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L
a présomption de responsabilité décennale François-Xavier Ajaccio, domaine de travaux sur des immeubles existants
s’applique dans les conditions posées par consultant en assurances – (C. cass., 3e ch. civ., 4 avril 2013, 11-25198, publié).
l’article 1792 du Code civil qui énonce que construction. Par exemple, il a été admis que les dommages affec-
« tout constructeur d’un ouvrage est respon- tant une « opération, qui portait sur la restructuration
sable de plein droit, envers le maître ou l’acqué- d’envergure d’un immeuble, soumise à l’obtention
reur de l’ouvrage, des dommages, même résultant d’un d’un permis de construire, [consistant] en la trans-
vice du sol, qui compromettent la solidité de l’ouvrage ou formation d’un hôtel en sept logements pour un coût
qui, l’affectant dans l’un de ses éléments constitutifs ou total de 142 701,42 euros hors taxes, [dont] le devis et la
l’un de ses éléments d’équipement, le rendent impropre facture [du constructeur] prévoyaient un nettoyage de
à sa destination. Une telle responsabilité n’a point lieu si la façade et une réfection complète des maçonneries
le constructeur prouve que les dommages proviennent défectueuses avec des reprises ponctuelles des fer-
d’une cause étrangère. » raillages » engageaient la responsabilité décennale
De prime abord, à la lecture de ce texte et de l’ar- des entrepreneurs (C. cass., 3e ch. civ., 21 juin 2018,
ticle 1792-4-1 du Code civil, il apparaît que ce régime 17-19.762).
de responsabilité a pour objet de garantir les dom- Il a également été admis que des « travaux consistant à
mages qui affectent la construction d’un ouvrage, transformer des fermettes industrielles en modifiant les
après la réception des travaux. La notion d’ouvrage fiches et contrefiches, en mettant en œuvre deux entraits
conditionne donc la mise en œuvre de cette respon- supplémentaires, ainsi qu’un plancher en aggloméré de
sabilité pesant sur les constructeurs. 20 mm cloué sur lambourdes 54 x 36 mm posées sur les
Celle-ci a été définie par la jurisprudence en consi- entraits des fermettes et à augmenter la surface habi-
dération de différents critères relatifs à la nature table par la création de trois pièces dans des combles ini-
des travaux et à leur importance, y compris dans le tialement non habitables ne constituaient pas www
des éléments
l’assureur A à garantir la société Y des condamnations dans/sur un bâtiment existant, les dommages les
prononcées à son encontre, l’arrêt retient que la pompe à affectant engagent la seule responsabilité de droit
chaleur, installée sur un socle en béton et ayant nécessité
des raccordements hydrauliques, constitue un ouvrage
d’équipement, commun de l’installateur (article 1231-1 du Code
civil, anciennement 1147).
au sens de l’article 1792 du Code civil ; qu’en statuant dissociables ou
Nouvelle jurisprudence
ainsi, par des motifs qui ne suffisent pas à caractériser
l’existence d’un ouvrage, la cour d’appel a violé le texte non, d’origine Cependant, à contre-courant de cette jurisprudence,
susvisé » (C. cass., 3e ch. civ., 4 mai 2016, 15-15.379).
La Cour de cassation considérait donc, concernant
ou installés la Cour de cassation a, par plusieurs arrêts de 2017,
remis en question ces règles d’interprétation. Ainsi,
l’installation d’éléments d’équipement sur/dans un sur existant, dans des décisions de principe, elle a affirmé que
bâtiment existant, qu’il était nécessaire pour admettre
l’application de la garantie décennale que ces travaux relèvent de la « les désordres affectant des éléments d’équipement,
dissociables ou non, d’origine ou installés sur existant,
caractérisent par leur importance, leur technicité, leur
coût, un ouvrage au sens de l’article 1792 du Code civil :
responsabilité relèvent de la responsabilité décennale lorsqu’ils
rendent l’ouvrage dans son ensemble impropre à
« Vu les articles 1792 et 1792-2 du Code civil ; attendu décennale sa destination » (C. cass., 3e ch. civ., 15 juin 2017,
que pour débouter la société X de ses demandes for-
mées sur l’article 1792 du Code civil, l’arrêt retient que lorsqu’ils 16-19.640, publié, BICC n° 872 du 1er décembre 2017).
De même, « attendu que, pour rejeter les demandes de
s’agissant d’un ouvrage conçu au sein d’un bâtiment de
commerces et bureaux afin de rafraîchir l’air ambiant,
rendent l’entreprise de pose X à l’encontre de l’assureur Y, l’arrêt
retient que les travaux d’installation de l’insert ne sont
il doit être considéré en raison de son importance et l’ouvrage dans pas assimilables à la construction d’un ouvrage, que
de son emprise sur le sous-sol comme constituant un
élément d’équipement, que, compte tenu du fait qu’il son ensemble l’insert ne peut pas davantage être qualifié d’élément
d’équipement indissociable puisqu’il ne résulte d’aucun
ne s’agit pas d’un ouvrage autonome mais d’un simple
élément d’équipement, l’impropriété à destination ne
impropre à élément du dossier que la dépose de l’appareil serait de
nature à porter atteinte aux fondations ou à l’ossature
se conçoit pas au niveau de l’élément d’équipement sa destination” de l’immeuble et que, s’agissant d’un élément d’équi-
lui-même mais bien à celui de l’ouvrage desservi dans pement dissociable adjoint à un appareil existant, la
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