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Nouveau Modèle de
Développement :
Croissance inclusive et
employabilité, pour une
repriorisation des enjeux
Ghizlane CHOUAY
Professeur à la Faculté Pluridisciplinaire de Nador
Laboratoire d’Etudes et de Recherches Interdisciplinaires en
Territoire, Entrepreneuriat et Droit des Affaires
Université Mohammed Premier. Oujda, Maroc.
g.chouay@gmail.com
06 73 79 57 78
Ahmed ZOHEIR
Doctorant au Laboratoire Interdisciplinaire de Recherches
Economiques, Economé triques et Managé riales
Faculté des Sciences Juridiques, Economiques et Sociales
Université Mohammed Premier. Oujda, Maroc.
a.zoheir@ump.ac.ma
06 43 28 51 56
Amina HAOUAT
Doctorante au Laboratoire Interdisciplinaire de Recherches
Economiques, Economé triques et Managé riales
Faculté des Sciences Juridiques, Economiques et Sociales
Université Mohammed Premier. Oujda, Maroc.
amina.haouat@ump.ac.ma
06 62 19 46 05
Nouveau Modèle de Développement :
Ghizlane CHOUAY, Ahmed ZOHEIR & Amina HAOUAT 371
Résumé
Le « modèle de croissance » actuel s’avère de moins en moins inclusif par
l’emploi. La fragmentation du tissu productif s’est accompagnée d’un déficit de la
productivité des facteurs et par ricochet d’un déficit du marché de travail ; D’autant
que l’investissement national est dans une tendance lourde de faible croissance.
Cela est traduit par la baisse tendancielle de l’intensité de la croissance en emplois.
Comment faudrait-il alors traiter les questions de la relation
investissement/emploi dans l’édification des choix stratégiques de
développement ? En particulier, comment élaborer et mettre en avant des
politiques de l’emploi en tant qu’élément pertinent de politiques sociales
volontaristes ?
Nous en concluons que l’impact de l’accumulation du capital physique sur
la productivité, sur la croissance économique et sur l’emploi diffère et dépend de
facteurs structurels tels que la structure du tissu productif ou encore du stock de
compétences disponibles.
Abstract
The current "growth model" is proving less and less inclusive through
employment. The fragmentation of the productive fabric has been accompanied by
a deficit in factor productivity and, as a consequence, a deficit in the labor market.
This is reflected in the downward trend in the intensity of growth in jobs.
How then should the issues of the investment/employment relationship
be addressed in the design of development strategies? In particular, how can
employment policies be designed and developed as an essential component of
proactive social policies?
We conclude that the impact of physical capital accumulation on
productivity, economic growth and employment differs and depends on structural
factors such as the structure of the productive fabric or the stock of available skills.
Key words: New Model of Development, physical capital accumulation, human
capital accumulation, Productivity's factors, Growth and Employment.
الملخص
.
اض النموذج التنموي غ قادر ع امتصاص الخصاص الموجود سوق الشغل ورافق تجزئة
اتجاه قوي ال سيج اﻹنتا عجز اﻹنتاج ة و التا عجز سوق العمل ،خاصة وأن اﻻس ثمار الوط
للنمو الضع ف .و نعكس هذا اﻻتجاه التناز ل ثافة النمو نقص التوظ ف.
فك ف جب التعامل مع قضا ا عﻼقة اﻻس ثمار التوظ ف عند وضع اس ات ج ات التنم ة؟ وﻻ
الس اسات اﻻجتماع ة الطوع ة؟ س ما ك ف ة تصم م س اسات التوظ ف وتط رها كعن أسا
س نتج أن تأث ترا م الرأسمال المادي ع اﻹنتاج ة والنمو اﻻقتصادي وفرص الشغل ختلف
و عتمد ع العوامل اله ل ة مثل ب ة ال سيج اﻹنتا أو مخزون المهارات المتاحة.
عنوان المقال
:
النموذج التنموي الجد د نمو شامل وفرص ال شغ ل ،من أجل إعادة ترت ب التحد ات
ال لمات المفتاح
النموذج التنموي الجد د ،التنم ة وال شغ ل ،عوامل اﻹنتاج ة ،ترا م الرأسمال المادي ،ترا م الرأسمال
ال ي.
Ghizlane CHOUAY, Ahmed ZOHEIR & Amina HAOUAT 373
Introduction
L’intensité de la croissance et de l’emploi est passée de 32 430 par an par
point de croissance sur la période (2000 – 2006) à 22 648 par an par point de
croissance en 2006 – 2012, puis à 15 000 par an par point de croissance sur la
période (2012 – 2018) (CESE, 2019). Pour la Banque Mondiale (2021), cette
croissance dite « pauvre en emplois » est caractérisée par une élasticité de l’emploi
à la croissance (élasticités emploi-production) pour l’économie agrégée de 0,27
entre 2000 et 2018. Un « Nouveau Modèle de Développement » (NMD) s’impose ?
Ceci nous interpelle (et interpelle certainement le gouvernement) quant à ces
objectifs prioritaires post Covid. Quels leviers opérationnels faut-il activer pour
réussir ce projet de société ?
Il faut s’accorder d’abord sur le « principe » qu’il n’existe, pour le
développement, ni boîte noire, ni boite conceptuelle, ni boîte à outil (savoir
technique, modèle d’action, …). Depuis son expansion dans les années 60, le
discours sur « les modèles de développement » s’est nourri de tant de définition
que plus personne ne sait ce que le développement veut dire.
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Pour plus de détails sur les avantages non économiques, voir : OCDE. (2001). Du bien-être des
nations - Le rôle du capital humain et social.
L’une des raisons qui justifie la différence entre le niveau de productivité des
individus s’explique par le fait que chaque individu dispose d’un capital propre, qui
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lui vient de son investissement en formation, de ses dons personnels et innés. Son
stock accumulé de capital humain a tendance de s’accumuler. L’augmentation du
niveau de cette richesse sera affectée dans une consommation intermédiaire ou
dans un processus productif au niveau des différents secteurs d’investissement, ce
qui explique et justifie les différences des gains de productivité sectoriels et, par
conséquent, la différence en termes de croissance économiques qui peut créer des
inhibiteurs à la création de l’emploi (Schultz, 1961 ; Becker, 1964).
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Le rendement de l’investissement est souvent mesuré par le coefficient marginal du capital
(incrément le rendement de l’investissement est souvent mesuré par le coefficient marginal du capital
(Incremental Capital Output Ratio (ICOR)), qui représente le nombre d’unités d’investissement (en %
du PIB) nécessaires pour réaliser un point de croissance du PIB. Plus l’ICOR est faible, plus
l’investissement est rentable
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Intensité Productivité
Intensité PGF
capitalistique du travail
capitalistique (variation ICOR
(variation en (variation en
(en 1000 $) en %)
%) %)
Maroc 29 5,1 % 3,8 % 2,0 % 7,5
Afrique
44 2,3 % 1,5 % 0,7 % 6,1
du Sud
Turquie 68 3,9 % 3,4 % 2,0 % 5,2
Espagne 219 2,8 % 0,7 % -0,2 % 5,7
Source : Haut-Commissariat au Plan, Étude sur le Rendement du Capital physique au
Maroc, 2016.
3
Ayant un CA compris entre 0 et 1 million de dirhams. Cette proportion est limitée à 7,5% pour les
entreprises dont le CA est compris entre 1 et 3 millions de dirhams.
Dossiers de Recherches en Economie et Gestion : Dossier 10, N° 1 : Mars 2022
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Nouveau Modèle de Développement : Croissance inclusive et employa…
Tableau 2. Ventilation des EPMA selon la taille de leurs CA en 2018 (208 919
EPMA)
Certes, une amélioration du climat des affaires est constatée par le Doing
Busines qui analyse la situation des PME au niveau national et mesure la
réglementation s’appliquant à celles-ci tout au long de leur cycle de vie.
2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018 2019 2020
128 115 94 97 87 71 75 68 69 60 53
Source: Doing Business (2020). Comparing Business Regulation in 190
Economies. World Bank
4
Le rapport annuel exercices 2019-2020 de l’OMTPME a constitué, pour l’année 2019, une base de
données relative à 571.989 entreprises actives, dont 303.013 entreprises personnes morales et
268.976 entreprises personnes physiques et ce, à partir des informations fournies par la DGI, la CNSS,
l’OMPIC et Bank Al-Maghrib.
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GE 8,2%
TPME 2,6%
MICRO -11,1%
tiré vers le bas par la contreperformance des MICRO
Source : A partir des données de l’Observatoire Marocain de la Très Petite et
Moyenne Entreprise (exercice 2019-2020). Rapport annuel.
D’après les résultats des comptes nationaux (HCP, 2019), la valeur ajoutée
nationale s’élève à 1 018 milliards de dirhams. Le secteur générant la part la plus
importante dans la valeur ajoutée globale est le tertiaire avec 57,6% en 2019.
62,2% de la valeur ajoutée cumulée des Entreprises Personnes Morales Actives
(EPMA) a été réalisée par les grandes entreprises et 37,8% par les TPME (Figure 1).
Figure 1. Répartition de la valeur ajoutée cumulée par catégorie
d’entreprises - 2019
concurrents et à la faiblesse du capital humain. Les secteurs qui combinent tous les
types d’actifs immatériels ont une croissance encore plus importante car « les
investissements dans les actifs immatériels se répondent. L’investissement dans le
capital humain – la formation et l’éducation – est hyper synergique avec
l’investissement dans le digital et l’analytique car cela crée une productivité du
travail bien plus importante ». Autrement dit, « la combinaison d’actifs intangibles
booste la productivité » (MGI, 2021 ; Haskel & Westlake, 2018). D’après les
données du HCP (2016), prolongées par l’étude de Doukkali & Guèdègbé (2018),
les pays qui ont réalisé une augmentation significative concernant l’intensité
capitalistique ont enregistré des améliorations de leur productivité globale des
facteurs et de leur productivité du travail grâce à la « forte » et d’investissement du
capital humain qui les caractérise. Le capital humain de ses pays contribue par
0,5 point à la PGF. Concernant le Maroc, l’accumulation du capital humain a
contribué à la PGF, durant la dernière décennie, à hauteur de 0,32 point.
Conclusion
L’étude de cas confirme que la croissance au Maroc n’est pas inclusive par le
travail. Pourtant, le Maroc s’est engagé, depuis le début des années 2000, dans une
orientation stratégique pour augmenter l’intensification capitalistique
(accumulation de capital public) afin d’accélérer le décollage du rythme de
croissance ; mais sans pour autant insuffler de manière significative des gains de
productivité. Ces derniers ont augmenté de 1% en moyenne durant les années
2000 (leurs contributions était négative durant les années 1990). La croissance
étant resté faible, le déficit sur le marché de travail s’est accentué. Or, certains pays
avec le même niveau d’intensité capitalistique, en augmentant leur niveau de
productivité globale des facteurs, ont réalisé des taux de croissance plus
importants. D’autres pays ont réalisé les mêmes performances que le Maroc en
termes d’amélioration du niveau de la productivité globale des facteurs, mais avec
un taux d’intensité capitalistique inférieur à celui du Maroc.
Pour y remédier, l’économie marocaine doit générer des gains de
productivité. Or, plusieurs facteurs expliquent les incohérences entre
l’accumulation du capital, les gains de productivité, la croissance et l’emploi.
L’incapacité de l’économie marocaine à générer des gains de productivité
dépend de facteurs structurels couvrant différents secteurs économiques dont la
défragmentation du tissu productif et l’accumulation de stock de compétences
répondant aux attentes du marché de l’emploi. La question de l’efficacité du capital
accumulé au Maroc s’avère importante. La disposition du stock et de la qualité du
capital humain est faible et son allocation est sous optimale. Au-delà de la
formation universitaire, la formation générale de la main d’œuvre et également
nécessaire. Il faut revoir la gestion publique de formation. De même, l’entreprise
doit tenir compte des mutations de la formation et de l’apprentissage pour devenir
une entreprise apprenante.
Bien évidemment, la principale limite à notre démarche (par l’étude de cas)
est de généraliser les résultats ainsi que la pertinence d’une telle généralisation.
Ce travail ouvre une perspective de recherche et peut être appréhendé par
les questionnements suivants :
*Comment peut-on développer les compétences ?
*La formation des salariés contribue-t-elle à leur émancipation ou au
contraire se justifie exclusivement par leur adaptation efficiente aux besoins du
capital physique ?
Références Bibliographique
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