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La conclusion du contrat d’assurance

Le processus d’établissement du contrat d’assurance comprend plusieurs phases lesquelles peuvent


être déclinées comme suit :
➢ La proposition d’assurance délivrée par l’assureur à l’assuré
➢ L’information du souscripteur par la notice d’information

=) Une phase précontractuelle (I)

➢ La couverture immédiate du risque avant la conclusion définitive du contrat par la note de


couverture
➢ La police d’assurance matérialisant l’existence du contrat, sous la forme de l’attestation
d’assurance délivrée à l’assuré.

=) La conclusion du contrat d’assurance (II)

➢ Toute modification du contrat doit pouvoir faire l’objet d’un avenant.

=) La modification des relations contractuelles (III)

Ces étapes ont été minutieusement réglementées par le législateur de telle sorte à ce qu’elles ne
soient pas laissées au hasard, mais surtout pour orienter les parties afin qu’elles contractent en
connaissance de cause. C’est particulièrement le cas du souscripteur non professionnel (au
demeurant consommateur) face à l’assureur.
Problème : Comment la loi 17.99 a-t-elle réglementé ces différentes étapes du processus ? Le
législateur a-t-il réellement veillé à garantir un équilibre contractuel entre les parties contractantes ?
La jurisprudence de son côté a-t-elle respecté cette volonté ?

I. L’obligation d’information préalable à la souscription du


contrat d’assurance

La phase précontractuelle a non seulement pour objet de permettre l’information du candidat à


l’assurance (A) mais aussi de l’assureur sur les risques éventuels à couvrir (B). Ce dernier est au
surplus, tenu d’un devoir de conseil en tant que professionnel (C).

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A. L’INFORMATION PAR L’ASSUREUR DU CANDIDAT A L’ASSURANCE

Imprécision terminologique. Si l’on se reporte à la loi 17.99, il ressort que, bien que l’on ne soit
qu’au stade précontractuel, cette dernière désigne le candidat à l’assurance comme étant l’ « assuré »
(art. 10 et 11 al. 3). Or, celui-ci n’a pas encore cette qualité. L’imprécision terminologique est ici
patente. En réalité, il s’agit là d’une reprise des dispositions de la loi française que notre législateur
n’a pas jugé bon de rectifier. Le contrat n’étant pas conclu, personne ne peut encore avoir la qualité
d’assuré.
La notice d’information. En vertu de l’article 10 de la loi 17.99, et ce « préalablement à la
souscription du contrat, l’assureur remet à l’assuré une notice d’information qui décrit
notamment les garanties assorties des exclusions, le prix y afférent et les obligations de
l’assuré (…) ». Ceci signifie qu’avant la conclusion du contrat, l’assureur est tenu d’informer le
candidat à l’assurance sur les prix et les garanties, les exclusions et les obligations de l’assuré
découlant du contrat envisagé.
Du point de vue des assureurs, l’objectif est de permettre une saine concurrence entre eux et de
favoriser les comparaisons de leurs cocontractants potentiels. Du point de vue des futurs assurés,
la remise de cette notice a pour but d’éclairer le consommateur d’assurance face à un professionnel
(contrat d’adhésion).
Le législateur marocain a modifié l’article 10 relatif à l’obligation d’information avec la loi 59.13.
Celui-ci complète les dispositions de cet article en ajoutant la remise du projet de contrat ou la
notice d’information. Le projet de contrat est en principe plus détaillé, plus personnalisé car il
traduit un certain avancement dans les négociations des futurs contractants. En pratique toutefois,
ce projet de contrat se rencontrera davantage dans les assurances des entreprises que dans les
simples contrats individuels. Pour autant, le projet de contrat permet au futur assuré de prendre le
temps de la réflexion avant de décider de signer le contrat définitivement =) tempérament au
caractère imposé de ce type de contrat.
Mais quelle est la nature de cette notice d’information ? S’agit-il d’une offre de contracter au sens
de la théorie générale des obligations ? Il semblerait que non puisque l’alinéa 2 de l’article 10 y
répond par la négative en disposant que la proposition d’assurance n’engage ni l’assureur ni l’assuré.
En réalité ce que la loi appelle de manière maladroite « proposition d’assurance », que l’on a
également repris du droit français, c’est cette notice d’information qui n’engage ni l’assureur ni
l’assuré.
La Cour suprême a eu l’occasion de juger que le reçu attestant le paiement de la somme proposée
par l’assureur au candidat à l’assurance ne valait pas contrat d’assurance dès lors que celui-ci
n’atteste pas de l’échange des consentements et ne comporte pas, à l’instar de la police d’assurance,
les clauses permettant de délimiter l’étendue de la garantie de l’assureur (CS 5 sept. 1979, n° 699,
dossier pénal n° 72228) =) la notice d’information ne vaut pas échange de consentements.
La Cour a en outre décidé, dans un arrêt du 15 mai 1981 (n° 164, dossier civil 66830) que
l’attestation d’assurance produite par l’assuré constitue un moyen de preuve attestant du bon
paiement de la cotisation due par ce dernier. La Cour a dans cette espèce approuvé les juges du

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fond ayant considéré que cette attestation était bel et bien une preuve de paiement et, par
conséquent, constitue une preuve de l’existence du contrat au moment de la survenance du sinistre.
Outre la notice d’information et le projet de contrat, le législateur français lui, prévoit, la remise
obligatoire d’une fiche d’information au candidat à l’assurance (Art. L. 112-2 du Code des
assurances concernant le coût de l’assurance, les garanties proposées, les exclusions de garantie, un
exemplaire du projet de contrat, les annexes avec mention de l’adresse de l’assureur, modalités
d’examen des réclamations et leur adresse…la loi applicable si celle-ci n’est pas française).
Toutefois, sa portée est limitée car, du moment que le futur assuré dispose d’un projet de contrat,
celui-ci devrait être suffisant pour l’informer sur les garanties dont il bénéficiera et les prix y
afférent. Il y a donc un risque de redondance que le législateur marocain a tout de même évité au
niveau des documents informatifs préalables à la souscription du contrat d’assurance.
Preuve de la remise du projet de contrat ou de la notice d’information. Cette remise a un
caractère obligatoire pour le législateur français s’agissant de la fiche d’information (art. 112-2 al.
1), mais pas pour les autres documents informatifs. Le législateur marocain ne fait, lui non plus,
ressortir aucun caractère obligatoire à la charge de l’assureur de remettre au candidat à
l’assurance ladite notice ou projet de contrat (cf. art. 10).
Selon l’article R. 112-3 du Code français, « le souscripteur atteste par écrit de la date de remise des
documents mentionnés au deuxième alinéa de l’article L. 112-2 et de leur bonne réception ». Cette
disposition ne concerne que la preuve de la remise matérielle des documents, pas l’exactitude de
leur contenu. Par ailleurs, le contrat d’assurance est un contrat consensuel et l’exigence de l’écrit
n’est qu’un moyen de preuve. Par ailleurs, la remise de ces documents semble quelque peu
malmenée au regard de l’évolution actuelle de la souscription des contrats d’assurance (notamment
à distance ou par tout autre mode de communication électronique) =) le respect strict des
dispositions de l’article 10 est quelque peu illusoire.
En matière d’assurance de groupe en revanche, est mise à la charge du souscripteur l’obligation de
remettre aux adhérents une notice d’information lors de l’adhésion au contrat1. Cette obligation a
été rappelée à l’occasion d’un arrêt de la CA Rabat le 24 janvier 2006.
En l’absence d’une obligation pesant sur l’assureur de remettre la notice d’information au
souscripteur, il n’existe aucune sanction liée à la non remise de ce document. C’est pourquoi
il convient de s’interroger sur la portée de cette disposition laquelle, si elle n’est pas obligatoire,
vide de son sens l’article 10. Corrélativement, le candidat à l’assurance ne bénéficie donc que d’une
protection insuffisante au stade précontractuel. A vrai dire, celui-ci n’est pas en droit d’exiger son
droit à l’information car la loi n’astreint pas l’assureur à cette obligation.
Obligation découlant du Code de la consommation. Toutefois, si le caractère obligatoire de
l’information du candidat à l’assurance fait défaut dans la loi 17.99, la loi 31-08 relative à la
protection du consommateur prévoit un chapitre premier entier réglementant l’obligation
d’information pesant sur le professionnel (art. 3 à 11). Ce n’est donc pas vers les dispositions
relatives à l’assurance qu’il convient d’astreindre l’assureur à cette obligation, mais au détour du

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Art. 106 L. 17.99 Le souscripteur est tenu de remettre la notice à l’adhérent, laquelle doit être établie par l’assureur.
Elle définit les garanties et les modalités d’entrée en vigueur ainsi que les formalités à accomplir en cas de sinistre, mais
aussi les éventuelles modifications du contrat. Cet article met également à la charge du souscripteur la preuve de cette
remise et de l’information concernant les modifications.
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Code de la consommation, étant entendu que le candidat à l’assurance est considéré comme
consommateur d’assurance. Il est néanmoins regrettable que la loi 17.99 ne prévoit pas le caractère
obligatoire de l’information de l’assuré.
=) protection légale insuffisante du candidat à l’assurance

B. L’INFORMATION DE L’ASSUREUR PAR LE FUTUR ASSURE

La proposition d’assurance. Avant la conclusion du contrat, l’assureur a besoin de se faire une


idée exacte du risque qui pèse sur la personne ou les biens du candidat à l’assurance. D’où l’intérêt
de la proposition d’assurance. Ce document, selon l’article 1er de la loi 17.99, est défini comme étant
le « document remis par l’assureur ou son représentant à un assuré éventuel et sur lequel ce dernier
doit porter les informations nécessaires à l’assureur pour l’appréciation du risque à couvrir et la
fixation des conditions de couverture ».
La proposition d’assurance en droit français est tout simplement la notice d’information que le
législateur français a maladroitement désigné comme une proposition d’assurance. D’ailleurs, celle-
ci n’engage ni l’assureur ni l’assuré. En revanche, le législateur marocain donne une définition de la
proposition d’assurance qui est différente de la conception française. Pour le législateur marocain,
ce document permet à l’assureur d’apprécier l’ampleur du risque à couvrir et les conditions de la
couverture. En droit français, un tel document est appelé questionnaire (art. L. 112-3) dont on ne
trouve nulle trace dans la loi 17.99.
La précision de l’article 10 alinéa 3 en vertu de laquelle « Est considérée comme acceptée la
proposition faite par lettre recommandée de prolonger ou de modifier un contrat ou de remettre
en vigueur un contrat suspendu, si l’assureur ne refuse pas cette proposition dans les dix jours après
qu’elle lui soit parvenue » atteste de ces difficultés.
En pratique, la proposition d’assurance comporte très généralement un questionnaire remis par
l’assureur au candidat à l’assurance, qui le remplit, le date et le signe. Cette déclaration revêt une
importance de taille car elle permet d’apprécier l’exactitude de la déclaration du risque par le
souscripteur. Cette proposition n’engage toutefois pas les parties ainsi que le souligne l’article 10
alinéa 2, mais n’a qu’une simple portée informative. De cette manière, l’assureur procède à la
sélection des risques (dans le cadre des assurances vie un certificat médical permet aussi d’éclairer
l’assureur).
La remise de ce document à l’assuré ne fait là encore, l’objet d’aucune obligation en droit marocain.
Il revient au candidat à l’assurance, de manière spontanée, de procéder de lui-même à la
déclaration (système de la déclaration spontanée abandonnée en 1989 par le droit français au profit
de la technique du questionnaire). Ainsi, si le candidat à l’assurance tait certains risques auxquels il
peut être potentiellement soumis, l’assureur ne peut valablement apprécier leur ampleur ni leurs
caractéristiques. A l’instar de la notice d’information, l’absence d’obligation de remettre ce
document à l’assuré en vue d’avoir une déclaration la plus complète possible joue cette fois en sa
défaveur, à moins qu’il n’arrive à établir la prévisibilité du sinistre ou la MF du candidat à
l’assurance.

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En droit français, c’est à l’assureur de remettre un questionnaire à l’assuré pour y répondre sur tous
les éléments concernant l’appréciation du risque qu’il aura à garantir. C’est une loi n° 89-1014 du
31 décembre 1989 (JO 3 janv. 1990) qui a écarté le régime de la déclaration spontanée pour adopter
celui du questionnaire. Elle consacre ainsi l’évolution jurisprudentielle qui avait eu lieu au cours des
années 1985-1989.
Quoi qu’il en soit, toutes ces contraintes ne sont pas toujours suivies à la lettre et que la plus grande
difficulté provient du fait que la terminologie et la technique du droit des assurances ne sont pas
compréhensibles par le souscripteur moyen non-juriste. Leur avantage est tout de même de
tempérer le caractère imposé du contrat d’assurance comme contrat d’adhésion. En tous cas une
meilleure lisibilité est souhaitée.

Débat actuel en droit français : La formulation même des documents remis lors de la
souscription du C d’assurance doit-elle comprendre exclusivement des questions auxquelles
doivent être apportées des réponses, ou est-il valable de procéder par des phrases pré-rédigées
(affirmations ou négations) sous lesquelles sera apposée la signature du déclarant ? La chambre
criminelle de la Cour de cassation adopte une position opposée à celle des chambres civiles :
Pour la première chambre civile de la Cour de cassation, les deux méthodes sont
utilisables. Pour la chambre criminelle, il est nécessaire de produire les questions avec
les réponses données par le souscripteur (pas seulement oui ou non). La chambre mixte
semble avoir tranché (Cass. ch. mixte, 7 févr. 2014, no 12-85.107) : le procédé de la déclaration
prérédigée est banni : sans questions, c’est-à-dire sans point d’interrogation, on n’est pas en
présence d’une déclaration au sens de l’article L. 113-2 du Code des assurances , et il n’est pas
possible d’évoquer une fausse déclaration. De la même manière, la preuve d’une fausse
déclaration intentionnelle ne peut être fournie que si l’assureur produit un document
contenant des questions. Le pbm demeure toutefois relativement à la preuve de l’existence
desdites questions, qui vient limiter la portée de cet arrêt (En l’absence de questions, il reste à
l’assureur la possibilité de fonder sa demande de nullité du contrat sur le dol. La jurisprudence,
qui exige pour cela que des questions aient été posées, ne laisse néanmoins à une telle démarche
que peu d’espoir de succès =) protection de l’assuré).

C. LE DEVOIR DE CONSEIL DE L’ASSUREUR

Objet. Le devoir d’information et de conseil existe dès qu’il y a « un déséquilibre des connaissances
entre contractants ». Il trouve sa justification dans l’inégalité des compétences entre les
cocontractants, un professionnel et un profane. Il suppose, de la part du professionnel, de livrer
une appréciation quant à l’opportunité ou non de souscrire à tel ou tel type de contrat d’assurance,
pour ne pas profiter abusivement de l’incompétence et de l’ignorance de l’autre en lui fournissant
une prestation qui ne répondrait pas à ses attentes. C’est donc une expression particulière du
devoir de loyauté qui doit permettre au candidat de savoir s’il doit contracter ou non la
police d’assurance.
En théorie, il conviendrait de distinguer l’information et le conseil. L’information constitue un
simple renseignement alors que le conseil implique une démarche intellectuelle plus poussée. Le
conseil traduit une opinion sur le comportement que devrait adopter le destinataire. Cette
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distinction demeure toutefois théorique car la frontière entre les deux n’est pas très nette. Par
ailleurs, la jurisprudence ne prête aucune importance à cette distinction.
Une obligation d’origine jurisprudentielle. Malgré les obligations légales d’information pesant
tant sur l’assureur que sur l’assuré, la jurisprudence s’est attachée à créer une obligation générale de
conseil et d’information en matière d’assurance. Les tribunaux font référence le plus souvent de
façon globale à « l’obligation d’information et de conseil », sans distinguer précisément ce qui relève
de l’information, du conseil ou de la mise en garde. Les décisions des tribunaux concernant le
devoir d’information et de conseil en matière d’assurance sont de plus en plus nombreuses au fil
des années, car les preneurs d’assurance n’hésitent pas à mettre en cause la responsabilité du
professionnel.
L’obligation qui pèse sur l’assureur est une obligation de moyens. Le fondement de l’obligation est
le contrat d’assurance et le manquement à cette obligation par l’assureur entraîne sa responsabilité
contractuelle. Il est également tenu d’une obligation particulière d’information et de conseil
précontractuelle à l’égard de la personne qui souhaite souscrire un contrat d’assurance, dont le
fondement ne dérive pas du contrat d’assurance. Cette responsabilité est alors délictuelle (cf. Cass.
civ. 2ème, 7 juil. 2011, concernant le cas d’une assurée ayant supprimé la garantie rente invalidité or
celle-ci a justement été déclarée invalide peu de temps après. Elle a assigné le mandataire d’une
société de courtage pour avoir failli à son devoir d’information lequel, selon la CC°, ne s’achève
pas avec la remise de la notice d’information. En gros il fallait que l’assurée puisse être parfaitement
informée des conséquences de cette suppression =) responsabilité délictuelle).

II. La conclusion du contrat d’assurance

Le contrat d’assurance déroge à la règle selon laquelle le contrat n’engage que ceux qui y étaient
partie =) dérogation au principe de l’effet relatif des contrats. En effet, celui-ci peut intéresser
plusieurs partenaires à l’assurance (A). Sa conclusion intervient néanmoins entre l’assureur et son
co-contractant (le souscripteur) et exige tant le respect d’un certain formalisme (B) que la présence
de certains éléments de fond (C).

A. LES PARTENAIRES AU CONTRAT D ’ASSURANCE

Le souscripteur contracte avec l’assureur. Il prend l’obligation de payer la prime (sauf précision
contraire dans la police d’assurance). Il peut aussi disposer de la qualité d’assuré, mais la garantie
d’assurance peut être souscrite pour le compte d’un tiers, qui bénéficiera de la couverture de son
risque. C’est l’assurance en vertu d’un mandat visée à l’article 9 de la loi 17.99. Celui-ci dispose
que « l’assurance peut être contractée en vertu d’un mandat général ou spécial ou même sans
mandat, pour le compte d’une personne déterminée.
Fonctionnement de l’assurance pour le compte de qui il appartiendra. L’assurance pour le
compte de qui il appartiendra est une clause qui vaut tant comme assurance au profit du

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souscripteur du contrat, que comme stipulation pour autrui au profit du bénéficiaire connu ou
éventuel de ladite clause. Le bénéficiaire n’est pas nommément désigné (il peut l’être), il est désigné
par sa qualité juridique (par exemple le propriétaire de tel bien). La clause va donc profiter à
chaque propriétaire au moment du sinistre.
La raison qui incite une personne à souscrire pour le compte d’autrui est indifférente, elle ne doit
néanmoins pas être illicite. Ex : une société qui souscrit une assurance pour le compte de son
dirigeant afin de garantir les dommages subis par son véhicule personnel.
Pour bien comprendre le mécanisme de l’assurance pour le compte de qui il appartiendra, il
convient de distinguer deux droits : d’une part, le droit d’agir contre l’assureur pour lui demander
d’exécuter sa prestation ; d’autre part, le droit à l’indemnité d’assurance qui doit être versée au
bénéficiaire désigné par le contrat d’assurance. C’est pourquoi conformément aux règles de la
stipulation pour autrui, le souscripteur du contrat d’assurance est en droit d’agir contre l’assureur
pour que celui-ci exécute son engagement en cas de sinistre, mais il ne peut exiger que l’indemnité
soit versée entre ses mains.

B. LE FORMALISME DU CONTRAT D’ASSURANCE

Intérêt de l’écrit. La police d’assurance matérialise le contrat d’assurance. Les stipulations de


cette police forment la loi des parties. L’attestation constate l’existence de l’assurance.
Aucune disposition légale n’énonce que le contrat d’assurance est consensuel. L’écrit n’est
nullement exigé car le contrat se forme valablement par le seul échange des consentements des
parties. Cependant, l’écrit est exigé par la loi (art. 11) et la jurisprudence le considère comme la
preuve du contrat d’assurance à l’occasion d’un litige (Cour suprême, 7 nov. 2002, n° 3415 dossier
n° 875/1/5/2002). Il permet également aux juges de s’y référer et constitue leur seul support, ce
qu’a pu rappeler la Cour suprême dans un arrêt rendu le 3 juin 1983 (n° 3683, dossier civil
n° 3978/94).
La preuve du contrat d’assurance par la note de couverture. L’article 11 alinéa 3 reconnaît la
possibilité pour les parties contractantes d’être engagées l’une vis-à-vis de l’autre avant la
délivrance du contrat ou de l’avenant par la remise d’une note de couverture ». Celle-ci est définie
comme étant un « document concrétisant l’engagement de l’assureur et de l’assuré et prouvant
l’existence d’un accord en attendant l’établissement de la police d’assurance ». Ce qui signifie que
les effets que celle-ci produit à l’égard des parties est similaire à la situation où la police d’assurance
aurait été rédigée. C’est ce qu’a reconnu la Cour suprême dans un arrêt en date du 3 juin 1998
(n° 3683, dossier commercial n° 3978/94). Toutefois, cette note de couverture, bien qu’elle
ait un effet immédiat, n’engage les parties que pour une durée limitée. Aucune forme
particulière n’est exigée pour la note de couverture. En ce sens, la Cour de cassation française a
pu considérer que s’il est prétendu que la note de couverture a été accordée par l’assureur au cours
d’une conversation téléphonique, le défaut de preuve de la teneur de celle-ci interdit d’admettre
la prétention » (Cass. civ. 1ère, 14 janv. 1992). Ce qui signifie que si la teneur de cette note avait été
rapportée, l’engagement de l’assureur aurait été acquis au jour de la conversation téléphonique.
La date de prise d’effet de la note de couverture peut toutefois être subordonnée au paiement
de la prime, à moins que celle-ci ne porte la mention quittance, auquel cas elle produit un effet
immédiat.

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La durée de validité de la note de couverture n’est pas spécifiée par le législateur à l’instar de celle
qui concerne l’assurance automobile obligatoire (1 mois selon l’arrêté de min. des Fin. Du 26
janv. 2005 n° 213-05, BO n° 5292 p. 585). Elle doit donc couvrir les risques jusqu’à la conclusion
définitive du contrat d’assurance ou à l’expiration de la date qui y est apposée.
L’imprécision du législateur quant aux conditions de conclusion de cette note laisse perplexe car
rien n’est précisé dans le texte de loi, alors même que celle-ci constate l’engagement des deux
parties (certes provisoire mais générateur d’effets à l’instar du contrat définitif) ce qui suscite des
incertitudes.
Langue de la police d’assurance. Le législateur marocain n’a pas exigé la rédaction du contrat
en langue arabe, ce qui n’exclut pas que celui-ci puisse être établit soit en arabe ou en français.
Toutefois, l’article 206 de la loi 31.08 édictant des mesures de protection des consommateurs
dispose que « tout acte rédigé dans une langue étrangère doit être obligatoirement accompagné de
sa traduction en langue arabe ».
La question se pose néanmoins concernant l’amazighe, reconnue langue officielle de l’Etat selon
l’article 5 de la constitution ? Le mutisme de la loi sur ce point s’accommode mal de cette dernière
exigence. Faute de disposition légale à ce sujet, la question demeure posée.

C. LE CONTENU CONTRACTUEL

Contrairement aux contrats à exécution instantanée (exemple du contrat de vente), le


contrat d’assurance est un contrat dont la caractéristique principale est de durer dans le
temps. C’est un contrat à exécution successive (la nullité n’a pas d’effet rétroactif et on parle
de résiliation). Au regard de cette spécificité, le contrat doit expressément indiquer la durée
d’engagement des parties. C’est ainsi que le législateur a exigé que le contrat d’assurance
mentionne sa durée2, ainsi que la durée de la garantie3 (article 12 de la loi 17.99). Si la clause
relative à la durée dans le contrat d’assurance permet de délimiter la durée de l’engagement
des parties, cette dernière n’est pas la seule clause relative à la gestion du temps (1). D’autres
clauses spécifiques au contrat d’assurance permettent aux parties d’adapter l’effet du temps
sur leurs engagements réciproques.
Par ailleurs, l’assuré en contractant, cherche principalement la garantie de l’assureur au cas
où surviendrait un sinistre. C’est pourquoi une fois la gestion du temps maîtrisé, le contenu
contractuel sera orienté autour de la garantie que l’assureur devra à son cocontractant en
cas de réalisation du risque (2).

2
Article 6 de la loi 17.99.
3
En effet, bien que les deux durées peuvent se recoupent, celles-ci ne se juxtaposent pas nécessairement. La durée du
contrat, c’est la durée pendant laquelle les deux parties seront engagées dans une relation contractuelle. La durée de la
garantie c’est la durée pendant laquelle l’assureur peut être tenu de fournir sa prestation. Elle peut être plus courte ou
plus longue que la vie du contrat. Par exemple, le contrat peut retarder indirectement le point de départ de la garantie.
C’est le cas lorsqu’une clause subordonne le point de départ de la garantie au paiement de la prime (Cass. 2e civ., 3 juin
2010, n° 09-66267, RGDA 210, 1011, note Bigot). Garantie de paiement pour l’assureur, la stipulation met cependant
en danger l’assuré. Pour réduire le risque de non garantie, la jurisprudence favorise la libération du débiteur en
considérant que la remise du chèque vaut paiement.
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1) Les clauses relatives à la gestion du temps

Au regard de la nature même du contrat d’assurance, le législateur s’est intéressé au


consentement des parties alors même que le contrat est déjà formé. Les engagements
perpétuels étant prohibés, le législateur a jugé nécessaire de s’assurer qu’au fil de temps, les
parties contractantes ont toujours la volonté de se maintenir obligées contractuellement.
C’est la technique de la prorogation du contrat pouvant se faire, ou non, par tacite
reconduction (a). S’il s’est intéressé à l’élément relatif au consentement, le législateur a
également entendu s’intéresser à la phase relative à la cessation du contrat d’assurance.
Après examen de ses dispositions, il en ressort que cette dernière est entourée d’un
formalisme rigoureux (tant en matière de mise en demeure que de résiliation ou de
l’exigence d’un préavis) (b). Enfin, et par exception au droit commun des obligations, le
législateur enferme les actions dérivant du contrat d’assurance dans une prescription
spécifique : la prescription biennale (c).

a) Tacite reconduction et prorogation

L’engagement par tacite reconduction. À l’expiration du terme, les obligations nées d’un
contrat ont vocation à s’éteindre de sorte que les effets de ce dernier sont anéantis. Les
parties sont libérées, de plein droit, du lien contractuel sans qu’il soit besoin qu’elles
accomplissent une démarche ou un acte en particulier. C’est le cas également s’agissant du
contrat d’assurance.

Le contrat d’assurance peut être soit à durée ferme soit à tacite reconduction4.

Dans le premier cas, le contrat est automatiquement éteint à la date d’échéance prévue.
Il reviendra aux parties de le proroger moyennant la signature d’un avenant. A défaut
d’avenant, il convient de souscrire un nouveau contrat, avec le risque de ne plus être
couvert contre les sinistres qui pourraient survenir postérieurement.

Dans le second cas de figure, le contrat est automatiquement reconduit, sans aucun
formalisme spécifique à la date d’échéance prévue au contrat. En cas de volonté de
résiliation, il faut, avant le délai de préavis prévu au contrat, formuler une demande de
résiliation à l’assureur. A défaut de cette formalité, le contrat est reconduit avec les effets
qui s’y attachent : obligation de payer la prime dans le délai prévu sous peine de sanction

4 Selon l’article 1er de la loi 17.99, la tacite reconduction est « le renouvellement automatique du contrat d’assurance au
terme de chaque période de garantie ».

9
prévue à l’article 21 de la loi 17.99. Au regard de ces effets, le législateur a entouré la
tacite reconduction d’un formalisme protecteur en faveur de l’assuré.

• La prorogation par tacite reconduction (par renouvellement automatique) doit


avoir été prévue par le contrat (art. 7). Ce texte précise que la durée de chacune des
prorogations successives du contrat par tacite reconduction ne peut être
supérieure à un an. Cette précision doit également figurer au contrat =) on peut
proroger par tacite reconduction plusieurs fois, mais chaque prorogation par tacite
reconduction ne saurait avoir pour effet de proroger au-delà d’un an =) le législateur
veille à ce que les parties réitèrent leur consentement et communiquent autour des
modalités (nouvelles ?) de leur obligation.

En pratique, et dans la grande majorité des cas, les contrats d’assurance proposés aux
particuliers sont conclus pour une durée d’un an. Sauf dénonciation par l’une ou l’autre des
parties à son échéance, le contrat est automatiquement reconduit d’année en année =) il va
revenir à la partie qui ne souhaite pas voir la garantie renouvelée de se manifester avant la
date de fin de garantie. La Cour de cassation a eu l’occasion de juger que la tacite
reconduction du contrat d’assurance ne se présume pas mais doit être expressément prévue
par le contrat d’assurance. CC°, 13 avr. 2010, chb. civile, n° 1679, n° dossier
2955/1/7/2009.
Rigueur du formalisme quant à l’engagement supérieur à un an. L’alinéa 2 de l’article
6 prévoit que lorsque la durée du contrat est supérieure à un an, celle-ci doit figurer en
caractères très apparents par une mention figurant au-dessus de la signature du souscripteur.
Cette clause doit également être rappelée dans chaque contrat. A défaut de cette mention,
le texte prévoit la possibilité pour l’assuré de résilier le contrat sans indemnité chaque année
à la date anniversaire de sa prise d’effet, avec un préavis d’un mois. Enfin, l’alinéa dernier
de l’article 6 précise qu’à défaut de mentionner la durée ou lorsqu’elle n’est pas mentionnée
en caractères très apparents, le contrat est réputé souscrit pour une année.
=) gradation de l’effet du formalisme sans que ça ne soit source de sanction pour l’assureur
qui ne le respecte pas. Plus la durée d’engagement est longue plus on a de formalisme. Si
engagement plus d’un an -) caractères très apparents exigé, par une mention figurant au-
dessus de la signature du souscripteur.
Si la mention fait défaut -) possibilité de résiliation sans indemnité chaque année à la date
anniversaire de sa prise d’effet, avec un préavis d’un mois.
Si aucune mention de durée ou si elle n’apparait pas en caractères apparents -) engagement
réputé être souscrit pour un an.

b) Résiliation et mise en demeure

Faculté de résiliation. L’article 1er de la loi 17.99 définit la résiliation comme étant « la
cessation anticipée du contrat d’assurance à la demande de l’une ou de l’autre des parties,
10
ou de plein droit lorsqu’elle est prévue par la loi ». En effet, l’article 6 dispose que « la durée
du contrat est fixée par la police ». Toutefois ce texte consacre le droit de l’assuré de se
retirer à l’expiration d’un délai d’un an sous réserve d’en informer l’assureur dans les
conditions prévues par la loi et le contrat (préavis). Ce droit à la résiliation doit, de plus, être
rappelé dans chaque contrat. Le minimum de préavis prévu est compris entre 30 et 90 jours
(sous réserve de dispositions particulières).
L’article 8 complète ce texte en disposant que le souscripteur dispose de la faculté de
résiliation nonobstant toute clause contraire (dérogation au droit commun où l’engagement
oblige), ce qui laisse penser qu’il s’agit d’un droit quasi-absolu à son profit. En réalité, bien
que la résiliation soit un droit de l’assuré, cette faculté répond à certaines modalités : elle
doit être faite soit par déclaration faite contre récépissé au siège social de l’assureur ou par
acte extra-judiciaire, ou par lettre recommandé ou tout autre moyen prévu au contrat
d’assurance (notamment par mail si c’est prévu). Ce droit à la résiliation est bilatéral puisque
l’assureur en dispose également. Dans tous les cas où celui-ci dispose de cette faculté, il
peut le faire par lettre recommandé au dernier domicile du souscripteur connu de l’assureur.
Cependant, la résiliation unilatérale par la compagnie d’assurance du contrat la liant à
l’assuré sans le consentement de ce dernier a été considéré comme étant une résiliation
abusive, du fait que les motifs de résiliation ont été limitativement arrêtés par l’article 18 de
l’arrêté du sous-secrétaire d’état aux finances en date du 25 janvier 1965 fixant les CGT des
contrats d’assurance, et viole d’autre part le Dahir du 20 octobre 1969 relatif à l’assurance
automobile obligatoire. TPI Casa, 26 juil. 1982, n° 8600, n° dossier 10159/81.
La procédure de résiliation du contrat d’assurance par l’assureur. Selon l’article 21 de
la loi 17.99, à défaut de paiement d’une prime ou d’une fraction de prime par l’assuré dans
les dix jours suivant la date d’échéance, l’assureur peut suspendre la garantie 20 jours après
mise en demeure de l’assuré. Cette possibilité est indépendante du droit pour l’assureur de
poursuivre l’exécution du contrat en justice. Une fois les 20 jours écoulés, l’assureur, à
l’issue d’une période de 10 jours, a le droit de résilier le contrat. La résiliation doit être
notifiée à l’assuré par lettre recommandée. Il s’ensuit que la date de prise d’effet de la
résiliation est de 30 jours à partir de l’envoi de la mise en demeure par l’assureur. Lorsque
l’assuré réside en dehors du Maroc, le délai de 20 jours suivant la mise en demeure et
précédant la suspension de la garantie est doublé.
Les dispositions de cette procédure sont d’ordre public et l’article 21 prévoit que toute
clause réduisant les délais fixés est réputée non écrite.

c) La prescription des actions dérivant du contrat d’assurance

Le domaine d’application de la prescription biennale. La prescription éteint l’action


naissant de l’obligation (art. 371 DOC). En matière d’assurances, les actions dérivant du
contrat d’assurance se prescrivent par deux ans à compter de l’évènement qui y donne

11
naissance5. Cette disposition est d’ordre public (art. 36). En effet, l’article 37 prévoit que ce
délai ne saurait être abrégé par une clause du contrat d’assurance. Ceci signifie qu’à l’inverse,
les parties pourraient convenir d’un allongement du délai de prescription d’un commun
accord.
La prescription biennale concerne les actions qui portent sur la validité, la nullité et
l’exécution du contrat d’assurance. C’est ainsi concernant les actions en paiement des
primes, les actions en règlement de sinistres, en responsabilité engagées par l’assuré contre
l’assureur, les actions en répétition de l’indu (droit qui appartient à quelqu’un d’obtenir le
remboursement de la valeur dont une autre s’est injustement enrichie à ses dépens) et les
actions en nullité pour fausse déclaration intentionnelle=) tout litige entre l’assureur et
l’assuré à raison du contrat d’assurance.
La disposition relative à la prescription ne semble pas poser de difficultés particulières au
niveau pratique puisqu’un jugement du TPI de Casablanca a fait une application littérale de
la disposition en se référant à l’article 366.
Les aménagements de la prescription. Cependant, le législateur a aménagé le délai à
partir duquel la prescription commence à courir selon les cas. En effet, ce délai ne court :
en cas de fausse déclaration sur le risque, que du jour où l’assureur en a eu connaissance.
La solution permet à l’assureur d’avoir une connaissance complète et réelle du risque qu’il
prend en charge avant de faire courir le délai de prescription. Elle repose également sur
l’article 380 en vertu duquel « la prescription ne court contre les droits que du jour où ils
sont acquis ». Imaginons que celui-ci n’apprend l’existence d’une fausse déclaration de son
assuré qu’une fois le délai de prescription éteint. L’assureur n’aurait plus la possibilité d’agir
contre lui en justice faute d’être dans le délai de deux ans.
De la même manière, en cas de non-paiement des primes ou d’une fraction de prime, le
délai de deux ans ne court que du dixième jour de l’échéance de celles-ci. Il a pu être jugé,
en ce sens, que la prescription ne court qu’à compter de la date d’échéance7 s’agissant d’un
litige concernant le paiement d’une prime.
Ensuite, dans l’hypothèse d’un sinistre, la prescription ne court que du jour où les intéressés
en ont eu connaissance, s’ils prouvent qu’ils l’ont ignoré jusque-là.
Enfin, l’article 36 prévoit que lorsque l’action de l’assuré contre l’assureur a pour cause le
recours d’un tiers, le délai de deux ans ne court qu’à compter du jour où ce tiers a exercé
une action en justice contre l’assuré ou a été indemnisé par ce dernier. En effet, un assureur
reproche aux premiers juges d’avoir considéré que son assuré (en l’espèce une clinique),
partie à une action en justice engageant sa responsabilité (introduite en 2001), n’est pas
fondé à l’appeler en garantie (en 2007) pour extinction de la prescription selon les termes
mêmes de l’article 36. Pour rejeter son pourvoi, la Cour de cassation a considéré que l’action

5
Art. 36 de la loi 17.99
6
TPI Casa, 28 nov. 2007, n° 855/11, n° dossier 8502/24/7.
7
Cour suprême, 20 mai 1984, chb. civile, n° 922, n° dossier 94744/87.

12
de la clinique n’est pas dirigée contre l’assureur ( =) le délai de prescription ne saurait être
celui de 2 ans) mais celui-ci a été appelé en garantie8. En effet, la prescription en cause est
celle pour laquelle l’assuré agit contre son assureur lorsque ce dernier a été condamné à
indemnisation en raison du recours en justice d’un tiers. Tel n’était pas le cas en l’espèce.

Les autres prescriptions en matière d’assurance. Quant aux actions en responsabilité


engagées par la victime, directe ou indirecte, à raison d’un évènement ayant entraîné un
dommage corporel, la prescription est de cinq ans conformément à l’article 23 du Dahir
du 3 octobre 1984 relatif à l’indemnisation des victimes (causés par des véhicules
terrestres à moteur)9. Il a été jugé en 1986 que la prescription quinquennale ne court qu’à
compter de la connaissance du dommage et du responsable. L’assureur qui se prévaut de
cette connaissance doit en apporter la preuve, càd qu’il appartient à l’assureur qui s’en
prévaut de prouver que la victime connaissait le responsable et que l’action est ainsi prescrite
(pour ce faire, il ne suffit pas de se baser sur les déclarations faites par la victime alors qu’elle
se trouvait hospitalisée (art. 106 DOC)). CC°, 11 juin 1986, ch. civile, n° 1503, n° dossier
1837/84.

En revanche, le même dahir prévoit un autre délai de prescription dans un autre cas
de figure : celui où la compagnie d’assurance refuse l’indemnisation de la victime
ou lorsque la victime n’est pas satisfaite de la proposition d’indemnisation qui lui a
été faite. En effet, l’alinéa 2 de l’article 23 dispose que « Sont prescrites toutes actions
en dommages et intérêts non intentées devant le tribunal compétent dans un délai
de 3 ans suivant la date de la lettre de refus d’indemnisation de l’entreprise d’assurances ou
de la lettre de rejet, par la victime ou ses ayants droit, de la proposition d’indemnisation
faite par l’entreprise d’assurances ».
Toutes les autres actions (notamment l’action en responsabilité engagée par l’assuré contre
son mandataire (courtier d’assurance), l’action directe de la victime contre l’assureur de
responsabilité de l’auteur du dommage…), sont des actions en responsabilité civile
délictuelle soumises au délai de prescription de droit commun, càd cinq ans
conformément à l’article 106 DOC10.
=) on a une prescription biennale, qui cohabite avec la prescription de 3 ans pour les
actions en DI devant le tribunal compétent lorsque la compagnie d’assurance refuse
l’indemnisation ou de la date de la lettre de refus de l’indemnisation proposée, avec la
prescription quinquennale en matière d’indemnisation pour les préjudices corporels et

8
CC°, 29 nov. 2011, n° 5177, dossier civil n° 4806/1/3/2011.
9 « Sont prescrites toutes demandes d’indemnisation non formulées par la victime ou ses ayants droit, auprès de
l’entreprise d’assurances concernée, dans le délai de 5 ans suivant, selon le cas, soit la date du rapport d’expertise
constatant la consolidation des blessures de la victime, soit la date du décès de la victime ».
10
« L’action en indemnité du chef d’un délit ou quasi-délit se prescrit par cinq ans, à partir du moment où la partie
lésée a eu connaissance du dommage et de celui qui est tenu d’en répondre. Elle se prescrit en tous les cas par vingt
ans, à partir du moment où le dommage a eu lieu ». Modifié par la loi 04.19 publiée au BO le 21 fév. 2019.

13
pour toutes les actions en responsabilité civile délictuelle. L’existence d’autant de
prescriptions est de nature à porter confusion et de susciter un contentieux abondant.

2) Les clauses relatives à l’effectivité de la garantie

La garantie est l’engagement que l’assureur prend vis à vis de l’assuré. Elle représente la
transcription du risque tel qu’apprécié par l’assureur. Le risque analysé par l’assureur lui
permet de déterminer deux choses : s’il intègre le candidat dans la mutualité mais aussi sa
garantie. Les préoccupations financières de l’assureur sont donc centrales, et c’est pourquoi
elles vont pousser l’assureur à retrancher du risque, au moment de la conclusion du contrat,
certaines situations qui lui paraissent augmenter la fréquence ou le coût du sinistre. C’est
pourquoi une place particulière est faite aux mécanismes originaux du droit des assurances
: les exclusions de garantie (a). Une fois le contrat conclu, et lorsque l’assuré ne respecte
pas les obligations lui incombant (tant au moment de la formation du contrat qu’après)
l’assureur peut, en guise de sanction, également dénier sa garantie (b).

a) Les exclusions de garantie

Les exclusions prévues par la loi 17.99. L’exclusion de garantie est définie par l’article 1er
de la loi 17.99. Selon le législateur, c’est « l’évènement ou l’état d’une personne non
couverte, étant exclue de la garantie ». L’assureur ne devra pas sa garantie.
L’art. 17 de la loi 17.99 énumère une première exclusion : « l’assureur ne répond pas des
pertes et dommages provenant d’une faute intentionnelle ou dolosive de l’assuré ».
On peut trouver dans les articles 44 et 45 deux autres exclusions : « Les déchets,
diminutions et pertes subies par la chose assurée et qui proviennent de son vice propre ne
sont pas à la charge de l’assureur, sauf convention contraire » ; « L’assureur ne répond pas,
sauf convention contraire, des pertes et dommages occasionnés soit par la guerre étrangère,
soit par la guerre civile, soit par des émeutes ou par des mouvements populaires ».
Ces différentes dispositions appellent à distinguer les exclusions légales et les exclusions
conventionnelles. Au-delà de leur source, ces exclusions sont bien différentes entre elles.
L’exclusion légale impérative. Parmi les exclusions légales, la faute intentionnelle
(qui suppose un acte délibéré de son auteur. Elle comprend deux conditions
importantes : la volonté de créer l’évènement, c’est-à-dire la conscience de l’assuré de
commettre une faute, et la volonté de commettre le dommage tel qu’il est survenu, et
pas n’importe quel dommage)
et la faute dolosive (pour laquelle l’intention de créer le dommage n’est plus
nécessaire ; elle n’oblige pas à la recherche des conséquences dommageables. La

14
deuxième condition de la faute intentionnelle n’est pas nécessaire. Le fait que
l’assuré ait volontairement pris des risques en ayant conscience de sa faute suffit), citées
à l’article 30 dans l’alinéa 2 constituent plus une limite à l’assurabilité du risque. Le
comportement de l’assuré tue l’aléa en cours de contrat. La relation d’assurance n’est plus
conforme à l’article 2 DOC (cause-objet-capacité-déclaration de volonté valide).
La faute intentionnelle supprime l’aléa et fausse complètement le calcul de l’assureur.
Il faut bien comprendre que selon la conception retenue, cette cause d’exclusion de garantie
pourra ou non être facilement invoquée par l’assureur.

Dans les assurances de responsabilité, c’est la victime de l’assuré qui pâtirait


principalement de l’exclusion =) problème de réparation car l’assuré à qui la garantie fait
défaut peut être insolvable, quid alors de la victime ? Pour cette raison, la jurisprudence
retient traditionnellement une conception étroite de la faute intentionnelle. Elle décide que
la faute intentionnelle suppose la volonté de provoquer le dommage. Cette définition
est parfaitement conforme à l’esprit du droit des assurances, ce qui compte en la matière,
l’essence du risque, ce sont les conséquences dommageables de l’événement. La faute est
intentionnelle quand on a recherché ses conséquences dommageables.
Il faut cependant préciser que cette conception étroite a un coût. Elle consiste à faire
supporter par la mutualité un nombre plus grand de comportements, cela a une incidence
directe sur le niveau des primes.
Les exclusions supplétives (à défaut de volonté exprimée). Le Code des assurances
prévoit deux exclusions propres aux assurances de dommages dans les articles 44 et 45.
Elles se justifient par des raisons différentes. La première (le vice de la chose) repose sur
l’idée que l’assureur ne couvre pas ce qui peut relever de la garantie du vendeur.
Concernant les guerres (article 45), les raisons de les exclure ont un lien avec la technique
de l’assurance. Il est impossible à l’assureur de prévoir la survenance et l’importance de ceux
-ci. Les destructions qu’ils emportent sont considérées impossibles à couvrir pour lui.
L’impossibilité est cependant relative dans la mesure où le texte prévoit la possibilité pour
le contrat de prendre en charge ses conséquences. La renonciation à l’exclusion doit
cependant résulter clairement des stipulations du contrat (Cass. 2e civ., 23 mars 2017,16-
10589).
Il peut s’agir d’une guerre étrangère. C’est la guerre la plus facile à délimiter, elle a lieu
entre une puissance étrangère et le Maroc. Elle débute par une déclaration et s’achève par
un armistice, un cessez-le-feu ou une capitulation.

• En cas de guerre étrangère, l’assuré doit prouver qu’il n’y a pas de lien entre le sinistre
et la guerre. Il s’agit d’une présomption défavorable à l’assuré. Elle est assez logique
car les circonstances de guerre favorisent l’idée que les sinistres sont dus aux
destructions massives. A l’assuré de démontrer le contraire.

15
• La règle s’inverse pour la guerre civile, les émeutes ou les mouvements
populaires. Ces circonstances sont plus difficiles à déterminer. On peut dire que la
guerre civile un « état d’hostilité générale entre citoyens (Y. Lambert-Faivre, n° 356)
d’un même pays ». Ce fut le cas en Espagne (1936), en Algérie (1954), en
Yougoslavie (1991). Ces guerres peuvent débuter par des émeutes ou des
mouvements populaires. Les émeutes se caractérisent par leur violence et les
mouvements populaires par l’idée que la circulation d’une foule poursuivant une
revendication va causer des désordres et des excès. Puisque qu’aucune guerre n’est
déclarée pour ces événements, on va présumer que l’assureur doit sa garantie. Il
revient alors à l’assureur de démontrer qu’une de ces trois circonstances est à
l’origine du sinistre. En fait, l’exclusion pour émeutes et mouvements populaires est
aujourd’hui dépassée. Soit ces circonstances prennent la forme d’actes de terrorisme
et la victime sera indemnisée, soit elles entraînent la responsabilité de l’Etat. Seules
restent pertinentes l’exclusion du fait de la guerre étrangère ou de la guerre civile.

=) si guerre étrangère -) exclue du champ de la garantie à moins que l’assuré ne prouve que
le sinistre n’a aucun lien avec la guerre.

=) si guerre civile, émeutes, ou mouvements populaires -) présomption de prise en charge


et c’est à l’assureur de prouver le lien pour dénier sa garantie

=) il y a une sorte de distribution du texte

Dans tous les cas, l’exclusion du sinistre repose sur son lien avec les faits.

Quant aux actes de terrorisme, le législateur marocain institua le régime de couverture des
conséquences d’événements catastrophiques 11 à travers la loi n° 110.14 modifiant et
complétant la loi 17.99 (publiée au BO le 6 oct. 2016). La définition de l’évènement
catastrophique dont la couverture est organisée vise les phénomènes naturels d’intensité
grave, soudains ou imprévisibles dont la liste est fixée par voie réglementaire ainsi que
l’action violente de l’homme constituant un acte de nature terroriste ou une émeute ou un
mouvement populaire lorsque les effets sont d’une intensité grave pour la collectivité.
Le nouveau chapitre 5 du Titre II du livre 1er de la loi 17.99 (article 64-1) prévoit que les
contrats d’assurance ci-après doivent comporter la garantie contre les conséquences
d’évènements catastrophiques. Il s’agit des contrats d’assurance garantissant les dommages
aux biens, ceux couvrant la responabilité civile en raison des dommages corporels ou
matériels causés à des tiers par un véhicule terrestre à moteur…

11
En France, le législateur a décidé d’édicter une loi régissant l’indemnisation des dommages
consécutifs à des actes de terrorisme et la lutte contre ces actes : la loi du 9 septembre 1986.
16
L’exclusion conventionnelle. L’exclusion conventionnelle, dans la mesure où elle
contribue à retrancher à la garantie, est un élément de délimitation de la garantie.
Les exclusions légales sont des hypothèses justifiées par l’idée que le calcul de la mutualité
est faussé. Ces hypothèses sont les plus flagrantes. Le contrat d’assurance de choses peut
encore comporter une clause aux termes de laquelle, en cas d’incendie la perte d’espèces
n’est pas assurée. Cette délimitation conventionnelle est dangereuse car elle a des
conséquences graves. De ce fait, le législateur a posé des conditions de forme strictes aux
exclusions de garantie.
Régime de l’exclusion. Cette exigence de forme implique que l’assuré ait connu et accepté
cette exclusion et cela dépend largement de la présentation de la garantie. Si celle-ci consiste
à énumérer toutes les circonstances dans lesquelles la garantie est due, les exclusions sont
indirectes. C’est de l’interprétation du contrat par le juge que ressortira le respect des
conditions imposées par le texte.
L’article 17 de la loi 17.99 exige une exclusion formelle et limitée dans la police. Pour
être formelle, elle doit apparaître en termes clairs et précis. Ce n’est pas le cas lorsqu’une
police exclut dans ses conditions générales les conséquences des dommages causés par l’eau
et prend en charge dans les conditions particulières les dommages causés par l’action même
indirecte de l’eau.
La condition d’une exclusion limitée n’est pas une condition de forme, c’est une condition
de fond. Il ne faut pas que l’assureur trouve dans les clauses d’exclusion de garantie
l’occasion de se délier de sa garantie en faisant disparaître tout le risque. En effet, l’assureur
ne peut, par une exclusion adroite, retirer la quasi-totalité de sa garantie, c’est pourquoi
l’exclusion est forcément limitée.
Ex. : dans une assurance de dommage, une police prévoyait l’extension de la garantie aux
dommages ayant pour origine un état d’arriération mentale ou d’aliénation. Pourtant, la
police définissait la notion d’accident en se référant au comportement d’un individu normal.
L’exclusion annulait donc l’extension de garantie. C’est aussi le cas par l’utilisation de « tels
que », preuve que la clause n’est pas limitative.
L’article 14 complète les conditions en exigeant que les exclusions soient imprimées en
caractères très apparents.
La conséquence d’une rédaction hasardeuse est bien sûr l’inopposabilité de la clause à
l’assuré. L’autre conséquence d’une rédaction hasardeuse c’est que les juges ne peuvent plus
interpréter la clause.
b) Les sanctions à la portée de l’assureur en cas de fausse déclaration
intentionnelle

La déchéance de garantie. La déchéance de garantie constitue la « perte du droit à


indemnité au titre d’un sinistre suite au non-respect par l’assuré de l’un de ses engagements,

17
sans que cela n’entraîne la nullité du contrat »12. Il résulte de cette définition que la
déchéance est une sanction de l’assuré entraînant le défaut d’attribution de l’indemnité
d’assurance en raison du non-respect par ce dernier de ses engagements. C’est une sanction
grave qui permet à l’assureur de ne pas accorder sa garantie13. La question se pose de savoir
quels sont les cas constitutifs d’une violation par l’assuré de ses engagements ? En effet, la
loi 17.99 ne dresse pas une liste des éventuelles violations dont se rendrait coupable l’assuré
mais liste, à l’inverse, les obligations lui incombant.
L’article 20 relatif aux droits incombant à l’assuré dispose que la « déchéance résultant d’une
clause du contrat ne peut être opposée à l’assuré qui justifie qu’il a été mis, par la suite d’un
cas fortuit ou de force majeure, dans l’impossibilité de faire sa déclaration dans le délai
imparti ». Cette disposition est complétée par l’article 35 lequel considère comme nulle
« toute clause du contrat d’assurance frappant de déchéance l’assuré en cas de violation des
textes législatifs ou réglementaires à moins que cette violation ne constitue un crime ou un
délit intentionnel ». De la même manière, le texte prévoit qu’ « un simple retard de l’assuré
dans la déclaration du sinistre ou à l’occasion de la production de pièces aux autorités ne
saurait justifier l’application d’une clause de déchéance à l’endroit de l’assuré » (sous réserve
du droit pour l’assureur de réclamer une indemnité proportionnée au dommage que le
retard lui cause). Ceci signifie que le champ d’application de la déchéance comme sanction
de l’assuré est limité au crime et au délit intentionnel.
Un arrêt de la Cour de cassation en date du 11 octobre 2011 a considéré qu’il incombe à
l’assuré de déclarer tout sinistre survenu pendant le délai convenu au contrat d’assurance.
S’il ne le fait pas, l’assuré peut se voir opposer une déchéance de garantie 14.
La nullité (comme sanction de la fausse déclaration intentionnelle). Toujours selon
l’article 20, l’assuré est obligé de « déclarer exactement, lors de la conclusion du contrat,
toutes les circonstances connues de lui qui sont de nature à faire apprécier par l’assureur les
risques qu’il prend à sa charge ». En cas de réticence ou de fausse déclaration intentionnelle
de la part de l’assuré, ET lorsque cette circonstance a modifié l’objet du risque ou en a
diminué l’opinion pour l’assureur, le contrat d’assurance est déclaré nul en vertu de l’article
30. La nullité est prononcée alors même que le risque omis ou dénaturé par l’assuré a été
sans influence sur le sinistre. Le législateur sanctionne le comportement intentionnellement
délictueux de l’assuré par la nullité du contrat et, à titre de dommages et intérêts, permet à
l’assureur la conservation des primes déjà payées par l’assuré.
La violation de l’obligation de déclaration incombant à l’assuré au moment de la
souscription explique cette sanction lorsque sa mauvaise foi est établie. C’est pourquoi le
législateur exclut la nullité du contrat d’assurance en cas d’« omission ou de

12
Art. 1er de la loi 17.99.
13
Ce qui explique que la déchéance, tout comme l’exclusion de garantie et la nullité doivent être rédigées en caractères
très apparents pour être visibles par l’assuré (art. 13), auquel cas elles lui sont inopposable. Cf. Cour sup. 5 oct. 2010,
n° 4129, dossier civil n° 1153/1/2/2009.
14
CC°, 11 oct. 2011, n° 4378, dossier civil n° 3158/1/2/2011.
18
déclaration inexacte » exclusive de toute mauvaise foi, en distinguant deux cas de
figure :
soit la constatation de la fausse déclaration a lieu avant tout sinistre, l’article 31
permet alors à l’assureur « soit de maintenir le contrat moyennant une augmentation
de prime acceptée par l’assuré soit de résilier le contrat dix jours après notification
adressée à l’assuré par lettre recommandée ». Le défaut d’établissement de la
mauvaise foi de l’assuré, s’il ne permet pas de le sanctionner, accorde toutefois un
avantage à l’assureur. Si ce dernier considère le risque réel à assurer trop élevé,
l’article 31 lui permet de résilier le contrat. Dans un souci d’équilibre, il est prévu
dans ce cas que l’assureur restitue la portion de prime payée pour le temps où la
garantie d’assurance ne court plus. L’assureur peut à l’inverse décider de maintenir
la relation contractuelle moyennant une augmentation de prime dont l’objet est
d’ajuster le montant de celle-ci au risque réel à couvrir.
Lorsque la constatation de la fausse déclaration a lieu après la survenance du
sinistre, l’alinéa 3 de l’article 31 prévoit que l’indemnité d’assurance est réduite en
proportion du taux des primes payées par rapport au taux des primes qui auraient
été dues, si les risques avaient été complètement et exactement déclarés. Il s’agit là
de l’application de la règle proportionnelle de prime qui vient sanctionner la fausse
déclaration de risque de l’assuré, en rétablissant l’équilibre rompu entre les deux
parties au contrat.

III. La modification des relations contractuelles

Le paradoxe de l’exigence d’un avenant écrit et signé. L’avenant doit être écrit et signé par
les parties en vertu de l’article 11 alinéa 2. C’est cet écrit-là qui servira de support pour prouver la
modification d’une clause de la police d’assurance. Or, en exigeant que l’avenant soit signé, le
législateur se contredit avec la qualification du contrat d’assurance lequel n’exige, pour sa validité,
pas d’écrit (contrat consensuel). Pourquoi alors imposer la signature lorsqu’il évoque l’avenant ?
En effet, le nouvel accord préexiste à la rédaction de l’avenant, comme pour le contrat initial,
parfait dès l’échange des consentements. Cf. arrêt 17 mars 2011.

Même pbm en dt français : L’article L. 112-3 du Code des assurances précise que la
modification du contrat d’assurance doit être constatée par un avenant signé des parties. Or, le
principe du consensualisme a conduit la Cour de cassation à juger que « la modification d’un
contrat d’assurance est parfaite dès la rencontre des volontés de l’assureur et de l’assuré », « peu
important que l’avenant n’ait pas été signé par l’assuré » (Cass. 1ère civ., 22 avr. 1992, n° 89-
10.822 ; voir aussi : Cass. 1ère civ., 1er juill. 1941; et la formule « lu et approuvé » n’est
évidemment pas nécessaire : cassation de l’arrêt qui refuse de donner effet à un avenant au
prétexte que la signature du souscripteur n’a pas été précédée de la mention « lu et approuvé »
« comme cela est d’usage » : Cass. 1ère civ., 30 oct. 2008, n° 07-20.001).

19
Le problème de la signature de l’avenant trouble cependant la Cour de cassation elle-
même. La troisième chambre civile a affirmé que la modification du contrat d’assurance
entraînant une restriction de garantie ne peut « être établie que par la signature de l’assuré,
antérieure au sinistre » (Cass. 3ème civ., 17 juin 2003, n° 01-15.700). Et la deuxième chambre
civile lui aurait emboîté le pas. La Cour a en effet cassé un arrêt des juges du fond qui avait
décidé qu’un avenant devait être appliqué car l’assuré avait reconnu en avoir eu connaissance
pour en avoir reçu un exemplaire. La cassation est ainsi motivée : « lorsque l’assureur à
l’occasion de la modification du contrat primitif, subordonne sa garantie à la réalisation d’une
condition, il doit rapporter la preuve qu’il a précisément porté cette condition à la connaissance
de l’assuré » ; or, il résulte des productions que l’assuré « n’avait pas apposé sa signature au
bas de l’avenant mentionnant qu’elle avait reçu un exemplaire du contrat d’assurance ».
(Cass. 2ème civ., 21 avr. 2005, n° 03-19.697, Bull. civ. II, n° 107). Cette solution a été répétée
( Cass. 2ème civ., 17 mars 2011, n° 10-16.553.). Il reste à observer que les trois arrêts précités ont
statué sur une « restriction de garantie », dans le cadre d’assurances de dommages.
La preuve du consentement à l’avenant serait-elle strictement subordonnée à cette
signature ?
La règle énoncée par l’arrêt précité du 22 avril 1992 est donc remise en cause, ce que regrette
une partie de la doctrine qui tient au principe du consensualisme. L’exigence d’une preuve
littérale entre les parties est une chose, l’exigence d’une signature au bas d’un document en est
une autre.

Effets de l’avenant. Une fois signé par les parties, l’avenant fait partie intégrante, pour l’avenir,
de la police d’assurance dont il constitue alors une clause particulière au même titre que les
conditions y figurant. En cas de contradiction entre l’avenant et la police d’assurance, c’est
l’avenant qui l’emporte, comme expression de la volonté de déroger aux conditions générales. A
cet égard, l’avenant et la police ont bel et bien une force probatoire car ils contribuent à
l’établissement de la preuve de l’existence du contrat et de son contenu. Cependant, l’article 10
alinéa 2 dispose que « seul le contrat constate leurs engagements réciproques », semblant ainsi
exclure l’avenant et la note de couverture en tant qu’ils engagent également les parties. Ne serait-
il pas plus simple en effet d’affirmer que le contrat d’assurance est un contrat consensuel dont la
preuve peut être établie selon les règles du droit commun ?

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Table des matières
La conclusion du contrat d’assurance ................................................................................... 1
I. L’obligation d’information préalable à la souscription du contrat d’assurance.......... 1
A. L’INFORMATION PAR L’ASSUREUR DU CANDIDAT A L’ASSURANCE .................... 2
B. L’INFORMATION DE L’ASSUREUR PAR LE FUTUR ASSURE ..................................... 4
C. LE DEVOIR DE CONSEIL DE L’ASSUREUR ................................................................. 5
II. La conclusion du contrat d’assurance .......................................................................... 6
A. LES PARTENAIRES AU CONTRAT D’ASSURANCE ...................................................... 6
B. LE FORMALISME DU CONTRAT D’ASSURANCE......................................................... 7
C. LE CONTENU CONTRACTUEL ..................................................................................... 8
1) Les clauses relatives à la gestion du temps .............................................................. 9
2) Les clauses relatives à l’effectivité de la garantie ................................................... 14
III. La modification des relations contractuelles ............................................................. 19

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