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Journal de pédiatrie et de puériculture (2019) 32, 117—127

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ScienceDirect
www.sciencedirect.com

ARTICLE EMC

Exploration des déficits immunitaires


primitifs夽
C. Thomas a,∗, M. Audrain b

a
Service d’hématologie et d’immunologie pédiatrique, Hôpital Mère-Enfants, CHU de Nantes,
7, quai Moncousu, 44000 Nantes, France
b
Laboratoire d’immunologie, CHU de Nantes, 9, quai Moncousu, 44000 Nantes, France

MOTS CLÉS Résumé Les déficits immunitaires primitifs sont des maladies génétiques qui touchent
Déficit immunitaire ; l’immunité adaptative ou innée. À ce jour, environ 300 gènes impliqués sont connus. Les défi-
Bilan biologique ; cits immunitaires primitifs sont classés en fonction des cellules atteintes en déficits combinés,
Infections ; humoraux, anomalies des cellules phagocytaires, déficits de l’immunité innée, défauts de régu-
Immunité humorale ; lation de la réponse immune. Les manifestations révélatrices des déficits immunitaires primitifs
Immunité cellulaire sont surtout les infections mais d’autres signes d’appel sont possibles : allergies sévères, cas-
sure de la courbe staturopondérale, manifestations auto-immunes, cancers ou manifestations
syndromiques associées. Dans la plupart des cas, les éléments de l’interrogatoire, l’examen
clinique et les types de complications observées, associées à des examens biologiques simples
de première intention permettent d’orienter le diagnostic sur un type de déficit immunitaire et
de cibler les examens à réaliser en deuxième intention. Les examens biologiques de première
et de seconde ligne sont souvent complétés par des analyses génétiques qui permettent de
confirmer l’anomalie moléculaire suspectée et de proposer un conseil au sein de la famille.
© 2019 Publié par Elsevier Masson SAS.

Introduction
Les déficits immunitaires primitifs ou héréditaires sont des
夽 Grâce au partenariat mis en place en 2010 entre le Jour- maladies génétiques touchant l’immunité adaptative ou
nal de Pédiatrie et de Puériculture et l’EMC, les articles de innée. Ils sont souvent diagnostiqués à l’âge pédiatrique
cette rubrique sont issus des traités EMC. Celui-ci porte la men- mais également à l’âge adulte [1] (Fig. 1).
tion suivante : M. François. Mastoïdites du nourrisson et de Ils sont liés à des anomalies génétiques, avec des modes
l’enfant. EMC—Pédiatrie—2016 [Article 4-061-G-10]. Nous remer- de transmission le plus souvent liés à l’X ou autosomique
cions l’auteur qui a accepté que son texte, publié initialement dans
récessif. À ce jour, environ 300 gènes sont connus.
les traités EMC, puisse être repris ici.
∗ Auteur correspondant. Selon le comité d’experts pour les déficits immunitaires
Adresse e-mail : caroline.thomas@chu-nantes.fr (C. Thomas). primitifs de l’International Union of Immunological Societies

https://doi.org/10.1016/j.jpp.2019.03.001
0987-7983/© 2019 Publié par Elsevier Masson SAS.
118 C. Thomas, M. Audrain

Figure 1. Âge au diagnostic des déficits immunitaires primitifs


(d’après [1]). Figure 2. Classification des déficits immunitaires primitifs
(d’après [1]).
(IUIS) [2,3], les déficits immunitaires primitifs sont classés
en fonction des cellules atteintes en :
• déficits combinés de l’immunité cellulaire et humorale verrues, hypogammaglobulinémie, infections, myéloka-
dont les déficits immunitaires combinés sévères et les texis (WHIM) ;
déficits immunitaires combinés moins sévères ; • les déficits du complément ;
• déficits combinés avec d’autres caractéristiques asso- • les maladies auto-inflammatoires ;
ciées comme le syndrome de Wiskott-Aldrich, l’ataxie- • d’autres déficits non identifiés.
télangiectasie, le syndrome de DiGeorge, le cartilage hair
hypoplasia ou le syndrome d’hyperimmunoglobulines E Ces déficits sont rares. La fréquence est estimée à 1 sur
(IgE), etc. ; 5000 naissances. Leur répartition est résumée sur la Fig. 2
• déficits humoraux : comme l’agammaglobulinémie de Bru- [1].
ton, ou les déficits immunitaires communs variables, etc. ; Les manifestations révélatrices des déficits immunitaires
• anomalies de régulation du système immunitaire comme primitifs sont surtout des infections sévères et/ou réci-
la lymphohistiocytose familiale, le syndrome de Pur- divantes, ou causées par des germes opportunistes, mais
tillo (X-linked lymphoproliferative [XLP]), le syndrome d’autres signes d’appel et d’autres complications sont
de polyendocrinopathie auto-immune de type 1 (autoim- possibles : allergies sévères, cassure de la courbe sta-
mune polyendocrinopathy-candidiasis-ectodermal dys- turopondérale, manifestations auto-immunes, cancers ou
trophy [APECED]), le syndrome d’immunodérégulation, manifestations syndromiques associées.
polyendocrinopathie, entéropathie auto-immune (syn- Un examen clinique physique, un interrogatoire et des
drome IPEX), le syndrome lymphoprolifératif associé à une examens biologiques simples permettent habituellement de
auto-immunité (ALPS) ; poser le diagnostic et de préciser le type de déficit immu-
• déficits congénitaux des cellules phagocytaires comme nitaire. Des examens spécialisés sont ensuite réalisés pour
la neutropénie congénitale, les déficits en molécules préciser les anomalies moléculaires et génétiques.
d’adhésion ou la granulomatose septique chronique (chro- La prise en charge des déficits immunitaires primitifs
nic granulomatous disease [CGD]) ; dépend du type de déficit et de sa gravité clinique. Elle
• déficits de l’immunité innée, comme la candidose va de la substitution en immunoglobulines à l’allogreffe
cutanéomuqueuse chronique, ou le syndrome de de moelle osseuse pour les formes les plus graves. Elle
Exploration des déficits immunitaires primitifs 119

s’associe souvent à une antibiothérapie continue, à une antigènes hautement spécifiques et uniques. Le récepteur
prise en charge respiratoire et nutritionnelle. de l’antigène sur le lymphocyte T est le T-cell receptor
(TCR) et sur le lymphocyte B est une immunoglobuline de
surface (B-cell receptor [BCR]). La diversité des récepteurs
Différentes fonctions du système aux antigènes est générée lors du développement lympho-
immunitaire cytaire par le réarrangement du récepteur. Il s’agit d’une
recombinaison aléatoire de plusieurs dizaines de segments
Immunité innée géniques codés dans le génome (V, D, J), spécifique et unique
pour chaque lymphocyte, mais irréversible, permettant à la
Le système de l’immunité innée ou naturelle constitue la descendance d’exprimer la même spécificité. Ce système
première ligne de défense contre les infections. Il repose de recombinaison aboutit à une diversité de reconnaissance
sur le complément et sur des cellules non éduquées à la quasiment infinie appelée le répertoire lymphocytaire. Lors
reconnaissance d’un antigène en particulier. Ce sont les cel- de l’interaction avec la cellule présentatrice d’antigène,
lules phagocytaires comme les polynucléaires neutrophiles, le lymphocyte reçoit d’autres informations qui orientent sa
les macrophages et les lymphocytes natural killer (NK). réponse vers un profil adapté. En fonction du type de molé-
Les cellules phagocytaires reconnaissent des motifs molé- cules présentatrices (complexe majeur d’histocompatibilité
culaires particuliers exprimés par les agents pathogènes de classe I ou II), les lymphocytes CD4 ou CD8 grâce
via des molécules de reconnaissances comme les toll like à l’engagement d’autres molécules de surface peuvent
receptor (TLR). La réponse déclenchée est à la fois une pha- s’activer, proliférer, se différencier en lymphocytes effec-
gocytose de l’agent pathogène et la sécrétion de molécules teurs sécréteurs de cytokines ou cytotoxiques capables de
solubles permettant l’activation du système immunitaire, tuer une cellule infectée par un virus. Les lymphocytes B
le recrutement d’autres cellules sur le site de l’infection subissent aussi un processus d’activation et de différen-
et le déclenchement de la réponse inflammatoire. Les ciation pour aboutir à la production d’anticorps de façon
polynucléaires neutrophiles (PNN) et les macrophages pha- T-dépendante ou T-indépendante. Ces anticorps assurent
gocytent les agents pathogènes et les détruisent dans des la destruction des pathogènes par neutralisation (cytotoxi-
phagolysosomes par différents mécanismes bactéricides et cité cellulaire à médiation anticorps [ADCC]). Un certain
bactériostatiques, dont la production de dérivés oxygénés. nombre de lymphocytes vont survivre pendant très long-
Le système du complément est un ensemble de protéines temps et constituer un pool de cellules mémoires. Cette
qui participe aux mécanismes de défense naturels de l’hôte mémoire immunitaire va permettre une réponse secondaire
contre l’infection, au maintien en solution et à l’élimination plus rapide, plus puissante et plus affine lors d’un contact
des complexes immuns. Lors de l’infection, le complément ultérieur avec l’antigène. La réponse adaptative est au final
peut être activé selon trois voies différentes : classique, une réponse moins rapide que la réponse innée mais plus
alterne et la voie des lectines. Cette activation va permettre efficace car plus spécifique, avec une amplification de la
le recrutement de nouveaux phagocytes, l’opsonisation ou réponse qui peut être importante, et dotée d’une mémoire
la lyse bactérienne et cellulaire par le complexe d’attaque qui peut se maintenir de nombreuses années.
des membranes. Il participe également à la réaction inflam- La diversité des mécanismes de défense (phagocytose,
matoire. anticorps, lymphocytes cytotoxiques par exemple) permet
Les lymphocytes NK grâce à la présence de certains à l’organisme de s’adapter aux différents pathogènes. En
récepteurs reconnaissent de façon rapide et non spécifique effet, certains nécessitent pour se développer d’envahir une
les cellules infectées ou tumorales et sont capables de les cellule hôte alors que d’autres peuvent proliférer en dehors
lyser directement via la sécrétion d’enzymes comme la per- d’une cellule. Ainsi les germes extracellulaires peuvent
forine. Ils peuvent également produire certaines cytokines être neutralisés par phagocytose ou par les anticorps alors
en grande quantité. La réponse de l’immunité innée est que les germes intracellulaires comme les virus nécessitent
immédiate, peu spécifique et ne présente pas de mémoire une réponse adaptative T cytotoxique. Ainsi le type de
immunitaire. pathogène observé dans des infections à répétition peut-
il orienter sur le type de déficit. Par exemple, une infection
Système immunitaire adaptatif fongique de type candidose, une pneumocystose, des infec-
tions virales orientent plutôt sur un déficit en lymphocytes
Il est constitué des lymphocytes T et des lymphocytes T. Les infections à germes encapsulés évoquent plutôt un
B. La réponse adaptative est initiée par l’ingestion d’un déficit humoral.
agent pathogène par une cellule dendritique immature au Les déficits immunitaires primitifs sont la conséquence de
niveau du tissu infecté. La cellule dendritique immature mutations dans les gènes impliqués dans le développement
joue un rôle de sentinelle du système immunitaire. Quand et/ou la fonction des cellules du système immunitaire.
elle détecte un agent pathogène, elle le capture, le trans-
porte vers les organes lymphoïdes secondaires et apprête
l’antigène sous forme de fragments peptidiques, migre vers Évoquer un déficit immunitaire
les organes lymphoïdes secondaires. Ce processus de migra-
tion et de maturation de la cellule dendritique aboutit Un déficit immunitaire doit être recherché devant un ou
à la présentation des antigènes peptidiques aux lympho- des signes cliniques d’alerte (Tableau 1). Il s’agit essen-
cytes grâce notamment aux molécules du complexe majeur tiellement d’infections mais cela peut être également
d’histocompatibilité. Pour reconnaître les antigènes, les des antécédents familiaux de décès précoces dus à des
lymphocytes expriment à leur surface des récepteurs aux infections, une cassure de la courbe staturopondérale,
120 C. Thomas, M. Audrain

Tableau 1 Signes d’alerte qui doivent faire rechercher un déficit immunitaire héréditaire.
Des infections récurrentes des voies respiratoires hautes et basses : — plus de huit otites par an chez les
enfants de moins de 4 ans — plus de quatre otites par an chez les plus de 4 ans—plus de deux
pneumonies par an ou plus de deux sinusites par an
Infection sévère avec des germes de type Neisseria, Haemophilus, Streptococcus pneumoniae. Un seul
épisode de méningite ou de sepsis sévère mérite d’être exploré
Infections à pyogènes récurrentes, cutanées, invasive tissulaire, etc.
Antécédents familiaux de déficits immunitaires
Infections récurrentes avec le même type de pathogène
Infections inhabituelles, opportunistes et/ou d’évolution inhabituelle (par exemple : muguet ou
candidose cutanée récidivante, pneumocystose)
Cassure de la courbe staturopondérale et/ou diarrhée persistante

Tableau 2 Exemples de pathogènes observés associés aux différents déficits (d’après [7]).
Type de déficit Pathogènes observés Principaux tableaux cliniques
Déficits immunitaires Tous virus et spécialement CMV, VRS, EBV Pneumocystose Infections
combinés Bactéries : Streptococcus pneumoniae, virales Mycobactérioses
Haemophilus, Pseudomonas, Staphylococcus disséminées Infections
aureus, Neisseria, Mycoplasma mais aussi bactériennes
Salmonella, Listeria, bactéries de la flore
entérique Mycobactéries typiques et
atypiques incluant le BCG Champignons :
Candida, Aspergillus, cryptocoque
Parasites : Pneumocystis jiroveci,
Toxoplasma, Cryptosporidies
Déficits immunitaires Entérovirus Bactéries et spécialement Infections ORL et
humoraux Streptococcus, Haemophilus, pulmonaires Diarrhées
Staphylococcus, Pseudomonas, Neisseria, Méningites
Mycoplasma Parasite : Giardia
Déficits sur les phagocytes Bactéries : Staphylococcus, Pseudomonas, Cellulites Abcès profonds
Salmonella, Klebsiella, Serratia, Nocardia, Septicémies Pneumopathies
Streptococcus dans certains types comme Gingivostomatites Retard à la
les mutations NEMO et IRAK4 Mycobactéries chute du cordon ombilical
incluant BCG Champignons : Candida,
Aspergillus
Déficit sur le complément Bactéries et spécialement Streptococcus, Méningites à méningocoques
Haemophilus, Staphylococcus, Infections graves à
Pseudomonas, Mycoplasma Neisseria pneumocoques
meningitidis pour les déficits C5 à C9
CMV : cytomégalovirus ; VRS : virus respiratoire syncytial ; EBV : Epstein-Barr virus ; BCG : bacille de Calmette et Guérin ; ORL :
oto-rhino-laryngologie.

une diarrhée chronique, une polyallergie sévère, ou des la présence de signes cutanés (eczéma, verrues, signes
manifestations cutanées. Le type d’infections observées : hémorragiques, etc.), un examen oto-rhino-laryngologique
fongiques, parasitaires, virales ou bactériennes peut (ORL), pulmonaire et abdominal attentif.
orienter sur le type de déficit (Tableau 2). Dans le cas de
syndromes complexes, d’autres signes cliniques peuvent
être observés : ataxie cérébelleuse et télangiectasies
oculaires (ataxie-télangiectasie), malformation cardiaque Examens à pratiquer
(syndrome de DiGeorge), anomalies des cheveux (maladie de
Chediak-Higashi ou syndrome de Griscelli), etc. (Tableau 3). Examens de première intention
Un interrogatoire approfondi doit permettre d’apprécier les
antécédents familiaux et infectieux, la présence de mani- Le bilan réalisé en première intention fait appel à des exa-
festations associées. L’examen physique comprend l’analyse mens simples et de routine qui vont permettre d’orienter le
de la courbe de croissance staturopondérale et du péri- diagnostic vers un déficit immunitaire héréditaire. Les pre-
mètre crânien, la recherche de malformations associées, miers examens à réaliser sont un hémogramme, un dosage
Exploration des déficits immunitaires primitifs 121

Tableau 3 Autres signes pouvant faire évoquer un déficit immunitaire (non exhaustif).
Auto-immunité Déficit immunitaire commun variable
Syndrome de Wiskott-Aldrich
Granulome Granulomatose septique chronique
Hypogammaglobulinémie
Cancer Ataxie-télangiectasie
Déficits immunitaires combinés sévères
Déficits immunitaires combinés
Dilatation des bronches Agammaglobulinémie
Hypogammaglobulinémie
Malformation cardiaque Syndrome de DiGeorge
Asplénie congénitale
Eczéma+++ Syndrome de Wiskott-Aldrich
Déficits immunitaires combinés
Retard staturopondéral Déficits immunitaires combinés sévères, et non sévères
(cartilage hair hypoplasia, etc.)
Retard de dentition Syndrome d’hyper-IgE (mutation du gène STAT3)
Syndrome NEMO (dents coniques)
Dermatite atopique, Déficits immunitaires combinés sévères (syndrome
érythrodermie néonatale d’Omenn ou GVH maternofœtale)
Certains déficits immunitaires combinés (mutation du gène
DOCK8 par exemple)
Vascularite, télangiectasie Syndrome de Wiskott-AldrichAtaxie-télangiectasie
(télangiectasies oculaires)
Adénopathies, organomégalie Syndrome lymphoprolifératif lié à l’X (syndrome de Purtilo)
Syndrome lymphoprolifératif associé à une auto-imunité
(ALPS)
Cytopénies Syndrome de Wiskott-Aldrich
Déficits immunitaires combinés variables
Déficits immunitaires combinés
Diarrhée chronique Déficits immunitaires combinés sévères
Déficits immunitaires combinés
Déficits humoraux (giardiase)
Dysmorphie, albinisme, Syndrome d’hyper-IgE
anomalies de la peau, des Syndromes de Griscelli, de Chediak-Higashi
cheveux, etc. Syndrome NEMO
Mutation du gène DOCK8
Ig : immunoglobulines ; GVH : réaction du greffon contre l’hôte.

pondéral des immunoglobulines, et des sérologies postvac- entre 0,5 et 1,0 g/l, elle est sévère en-dessous de 0,5 g/l.
cinales ou postinfectieuses. Dans ce cas, la neutropénie peut être responsable de mani-
festations infectieuses. Elle doit être contrôlée et explorée,
à la recherche d’une neutropénie congénitale sévère ou
Hémogramme ou numération formule sanguine d’une neutropénie auto-immune. Une anémie, une throm-
Il permet d’apprécier le chiffre total des leucocytes et la bopénie peuvent également être observées dans certains
formule leucocytaire permet de quantifier le nombre de déficits immunitaires et être liées à des manifestations auto-
PNN et le nombre de lymphocytes, à interpréter en valeur immunes.
absolue. Il faut toujours apprécier les résultats en fonc- Le frottis sanguin permet également de rechercher des
tion de l’âge, du fait notamment de l’hyperlymphocytose corps de Jolly, évoquant une asplénie ou une hyposplénie.
physiologique chez le jeune enfant. Une lymphopénie infé-
rieure à 2000 lymphocytes/mm3 chez un nouveau-né doit
être un signe d’alerte et faire évoquer le diagnostic de défi- Dosage pondéral des immunoglobulines
cit immunitaire combiné sévère et doit être complétée par Il doit également être interprété en fonction de l’âge de
une analyse des sous-populations lymphocytaires. l’enfant (Tableau 4) [4]. Durant les six premiers mois de
Une neutropénie est définie comme un abaissement du la vie, les IgG sont essentiellement d’origine maternelle.
chiffre absolu des PNN du sang au-dessous de 1,5 g/l. La Entre 6 et 8 mois, il existe une hypogammaglobulinémie dite
neutropénie est minime lorsque le compte absolu des PNN « physiologique ». Ces dosages permettent d’apprécier la
circulants est compris entre 1,0 et 1,5 g/l, elle est modérée production globale d’anticorps sans tenir compte de leur
122 C. Thomas, M. Audrain

Tableau 4 Valeurs de référence des classes d’immunoglobulines (Ig) (g/l) en fonction de l’âge (d’après [4]).
Ig Nouveau-né 1 mois 3 mois 6 mois 1 an 3 ans 5 à 9 ans 15 ans Adulte
IgG 6,1—13 4,6—8,6 2,9—5,5 2,3—4,4 3,3—6,2 4,8—8,9 5,5—11,5 6,5—12,3 6,6—12,8
IgA 0—0,2 0,1—0,3 0,1—0,4 0,2—0,6 0,2—0,8 0,3—1,2 0,4—1,6 0,5—2 0,7—3,4
IgM 0,04—0,6 0,2—0,7 0,3—0,8 0,3—0,9 0,5—1,3 0,5—1,5 0,5—1,5 0,5—1,6 0,5—2,1

spécificité et d’apporter des éléments pour le diagnostic L’étude qualitative de l’immunité cellulaire (test de
d’un déficit en lymphocytes B ou d’un déficit combiné en transformation lymphoblastique) consiste à mesurer la capa-
lymphocytes B et T. Le dosage pondéral des immunoglo- cité des lymphocytes à proliférer en présence d’antigènes
bulines est préférable à l’électrophorèse des protides, qui non spécifiques (phytohémagglutinine, anticorps anti-CD3),
risque de passer à côté d’un déficit isolé en un isotype. spécifiques ou vaccinaux (anatoxine tétanique, candidine,
tuberculine).
Étude des sérologies postvaccinales
C’est un test fonctionnel d’étude de l’immunité humorale. Analyse fonctionnelle des polynucléaires
On distingue les anticorps antipolysaccharidiques, produits neutrophiles
par des germes encapsulés de type pneumocoque et ménin-
Sur le plan quantitatif, la quantification des polynucléaires
gocoque et reflétant une réponse lymphocytaire B seule,
est réalisée par la NFS. Sur le plan fonctionnel, il est
et les anticorps antiprotidiques (antitétanos ou polio par
possible d’étudier l’expression des protéines d’adhésion
exemple), faisant appel à un mécanisme de coopération
par cytométrie de flux (expression de CD18 à la sur-
entre les lymphocytes T et B. Les anticorps antipolysaccha-
face membranaire), et la fonction phagocytaire (capacité
ridiques ne sont pas produits avant l’âge de deux ans de
à générer des dérivés oxygénés) par le test à la dihy-
manière physiologique. Ces sérologies doivent être interpré-
drorhodamine (DHR), ou le test de réduction au nitrobleu
tées en fonction de l’âge (persistance d’anticorps maternels
de tétrazolium (NBT). Ces tests doivent être réalisés
dans les six premiers mois de vie) et en fonction du sta-
devant un tableau de granulome, d’abcès profonds ou
tut vaccinal de l’enfant. Leur dosage peut être utile après
cutanés ou d’infections fongiques. Des tests plus sophis-
revaccination. Les allohémagglutinines de groupe sanguin
tiqués effectués en laboratoire spécialisé permettent
sont des anticorps non hémolysants naturels antipolysaccha-
aussi d’apprécier le bon fonctionnement des voies de
ridiques dirigés contre les antigènes des groupes sanguins A
TLR.
et B. Ils ne sont pas évaluables chez les sujets de groupe
sanguin AB.
Analyse du complément
Examens de deuxième intention Les résultats de la triade — complément hémolytique à
50 % (CH50), dosages antigéniques de C3 et de C4 — per-
En fonction des signes cliniques, de l’âge de l’enfant et mettent en première intention de comprendre le mécanisme
des résultats des examens réalisés en première intention, de l’hypocomplémentémie. Le CH50 est un test fonctionnel
d’autres explorations biologiques peuvent être réalisées. permettant d’apprécier l’activation par les protéines de la
voie classique, les composés C1, C2 et C4, le C3 ainsi que
Analyse des sous-populations lymphocytaires les protéines de la voie terminale (C5 à C9 ou complexe
Elle peut se discuter en première intention en fonc- d’attaque membranaire). Un défaut de l’un de ces composés
tion du contexte. L’immunophénotypage des lymphocytes entraîne une baisse du CH50, et le diagnostic est alors
par cytométrie de flux permet de quantifier les diffé- confirmé par le dosage spécifique des divers composants.
rentes sous-populations lymphocytaires : lymphocytes T La prescription peut être complétée dans un contexte
avec les marqueurs CD3, CD4 et CD8, lymphocytes B avec d’infection à Neisseria meningitidis par le dosage de l’AP50
les marqueurs CD19 et CD20, les cellules NK (marqueurs (dosage de l’activité dépendant de la voie alterne) et de la
CD16 et CD56). L’interprétation des valeurs de chaque sous- properdine.
population est à faire en valeur absolue et en fonction de
l’âge (Tableau 5) [5]. D’autres marqueurs lymphocytaires Autres examens réalisables en fonction du
peuvent être également étudiés comme le pourcentage
de T naïfs qui permettent d’apprécier le fonctionnement
type de déficit suspecté
du thymus ou le pourcentage de B naïfs ou mémoires La fonction cytotoxique des lymphocytes CD8 peut être étu-
dans les hypogammaglobulinémies, l’expression du CD25 ou diée. D’autres déficits sont caractérisés par le déficit en
des molécules human leukocyte antigen-antigen D rela- molécules Fas ou Fas-ligand intervenant dans l’apoptose des
ted (HLA-DR) permettant d’apprécier l’état d’activation des lymphocytes, ou encore le dosage des sous-classes IgG1 à
lymphocytes, la présence de T régulateurs, l’expression des IgG4 dans le cas de déficits humoraux. Celui-ci ne peut être
antigènes HLA de classe I ou II, l’expression de la molécule réalisé avant l’âge de 18 mois à 2 ans. Le dosage des IgE
zeta chain associated protein of 70 kDA (ZAP70) ou celle totales peut également être utile pour diagnostiquer un syn-
de la perforine. La production de cytokines peut également drome d’hyper-IgE devant un tableau d’abcès cutanés et
être évaluée, notamment l’interféron &ggr; (IFN&ggr;). d’eczéma.
Exploration des déficits immunitaires primitifs 123

Tableau 5 Valeurs de référence des sous-populations lymphocytaires (N/&mgr ;l × 10−3 ) (d’après [5]).
0—3 mois 3—6 mois 6—12 mois 1—2 ans 2—6 ans 6—12 ans 12—18 ans
Leucocytes 7,2—18 6,7—14 6,4—13 6,4—12 5,2—11 4,4—9,5 4,4—8,1
Lymphocytes 3,4—7,6 3,9—9 3,4—9 3,6—8,9 2,3—5,4 1,9—3,7 1,4—3,3
CD3+ 2,5—5,5 2,5—5,6 1,9—5,9 2,1—6,2 1,4—3,7 1,2—2,6 1—2,2
CD4+ 1,6—4 1,8—4 1,4—4,3 1,3—3,4 0,7—2,2 0,65—1,5 0,53—1,3
CD8+ 0,56—1,7 0,59—1,6 0,5—1,7 0,62—1 0,49—1,3 0,37—1,1 0,33—0,92
CD19+ 0,3—2 0,43—3 0,61—2,6 0,72—2,6 0,39—1,4 0,27—0,86 0,11—0,57
NK+ 0,17—1,1 0,17—0,83 0,16—0,95 0,18—0,92 0,13—0,72 0,1—0,48 0,07—0,48
NK : natural killer.

Réaliser ces explorations Quelques exemples de déficits


immunitaires héréditaires
En cas de lymphopénie isolée avérée
Si l’hémogramme retrouve une lymphopénie isolée avérée Déficits immunitaires combinés sévères
sur un contrôle, l’analyse est complétée par la réalisa-
tion d’un phénotypage lymphocytaire (Fig. 3) [6]. Une Le déficit immunitaire combiné sévère est une maladie géné-
lymphopénie T majeure (< 300 lymphocytes/mm3 ) chez un tique caractérisée par un déficit profond de l’immunité
petit enfant présentant une infection grave évoque for- adaptative (absence de lymphocytes T). Il existe une ving-
tement un déficit immunitaire combiné sévère. L’analyse taine de gènes différents dont les mutations entraînent un
peut être complétée, d’une part, par l’étude de lympho- déficit immunitaire combiné sévère. Ces gènes sont des
cytes T naïfs et mémoires ainsi que l’étude de la capacité gènes clés dans la maturation, la différenciation et la pro-
des lymphocytes à proliférer et, d’autre part, par une lifération des lymphocytes (gènes RAG1 et 2, Jak3, gène
étude génétique à la recherche de l’anomalie molécu- &ggr;c codant pour une chaîne commune à plusieurs récep-
laire. teurs aux cytokines dont IL-2 et IL-7, gène de l’adénosine
Une lymphopénie modérée (entre 300 et déaminase). Selon l’endroit où se situe ce gène dans la
1500 lymphocytes/mm3 ) associée à des tests de trans- différenciation des lymphocytes, le déficit atteint les lym-
formation lymphoblastique anormaux évoque un déficit phocytes T avec ou sans déficit des lymphocytes B et NK
immunitaire combiné qui peut être exploré par des tests (Fig. 5) [8].
génétiques. Les enfants atteints sont asymptomatiques à la naissance
mais décèdent d’infections dans la première année de vie
En cas d’agammaglobulinémie [7] s’ils ne sont pas diagnostiqués et traités de manière appro-
priée. Ils sont également très vulnérables aux infections
Un immunophénotypage lymphocytaire est réalisé à la secondaires liées à l’injection de vaccins vivants. Quand il
recherche de lymphocytes B circulants (cellules CD19 posi- est suspecté, le diagnostic est évoqué devant une lympho-
tives). Chez un garçon, une agammaglobulinémie associée à pénie profonde sur la numération, la lymphopénie T peut
une absence de lymphocytes B circulants évoque une mala- cependant être masquée par les lymphocytes maternels ou
die de Bruton. L’étude doit être alors complétée par la par une lymphocytose B. La numération des sous-populations
recherche de la mutation du gène B tyrosine kinase (BTK), lymphocytaires permet de poser rapidement et facilement
localisé sur le chromosome X. le diagnostic, elle peut se justifier en première intention
dans ce contexte. L’absence de thymus sur une radiogra-
En cas d’examens de première intention phie de thorax est également un critère d’orientation. La
normaux, mais infections bactériennes et/ou greffe de cellules souches hématopoïétiques (CSH) est une
fungiques urgence thérapeutique. Elle permet de remplacer le sys-
Si les examens de première intention sont normaux (Fig. 4) tème immunitaire défaillant et de guérir ces enfants. La
[6] et que l’enfant présente des infections bactériennes thérapie enzymatique ou la thérapie génique sont aussi envi-
et/ou fungiques récurrentes, la nature des infections sageables dans certains cas.
oriente vers des explorations du PNN, vers une asplénie ou Le dépistage néonatal de cette maladie est possible. La
un déficit en complément. Dans ce cas, une étude du méta- méthode utilisée et reconnue est la quantification des T-
bolisme oxydatif par le test à la DHR et un dosage de la cell receptor excision circles (TREC), réalisée à partir d’une
triade CH50-C3-C4 doivent être réalisés. Enfin, une étude goutte de sang prélevée sur un papier buvard. Le prélève-
du chimiotactisme des PNN, un dosage d’IgE et une étude ment pour cette analyse peut être réalisé à 72 heures de vie
de l’axe interleukine 12 (IL-12)/IFN&ggr; peuvent être utiles au même moment que le prélèvement déjà réalisé pour les
pour diagnostiquer respectivement le déficit en molécules autres dépistages en période néonatale. Le dépistage néo-
d’adhésion, le syndrome de Buckley et la susceptibilité aux natal se fait dans un grand nombre d’États aux États-Unis, il
mycobactéries. est en cours d’étude dans plusieurs pays européens, dont la
124 C. Thomas, M. Audrain

Figure 3. Examens de première intention et de deuxième intention si les premiers sont anormaux (d’après [6]). Ig : immunoglobulines.

France [9]. Le dépistage par les TREC ne permet de dépister mutation d’une tyrosine kinase du lymphocyte B, indispen-
que les lymphopénies sévères. sable pour sa différenciation intramédullaire. Cette maladie
se caractérise sur le plan clinique par des infections ORL et
Déficits immunitaires combinés respiratoires qui débutent au-delà de l’âge de 6 mois, date à
laquelle l’enfant n’est plus protégé par les anticorps mater-
Les déficits immunitaires combinés sont définis par une lym- nels. Les patients peuvent aussi développer des infections
phopénie T moins profonde que dans le déficit immunitaire intestinales (Giardia intestinalis) ou à entérovirus.
combiné sévère ou par l’absence de lymphopénie mais avec Sur le plan biologique, il existe une agammaglobulinémie
des fonctions lymphocytaires T prolifératives altérées. Il avec des taux d’anticorps proches de zéro et une absence
existe une vingtaine d’anomalies génétiques responsables de lymphocytes B circulants (cellules CD19 positives). Les
de déficit immunitaire combiné, qui sont recherchées en examens à pratiquer sont simples : une numération des
fonction des anomalies cliniques. Sur le plan clinique, les sous-populations lymphocytaires et un dosage des immuno-
déficits immunitaires combinés sont caractérisés par la globulines.
survenue d’infections récurrentes, sévères, bactériennes, Le traitement repose sur la substitution à vie par immu-
virales, fongiques. Les manifestations associées peuvent noglobulines polyvalentes. Le pronostic est très bon, à
être des manifestations cutanées, des polyallergies sévères, condition que les patients soient correctement substitués.
des manifestations auto-immunes ou des cancers (lymphome
notamment). L’âge de diagnostic est plus tardif que l’âge de
diagnostic des déficits immunitaires combinés sévères. Déficit immunitaire commun variable
Il convient de citer quelques exemples de déficit immu- C’est le plus fréquent des déficits immunitaires primi-
nitaire combiné : déficit en ZAP70, en dedicator of tifs symptomatiques de l’adulte. L’âge du diagnostic est
cytokinesis 8 (DOCK8), déficit d’expression des antigènes généralement supérieur à 20 ans. L’anomalie génétique
HLA de classe II, déficit en CD40 ligand, etc. sous-jacente est le plus souvent non identifiée et probable-
ment multigénique. Certains patients présentent un déficit
Déficits immunitaires humoraux T associé. Les infections restent au premier plan des signes
cliniques mais d’autres complications surviennent : hyper-
Agammaglobulinémie de Bruton plasie lymphoïde, granulomes, lymphomes, complications
C’est le modèle du déficit immunitaire primitif complet et auto-immunes. Le dosage des immunoglobulines et les séro-
pur. Il s’agit d’une maladie liée à l’X caractérisée par une logies vaccinales permettent d’orienter le diagnostic et de
Exploration des déficits immunitaires primitifs 125

Figure 4. Examens de première intention et de deuxième intention si les premiers sont normaux (d’après [6]). Ig : immunoglobulines ;
CH50 : complément hémolytique à 50 % ; DHR : dihydrorhodamine ; IL-12 : interleukine 12 ; IFN&ggr; : interféron gamma ; Ac : anticorps.

prendre une décision thérapeutique. Le traitement repose des protéines C2, C3 et C4, des facteurs H et I prédisposent
sur la substitution en immunoglobulines à vie, le traite- aux infections à bactéries encapsulées et aux manifestations
ment par antibiotique de toute infection et la kinésithérapie auto-immunes, ainsi que pour les protéines C3 et H aux glo-
respiratoire pour prévenir l’apparition de dilatation des mérulonéphrites membrano-prolifératives et les syndromes
bronches. hémolytiques et urémiques (SHU) atypiques.
Les déficits complets en protéines de la voie finale
commune (C5, C6, C7, C8, C9) et le déficit en properdine
Déficit en complément sont rares dans la population caucasienne, leur prévalence
varie en fonction de l’origine ethnique des patients. Ils
Les déficits en un composant du complément sont des situa-
entraînent une susceptibilité aux infections à N. menin-
tions rares mais, dans tous les cas, associés à une prédisposi-
gitidis. Le déficit en properdine, protéine de régulation
tion à développer des pathologies d’une grande diversité cli-
positive de la voie alterne, est une anomalie liée à l’X.
nique : maladies auto-immunes, atteintes rénales et infec-
Une exploration fonctionnelle de la voie alterne par un test
tions. Les sujets porteurs d’un déficit en protéines de la voie
appelé AP50 est nécessaire pour poser le diagnostic. Les
classique ou en protéines de la voie alterne ont un risque de
déficits en properdine sont très fortement associés à la sur-
développer une infection à N. meningitidis 250 à 1000 fois
venue d’infection à N. meningitidis. Le pronostic est sévère,
supérieur à celui de la population générale. Une première
reflété par la fréquence des formes fulminantes.
orientation peut être obtenue par des tests simples, les trois
Les déficits en C3 sont rares et peuvent être héréditaires
dosages suivants sont à demander en même temps : activité
ou acquis. Les patients déficitaires présentent des infections
fonctionnelle CH50, dosage des protéines C3 et C4. En fonc-
récurrentes à germes encapsulés (Streptococcus pneumo-
tion des résultats, des explorations plus poussées avec les
niae et N. meningitidis). Les déficits en C1 q, C2, et C4 ont
dosages des fractions peuvent être effectuées. Les déficits
126 C. Thomas, M. Audrain

Figure 5. Anomalies moléculaires des déficits immunitaires combinés sévères (d’après [8]). NK : natural killer.

également une susceptibilité accrue aux infections par des phagocytées. En effet, ces cellules ne peuvent pas produire
bactéries encapsulées, en particulier, S. pneumoniae. les dérivés actifs de l’oxygène qui normalement détruisent
La prise en charge des patients porteurs de déficit en les micro-organismes. La transmission de cette maladie
complément repose, en dehors du conseil génétique, sur est autosomique récessive ou liée à l’X en fonction de
la prophylaxie vaccinale (antiméningococcique B et C, et l’anomalie moléculaire sous-jacente. Le test à la DHR est
antipneumococcique), et sur la prophylaxie antibiotique un test simple en cytométrie de flux réalisé dans des labo-
(pénicilline) ratoires spécialisés, il permet d’orienter le diagnostic avant
de confirmer par la biologie moléculaire.
Anomalies des phagocytes
Ces anomalies représentent 10 % des cas des déficits immu-
nitaires primitifs. Conclusion
Neutropénie congénitale sévère Le diagnostic de déficit immunitaire primitif est avant tout
un diagnostic clinique. Il doit être évoqué devant toute
Elle est liée à un blocage de maturation des progéni-
infection inhabituelle. Des examens simples et relative-
teurs granuleux entraînant une agranulocytose profonde.
ment peu onéreux permettent d’orienter le diagnostic.
Elle peut être évoquée sur un simple hémogramme. Les
Cependant, la normalité des explorations biologiques ne
infections sont précoces et souvent sévères. La prise en
doit pas totalement éliminer le diagnostic de déficit immu-
charge repose sur des traitements antibiotiques adaptés et
nitaire primitif si la présomption clinique est forte. De
sur l’administration de facteurs de croissance hématopoïé-
nouveaux déficits immunitaires sont décrits chaque année,
tiques. Le risque de transformation en myélodysplasie ou en
notamment les syndromes de susceptibilité infectieuse à
leucémie aiguë impose une surveillance du myélogramme et
un type de pathogènes. Ces déficits immunitaires primi-
du caryotype médullaire.
tifs sont moins classiques et plus difficiles à diagnostiquer.
Des explorations plus poussées et des études génétiques
Granulomatose septique chronique dans les laboratoires spécialisés doivent être réalisées en
Elle se caractérise par une incapacité des polynucléaires cas de forte suspicion, après consultation dans un centre
à détruire les champignons ou les bactéries normalement de compétence des déficits immunitaires héréditaires. Le
Exploration des déficits immunitaires primitifs 127

plan national maladies rares a permis la constitution d’un from Jeffrey Modell Centers worldwide focused on diagnosis,
réseau clinique et biologique (le Centre de référence treatment, and discovery. Immunol Res 2014;60:132—44.
déficits immunitaires héréditaires [CEREDIH], site Inter- [2] Picard C, Al-Herz W, Bousfiha A, Casanova JL, Chatila T, Conley
net : www.ceredih.fr) constitué d’un centre de référence ME. Primary Immunodeficiency Diseases: an update on the classi-
à l’hôpital Necker et de centres de compétences (un par fication from the International Union of Immunological Societies
Expert Committee for Primary Immunodeficiency 2015. J Clin
région), qui permet d’assurer que chaque enfant dans
Immunol 2015;35:696—726.
chaque région a une prise en charge adéquate. [3] Bousfiha AA, Jeddane L, Ailal F, Al Herz W, Conley ME,
Cunningham-Rundles C. A phenotypic approach for IUIS PID clas-
sification and diagnosis: guidelines for clinicians at the bedside.
Points essentiels J Clin Immunol 2015;35:727—38.
• Toute infection sévère justifie un bilan immunitaire. [4] Picard C. Comment explorer un déficit immunitaire héréditaire ?
• Une lymphopénie inférieure à Rev Prat 2007;57:1671—6.
2000 lymphocytes/mm3 chez un nouveau-né [5] Schearer WT. Lymphocyte subsets in healthy children from
doit être explorée. birth through 18 years of age: The Pediatric AIDS Clinical
Trials Group P1009 study. J Allergy Clin Immunol 2006;112:
973—80.
[6] Picard C. Quand rechercher un déficit immunitaire héréditaire
chez l’enfant ? Arch Pediatr 2013;20:412—7.
Déclaration de liens d’intérêts [7] Notarangelo LD. Primary immunodeficiencies. J Allergy Clin
Immunol 2010;125:S182—8.
Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts. [8] Tsukada S, Saffran DC, Rawlings DJ, Parolini O, Allen RC,
Sparkes RS. Deficient expression of a B cell cytoplasmic tyrosine
kinase in human X-linked agammaglobulinemia. Cell 1993;72:
Références 279—90.
[9] Thomas C, Mirallie S, Pierres C, Dert C, Clement MC, Mahlaoui
[1] Modell V, Knaus M, Modell F, Roifman C, Orange J, Notarangelo N. Neonatal screening of severe combined immunodeficiencies.
LD. Global overview of primary immunodeficiencies: a report Arch Pediatr 2015;22:646—52.

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