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Note d’information sur le projet de

tunnel entre l’Europe et l’Afrique


à travers le Détroit de Gibraltar

Introduction

Objet du rapport
Le présent rapport traite succinctement du cadre institutionnel dans lequel se déroulent
les études, des principaux résultats des investigations du milieu physique de la zone
d’élection du Projet, des solutions de base étudiées en donnant des indications précises
sur la variante la plus avantageuse du point de vue technique, financier, fonctionnel et de
protection de l’environnement, en l’occurrence le tunnel foré ferroviaire, de quelques
données sur les prévisions du trafic à travers le futur ouvrage, des aspects socio-
économique et juridique ainsi que d’une première ébauche du montage institutionnel et
financier pour sa concrétisation. Il présente également les principales activités
programmées en 2006 pour finaliser les études du projet.

Cadre institutionnel

Les études de la liaison à travers le Détroit de Gibraltar ont été lancées conjointement par
le Maroc et l’Espagne sur la base d’un accord de coopération bilatérale, signé le 24
octobre 1980. Un accord additionnel actualisant le premier a été signé le 29 juillet 1989.
Ce dernier a été établi à la suite des résultats encourageants enregistrés dans le
développement des études et des travaux de reconnaissance à l’occasion du dixième
anniversaire du lancement des études du Projet. Si le premier accord visait
essentiellement l'étude de faisabilité du Projet, le second accord a ouvert la voie aux
deux pays en vue d’établir une coopération plus élargie pour la construction de l’ouvrage
et de ce fait, a donné un nouvel élan au développement des études par la réalisation
notamment, d’importantes investigations géologiques et géotechniques par des ouvrages
expérimentaux en vraie grandeur et par des forages profonds en mer.

Les accords de coopération ont institué un Comité Mixte intergouvernemental et deux


Sociétés d'études, SNED1 au Maroc et SECEG1 en Espagne. Le Comité Mixte est
l’organe de direction et de supervision des études. Il approuve le programme de travail et
les résultats qui en découlent et décide des étapes à franchir. Les Sociétés d’Etat
constituent quant à elles, les organes d’élaboration des programmes des études et de
leur mise en œuvre de manière conjointe.

Enfin, l'ampleur des investigations et des recherches à réaliser et leur diversité ont amené les
deux sociétés, dès le lancement des études, à y associer les institutions scientifiques et
techniques nationales et internationales. La mise à contribution de ces organismes a été l'un des
gages du bon déroulement des études du projet ; ce qui a contribué à son tour, au
développement de la recherche scientifique et technique et a ouvert de nouvelles perspectives de
coopération dans ce domaine. L'esprit de coopération qui a toujours prévalu entre les partenaires
a permis de parvenir à des conclusions communes et a présidé à l'élaboration de toutes les
études, conformément aux plans de travail approuvés par le Comité Mixte.

1 "Société Nationale d'Etudes du Détroit de Gibraltar" (SNED), Rabat, et "Sociedad de Estudios para la Comunicacion fija a través del Estrecho
de Gibraltar, S.A." (SECEG), Madrid.
Résumé du processus d’études

Dans un premier temps, le processus des études a principalement concerné l’acquisition


des données de base, puis le développement d’études dans les cinq domaines d’activités
suivants : milieu physique, études techniques, milieu socio-économique, études juridiques
et institutionnelles puis relations externes. Des solutions techniques de traversée, dont
quelques unes sont inédites, ont été proposées, développées par le lancement d’une
série d’investigations et d’études, puis comparées entre elles sur la base d’une analyse
multicritère. Après cette étape, les études ont abouti en 1996, à la formulation technico-
économique de l'alternative de base du Projet, consistant en un schéma de tunnel
ferroviaire foré sous le fond du Détroit, fonctionnellement similaire à celui du Tunnel sous
la Manche. Cette formulation présente des résultats encourageants concernant la
faisabilité du Projet. A noter l’homologie géologique parfaite des terrains flyschs qui
constituent les rives du Détroit ainsi que le substratum de la zone immergée.

La formulation de l’alternative de base réalisée en 1996 et définie à partir du niveau de


connaissances disponible à l'époque, comportait des réserves concernant notamment la
confirmation de certaines hypothèses géologiques sous-marines, qui ne peuvent être
levées que par l'utilisation de méthodes onéreuses de prospection par forages profonds
en mer, dont la réalisation devrait être en tous cas fondée sur des perspectives
raisonnables de faisabilité générale.

De ce fait, le processus d'étude a été orienté à partir de 1996, dans le but de lever les
incertitudes géologiques existantes et d’actualiser, en conséquence, la formulation
technique et économique du Projet, en tenant compte particulièrement de la prévision des
trafics utilisateurs et du coût de construction.

Après une première tentative peu concluante, le processus d’investigation en mer par des
forages profonds, a été poursuivi par le lancement en 1997, de la campagne dénommée
Bucentaur 97. Celle-ci a permis de réaliser des performances exceptionnelles en la
matière, tout en révélant l’existence, au centre du Seuil du Détroit, de formations
géologiques quaternaires relativement perméables qui seraient adverses à la construction
de la solution tunnel et dont il faudrait définir les contours et les épaisseurs.

Une deuxième campagne de forages profonds, Norskald 98, puis une troisième
campagne Kingfisher 05, ont été réalisées, respectivement, en 1998-99 et en 2005. Les
résultats obtenus de ces campagnes ont confirmé des perspectives favorables quant à la
possibilité d'adapter l'alternative de base aux nouvelles conditions géologiques, par un
abaissement raisonnable du tracé initialement prévu, et ce, afin d’éviter la traversée par le
tunnel, des sables bioclastiques supérieurs, potentiellement perméables. Les contours de
ces sables seraient limités à 120 m de profondeur sous le sol sous-marin ou à 400 m
sous le niveau de la mer (les derniers forages effectués n’ont plus rencontré de sables
bioclastiques au-delà de cette limite).

La finalisation à l’horizon 2006-2007 de l'étape en cours, sera clôturée par une étude
d’évaluation globale intégrant les résultats des études actuellement en cours, notamment
la reformulation du Projet de tunnel à travers l’actualisation de l’aspect technique de
l’ouvrage, les études de prévisions de trafic, des impacts socio-économiques et
environnementaux de l’ouvrage et des aspects juridiques, en vue de lancer le processus
de réalisation du tronçon sous marin de la galerie de reconnaissance à l’horizon 2008,
conformément aux orientations des deux gouvernements marocain et espagnol.

2
Les résultats des études du projet et les perspectives de son développement ont été
présentés, à Tanger le 19 janvier 2005, à Leurs Majesté les Rois Mohammed VI du
Maroc et Juan Carlos 1er d’Espagne qui ont manifesté un intérêt particulier à sa
réalisation, donnant une grande dynamique aux études.

Solutions envisagées et choix de l'alternative de base

Configuration du Détroit de Gibraltar

La traversée du Détroit par un lien fixe -routier ou ferroviaire- présente des problèmes
exceptionnels d'ingénierie, parfois sans précédents. Ces problèmes dérivent en premier
lieu, des dimensions relativement importantes à franchir, soit en termes de distance entre
les rives, soit en termes de profondeur d'eau. En deuxième lieu, ces problèmes découlent
de l'adversité du milieu physique, notamment ses aspects géologique et océanologique,
outre les difficultés inusitées qu'ils présentent à la prospection en mer.

La configuration du Détroit est bien connue. Elle présente deux corridors


caractéristiques d'une grande importance pour le Projet :

a. Le "Caňon du Détroit", entre Punta


Cirès et Punta Canales, de 14 km de
longueur entre les deux rives et de
l’ordre de 900 m de profondeur,
constitue la route la plus courte entre
l'Afrique et l'Europe ;
Canon du
b. Le " Seuil du Détroit " entre Punta Seuil du Détroit
Détroit
Malabata et Punta Paloma, de 28 km
de longueur entre les rives et de l’ordre
de 300 m de profondeur, est la route
la moins profonde entre les deux
continents.

Dans l'historique du Projet, tous les tracés


des solutions de traversée proposées ont
suivi l'un ou l'autre de ces deux corridors.

Types d'ouvrages envisagés

La configuration du Détroit permet Seuil du Détroit


d’adapter un grand nombre de types
d'ouvrages de traversée, depuis les plus
"classiques", comme le pont sur appuis
fixes et le tunnel foré, jusqu'aux moins
conventionnels, comme les ponts sur
appuis flottants et les tubes immergés.

Plusieurs types d’ouvrage non


conventionnels ont été évalués puis Canon du Détroit
écartés du processus d'étude. Celui-ci
s'est ensuite focalisé sur les deux schémas les plus classiques, lesquels ont été
développés au niveau dit d'Avant - Projet Primaire. C'est ainsi que les études se sont

3
orientées vers ce qui a été appelé la solution "pont" et la solution "tunnel" et ont conduit,
sur la base d’une analyse de type multicritère, au choix de la solution de base, le tunnel
foré ferroviaire.

La solution "pont"
S'inspirant de la technologie liée à l'ingénierie des grandes plates-formes pétrolières en
béton (GBC) et à l'ingénierie des ponts suspendus de grande portée utilisant des
matériaux conventionnels, la solution "pont" a pour tracé le Seuil du Détroit. Elle a été
étudiée selon deux variantes : « routière » et « routière+ferroviaire ». D'une longueur
totale de 28 km, elle comporte deux parties bien distinctes: (1) le pont principal de 14 km
de long franchissant la partie profonde du Seuil; et (2) les deux viaducs d'accès off-shore
de 8 et 6 km, qui relient le pont principal aux rives respectives Sud et Nord.

La structure principale est un pont suspendu constitué par trois travées centrales de
3.550m de portée chacune et par deux travées latérales de 1.500m. La superstructure du
pont (pylônes, tablier, système de suspension) est érigée sur une infrastructure off-shore
constituée par deux massifs d'ancrage immergés et par quatre piles gravitaires auto-
résistantes au choc des bateaux, fondées à une profondeur maximale d'environ 3OOm.
La hauteur totale à ce niveau, de l'ensemble pile-pylône, serait d'environ 800m.

La solution "pont"2., qui avait suscité beaucoup d’intérêt technique et dont les études
d’Avant-Projet Primaire en avait établi la faisabilité technique à titre préliminaire, a
toutefois été écartée du processus d'études en 1996, lorsque le Comité Mixte, au vu de la
comparaison avec la solution "tunnel", a décidé de retenir cette dernière pour la poursuite
des études, en raison, principalement, des facteurs suivants: (1) le coût de construction
et les incertitudes technologiques à moyen terme; (2) l'interférence avec la navigation
maritime par le Détroit et ses conséquences sur l’environnement, et (3) le fait que la
solution "pont" ne puisse pas s’adapter à l'évolution future des trafics par un programme
de réalisation par phases.
La solution '"tunnel"
La solution "tunnel", actuellement retenue comme l’alternative de base du Projet, consiste
en un ouvrage à trois tubes, forés sous le Seuil du Détroit. Elle est conçue pour la
connexion du trafic ferroviaire ordinaire (passagers et marchandises) entre les réseaux
ferroviaires marocain et espagnol, ainsi que pour le transbordement sur des rames-
navettes, de véhicules routiers (légers, poids lourds) circulant entre deux gares
terminales, l'une au Maroc et l'autre en Espagne. Cette solution comporte donc un
système de transport similaire à celui du Tunnel sous la Manche, qui représente
2
Il est rappelé qu'une alternative de la solution pont connue parfois sous le nom de "Super pont du Détroit", a également été étudiée, bien que de
façon moins approfondie. Il s'agit de la variante, de typologie similaire, implantée sur le Cañon du Détroit, qui serait entièrement franchi par une
structure à deux travées centrales de 5.000 m de portée, flanquées de deux travées latérales de 2.000 m. Un tel schéma, envisageable grâce à
l'existence du Mont Hercule situé à – 470 m au niveau du tracé sous-marin, est souvent reconnu comme une alternative de lien fixe pour le grand
futur et, en tous cas, comme une référence pour la recherche technologique actuelle en matière de ponts à grande portée.

4
effectivement, un antécédent déterminant pour le projet sous le Détroit de Gibraltar.
Une formulation technico-économique de la solution "tunnel", développée au niveau
d'Avant-Projet Primaire, a été établie en 1996. Fondée sur le niveau des connaissances
disponibles à l'époque, notamment en ce qui concerne les conditions géologico-
géotechniques et les prévisions du trafic utilisateur, cette formulation indiquait des
conclusions favorables concernant la faisabilité technique et économico-financière.
Toutefois, des réserves devaient être levés. Elles sont inhérentes au caractère
préliminaire de l’étude, notamment la vérification de certaines hypothèses géologiques et,
naturellement, de la consolidation des prévisions des trafics, et font aujourd’hui l’objet
d’une actualisation. Les caractéristiques principales du tunnel foré ferroviaire qui sont
données dans la figure en annexe, se résument comme suit :

a. Longueur. Distance entre gares terminales : 42 km. Longueur totale en tunnel : 37,7
km. Longueur en tunnel sous-marin : 27,7 km.

b. Profil en long. Le profil proposé initialement (Tracé B0) passait à -400m sous le niveau
de la mer au point le plus profond et disposait d’une couverture minimale de terrain de
100m supposée au départ être des flyschs en place. Ce tracé a été abandonné suite
aux résultats de la première campagne de forages en mer (Bucentaur 97) qui avait
révélé l’existence de sables bioclastiques sur les premiers 100m de profondeur et des
brèches argileuses3 au-delà, jusqu’à 120m de profondeur.

Deux variantes de tracé, appelées respectivement B1 et B2 (visant à abaisser le profil en


long au point le plus profond, respectivement de 100m et 200m tout en maintenant
l’emplacement des têtes du tunnel mais en augmentant les pentes), ont été alors
envisagées et étudiées. Ces nouveaux profils avaient pour objectif d’éviter la traversée
des brèches et surtout des sables. Néanmoins, la deuxième campagne de forages en
mer (Norskald 98-99) puis la troisième (Kingfisher 05) ont montré l’existence de brèches
sur au moins 325m de profondeur, ce qui a suscité une nouvelle proposition, le profil P
actuellement en étude, passant à travers les brèches et évitant les sables bioclastiques.

Profil proposé Variantes étudiées4


Profil P en étude
initialement, provisoirement
actuellement
tracé B0 tracés Bl et B2
Côte du point le plus profond en m - 400 -500 -600 -400 <PF< -500
Profondeur d'eau maximale, en m 300 300 300 300
Couverture de terrain minimale, en m 100 200 300 120 <CT< 200
Pente maximale en % pour mille 25 ~30 ~35 25 <p< 30

c. Coupe en travers. Celle-ci comporte deux galeries ferroviaires circulaires à voie


unique (diamètre 7,50 m) et une galerie de service/sécurité pressurisée (diamètre 4,80

3
Ces brèches, rencontrées uniquement au niveau des paléocanaux, consistent en une formation géologique récente composée d’éléments
provenant exclusivement des flyschs et resédimentés à la suite principalement d’effondrements des pentes continentales. Elles ont une
composante argileuse prédominante leur procurant ainsi une étanchéité équivalente à meilleure que celle des flyschs mais avec des propriétés
mécaniques qui peuvent être moindres.
4 Ces variantes Bl et B2 découlent de l’abaissement respectif de 100m et de 200m du tracé de base BO, tout en conservant les mêmes
emplacements des têtes de tunnel, et par conséquent, en conservant pratiquement la même longueur de l'ouvrage. A signaler à cet égard que,
selon les études disponibles, les pentes impliquées -sans doute exceptionnelles - resteraient toutefois compatibles avec la fonction ferroviaire et
les paramètres d'exploitation prévus dans l'alternative de base, à condition d’augmenter la traction par l’ajout d’une ou de deux locomotives
supplémentaires aux trains de marchandises et aux trains navettes.

5
m) centrée entre les deux dernières et communiquant avec elles par des passages
transversaux à intervalles réguliers (tous les 340m).

d. Connexions aux réseaux. Les conditions de connexion du lien fixe aux réseaux Nord
et Sud, présentent une asymétrie. Du côté Sud, l'accès au tunnel se trouve aux
environs mêmes du nœud routier et ferroviaire de premier ordre qu'est Tanger, alors
que l'accès du côté Nord se trouve relativement éloigné de tout nœud important, ce
qui nécessite la construction d’ouvrages de raccordement, en particulier pour ce qui
est de la connexion ferroviaire comme indiqué dans le schéma « ouvrage de
connexion ».

. Les phases successives de réalisation du tunnel :

Elles sont conçues afin de rendre plus attractif sa concession au secteur privé:

a. Phase 0 (Galerie de reconnaissance). : Construction du tronçon de la partie sous-


marine de la galerie de service en tant que galerie pilote de reconnaissance. Une
phase pratiquement indispensable du point de vue technique.
b. Phase 1 (Phase monotube) : Réalisation du premier tunnel ferroviaire avec ses
terminaux et achèvement des tronçons terrestres de la galerie de service. C'est la
phase de mise en service.
c. Phase 2 (Phase bitube) : Réalisation à long terme, du second tunnel ferroviaire et
élargissement des terminaux, en fonction de l’évolution du trafic.

A signaler que le phasage prévu de réalisation de l’ouvrage, constitue une des plus
importantes spécificités qui ont conduit le Comité Mixte à la sélection de l'alternative de
base. En effet, celle-ci s'adapte aux niveaux d'incertitude inhérents au projet concernant,
d'une part, les aléas géologico-géotechniques - par la réalisation préalable d'une galerie
pilote sous-marine - et, d'autre part, concernant les aléas relatifs aux prévisions de trafic à
long terme, par le décalage, en principe d’une trentaine d’années ou plus, de la
réalisation du second tunnel ferroviaire. Ce phasage peut, enfin, réduire
considérablement les risques associés au projet et faciliter de ce fait, la participation
éventuelle du secteur privé.

Les principales caractéristiques fonctionnelles du tunnel, telles que définies en 1996,


sont:

a. Vitesse maximale en tunnel. 120 km/h pour les navettes et les trains ordinaires, avec
la possibilité de service grande vitesse pour les trains de passagers;
b. Temps de passage. Trajet entre les gares terminales : 30 mn. Trajet en tunnel :
25mn. Attente maximale : 1h 30mn (en phase monotube) ;
c. Trains-navettes. En principe, deux types de rames sont prévus : le type "tourisme"
pour 130 automobiles et le type "poids lourds" pour 18 camions. Les occupants de
tous les véhicules, passagers et conducteurs, voyageraient, séparés de leurs
véhicules, dans des wagons d'accompagnement ;
d. Capacité annuelle (en phase monotube). Voitures de tourisme: 1.580.000 ; Véhicules
poids lourds: 460.000 ; Passagers automobilistes: 4,7 millions ; Passagers
ferroviaires: 11,2 millions ;
e. Capacité annuelle (en phase bitube). Triple ou plus de la capacité précédente.

6
Aspect géologique du Projet

Le Détroit de Gibraltar présente des spécificités géologiques et océanographiques dont


les investigations ont suscité un intérêt important auprès de la communauté scientifique
internationale. Des efforts de prospection importants ont été déployés, spécialement dans
le domaine de la géologie appliquée à l’ingénierie des tunnels.

Le milieu géologique du Projet comprend deux systèmes de formations qui ont orienté les
investigations. Il s’agit de :
• l’édifice des flyschs qui constitue le substratum de la zone et qui a connu, au cours
du Pliocène inférieur, l’ouverture du Détroit ; et
• les formations post-orogéniques déposées sur les flyschs

a- Les flyschs du Détroit de Gibraltar

Les flyschs du Détroit consistent en un empilement tectonique d’ensembles dits « unités


de flyschs » d’épaisseurs plurikilométriques qui affleurent sur les deux rives. Les
fondements de la géologie de la zone se basent sur :
• l’homologie géologique (lithologie et tectonique) entre les deux rives du Détroit, avec
une correspondance parfaite des unités de flyschs qui y affleurent ;
• les sondages pétroliers profonds réalisés en rive Nord, qui ont permis de confirmer
l’importante épaisseur de cet édifice ; et
• la continuité de l’homologie géologique en zone immergée, qui est bien établie par la
compatibilité avec les modèles de tectonique régionale, unanimement admis et
surtout par les investigations réalisées en mer dans le cadre des études du Projet.

Les principales unités de flysch du Détroit sont représentées dans la figure jointe qui
indique également les âges géologiques, l’épaisseur des sédiments et la lithologie. Elles
portent les noms des localités où elles sont les mieux représentées sur chacune des deux
rives. On distingue ainsi les unités de:
• Beni Ider / Algeciras (et sa diverticulation Tisirène/ Nogales)
• Numidien/Aljibe (et sa diverticulation Melloussa/Facinas)
• Talaa Lkaraa/Bolonia
• Tanger/Almarchal

Les flyschs du Détroit, tectoniquement en position allochtone, sont d’âge Crétacé à


Miocène inférieur. Ils se sont déposés dans un sillon situé beaucoup plus à l’Est par
rapport à leur position actuelle, puis poussés et éjectés vers l’Ouest lors des phases
paroxysmales de l’orogenèse alpine en se structurant en nappes de charriage empilées
sur plus de 4 km d’épaisseur. Cet édifice a été par la suite affecté par de nouvelles
phases tectoniques postérieures mineures qui lui donnent sa complexité structurale
actuelle.

Du point de vue lithologique, ces unités sont constituées par des matériaux
essentiellement argileux (pélites argileuses, argiles marneuses), parfois massives (unité
de Tanger/Almarchal et certaines parties des autres unités) et souvent en alternance
avec des bancs de grès, ou de calcarénies, d’épaisseurs centimétriques à métriques -
rarement de plus de 10m-.

9
LES FLYSCHS DU DETROIT DE GIBRALTAR
Les flyschs du Détroit sont constitués d’alternances rythmiques de bancs rocheux (grès ou
calcarénites) et d’interbancs argileux à marneux avec des épaisseurs variants de quelques cm à une COLONNES LITHOSTRATIGRAPHIQUES
DES UNITES DE FLYSCHS
dizaine de m. Leurs principales caractéristiques sont : BENI IDER
NUMIDIEN ALGECIRAS
• Age crétacé inférieur (Néocomien) à Miocène (Burdigalien) ; ALGIBE

100

100
• Structure en nappes de charriage superposées sur de grandes épaisseurs avec des structures BURDIGALIEN

internes très complexes. TALA-LAKRA


BOLONIA
• Subdivision en quatre unités tectoniques qui affleurent simultanément sur les deux rives avec les
appellations respectives suivantes :
AQUITANIEN
o Beni Ider / Algeciras (avec sa diverticulation Tisirène / Nogales)

1000

1000
600
o Numidien / Aljibe (avec sa diverticulation Melloussa / Facinas)
o Talaa Lakraa / Bolonia.
o Tanger / Almarchal.
• Géotechniquement, les flyschs sont classés en OLIGOCENE

100

100 100
deux grands groupes selon l’importance de
EOCENE

80
leurs fractions argileuses.
o Les flyschs armés en barres, souvent de

150

300-
grès, comprenant les termes d’âge Oligo- TANGER
ALMARCHAL
Miocène de toutes les unités, ainsi que le CRETACE
SUPERIEUR
MELLOUSSA
FACINAS
flysch crétacé inférieur de Tisirène /
Nogales. TISIRENE

400
NOGALES
o Les flyschs peu armés avec des argiles

200
souvent microfissurées et parfois
gonflantes. Ils sont du type Tanger/
Almarchal et comprennent également les
séries d’âge Crétacé supérieur à Eocène ALBIEN

de toutes les unités ainsi que le flysch

>400
>400
albo-aptien de l’unité de Melloussa/ APTIEN
Facinas.
• En raison de la prédominance de leurs fractions argileuses, tous les flyschs sont très NEOCOMIE

50 ?
N
imperméables même lorsqu’ils sont tectonisés.
• Les flyschs renferment du gaz, mais en faibles quantités et avec des débits faibles en raison de Grès Grès Pélites et
l’omniprésence des argiles siliceux calcareux Conglomérats Calcarénite Marnes
Les caractéristiques géotechniques de ces flyschs peuvent être résumées comme suit :
• En raison de la prédominance générale de la fraction argileuse, toutes les unités de
flyschs, même lorsqu’elles sont très tectonisées, sont très imperméables. Ce qui est
largement confirmé par les essais hydrogéologiques réalisés dans les sondages à
terre et par les reconnaissances réalisées dans les ouvrages expérimentaux.
• Les flyschs du Détroit, traversés par la Galerie expérimentale de Tarifa, sont
caractérisés par une gamme de valeurs du Rock Mass Raiting (RMR) compris entre
60 pour les flyschs armés de l’unité d’Algeciras et 25 pour les flyschs faibles de type
Almarchal.
• L’importante variation des indices de qualité des flyschs dépend essentiellement de
l’épaisseur et de la distribution des intercalations compétentes –généralement
gréseuses - dans la masse argileuse dominante.
• Les flyschs faibles sont des argilites massives – ou peu armées - très tectonisées,
microfissurées, parfois gonflantes et de plasticité moyenne à élevée. Les essais
géotechniques classiques de laboratoire réalisés sur ces matériaux ont d’ailleurs
tendance à en sous-estimer le comportement géotechnique réel, en raison, entre
autres, des difficultés à en prélever des échantillons représentatifs.
• Comme constaté dans plusieurs sondages et dans les ouvrages expérimentaux,
toutes les unités de flysch pourraient renfermer du gaz. L’imperméabilité de ces
matériaux fait cependant que son drainage est lent et les débits constatés sont très
faibles.

Les flyschs faibles de type Tanger/Almarchal (et en général tous ceux d’âge Crétacé) qui
conditionnent le design structural et le processus de construction du tunnel (du moins
pour ce qui concerne la galerie de reconnaissance) seront traversés par le tracé sur des
distances significatives. Leur distribution le long de ce tracé reste cependant imprévisible.

b- Les formations post-flyschs

Les formations post-orogéniques de la zone du Projet ont fait l’objet d’intenses


investigations durant le processus d’étude en cours. Ces formations sont en effet
potentiellement adverses par leur perméabilité et pourraient affecter sérieusement
l’aspect technique de l’ouvrage voir même en conditionner la faisabilité.

Ces dépôts sont d’âge Pliocène à Quaternaire puisqu’au Miocène supérieur, la zone du
Projet se trouvait émergée et la communication de l’Atlantique avec la Méditerranée se
faisait à travers les détroits bétique et rifain.

A proximité des flyschs affleurant directement dans le fond marin (plateformes


continentales), les formations post-flyschs qui sont en général des dépôts de matériaux
granulaires, recouvrent sur de faibles épaisseurs ces flyschs, sans atteindre les
profondeurs pouvant affecter le tunnel. Au niveau de la zone profonde du Seuil, par
contre, les investigations par des sondages profonds ont montré l’existence de deux
paléocanaux profonds transversaux au tracé, remplis de matériaux quaternaires
(formations coralliaires, conglomérats, sables bioclastiques et brèches argileuses), dont la
profondeur maximale, actuellement non connue, dépasse les 600m sous le niveau de la
mer.

Les informations géotechniques disponibles sur ces formations proviennent des


programmes d’essais de laboratoire réalisés sur les carottes prélevées lors des trois
dernières campagnes de sondages en mer -Bucentaur 97, Norskald 99 et Kingfisher 05-.

11
Ces essais ont été réalisés sur 60 échantillons (diamètre 5cm, longueur 25cm), par trois
laboratoires différents, avec les résultats consignés qui peuvent être résumés comme
suit:
• Les sables bioclatiques sont des dépôts de faible cohésion modérément perméables
(k≈ 4x10-6 cm/s) et significativement bioclastiques (58% de CaCO3 ) ; et,
• Les brèches seraient un peu moins résistantes que les flyschs faibles (70%), mais
avec des perméabilités comparables (k ≈10-8 cm/s ).

Etant donné que les remplissages des paléocanaux du Seuil devront être traversés par le
tunnel et que ces matériaux n’affleurent pas à terre, leur caractérisation géotechnique qui
constitue un passage obligé pour le design technique de l’ouvrage ne peut être faite qu’à
travers les essais sur des carottes prélevées dans les sondages géologiques en mer ou
des essais ‘down-hole’ dans ces sondages.

Les investigations géologiques et géotechniques réalisées

La connaissance du milieu physique

Les Sociétés d'études ont mené tout au long des vingt dernières années une série
d’investigations réalisées en partie avec l'aide précieuse des Instituts compétents des
deux pays. Ces investigations ont fortement contribué à la connaissance du milieu
géologique-géotechnique du Projet et ont porté sur :

a. La liaison géodésique des deux rives, par l’installation et l’observation périodique d’un
réseau géodésique dense dénommé « Réseau Géodésique pour Observations
Géodynamique » (RGOG), dont le but est de quantifier les mouvements relatifs à
l’échelle géologique des deux rives. Ce réseau a également servi à la calibration et à
l’homogénéisation de la cartographie détaillée réalisée sur les deux rives ;
b. La cartographie topographique détaillée à terre des zones d’intérêt pour le Projet, par
la réalisation de survols aériens de ces zones avec des restitutions aux échelles
requises par le Projet. Les cartes établies sont aux échelles 1/1.000ème pour les zones
des gares terminales et 1/5.000ème pour les zones des tracés du tunnel et utilisent un
système de référence géodésique spécifique (WGS-84, calibré par le réseau
géodésique RGOG mentionné ci-dessus) ;
c. Les levés bathymétriques de la zone marine à travers plusieurs campagnes de
mesure dont en particulier, celle utilisant la technique multi-faisceaux qui ont permis
de disposer pour la zone du Seuil, d’une bathymétrie très précise à l’échelle
1/5.000ème avec une équidistance des courbes de 1m ;
d. L’étude sismique de la zone, par la compilation des données préexistantes et par
l’installation d’un réseau sismologique télémétré spécifique installé sur les deux rives
et permettant le suivi en temps réel de l’activité sismique de la zone ;
e. Les études météorologiques, par une compilation des données préexistantes et par
des mesures spécifiques effectuées au niveau des stations installées dans la zone du
projet ;
f. Les études hydrodynamiques marines destinées à une meilleure connaissance des
circulations marines dans le Détroit, par l’élaboration de modèles mathématiques de
prévision des courants marins dans la zone du Seuil et d’écoulement dans le
Détroit qui constituent des paramètres d’importance capitale pour la programmation et
la réalisation des campagnes de prospection, notamment par les forages en mer ;

12
Les investigations géologiques et géotechniques en mer et à terre

a. En mer : Elles constituent de loin le volet le plus important et le plus coûteux des
investigations. Elles comprennent les 40 campagnes marines indiquées en annexe qui
montre également l'évolution du processus suivi pour chacune des principales
méthodes de prospection utilisées. Globalement, les investigations en mer ont couvert
les aspects suivants :
i. Géophysique : plus de 10.000 km de profils sismique-réflexion ;
ii. Side scan sonar : environ 5.000 km de profils ;
iii. Echantillonnage : plus de 2.000 échantillons gravitaires récupérés ;
iv. Forages courts : 50 forages de moins de 5 m totalisant 100 m de
pénétration et 50m de carottes ;
v. Forages profonds : environ 3.000 m, comprenant 15 forages de plus de
100 m de profondeur, 5 forages de plus de 200 m ; et
un forage record de 325m de profondeur
vi. Vidéo sous-marine : 40 heures d'inspection visuelle depuis un sous-marin
autonome.

b. A terre : les investigations géologiques se sont focalisées, dans un premier temps, sur
la mise à jour des fondements de la géologie du Détroit et ont consisté en :

• La reprise de l’étude d'anciens forages pétroliers pluri-kilométriques réalisés en


rive espagnole pour la recherche d’hydrocarbures ;
• L'élaboration de nouvelles cartes géologiques terrestres à l’échelle 1 :25.000 de
la zone d’intérêt pour le Projet, basées sur des études multidisciplinaires dont la
sédimentologie, la micropaléontologie, la tectonique, etc… ;
• La réalisation de campagnes géophysiques à terre par la méthode dite de
« sismique réfraction » permettant d’approcher indirectement les caractéristiques
géotechniques des terrains : vitesse de propagation des ondes sismiques,
épaisseur des terrains décomprimés de surface, etc.
• La réalisation de plusieurs campagnes de forages à terre totalisant un linéaire
d’environ 4.000m avec les programmes associés d'essais géotechniques in situ et
de laboratoire ;

Dans un deuxième temps, les investigations à terre ont porté sur la réalisation
d’importants ouvrages expérimentaux sur le deux rives, destinés à caractériser géo
techniquement les formations jugées les plus significatives pour le Projet. Identifiables
à terre, trois ouvrages expérimentaux majeurs ont été réalisés dans ce cadre:

i. En rive Sud, l'Ouvrage de Malabata, a permis d'étudier in situ le comportement de


certains types stratégiques de terrains pour le Projet jusqu'à 300 m de profondeur
sous le niveau de la mer. Cet ouvrage offre aussi l'opportunité unique d'accéder à
ces terrains pour y reprendre dans le futur des investigations expérimentales.
L’ouvrage est situé à l’est de la ville de Tanger, à quelques mètres de la rive, près
du tracé du tunnel. Son objectif est de déterminer les caractéristiques
géotechniques à court et à moyen termes des terrains les plus représentatifs du
tracé du tunnel, de déterminer aussi l’état de leurs contraintes géostatiques,
d’apprécier le comportement du terrain à l’excavation et l’évolution de ce
comportement en rapport avec la profondeur.

13
OUVRAGE EXPERIMENTAL DE MALABATA

Ouvrage de Malabata

MAROC

Puits principal
Sud Nord Sud-Ouest Nord-Est

VUE EXTERIEURE DU PUITS

Faille

Niveau -147

Faille

Faille Faille Faille Galerie -300m


Niveau -300
GALERIE AU NIVEAU -300M COUPE GEOLOGIQUE
SCHEMA DU PUITS, GALERIES ET SECTIONS D’ESSAIS
LES OUVRAGES EXPERIMENTAUX DE BOLONIA ET TARIFA

Puits de Bolonia

Galerie de Tarifa

Profondeur : 70m
Diamètre : 3,50m

Tronçon Tronçon
expérimental flexible 1
N°1
Tronçon rigide 1
Tronçon
expérimental Tronçon
Coupe géologique N°2 flexible 2

Tronçon rigide 2

Tronçon Tronçon
expérimental flexible 3
N°3
Tronçon rigide 3
Tronçon du fond
L’ouvrage se compose d’un puits de 160 m de profondeur qui dessert un réseau
de galeries sous-marines de plus de 200 m de longueur, et d’un second puits de
150 m de profondeur, creusé à partir de l’une de ces galeries. Celui-ci donne lui
aussi accès à une galerie de 35 m de long, creusée donc à 300 m sous le niveau
de la mer. L’imperméabilité en grand des terrains traversés a été confirmée et
différents revêtements de galerie ont été expérimentés : béton projeté, anneaux
de béton, cintres en acier, etc. ainsi que plusieurs sections de galerie ont été
instrumentées pour un monitoring des principales caractéristiques des terrains et
de leur comportement au cours du temps.
ii. En rive Nord, le Puits de Bolonia - de 74 m de profondeur - et la Galerie de Tarifa
- de 567 m de longueur -, qui, bien qu'en conditions de charge beaucoup plus
modestes que l’ouvrage Malabata, ont permis de compléter l'étude in-situ des
formations géologiques intéressant le Projet. Le puits de Bolonia a été conçu pour
réaliser l’investigation et l’auscultation du massif constitué de l’unité argileuse d’Al
Marchal, tenue pour une des plus adverses pour le tunnel. La galerie, de 3.80m
de diamètre, a été forée au tunnelier ouvert. Elle a traversé des terrains
appartenant à deux unités géologiques différentes ainsi que deux importantes
failles, ce qui a permis la caractérisation géotechnique et l’observation du
comportement géomécanique des accidents tectoniques et de l’ensemble des
lithologies rencontrées par l’ouvrage, considérés comme très représentatifs de
l’environnement géologico-géotechnique du Projet. Environ 80 sections
d’auscultation de la galerie, dont 10 installées sur des anneaux rigides, ont été
instrumentées pour un enregistrement en continu des principales caractéristiques
et du comportement des terrains dans le temps.

Coupe géologique schématique du tracé


La vérification des aspects géologiques sous-marins de l'alternative de base a été
abordée en 1997 par la réalisation de la campagne de forages profonds dénommée
Bucentaur 97. Cette campagne fait suite à une longue série d’investigations
géophysiques, de prises d’échantillons du fond marin et d’enregistrements par vidéo
sous-marine. Elle fait également suite à plusieurs tentatives de campagnes de forages en
mer, infructueuses pour cause d’instabilité du bateau foreur, en raison du régime de forts
courants du Détroit. Cette campagne Bucentaur 97 - qui a marqué un jalon important
dans le processus d'études - a prouvé la présence de formations quaternaires (sables
bioclastiques et brèches argileuses) dans la partie profonde du Seuil du Détroit. Ceci
indique l'existence d'accidents géologiques (paléo-canaux érosifs) non détectés
auparavant, susceptibles de présenter des effets adverses sur l'ouvrage.
L'investigation de ces problèmes a été alors considérée, à juste titre, comme l'activité
prioritaire dans la poursuite des études.

L'expérience de la campagne Bucentaur 97 a également confirmé les difficultés


techniques des investigations futures concernant les formations géologiques en
présence, notamment :
• Le fait que les méthodes classiques de prospection indirecte (géophysique) se sont
avérées inadaptées aux formations géologiques en place, comme cela est prouvé
par les nombreuses expériences réalisées tout au long du processus d'études.
Seules les méthodes onéreuses de foration / carottage off-shore sont applicables
pour l'essentiel ; et que,
• Les profondeurs d'eau impliquées et surtout, l'exceptionnel régime de courants du
Détroit posent des problèmes techniques inusités à la foration off-shore.

16
Dans le cadre de la nouvelle étape d’investigation, en plus de la campagne Bucentaur 97,
deux campagnes additionnelles de forages profonds en mer ont été programmées et
menées à bien (Norskald 98 et Kingfisher 05). Ce sont les résultats de ces dernières
campagnes qui ont considérablement enrichi les connaissances disponibles. En fait, ces
résultats ont permis de produire la coupe géologique estimative montrée dans la figure
« travaux en mer », dans laquelle est représenté le profil P, qui traverse les brèches
imperméables (formations géologiques quaternaires), remplissant les paléo-canaux du
Seuil, sans pour autant rencontrer les sables bioclastiques supérieurs, potentiellement
perméables.
La campagne Kingfisher 05, réalisée en 2005, constitue une des plus importantes
opérations entreprises jusqu’ici dans le processus des études de la liaison fixe,
notamment pour sa signification pour la formulation de l’Avant Projet Primaire du tunnel.
Les principaux résultats de cette campagne se résument comme suit :
• La réalisation d’un linéaire total de 1380m (587m de carottes récupérés dans tous les
sondages, représentant 91% des tranches carottées), réparti sur 15 forages exécutés
au niveau de 11 sites, dont le plus profond a dépassé les 325 m de pénétration sous
une tranche d’eau de 275 m, à partir du niveau de la mer.
• Le tracé de tunnel qui traverserait uniquement le substratum des flyschs parait non
viable puisqu’il faudra descendre jusqu’à 650m sous le niveau de la mer au moins.
• Le tracé, en principe favorable, serait à la cote maximale de 450m à partir du niveau
de la mer, évitant les sables bioclastiques mais devant traverser les brèches
argileuses sur une distance d’environ 3km.

Les résultats des investigations géologiques réalisées en mer (géophysique,


échantillonnage gravitaire, sondages courts et sondages profonds) mentionnées ci-
dessus, compilés avec d’autres données d’ordre géologique régional et morphologiques,
ont permis de produire la carte et la coupe géologique respectivement illustrées dans les
figures « travaux en mer » et « Colonnes lithostratigraphiques des unités de flyschs», et
permettent de formuler les conclusions suivantes :
• Le tracé en mer sous des tranches d’eau de 0 à 200m (environ les 2/3 du tracé sous-
marin) est dans le substratum des flyschs affleurant ou sub-affleurant à légèrement
couvert par des formations récentes d’épaisseur réduite sans incidence sur le tracé
du tunnel ;
• Au-delà de cette profondeur d’eau (-200m), c'est-à-dire au niveau du tronçon central
profond du Seuil, le fond marin est en général tapissé par une formation lithoherme
de coraux aphotiques, dont les conditions de vie paraissent associées au niveau
bathymétrique ci-dessus. Aucun affleurement de flysch n’a en effet été observé sous
ce niveau durant toutes les campagnes de reconnaissance réalisées y compris
l’inspection visuelle à partir du sous-marin ;
• Les deux conclusions ci-dessus et surtout les résultats des trois dernières
campagnes de sondages profonds, ont permis de mettre en évidence,
respectivement au nord et au sud du monticule ‘Tartesos’ constitué de flyschs, deux
paléocanaux parallèles de profondeurs indéterminées transversaux au tracé. Ces
deux paléocanaux ouverts dans le substratum des flyschs sont remplis de dépôts
d’âge probablement quaternaire de brèches argileuses (à éléments de flyschs) et de
sables bioclastiques (détectés seulement dans le paléocanal Sud) recouverts par
une croûte coralliaire calcaire.

17
La formation de ces paléocanaux peut être expliqué par le processus géologique suivant :
• Erosion de deux chenaux profonds et étroits de direction Est-Ouest dans les flyschs
jusqu’à des profondeurs dépassant les 600m sous le niveau de la mer,
• Remplissage de ces chenaux par des brèches argileuses de collapses sous-marins
jusqu’à la cote -300m.
• Erosion de la brèche dans chenal sud par un nouveau chenal superposé, également
de direction Est-Ouest, sur une profondeur d’au moins 390m.
• Remplissage de ce nouveau chenal érosif par des sables bioclastiques jusqu’au
niveau -300m. Aucun des sondages réalisés dans le canal Nord n’y a traversé ces
sables. Dépôt de conglomérats à grands blocs de flyschs très arrondis et rodolites
qui fossilisent les sables et les brèches.
• De la glaciation du Würm à maintenant, la zone profonde du Détroit a été colonisée
par des coraux aérmatypiques.

Les études socio-économiques du Projet

Les études relatives au milieu socio-économique du tunnel conditionnent également la


faisabilité du projet. Un des thèmes le plus directement lié à cette faisabilité est celui
concernant la prévision des trafics utilisateurs du Projet. Aussi, les Sociétés lui ont-elles
consacré des efforts considérables selon les lignes de travail suivantes :
• La construction d'une base de données permanente sur les flux de trafics de
passagers et de marchandises entre les deux zones Sud et Nord de l'aire d’étude du
Projet;
• La mise en place progressive d'un Observatoire des flux de trafic Europe - Afrique
(susceptibles de détournement significatif par le futur tunnel du Détroit) par, entre
autres, la réalisation de séries d'enquêtes annuelles origine / destination des trafics
maritimes et aériens; et
• Le développement de modèles de prévision des trafics utilisateurs du Projet du
Détroit et leur recalibration progressive dans le temps.

C'est à cette dernière ligne de travail - et malgré les difficultés intrinsèques qu'elle
comporte - que les Sociétés d'études ont accordé une attention particulière, en suivant
un processus de recalibration par des améliorations successives des bases statistique et
méthodologique des modèles en construction. A ce propos et à titre illustratif, la figure sur
les prévisions de trafics, montre les résultats du dernier modèle calibré (TRATAR-95), qui
nécessite des développements progressifs, notamment en ce qui concerne la prévision
des trafics créés par les effets structurants du Projet. Ces développements font l’objet
d’importantes études dont le lancement est en cours, y compris une analyse des impacts
socio-économiques du projet.
Les résultats des prévisions indiqués par les modèles pour le trafic à travers
le tunnel peuvent se résumer en 2025, à plus de 9 millions de passagers, et près de 8
millions de tonnes de marchandises.

Il faut noter que ces valeurs prévisionnelles prennent en compte les trafics créés par les
effets structurants du projet pour une proportion de l’ordre de 20% du trafic total de
passagers dans le tunnel et de l’ordre de 10% du trafic total de marchandises.
PREVISIONS DES TRAFICS

• Mise en place d’un Observatoire de


Prévisions des trafics passagers Prévisions des trafics marchandises
Trafics maritime à travers le Détroit et
aérien pour les vols Maroc – Europe.

• Prévisions des trafics qui seront drainés


par le Tunnel en 2025 :
o 9 millions de passagers ;
o 8 millions de tonnes marchandises.

PREVISIONS ET REPARTITION DES TRAFICS

Millions de Millions de
passagers par tonnes de
an marchandises
par an
2025 2035 2025 2035

Demande Globale zone d’étude 31 38 92 103

Corridor du Détroit 12 15 8 11

Prévisions sur le tunnel dont : 9 11 8 10

• trafic détourné 5,7 7,1 6,5 8,2

• trafic engendré 1,3 1,6 0,2 0,2

• trafic créé 2,1 2,6 1,0 1,3


20
Quant à l’Observatoire de Trafic, les premiers résultats qui en découlent sont :
• Pour la traversée maritime actuelle du Détroit : 90% des passagers sont soit de
nationalité espagnole (53%), ou marocaine (38%) y compris les Marocains Résidant
à l’Etranger ; et 86% des passagers résident dans les quatre pays : Espagne (49%),
France (19%), Maroc (10%) et Italie (8%). L’Algérie et la Tunisie présentent des
potentiels réels d’échanges avec les pays européens à travers le Détroit de Gibraltar,
une fois les frontières ouvertes et les travaux de réhabilitation du train
transmaghrébin et de l’Autoroute de l’Unité Maghrébine seront terminés ;
• Pour les vols aériens actuels vers l’Europe à partir du Maroc: la majorité des
passagers enquêtés réside à l’étranger (86 %) contre seulement 14 % au Maroc. La
France représente 50 % des destinations des passagers, l’Espagne représente 11 %
et le reste de l’Europe 38 %. Les Marocains Résidant à l’Etranger représentent quant
à eux 25 % des passagers.

Les enquêtes ont aussi permis d’obtenir des informations sur une répartition plus fine des
zones origine / destination, sur les motifs de déplacement, quelquefois sur les tranches
de revenu des passagers et sur différentes autres caractéristiques.

A noter que les études de prévision des trafics développées par le Projet avaient souligné
ses effets bénéfiques sur la région Nord-Ouest africaine dans son ensemble en ce qui
concerne l’amélioration des transports terrestres de marchandises, et sur les pays
proches, en particulier l’Algérie, en ce qui concerne l’amélioration des transports
terrestres de voyageurs

Première ébauche de montage institutionnel et financier

Le principe de base pour la construction et l’exploitation du tunnel ferroviaire, consiste à


considérer une concession de type B.O.T. (Built, Operate and Transfer). Dans le but de
minimiser les risques de financement dus aux aléas de la construction, l’hypothèse de
montage institutionnel prévoit la réalisation anticipée par des fonds publics, d’une galerie
de reconnaissance, qui constituera ultérieurement le tronçon sous-marin de la galerie de
service de l’ouvrage. Cette galerie de reconnaissance fera donc partie intégrante des
études et investigations menées pour le développement du Projet. Une fois cette galerie
de reconnaissance construite, elle sera cédée sans charge à la société concessionnaire
qui sera choisie par appel d’offres et qui construira alors le reste de l’ouvrage sans
aucune aide financière publique additionnelle et l’exploitera pendant une période d’une
quarantaine d’année.

L’avantage de ce processus de réalisation de l’ouvrage en deux étapes – construction de


la galerie de reconnaissance par des fonds publics puis concession de l’ouvrage
monotube à des sociétés privées – réside particulièrement dans les éléments suivants :
• La réalisation de la galerie de reconnaissance permettra une meilleure connaissance
des formations géologiques qui seront traversées par le futur tunnel et une bonne
maîtrise des coûts de sa construction
• Ce processus réduirait le coût de construction de l’ouvrage en rendant sa mise en
concession plus attractive pour le secteur privé.
• L’ouvrage présentera une grande sécurité pendant sa construction, et
• L’ouvrage sera réalisé de manière progressive et ne coûtera aux promoteurs que
l’investissement initial de la galerie de reconnaissance/service et celui des
raccordements du tunnel aux réseaux ferroviaire et autoroutier des deux pays.

21
Aspect juridique du projet

Les études de faisabilité juridique ont été confiées à un groupe d’étude composé
d’experts marocains et espagnols et ont été réalisées en deux étapes :
• La première étape de l’étude a consisté en l’élaboration de rapports généraux sur la
licéité du projet au regard du droit international de la mer et particulièrement des
normes de transit régissant la navigation dans les détroits ;
• La deuxième étape a donné lieu à un programme d’études ponctuelles traitant des
aspects de droit international et une première ébauche des questions de
responsabilité internationale, de droit public interne et de droit administratif.

Dans l’objectif d’évaluer ces études, deux séminaires juridiques ont été tenus,
respectivement à Tanger et à Madrid, avec la participation de juristes internationaux et de
représentants des organisations spécialisées (OMI, CNUCED, CEA/ONU, CEE/ONU).

Le Séminaire de Tanger a conclu à la conformité de l’ouvrage fixe au regard des normes


de la navigation à travers les détroits. Il a en outre recommandé :
• La définition par le Maroc et l’Espagne d’une politique de coopération avec certains
organismes internationaux à caractère technique, notamment l’OMI, et une politique
de promotion du projet dans les domaines de la sécurité, de la préservation de la
zone, du financement, et des transports et communications.
• L’analyse du régime juridique des contrats de construction et d’exploitation de
l’ouvrage à titre préliminaire, en requérant une étude de droit comparé entre les
législations du Maroc et de l’Espagne.

Le Séminaire de Madrid a, quant à lui, permis de traiter du droit administratif et de la


responsabilité internationale, et a abouti aux conclusions principales suivantes:
• Les lois administratives du Maroc et de l’Espagne, donc de l’Europe applicables au
projet, ne sont pas incompatibles. Cependant, le caractère spécial du projet et les
relations éventuelles qui peuvent se produire avec des Etats-tiers, nécessiterait
l’établissement d’une réglementation spécifique régissant les travaux de
construction et d’exploitation de l’ouvrage. Cette réglementation devrait être
élaborée par les deux Etats riverains dans le cadre d’un traité qui permettra, le
moment opportun, la mise sur pieds d’un organisme chargé de la réalisation des
travaux de construction ;
• Le programme futur devrait comporter des études approfondies dans les domaines
du droit administratif comparé, de la responsabilité internationale, du droit des
contrats et de la coopération internationale.
Le projet au cœur du système de transport Europe – Afrique
Le projet de liaison fixe constitue un maillon essentiel dans le schéma directeur du réseau
terrestre de transport euro-africain et plus particulièrement ouest - méditerranéen, et ce,
dans l’optique d’une intégration économique régionale. Ce réseau comporte en rive Nord
le corridor de transport Nord Est - Sud Ouest et en rive Sud la voie ferrée trans-
maghrébine, le projet d’Autoroute Maghrébine puis l’axe routier côtier Tanger – Lagos. De
nombreux travaux et développements liés à ce réseau sont en cours, principalement dans
le cadre de la Commission Européenne à travers le Comité de Haut Niveau chargé du
développement du Transport dans la Méditerranée et les études réalisées par la
Commission Européenne dans ce cadre (Contrat principal d’infrastructure de transport
dans la Méditerranée, Meda-Ten-T et Destin), soit dans le cadre du Groupe des
Transports de la Méditerranée Occidentale (GTMO), composé des Ministres en charge

22
des Transports des sept pays de la région et de représentants de la Commission
Européenne, soit dans le cadre de l’Union du Maghreb Arabe (UMA), soit encore dans
celui de la Commission Economique des Nations Unies pour l’Afrique (CEA/ONU).

Le Projet est également suivi depuis son lancement par l’Organisation des Nations Unies
(ONU) et plus particulièrement par son Conseil Economique et Social (ECOSOC) à
travers les Commissions Economiques des Nations Unies pour l’Afrique et pour l’Europe.
Celles-ci préparent tous les deux ans, par des experts onusiens, un rapport d’évaluation
globale des études et le soumettent à l’examen et au vote de l’ECOSOC, qui invite les
organisations techniques spécialisées à coopérer pour développer le Projet. C’est le cas
en particulier de l’Association Internationale des Travaux en Souterrain (AITES ou ITA),
qui a initié plusieurs études et évaluations et a organisé deux rencontres internationales à
ce sujet, sous l’égide des deux Commissions CEE et CEA de l’ONU.

Placé dans son contexte économique international, le projet intéresse en réalité une vaste
zone intercontinentale d'Europe et d'Afrique, dans laquelle les grands axes de transport
terrestre sont en pleine expansion. L'Espagne a fourni depuis son entrée à l'Union
Européenne un effort important dans la construction d'autoroutes et de voies express,
ainsi qu'une ligne ferroviaire à grande vitesse desservant le Sud du pays et actuellement
prolongée au Nord vers la frontière française.

Au Maroc, le réseau autoroutier est en construction avancée avec un programme de 1500


km de réalisation à l'horizon 2010. Ce programme se développe le long des axes
structurants du pays, orientés davantage du Nord au Sud et de Est à l'Ouest. De même la
rocade méditerranéenne en cours de rénovation, devra relier Tanger à la frontière
maroco-algérienne sur plus de 560 km. On peut aussi rejoindre la frontière Sud du Maroc
par une route aux normes internationales, longue de 2400 km entre Tanger et El Gouera.
Cette route elle-même constitue le tronçon principal de l'axe routier Tanger à la frontière
avec la Mauritanie qui drainera les pays de l'Afrique de l'Ouest à partir de la
Méditerranée, sur une longueur de 7.600 km, déjà réalisée à plus de 80 %.

De ce fait, les réseaux de transport s'organisent dans la région aussi bien au Nord qu'au
Sud et un effort est entrepris pour développer de concert les corridors débouchant sur le
Détroit de Gibraltar.

D'un côté, l'Europe développe le corridor Nord-Est / Sud-Ouest vers le Détroit, avec ses
multiples ramifications et modes de transport, soit le long de l'Atlantique en passant par
Bordeaux et Madrid, soit le long de la Méditerranée desservant Barcelone et Marseille
avec une bifurcation sur Rome. C’est ce même corridor qui a été retenu par le Comité de
Haut Niveau institué par la Commission Européenne et qui a retenu le tunnel à travers le
Détroit de Gibraltar parmi les projets prioritaires.

Au niveau de l'Union du Maghreb Arabe, les pays de cette organisation mènent dans le
cadre d'une stratégie globale, la réalisation des deux axes importants
• L'Autoroute de l'Unité Maghrébine qui relie les cinq capitales des pays maghrébins
de Nouakchott en Mauritanie à Tripoli en Libye, sur une longueur de 6.900 km,
entièrement bitumée à l'exception du tronçon Nouakchott-Nouadhibou sur près de
470 km, dont les travaux seront achevés courant 2006.
• Le train transmaghrébin qui relie déjà le Maroc, l'Algérie et la Tunisie sur une
longueur de 8.400 km. Il connaît d'importants travaux de renouvellement de voies,
d'amélioration de leur capacité et de modernisation des équipements de

23
communication et de signalisation.

Le lien fixe apparaît donc comme le point de jonction de tout un réseau d'infrastructures
de transport en projet ou en cours de réalisation. Il est totalement intégré dans une
stratégie globale de développement des transports en Méditerranée Occidentale et
s'inscrit dans la construction d'un espace de véritable partenariat entre l'Union
Européenne et le Maghreb.

A cet égard, les Ministres des Transports de la Méditerranée Occidentale ont engagé une
démarche régulière et commune de concertation, de façon à identifier des corridors
prioritaires dans le prolongement des réseaux transeuropéens en direction et entre les
pays de la rive Sud, et d'aider à leur développement.

Ce travail a été relayé au niveau euro-méditerranéen par la création en 1999, sous l'égide
de la Commission Européenne, du Forum Euro-Med des Transports et de la mise sur
pied en 2004, du Comité de Haut Niveau pour le développement du secteur, dans la
perspective de la mise en place de la Zone Euro-Méditerranéenne de Libre Echange.
Dans ce cadre, la Commission Européenne a initié et financé plusieurs actions,
notamment, deux études importantes qui sont en cours de finalisation.

La première étude dénommée « Contrat Principal d’Infrastructures de Transport dans la


Méditerranée » concerne particulièrement l’établissement d’un réseau euro-
méditerranéen stratégique et le développement des projets d’infrastructures et des
systèmes d’exploitation. La deuxième étude dénommée «DESTIN» a visé à mettre en
évidence une stratégie réelle de développement des transports par l'identification et la
mise en oeuvre de projets prioritaires de la zone de la Méditerranée Occidentale. La
troisième étude, intitulée «MEDA TEN-T» a intéressé l'ensemble des pays du
pourtour méditerranéen et a eu pour but de définir et développer des corridors
méditerranéens se situant dans le prolongement des corridors européens à partir du
Détroit de Gibraltar vers la côte ouest-africaine d’un côté et vers la rive Sud
méditerranéenne orientale de l’autre.

La contribution de la Commission Européenne à la réalisation du projet trouve sa


justification dans le rôle que celui-ci est appelé à jouer dans le développement des
infrastructures de transport dans la région. Les conclusions de la première réunion de la
Conférence Euro-Méditerranéenne des Transports, tenue à Marrakech le 15 décembre
2005, viennent le confirmer. En effet, cette Conférence a adopté les conclusions du
Comité de Haut Niveau précité, relatives à la définition d’un réseau d’axes stratégiques
de transport dans la Méditerranée, constituant le prolongement des axes européens, et
au choix des principaux projets les composant, en décidant de leur accorder la priorité
dans le financement par les organes de la Commission. Dans ce cadre, la liaison fixe a
été retenue comme projet prioritaire et maillon essentiel manquant dans l’axe stratégique
reliant l’Europe occidentale à l’Afrique du Nord par le Détroit de Gibraltar et se
prolongeant le long des côtes méditerranéenne et atlantique

Ce riche contexte international souligne le caractère euro-méditerranéen du Projet et


l’ampleur territoriale de ses impacts socio-économiques potentiels et justifie, de ce fait, la
participation de la Commission Européenne à son développement. A rappeler, à titre
d’exemple, que les études de prévisions de trafics passagers et marchandises utilisateurs
du Projet, ont montré que près des trois quart de ce trafic a pour origine les pays des
l’Union Européenne.

24
L'étape d’investigations et d’actualisation technico-économique en cours
Afin de répondre aux interrogations suscitées par les résultats de cette première
campagne de forages et pour faire face aux problèmes posés, le processus d'études a
fait l'objet d’une nouvelle étape actuellement en cours, dite « d’investigations et
d’actualisation technico-économique ». Elle vise principalement les objectifs suivants:

a. La clarification des problèmes géologiques moyennant la réalisation de campagnes


additionnelles de forages profonds en mer; (activité pratiquement terminée) ; La
campagne Kingfisher 05 a permis certes d’atteindre les objectifs escomptés mais des
investigations complémentaires pourraient être programmées au vu des premiers
résultats de l’étude d’actualisation de l’Avant Projet Primaire du tunnel récemment
initiée.
b. L'amélioration des méthodes en matière de prévision de trafic par, entre autres,
l'observation directe des flux réels de passagers et de marchandises concernés par
le Projet et par le développement des modèles prévisionnels disponibles ; activité
dont la première étape est terminée et dont la seconde étape a récemment été
initiée. Cette seconde étape consiste essentiellement en la délimitation de la zone
d’étude, l’établissement d’une base statistique récente, l’analyse de l’offre de
transport puis la modélisation de la demande de transport en fonction des scénarios
de croissance économique puis l’évaluation sommaire des effets structuraux du
Projet induisant la création de nouveaux flux de transport ;
c. La reformulation et l'évaluation technique du Projet à la lumière des nouveaux
résultats d’investigations, activité également récemment initiée par le lancement de
l’étude d’actualisation de l’Avant Projet Primaire du tunnel. L’étude est articulée
autour des axes principaux suivants, à savoir : l’analyse en profondeur des résultats
des investigations géologico-géotechniques disponibles et la mise en évidence des
besoins éventuels en investigations additionnelles. L’actualisation de tous les
aspects de génie civil de l’Avant Projet Primaire pour les différentes phases du projet
et plus particulièrement pour la phase initiale (galerie de reconnaissance), et
l’actualisation des aspects liés aux équipements fixes et au matériel roulant ;
d. L’analyse des impacts environnementaux de la construction du tunnel est une activité
récemment initiée. Il s’agit d’appliquer au projet les standards environnementaux
internationaux, en particulier les directives émanant du cadre légal européen. Cette
étude va proposer les mesures préventives, compensatoires et d’atténuations
relatives aux impacts négatifs du creusement des tunnels, des puits et des ouvrages
et travaux nécessaires à la réalisation du Projet (zone de préfabrication des
voussoirs, zone de cantonnement de la main d’œuvre, les carrières, zones de dépôt
des déblais, traitement des eaux de drainage...) sur les valeurs biologiques,
écologiques et paysagères et leur mise en œuvre pendant sa réalisation et son
exploitation ;
e. L’analyse des impacts socio-économiques du Projet est une activité qui sera bientôt
lancée. L'étude sera orientée vers l'évaluation des effets du Projet sur chacun des
aspects du système régional, incluant l'identification de mesures préventives en
matière d'aménagement du territoire : effets sur le développement régional en termes
généraux; effets structurants du Projet susceptibles de produire du trafic créé; effets
sur le système d'infrastructures de transport et effets sur l'usage du sol, spécialement
dans les zones sensibles proches de l'emplacement potentiel des terminaux du
Projet ;
f. L’analyse du cadre juridique et institutionnel du Projet, est une activité qui sera

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également réalisée en 2006. L’étude consiste en l’analyse du cadre administratif et
de la nature juridique de l’organisme chargé de la construction, de l’exploitation et
l’entretien de l’ouvrage, l’analyse de la sécurité et de la responsabilité de l’ouvrage et
des usagers, puis la présentation des mesures d’accompagnement ;
g. Puis l’évaluation économique et financière globale du Projet, activité qui sera
également bientôt lancée. L’étude développera des analyses multi-critères et des
modèles d’évaluation économique coûts/bénéfices puis de simulation financière pour
les comptes d’exploitation de l’investissement et ce, conformément aux pratiques
généralement acceptées par la communauté internationale dans le domaine de
l'évaluation des projets d'infrastructures de transport.

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