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LA BIOSECURITE

La Biosécurité en élevage de production, décembre 2014

2014 EN ELEVAGE DE PRODUCTION


2014

Catherine Calvar, Thomas Lemoine, Chambres d’agriculture de Bretagne

Ce document provient de l’Agrithèque, base de connaissances des Chambres d’Agriculture de Bretagne. Toute reproduction sous
quelque forme que ce soit, n’est autorisée que dans le cadre de l’usage privé du copiste ou dans le respect de la réglementation en
vigueur.

Les mesures de biosécurité appliquées en élevage de porc limitent la


transmission des pathogènes. Dans le contexte économique actuel, ces
mesures peuvent apparaitre comme des contraintes supplémentaires
nécessitant des investissements ou changements de pratiques. Néanmoins,
elles contribuent à la maîtrise du sanitaire : réduction de l’utilisation des
antibiotiques, optimisation des performances. Cette synthèse fait le point
via deux enquêtes, d’une part sur les préconisations des vétérinaires et Cat
techniciens, d’autre part, sur les choix des éleveurs de porcs plus ou moins
impliqués dans cette démarche de biosécurité.

1. Introduction 2. Bibliographie
2.1. Définition de la biosécurité
Depuis plus de dix ans, les Chambres
d’agriculture de Bretagne, l’IFIP et l’Anses ont La biosécurité est définie comme un ensemble de
communiqué sur la biosécurité, via différentes mesures permettant de réduire les risques
plaquettes sur la protection sanitaire des d’introduction et de diffusion d’agents pathogènes
élevages de porc, le nettoyage-désinfection. Le dans un élevage. Cela implique d’adopter un
plan EcoAntibio 2017 accroît la prise de ensemble d’attitudes et de comportements pour
conscience des éleveurs sur la maitrise du réduire les risques (FAO/WB/OIE, 2010). La
sanitaire, aidée par la restructuration des biosécurité contribue à maîtriser la santé des
élevages avec la mise aux normes bien-être des porcs. On distingue :
truies gestantes. Actuellement, les Instituts et
les groupements proposent aux éleveurs de • La biosécurité externe, qui a pour objectif
nombreuses recommandations en termes de d’empêcher ou de limiter le risque
biosécurité, d’hygiène et de conduite d’élevage au d’introduction d’un nouvel agent
travers du guide de bonnes pratiques d’hygiène pathogène dans un élevage. Elle consiste
(GBPH) et de son manuel d’application (IFIP, à contrôler l’ensemble des voies de
2009). Néanmoins, certaines mesures ne sont contamination d’un élevage.
pas encore suffisamment appliquées en élevage. • La biosécurité interne, qui a pour but de
limiter la diffusion ou la pression
d’infection d’un agent pathogène déjà
Ce projet mené par le pôle Porc de la Chambre présent dans un élevage. Le respect des
d’agriculture de Bretagne a pour objet d’étudier recommandations zootechniques et de
les freins à la mise en place des règles de conduite d’élevage contribue également
biosécurité dans les élevages bretons et de au maintien de la santé des animaux
mesurer l’impact de la mise en place de critères (Hémonic A, 2013).
de biosécurité en élevage sur les performances
technico-économiques. La biosécurité permet de maîtriser l’état sanitaire
de l’élevage. L’apparition des signes de maladie
en élevage dépend aussi de plusieurs facteurs :
la virulence de l’agent pathogène, la pression de
Des freins de nature économique, technique et
contamination, l’état immunitaire général et
liés aux connaissances de l’éleveur pourraient
spécifique de l’élevage, la configuration et le type
être la cause de la non application de mesures de
de conduite de l’élevage et enfin la gestion de
biosécurité. Quelles solutions avons-nous pour
l’hygiène (Madec et Robert, 2002).
lever ces freins ? L’objectif final est de permettre
à chaque éleveur d’évaluer son niveau de
biosécurité à travers une grille de synthèse
identifiant les points d’amélioration et les priorités 2.2. Voies de contamination
d’action. Les voies de contamination par un agent
pathogène sont nombreuses dans un élevage.

Chambres d’agriculture de Bretagne – Pôle porc-aviculture 1


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La voie la plus à risque de transmission d’un agent concluent que l’accompagnement technique dans
infectieux est le contact direct de porc infecté à la mise en œuvre du paquet Hygiène est concret
porc sain. et bien avancé dans ces bassins de production.
Figure 1 : Les voies de contamination des Néanmoins, certaines mesures sont loin d’être
porcs appliquées par tous et parfois même dans moins
d’un élevage sur deux. Elles concernent la
quarantaine, la qualité de l’eau, la gestion de
l’embarquement des porcs et de l’équarrissage, le
respect de la conduite en bande ou des densités,
l’hygiène du personnel et des interventions
(Hemonic et al., 2010 ; Corrégé et al., 2012). Ce
sont des voies d’amélioration de la biosécurité
dans les élevages.

2.4. Le respect de la biosécurité


impacte les résultats tech-
niques et économiques
L’introduction d’animaux reproducteurs dans
Le non-respect des règles de biosécurité et
l’élevage doit être réalisée avec la plus grande
d’hygiène, la durée du vide sanitaire, la densité
attention. Le principal risque de contamination
en post-sevrage et l’absence de transition
est l’apport dans l’élevage de virus tel que le
alimentaire au début d’engraissement sont autant
syndrome dysgénésique et respiratoire porcin
de facteurs associés à l’infection des bandes de
(SDRP), d’autant plus que sa transmission
porcs par Lawsonia intracellularis, agent
indirecte par l’air est facilitée. D’autres virus sont
étiologique de l’iléite du porc (Fablet et al., 2006).
aussi omniprésents comme le circovirus porcin 2
De même, le mélange de bandes en maternité,
(PCV2) dans les élevages en France (Martineau et
l’absence de conduite en tout plein-tout vide en
Morvan, 2010). Leur maîtrise impose une
engraissement, d’adaptation au microbisme
approche globale multifactorielle.
digestif et de traitement antiparasitaire en
Les autres voies de contamination concernent les quarantaine, la mauvaise qualité de l’eau et le
nuisibles, les animaux sauvages et domestiques, non-respect des protocoles de nettoyage-
les véhicules, le matériel, l’aliment, l’eau, la désinfection sont des pratiques influant sur la
semence, les effluents, l’air sans oublier le séroprévalence en salmonelles (Corrégé et al.,
personnel et les visiteurs. 2008). Enfin, ces pratiques périlleuses sont
également des facteurs de risque dans
l’expression de la maladie d’amaigrissement du
2.3. La biosécurité actuelle en porcelet ou MAP (Rose et al., 2003). Le respect
des protocoles de nettoyage-désinfection est
élevage
indispensable pour une bonne maîtrise du
Les mesures de biosécurité contribuent à la sanitaire, et notamment de la pathologie
maîtrise des infections en élevage de porc. De digestive en maternité et post sevrage, de la
nombreuses études mettent en évidence des pathologie respiratoire en engraissement ou
pratiques de biosécurité, d’hygiène ou de encore dans la prévention de la MAP (Corrégé,
conduite d’élevage comme facteurs protecteurs 2002). Toutes ces maladies sont source de pertes
de l’expression de pathologies en élevages. C’est économiques importantes pour l’éleveur de par la
le cas par exemple pour la MAP, l’iléite, la réduction des performances techniques (IC,
pathologie respiratoire et le portage de GMQ…), l’augmentation des dépenses de santé,
salmonelles (Rose et al., 2003 ; Fablet et al., de la mortalité et du temps de travail.
2006, Corrégé et al., 2008).
Certains auteurs ont tenté de chiffrer
Un audit réalisé par Hémonic et al., en 2010 dans économiquement l’impact de l’application des
les régions Poitou-Charentes, Alsace-Lorraine, règles de biosécurité et de maîtrise sanitaire selon
Bourgogne et Champagne-Ardenne révèle que les la conception et la conduite d’élevage. Des
éleveurs de porcs appliquent les mesures pratiques favorables permettent de dégager une
réglementaires, telles la présence de quai marge standardisée supérieure de 182
d’embarquement, d’une quarantaine, stockage euros/truie/an (Corrégé et al., 2011). En effet,
des médicaments et des produits périmés, emploi ces pratiques permettent d’améliorer les
de désinfectants avec la triple homologation. Une performances des animaux : +1,9 porc produit
majorité d’éleveurs va au-delà des simples par truie et par an, + 28 g/j de GMQ et +0,54
exigences réglementaires. Corrégé et al., en 2012 point de TVM auxquels s’ajoutent l’amélioration
aboutissent au même constat. L’utilisation de de l’indice de consommation (– 0,14 point) et la
tenues spécifiques pour les visiteurs, la présence diminution des pertes sevrage-vente (–2,2
d’un local d’embarquement et le nettoyage- points). Une autre étude menée par Cariolet et
désinfection des salles sont respectés dans la al., en 2012 a permis d’approfondir ce constat en
grande majorité des élevages. Les auteurs distinguant les élevages selon leur niveau de

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biosécurité par quart supérieur et inférieur. Le lorsque que la distance séparant les élevages est
différentiel de marge standardisée entre ces deux inférieure à 3 km (Madec et Robert, 2002).
catégories d’élevage est de 202 euros/truie/an.
De plus, Laanen et al., 2011 ; Collineau et al.,
2014 ont montré qu’améliorer le niveau de
biosécurité permet en plus de réduire l’utilisation
3. Matériel et méthodes
d’antibiotiques. Ce même constat a été établi par 3.1. Enquêtes auprès de
les Chambres d’Agriculture de Bretagne avec
structures et des éleveurs
l’existence d’une relation entre les dépenses de
santé et le statut sanitaire des élevages ainsi que
le respect de la conduite en bande et des densités Les critères techniques et les aspects humains
(Larour et Pellois, 2010). Ceci démontre l’intérêt (connaissances, attitudes, comportements) qui
des bonnes pratiques d’hygiène et de maîtrise de limitent le respect des règles de biosécurité sont
la santé pour optimiser les coûts de production. regardés pour mieux comprendre le point de vue
et le comportement des acteurs.
3.1.1. Enquêtes auprès de
2.5. Méthodes d’évaluation spécialistes
Des grilles d’évaluation du niveau de maîtrise du L’enquête auprès des professionnels de la
sanitaire en élevage de porc ont été proposées production porcine : vétérinaires, animateurs
par différents auteurs (Cariolet et al., 2009 ; techniques, techniciens de suivi d'élevage,
Laanen et al., 2010, Biocheck). Ces grilles sont d'alimentation, de génétique est réalisée soit par
basées sur l’attribution d’une note à partir d’un envoi du questionnaire par courrier ou mail, soit
relevé de plusieurs critères influençant la qualité par entretien semi-directif. 33 personnes ont
sanitaire de l’élevage. Une conduite d’élevage en répondu sur leurs préconisations (40 % de
flux tendu des bâtiments et avec un défaut de vétérinaires, 60 % techniciens) et sur l'application
marche en avant est associée à un faible score
des mesures de biosécurité en élevage de
d’hygiène (Cariolet et al., 2009). Cette faible
production.
hygiène associée au non-respect de la conduite
en bandes est source d’augmentation de pertes Tableau 1 : Domaines d’activité des
notamment en période sevrage-vente professionnels enquêtés
(Guyomarc’h et al., 2005). L’amélioration de la
maîtrise sanitaire par le respect des règles de
biosécurité devrait permettre aux animaux Domaine Technicien Vétérinaire Ensemble
d’exprimer pleinement leur potentiel génétique "Experts" 1 3 4
sur cette période et ainsi améliorer les résultats.
Suivi
1 9 10
sanitaire
2.6. Les pré-requis à Génétique 4 1 5
l’évaluation de la biosécurité
Conduite 11 11
L’application des règles de biosécurité est à
raisonner selon le type d’élevage, son contexte Aliment 3 3
économique, sa situation géographique et sa Total 20 13 33
conception :
3.1.2. Enquêtes en élevages
- un parc de bâtiments clôturé, perpendiculaire
aux vents dominants et permettant la réalisation L’enquête auprès de 23 éleveurs est réalisée
d’une marche en avant avec des circuits pendant l’hiver 2013-2014 par entretien à
spécifiques est un pré-requis favorable au respect l’élevage. Celle-ci a permis de mieux cerner les
des règles de biosécurité. La séparation des motivations ou les réticences des uns et des
ateliers naissage/post-sevrage/engraissement, la
autres, les mesures appliquées et les contraintes
cohérence de la chaîne de bâtiments, la limitation
rencontrées. Les élevages retenus sont des
de la taille des salles et des cases contribuent à
la maîtrise de la pression d’infection (Nevannen naisseurs-engraisseurs conventionnels engrais-
et al., 2011, UGPVB, 2012). L’âge et l’usure des sant « en propre » plus de 80% de leur
bâtiments n’est pas non plus à négliger. production. Le suivi en GTTT et en GTE est
recommandé pour connaître les résultats
Laanen et al., en 2011 ont constaté que le niveau
techniques et économiques de ces élevages. Deux
de biosécurité était plus faible dans les bâtiments
anciens. catégories d’éleveurs ont été sélectionnées, à
dire d’experts : la catégorie "Bons" qui regroupe
- la situation géographique et notamment la 14 éleveurs très impliqués dans l’application des
densité porcine dans les régions sont des facteurs mesures de biosécurité. La catégorie "Moins
importants à prendre en compte dans l’étude de
Bons" est constituée de 9 éleveurs se sentant
la biosécurité. En effet, la transmission aérienne
moins ou peu concernés par cette démarche.
d’agents infectieux peut présenter un risque

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3.2. Analyse des données un nettoyage-désinfection régulier. Une


importance particulière est à donner aux locaux,
Pour les deux enquêtes, une analyse descriptive couloirs et zones de transfert qui sont parfois
est réalisée, aussi bien pour les préconisations négligées. Ensuite, le respect de la conduite est
des professionnels que pour les mesures abordé avec la conduite en bandes et le non
appliquées par les éleveurs. mélange d’animaux. Les professionnels apportent
également une importance à l’organisation du
travail et de l’élevage. La marche en avant et le
déplacement organisé sont les mesures
4. Résultats principales. L’un des spécialistes insiste : « La
stratégie de marche en avant est très importante,
4.1. La biosécurité vue par les car aujourd’hui beaucoup d’éleveurs ont des
professionnels salariés et des élevages avec des sites
indépendants ». Enfin, l’hygiène au quotidien de
4.1.1. Biosécurité externe et
l’éleveur, du personnel et des intervenants est
interne citée comme 4ème axe.
Pour les 33 professionnels interrogés, la
biosécurité est un ensemble de mesures qui Figure 3 : Axes à privilégier en Biosécurité
contribuent à la maîtrise de la santé en élevage. interne (% de réponses)
Les définitions varient selon les interlocuteurs et
leur domaine d’activité, mais les deux notions de
biosécurité externe et interne ressortent
clairement dans les réponses. D’autres termes
comme la protection sanitaire des élevages, ainsi
que le statut sanitaire de l’élevage et des animaux
sont aussi évoqués.
Les priorités ou recommandations en matière de
biosécurité externe à mettre en place varient
selon les interlocuteurs. Les personnes
interrogées ont pu donner plusieurs réponses.
Quatre axes sont ressortis comme primordiaux en
matière de biosécurité externe car nommés par le
plus grand nombre de personnes. La mesure
principale réside dans la protection de l’élevage
(clôture, dératisation, entrées d’air, épandage…).
Ensuite, les professionnels insistent sur 4.1.2. Freins à la mise en place de
l’importance du sas d’entrée et du lavage (au la biosécurité
moins) des mains. Les circuits et les mouvements
des animaux sont un autre axe à privilégier, avec
Le frein humain est le frein majeur identifié
deux points de vigilance : le quai
(88 %) pour la mise en place de mesure de
d’embarquement et le bac d’équarrissage. Enfin,
biosécurité, avec mise en avant du poids des
ils soulignent l’importance de la qualité des
habitudes, du scepticisme des éleveurs ou le
jeunes reproducteurs introduits dans l’élevage et
manque de rigueur concernant l’intérêt des
de leur adaptation.
mesures de biosécurité. Le bâtiment vient en
Figure 2 : Axes à privilégier en Biosécurité second (70 %) avec notamment les problèmes de
externe (% de réponses) cohérence de la chaîne bâtiment qui empêchent
parfois de délimiter des zones de naissage et
d’engraissement. Ensuite viennent le travail
(30 %) et le coût des mesures (30 %).
Figure 4 : Freins à la mise en place de
mesures de biosécurité (% de réponses)

88
70

30 30
18
Comme pour la biosécurité externe, les mesures
mises en avant pour la biosécurité interne sont
différentes selon les domaines d’activité des Hommes Bâtiment Travail Coût Situation
professionnels enquêtés. Ils recommandent Elevage
d’abord une bonne hygiène des bâtiments avec

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4.1.3. Mesures de biosécurité c’est possible en totalité ou partiellement en


avec impact sur les prenant des mesures appropriées.
performances
Les mesures prioritaires à mettre en place dans
23 personnes enquêtées sur 33 confirment que la ce cas sont les suivantes :
mise en place de bonnes pratiques de biosécurité • le lavage-désinfection
permet une amélioration des performances en • la limitation, voire l’arrêt des mélanges de
élevage. 4 soulignent qu’il est difficile de bandes pour les porcs en croissance
• le préchauffage des salles en post-
l’affirmer.
sevrage et en engraissement
Lorsque l’on leur demande trois mesures qui ont • le changement de tenue entre secteurs
amélioré les performances, les réponses des d’élevage
experts sont très diverses. Néanmoins le respect • la vente de porcelets ou le façonnage
du chargement, le changement de tenue et de dans le but de respecter les densités
bottes, la sectorisation de l’élevage, la gestion de • avoir plus d’hygiène
la quarantaine, la marche en avant, ainsi que le
lavage et désinfection des préfosses, l’utilisation Un technicien souligne que ces maillons faibles
d’aiguilles à usage unique sont les principales sont compensés par une politique vaccinale plus
mesures applicables durablement et qui ont un importante. Un autre positive en disant que la
impact sur les performances. Exceptée la mise en place de ces règles peut être à l'origine
sectorisation de l’élevage, les mesures citées ne d'un cercle vertueux qui annule ces maillons
nécessitent pas de lourds investissements, faibles.
seulement de la discipline de la part de l’éleveur
et des salariés pour la circulation des personnes
4.1.5. Organiser la biosécurité
et des animaux et du travail pour le lavage et
désinfection des préfosses. dans les élevages avec
salariés et le week-end
Figure 5 : Mesures de biosécurité avec
Impact sur performances (% des réponses) Les avis sont partagés sur ce sujet. Les élevages
avec salariés sont en général des élevages de
taille importante, avec sectorisation, tâches
spécifiques, sas avec tenues qui permettent déjà
l’application de certaines mesures de biosécurité.
Les salariés sont souvent aussi des jeunes, donc
plus sensibles au respect de ces mesures, à
condition que le responsable le soit aussi. Selon
d’autres experts, il ne devrait pas y avoir de
différence entre les élevages avec ou sans salarié,
car un éleveur qui travaille seul devrait aussi
respecter ces mesures, plus facilement.
L’application des mesures de biosécurité, c’est un
état d’esprit. Pour 14/27 personnes qui ont
Cependant, pour la majorité des professionnels répondu à cette question, l’application des règles
(70 %), les mesures de biosécurité actuellement de biosécurité est moins rigoureuse le weekend
en place dans les élevages ne sont pas qu’en semaine, que ce soit dans les élevages avec
suffisantes. Il n’est pas toujours facile de salariés ou lorsque l’éleveur travaille seul. Le
respecter scrupuleusement les règles de temps disponible est plus réduit.
biosécurité : le poids des habitudes, l’organisation
du parc bâtiment et la charge de travail viennent Les techniciens soulignent aussi que la biosécurité
souvent perturber la bonne marche des est plus aléatoire dans les gros élevages, car le
événements. Néanmoins, ces contraintes ne sont weekend, les salariés sont moins nombreux et ils
pas insurmontables à condition de s’en donner les doivent passer dans tout l’élevage. Le
moyens. Des mesures simples comme changer de changement de tenue entre les différents
bottes et de tenues, respecter le chargement, la secteurs ou le respect d’un minimum de marche
marche en avant et s’assurer de la qualité en avant ont été évoqués. Un tiers des enquêtés
sanitaire et bonne adaptation des jeunes souligne que lorsque les règles sont claires pour
reproducteurs peuvent réellement apporter un le personnel, la biosécurité est identique la
gain. semaine et le weekend.
4.1.4. Mesures de biosécurité :
Au final, d’après les professionnels, la biosécurité
mesure compensatrice ? est un élément aujourd’hui davantage pris en
compte par les éleveurs pour leur conduite
De l’avis des personnes interrogées, la d’élevage, cependant, cette sensibilisation est
compensation des maillons faibles par la mise en très variable et peut être améliorée avec la mise
place de mesures de biosécurité n’est pas en place de mesures simples.
possible ou difficile (17/32). Pour l’autre moitié,

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Comme le précisent plusieurs professionnels : Figure 6 : Répartition des élevages (en


- Le niveau de global de biosécurité de l’élevage nombre) selon la catégorie « Biosécurité »
est la résultante du maillon le plus faible de la et l’effectif truies présentes
chaîne
- La stratégie de marche en avant est très
importante, car aujourd’hui, beaucoup d’éleveurs >700
ont des salariés, et des élevages avec des sites 300-600
indépendants.
- La biosécurité est une culture qui demande de 200-300
la rigueur, les éleveurs arrivent à suivre
facilement, s’ils sont convaincus de son intérêt. 150-200
Pour beaucoup, cela devient du bon sens 100-150
- Le conseil doit être adapté à chaque éleveur, en
fonction de son niveau de départ, de sa volonté 0 1 2 3 4 5 6
de changer, de ses bâtiments.
Moins Bons Bons

4.2. Enquête auprès des


éleveurs Les performances de productivité annuelle des
truies (GTTT) sont supérieures dans la catégorie
4.2.1. Description de l’échantillon
« Bons », en lien avec un nombre de sevrés par
Les 23 élevages bretons sélectionnés sont
portée plus élevé. En GTE, les kilos produits par
équitablement répartis sur les quatre truie présente sont aussi supérieurs. A noter un
départements et issus des principaux taux de pertes sevrage-vente plus faible, mais
groupements, 14 dans la catégorie « Bon », 9 des dépenses de santé plus élevées pour cette
dans la catégorie « Moins bons ». catégorie d’éleveurs.
Tableau 3 : Performances zootechniques des
Tableau 2 : Caractéristiques des élevages élevages enquêtés (GTTT et GTE 2013)
enquêtés
"Bons" "Moins Ensemble
Bons"
« Moins
« Bons » Ensemble Nb de truies
Bons » 430 164 326
présentes
Nb élevages 14 9 23 Sevrés/truie
29,8 27,6 28,9
productive/an
Truies présentes 441 168 337
Sevrés/portée 11,8 11,3 11,6
Nb élevages Age au sevrage(j) 22,7 24,6 23,3
9 2 11
multisites Nb de porcs
produits/truie 24,5 23,1 23,9
Nb élevages présente/an
4 1 5
avec façonnage Kg produits/truie
2748 2576 2674
Nb élevages présente/an
avec autre 2 4 6 IC global 2,83 2,85 2,84
production Taux de pertes
4,9 5,8 5,3
Sev-vente (%)
SAU (Ha) 85 104 92 Dépenses de
santé (€/100 kg 6,21 4,99 5,69
Le profil des 2 catégories d’élevages est différent carcasse)
sur plusieurs critères : taille d’élevage supérieure,
plus de multisites et de façonnage pour les
« Bons ». Par contre, la SAU moyenne est plus 4.2.2. Une biosécurité externe à
faible et une production animale autre que le porc parfaire
(lait ou viande) sont moins fréquentes que dans Tous les éleveurs le reconnaissent, les
la catégorie « Moins bons ». améliorations vis-à-vis de la limitation des
De plus, 69 % des élevages de la catégorie entrées des pathogènes dans l'élevage doivent
« Bons » se situent en zone de faible densité être poursuivies. Certaines mesures sont bien
porcine (aucun élevage dans un rayon de 1 km), appliquées, comme la signature du registre
contre 31 % pour la catégorie « moins bons ». d'élevage, la proposition de tenue pour les
visiteurs, l'absence d'animaux domestiques dans
l'élevage pour une majorité des éleveurs, la
présence d'au moins un lavabo.

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D'autres mesures sont parfois plus difficiles à que pour 40 % d'entre eux. Le lavage du quai
mettre en place et sont plus coûteuses, telle une d'embarquement après chaque départ n'est
clôture autour de l'élevage. Des écarts réalisé que par 30 % des éleveurs enquêtés.
d'application des mesures existent entre les 2 Un quai spécifique pour l'embarquement des
catégories d'éleveurs "Bons" et "Moins Bons". Ils réformes est peu fréquent. A noter cependant que
peuvent être liés à la motivation des éleveurs vis- 2 éleveurs (1 bon et 1 moins bon) utilisent une
à-vis de la biosécurité, mais aussi à la taille bétaillère pour amener leurs truies à l'extérieur
d'élevage plus importante chez les "Bons", ceci de l'élevage. Les élevages sont tous équipés de
pour un critère comme présence de douche pour bac d'équarrissage, mais seulement 87 % d'entre
le personnel et les intervenants de l’élevage. eux sont fermés.
Tableau 4 : Application des mesures de Tableau 5 : Application des mesures de
biosécurité externe dans les élevages biosécurité interne dans les élevages
enquêtés (% élevages) enquêtés (% élevages)
Critère "Bons" "Moins Ensemble Critère "Bons" "Moins Ensemble
Biosécurité Bons" Biosécurité Bons"
externe interne
Contrat de Quarantaine
93 56 78
dératisation conduite en tout 93 33 75
Mise en place plein tout vide
d'appâts par 7 44 22 Séparation
l'éleveur physique des
93 78 87
SAS Entrée 57 22 43 zones naissage-
Douche 100 44 78 engraissement
Clôture autour de Marche en avant
36 0 22 éleveur et 86 78 83
l'élevage
En cas d'absence personnel
- Enceinte de Matériel propre
86 56 74 à l'élevage 86 22 61
l'élevage fermée -
sonnette (échographe…)
1 aiguille par
50 22 39
truie
4.2.3. Marche en avant dans 83 Lavage couloirs
après transfert 92 75 90
% des élevages
animaux
Désinfection
Même s'ils reconnaissent qu'elle n'est pas
couloirs après
toujours parfaite du fait de la configuration des 54 25 43
transfert
bâtiments, la marche en avant des éleveurs et du
animaux
personnel est pratiquée dans une majorité des
Lavage quai
élevages enquêtés. Il en est de même pour la
(après chaque 43 11 30
marche en avant des animaux, même si elle est
départ)
parfois plus difficile à appliquer pour les mêmes
raisons de chaîne bâtiment. D’autres mesures de Quai spécifique
29 11 22
biosécurité interne sont moins bien appliquées, réformes
pour des raisons de temps de travail,
d'organisation des tâches. Cependant, elles le
sont davantage pour la catégorie « Bons », 4.2.4. Biosécurité externe ou
comme la conduite en tout plein tout vide en interne : quelle priorité ?
quarantaine : 93 % des éleveurs de la catégorie
« Bons » et seulement 1/3 dans la catégorie Les avis divergent sur le sujet, quelle que soit la
« moins bons ». L'utilisation d'une aiguille par catégorie d'éleveurs enquêtés. Les éleveurs qui
truie n'est réalisée que dans 40 % des élevages. optent de façon privilégiée pour la biosécurité
L'utilisation du matériel propre à l'élevage comme externe mettent en avant qu'il faut se protéger
l'échographe ou l'appareil de mesure de vis-à-vis de l'extérieur. L'éleveur doit être ferme
l’épaisseur de lard dorsal est plus importante vis-à-vis des intervenants dans l'élevage :
chez les "Bons". L’application plus satisfaisante de dépanneurs, techniciens, chauffeurs de
ces différentes mesures de biosécurité interne camions...Interdiction de rentrer dans l'élevage
chez « les bons » peut aussi avoir un lien avec en l'absence de l'éleveur. Même si le risque ne
leur taille d'élevage supérieure. peut pas être totalement maîtrisé, il est toujours
possible de mettre en place certaines mesures :
Le nettoyage des couloirs et du quai appeler pour un rendez-vous, clôture et
d'embarquement sont des tâches pour lesquelles signalétique élevage…
des progrès importants restent à faire. Si le
lavage des couloirs est pratiqué par 90 % des La crainte d'une contamination venant de
éleveurs, leur désinfection n'est systématique l'extérieur est plus forte chez les "Bons". Les

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La Biosécurité en élevage de production, décembre 2014

éleveurs pensent que les camions peuvent être Tableau 6 : Prophylaxie : Vaccinations
les principaux vecteurs de pathogènes, puis le pratiquées (% élevages enquêtés)
lisier, le vent et enfin le voisinage (autres
élevages). Certains d’entre eux ont pris des Vaccinations « Bons » « Moins
mesures pour imiter ces risques de pratiquées (% Bons »
contamination, comme le transport en bétaillère élevages)
des truies de réforme en dehors de l’élevage, des Parvo et rouget 100 100
échanges de parcelles avec des voisins pour le SDRP 93 56
risque épandage. Mycoplasme 79 67
Collibacillose 79 44
Ces craintes existent chez les "moins bons", mais Grippe 79 22
à un degré moindre, même si 2/3 d'entre eux se Circovirus 71 67
situent dans une zone de densité porcine Rhinite 64 67
moyenne à forte. Les éleveurs sont « habitués » Iléite 29 0
au voisinage et ont appris à vivre avec. Pour cette
Clostridium 7 11
catégorie "Moins bons", l’inquiétude vis-à-vis
Autovaccin
d’une contamination extérieure est plus faible. La 7 11
(strepto/actinobacille)
SAU plus importante, avec 89 % des terres
d'épandage à proximité, sur lesquelles est
épandue le lisier de l'élevage peut être une des
raisons de ce fait.
5. Discussion
Un problème sanitaire (SDRP, grippe,
Figure 6 : Provenance du risque sanitaire actinobacillose….), la mise en groupe des truies,
(% réponses éleveurs) une restructuration d'élevage ont poussé les
64 éleveurs à réfléchir à la mise en place de mesures
de biosécurité dans leur élevage.
56
Dans les deux enquêtes menées en parallèle
auprès des structures d'une part et des éleveurs
d'autre part, le frein humain est le premier frein
29 29 29 à la mise en place de mesure de biosécurité en
22
élevage de porc.
11 11
5.1. Biosécurité : Impact sur les
résultats économiques
Risque Risque lisier Risque Air- Risque Dans notre enquête, les éleveurs de la catégorie
camions vent voisinage « Bons » ont dans l’ensemble des performances
techniques supérieures à ceux de la catégorie
Bons Moins bons « moins bons ». Cela va dans le sens des résultats
de Cariolet et al., (2009) et de Corrégé et al.,
(2011). En effet ces auteurs ont mis en avant une
marge sur le coût alimentaire truie et par an
Pour les raisons inverses, des éleveurs supérieure par pour les éleveurs ayant des
privilégient la biosécurité interne, car selon eux, pratiques respectant des mesures de biosécurité.
ils peuvent la maîtriser et organiser leur travail et Laanen et al., (2013) observent aussi une relation
celui de leur personnel. C'est souvent une entre meilleure biosécurité et taille d’élevage.
avancée collective pour que chacun s'approprie Même si les performances obtenues dans les
les mesures et ne les vive pas comme une élevages enquêtés dans notre étude vont dans le
contrainte, tels les changements de tenue, le même sens, il faut noter que, d’une part, notre
lavage des bottes et des mains… " C’est un travail échantillon d’élevages est restreint (23 élevages),
de longue haleine, il faut être convaincu des d’autre part, la taille d’élevage pour la catégorie
bienfaits de la biosécurité, même si les résultats « Bons » supérieure à celle des « moins bons »
ne se voient pas tout de suite", dit un éleveur. implique généralement de meilleures
Une quarantaine longue (en moyenne 9 performances et par conséquent, un résultat
semaines), des vaccinations nombreuses (10 en économique plus élevé, Calvar et Badouard
moyenne par élevage, tous stades physiologiques (2014).
confondus pour protéger les animaux de six
maladies) font partie aussi des mesures de 5.2. Biosécurité Externe :
biosécurité interne mises en place. "Priorité au Mettre l’accent sur les jeunes
préventif, plutôt qu'au curatif".
reproducteurs
A noter que les éleveurs de la catégorie « Bons »
vaccinent davantage leurs animaux que la Si les experts et les éleveurs s’accordent sur
catégorie « Moins bons » (11,3 vaccinations vs l’importance de certaines mesures de biosécurité
8,3). La vaccination contre l’iléite n’est pratiquée externe, telle la protection de l’élevage vis-à-vis
que par les éleveurs de la catégorie « Bons ». des nuisibles, des camions, des différents
intervenants, des points faibles existent

8 Chambres d’agriculture de Bretagne – Pôle porc-aviculture


La Biosécurité en élevage de production, décembre 2014

cependant vis-à-vis de l’entrée des animaux dans naissage de l’engraissement, la marche en avant,
l’élevage. Cet axe à privilégier pour la biosécurité la conduite en tout plein-tout vide en
externe ne vient qu’en quatrième position dans quarantaine. Par contre, l’utilisation d’une aiguille
notre enquête auprès des professionnels, unique par truie et une par portée ne sont pas
pourtant son importance a déjà été soulignée par encore des pratiques de routine (40 % des
Hémonic et al., (2010) et Corrégé et al., (2012). éleveurs enquêtés). Ces résultats sont un peu
Le statut sanitaire des jeunes reproducteurs moins bons que ceux obtenus par Hémonic et al.,
constitue un maillon faible pour la biosécurité, en 2010 dans une enquête sur les bonnes
tous les éleveurs ne le connaissent pas, excepté pratiques d’hygiène (51 % des éleveurs
pour le SDRP. Ceci corrobore les résultats de enquêtés). Au contraire, deux mesures ont une
Calvar et al., (2012) sur la quarantaine, à peine évolution favorable. L’emplacement du bac ou de
60 % des éleveurs connaissent le statut des l’aire d’équarrissage est pour 61 % des élevages
animaux livrés. D’autre part, la situation du local éloigné de plus de 40 mètres, alors que
de quarantaine n’est pas toujours en accord avec seulement 22 % l’était en 2010, dans l’enquête
le respect de la biosécurité. En effet, il n’est pas de Hémonic et al., De même, les cadavres de
toujours situé en périphérie de l’élevage, comme grande taille sont stockés dans un bac fermé pour
recommandé dans le GPBH (2009). 87 % des élevages de notre enquête, 62 % dans
celle de Hémonic et al.
Dans les élevages enquêtés, la durée de
quarantaine de 9 semaines en moyenne est Comme le souligne cet auteur, beaucoup de
supérieure à celle observée en 2012 par Calvar et pratiques de biosécurité ou d’hygiène sont liées à
al., celle-ci était de 52 jours, soit près de 7,5 la conception initiale des élevages et ne peuvent
semaines. Cet allongement de la quarantaine donc pas être facilement modifiées. Par contre, le
n’est pas toujours effectué pour des raisons respect de la conduite en bandes, la conduite en
sanitaires, mais plus pour des motifs de conduite, tout plein–tout vide des locaux, le non mélange
avoir des cochettes plus âgées à la 1ère mise bas d’animaux sont des actions de biosécurité
(Calvar et al., 2012). facilement applicables par tous. Il en est de
même pour le nettoyage-désinfection des salles,
Selon les professionnels et les éleveurs enquêtés,
couloirs et du quai de stockage des animaux, mais
le quai d’embarquement et le bac d’équarrissage
celui-ci est loin d’être systématique pour tous les
sont aussi deux points faibles de la biosécurité
stades physiologiques dans les élevages
externe. Leur emplacement, leur nettoyage ne
enquêtés. Pourtant, Corrégé et al., 2011 ont mis
sont pas réalisés systématiquement. Hémonic et
en avant que celui-ci avait un impact favorable
al., 2010 et Corrégé et al., 2012 avaient fait le
sur les performances technico-économiques.
même constat.
Autre point important concernant la protection de 5.4. Biosécurité : Freins et
l’élevage, les camions sont les premiers vecteurs leviers d’action
de pathogènes qui peuvent contaminer l’élevage,
Pour les experts enquêtés, le premier frein à
le lisier est la 2ème voie de contamination aux dires
l’application des mesures de biosécurité en
des éleveurs. La bibliographie sur la biosécurité
élevage de porc, c’est l’homme. Cela a été aussi
n’évoque pas ces risques potentiels de
mis en avant en production bovine par Frappat et
contamination, car de nombreuses enquêtes se
al., (2011, 2012). Les éleveurs de bovins ne sont
focalisent sur l’élevage lui-même.
pas encore assez sensibilisés à la biosécurité. Les
Laanen et al., (2013) montrent dans leurs pratiques sont souvent perçues comme coûteuses
travaux que les éleveurs jeunes ont une meilleure en temps, freinant la liberté d’organisation ou
biosécurité externe que l’ensemble. Au contraire, lourdes en investissements. Les résultats de
Racicot (2011) a mis en avant que la biosécurité Laanen (2013) mettent bien en avant que l’âge
était mieux appliquée en élevage avicole par des des bâtiments et leur vétusté sont un point
éleveurs ou salariés avec des années négatif important pour l’application de la
d’expérience. Ces auteurs s’accordent cependant biosécurité interne de l’élevage. Névannen et
sur le niveau de formation qui joue un rôle al.,(2011) ont quant à eux, pensé la biosécurité
important. Ce lien n’est pas évident dans notre en amont. Ils ont recensé les critères à prendre
étude, pas plus que le niveau de formation des en compte lors de la conception ou la rénovation
éleveurs. Même si lors de l’entretien avec de bâtiments afin de permettre à l’éleveur
l’éleveur, des questions concernant son âge, ses d’optimiser la conduite sanitaire optimale de son
diplômes, la formation continue étaient abordées. élevage.
Les professionnels enquêtés sont aussi partagés
La majorité des éleveurs enquêtés pense que la
sur le sujet.
mise en place progressive de la biosécurité est
5.3. Biosécurité Interne : plus durable dans le temps, car chacun peut
s'approprier les règles et les respecter. Ecrire
Respecter les règles de base
quelques règles simples, les expliquer et les
de la conduite d’élevage afficher met tous les intervenants de l’élevage au
En biosécurité interne, certaines mesures même niveau d’information. Cela permet des
recommandées par les experts sont plutôt bien échanges sur les avantages et les contraintes
appliquées en élevage, telles, la séparation du qu’apportent la mise en place de certaines

Chambres d’agriculture de Bretagne – Pôle porc-aviculture 9


La Biosécurité en élevage de production, décembre 2014

mesures, tels le changement de tenues, le lavage Tableau 7 : Quelques mesures de biosécurité


des mains…Ce constat a aussi été fait en facilement applicables en élevage
aviculture par Racicot (2011). Des erreurs ont été
faites liées à un manque de compréhension des Biosécurité externe
principes associés aux mesures de biosécurité, • Signalétique pour visiteurs et camions
sur des critères tels la délimitation de la zone
propre de la zone sale. Des caméras vidéo • Sonnette – Sas d’entrée – Tenue : cotte et
installées à l’entrée des bâtiments ont permis de bottes – Régistre d’élevage
montrer que l’observance diminuait au bout de six • Lavabo ou point d’eau dans chaque
mois. D’où l’importance de redire, reformer et bâtiment – Bottes à disposition
communiquer sur les règles.
Ce travail sur la biosécurité a été mis en place • Contrat de dératisation – Quarantaine en
dans un contexte sanitaire breton « stable ». Les périphérie – connaissance du statut
différents acteurs enquêtés sont plus ou moins sanitaire du fournisseur des cochettes
sensibilisés à la biosécurité, mais la vigilance
• Bac d’équarrissage fermé à plus de 40
n’est pas toujours de mise. Comment réagirions-
mètres des bâtiments d’élevage
nous dans une situation de crise sanitaire, comme
l’ont connue les USA, comme l’a maitrisée le Biosécurité interne
Canada. En France, L’OVS et l’ANSES (2014)
informent les acteurs de la filière porcine, • Marche en avant des animaux et du
communiquent sur le risque d’émergence de la personnel de l’élevage
DEP, proposent des mesures de biosécurité à • Respect de la conduite en bandes : densité
mettre en place. Toute la filière est sensibilisée. – non mélange d’animaux de différents
stades
• Conduite en tout plein – tout vide
6. Applications pratiques • Nettoyage-désinfection des salles, couloirs,
Les conclusions de cette étude fournissent aux du quai d’embarquement et du bac
structures et aux éleveurs des propositions de d’équarrissage
sensibilisation et/ou d’amélioration de mise en
• Respect des protocoles d’injection, de
application de mesures de biosécurité en élevage.
vaccination – 1 aiguille/truie – 1
Une signalétique pour les personnes, mais aussi
aiguille/portée
pour les camions, une sonnette, un sas d’entrée
délimitant une zone sale/zone propre, un • Analyses d’eau au moins 1 fois par an –
bâtiment équipé de lavabo, de porte-manteaux Purge des circuits d’eau en Post sevrage
pour les changements de tenues, sont des
mesures que bon nombre d’éleveurs peuvent • Nettoyage et fumigation des silos au moins
mettre en place. 1 fois/an

- Le statut sanitaire de l’élevage fournisseur peut


et doit être demandé par chaque éleveur achetant
des cochettes. Le protocole de suivi, de
vaccination et de contamination des animaux en
découlera. 7. Conclusion
- Les règles de base de conduite d’élevage que
De l'avis de tous, professionnels et éleveurs, la
sont le non mélange de bandes, le respect de la
biosécurité est une démarche à entreprendre au
densité dans les cases, la conduite en tout plein-
quotidien qui nécessite un investissement durable
tout vide, peuvent avoir un impact rapide sur les
pour garantir la sécurité sanitaire de l’élevage.
performances.
Tous les acteurs, éleveurs, techniciens et
- Le nettoyage-désinfection systématique des vétérinaires sont plus ou moins sensibilisés à
salles, des couloirs, du quai d’embarquement et cette démarche. La formation et la
du bac d’équarrissage font partie aussi des communication autour du respect des règles de
mesures à mettre en place, elles nécessitent du biosécurité est essentielle car les pratiques
temps, mais ne sont pas coûteuses. peuvent être contraignantes. De plus, si l’intérêt
n’est pas clairement perçu par les éleveurs, le
- Respecter les protocoles d’injection et de
risque est de voir apparaître des incohérences
vaccination, utiliser une aiguille par truie et une
dans les élevages.
aiguille par portée sont des mesures facilement
applicables par les éleveurs. Certes, le retour sur investissement de cette
démarche est long, mais à l’inverse, il suffit de
- Faire des analyses d’eau au moins une fois par
peu d'écart pour mettre en péril un bon équilibre
an, purger les circuits et les abreuvoirs en
sanitaire.
particulier en post-sevrage sont des mesures
simples à mettre en place.

10 Chambres d’agriculture de Bretagne – Pôle porc-aviculture


La Biosécurité en élevage de production, décembre 2014

Actualité sanitaire : L’enquête décrite dans le


présent rapport a été réalisée et traitée fin 2013-
début 2014, alors que le contexte sanitaire dans
les élevages bretons était plutôt favorable, Nous vous invitons également à découvrir deux
malgré la présence récurrente de maladie telle autres études complémentaires autour de la
que le SDRP. Depuis, le contexte sanitaire a maîtrise de la santé animale :
évolué, compte tenu de la découverte d’un cas de
diarrhée épidémique porcine (DEP) en France en - Thomas Lemoine, Catherine Calvar, Dé
décembre 2014. La DEP est liée à un virus contre cembre 2014. Réduction des antibiotiques en
lequel aucun moyen de traitement n’est pour le élevage de porcs : le savoir faire des bons
moment disponible et qui peut entrainer une éleveurs. Rapport d’étude. Chambre
mortalité très importante des porcelets. Les d’agriculture de Bretagne, 12 pages.
mesures de biosécurité sont les seules qui - Thomas Lemoine, Catherine Calvar,
peuvent empêcher l’introduction du virus dans les Nathanaëlle Bouché, 2014. Les dépenses de
élevages et les principales recommandations de santé 2013 dans 65 élevages de porcs
l’Ifip et de l’ensemble de la filière portent d’abord naisseur-engraisseurs bretons. Rapport
sur les règles de biosécurité externe. La DEP d’étude. Chambre d’agriculture de Bretagne,
constitue un nouvel enjeu pour la filière porcine 16 pages.
depuis la maitrise de la maladie d'amaigrissement
du porcelet (MAP) apparue au milieu des années Tous mes remerciements aux éleveurs,
90. La vigilance en termes de biosécurité, et techniciens et vétérinaires ayant accepté de
l’application des mesures soulignées dans le participer à cette étude.
rapport est un travail de tous les instants dans le Cette étude a été réalisée avec la contribution
but de prémunir l’élevage porcin, de manière financière du Compte d’Affectation Spéciale pour
individuelle et collective, des conséquences des le Développement Agricole et Rural, du Conseil
épizooties. Régional de Bretagne et du Comité Régional
Porcin breton.
8. Pour plus d’informations…
Contact : Catherine Calvar
Pôle porc-aviculture des Chambres d’agriculture
de Bretagne, Vannes
Téléphone : 02 97 48 28 39
Mail : catherine.calvar@bretagne.chambagri.fr

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Chambres d’agriculture de Bretagne – Pôle porc-aviculture 11


La Biosécurité en élevage de production, décembre 2014
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Comment citer ce document ?

Catherine CALVAR, Thomas LEMOINE, Décembre 2014. La biosécurité en élevage de production. Rapport
d’étude. Chambre d’agriculture de Bretagne, 12 pages.

Mots-clés : Porc, biosécurité, freins, leviers d’action, performances

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