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THEME 5 

: LES MUTATIONS DE LA SOCIETE WOLOF SOUS L’INFLUENCE DU MOURIDISME


INTRODUCTION
Le mouridisme est une confrérie fondait dans la seconde moitié du XIXe siècle par Cheikh
Ahmadou Bamba. Il se base sur des principes tels que l’éducation spirituelle, l’adoration, la
conformation à l’éthique de l’islam, la recherche du gain licite etc. Ainsi, dès ses débuts,
Cheikh Ahmadou Bamba a réalisé l’émancipation culturelle, sociale et agricole du peuple
wolof par extension de tous les sénégalais.
I.QU’EST-CE QUE LE MOURIDISME ?
Le mouridisme est une confrérie musulmane née au Sénégal dans la deuxième moitié du
XIXe siècle. A cette époque, le Sénégal vivait dans un contexte colonial hostile au
développement personnel et à l’épanouissement spirituel, qui ne laissait aucune perspective
aux indigènes. En effet, dans ce climat tendu, certains groupes comme ceux qui sont issus de
l’aristocratie ceedo adoptaient une posture suicidaire face au pouvoir colonial en refusant
une collaboration déshonorante. D’autres, en revanche, adoptaient la stratégie de la
soumission et de la servitude pour préserver leurs statuts.
Cette situation a changé les enjeux et les modes de vie de presque tous les groupes sociaux.
Ainsi, l’ancienne noblesse animiste perdait toute influence sur les peuples qu’elle dominait
autrefois. Désemparées, certaines couches de la population se trouvent ballotées entre la
cruauté des chefs guerriers autochtones et l’imposition d’une culture venue d’ailleurs avec
en filigrane un enjeu économique fort. Dans ce contexte se furent les « marabouts », c’est-à-
dire les cadres religieux qui apparurent comme les seuls remparts contre la perte de
l’identité religieuse et culturelle des peuples du Sénégal face au colonialisme.
Vu que la marge de manœuvre est quasi nulle avec les ceddos et l’administration coloniale,
le Cheikh décide de se retirer dans les zones rurales afin de fonder sa confrérie pour
s’adonner à l’éducation et l’enseignement des masses les plus défavorisées de la hiérarchie
sociale. C’est la naissance du mouridisme.
C’est dans cette atmosphère tendue que Cheikh Ahmadou Bamba (1853-1927), conscient de
l’enjeu de l’éducation spirituelle chez les populations indigènes, a proposé une alternative à
la population désemparée malgré la présence des missionnaires du Baol et du Cayor
éprouvées par la conjoncture pour qu’elles se joignent à lui afin de proposer une solution
alternative. Il prône une non-violence qui constitue le socle de ses principes que sont le
travail et la prière. C’est de là qu’est née la voie de la mouridiyya qu’on appelle aujourd’hui
le mouridisme. Il inculque à ses disciples le culte de la spiritualité, c’est la raison pour
laquelle il fonde sa confrérie dans les zones rurales car propices au travail, à la méditation et
à l’éducation de l’âme.
II. MUTATIONS CULTURELLES ET SOCIALES
Si l’avènement du mouridisme a été perçu, dans les sociétés wolofs, comme une réponse à
des cris de détresse, c’est parce que la colonisation française représentait à leurs yeux une
agression culturelle, d’où leur soucis de rechercher tout refuge pour préserver leur identité.
La société wolof possédait des valeurs guerrières dont les colons n’ont jamais douté. Mais
face à une puissante armée française, dotée des techniques les plus modernes de l’époque,
la résistance, qui avait retardé la pénétration coloniale, finit par céder. Ainsi, bon nombre de
rois, de princes et guerriers allaient connaitre la mort face à l’armée impérialiste. Ce lourd
bilan mettait donc fin à la résistance armée des damels, bourbas et bracks. La résistance ne
fut, cependant, seulement l’œuvre des rois et des princes puisqu’elle a mobilisé des
hommes religieux qui, sous le flambeau de l’islam, ont résisté aussi par les armes. Tel fut le
cas d’El hadji Omar Tall, et de Maba Diakhou Ba, mais alors, les peuples wolofs, fatigués de
ces guerres et conflits, ont cherché d’autres guides et d’autres formes de lutte. Donc, toute
résistance qui devrait encore naitre tout en gagnant la sympathie de ces derniers et surtout
faire renaitre un espoir, ne devait être que pacifique. C’est dans ce sens qu’on peut
comprendre la réponse en masse des wolofs à l’appel de Cheikh Ahmadou Bamba.
Connaissant le souci et la peur d’un éventuel déracinement culturel de son peuple, le défi de
Bamba fut de combattre la colonisation française par le biais de l’islam, sans pour autant
acculturer son peuple par la culture arabe. En d’autres termes, son défi consista de faire de
son peuple des musulmans africains.
L’islam s’est bien intégré dans la société wolof et s’est présenté comme le défenseur de la
liberté et de l’égalité des hommes face à une société caractérisée par des inégalités sociales.
Même si ses premiers intervenants appartenaient à la classe des nobles, cette religion s’est
très vite propagée et a atteint la totalité des peuples wolofs. Il leur a octroyé une ouverture
vers une culture universaliste. Ce message de l’islam, nous le retrouvons dans le cadre du
mouridisme, car Cheikh Ahmadou Bamba a formé ses disciples conformément à ces valeurs.
Ainsi, le développement original de la confrérie eut lieu quand le système étatique wolof se
désagrégeait, et le succès spectaculaire de la confrérie ne fut pas seulement celui d’un
mouvement religieux, mais aussi celui d’une structure d’autorité qui apparaissait comme
une alternative possible.
L’effondrement du système étatique wolof et son remplacement par une administration
coloniale difficilement acceptée signifiait le déplacement d’un grand nombre de personnes,
notables et leur entourage ; ainsi que de dépendant de toute sortes, privés d’un système
d’autorité politique et de moyens de vivre. Beaucoup de ceux de la classe inférieure, et
particulièrement les esclaves, dont la sécurité était ainsi menacée, trouvèrent un refuge
dans une nouvelle subordination au prédicateur Ahmadou Bamba et à ses disciples, dans
l’Etat du Baol. Ils apportèrent avec eux l’habitude d’une soumission extrême, la volonté de
travailler pour un maitre ou de lui donner les fruits de leur labeur, ce qui donna une marque
durable sur l’organisation de la confrérie. De leur côté, de nombreux réfugiés originaires de
castes supérieurs formèrent des alliances matrimoniales avec les grandes familles de
marabouts ou bien devinrent eux- mêmes marabouts, recouvrant ainsi, au moins
partiellement, la position dominante qu’ils avaient perdu.
Les structures mourides actuelles représentent une synthèse des influences wolof et la
sujétion du talibé à des composantes tant spirituelles qu’économiques et politiques.
D’abord, la sujétion est totalement volontaire : il n’y a aucune limitation de la liberté dans le
choix de celui que l’on reconnaitra comme son supérieur, que le choix soit fait par le père ou
le tuteur au nom de l’enfant ou par le futur talibé lui-même. En pratique, le choix est
maintenant limité dans son objet à ceux qui font partie de la caste établie des marabouts,
dans de nombreux cas le fils préfère se soumettre au fils du cheikh de son père.
L’acte de soumission d’un talibé est accompli suivant un modèle fixe comprenant
l’affirmation rituelle de fidélité de la part du talibé et l’acceptation de la bénédiction
formelle du cheikh. Cet acte est l’unique critère d’appartenance à la confrérie.
III. LES MUTATIONS AGRICOLES
Derrière la progression spectaculaire d’arachide au Sénégal de 1840 à 1960, l’analyse
historique décèle un processus complexe, lié entre autre à l’essor de la confrérie musulmane
mouride. Essor paradoxal à deux points de vue au moins : mouvement mystique au départ,
le mouridisme se mue en entreprise d’organisation sociale et de colonisation agraire ; en
vecteur d’intégration au capitalisme et aux rapports marchands.
L’illumination mystique et la révélation accordées à Ahmadou Bamba se produisent en 1886,
année même où à la mort de Lat Dior à la bataille de Dékhelé marqua la fin de la résistance
armée à la colonisation du Sénégal. Par certains aspects, l’influence d’Ahmadou Bamba
semble continuer cette résistance sous d’autres formes, et les autorités coloniales exileront
deux fois de suite Serigne Touba. En même temps toutefois, les mourides occupent le Baol
sous la conduite de leur marabout, défrichent, cultivent activement l’arachide. A ce
phénomène se superpose une dynamique agraire poussant à conquérir l’intérieur du pays.
Seul le Cayor a été mis en valeur jusqu’ici, grâce au chemin de fer Dakar-Saint-Louis. La
confrérie mouride offre une structure sociale remplaçant celle qui s’effondre, de possibilités
de promotion, une idéologie égalitaire : tous les disciples, captifs ou hommes libres, sont
égaux devant Dieu et Ahmadou Bamba ; se verront attribuer des terres par les serignes lors
de la colonisation du Baol. Ainsi des gens de basse origine, des paysans sans terre, des
soldats de fortune, vont s’enrôler dans une confrérie qui leur donne un statut, des terres, et
un sentiment de supériorité nourrit par une idéologie puissante. Les ceddos, en particulier,
sont tout prêts à aller manier le gourdin contre les peuls qu’il faut déloger du Baol.
Deux choses devenaient urgentes vers 1900 : la recherche de terres nouvelles, un
encadrement efficace pour organiser l’installation des communautés pionnières. C’est ici
qu’apparait une catégorie fascinante de marabouts-entrepreneurs, organisateurs et homme
d’action, activistes infatigables, mais à la personnalité desquels l’observateur occidental ne
comprend rien s’il refuse d’en noter la composante mystique et religieuse. Ainsi, suite à la
demande du premier khalife des mourides la construction de la grande mosquée de la ville
sainte de Touba (1929) fut financée par la culture arachidière des mourides. D’autres projets
agricoles tels que les champs de khelcome dans la région de Kaolack sont aussi des initiatives
de la confrérie mouride.
A l’enthousiasme et à l’activisme du marabout, correspondent chez le paysan le sentiment
d’identité commun à tous les disciples d’Ahmadou Bamba, le désir de profiter de la barké
(charisme) du marabout et de ses capacités d’organisation, et enfin la conviction d’être
spirituellement et matériellement supérieur aux peuls.
CONCLUSION
Fondé dans la seconde moitié du XIXe siècle par Cheikh Ahmadou Bamba, la confrérie
mouride n’était pas vue d’un bon œil à ses débuts ni par le gouverneur qui dirigeait le
Sénégal et l’AOF craignant une désobéissance des indigènes, ni par les aristocrates inquiets
de son pouvoir et redoutant la vengeance des gens jadis opprimés. La résistance culturelle
d’Ahmadou Bamba a permis aux wolofs mourides de préserver leur identité culturelle. A
travers le développement de la langue wolof, l’effervescence de mouvement culturels
religieux comme le hizbuttarkhiya, les formes d’habillement des mourides, les formes de
salutations, le patrimoine culturel de la ville de Diourbel qui abrite la ville sainte de Touba et
enfin la consommation du produit « café Touba ».Toutefois, le fer de lance du mouvement
mouride a été constitué essentiellement par des groupes de jeunes gens réunis en daara,
sortes de petites communautés orientées vers la colonisation agraire.
SOURCES :
La communauté mouride du Sénégal et de la diaspora : pour une approche
communicationnelle de tradition et de l’écriture en contexte de tradition médiatique,
Cheikhouna BEYE, pages 15- 17
https://tel.archives-ouvertes.fr/te-01233939
LES ASPECTS DU MOURIDISME AU SENEGAL, THIAM El Hadji Ibrahima Sakho pages 85-86
Le talibé mouride : Etude d’un cas de dépendance sociale, (article) O’BRIEN Donal Cruise,
Cahiers d’ETUDES AFRICAINES/Année 1969/35/pages 503-504
B) Les Mourides et l’arachide au Sénégal (article), COUTY Philippe, Revue Tiers
Monde/Année 1982/90/pages 311-313
UNIVERSITE ASSANE SECK DE ZIGUINCHOR

Années 2019/2020
UFR/LASHU
Département : Histoire & Civilisations

Module : SOCIETES & CIVILISATIONS SENEGAMBIENNES (HC 2412)


Dr Philippe MEGUELLE

EXPOSANT
Moussa GNING 20170300

THEME 5 : LES MUTATIONS DE LA SOCIETE WOLOF SOUS L’INFLUENCE DU MOURIDISME

PLAN
INTRODUCTION
I. Qu’EST-CE QUE LE MOURIDISME ?
II. LES MUTATIONS CULTURELLES ET SOCIALES
III. LES MUTATIONS AGRICOLES
CONCLUSION

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