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LA COMMUNION FRATERNELLE « LABORATOIRE » DES BEATITUDES

I. Le cadre théologique des béatitudes (Mt 5, 1-12)

0. Un lieu = la Montagne : lieu d’élévation. Elle évoque la montée intérieur à laquelle Jésus nous invite.
Les béatitudes (appelées « Discours sur la Montagne ») sont présentées par Matthieu comme un
programme de vie qui nous élève vers Dieu. Ce sont des attitudes, toutes, d’ordre spirituel et morale : les
pauvres de cœur, ceux qui pleurent, les doux, ceux qui ont faim et soif de la justice, les miséricordieux,
les cœurs purs et les artisans de paix. Elles sont un sommet de la vie morale et spirituelle, avec une double
dimension : « la disponibilité » à Dieu et « l’amour » pour les autres.
1. Destinateurs = Les foules : Tout homme. Les béatitudes sont un programme de vie pour tous, ouvert à
tous ; Un style de vie pour tout homme qui cherche le bonheur en Dieu et veut suivre le Christ.
2. Sens original = Elles sont d’abord la Bonne Nouvelle de ce que Dieu a fait pour les hommes en Jésus-
Christ, avant d’être un appel à ce que les hommes doivent faire pour entrer dans le Royaume de Dieu.
• Au niveau de Jésus : les béatitudes sont un geste de tendresse de Dieu, qui en Jésus-Christ
apportent le bonheur aux pauvres et aux démunis. En, Jésus l’amour de Dieu se fait proche,
visible, réalité parmi les hommes.
• Au niveau des hommes : elles sont une invitation à vivre dans les conditions d’entrée dans le
Royaume (d’être un peuple des bienheureux), dans un climat de pauvreté spirituelle et d’amour
des hommes.
3. Le But = vivre Heureux : heureux sont ceux et celles qui vivent ainsi. Ce programme de vie nous est
donné pour notre bonheur et non pour nous rendre la tâche plus difficile. Jésus ne donne aucune formule
magique pour ne plus éprouver le mal et la souffrance, mais il nous encourage à tenir bon et à rester
fermes dans l’espérance que toutes les épreuves, même les plus dures comme la persécution, ne nous
séparent pas de son amour.

II. Vivre les Béatitudes, « c’est faire de notre vie une œuvre d’art »

Découvrons à présent comment vivre les béatitudes fait de notre vie une œuvre d’art :

Une œuvre d’art : c’est le résultat sensible d’une action ou d’une séries d’actions
orientées vers une fin. Il y a dans l’œuvre d’art 3 moments :
• La conception : l’image de la forme à donner
• La réalisation : Les actions à poser pour donner forme
• Le résultat : L’éclat de son œuvre

Avez-vous une image de comment vivre heureux comme chrétien ? quelles sont les actions qui vous orientent
vers cette fin ? et enfin appréciez-vous de devenir ou de faire partir d’un peuple des bienheureux ?

1. Les béatitudes sont, en elles-mêmes, l’image de comment vivre heureux

Elles commencent par ce simple mot : « Heureux ». C’est le refrain que Jésus répète et veut fixer dans notre cœur.
c’est un message d’intériorité car le bonheur en Dieu est avant tout intérieur et souvent en contradiction avec
l’extériorité de ce que le monde nous offre.

• Les Saints – qui ont vécu les béatitudes et qui jouissent de la félicité éternelle – sont pour nous cette image
heureuse qui nous inspire. Les béatitudes deviennent pour nous, l’image de comment vivre heureux
comme chrétien : une raison de plus de nous élever vers Dieu, là où le spirituel peut décliner.
• « Heureux » peut signifier aussi « Béni » (une bénédiction) = les bénis de Dieu, puisque nous sommes
aptes à recevoir la bénédiction du Royaume : « venez, les bénis de mon Père, recevez en héritage le
Royaume » (cf. Mt 25, 31-46). Se savoir béni de Dieu, n’est-il pas un motif de joie ? Quel chrétien ne
voudrait pas être béni de Dieu ?
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• Les béatitudes se vivent dans le présent avant de recevoir sa récompense dans les cieux : non seulement
« tu seras » heureux, mais « tu es » heureux . Tu es heureux à chaque fois que tu écoutes la parole
de Dieu et la mettes en pratique (cf. Lc 11, 28). Voilà la réalité de la vie chrétienne. C’est vivre dans
la joie d’entendre la vie comme une histoire d’amour, avec Dieu fidèle qui ne nous abandonne jamais et
veut être en communion avec nous toujours. Voici le motif de notre joie, d’une joie que personne au
monde et qu’aucune circonstance de la vie ne peuvent nous enlever. C’est une joie qui donne la paix
même dans la souffrance, [une joie] qui déjà nous donne un avant-gout de ce bonheur qui nous attend
pour toujours. C’est dans la joie de la rencontre (avec Dieu et nos frères) que nous nous disons :
« heureux ».

2. Les béatitudes sont des actions vertueuses à pratiquer

Pour etre « bienheureux », il faut vivre certaines vertus « spirituelles et morales » (les béatitudes), qui
rendent pratique les vertus théologales (la foi, l’espérance et l’amour). Et les motifs de chacune des
Béatitudes sont frappants. En eux nous voyons un renversement de la pensée commune, selon laquelle
sont heureux les riches, les puissants, ceux qui ont du succès et sont acclamés par les foules. Pour Jésus, au
contraire, heureux sont les pauvres, les doux, ceux qui restent justes même au prix de faire triste figure, les
miséricordieux, les persécutés. Qui a raison, Jésus ou le monde ? Pour comprendre, regardons comment a
vécu Jésus (il est la personne qui incarne parfaitement chacune des béatitudes auxquelles il nous invite) :

1. Jésus a vécu pauvre de choses et riche d’amour, il a usé des richesses matérielles en vue du
Royaume et non pour s’enrichir égoïstement. Il a guéri tant de vies, mais n’a pas épargné la sienne.
Il est venu pour servir, non pour être servi ; il nous a enseigné que ce n’est pas celui « qui a » qui
est grand, mais celui « qui donne ».
2. Il est juste et doux, il n’a pas opposé de résistance et s’est laissé condamner injustement. De cette
façon, Jésus a porté dans le monde l’amour de Dieu. Seulement ainsi, il a vaincu la mort, le péché,
la peur et la mondanité elle-même : avec la seule force de l’amour divin. À une autre occasion, il a
invité ses disciples à l’imiter en cela : « Chargez-vous de mon joug et mettez-vous à mon école, car je
suis doux et humble de cœur, et vous trouverez soulagement pour vos âmes », disait-il (Mt 11, 29).
3. Jésus a, lui aussi, pleuré nous rapporte l’évangéliste Luc (cf. Lc 19, 41), en constatant que Jérusalem
n’accueille pas le salut que Dieu lui envoie.
4. Il a témoigné sa faim et sa soif de la justice en prenant la défense des petits et des faibles.
5. Il est l’homme miséricordieux par excellence : il est porteur du message de miséricorde de la part du
Père pour tous les hommes, mais il est aussi celui en qui brille cette miséricorde, puisqu’il a pris sur lui
nos péchés et toutes leurs conséquences pour que nous en soyons libérés et guéris.
6. Il a un cœur pur : un cœur qui ne dévie pas de Dieu pour adorer des idoles quelles qu’elles soient. Son
amour envers le Père est indéfectible, comme il en témoigne du début à la fin de sa vie terrestre.
7. Il est l’artisan de la paix par excellence. Une paix, sans doute différente de celle que s’imagine le monde
(cf. Jn 14, 27), mais une paix de l’âme si profonde qu’elle répond à toutes les aspirations humaines.
8. Pour finir, Il a vécu la persécution en sa propre chair et en son propre esprit, qui l’a conduit jusqu’à la
mort sur la croix. Jésus sait bien que ses disciples ne sont pas exempts de la persécution. La fidélité dans
l’amour va jusque-là : « Il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie » (Jn 15, 13).

3. Les béatitudes, une œuvre éclatante de simplicité et de gratuité



Regardons Jésus : lorsqu’il nous dit comment vivre, il ne nous demande pas d’élever de grandes œuvres ou de
nous signaler en accomplissant des gestes extraordinaires. Il nous demande de réaliser une seule ouvre d’art,
possible pour tous : celle de notre vie. Les béatitudes sont alors un plan de vie : elles ne demandent pas des
actions surhumaines, mais d’imiter Jésus dans la vie de tous les jours. Elles nous invitent à tenir notre cœur
propre, à pratique la douceur et la justice malgré tout, à être miséricordieux avec tous, à vivre l’affliction en étant
unis à Dieu. C’est la sainteté du vivre-au-quotidien, qui n’a pas besoin de miracles et de signes extraordinaires.
Les béatitudes ne sont pas pour des super-hommes, mais pour qui affronte les défis et les épreuves de chaque jour.
Celui qui les vit, selon Jésus, rend propre le monde. Il est comme un arbre qui, même en terre aride, absorbe chaque
jour de l’air pollué et le restitue oxygéné. Ainsi notre vie devient source de bonheur. Ce qui nous amène à notre
dernier point :
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III. La communauté, terre des béatitudes

La vie chrétienne n’est pas une vie faite pour la vivre seul mais plutôt ensemble : en communion fraternelle, en
communauté chrétienne, en Église (Mt 3, 13 ; Jn 17, 21) : « Qu’il est bon, qu’il est doux pour des frères de vivre
ensemble et d’être unis » (cf. Ps 133, 1). Cependant, la communion fraternelle n’est possible que quand chacun
accepte de devenir un grain de blé qui meurt pour porter de fruit : « En vérité en vérité, je vous le dis, si le grain
de blé qui est tombé en terre ne meurt, il reste seul ; mais, s’il meurt, il porte beaucoup de fruit » (Jn 12, 24). Nos
martyrs ont certes écouté cette parole de Jésus le jour de leur profession religieuse et ont compris qu’on ne peut
être à la suite du Christ qu’en acceptant de « mourir en soi-même ». Mourir en soi-même est en réalité le chemin
des béatitudes, le secret d’une véritable joie, car en mourant à de petites choses (s’en détacher), nous sommes
libres d’aimer, d’apprécier et de servir les autres. En mourant aux personnes, à une façon sélective et possessive
de les aimer, nous devenons frères de toute l’humanité à aimer et à sauver en Jésus. En mourant en nous-mêmes,
nous laissons toute la place à Dieu et à l’irruption de son Esprit dans nos vies. On ne meurt pas en soi-même juste
pour soi-même, c’est pour porter de fruit et devenir un canal de la présence de Dieu pour ses frères.

La communion fraternelle (le vivre ensemble) devient le lieu où se vit les béatitudes, une école où nous
apprenons et nous nous entraidons à vivre les béatitudes. Elle est la terre des béatitudes, la terre des
bienheureux où la semence de la parole germe, où la vie chrétienne devient expression de donation, d’un
amour fraternel concret qui n’est plus image, mais réalité palpable. C’est en commençant par la communauté
dans laquelle il vit, que le chrétien promeut la paix et la justice, fait preuve de douceur et de miséricorde (évite
d’agresser ou d’écraser les autres), vit une pauvreté et une pureté de cœur (une relation d’amour indéfectible
envers Dieu), accepte les persécutions (les épreuves et les contradictions du monde) et partage sa douleur, face
aux abominations que l’on commet. Et, il faut vivre tout cela dans la joie, nous invite le Christ, car Il nous
réconforte et nous rassure de sa présence (cf. Mt 28, 20). Ainsi, nos communautés chrétiennes sont donc des
oasis des béatitudes – des oasis de paix, de miséricorde, de pureté, d’amour, de justice etc. – face à un
monde aride, desséchée (par la violence, l’injustice, la dureté, la cruauté, l’égoïsme, le relativisme religieux,
la désolation et l’insécurité etc.). Ainsi, nos bienheureux nous apprennent que chaque fois que nous rencontrons
nos frères dans l’amour, nous nous mettons dans une condition qui nous permet de découvrir quelque chose de
nouveau de Dieu.

Aujourd’hui le Seigneur nous fait découvrir par les béatitudes, qu’il faut faire de notre vie une œuvre d’art et de la
communion fraternelle, la terre des béatitudes et qu’ETRE HEUREUX :

1. Ce n’est pas avoir un ciel sans tempête, une route sans accident de circulation, un travail sans fatigue,
des relations sans désillusions. C’est trouver la force dans le pardon, l’espoir dans les batailles, la
sécurité sur la scène de la peur, l’amour dans les désaccords.
2. Ce n’est pas que tout est parfait, mais que tu décides de regarder au-delà des imperfections.
3. Ce n’est pas seulement apprécier le sourire, mais aussi réfléchir sur la tristesse.
4. Ce n’est pas seulement célébrer la réussite, mais apprendre les leçons des échecs.
5. Ce n’est pas seulement se sentir heureux avec des applaudissements mais être heureux dans
l’anonymat.
6. Ce n’est pas d’avoir tout ce que l’on désire, mais d’apprécier ce que l’on a.
7. Ce n’est pas une fatalité du destin, mais une victoire pour ceux qui sont capables de voyager dans leur
être.
8. Ce n’est pas une station de la vie, mais une manière de voyager.
9. C’est remercier Dieu chaque matin pour le miracle de la vie : reconnaître que la vie vaut d’être vécue,
malgré tous les défis et toutes les épreuves.
10. C’est éliminer deux choses : la peur d’un mal futur et le souvenir d’un mal passé.
11. C’est de cesser de se sentir victime des problèmes et de devenir acteur de son histoire.
12. C’est trouver la force d’éloigner le mal, pour être à mesure de vivre le bien.
13. C’est traverser les déserts en dehors de soi, mais être capable de trouver une oasis dans les recoins de
son âme.
14. C’est savoir parler de soi et avoir le courage d’entendre un « non ».
15. C’est se sentir confiant de recevoir une critique bien qu’injuste.
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16. C’est embrasser la vie et vivre des moments poétiques avec les autres.
17. C’est penser au bonheur des autres, car le bonheur, quand il est partagé, il est également multiplié.
18. C’est laisser la créature qui vit en nous, libre, joyeuse et simple.
19. C’est avoir la maturité nécessaire pour dire : « je me suis trompé ». C’est avoir le courage de dire :
« Pardonne-moi ». C’est avoir la sensibilité pour dire : « J’ai besoin de toi ». C’est avoir la capacité
de dire : « Je t’aime ».

Laisse que ta vie puisse être un jardin d’occasions d’être heureux. Dans tes printemps, sois amant de la joie.
Dans tes hivers, sois ami de la sagesse. Tu découvriras qu’être heureux ce n’est pas avoir une vie parfaite,
mais : User les larmes pour irriguer la tolérance ; Utiliser les pertes pour aiguiser la patience ; Utiliser les
erreurs pour sculpter la sérénité ; Utiliser la douleur pour lapider le plaisir ; Utiliser les obstacles pour ouvrir
les fenêtres de l’intelligence. Ne renonce jamais au bonheur, vis les béatitudes. Sois donc un homme ou
une femme heureux(se) dans ta vie. Et si la vie te donne une centaine de raisons de pleurer, montre-lui
que tu en as mille de sourire.

Que Jésus, qui nous appelle « heureux », nous donne la grâce d’aller toujours de l’avant sans nous
décourager, en grandissant dans l’amour « entre nous et envers tous » (1 Th 3, 12).

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