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Shaarawi Khairy. Formes sacrificielles dans l'Ancien Testament et le Coran. Étude comparée des offrandes de Caïn et Abel,
du sacrifice d'Abraham et des sacrifices expiatoires dans le judaïsme et dans l'islam. In: École pratique des hautes études,
Section des sciences religieuses. Annuaire. Tome 114, 2005-2006. 2005. pp. 467-474;
doi : https://doi.org/10.3406/ephe.2005.12527
https://www.persee.fr/doc/ephe_0000-0002_2005_num_118_114_12527
4. Cette tradition qui lie le sacrifice au temple est à ce point forte qu'à l'exception du
cas d'Eléphantine il semble bien qu'aucun culte sacrificiel n'ait été pas célébré dans la
diaspora. Les sacrifices restent cependant présents dans la conscience et dans la prière
et, d'une certaine manière, dans la pratique des juifs. Cf. P. Lenhardt, « la valeur des
sacrifices dans le judaïsme d'autrefois et d'aujourd'hui », dans N. Marcel (dir.), Le
sacrifice dans les religions, p. 61 .
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en Muhammad prophète d'Allah »5. De sorte que l'on est amené à dire qu'il
serait plus exact de parler des formes sacrificielles dans le Coran et non pas
du sacrifice coranique.
Il va de soi que le Coran partage avec l'Ancien Testament plusieurs
principes, et ce rapprochement est particulièrement significatif lorsqu'il
s'agit des récits relatant le sacrifice d'Abraham et les offrandes présentées
par les deux fils d'Adam ainsi que d'autres formes sacrificielles comme les
sacrifices expiatoires. Comparant ces formes sacrificielles nous avons étudié
dans la première partie les offrandes présentées par Caïn et Abel. Ce sacrifice
primordial est particulièrement important. Il permet aux commentateurs
juifs d'expliquer les caractéristiques fondamentales attribuées au système
sacrificiel juif : la qualité de l'offrande, le choix de sa matière et la fonction
qui lui est assignée ainsi que la modalité du sacrifice. Quant au Coran, il
utilise le terme qurbân déjà rencontré dans la Bible pour désigner ce sacrifice.
Néanmoins, il ne mentionne ni les noms des deux fils d'Adam, ni la modalité
ni la matière ni les motifs de ce sacrifice. Devant ce mutisme du Coran les
exégètes musulmans ont eu recours au Livre de la Genèse pour expliquer la
brièveté du texte coranique. Dans la deuxième partie nous avons examiné le
sacrifice d'Abraham. En fait, aussi bien le judaïsme que l'islam ont voulu
faire de la symbolisation de ce non-sacrifice leur fondement. Ils l'ont élevé
à la dignité d'un modèle afin de proscrire le sacrifice humain. Il s'agit donc
de l'élection d'une scène dramatique où se joue le spectacle du sacrifice du
fils par le père ou le consentement du père à donner en sacrifice le plus cher
pour lui, à savoir le fils. L'Ancien Testament et le Coran semblent s'accorder
pour apporter une solution prévoyante, par le moyen d'une substitution
animale, que le sacrifice ne s'accomplisse pas. L'interprétation musulmane
met en évidence quelques divergences avec la tradition juive. Soulignons que
la controverse judéo-musulmane tourne essentiellement autour de l'identité
du fils qui a subi l'épreuve du sacrifice. Nous avons étudié dans la troisième
partie les sacrifices expiatoires en les présentant sous les formes hattat et acham
pour l'Ancien Testament et sous la forme hady dans le Coran. Remarquons
que le sacrifice islamique diffère du sacrifice juif dans sa terminologie, ses
modalités, ses mobiles et ses rituels ainsi que par l'objet sacrifié. Le sacrifice
dans le Coran se limite dans un culte restreint (hajj) et le jour de sa fête. Il
dépend strictement de la tradition d'Ibrâhïm et la commémoration rituelle
chaque année, lors de la fête du sacrifice, par l'immolation d'un mouton
(dahiyya) est à cet égard cruciale, car elle réactualise et donne corps au
geste d'Abraham. Quant au sacrifice expiatoire, il s'impose pour expier la
négligence d'un rite du pèlerinage et l'infraction des règles de Yihrâm. Ce
sacrifice ressemble au sacrifice hattat de l'Ancien Testament avec la
différence que ce dernier se pratique lors de la vie profane, et que le pèlerin a le
choix entre le sacrifice, l'aumône ou le jeûne. Enfin, le sacrifice musulman
5. A. Loisy, Essai historique sur le sacrifice, Paris, éd. Emile Nourry, 1920, p. 517.
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