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Le Lamy Droit du contrat

Partie 2 La phase de conclusion Titre 3 Accord de volontés > Sous-titre 2 L'échange des
consentements > Chapitre 2 L’inclusion des documents dans le champ contractuel > Section 1 Premiers
documents inclus dans le champ contractuel > § 2. Les conditions générales > A. ​ Conditions générales
établies par une partie

Valeur contractuelle des conditions générales

Mis à jour 10/2023

Pour entrer dans le champ contractuel, les conditions générales doivent avoir été acceptées par celui auquel on les oppose. En d'autres termes, il est
nécessaire qu'elles aient fait, dès l'origine, partie intégrante du consentement des deux contractants. C'est une règle à laquelle la jurisprudence se tient
fermement (voir les décisions étudiées par Labarthe Fr., La notion de document contractuel, préf. Ghestin J., LGDJ, 1994, no s 487 et s. ; addeCass. com., 28
avr. 1998, no 95-20.290, RTD civ. 1999, p. 81, obs. Mestre J. : « "en se déterminant ainsi, sans rechercher si les conditions d'achat de la société C avaient
été connues et acceptées par la société S lorsque la vente était devenue parfaite, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision" »). Cette
jurisprudence constante a été reprise dans l'ordonnance no 2016-131 du 10 février 2016 (JO 11 févr.) et a donné lieu à l'article 1119 du Code civil, qui
dispose dans son premier alinéa que « "les conditions générales invoquées par une partie n'ont effet à l'égard de l'autre que si elles ont été portées à la
connaissance de celle-ci et si elle les a acceptées" ». En revanche, cette connaissance et cette acceptation ne conditionnent en principe que leur
opposabilité au cocontractant, et non la formation du contrat elle-même. Pour cette dernière, l'acceptation de l'offre suffit (voir no s 438 et s.). C'est ce
qu'a rappelé la Cour de cassation dans un arrêt rendu le 20 avril 2017 (Cass. 3e civ., 20 avr. 2017, no 16-10.696, Bull. civ. III, no 49, D. 2018, p. 371, obs.
Mekki M., RDI 2017, p. 307, obs. Dessuet P., RTD civ. 2017, p. 635, obs. Barbier H.). Les juges d'appel avaient considéré que des contrats d'assurance
n'avaient pas été valablement formés en dépit de l'acceptation par la société contractante des offres qui lui avaient été faites dans la mesure où la
validité des notes de couverture était conditionnée à la fourniture de la déclaration d'ouverture de chantier qui n'a jamais été remise et que les
conditions générales et particulières des contrats n'avaient pas été adressées à la société et acceptées par elle. Pour la Cour de cassation, en revanche,
dès lors que la société « "avait accepté les offres émises par l'assureur à qui elle avait adressé trois chèques en règlement des primes" », le contrat était
formé dans la mesure où « "la connaissance et l'acceptation des conditions générales et particulières conditionnent leur opposabilité à l'assuré et non la
formation du contrat" ».
Il n'en va cependant pas toujours ainsi. Il est en effet possible que le défaut d'acceptation des conditions générales empêche la formation même du
contrat, lorsqu'elles contiennent des éléments essentiels du contrat (Cass. 1re civ. , 4 oct. 2017, no 16-10.411, RTD com., 2017, p. 906, obs. Pollaud-Dulian
Fr., RTD civ. 2018, p. 100, obs. Barbier H., à propos d'un contrat de cession de droits d'auteurs, dont les conditions générales, qui n'avaient pas été
acceptées par l'auteur, renfermaient la portée de la cession).
En pratique, la difficulté vient de ce que les conditions générales ne sont pas toujours remises au cocontractant, si bien que ce dernier ne les signe pas.
Dans cette hypothèse, il faut apporter la preuve de leur acceptation, éventuellement en démontrant que les conditions générales étaient reprises dans
les tarifs dont la consultation s'avérait nécessaire pour passer les commandes (Cass. com., 11 juin 1996, no 93-15.376, D. 1996, I.R., p. 185, RTD civ.
1997, p. 118, obs. Mestre J. ; voir à l'inverse, Cass. com., 6 sept. 2016, no 15-12.281, RDC 2017, p. 17, note Laithier Y.-M. : cassation de l'arrêt qui avait
appliqué des dispositions des conditions générales de vente d'un contractant à l'encontre de l'autre partie alors que « "les clauses dérogatoires au droit
commun contenues dans des conditions générales ne sont opposables au cocontractant que si elles ont été portées à sa connaissance et acceptées par
lui et qu'il n'était pas contesté que les conditions générales de vente établies par la Fédération des entreprises de transport ne figuraient ni sur le
mandat ni sur les factures" » ; encore faut-il que les conditions générales acceptées ne soient pas ensuite modifiées : v. par ex., censurant l'arrêt d'une
cour d'appel qui n'avait pas recherché "« comme elle y était invitée, si ces conditions générales, produites par l'assureur, étaient celles applicables au
contrat en cause et étaient opposables à la SCI, laquelle soutenait que tel n'était pas le cas" » : Cass. 2e civ., 25 juin 2020, no 19-13.624, RGDA 2020, p.
26, obs. Mayaux L.). Cependant, le moyen le plus sûr consiste encore à insérer dans l'instrumentum une clause de référence (ou de renvoi) aux
conditions générales (voir pour la nécessité d'une telle référence : Cass. 1re civ., 30 juin 1992, no 90-21.491, Bull. civ. I, no 203, énonçant que « "la
connaissance éventuelle par l'une des parties, à l'occasion d'opérations antérieures, des conditions générales de l'autre partie contenant une clause de
juridiction ou la connaissance de l'existence d'une telle clause dans des documents étrangers à l'opération litigieuse, ne suffit pas, même en cas de
relations d'affaires suivies, à lui rendre opposable cette clause si le contrat n'y fait aucune référence, directement ou indirectement" » ; solution reprise
par Cass. 1re civ., 18 oct. 2005, no 03-18.467, Bull. civ. I, no 377, RTD civ. 2006, p. 107, obs. Mestre J. et Fages B. ; Cass. 1re civ., 7 juin 2006, no 04-
14.960, Bull. civ. I, no 286 ; comp. cependant, Cass. com., 23 nov. 1999, no 96-21.869, Bull. civ. IV, no 210). Ainsi est-il possible, par exemple, d'accepter
une clause attributive de compétence par renvoi à un « "cahier des prescriptions générales" » (Cass. 1re civ., 16 févr. 1999, no 96-19.469, Bull. civ. I, no
51, JCP G 1999, II, no 10162, note Fillion-Dufouleur B., en matière de commerce international).
Exemple
« Le contractant reconnaît avoir pris connaissance des conditions générales auxquelles renvoie le présent acte et les accepte comme faisant partie
intégrante du contenu du contrat ».
« The signatory aknowledges being duly informed of the general conditions to which the present agreement is referring to, and expressly accepts them
as being part of the said agreement ».
La jurisprudence admet l'efficacité d'une telle clause de renvoi (Cass. 3e civ., 30 juin 2016, no 15-22.228, AJDI 2017, p. 105, note de La Vaissière Fr.) et,
en présence d'un consommateur, ne la considère pas comme abusive (Cass. 1re civ., 10 avr. 1996, no 94-14.918, Bull. civ. I, no 177, Contrats, conc.
consom. 1996, comm. no 113, note Leveneur L., JCP G 1996, II, no 22694, note Paisant G. et Claret H., RTD civ. 1997, p. 118, obs. Mestre J., en matière
d'assurance). Une autre possibilité est d'annexer un exemplaire des conditions générales au contrat (voir par exemple, Cass. 1re civ., 24 nov. 1998, no
96-16.570, admettant le jeu d'une clause de solidarité stipulée de cette manière).
La Cour de cassation a par ailleurs précisé qu'en présence d'une telle clause de renvoi aux conditions générales figurant au recto du contrat, l'absence
de la formule d'usage de prise de connaissance des conditions générales qui figurait au verso et de leur acceptation est sans aucune incidence (Cass.
com., 2 juin 2015, no 14-11.014, Gaz. Pal. 5 janv. 2016, p. 36, obs. Houtcieff D.). L'effet obligatoire est donc acquis dès lors que les conditions générales
ont été portées à la connaissance de l'acquéreur, sans qu'il soit besoin de respecter un formalisme particulier.
À l'inverse, les conditions générales du contrat peuvent elles-mêmes renvoyer à des conditions particulières. L'effet est alors identique : la connaissance
des conditions particulières peut se déduire d'une clause de renvoi prévue dans les conditions générales. La Cour de cassation a ainsi pu censurer un
arrêt d'appel qui avait refusé à une compagnie d'assurance le bénéfice d'un plafond de garantie, faute pour lui de démontrer par les documents versés
aux débats, et notamment les exemplaires des conditions particulières du contrat qui n'ont pas date certaine et ne portent pas la signature de l'assuré,
que cette limitation est entrée dans le champ contractuel. En effet, pour la Haute juridiction, « "en statuant ainsi, sans répondre au moyen de l'assureur

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qui faisait valoir que les conditions générales du contrat, dont l'assuré se prévalait, prévoyaient que la garantie conducteur était plafonnée à un montant
indiqué dans les conditions particulières ce dont il déduisait que l'assuré avait connaissance de l'existence d'un plafond de garantie, la cour d'appel a
violé" » l'article 455 du Code de procédure civile (Cass. 2e civ., 14 avr. 2016, no s 15-16.625 et 15-22.147, Bull. civ. II, no 113, JCP E 2016, 1363, obs.
Seube J.-B.).
Si elles doivent être acceptées, les conditions générales n'ont pas besoin de faire l'objet d'une acceptation spécifique (voir en ce sens, Ghestin J., Loiseau
G. et Serinet Y.-M., Traité de droit civil. La formation du contrat, t. 1, LGDJ, 4e éd., 2013, no 923). Dès lors qu'un renvoi a été fait aux conditions générales,
que le cocontractant a pu en prendre connaissance et n'a pas manifesté de volonté contraire, les conditions générales peuvent entrer dans le champ
contractuel par le seul effet de l'acceptation plus globale de l'offre (voir notamment, Cass. 1re civ., 11 mai 2012, no 10-25.620, RLDA 2012/74, no 4236,
note Combet M., où la confirmation d'une commande comportait une référence à des conditions générales de vente stipulant une clause compromissoire
portée à la connaissance du cocontractant, de sorte que celui-ci a, « "fût-ce par son silence, accepté cette référence" » ; voir également, Cass. 1re civ., 3
juin 1997, no 95-17.603, Bull. civ. I, no 177, Rev. crit. DIP 1999, p. 92, obs. Mayer P. : « "en matière d'arbitrage international, la clause compromissoire par
référence à un document qui la stipule est valable lorsque la partie à laquelle on l'oppose en a eu connaissance au moment de la conclusion du contrat et
qu'elle a, fût-ce par son silence, accepté cette référence" » ; Cass. 1re civ., 9 nov. 1993, no 91-15.194, Bull. civ. I, no 313, JDI 1993, p. 690, note Loquin E.,
Revue de l'arbitrage 1994, p. 108, note Kessedjian C.). La Cour de cassation a même admis qu'une telle clause compromissoire par référence était
valable lorsque le renvoi était opéré par le document principal aux conditions d'une association professionnelle de commerçants, avec l'indication qu'elles
étaient accessibles et envoyées gratuitement sur demande (Cass. 1re civ., 9 nov. 2016, no 15-25.554, RTD com. 2017, p. 844, obs. Loquin E.), ou encore
lorsque les trois documents établissant la relation contractuelle (la confirmation de commande, le bon de livraison et la facture) comportaient, au recto,
une invitation en français à consulter les conditions de vente et de livraison et, au verso, la reproduction de l'intégralité des conditions générales de
vente rédigées en langue allemande, dont l'article 11.2 stipulait une clause de compétence (Cass. 1re civ., 15 mai 2018, no 17-12.044 ; pour les juges, «
"nonobstant sa rédaction en langue étrangère, cette clause sur laquelle l'attention de l'acheteur avait été spécialement attirée, et qui n'avait pas été
contestée, avait fait l'objet d'une acceptation tacite et lui était opposable" »). La CJUE a récemment apporté une précision s'agissant des clauses
attributives de juridiction, qui doivent faire l'objet d'une acceptation claire des parties : « "Une clause attributive de juridiction est valablement conclue
lorsqu'elle est contenue dans des conditions générales auxquelles le contrat conclu par écrit renvoie par la mention du lien hypertexte d'un site Internet
dont l'accès permet, avant la signature dudit contrat, de prendre connaissance desdites conditions générales, de les télécharger et de les imprimer, sans
que la partie à laquelle cette clause est opposée ait été formellement invitée à accepter ces conditions générales en cochant une case sur ledit site
Internet" » (CJUE, 24 nov. 2022, no C-358/21, ECLI:EU:C:2022:923, Tilman SA c/ Unilever Supply Chain Company AG, D. 2023, p. 925, obs. Clavel S. et
Jault-Seseke F.).
Évidemment, l'acceptation des conditions générales n'empêche pas l'invalidation de certaines clauses qui pourraient être considérées comme abusives au
sens du droit de la consommation (C. consom., art. L. 212-1 ; voir no s 1325 et s.), du droit commercial (C. com., art. L. 442-1, I, 2º ; voir no s 1305 et s.),
ou même désormais du droit commun des contrats (C. civ., art. 1171 ; voir no s 1282 et s.). On peut par exemple citer un arrêt de la Cour de cassation
prononçant, à la demande du ministre chargé de l'Économie, la nullité de certaines clauses de conditions générales d'un distributeur, annexées aux
contrats cadre conclus avec ses fournisseurs, clauses qui créaient un déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des parties (Cass. com., 27
mai 2015, no 14-11.387, Bull. civ. IV, no 87, AJ Contrats d'affaires 2015, p. 379, obs. Bros S.). En ce qui concerne les relations entre professionnels et
consommateurs, l'on peut évoquer un jugement du tribunal de grande instance de Paris (TGI Paris, 4e ch., 2e sect., 5 mars 2015, no 12/12401, Contrats,
conc. consom. 2015, comm. 51, note Loiseau G., Gaz. Pal. 29 mai 2015, p. 18, note Prieur S., RLDI 2015/115, no 3735, note Moritz M.), confirmé par un
arrêt de la cour d'appel de Paris (CA Paris, pôle 2, ch. 2, 12 févr. 2016, no 15/08624, Contrats, conc., consom. 2016, repère 3, obs. Caron Ch.), qui a
qualifié de clause abusive au sens de l'ancien article L. 132-1 du Code de la consommation (aujourd'hui, C. consom., art. L. 212-1) la clause attributive de
juridiction au profit des tribunaux californiens qui figurait dans les conditions générales d'utilisation du réseau social Facebook (sur la valeur de ces
conditions générales, voir Loiseau G., La valeur contractuelle des conditions générales d'utilisation des réseaux sociaux, Contrats, conc. consom. 2012,
comm. 78).
Pour d'autres documents cependant, un simple renvoi ne suffit pas toujours à apporter la preuve d'une contractualisation : ainsi, pour la Cour de
cassation, la clause par laquelle un propriétaire « "reconnaissait avoir pris connaissance de tous les documents du lotissement et être tenu d'en exécuter
toutes les stipulations, charges et conditions en tant qu'elles s'appliquaient au bien vendu" » a été considérée comme insuffisante à caractériser « "une
volonté non équivoque des colotis de contractualiser le règlement du lotissement ou certaines de ses dispositions" » (Cass. 3e civ., 21 mars 2019, no 18-
11.424, publié au Bulletin, RTD civ. 2019, p. 626, obs. Dross W.).

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