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Corporate

Nathalie GUIRONET

Focus
David RAICHMAN

Initiative artistique
Dmitry BAEV

L'invité
Joseph FORD

Portfolio
Georges ROUSSE

Street photography
Sonia HAMZA N°30
Février/Mars 2023
OPENEYE - Le regard d’aujourd’hui sur la photographie
Pour accéder au site des auteurs, il suffit de cliquer sur leur portrait
somm
4-5 46 84

La citation - L'édito Initiative artistique L'invité


Dmytro BAEV John FORD
6-7 L’art malgré la guerre ! L’art du diptyque

L'équipe
Photo de couverture
Dmytro BAEV 8

Retrouvez
Dmytro BAEV
Les Amis d'OPENEYE
dans la rubrique
Initiative artistique
Page 46 10 60 98
Corporate Architecture Portfolio
Ont participé à l’élaboration Nathalie GUIRONNET Jacques GARNIER GEORGES ROUSSE
de ce magazine Des cafés mobiles à la mode Les hymnes aux silences Le maître du trompe-L’œil
André Jacquart, égyptienne
Barry Gilbert-Miguet,
Christelle Noël
Jacky Martin,
Jean-Paul­ ­Gavart-Perret,
Laura Samori,
Marcel Boi,
Philippe Litzler,
Pierre Evrard,
Pierre-Jean Amar 20 72 120
Sylvaine Baglan
Interview - Focus Le monde de la photo Société
David RAICHMAN Nicolas SAINT-PIERRE Arnaud BAUMANN
The Parisian Metro Life Les pêcheurs sur glace Fête au Palace

2 OPENEYE N°30 - Février/Mars 2023


maire N° 30- FÉVRIER/MARS 2023

134 172 220 250

Danse Reportage Où va la photographie ? Livres


Sinéad BUNN Line PARIENTE Création et l’Intelligence Un choix de livres
Ballerines Une année en Suisse 1972 artificielle divers et variés,
proposés par la
rédaction
d'OPENEYE

146 186 228 258

Photo sous-marine Street photography Histoire de Le carnet


Thomas SYMONDS Sonia HAMZA la photographie d'OPENEYE
Amphibians Chinatown: une ambiance... La Straight Photography
Kourtney ROY
Les disparitions de la
« Highway 16 »
Peter MAIR & Bea HELLER
La magie de la lumière
La Fondation
CARMIGNAC
« Esprit Pop, es-tu là ? »

158 206 236 262

Astronomie La galerie des lecteurs Témoignage À voir


Thierry LEGAULT Thomas CARYN Katia AR Expositions en
La tête dans les étoiles L’illusion du temps Alger sans filtre Île de France,
en province
et ailleurs

Février/Mars 2023 - N° 30 OPENEYE 3


OPENEYE
Le regard d’aujourd’hui sur la photographie
La citation

Robot prenant des photos dans un studio - Image crée avec Midjourney - Marcel Boi
Robot taking pictures in a studio - Image created with Midjourney

Pour exercer sa suprématie intellectuelle,


l'homme créa l'intelligence artificielle à son image, au risque de s'y soumettre.
To demonstrate his intellectual supremacy,
Man created artificial intelligence in his own image, at the risk of submitting to it.
Serge Zeller
4 OPENEYE N°30 - Février/Mars 2023
L'édito OPENEYE
Le regard d’aujourd’hui sur la photographie
par Philippe LITZLER
Rédacteur en Chef
La Révolution arrive !
Il y a quelques années, François HEBEL disait lors des Rencontres Pro : « La photographie change
tous les cinq ans. » Ce en quoi il n’avait pas tort et il ajoutait : « Je vois l’avenir de la photographie
dans la vidéo. ». Là il se trompait un peu car aujourd’hui nous arrive une révolution, comparable à celle
provoquée par Photoshop® dans les années 90, mais en plus immense, l’intelligence artificielle ou IA.

Ce mouvement mondial qui démarre sur les chapeaux de roue nécessite des algorithmes fabuleux
– qui de surcroit s’améliorent de jour en jour. Tous les domaines sont impactés : architecture, mode,
graphisme, photographie, peinture, écriture, musique, création de magazine et j’en oublie bien d’autres.

Pour un utilisateur, plus besoin d’appareil photo. Les graphistes, quant à eux, ont du souci à se faire s’ils ne maîtrisent
pas ce puissant outil, car l’AI utilise la photo, la vidéo, la musique etc., des techniques qu’elle va « pomper » sur Internet
et qu’elle assemble suivant le désir du créateur (assis devant son clavier). Sauf que… les premiers procès commencent
déjà à émerger. En janvier 2023 Guetty Images a assigné en justice la société Stability A I, qui proposa l’outil de création et
générateur d’images « Stable Diffusion ». Il faudra donc certainement passer par une législation adaptée.

OPENEYE, vous donnera les clés dès ce numéro et les suivants.

The Revolution is coming!


A few years ago, François Hébel remarked, during a meeting of professionals at the Arles photo festival, that “photography
changes every five years”! He certainly had a point. He then went on, however, to add that he saw “the future of photogra-
phy in video", which may have been somewhat less foresighted given that, with the rapid rise of artificial intelligence (AI),
we are today witnessing a far more radical shift – one that outstrips even the already spectacular revolution provoked by
Photoshop® in the 90s.

This global phenomenon, which is gaining ground at a frantic pace, employs mindboggling algorithms - that seem to be
getting more and more sophisticated with every day that passes. No disciplines appear to be immune from its impact – in-
cluding architecture, fashion, graphic design, photography, painting, writing, music and magazine creation, to name just a
few that immediately spring to mind.

A photographer arguably no longer needs a camera. Meanwhile graphic designers are among those with perhaps the most
to lose if they fail to master this formidable new tool. Indeed, AI is able to ‘appropriate’ photos, videos, music and other
materials directly from the internet and instantly re-cycle them in accordance with the brief of a computer operator who
never has to leave his or her keyboard. This being said, the first clouds are beginning to appear on the horizon in the form
of an initial flurry of lawsuits. In January 2023, for example, Getty Images sued Stability AI (the company behind the image
creation and art generation tool Stable Diffusion) in the UK. Certainly, it is likely the field of AI will increasingly need to be
the object of appropriate regulation.

We will develop the subject of AI in more detail elsewhere in this and future issues of OPENEYE.

Février/Mars 2023 - N° 30 OPENEYE 5


OPENEYE
Le regard d’aujourd’hui sur la photographie
L’équipe

Pierre EVRARD
Philippe LITZLER Directeur de la Publication
Rédacteur en chef Responsable Publicité
Contact avec les marques

Marcel BOI
Maquettiste
André JACQUART
Graphiste
Rédacteur en Chef Adjoint
PAO

Jean-Paul GAVARD-PERRET
Rédacteur

6 OPENEYE N°30 - Février/Mars 2023


Une équipe, des regards d’aujourd’hui sur la Photographie
Contact : contact@openeye.fr
Site web : www.openeye.fr

Directeur de la publication
Apolline SCHMITT Contact marques-Communication
Jacky MARTIN Avocate (activité dominante, Pierre EVRARD
Rédacteur évènementiel droit à l’image et à la
Regard sur le monde propriété intellectuelle) Rédacteur en chef
Philippe LITZLER

Rédacteur en chef adjoint


André JACQUART
Clarke DRAHCE Betty FERRER
Photographe Correspondante Rédacteurs
Spécialiste du Studio Arrêt sur image Jean-Paul GAVART-PERRET
Jacky MARTIN

Webmaster
Christelle NOËL

Graphiste, maquettiste, PAO


Laura SAMORI Barry GILBERT-MIGUET
Rédacteur-Traducteur
Marcel BOI
Attachée de rédaction

Attachée de rédaction
Laura SAMORI

Correspondante - Arrêt sur image


Betty FERRER
Sylvaine BAGLAN Christelle NOËL
Graphiste Webmaster Rédacteur Traducteur
Rubrique "À voir" Barry GILBERT-MIGUET

Graphiste - Rubrique À voir


Sylvaine BAGLAN

Ce magazine est édité par :


OPENEYE
Le regard d’aujourd’hui
sur la photographie

Association à but non lucratif


Déclarée d’intérêt général
OPENEYE
Le regard d’aujourd’hui sur la photographie
Les amis d'openeye
par Pierre EVRARD

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Association «OPENEYE le regard d’aujourd’hui sur la photographie » inscrite le 21 Mars 2017


au Registre des Associations du Tribunal d’Instance de Strasbourg sous les références : Volume 95 – Folio n°91

8 OPENEYE N°30 - Février/Mars 2023


Corporate OPENEYE
Le regard d’aujourd’hui sur la photographie
par Pierre EVRARD

Nathalie GUIRONNET
Des cafés mobiles à la mode égyptienne
Le rituel du café sort des murs et s’expose dans le coffre des voitures.

Au Caire, les égyptiens ont modernisé la tradition et imaginé des cafés mobiles qui créent du lien social en attirant
à eux amis et famille.

Facilement identifiables la nuit car elles sont illuminées, les voitures-café, garées dans les quartiers résidentiels et
en périphérie urbaine, proposent toutes sortes de cafés et de boissons chaudes et traditionnelles.

Nouvel objet de mode, reflet de la société contemporaine, chaque voiture est personnalisée pour attirer et fidéliser
les clients.

Mais au-delà de la simple tendance, ce nouveau mode de consommation permet aussi à des hommes et des femmes
de trouver leur indépendance économique et une grande flexibilité de travail. Si certains y trouvent des revenus
complémentaires, jonglant entre plusieurs travails, d’autres y voient l’occasion de se lancer dans l’entreprenariat.

(2021-2022)

Car boot cafés, Egyptian style


In Cairo, the coffee ritual has moved beyond the walls of traditional cafés and gravitated to the boots (trunks) of
cars. Egyptians have indeed, modernised the concept and introduced mobile outlets that create social links by
attracting friends and family to them.

Easily identifiable at night thanks to their vivid illumination, the coffee cars are parked in residential areas and on
the outskirts of the city. They offer all kinds of coffee as well as other hot and typical drinks.

As each vehicle is personalised to attract custom, they have gradually become a reflection of contemporary society
– a new fashion statement.

But beyond the mere trend, this new mode of consumption has also provided many enterprising Egyptians with
a means of achieving greater economic independence and/or work flexibility. Indeed, while some use the mobile
cafés to supplement their income whilst juggling several other jobs, others view them as a viable full-time business
opportunity in their own right.

(2021-2022)

Février/Mars 2023 - N° 30 OPENEYE 11


OPENEYE
Le regard d’aujourd’hui sur la photographie
Interview
par Philippe LITZLER

David RAICHMAN
Tout savoir sur l’Intelligence artificielle
Avec l’Intelligence Artificielle (AI) nous sommes à la veille d’une véritable révolution dans de nombreux domaines mais
particulièrement dans celui de l’art. En effet cette dernière est en train de bouleverser nos certitudes pour notre bien mais
peut-être aussi pour notre malheur.

David RAICHMAN, vous êtes l’un des premiers artistes


à l’utiliser avec un talent surprenant dans la photographie,
plus particulièrement dans la Street photography.

Nous aimerions vous poser quelques questions :

Photo IA de David Raichman

20 OPENEYE N°30 - Février/Mars 2023 © Antoine Alacusos


OPENEYE
Le regard d’aujourd’hui sur la photographie

OPENEYE : Comment en êtes-vous arrivé à utiliser l’AI dans vos créations ? Était-ce en relation avec votre travail
(vous êtes directeur de création, publicitaire à l'agence Ogilvy) ?

David RAICHMAN : Oui, la création publicitaire s’est toujours intéressée aux nouveaux moyens d’expression et
de communication. Mon histoire avec les AI remonte à un peu plus de 5 ans, lorsque les premières applications
sont apparues : édition d’images, deepfake, face swap…
C’est donc assez naturellement que l’usage de l’AI générative s’est invitée dans mon travail, tant professionnel que
personnel.

OPENEYE : Dans ce nouveau domaine il faut maîtriser de nouveaux outils, les programmes par exemple, mais
également le vocabulaire. Pouvez-vous nous expliquer brièvement comment cela fonctionne et que veulent dire les
termes « prompt », « blend » ou même « seed » ?

David RAICHMAN : Wow ! Allez, je me jette, je vais m'essayer un exercice de super vulgarisation et expliquer ce
que sont les AI génératives… En gros, ces AI sont basées sur ce qu’on appelle la technologie de la diffusion.
L’idée est de faire apprendre à une AI, sur des milliards d’images, comment reconstituer une image à partir d’une
image « bruitée » (un peu comme de la neige sur les vieilles TV cathodiques). On pousse progressivement
l’apprentissage avec de plus en plus de bruit jusqu’à un bruit absolu soit un amas de pixels rouges-verts-bleus.
Pour simplifier, une IA générative est capable de créer n’importe quelle image à partir de ces amas de pixels.
La génération d’une image partant de ces amas de pixels et tous les paramètres qui conduisent jusqu’à l’image
finale s’appelle un seed (graine en français). Et l’on peut comprendre aisément qu’un même seed ou graine donnera
toujours le même genre d’images générées.

Dans le processus d’apprentissage des AI, il y a beaucoup de statistiques sur les images qui vont être inférées par
les AI. Par exemple un visage humain répond à des statistiques visuelles. Un homme dans une rue également… ces
statistiques permettent d’encadrer dans quelle mesure l’image reste encore reconnaissable : si je fais des variations
sur un visage humain, jusqu’à quel point reste-t-il reconnaissable ? Ce processus d’encadrement statistique par les
AI permet d’explorer toutes les variations possibles (il y en a des milliards de milliards et je n’exagère pas) autour
d’une image et du concept qui y est associé et c’est là que cela devient incroyable !

Si vous voulez explorer toutes les variations autour de la Joconde (formes couleurs, concepts…) c’est presque
sans fin, mais elle restera toujours reconnaissable car encadrée statistiquement.

Février/Mars 2023 - N° 30 OPENEYE 21


OPENEYE
Le regard d’aujourd’hui sur la photographie

Bon, vous me suivez toujours ? Parce que ce n’est pas terminé il reste une dernière chose à comprendre.
Toutes ces images qui existent potentiellement « vivent » dans des espaces encadrés statistiquement, mais pour
y accéder il faut guider l’AI. Le moyen le plus simple c’est d’utiliser le langage naturel. Là encore les AI apprennent
sur des milliards d’images à créer une jonction statistiquement probable entre une image et un concept grâce à
des mots-clés et des phrases. C’est ainsi que l’on peut préciser à l’AI dans quel espace on veut aller générer son
image. Ces phrases on les appelle des prompts, ils peuvent être simples comme un « chat jouant du piano » ou
élaborés comme « un homme effrayé dans une rue brumeuse le soir à Paris photographié avec un appareil photo
Leica, objectif 35mm, focale 1.4, vitesse d’obturateur 0.5 sec, rendu sur pellicule fuji Acros 3200, Noir et blanc ».
Toutes ces indications permettent d’aiguiller l’AI dans l’espace des images possibles qui statistiquement répondent
à tous ces concepts. Et comme ces espaces sont mathématiquement très vastes comme je l’expliquais tout à
l’heure, ce sont des milliards d’images qui sont possibles, et on choisit soit délibérément ou aléatoirement un
chemin de génération (seed) pour rendre concrètes certaines de ces images.

On peut également aiguiller l’AI avec une image seule, en ce cas elle ira explorer l’espace des possibles autour de
l’image et des concepts qui s’y trouvent. On peut aussi lui donner une image et un prompt ou encore aucun prompt
mais juste plusieurs images, ce qu’on appelle un blend (fonctionnalité récemment disponible dans Midjourney).
Notez qu’entre le moment du guidage de l’AI générative et la génération d’une image il ne se passera que quelques
dizaines de secondes !

Voilà, vous venez de comprendre dans les grandes lignes, ce qui se cache derrière Stable Diffusion, Dall.E ou
Midjourney, mais aussi à quel point les images qui servent de base d’apprentissage sont cruciales pour explorer
ces nouveaux espaces d’images possibles.

OPENEYE : En regardant sur Instagram les nouveaux auteurs qui se sont emparés de l’AI, j’ai remarqué que
« leurs œuvres » avaient une très grande parenté. Normal, puisqu’ils utilisent tous les mêmes programmes.
Mais vos images, que l’on découvrira dans la rubrique suivante, sont très différentes. Vous m’avez dit que
vous utilisez vos propres photos. Comment cela est-il possible ?

David RAICHMAN : Comme je le viens de le dire, la base d’apprentissage des AI génératives a un impact majeur
sur le type d’images que l’on peut créer. J’ai alors constitué mes propres bases d’apprentissage sur mes propres
photographies (et j’en ai des milliers sur les 10 dernières années, notamment sur Paris et son métro que j’ai
obsessionnellement pris pour sujet). Ensuite, je les ai combinées avec des prompts assez élaborés comportant
notamment des pondérations sur l’importance des mots les uns par rapport aux autres, pour plus de contrôle sur
le résultat final. Enfin, j’utilise systématiquement une de mes photographies en référence pour aiguiller encore plus
précisément l’AI vers la composition photographique de l’image finale que je souhaite obtenir.

22 OPENEYE N°30 - Février/Mars 2023


OPENEYE
Le regard d’aujourd’hui sur la photographie

OPENEYE : Quels sont les programmes d’IA actuellement disponibles sur Internet et lesquels utilisez-vous ?

David RAICHMAN : Il y en a énormément et beaucoup s’appuient sur Stable Dissusion qui est open source.
Pour ma part c’est Stable Diffusion que j’utilise majoritairement car il permet de créer ses propres modèles
d’apprentissage, j’utilise parfois Midjourney pour son rendu qualitatif ou ponctuellement Dall.E pour ses
fonctionnalités d’édition d’image. J’utilise également des AI de reconstruction d’image pour améliorer les rendus
des visages, des détails et aussi pour agrandir les images.

OPENEYE : Que pensez-vous des problèmes éthiques que l’AI va générer dans les arts graphiques ? Déjà certaines
banques d’images portent plainte contre les distributeurs de programmes AI.

David RAICHMAN : Oui, c’est un sujet complexe et il y a au moins trois dimensions à prendre en compte :
technique, juridique et éthique.

Techniquement : les images qui ont servi à entrainer les AI génératives type Midjourney, Dall.E ou Stable
Diffusion sont des images issues de la base de données nommée LAION 2B (env. 2 milliards d’images) qui était
utilisée pour la recherche scientifique en AI. Cette base est composée de toutes sortes s’images, incluant des
images de banques et aussi d’images « copyrightées » d’artistes.

Juridiquement : cela pose un problème car les images avec copyright ont été « utilisées » sans le consentement
des artistes ou des banques d’images, qui plus est pour créer un modèle de rémunération qui revient exclusivement
aux éditeurs de logiciel des AI génératives. Mais la question de l ‘ « utilisation » en tant que telle de ces images
est la zone de flou [c’est la Rédaction qui souligne]. En effet, les images servant à l’entrainement de ces AI ne sont
pas utilisées strictement parlant, c’est-à-dire que pas un seul de leur pixel n’est vraiment repris. Ces AI explorent
des espaces vastes d’images possibles au carrefour d’autres références qui se mélangent et ne permettent pas de
recréer l’œuvre originale d’un artiste dont l’image aurait été entraînée dans la base de départ. C’est précisément
ce qui crée ce flou juridique actuel. Pour l’outrepasser, les éditeurs des logiciels d’AI génératives ont créé des
licences d’utilisation pour les images produites via leurs solutions mais non soumises à des copyrights. Alors si
on ne peut pas reproduire exactement une image d’un artiste, on peut en revanche, vous l’aurez compris, s’en
rapprocher, et donc utiliser son style.

Pour éviter ces problèmes litigieux, une approche serait par exemple de demander aux artistes et aux banques
d’images d’être ou de ne pas être dans les bases de données qui entrainent les AI. Par exemple, Shutterstock
a contracté, après coup, un partenariat avec Dall.E alors que Getty continue de s’opposer au courant de l’AI
générative. Concernant les créateurs et artistes indépendants, on pourrait envisager la possibilité de monétiser
leurs propres bases d’entrainement et de créer des licences d’utilisation encadrant l’usage des images générées.

Février/Mars 2023 - N° 30 OPENEYE 23


OPENEYE
Le regard d’aujourd’hui sur la photographie

Ethiquement : Il se pose tout d’abord la question de l’influence d’un style d’un artiste sur une image produite
via les AI génératives : est-ce du plagiat ou une manière de recréer le processus d’intuition et d’inspiration ?
Souvent les styles sont mélangés par celui qui écrit ses prompts en renseignant plusieurs références, si bien que
la création finale n’a pas de lien apparent avec les styles mentionnés (mélanger Vermeer avec Cartier-Bresson
et Terry Guilliam peut donner des choses étonnantes). Le cas le plus problématique est l’usage d’un style unique
avec une volonté de plagier un artiste sans droits (qui n’est pas dans le domaine public). C’est ce qui est arrivé à
l’artiste Greg Rutkowski et à la plateforme créative Artstation.com qui ont été massivement référencés dans les
prompts des premiers utilisateurs des AI génératives. Il n’est pas étonnant alors que la révolte anti-AI soit née de
cette plateforme en décembre 2022.

Une autre question morale se pose. Les AI génératives sont capables de créer en quelques seconde plusieurs
images : 4, voire 8, voire plus. Ce processus d’exploration itératif conduit certains à penser qu’il est au fond plus
rentable de travailler de cette manière qu’avec un illustrateur, un photographe… dont le coût jour/homme devient
prohibitif face au coût seconde/machine. La presse, les maisons d’éditions considèrent d’ores et déjà pouvoir
remplacer les artistes par les AI génératives.

Je pense qu’il est fondamentalement difficile de créer avec les AI génératives des images intéressantes sans un
vrai savoir-faire artistique. En revanche, pour des usages d’appoint cela peut être une véritable alternative aux
banques d’images, surtout si on cherche quelque chose de très précis. Quoiqu’il advienne, en business l’éthique a
peu de place mais l’esthétique et le public en ont une, c’est ici qu’il y a un rôle à jouer pour les créateurs et artistes
qui devraient s’approprier les AI génératives grâce à leur savoir-faire et surtout leur culture de l’image.
Mais beaucoup de métiers et de modèles économiques vont devoir se réinventer.

OPENEYE : Une dernière question. Comment voyez-vous l’avenir de ces nouvelles technologies ?

David RAICHMAN : Quelle que soit l’issue des débats juridiques concernant les bases de données, les AI génératives
sont là et on ne fera pas machine arrière, telle l’apparition de l’imprimerie, l’émergence de l’industrialisation,
Internet… c’est une révolution pas que technologique, c’est une révolution économique, artistique, culturelle qui est
en cours. Il est urgent pour les artistes de s’accaparer les AI génératives et d’en faire quelque chose d’intéressant.
On reproche souvent à ceux qui utilisent les AI génératives « qu’il n’y a pas de travail car quelques mots suffisent
à faire une image ou que ce ne sont pas eux qui le font mais l’AI ». Détrompons-nous, tout d’abord ce n’est pas
la « fabrication » de l’image qui est la nouvelle donne dans ce contexte, mais l’intention, les émotions que l’on
peut véhiculer, le regard sur le monde que l'on peut exprimer grâce à ce nouveau moyen. Ensuite, on s’aperçoit
qu’il y a un enjeu à maitriser profondément l’AI pour l’asservir et en faire un outil. L’intervention humaine doit être
présente en amont, pendant et en aval pour guider avec précision l’AI afin de créer ce que l’on veut vraiment !
En bref, redonner au créateur toute sa place.

24 OPENEYE N°30 - Février/Mars 2023


OPENEYE
Le regard d’aujourd’hui sur la photographie

Je suis persuadé, qu’avec les AI génératives, une nouvelle forme artistique à part entière verra le jour. Elle permet
d’exprimer des émotions, un regard sur le monde, d’avoir sa propre esthétique, et derrière il y a un tout un savoir-
faire nouveau qui est en train de naître et qui est différent de tous les arts existants. Les AI génératives rendent
plus démocratique l’art et de nouveaux artistes vont émerger avec ce savoir-faire unique.

Rappelons-nous qu’un peintre n’est pas forcément un bon photographe, un bon photographe n’est pas forcément
un bon réalisateur de cinéma, et un AI artiste à ce titre, pourrait ne maîtriser aucun des arts existants ! Mais si un
propos, une intention est là, qu’une esthétique se dégage, et que cela touche un public, toutes les conditions sont
remplies pour qu’il s’agisse bien d’une démarche artistique à part entière.

OPENEYE : Nous vous remercions pour vos réponses.

Février/Mars 2023 - N° 30 OPENEYE 25


OPENEYE
Le regard d’aujourd’hui sur la photographie

Everything you wanted to know about


Artificial Intelligencegence

With the advent of Artificial Intelligence (AI) we are on the verge of a major revolution. This applies to many fields but
arguably most particularly the arts. Indeed, AI is in the process of overturning all our preconceived ideas and certainties –
maybe for our own good but perhaps also, as some may fear, for the contrary.

David RAICHMAN, you are one of the first artists to embrace AI, with admirable talent, in the domain of photography, and
more specifically street photography. We would like to ask you a few questions:

OPENEYE : How did you first come to use AI in your creative work? Was it related to your profession in advertising
as a creative director with Ogilvy?

David RAICHMAN : Yes, advertising design has always been interested in new ways of expression and communication.
My involvement with AI goes back to a little over five years ago, when the first applications started to appear: image editing,
deepfake, face swap etc. … It was a natural progression, therefore, for generative AI to gradually become an integral part
of both my professional and personal work.

OPENEYE : For this new field you have had to master new tools, not only software programmes, for example, but
also the distinct vocabulary. Could you briefly explain to us how it all works and what the terms ‘prompt’, ‘blend’
or even ‘seed’ mean?

David RAICHMAN : Gosh! OK, I'll give it a go – even if I’m afraid I’m going to have to resort to some quite radical
oversimplification to try and explain in layman’s terms what generative AIs are ... Broadly speaking, these AIs are based on
so-called ‘diffusion technology’. The aim is to make an AI learn (from assessing a learning base of billions of images) how to
construct a new image from a ‘noisy’ image (a bit like the ‘snow’ interference we used to see on old cathode ray TVs). The
training process is progressively pushed with more and more noise until it attains absolute noise, i.e. a mass of red-green-
blue pixels. To simplify, a generative AI is able to create any image from these clusters of pixels. The generation of an image
from the clusters, together with all the other various parameters, is called a ‘seed’. And, it is easy to understand that the
same seed will always give the same kind of generated images. In the process of training AIs, there are many statistics on
the images that will be inferred by the AI. For example, a human face corresponds to visual statistics, as does a man in the
street. Statistics make it possible to frame the extent to which the image remains recognisable. If I start to make variations
to a human face, to what measure will it still be recognisable? This process of statistical framing by AIs makes it possible
to explore all the potential variations (of which, without exaggeration, there are billions and billions) around an image as
well as the context generally associated with it. This is where it starts to become truly unbelievable! If you wish to explore,
for example, all the various variations around the Mona Lisa (shapes, colours, concepts ...), the possibilities are virtually
endless, but it will always remain recognisable because it is statistically framed.

26 OPENEYE N°30 - Février/Mars 2023


OPENEYE
Le regard d’aujourd’hui sur la photographie

Right, are you still following? Because this is not the end of the story. Indeed, there is one more thing to understand. All
these images potentially exist ‘live’ in statistically framed spaces, but to access them you have to guide the AI. The easiest
way to achieve this is to use natural language. Here again, AIs learn from billions of images to create a statistically probable
correlation between an image and the desired concept. They do this using keywords and phrases. This is how you can
instruct the AI regarding how you want to generate your image. These phrases are called ‘prompts’, and can be as simple
as ‘a cat playing the piano’ or as elaborate as ‘a frightened man on a foggy street in Paris photographed with a Leica
camera, equipped with a 35mm lens, focal length 1.4, shutter speed 0.5 sec, rendered in black and white on Fuji Acros 3200
ISO film’. All these specifications will help guide the AI in its search for potential images that statistically meet all the above
criteria. And, as the possibilities are mathematically vast - comprising, as I explained earlier, billions of permutations - we
have to select, either deliberately or randomly, a generation path (seed) to make some of these images tangible.

Another possibility is to guide the AI by reference to a single image, in which case it will explore the possibilities suggested
by the image concerned and the concepts inherent in it. Yet another is to give it an image together with a prompt - or no
prompt but several images, a feature - known as a ‘blend’ - which was recently introduced by the Midjourney software.
Despite all this complexity, only a few tens of seconds will pass between the AI guidance and the generation of an image!
Hopefully, I have managed to give you a broad introduction to the fundamentals of Stable Diffusion, Dall.E or Midjourney,
but also how crucial the images that serve as a learning base are to exploring the potential of the new technology

OPENEYE : Looking at some of the latest artists using AI on Instagram, I noticed that ‘their works’ display a very
strong kinship. This is probably normal, since they all use the same programmes. But your images, which we will
discover in the next section, seem very different. You told me that you use your own photos as a base. How does
this work?

David RAICHMAN : As I just emphasised, the learning base of generative AI has a major impact on the types of images
you can create with it. So, I built up my own learning bases using some of the many thousands of photos I have personally
taken over the last ten years or so – notably of Paris and its Metro, which I have become rather obsessed with as a subject.
I then added some relatively elaborate prompts, including stressing or ‘weighting’ the importance of some keywords in
relation to others in order to achieve more control over the final result. Last but not least, I systematically used one of my
own photographs as a single image reference to guide the AI even more precisely in terms of the composition of the final
image I envision.

Février/Mars 2023 - N° 30 OPENEYE 27


OPENEYE
Le regard d’aujourd’hui sur la photographie

OPENEYE : What AI programmes are currently available on the Internet and which ones do you use?

David RAICHMAN : YThere are a whole lot of them, many based on Stable Diffusion, which is open source. For my part,
I tend mainly to use Stable Diffusion precisely because it enables me to create my own learning bases. Sometimes, I’ll use
Midjourney for its qualitative rendering or, occasionally, Dall.E for its image editing features. I also use image reconstruction
AIs to improve the rendering of faces and other details as well as to enhance enlargements.

OPENEYE : What are your views regarding the ethical issues that AI is likely to generate in the field of graphic arts?
Already, I understand that some image banks are suing the distributors of AI programmes.

David RAICHMAN : Yes, it's a complex subject and there are at least three dimensions to take into consideration: technical,
legal and ethical.

Technically : the images used to train generative AIs such as Midjourney, Dall.E or Stable Diffusion are derived from the
LAION 2B database (about two billion images) that was used for scientific research into AI. This database comprises all
kinds of images, including not only image bank libraries but also ‘copyrighted’ artistic works.

Legally : it follows that the legal dimension has become problematic because copyrighted images have been 'used' without
the consent of the relevant artists or image banks. Moreover, they have been used as the basis for a remuneration model
that accrues exclusively to the generative AI software companies! This being said, a legal definition as to 'use' of such
images constitutes a major grey area [emphasis added]. Indeed, the images that serve to train the AIs are never actually
‘used’ in the usual sense of the word. Indeed, not a single pixel emanating from them is reproduced. Rather, the AIs sift
through vast reservoirs of potential images that are assessed by reference to a host of other data inputs. Everything is
mixed together in a manner that excludes the exact re-creation of an original artistic work. But then there is, of course, as
you’ve probably already anticipated, the problem of users who, whilst they don’t plagiarise a specific work, could certainly
be accused of mimicking the distinctive style of the artist concerned. Here lie some of the causes of the current legal
uncertainty. In an effort to resolve the situation, the publishers of generative AI software have introduced user licences for
images generated by their systems.

To avoid such contentious issues in the future, one approach might be to invite the artists and image banks concerned to
elect whether or not they wish to be included in the databases that drive the AIs. For instance, Shutterstock has retroactively
partnered with Dall.E. Getty, on the other hand, continues to oppose the generative AI trend. For independent creators and
artists, one might envisage the possibility of them monetising their specific training bases and creating their own licences to
control the use of the images generated.

28 OPENEYE N°30 - Février/Mars 2023


OPENEYE
Le regard d’aujourd’hui sur la photographie

To avoid such contentious issues in the future, one approach might be to invite the artists and image banks concerned to
elect whether or not they wish to be included in the databases that drive the AIs. For instance, Shutterstock has retroactively
partnered with Dall.E. Getty, on the other hand, continues to oppose the generative AI trend. For independent creators and
artists, one might envisage the possibility of them monetising their specific training bases and creating their own licences to
control the use of the images generated.

Ethically : First of all, there is the question, alluded to above, of the influence of a given artist's style on images produced via
generative AI. Does this constitute plagiarism, or is it simply a means of re-creating a process of intuition and inspiration?
Often, the writer of prompts will deliberately seek to mix together several contrasting styles – so much so that the final
creation may bear little relation to any of them in particular (mixing Vermeer with Cartier-Bresson and Terry Gilliam might
produce some awesome and highly original results, for example). The most problematic situation is when the user adopts a
distinctive style with the intention of plagiarising an artist (whose work is not in the public domain, of course) without paying
any rights. This is what happened in the case of the artist Greg Rutkowski, and the creative platform Artstation.com, who
were massively referenced in the prompts of early adopters of generative AI – so much so that, hardly surprisingly, the
situation precipitated the anti-IA revolt born out of the aforementioned platform in December 2022.

Another moral or social question arises in that generative AIs are capable of churning out several images – four or even
eight or more - in a matter of a few seconds. This iterative exploration capacity leads some business people to start thinking
that it may actually be more profitable to adopt the technology rather than work in the traditional manner with an illustrator
and/or photographer, whose daily rates soon become prohibitive compared to the machine cost per second. Already, some
press and publishing houses are considering replacing artists with generative AI tools.

Personally, I think it is fundamentally difficult to create interesting images with generative AI without the benefit of genuine
artistic input and know-how. For back-up purposes, however, it can be a truly viable alternative to image banks, especially
if you are looking for something very specific. In any event, while ethics don’t tend to carry much weight in the world of
business, the same cannot be said for aesthetics and their appeal on the public. It is in this sphere that creators and artists
are likely to continue to play a crucial role – especially those that are able to mobilise AI and harness it to their know-how
and inherent image culture. This is bound to mean that many professionals and economic models will need to reinvent
themselves.

Février/Mars 2023 - N° 30 OPENEYE 29


OPENEYE
Le regard d’aujourd’hui sur la photographie

OPENEYE : One last question. How do you see the future of these new technologies?

David RAICHMAN : Whatever the outcome of the ongoing legal debates concerning databases, generative AI is here to
stay and there is no turning back. The evolution is on a par with the invention of printing, the emergence of industrialisation
and the birth of the Internet ... it's not merely a technological upheaval that we are undergoing, but rather an economic,
artistic and cultural revolution. It is imperative for artists to grasp generative AI and make something interesting out of it.
Those who use generative AI are often accused of ‘not doing any work because a few words are enough to make an image’
or that ‘it's not them who are creating but the AI’. Let's be clear, first of all it is not the ‘making’ of the image that is the big
deal in this context, but rather the concept and the emotions that can be conveyed - the vision of the world that can be
expressed through the new medium. Then, we become aware of the challenge that lies in mastering AI - to tame it and
make it a tool working with and not against us to create exactly what we desire! This requires human intervention not only
during the process itself but also upstream and downstream in order to guide the AI with rigorous precision. ! In short, the
creator must be given and assume his or her rightful role.

I am convinced that with generative AI, a new art form is emerging in its own right – one that allows you to express your
emotions, your vision of the world and to develop your own distinctive aesthetic. Underpinning it is a whole new reservoir
of know-how that is radically different from that which applies to all the traditional arts. Generative AIs make art more
democratic and more and more artists will emerge vested with this new know-how.

Just as a painter may not necessarily be a good photographer, and a good photographer may not necessarily be a good film
director, so an AI artist may not master any of the existing arts! But, as long as there is an aim, a vision and an aesthetic,
and as long as he or she touches an audience, then all the conditions are met for a valid and fully-fledged artistic process.

OPENEYE : Thank you for your answers.

30 OPENEYE N°30 - Février/Mars 2023


Focus OPENEYE
Le regard d’aujourd’hui sur la photographie
par Philippe LITZLER

David RAICHMAN
The Parisian Metro Life
La street photography est apparue au fondement même de la photographie explorant les villes, les populations; elle
capture l'empreinte d'une époque. Street photographer passionné, j'ai voyagé ces dernières années pour scruter
les rues, la foule, les gens, leurs regards candides, trouver la relation entre l'environnement et les personnes, la
composition et son flux. J'ai recherché le surprenant, l'incroyable, ce qui capture l'essence d'une ville et d'une
culture. En découvrant les Intelligences Artificielles génératives, j'ai compris qu'il fallait les combiner avec mon
expérience de photographe de rue. J'ai compris qu'il est possible dorénavant de « photographier mentalement » des
lieux fantasmés, des émotions rêvées, tout en respectant les mêmes codes et les mêmes techniques que la street
photography traditionnelle. C'est cette approche que je prône dans mes créations. Créations qui me permettent
d'exprimer des choses que je ne pouvais exprimer jusqu'alors.

Ma série « The Parisian Metro Life » s’inscrit dans cette verve. J’ai toujours détesté et adoré le métro, cette
condensation d’êtres humains dans un espace exiguë est à la fois insoutenable et source d’étrangeté visuelle.

Tant de regards, de vies, de portraits possibles éclairés sous les néons. Le métro est insensible au jour, à la nuit, à
la météo. Il est un aspirateur de quotidien immuable. J’ai voulu grâce à l’intelligence artificielle combinée à certaines
de mes photographies de métro, explorer le sentiment d'exiguïté et d’uniformisation de cet espace immuable en y
introduisant des éléments qui dérangent ou qui n’ont pas leur place.

David RAICHMAN est directeur de création, publicitaire à l'agence Ogilvy. Il a travaillé pour Louis Vuitton, Coca-
Cola, IBM, IKEA et a obtenu de nombreux prix internationaux.

Février/Mars 2023 - N° 30 OPENEYE 33


David RAICHMAN
The Parisian Metro Life
Street photography has become a fundamental discipline of photography, immortalising cities and people as well
as, generally, perpetuating the imprint of an era. As an avid street photographer, I have devoted a lot of time over
the past few years to scanning the streets, the crowds and the various characters in an effort to capture candid
moments and explore the relationships between composition and flow, as well as people and their environment.
I have sought out the surprising, the incredible and those elements that characterise the essence of a city and
a culture. When I discovered generative Artificial Intelligence technologies, I immediately saw the potential for
combining them with my experience as a street photographer. Suddenly, it was possible to ‘mentally photograph’
scenes and emotions that were the stuff of pure fantasy. The approach I chose was to apply this revelation in
accordance with the codes and techniques of traditional street photography. As a result, I am now able to convey
things I could not express previously.

My series devoted to Parisian Metro Life is precisely in this vein. I have always variously hated and adored the
metro. Indeed, the concentration of human beings in a cramped space that it represents can be both unbearable
and visually stimulating. So many glances, so many transient lives, so many potential portraits lit by the glare of
neon lights. The metro is oblivious to day, night or changing weather as it relentlessly sucks up its daily quota of
human life. I wanted to combine artificial intelligence with some of my photographs so as to accentuate the sense
of confinement and monotony generally associated with the metro by introducing elements that are disturbing or
which somehow don't belong.

David Raichman is an Executive Creative Director at Ogilvy, Paris. He has worked across the agency’s iconic global
brands, including Louis Vuitton, Coca-Cola, IBM and IKEA and is the recipient of numerous international awards.
© Copyright Frédéric Lonjon / JDC
Initiative artistique OPENEYE
Le regard d’aujourd’hui sur la photographie

par Philippe LITZLER

Dmytro BAEV
L’art malgré la guerre !

Je m’appelle Dmytro BAEV et suis originaire d'Odessa en Ukraine. Je me suis lancé dans la photographie en 2013.

Ma passion pour la peinture hollandaise et l'impressionnisme me pousse toujours à utiliser un éclairage clair-obscur que
les artistes utilisaient alors. Les tons clairs, les couleurs et les nuances permettent d'obtenir une transition plus douce
de la lumière dans les ombres. Je ressens la photographie comme une sorte de sentiment et non comme une technique.
L'essence est la substance émotionnelle plutôt que la couleur, la composition ou la forme. La technique sert juste à renforcer
l’émotion.

J'aime créer des photographies d'art en utilisant mes effets « picturaux ». Mes photos prennent tout leur sens, imprimées sur du
papier d'art au format supérieur à 30 cm.

Art to help conquer war!


“My name is Dmitry Baev and I’m from Odessa, Ukraine. I got started in photography in 2013.

My passion for Dutch painting and Impressionism always pushes me to use the principles of achieving the chiaroscuro lighting
that the artists used. Light tones, colours and shades enable me to achieve a smoother transition from light to shadow in a
photo. As for me, photography is a kind of feeling, not a technique. The essence is the emotional substance rather than colour,
composition or form. Technical means may only enhance the emotional response.

I like creating fine-art photography via use of my own ‘painterly

Février/Mars 2023 - N° 30 OPENEYE 47


Architecture OPENEYE
Le regard d’aujourd’hui sur la photographie

par André JACQUART

Jacques GARNIER
Les hymnes aux silences
Grâce dans l'isolement. C'est le thème central des Hymnes au silence de Jacques GARNIER. L’idée est de
créer de un espace autour de l’objet (éléments architecturaux isolés) afin qu'il puisse respirer et être apprécié
pour ce qu'il est, sans aucune distraction. Ces photographies en noir et blanc, minimales et abstraites sont entre
reportage et création. "J'essaie de créer le poème à partir des preuves", a déclaré le dramaturge Arthur Miller.
Les photographies de GARNIER capturent des bâtiments modernes avec détail et fidélité, mais sont en même
temps des fictions poétiques personnelles. L’artiste a décidé que l'art ne devait pas livrer un rapport sur la réalité
mais plutôt un regard sur ce qui se cache derrière elle. Il cherche à transcender le sujet, essentiellement à rendre
le sujet non pertinent. Ce sont des œuvres épurées, des images qui suppriment le superflu et obligent ainsi le
spectateur à regarder vers l'intérieur. L'espace négatif de ces images déconstruites est une pause entre des
notes de musique, une interruption pour que chacun crée sa propre interprétation et profite du silence.
C'est une quête émotionnelle, un cheminement spirituel. Peut-être Lau Tzu l'a-t-il mieux dit il y a environ 2 700
ans : "Soyez immobile. L'immobilité révèle les secrets de l'éternité."

Artist statement on hymns to the silence


Grace in isolation. This is the central theme of Jacques Garnier’s Hymns to the Silence. The motivating factor is to create space
around an object (isolated architectural elements) so it can breathe and be appreciated for what it is, without any distractions.
These minimal, abstracted, B&W photographs dwell in the zone between report and fabrication. "I try to create the poem from the
evidence," said playwright Arthur Miller.

“Garnier's photographs capture modernist buildings with detail and fidelity, but at the same moment are crafted, poetic fictions.
… [The artist] has increasingly decided that art should not deliver a report on reality but instead look at what is behind reality. [He]
seeks to transcend the subject, essentially making subject matter irrelevant. These are reductive works, images that remove the
superfluous and in so doing force the viewer to look inward. …

The negative space of these deconstructed images is the pause between the notes of the music, a disruption, to make you create
your own interpretation and to enjoy the silence. … Perhaps Lau Tzu said it best some 2,700 years ago: ‘Be still. Stillness reveals
the secrets of eternity’." – Arthur Miller

Février/Mars 2023 - N° 30 OPENEYE 61


© Ann Ellis
Le monde de la photo OPENEYE
Le regard d’aujourd’hui sur la photographie

par Philippe LITZLER

Nicolas SAINT-PIERRE
Les pêcheurs sur glace de l’île Pétrie

Situé sur le territoire traditionnel de la nation algonquine Anichinabé à 20 kilomètres au nord-est d’Ottawa, au
Canada, le petit archipel des îles Pétrie et les eaux qui l’entourent ont été fréquentés par les peuples autochtones,
qui l’utilisaient comme territoire de chasse et de pêche, depuis des temps immémoriaux.

De nos jours, l’archipel est un site de pêche prisé des résidents de la région de la capitale nationale du Canada
qui, chaque année en décembre, plantent leurs tentes et érigent leurs cabanes sur la rivière des Outaouais dans
l’espoir d’y pêcher quelques-uns des crapets, perches, brochets et dorés dont regorgent ses eaux.

En raison de son coût abordable et des restrictions imposées sur les activités intérieures en temps de pandémie,
la pêche sur glace n’a cessé de croître en popularité au cours des dernières années. Jadis surtout pratiquée par
des hommes de race blanche dans la fleur de l’âge, cette activité typiquement canadienne attire désormais un
éventail beaucoup plus large d’amateurs, dont des jeunes, des femmes, des familles et des immigrés.

Dans ce reportage photo, réalisé en 2021/2022, le photographe canadien Nicolas SAINT-PIERRE tourne son
objectif vers ceux qui, ayant fait de la pêche blanche leur passe-temps hivernal, se rendent chaque année en plus
grand nombre à l’île Petrie pour y trouver un esprit de communauté ainsi qu’un grand bol d’air frais, de liberté et
de camaraderie. Bienvenue dans leur « village » !

Février/Mars 2023 - N° 30 OPENEYE 73


OPENEYE
Le regard d’aujourd’hui sur la photographie

Nicolas SAINT-PIERRE
The Ice Fisher men of Petrie Island

Located on the traditional territory of the Algonquin Anishinaabe Nation, 20 kilometres northeast of Ottawa, Canada, the Petrie
Islands archipelago and its surrounding waters have been traditionally used by native Americans who have hunted and fished
there since ancient times.

Nowadays, the archipelago is a popular fishing spot for the residents of Canada’s National Capital Region who, each year in
December, set up their tents and ice huts on the Ottawa River in the hope of catching some of the crappies, perches, pikes and
walleyes that teem in the waters beneath.

Benefitting from its affordability, as well as the restrictions imposed on indoor activities as a result of the COVID-19 pandemic,
ice fishing has steadily gained popularity in recent years. Once mostly practiced by white middle-aged men, this quintessentially
Canadian winter activity is now attracting a wider range of enthusiasts, including youths and new immigrants.

In this photographic essay, shot during the period 2021-22, the Canadian photographer, Nicolas SAINT-PIERRE focuses his
lens on those who, having made ice fishing their winter pastime, come to Petrie Island year after year to find a sense of commu-
nity - as well as a breath of fresh air, freedom and camaraderie on the ice. Welcome to their “village”!

74 OPENEYE N°30 - Février/Mars 2023


L'invité OPENEYE
Le regard d’aujourd’hui sur la photographie

par Philippe LITZLER

John FORD
L’art du diptyque
J'ai commencé à travailler sur des séries de diptyques suite à des voyages en Sicile et à l'Ile Maurice, où j'ai eu
la possibilité d'effectuer des prises de vues aériennes. Les possibilités de la photographie aérienne m'ont toujours
fasciné : le changement de perspective nous permet d'appréhender autrement la ville, la nature. Une voiture
devient un jouet, un mur devient un trait, une ligne. Une dune devient un pli dans un pull, un rond-point une montre.

Après une première série personnelle, j'ai enchaîné avec une deuxième pour Süddeutsche Zeitung Magazine, puis
des commandes pour Missoni, Pepe Jeans, Lacoste, Boss, Manor…
Si le principe reste identique d'une série à une autre, la façon de l'explorer change, et chaque série présente des
défis différents. Pour Lacoste j'ai travaillé au sol autant qu'en l'air, et les vues sont plus abstraites. Pour Pepe
Jeans, je me suis concentré sur la ville de Londres qui apparaît de façon reconnaissable dans chaque diptyque.

The art of the diptych


John FORD began working on this series of diptychs after undertaking advertising jobs in Sicily and Mauritius,
where he was given an opportunity to shoot from the air. The possibilities of aerial photography had always
fascinated him, particularly the manner in which the change of perspective could radically modify one’s perception
of urban landscapes and nature. From the sky, a car looks like a toy, a wall becomes a mere line, a sand dune a
fold in a piece of clothing, and a roundabout a watch.

He first pursued the idea as a personal project, but then followed it up in the context of professional commissions
for, firstly, Süddeutsche Zeitung Magazine and then Missoni, Pepe Jeans, Lacoste, Boss and Manor etc..

Whilst the overall approach and vision remains common, John Ford develops each commission differently and in
accordance with the specific challenges raised. For Lacoste, for example, he worked from the ground as well as
from the air, and the images are more abstract, while, for Pepe Jeans, he focused on the city of London, which is
clearly recognisable in each diptych.

Février/Mars 2023 - N° 30 OPENEYE 85


Photo : Ann Ellis

Georges Rousse à Lisbonne/ In Lisbon 2018


Portfolio OPENEYE
Le regard d’aujourd’hui sur la photographie
Philippe LITZLER

Georges ROUSSE
Le maître du trompe-l’œil
Inspiré par des photographes tels qu’Edward Steichen, Alfred Stieglitz ou Ansel Adams, Georges ROUSSE se
lance à fond dans la photographie après des études en médecine.

La découverte du "Land Art", ainsi que le choc provoqué par la découverte du Carré Noir sur fond blanc de Kasimir
Malevitch, le décident à s’investir dans le domaine de l’espace, mêlant art pictural et photographie.

Très vite, par l’intermédiaire de la chambre photographique, il va utiliser la technique de l’anamorphose, qui permet
de dessiner dans l’espace tridimensionnel.

Le mot est lâché. Pour comprendre les images magistrales de Georges ROUSSE, disons que son travail consiste
à peindre d'une façon déformée et calculée - avec une précision mathématique - une image dans un environnement
tridimensionnel qui, sur une photographie en 2 dimensions, produira un effet recherché mais visible uniquement à
un seul endroit précis. Que l’on se déplace d’à peine 1 mètre, et déjà toute l’illusion d’optique s'évanouit.
On ne peut se rendre compte effectivement de la prouesse artistique qu’en contemplant la même œuvre sous 2
points de vue différents.

Février/Mars 2023 - N° 30 OPENEYE 99


Bercy 1984
The master of trompe-l’œil

Inspired by photographers such as Edward Steichen, Alfred Stieglitz and Ansel Adams, Georges Rousse
began to devote himself to photography immediately after he completed his studies in medicine.

The discovery of the 'Land Art' movement as well as the impact of seeing Black Square, the painting by Kazimir
Malevich, led him to explore the concept of space, mixing pictorial art and photography.

He was quick to adopt the 'trompe-l'œil' approach (literally ‘deceive the eye’ in French), which has long been
popular among artists, notably during the 17th century, - and which is often based on the perspective technique
known as anamorphosis.

Georges ROUSSE'S masterful images involve painting, with the help of a view camera (see details in interview),
an image in a three-dimensional environment which, when observed from a precise viewpoint, and reproduced in
two dimensions by means of a photograph, will reveal the desired effect. This obviously involves calculating and
preparing the initial 3D painted image with mathematical precision to produce an optical illusion that will manifest
itself when viewed from a pre-defined angle. If the spectator moves just one metre to the side, the illusion will be
lost. Indeed, it is only possible to truly appreciate the artistic prowess involved by contemplating the same work
from two different points of view.
.
Santiago 2013

Sur ces trois images on comprend mieux le principe tri-dimensionnel de l’œuvre où l’étoile n’est visible qu’à un point donné.

Viewing these three images gives us a better idea of the three-dimensional principle behind the work. The star is only visible
from a certain angle.
Casablanca 2003
Matsushima
Alex 1999
Montréal 1997
Coblence 1994
Arles 2006
Rome 1986
Bercy 1985
© Photo Philippe Litzler
l'interview OPENEYE
Le regard d’aujourd’hui sur la photographie
Philippe LITZLER

Questions à Georges ROUSSE

OPENEYE : Georges ROUSSE, quand avez-vous eu l’intuition que ces « illusions d’optique » allaient devenir votre
occupation principale et pourquoi ?

Georges ROUSSE : Je ne me suis jamais préoccupé de l’illusion, puisque mon projet à toujours été de mémoriser
des lieux abandonnés sous une autre forme que le simple constat photographique. Je rappelle que l’œuvre finale
est toujours la photographie. Mais parfois, je réalise des installations publiques dans un but didactique afin de
combattre l’idée d’une manipulation informatique.

OPENEYE : Combien de temps prend la réalisation d’une telle fresque, du concept au dernier clic photo ?

Georges ROUSSE : Tout dépend de l’installation et de sa mise en œuvre dans un espace complexe ou non… Il
faut entre 4 et 15 jours suivant la complexité du lieu.

OPENEYE : Question technique - car on a du mal à comprendre comment vous pratiquez - vous m’avez dit que
vous travaillez souvent à la chambre et que vous reproduisez sur le film les traits que vous peignez sur un mur ?
Ai-je bien compris ?

Georges ROUSSE : J’aimerais parler d’abord des lieux abandonnés qui ont toujours été ma passion, leur
découverte en faisant un repérage puis, le plus important, à partir de ces images, la recherche de la forme, de
la couleur en dessinant ces espaces et en imaginant différentes propositions qui me viennent à l’esprit, jusqu’à
aboutir à un projet. Ensuite vient la réalisation.

Une chambre photographique est un appareil grand format, au moins 4 ‘’x 5 ‘’ (10cm x 12,5cm) constitué d’un
objectif fixé sur une chambre noire et d’un dos en verre dépoli. Lorsqu’on regarde sous le voile noir, à travers le
dépoli, on voit l’espace réel inversé, le haut est en bas, et la droite à gauche. Sur le dépoli je dessine ma forme que
je reporte dans l’espace point par point par des allers-retours ; puis j’organise les différentes couleurs.

L’œuvre terminée dans l’espace, j’introduis dans ma chambre le châssis contenant le film négatif ou positif pour
mémoriser l’action. Le point de vue de l’appareil photographique se confond avec celui de l’anamorphose.

Février/Mars 2023 - N° 30 OPENEYE 115


© Photo Philippe Litzler
OPENEYE
Le regard d’aujourd’hui sur la photographie

OPENEYE : Vous réalisez souvent des œuvres éphémères dans des lieux abandonnés. Ne pensez-vous pas que
l’espace urbain public gagnerait à s’embellir de vos œuvres (comme l’ancien Yacht Club de Deauville) ?

Georges ROUSSE : Deauville est un passage récent pour moi, j’ai pu agir y sur l’espace public de façon éphémère,
alors que j’ai beaucoup travaillé dans les espaces intérieurs par goût de la solitude, celle de l’artiste dans son
atelier. Mes actions sont aléatoires, au gré des propositions.

OPENEYE : Votre travail conceptuel est reconnu dans le monde entier, des États-Unis au Japon, de la Corée du
Sud au Québec ou en Amérique latine. Ne croyez-vous pas qu’il est temps que l’État français, ou une collectivité
importante, réalise un musée central pour y préserver vos œuvres, ces dernières se trouvant « éparpillées » dans
de nombreuses collections privées et départementales ?

Georges ROUSSE : Je vous remercie de cette proposition, mais j’ai déjà du mal à obtenir les autorisations pour
intervenir dans certains lieux [NDLR : incroyable !].

OPENEYE : Quels sont vos prochains projets ?

Georges ROUSSE : Comme les propositions qui me sont faites sont longues à mettre en place, je ne peux pas
encore évoquer mes projets futurs

OPENEYE vous remercie pour vos réponses

Février/Mars 2023 - N° 30 OPENEYE 117


OPENEYE
Le regard d’aujourd’hui sur la photographie

Questions to Georges ROUSSE


OPENEYE : Georges ROUSSE, when did you first begin to realise that these ‘optical illusions’ might become your
main project pre-occupation, and why?

Georges ROUSSE : In fact, I have never been overly pre-occupied by the illusion aspect as my main intent has
always been to commemorate abandoned places in a form other than a mere photographic record. As I have
emphasised before, the final artistic end is always the photograph, but sometimes I will first make installations.
Essentially, these are intended to have an educational purpose vis-à-vis the public and, notably, to counter the
assumption of computer manipulation.

OPENEYE : How long does it take to create such installations, from the initial concept to the final click of the
camera?

Georges ROUSSE : TIt all depends on the installation and the limitations or otherwise of the space in which it is
to be constructed. Generally, I would foresee between 4 and 15 days, depending on the difficulty of the location.

OPENEYE : A more technical question, because it's not easy to understand precisely how you work. You told
me that you often use a view camera, and that you reproduce on the film the lines that you paint on a wall? Did I
understand this correctly?

Georges ROUSSE : I'd like to preface my answer by reverting to the passion for abandoned places that I mentioned
earlier. I scout around for suitable locations and then, most importantly, begin to explore their potential from a
standpoint of form and colour. For this, I make drawings, using watercolours, to develop various ideas until a viable
project emerges. Then it’s a matter of putting the idea into practice.

You are correct that I use a large format (at least 4''x 5'' or 10cm x 12,5cm) view camera, with a lens fixed on the
front standard and a matte glass rear panel. When you put a black cloth over your head and look through the matte
glass, you are presented with an inverted image. I draw my project shape directly onto the matte glass and use
this as a reference to reproduce it, point by point, onto the chosen location. This means constantly going back and
forth between camera and location to check that everything is precisely in position. I then select the various colours
and paint the finished work. It now only remains to insert a holder, loaded with negative or transparency film, into
the view camera in order to capture the scene exactly as it was conceived on the matte glass. The viewpoint of the
camera merges precisely with that of the anamorphosis.

118 OPENEYE N°30 - Février/Mars 2023


OPENEYE
Le regard d’aujourd’hui sur la photographie

OPENEYE : You often create such transient installations in abandoned places. Don't you think that the urban public
space might benefit from being graced by one of your works (somewhere like the old Yacht Club in Deauville, for
example)?

Georges ROUSSE : Deauville, where I was able to realise one of my ephemeral works in a public place, is a recent
experience for me. I have previously tended to work more in interior spaces, mainly because of my liking for solitude
– akin to that of the artist in his studio. Similarly, I tend to take on projects in a random manner, depending on the
proposals I receive.

OPENEYE : Your conceptual work is recognised all over the world, from the United States to Japan and from South
Korea to Quebec or Latin America. Don't you think it's about time the French State, or a major municipality, decided
to create a central museum to showcase your work, which is currently ‘scattered’ among numerous private and
regional collections?

Georges ROUSSE : I’m flattered by the proposal, but am already having enough trouble just obtaining the necessary
authorisations to operate in some areas! (ed: unbelievable!)

OPENEYE : What are your next projects?

Georges ROUSSE : As the proposals I receive often take a long time before coming to fruition, I can't really talk
about any future plans at this stage.

OPENEYE Thank you for your answers

Février/Mars 2023 - N° 30 OPENEYE 119


©Photo Philippe Litzler
Société OPENEYE
Le regard d’aujourd’hui sur la photographie

Par Jean-Paul GAVARD-PERRET

Arnaud BAUMANN
Fête au Palace
Le photographe et vidéaste Arnaud BAUMANN - né à la Réunion en 1953 - trouva à Paris de quoi s'épanouir. Et ce, par
ses études et la rencontre de l'équipe de Hara-Kiri en 1973. C'est au sein de cette publication sulfureuse et géniale qu'il
crée ses premières photos. Vingt ans plus tard il réalise ses « Vidéocaptures » en numérique pour Libération lors du 45e
Festival de Cannes. Mais entre-temps il aura roulé sa bosse dans des lieux interlopes côtoyant des sbires et des sirènes
du même acabit, que seuls les malotrus traiteraient de tristes sires et de fieffées salopes.

Auteur de plusieurs livres qui mettent la tête sous « l'O d'histoires » * Dancefloor (mais pas que), nous sommes ici moins
près de la Boum que des clubs new-yorkais dont le Palace devint le parangon. En un tel lieu, c'est moins le Campistron
qui pullule que les belles de nuit aux atours baroques. L'époque était bénie - juste avant que le Sida ne sévisse, laissant
derrière lui des milliers de vie fauchées en pleine jeunesse (à ce titre le Covid devient une commodité de la conversation).

Mais BAUMANN ne fétichise pas le lieu et n'embellit pas ses visiteuses et visiteurs du soir. Il cultive une approche
volontairement « sale ». Et là où l'excentricité reste la pierre de touche, fidèle à ses principes premiers, il ne l'esthétise en
rien pour la rendre plus spectaculaire qu'elle voudrait se donner à voir. Des glands d'or sonnent le glas même lorsqu'ils
implorent Ave Madonna. Place au Dirty en quelque sorte.

Les photographies obligent à un regard autre, oblique. Le corps n’est qu’une idée, rien de plus. Ce que les hidalgos
et poupées font reluire ne possède rien de forcément brillant sinon dans la pacotille. Et finalement scènes et portraits
s'ironisent au détour de la solitude déposée de toujours dans les corps qui même nus se dérobent.

Arnaud BAUMANN ranime de manière perverse les questions que l’on pose sans espoir. Il ferme les promesses d’un
avenir et d’un « croire voir » (Beckett) là où de telles œuvres s’inscrivent comme une tâche noire essentielle au cœur
même de la lumière. « Soleil et chair » comme disait Hans Bellmer ne vont plus de pair. C'est la lune qui tente de jouer
les belles du seigneur et de jour.

FÊTE AU PALACE
L’exposition et le livre chez HARCOURT

Février/Mars 2023 - N° 30 OPENEYE 121


OPENEYE
Le regard d’aujourd’hui sur la photographie

Arnaud BAUMANN
Palace Revels
The photographer and videographer Arnaud BAUMANN was born on the island of Reunion in 1953. It was twenty years
later, however, that he was to truly blossom when, during his studies in Paris, he came into contact with the team behind the
infamous French satirical magazine, Hara-Kiri. Indeed, he made his first photos for this sulphurous but renowned publication.
Another twenty years on, and he made his memorable digital ‘Videocaptures’ for the newspaper Libération in the context of the
45th Cannes Film Festival. Between all this, he has been working as somewhat of an underground artist, rubbing shoulders with
dubious characters whom only those lacking a sense of humour and tolerance might label as henchmen or loose women!

The author of several books, including some that most definitely spiced up the concept of dancefloor in a manner far removed from
The Red Shoes! Indeed, they were more inspired by the notorious New York clubs - swarming with people of the night garbed in
Baroque finery - of which The Palace became the paragon. These were the glory years, just before the onslaught of AIDS cut
thousands of lives tragically short in a manner that almost makes the outbreak of COVID-19 look like a minor inconvenience in
comparison.

But, while Baumann cultivates a provocative and deliberately ‘dirty’ approach to his work, he never falls into the trap of fetishising
or embellishing, either the venue or its colourful clientele. Rather, true to his first principles, eccentricity remains the overriding
touchstone and he does nothing to make the atmosphere appear more glamourous than it really is. The golden tassels already
appear to be sounding the death knell - even as they pay tribute the rise of the Goddess Madonna. Like a Virgin making way for
‘Dirty’!

Baumann’s photographs present an original, oblique vision. The body is reduced to nothing more than a concept. What the
revellers appear to make shiny is frequently exposed as lacking any substance beyond the tawdry. And, last but not least, there is
an underlying irony present in the various apparently joyful scenes and portraits – a latent solitude that is notably captured in the
bodies that, even naked, come across as strangely anonymous.

Perversely, Arnaud Baumann reiterates eternal questions, which remain unanswered and without hope. He closes the door
on promises of a future and, as Samuel Becket put it, of "believing to see" a time when such works are enshrined as a kind of
essential black spot in the very heart of light. To paraphrase Hans Bellmer, the sun and flesh are no longer in tandem. It is the
moon that strives to seduce the Lord and the day.

Février/Mars 2023 - N° 30 OPENEYE 123


© Susanne Schramke
Danse OPENEYE
Le regard d’aujourd’hui sur la photographie

par André JACQUART

Sinéad BUNN
Ballerines
Je m'appelle Sinéad BUNN, je suis danseuse de ballet professionnelle au Bayerisches Staatsballett de Munich.
La photographie est une passion qui occupe mon temps lorsque je ne suis pas sur scène. Le projet « Ballerine » m'a aidée
à traverser la période de Covid. Ce travail veut rendre compte de ce qu’a été, jusqu'à présent, ma vie de danseuse qui doit
sans cesse se perfectionner. C'est aussi une célébration du ballet en tant que forme d'art merveilleusement belle.
La Covid a frappé très durement les ballerines et les artistes de scène. Avec ce portfolio, j'ai essayé de transformer cette
souffrance en quelque chose de beau. J'espère ainsi atténuer ces moments tristes et ces souvenirs de la fermeture de nos
théâtres, de l'annulation du public et du chômage des ballerines.
J’aimerais maintenant obtenir un financement afin de me consacrer davantage à mon travail photographique et de partager
plus largement mon art.
J'espère sincèrement qu’il trouvera une place dans vos cœurs.

Ballerinas
My name is Sinéad BUNN, I’m a professional ballet dancer at The Bayerisches Staatsballett in Munich. Photography is
my passion that occupies my time away from the stage. The ‘Ballerina Collection’ project helped me through the days of
Covid-19. This collection is a tribute to what I have spent my life thus far perfecting, ‘Ballet’. It’s also a celebration of Ballet
as the wonderfully beautiful art form it is.
Covid-19 hit ballerinas and stage artists very hard. With this small portfolio, I’ve tried to turn that suffering into something
special. I hope it’s special enough to diminish those sad times and memories of when our theatres were closed, audiences
cancelled and ballerinas were unemployed.
I‘m really eager now to get some funding or more interest in my photography collections and to share my work with more
people. I sincerely hope you can find a place in your hearts for my art.

Février/Mars 2023 - N° 30 OPENEYE 135


Photo sous-marine OPENEYE
Le regard d’aujourd’hui sur la photographie

par Pierre EVRARD

Thomas SYMONDS
Amphibians
“Je ne critique pas, boire est si délicieux. Je regrette néanmoins que nul n'explore l'infini de la soif, la pureté de cet élan, l'âpre
noblesse qui est la nôtre à l'instant où nous l’éprouvons.”
- Amélie Nothomb

Amphibians raconte notre rapport ambivalent à l’eau. Les modèles évoluent dans des poses évoquant des tableaux
mythologiques et religieux de la Renaissance. La métaphore est poussée jusqu’au format de l’image : de larges compositions
de plusieurs mètres dédiées à des problématiques contemporaines et non plus à des thématiques religieuses ou des fresques
historiques.

Une façon de mettre en avant ces enjeux sociétaux et de laisser le soin au spectateur d’y répondre.

"I am not criticising; drinking is so delightful. I regret, however, that no-one explores the infinity of thirst, the purity of the
impulse, the bitter nobility that is ours the moment we experience it."
- Amélie Nothomb

Amphibians addresses our ambivalent relationship with water. The models adopt poses that evoke mythological and religious
paintings from the Renaissance. The metaphor even extends to the format of the images: large scale compositions, each
spanning several metres, devoted to contemporary concerns rather than religious themes or historical frescoes. A way of
highlighting the societal issues of our times.

Février/Mars 2023 - N° 30 OPENEYE 147


Astronomie OPENEYE
Le regard d’aujourd’hui sur la photographie

par Jacky MARTIN

Thierry LEGAULT - La tête dans les étoiles


Ingénieur de formation, Thierry LEGAULT est français et habite près de Versailles où la pollution lumineuse est
très importante. Il peut malgré tout réaliser depuis son jardin la plupart de ses images du soleil, de la lune et des
planètes. Pour le ciel profond, il doit se rendre en rase campagne entre Rambouillet et Chartres. Il voyage aussi
autour monde pour réaliser des images exceptionnelles, en particulier pour des éclipses (Angola, Egypte, Russie,
Chine, Argentine, USA, Australie, Oman…) et des aurores boréales (Islande, Norvège, Finlande).

Thierry se qualifie d’astronome amateur mais je connais beaucoup d’amateurs qui aimeraient avoir sa compétence
et son matériel.

Il a écrit 3 livres, "Le grand atlas de la lune" (Larousse), "Astrophotographie", et "Les secrets de l’astrophotographie"
(Eyrolles).

Il a rédigé de nombreux articles sur l'imagerie numérique en Europe et aux USA (Sky and Télescope, Ciel et
Espace, Astronomie Magazine, Chasseur d'Images...).

Ses photographies, notamment celles du transit solaire de la station spatiale, ont été publiées dans des journaux
et magazines et ont été diffusées par TV dans le monde entier.

En mai 2009, il a pu assister depuis le site de presse du Centre Spatial Kennedy (KSC) au tir de la navette spatiale
Atlantis lors de la mission STS-125 (dernière mission de réparation du télescope Hubble), et visiter le hangar dans
lequel se trouvait la navette Discovery en cours de préparation pour une mission ultérieure. Le lendemain, il a
réalisé une photo d’Atlantis en passage devant le Soleil, publiée en Une du Times.

En 2019 il a rencontré 3 astronautes au centre d'entraînement des astronautes à Houston : Donald Pettit, Steve
Bowen, et le français Thomas Pesquet.

Il a été récompensé par SBIG dans le Hall of Fame de cette compagnie et il a reçu le prix Marius Jacquemetton de
la Société Astronomique de France en 2004 pour ses travaux photographiques.

L'astéroïde numéro 19458 a été officiellement baptisé Legault auprès de l'Union Astronomique Internationale.

Pour les informations techniques et son équipement vous pouvez visiter son site Internet.

Février/Mars 2023 - N° 30 OPENEYE 159


OPENEYE
Le regard d’aujourd’hui sur la photographie

Thierry LEGAULT - Head in the stars


Thierry LEGAULT is a French engineer who lives near Versailles, in an area where views of the sky tend to be
heavily polluted by urban lighting. Despite this, he manages to take most of his images of the sun, moon and
planets from his backyard. For shots of the deep sky beyond, he has to venture into to the clearer countryside
between Rambouillet and Chartres. He also travels around the world in order to make his remarkable images
of eclipses (Angola, Egypt, Russia, China, Argentina, USA, Australia, Oman etc.) and aurora borealis (Iceland,
Norway, Finland).

Thierry calls himself an amateur astronomer but I know of many amateurs who would give their eye teeth to
possess his skills and equipment. He has written three books: le Grand Atlas de la Lune (The New Atlas of
the Moon), published by Firefly in English, as well as Astrophotographie (Astrophotography) and Les Secrets
de l'Astrophotographie (The Secrets of Astrophotography) both published by Eyrolles in France (and the former
by Rockynook in English). In addition, he is the author of numerous articles devoted to imaging techniques that
have appeared in leading magazines across Europe and the USA, including Sky and Telescope, Ciel et Espace,
Astronomie Magazine, Chasseur d'Images etc.). His photographs, notably those of the space shuttle and space
station, have been prominently featured by written and broadcast media throughout the world. Key references
include:
The Times, The Guardian, The Daily Mail, The Wall Street Journal, CNN, Fox News, ABC News, CBS News,
Discovery Channel, Science et Vie, le Monde, le Figaro, le Point, Ça m'Intéresse, TF1, France2 and M6.

In May 2009, he was privileged to observe the launch of Space Shuttle Atlantis (for the final Hubble telescope
servicing mission) from the Kennedy Space Center press site as well as tour the hangar in which Space Shuttle
Discovery was being prepared for a future flight. The next day, he took the photo of Atlantis passing in front of the
sun that was published on the front page of the Times of London. In 2019, he met personally with three astronauts
at their training centre in Houston. These were his compatriot Thomas Pesquet and the Americans Donald Pettit
and Steve Bowen.

Thierry LEGAULT has been honoured by the SBIG brand of scientific camera equipment in their Hall of Fame
and, in 1999, received the Marius Jacquemetton Award, discerned by the French Astronomical Society (Société
Astronomique de France) for his photographic work. He also enjoys the unique distinction of having an asteroid
(number 19458) being officially named after him by the International Astronomical Union.

Further technical information as well as details of the equipment used by Thierry may be found on his website.

Février/Mars 2023 - N° 30 OPENEYE 161


L'éclipse de Soleil et l'installation des nouveaux panneaux solaires Macon France 2021
ISS : International Space Station - Vitesse 27000 km/h - Distance : ~400km
Transit ISS Lune Bourges France 2022
Occultation de Mars par la Lune Lisbonne Portugal 2020
Comète Neowise sur le Mont Saint Michel 2020
Aurore Boréale sur le mont Kirkjufell Islande 2019
Double éclipse solaire Argentine 2019
Éclipse de lune Paris 2019
Pleine Lune sur l'Empire State Building New York 2017
Pleine Lune sous l'Arc de Triomphe Paris 2022
Portrait_Badessi_B&W
Reportage OPENEYE
Le regard d’aujourd’hui sur la photographie

par Philippe LITZLER

Line PARIENTE
Une année en Suisse, 1972
Avec cette série, j’explore un épisode de mon enfance. Cet événement se situe précisément pendant l’année 1972.
À l’époque j’ai 8 ans et mes parents me placent dans un internat en Suisse, le Colibri, pour repartir vivre en Afrique.
J’y reste une année scolaire, celle du CM1.

J’ai une mémoire fragmentaire de cette période. Au fil des ans, mes souvenirs se sont chargés d’émotions négatives.
J’ai éprouvé le besoin de réinvestir différemment cette partie de mon histoire pour élaborer une représentation
simplifiée de ce passé et remplir le récit manquant.
Ce travail sur les mots et les images est l’acceptation des traumatismes liés à mon enfance et constitue un ancrage
dans mon récit personnel.
.

A year in Switzerland, 1972

This series is devoted to a period of my childhood when, at the age of eight, my parents put me in a boarding school
in Switzerland for a year while they went to live in Africa. My sketchy memories of those times evoke a lot of negative
emotions. So much so, that I felt the need to re-engage with the period in order to develop a fresh perspective, and
fill in some of the missing pieces. The series thus represents acceptance of my childhood traumas and anchors my
personal narrative.

Février/Mars 2023 - N° 30 OPENEYE 173


Street photography OPENEYE
Le regard d’aujourd’hui sur la photographie

par Pierre EVRARD

Sonia HAMZA
Chinatown : une ambiance à part à Bangkok
En résidence à Bangkok pendant deux mois, j’ai habité et travaillé dans le quartier chinois aux rues typiques où les ateliers-
maisons se succèdent : de petites échoppes mono-produit constituées d’un étroit magasin en rez-de-chaussée, une cuisine
rudimentaire et une douche au fond, des dortoirs sommaires aux étages. Les commerçants et leurs familles y travaillent et
y vivent sous le nez des passants : la frontière entre vie publique et vie privée est totalement effacée.

Ma série vise à révéler cette ambivalence entre l’attraction touristique d’un univers authentique et le maintien artificiel de
cette authenticité pour des raisons pécuniaires, au péril de la vie de ses habitants, car ces bâtiments sont pour la plupart
insalubres, rongés par l’humidité (à cause de la mousson) et générateurs de maladies. Pendant ce temps, la population
locale y survit de l'aube au crépuscule, s'aventurant rarement de leurs minuscules vitrines, comme si elle jouait une pièce
de théâtre perpétuelle pour le plaisir du public.

J’ai voulu livrer cette sensation de chaos ressentie par le promeneur en juxtaposant trois espaces dans la même image et
en manipulant la ligne de démarcation entre chacune pour renforcer le sentiment de proximité et d'encombrement.

Pour rappeler les tentures chinoises anciennes et les peintures sur tissu, j’ai encadré mes vues panoramiques de trois
bordures à motifs, issus de détails de l’image, grossis et multipliés pour évoquer le textile. En Asie, ce type de cadres servait
à donner de la valeur à une œuvre.

Cette série met également en cause la responsabilité du tourisme de masse dans sa quête du sensationnel.

Chinatown : an atmosphere of its own in Bangkok


During a two-month residency in Bangkok, I lived and worked in the Chinese quarter, renowned for its characteristic streets
sprawling with small workshops and businesses - typically small single-product stores comprising a narrow stop on the
ground floor, with rudimentary kitchen and shower areas at the back, and basic dormitories on the upper floors. The
tradespeople and their families both live and work on the premises, totally eroding any barriers between public and private
space as they go about their daily routines virtually under the noses of passers-by.

My series draws on the ambivalence inherent in seeking to preserve the perceived authenticity of the district – frequently
at the expense of the health and safety of its residents - so that it continues to attract tourists and the revenues they bring.
Indeed, most of the buildings (especially in the wake of the monsoon season) are in damp, unsanitary condition and form
a breeding ground for disease. Meanwhile, the local population survives there from dawn to dusk, rarely venturing from
their tiny storefronts, as if performing a perpetual play for the titillation of the bustling audience on the street beyond. In this
respect, the series further questions the responsibility of mass tourism in its relentless quest for gratification at any expense.

I wanted to convey the sense of chaos experienced by visitors to the area by combining three such shop areas, and
manipulating the dividing line between each to enhance the sense of proximity and clutter. Taking inspiration from ancient
Chinese hangings and paintings on fabric, I framed each of the resulting panoramic views with three distinctly patterned
borders, echoing details within the images duly magnified and m
ultiplied to evoke a textile design. In Asia, this type of frame was traditionally employed to denote and enhance the value
to a work.
Février/Mars 2023 - N° 30 OPENEYE 187
La galerie des lecteurs OPENEYE
Le regard d’aujourd’hui sur la photographie

par Marcel BOI

Thomas CARYN
L’illusion du temps
« Considérant l’évolution de notre espèce comme une erreur de la nature, je me plais à photographier ces endroits
libérés de toute oppression humaine où la végétation et les outrages du temps ont repris le dessus. De la centrale
électrique en passant par la morgue et les blocs opératoires d’hôpitaux, de la petite ferme en passant par l’église du
village... Je recherche, arpente et m’introduis illégalement dans ces lieux abandonnés mis en offrande sur l’autel de
l’obsolescence. Une réflexion sur le nombrilisme humain et sur cette supercherie montée de toutes pièces qu’est...
le temps. » Voici ce que dit de lui cet auteur autodidacte de Mouscron en Wallonie (B).

Il a très jeune appris les bases de la photo en analysant la technique et les clichés réalisés par son père alors
photographe ornithologue. Puis suivent des études d’infographiste… Thomas donne aujourd’hui des formations
sur son thème de prédilection : l’urbex.

The illusion of time

"As I feel the evolution of our species must be some kind of mistake on the part of nature, I like to photograph places
freed from human encroachment, where vegetation and the ravages of time have once again taken over. From
power stations to morgues and hospital operating theatres; small farms to village churches and such like, I seek
out, survey and furtively enter abandoned spaces sacrificed on the altar of obsolescence – casualties of human
navel-gazing and the deception that is time.” It is in these terms that Thomas Caryn, a photographer from Mouscron
in Belgium, introduces his work.

He taught himself the basics of photography early on by studying the pictures and technique of his father, a proficient
ornithological photographer. Following his studies in computer graphics, Thomas now gives training courses on his
favourite theme: urbex.

Février/Mars 2023 - N° 30 OPENEYE 207


Du plomb dans l'elle
Tempête dans un vert d'eau
Je rêve de Bastia en été
Hot Ladies On Ice
L'église au milieu du pillage
Et sur cette pierre je baclerai mon église
Cannibale Lecter
Extra tes restes
Le eau débit
La flemme de ménage
Pierre qui mousse n'amasse pas rouille
L&T sur son 31
OPENEYE
Le regard d’aujourd’hui sur la photographie
Où va la photographie ?
par Laura SAMORI

La collaboration Artiste-Machine :
Création et ’Intelligence artificielle

Au XXIe siècle, L’art est entré en contact avec un nouveau paradigme. La photographie plasticienne est embarquée
de plein fouet dans cette nouvelle représentation du monde, muable et paradoxale : entre réel et irréel, abstraction
et figuration, entre création humaine et création machinique/algorithmique.

Les possibilités de création étaient déjà considérées comme infinies avec l’arrivée d’outils comme Photoshop dans
les années 1990. Aujourd’hui, et depuis un peu moins d’une dizaine d’années, la popularisation des outils utilisant
différents sous-genres de l’intelligence artificielle (deep-learning, machine-learning, etc.) ont ouvert drastiquement les
potentialités de la création. Les images naissent d’une collaboration, bien que les questionnements sur la paternité
des œuvres fassent débat. Qui est l’ultime créateur ? La machine ou l’artiste ? Répondre suppose de se tourner
vers les artistes, et il en ressort que la grande majorité d’entre eux considèrent que les résultats obtenus, bien que
sélectionnés in fine par leur sensibilité plastique, sont bel et bien le fruit d’une collaboration. Des artistes pionniers
les plus célèbres comme Grégory Chatonsky (créateur du projet Terre Seconde, entre autres) au collectif Obvious
(Portrait d’Edmond de Bellamy), l’aspect collaboratif entre humain et machine fait l’unanimité. Fournir la matière
première à l’algorithme (un ensemble d’images sources, faisant office de base de réflexion), choisir l’algorithme
qui créera de nouvelles images, devenant l’équivalant des pinceaux du peintre. Enfin, choisir l’image qui ressort du
processus mathématique, en faisant appel à une dimension sensible.

Le collectif Obvious, figure de proue de l’IA Art, met en valeur cette collaboration en signant l’œuvre imprimée par
la formule algorithmique employée pour la réaliser. Dans l’idée, disent-ils lors d’une interview, de donner un indice
au « regardeur » de l’origine de l’image qu’il a devant lui. L’année passée, un concours artistique a été remporté
par Jason Allen avec son œuvre Théâtre d’opéra spatial, dans la catégorie Digital Art. L’artiste revendique que
l’image en question ait été réalisée en partenariat avec le logiciel Midjourney, produisant des images à partir de
descriptions textuelles, avec un fonctionnement similaire à celui d’OpenAI. L’artiste tchèque Emil Holub revendique
également cette dimension collaborative lorsqu’il réalise des portraits qui « clochardisent » des célébrités grâce à
l’IA, qui ajoutent aux images initiales des stigmates liées dans l’imaginaire à la pauvreté. « J’ai choisi la voie de
la coopération avec l’IA, résister au progrès n’en vaut pas la peine… C’est beau, inspirant et effrayant à la fois. »
explique-t-il.

(Voir l’ensemble du portfolio dans la Gazette de Nicole pp164-170)

220 OPENEYE N°30 - Février/Mars 2023


Obvisous - Le Marquis De Belamy
GANs Algorithm, Inkjet printed on Canvas
70x70 cm - 2018 - Art collector from India
OPENEYE
Le regard d’aujourd’hui sur la photographie

Le festival des Rencontres d’Arles, précurseur comme souvent, a exposé le travail de Joan Fontcuberta et Pilar
Rosado intitulé "Déjà vu à la chapelle du Méjan" lors de l’édition 2022. Il s’agit d’une série d’images entre réalité et
fiction générée par réseaux adverses génératifs de neurones. « Cette expérience interroge les notions « d’artiste »,
de « conservation » et de « conservateur ». » expliquent les artistes.

On peut noter qu’il y a une forme d’égalité dans l’accès à la création en duo avec la machine, car pour peu que l’on
soit pourvu d’un ordinateur et d’une connexion internet, la création est possible, illimitée et donne les mêmes outils
à chacun. Seul le temps de calcul varie selon la puissance du matériel utilisé.

Le rôle de l’artiste ne s’en trouve pas pour autant dénaturé ou réduit. Au contraire. L’artiste doit prévoir, connaître et
appréhender les comportements algorithmiques pour s’approcher au plus près de l’idée à l’initiative de l’œuvre : la
sélection du corpus d’images servant de base est très importante.

Les algorithmes d’intelligence artificielle (réseaux adverses génératifs appelés GAN), basés sur l’imitation, les
réseaux de neurones convolutifs (CNN), les Deep Fake, etc. Ces algorithmes sont sujets à une amélioration
constante. Ils ont en commun la capacité de synthèse puis de transformation d’un corpus pour créer un +1, une
image nouvelle. Beaucoup d’œuvres produites restent dans le champ de la photographie, qu’elles soient visibles
en ligne ou imprimées ensuite. Certains artistes puisent dans ces possibilités infinies d’imagination des machines
pour croiser l’image numérique et immatérielle à la finalité matérielle de la peinture. Le studio aurèce vettier, après
avoir produit une image via l’intelligence artificielle, reproduit certains visuels à l’huile sur toile dans l’exposition
« CIRCULAR RUINS » à la galerie Darmo à Paris. La peinture achevée reste le fruit d’une collaboration
homme-machine. L’artiste est ici à la fois au début et à la fin de parcours, bouclant le processus de création
par l’acte de peindre. L’artiste joue avec les techniques de restitution car il conserve certaines images en
photographie également. (Voir illustration)

Ces œuvres ouvrent la relation homme-machine et homme-programme. Un autre particularité des formes d’art
numérique est de proposer « autre chose que la critique de l’impact de l’IA et de son utilisation par les GAFAM »,
comme l’a fait Grégory Chatonsky avec Hisland ou Terre Seconde : s’emparer des outils pour créer.
L’art à l’ère post-digitale est traducteur, incitateur de connaissance, de rêves, et transporte l’imaginaire dans des
paysages inconnus ou l’émotion prime. Un état de fascination favorisé par les relations de plus en plus inextricables
entre l’homme comme producteur d’art et la machine.

222 OPENEYE N°30 - Février/Mars 2023


Joan Fontcuberta & Pilar Rosado.
Série Déjà-Vu, 2021.
Avec l’aimable autorisation des artistes.
OPENEYE
Le regard d’aujourd’hui sur la photographie

Artistic Collaboration between


Humans and Machines:
Creation and Artificial Intelligence

In the 21st century, art is confronted with a new paradigm – one in which visual arts photography is playing a major
role and which reflects our shifting and paradoxical world, breaking down the barriers between the real and the
unreal, abstraction and figuration as well as, significantly, between human and machine/algorithmic creation.

The frontiers of creation were already considered boundless with the arrival of software like Photoshop® in the
1990s. Over the last decade, however, the increased accessibility of tools mobilising different sub-genres of artificial
intelligence (deep-learning, machine-learning, etc.) have extended the potential even further, so as to make it
virtually infinite. Meanwhile, many modern images are the fruits of an unprecedented form of collaboration, which
raises new questions regarding authorship. Who or what is the ultimate creator? The machine or the artist? To
answer this dilemma, we must turn to the artists themselves - and it appears that the vast majority, even though they
still lay claim to final artistic control and vision, acknowledge that their works are effectively produced in collaboration.
Indeed, artists ranging from the most prominent pioneers in the field, such as Gregory Chatonsky (creator of the
Terre Seconde project), to the members of the Obvious collective (Portrait of Edmond de Bellamy), unanimously
embrace the collaborative dimension between human and machine. The process of providing raw data (a set of
source images, acting as a basis for reflection) and then selecting an appropriate algorithm to create new images
has become the modern equivalent of wielding a set of painter's brushes, while the artist now essentially focuses his
or her sensibility on influencing the image that emerges from the mathematical process.

The Obvious collective, leading proponents in AI art, highlight this dimension of collaboration by signing each
printed work with the algorithmic formula used to create it – the idea, according to interviews they have granted,
being to give the ‘viewer’ an insight as to the origins of the image. Last year, the digital arts/digitally manipulated
photography category of a major art competition in Colorado was won by Jason Allen with his work Theatre d’opera
spatiale (Space Opera Theatre). The artist stated that his winning image was created using Midjourney, an artificial
intelligence (AI) software that turns lines of text into hyper-realistic graphics. Similarly, the Czech artist Emil Holub
acknowledges a collaborative dimension when he uses AI to manipulate portraits of celebrities to make them look
like vagrants - vesting them with facial defects and other trappings more usually associated with extreme poverty.
"I opted to embrace AI”, he affirms. “Resisting progress is not worth it ... It's beautiful, inspiring and scary at the
same time." (The complete portfolio may be viewed online in the January 2023 edition of La Gazette de Nicole,
pp164-170).

224 OPENEYE N°30 - Février/Mars 2023


aurece vettier Obvious - Ken of the Two Passes
GANs Algorithm, Inkjet Printing on traditional Japanese Washi
78x106 cm - 2019
OPENEYE
Le regard d’aujourd’hui sur la photographie

As has been so often the case, the Rencontres d'Arles photo festival proved a foresighted pioneer of the new medium
by exhibiting Joan Fontcuberta and Pilar Rosado work entitled Déjà vu at the Chapelle du Méjan in 2022. The
work consists of a series of images, conveying a world existing somewhere between reality and fiction, generated
by so-called ‘adversarial neural networks’. The experiment, explained the initiators, challenges our notions of what
constitutes an ‘artist’, ‘conservation’ or ‘curator’.

The new medium could also be said to herald a kind of democratisation of the artistic process, making it more
accessible to all. Indeed, as long as one has a suitable computer and an internet connection available, literally
anybody can become a creator. Only the computing time spent will vary, depending on the specifications of the
hardware used.
This does not imply that the role of the human artist has become somehow distorted or diminished. On the contrary,
the artist must be familiar with and be able to anticipate the behaviour of the relevant algorithms in order to realise
the idea behind the work as accurately as possible. The selection of the body of images used as a basis for the
project is also particularly important.

Many AI algorithms (Generative Adversarial Networks, called GANs and based on imitation, Convolutional Neural
Networks known as CNNs, Deep Fake, etc.) have been developed over the past few years and are subject to
constant improvement. What they have in common is the ability to synthesise and then transform data to create a
+1 - i.e. a new image. Many of the works produced may still be classified as belonging to the domain of photography,
irrespective of whether they are printed out or simply remain viewable on line. This being said, some artists are now
drawing on the infinite possibilities of machine imagination to cross the digital and non-tangible image threshold to
produce works possessing the physical properties of paintings. For the ‘Circular Ruins’ exhibition, held towards the
end of last year at the Darmo gallery in Paris, for example, the aurèce vettier studio, first created dreamlike images
using AI before re-producing them in oil on canvas. Thus, in this instance, the living artist assumes a preeminent
role both to launch the creative collaboration between human and machine and at its conclusion when he or she
completes the process through the physical act of painting. Naturally, photography may also be used for such
restitution (see illustration).

The works introduced above open up the field of man/machine and man/software relationships. Another common
characteristic of the latest digital art forms is to propose a more positive and constructive reaction to the prevailing
disquiet regarding the impact of AI and its use by the giants of GAFAM (Google, Apple, Facebook, Amazon and
Microsoft). Certainly, Gregory Chatonsky achieved this with his Hisland and Terre Seconde projects by embracing
the creative possibilities of the new tools.

Art in the post-digital era has become an interpreter, an instigator of knowledge and dreams. It transports the
imagination into unknown landscapes where the contours are freely defined by emotion: a domain of enchantment
made possible by the increasingly inextricable relationship between humans, as conceivers of art, and the machine.

226 OPENEYE N°30 - Février/Mars 2023


Joan Fontcuberta & Pilar Rosado, Déjà Vu

Emil Holub
OPENEYE
Le regard d’aujourd’hui sur la photographie
Histoire de la photographie
par Pierre-Jean AMAR

La Straight Photography
Alfred Stieglitz (1864-1946) avait jeté les bases
d’une photographie moderne en voulant la faire
reconnaître comme un art et en défendant les
pratiques pictorialistes (voir l’article dans le N°
28 d’OPENEYE) lorsqu’il fonde avec Edward
Steichen (1879-1973) le groupe Photo-
Secession en 1905. Parmi ses membres
on peut citer Clarence H. White, Gertrude
Käsebier et Alvin Langdon Coburn.

Stieglitz et Steichen créent également la


splendide revue trimestrielle Camera Work et
les Little Galleries 291 selon le numéro de la
Cinquième Avenue de New York où elles sont
installées. On y présentera les photographes
du groupe mais aussi les œuvres d’artistes
contemporains européens comme Picasso,
Rodin, Matisse et Toulouse-Lautrec, entre
autres.

1-Edward Steichen. JP Morgan 1903

228 OPENEYE N°30 - Février/Mars 2023


OPENEYE
Le regard d’aujourd’hui sur la photographie

Dès 1910, des divisions se font sentir au sein de Photo-Secession. Certains veulent continuer dans
le pictorialisme, d’autres voient à présent dans cette pratique une négation des spécificités visuelles et
matérielles de la photographie. C’est notamment le cas des deux fondateurs du groupe qui finira par se
séparer en 1917.

Deux photographies marquent réellement la naissance de cette nouvelle approche que l’on appellera la
Straight Photography ou photographie pure et directe. Il s’agit de L’Entrepont de Stieglitz (voir l’article
dans le N° 29 d'OPENEYE) et de La Barrière blanche de Paul Strand (1890-1976) publiée dans le
dernier numéro de Camera Work en 1917.

La barrière blanche Paul Strand 1915 - copie

Février/Mars 2023 - N° 30 OPENEYE 229


OPENEYE
Le regard d’aujourd’hui sur la photographie

D'un grand modernisme de vision et d'une hardiesse


étonnante pour l'époque dans sa composition, elle
rompt avec la tradition du paysage ouvert sur l'horizon.
« La Barrière blanche, métaphore visuelle d'un extrême
réalisme de détail, est la plus éloquente des images
de Strand qui connaissait les démons du flou et s’en
défiait. […] Cette fois, confronté à son propre plaisir
visuel, il choisit de clore presque entièrement l’accès
à sa photographie. […]. La lumière crépusculaire,
annonciatrice de mort pour l'ancien style mais de vie
pour les créations à venir […]» (Mark Haworth-Booth,
Paul Strand, Les Maîtres de la photographie, Nathan,
1990.)

Paul Strand, jeune photographe, venait de réaliser une


très belle suite de portraits pris sur le vif à la Graflex,
dans les rues de New York, dont le fameux portrait
d’une mendiante aveugle (Blind Woman), mais aussi
des images presque abstraites.

Paul Strand

230 OPENEYE N°30 - Février/Mars 2023


OPENEYE
Le regard d’aujourd’hui sur la photographie

Dans un article-manifeste de 1917 intitulé Photography, Stieglitz écrit : « La plus parfaite réalisation de
cette objectivité absolue qui est le propre de la photographie est atteinte sans aucun truc ni procédé, sans
manipulation, grâce à l’utilisation de méthodes photographiques directes »

Ces photographes prônent le retour à une photographie sans artifices, la plus « objective » possible,
sans même avoir recours à l’agrandissement car ils travaillent à la chambre grand format et tirent souvent
leurs images par contact par le procédé de la platinotypie pour un rendu délicat et velouté dans les gris et
les noirs. Paysages, natures mortes, nus, portraits, architectures, tous les sujets sont abordés en noir et
blanc bien sûr. Le regard se concentre sur les structures, les formes, la lumière du monde réel conduisant
à une composition telle qu’aucun artifice ne sera requis au tirage. Une photographie qui, grâce aux films
plus sensibles et aux équipements moins encombrants, descend également dans la rue. Cette réaction
au pictorialisme va également se faire sentir aux USA mais aussi en Europe.

Aux USA, le Groupe f/64 créé en 1932 réunit autour d’Edward Weston
(1886-1958) et Ansel Adams (1902-1984) plusieurs photographes
dont Imogen Cunningham (1883-1976), Minor White (1908-1976),
Paul Caponigro (1932), Wynn Bullock (1902-1975) et beaucoup
d’autres.

Février/Mars 2023 - N° 30 OPENEYE 231


OPENEYE
Le regard d’aujourd’hui sur la photographie

Le nom du groupe vient de la plus petite ouverture de diaphragme qu’ils


emploient pour avoir une grande profondeur de champ et être ainsi net
partout. La qualité du tirage est tout aussi importante car elle participe à la
beauté de l’œuvre. On reconnaît à l’épreuve une valeur d’objet d’art dont
la réalisation est primordiale. Ce mouvement va être très actif jusqu’aux
années 1970 et il représentera la notion de modernité. Il influencera aussi
beaucoup la photographie documentaire comme celle de Walker Evans
(1903-1975) et des membres de la Farm Security Administration (FSA).

Edward Weston sera le véritable chef de file de la photographie pure, bien qu’il ait débuté sa carrière
comme pictorialiste. Touché par la beauté des arts industriels dans l’Ohio, il photographie des usines
et des objets manufacturés. Au contact d’artistes comme Diego Rivera et José Orozco au Mexique,
sa personnalité s'affirme. Dans son journal, il définit sa conception de la photographie : «Une épreuve
techniquement parfaite, tirée d'un cliché techniquement parfait, peut seule à mes yeux retenir une
valeur intellectuelle ou une puissance émotionnelle.»

Il décide de vivre en artiste, vendant ses tirages. Il explique dans son journal ses immenses difficultés
à vivre de cette manière. Sa rigueur technique est aussi celle de son engagement.
Ses sujets de prédilection vont du portrait au nu mais aussi aux natures mortes d'objets usuels, aux
paysages et aux objets de nature.

232 OPENEYE N°30 - Février/Mars 2023


OPENEYE
Le regard d’aujourd’hui sur la photographie

Sa photographie la plus emblématique intitulée Poivron n°30 est


réalisée en 1930. Il réussit à allier lumière, forme et sensualité en
montrant un simple poivron qui devient sous son objectif un couple
éternel.

Ansel Adams dont la rigueur technique est exemplaire — il est


le créateur du Zone System qui permet d'obtenir des négatifs
absolument parfaits — se consacre essentiellement au paysage
et à la défense de la nature. Son livre, This is the American Earth,
est un hymne à la beauté des paysages américains.
C’est un écologiste avant la lettre !

Durant la même période, en Europe, des photographes ont les


mêmes aspirations. En Allemagne, Albert Renger-Patzsch (1897-
1966) publie en 1928 Die Welt ist shön (Le Monde est beau) ;
Edward Weston Poivron N°30 1930 « Laissons l’art aux artistes et essayons par les moyens de la
photographie de créer des images qui tiennent seulement par leur
qualité photographique » écrit-il.

Ansel Adams Half dome 1960 Renger-Patzsch 1925 - Tête de couleuvre

Février/Mars 2023 - N° 30 OPENEYE 233


OPENEYE
Le regard d’aujourd’hui sur la photographie

Karl Blossfeldt (1865-1932) publie la même année Urformen


der Kunst (Formes originelles de l’art) où des détails de végétaux
pris en gros plans deviennent des sculptures ou des bas-reliefs.
En Tchécoslovaquie, Joseph Sudek (1896-1976) photographie
Prague, sa ville natale, dans de superbes panoramiques et crée de
délicates natures mortes pleines de poésie qu’il compose chez lui.

Joseph Sudek

En France, Emmanuel Sougez (1989-1972) est dans la même


mouvance avec ses grandes natures mortes faites à la chambre
30x40cm et tirées par contact, ainsi que Maurice Tabard (1897-
1984).

Cette conception de la photographie a toujours ses adeptes et bien


des artistes contemporains peuvent s’en prévaloir. On peut y rattacher
Lucien Clergue (1934-2014) et ses nus somptueux, Jean Dieuzaide
(1921-2003) ou Denis Brihat (1928) pour la France.

Emmanuel Sougez. 1933

234 OPENEYE N°30 - Février/Mars 2023


OPENEYE
Le regard d’aujourd’hui sur la photographie

Minor White (1908-1976) et sa revue Aperture, Harry Callahan


(1912-1999), ou Paul Caponigro (1932) aux États-Unis et en
U.R.S.S. Alexander Rodtchenko (1891-1956).
Ce dernier illustre Maïakovski et photographie Moscou et son
architecture dans la mouvance du constructivisme russe.

Par ailleurs le monde artistique


s’approprie les images scientifiques
prises au microscope, les
cristallisations, les coupes minérales
et même les instantanés très rapides
réussis grâce au flash électronique
permettant le 1/100 000e de seconde.
Par exemple, la représentation d’une
balle de fusil coupant une carte à
jouer ou l’étrange déformation d’une
balle de golf sous l’impact d’un club
sont à rattacher au mouvement de
cette Nouvelle Objectivité.

C’est l’arrivée d’une photographie


plus conceptuelle et plasticienne qui
détrônera ce courant photographique,
bien qu’il ait encore beaucoup
The-Unmade-Bed-1957,Immogen Cunningham d’adeptes de par le monde.

Février/Mars 2023 - N° 30 OPENEYE 235


Témoignage OPENEYE
Le regard d’aujourd’hui sur la photographie

par Pierre EVRARD

Katia AR (ANEMICHE-RAFFARIN)
Alger sans filtre
Alger est ma ville natale. J’y ai vécu jusqu’à mes 12 ans et puis, je l’ai - presque - oubliée. Jusqu’à ce qu’elle se
rappelle à moi, 35 ans plus tard. Aujourd’hui, quand je cours à Alger, ce n’est jamais d’un pied léger car je n’y
fais pas de tourisme, j’y vais pour de tristes raisons familiales. Au delà du récit, un acte me sauve, c’est d’ailleurs
celui qui me porte : « photographier ». Ce qui n’est pas chose facile à Alger : prendre une photo, c’est s’approprier
son sujet. Alors, je discute, je demande gentiment. Cela donne des instantanés pris au smartphone, à la volée,
sans filtre, authentiques. Le reflet de ce que voit un algérois, une algéroise, quotidiennement. Ici, 12 photos, 12
fragments de cette ville qui n’existe plus, comme un reptile qui se ronge d’impatience jusqu’à ce que sa mue soit
faite, lesté définitivement de celle qu’on appelait Alger La Blanche.

Née dans les années 70, j’ai exercé plusieurs professions dont celle de journaliste. En 2007, je fais l’école des
Gobelins (prise de vue vidéo) en formation continue. Simultanément, j’ouvre mon coeur à la photo numérique.
Écrivaine, je me dope aux instantanés, aux collages, aux podcasts… Je me définis comme une auteure au cœur
solide car c’est la vie que je célèbre à chaque fois que j’imagine une histoire, qu’elle soit visuelle ou qu’elle prenne
forme sur un clavier.

ALGIERS unfiltered

Algiers is my home town. I lived there until I was 12 and then - almost - forgot about it for 35 years. Today, when I
have to rush back, it is never with a light heart because, unfortunately, I do not visit as a tourist. Rather I tend to return
for rather sad family reasons. Only one thing relieves the downcast circumstances and helps lifts my mood, and that
is photography - which is far from straightforward in Algiers as taking a photo is perceived as taking ownership of
the subject. So, my approach is to ask nicely for permission and engage a discussion. In this way, I have been able
to put together a series of snapshots taken with a smartphone. The images are taken spontaneously, unfiltered and
authentic – a reflection of what Algerians actually experience on an everyday basis. The series below presents 12
photos, 12 fragments of a city that in many ways no longer exists – like some reptile impatiently gnawing at itself
until its previous skin is finally shed; inexorably burdened by nostalgic memories of the elegant metropolis that used
to be known as Algiers ‘La Blanche’, the white pearl of the Mediterranean.
Born in the 1970s, I have worked in several professions, including journalism. In 2007, I took a further education
course in video shooting with the Gobelins visual arts school - and simultaneously embraced digital photography,
using snapshots, collages and podcasts in conjunction with my writing. I like to think of myself as a writer with a big
heart because I strive to celebrate life in every story I conceive, whether visually or simply in words on a keyboard.

Février/Mars 2023 - N° 30 OPENEYE 237


OPENEYE
Le regard d’aujourd’hui sur la photographie
Livres
par Philippe LITZLER

Voir la lumière - #100daysoflumière: Un challenge


Caro Cuinet WELLINGS

Un challenge photo est un défi à soi-même, une manière de se questionner,


de réviser des bases, de remettre en question des idées toutes faites, et
surtout de créer.
C'est également une manière de poser un autre regard sur la technique
et un formidable terrain de jeu pour rater plein de photos mais surtout
expérimenter et ainsi avancer.

Parce que la lumière est l'essence même de la photographie, Caro Cuinet


Wellings, photographe de famille lifestyle et formatrice, a décidé de partir
en quête de lumière, en 2016, en menant pendant 100 jours le challenge
#100daysoflumière initié sur Instagram.

Depuis, elle réexplore le thème chaque année. Avec ce guide proposant


pistes créatives, exercices à réaliser et indications techniques à assimiler,
elle invite les lecteurs - du photographe débutant au professionnel aguerri
- à se joindre à elle et à raviver leur créativité en s'appropriant le challenge.

Broché, 158 pages


Prix : 23 €
ISBN 9782212654196

250 OPENEYE N°30 - Février/Mars 2023


OPENEYE
Le regard d’aujourd’hui sur la photographie

Bons Baisers du Sud


Andres ROÉ

Roé est connu comme musicien. Ses mélodies ont parcouru la


planète, il a joué avec les plus grandes stars.

Comme d’autres immenses créateurs, il a le talent du partage


des sentiments, par les sons et les paroles et maintenant, par
l’image saisie. Son Sud n’est pas un sud d’opérette, mais un sud
qui bouge, transpire, danse, joue, s’engueule, s’émeut… une
évidence, un désir incompressible de le partager… comme des
baisers.

Année d’édition : 2022


Prix : 20,00 €

Février/Mars 2023 - N° 30 OPENEYE 251


OPENEYE
Le regard d’aujourd’hui sur la photographie

UN DEMI-SIÈCLE DANS L’HIMALAYA


Matthieu RICARD

La version collector de l’un des best-sellers du moine-


photographe Matthieu Ricard.

Pendant un demi-siècle, ce dernier a photographié les cérémonies, la vie et


l’intimité des monastères bouddhiques, tout comme la majesté des sommets
himalayens du Népal, l’immensité des hauts plateaux tibétains ou la nature
sauvage du royaume du Bhoutan. Il a partagé la vie des communautés
monastiques, des paysans et des nomades et s’est consacré à de nombreux
projets humanitaires.

Cette somme photographique de 350 images, accompagnée de textes dans


lesquels il retrace son parcours personnel, est un hommage éclatant à la sagesse,
la compassion et à l’Himalaya. Un témoignage qui est aussi l’œuvre d’une vie.

Format 24cm x 31cm


ISBN 1040111386
Illustration Photos couleur
Nombre de pages
Prix : 60 €

252 OPENEYE N°30 - Février/Mars 2023


OPENEYE
Le regard d’aujourd’hui sur la photographie

Green & Wild


Mathieu COURDESSES

Le photographe animalier Mathieu COURDESSES présente le résultat de


10 années d’expédition dans les jungles du monde. Ce livre vous transporte
dans les plus belles forêts tropicales de la planète pour y découvrir la faune
qui les habite. Croisez le regard d’un gorille et surprenez le vol majestueux
des aras au-dessus de l’Amazonie, comme si vous y étiez.

« Aussi magnifiques soient-ils, les animaux des forêts équatoriales sont en


danger. Braconnage, trafic, déforestation, les enjeux liés à leur sauvegarde
sont variés. Ce livre est ma vision d’un petit microcosme naturel à la fois
merveilleux, puissant mais pourtant si fragile. Certains des animaux
photographiés sont menacés d’extinction, ils sont les ambassadeurs d’un
monde qu’il faut à tout prix préserver, ces pages sont pour eux, et pour toutes
celles et ceux qui les protègent. »

Reliure : dos carré


155 pages
Dimensions 32x30
ISBN 978-2-492821-24-0
Prix : 42,50 €
Contact Presse : Syril Giorgioni – 06 74 55 35 49

Février/Mars 2023 - N° 30 OPENEYE 253


OPENEYE
Le regard d’aujourd’hui sur la photographie

Portraits croisés
Sacha Golberger

La série de photographies en couleur et en noir & blanc, Portraits Croisés, nous


offre une vision de la culture à la fois positive et réjouissante dans laquelle
se mêlent les grands classiques des siècles derniers (Molière, Victor Hugo,
Beethoven...) aux contemporains (Wonder Woman, Pac Man, Dallas...).
Portées par des artistes en tous genres (David Abiker, Irène Frain, Bartabas,
Joann Sfar et tant d'autres) et grâce au travail méticuleux de mise en scène
de Sacha GOLDBERGER et de son équipe, ces figures emblématiques du
monde de l'Art semblent avoir traversé les époques pour nous réconforter dans
l'idée d'une culture universelle qui se moque des lois et des frontières, mais
surtout dans l'espoir qu'elle demeure essentielle et qu'elle continue à donner
du sens.

À travers Portraits Croisés le photographe rend hommage à tout ce qui nous


fait vibrer : des Arts nobles à la Pop Culture en passant par le cinéma, les jeux
vidéo, la musique, la bande dessinée, etc.
.

ISBN 978-2-493152-06-0
Relié - Nombre de pages : 160
Dimension 21x27
Prix : 40€

Francois Berleand-Victor Hugo

254 OPENEYE N°30 - Février/Mars 2023


OPENEYE
Le regard d’aujourd’hui sur la photographie

Une histoire de la photographie à travers


les collections du Musée Nicéphore Niépce
Sylvain BESSON
Cet ouvrage parcourt l’histoire de la photographie, depuis
son invention en 1827 jusqu’à ses usages contemporains, à
travers les collections du musée Nicéphore Niépce, riches de
4 millions de photographies, 8000 appareils et 30000 revues
et livres techniques ou illustrés. Hors des sentiers battus, c’est
une " autre histoire " de la photographie que propose ici Sylvain
BESSON en s’attachant à la richesse du medium dans sa
diversité de techniques, de courants artistiques, de modes de
diffusion. Il répertorie les dimensions sociales, documentaires et
commerciales de la photographie depuis ses origines.

Nombre de page 360


Photos couleur
Format 21x28,
ISBN 2845979282
Prix 59 €

Février/Mars 2023 - N° 30 OPENEYE 255


OPENEYE
Le regard d’aujourd’hui sur la photographie

Ils brillaient de pétrole sous le soleil :


Les ouvriers de Fos-sur-Mer
Photographies de François LUCCHESI

Les photographies de François LUCCHESI témoignent avec sensibilité et


malice de son quotidien de travail et de celui de ses collègues, au Port pétrolier
de Fos-sur-Mer dans les Bouches-du-Rhône. Parmi les embruns et les vapeurs
de gaz, sous le mistral glacial ou la chaleur écrasante, François LUCCHESI
a su capter à hauteur d'hommes, jour et nuit, toute l'année, la vie des ouvriers
du pétrole. Souvent méconnu - alors que l'or noir est encore indispensable à
la vie du pays -, voire occulté en raison des maladies professionnelles qui les
déciment, leur travail est désormais reconnu grâce à ce livre inédit.

Seul un ouvrier du pétrole pouvait transmettre une mémoire toujours aussi


vivante.
.

Broché
Format : 15,5 x 24 cm - 174 pages
ISBN : 978-2-343-22826-6
Prix :25 €

256 OPENEYE N°30 - Février/Mars 2023


OPENEYE
Le regard d’aujourd’hui sur la photographie

ANIMA
Laurent GRASSO

Dans le sillage des travaux du philosophe Bruno Latour, la chaire de recherche «


Laudato Si’ - Pour une nouvelle exploration de la terre » organisée par le Collège
des Bernardins mène, depuis 2021 et jusqu'en 2023, une réflexion sur l’enjeu
crucial des mutations écologiques et sociales actuelles, en mobilisant les approches
scientifiques, spirituelles et artistiques. Dans le cadre de cette réflexion artistique,
l’artiste français Laurent GRASSO a été invité à concevoir un projet dans la nef
historique du Collège, en plein cœur du Ve arrondissement de Paris.

Avec pour inspiration le lieu mythique du mont Sainte-Odile où se mêlent plusieurs


systèmes de compréhension du monde – religieux, scientifique et parascientifique
–, l’artiste développe des créations vidéo, des peintures et des installations
lumineuses présentées ici à travers des œuvres anciennes et des créations
inédites, immortalisées par des photographies in situ réalisées spécialement pour
l'ouvrage.

Laurent GRASSO est un artiste contemporain français dont la pratique inclut


installation, vidéo, sculpture, peinture, photographie, etc.
Fasciné par la façon dont divers pouvoirs peuvent affecter la conscience humaine,
l'artiste tente de saisir, de révéler et de matérialiser l’invisible couvrant aussi bien
les peurs collectives que la politique.

Relié
Nombre de pages 181
Dimensions 19,5x26
ISBN 978-2_07-3005532-8
Prix : 35 €

Février/Mars 2023 - N° 30 OPENEYE 257


OPENEYE
Le regard d’aujourd’hui sur la photographie
Le carnet d'OPENEYE
par Philippe LITZLER

Kourtney ROY
et les disparitions de la « Highway 16 »

Allez vite à la galerie Les Filles du Calvaire (Paris), où l'artiste Kourtney ROY expose
encore jusqu’au 24 février 2023 un travail très personnel.

Le photographe reconnue pour la créativité de ses mondes fictionnels, aborde avec ce travail un sujet grave :
depuis plus de quarante ans, le long de la Highway 16, une route du nord de la Colombie Britannique, disparaissent
des femmes et jeunes filles pour la plupart originaires des Premières Nations.

D’octobre 2017 à septembre 2019, Roy se rend cinq fois dans la région et voyage de façon anonyme sur cette
portion de 720 km de long tristement appelée la Route des larmes.

L’exposition The Other End of the Rainbow présente un extrait de cette mise en récit par l’image d’un fait
divers qui s’enracine dans la violence, la misogynie et le racisme systémique. Ce projet hybride, artistique et
documentaire, est présenté dans son ensemble dans un livre publié chez André Frère.

258 OPENEYE N°30 - Février/Mars 2023


Blizzard 2018, Series The Other End of the Rainbow

First snowfall, 2017, Series The Other End of the Rainbow


Courtesy Galerie Les filles du calvaire, Paris
OPENEYE
Le regard d’aujourd’hui sur la photographie

La magie de la lumière - Exposition à Bâle


Peter MAIR & Bea HELLER
Les paysages et les voyages permettent de plonger dans des
mondes lointains au travers de la photographie. Cependant, un petit
quelque chose de magique peut tomber du ciel sur le bord de la
route. Et ce petit rien sera souvent le déclic pour un artiste.

Ainsi, les œuvres de cette exposition réalisées par le photographe à


partir de clichés « naturels » ont été tirées sur du papier à dessin, et
sur l’arrière-plan de l'image, la peintre a mis ses couleurs.
Les sujets apparaissent ainsi sous un nouveau jour tels des
photogrammes coloriés.

Cette coopération entre Peter MAIR (photographie) et Bea HELLER


(peinture) est présentée du 12 au 19 février 2023 à Bâle, Suisse
(Klybeckareal K-104).
.

260 OPENEYE N°30 - Février/Mars 2023


OPENEYE
Le regard d’aujourd’hui sur la photographie

La Fondation CARMIGNAC
présente 10 œuvres de sa collection dans l'exposition
« Esprit Pop, es-tu là ? »
Exposition aux Franciscaines de Deauville du 28 janvier au 25 juin 2023.
« Esprit Pop, es-tu là ? » est une exposition-expérience. Loin d’être ex-
haustive sur le mouvement pop et l’esthétique psychédélique, elle tire des
fils, suggère des associations, agite les idées dans un espace et une scé-
nographie, pleine de musique et d’images, ce qui permet de mieux appré-
hender les années soixante.

Illustration : Maurizio Cattelan, Untitled, 1998


Photographie 179,4 x 223,4 cm
Courtesy Maurizio Cattelan’s Archive

En un peu plus d’une cinquantaine de pièces (dont 10 œuvres de la


Collection Carmignac), - peintures (dont quelques chefs-d'œuvre du pop
art), films, chansons, affiches, architecture, BD, photographies, livres -,
l’exposition promet ainsi un voyage en couleurs dans le temps...

Ci-dessous Les Franciscaines de Deauville

Février/Mars 2023 - N° 30 OPENEYE 261


OPENEYE
Le regard d’aujourd’hui sur la photographie
À voir à Paris et en Île de France
par Sylvaine BAGLAN et Marcel BOI

Hélène DEGRANDPRÉ
« Habiter le paysage, une conversation
photographique en Flandre maritime »

Hélène DEGRANDPRÉ  s’est orientée vers la photographie documentaire


après avoir longtemps travaillé dans le milieu du spectacle vivant et du champ
social. Photographe indépendante, elle affectionne particulièrement le travail de
portrait, dans lequel elle propose à chacun de se raconter, de partager un peu
de son intériorité que ce soit dans un studio, lieu d’invention, ou bien dans son
environnement.

Le projet est né d’une histoire personnelle du paysage, La série Flandre 2019.


De petites maisons éparpillées dans la plaine flamande, l’histoire d’un rêve que j’ai
eu envie ensuite de confronter avec le réel. Depuis l’intimité de leurs maisons à
l’horizon des champs qui les entourent, quels regards les gens du territoire portent-
ils sur le paysage ?
Galerie Spéos
7 rue Jules Vallès Habiter le paysage est le carnet de bord de la résidence à Bourbourg d’Hélène
75011 PARIS DEGRANDPRÉ entre janvier et mai 2022, un travail photographique réalisé dans
la rencontre avec les habitants et les travailleurs de la terre du Dunkerquois autour
de leur récits et pratiques de l’environnement naturel.

Dans ces anciennes fermes parfois encore en activité, des personnes ont accepté
de raconter quelques fragments de vie, de partager leurs horizons. Le lien au
vivant s’est révélé en multiples facettes : les paysans et les citadins, le monde
agricole, son histoire, ses bonheurs et ses inquiétudes, le dérèglement climatique,
les générations à venir, et tous ces instants qui font la poésie du quotidien.

jusqu’au 17 mars 2023

262 OPENEYE N°30 - Février/Mars 2023


© Hélène Degrandpré – Habiter le paysage – 2022
OPENEYE
Le regard d’aujourd’hui sur la photographie

Paul STRAND
ou l'équilibre des forces

Paul STRAND (américain, né en 1890 à New York – mort en 1976 à Paris),


est l’un des photographes les plus célèbres de l’histoire de la photographie.
Alors que Strand est souvent célébré comme étant pionnier de la straight
photography (ou photographie directe), cette exposition revient également sur la
dimension profondément politique de son travail.
L'exposition présente près de 120 tirages issus des collections de la Fundación
MAPFRE à Madrid, le film "Manhatta" réalisé par Paul STRAND et Charles
SHEELER en 1921 ainsi que quelques tirages prêtés par le Centre Pompidou.

Paul STRAND est l’héritier de deux grandes traditions photographiques : une


tendance formaliste cherchant à démontrer que la photographie est un art et une
tendance sociale, l’envisageant comme un outil documentaire au service d’un
projet politique.
79 rue des Archives
L'exposition se propose de recontextualiser STRAND en rappelant l’importance
75003 PARIS
de son engagement politique sans pour autant minimiser son approche formaliste,
entre recherche formelle et implication sociale. Car si STRAND est souvent
présenté comme l’un des grands photographes du XXe siècle, c’est précisément
parce qu’il a su proposer une synthèse entre ces deux polarités.

Jusqu’au 23 avril 2023

264 OPENEYE N°30 - Février/Mars 2023


OPENEYE
Le regard d’aujourd’hui sur la photographie

Zanele MUHOLI
Rétrospective

Zanele MUHOLI est un·e photographe et activiste sud-africain·e de renommée


internationale, se définissant comme non-binaire. Son travail engagé documente
la vie de la communauté noire LGBTQIA+. Cette rétrospective, une première
en France, rassemble plus de 200 photographies, vidéos et installations créées
depuis le début des années 2000 ainsi que de nombreux documents d’archives.
Ses photographies encouragent le spectateur à interroger les idées reçues et
cherchent à créer un nouveau lexique d’images positives pour des communautés
5 rue de Fourcy mal et sous-représentées, en vue de promouvoir le respect mutuel et la tolérance.
75004 PARIS
L'exposition couvre toute l’étendue de la carrière de Zanele MUHOLIi à ce
jour, faisant ainsi honneur à l’un·e des artistes les plus salué·es aujourd’hui.
Son travail photographique est indissociable de son militantisme. Les photographies
de MUHOLI montrent la diversité et la singularité des membres de la communauté,
en mettant en avant leur courage et leur dignité face aux multiples discriminations.
Dans ses portraits individuels et collectifs, l’artiste cherche à rendre visible
des personnes queer et racisées, tout en questionnant les stéréotypes et les
représentations dominantes qui y sont associées.

Jusqu’au 21 mai 2023

266 OPENEYE N°30 - Février/Mars 2023


OPENEYE
Le regard d’aujourd’hui sur la photographie
À voir en province

Sacha GOLDBERGER
Portraits croisés

Portraits croisés, c’est l’idée folle d’une série unique de photos surgie de l’esprit
de Sacha GOLDBERGER, qui transforme des personnalités issues du cinéma,
de la chanson, du théâtre ou de la littérature, en des figures emblématiques de la
culture, réelles ou fictives, actuelles ou historiques.

Grâce au soutien de Cultura, Sacha GOLDBERGER a pu photographier une


galerie de portraits parfois émouvants, souvent drôles qui sont autant d’hommages
en images à la diversité artistique et à la mixité des cultures.

38 portraits exposés en plein air où  Mathieu Chedid se transforme en Charlot,


Guillaume Gallienne en Molière, Zaz en Marlène Dietrich, Kev Adams en Mona
Lisa, Caroline Vigneaux en Wonder Woman, Olivia Ruiz en Barbarella, Mathilda
May en Colette, Bartabas en Don Quichotte, Johan Sfarr en Barbe Bleue, Renaud
Capucon en Buster Keaton, Irène Frain en princesse Leia, Alexandre Jardin en
Dracula et bien d’autres offre un regard ludique mais réfléchi sur la culture d’hier
et d’aujourd’hui.
Portraits croisés
Il s’agit d’encourager chacun à se lancer avec plaisir dans l’expérience culturelle et
Promenade des anglais
artistique. Parce que la culture doit être vivante, jubilatoire et ouverte, cette série
06000 NICE
prône le décloisonnement des cultures et favorisent leur rencontre.

Ambassadeur pour la marque Leica, Sacha GOLDBERGER travaille actuellement


sur la série “What if Hitchcock had been a feminist” photographié en 2022.

La série questionne sur le rapport de chacun au féminisme a travers le prisme des


films d'Hitchcock.

du 22 février au 22 mars 2023

268 OPENEYE N°30 - Février/Mars 2023


Olivia Ruiz Barbarella Guillaume Gallienne Molière
OPENEYE
Le regard d’aujourd’hui sur la photographie

Gilles MASSOT
L’ESPACE ENTRE LES CHOSES

La Fondation MRO, au travers de l’exposition l’Espace entre les choses dédie une
rétrospective à Gilles MASSOT, photographe et théoricien de la photographie qui
depuis des décennies mène une réflexion sur le temps et l’espace en étudiant les
distances entre les choses.

L’exposition est avant tout une question sur les multiples connexions qui font le
travail pluridisciplinaire de Gilles MASSOT, réunissant les traces d’une grande
Fondation Manuel Rivera-Ortiz partie de sa vie d’artiste et d’historien voyageur. Les séquences de l’exposition font
18, rue de la Calade référence au processus qui sous-tend son travail ; un processus qui lui fait établir
13004 ARLES au fil des ans des liens entre des récits, des techniques, des occurrences et des
parties du monde.
du mardi au dimanche
de 11h à 18h
Il nous propose une réécriture de l’histoire de la photographie, en parcourant
les prémices d’un des premiers reporters photographe Jules ITIER, jusqu’aux
La vente des billets mystères des pyramides d’Égypte. L’ensemble confronte la mondialisation à la
cesse 30 mn avant la fermeture diversité et la multiplication des usages.
Vernissage
vendredi 3 mars à 19h

du 4 mars au 28 mai 2023

270 OPENEYE N°30 - Février/Mars 2023


© Gilles Massot, Singapore from BW to C, tirages argentiques colorés, 1985.

© Gilles Massot, Singapore from BW to C, tirages argentiques colorés, 1985.


OPENEYE
Le regard d’aujourd’hui sur la photographie

Michael KENNA
Deux expos autour de la mémoire

Le Mémorial du Camp de Rivesaltes et le Musée départemental de la Résistance


& de la Déportation de Haute-Garonne présentent deux expositions autour du
photographe britannique Michael KENNA.

Une mémoire photographique


La Lumière de l’ombre, photographies des camps nazis
Une mémoire photographique
Avenue Christian Bourquin Par la force et la sensibilité de son travail photographique, Michael KENNA a
66600 SALSES-LE-CHÂTEAU construit, en photographiant entre 1986 et 1999 les lieux de déportation et du
système concentrationnaire nazi, par ce projet de plus d’une décennie, un objet de
mémoire d’une grande puissance.
(À 10 minutes de Perpignan)
Maître du paysage en noir et blanc, l’artiste pose un regard unique sur les sites qu’il
photographie, cernant l’immensité des camps dans la délicatesse des petits formats
de ses images. À l’ère du numérique, son travail patient de photographie gélatino-
argentique, caractérisé par un traitement unique de la lumière, des expositions
longues, à l’aube ou au crépuscule, devient une authentique empreinte du monde
et vient ajouter aux archives historiques la poésie et la puissance sensible des
archives d’auteurs.
 
À ce projet de plus d’une décennie, conservé au Musée de la Résistance Nationale,
Michael KENNA a ajouté des œuvres exceptionnelles réalisées sur le site de
La Lumière de l’ombre, l’ancien camp de Rivesaltes lors d’une résidence artistique en mars 2022.
photographies des camps nazis
Musée de la Résistance & “Il se trouve que j’ai photographié ces camps pendant une douzaine d’années. Il
de la Déportation fallait que je les photographie [...], pour garder cette mémoire vivante, pour conserver
une trace. Mon œuvre porte sur la mémoire.” (Michael KENNA, décembre 2019)
de Haute-Garonne
52, allée des Demoiselles
31400 TOULOUSE Mémoire photographique
du 10 mars au 1er octobre 2023
La Lumière de l’ombre, photographies des camps nazis
du 9 mars au 27 mai 2023

272 OPENEYE N°30 - Février/Mars 2023


MICHAEL
KENNA
Une mémoire
photographique
10 mars > 1er oct. 23

01/23-13638
Photo ©Michael Kenna • Graphisme : Clarisse de Jaham •

© Michael Kenna – Ministère de la Culture – MAP, dist. RMN-GP • Graphisme : Olivier Umecker
du 9 mars 27 mai 2023
du 10 mars 1er octobre 2023 Musée Départemental
Mémorial du camp de Rivesaltes de la Résistance & de la Déportation
Avenue Christian Bourquin – 66600 Salses-le-Château 52 Allées des Demoiselles – 31400 Toulouse
www.memorialcamprivesaltes.eu www.musee-resistance.com

Avenue Christian Bourquin • 66600 Salses-le-Château


www.memorialcamprivesaltes.eu

Exposition en partenariat avec le Musée


de la Résistance Nationale et le Musée Départemental
de la Résistance et de la Déportation de Haute Garonne

© XXXXX
OPENEYE
Le regard d’aujourd’hui sur la photographie
À voir à l'étanger

NIKOS ALIAGAS
« Regards Vénitiens »
La Fondazione dell'Albero d'Oro accueillera l'exposition de Nikos Aliagas.
L'exposition "Regards Vénitiens" sera le résultat d’une nouvelle résidence
artistique qui a eu lieu entre juillet et décembre 2022.

Nikos ALIAGAS se rend plusieurs fois Venise pour rencontrer ceux qu’on ne voit
pas dans la ville : les habitants, ceux qui évitent les regards des objectifs des
Fondazione touristes. Ce projet s’est enraciné dans l’esprit de l'artiste lorsque, à l'invitation
dell’Albero d’Oro de la Fondazione Albero d'Oro, il a visité la lagune pour la première fois et a eu
San Polo, 2033 l'occasion d'observer sa réalité énigmatique et fascinante. À ce moment naît l’idée
VENISE de regarder réellement à l'intérieur de Venise, en explorant l'univers qui gravite
autour du Palazzo Vendramin Grimani.

L'objectif de Nikos ALIAGAS part à la recherche de l'extraordinaire quotidien du


campo San Polo, du sestiere qui l’entoure et des aperçues vénitiens, laissant aux
images le soin de raconter les histoires de ceux qui vivent et font vivre ces lieux.
Design Sebastiano Girardi Studio

Les images de Nikos ALIAGAS sont en noir et blanc : l’artiste explore les
contrastes, les contrejours, les mouvements dans des cadres où la ligne et la
courbe s’épousent que ce soit sur un visage ou au coin d’une rue.

NIKOS Derrière son objectif, il ne capture pas des visages comme un collectionneur, il essaie
ALIAGAS de capter l’essence de chaque personne, le mystère de notre existence éphémère.
REGARDS Les traces du temps sont en effet l’un des thèmes de prédilection de l’artiste Nikos
VÉNITIENS ALIAGAS, comme une recherche d’un instant suspendu dans l’implacable finitude
d’une existence, ses expositions en témoignent avec tendresse et nostalgie.
Palazzo Vendramin Grimani
4.02 → 2.04.2023

« Peut-on encore improviser à Venise ? Dans une ville photographiée des millions
Fondazione 5 min. Rialto — 1 min. Campo San Polo
dell’Albero d’Oro San Silvestro Stop
Palazzo Vendramin Grimani
San Polo 2033 Info e prenotazioni / Info and reservations
Venezia +39 041 87 27 750
info@fondazionealberodoro.org
Orari / Opening Times

des fois par des yeux de passage ? Oui » répond l’artiste « si on part du principe
fondazionaealberodoro
Lun → Dom
10 → 13 / 14 → 18 fondazionealberodoro.org

que c’est Venise qui nous regarde et qui nous observe. »

jusqu’au 3 avril 2023

274 OPENEYE N°30 - Février/Mars 2023


© 17-Venise - Nikos Aliagas

© 3-Venise - Nikos Aliagas


Vous remercie et vous donne rendez-vous pour le numéro 31.
Le magazine de Avril, Mai 2023,
paraîtra aux alentours du 15 avril 2023.
Vous y ferez d’autres découvertes.
Si vous n’êtes pas encore abonné, n’hésitez pas c’est gratuit !

Pour nous contacter, c’est simple cliquez sur le lien ci-après :

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