ces personnes peuvent être des préposés », généralement
des salariés, ou bien des « collaborateurs » qui aident le débiteur à accomplir sa tâche, ou bien
encore des « substituts » ou sous-traitants choisis par celui-ci sans le consentement du client et
qui exécutent tout ou partie de ses obligations: répondant de ces exécutants, le débiteur ne peut
se prévaloir de leur fait pour s'exonérer. Parfois la loi l'oblige à répondre aussi d'autres
personnes (par ex., le bailleur qui garantit le fait de ses locataires à l'égard de ses colocataires :
ou le locataire qui répond des personnes de sa maison »). Mais le débiteur ne répondra pas du
fait de personnes qui, bien que participant à l'exécution, lui ont été imposées par son
cocontractant ou par un tiers (par ex., l'anesthésiste choisi par le patient ou imposé au chirurgien
par le service public). A plus forte raison ne sera-t-il pas responsable du fait de tiers qui se sont
immiscés contre son gré dans l'exécution, à moins bien sûr que la loi n'en dispose autrement
(par ex., pour l'hôtelier qui répond des vols commis au préjudice de ses clients). 97
La doctrine a déduit de cette exigence un caractère d'extériorité de la cause étrangère par rapport
à l'entreprise du débiteur. Cela est exact dans la mesure où cette cause doit provenir du fait d'un
véritable tiers. Mais il faut réserver toutefois les circonstances internes à l'agent (maladie,
syncope...), écartant à la fois sa responsabilité personnelle et celle du débiteur, si elles présentent
les caractères de la force majeure. La jurisprudence a fait des applications rigoureuses de
l'extériorité de la cause étrangère. Ainsi elle n'a pas admis la SNCF à s'exonérer en cas
d'accident dû à un attentat criminel tant que l'auteur n'était pas connu, car il pouvait s'agir d'un
préposé. De même, à propos de la grève du personnel, elle n'a accueilli le moyen tiré de la cause
étrangère que si l'origine de la grève est extérieure à l'entreprise (par ex.: grève nationale
déclenchée par les grandes centrales syndicales), non si elle est motivée par un conflit interne
(par ex. : refus de l'employeur de satisfaire aux revendications de son personnel); à moins peut-

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être que les circonstances laissent subsister l'irrésistibilité et l'imprévisibilité (par ex. : brutalité
et absence de préavis).
Quant à « l'abus de fonction » du préposé, la jurisprudence hésite à l'admettre comme
circonstance exonératoire, faute de satisfaire aux caractères de la force majeure. Il ne semble
pas, en particulier, d'après la jurisprudence majoritaire, que le fait d'agir hors des fonctions
suffise à caractériser l'extériorité, car on exige la preuve d'un fait dommageable n'émanant pas
d'une personne dont le débiteur répond. Tout au plus a-t-on parfois admis que le dommage causé
par un préposé dans des conditions qui, en matière délictuelle, exonéreraient le commettant, est
extérieur à l'exécution du contrat. C'est alors à travers l'exigence d'un dommage résultant de
l'inexécution, c'est-à-dire celle d'un lien de causalité entre le dommage et l'exécution, que l'on
en vient à réintroduire l'idée d'exonération pour abus de fonction.98

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Droit des obligations, Christian LAPOYADE DESCHAMPS, Manuel Université de droit, ellipses, 2008
Conclusion :
La responsabilité est un thème philosophique majeur selon Marie Anne Frison-Roche , dans le sens
où l’étendue de son champ d’application ne cesse de s’élargir, invitant les auteurs à débattre son
évolution et la jurisprudence à pousser sa réflexion.

Bien que la finalité soit unanime, s’agissant notamment de mettre les intérêts de la victime en priorité
et réparer le préjudice qu’il a subi du fait de son auteur, ses instruments diffèrent selon la situation.

L’origine de la responsabilité délictuelle ou contractuelle dépend de l’acte personnel de la personne


dont on engage sa responsabilité, cependant, la prépondérance de la théorie du risque ainsi des
activités humaines ont poussé le législateur à prévoir d’autres instruments afin de garantir la
réparation du préjudice causé à la victime, dont la responsabilité du fait d’autrui en fait l’exception.

Notre étude a permis de concevoir la responsabilité du fait d’autrui dans ces deux terrains, le terrain
délictuel et celui contractuel, la problématique qui a été soulevée en principe est le fondement
législatif de chacune en le témoignant par la jurisprudence et la position du droit français dont nous
estimons être plus contraignant que notre droit marocain. On pourra s’interroger alors, à ce stade, si
le droit marocain continuera à s’inspirer du droit français et changera son régime actuel vers un
régime plus stricte et contraignant ?
Bibliographie :

Ouvrages :

- Mireille Becache-Gibeili Droit Civil, Les Obligations, La Responsabilité civile extracontractuelle,


Tome V 1ère édition, Economica Delta, 2011

- Christian LAPOYADE DESCHAMPS, Droit des obligations, Manuel Université de droit, ellipses,
2008

- Farid El Bacha, Droit des Obligations, Actes juridiques et faits juridiques, 2e édition, 2020.

- ‫ إدريس فتاحي‬: ‫ االتفاق على تعديل أحكام المسؤولية العقدية في القانون المغربي والمقارن‬:2004‫مطبعة األمنية‬

- Muriel Fabre- Magnan, Droit des obligations, responsabilité civile et quasi-contrats, Press
Universitaires de France, 2ème édition : 2010, Aout

- Jerome Julien, Droit des obligations, larcier, 2e édition, 2014

- Corinne RENAULT-BRAHINSKY , Droit des obligations, 2ème édition, Gualino Editeur

- PHILIPPE MALAURIE, LAURENT AYNES,PHILIPPE STOFFEL MUNCK, Droit des obligations, 7ème
édition , 1 aout 2015, LGDJ.

- Jacque Flour, Droit Civil, 2.Les obligations, 13e éditions, Sirey, 2009

-Marie-Thérèse Kenge, Droit civil, Les obligations, l’Harmattan, 2017

- ‫ بالرباط‬،‫ توزيع مكتبة دار االمان‬،٢٠١٩،‫الطبعة السابعة‬، ‫المسؤولية المدنية‬،‫عبد القادر العرعاري‬.‫د‬

Articles :

- Beurdeley Paul. La responsabilité des instituteurs. In: La revue pédagogique, tome 21, Juillet-
Décembre 1892. pp. 122-138

Loi :

- Le Code civil Français

- Le Dahir des obligations et des contrats

Jurisprudence :

- Trib. 1ère inst. Casablanca, 8-1-1932, G.T.M., 1932, n°485, p. 82, CAR., 10-V-1944, R.A.C., 1.
XIII, p. 456

- C.S. Civ., 26-1-1960, R.A.C.S., T. 1, p. 137

- Cass. Crim., 12-VII-1946, R.A.C., T. XIV, p. 220

- CAR., 21-X-1959, R.M.D., 1961, p. 401

- C.S. Crim., 26-V-1960, R.A.C.S., T. 1, p. 287


- CAR., 23-VI1959, G.T.M., 1959, n°1257, p. 94

- Trib. 1ére Inst. Kenitra, 17-IV-1951, R.M.D., 1952, p. 133-136; CAR., 13-VII-1951, R.M.D., 1952,
p. 133

- C.S. Crim., 18-11-1960, R.A.C.S., T. 1, p. 219

- C.S. Civ., 26-1-1960, R.A.C.S., T. 1, p. 137

- CS Soc.18-3-1975, RJL, 1977, n°126, p.20

- CS Civ, 26-I-1963, RMD, 1963, p.408.

- CAR, 31-III-1950,RAC, T.XVI, p.236-237

- CAR., 21-VI-1960, G.T.M., 1961, n° 1286, p. 27

- Arrêt Costedoat, 25/2/2000, JCP, 2000, II.10295, note Billiau

- Affaire Leblanc, le 23 janvier 1892, un jugement de la 10e chambre du tribunal de la Seine.

- CS, 26 mai 1994, Arrêts de la cour suprême, 1958- 1996, Publications de la Cour Suprême,
1997, p.229

- Arrêt de la Cour de cassation française portant numéro 21-82.535 du 2 février 2022

- arrêt du 12 mai 2009, portant numéro 07/01901, la Cour d’appel de Grenoble

- arrêt marocain du 20 février 2014, portant nº180, dossier administratif nº 969/4/2/2012

- arrêt de la Cour de cassation marocaine, du 13 janvier 2015, dossier nº 1524/1/3/2013

- arrêt du 12 décembre 2008, portant numéro 296982, du Conseil d’Etat en France, 3e et 8e


sous-sections réunies

- Arrêt de la Cour de cassation marocainñye, nº 424, dossier nº 845/3/3/2009, rendu le 18


Mars 2010

- l’arrêt de la Cour de cassation marocaine, dossier nº 845/3/3/2009, rendu le 18 Mars 2010.

- Cass Crim, 15-4-1983, JCS, 1984, n°33-34, p.166

- Civ.2e, 20 janvier 2000, nº98-14479

- Crim, 8 Février 2005, nº 03-87447.

- CAR, 8-11-1952, RMD, 1954, p.181-182 note Rodière.

- C.A.R., 9-11-1953, R.MD., 1953, pp.374-378, note R. Rodière, CS, Crim.20-2-1964, RACS, T.4,
p.200

- Civ.2ème, 16 juillet 1969, Bull Civ, II, n°255, p 183, RTDCiv, 1970 .575, obs G .Durry

- Civ 2ème, 10 mai 2001, Bull Civ II, n°96, JCP 2001, II, 10613, note J/Mouly.

- C.A.R. 24-1-1958, R.M.D., 1961, p. 133-135, note R. Rodière ; R.A.C., T. XIX, p.390 et CAR, 15-
7-1938, RAC, T.IX, p 597

- CS Crim, 3-XII-1964, RACS, T.IV, p 302


- Arrêt Fullenwarth, Ass. Plén. 9 mai 1984, D 1984.525

- arrêt « Bertrand » (Civ. 2ème, 19 février 1997, Bull. n° 55

- Civ 2ème, 10 mai 2001, Bull Civ II, n°96, JCP 2001, II, 10613, note J /Mouly.

Webographie :

- https://www.autonome-solidarite.fr/articles/la-responsabilite-civile-des-personnels-
deducation/#sources

- https://www.9anonmaroc.com/2019/11/blog-post_16.html

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