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analyse Cass. 1re civ., 19 sept.

2018

La Cour de cassation, dans un arrêt du 19 septembre 2018, a statué sur


l'application dans le temps de l'ordonnance du 10 février 2016 et a rappelé que
les contrats conclus avant cette date demeurent soumis à la loi ancienne.

Mme X a acheté un climatisateur auprès de la Société méditerranéenne


d'applications thermiques et de conditionnement (SMATEC) en juin 2013. Elle
a également souscrit un contrat de maintenance d'un an renouvelable tacitement
avec la SMATEC. Cependant, la SMATEC a informé Mme X en mai 2015
qu'elle ne renouvellerait pas le contrat. Mme X a alors assigné la SMATEC en
justice pour obtenir le remboursement des frais de déplacement de l'unité
extérieure et la réparation du préjudice résultant de la rupture abusive du
contrat de maintenance.

La juridiction de proximité de Marseille a rejeté les demandes de Mme X en se


fondant sur l'article 1186 du code civil, selon lequel un contrat devient caduc si
l'un de ses éléments essentiels disparaît. La juridiction a considéré que la
modification de la situation de l'immeuble rendait l'entretien du climatisateur
impossible, rendant ainsi la demande de Mme X sans objet.

La question posée à la Cour de cassation était de savoir si la juridiction de


proximité avait correctement appliqué l'article 1186 du code civil dans sa
rédaction issue de l'ordonnance du 10 février 2016, alors que le contrat avait été
conclu avant le 1er octobre 2016.

La Cour de cassation a cassé et annulé le jugement de la juridiction de


proximité de Marseille. Elle a rappelé que l'ordonnance du 10 février 2016 était
entrée en vigueur le 1er octobre 2016 et que les contrats conclus avant cette
date demeuraient soumis à la loi ancienne. Par conséquent, la juridiction de
proximité avait violé l'article 9 de l'ordonnance en appliquant l'article 1186 du
code civil dans sa rédaction issue de l'ordonnance à un contrat conclu avant le
1er octobre 2016.

dès lors , Le fait que le législateur veulent protéger la partie faible depuis la réforme
de 2016 justifie t-elle une remise en cause de l’application du transitoire ?

sens: Suite à un changement de circonstances survenu postérieurement à la


conclusion d’un contrat à tacite reconduction conclu en 2013 consistant en la
maintenance d’un climatiseur, les juges de la juridiction de proximité de Marseille se
sont fondé sur l’article 1186 du cc issus de l’ordonnance de 2016 qui prévoit que « un
contrat valablement formé devient caduc si l’un de ses éléments essentiels disparait »
pour prononcer la caducité du contrat.

L’accès au groupe extérieur étant possible au moment de la conclusion du contrat, les


juges de première instance ont considéré que l’impossibilité pour la société d’avoir
accès au bloc extérieur du climatiseur sans avoir recourt à des frais supplémentaires
dus à la nécessité de louer une nacelle, suffisait à caractériser la disparition d’un
élément essentiel du contrat pourtant présent au moment de sa conclusion au sens de
l’article 1186 du code civil.
Ici l’élément essentiel du contrat s’apparente clairement à la capacité d’accès au bloc
extérieur pour la société afin que ses employés soient en mesure de procéder à sa
maintenance ainsi que son entretien.
De ce fait la requête de la demandeuse au pourvoi tendant en le versement de
dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat ainsi que le remboursement des
frais de déplacements leurs est apparu comme étant infondée.

Dans cet arrêt, la première chambre civile de la cour de cassation ne remet pas en
cause l’interprétation du texte législatif par les juges de premières instance mais bien
la temporalité de son application.
En effet, en ce fondant sur l’article 9 de l’ordonnance du 10 février 2016 qui précise
que les contrats conclus avant le 1 octobre 2016 demeurent soumit à la loi ancienne,
les juges de la CDC considèrent que en appliquant au litige l’article 1186, la
juridictions de proximité de Marseille a violé le texte pré-cité.

Ainsi les juges du quai de l’horloge ont prit la décision de faire valoir la requête de la
demandeuse au pourvoi en censurant l’arrêt du 30 Juin 2017 rendu par le tribunal de
proximité de Marseille

valeur

A travers cet arrêt, la CDC affirme sa volonté de consacrer le principe de non


rétroactivité des lois qui est intrinsèquement lié au principe de survie de la loi
ancienne. Ainsi Elle se place sur ce point dans la même ligne de conduite que le
législateur qui, par la loi du 20 Avril 2018 est venu interpréter les dispositions de
l’ordonnance de 2016 en affirmant que le principe de survie de la loi ancienne
s’applique au contrat conclus avant le 1e octobre 2016.

Au regard des faits d’espèce, la question de l’application du droit dans le temps est
primordial car elle va déterminer la solution du litige.
En appliquant le droit antérieur comme l’on fait les juges de cassation, la société est
obligé d’exécuter son obligation contractuelle malgré le fait qu’un changement de
circonstance imprévisible remette en cause l’équilibre du contrat. Cela illustre
l’attachement de la CDC à l’ancien article 1134 du code civil précisant que « les
conventions tiennent lieux de loi à ce qui les ont faites, elles ne peuvent être
révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise ».
Cependant en appliquant le droit nouveaux, la société aurait été en mesure de
demander au juge de rééquilibrer le contrat en ce fondant sur le nouvel article 1995
issu de l’ordonnance de 2016.

Bien que la CDC ai toujours montré un attachement au principe d’instabilité du


contrat depuis sont arrêt Canal de cramponne de …, le juge a au fil des années trouvé
des moyens de contourner ce principe. Par exemple dans l’arrêt Chevassus marche
contre Danon du 24 novembre 1998, le juge de cassation s’est fondé sur la bonne foie
pour obliger les parties à renégocier le contrat
De plus, la Chambre commercial a considéré dans un arrêt du 29 octobre 2010 que si
les circonstances économiques changent et déséquilibrent le contrat, on considère
qu’il y’a une disparition de la cause au sens de ce pourquoi les parties se sont engagé.
Bien que la portée de cet arrêt soit à nuancer car il n’a pas été publié au bulletin , sa
similitude avec les faits d’espèces peut amener à une critique du raisonnement de la
cour

En l’espèce, d’un point de vu économique la nécessité d’avoir recours à un engin


élévateur entraine inévitablement un changement des circonstances économiques qui
sont sans aucun doute un élément déterminent du consentement de la société de part
son but lucratif. Les juges du quai de l’horloge font donc prévaloir la temporalité de
l’application du texte législatif au détriment de sa pertinence et du respect du
consentement des parties.

De plus, le fait que le contrat soit un acte de prévision devant de ce fait répondre à une
exigence de sécurité juridique n’a pas empêché les critiques doctrinales du principe
de survie de la loi ancienne consacré par cet arrêt.. Malgré le fait que la Cour de
cassation se place du même coté que le législateur, certains auteurs ont critiqué cette
conception de l’application du droit dans le temps. C’est par exemple le cas du
professeur de droit Daniel Mainguy qui préconise une application immédiate de la loi
nouvelle au contrat conclu avant la réforme. Pour ce dernier cela éviterais au contrat
qui ont des effets sur le long terme de se retrouver sous l’empire d’un droit archaïque
qui, au vu des faits d’espèces peut avoir de lourdes conséquences économiques.

Par exemple entre 2 entreprises de maintenance, celle qui a passé bon nombres de
contrat avant 2016 aura beaucoup plus de mal pour ne pas dire l’impossibilité de
renégocier ses contrats en cas d’imprévision alors qu’une entreprise récente dont la
majorité des contrats ont été passé après 2016 aura la possibilité de demander un
rééquilibrage du contrat pour imprévision sur le fondement de l’article 1195 du code
civil. Ainsi cela entrainera une concurrence déloyal en plus d’ une remise en cause du
principe d’égalité devant la loi.

Malgré ces critiques sur la pertinence de l’application de la loi ancienne au contrat


conclu avant 2016, la position de la cour est compréhensible car en réalité elle se
retrouve bloquée entre deux volontés opposées du législateur:
D’un coté le législateur veut protéger la partie faible au contrat, ici l’entreprise, qui
grâce à 1195 peut demander au juge de rééquilibrer le contrat alors que de l’autre, il
prévoit expressément le principe de survie de la loi ancienne en matière contractuelle
par la loi du 20 Avril 2018. La cour n’a donc décidé ici que de faire prévaloir la
volonté explicite du législateur sur sa volonté implicite.

Enfin, la rédaction de l’attendu de la cour de cassation laisse à penser que il ne s’agit


pas d’un arrêt principe mais bien d’une solution propre au cas d’espèce posé par les
juges du fond.

portée :

Cet arrêt ne peut pas être considéré comme novateur car il ne fait que reprendre le
positionnement du législateur sur le questionnement de l’application du droit dans le
temps. Cependant la solution posé par la cour ne semble pas viable sur le long terme
car en rejoignant le PDV du professeur Daneil Mainguy, les évolutions du droit des
contrats qui sont corrélées à l‘évolution de la société risque de créer un décalage
beaucoup trop conséquent ente le droit antérieur et le droit nouveaux.

Pour cette raison, une évolution serait souhaitable. Nous pouvons envisager une
application des dispositions du nouveaux droit au contrat conclus avant 2016 mais
sous certaines conditions comme en l’espèce un déséquilibre important entraînant un
risque financier pour l’une des parties au contrat.
Cet entêtement de la Cour à respecter le principe de survie de la loi ancienne
notamment dans le cadre de la révision pour imprévision semble archaïque par rapport
à d’autres branches du droit.:
En droit public, il est déjà acquis depuis des années que le juge est en mesure de
réviser le contrat en cas d’imprévision. C’est également le cas en droit européen des
contrats qui prévoit en son article 7:101 une possibilité pour le parties de demander au
juge de réviser équitable le contrats si elles n’ont pas réussi à s’entendre sur une
renégociation de ce dernier.

De part cet analyse nous pouvons donc envisager une « modernisation » du


raisonnement de la cour en faisant prévaloir la pertinence de l’application des textes
plutôt que l’application de principe transitoire au risque de limité l’impact des
évolutions juridiques postérieurs auxquels la cours sera soumise.

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