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La Maison-Dieu : cahiers de

pastorale liturgique

Source gallica.bnf.fr / Les éditions du Cerf


Service national de la pastorale liturgique et sacramentelle
(France). Auteur du texte. La Maison-Dieu : cahiers de pastorale
liturgique. 1962-04.

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i
LA MAISONooDIEU

t4

1 *
Vc
LA
DÉDICACE
des églises

REVUE DE PASTORALE LITURGIQUE


LES EDITIONS DU CERF

70
LA MAISON-DIEU
Revue trimestrielle
du Centre de Pastorale Liturgique

9
Directeurs
A.-G. MARTIMORT, A.-M. ROGUET
Secrétaire de rédaction
M.-D. BOUYER, o. p.
Principaux collaborateurs
BOTTE, o.s.b.; F. BOULARD; L. BOUYER; A. CHAVASSE; Y. CONGAR,
B.
o.p.; I.-H. DALMAIS, o.p ; J. DANIELOU, s.j.; Dom J. GAILLARD, o.s.b.,
J. GELINEAU, s.j.; P.-M. GY, o.p.; J. HILD, o.s.b.; J.-M HUM, o.p.; P. JOUNEL;
J. LECLERCQ, o.s.b.; J. LECUYER, c.s.sp.; F. LOUVEL, o.p.; F. MORLOT;
O. ROUSSEAU, o.s.b., et un groupe de curés.

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LES EDITIONS DU CERF


29, boulevard Latour-Maubourg, Paris-7e
(C.C.P. Paris 1436.36)
CENTRE DE PASTORALE
LITURGIQUE

LA MAISON-DIEU

LES ÉDITIONS DU
CERF
29, boul. Latour-Maubourg,Paris-7e
Cumpermissusuperiorum,

D. L., -2° trimestre 1962. — Imprimeur, n° 2693.


SOMMAIRE

Pour chaque paroisse, la dédicace de l'église est une célé-


brationunique,exceptionnelle. Comme le baptême et la con-
firmation du chrétien,ladédicace de l'église n'a lieu qu'une
seule fois. La rareté de cette célébration légitime donc son
ampleur. Elle souligne aussi son importance. Pour les fidèles
qui, au moins chaque dimanche, s'assemblent dans ses murs,
autour de son autel, une catéchèse à la fois exacte et vivante
de l'église, l'église de pierres, dans ses rapports avec l'Église
Corps du Christ, est non seulement utile, mais indispensable.
En cette époque où, notamment dans les banlieues des gran-
des villes, un très grand nombre d'églises sont à construire
d'urgence, on ne peut que saluer la promulgation récente,
après sa réforme, du Livre II du PontificalRomain, qui con-
tient la célébration de la Dédicace. Rite abrégé et donc plus
favorable à une participation effective et active des fidèles, le
nouveau cérémonial de la dédicace sera pour chaque curé
l'occasion d'un examen de conscience. L'église dont j'ai la
charge correspond-elle vraiment à ce qu'elle doit être, tant
d'après les plus récentes dispositions du Saint-Siège que
?
d'après la Tradition authentique de l'Église Ai-je assez aidé
mes paroissiens à découvrir, à partir de ce qu'ils ont sous les
yeux, les grandes lois du mystère de l'Église, Corps du Christ?
Les réflexions historiques et doctrinales, les suggestions pas-
torales rassemblées dans ce cahier permettront sans doute à
ceux qui préparent la dédicace d'une église d'y faire parti-
ciper au mieux les fidèles; mais aussi à tous les autres, dont
l'église est simplement bénite ou est déjà consacréedepuis
longtemps, de mieux faire découvrir à leurs paroissiens, cha-
que fois qu'ils en auront l'occasion, que le seul fait de se ras-
sembler dans cette église est déjà riche de signification.

ÉTUDES

A.-G. MARTIMORT. Le nouveau rite de la dédi-


cace des églises 6
JEAN WAGNER, Le lieu de la célébration
Directeur de l'institut eucharistique dans quel-
ques églises anciennes
Liturgique de Treves.
d'Occident. 32

:
ALPHONSE RAES, S. j.,
Préfet de la
Bibliothèque Vaticane.
La liturgie eucharistique en
Orient
tectural
son cadre archi-
49

deStrasbourg.
CYRILLE VOGEL,
Professeur à la Faculté de
Théologie catholique
Versus ad Orientem.L'orien-
tation dans les Ordines Ro-
mani du haut moyenâge.âge. 67

MARCEL DURLIAT, Recherches sur l'emplace-


Professeur à la Faculté des ment des trônes épisco-
Lettres de Toulouse. paux dans les cathédrales
du moyen age 100
YVES M.-J. CONGAR, o. p. L'Eglise, ce n'est pas les
murs, mais les fidèles 105

J-
SUGGESTIONS PASTORALES

JOSEPH GELINEAU, s. j. L'aménagement de la cathé-


drale de Cuernavaca 115
PIERRE JOUNEL. La célébration de ladédicace. 117
P. J. Le livret de la dédicace 124
P. Préparation d'une paroisse
la dédicace
à 125
TEXTES ANCIENS

ANDRÉ K. FYRILLAS, Le rite byzantin de la consé-


de l'Institut Orthodoxe cration et dédicace d'une
Saint-Serge. église 131
Ordo de la dédicace au rite byzantin ancien. 135
La dédicace de la basilique arnbrosienne par saint Aln-
broise (Saint AMBROISE DE MILAN, Lettre 22 à sa
soeur Marcellina) 141
Les rites de la dédicace en Gaule (extraits de GRÉGOIRE
DETOURS) 146

NOUVELLES DU MOUVEMENT LITURGIQUE

A.-G. MARTIMORT. CHangements dans le Ritus


servandus in celebratione
missae 149
B. BOTTE. Une chaire Dom Lambert
Beauduin à l'Institut supé-
rieur de liturgie de Paris. 156
IXe Semaine d'étude pour professeurs de liturgie (Lou-
vain) 157
Liturgie et vie spirituelle (programme du Congrès du
G.P.L., Angers, 1962) 158

BIBLIOGRAPHIE

A. VERHEUL. Inleideing tot de liturgie (F. VAN-


DENBROUCKE) 160
LE NOUVEAU RITE
DE LA DÉDICACE DES ÉGLISES

L portant
rite
E de la dédicace des églises est de loin le plus im-
de ceux que contient le Livre II du Pontifical;
c'est même de beaucoup la plus longue, la plus solen-
nelle des actions liturgiques, la plus riche en formulaires
et en symboles1. Mais avec le temps, cette solennité et cette
richesse étaient devenues surcharge écrasante. Aussi les
évêques de naguère répugnaient à célébrer des dédicaces;
lorsqu'elles semblaient inévitables, ils les exécutaient en
toute hâte, sous la surveillance vigilante decérémoniaires
qui assuraient l'observance exacte des rubriques, mais en
l'absence de tout peuple et devant l'indifférence de quelques
assistants. A partir du moment où l'on a redécouvert la ri-
chesse spirituelle de ces rites et leur valeur éducative pour

:
les chrétiens, un effort pastoral a été tenté et souvent avec
un grand succès des édifices, célèbres ou modestes, ont été
consacrés ces dernières années avec le concours d'un peu-
ple priant, rendu attentif et actif grâce à une préparation
antérieure, à la présence d'un bon commentateur et au
style d'ensemble adopté. Mais c'est alors qu'on a senti le

:
plus vivement la nécessité et l'urgence d'une réforme du
rituel; que de doublets fastidieux gestes répétés à plusieurs
reprises, oraisons multiples pour un même rite ou reve-
nant sans cesse sur les mêmes demandes, tout cela aggra-
vant d'une fatigue psychologique le poids de la fatigue

I. Nous avons déjà développé ce point de vue dans La Maison-Dieu,


63, pp. 86-95.
physique due à la durée de l'ensemble! C'est pourquoi de
tous côtés les évêques réclamaient cette réforme, alors que
la reconstruction d'églises détruites par le fait de guerres
et la construction de nouveaux édifices de culte dans les
villes rendaient désirable la célébration plus fréquente des
dédicaces.
La Commission chargée par Pie XII de la réforme liturgi-
que générale dut ajouter ce travail à tous ceux qui lui avaient
déjà été confiés. On s'explique ainsi aisément que la publi-
cation du nouvel Ordo de la dédicace, si impatiemment
attendue, ait cependant tardé plusieurs années. D'autant que,

:
chemin faisant, la Commission était obligée de décider des
choix difficiles des points de vue très divers, presque con-
tradictoires, devaient être pris en considération. La commo-
dité de l'évêque célébrant ne coïncide pas nécessairement
avec l'utilité du peuple qui participe, et d'autre part la
raison pastorale ne peut faire oublier la vénération que
méritent des usages plus que millénaires.
Le 2 juin 1951, le pape Pie XII consacra l'aulel majeur de
la basilique Saint-Eugène de Rome avec un cérémonial très
simplifié, dont le texte avait été remis aux prélats et aux
membres du Corps diplomatique. La sélection des rites
semblait n'avoir pas obéi à des critères bien définis. Mais
il s'agissait là d'un événement isolé. Porter la main au
Pontifical pour en faire une réforme définitive exigeait de la
méthode, un travail assidu, un cercle élargi de consultations
auprès de compétences diverses. Aucune de ces conditions
n'a manqué à la préparation du nouvel Ordo, publié le
13 avril 1961. Après l'avoir décrit de façon aussi précise que
possible et l'avoir comparé à l'ancien, nous essaierons de
l'apprécier à la lumière des principes mêmes qui ont présidé
à son élaboration.

I. — DESCRIPTION DU NOUVEAU RITUEL

Avant tout, l'Ordo de la dédicace devait être abrégé et


simplifié. Abrégé, il l'est de près des deux tiers. Simplifié,
il l'est considérablement dans son ensemble et dans ses
détails, et tout d'abord dans son plan.
Deux parties symétriques, mais d'inégale longueur, divi-

:
saient traditionnellement la cérémonie de consécration des
églises les rites de l'eau, les rites de l'huile. Chacune de ces
deux parties se terminait par le chant d'une préface qui en

:
constituait comme le sommet. La séparation était facile à
percevoir par les fidèles maintenus hors de l'édifice durant
les rites de l'eau, ils étaient admis à entrer pour les rites de
l'huile; de plus, la solennelle procession et la sépulture des
reliques marquaient la fin de la première partie et inaugu-
raient la seconde. Mais ces articulations perdaient de leur
netteté pour ceux qui étaient occupés au détail de cérémo-
nies qui se suivaient, s'enchevêtraient et s'interrompaient
de nombreuses parenthèses; en outre la fatale erreur du
scribe qui, vers l'an 700, écrivit le Missale Francoram ou
son modèle, imposa jusqu'en 1961 le titre « Consecratio
altaris » aux gestes de l'eau sur l'autel. C'est pourquoi, aux
évêques qui demandaient de scinder la cérémonie en deux

:
séances, la Congrégation des Rites accordait généralement de
faire la coupure avant ce fameux titre le résultat était qu'on
s'arrêtait le premier jour après avoir béni de l'eau grégo-
riene qui ne servirait que le lendemain, et le second jour
les fidèles butaient encore désespérément devant une porte
fermée, se demandant si elle s'ouvrirait jamais. Pour la
consécration de l'église de Lourdes, nous avions obtenu par
induit que la cérémonie du second jour s'inaugurât par la
procession des reliques, ce qui apparut, à l'expérience, à la
fois très juste et très commode.

fical même :
Désormais, les articulations sont marquées dans le Ponti-
Première partie, Lustration et dédicace de
l'église; Deuxième partie, Déposition des reliques; Troisième
partie, Consécration de l'église et de l'autel. La seconde par-
tie, quoique le titre la distingue autant de la première que de
la troisième, est cependant liée de façon manifeste à la
troisième qui la suit sans interruption; elle est au contraire
bien détachée de la première par le changement de vête-
ments des célébrants et par le déplacement hors de l'église
qu'impose la procession. De plus, la symétrie entre le ser-
vice des lustrations et le service des onctions est accusée par

:
une meilleure ordonnance des grandes prières qui clôturent
chacun d'entre eux une monition du célébrant, un temps
de prière silencieuse à genoux à l'invitation du diacre, puis
une oraison et lechant d'une préface. Ces formules, parfois
dispersées, ont dû être regroupées, et on a supprimé toutes
les autres monitions et tous les autres Flectamus genua.
Je viens de mentionner le changement de vêtements.
Selon l'ancien rituel, le pontife était, durant toute la céré-
monie, en aube, étole et chape blanche, assisté d'un
diacre en aube et étole blanche, ainsi que d'un sous-
diacre en aube; c'est seulement pour la messe que lui et ses
ministres retournaient au secretarium en vue de s'y revêtir.
Désormais, pour la première partiede la dédicace les vête-
ments sont violets; l'évêque et le diacre prennent les vête-
ments blancs au moment de la procession. Ainsi est souligné
le parallélisme avec le rituel pascal et baptismal, la consécra-
tion d'une église rappelant les étapes de l'initiation chré-
tienne selon la remarque de Mgr Duchesne2. J'ai souvent
souhaité cette disposition pour le cas où la cérémonie se
déroulait en deux séances distinctes; mais si on accomplit
-
le rite en une seule séance (le nouveau Pontifical n'envisage

:
pas d'interruption), le changement de vêtements devient
alors fastidieux malheureusement les réformes opérées ces
dernières années n'ont fait qu'en multiplier les occasions,
ce qui n'est ni une simplification, ni un progrès.

I. La vigile de la dédicace.
Outre la préparation pastorale, qui peut s'échelonner sur
un temps assez long et dont nous reparlerons, la dédicace
comporte traditionnellement une vigile. La veille de la céré-

2. L. DUCHESNE, Origines du culte chrétien, 5e éd., Paris, E. de


Boccard, 1920, p. 435.
monie est jour de jeûne pour l'évêque célébrant, le clergé
et les fidèles auxquels appartient l'édifice; cependant, le

de supprimer l'obligation de ce jeûne :


pape Jean XXIII a décidé de modifier le canon 1166, § 2, et
jejunare decet, dit
le nouvel Ordo (n. 4). Mais la vigile est marquée encore plus
par la veillée solennelle que l'on doit faire auprès des reli-
ques des martyrs.
Déjà saint Ambroise, sous la pression de son peuple, avait
donné à la dédicace des basiliques le sens d'une festive depo-
sitio martyrum : les corps des saints Gervais et Protais,
providentiellement découverts, firent l'objet de cortèges
triomphants, de veillées répétées avant d'être ensevelis sous
l'autel de la basilica ambrosiana 3. La consécration d'une
église exige aujourd'hui encore des reliques de martyrs;
remarquons l'intérêt et la piété que ces reliques provoquent
de la part des fidèles lorsqu'elles se rattachent à des noms
connus, comme saint Pierre Chanel ou sainte Maria Goretti.
Ces reliques, préparées et enfermées par l'évêque dans le
coffret qui sera déposé dans le tombeau de l'autel (sur ce
point le nouvel Ordo maintient les dispositions traditionnel-

:
les), seront apportées avec faste jusqu'à laproximité de
l'église à consacrer on suggère des haltes dans les églises
voisines permettant d'élargir le cercle de la préparation à la
fête, d'associer dans la solidarité d'un événement d'Église les
fidèles d'une région ou de toute une ville et de corriger
l'esprit de clocher. Cela suppose d'ailleurs que la dédicace
qui doit avoir lieu mérite cet intérêt : il n'en serait pas ainsi
si l'on s'avisait — comme cela s'est produit trop souvent—
de faire consacrer un édifice construit et utilisé depuis des
siècles ou un oratoire ne répondant à aucune nécessité.

pelle des reliques:


Auprès de l'édifice à consacrer sera aménagée une cha-
ce sera soit l'ancienne chapelle provi-
soire, soit un local décent assez spacieux, soit même, comme
le décrivait l'ancien rituel, une tente. C'est là que l'on
organisera la veillée des reliques. Maison peut prévoir aussi

3. On trouvera plus loin le récit que fait saint Ambroise lui-même


de cette consécration dans sa lettre à sa sœur Marcellina.
une autredisposition, bien que les rubriques ne l'envisagent
:
pas c'est ainsi que lors de la consécration d'une nouvelle
église urbaine, la veillée des reliques a lieu parfois à la

:
cathédrale même, ou bien à l'église paroissiale dont le nou-
vel édifice est comme une filiale après la veillée, un cortège
transporte alors les reliques à la chapelle où elles demeure-
ront jusqu'au lendemain.
La veillée liturgique consiste, comme toujours, dans les
Matines célébrées à trois nocturnes selon le rite festif. Pour
le choix des psaumes, antiennes et leçons, on suivra éven-
tuellement le propre des saints célébrés, sinon le commun
des martyrs. A cet office, le peuple sera invité -— ce qui veut
dire qu'on devra prévoir un bon commentateur et les autres
éléments nécessaires à la participation. Pour les clercs et
réguliers astreints à l'office, ces matines satisfont à leur
obligation (n. 5) saluons avec joie cette précision si libé-
:

rale. Mais au passage, relevons un heureux changement.

:
Jadis, dans l'église consacrée, on commençait à partir de
tierce à célébrer l'office de la dédicace d'une part, cela
fixait de façon trop rigide l'heure de la cérémonie (mon
lecteur me pardonnera mes illusions), d'autre part, cet
office était dépourvu de ses nocturnes. Désormais, l'office
de la dédicace s'inaugure par les vêpres, après l'accomplis-
sement de la cérémonie, et se continue tout le lendemain
selon le rite de première classe; de cette façon aussi, tous les
prêtres reprendront le lendemain la messe propre qui, sans
cela, aurait été réservée a l'évêque seul.
La veillée liturgique est conditionnée par la clause « si
commode fieri potest ». Cette commodité se vérifie évidem-
ment pour une église cathédrale ou conventuelle au clergé
nombreux. Ailleurs, on sera souvent contraint d'organiser
seulement des pia exercitia en maintenant toujours ceux-ci
dans le style d'une vigile biblique, comme le sont les Mati-
nes. La veillée liturgique, d'ailleurs, là où elle aura
effectivement lieu, ne suffira pas, et sera précédée ou suivie
d'autres réunions auprès des reliques, par groupes plus ou
moins nombreux.
2. :
Première partie « lustration et dédicace de l'église ».
Au moment où commence la cérémonie, l'église est
fermée. Comme dans l'ancien rituel, personne ne peut y
demeurer, à l'exception d'un diacre, chargé d'accueillir
l'évêque au moment voulu.
Le clergé se réunit à la chapelle des reliques, où l'évêque
lui-même vient revêtir les ornements et où ont lieu des
prières préparatoires. On a heureusement supprimé les sept
psaumes et la litanie initiale dont nous avait accablés, un
peu dans tous les rites, Durand de Mende. On a maintenu
l'antienne Adesto avec l'oraison Actiones nostras : cela fait
tout demême encore préludes de dévotion, peu cohérents à
une action liturgique.
De la chapelle des reliques, l'évêque et le clergé se rendent
en procession devant la porte de l'église. Je suppose que c'est
là que le peuple attend, mais la rubrique aurait dû le préci-
ser. Le rite commence par la récitation du Deus in adjuto-

génuflexion :
rium avec Gloria Patri, sans chant, ni répétition, ni
il a été entraîné là par le formulaire de béné-
diction de l'eau grégorienne et maintenu sans doute par
égard pour l'Ordo 4r qui le mentionnait déjà au 9e siècle;
mais ces motifs ne persuadent guère de son utilité. En
-
revanche, il manque un chant d'entrée, qui eût été très
bien le vieux répons Fundata est (Isaïe, 2, 2) avec des versets
du psaume 125 (venientes autem venient cum exsulta-
tione.).
tinctes, avec mélange d'ingrédients différents :
L'ancien rituel prévoyait deux bénédictions d'eau dis-
pour les
lustrations extérieures, de l'eau mêlée de sel, bénite selon le
formulaire ordinaire du missel; pour les lustrations inté-
rieures, l'eau dite bien à tort « grégorienne »,
laquelle on mêle du sel, des cendres et du vin. Désormais,
dans

toutes les lustrations se font avec l'eau grégorienne. Celle-ci


conserve son extraordinaire alchimie, qui de surcroît réunit
les usages liturgiques de diverses églises de l'antiquité; elle
maintient la plus grande partie de son formulaire, puzzle
de prières d'origine variable (certaines sont wisigothiques) :
on n'a élagué que la longue formule Sanctificare, qui était
un curieux centon de pièces hispaniques, dont une bénédic-
tion de l'eau baptismale! Il eût fallu courageusement sup-
primer ces complications inintelligibles; il est vrai qu'on
suggère, par la rubrique et même par la typographie, que
l'eau peut être confectionnée à l'avance, ce qui ne fait
qu'aggraver la chose, comme je l'expliquerai plus loin. La
solution était, me semble-t-il, de bénir de l'eau, sans plus,
avec comme formule l'exorcisme propre (. ut repellas) qui
est excellent, et l'oraison commune Deus ad salutem : tout
le reste est médiocre ou même mauvais, car les textes ne
correspondent pas à la circonstance.

:
Avec cette eau, l'évêque fait toutes les aspersions au
moyen d'une branche d'hysope on a heureusement con-
servé l'usage de cette plante biblique, liée à tous les rites de
purification, et qui nous débarrasse, au moins en cette cir-
constance, de notre matériel banal de sacristie.
Au lieu de trois lustrations extérieures autour de l'édifice,
l'évêque n'en fait désormais plus qu'une; il asperge sans

souhaitable que la même règle fût appliquée partout un :


rien dire, ce qui est un progrès intéressant, — il eût été

geste peut suffire à lui-même sans qu'il ait l'accompagne-


ment obligé de paroles. La lustration est une vraie proces-
sion, entraînant lepeuple à la suite de l'évêque; un chant
l'accompagne, le psaume 86 (qui occupait jadis une autre
place), antiphoné avec le refrain Bene fundata est. Je regrette
qu'on n'ait pas mis plutôt le psaume 23, traditionnel dans
l'antiquité et en Orient, pour le débutde la Dédicace. Après
cette lustration, l'évêque chante l'oraison Omnipotens sem-
piterne Deus qui in omni loco : elle se trouvait déjà dans le
Pontifical rhénan du 10e siècle, comme les deux qui suivaient
les autres lustrations aucune des trois n'était d'ailleurs ni
:

tout à fait négligeable, ni tout à fait satisfaisante.


L'entrée dans l'église donne lieu, comme dans l'ancien
rituel, à un dialogue entre l'évêque et le diacre demeuré à
l'intérieur. On aurait pu élaguer encore, semble-t-il. Inno-
vation importante, le clergé et le peuple entrent à la suite
de l'évêque, alors que précédemment ils devaient demeurer
dehors. Je regrette la strophe Pax aeterna qui accompagnait
si joyeusement l'entrée. Mais celle-ci se fait au chant des
litanies des saints, selon le formulaire de la.Nuit de Pâques,
ce qui est une heureuse innovation; on y ajoute le nom des
saints dont les reliques doivent être ensevelies dans les
autels (sans les doubler) et l'on invoque trois fois le titulaire

:
de l'église. Il eût été bien d'arrêter la litanie après le triple
Agnus Dei les cinq invocations finales, quelque tradition-
nelles qu'elles paraissent, donnent la fâcheuse impression
d'un recommencement. On a bien fait de supprimer le Veni
Creator.

:
Des deux oraisons qui clôturaient la prière litanique, une
seule a été retenu Magnificare, du Sacramentaire gélasien,
préférable à l'autre qui s'y était ajoutée au 13e siècle. On
a supprimé la signation de la porte (elle faisait triple em-
ploi!) et la prière si critiquable qui l'accompagnait. Suivent
les aspersions de l'intérieur de l'église et de l'autel.
Dans l'ancien rituel, les gestes de l'eau et de l'huile
étaient toujours accomplis d'abord sur l'autel avant de se
prolonger sur les murs de l'édifice; cet ordre, résultat d'une
tradition millénaire, soulignait la place de l'autel, véritable
centre et lieu essentiel de l'église. Je ne vois pas comment
la nouvelle disposition se justifie.

:
On n'a conservé que deux des nombreuses aspersions que

axes. Deux psaumes antiphonés les accompagnent :


prévoyait l'ancien rite à l'intérieur de l'église l'une en
faisant le tour de l'édifice, l'autre en parcourant les deux

(Laetatus sum), avec le refrain Haec est domus Domini, le


le 121

:
83 (Quam dilecta), avec le refrain Non est hic aliud. Une
seule oraison clôture ces gestes et ces chants Deus sancti-
ficationum, tirée du Sacramentaire gélasien (l'oraison Deus
qui loca se retrouvera à une autre place).
Les gestes sur l'autel étaient fixés depuis le vieux Missale
Francorum du t-8 siècle; c'étaient ceux mêmes que
Moïse avait accomplis dans Ex., 29, 12-18 et Lev., 8, 11.
:
Il n'en reste désormais que deux l'évêque fait une fois (et
non plus sept fois) le tour de l'autel en l'aspergeant, puis,
avec le pouce trempé dans l'eau grégorienne, il trace cinq
croix sur la table. On a abrégé et simplifié4 la formule qu'il
doit réciter, attestéedès le IÙe siècle; mais n'aurait-on pu la
supprimer complètement, puisque les gestes et le chant sont
toujours suivis d'une prière du célébrant? Ici le chant est
tiré du psaume 42 et la prière est la formule Singulare illud
propitiatorium, attestée déjà au Sacramentaire de Gellone;
elle est très belle, mais elle pose des problèmes de critique
textuelle et suppose un cérémonial de consécration un peu
différent de celui qui a été retenu.
C'est après les aspersions que le nouveau rituel place le
geste de l'alphabet. Avec des cendres, selon la tradition,
- mais qu'on peut désormais remplacer par du sable, —
deux bandes diagonales ont été tracées, dans lesquelles
l'évêque, du bout de sa crosse, écrit successivement l'alpha-
bet grec et l'alphabet latin. Le refrain 0 quam metuendus
est accompagne toujours le geste, antiphoné non plus avec
le Benedictus, mais avec le psaume 47, qui est un psaume de
dédicace, heureusement introduit dans la cérémonie. Cepen-
dant, il faut faire deux remarques. Dans l'ancien rituel,
l'alphabet s'écrivait sur le sol d'un édifice vide, et pouvait
donc s'étaler aux dimensions même de la nef; la présence
nouvelle des fidèles va gêner et réduire singulièrement son
ampleur; les rubriques nous y résignent, en mesurant
« trois mètres environ » et en admettant que seul le pres-
byterium soit signé. Par ailleurs, l'alphabet se situait tradi-
tionnellement dès l'entrée dans l'église; pourquoi l'a-t-on
transporté après les aspersions? On pouvait objecter que les
aspersions, accomplies par-dessus les cendres, salissaient
le sol; mais les cendres, placées sur le sol mouillé, ne font
pas mieux. Plutôt a-t-on pensé que les aspersions, signifiant
purification et exorcisme, devaient précéder un geste inter-

4. Réjouissons-nous qu'on ait supprimé les trois signes de croix qui


venaient chaque fois s'ajouter à celui de l'onction elle-même. Nous
nous sentons de moins en moins disciples de saint Patrick.
prêté comme prise de possession du lieu au nom du Sei-
gneur : possessio et dedicatio. Les historiens n'ont jamais
donné de l'alphabet une explication pleinement satisfai-

:
sante, quoique finalement l'évocation de l'arpenteur soit la
plus parlante. On a bien fait de le conserver il est une des
choses qui suscitent, de la part du public, le plus de curio-
sité et d'intérêt.
Les prières que clôturent la première partie et en consti-
tuent le sommet sont introduites par la monition Deum
omnipotentem, qui était précédemment placée avant les
lustrations de l'autel. Mais le texte en a été entièrement revu
et restitué en la teneur qu'il avait au Pontifical du 10e siècle.

fical romano-germanique
Celle-ci a été remaniée
::
La prière du célébrant comporte d'abord l'oraison Deus qui
loca, du Sacramentaire gélasien 5, puis la préface du Ponti-
Vere dignum. adesto precibus.
l'addition ieque suppliciter exorare
rend la suite des idées plus cohérente (il serait souhaitable
que l'on retouchât de la même façon la préface des Apôtres
au, missel); en revanche on a supprimé les acclamations
trinitaires dont le lyrisme, voisin de la laus cerei, est peu
habituel dans les préfaces romaines, et les allusions à des
guérisons charismatiques.

3. Deuxième partie : Déposition des reliques.

Les célébrants ayant déposé les vêtements violets et mis


les vêtements blancs, clergé et peuple partent en procession
chercher les reliques. Les processions exigent beaucoup de
préparation et d'organisation; leur difficulté croît en pro-
gression géométrique avec l'affiuence. Il faut donc que
celle-ci soit prévue minutieusement et dirigée selon une
technique expérimentée. Les rédacteurs du nouvel Ordo
ont-ils craint que ces conditions défaillent souvent? Une.

5.
:
L'oraison Deus sanctificationum, qui lui est toujours associée
depuis le vieux Gélasien, s'en trouve désormais séparée nous l'avons
déjà signalé ci-dessus, p. 14.
:
rubrique témoigne, en tout cas, de leur hésitation « Si
tamen multitudo fideliummagna sit et praevideatur quod
non sine boni ordinis et devotionis detrimento ab ecclesia
exire possint. » Certains peuples sont peut-être plus
rebelles que d'autres au bon ordre et au recueillement; mais
les pasteurs qui ont l'habitude du maniement des foules
ne reculeront pas devant la peine, car la procession des reli-
ques est le plus grand moment de la dédicace.
L'ancien Ordo ne prévoyait aucun chant pour aller de
l'église à la chapelle des reliques. C'est durant ce trajet
que l'on chantera O quam gloriosum, Movete, Ecce popu-

:
lus, Via sanctorum. Mais la rubrique du n. 27 donne toute
liberté d'ajouter d'autres chants, même des cantiques « vel
etiam cantus popularis in honorem sanctorum ». A la cha-
pelle, l'évêque chante l'oraison Fac nos Domine (elle se
trouvait dans certains sacramentaires du 8e siècle); on a
supprimé Aufer a nobis, et avec raison, malgré son ancien-
neté. Au retour. on doit avoir perdu le peuple en chemin,
puisqu'il a été oublié dans la rubrique du n° 291 Sont pré-
vus, comme chants, le psaume Ill9 avec l'antienne Istorum,
le psaume 150 avec l'antienne Ingredimini, et éventuelle-
ment des cantiques. Je regrette — pour leur texte, non
pour leur mélodie qui était mauvaise — les chants suppri-
-
més : Cumjucunditate,Surgite sancti Dei, Ambulate sancti.
Il n'y a plus de station à la porte, comme dans l'Ordo

d'uneinauguration que lui donnait l'ancien usage à la :


précédent; d'ailleurs l'entrée dans l'église n'a plus le sens

suite des reliques, le peuple entrait pour la première fois,


après avoir attendu si longtemps au-dehors, alors que désor-
mais chacun va regagner la place qu'il occupait tout à
l'heure.
Dès qu'elles ont été apportées près de l'autel, les reliques
sont encensées puis ensevelies par l'évêque dans leur sépul-
cre. Les gestes ont été simplifiés le plus possible: dès que
les reliques ont été déposées, un maçon fait, avec l'eau gré-
gorienne, le ciment que l'évêque bénit aussitôt (l'ancien
Ordo faisait préparer le ciment par l'évêque lui-même et
c'était beaucoup plus expressif; la présence du maçon à ses
côtés suffisait à guider son éventuelle inexpérience); l'évê-
que scelle la pierre du sépulcre. Pendant ce temps, l'on
chante les deux antiennes Sub altare Dei et aussi l'antienne

:
Corpora sanctorum. L'évêque clôture par l'oraison du Sa-
cramentaire grégorien Deus qui ex omni COAPTATIONE, selon
l'antique formule, maladroitement corrigée au moyen âge
et aujourd'hui heureusement rétablie. Il faut se réjouir que
tout le reste ait disparu, notamment les nombreuses onc-
tions du sépulcre et de sa pierre.

4. Troisième partie
tel».
: « Consécration de l'église et de l'au-

Le titre « consécration » désigne les rites de l'huile. On


n'utilise plus désormais l'huile des catéchumènes, qui
n'avait aucun symbolisme valable ici; toutes les onctions
sont accomplies avec le saint chrême, et d'ailleurs leur
nombre est réduit.

:
Il faut faire ici la même remarque que pour la première
partie l'ordre traditionnel a été inversé, l'onction des murs
précédant désormais l'onction de l'autel.
L'onction des murs demeure toujours l'un des grands
moments de la dédicace. Son symbolisme en est très obvie,
et le chant du Lauda Jerusalem facilement très populaire.
A chacune des douze onctions le geste s'accompagne d'une
formule — simplifiée certes parrapport à l'ancien rituel,
mais dont la suppression aurait été meilleure — et de l'en-
censement. Mais quelle innovation ridicule et blâmable de
faire essuyer l'onction par un prêtre! Cela énerve la portée
du signe, et constitue un vestige de la méthode qui a défi-
guré tant de gestes liturgiques, les rendant étriqués et for-
malistes.
Avec le chant traditionnel du Lauda Jerusalem et de
l'hymne Caelestis urbs, on a maintenu les répons Haec est
Jerusalem et Plateae tuae dont le texte, là encore, est excel-
lent mais dont la mélodie est peu en rapport avec la cir-
constance. Nous reviendrons plus loin sur les problèmes
du chant. Par ailleurs, au moment où l'évêque passe devant
la porte principale, il fait avec le saint chrême l'onction
desmontants qui se pratiquait jadissur la façade extérieure,
et l'on a maintenu par ce geste la formule, bonne à la
vérité, du Pontifical rhénan; mais le résultat navrant de
cette disposition nouvelle, c'est qu'elle fait interrompre le
chant, qui ne reprendra qu'ensuite; le rite des onctions des
murs se trouve donc scindé en deux, et l'interruption du
chant, dans le moment précis où il soulève le mieux la
masse des participants, est une grosse erreur du point de
vue technique comme du point de vue pastoral.
Gestes et chants sont conclus, comme toujours, par la
prière du célébrant; ici, c'estl'oraison Deus qui in omni
loco, qui était précédemment placée avant la sépulture des
reliques; elle a, des titres de noblesse par son ancienneté,
puisqu'elle figurait déjà dans l'Ordo 42, mais son contenu
demeure très en dehors de la magnifique perspective qu'ou-
vrait le rite de l'onction des murs.
L'onction de l'autel est sans doute la partie qui a subi
les plus radicales simplifications. Dans l'ancien rite, l'on
s'en souvient, quatre encensements, solennisés par le chant
du Dirigatur, précédaient chacun une prière, puis un geste

psaume:
d'onction accompli au chant d'une antienne et d'un
deux onctions des cinq croix avec l'huile des calé-
chumènes, une autre avec le saint chrême, enfin l'effusion
par toute la table des deux huiles mêlées. A des moments
ultérieurs de la cérémonie, s'ajoutaient l'onction du front
de l'autel et quatre onctions destinées à marquer la fixation
immuable de la table sur ses bases. Désormais, en un uni-
queet même rite, l'évêque fait, avec le saint chrême seul,
une onction sur chacune des cinq croix, puis l'onction sur
le front de l'autel et les quatre onctions sur la jointure de
la table avec les bases. A mon avis, le choix aurait dû être
meilleur; les dernières onctions pouvaient disparaître sans
laisser de regrets, sinon à quelques juristes qui se seraient
demandés quelle différence il restait entre l'autel fixe et
l'autel portatif; en revanche, la disparition de l'effusion
d'huile sur toute la table, difficile j'en conviens à réaliser,
est une perte très grave, sur laquelle je reviendrai..
Les onctions s'accompagnent de formules. C'était inu-

onctions ont pour formule :


tile, comme on l'a vu plus haut. De plus, certaines de ces
« In nomine Patris et Filii et
Spiritus sancti », qui ne peut être approuvée pour bien des
motifs.
Un seul chant a été conservé : Unxit te Deus avec le
psaume 44, selon la tradition de la liturgie wisigothique. Il
faut convenir que ce choix, bien qu'étranger à l'usage ro-
main (c'est le Pontifical germanique qui a fait cet emprunt
à l'Espagne), est excellent, il attire l'attention sur le sym-
bolisme le plus radical de l'autel, signe du Christ, notre seul
autel véritable.
Et de même, un seul encensement demeure, pratiqué
après l'onction. Il a, hélas! bien perdu de son faste « altare
thurificat ut fit in missa solemni ». Il ne s'accompagne plus
:
du Dirigatur, dont la difficulté d'exécution et la longueur
créaient des ennuis, et qu'à cause de cela on regrettera
moins, mais des trois antiennes, reprenant le thème
d'Apoc., 8, 3-4, Stetit angélus. C'est l'oraison qui évoque
le symbolisme de l'encens selon le psaume 140 : elle avait
été introduite par Durand de Mende. Peut-êtrecelledu Sacra-
mentaire de Gellone, Cleinens et propitius était meilleure.
Tous les autres formulaires ont été supprimés.
Nos yeux se réjouiront toujours de voir brûler les grains
d'encens sur les croix de l'autel — bien que leur flamme
ne se reflète plus désormais sur la table toute recouverte
d'huile. On a en effet maintenu ce très beau geste de l'an-
cien rituel, et de même le chant du Veni sancte Spiritus. La
bénédiction de l'encens a conservé sa formule6, mais elle
peut s'accomplir à l'avance. La mauvaise rubrique qui inci-
tait certains cérémoniaires à faire disparaître l'encens sans
attendre qu'il ait fini de brûler a heureusement été abolie
à l'expérience, il est si agréable de voir se consumer l'en-
:
6. :
Elle est wisigothique Liber ordinum, éd. FÉROTIN, col. 177.
cens jusqu'au bout et s'éteindre progressivement de lui-
même tandis que l'évêque chante la préface 1 C'est ce qui
se pratiquera enfin partout.
Dès que le verset du Veni sancte est achevé, l'évêque in-

:
vite en effet à la prière solennelle, comme à la fin de la pre-
mière partie. La monition au peuple Dei Patris omnipotentis
misericordiam dilectissimi fratres, est mieux située que dans
l'ancien rituel; son texte a été revu sur le Sacramentaire géla-

::
sien d'où il provient. Après la monition, un temps de prière
silencieuse est annoncée par le diacre Flectamus genua;
il est suivi de la double prière du célébrant l'oraison Deus
omnipotens, qui remonte également au Sacramentaire géla-
sien (le texte en a été revu), et la préface Vere dignum.
et ut propensiori. Cette préface, comme la première, se
chante intégralement, y compris la conclusion l'usage mé-
:

:
diéval imposait à toutes les grandes prières consécratoires
une morne finale « submissa voce, ita tamen quod a cir-
cumstantibus audiatur », sans doute parce que le chant
in tono praefationis ayant été démarqué de la préface de la

:
messe qui ne comporte pas de conclusion, on ne savait pas
comment le compléter. Autre remarque les signes de croix,
qui étaient prescrits à l'évêque chaque fois qu'il employait
les verbes benedicere ou sanctificare, ontdisparu. Souhai-
tons que des réformes semblables s'étendent aux autres for-
mulaires liturgiques.
Après le sommet que constituent les prières, il reste à
procéder à la vêturede l'autel. Le nouveau Pontifical admet
que la bénédiction des nappes et autres objets7 ait lieu à
l'avance, ce que je déplore. Il prévoit surtout que la vêture
de l'autel se fera après que l'évêque aura quitté l'église
pour le secretarium, où il va se préparer pour la messe; je
suis un peu gêné pour critiquer cette manière de faire,
:
l'ayant moi-même a dmise en certains cas lorsque le rite
comportait la présence et l'intervention de plusieurs évê-

formule a été revue; celle de la consécration des autels reprend


7. La
à peu près le Gélasien, n. 695, et le Missale Francorum, n. 60; celle
de la dédicace des églises est tirée du Pontifical romano-germanique.
ques, volontiers je laissais à l'un des consécrateurs des
autels secondaires le soin de présider à la vêture de l'autel
majeur, pour éviter aux fidèles le temps mort que consti-
tuait pour eux la préparation à la messe du célébrant prin-
cipal et de ses ministres. Cependant, dans la disposition
actuelle, la vêture de l'autel, se faisant sans la présence
d'un évêque et sans aucun des chants appropriés que pro-
posait l'ancien Ordo, risque d'apparaître comme un simple

:
détail matériel, une affaire de sacristains, alors qu'elle est
un des rites de l'initiation l'autel, lavé et oint, est vêtu
de blanc et illuminé. Il est vrai que la nef n'est pas silen-
cieuse : on chante Confirma hoc Deus, antienne qui a ce-
pendant perdu son sens ancien, puisqu'elle accompagne
non plus son psaume 67, mais le 95, qui figure désormais
pour la première fois à la dédicace. Mais quel dommage de
n'avoir plus l'admirable répons Induit, provenant de l'An-
tiphonaire de Leénj
Avant de quitter l'église pour le secretarium., l'évêque
salue le peuple et le diacre chante Benedicamus Domino.

:
Cette acclamation était traditionnelle, mais elle ne semble
pas pour autant heureuse à cette place c'est la façon gal-
licane de congédier une assemblée; or, loin d'être congé-

:
diée, l'assemblée doit se rendre compte que l'essentiel est
encore attendu la messe.

5. La messe de la dédicace.

La messe a une telle importance pour le rituel de la dédi-


cace que, dans l'usage romain primitif, elle en constituait
même l'acte unique8. Du moins, dans le droit actuel est-
ellequalifiée de pars totiusritusconsecrutionis M. C'est
«
pourquoi, la messe propre de la dédicace est l'unedes rares
messes votives de première classe; elle n'est empêchée que par
la semaine sainte, la Vigile de Noël, les fêtes de Noël, Epi-
phanie, Ascension, Pentecôte et Fête-Dieu et le jour des

8. Cf. La Maison-Dieu, 63, p. 8^


Morts : mais à ces divers jours, la cérémonie elle-même de
la dédicace est interdite (n. 50). C'est pourquoi aussi, dit
la rubrique n° 50, « il vaut mieux que l'évêque la célèbre
lui-même, quoiqu'il puisse y déléguer un prêtre ».
Et si
l'on craint trop de longueur ou de complication d'une
messe pontificale, la messe lue comportera les mêmes pri-
vilèges que les messes d'ordination, l'évêque usant de tous
les pontificaux.
A cette messe, il n'y a ni prières du bas de l'autel au dé-
but nidernier évangile à la fin, comme à la vigile pascale.
On ajoute, subunica conclusione, l'oraison du titulaire; on
ne fait aucune autre mémoire, même privilégiée.

nelle et fait proclamer des indulgences :


A la fin de la messe, l'évêque donne la bénédiction solen-
par concession
expresse du pape Jean XXIII et par dérogation du ca-
non 1166, § 3, il accorde une indulgence plénière aux fidèles
présents et à ceux qui visiteront l'église ce jour-là, ainsi
qu'une indulgence de cinq cents jours au jour anniversaire.
Ces indulgences, inscrites sur le parchemin qui a été dé-
posé dans le coffret des reliques, sont proclamées, exception-
nellement, au nom de l'évêque consécrateurmême s'il est
dépourvu de juridiction sur le territoire9.

II. — APPRÉCIATION DU NOUVEAU RITUEL

Pour apprécier une réforme liturgique, on peut se placer


à différents points de vue, ce qui entraîne des jugements
de valeur fort discordants.

I. Du point de vue de la structure des cérémonies.


Nous nous attarderons peu aux réactions que nous avons
éprouvées comme maître de cérémonies. Au vrai, ces réac-

9v Disposition qui n'est pas nouvelle, puisqu'elle était dans le Code,


can. II66, § 3, mais qui n'avait pas été remarquée par J. HAEGY dans
la 7e édition, 1926, de son Cérémonial de la consécration des églises.
tions, nous les avons déjà exprimées au fur et à mesure que
nous décrivions le nouveau rituel et ses abrègements. D'ail-

:
leurs, ce point de vue demeure accessoire et provoque des
déformations regrettables trop souvent, hélas, nous avons
tendance à aménager une cérémonie en fonction de notre
commodité ou de notre littéralisme, au mépris de l'assem-
blée et du vrai sens des rites.
Cependant, il nous reste à signaler, dans cette ligne, les
intéressantes rubriques introduites par le nouveau Ponti-
fical pour organiser l'intervention de plusieurs évêques,
consacrant les autels secondaires tandis que le célébrant
principal consacre l'autel majeur. La chose n'était pas pré-
vue par l'ancien Pontifical, mais les auteurs proposaient
diverses solutions, que chaque cérémoniaire complétait de
son expérience personnelle. Les rédacteurs du nouvel Ordo
ont cherché à faire de la présence de ces évêques une
vraie concélébration, évitant une simple juxtaposition de
cérémonies synchronisées. Ils prennent les vêtements pon-
tificaux dès le début du rite, ce qui est bien préférable; ils
n'interviennent pas pour la bénédiction de l'eau grégo-
rienne, faite par un seul; lorsque l'on est entré dans l'église,
ils viennent se mettre auprès du célébrant principal pros-
terné pour la litanie, mais celui-ci chante seul les formules
Ut locum istum.; ils se rendent à leurs autels respectifs

sions prévues:
après les aspersions de l'édifice, en vue d'y faire les asper-
ils disent submissa voce l'oraison Sin-
gulare illud, chantée par le principal consécrateur; durant
le tracé de l'alphabet, ils s'assoient près de leurs autels;
ensuite ils viennent se regrouper près du président
qui chante seul les prières terminales de la première par-
tie. Ils participent à la procession des reliques, mais la

:
rubrique concernant la distribution des coffrets après la
procession n'est pas bonne c'est le principal célébrant qui
devrait faire lui-même cette distribution à ses collègues,
comme le prévoyait Haegy et comme nous l'avons toujours
fait pratiquer; la courtoisie des mœurs doit s'étendre aux
actions liturgiques! Chaque évêque bénit le ciment (pour-
quoi pas une unique bénédiction ?) :
chacun dit, avec le
président qui la chante, l'oraison Deus qui ex omni coap-
tatione. Les évêques sont assis pendant l'onction des murs;
ils font, en même temps que le président, les onctions et
l'encensement de leurs autels respectifs; ils disent l'oraison
Dirigatur. Pour les grains d'encens, il semble que chacun
enfait la bénédiction, si elle n'a pas eu lieu à l'avance, et

disant :
le cas du verset Veni sancte est obscur, car la rubrique 48 a
«eadem peragunt et dicunt unusquisque ad suum
altare », je craindrais qu'elle ne vise le Veni sancte et ne
nous rejette dans la mauvaise habitude ancienne de dire
en aparté ce qui est chanté par le chœur. Pour les prières
solennelles de cette partie, le célébrant principal ayant fait
seul la monition au peuple, tous les évêques, chacun à son
autel, disent submissa voce en même temps que le prési-
dent, l'oraison et la préface. Si les nappes et autres orne-
ments des autels n'ont pas été bénits à l'avance, chaque
évêque y procède, après quoi on les perd de vue complète-
ment, ignorant quand et où ils quittent les pontificaux pour
reprendre l'habit de chœur. Bien sûr, il n'y a qu'une seule
messe. Mais je pense que, le surlendemain, on peut dire
sur ces autels secondaires la messe de leur titulaire avec
l'oraison In dedicatione altaris.

2. Du point de vue de l'histoire.

On peut aussi étudier le nouveau rituel du point de vue


de l'historien, se demander si l'on a conservé les parties
les plus anciennes et les plus vénérables, si c'est une inno-
vation ou une restauration. Là encore, nous avons déjà
fait de nombreuses remarques, tout en décrivant la céré-
monie. Mais nous ne nous y attarderons pas outre mesure.

fondue avec l'archéologie :


En effet, la réforme liturgique, de soi, ne saurait être con-
Viollet-le-Duc nous a d'ail-
leurs appris, par ses propres erreurs, combien il est facile
de transformer et défigurer ce qu'on prétend seulement
restaurer. L'étude de l'histoire liturgique a pour objet de
connaître exactement les richesses du passé, de retrouver
la spontanéité qu'avaient les choses et les rites lors de leur
création, de redresser les déviations, de discerner l'essentiel
de l'accidentel, de fournir comme l'axe des évolutions ulté-
rieures. Dans le cas de la dédicace, l'histoire nous montre
combien la conception occidentale de l'autel est différente
de l'orientale, comment aussi les rituels de Rome, de la
Gaule, de l'Espagne, tous porteurs de valeurs magnifiques,
offrent cependant des aspects fragmentaires, insuffisants,
au point qu'on a toujours cherché à les amalgamer en des
synthèses jamais satisfaisantes. Lorsque nous déplorons la
disparition de telle formule, de tel geste, de tel chant, ce
n'est pas à cause de son ancienneté, mais à cause de sa
signification, de sa valeur de prière et d'enseignement. A

aucune valeur supplémentaire :


plus forte raison, la « romanité » des rites ne leur donne
les formulaires romains de

:
la dédicace sont les plus pauvres. Finalement, d'autres cri-
tères de discernement doivent être utilisés ceux mêmes que
les rédacteurs du nouvel Ordo se sont proposés.

3. Du point de vue pastoral et spirituel.

Le décret qui inaugure le nouveau Pontifical et l'authen-


tifie précise que la révision et l'abrègement recherchés des
actions liturgiques ont eu pour but de rendre aux fidèles

lement l'intelligence de leur signification profonde :


plus facile la participation à ces actions et plus facile éga-
« ita
ut a fidelibus et facilior eveniat (Jd illas participatio et earum
profundae significationis intelligentia ». C'est pourquoi le

:
rite exige non seulement une préparation matérielle, mais
aussi une préparation pastorale, prévue désormais dans les
rubriquespréliminaires l'essentiel de cette préparation,
pour la dédicace, consistera justement à expliquer les rites
et leur signification, à donner aux fidèles l'amour de leur
église, le souci de sa conservation et de sa beauté (n. 8).
C'est donc en fonction de cette préoccupation pastorale et
spirituelle qu'il faut étudier le nouvel
ché a-t-il été atteint?
:
Ordo le but recher-

a) La participation du peuple en général.


Nous avons déjà relevé un bon nombre de rubriques con-
cernant la participation du peuple, notamment sa place dans
les processions. Il n'y a plus aucune partie de la cérémonie
qui se déroule en son absence. Les monitions de l'évêque
au peuple, moins nombreuses, n'en seront que plus remar-
quées : elles visent à obtenir la prière silencieuse que cha-
que fidèle fera à genoux, avant qu'elle soit résumée dans
sa propre prière de célébrant. Souvent revient la rubrique
« Omnes respondent », « Omnes dicunt », selon la tradition

:
des vieux Ordines Romani; j'avoue trouver plus belle la
tradition ancienne de l'Orient « ÀaÓs, le peuple », for-

mule plus biblique et plus théologique, — mais nos clercs


latins en auraient conclu qu'ils étaient exempts des devoirs
des fidèles et. qu'ils pouvaient prendre, pendant ce temps,
de l'avance pour leur bréviaire.

b) La participation au chant.
La révision du répertoire des chants doit permettre une
participation plus grande des fidèles. Des chants populaires
sont prévus pour la procession des reliques, tant à l'aller
qu'au retour.
Ces chants populaires sont pratiquement à créer, en s'ins-
pirant des antiennes actuelles ou des anciennes qui étaient
si expressives; le style devra en être triomphant, mais les
refrains doivent permettre à une foule non exercée de s'y
joindre presque aussitôt.
La Commission a délibérément et à très juste titre main-
tenu, pour les psaumes, le texte de la Vulgate. En attendant
qu'une décision soit prise pour l'avenir, espérons que nous
ne verrons plus introduire dans les pièces chantées la ver-
sion de l'Institut biblique dont nous avons souvent dit les
inconvénients.
Relevons avec joie l'accent mis par les rubriques sur le
caractère fonctionnel des chants accompagnant les actions :
ce sont des psaumes, chantés à deux chœurs, mais avec
répétition de l'antienne chaque deux versets, formule qui
était un peu celle que prévoyait le Pontifical pour la con-
sécration des autels seuls. Lorsque l'action qu'il accom-
pagne est terminée, on arrête le chant, méthode que je fai-
:
sais moi-même pratiquer déjà. Mais les antiennes étaient
souvent, dans l'ancien Pontifical, mal choisies trop lon-
gues, trop ornées, elles consistaient parfois en remplois de
répons prolixes, de graduels ou autres pièces, inutilisables
comme refrains. On a donc choisi, autant que possible, des
formules brèves, capables d'être bien rythmées et mémo-
risées. Parfois, la mélodie en a été retouchée, et dans le cas
où une mélodie ad libitum était plus simple ou plus chan-
tante, cette dernière a été préférée. Par exemple, le répons

Mais la méthode adoptée a été trop timide :


Stetitangelus a été fractionné en trois antiennes.
les révisions
de mélodies n'ont porté que sur des détails, en vue de retour-
ner à la leçon des manuscrits. Or certaines antiennes de-
meurent décevantes, comme rythme et comme mélodie;
les répons et chants prolixes, devenus facultatifs, seront

:
relégués, mais nous verrons tout à l'heure le dommage que
cela fait subir à la cérémonie le bon principe qui a gardé
les antiennes brèves et écarté les antiennes longues a en-
traîné la conséquence inattendue d'un appauvrissement du
sens des rites. Il aurait fallu s'arracher à la superstition du
répertoire traditionnel et créer, en vue des textes et de leur
fonction, des mélodies nouvelles lorsqu'on ne pouvait en
utiliser d'anciennes, comme l'a fait très bien Dom Pothier
en 1912 pour l'antiphonaire. Aucun progrès du chant litur-
gique n'est possible si l'on considère le répertoire comme
clos, et jamais l'Église romaine n'a accepté cette hypothèse.
Il faut reconnaître que la tradition musicale du Pontifical
romain était mauvaise depuis le moyen âge, et doit être
entièrement reconsidérée dans l'avenir.
c) L'intelligence des signes.
La simplification, qui a supprimé tant de surcharges,
devrait aider à mettre mieux en valeur les rites qui ont
été conservés. Il sera plus facile de donner l'intelligence
de signes moins nombreux. Parce qu'ils ne sont pas répé-
tés plusieurs fois, comme dans l'ancien rituel, on compren-
dra que leur accomplissement revêt plus d'importance.
Malheureusement, il faut constater que les rubriques ne
-
les ont pas seulement simplifiés, mais amenuisés. Jadis, au
cours de la dédicace, les signes étaient traités avec une

:
opulence qui faisait de la cérémonie une pédagogie hors
de pair encensements continuels en faisant le tour com-
plet de l'autel, qui remplissaient l'édifice de fumée odo-
rante; effusion du chrême par tout l'autel selon le geste de

passera négligeable et inaperçu :


Jacob à Béthel. Désormais, le seul encensement maintenu

:
ut fit in missa solemni.
L'effusion du chrême par tout l'autel est supprimée l'onc-
tion se réduit à faire cinq signes de croix avec le pouce
imbibé; le geste est donc définitivement dégradé en pure
« cérémonie ».
appauvrissement :
Aucun argument ne me paraît excuser cet
ni la difficulté qui comportait l'effusion
d'une grande quantité d'huile avec le risque de tacher le

:
sol et les vêtements; ni le fait qu'elle avait été introduite
tardivement dans le Pontifical romain Mgr Borella a mon-
tré que primitivement les cinq croix étaient faites non
pas avec le doigt imbibé, mais avec l'huile coulant de
l'urne, et que la même abondance se vérifiait dans les onc-
tions du baptême et du sacre de l'évêque1°. J'ai signalé plus
haut comment le tracé de l'alphabet s'était, lui aussi,
resserré dans un espace plus restreint.
D'autre part, comme nous l'avons déjà signalé, le nouveau
Pontifical prévoit que la bénédiction de l'eau grégorienne,
de l'encens et des vêtements de l'autel peut se faire au préa-
lable et même la disposition typographique invite à adopter
cette solution. C'est pourtant bien regrettable; en effet,

10. P. BORELLA, L'effusione del crisma, dans Ephemerides Litargicae,


73, 1959, pp. 216-218.
les bénédictions sont une prière et si elles sont prononcées
par un ministre qualifié, elles supposent pourtant qu'à cette
prière s'unit une assemblée présente; c'est en l'écoutant que
l'assemblée apprend comment des choses visibles que l'on
bénit il faut s'élever jusqu'auxinvisibles qu'elles évoquent.
Tout le mouvement des réformes récentes était dans ce
sens, notamment le nouveau rituel des Rameaux qui exige
une participation du fidèle à l'action liturgique pour le
bon usage de l'objet bénit. Priver les fidèles d'entendre ces
formulaires et de s'y unir par la prière, c'est appauvrir le

de maintenir la bénédiction
suffirait à les sanctifier.
:
symbolisme et du coup on ne voit plus pourquoi il y a lieu
l'usage liturgique des choses

d) Les thèmes bibliques.

L'ancien rituel de la dédicace était — nous le soulignions


naguère11 — une riche symphonie de thèmes bibliques, de

:
laquelle se dégageait une admirable pédagogie. Ces thèmes
bibliques étaient présentés surtout par les chants psaumes
et antiennes. Or la réduction du rituel, entraînant la dis-
parition d'un grand nombre de ces chants, a obligé à faire

biblique :
un choix, mais ce choix est demeuré extérieur au contenu
on a choisi les chants les plus faciles à exécuter
comme refrains, se refusant à modifier la tradition mélodi-
que des pièces. Le résultat a été que des antiennes non

Bene fundata est ou Haec domus Domini ;


bibliques, mais faciles, ont reçu la préférence, comme

psaume 86, Fundamenta, mal placé, risque de perdre sa


que le
vraie signification dans une espèce de calembour; certaines
formules, réduites à un bref refrain, n'évoqueront plus les
récits bibliques dont elles sont extraites. C'est particulière-
ment vrai pour l'épisode primordial de Gen., 28, que l'an-
cienne antienne Mane surgens Jacob explicitait largement;
non seulement le geste a disparu du rituel actuel, mais les
refrains qui en sont extraits ne sont qu'un écho lointain,

11. Dans La Maison-Dieu, 63, art. cité.


:
inintelligible 0 quam metuendus, Non est hic aliud (ce
dernier faisant double emploi avec le précédent). Il est vrai
qu'il y a aussi l'introït Terribilis, mais la seule solution
consisterait désormais à insérer une lecture de la péricope
entière dans la préparation à la cérémonie. Il ne reste plus
rien de la fragrantia qui, de la bénédiction de Jacob par
Isaac, s'étendait au parfum de l'onction du Christ (Ecce
odor), — de la dédicace de l'autel par Moïse (Aedificavit
-
Moyses) de la prière macchabéenne : Tu,Domineuniverso-
rum. Remarque beaucoup plus grave, même les psaumes
et chants concernant l'Eglise ont été radicalement réduits,
c'est-à-dire ceux dont la présence donnant le sens spécifi-
quement chrétien au rite de la dédicace. Il reste, bien sûr,
Lapidespretiosi et Plateae tuae (Tobie, 13,21-22), Ecce popu-
lus (Isaïe, 26, 2-4), Haec est Jerusalem (Apoc., 21, 2-3 et 25)

sions les plus missionnaires qui ont disparu :


et les psaumes 86, 121, 147. Mais ce sont peut-être les vi-
Fundata est
domus Domini (Isaïe, 2,2); Nationes e longinquo (Isaïe, 60),
Narrabo norrien tuum (ps. 21), Omnisterra adoret te
(ps. 65), les psaumes 45, 67, 91. Il est vrai que l'on a intro-
duit en revanche les psaumes 47 et 95.
A ces remarques un correctif doit être apporté. La réforme
présente, n'étant qu'un aménagement des rites existants, ne
pouvait envisager autre chose que des suppressions. Or pour
éviter les difficultésque nous signalons, il eût fallu, avons-

créer délibérément des mélodies nouvelles :


nous dit, s'affranchir du répertoire musical traditionnel et
cela dépassait
le cadre du travail envisagé et mettait peut-être en cause
ces altiora principia d'une réforme liturgique générale que
le pape Jean XXIII entend soumettre au concile général.
Quoi qu'il en soit de l'avenir et d'un approfondissement
souhaitable des valeurs bibliques et spirituelles de la dédi-
cace, nous devons être reconnaissants à la Commission de
réforme liturgique d'avoir facilité l'accès des clercs et des
fidèles aux richesses du Pontifical grâce à un parti à la fois
hardi et traditionnel.
AIMÉ-GEORGES MARTIMORT.
LE LIEU
DE LA CÉLÉBRATION EUCHARISTIQUE
dans quelques églises anciennes d'Occident*

E i Occident comme en Orient, la célébration de l'Eucha-


ristie se fonde sur une seule et même institution par
JéSllS lorsque, dans l' llyperoon, la chambre haute, à
Jérusalem, après la dernière Cène, il dit à ses convives :
« Faites ceci en mémoire de moL » Au cours des premiers
siècles, cette célébration de l'Eucharistie a suivi une évolu-
tion identique en Orient et en Occident, si bien que vers
154, sur l'invitation du pape Anicet, l'évêque Polycarpe de
Smyrnc put, même à Rome, présider l'Eucharistie. Au 3e siè-
cle, la Didascalie syriaque parle d'une telle invitation comme
d'une règle qui s'impose en pareil cas, et au 4e siècle encore
saint Athanase, évêque exilé d'Alexandrie, put être prié
par son hôte, l'évêque Maximin de Trèves, de remplir la
même fonction en cette ville. Venue de l'extrême Occi-
dent pour visiter les lieux saints, Éthérie put dire de la litur-
gie dominicale de Jérusalem que cc les choses s'y passent
comme chez nous ». En parlant ainsi, Éthérie peut fort bien
sous-entendre que des variantes de détails existent; mais il
n'en est pas moins vrai que, dans sa structure fondamentale,
la célébrationdel'Eucharistie restait identique d'un côté et
de l'autre, à travers l'Église universelle.
L'assemblée sainte se compose fondamentalement du prési-

* Nous remercions les différents éditeurs qui ont bien voulu nous per.
mettre la reproduction des dessins dont ils sont propriétaires.
dent et de la communauté; et, pour créer les liens nécessaires
entre ces deux, il y a des fonctions intermédiaires. Il y a ceux
qui sont chargés de garder les portes et ceux qui veillent au
bon ordre, ceux qui entonnent psaumes et cantiques et ceux
dont le chant alterne avec celui de la communauté, ceux qui
font les lectures et ceux qui apportent la table sainte, ou
qui la préparent, si elle se trouve déjà d'avance à sa place;
il y a enfin ceux qui déposent sur l'autel le pain et le vin et
ceux qui aident à distribuer des dons consacrés et congédient
ensuite le peuple. Dans toutes les églises, ces fonctions sont les
mêmes; à commencer par celle duprésident. Celui-ci siège au
milieu d'un collège de presbytres, où il a préséance; il ouvre
etclôt la réunion, parle à l'assemblée, lui explique le contenu
des lectures et lui fait ses recommandations; il l'invite à la
prière et formule la collecte. C'est lui qui prononce l'Eucha-
ristie sur le pain et le vin, mange et boit les, dons eucharistiés
et les distribue ensuite à l'assemblée, en se faisant aider par
les diacres, ses « serviteurs » du degré hiérarchique le plus
haut. Quant à la communauté, répartie selon l'âge et le sexe,
elle écoute, répond par ses acclamations et sa prière, répète
les antiennes et participe au repas sacré.
Le local destiné à la réunion sainte est aménagé de façon
spéciale. Abstraction faite de toutes les variantes dues aux

:
circonstances, de temps et de lieu, ce local est toujours conçu
d'une manière uniforme il s'y trouve des sièges pour le col-

;
lège presbytéral, avec, au milieu, la chaire de l'évêque; le
;
pupitre du lecteur la table sainte pour ne citer que le mobi-
lier le plus essentiel qui est en même temps le plus ancien,
plus primitif que toute l'architecture chrétienne et l'artchré-
tien en général.
Ce mobilier est composé de pièces mobiles et il suffit de
« »
les placer comme il faut pour transformer
en oratoire n'im-
porte quel lieu et n'importe quel ensemble architectural, qu'il
s'agisse d'une maison privée ou d'un édifice destiné à des
réunions publiques. Ce mobilier crée tout une ambiance et
constitue de façoncaractéristique le lieu de culte, pourvu seu-
lement que les locaux en question se prêtent à une assemblée.
Au début, ces lieux n'ont pas exclusivement une destination
liturgique, ils servent plutôt à tous les usages qui se présen-
tent et où la table, le banc, la chaire et le pupitre ont un
rôle à jouer, bien que Minutius Felix (à la fin du 2e siècle)
emploie déjà l'expression de Sacrarium pour désigner un local
réservé à la réunion liturgique et organisé en vue de celle-ci,
précisément parce qu'on y trouve ce mobilier hautement tra-
ditionnel.
Longtemps, ce mobilier resta fait d'une matière facile à
détruire, et c'est ce qui explique pourquoi il n'en reste aucune
trace, même abstraction faite de l'injonction impériale de
Dioclétien ordonnant, en 303, de confisquer, spolier et détruire
les édifices ecclésiastiques dont il existe déjà à cette époque un
nombre considérable, en Orient comme en Occident. Plus
tard, on utilise en général une matière plus durable et le mo-
bilier liturgique est fait pour être installé de façon définitive.
Il prend alors des formes nouvelles, plus typiques de l'usage
liturgique et qui s'intègrent dans la construction elle-même et

:
finit par déterminer la disposition du lieu lui-même, sa forme
architecturale et sa décoration l'aménagement du plancher,
les mosaïques et les fresques des murs, du plafond et de l'abside.
Une église peut être aménagée et décorée de façon plus ou
moins riche, on peut y rencontrer des formes primitives ou
des formes évoluées, des particularités régionales et des traits
qui demeurent les mêmes d'une région à l'autre, des solutions
pratiques qui s'imposent ici et là : il n'empêche qu'une ordon-
nance y règne qui demeure typiquement uniforme partout.
C'est vraiment l'unité dans la variété, une unité réelle qui se
dégage d'une même disposition des lieux et reflète une même
conception des choses.
C'est seulement de façon progressive, avec la différenciation
des rites et de la mentalité sous-jacente, que cette conception
fondamentale et générale se transforme, et que l'Orient et
l'Occident aménagent leurs églises et disposent les choses de
telle manière qu'ils finissent par se sentir étrangers l'un chez
l'autre. Nous n'avons pas à déterminer le moment où, pour la
première fois, ce sentiment a opposé l'Est à l'Ouest et com-
ment il s'est manifesté :
il suffit d'esquisser à grands traits
comment la disposition et l'aménagement des lieux ont évolué
dans quelques églises d'Occident.

L'AFRIQUE

Nous commencerons parlescolonies romaines d'Afrique du


Nord, pour la bonne raison que les découvertes archéologiques
faites dans cette région ont permis d'exhumer l'antique dispo-
sition des lieux cultuels, et de voir aussi comment une cer-
taine évolution s'est amorcée. L'Église d'Afrique du Nord a
disparu sous la tempête de l'Islam, mais les sables en ont caché
des vestiges qu'un siècle de fouilles archéologiques a pu décou-
vrir.
En règle générale, une église de l'antique Afrique du Nord
ne se distingue pas par l'importance de son édifice; il est plu-
tôt petit et sans relief. Les grandes églises constituent des
exceptions. On a retrouvé à Tabarca, en Libye, la mosaïque
d'un édifice funéraire (fig. 1) qui, malgré son mauvais état de
conservation, donne une image relativement précise de ce type
d'église.

Fig. 1. — ÉGLISE DE TYPE NORD-AFRICAIN


TELLE QUE LA REPRÉSENTE LA MOSAÏQUE DE TABARKA
(P. TESTINI, Archeologia Christiana, Rome, Desclée et Cie, 1959, p. 706).
Il y a trois nefs sans transept, la nef éentrale étant
surélevée; l'abside, qui domine le plan général, est séparée de
cette nef centrale par une série de colonnes. Mais, chose sur-
prenante, c'est au milieu de cette nef principale que se trouve
l'autel. Évidemment, il ne s'agit que de la reconstitution d'un
plan; l'autel, et toute la disposition des lieux qui l'entoure,
ont de quoi susciter des contradicteurs. Les auteurs de cette
reconstitution des lieux placèrent sur l'autel trois objets qu'on
prit manifestement pour des chandeliers. Dans sa Symbolik
des Kirchengebäudes1, Josef Sauer prend ce dessin reconsti-
tutif pour preuve que « des chandeliers eurent déjà très tôt
leur place sur l'autel ».. Mais Josef Braun le contredit et re-
marque que, d'après ce qu'il peut constater objectivement, les
chandeliers devaient avoir leur place derrière l'autel. Bien
plus, il se refuse à reconnaître un autel dans cet objet » situé
cc

au milieu de la nef2. En 1958, Pasquale Testini reproduiten-


core ce dessin litigieux, mais sans la moindre allusion à la
controverse en question3. Quoi qu'il en soit, retirons les chan-
deliers de l'autel et ne nous arrêtons pas à la forme recons-
tituée de l'autel lui-même : il n'en restera pas moins que celui-
ci fut reconstruit à l'endroit précis que la Mensa Domini occu-
pait effectivement dans les basiliques d'Afrique du Nord. Il y
a quelques années, le Néerlandais Albert Gérard Luiks a pu-
4
blié une dissertation dans laquelle il examine à nouveau tout
le résultat des fouilles africaines et les hypothèses auxquelles
elles ont donné naissance. Il se pose à peu près les mêmes ques-
tions qui nous intéressent ici. Quelle était la place du prési-
?
dent de l'assemblée liturgique Quelle était la place de l'au-
tel? Il résume en trois thèses le résultat de son étude.
1. La cathedra, d'où le président s'adressait à la commu-
nauté pour proclamer la parole de Dieu, avait sa place dans

1955.
1. Fribourg, 1924, p. 402.
2. Das christliche Altareerat. Munich. 1930. D. 493. n. 5.
3. Archeologia Christiana, Rome, 1958, p. 706.
,

4. Cathedra en Mensa, De Plaats von Preekstoel en Avendmaalstafel


in
het oudchristelijk Kergebouw volgens de Opgravingen in Noord-Afrika,
Franeker,
le presbyterium, à l'endroit le plus élevé et dominant par con-
séquent toute l'église.
2. La mensa, devant laquelle le célébrant distribuait l'eu-
charistie à la communauté, avait sa place dans la nef des
fidèles, parfois au milieu de celle-ci.
3. L'édifice ecclésial, dans lequel se déroulait le culte régu-
lier de la communauté, était destiné tout d'abord au service
de la parole, ensuite seulement au service du sacrement.
Ce n'est
pas sans un sentiment anticatholique que Luiks,
théologien protestant, fait ces constatations. Mais ceci ne doit
pas nous empêcher d'en retenir l'essentiel. Il semble que pour
toute la période qui se situe entre la paix constantinienne et
l'invasion des Vandales, on ne puisse relever aucun cas où
l'autel d'une église d'Afrique du Nord se trouve dans l'abside.
Au contraire, jusqu'à cette époque sa place fut dans la nef,
plus ou moins proche des marches du presbyterium, voire au
milieu même de la nef. Saint Augustin connaît l'expression :
« in medio ecclesiae ». Il est probable que la mensa s'élevait
à même le sol et on ne peut pas affirmer qu'un cancell'entou-
rait partout. Dans la basilique Sainte-Monique à Carthage,
par exemple (fig. 2), rien ne l'indique. Par ailleurs, l'église
de Sabratha, en Libye (fig. 3), et beaucoup d'autres, avaient
manifestement des cancels pour entourer l'autel.
Il faut donc conclure qu'il existe, dans les églises d'Afrique
du Nord, une disposition des lieux qui ignore encore le sanc-
tuaire proprement dit. Il est possible de s'imaginer quelque
peu cetancien état de choses. Dans le principe même, le pres-
byterium et la place de l'autel ne s'identifient nullement, et
c'est justement ce qui caractérise typiquement l'antique dis-
position des lieux dans la basilique de l'ancienne Afrique du
Nord. Il existe cependant de nombreux exemples (qu'il n'est

s'y rattachant même à l'occasion; si bien qu'on peut dire la:


pas possible de citer ici) d'un autel rapproché de l'abside et

place de l'autel et le presbyterium sont en train de s'identi-


fier.
La cathedra, dans le fond de l'abside, est aussi le lieu natu-
rel de la prédication. Cet usage se maintient d'autant plus faci-
Fig. 2. — BASILIQUE SAINTE-MONIQUE DE CARTHAGE
(LUIKS, Cathedra en Mensa, Éd. Wever, Francker, 1955).
Fig. 3. — L'ÉGLISE DE SABRATHA EN LYIIIE
(TESTINI, Arch.Christ., p. 709).

lement que les églises de l'époque sont relativement petites.


Dans les basiliques plus grandes de Carthage, saint Augustin,
pour mieux se faire comprendre, quitte volontiers la cathedra
de l'abside pour prêcher devant les cancels — s'agit-il des
cancels du presbyterium ou de ceux de l'autel, on l'ignore.
Tant que je sache, les fouilles n'ont nulle part permis de
déterminer l'emplacement du pupitre du lecteur. Mais il est
certain que ce pupitre existait. Déjà saint Cyprien en parle
en disant qu'il se trouve au-dessus de la tête des gens5. Il cite
aussi le cas qui s'est présenté plusieurs fois à l'occasion des
a
fêtes de Pâques, où un laïc remplacé le lecteur trop fatigué
pour achever6.

J
LA RÉGION DU NORD DE L'ADRIATIQUE

Des éléments de cette conception primitive ou antique de la


disposition des lieux se retrouvent ailleurs, particulièrement
dans les régions du Nord de l'Adriatique, où ils se sont con-

5. Epistolae, XXXVIII, 3; XXXIX, 5.


6. Epistola, XXXIX, 3, 5.
servés assez longtemps. Ces régions sont la Vénétie, l'Istrie,
sans oublier la Norique que les archéologues regardent volon-
tiers comme une réserve de formes particulièrement ancienne.
Ici l'autel se trouve également dans la nef des fidèles — c'est
la
par exemple le cas certain pour basilique ursinienne de
Ravenne. Ailleurs, par exemple à Aquilée, on peut discuter
sur l'emplacement de l'autel.
D'une façon générale, on peut conclure qu'autour de l'autel
se trouve un espace sacré, entouré de cancels, et que cet em-
placement de l'autel se rattache au presbyterium. Très carac-
téristique d'un état de choses fort ancien est alors le fait que-
les sièges du collège presbytérial ne se trouvent pas dans une
abside mais au fond d'une salle rectangulaire; détachés du
mur, ils sont disposés de manière semi-circulaire. Cette dis-
position se trouve dans les pays les plus reculés et dans de très
petites églises, comme par exemple dans la basilique cimeté-
riale de l'ancienTeurnia, aujourd'hui San Peter im Holz, en
Carinthie (fig. 4 et 5). Il est à noter qu'ici les bancs presbyté-
raux forment un demi-cercle et ne prévoient pas de cathedra
pour l'évêque; et ceci montre une fois de plus à quel point
l'antique célébration de l'Eucharistie était conçue comme l'ac-
tion communautaire d'une assemblée, et que l'on tenait à ce
qu'il y eût une présidence en face de la communauté pour diri-
ger celle-ci et pour faire du rassemblement de la foule une
assemblée authentique.

Fig. 4. — BASILIQUE SAN PETER IM HOLZ, EN CARINTHIE


WEYRES-BARTNING, Kirçhen, Éd. Calleweg, Munich, 1959,
p. 37),
Fig. 5. — BASILIQUE SAN PETER IM HOLZ (TESTINI, Arch. Christ., p. 751).
ROME

Arrêtons-nous maintenant à Rome, au centre de la chré-


tienté occidentale latine, dans la basilique Saint-Pierre (fig. 6),
Ici nous aurons l'avantage de pouvoir observer également une
phase décisive dans l'histoire d'une grande église commémo-
rative, d'une memoria. Le plan de l'édifice constantinien nous
est connu. Au centre se trouve, non pas l'autel, mais le tom-
beau de saint Pierre, et c'est autour de celui-ci que s'organise
la disposition des lieux. L'abside s'élève derrière le tombeau.
La cathedra de l'évêque de Rome et les sièges presbytéraux
ont leur place au fond de l'abside. Des colonnes marquent
la fin de l'abside, par rapport aux nefs et tout d'abord
par rapport au transept, si bien que le monument au-
dessus du tombeau de saint Pierre s'y intègre encore. De-
vant le tombeau et avant la colonnade se trouve une place rec-
tangulaire, entourée également de colonnes et recouverte d'une
sorte de ciborium : c'est l'emplacement de l'autel (fig. 7).

Fig. 7. — L'AUTEL DE L'ANCIENNE BASILIQUE SAINT-PIERRE DE ROME


(WEYRES-BARTNING, Kirchen, p. 46).
On admet généralement que la basilique constantinienne
primitive n'abritait pas un autel fixe : pour chaque célé-
bration de l'Eucharistie on apportait l'autel et on le pla-
çait devant le tombeau de l'Apôtre. Et il n'y eut toujours
qu'unseul autel; et par là, cette basilique constantinienne de
Saint-Pierre ne se distinguait d'aucune autre église de cette
époque, en Orient comme en Occident. Les cc altaria semptem
ex argento purissimo », dont l'empereur Constantin aurait
pourvula basilique du Latran (d'après le Liber Pontifccalis7),
ne sont pas des autels mais plutôt des tables pour recevoir les
offrandes. Klauser pense que ces tables des offrandes eurent
leur place à l'endroit où les nefs (latérales) débouchent dans
le transept, accueillant en quelque sorte la procession des
offrandes qui devait monter par ces nefs 8. Si cette supposition
est exacte, nous pouvons nous représenter des tables sem-
blables dans la nef transversale de la basilique de Saint-Pierre,
et comme ces tables furent amovibles, il ne faut naturellement
pas songer à en chercher des traces.

:
La même chose vaut pour le pupitre du lecteur et l'enceinte
où se tenait la schola autant que je sache, il n'en reste rien;
mais est certain que ce pupitre et cette enceinte ont existé. J
Les transformations que saint Grégoire le Grand fit faire
autour du tombeau de saint Pierre et dans l'abside (fig. 8) sont
d'une importance capitale pour l'histoire ultérieure de la dis-
position de l'autel. C'est sans doute pour mettre de l'ordre
dans l'affluence des pélerins que l'on suréleva davantage le
niveau de l'abside et que l'on pratiqua, sous cet exhaussement,
un passage circulaire permettant aux pèlerins de s'approcher
du tombeau sans passer par l'estrade de l'abside. C'est à par-
tir de cette époque, au plus tard, que disparut l'autel amovi-
ble, et à sa place on construisit un autel en pierre, exactement
au-dessus du tombeau, surmonté d'un ciborium.

7. DUCHÊNE, 1, p. 172.
8. TH. CLAUSER, Die Konstantinischen Altäre der Lateranbasilika,
R.Q.S. 43, 1935, pp. 179-186.
Fig. 8. — LA CRYPTE CIRCULAIRE
DE L'ANCIENNEBASILIQUE SAINT-PIERRE DE ROME
AMÉNAGÉE VERS L'AN 600, SOUS GRÉGOIRE 1er
(WEYRES-BARTNING, Kirchen, p. 42).

Toutes ces initiatives eurent pour effet que la disposition et


l'aménagement de l'abside, avec le trône et le synthronos
(fig. 9) parurent plus imposants et plus majestueux — un effet
consciemment recherché probablement. Car on a désormais
créé l'espace vraiment idéal pour l'assemblée plénière de la
Civitas Dei. Déjà dans l'assignation de la place de chacun on
découvre l'ordonnance hiérarchique de cette sainte Res Publica
(« nos servi tui sed et plebs tua sancta »). Dans les nefs se
tient la plebs sancta : la foule occupe le vaisseau central, les
nobles et les matrones les deux bras de la nef transversale. En
face de la plebs sancta se tiennent ceux qui président, les
serviteurs de Dieu et les dispensateurs de ses mystères (nos
servi tui). A leur tête se trouve le « Consul Dei ». (On le sait,
c'est le titre honorifique décerné à saint Grégoire le Grand.)
Il prend place sur un trône surélevé.

Fig. 9. — TRÔNE ET syn-


thronos DE LA CATHÉDRALE
DE TORCELLO (WEYRES-BART-
NING, Kirchen, p. 39).

A ses côtés siègent le sénat, les évêques et les prêtres, prédé-


cesseurs des cardinaux. Devant eux se tiennent les diacres et
toute la cour papale, chacun à sa place. Et c'est au milieu de
cette assemblée que s'accomplit alors l' « actio », mot qui, à
cette époque, désigne d'une façon privilégiée la célébration de
l'Eucharistie. Celle-ci est conçue comme un acte officiel de la
cité de Dieu, « actio civitatis Dei ». Le point culminant de
cette action est le renouvellement du mémorial eucharistique
qui a lieu sur l'autel, au-dessus du tombeau du fondateur de
l'Église romaine. Iln'est pas nécessaire de décrire le détail
du déroulement de cette actio, on le connaît assez. Il suffit de
faire remarquer que cette disposition des lieux est en même
temps une disposition des personnes, puisque l'espace sacré est
considéré et aménagé dans la perspective des fonctions qui doi-
vent y être remplies. Et nous avons ici le modèle type de la
disposition des lieux selon la liturgie de la messe romaine, et
l'expression même de son génie propre; disposition idéale que
l'on admire, qu'on imite mille fois, mais qui rencontrera aussi
des interprétations inexactes avant de sombrer pour ainsi dire
dans l'oubli. Notre siècle, avec le réveil de l'Église dans les
âmes, l'a redécouverte et a renoué avec la tradition.
C'est l'église Saint-Clément (fig. 10) qui montre comment

Fig.10. -
L'ESPACE CEN-
TRAL DE L'ÉGLISE SAINT-CLÉ-
MENT DE ROME (WEYRES-
BARTNING, Kirchen, p. 38).
cette disposition classique des lieux a achevé son évolution au
cours du temps, créant une place à part pour la schola can-
torum et installant un deuxième ambon à côté du premier :
l'un est réservé à la lecture de l'épître et l'autre à celle de
l'évangile.

JEAN WAGNER.
LA LITURGIE EUCHARISTIQUE
EN ORIENT
Son cadre architectural

L Aliturgie eucharistique ne se célèbre en plein air que dans


des circonstances exceptionnelles; d'ordinaire, célébrants
et fidèles se réunissent dans un local fermé, destiné au
culte et disposé pour permettre des réunions liturgiques. Ce
local n'est pas une salle où l'on place les tables pour un repas,
quoique le Cénacle où s'est célébrée pour la première fois
l'Eucharistie ait été arrangé de façon à recevoir des commen-
saux. Le jour où l'Eucharistie a été séparée des agapes, et
surtout le jour où les chrétiens ont pris pleinement conscience
que l'Eucharistie était un sacrifice, il n'est plus resté qu'une
a
seule table qui pris le nom et la fonction d'un autel, autel
mobile, encore semble-t-il, à Doura Europos (détruite en 260),
mais bientôt fixe et donc placé dans une partie déterminée du
local.
Il s'est fait que les chrétiens de l'empire romain ont choisi
comme édifice pour leur culte non pas le temple païen qui
généralement était un édicule de dimensions plutôt restreintes,
puisqu'il ne devait contenir que la statue de la ou des divini-
tés et un autel, mais la basilique, qui se prêtait à la réunion de

:
grandes assemblées. Par le fait même, l'endroit où on mettrait
l'autel fixe était tout indiqué l'abside; et nécessairement les

* Rapport présenté à la 7e Semaine internationale d'Études liturgiques


de Munich (juillet 1960), paru en allemand dans Liturgisches Jahrbuch 11
(1961), 222-237, et en français dans le numéro de Pentecôte 1962 des Ques-
tions Liturgiques et Paroissiales. Nous remercions très spécialement le
R. P. Vandenbroucke d'avoir autorisé la présente reproduction de cet
article.
célébrants trouveraient, là aussi, la place qui leur serait des-
tinée et réservée. Le reste de la salle était un ambulatoire spa-
cieux divisé par deux séries de colonnes, comme à Sainte-Marie-
Majeure à Rome, ou par quatre séries, comme à Saint-Paul-
hors-les-murs.
Dans l'empire des Sassanides le choix de l'édifice destiné au
culte a été différent1. A Ctésiphon, l'église inférieure, et aussi
l'église supérieure, est une grande salle rectangulaire avec

:
deux files de colonnes adossées,ou presque, aux murs longs du
rectangle structure reproduite par d'autres édifices sassani-
des. Tandis que dans l'église inférieure il est impossible de
déterminer la forme de l'extrémité de l'édifice, l'église supé-
rieure présente à son extrémité orientale un mur percé de trois
portes qui donnent accès à trois locaux rectangulaires allongés.
Le mur opposé, c'est-à-dire le mur occidental, est complètement
fermé, les portes d'entrée se trouvant sur le mur des côtés
longs; ici encore l'édifice sassanide a servi d'exemple. Même
lorsqu'on adoptera en Syrie le style basilical, on conservera les
entrées sur les côtés longs. Monneret de Villard cherche l'ori-
gine de ces structures dans le temple babylonien où, de la cour
intérieure, on pénétrait d'abord dans une anticella et de là
dans la cella où était conservée la statue de la divinité.
Il semble donc que dans tous les cas c'est le sanctuaire, c'est-
à-dire l'endroit réservé à l'autel, qui a déterminé le premier
conditionnement spatial de l'église chrétienne. Ce sanctuaire,
au moins selon son origine, aurait été fermé dès le début, dans
l'Empire perse, mais non en sa forme basilicale dans l'Empire
romain.
Un mur séparait donc radicalement, dans l'Empire perse, le
sanctuaire du reste de l'église, les célébrants des fidèles, et
cachait un culte mystérieux même aux yeux des initiés; seuls
les prêtres avaient accès au sanctuaire, pour le service de l'au-
:
tel nous ne sommes pas loin du sancta sanctorum du temple
de Jérusalem. Je ne connais cependant pas de documents litté-
raires anciens qui nous auraient transmis les sentiments de

1. Cf. U. Monneret de Villard, Le chiese della Mesopotamia, Rome,


1940.
respect et de crainte révérentielle qui ont dû remplir l'âme de
ces chrétiens les plus orientaux de la chrétienté. Chez les
Nestoriens et les Jacobites, le mur a dû rester en usage assez
longtemps; à une certaineépoque, que je ne saurais détermi-
ner, on a fait concurremment usage du voile. Dans les vieilles
églises des Malabares, quoique « unis » depuis le 16e siècle et
fortement latinisés, on découvre encore aujourd'hui les clous
qui tenaient la corde à laquelle était suspendu le voile du
sanctuaire. Le voile cachant le sanctuaire est employé par
les Arméniens catholiques comme par les Arméniens dissi-
dents. Dans la messe copte, la première prière de l'anaphore
s'appelle « prière du voile ».
Voile du sanctuaire, voile de l'autel, sont destinés tout
autant à cacher qu'à montrer ce qui est caché. Ils sont à la
fois de nature à garder le mystère et à le révéler, destinés à
refuser l'entrée à ceux qui ne sont pas appelés mais aussi à
rendre possible l'entrée et la sortie. Enfin, ils sont le passage
du ciel à la terre pour le Verbe qui prend notr chair2.
Que ce sanctuaire puisse constituer à peu près un édifice ou
un local se suffisant à lui-même, au moins dans le rite syro-
oriental, on peut s'en rendre compte par cette cérémonie par-
ticulière qu'offrece rite pour la consécration de l'autel. Après
avoir oint l'autel, l'évêque fait l'onction sur les parois orien-

:
tale, septentrionale, méridionale et occidentale du sanctuaire.
Et le Pontifical chaldéen ajoute s'il y a un beth gaza, c'est-à-
dire un gazophylacium, l'évêque fait l'onction d'abord sur le
toit comme il l'a fait sur l'autel, puis sur les quatre parois;

:
cela montre combien intimement ces parois sont unies à l'au-
tel elles forment avec lui, pour ainsi dire, une seule chose
sacrée.

à cette règle qu'une seule exception :


En Orient l'autel se trouve au milieu du sanctuaire; il n'y a
le rite syro-chaldéen
construit régulièrement son autel contre la paroi orientale de
?
l'église. Cette exception est-elle ancienne Je le crois; en tous

2. A ce sujet l'article instructif de Carl Schneider, Studien zum


Ursprung liturgischer Einzelheiten ostlicher Liturgien; 1. KatefJetusma.
in Kyrios, I,1936, pp. 57-73.
cas, je ne connais aucun document écrit, figuré ou archéologi-
que, qui prouve le contraire. Aussi l'encensement de l'autel ne
peut-il s'y faire comme dans les sanctuaires des autres rites
orientaux. Dans ceux-ci l'autel est encensé de ses quatre côtés;
le plus beau que je connaisse est l'encensement d'autel que le
célébrant de rite byzantin, assisté de son diacre, accomplit
pendant l'office eucharistique des présanctifiés. La première
partie de cet office n'est autre que la première partie des
vêpres. Après la récitation du psaume initial, de la litanie,
d'une partie du psautier, des psaumes vespéraux, de la Petite
entrée avec l'encensoir et de deux lectures de l'Ancien Testa-
ment, a lieu l'encensement solennel de l'autel, qui nous rap-
pelle le début de l'évangile de saint Luc. « Or, pendant que
Zacharie s'acquittait devant Dieu des fonctions sacerdotales, il
fut désigné par le sort, selon la coutume observée par les
prêtres, pour entrer dans le sanctuaire du Seigneur et y offrir
l'encens. Et toute la multitude du peuple était dehors en prière

:
à l'heure de l'encens. » Ici, le prêtre debout devant l'autel,
pendant qu'il encense, chante « Que ma prière soit devant ta
face comme l'encens, et l'élévation de mes mains comme l'of-
frande du soir. » La foule, qui s'était mise à genoux, se lève et
répète le même verset pendant que le prêtre avec son diacre

«s'agenouillent. Ensuite, il se rend du côté sud de l'autel, l'en-

attention à la clameur de ma supplication au moment où je

:
crie vers toi. » Même agenouillement de la foule; puis répéti-
tion du refrain « Que ma prière soit devant ta face comme
l'encens. » pendant que le prêtre s'agenouille. Le même rite
est répété devant le côté oriental de l'autel avec le chant du
verset suivant, devant le côté nord de l'autel et encore une fois
devant le milieu de l'autel. Ces alternances d'oblation de l'en-
cens et d'agenouillement priant de la part duprêtre et de la
part de la foule sont une des cérémonies les plus émouvantes
du rite byzantin.
Faut-il rappeler que dans les rites orientaux, ce qu'on
appelle la dédicace de l'église est formé uniquement, ou pres-
que uniquement, de la consécration de l'autel, la bénédiction
?
du reste, là où elle existe, n'étant qu'un accessoire Aussi ces
rites ne connaissent-ils pas un office correspondant à celui
d'une simple bénédiction de l'église, telle que la conçoit le
rite romain.
Le sanctuaire, avec son autel, est vraiment le cœur de l'église
orientale. On peut même affirmer qu'il est réservé exclusive-
ment, ou presque, à la célébration du sacrifice eucharistique
pris au sens strict. Non seulement l'administration du baptême,
de la confirmation, du mariage, de la pénitence et de l'onction
des infirmes, la bénédiction des rameaux et d'autres béné-
dictions similaires, mais même la partie psalmodique et scrip-
turaire de la messe se célèbrent hors du sanctuaire, du moins
en principe. Tandis que les stalles des chanoines latins et le
chœur des moines latins se trouvent dans le sanctuaire, et par-
fois enveloppent l'autel, chez les Orientaux stalles et chœur
se trouvent en dehors du sanctuaire, et il est parfaitement pos-
sible de chanter l'office sans que le président dela communauté
soit obligé d'entrer dans le sanctuaire. Celui-ci est fait pour
l'autel et l'autel est fait pour lesacrifice. Aussi ne peut-on ima-
giner, en Orient, qu'une femme entre dans le sanctuaire; cette
prohibition s'étend même aux hommes, aux laïcs. C'est logi-
que.
Dans le sanctuaire, les Orientaux placent le trône épiscopal
et des sièges pour les célébrants et pour les ministres; ils les
occupent pendant là lecture de l'Écriture Sainte, évangile
excepté. Ils ne connaissent pas l'exécution de longs morceaux
musicaux pour l'audition desquels les Latins vont s'asseoir.
Le catéchuménat et la pénitence publique ont existé en Orient
du 2e-3e siècles au 56_66 siècles. Ces catéchumènes et ces péni-
tents, au moins certaines classes parmi ces derniers, ne pou-
vaient assister qu'à la première partie de la messe; après quoi
le célébrant procédait à leur renvoi. On leur réservait une
place particulière au fond de l'église; les églises byzantines,
tout au moins, employaient à cet effet le narthex. Dans le
déroulement du sacrifice eucharistique, le narthex ne joue plus
aucun rôleaujourd'hui. Mais il en joue un pour d'autres
fonctions liturgiques, par exemple la récitation des Petites
Heures et le rite de la litia ou supplication à la fin des vêpres,
à certains jours, dans lerite byzantin.
Aux laïcs est réservée la partie la plus grande de l'église, la

femmes;
nef. Les Orientaux, comme les Latins, séparent les hommes des
quelquefois en mettant comme eux les uns à droite, les
autres à gauche; d'autres fois en plaçant les hommes en avant et
les femmes en arrière. Dans les pays du Proche-Orient, la
séparation des sexes est appliquée d'une manière stricte, par-
fois même exorbitante. Ainsi, chez les Coptes, encore jusque
dans les derniers temps, une cloison de bois s'élevant très haut
empêchait les femmes de voir quoi que ce soit de ce qui se
passait devant eux, dans la section des hommes; évidemment,
impossibilité absolue de voir le sanctuaire. Voici comment se
déroulait le rite du mariage chez les Coptes au 15e siècle, selon
l' « Ordonnance » du patriarche Gabriel V. Après l'office de
minuit les prêtres et les diacres se rendaient à la porte de
l'église, et là, attendaient l'arrivée de l'époux. Il arrive; on
chante, on prie; puis, avec des cierges allumés et au son des
cloches, on le conduit à l'endroit où d'ordinaire a lieu la béné-
diction nuptiale, c'est-à-dire la partie de la nef réservée aux
hommes. Ensuite le clergé se rend de nouveau à la porte de
l'église et y reçoit l'épouse; on chante un Ave Maria et on la
»
conduit au «gynécée ou endroit de l'église réservé aux femmes.
Après la première partie de la messe, qui est passablement lon-
gue chez les Coptes, le célébrant bénit les habits de l'époux que
celui-ci revêt immédiatement, et ensuite, il l'amène dans l'en-
droit réservé aux femmes. Il lui ordonne de passer l'anneau d'or
à la femme; si celle-ci le prend, elle signifie par ce geste qu'elle
accepte cet homme pour son mari. Alors le célébrant dit à la
:
marraine de « la produire devant le peuple » (je suppose chez
les hommes); et la cérémonie continue; la femme doit s'asseoir
à côté de son mari, puis a lieu la cérémonie du couronnement.
A la fin de la messe, les époux sont conduits jusqu'à la porte
du chœur pour recevoir une dernière bénédiction du prêtre;
on les reconduit à la porte de l'église d'où les paranymphes
les accompagnent à la maison.
Dans ces églises coptes, non seulement une cloison séparait
les hommes des femmes, mais une autre cloison tout aussi
élevée séparait les hommes du chœur, c'est-à-dire de l'endroit
occupé par les chantres devant le sanctuaire.
Chez les Chaldéens également, la séparation des deux sexes
était nettement marquée, non seulement par l'ambon qui occu-
pait le milieu de la nef, mais aussi par un muret qui joignait
les côtés droit et gauche de l'ambon aux murs correspondants
de l'église. Comme dans les églises mésopotamiennes, l'entrée
àl'église se fait sur le côté. Hommes et femmes ayant leurs
portes respectives, c'était marquer leur séparation dès l'entrée.
Dès le début, sans doute, les chrétiens ont séparé les sexes
dans leurs assemblées; peut-être n'était-ce là qu'une continua-
tion de la coutume juive; la Didascalie des Apôtres atteste le
fait pour la Syrie du 3*" siècle. Mais il n'y a aucun doute que
cette séparation, devenue presque une claustration, n'a été
poussée si loin qu'en raison de l'ambiance musulmane. Jusque
dans ces derniers temps, ce n'étaient pas uniquement des
femmes musulmanes qui se voilaient le visage en sortant en
rue, mais des chrétiennes agissaient de même. Aujourd'hui, le
voile a disparu, et les femmes s'engagent dans les carrières libé-
rales. Les chrétiens ont été les premiers à reconnaître la dignité
de la. femme. Je croirais volontiers que les hautes cloisons qui
séparaient les femmes des hommes dans les églises coptes ont
disparu ou sont en train de disparaître. N'empêche qu'une
certaine distinction, ou même une séparation, existe encore,
mais plutôt à la manière occidentale, par les côtés droit et gau-
che de l'église. Chez les Chaldéens et les Syriens, l'ambon
n'existe plus, et par le fait même les murets ont disparu.
Il faut avouer que pendant les siècles où ces séparations
exorbitantes ont existé en pays musulman, les fidèles étaient

:
privés du moyen le plus communicatif pour participer à la
liturgie la vue des cérémonies liturgiques. Ils ne pouvaient
se guider que par l'ouïe. Il ne faudrait pas oublier ces faits
quand on invoque les liturgies orientales comme un exemple
de participation active et réelle à la liturgie,
Les Orientaux y apportaient cependant un remède :
placé au milieu de la nef dans leséglises mésopotamiennes
l'ambon
(Iraq et Syrie septentrionale), et le beau pupitre de marbre
perché sur de longues colonnettes dans les églises coptes.
Il semble bien que l'usage de l'ambon, ou bêma, est un
emprunt à la synagogue. « C'est l'estrade sur laquelle se tenait
le président, et du haut de laquelle on faisait la lecture et le
commentaire des Écritures3. »
Si, aux) premiers siècles, le siège épiscopal était encore dans
l'abside, déjà avant le 7e siècle l'évêque chaldéen et son
clergé prenaient place sur l'ambon pour toute la première
partie de la messe. Lectures, admonitions, litanies avaient
donc lieu au milieu de la nef, où les hommes se trouvaient
d'un côté et les femmes de l'autre. L'arrivée du clergé sur
l'ambon et son retour dans le sanctuaire se faisaient en pro-

reprenait le refrain :
cessions accompagnées du chant des onyatha, dont la foule
ici la participation des fidèles était

-
totale.
Chez les Coptes elle était moindre; mais j'aime à croire
que la hauteur insolite des pupitres d'où se faisaient les lec-
tures était établie pour que les femmes puissent apercevoir les
lecteurs. Les dimensions des cloisons et des pupitres étaient
sans doute variables;au Caire, à Deir-Abu-Sifain la cloi-
son des femmes mesurait quatre pieds de haut (environ 1,20 m)
et à l'église de Muallakah l'escalier conduisant à l'ambon
comptait douze marches, ce qui donne une hauteur sensible-
ment égale4. Le remède malgrétout n'était que partiel.
Latins, nous sommes habitués à voir dans la nef de nos
églises des confessionnaux; inutile de dire que ce meuble
n'existe en Orient que dans les églises de certains Orientaux
catholiques; même en Occident, on ne les connaissait pas
avant le 16e siècle.
A la question de savoir à quelle époque l'usage du bêma

:
est tombé en désuétude chez les Chaldéens, J. Dauvillier
répond ainsi « On peut seulement conjecturer que lors de

3. Cf J. Dauvillier, L'ambon ou bêma dans les textes de l'Église chai-


déenne et de l'Église syrienne au Moyen Age, dans Cahiers Archéologi.
ques, VI, 1952, pp. 11-30.
- 4. Cf. A. J. Butler, The Ancient Coptic Churches of Egypt, I, Oxford,
1884, pp. 145 et 218.
la décadence qui se manifeste à mesure qu'on avance dans
le 14e siècle, certaines règles liturgiques ont dû être négli-

gravité de la nation se déplace :


gées et même tomber dans l'oubli. En outre, le centre de
il est désormais situé dans
les montagnes du Kurdistan, où le catholicos se réfugie, à
proximité des tribus assyriennes demeurées indépendantes.
La liturgie est célébrée dans de toutes petites églises de
montagne. Le sanctuaire est minuscule et a l'aspect d'une
niche creusée dans la muraille et fermée par un mur sur

la nef, comme les femmes dans le gynécée :


lequel s'ouvre une porte basse. Les fidèles se tassent dans
la construction
d'un bêma retirerait trop de place5. » Chez les Syriens l'am-
bon semble avoir servi surtout aux lectures et aux chants
liturgiques; l'évêque y a eu parfois son trône, nous dit J. Dau-
villier6, et il ajoute que l'usage de construire un bêma dans
les églises syriennes a disparu depuis longtemps sans doute
à la suite de la décadence qui est survenue à partir du
14e siècle et qui a amené l'oubli de certaines règles litur-
giques. Il pense que les Maronites n'ont jamais eu de bêma;
au moins il n'en serait resté aucune trace7.
Il faudra sans doute du temps avant de le voir rétabli.
Et pourtant deux choses pourraient faire désirer son retour.
D'abord, l'habitude encore vivante chez les Nestoriens et les
Malabares de faire des prostrations autour du bêma, ou plu-
tôt à l'endroit où normalement se
trouvait le bêma, avant d'en-
trer au sanctuaire et d'accéder à l'autel pour commencer
l'offrande et l'anaphore. Les Malahares étendent au milieu
de la nef, par terre, un grand voile portant généralement

les chantres entonnent cette onitha des mystères :


une croix. Le prêtre célébrant se trouvant devant ce voile,
« Quand
le prêtre entre au saint autel, il élève vers le ciel ses mains
pures et invite l'Esprit, qui descend et consacre le Corps »;
à ce moment le prêtre, ayant fait la première prostration, se
relève, et tandis que les chantres achèvent l'onitha : « et

5. DAUVILLIER, op. c., p. 25.


6. Id., p. 29.
7, Id., p. 30,
le Sang du Christ », il fait devant lui un grand signe de
croix. Ce chant, avec la prostration et le signe de croix, se
répète au côté droit du voile, au côté opposé, et au côté
gauche.Jusqu'ici personne parmi les Malabares ou les Chal-
déens n'a pu fournir une explication tant soit peu probable
de cette cérémonie solennelle mais énigmatique. Le fait est
d'autant plus curieux qu'il est décrit dans tous les manus-
crits donnant l'Ordinaire de la messe nestorienne (les plus
anciens remontent au 14e siècle), tandis qu'aucun des com-
mentateurs assez nombreux de cette messe (ils s'échelon-
nent du 6e au 13e siècle) n'y fait la moindre allusion. Peu
importe; il nous suffit de montrer qu'aujourd'hui on pra-
- tique encore un rite qui suppose l'existence de l'ambon8.
Ensuite, les Nestoriens ont conservé jusqu'aujourd'hui l'ha-
bitude de manifester, à chaque phrase ou paragraphe de la
péri-cope évangélique lue pendant la messe par le prêtre, leurs
sentiments par des exclamations qui traduisent leur approba-
tion, leur étonnement, leurs félicitations, leur malédiction,
leur foi vive, leur espérance, leur adoration, etc. Évidemment,
cela suppose un lecteur qui se trouve près d'eux; le mieux
serait sur l'ambon.
Enfin, combien plus logique ne serait-il pas de célébrer
l'office de l'avant-messe, et l'office des lectures interrompues
par des chants, au milieu de la nef, précisément pour marquer
nettement la distinction de cette première partie de la messe
d'avec l'autre, entièrement consacrée au sacrifice eucharistique
et dont le lieu propre est précisémnt le sanctuaire avec son
autel. On éviterait ainsi ces montées à l'autel et ces descentes
de l'autel, qui semble servir seulement de podium surélevé
pour permettre au célébrant de se montrer et de mieux faire
entendre sa voix. On s'approche quelque peu de cet idéal
dans la plupart des rites orientaux qui font exécuter les lec-
tures de l'Écriture Sainte sur le pas de la porte du sanctuaire,
face au peuple.
Après avoir déterminé la place réservée au prêtre célé-

8. Cf. A. Raes, Une « onitha » eucharistique dans les rites chaldéen


et malabare, dans L'Orient syrien, II, 1957, pp. 49-64.
brant (le sanctuaire), celle des catéchumènes et des pénitents
(le narthex), et celle des laïcs (la nef), précisons cellequ'oc-
cupe le ou les chœurs des chantres. Le rite byzantin, au
moins pour l'exécution de l'office divin, suppose deux chœurs,
l'un se trouvant à droite et l'autre à gauche. Pratiquement,
il n'y a souvent qu'un seul chœur, surtout chez les Slaves,
qui exécutent les chants en polyphonie. La place qui leur est
réservée est toujours en avant des laïcs, plus près du sanc-
tuaire; elle est nettement marquée, spécialement dans les
anciennes églises coptes. Mais chez les Syriens et chez les
Chaldéens, on peut voir aussi les chantres prendre place dans
le sanctuaire autour de l'autel; ce qui, en principe, serait
un abus.
De l'endroit réservé aux chantres il faut distinguer cette
plate-forme qui, encore à la hauteur du sanctuaire, s'étend
devant l'iconostase ou devant le mur. Les Grecs appellent cet
endroit la solea, les Chaldéens questroma. C'est là que le dia-
cre prend place lorsqu'il adresse ses exhortations ou ses mo-
nitions aux fidèles, ou lorsqu'il leur propose la série de de-
mandes contenues dans les litanies. C'est jusque-là que pour-
ront venir les fidèles pour recevoir la sainte communion.
Quant à l'évêque, il n'a pas de lieu qui lui soit proprement
réservé. Il a un trône; mais ce trône peut être placé soit
dans l'abside, soit devant l'iconostase, près du chœur, soit
enfin sur une estrade mobile qu'on dresse au milieu de la
nef et que certains livres slaves appellent cc théâtre ».
En résumé, nous trouvons donc cinq lieux bien définis et
différents, dans les églises orientales, lorsque nous prenons
comme principe de conditionnement spatial les différentes
catégories de personnes qui constituent l'assemblée chrétienne
ou le peuple de Dieu. Ils se suivent sur une ligne longitudi-
nale : le narthex pour les catéchumènes et les pénitents, la
nef pour les laïcs, le chœur pour les chantres et les lecteurs,
la solea ou questroma pour les diacres, le sanctuaire enfin pour
les prêtres célébrants. Et, fait remarquable, plus on avance
dans l'église sur cette ligne et plus on s'approche de l'endroit
le plus sacré, plus aussi les personnes qui prennent place aux
endroits successifs revêtent un caractère sacré plus élevé et
participent aux degrés différents de l'ordination. D'abord les
catéchumènes, candidats au baptême, et les pénitents, momen- -

tanément rejetés du groupe de ceux qui communient aux mys-


tères. Puis, les baptisés, qui, d'une certaine manière, appar-
tiennent au sacerdoce royal et sont donc ordonnés au culte
divin. Puis, les chantres et les lecteurs qui ont reçu les
ordres mineurs. Ensuite, les diacres qui dirigent la prière
des fidèles mais peuvent entrer au sanctuaire pour être les
ministres du prêtre. Enfin, les prêtres qui sont appelés à offrir
le sacrifice eucharistique au nom du grand prêtre invisible,
et à être les dispensateurs des divins mystères.
?
Et l'évêque H est le président de l'assemblée et siège
sur un trône. Cela peut nous étonner; à nous qui connaissons
les messes pontificales, la messe « avec assistance pontificale »
nous paraît être une diminution de celle-là. Cependant, si on
veut y réfléchir un instant, on comprend que l'évêque ne consi-
dère pas la célébration du sacrifice comme une fonction propre
de son pouvoir épiscopal ou un effet spécifique de sa consé-
cration, puisque l'ordination sacerdotale rend le prêtre apte
à cet exercice du culte divin. Mais à lui seul, comme possédant
la plénitude du pouvoir d'ordre, il appartient de rendre d'au-
tres participants de ce même ordre à différents degrés; à lui
appartient aussi la consécration de l'autel, équivalente à la
dédicace d'une église; et enfin, la consécration du saint chrême
(non pas des autres huiles saintes), à moins qu'un canon ecclé-
siastique ne la réserve au patriarche.
Ces cinq lieux, réservés à cinq catégories de chrétiens, les
approchent progressivement du mystère, mais les en éloignent
aussi selon la même progression. De cela on pourrait conclure
que moins on est initié, moins on participe activement au
culte, en raison de la place plus éloignée du sanctuaire qu'on
occupe. Mais je crois que les Orientaux ont une autre con-
ception de cette participation active au culte, qui est com-
mandée par le conditionnement spatial. Ils la voient sur un
autre plan que celui considéré jusqu'ici. Pour les compren-
dre, il faut faire appel au symbolisme. Les différents endroits
de l'église peuvent représenter symboliquement différents lieux
dans l'ordre de notre salut.
Les Chaldéens distinguent le sanctuaire qui représente le
ciel, demeure du Seigneur des seigneurs; le questroma, qui
représente le paradis (en effet, tout en étant encore à la
hauteur du sanctuaire et tout en participant donc en quel-
que manière à la félicité du ciel, il est dehors, séparé par
un mur; c'est le troisième ciel où le ravissement a porté saint
Paul; c'est la place des lecteurs qui représentent les degrés
inférieurs des anges). Enfin, la nef représente la terre et dans
cette terre l'ambon, placé en son milieu, symboliseJérusa-
lem; et comme sur l'ambon il y a un autel, celui-ci repré-
sente le Golgotha, où se trouve aussi le sépulcre du premier
homme dont la descendance a été récapitulée par le second
Adam, mort et ressuscité sur le Calvaire. De l'ambon une
espèce de corridor conduit vers le sanctuaire; ce beth seqaqone
est la voie de la vérité qui conduit au ciel.
Dans tous les rites orientaux il y a eu des commentateurs
qui ont exposé le ou les symbolismes du lieu du culte et
des actions liturgiques qui s'y exécutent. Nous, occidentaux
et rationalistes, dégoûtés par le symbolisme liturgique exagéré
de nos écrivains du moyen âge, nous marquons un scepticisme
instinctifenvers ces explications par trop artificielles, fruits
d'un subjectivisme effréné. Il semble pourtant que les Orien-
taux, malgré d'évidentes exagérations, ont conservé plus de me-
sure, et en tout cas n'ont pas été atteints par notre scepticisme
destructeur. Un deceux qui a le mieux compris les explications
des auteurs byzantins est le P. Sévérien Salaville, A. A., qui,
dans son petit livre Liturgies orientales. Notions générales,
éléments principaux9, utilise les écrits de saint Maxime le
Confesseur, de saint Germain de Constantinople, de Théodore
d'Andide, de Nicolas Cabasilas et de Syméon de Thessalonique.
Il traduit de ce dernier auteur un passage que voici :
Le temple, comme maison de Dieu, figure le monde entier : car
Dieu est partout et au-dessus de tout. C'est pour indiquer cela qu'il est
divisé en trois parties; parce que Dieu est Trinité. C'est ce que repré-

9. Paris, 1932, pp. 98-127.


sentait aussi le tabernacle, divisé en trois parties; et de même le temple
de Salomon, comme le dit saint Paul. Il y avait le Saint des saints, le
Saint et l'Atrium. Ici, le sanctuaire est le symbole des sphères supé-
rieures et supracélestes, où l'on dit être le trône du Dieu immortel et
le lieu de son repos. (Donc, comme chez les Chaldéens, le sanctuaire
représente le ciel.) Ici et là se trouvent les célestes hiérarchies; mais
ici il y a avec elles des prêtres qui tiennent leur place. Le temple
(c'est-à-dire la nef) représente ce monde visible; la voûte, le ciel
visible; le sol, les choses qui sont sur la terre et le paradis lui-même
(ici Syméon ne dit pas clairement ce qui représente le paradis terrestre;
c'est la soléa). (Puis il revient au sanctuaire et à son symbolisme.) Le
sanctuaire reçoit à l'intérieur le pontife, qui représente l'Homme-Dieu
Jésus dont il a la toute-puissance; les autres ministres sacrés représen-
tent les apôtres, et même spécialement les anges et les archanges,
chacun suivant son ordre. Je mentionne les apôtres avec les anges, les
pontifes et les prêtres, parce qu'il y a une seule Église, là-haut et ici-
bas, depuis que Dieu est descendu à nous, qu'il a été vu parmi nous
et qu'il a accompli sa mission pour nous. Et c'est une œuvre une que
le sacrifice du Seigneur, la communion et la contemplation. Or, cela
s'accomplit et là-haut et ici-bas. Avec cette différence, que là-haut c'est
sans voiles et sans symboles quelconques, ici par symboles embarrassés
de ce fardeau d'une chair sujette à la corruption10.

Un symbolisme qui nous conduit à comprendre que la-


liturgie eucharistique et la liturgie céleste sont une, ne peut
être taxé de vaine imagination ou de fantaisie maladive, mais
exprime une profonde vérité de notre foi, dont saint Paul
a été le premier héraut.
Oui, pour les Orientaux l'église est le ciel descendu sur
la terre. Permettez-moi de citer une page de la Chronique
de Nestorn, où Nestor raconte comment les Musulmans, les
Juifs, les Allemands et les Grecs sont venusexposer à Vladimir
de Kiev leur religion et comment le prince, avant de fixer son
choix, envoya une ambassade de dix hommes pour aller voir de
leurs propres yeux la manière dont chacun des solliciteurs
pratiquait sa liturgie.Après avoir visité les mosquées chez les
Bulgares, ils allèrent chez les Allemands et de là à Constan-
tinople chez l'empereur. Celui-ci
envoya un message au patriarche disant : « Il est venu des Russes pour
étudier notre foi; prépare l'église et ton clergé, revêts ton costume
pontifical afin qu'ils voient la gloire de notre Dieu. » Alors le patriar-
che appela le clergé; on célébra les solennités suivant l'usage, on brûla
o.c.,p.122.
10. S. Salaville,
11. Trad. franç. par L. Léger, Paris, 1884, pp. 88 sv.
de l'encens, et on chanta des chœurs. Et l'empereur alla avec les
» Russes à l'église, et on les fit placer dans un endroit d'où l'on pouvait
bien voir; puis on leur montra les beautés de l'église, les chants et le
service de l'évêque, le ministère des diacres, en leur expliquant le
service divin. Revenus au pays ils dirent au princes et aux boiars :
ce
Nous avons été d'abord chez les Bulgares et nous avons observé
comment ils adorent dans leurs temples; ils se tiennent debout sans
ceinture; ils s'inclinent, s'assoient, regardent çà et là comme des
possédés, et il n'y a pas de joie parmi eux, mais une tristesse et une
puanteur affreuses. Leur religion n'est pas bonne. Et nous sommes
allés chez les Allemands et nous les avons vus célébrer leur service
dans l'église et nous n'avons rien vu de beau. Et nous sommes allés en
Grèce et on nous a conduits là où ils adorent leur Dieu, et nous ne
savions plus si nous étions dans le ciel ou sur la terre; car il n'y a pas
de tel spectacle sur la terre, ni de telle beauté. Nous ne sommes pas
capables de le raconter; mais nous savons seulement que c'est là que
Dieu habite au milieu des hommes; et leur office est plus merveilleux
que dans les autres pays. » (p. 90).

Peu importe que ce récit de voyage soit une invention de


l'auteur qui n'a pas vécu à l'époque païenne de Vladimir
mais deux siècles plus tard, lorsque le rite byzantin florissait
déjà dans ces terres. Or, le sentiment que produit la liturgie
eucharistique est bien exprimé par les paroles des voya-
geurs : « Nous ne savions plus si nous étions dans le ciel
ou sur la terre; nous savons seulement que c'est là que Dieu
habite parmi les hommes. »
Il faut avouer que l'iconostase et le mur du sanctuaire sont
de nature à empêcher la participation active des fidèles telle
que nous la concevons. Alors, comment expliquer que les
Orientaux profitent tant de la messe et comme individus et
?
comme collectivité
un rôle plus efficace que chez les Latins :
Le diacre joue chez eux, sans doute,
il les avertit sur
la position extérieure et sur l'attitude intérieure à prendre;
surtout il prie avec eux. Mais il faut remarquer que les de-
mandes constituant ces litanies ne font que de fugaces allu-
sions au saint sacrifice. Si je ne me trompe, pour expliquer
la satisfaction vraie que le service eucharistique procure aux
Orientaux, à qui pourtant le sanctuaire et l'autel et le célé-
brant sont cachés, il faut admettre qu'ils y vont moins pour
donner que pour recevoir. En Occident, on excite aujourd'hui
les fidèles à joindre leur offrande personnelle à celle
que le
Christ renouvelle sur l'autel, puisque tout baptisé est or-
donné de quelque manière au culte. Psychologiquementcela
revient à exiger un grand effort personnel pour se dégager
et se détacher de ce qu'on est et de ce qu'on a. La foi me
persuade que cette oblation, unie à celle du Christ, porte ses
fruits dans le royaume des âmes; seule une foi très grande
peut trouver sa joie dans une offrande qui, malgré tout, reste
toujours secondaire et n'est presque rien en regard de celle
du Christ sur l'autel. Même en communiant, nos Occiden-
taux ont encore le sentiment de « faire quelque chose d'agréa-
ble à Notre-Seigneur » et de poser un acte moralement bon
qui leur assure davantage le salut éternel.

:
L'attitude des Orientaux est, si je ne me trompe, bien
diverse ils reçoivent, et ils sentent qu'ils reçoivent, et ils
sont remplis de joie comme celui qui a reçu de bonnes
choses, cette fois non pas matérielles, mais spirituelles. Le ser-
vice eucharistique les nourrit et ils sortent de l'église comme
des gens qui se sentent devenus plus riches. Que reçoivent-ils?
Les dons divins et célestes. Cette réception, précisément, ne se
fait pas sur la terre mais comme au ciel. Pendant le trans-

Chérubins :
fert des oblats sur l'autel, les Byzantins chantent l'hymne des
cc
Nous qui figurons mystiquement les Chérubins
et chantons à la vivifiante Trinité l'hymne trois fois sainte,
laissons tous les soucis de ce monde afin de recevoir le Roi
de l'univers, invisiblement escorté des chœurs angéliques. »
Loin de nous donc les soucis de tous les jours en ces quelques
moments de dévotion fervente, au moment où les anges et
les Chérubins escortent notre Roi céleste!
Cet oubli des soucis temporels est le complément de la vie
liturgique qui nous transporte au ciel; car à l'église on est au
ciel, avec Dieu, avec ses anges, et avec ses saints. Et c'est dans
ce cadre que l'iconostase, pour les églises qui en ont une, prend
toute sa valeur, surtout si on peut y ajouter les peintures de
scènes de l'Ancien et du Nouveau Testament qui couvrent l'ab-
side, la coupole, tous les murs du sanctuaire et même de l'église.
Au ciel, le nombre des saints et des anges est innombrable.
En somme, tout cet ensemble fait percevoir à l'âme reli-
gieuse la transcendance, la grandeur et la puissance du Père,
son amour envers le monde, pour lequel Il a rlonné son Fils,
son amour persévérant qui nous a donné l'Esprit-Saint sanctifi-
cateur. C'est de la miséricorde et de la cc philanthropie » de ce
Père, de qui descend tout bien, que les fidèles priants atten-
dent les bienfaits temporels et les dons célestes. Sortant du
sacrifice eucharistique, ou mieux de la liturgie, ils emportent
avec eux le sentiment de s'être approchés de Dieu et d'avoir
obtenu ses grâces. Encore une fois, si je ne me trompe, c'est
là l'origine de ce contentement qui remplit les fidèles orien-
taux après que, à l'église, ils ont pris part à la Liturgie. Qu'ils
n'aient pas pu jeter un regard sur l'autel dans le sanctuaire,
qu'ils n'aient pas pensé à ajouter leur offrande à celle du Cru-
cifié, cela n'est pas grave; mais ils ont été en contact avec
les lecteurs venus près d'eux, avec le diacre qui les a fait
prier, avec les chœurs dont ils ont compris lés chants habi-
tuels, avec le prêtre qui a parcouru leurs rangs en les encen-
sant et leur a montré les dons qui seront offerts sur l'autel,
surtout avec les saints et les anges du ciel, et Dieu lui-même,
dans la compagnie desquels ils se sont trouvés pendant une
heure. Et j'oserais conclure que si la disposition des différents
endroits constituants, par leur ensemble, l'église comme lieu
du culte n'est qu'un élément secondaire pour une participa-
tion active des fidèles à la célébration du sacrifice eucharisti-
que, son importance est grande en tant qu'elle aide à exciter
la foi et la charité théologales qui sont les conditions primor-
diales de tout culte chrétien.
Au début de cet article nous avons parlé de l'église à forme
basilicale, en usage dans l'Empire romain, et de l'église formée
d'une anticella et d'une cella rectangulaires dans l'Empire sas-
sanide de Perse. Maintenant, il nous faut dire un mot des
églises à forme circulaire. Je me suis laissé dire que l'Occident
a toujours recherché la ligne longitudinale, sans doute plus en
rapport avec son idéal d'infini qui, en avançant toujours sur
la même ligne droite, se perd dans le lointain inconnu; l'Orient
aurait préféré le cercle comme répondant davantage à son
idéal de perfection, puisque les tours faits sur un cercle ne
trouvent nulle part une cause d'arrêt. Lorsque les chrétiens
de Rome ont changé le Panthéon en église, ils n'ont pas
mis l'autel au milieu mais ils l'ont accolé à une des parois,
alors que rien n'attirait le regard vers cet endroit plutôt que
vers un autre. Les Grecs, construisant Sainte-Sophie à Cons-
tantinople, ont agi de la même façon. Au contraire, ce sont
les Éthiopiens qui, à côté d'églises à forme basilicale, en ont
construit d'autres en forme de cercle, et ils y ont placé l'autel
au milieu. Cet autel se trouve dans un sanctuaire entouré
d'une cloison circulaire haute percée d'une seule porte basse.
Dans l'enceinte suivante ne prennent place que les ministres
et les chantres. Une autrecloison circulaire, avec quatre portes,
sépare complètement ces derniers des fidèles, dont un grand
nombre du reste n'entre pas même dans la troisième enceinte,
mais reste dehors, sous l'abri descendant du toit, tout autour
de l'édifice. Il est évident que les fidèles ne voient du sacri-
fief eucharistique que la procession venant de la maison-
nette appelée « Betléem » où le pain pour la messe est cuit,
et peut-être quelque encensement. Mais jusqu'au-dehors ils
peuvent entendre les chants accompagnés par le son des tam-
bours et le clic mesuré des sistres. C'est peu de chose pour
obtenir une participation active à la célébration du sacrifice
chrétien.
Si parfois on met, chez les Latins, l'autel au milieu d'une
rotonde, ce sera précisémentafin que tous les assistants puis-
sent suivre facilement les mouvements et les prières du prê-
tre célébrant. Mais chez les Éthiopiens qui entourent l'autel
d'une triple cloison, il faut sans doute chercher l'explication
d'un tel phénomène dans le désir d'imiter le plus possible
le temple juif de Jérusalem. Depuis que la croyance s'est
enracinée que la reine de Saba, après sa visite à Jérusalem
auprès du roi Salomon, a fourni à l'Éthiopie la famille royale
des Salomonides, l'imitation du culte juif a pris chez eux une
importance capitale qui, malheureusement, dans le cas que
nous étudions comme dans d'autres, n'a pas eu les effets les
meilleurs.
Rome. A. RAES, s.j.
VERSUS AD ORIENTEM

L'orientation dans les Ordines romani


,
du haut moyen âge*

T de donnerreligions
OUTES les antiques prescrivent leurs adeptes
au corps une direction déterminée pendant
à

la prière. Si le lieu vers lequel s'orientent les fidèles


n'est pas le même pârtout, le fait de l'orientation elle-même
apparaît comme une exigence fondamentale de tout culte;
la position dans laquelle se fait la prière est aussi impor- -
tante que la formule euchologique récitée1.
Le christianisme ne fait pas exception à la règle géné-
rale2. Depuis 200 environ, et peut-être même depuis le dé-

* L'auteur précise et complète le présent article dans une étude


intitulée Sol œquinoctialis. Problèmes ettechniques de l'orientation
dans le culte chrétien, à paraître dans les Actes du colloque d'archéo-

:
logie paléochrétienne de Strasbourg (courant 1963).
I. En ce qui concerne l'orientation, les grandes religions histo-
riques se répartissent en deux catégories les cultes adoptant une
orientation « géographique », tel le Judaïsme (Temple de Jérusa-
orientation «cosmique »
lem) et l'Islam (la Kaaba de La Mecque), et les cultes adoptant une
ou solaire, tel les religions de l'antiquité
classique et le christianisme. La différence entre les deux types
d'orientation est fondamentale et irréductible. L'orientation dans
le christianisme s'affirme par opposition à l'orientation juive; cf. sur
ce point E. PETERSON, Die geschichtliche Bedeutung der jüdischen
Gebetsrichtung, in Theologische Zeitschrift, 1947, p. 1 et suiv.; et
La croce e la preghiera verso Oriente, in Ephemerides Liturgicae,
LIX (1945), pp. 52-68; les deux articles sont repris et complétés dans
E. PETERSON, Frühkirche, Judentum und Gnosis, Rom-Freiburg-
Wien, 1969, pp. 1-35. Bibliographie d'ensemble ci-dessous; n. 4.
2. L'orientation dans le christianisme pose un problème, du fait
que les écrits néotestamentaires ignorent toute direction déterminée

:
pendant la prière ou même l'excluent formellement, ainsi Mt., 6, 6;
loh., 4, 21-23; cf. aussi les textes affirmant que Dieu n'habite pas
dans les temples Actes, 17, 24; Ioh., II, 19; 1 Cor., 3, 16; II Cor., 6,
but du second siècle, tant en Orient qu'en Occident, le
chrétien priait vers le soleil levant, vers l'est, et très tôt,
depuis Origène (t 253-254) au moins, la direction versus
orientem l'emporte, en cas de conflit, sur une autre exi-
gence, celle de se tourner pendant l'oraison vers l'air libre
et le ciel découvert3

:
La loi de l'orientation cultuelle commande essentielle-
ment trois domaines la prière privée, la prière collective
ou liturgique proprement dite et l'architecture des édifices

16; Apoc., 21, 10. Cette constatation implique que le fait de l'orien-
tation chrétienne provient du milieu dans lequel le christianisme
s'est développé, non par emprunt direct aux cultes solaires propre-
ment dits auxquels le christianisme s'est constamment opposé, mais
par influence diffuse de tout le milieu culturel antique. Les motifs
allégués par les auteurs ecclésiastiques pour imposer l'orientation

dition opposée à l'orientation:


ou la justifier sont évidemment spécifiquement chrétiens. On n'ou-
bliera pas qu'à l'intérieur même du christianisme il existe une tra-
MINUCIUS FELIX (fin 2e s.), Octa-
vius, XXXI, 2 (C. S. E. L., II, 45-46), ARNOBE (v. 304-3I0), Adv.

:
nat., IV, 5 (C. S. E. L., IV, 145), AUGUSTIN (387-43O), Tract. in
Ioh., X, I (P. L., 35, 1467) (malgré d'autres textes formels du même
,
auteur attestant l'orientation p. ex. De serm. Dom. in monte, II,
5, 18 = P. L., XXXIV, 1277) et Léon Ier (440-46I)
nat. Dom., VII, 4 (P. L., LIV, 218).
Serm. 27 (26) = In
3. TERTULLIEN, Ad nationes, I, 13 (C. S. E. L., XX, 83); Apologe-
ticum, XVI, 9-11 (Corpus Christianorum, I, I, p. 116). CLÉMENT
D'ALEXANDRIE, Paedagog., II, 8, 61 (G. C. S. Clem., I, 194). L'on peut
remonter jusque vers les années 100, si l'on admet l'interprétation
de Fr. J. DOELGER, d'un passage de Epiphane sur Elchasai; EPIPHANE,
Panarion, XIX, 3, 5-6 (G. C. S., Epiphan., I, 220); cf. Fr. J. DOELGER,
Sol Salutis, Muenster-Westf., 1925, pp. 194-198. — ORIGÈNE, De ora-

prière. Il y a quatre points cardinaux :


tione, 32 (G. C. S., Origenes, II, 400) : « Il reste à parler encore de
la direction céleste vers laquelle il convient de regarder pendant la
nord, sud, ouest et est; qui
ne reconnaîtra pas ce qu'il convient de prier vers l'est, comme sym-
bole, pour que l'âme soit orientée vers l'apparition de la vraie
lumière? Si les portes de la maison s'ouvrent vers une autre direc-
tion du ciel et si quelqu'un veut prier, tourné vers cette ouverture
de la maison en affirmant que le ciel libre est plus attrayant pour
les regards que le mur — dans le cas où par hasard la maison n'a
:
pas d'ouverture vers le lever du soleil — il faut répliquer ceci les
maisons tiennent leurs ouvertures de la volonté arbitraire de
l'homme tandis que l'est excelle par nature sur les autres points
cardinaux. Il faut donc préférer ce que la nature a créé à ce qui
est construit arbitrairement. Quand quelqu'un prie sous le ciel
découvert il se tourne vers l'est, pour la raison indiquée plus haut.
?
Pourquoi ne pas agir ainsi partout » On se souviendra que la mai-
:
son antique a normalement une ouverture vers l'est, y compris
les étables cf. VITRUVE, VI, 6 : « agricolae regionum periti non
putant aliam regionem caeli boves spectare nisi ortum solis ».
sacrés; elle donne donc lieu à trois séries de problèmes que
l'analyse devra distinguer soigneusement4.

4. Les trois problèmes indiqués ci-dessus sont complémentaires,


mais ne découlent pas nécessairement l'un de l'autre. Nous nous
:
contentons d'indiquer ici les principaux travaux relatifs à l'orien-
:
tation dans le culte chrétien a) Orientation dans la prière privée
et dans le culte J. THOMASIUS, De ritu veterum christianorum pre-
candi versus orientem, Leipzig, 1672; M. ZEIDLER, Exercitatio theo-

:
logica de conversione orantium ceu ritu Ecclesiac iam olim usitato,
Königsberg, 1673; J. BoNA, Rerum liturgicarum libri duo, Cologne,
1674 (orientation 1. I, pars II, c. XX, § 4, pp. 244-247); C. AUBER,
Histoire et théorie du symbolisme religieux avant et depuis la chris-
tiànisation, t. 1-4, Paris, 1884 (orientation : t. 3, pp. 66-100);
G. LOESCHEE, Judisches und Heidnisches im christlichen Kult, Bonn,
1910; Fr. J. DOLGER, Sol Salutis. Gebet und Gesang im christlichen
Altertum mit besonderer Rücksicht auf die Ostung in Gebet und
Liturgie (Liturgiegeschtl. Quellen und Forschungen, XVI-XVII),
26 éd., Münster-Westf., 1925 (fondamental); du même, Die Sonne
der Gerechtigkeit und der Schwarze (Liturgiegeschtl. Quellen und
Forschungen, XIV), Munster-Westf., 1919; L. GOUGAUD, Dévotions et
pratiques ascétiques du moyen âge, Paris, 1925; E. PETERSON, La
croce e la preghiera verso Oriente cit. et Die geschichtliche Bedeu-
tung der jüdischen Gebetsrichtung cit., les deux articles repris et
complétés dans E. PETERSON, Frühkirche, Judentum und Gnosis,
Rom-Freiburg-Wien, 1939, pp. 1-35 (fondamental); L. VOELKEL,
Orientierung im Weltbild der ersten christlichen Jahrhunderte,
dans Riv. di archeol. cristiana, XXV (1949), pp. 155-170; A. KrncH-
GASSNER Die mitchtigen Zeichen. Ursprünge, Formen und Gesetze des
Kultus, Freiburg-Basel-Wien, 1959. b) Orientation des édifices sa-
crés : J. A. ALBËRDINGK THIJM, Lettre sur la ligne sacrée à M. le
Conseiller Auguste Reichensperger, Amsterdam, 1858; du même,
De heilige Linie. Proeve over de oostwardsche Richting van Kerk en
Altaar als Hoofjbedinsel der kerklijke Bouwkunst, Amsterdam, 1858;
H. DTm, Handbuch der kirchlichen Kunst-Archoologie des deuischen
Mittelalters, Leipzig, 1868; H. NISSEN, Orientation. Studien zur Ges-
chichte der Religion, Hefl-3 (seuls parus; pagination continue), Ber-
lin, 1906, 1907, 1910; 0. MOTHES, Die Basilikenformen bei den Chris-
ten der ersten Jhh., 2e éd., Leipzig, 1869; du même, Die Baukunst
des Mittelalters in Italien, 1 (seul paru), Jena, 1884; F. X. KRAUS,
Orientierung (Real-Encyklopaedie der christlichen Altertumer. II,
pp. 559-561), Freiburg-Br., 1886; G. DEHIO-G. V. BEZOLD, Die kirchli-
che Baukunst des Abendlandes, I, Leipzig, 1892, pp. 91-92;
TH.SCHERMANN, Christliche Ostung, dans Archiv. f. christliche
Kunst, XIX (1901), pp. 33-35; 43-46; 49-52; 57-60; J. SAUER, Symbo-
lik des Kirchengebaudes und seiner Ausstattung in der Auffassung
des Mittelalters, Freiburg-Br., 1902; K. LIESENBERG, Der Einfluss der
Liturgie auf die frühchristliche Basilika, Neustadt a. d. Hard, 1928,
PP. 37-42; A. M. SCHNEIDER, Liturgie und Kirchenbau in Syrien,
dans Nachrichten d. Akad. d. Wissenschaften i. Gottingen, Phil.-
Hist. KI. 1949, pp. 45-68; G. KUNZE, Lehre, Gottesdienst in ihren
gegenseitigèn Beziehungen, I (seul paru), Göttingen, 1949; J. A.
JUNGMANN-E. SAUSER, Symbolik der katholischen Kirchc (Symbolik
der Religionen,VI), Stuttgart, 1960; F. WEIGAND, Die Ostung in der
Il ne sera question ici que du culte chrétien durant le
haut moyen âge tel qu'il nous est connu par les Ordines
Romani 5.

I. — VERSUS AD ORIENTEM ».
«
LA POSITION DU CÉLÉBRANT AL'AUTEL

Les témoignages relatifs à l'orientation dans le culte


abondent pour la partie orientale de l'Église; il n'en va
pas de même pour l'Occident6.

fruhchristlichen Architektur, dans Festschrift f. Sebastian Merkle,


Düsseldorf, 1922, pp. 370-385.
5. Numérotation et édition des Ordines Romani dans M. ANDRIEU,
Les Ordines Romani du haut moyen âge, I, Les manuscrits, Louvain,
1931; II, Les textes (Ordines I-XIII), ibid., 1948; III (Ordines XIV-
XXXIV); ibid., 1961; IV (Ordines XXV-XXIX), ibid., 1956. Les ponti-
ficaux du moyen âge ne contiennent rien de nouveau sur l'orien-
tation par rapport aux Ordines Romani; on pourra se reporter aux
termes orientem (ad, versus) des indices établis par M. ANDRIEU,
Le pontificat romain au moyen âge, t. 4 (Studi e Testi, 99), Città del
Vaticano, 19[11, p. 323. A propos du rituel de la dédicacé des églises
(Ordo XLI) dans lequel apparaissent les points cardinaux (Ordo XLI,
5) (i Deinde poutifcx incipit de sinistro angulo ab oriente scribens
per pavimentum cum cainbuta sua abcdurium usque in dextro
angulo occidentalis; incipiens iterum similiter de dextro angulo
orientalis abcdurium scribens usque in sinistro angulo basilicae
occidentalis » (éd. ANDRIEU, Ordines, IV, pp. 340-341) ne sont pas à

:
interpréter en fonction du cardo et du decumanus des agrimensores
romains, mais à partir du rituel celtique qui attribuait une vertu
bénéfique à l'alphabet inscrit sur une croix oblique cf. H. THURS-
TON, The Alphabet and the Consecration of Churches, dans The
Month, 1910, pp. 621-631.
6. En ce qui concerne l'orientation dans le culte dans la liturgie
orientale citons ici : a) les Canones Basilii (v. 400), c. 97 (éd. W. RIE-
DEL, Die Kirchenrechtsquellen des Patriarchats Alexandrien; Leipzig,
1900, p. 274 et I. E. RAHMANI, I fasti della Chiesa patriarcale Antio-
chena, Roma, 1920, pp. XVI-XVII), au début de la préface; b) la
Didascalià (fin 3e s.), II, 57, 5 et les Constitutions Apostoliques
(v. 38o), II, 57, 5 (éd. Fr. X. FUNK, Didascalia et Constitutiones
Apostolorum, I, Paderborn, 1905, pp. 158-166; sur le texte syriaque
de la Didascalia et la reconstruction de l'original grec par P. nE LA-
GARDE, voir A. M. SCHNEIDER, Liturgie und Kirchenbau in Syrien,
dans Nachrichten d. Akad. d. Wiss. in Göttingen, Phil.-Hist. Kl.,
19119, p. 48), d'après le contexte, pour l'oratio fidelium et la prière
eucharistique (sur l'interprétation erronée du célèbre passage des
Constitutions Apostoliques, II, 57, 2 : « Que l'édifice (sacré) soit
tourné vers l'orient », donnée par exemple dans KUNZE, Kirchenbau,
pp. 28-29, voir SCHNEIDER, op. cit., p. 50); c) l'Anaphore coptede
Les témoignages latins, avant les Ordines Romani, sont
au nombre de trois.
a) Le deuxième sermon de saint Augustin (354-430) en
l'honneur de saint Cyprien, prononcé vraisemblablement

est), se termine par l'exhortation :


dans la memoria Cypriani à Carthage (orientée façade en
« conversi ad dominum
(oremus) 7 ». Le contexte nous oblige d'admettre que cette
conversio implique un retournement vers l'est, lequel
s'opère donc, après l'homélie, au début de la missa fide-
lium8. Les formules « conversi ad dominum. gratias aga-
mus »ou « deprecamur » se rencontrent dans 117 sermons
authentiques de l'évêque d'Hippone 9.
Dans le vocabulaire
augustinien, le participe conversi signifie « tournés vers
l'est M, conformément d'ailleurs à la sémantique du verbe
convertere qui, de Vitruve et Ovide jusqu'à Walafrid Stra-
bon, implique un mouvement vers l'est10. Cette significa-
tion concorde avec ce que les Constitutions Apostoliques'
nous apprennent pour la même époque.
saint Basile (éd. E. RENAUDOT, Liturg. oriental. collectio, Paris, 1710,
p. 13), avant la préface; d) la Liturgie alexandrine de saint Basile
(éd. RENAUDOT, op. cit., p. 65), avant le Sanctus; e) une Anaphore
éthiopienne (éd. RENAUDOT, op. cit., p. 516), avant la préface; f) la
Liturgie de saint Jean Chrysostome (éd. du IEHATIKON, Rome, 1950,
p, r31 et tous les Euchologes grecs), avant la préface et pour le
Ganon.
7. AUGUSTIN, De nataliS, Cypriani Scrmo II, 153 (éd. G. MORIN,
S. Augustini tract, sive sermones inediti, Kempten-München, 1917,
p. 109.
-
8. Sur ce point DOLGER, Sol Salutis, pp. 33o-336.
9. Ainsi dans les Sermons 1, 26, 29, 49, 63, 67, 69, 76, 87, 100, 111,
ix3, 133, 124, 127, 128, 129, 131, 138, 141, 145, 151, 153-
156, 163-165, 169, 173, 174, 175, 180, 182, 234, 235, 254, 273, 279, 285,
294, 314, 323, 324, 361, 562; tous ces sermons dans P. L., XXXVIII.
10. Ainsi AUGUSTIN, De sermone Domini in monte, II, 18 (P. L.,

:
XXXIV, 1277) : « Cum ad orationem stamus, ad orientem conver-
timur. » Dans le même sens deconversio vers l'orient VITRUVE,
De architect., IV, 5, 2; HYGIN, De limitibus constituendis (éd. Blume-
Lachmann, Die Schriften der rômischen Feldmesser, I, Berlin, 1848,
p.169); OVIDE, Fasti, IV; LÉON l'sr, Serm. 26 (26) = In nat. Dom.,
7, 4 (P. L., LIV, 218) : « Converso corpore ad nascentem solem se
refleètant »; WALAFRID STRABON, Lib. de exord. et increm., etc.
vertamus. »
(M. G. H., Capit., II, 477) : « Ut orientem versus facies orando
Il convient de citer également un passage des Acta
Pionii (t 250) (éd. Ruinart, p. 197); « ad orientem oculis animoque
conversis ».
b) Le Sursum corda — Habemus ad dominum » du dia-
«
logue introductoire à la praefatio ou contestatio et donc à
l'action eucharistique proprement dite, contient un aver-
tissement aux fidèles de se tenir immobiles et attentifs. Or
la concentration religieuse se traduit extérieurement par la
station debout, la fixité du regard et, pour le célébrant du
moins, par l'orientation du corps vers l'est; en effet, l'en-
droit où réside le Seigneur est l'est11. -
c) Un passage célèbre d'un sermon de saint Léon le Grand
(440-461), à notre avis, atteste e contrario l'usage de la con-
versio versus orientem, à certains moments de la prière litur-
gique. Voici ce passage :
Certains chrétiens agissent de même (en se tournant vers le
soleil levant) et croient par là accomplir un acte religieux. En
effet, avant d'entrer dans la basilique du bienheureux apôtre
Pierre, laquelle est dédiée au seul et vrai Dieu et après avoir
gravi les degrés qui mènent à la terrasse supérieure
( =l'atrium), ils se tournent vers le soleil levant et, la tête
baissée, s'inclinent pour honorer le soleil radieux. Leur
manière d'agir est imputable en partie à leur ignorance, en
partie à leur esprit païen; nous en sommes péniblement affec-
tés. Même si quelques-uns d'entre eux vénèrent davantage le
créateur du beau soleil que le soleil lui-même, qui n'est qu'une
simple créature, il faut cependant se garder de l'apparence
même d'un pareil culte. Si en effet un nouveau converti du
paganisme retrouve chez nous un élément de l'ancienne
croyance, ne le retiendra-t-il pas comme acceptable, puisqu'il
voit qu'il est commun aux chrétiens et aux païens12.

II. Sur ce point voir les observations de DÖLGER, Sursum corda


und der Aufblick zum Himmel, dans Sol Salutis, pp. 301-320. Nous
disons « pour le célébrant du moins », car dans l'hypothèse où
l'église avait son entrée en est et l'abside (avec l'autel) en ouest,
il est inconcevable que les assistants aient tourné le dos à l'autel
même pour se mettre versus orientem (voir plus loin, n. 32). Dans
le cas d'une église ayant son chevet et son autel en est (comme la
majorité des édifices sacrés au nord des Alpes), pour éviter, que le
»
célébrant ne soit « désorienté pendant l'Eucharistie, la célébration
versus populum sera abandonnée comme nous le dirons; dans cette
hypothèse, les fidèles regardent vers l'autel et versus orientem.
12. LÉON lor, Sermo 27 (26) = In nativitate Domini, 7, 4 (P-L.,
LIV, 218). Cf. DOLGER, Sol Salutis, pp. 1-20.
Pour l'intelligence de ce texte, il faut se souvenir que la
basilique du Vatican est orientée abside en ouest et entrée
en est et que certains chrétiens entendent donner à leur
salutation versus solem orientem un sens chrétien (a Vene-
rantur. creatorem potius pulchri luminis quam ipsum lu-
men»). L'on peut supposer que ces chrétiens ne se seraient
pas retournés avant d'entrer dans la basilique (où, regar-
dant vers l'abside, ils regardent versus occidentem) s'ils
avaient eu l'occasion, durant le culte, de se tourner vers
l'orient. Si cette exégèse est exacte, il s'ensuit qu'à Rome,
vers le milieu du 5e siècle, la conversio versus orientem pen-
dant le culte n'était plus en usage13.
Si l'on veut ajouter foi au témoignage de Guillaume Du-
rand (v. 1230-1296), c'est le pape Vigile (537-555) qui aurait
introduit la coutume pour le célébrant de se tourner vers
l'est pendant le culte :
Porro licet Deus sit ubique, tamen sacerdos in altari et in
divinis officiis debet ex institutione Vigilii papae versus orien-
tem orare14.

13. Lacoutume de se retourner vers l'est avant d'entrer à Saint-


Pierre au Vatican s'est maintenue fort longtemps, à en juger par un
passage de J.-B. CASALIUS que nous traduisons ici : « Comme les
fidèles, même dans les siècles suivants (après la monition de saint
Léon Ier), avaient gardé l'habitude de se tourner dans l'atrium de
Saint-Pierre, vers l'est, et adoraient Dieu, tournés vers un mur, le
grand peintre florentin Jottus (= Giotto), en 1300, sur comimade
du cardinal Stefaneschi, neveu du pape Boniface VIII, confectionna
une mosaïque : un vaisseau dans lequel se trouvent le Christ, saint
Pierre et les autres apôtres; le but de ce travail était que désormais
les fidèles vénèrent cette mosaïque placée en est et évitent ainsi
toute superstition ou culte solaire. Urbain VIII (1623-1644) fit placer
cette mosaique au-dessus de la grande porte d'entrée, à l'interieur
de la basilique » (J.-B. CASALIUS, De veteribus sacris christianorum
ritibus, Francfort et Hannover, 1681, p. 31). On notera le recoupe-
ment entre le sermon de Léon Ier (440-461) et les inventaires de
O. MOTHES (Die Baukunst des Mittelalters in Italien, pp. 65-78),
lequel place vers 420 environ le moment où la majorité des églises
furent construites abside en est et entrée en ouest (par opposition
avec les édifices sacrés antérieurs); dans la nouvelle orientation il
n'y a plus pour les fidèles de problème d'orientation, puisque regar-
dant vers l'autel ils regardent automatiquement versus orientem.
I4- GUILLAUME DURAND, Rationale divinorum officiorum, V, 2,
S 57, éd. Lyon, 1584, p. 222.
Le pape aurait donc prescrit au liturge de s'orienter vers
l'est quelle que fût la position,de l'abside (ou du chevet) :
vers l'abside, dans le cas où celle-ci est tournée en est,ver-
sus populumdans le cas où la façade est en est. L'évêque
de Mende est le seul auteurqui fasse état d'une prescription
du pape Vigile. Il est presque certain qu'il entendait seu-
lement par là justifier juridiquement l'usage de son temps.
Il n'y a pas à notre connaissance d'autres témoins occi-
dentaux sur l'orientation dans le culte avant les Ordînes
Romani qu'il nous faut à présent examiner.

la numérotation de M. Andrieu :
Entrent en ligne de compte les Ordines suivants, dans
Ordines I, IV, V, VI, IX,
X, XV, XVII, XIX, XXII, XXIV, XXVII, XXVIII, XXXI.
La chronologie de nos documents s'établit comme suit :
Ordo I, rédigé à Rome fin 7e s. début 86 s. est connu en Gaule
vers 750 certainement, peut-être déjà vers 700-750, dans sa
double recension, primitive et retouchée15.
Ordo XV, rédigé vers 750-787 par un moine burgonde ou
austrasien, et non par « Jean archicantor » de la basilique
Vaticane16.

15. L'Ordo I, rédigé à Rome à la fin du 7E siècle ou au début du


80 siècle, circule en Gaule vers 750. En effet : a) dès ce. début du
ge siècle, il est attesté dans les mss (Paris, B. N. lat. 2399; Saint-Gall,
614; Montpellier, Fac. Méd. 412; Vérone, Bibl. capit. 92; Cologne, Bibl.
capit. 138); b) avant la fin du Be siècle, le compilateur de l'Ordo IV
(Ordo de Saint-Amand) utilise l'Ordo 1 avec son second supplément
(= Ordo 111) ainsi que la Collection A d'Ordines dont lait partie
l'Ordo I; c) avant 787 certainement (probablement dès 775-780),
l'Ordo I retouché dans un sens gallican est utilisé par le moine franc
auteur du Capitulare ecclesiastici ordinis (= Ordo XV), et d) l'Ordo I
est le complément indispensable pour le clerc franc voulant célé-
brer suivant le sacramentaire grégorien (type Paduensis D. 47) qui
circule en Gaule dès le 8e siècle.
:
16. L'Ordo XV (= Capitulare ecclesiastici Ordinis) doit se situer
entre 750 et 787 car a) il utilise la recension retouchée ou franque
de l'Ordo I, laquelle est de 750 environ; b) il utilise l'Ordo XI et
l'ordo baptismal du Gellonensis, donc il n'est pas antérieur à 750;
c) il se situe avant 787, car il fait partie de la collection Sangall. 349,
qui est confectionnée avant le 28 concile de Nicée (787) (cf. Ordo-XIX,
44, qui fait partie également de la Collection sangallienne 349 :
« Sex autem [hereses] iam surrexerunt in mundo de parte orientali
contra sancta Romana ecclesia, sed, opitulante gratia Christi, omnes
illas hereses fregit sancta sedis beati Petri apostoli atque compotavit.
Adhuc septima restat » (= Concile de Nicée, 787) (éd. ANDRIEU, Les-
Ordo XXVII, connu en.France dès la seconde moitié du
8e siècle17.
Ordo IV, appartenant à la collection d'Ordines de Saint-
Amand-en-Pévèle, des dernières décades du 8e siècle, soit vers
780-80018.
Ordo XXIV, également des années 750-80019.
- Ordo XIX, vers 78020.
Ordo XVII, ou Breviariwm ecclesiastici ordinis, vers 780-
79021.
Ordo XXII, vers 795-800, en tout cas avant le couronnement
impérial de Charlemagne en 80022.
OrdoXXVIII, vers80023.
Ordo VI, postérieur à la mort d'Amalaire, donc après 850-
85324.

Ordines Romani, III, p. 226). L'auteur de l'Ordo XV, comme de tout


le Capitulare ecclesiastici ordinis, est un moine burgonde ou austra-
sien et non l'archicantor de la basilique vaticane comme le voulait
C. Silva-Tarotjca, Giovanni « archicantor » di San Pietro a Roma e
l'Ordo Romanus da lui composto (an. 680) dans Atti della Pont.
Accad. rom. di archeol. crist., Memorie I, I, Roma, 1923, pp. 159-219;
cf. l'argumentation de M. ANDRIEU,LesOrdines Romani, III, pp. 3-21.
17. L'Ordo XXVII fait en effet partie de la Collection A des Ordines
Romani.
18. L'Ordo IV utilise la Collection A qui circule en tant que col-
lection en Gaule dès 750; le style de notre Ordo IV nous ramène à
une période antérieure à la renaissance carolingienne.
19. On lit en effet Ordo XXIV, 3 « Post imperatorcm vero dicit
orationem pro rege Francorum », ce qui ne convient qu'à la période
postérieure au sacre de Pépin le Bref par Etienne II (juillet 754) et
avant le couronnement de Charlemagne comme empereur (800).
20. L'Ordo XIX fait en effet partie de la collection du SANGALL, 349;
cf. ce qui a été dit de l'Ordo XV.
21. Le ms. de Rome, Vaticanus Palat. 574, paraît être l'original
de l'Ordo XVII; la date de composition est donc celle de la confection
de ce codex (vers 790). Dans tous les cas, même si le Palatinus 574
n'est qu'une copie, l'archétype doit se placer vers 780-785, puisque
l'Ordo XVII utilise l'Ordo XV et l'Ordo XVI, pièces d'une collection
compilée vers 750-780.
22. L'Ordo XXII est antérieur au couronnement impérial de Char-
lemagne, car celui-ci y est qualifié de rex (Ordo XXII, 13 : « tem-
pore Adriani institutum est tu flectere tur pro Carolo rege » et après
Hadrien 1 († 795) en raison de l'expression « tempore Hadriani ». Voir
A. JUNGMANN, Fiectere pro Carolo rege, dans Mélanges en l'honneur de
Mgr M. Andrieu (Revue des Sciences religieuses, vol. hors série),
Strasbourg, 1956, pp.219-228.
23. Ordo XXVIII appartient en effet à la Collection B ou gallicanisée
(vers 800).
24. L'Ordo VI est postérieur à Amalaire († 85o-853), car il en
reprend une expression (Ordo VI, 67 = AMALAIRE, De eccl. ofl., III, 15;
P. L., CV, 1211) et vient probablement de la région de Metz (« statio-
narii diaconus »).
Ordo V, vers 880-900, bien qu'il n'apparaisse qu'avec le
Romano-germanique 25.
Ordo IX, vers 890-90026.
Ordo XXXI, vers 90027.
Ordo X, rédigé entre 900 et 950-962 28.

Nos Ordines prescrivent au célébrant de se tourner versus


orientem dans les cas suivants :
1) après le verset de l'introït (antiphona ad repetendum)
1, 51; OrdoVI, 23.
:
:
Ordo
2) pendant le Kyrie eleison OrdoXV, 123; OrdoXV, 16.
3) pendant le chant du Gloria in excelsis Deo : Ordo I, 53;
Ordo IV, 21; OrdoXV, 17; OrdoXVII, 28.
:
4) pendant la récitation de la collecte Ordo I, 53; Ordo XV,
18; Ordo XVII, 30; Ordo XXII, 4.
5) pendant la lecture de l'évangile
6) pendant que le célébrant communie
::
Ordo V, 35.
Ordo IX, 40.
7) pendant la récitation de l'oratio ad complendum, c'est-à-
dire de la post-communion : Ordo I, 123.
8) pendant l'oratio super populum : Ordo XXII, 14.
9) pendant la consécration du saint chrême, le jeudi saint;
OrdoXXIV, 17; XXVII, 30; XXVIII, 20; XXXI, 25.

:
10) pendant l'oraison précédant la bénédiction des fonts
baptismaux le samedi saint Ordo XXVIII, Appendix, 1129.

La prescription versus orientem n'est pas mentionnée,


par nos Ordines, durant le rituel baptismal, où, à l'époque

25. L'Ordo V apparaît vers 950-964 avec le Pontifical romano-germa-


nique où il est inséré sans changements. L'Ordo V est plus récent
que les Eglogae de Ordine romano attestées paléographiquemnt dès
la seconde moitié du 9e siècle (SAINT-GALL, Stiftsbibl. 614). Il est à peu
près contemporain d'Amalaire (t 85o-853) auquel le Sangall. 614, dans
une écriture un peu postérieure, attribue les Eglogae.
26. L'Ordo IX appartient à la partie du Sangall. 614 qui est dela
fin du 9° siècle (ANDRIEU, Ordines, I, 347). D'autre part l'OrdoIX
utilise l'Ordo V qui est de 880-000 environ.
27. L'Ordo XXXI utilise conjointement le Gélasien et l'Hadrianum
supplémenté (v. 900). Il est postérieur à Amalaire (85o-853) dont un
ms. du IOe siècle transcrit déjà le Liber officialis.
28. L'Ordo X fait en effet partie du Pontifical romano-germanique
(v. 950-964). Il est postérieur à 900 car les Ordines V et IX, tous deux
de la fin du 9e siècle, sont les sources immédiates de l'Ordo X.
29. Ed. ANDRIEU, Les Ordines Romani, III, pp. 412-413. — Tous les
Ordines indiqués ci-dessus sont facilement accessibles dans l'édition
critique qu'en a donné M. Andrieu;
paléochrétienne, le symbolisme est (serment de fidélité) et
ouest (rite apotropique de la renonciation à Satan) était
largement utilisé80.

préalables:
La répartition opérée ci-dessus appelle deux remarques
a) la prescription de se tourner versus orien-
tem ne concerne que le célébrant (avec les ministres qui
l'entourent) et b) elle n'est pas renouvelée au moment de
l'action eucharistique proprement dite (à partir de la prae-
fatio). Il y a à cette anomalie une raison très simple. Le con-
texte de nos Ordines. suppose — nous le dirons — que l'édi-
fice sacré est orienté chevet (et autel) en est, la façade (et
l'entrée) en ouest et que, dans ces églises, le célébrant ne
se tient pas versus populum, mais devant l'autel, le dos
tourné aux fidèles et donc ipso facto versus orientera31. Pour

:
les assistants, le problème d'orientation ne se pose pas non
plus ils sont normalement tournés vers l'autel, donc vers
l'abside (ou le chevet) en est.
Au surplus, durant l'action eucharistique proprement
dite (de la préface à la doxologie finale), le principe de
l'orientation vers l'est, même dans les églises ayant le che-
vet et l'autel en ouest, ne s'est jamais appliqué aux fidèles
ils ont regardé la mensa quelle que soit la position de celle-
:
ci (en est ou en ouest). Tourner le dos à l'autel, même sous
le prétexte de s'orienter versus- orientem eût été un acte

30. Sur ce point FR. J. DOLGER, Die Sonne der Gerechtigkeit und
der Schwarze. Eine religionsgeschichtliche Studie zum Taufgelöbniss
(Liturgiegeschtl. Quel. u. Forschung., XIV), Münster-Westf., 1919 et,
du même, Sol Salutis, p. 334. Des rites d'orientation lors du baptême,
découle la position du baptistère qui dans les basiliques constanti-
niennes est situé à l'ouest, c'est-à-dire derrière l'abside. Au moment
de l'abrenuntiatio satanae en effet, le baplizandus se tourne vers
l'ouest, habitation des démons. L'entrée du baptistère est en ouest,
à l'opposé de l'entrée de l'édifice sacré en est; sur ce point G. Po-
DHRADSKY, Aniange der symbolischen Betrachtung des Kirchengebau-
des (Referat anlässl. der Disputatio publica z., Thomasfest, 1955 an d.
Theol. Fak. d. Univers. Innsbruck; inédit) cité dans JUNGMANN-SAUSER,
Symbolik, p. 58.
31. Il faut remarquer ici que l'expression « célébrant tourné dos
au peuple » est très mal choisie; il n'a jamais été question de faire
tourner au prêtre le dos aux assistants, mais d'orienter le liturge avee
les fidèles versus orientem,
irrespectueux grave vu la sainteté de l'autel, et ceci a for-
tiori quand s'y accomplissait le mystère le plus auguste du
culte chrétien32.
A cela s'ajoute le fait que très tôt la croix prend place sur
l'autel ou sur les murs de l'hémicycle absidal (croix escha-
tologique) et concrétise ainsi la direction de la prière83.

Le texte le plus riche en renseignements est sans doute


aucun l'Ordo I, n. 53 (Ordo romanus primus), et les Ordines

32. Se retourner pendant le sacrifice était, dans l'antiquité païenne,


une irrévérence grave (OVIDE, Fasti VI, 164 : « Quique adsint sacris,
respicere illa vetat »). Il en est de même dans le judaïsme (Ez., 8,
16) « A l'entrée de la maison de Yahweh, entre
le portique et l'au-
tel, il y avait environ vingt-cinq hommes le dos tourné au temple
de Yalrweh et le visage de l'orient. Est-ce trop peu pour la maison
de Juda do commettre les abominations qu'ils continuent ici? »
Pour les chrétiens nous avons le témoignage explicite de GRÉGOIRE
DE NAZIANZE (Oratio, XVIII, 10). Tourner le dos à l'autel devient un
acte injurieux surtout quand se développe le symbolisme identifiant
l'autel au Christ, ceci dès le 4E siècle (EUSÈBE, H. E., X, 4, 68; AM-
BROISIE, De sacramentis, V, 2, 7; CYRILLE D'ALEXANDRIE, Ador (P. G.,
LXVIII, 5GI D). Sur l'ensemble du problème voir FR. J. DöLGER, Die
Heiligkeit des Altars und ihre Begründang im christlichen Altertum
(Antike und Chrislentum, II, 1930, pp. 161-183), et du même, Der
Altarkuss (ibid., pp. 190-193); TH. KLAUSER, Die konstantinischen
Altäre der Lateranbasilika, dans Rômische Quartalschrift, XLIII (1935),
pp. 179-186, et les chapitres correspondants de J. BRAUN, Der christli-
che Altar in seiner geschichtlichen Entwicklung, 2 vol., München,
1924.
33. La croix et plus précisément la croix dans sa signification escha-
tologique (emblème précédant le Christ dans sa parousie pour le juge-
ment dernier et, par le fait même, crux triumphalis ou crux victo-
ride) a été utilisée depuis la plus haute antiquité pour indiquer et
localiser la direction est vers laquelle il convient de prier; ceci expli-
que sa présence dans les absides et rend difficilement concevable qu'à
un moment quelconque de l'office on ait pu lui tourner le dos; cf.
PRTERSON, Friinhirche, Judentum und Gnosis, pp. 29-35. La croix
sur le devant de l'autel est mentionnée par PAULIN DE NOLE (403),
ln Felicis nativitate, XI, 474 : « [crux] altaris faciem signo pietatis
adnrnat »; la croix sur l'autel par saint Jean Chrysostome (407). Sozo-
MÈNE(4?îo) parle de la coutume de placer la croix
sur l'autel comme
d'un usage courant (SOZOMÈNE, H. E., II, 2). Le corpus sur la croix
(crucifix) est déjà mentionné par l'ascète Nestorien Dadisho Ct v. 690);
cf. PETERSON, op. cit., pp. 17-19.
— Voir cependant sur la thèse de
E. WURGANG (Die Ostunq in der frühchristlichen Architektur : Fests-
chrift f. Seb. Merkle, Dusseldorf, 1922, pp. 370-385) relative à l'in-
fluence de la croix absidale sur l'orientation des édifices sacrés, les
remarques de PETERSON, op. cit., p. 31, n. 39.
:
qui s'en inspirent comme de leur source34. L'Ordo I, 53,
nous est parvenu dans une double rédaction
Tous les manuscrits sauf SAINT-GALL, codd. IItO et
Sangail.ilio et 614. 614.

I, 53 Quam (Kyrie eleison)


: I, 53 : Quatido vero funie-
dum finierint, incipit ponti- rint (Kyrie eleison) dirigens
fex : Gloria in exelcis Deo, si se pontifex contra populum
tempus fuerit, et non sedit incipit Gloria in excelsis Deo.
antequam dicant, postoratio- Et statim regerat (regirat) se
nem primam, Amen35. ad oricntem usquedum finia-
tur. Post hoc dirigens se ite-
rum ad populum dicens :
Pax vobis et regerans se ad
orientem dicit Oremus et
scquitur oratio. Post finitam
sedit36.

La différence entre les deux versions est notable. Les codi-


ces Sangall. 140 et 614 nous ont gardé une recension fran-
que de l'original romain, effectuée vers 750 environ, date
où notre Ordo avait émigré de Rome, et 787, année où
l'Ordo 1 avec ses interpolations gallicanes était entre les
mains du moine austrasien ou burgonde qui rédigea le
Capitulare ecclesiastici ordinis (= Ordo XV) 37.
Suivant le texte élargi, le pontife, après le chant du Kyrie
eleison, se retourne vers le peuple pour entonner le Gloria
in excelsis; il se remet dans la positionversus orientem
jusqu'à la fin de l'hymne angélique. Puis il se tourne à

34. Sur l'Ordo I, voir Les Ordincs Romani, II, pp. 3-64 (texte de
I,
l'Ordo ibid.,pp.64-108).
35. Ed. ANDRIEU, Ordines Romani, M, p. 84.
36. Ibid. (avec mise en évidence de l'interpolation).

les codices Sangall. 140 et 614 (ainsi que de diverses autres;


37. Sur l'origine franque de l'interpolation signalée ci-dessus dans
Ordo I,
24, 27,53, 76, 87, 95, 103, 123), voir la démonstration de M. ANDRIEU,
Note sur une ancienne rédaction de l'Ordo Romanus primus (= Ordo
I), dans Revue des Sciences religieuses, II (1922), pp. 319-330, et, du
même, Les Ordines Romani, II, pp. 38-64. — Sur l'Ordo XV (= Capi-
tulare ecclesiastici ordinis), sa date et son origine, contre l'hypothèse
erronée de Silva-Tarouca, voir ANDRIEU, Les Ordines Romani, III,
pp. 3-92.
nouveau vers le peuple pour la salutation Pax vobiscum et
revient versus orientem pour la collecte.
La recension interpolée suppose que le chevet, avec l'au-
tel, est en est, l'entrée en ouest, autrement les indications
sur les mouvements prescrits au célébrant deviennent inin-
telligibles : se tourner vers le peuple (« dirigens se contra
populum ») et se retourner vers l'orient (« regerans se ad
orientem38 »).
Toutes nos sources s'accordent d'ailleurs pour nous con-
firmer qu'à l'époque où fut élaborée la recension élargie, la
règle en pays franc était de placer le chevet et l'autel en est,
la façade et l'entrée en ouest39. Walafrid Strabon (+ 849)

38. Et ceci dans tous les cas, que la cathedra épiscopale soit au
fond de l'hémicycleabsidal ou qu'elle soit latérale ou que l'on
imagine le célébrant à l'autel. Notre passage avec ses indications sur
les mouvements rotatoires suppose nécessairement un édifice sacré
ayant son chevet (et l'autel)en est.
39. Les édifices
- sacrés de l'époque constantinienne (les plus
- anciens
-
qui soient conservés) ont leur axe, dans la mesure où il s'agit de
plans basilicaux, orientés d'est en ouest, en conformité avec le decu-

dominante :
manus des agrimensores romains. Il est certain que dans un premier
temps, la position de l'abside en ouest et l'entrée en est était pré-
sur 20 édifices constantiniens, 10 ont l'abside en ouest
(Saint-Sépulcre à Jérusalem, la basilique de Paulin à Tyr, l'Octogone
d'Antioche, l'Ecclesia Magna d'Héliopolis; la Memoria Apostolorum
sur la via Appia, Saint-Sauveur au Latran, Saint-Pierre au Vatican,
Saint-Paul sur la voie d'Ostie (= la basilichetta primitive), Saint-
Laurent-hors-les-murs (= 1re construction), l'église des Apôtres à
Capoue), 7 ont l'abside en est (l'église de la Nativité à Bethléem,
l'Oratoire du Mont-des-Oliviers, la basilique de Mambra, les Saints-
Apôtres à Constantinople, Sainte-Croix-de-Jérusalem à Rome, Saint-
Jean-Baptiste à Albano, Saints-Pierre-et-Marcellin sur la via Labicana)
et 3 sont aberrants, non orientés dans l'axe est-ouest (Sainte-Agnès-
hors-les-Murs, Saints-Apôtres à Ostia, la basilique de Naples). En te-
nant compte des relevés de Mothes et de Nissen, sur un total de
53 églises antérieures à 420 environ, 37 ont l'abside en ouest, II l'ab-
side en est, 2 l'abside au nord et 3 sont indéterminées. Depuis le
milieu du 5e siècle environ, la proportion se renverse en faveur du
type abside en est, façade en ouest qui sera le type à peu près exclusif
au moyen âge, au nord des Alpes. D'après les mesures de O. Mothes,
sur 68 églises construites entre 4ao environ et l'an mille, 44 ont
l'abside en est, 17 l'abside en ouest ou dans une autre direction (cas
souvent explicables par les conditions de lieu). Des relevés complets
et sûrs font défaut; voir la bibliographie donnée note 4. A nous en
tenir aux sources littéraires en Occident, notre documentation se
présente comme suit. PAULIN DE NOLE (~ 431) s'excuse encore de n'avoir
pas respecté, dans sa nouvelle construction attenant à S. Felix in coe-
meterio, la position, traditionnelle à son époque, de l'abside en ouest
et de l'entrée en est (PAULINUS NOLANUS, Ep., 32, 13 : « Prospectus
note que c'est là l'usage le plus rationnel, c'est-à-dire le plus
conforme aux exigences cultuelles de l'orientation versus
orientem : « usus frequentior et rationi vicinior40 ». Le

:
moyen âge se tiendra à ce principe d'architecture sacrée;
les documents ajoutent toutefois une précision l'orientation
se fera vers le lever du sol aequinoctialis et non vers les
points solsticiaux41. Les auteurs médiévaux ont renoué ainsi
avec la technique des agrimensores romains, tout en déve-

:
loppant à propos de l'orientation équinoxiale un symbo-
lisme spécifiquement chrétien équinoxe de printemps (in-

[c'est-à-dire la façade] vero basilicae non ut usitatior mos est, orien-


tem speçtat sed ad Domini mei beati Felicis basilicam pertinet, memo-
riam eius aspiciens »). De même SIDOINE APOLLINAIRE (F v. 480-490)
à propos d'une église construite à Lyon (SIDONIUS ApOLLINARIS,
Epistolarum, 1. II, 10, 4 : « aedes celsa nitet nec in sinistrum aut
dextrum trahitur sed arce frontis [c'est-à-dire la façdde fortifiée]
ortum prospicit aequinoctialem »). Après l'Ordo I, 53, cité plus haut,
WALAFRID STRABON (f 849) relève l'usage inverse; de son temps la
grande majorité des églises ont leur chevet (et l'autel) en est, la
façade (et l'entrée) en ouest (WALAFRID STRABON, Liber de exord. et
increm. quorundam in observat. eccl. rerum, c. 4; M. G. H., Capitu-
laria, II, 478). Ce sera la règle constante au moyen âge; ainsi HONO-
RIUS D'AUTUN (~ v. 1150), Gemma animae, I, 129, de situ ecclesiae.
P. L., CLXX, 586 A-B. J. BELETH (~ 1202), Rationale, c. 2. P. L., CCII,
16 B-C. SICARD DE CRÉMONE (t 1215), Mitrale, I, c. 2, de fundatione
ecclesiae : P. 'L., CCXIII, 17. GUILLAUME DURAND (t 1296), Rationale,
I, I, 8 : éd. 1584, p. 5v.
40. WALAFRID STRABON, Liber de exordiis et incrementis (v. 840-842),
c. 4 (M. G. H., Capitularia Reg. Francorum, II, 478) (après avoir
rappelé l'usage contraire) : « Sed tamen usus frequentior secundum
, quod et supramemoravimus et rationi vicinior habet in orientem
orantes converti et pluralitatem maximam ecclesiarum eo tenore cons-
titui. »
41. Ainsi SIDOINE APOLLINAIRE (t 480-490) : a ortus aequinoctialis »
(Ep., 2, 10, 4; M. G. H., Auct antiquiss., VIII, 34); WALAFRID STRABON
t
C 849) : « ita ut sol aequinoctialis exoriens radios suos per illas
[partes].dirigeret» (Lib. de exord. et increm., c. 4; M. G. H., Capit.,
II, 477). (à propos des temples païens orientés entrée en est, usage
auquel Strabon oppose l'usus frequentior de placer l'abside en est,
et l'entrée en ouest); J. BELETH ct 1202) : « Et omnino necesse est
ut aedificetur [ecclesia] versus orientem, hoc est, versus solis ortum
aequinoctialem, nec vero contra aestivale solstitium ut nonnulli et
volunt et faciunt » (Rationale, c. 2; P. L., CCII, 16 B-C); SICARD DE
:
CRÉMONE (t 1215) «Ad orientem, c'est-à-dire ortum solis aequinoctia-
lem, non ut quidam faciunt ad solis ortum aestivalem » (Mitrale, I,
2; P. L., CCXIII, 17); GUILLAUME DURAND (~ 1296), Rationale, I, 1, 8;
éd. 1584, p. 5 v : « Debet quique sic fundari (ecclesia) ut caputrecte
respiciat versus orientem. videlicet versus ortum solis equinoctia-
lem. et non versus solstitialem ut faciunt quidam. »
carnation et passion du Christ), équinoxe d'automne (con-
ception du Précurseur) 42.
Telle étant la direction de l'axe de l'édifice sacré et la
localisation du chevet avec l'autel, un autre changement ne
tarda pas à s'implanter dans le culte. Dans une église ayant
l'abside et la mensa en est, le pontife ne pourra pas célébrer
versus populum, sous peine d'être tourné vers l'ouest et
d'être « désorienté ». Le célébrant fut donc ramené sur le
devant de l'autel, le dos tourné aux fidèles ou, mieux, tourné
avec eux vers l'orient. Cette solution satisfait entièrement
aux exigences de l'orientation de l'assemblée entière —
liturge y compris — et supprimait les inconvénients prati-
ques que ne manquaient pas d'entraîner, chez les fidèles,
dans le cas des églises ayant l'autel en ouest, les mouve-
ments nécessaires pour se tourner versus orientem.
La position du célébrant devant l'autel, dos aux fidèles,
est confirmée explicitement par Amalaire (~ 850-851). Lors
de la salutation (Pax ou Dominus vobiscum), nous apprend
l'auteur du Liber officialis, le prêtre se tourne vers le peu-
ple et se retourne de nouveau ad orientem pour réciter la

42. La ligne est-ouest correspond en effet au decumanus des agri-


mensores romains, lequel est donné par les points équinoxiaux (270°-
90°). Cf. entre autres PLINE L'ANCIEN, N. H., XVIII, c. 34, sect. 77 (éd.
SILLIG, III, 222) : « Per hune medium [l'umbilicum situé sur le cardo]
transversa currat alia; haec erit ab exortu aequinoctiali ad occasum
aequinoctialem et limes qui ita secabit agrum decumanus vocabitur. »
Sur ces problèmes, voir RUDORFF A., Gromatischc Institutionen
(Schriften der römischen Feldmesser, II, Berlin, 1852), pp. 227-264. —
Il paraît certain que le moyen âge a eu connaissance de la technique
des arpenteurs romains par l'intermédiaire D'ISIDORE DE SÉVILLE,
Etymologiarum, 1. XV, de adeificiis et agris; c. 4, de aedificiis sacris,
n. 7 : « Unde et quando templum constituebant, orientem spectabant
aequinoctialem. » GUILLAUME DURAND dans son Rationale, I, 1, 8,
mots:
explique la direction versus solem aequinoctialem par un mauvais jeu de
« Ad denotandum quod ecclesia quae in terris militat tempe-
rare se debet aequanimiter in prosperis et in adversis. » — Pour ce
qui est du symbolisme chrétien relatif aux équinoxes, rappelons sim-
plement que le moyen âge savait que Dieu créa le monde à l'équi-
noxe de printemps (PHILON, In Exodo sermo, I, 1), que le Christ est
né, c'est-à-dire a été conçu le 25 mars (équinoxe officiel) (De pascha
computus : C. S. E. L., III, 3, p. 266) et qu'il était mort le même jour
(TERTULLIEN, Adv. Iud., c. 8). A l'équinoxe d'automne se place la
conception de Jean-Baptiste (24 septembre), son cycle étant calculé
sur celui du Christ suivant IOH., III, 3o : « Illum oportet crescere me
autem minui. »
collecte qui suit; c'est donc qu'il est devant l'autel, dos
aux assistants, dans une église qui a le chevet en est :
I. Quando dicimus Pax vobiscum siveDominus vobiscum
:
quod est salutatio, ad populum sumus versi, quos salutamus

mus48.
eis faciem praesentamus.
4. Deinde revertitur episcopus ad orientem et dicit Ore- :
Le même Amalaire corrobore l'opinion exposée plus haut
qu'au moment où se déroule l'actio eucharistique, nul souci
d'orientation ne saurait l'emporter sur l'impossibilité de
tourner le dos à l'autel :
Quando dicimus : Pax vobiscum sive Dominus vobiscum.
:
ad populum sumus versi. excepto in uno quod est in prae-
paratione ymni (= salutation qui introduit le dialogue initial
de la préface) ante Te igitur. Ibi iam occupati circa altare ita
ut congruentius sit uno modo versos esse nos, quam retro
aspicere, ad insinuendam intentionem devotissimam quam
habemus in offerendo sacrificio, nec debet arator, dignum
opus exercens, vultum in sua terga referre44.

Quatre siècles plus tard, Guillaume Durand, évêque de


Mende (v. 1230-1296) résumera dans son Rationale la pra-
tique médiévale. Il distingue entre églises ayant chevet et
autel en est où le célébrant se retourne et les édifices sacrés
orientés chevet et autel en ouest où cette conversio n'est pas
nécessaire, le prêtre se tenant versus populum, c'est-à-dire
versus orientem (ici vers l'entrée). Comme exemple de ces
derniers édifices, Durand cite les églises de Rome, dont
les plus anciennes sont, en effet, orientées abside et autel
en ouest, entrée en est :
Porro licet Deus sit ubique tamen sacerdos in altari et in

43. Amalajre, Liber officialis ou De ecclesiasticis officiis, III, c. 9;


de prima oratione missae (éd. HANSSENS, Opera liturgica omnia, II,
Città del Vaticano, 1948, pp. 288-290 et P. L., CV, iii5-ui6) en s'ap-
puyant sur un texte de saint De serm. Domini in monte,
AUGUSTIN,
II, 5, 18 (P. L., XXXIV, 1277) : « Cum ad orationem stamus, in orien-
tcm convertimur. »
44. AMALAIRE, Liber officialis, III, (éd.
9 HANSSENS, op. cit., pp. 288-
290; P. L.,105,1115-1116.
divinis officiis debet ex institutione Vigilii papae versus orien-
tem orare. Unde in ecclesiis ostium ab occidente habentibus,
missam celebrans in salutatione ad populum se vertit, quia
quos salutamus facie ad faciem praesentamus. In ecclesiis
vero ostia ab oriente habentibus, ut Romae, nulla est in salu-
tatione necessaria conversio : sacerdos in illis celebrans sem-
per ad populum stat conversus45.

:
Que le déplacement du célébrant se soit opéré la première
fois en pays franc ne fait pas de doute il suffit de comparer
la recension interpolée de l'Ordo I, 53, au texte primitif où
il n'est pas question des mouvements rotatoires du liturge46.
Il apparaît dans nos pays dans un contexte architectural
défini (abside en est, façade en ouest), entre 750 et 787,
puisque l'Ordo 1 à son départ de Rome (avant 750) ne con-
tient pas encore cette interpolation et qu'en 787 le rédacteur
du Capitulare ecclesiastici ordinis (= Ordo XV) utilise déjà
le passage remanié de l'Ordo I, 5347. La même divergence
entre recension primitive et recension élargie se remarque
dans les autres passages de l'Ordo I, relatifs à l'orienta-
tion48.

45. GUILLAUME DURAND, Rationale divinorum officiorum, V, 2, 57;


éd.cit.,p.222.
46. Ordo I, 53 (texte romain primitif) : « Quam [Kyrie eleison]
dum finierint, incipit pontifex : Gloria in exclesis Deo, si tempus
fuerit et non sedit antequam dicant post oratione, primam : Amen
(éd. ANDRIEU, Les Ordines Romani, II, p. 84). — Se rapporter au texte
parallèle donné plus haut.
47. Sur la date, le lieu et la nature de la collection du Sangallensis,
349, dont fait partie l'Ordo XV (= Capitulare ecclesiastici ordinis), voir
ANDRIEU, Les Ordines Romani, III, pp. 3-21 et pp. 45-92. Voici le
: —
texte correspondant de l'Ordo XV, 17-18 : « Finitis Kyria eleison,
respiciens ad populum incipit Gloria in excelsis Deo. Et ipse cum
diaconobus ad orientem aspicit. Hoc finitum dicit : Pax vobis. Res-
pondentibus omnibus : Et cum spiritu tuo, dicit : Oremus. Tunc
vertit se ad orientem, dicit orationem » (ANDRIEU, Ordines, III, 99).
Il est évident que c'est la recension interpolée de l'Ordo I, 53,
qui est utilisée dans l'Ordo XV, 17-18.
48. Ainsi Ordo I, 123, à propos de l'oratio ad complehdum (post-
communion), le texte primitif signale simplement que le pontifex se
rend à l'autel. Les basiliques du Latran ou de Saint-Pierre au Vatican
où célèbre habituellement le pape étant orientées l'entrée en est et
le pontifex étant placé versus populum, il est automatiquement placé
versus orientem. Seuls les témoins de la tradition franque interpolée
:
(Sangallenses 140 et 614) ajoutent une précision à l'adresse des célé-
brants francs officiant dans des églises où l'abside est en est « direc*
La conversio versus orientem est signalée encore, au Glo-
ria in excelsis Deo et à la collecte, dans l'Ordo IV, 21 (v. 780-
800) 49, l'Ordo XV, 17-18 (V. 750-787)50, l'Ordo XVII, 28-
3o (v. 780-790)51,l'Ordo XXII, 4 (V. 795-800)52 et l'Ordo X,
22 (v. 900-950) 53; à l'oraison précédant la benedictio fontis
du samedi saint, par l'Ordo XXVIII, Appendix n. 11
(v. 800) 54. Tous ces textes n'apportent rien de nouveau sur
ce que l'Ordo 1 nous a appris65.
L'apparition des chandeliers sur l'autel et des retables
(XIe siècle), de même que le recul de l'autel vers le fond
de l'abside ou du chevet, rendit matériellement impossible
toute célébration versus populum56.

:
Rappelons cependant que la législation cultuelle d'aujour-
d'hui prévoit encore les deuxcas si l'abside et l'autel sont
tus ad orientem; nam in isto loco cum Dominus vobiscum dixerit,
non se dirigit ad populum (Ordo I, 123, recension franque; éd. AN-
DRIEU, Ordines, II, 107). Nous apprenons par le même texte que pour
la postcommunio le pontifex franc reste face à l'orient, donc à l'ab-
side, sans se retourner, en raison, semble-t-il, de la communion qui
vient d'avoir lieu.
49. Ordo IV, 21; éd. ANDRIEU, Les Ordines Romani, II, pp. 159-160.
50. Ordo XV, 17-18; ibid., III, p. QQ.
51. Ordo XVII, 28-30; ibid., III, p. i7q.
52. Ordo XXII, 4; ibid., III, p. 260.
53. Ordo X, 22; ibid., II, p. 355.
54. Ordo XXVIII, Appendix II; ibid., III, p. 413. Ajoutons que la
direction versus orientem est prévue lors de la communion du pontife
(Ordo IX, 40; ibid., II, p. 335), à l'appel diaconal : Humiliate capita
vestra Deo (Ordo XXII, 14; ibid., III, p. 261), à la consécration du
saint chrême (Ordo, XXIV, 17; ibid., III, p. 291; Ordo XXVII 30;
Ibid., III, p. 254; Ordo XXVIII, 20; ibid., III, p. 396; Ordo XXXI, 25;
ibid., III, p. 495).
55. Nous avons rapporté plus haut le texte d'Amalaire confirmant
les données des Ordines sur les mouvements rotatoires et la position
à l'autel du célébrant. Pour la période postérieure on peut citer encore
les Statuta synodalia de Cahors, de Rodez et de Tulle (France) (1289),
c. XVI (éd. MARTÈNE, Thesaurus Anedcdot., IV, 710 et MANSI, Concilia,
XXIV, 1001 B, et un passage de CHARLES BORROMÉE (t 1584), Della
fabrica della chiesa, I, 10 (cité dans NISSEN, Orientation, p. 413).
56. La première attestation sûre des retables sur les autels est du
11e siècle (l'Historia Walciodorenmonast., c. 43, signale que l'abbé
Erembertus Ct 1033) du monastère de Waulsort, d. de Liège, fit cons-
truire un retable;éd. M. G. H.,SS., XIV, 524);les premiers retables con-
servés sont du 12e siècle (Carrières-Saint-Denis, en Seine-et-Oise; chapelle
de Quirinus, Luxembourg; Saint-Castor à Coblence). Les chandeliers sur
les autels apparaissent dans les monuments figurés seulement à la fin
du Hé siècle. Sur ces documents voir J. BRAUN, Der christliche Altar,
II, pp. 277-540.
: cathedra episcopalis.

: mensa.

: célébrant.

ORIENTATION SCHÉMATIQUE DES ÉDIFICES SACRÉS

A) Position probablement primitive, abside en ouest, façade et ouver-


ture en est. Le célébrant à la mensa est tourné vers l'est, donc ipso
facto vers les fidèles.
B) Position abside en est, façade et ouverture en ouest; type qui do-
mine à partir de 450 environ. Le célébrant à la mensa, pour s'o-
rienter correctement, se tourne vers le fond de l'hémicycle absidal
»
et donc ipso facto « dos au peuple (ou, mieux, vers l'est avec le
peuple).
Remarque : L'on se souviendra qu'à l'époque paléochrétienne, c'est
la cathedra épiscopale qui occupe le fond de l'hémicycle absidal, la
mensa eucharistique se situant soit devant l'arc triomphal, soit à la
croisée du transept, soit même vers le milieu de la nef centrale
(laquelle est un lieu d'évolution cultuelle plus qu'un lieu de groupe-
ment des fidèles).
C) :
Solution médiévale -abside (ou chevet) en est, façade et ouverture
en ouest. L'autel, pour éviter les mouvements compliqués (qu'exige
la position B) est placé au fond du chevet, la cathedra ramenée sur
le côté. Le célébrant, pour ne pas être « désorienté » dans ce type
architectural, devra nécessairement célébrer vers le fond de l'abside.
en ouest le célébrant se
placera versus populum (c'est-à-dire
vers l'entrée, donc versus orientem) et ne se retournera pas
au moment des salutations; dans le cas contraire, il officiera
dos tourné aux assistants67.
Le sens de l'orientation cosmique ou solaire (est) se per-
dit en fait quand se multiplièrent les autels. Encore au 4e et
au 5esiècle les textes ne signalent que des autels dans des
chapelles indépendantes, en conformité avec l'antique prin-
cipe de l'unicité de l'altare. Dès le 6" siècle, la situation
actuelle s'ébauche; Grégoire le Grand signale, sans protes-
ter, que l'évêque de Saintes fit construire une église avec
treize autels58.
Le déplacement du célébrant devant l'autel, dos tourné

cule chrétien :
aux fidèles, entraîna très tôt un autre aménagement dans
le déplacement de la cathedra épiscopale,
dont il nous faut maintenant parler.
le

II. - « DEXTRA PARS ALTARIS » ET LE SIÈGE ÉPICCOPAL

A l'époque paléochrétienne, on le sait, la cathedra épis-


copale se situe normalement dans le fond de l'hémicycle
absidal, au centre des subsellia dupresbyterium59.

57. Rubricae generales, tit. XVII, 6; Ritus servandus in celebratione


missae, tit. V, 3 : « Si altare sit ad orientem, versus populum, cele-
:
brans versa facie ad populum non vertit humeros ad altare cum
dicturus est Dominus vobiscum, Orate fratres, Ite missa est, vel
daturus benedictionem. »
58. GRÉGOIRE Ier,Registrum, VI, 48. La situation n'est pas exception-
nelle; elle se retrouve à Saint-Gall comme l'atteste le plan du monas-
tère (dans D. A C. L., VI, 83). Les autels se multiplient avant l'appa-
rition des messes privées; ils servent à la conservation des reliques.
Voir, en plus de l'ouvrage classique de J. BRAUN, Der christlichAltar
in seiner geschichtlichen, Entwickung, 2 vol., Munchen, 1924,
TH. KLAUSER, Die konstantinischen Altär der Lateranbasilika, dans
Romische Quartalschrift, XLIII (1935), pp. 179-186), et du même,
Altar, dand Lexikon f. Theol. u. Kirche, I, 370.
59. Voir en particulier la Didascalie (fin 3e siècle), I, 57, 3-11, et le
passage correspondant des Constitutions apostoliques (v. 380) (éd.
FUNK, I, 158-166) et le commentaire de A. M. SCHNEIDER, Liturgie und
Kirchenbau in Syrien, dans Nachrichten d. Akad. der Wiss. in Göttin-
gen, Phil.-Hist. Kl., 1949, pp. 45-68). L'interprétation de G. KUNZE,
Lehre, Gottesdienst, Kirchenbau in ihren gegenseitigen Beziehungen,
Depuis la seconde moitié du 8e siècle il n'en va plus de
même partout, en pays franc. Un endroit non interpolé de
l'Ordo I, 51, qui appartient donc à la couche romaine pri-
mitive (entre 650 et 710, date de l'arrivée de l'Ordo 1 en pays
franc), prescrit au pontife de quitter l'autel après l'introït,
d'aller à son siège et de regarder vers l'orient (c'est-à-dire
versus populum et versus orientem dans, une église orientée
abside en ouest; versus orientem et vers l'hémicycle absidal
dans le cas contraire) :
Nam diaconi surgunt quando dicit (prior scolae) : Sicut erat
(après l'introït) ut salutant altaris latera, prius duo et duo
vicissim redeuntes ad pontificem. Et surgens pontifex osculat
evangelia et altare et accedit ad sedem et stat versus ad orien-
tem eo.

L'Ordo I, n. 51, n'indique pas autrement la place dela


sedes, mais le supplément romain de notre Ordo 1
:
fiunt.
(= Ordo II) donne toutes les précisions nécessaires
1. Si autem summum pontificem, ubi statio fuerit, conti-
gerit non adesse, haec sunt quae ab alio episcopo dissimiliter

2. Secundum namquequod non sedit in sede post altare.


3.Tertio non dicit orationem post altare (c'est-à-dire à la
cathedra au fond de l'abside) sed in dextro latere altaris61.

D'après ce texte, le siège papal était derrière l'autel au


fond de l'hémicycle absidal — ce que nous savons; mais en
cas d'absence du pape, l'évêque suppléant laissait la cathe-
dra du pape inoccupée et s'installait sur un siège dressé in
« dextrô latere altaris ».
Tel était donc le double usage à Rome encore au début
du 8e siècle, et, hormis le cas où il ne célébrait pas en per-

I, Göttingen, 1949, pp. 28-29, ne semble pas devoir être retenue.


Consulter également P. E. SCHRAMM, Herrschaftszeichen und Staats-
symbolik. Beiträge zu ihrer Geschichte vom 3. bis zum 16 Jhd., I,
Stuttgart, 1954, pp. 316-326; III, ibid., 1956, pp. 629-731.
60. OrdoI, 51; éd. ANDRIEU, Les Ordines Romani, II, p. 83 (tous
lesmss).
61.OrdoII,2-3 (v.750);ibid.,II, p.115.
sonne aux offices stationaux, le pape n'avait qu'un mouve-
ment très simple à accomplir pour se rendre de sa cathedra
absidale à l'autel où il se tenait versus populum
L'Ordo IV, qui ouvre la célèbre collection dite de Saint-
Amand-en-Pevèle (départ. du Nord, France) conservée dans
le Parisinus 974 (9e siècle) mais dont l'original doit se pla-
cer vers 780-800, suppose une situation différente :
18. Et dum dixerit scola versum ad repetendum surgit pon-
tifex ab oratione et osculat evangelium qui est super altara et
vadit de dextra parte altaris ad sedem suam et diaconi cum ipso
hinc et inde, stantes et aspicientes contra orientem63.

L'expression « vadit de dextra parte altaris ad sedem


suam » ne dit pas explicitement que le siège lui-même est
placé à droite de l'autel (par rapport au célébrant tourné
vers l'est, c'est-à-dire en pays franc, vers le fond du chevet).
On peut le supposer cependant, d'autant plus que le rédac-
teur franc de l'Ordo IV a négligé de faire état du supplé-
ment romain de l'Ordo 1 (= Ordo II), qu'il avait sous les
yeux, et quidistinguait entre siège absidal du pape et sedes
latérale réservée aux autres célébrants.
Les Ordines postérieurs sont plus explicites. L'Ordo V,
21 (de très peu postérieur à Amalaire (t 85o-853) utilise
comme une de ses sources l'Ordo I, 51; or, une interpola-
tion franque propre à l'Ordo V situe explicitement la sedes
épiscopale sur le côté droit :
Ordo I, 5i Ordo V, 21
Et surgens pontifex oscu- Tandem episcopus oscu-
lat evangelia et altare et latur evangelium et altare et

fia. A Rome, le jour de son ordinatio, le pape était intronisé dans la


cathedra de Saint-Pierre; aucun autre évêque ou prêtre remplaçant le
pape ne pouvait s'y asseoir. En Gaule il en fut de même. CL. DEVERT
(Explication simple et historique des cérémonies de l'Église, II, 1698,
p. 63, n. a), donne une liste des cathédrales qui, encore au qe siècle,
avaient une chaire absidale réservée à l'évêque, ou employée exclusi-
vement pour les cérémonies d'intronisation (Lyon, Vienne, par exem-
ple). Ailleurs il signale un siège, devant ou à droite de l'autel, face
au peuple (t. IV, 1713, posthume, p. 26).
63. Ordo IV, 18; éd. ANDRIEU, Les Ordines Romani, II, p. 159.
accedit ad sedem et stat ver- pergit ad dexteram altaris ad
sus ad orientem64. sedem suam et stat erectus
et versus ad orientem65.

L'Ordo X, 18 (v. 900-950), un élargissement franc de


l'Ordo V, 21, est encore plus précis :
Pontifex usque in medietatem altaris ducendus, ubi se altari
inclinans, evangelium osculetur et sic demum dextro cornu
altaris, ubi etiam sibi sedes parata est, osculum ferat66.

Au 14e siècle enfin, le Cérémonial du cardinal Jacques


Gaetani Stefaneschi (v. 1270-1343) (= Ordo XIV de MABIL-
LON) assignera au siège pontifical la place derrière l'autel
(c'est-à-dire au centre de l'hémicycle absidal) ou à droite
de l'autel, suivant la coutume locale :
53. Pontifex vadit ad sedem suam videlicet ad faldistorium
praeparatum in dextra parte altaris seu post ipsum altare se-
cundum qualitatem et consuetudinem loci67.

Le déplacement du siège vers la partie antérieure et droite


de l'autel dégageait le fond de l'abside où aucun ministre
ne circulait plus durant le culte. Un nouveau regroupement
s'opéra en conséquence. Diacres et sous-diacres se placent
de part etd'autre du siège latéral68, les sept acolytes logent

I,
64. Ordo 53: ibid., p. 83.
65. Ordo V, 21; ibid., II, 213. L'Ordo V, 21, est conforme aux Eglo-
gae de Ordines Romano; de statione episcopi (P. L., CCV, 1319 C) et
à AMALAIRE, Liber officialis, III, 5 (P. L., CV, 1113 A).
66.Ordo X, 18 (élargissement de l'Ordo V, 21); éd. ANDRIEU, Les
Ordines Romani, II, p. 355. L'on peut citer encore l'Ordo V, 91 (redit
ad sedem sans autre précision); ibid., II, p. 226; l'Ordo VI, 23 (accedit
ad sedem et stat versus orientem, après l'introït; ibid., II, p. 245.
L'Ordo XV, 16 (v. 750-787; rédigé en pays franc) mentionne la sedes
post altare; c'est un archaïsme ou un romanisme voulu; ibid., III,
p.98.
67. Ordo XIV de Mabillon, n. 53; éd. MABILLON, Museum Italicum,
II, Paris, 1689, p. 296 (P.L., LXXVIII, 1159 D). L'attribution tradi-
tionnelle de l'Ordo XIV de Mabillonau cardinal Gaetano Stefaneschi
(c. 1270-1343) doit être maintenue; cf. M. ANDRIEU, L'Ordinaire de la
chapelle papale et le cardinal Jacques Gaetani Stefaneschi, dans Ephe-
merides liturgicae, XLIX (1935), pp. 230-260.
68. Ordo IV, 18 : « [pontifex] vadit de dextra parte altaris ad sedem
suam et diaconi cum ipso hinc et inde, stantes et aspicientes contra
orientem » (éd. ANDRIEU, II, 159).
les chandeliers après l'évangile dans l'espace libre de l'hé-
micycle absidal pour dégager la place devant l'autel lors
des allées et venues accompagnant les oblations69. La schola,
à
logée jusque-là dans la nef centrale la hauteur à peu près
de l'arc triomphal ou au niveau des ambons, se déplace
sur le côté gauche du presbyterium, face au célébrant70.
Les diverses modifications introduites dans le culte en
pays franc s'enchaînent donc assez rigoureusement dépla-
cement de l'officiant sur le devant de l'autel face à l'hémi-
:
cycle absidal, localisation de la cathedra sur le côté latéral
droit, montée de la schola vers le côté gauche de l'hémi-
cycle absidal et réutilisation nouvelle du presbyterium. Tous
ces regroupements, nos documents en font foi, datent des
années 700-850 environ.
* Nos textes pour désigner la place de la sedes latérale in-

diquent la dextera, la dextera pars, le latus dextrum altaris.


Que faut-il entendre par là? Côté nord (Septemtrio, Aquilo),
c'est-à-dire côté actuel de l'évangile, ou côté sud (Meridies,
Auster), c'est-à-dire côté actuel de l'épître?
La pire confusion règne à ce sujet dans les textes du
moyen âge. Voici quelques jalons sûrs pour clarifier le pro-
blème.
Dans tous les anciens Ordines et dans les textes liturgi-
ques antérieurs au 15B siècle et plus exactement antérieurs
aux années 1485, le côté droit désigne le côté où se lit actuel-
lement l'épître, le côté gauche celui où le célébrant récite
l'évangile. En d'autres termes, la dextera pars est le côté
sud (Meridies, Auster), la sinistra pars le côté nord (Semp-
tentrio, Aquilo); les indications topographiques sont donc
à prendre par rapport à celui qui regarde vers le chevet et
l'autel, lesquels sont en est, en pays franc, dans la très
grande majorité des cas71. Jusque vers la fin du 156 siècle

69. Ordo IV, 34 et ponunt ea [cereostata] retro altare seu et reli


«
quacaereostata»(ibid 161).
:
II,
70. Ordo IV, 62 : « Et revertitur scola in presbiterio, in parte sinis-
tra, et annuit archidiaconus scolae ut dicatur : Agnus Dei (ibid.,
II,165).
»
71. Dans le même sens INNOCENT II,
III, De sacro altaris mysterio,
dans les textes liturgiques valent donc les équations sui-
vantes :
côté droit = sud = côté actuel de l'épître
côté gauche = nord = côté actuel de l'évangile.

Un changement radical dans la terminologie — qui sur-


vit encore aujourd'hui — intervient avec Burchard de Stras-
bourg (t 1506), le célèbre auteur du Diarium, maître des
Cérémonies sous Sixte IV, Innocent VIII et Alexandre VI.
En collaboration avec Agostino Patrizzi Piccolomini
(t 1496), évêque de Pienza et Montalcino, Burchard mit au
point, en prenant comme modèle le Pontifical tripartite de
Guillaume Durand, évêque de Mende (t 1296), l'édition
princeps du Pontificale Romanum, qui parut à Rome en
1485; ce Pontificale, à de minimes différences près, est
encore celui en vigueur aujourd'hui72. Le même Burchard
1

22 (P. L., CCXVII, 811-812) (à la collecte, et après l'introït) : « ad dex-


tram consistit altaris in hoc illud significans quod fuerat propheta-
tum : Deus ab Austro (= sud) veniet ». Le côté droit désigne égale-
ment l'actuel côté de l'épître chez GUILLAUME DURAND, Rationale, IV,
11 (éd. 1584, p. 107) : « episcopus vel sacerdos ad dextram altaris
partem se transfert; ibi una cum ministris plane officium et Kyrie
eleison, dicit; ibid., IV, 15, n. 3 (p. 113r) : « Sane sacerdos dum orat
(collecte) ad dextram consistit altaris. quia Dextra Iudaeos, Gentiles
sinistra figurat. dicturus Evangelium ad sinistrum convertitur »;
ibid., IV, 16, n. 2 (p. 117) : « legi debet epistola secundum Petrum
Autisiodoren, in dextra parte ecclesiae. melius tamen fit in medio
ecclesiae ». Signification identique dans l'Ordo XIV de Mabillon
(= Ordo de Stefaneschi et Ordo XV de Mabillon (= Cérémonial de
Pierre Amiel, év. de Sinigaglia, 1310-1378). P. LE BRUN, Explication
des prières et cérémonies de la messe, Liège, 1781, p. 159 n., a trouvé
la même situation dans un missel de Lyon de 1500, un missel de
Besançon de 589 et même dans un missel romain imprimé à Paris
en 1542.
72. L'édition princeps du Pontificale Romanum a paru à Rome en
1485. Elle est l'œuvre de Burchard de Strasbourg en collaboration
avec Agostino Patrizzi Piccolomini (~t 1496), évêque de Pienza et Mon-
talcino. C'est Burchard qui a fourni le véritable travail, l'évêque Pic-
colomini ne donnant que son haut patronage; la preuve en est qu'une
nouvelle édition du Pontificale parue à Rome en 1497 porte toujours
le nom de Buchard, accompagné d'un autre patron, Jacques de Luciis,
ep. Caidn; cf. sur ce point P. BATIFFOL, La tradition du Pontifical
romain. Les éditions imprimées, dans Bulletin d'ancienne litt. et
du Pontifical de 1485 que j'ai sous les yeux est ainsi libellé :
d'archéol. chrétienne, II (1912), pp. 134-140. L'explicit de l'exemplaire
« Expl(icit) pontificalis liber, magna diligentia Rev. in Chr(isto) patris
de Strasbourg élabora l'Ordo servandus per sacerdotem in
celebrationemissae (Rome, 1498) et, le Caeremoniale ou
Rituum ecclesiasticorum sive sacraruin caeremonarium
S.R.E. libri tres, dédié à Innocent VIII, publié, après la
mort de Burchard, à Venise en 1516 par Christophore Mar-
cello, archevêque de Corfou; les deux directoires sont en
usage encore actuellement73.
Or, dans les livres liturgiques revus par Burchard, le côté
droit désigne le côté acLuel de l'évangile donc le nord, le
côté gauche le côté actuel de l'épître donc le côté sud; cette
terminologie est donc exactement le contraire de la nomen-
clature Inédiévale74. Ainsi le Caeremoniale episcoporum,
I, c. 13, n.1-2, enjoint de placer la cathedra soit au fond de
l'abside soit sur le côté de l'évangile considéré comme le
côté droit; le siège du prêtre sera placé du côté de l'épître,
regardé comme le côté gauche. Les manuels techniques
d'architecture sacrée recommandent jusqu'aujourd'hui cette
disposition75.
Nous ne pouvons faire que des hypothèses sur les raisons
qui ont conduit Burchard à inverser la terminologie usuelle
D. Augustini Patricii de Picolominibus, ep. Pient. et Ilcinen. (= de
Pienzia et Montalcino) ac ven. viri D. Johannis Burckhardi, prepositi
et canonici eccl. s. Florentii Haselacensis, Argent, dioc. (= Saint-
Florent de Haslach, diocèse de Strasbourg, France), capelle S.S.D.N.
papae caercmoniarum magistri, correctus et emcndatus. n Rappelons
que la première édition oflicielle du Pontifical est celle de Clé-
ment VIII en 1595 (1596), substantiellement identique à l'édition
immimée de Burchard.
73. Il s'agit de l'Ordo servandus per sacerdotem in celebratione
missae sine cantu et sine ministris secundum ritum S.R.E., Rome,
1498, et du Cérémonial dédié à Innocent VIII, mais publié seulement
après la mort de A. P. Piccolomini ct 1496) par Ghristoloro Marcello,
archevêque de Corfou, sous le titre Rituum ecclesiasticorum sive
sacrarum caeremoniarum S.R.E. libris très, Venetiis, 1516 (éd. dédiée
à Léon X), œuvre de Burchard, rééd. avec commentaire par J. CATA-
LANI, Rome, 1750.
74. Ainsi l'expression stéréotypée qui revient fréquemment dans le
Pontifical de 1485 : ad sinistrum cornu altaris scilicet Enistolae.
75. Dans le Ritus servandus in celebratione missae, IV, 2 (en tête
des missels actuels) : accedit (sacerdos) ad cornu altaris sinistrum i.e.

:
Epistolae. — Le principe de la sedes épiscopale au fond de l'abside ou
côté évangile, la sedes sacerdotale du côté épître, est donnée comme
la règle dans un récent manuel de construction W. WEYRES-O. BART-
ning et autres, Kirchen. Handbuch f. d. Kirchenbau, München, 1959,
p.416.
jusqu'à son époque. Peut-être a-t-il raisonné en fonction du
célébrant orienté versus populum et versus orientem dans
- les plus anciennes églises romaines. Plus probablement il
aura pris comme point de départ la croix ou mieux le cru-
cifix de l'autel. L'on savait en effet, depuis saint Jean Da-
mascène ~(t v. 754) que le Christ sur la Croix a regardé vers
l'ouest76. L'erreur a été de transposer ce symbolisme à l'édi-
fice sacré, où il impliquait que la droite était le côté de
l'évangile, la gauche le côté de l'épître.
En ce qui concerne la droite et la gauche, le moyen âge
a connu des symbolismes contradictoires. Tantôt le côté
droit du Christ est le symbole de l'Église (ou Marie, le por-
teur de la lance, le bon larron, le soleil), le côté gauche le
symbole de la Synagogue (ou saint Jean, le larron endurci,

se superposera un autre :
le porteur de l'éponge et du fiel, la lune); à ce symbolisme
le Sauveur sur la croix est juge
et les élus sont à droite, les réprouvés à gauche. Tantôt la
droite symbolise le monde judaïque, la gauche l'Ecclesia ex
gentibus; Sicard de Crémone et Guillaume Durand ont sur
ce point des formules contradictoires77. Le même Durand
assimile l'édifice sacré avec son transept à un corps humain
suivant un plan qui figure déjà dans les Gesta abbatum
Trudonensium78.

76. JEAN DAMASCÈNE (F av. 754), De fide orthodoxa, IV, 12; De ima-
I,
ginibus, 23-2, 16.
77. SICARD, Mitrale, III, 2 (P. L., CCXIII, 102 A) : « Dextera Iudaeos,
Gentiles laeva figurat. » GUILLAUME DURAND, Rationale, IV, 23 (Juifs à
droite, païens à gauche), mais Rationale, I, 6 (Juifs à gauche, païens
à droite). Sur ce point voir J. SAUER, Symbolik des Kirchengebdudes
und seiner Ausstattang in der Auffassung des Mittelalters, Freiburg-
Br., 1902, pp. 87-07 (entre autres).
78. GUILLAUME DURAND, Rationale, I, I, 14 (éd. 1584, p. 6) : « Dispo-
sitio autem ecclesiae materialis, modum humani corporis tenet. Can-
cellus namque sive locus ubi altare est, caput repraesentat et crux ex
utraque parte, brachia et manus; reliqua pars ab occidente (nef) quic-
quid corpori superesse videtur. » On notera cependant que ce sym-
:
bolisme n'a pas conduit G. Durand à identifier l'Evangile avec la
droite cf. Rationale, IV, 11; IV, 15, 3. — Gesta abb. Trudonensium
(12e siècle) : « Nam habebat [ecclesia] cancellum qui et sanctuarium
pro capite et collo, chorum stallatum pro pectoralibus, crucem ad
utraque latera ipsius chori duabus manicis seualis protensam
(= transept) pro brachiis et manibus, navim vero monasterii pro
utero et crucem inferiorem eque duabus alis versus meridiem et
Il faut répéter cependant que tous ces développements,
bien ou mal venus, n'ont pas conduit les gens du moyen
âge à modifier la signification primitive de gauche et de
droite dans les livres liturgiques; l'inversion est le fait de
Burchard de Strasbourg.

III. — AD MERIDIEM. LE DIACRE A L'ÉVANGILE

L'Ordo V, bien qu'il n'apparaisse que dans la compila-


tion romano-germanique du 10e siècle, a été rédigé vers les
années 850-900; il reprend, en l'interpolant, l'Ordo Roma-
nus primas (= Ordo I). Dans la partie qui lui est propre,
le rédacteur de notre Ordo précise l'orientation que pren-
dra le diacre au moment où il lit l'évangile :
Ordo I, 62 Ordo V, 36
Diaconus in loco lectionis Ipse vero diaconus stat
ascendit ad legendum et illi versus ad meridiem ad quam
due subdiaconi redeunt stare partem viri solent conflue-
ante gradum discensionis rem, alias autem ad septen-
ambonis79. trionem80.

usages:
L'Ordo V, 36, vers la fin du p-6 siècle connaît donc deux
le diacre se tourne normalement vers le midi ou,
selon d'autres, vers le nord (« alias autem ad septentrio-
nem »). L'Ordo I, 62, dans sa couche romaine primitive, au
même endroit, ne connaît ni l'une ni l'autre de ces direc-
à
tions; le diacre pour lire l'évangile monte l'ambon; il se
tient donc tourné versus populum.

septemtrionem expansam, pro coxis et cruribus. quod cancellus


versus orientem respiciens, et dicitur alio nomine sanctuarium »
(M. G. H., SS., X, 214); cf. SCHLOSSER, Quellenbuch, Wien, 1896,
p. 242.
79. Ordo I,62; éd. ANDRIEU, Les Ordines Romani, II,p. 89.
00. urao V, 36; ibid., II, 216-217. Concordance de l'Ordo V, db,
avec les Eglogae (de peu antérieures) (P. L., CV, 1322 A) : « diaconus
vero stat versus ad meridiem ad quam partem viri soient confluere »,
et l'Expositio missae du ms. de Zurich 102 (J. M. HANSSENS, Le traité
sur la messe du ms, de Zurich, dans Ephemerides liturgicae, 1927,
pp. 153-185),
Le meridies ou côté sud est la partie occupée par les hom-
mes (sud par rapport à une église ayant le chevet en est,
donc l'actuel côté de l'épître), le côté nord est réservé aux
femmes 81.
Les Eglogae de Ordine Romano ainsi que l'Expositio
missae du manuscrit de Zurich, cod. 102, textes de peu
antérieurs à notre Ordo, ne connaissent encore au moment
del'évangile que l'orientation versus meridiem pour le
diacre82. C'est donc vers 850, et en pays franc, que la nou-
velle coutume de s'orienter versus septentrionem, a reçu
pour la première fois, droit de cité dans un document, litur-
gique, à côté de la direction traditionnelle versus meridiem.

81.
:
Primitivement la place des sexes dans les assemblées était fixée
comme suit de l'est vers l'ouest, d'abord les membres du presby-
terium, puis les hommes, ensuite les femmes derrière les hommes.
La répartition se faisait donc non de part et d'autre de l'axe longitu-
dinal de l'édifice basilical comme au moyen âge et maintenant, mais
d'est en ouest sur toute la largeur. Ainsi dans la Didascalie (c. 12 de
l'éd. de LAGARDE; II, 57, 2-11 de l'éd. de FUNCK), les Constitutions
Apostoliques, II, 57, 2-11 (éd. FUNCK) et le Testamentum Domini
(5E siècle), I, 19 (éd. E. H. RAHMANI, Testamentum Domini nostri Iesu
Christi, Mayence, 1899, p. 22). Voir sur ce point A. M. SCHNEIDER,
Liturgie und Kirchenbau in Syrien, dans Nachrichten d. Akad. d.
Wiss. in Göttingen, Phil. Hist. Kl., 19/19, pp. 48-55. Au moyen âge, la
:
répartition des.sexes se fait comme maintenant, de part et d'autre de
l'axe longitudinal de l'église les hommes côté sud (= côté de l'é-
pître), les femmes côté nord (= côté de l'évangile); ainsi dans
l'Ordo V, 36, cité plus haut; AMALAIRE, Liber oflicialis, III, 2, ro
(HANSENS, II, p. 264; P. L., CV, 1105) « Masculi stent in australi
parte (= sud) et feminae in boreali (= nord) ut ostendatur per
fortiorem sexum firmiores sanctos semper constitui in maioribus
temptationibus mundi huius et fragiliorem sexum infirmiores in
aptiore loco » (le symbolisme allégué par Amalaire d'après ACGUSTlN,
De civit. Dei, II, 28); HONORIUS D'AUTUN, Gemma animae, III, 36
(P. L., CLXXII, 661 A), et I, 145 (ibid., 589 B) : « In ecclesia masculi
in Australi parte stant quod fortiores in fide ardore Spiritus Sancti
fervidi. Feminae vero in boreali parte. quod fragiliores subesse
debeant quae aestum tentationum ferre nequeant atque nuptiali
medicamine aestum carnis temperare »;SICARD, Mitrale, VI, 8 (P. L.,
CCXIII, 279 C) : « Seorsum mares ad Austrum, seorsum feminae
ad Aquilonem exorcizantur, quia maiora magis intelligentibus et
minora minus capientibus et frigidis sunt propinanda » (à propos
des exorcismes précédant le baptême).
82. Eglogae de Ordine Romano (de peu antérieures à l'Ordo V)
(P.L., CV, 1822 A) : « diaconus vero stat ad meridiem ad quam
partem viri soient confluere »; texte parallèle dans l'Expositio missae
du ms. de Zurich, cod. 102 (éd. HANSSENS, Ephemerides Liturgicae,
r927, pp. 153-185).
Le nouvel usage, ne fut pas immédiatement accueilli
partout. Deux siècles après la confection de l'Ordo V,
Bernold de Constance ~(t 16. 9. 1100) dans son Micrologus
ne veut encore connaître que l'orientation versus meri-
diem, vers le côté des hommes; il qualifie la coutume de se
tourner versus Aquilonem (nord) d' « inhonesta, contra
Ordinem Romanum ».
Diaconus cum legit evangelium iuxta Ordinem Romanum
in ambone, vertitur ad meridiem ubi et masculi conveniunt,
non ad aquilonem ubi feminae consistunt. Hinc utique ilia
usurpatio emersisse videtur ut etiam diacones in ambone con-
tra Ordinem Romanum se vertant ad aquilonem potiusque se
ad partem feminarum quam masculorum vertere non verean-
tur. Quae usurpatio adeo inolevit ut apud plerosque quasi pro
ordine teneatur. Sed quia certissimum contra Ordinem est et
inhonesta, a diligentioribus Ordinis servatoribus merito refu-
tatur83.

L'indignation de Bernold est exagérée; la couche primi-


tive de l'Ordo I, 62, n'indique aucune direction spéciale au
diacre — nous l'avons dit. De plus l'Ordo V, en usage en
son temps, prévoit les deux usages et a près de deux siècles
d'ancienneté.
Honorius d'Autun (f v. ii3o) donne la direction ad aqui-
lonem (nord) comme la coutume en usage, mais connaît
encore la position ad Austrum (sud); nullement embarrassé,
il découvre à toutes les deux des symbolismes assez surpre-
nants84.
Un siècle plus tard, selon Sicard de Crémone (t 1215) la
direction ad Austrum (sud) n'est pas encore oubliée, bien
que ad Aquilonem (nord) soit la directionadoptée « pene in
83. BERNOLD DE CONSTANCE, Micrologus, c. 9 (P. L., CLI, 983 A). Sur
Bernold de Constance, auteur du Micrologus, voir G. MORIN, Que l'au-
teur du Micrologus estBernold de Constance, dans Revue Bénéd.,
1891, pp. 385-395, et V. L. KENNEDY, For a new edition of the Micro-
logus of Bernold of Constance, dans Mélanges Andrieu, cit.,
pp. 229-291.
- - 84. HONORIUS D'AUTUN, Gemma animae, I, 22(P. L., CLXXII, 551 C) :
a Diaconus secundum ordinem se vertit ad austrum dum legit Evan-
gelium.. nunc autem secundum morem solitum se ad aquilonem
vertit ubi feminae stant quia carnales significant, quia Evangelium
carnales ad spiritualia vocat. »
omnibus ecclesiis »; ici encore les interprétations symboli-
ques ne manquent pas85.
La raison pour laquelle le diacre a passé de la direction

:
ad meridiem à la direction ad septemtrionem s'explique
d'une manière fort simple il a suivi l'exemple du célébrant
qui récitait depuis toujours l'évangile au côté nord de l'au-
tel, afin que la partie sud restât libre pour les oblations. Les
liturgistes du moyen âge ont déjà signalé ce parallélisme86.
*
* *
Telle est la contribution que fournissent les Ordines à la
solution du problème complexe de l'orientation durant la
liturgie. Étant donné la valeur exceptionnelle de ces docu-
ments, cet apport nous paraît digne d'intérêt pour l'histo-
rien du culte chrétien au moyen âge autant que pour l'ar-
chéologue.
Le déplacement du célébrant à l'autel, entraînant en
chaîne les autres regroupements dans le culte, est apparu,
vers le 8e siècle, en pays franc, où les exigences de l'orien-
tation vers l'est paraissent avoir été plus vivantes qu'à Rome
vers la même époque. Le contexte architectural est lui aussi
plus uniforme que dans la cité papale; au nord des Alpes,
depuis Walafrid Strabon certainement, les édifices sacrés
sont normalement orientés chevet et autel en est, entrée en
ouest. Cette constante monumentale aura engagé les compi-
lateurs francs des Ordines Romani à fixer plus rigoureuse-
ment qu'ailleurs l'orientation dans le déroulement des
cérémonies sacrées.
CYRILLE VOGEL.

L.,CGXIII, 108 A-B) « Diaconus quod


85. SICARD, Mitrale, III, 4 (P. :
se ad Austrum (sud) evangelium lecturus vertit. Quidam vero, ut
pene in omnibus ecclesiis vetus obtinet consuetudo, se ad Aquilonem
(nord) convertunt ubi feminae sunt. » De même GUILLAUME DURAND,
Rationale. IV..
86. SICARD,
-
-
Mitrale, III, 4 (P. L., CCXIII, 108 G) : « Si autem Evan-
gelium fuerit ad altare legendum, in sinistra parte legatur. » HONO-
RIUS D'AUTUN, Gemma animae, I, 97 (P. L., CLXXII, 576 A) (l'évan-
gile à l'autel est lu côté gauche) : « ut expeditior sit (altare) ad susci-
piendum secrificium ». De même GUILLAUME DURAND, Rationale, IV,
23 et 24.
RECHERCHES SUR L'EMPLACEMENT
DES TRONES ÉPISCOPAUX
DANS LES CATHÉDRALES DU MOYEN AGE1

0 N sait que, dans les anciennes basiliques, les membres du


clergé qui assistaient aux offices s'asseyaient sur un banc
de pierre adossé au mur de l'abside et au milieu du-
quel était- la chaire, cathedra, réservée à l'évêque. Mais il ne
subsiste de cette disposition liturgique primitive que de très
rares exemples, dont les plus connus sont ceux de Lyon, de
Vienne et de Vaison2.
A Lyon, le nouvel aménagement du chœur de la cathédrale,
en 1935, fit disparaître le plancher factice qui l'encombrait et
découvrit le trône épiscopal surélevé au fond de l'abside, au-
dessus et au milieu du banc des clercs3. On a pu alors rétablir
le chœur dans l'état où il se trouvait au moment de sa cons-
truction par l'archevêque Guichard entre 1165 et 1180 et per-
mettre ainsi de faire revivre les cérémonies de l'antique litur-
gie lyonnaise, qui s'était conservéejusqu'à la Révolution fran-
çaise4.

1. Nous sommes heureux d'exprimer notre reconnaissance à M. le


chanoine Martimort qui, après nous avoir indiqué l'intérêt de cette
étude, nous a encouragé à l'entreprendre, en nous aidant de ses conseils.
2. R. DE LASTEYRIE, L'architecture religieuse en France à l'époque
romane, 2° édit., pp. 694-695.
3. En réalité, le trône lui-même n'existait plus, mais il a pu être
reconstitué d'après des fragments retrouvés en 1856. Ces éléments per-
mettent de penser que le trône et le banc des chanoines étaient con-
temporains du début des travaux de construction du chœur. Marcel
AUBERT, Le nouvel aménagement du chœur de la cathédrale de Lyon,
Les Monuments Historiques de la France, 1 (1-2), 1956, pp. 3-11.
4. Voir la description donnée par le sieur DE MOLÉON, Voyages litur-
giques de France ou recherches faites en diverses villes du royaume con-
tenant plusieurs particularités touchant les rites et les usages des églises,
par M. Marcel Aubert, à la page 6 de son article
dant la messe pontificale.
:
Paris, 1757, pp. 44-45, qui correspond à la gravure du 18e siècle publiée
Vue du chœur pen-
Au pourtour de l'abside de la cathédrale Saint-Maurice de
Vienne, « dont le plan, le parti général, les détails du décor
s'inspirent de la primatiale de Lyon, règne le banc de marbre
destiné aux clercs, interrompu en son milieu par le trône épis-
copal, taillé dans un bloc monolithe de marbre blanc, dont
5
le dossier s'arrondit à sa partie haute ». Ici aussi, cette dis-
position fut utilisée sans interruption pour les besoins litur-
giques, depuis la construction du chœur dans la première moi-
tié du 13e siècle, jusqu'au 18e siècle, comme l'apprend le sieur
de Moléon : « Aux grandes fêtes que l'archevêque célèbre la
messe. l'archevêque monte comme à Lyon dans la chaire qui
est tout au fond et au milieu de la coquille ou abside. » Le
fait était possible parce qu'il n'y avait « rien sur le grand autel
qu'un petit retable haut d'un pied' ou d'un pied et demi
Toujours à Vienne, on conservait au 18e siècle une autre
6.».

cathedra en place dans l'abside de la vieille église Saint-


Pierre. A la suite de ce siège se développait le banc des prê-
tres, comme à Saint-Maurice7.
Tout récemment, on a rétabli la disposition primitive de
l'abside de la cathédrale de Vaison-la-Romaine. Les fouilles
avaient permis de mettre au jour sur son pourtour les trois
gradins du banc presbytéral et de retrouver l'emplacement du
siège de l'évêque dans l'axe de l'édifice. Il a donc été aisé de
rétablir ce dernier à l'endroit où il se trouvait à l'origines. Il
est vrai que cette cathédrale pose un difficile problème de
chronologie. Le chanoine Sautel a proposé de voir dans le
chevet actuel une construction du 6e-7e siècle, mais M. Jean
Hubert, en s'appuyant notamment sur la modénature des tail-
loirs, a montré qu'il ne pouvait s'agir que d'une œuvre ro-
mane9. De très curieuses substructions grossièrement appareil-

5. Marcel AUBERT, op. cit., p. 5.


6.Op.cit..d. 5 et11.
-7. «Derrière y
le grand autel il a aussi bien que dans l'église cathé-

-
p. 39.
:
drale de Saint-Maurice, au milieu de la muraille au fond de l'abside
une chaire de pierre belle comme du marbre blanc, élevée sur trois
degrés, avec ce passage tiré du Pastoral de saint Grégoire Desinat
locum docendi suscipere, qui nescit docere. Sieur DE MOLÉON, op. cit.,

et
8. Jean SONNIER, Dégagement présentation du chevet de l'ancienne
cathédrale de Vaison-la-Romaine, Les Monuments Historiques de la
France, 1958 (I), pp. 18-25.
9. Jean HUBERT, L'architecture religieuse du haut Moyen Age en
France, Paris, 1952, pp. 50-51.
lées d'une église antérieure, que M. Jean Hubert date du
10e siècle, présentaient au fond de l'abside un petit hémicycle
apparemment destiné aussi au siège épiscopal 10.
Les exemples précédents, auxquels on pourrait joindre celui
de Notre-Dame-des-Doms d'Avignon, qui conserve un trône
épiscopal célèbre, du milieu du 12e siècle, montrent l'existence
d'une tradition constante, maintenue au moins jusqu'au début
du 13e siècle, en ce qui concerne l'emplacement liturgique des
chaires épiscopales dans les cathédrales de la vallée du Rhône.
Lorsqu'on reconstruisit ces édifices à l'époque romane ou au
début de l'époque gothique, on continua à installer le trône de
l'évêque au fond de l'abside, au centre du banc des chanoines.
Les exemples auxquels nous allons maintenant faire appel
montrent que cette pratique fut même conservée plus long-
temps dans les pays catalans, puisqu'elle y était encore géné-
ralement de règle dans la première moitié du 14e siècle.
Évoquons d'abord le cas de l'abside de la cathédrale de
Palma de Majorque, reconstruite à partir de 1314 et qui reçut
un nouveau mobilier liturgique dans le second quart du 14e siè-
cle11. Le trône épiscopal lui-même, sculpté en marbre blanc,
fut installé au fond du cap nou, dans une sorte de niche ornée
d'un magnifique arc trilobé à redents, que surmonte un gâble
hérissé de crochets. Cette œuvre fut commandée par l'évêque
Bérenger Batlle avant la consécration du maître-autel qui eut
lieu le 1er octobre 1346.
Le trône épiscopal s'accompagnait de stalles en bois, que
confectionnèrent en deux fois les menuisiers Pierre Johan et
Bérenger Ostales de Majorque et que décora le sculpteur perpi-
gnanais Antoine Camprodon entre 1329 et 1333 et de 1337 à
1339.
Peu de temps auparavant, à partir de 1298, on avait égale-
ment entrepris de reconstruire l'abside de la cathédrale de
Barcelone et on avait renouvelé son mobilier liturgique,
notamment avec l'exécution, au début du 14e siècle, d'un trône

10. Chanoine J. SAUTEL, Études et documents sur Vaison-la-Romaine,


VII et XII : Les origines de la cathédrale de Notre-Dame-de-Nazareth à
Vaison-la-Romaine, Lyon, 1950-1951.
11. Marcel DURLIAT, La construction de la cathédrale de Palma de Ma-
jorque au 140 siècle, dans Mouseion, Studien aus Kunst und Geschichte
fur Otto H. Förster, Cologne, 1960, pp. 115-123, repris dans L'art dans le
royaume de Majorque, Toulouse, 1962, pp. 156-157.
épiscopal gothique en marbre blanc, que l'on voit toujours au
fond de l'édifice, comme à Palma de Majorque12.
A Gérone, où le chevet de la cathédrale avait été refait entre
1312 et 1347 13, on s'était par contre borné à installer au fond
de l'abside l'ancienne chaire épiscopale romane, qui date vrai-
semblablement des environs de 103814. Nous trouvons à ce fait
une raison péremptoire. Depuis le moment où, dans la
troisième décade du 14e siècle, on avait décidé d'enrichir l'au-
tel d'un baldaquin et d'un retable d'argent15, l'évêque ne
pouvait plus prendre place au fond de l'abside où il aurait été
dissimulé par ce somptueux décor d'orfèvrerie. L'installation
de la chaire épiscopale à cet endroit, à laquelle on procéda
néanmoins, ne pouvait plus avoir qu'une signification symboli-
que.
La construction de grand s retables de menuiserie dans les
cathédrales de Barcelone et de Palma de Majorque, dans le
courant du 14e siècle, devait de la même manière provoquer
l'abandon des trônes épiscopaux de marbre dans ces deux
cathédrales. Pour Barcelone, cet événement se produisit entre
1358 et 137716, et c'est aussi peu après cette date qu'on com-
mença à édifier le chœur des chanoines dans la nef de la cathé-
drale17. Les deux phénomènes paraissent liés l'un à l'autre. A
Palma de Majorque, le déplacement de ce chœur eut lieu
avant 1386, car à cette date les chanoines étaient installés sous
le toit de l'ancienne mosquée encore debout. Le retable du
maître-autel, aujourd'hui plaqué au-dessus du portail du
Mirador, paraît aussi dater de la seconde moitié du 14e siècle.
L'abandon des trônes épiscopaux placés au fond des absides
dut se produire au cours du moyen âge dans nombre de cathé-

12. Juan AINAUD, José GUDIOI. et F.-P. VEHRIE, La ciudad de Barce-


lona. Catâlogo Monumental de Espana. Madrid, 1947. fie. 190.
13. Pierre LAVEDAN, L'architecture gothique religieuse en Catalogne,
Paris, 1935, pp. 142-144 et 147-148.
14. Lamberto FONT, Gerona. La Catedral y el Museo diocesano, Gé.
rone, 1952, p. 21, fig. 18 et 19, et André GRABAR, Trônes d'évêques en
Espagne du Moyen Age, Studien für Hans Kauffmann, Berlin, 1956,
p. 3 du tirage à part.
- 15. Lamberto FONT,
op. cit., p. 20, fig. 4.13, et Ada MARSHALL JOHN-
SON, Hispanie Silverwork, New York, 1944, pp. 8.9.
16. Agusti DURAN 1 SANPERE, Per a la historia de l'art Il Barcelona,
Barcelone, 1960, pp. 27-35.
17. Juan AINAUD, José GUDIOL et F.-P. VERRIE, op. cit., p. 60, et Joan
AINAUD DE LASARTE, El Toisô d'Or
a Barcelona. Barcelone, 1949.
drales françaises. Au 18esiècle, ces chaires devenues sans
emploi, sont encore signalées dans plusieurs d'entre elles,
notamment à Reims, Metz, Arras, Verdun, Chartres, Autun,
Toul, etc. En dehors de Lyon et de Vienne, « elles sont parfai-
tement oisives, si ce n'est qu'en quelques-unes, l'évêque
observe toujours de s'y mettre pour la forme, le jour qu'il
prend possession de son église. La plupart de -ces chaires sont
même aujourd'hui déplacées », constate le bon informateur
qu'est Claude de Vert. « Celle de Reims est encore en son lieu,
à la vérité, mais quand l'archevêque de Reims voudrait s'y
mettre et reprendre sur cela l'ancien usage, le tombeau du
cardinal de Lorraine, joint à l'autel de la Croix qu'un mauvais
goût a laissé construire tout attenant cette chaire, rendrait le
dessein absolument impraticable, à moins que de transporter
le tombeau et l'autel ailleurs18. » -
Au 18e siècle, par conséquent, les archevêques de Lyon et de
Vienne continuaient seuls à occuper un trône au fond de
l'abside, derrièrel'autel, dans le vaste espace limité par les
bancs des clercs et les stalles des chanoines. Partout ailleurs les
évêques avaient quitté ce siège de pierre ou de marbre pour
venir s'asseoir à côté de l'autel. Cependant les remarques faites
précédemment tendent à établir que dans certaines cathédra-
les, et notamment dans le sud de la France et en Catalogne,
l'abandon de l'antique coutume s'était produit à une date
relativement récente, à l'époque gothique, lorsque les grands
retables sculptés et peints avaient fait leur apparition derrière
le maître-autel.

MARCEL DURLIAT.

18. Claude DE VERT,Explication simple, littérale et historique des


cérémonies de l'Église, Paris, 1706-1713, pp. 25-26 et 58.
L'ÉGLISE, CE N'EST PAS LES MURS
MAIS LES FIDÈLES

Duekklèsia,
moment où l'on avait donné le nom d' église
lieux où fidèles s'assemblaient pour
les
« »,
aux
le culte1, il était normal qu'on rappelât souvent que le
même mot ekklèsia désignait, par priorité, l'assemblée des

:
fidèles elle-même. S'il est une idée familière aux Pères, c'est
bien celle-ci l'Église consiste dans les hommes, elle-est

se trouve exprimée en termes de temple :


faite des fidèles, des âmes saintes2. Fréquemment, cette idée
le vrai temple de
Dieu, c'est l'âme fidèle, ou mieux, la communauté et l'unité

lettre même du Nouveau Testament


pierres vivantes de cet édifice spirituel3.
:
des fidèles. Ou encore, et en conformité, également, avec la
les fidèles sont les

I. L'article de F. J. DÖLGER (Ant. u. Christ., 6 (1941), pp. 161-195)


n'apporte rien sur le mot ecclesia. Voir H. LECLERCQ, art. Église, dans
Dict. Arch. chr. Lit., t. IV, col. 2221. On trouve ekkl. (eccl.) pour
désigner le local, déjà chez Clément d'Alexandrie (Strom. VII, 5 : cité
injra, n. 5) et chez Lactance (cf. Vigil. christ., 1948, p. 169).
3. Uutre les textes dHippolyte, de saint Ambroise et de saint Jé-
rôme cités plus loin, voir par exemple ORIGÈNE, De princ., II, 8, 5
(P. G., II, 25 : « Quia multitudo credentium corpus illius dicitur »);
In Isaiam, hom. 2, n. I (éd. BAEHRENS, p. go : « Nos sumus Ecclesia
Dei »); In Cant., I et 3 (BAEHRENS, pp. 90 et 232, 1. 21-22); saint
CYPRIEN, Epist. 33, I : « Eccl. in episcopo et clero et in omnibus stan-
tibus. constituta »; saint AUGUSTIN, Serm. Guelferbyt., I, 8 (Miscell.
Agost., I, p. 447: « Sancta Eccl. nos sumus. »), etc.
3. Cf. J. C. PLUMPE, Vivum saxum, vivi lapides. The concept of
»
« living stone in Classical and Christian Antiquity, dans Traditio, 1
(1943), pp. 1-14 : Pour le thème du temple spirituel chez les Pères,
faute de monographie complète, voir P. TERNANT, dans Proche-Orient
chrét., 2 (1952), pp. 319-332; D. SANCHIS, Le symbolisme communau-
taire- du Temple chez saint Augustin, dans Rev. Ascét. Myst., 37
(1961), pp. 3-30, et J. GAILLARD, art. Domus Dei, dans Dict. de Spiri-
tualité, t. IV, col. 1551-1567.
Au début du 3e
n'est pas un lieu qu'on appelle église, ni une maison faite
:
siècle, saint Hippolyte de Rome écrit « Ce

d'e pierres et' de terre; on ne peut non plus appeler l'homme


»
pris en lui-même « église : car une maison est sujette à la
destruction, et l'homme à la mort. Qu'est donc l'Église?

tice4. )) Clément d'Alexandrie fait écho :


Elle est la sainte assemblée de ceux quivivent dans la jus-
« Ce
n'est pas le
lieu, c'est l'assemblée des élus que j'appelle église5. »
Nous nous rapprochons davantage, littérairement parlant,
de la forme classique du topos avec Lactance, qui écrit
entre 305 et 310 : « Et domus quam aedificavit (Salomon)
non est fidem consccuta, sicut Ecclesia, quae est verum tem-
plum Dei, quod non ex parietibus est, sed in corde ac fide
hominum, qui credunt in eum, ac vocantur fideles6. »
Saint Hilaire de Poitiers rédige son livre contre Auxentius,
évêque arien de Milan, en 364. Il adresse un solennel aver-
tissement à ceux qui n'oseraient pas affronter les épreuves
de l'exil pour garder la fidélité à la vraie foi : « Gardez-vous
de l'antéchrist. C'est grand tort d'être attaché aux murs,
c'est grand tort de mettre votre vénération pour l'Église
dans les toits et les édifices7. » Le successeur d'Auxence sur
le siège de Milan, Ambroise, saurait, lui, que l'Église est
avant tout spirituelle, et que ses murs sont faits des fidèles8.
Ce n'est pas exactement notre topos, puisque Ambroise
n'oppose pas les fidèles aux murs, qu'il les identifie plutôt;
mais, sous une autre forme, la pensée est la même. Saint
Jean Chrysostome, par contre, devait proclamer fièrement,

4. In Daniel., I, 17, 6-7 (GCS, Hippol-Werke, I, I, p. 28, l. 20-24).


5. Strom., VII, c. 5 (P. G., 9, 437C; STÄHLIN, III, p. 21). 1
6. Inst., IV, 13, 26 (P. L., 6, 486-487).
7. C. Auxent., 12 (P. L., 10, 616) :« Cavete antichristum : male
enim vos parietum amor cepit,male Ecclesiam Dei in tectis aedifi-
ciisque veneramini. »
8. Saint AMBROISE, Apologia David, 16, 83 (P. L., 14, 922) : « Muri
itaque Jerusalem fidei propugnacula, disputationum munimenta, vir-
tutum culmina sunt; muri Jerusalem ecclesiarum conventus sunt toto
orbe fundati, Ecclesia enim dicit : Ego murus et ubera mea turris
(Cant., 8, 18). Et bene muri Jerusalem ecclesiarum conventicula sunt;
quoniam quisquis bona fide atque opere ingreditur Ecclesiam fit
supernae illius civis et incola civitatis quae descendit de coelo. Hos
muros lapidum aedificat structura vivorum. »
:
au moment de partir en exil « L'Église n'est pas constituée
par son enceinte de murs; elle consiste dans le nombre de

:
ses membres9. » Chrysostome mettait en pratique l'adjura-
tion de saint Hilaire il plaçait la liberté de sa parole et la
fidélité de sa foi au-dessus de tout attachement à des murs :

:
pour elles, il acceptait l'exil dans un pays désert.
Saint Jérôme aimait notre topos «Ecclesia non in parieti-
bus consistit, scd in dogmatum veritate. Ecclesia ibi est ubi
fides vera est10.»; « Parictes non faciunt christianos11. »
Saint Augustin nous rapporte, de son côté, le cas de Victo-
rinus qui, converti par la lecture des Écritures, se considérait
comme chrétien de ce fait, bien qu'il n'ait pas reçu le bap-
tême. Comme Simplicianus lui disait qu'il ne le considérait
pas comme tel tant qu'il ne le verrait pas parmi les fidèles
dans l'église, Victorinus avait répondu ironiquement
« Ergo parietes faciunt christianos ?», ce sont donc les murs
:
?
qui font les chrétiens12 Augustin lui-même devait appli-
quer un principe analogue à la ville même de Rome et à ce
qu'elle représentait, quand elle tomba sous l'assaut des

:
Barbares : « Civitas in civibus est, non in parietibus », écri-
vait-il13; et il redisait « Forte Roma non perit si Romani

9.
n'est pas pour les murs que le diacre proclame : :
P. G., 52, 429. Jean disait aussi des choses comme ceci « Ce
Prions pour les
catéchumènes. » (In 2 Cor., hom. 2 : P. G., 61, 404). On trouvera
d'autres textes dans VANDENBERGHE, Saint Jean Chrysostome, Paris,
Cerf. 1961, pp. 159-160 et 172.
10. InPs.133 (P.L., 26, 1223 A).
II. Tract. in Psalm. 123 (éd. G. MORIN, Anal. Maredsol., III, 2,
p. 292). Jérôme exprime aussi le thème « vera Ecclesia, verum tem-
plum » : Tract. in Ps. 86 (éd. cité, p. 104) : « Vera Ecclesia, verum
templum Christi non est nisi anima humana »; Epist. 58, 7 (P. L.,
22, 584) : « Verum Christi templum anima credentis est. Quae
utilitas est parietes fulgere gemmis et Christum in paupere fame
?
periclitari »
12. Confess., VIII, 2, 4 : P. L., 32, 750.
13. Sermo de Urbis excidio, 6 : P. L., 40, 721. La formule devait
être classique, car nous la retrouvons chez saint ISIDORE, Etym.,
XV, c. 2, n. i : a Civitas est hominum multitudo societatis vinculo
adunata, dicta a civibus, id est ab ipsis incolis urbis. Nam urbs
ipsà moenia sunt, civitas autem non saxa, sed habitatoresvocantur »
(P. L.; 82, 536 BC). Cependant, nous n'avons rien trouvé de ce genre
chez les auteurs classiques : ni Forcellini, ni Otto (Sprichworter u.
sprichwdrtlichen Redensarten der Römer, Leipzig, i8go) n'indiquent
quoi que ce soit qui approche, ou même intéresse, notre topos.
nonpereant. Roma enim quid est, nisi Romani? Non enim
de lapidibus et lignis agitur, de excelsis insulis et amplis-
simis mœnibus14. »

:
On cite parfois un texte de saint Cyrilled'Alexandrie,
mais nous n'avons pu en vérifier l'exactitude « Cum dici-
Inus Ecclesiam, non circuitu murorum vim hujus dictionis
accommodamus, sed piorum potius in ea sanctissimam
multitudinem significamus15. » Nous terminerons, comme
il se doit, la série des témoignages- patristiques par Grégoire
le Grand. Il se plaignait du fait que tous ceux qui remplis-
sent les murs (parietes) de l'église à l'occasion d'une grande
fête n'appartiennent cependant pas au troupeau des élus de
Dieu16.
Saint Grégoire se tient, avec son contemporain saint Isi-
dore, à la soudure du monde antique et du haut moyen âge.
Celui-ci a connu, évidemment, l'espèce de tension entre
l'église-édifice matériel et l'Église-assemblée des fidèles
ainsi Raban Maur Ct 856) 17, tandis que, vers la fin du
:
9e siècle, un poème anti-romain, les Versus Romae, jouait

en tout cas après 9/io) qui écrivait :


sur les mots mores et muri18. C'est Atton de Verceil (f 961?,
« Haec itaque domus
non ex parietibus manufactis, sed ex vivis et electis lapidi-
bus, id est sanctorum cœtibus elegantissime constat19. »

:
C'est le concile d'Arras de 1025, dont le texte est tellement
significatif et instructif, qui reprenait le thème l'Église, ce
sont les fidèles plus que les murs20.
Dès lors, les emplois de notre topos vont être conditionnés
par un certain sens juridique du mot ecclesia. L'origine de

15. Cité
:
14.Sermo 81,9 P.L.,38, 505.
par J. LAUNOI, Opera, t. V, 2, p. 671, avec pour référence
Orat. IV sup. Isaiam.
16. Hom. in Evang., 19, 5 : P. L., 76, 1157.
17. En. in Epist. Pauli, lib. XXIII, in epist. 1 ad Tim., c. 3 (P. L.,
112,607B) : « Id vero cognoscendum, quoniam domum Dei Eccle-
siam, non domum orationis dicit, secundum plurimorum opinio-
nem, sed fidelium congregationem. »
18. « Moribus et muris,Romavetusta, cadis » : cité par E. H. KAN-
TOROWICZ, The Kinq's two Bodies, Princeton, IQ5'7. p. 82, n. qq.
19. Libell. depressuris Ecclesiae, 1 (P. L., 134, 53C).
20. Can. à MANSI, XiX, 437 G.
ce sens doit être cherchée dans les dispositions prises pour
que des moyens normaux d'entretien soient assurés aux
clercs. Il existait, à cet égard, une législation portée par
Justinien, qui interdisait d'ordonner des clercs sans que
leur vie soitassurée21. Ces dispositions accentuaient le lien
entre ordination et moyen de subsistance, entre un clerc et
un titulus ou une ecclesia, au sens où cesmots désignaient,
dès lors, non plus seulement une communauté donnée
d'hommes — c'était leur premier sens —, mais certains
moyens de subsistance, un ensemble de biens et de droits. La
fréquence de ce sens du mot ecclesia a été favorisée, en
Occident, par le système des « églises privées »,
que l'in-
fluence germanique n'a pas créé, mais développé. A partir
du 9e et surtout du 10e siècle, ecclesia désigne fréquemment
l'édifice du culte et ses appartenances en droits (dîmes, etc.)
et biens temporels22. Dans la collation d'un bénéfice par son
propriétaire, il y avait « investiture »
avec la formule
« Accipeecclesiam23. » Notons que, dans le même climat
:
des institutions et du vocabulaire féodal, parietes, un des
termes de notre topos, désignait parfois l'hommage féodal
ou les revenus d'un fief24 détail à retenir pour apprécier
:

toutes les connotations de certains textes. D'un côté, l'Église


était ainsi livrée, pour toute sa vie matérielle, aux seigneurs
laïcs : la réforme entreprise par saint Léon IX et saint Gré-
goire VII visera (et elle réussira largement) à la faire sortir
de cette situation. D'un autre côté, l'Église était ainsi puis-

temporel :
sammment dotée, privilégiée, engagée dans le poids du
toute une série de mouvements spirituels, à partir

21. Sur ce point, et pour ce qui suit, cf. V. FUCHS, Der Ordina-
tionstitel von seiner Entstehung bis auf Innocenz III. (Kan. St. u.
Texte,4), Bonn, 1930,pp. 138-195.
22. P. HINSCHIUS, Zur Gesch. der incorporation
- u. des
- Patro-
- -
natsrechts, dans Festgaben Heffter, Berlin, 1873, pp. I s.; P. THOMAS,
Le droit de propriété des laïcs sur les églises et le patronage laïque
au moyen âge, Paris, 1906, pp. 17 s., 76 s.; V. FUCHS, op. et loc. cit.
23. Voir A. HAUCK,Kirchengeschichte Deutschlands, t. III, pp. 52-
69; P. IMBART DE LÀ TOUR, Les élections épiscopales dans l'Église de
France du 9B au 11e siècle, Paris, 1891, pp. 74 s.
24. Parietes = Pariae. Cf. Du CANGE, S. V., avec citation d'une charte
de 845.
de la fin du 11e siècle, s'appliquèrent à critiquer cet état de
choses et à rompre avec lui, en y dénonçant quelque chose-
d'anti-évangélique.
C'est cette situation, c'est cet usage du mot ecclesia, qui
commandent les deux grands groupes de textes que nous
allons rencontrer et qui, eux-mêmes, répondent à deux
grands moments d'utilisation de notre topos :
I) dans le
chapitre des mouvements ou des sectes anti-ecclésiastiques
du 12e siècle; 2) chez les canonistes ou en dépendance d'eux.

I) Mouvements spirituels ou sectes anti-ecclésiastiques du


12* siècle.

Ils tendent à restituer à son ordre spirituel une Église


alourdie par le temporel. C'était déjà la visée, moins désin-
téressée, de l'auteur inconnu des traités contenus dans le
manuscrit de Cambridge, Corpus Christi College, n° 415,
parfois désigné comme « l'Anonyme d'York »
ou « l'Ano-
nyme Normand ». Il veut établir une souveraineté totale du
pouvoir royal, même sur l'Église terrestre. Il aime opposer
le vrai temple, fait des hommes vivants, à l'Église maté-
rielle25, le ciel incorporeL et le ciel corporel26 Du côté des
mouvements spirituels, c'est surtout celui de Pierre de Bruys
(les Pétrobusiens) qui a critiqué une Église trop alourdie
par le terrestre et le temporel, au nom du principe « quod
nomen ecclesiae non structuram parietum, sed congregatio-
nem fidelium signaret27 ». Moyennant quoi on détruisait
les églises. Pierre le Vénérable, qui nous a transmis ce
propos, accepte la définition spirituelle de l'Église « Dici-
turEcclesia, ut ipsi dixistis, congregatio. Ecclesia, hoc est
:
in Christum credentium congregatio28 », « cum Ecclèsia Dei
non constet multitudine sibi coherentium lapidum, sed uni-

25. Par exemple Tract. II : Libelli de Lite, t. III, D.653.


26. Cf. Tract. XIXX, dans H. BÖHMER,Kirche und Staat in England
und in der Normandie im 11. u. 12. Jahr., Leipizig, 1899, p. 479.
27. PIERRE LE VENÉIRABLE, Contra Petrobusianos : P. L., 189, 738 A.
28.Ibid.,col.738BetD.
tate congregatorum fidelium29. » On retrouve le même
thème, à la fin du 12e siècle, sous la plume d'Alain de Lille
écrivant contre lesVaudois et les Cathares, unis, sur ce point
tout au moins, dans une critique de l'Église existante et des

:
formes extérieures du culte30, ou encore, en 1242, sous la
plume de Moneta de Crémone « Ecclesia dicitur dupliciter.
Vel congregatio fideliumconstans ad minus ex episcopo,
presbytero, diacono et subdiacono, vel domus materia-
lis21. »
Une réponse, non plus apologétique ou critique, mais

:
toute positive, a été donnée aux mouvements spirituels, dans
l'Église, par les hommes vraiment spirituels saint Bernard,
qui savait combien les murs de l'Église sont toujours à
rebâtir par lacohésion de
la charité et par des hommes qui
doivent sans cesse triompher de l'esprit charnel32; Hugues
de Saint-Victor et d'autres, qui prêchaient le thème tradi-
tionnel du vrai temple dontles pierres et les murs sont faits
des fidèles unis par la charité83. La réponse « catholique »,
finalement, devait être donnée par François d'Assise. La
vision qu'on prête à Innocent III est peut-être une légende
celle d'hommes (François, Dominique) soutenant les murs
:
29. Op. cit., col. 762.
30. De fide catholica contra haereticos, lib. I, c. 69 : « Non desunt
qui dicunt locum materialem non esse Ecclesiam, sed conventum
fidelium tantum. »" (P. L., 210, 571); il répond àcela, c. 70; c. 71,
col. 573 : « Quod locus materialis dicatur domus Dei ad quam conve-
niunt fideles ut orent, variis probatur auctoritatibus. Sciendum
ergo quod tam locus materialis quam conventus fidelium dicitur
Ecclesia Dei. »
31. Summa adv. Catharos et Valdenses, lib. V, c. 8, § 3 : éd. Ri-
OHINI, Rome, 1743, p. 456. Moneta répond aux critiques des Cathares
n'admettant pas qu'il existe des temples matériels (§ 1, p. 454) ni
qu'on les appelle « églises » (S III. p. 455).
32. Cf. Infesto S. Michaelis sermo 2, n. 2 (P. L.. 183. 452).
33. HUGUES DE SAINT-VICTOR, Sermo 3. In dedic. eccles.(P.L,., 177,
905) : « Jerusalem civitas sancta et civitas Sancti, Ecclesia est. Habet
haec civitas sancta, id est Ecclesia, lapides suos, murum suum,
turres suas, aedificia sua, portas suas. Habet lapides, scilicet fideles,
:
qui sicut per caementum lapis jungitur lapidi, sic par charitatem
junguntur sibi. » Ce genre de texte est fréquent alors cf. J. SAUER,
Symbolik des Kirchengebâudes, 2e éd., Freiburg, 1924, p. 104;
Fr. HEER, Die Tragödie des hl. Reiches, Vienne et Zurich, 1952, p. 193,
avec les notés correspondantes.
lézardés et branlants de sa cathédrale du Latran. Mais la
légende traduit assez bien la réalité. C'est un fait, en tout
cas, que François d'Assise, qui poussa au plus haut degré le
dégagement à l'égard des conditions matérielles et des biens
temporels, eut la plus souveraine vénération pour le Saint-
Sacrement, pour les prêtres et pour les églises de pierre ne
commença-t-il pas par relever Saint-Damien et par réparer
:
ou nettoyer bien d'autres petites églises de la campagne des
environs d'Assise34?
Le thème des sectes du 12e siècle a été repris, au 1 7e, par
Georges Fox, pour lequel l'église matérielle, qu'il affectait

:
d'appeler « la maison à clocher », était le symbole de toute
une conception du christianisme qu'il écartait car il le

ministre anglican :
voulait tout intérieur et spirituel. Aussi demandait-il à un
« Qu'appelles-tu une église? Le bâti-
ment ou cette multitude35? » Il posait ainsi, évidemment,
un dilemme qui n'en est pas un.

2) Sous le signe du Droit canonique.

:
Les canonistes opérèrent, à leur manière, une union des
deux idées ils le firent en répon dant à la question de savoir
à qui appartiennent les biens d'Église. La seconde moitié du
12e siècle et le début du 138 baignent dans le climat des idées
corporatives analysées en particulier par M. Br Tierney
(Foundations of the Conciliar Theory. The Contribution of
the Medieval Canonists from Gratian to the Great Schism.
Cambridge, 1955). On s'appliquait à définir la situation res-

:
pective d'un prélat et de la communauté dont il était le chef,
à l'égard de la propriété des biens. Le vraipropriétaire était
« illa bona competunt ecclesiae catholico-
la communauté

34. Dans son Testament, François a bien noté : « Et Dieu me


donna une foi si grande dans les églises. » Cf. J. JOERGENSEN, Saint
François d'Assise, pp. 52 s.; Kaj. ESSER, Die religiösen Bewegungen
des Hochmittelalters und Franziskus v. Assisi, dans Glaube und
Geschichte. Festg. J. Lortz, Baden Baden, 1958, t. II, pp. 287-315.
35. Journal deGeorges Fox, trad. BOVET,Paris, 1955, p.13.
rum, non enim parietibus, sed congregationi fidelium »,
prononçait Huguccio, qui fut, à Bologne, le maître d'Inno-
cent III36. Cette position juridique n'était point partagée par
tous les Décrétistes87, mais par un bon nombre, et des plus
importants, des Décrétistes ou des Décrétalistes38. Comme il
arrive souvent chez les canonistes médiévaux, l'option sur
ce point particulier, qu'on eût pu considérer comme secon-
daire, était grosse d'une option sur les questions les plus
générales et les plus importantes. Il s'agissait ici finalement
de la notion même d'ecclesia et de la place que tient, dans
cette notion, la communauté des fidèles comme telle.
Les positions prises par les canonistes se retrouvent chez
de nombreux théologiens de la fin du 13c et du début du
146 siècle, dans des termes qui intéressent notre recherche.
Nous mettrons un terme à celle-ci en citant quelques textes
significatifs de ces théologiens.
C'est Humbert de Romans (f 1279) qui note, à l'usage,
précisément, des canonistes, que l'Église, c'est les âmes, non
les champs ou les vignobles, c'est-à-dire les possessions des
églises39. C'est Godefroid de Fontaines, qui classe et résume
les acceptions du mot ecclesia « Per Ecclesiam possumus
:

intelligere primo domummaterialem, scilicet templum lapi-


deum vel ligneum in quo principaliter Deus extrinsecus
colitur corporaliter. Secundo, domum spiritualem, scilicet
fideles in quibus Deus colitur spiritualiter per virtutes theo-
logicas, scilicet per fidem, spem et caritatem, qui corpora-
liter solunt Deum in ecclesia praedicta materiali. Item bona
exteriora temporalia, scilicet redditus et possessiones et

36. Dans P. Gillet, La personnalité juridique en Droit canonique,


Malines, 1927, p. 101; B. TIERNEY, op. cit., p. 118.
37. Ainsi par la Glossa ordinaria, la Glossa Palatina : TIERNEY,
op. cit., p. 118. De même les légistes accentuaient la situation pré-
pondérante des clercs par rapport à la communauté. Cf. V. GIERKE,
Das deutsche Genossenschaftrecht, t. III, p. 360, surtout n. 22.
38. Cf. B. TIERNEY, op. cit., pp. 118-119. Ajouter p. 140 (Inno-
cent IV); plus tard, Jean de Paris (dans GIERKE, op. cit., p. 255,
n.33).
39. Sermon type Ad studentes in jure canonico, dans son De eru-
ditione Praedicat., in Max. Bibl. Vet. Patrum, t. XXV, Lyon, 1677,
p.490.
hujusmodi, quibus ministri Ecclesiae corporaliter susten-
tantur0. » Mise au point parfaite, mais qui n'était pas neuve.
On trouve des distinctions analogues chez Guillaume Durand
le Spéculateur41, et une protestation semblable à celle

:
d'Humbert de Romans chez Agostino Trionfo d'Ancône, qui
allait jusqu'à dire Si l'on entend par « église les murs,
villes et biens temporels, on ne peut pas dire que le Christ
»
soit mort pour l'Église42 on sent là une réaction contre un
:

point de vue tout extérieur, qui pouvait bien être celui des
canonistes. Même réaction, vers 1312, chez Jean du Mont-

le Franciscain Alvara Pelayo, qui écrit :


Saint-Éloi43. Enfin, une vingtaine d'années plus tard, chez
« Item
Ecclesia
quae est corpus Christi mysticum, et quae collectio catholi-
corum. non est ambitus murorum44 », ou encore « Non
est Ecclesia parietum vel murorum, sed collectio catholico-
:
rum45. »

Y. M.-J. CONGAR.

40. Quodl. X, q. 18, en 1293.


41. Rationale divin. offic., lib. I, n. I (éd. Venise, 1609) : il dis-
tingue, dès le début de son œuvre, l'Ecclesia corporalis, les murs, et
l'Eccl.spiritualis, la « fidelium collectio ».
42. Voir M. GRABMANN, Die Erörterung der Frage, ob die Kirche
besser durch einen guten Juristen oder durch einen Theologen.
regiert wurde, bei Gottfried v. Fontaines (t nach 1306) u. Augustinus
Triumphus von Ancona (t 1328), dans Festschrift f. E. Eichmann,
Paderborn. 1040. ira. 1-19.
43. Dans sonQuodl. II, q. 8, cité d'après Vat. lat., 1086, par
J. LECLERCQ, L'idéal du théologien au Moyen Age. Textes inédits,
dans Rev. des Sc. relig., 1947, pp. 121-148; cf. p. 127 : « Dicendum
quod multi decipiuntur per equivocationem ecclesiae, nam quidam
bona ecclesiastica reputant ecclesiam, sed in veritate ecclesia pro qua
Christus mortuus est sunt fideles quos prelatus major debet scire
regere. »
44. Collyrium adv. haereses, dans R. SCHOLZ, Unbekannte kirchen-
politische Streitschriften. L II, Romp. 1914. n Rnfi
,,-- -
45. De Statu -et Planctu --} --------,I, -'il-" .1:" \.J'_V".
Ecclesiae, art. 31 : cité par N. IUNG,
Un Franciscain théologien du pouvoir pontifical au 14e siècle,
Alvaro Pelayo, Paris, 1931, p. 150, n. 2.
L'aménagement de la cathédrale de Cuernevaca
(Mexique) -

D URANT la session tenue à Versailles les 30 août-1er septem-


bre 1960 où le C.P.L. s'efforçait de dégager le programme
liturgique qui doit guider la construction ou l'aménage-
ment du lieu de culte, un auditeur illustre et imprévu, S. Exc.

:
Mgr Sergio Mendes Arceo, évêque de Cuernevaca, se présenta à
la suite d'une conférence « Je crois pouvoir vous montrer, inté-
gralement réalisée dans ma cathédrale, l'application des prin-
cipes ici exposés. » Une séance de projection permit à tous les
sessionnistes d'apprécier la restauration intérieure de la cathé-
drale de Cuernevaca, inspirée et dirigée par son évêque.
Une telle entreprise souleva dans le nouveau monde quelque
émotion. La presse .en parla, ce qui donna l'occasion à l'évêque
de Cuernevaca de justifier son œuvre (Interview dans Impacto,
n° 561, du 23 novembre 1960; article dans le périodique Excelsior)
du 18 décembre 1960). Nous utilisons ces documents.
Il s'agissait d'aménager une église conventuelle franciscaine
du 16* siècle en une cathédrale adaptée aux exigences actuelles
de la célébration liturgique. L'architecture extérieure et inté-
rieure, témoin de la première période de l'art espagnol du
Mexique, est noble. Mais les siècles postérieurs (surtout le 19e siè-
cle) avaient encombré la nef unique d'innombrables œuvres
d'inégale valeur. Entouré des conseils de techniciens et d'artistes,
l'évêque n'hésita pas à ôter les retables du 19e siècle, autels se-
condaires, tableaux, statues et peintures, pour restituer à la nef
son unité. « Je pense, observe-t-il, que l'église est le lieu de
l'assemblée des fidèles, toujours vivant et actif, et non un mu-
sée. » Ainsi réapparut un vaisseau d'une austère mais réelle
grandeur.
:
Puis vient l'aménagement de l'espace pour le culte « On a fait
une réalisation liturgique fonctionnelle, qui, bien qu'elle paraisse
typiquement moderne, suit la tradition des plus anciens tem-
ples chrétiens. » Au fond du sanctuaire, se trouve le siège de
l'évêque, surmonté de ses armes. Au milieu, un autel de pierre,
simple parallélépipède, avec, au centre, la grille du tombeau des

:
reliques. Du côté du célébrant, face au peuple, est inscrit en
espagnol « Je suis mort, et maintenant je vis »; côté fidèles
« Je suis le premier et
le dernier. » Un ciborium, où pendent
:
quelques lampes à huile, surmonte l'autel. Son plafond est décoré
de deux mains et de diverses inscriptions (Sanctus, Doxologie de
l'apocalypse, etc.). En avant, de chaque côté et se faisant face
(car la lecture s'adresse non seulement au peuple, mais à toute
l'assemblée, dontl'évêque et les ministres font partie) deux am-
bons de pièrre, portant respectivement les noms des évangélistes
et des apôtres. Plus en avant encore, et plus à l'extérieur, on

hommes parleront de Dieu


:
voit à gauche un petit chancel de pierre, derrière lequel se tient le
commentateur et où est écrit « Poussés par l'Esprit-Saint, les
», puis, à droite, un support majes-
tueux avec le cierge pascal. A la jointure du sanctuaire et de la
nef pend une grande croix nue. Il n'y a point de chaire, car
l'évêque est censé adresser lui-même, en toute occasion, la parole
à son peuple, depuis son siège.
La nef ne comporte d'autre ornement que les croix de pierre
de la consécration, symbole des douze Apôtres, avec un chande-
lier. La chapelle du Saint-Sacrement et le baptistère sont dis-
tincts de la nef centrale. Les abords de la cathédrale sont des-
tinés au culte des saints, à l'aide d'une décoration qui se renou-
velle suivant les fêtes. A l'inévitable objection de « synagogue »
et de « temple protestant », l'évêque répond que « nous sommes
fils d'Abraham» et que « l'église est le lieu de la Parole de
Dieu ». Le culte catholique n'a pas moins, mais plus. Il ajoute :
« Certainement, le mouvement liturgique actuel et les églises
modernes cherchent la simplicité et sont christocentriques. Le

Et il aime à citer cette approbation du pape :


Christ est notre unique médiateur et notre modèle suprême. »
« Une telle réali-
sation appelle la participation du peuple fidèle. »

JOSEPH GELINEAU.
LA CÉLÉBRATION DE LA DÉDICACE*

La dédicace d'une église ne requiert pas seulement l'inter-


vention d'un évêque et d'un clergé assez nombreux sous la
direction d'un cérémoniaire expérimenté. Elle demande aussi
-
la participation active et éclairée de la communauté chrétienne
pour le service de laquelle cette église a été bâtie. C'est dire
qu'une telle célébration doit être préparée avec le plus grand
soin.

1. La préparation pastorale.

L'Ordo de la dédicace ordonne au recteur de l'église de veil-


ler à ce que les fidèles cc ne soient pas seulement avertis à
temps de la consécration solennelle, mais encore soient ins-
truits d'un façon pratique des rites et de leur signification. Ce
qu'il faut, en fin de compte, c'est que ces fidèles soient impré-
gnés d'une juste dévotion envers leur église » (n° 8). L'Ordo
a d'abord en vue une catéchèse des rites, mais pour que la
catéchèse soit efficace elle doit viser à obtenir une démarche
spirituelle. Dans une oraison du rituel byzantin de la dédicace
l'évêque dit au Seigneur que son peuple lui consacre « ce
temple vénérable en symbole de la très sainte Église et aussi
de notre tabernacle intérieur1 ». La découverte par la com-
munauté chrétienne de la signification de l'église qu'elle a
édifiée et des mystères qui s'y célébreront, doit l'amener à
prendre conscience du fait qu'elle est elle-même le temple
vivant du Seigneur, l'église des appelés, en même temps que
chacun de ses membres ravivera le souvenir de sa propre dédi-
cace baptismale.
Extrait d'une brochure en préparation aux Éditions Desclée et Cie
*
dont ontrouvera la présentation plus loin, p. 124.
1. J. GOAR : EùxoÀÓywv sive Rituale Graecorum, Paris, 1747, p. 841.
La dédicace de l'édifice matériel doit ainsi coïncider avec
un effort collectif et personnel de renouveau spirituel. Elle
sera le signe global de la dédicace au Seigneur de l'église vi-
vante, de la communauté des croyants. En même temps chacun
entendra l'appel à la dédicace de l'âme (rftc; tpuxfts "Cà ~èvxcu-
via),selon l'admirable expression de la liturgie byzantine :
Homme, rentre en toi-même : deviens l'homme nouveau, au lieu
d'être l'ancien et célèbre la dédicace de l'âme. Voici le jour opportun :
renouvelle ta vie et toutes les voies de ta conduite. Les choses antiques
ont passé, voici que tout est devenu nouveau. De la présente fête retire
ce fruit, d'opérer en toi un heureux changement. C'est ainsi que
:
l'homme se renouvelle c'est ainsi que se célèbre le jour inaugural de
la Dédicace2.

Dans cette perspective la préparation de la dédicace doit se


développer sur tous les plans de l'action pastorale. Elle a une
portée missionnaire, puisque l'expérience révèle que toute
implantation d'un nouveau lieu de culte dans un quartier qui
en était jusque-là dépourvu est une source d'évangélisation.
Elle influe sur l'engagement des fidèles dans les domaines
les plus divers de leurs activités, car la consécration du peuple
des baptisés d'un territoire doit purifier l'action de chacun et
lui donner un surcroît de rayonnement dans la charité. H
n'est donc aucun secteur de la vie paroissiale qui puisse se
désintéresser de la célébration de la dédicace. Ce sera en
outre une occasion unique de faire découvrir aux chrétiens le
lien de dépendance qui rattache la paroisse au diocèse
comme l'impulsion apostolique procède de l'évêque, la béné-
:
diction divine passe par son sacerdoce. L'évêque qui gou-
verne est aussi celui qui consacre.

2. La catéchèse préparatoire.

Si la préparation de la dédicace embrasse l'ensemble de


l'action pastorale, il est bien évident qu'elle trouvera sa source
dans la catéchèse liturgique prescrite par l'Ordo. Cette caté-
chèse prendra les formes les plus variées. Elle pourra com-
porter une séried'homélies dominicales sur l'église et ses
2. S. SALAVILLE :Cérémonial de la consécrationd'uneéglise selon le
rite byzantin. Tipografia poliglotta vaticana, 1931, p. 19.
diverses parties avec les mystères qui s'y rattachent ou, d'une
manière plus directe, sur les rites de la consécration. Dans le
premier cas on présentera par exemple le baptistère de la
nouvelle naissance, la nef de l'assemblée, les bénitiers et les
confessionnaux de la pénitence, l'ambon de la parole de Dieu,
l'autel du sacrifice et du repas du Seigneur, le tabernacle de la
réserve eucharistique. Dans le second cas on présentera suc-
cessivement les rites de lustration, de prise de possession, de
déposition des reliques, - de consécration de l'église et de l'au-
tel, et enfin la liturgie eucharistique. On s'arrêtera moins aux
détails qu'au contenu sacré; on soulignera constamment le
lien que manifeste le symbolisme des rites entre l'église maté-
rielle et l'Église épouse du Christ, mère des chrétiens.
Mais l'enseignement donné dans les homélies ne passera
dans la vie que s'il est assimilé par la communauté dans la
prière. D'où l'importance de célébrations de la Parole sur
les thèmes qu'aura développés la prédication. Pour ces célé-
brations on utilisera en particulier les psaumes qui doivent
être chantés lors de la dédicace. On sait que dans le dérou-
lement de la liturgie chaque action de l'évêque est accom-
pagnée d'un psaume, qui en révèle le sens. C'est en partie
grâce au chant des psaumes que, dans la dédicace, les rites
de la nouvelle Alliance manifestent leur continuité avec les
merveilles divines qui ont jalonné l'histoire du peuple de
Dieu.
On accordera enfin toute son importance à la formation par
l'action. L'idéal n'est pas de faire appel aux élèves d'un sémi-
naire ou à un groupe de grands clercs pour assurer l'ensem-
ple des chants et remplir les fonctions de servants. C'est la
communauté locale qui doit, dans la mesure du possible, assu-
rer les divers ministères autour de l'évêque et des ministres
sacrés. La schola se familiariseraavec la psalmodie, on pro-
fitera des réunions préparatoires pour apprendre aux fidèles
les principales antiennes; hommes et jeunes gens se répar-
tiront les divers services autour de l'évêque et se prépareront
à les remplir sous la direction d'un prêtre.
3. La vigile de la dédicace.
La vigile de la dédicace est un grand jour pour la paroisse.
Comme toute vigile, elle commence dans la pénitence et elle
s'achève dans l'inauguratoin de la fête.
Le caractère pénitentielle de la vigile consiste dans le jeûne

l'évêque :
qui est conseillé à toute la communauté chrétienne ainsi qu'à
« Le jour qui précède la dédicace, il convient de
jeûner, aussi bien pour le Pontife consécrateur que pour le
clergé et les fidèles relevant de cette église », déclare l'Ordo
(n° 4). Bien qu'il ne s'agisse que d'une invitation et non
d'une prescription, on ne saurait la prendre à la légère. Le
jeûne sera l'expression tangible de l'effort spirituel accompli.

en aumône :
Il pourra peut-être, comme celui du carême, se concrétiser
ce dont la communauté paroissiale se sera privé
en jeûnant la veille de la dédicace permettra d'associer les
pauvres, les vieillards et les malades à la joie de la fête. N'ou-
blions pas que la liesse populaire de nos kermesses est née de
la fête de la dédicace, de la « messe de l'église » (flamand
kerkmisse), si l'on s'en rapporte à l'étymologie. Que la joie
des déshérités soit payée de quelques privations volontaires de
leurs frères, tout chrétien est capable de le comprendre.
La soirée comporte normalement deux célébrations litur-
giques : la réception solennelle des reliques des saints martyrs,
puis la veillée près d'elles.
« Sur le soir du jour qui précède la dédicace, il convient
d'amener les reliques par une procession solennelle dans les
rues avoisinant l'église, dans la manière et la forme qui est
décrite au Rituel romain » (Ordo, n° 4). Le Rituel prévoit que
les rues par lesquelles passera la procession soient autant que
possible décorées et que tout le peuple accompagne les reli-
ques avec des cierges allumés, en chantant les Litanies des
Saints ou quelques chants appropriés (tit. X, ch. 14). « Puis,
continue l'Ordo, les reliques sont placées dans un lieu hono-
rable, disposé hors de l'église à consacrer, décoré à cette fin
de tentures, de fleurs et de lumières, et c'est devant ces reli-
ques qu'on célébrera les Vigiles (n° 4). Il est évident que la
processi on est fonction, dans son déploiement, des conditions
locales. Dans un pays dont les structures sociales sont demeu-
rées chrétiennes, elle pourra connaître l'ampleur de celles
des Rameaux ou de la fête du Saint-Sacrement. Ailleurs elle
aura des proportions beaucoup plus modestes ou même on
devra l'omettre.
Par contre, on pourra célébrer partout avec splendeur la
veillée sainte près des reliques des martyrs. L'Ordo prévoie
« qu'on célébrera les Vigiles, si on le peut commodément, et
qu'on chantera et récitera Matines, avec trois Nocturnes, en
l'honneur des saints martyrs dont les reliques vont être en-
sevelies. On invitera aussi les fidèles à participer à ces vigi-
les » (n° 5). En réalité le si commode fieri potestconcerne da-
vantage dans la pratique le mode de participation des fidèles
à la veillée que le fait de cette veillée. Il est hautement sou-
haitable que la veillée près des reliques rassemble le plus
grand nombre possible de fidèles et qu'elle constitue en quel-
que sorte le couronnement de la préparation communautaire.
Souvent le souci de faire participer activement le peuple à la
célébration amènera à organiser une veillée en langue vivante
de préférence à la psalmodie latine de l'office nocturne des
martyrs. Cette veillée pourra s'inspirer de la liturgie des mar-
tyrs, en utilisant les chants populaires qui sont donnés en
appendice du présent volume. Les Actes des martyrs ou la
Vie des saints y seront largement utilisés. Voici un schéma
possible.

SCHÉMA DE VEILLÉE DES RELIQUES

Chant d'entrée :
Première partie des Litaniesdes Saints (jusqu'à In die iudi-
cii). On nomme à leur rang, en doublant l'invocation, les
saints dont on honore les reliques.
Première lecture :
Soit un passage des Actes des martyrs ou de la Vie des saints,
soit le sermon de saint Césaire d'Arles, que le Bréviaire donne

de plusieurs martyrs :
sous le nom de saint Augustin au second nocturne du Commun
Chaque fois, frères très chers, que nous
célébrons les fêtes des saints martyrs.
Chant psalmique : Psaume 125, Quand le Seigneur ramena
nos captifs.
:
Deuxième lecture Rom., 8, 12-19 et 28-39, au premier noc-
turne du Commun de plusieurs martyrs.
Chantpsalmique : Psaume 23, Au Seigneur la terre et sa
plénitude.
Évangile : Matth., 5, 1-12 (Évangile de Toussaint).
Homélie.
:
Vénération des reliques au chant du cantique Dieu, nous
te louons.
Prière litanique : Seconde partie des Litanies des Saints
(peccatores)
:
Prière sacerdotale Fac nos Domine (Ordo, n° 28).
Benedicamus Domino, Deo gratias.

4. La liturgie de la dédicace.

Si tout le travail de préparation pastorale que nous avons


suggéré a été fait, la célébration de la liturgie elle-même ne
demandera pas un effort particulier. Elle est régie par les
mêmes lois fondamentales de la pastorale liturgique que la
célébration de la messe. La messe en constitue d'ailleurs le
sommet. C'est dans la messe, et spécialement dans la commu-
nion eucharistique que la communauté et chacun de ses mem-
bres réaliseront leur propre dédicace. Le commentateur devra
avoir toujours présent à l'esprit ce terme de la montée com-

:
mune. Comme la veillée pascale, la dédicace est une liturgie
ascensionnelle elle part du plus exceptionnel qui peut sem-
bler le plus pittoresque (aspersions multiples, inscription des
alphabets) pour atteindre le plus quotidien (la messe), et
c'est précisément le plus quotidien qui est le plus sacré, le
rite qui sollicite l'engagement le plus profond de l'assemblée.
La tâche du commentateur est lourde. Nous avons essayé
de l'alléger en insérant dans le texte même de l'Ordo, une
série complète de monitions. Elles ne sont évidemment pro-
posées qu'à titre de suggestions. Il est souhaitable qu'elles ne
soient pas toutes données par la même personne. On pourrait
confier les invitatoires d'oraisons au diacre, tandis que le com-
mentateur se contenterait d'expliquer le déroulement des rites
et d'introduire les chants.
Au sujet du commentateur nous n'hésitons pas à préciser
qu'il ne doit pas apparaître, comme une sorte d'intrus parmi
les acteurs de la célébration. Si l'on accepte sa présence, on
doit accepter qu'il remplisse sa fonction, telle que la définit
l'Instruction De Musica sacra (n° 96). Souvent il semble avoir
à se faire pardonner de prendre la parole pour placer ses
monitions.

5. La fête de la dédicace.

Le lendemain de la dédicace d'une église on en célèbre la


fête sous le rite de lre classe (Ordo, n° 5). C'est tout ce qui
reste de l'antique liturgie de l'octave de la Dédicace, qui
était déjà célébrée à Jérusalem au 4° siècle. Du moins la fête
ne doit-elle pas passer inaperçue. La paroisse sera invitée à
se rassembler une dernière fois pour une messe du soir, qui
fera monter vers le Seigneur l'action de grâces de son peuple.
Évidemment les douze cierges seront allumés le long des mu-
railles de l'église. Peut-être, en sortant à la fin de la messe, les
fidèles pourront-ils monter à l'autel pour en baiser la table,

:
tandis que tous chanteront le Hallel : Rendons grâce au Sei-
gneur, car il est bon éternel est son amour (Ps. 117).
Chaque année, au jour anniversaire de la dédicace, l'Église
commémore l'événement par une fête de 1re classe. En beau-
coup de paroisses on aimera à rappeler le souvenir des grandes
heures vécues dans l'allégresse et à renouveler dans une solen-
nelle messe du soir la consécration de la communauté au ser-
vice du Seigneur avec la dédicacedel'âme de chacun de ses
membres.

PIERRE JOUNEL.
Le livret de la Dédicace

Le C.P .L. va publier aux Éditions Desclée et Cie le livret


pour la célébration de la dédicace selon le nouvel Ordo. Il
paraîtra dans le courant du mois de juillet sous le titre La
dédicace d'une église.
On y trouvera le texte latin-français du Pontificalromain
avec la mélodie grégorienne établie par les moinesde Solesmes,
ainsi que le formulaire et les mélodies de la messe. La traduc-
tion des rubriques et des prières a été faite par le P. Roguet,
celle des psaumes et des lectures est empruntée à la Bible de

M. l'abbé P. Jounel. L'introduction comporte deux chapitres :


Jérusalem. L'introduction, les invitatoires et les notes sont de

le premier établit à partir de l'histoire les structures fonda-


mentales du rituel de la Dédicace. Quant au second, consacré
à la pastorale de la Dédicace, on en lira ci-après le texte inté-
gral, que nous publions avec la bienveillante autorisation des
éditeurs. Les monitions ont été insérées dans le corps même de
l'Ordo, afin de faciliteraumaximum la tâche du commen-
tateur.
On a donné en appendice un choix de chants populaires
latins et français, ainsi que plusieurs psaumes avec les mélodies
du P. Gelineau. Les uns et les autres pourront être utilisés soit
dans les célébrations préparatoires, soit dans la veillée ou dans
la procession des reliques, comme le prévoit explicitement le
Pontifical. Bien que le livret ait avant tout un objectif pas-
toral, on y a joint cependant quelques éléments d'apparat cri-
tique pour permettre de faire dans les séminaires l'étude des
sources du Pontifical.
Une autre brochure, qui devrait paraître au début de l'au-
tomne, donnera les rites de La Bénédiction d'une église et ceux
de La Consécration d'un autel. Elle est préparée par les mêmes
auteurs que celle de la Dédicace et établie selon le même plan.
On reprendra par la suite tous les volumes de la collection qui
était parue aux Éditions Desclée sous la direction de R. Dubosq.

P. J.
PRÉPARATION D'UNE PAROISSE
A LA DÉDICACE

On trouvera ici le schéma de quelques prédications prépa-


ratoires à la dédicace d'une église. Chacune d'elle pourra s'in-
sérer dans une courte célébration.

I. — L'ÉGLISE EST LA MAISON DU PEUPLE DE DIEU

Les rites de la Dédicace de votre église doivent vous aider


à prendre conscience de ce que représente cette église plantée
au milieu de vos maisons, dont vous prenez le chemin chaque
dimanche, mais souvent aussi en semaine.
Elle est un lieu saint, parce qu'elle est la maison du Sei-

:
gneur. Les rites préliminaires de la consécration mettront en
valeur cet aspect les aspersions extérieure et intérieure, la
nef marquée par la croix (ce lieu est « mis à part » pour le
Seigneur)
Mais si cet édifice est la maison de Dieu, pourquoi est-elle
?
si grande Les temples religieux des païens, celui même du
peuple juif, étaient de petites dimensions. C'est que les édi-
fices religieux des chrétiens ne sont pas seulement des mai-
sons de Dieu, ils sont un lieu de rencontre entre Dieu et son
peuple, le lieu où se fait, où se renouvelle activement, où
s'approfondit, d'une célébration à l'autre, la rencontre des
baptisés avec leur Seigneur, où se noue leur Alliance.
Avez-vous pensé qu'un même mot église désigne à la fois un
?
édifice matériel et la société des croyants De même la litur-
gie de la Dédicace passe constamment d'un plan à l'autre.
?
Mais que veut dire ce mot église Elle dit convocation, ras-
semblement des appelés. Chrétiens, nous savons que nous
sommes des appelés, comme le furent déjà Abraham, Moïse,
les prophètes, les apôtres, saint Paul. Si nous sommes bapti-
sés, c'est parce que Dieu nous a appelés. Appelé à quoi ? A

:
nous rassembler. Il existe un signe sensible de cet appel di-
vin les cloches qui sonnent.
1) L'Église est le lieu du rassemblement.

toire de l'Église est encadrée par deux rassemblements :


Il est essentiel aux chrétiens de se rassembler. Toute l'his-
celui
de la Pentecôte et celui du ciel, que nous décrit saint Jean
dans l'Apocalypse.
Le rassemblement de la Pentecôte : culture.
— Ils sont de toute race, de toute nation, de toute
C'est cela l'assemblée chrétienne.
- Ils se rassemblent à la voix de l'Apôtre. L'assemblée
chrétienne est hiérarchique. Les successeurs des apôtres sont
les évêques.
1

— Ils se rassemblent dans la foi au Christ ressuscité, sous


l'impulsion de l'Esprit (c'est lui qui nous réunit).
— Ils entendent dans leur propre langue (mystère d'unité
et de catholicité).
— Ils chantent les merveilles de Dieu.
— Ils sont assidus à la prière.
— Ils mettent tout en commun.
Le rassemblement est le signe de l'unité dans l'amour.

tienne; elle a des prolongements :


Notre assemblée liturgique n'est pas le tout de la vie chré-

— pour chaque membre, pour chaque foyer :


son engage-
ment humain;
la :
communauté en tant que telle son souci mis-
— pour
sionnaire.
Derrière nous, comme un modèle
Pentecôte.
:
le rassemblement de

Devant nous le rassemblement du ciel dont notre assemblée


est le signe prophétique.
:
Célébration

Chant:
Écoutons-en la description (lecture de l'Apocalypse, ch. 7).
0 Seigneur, rassemblez dans votre Église.

2) L'Église est le lieu où le Seigneur parle à son peuple.

Dans le rassemblement de la Pentecôte on écoute Pierre; à


Troas on écoute Paul. Saint Justin rapporte qu'à l'assemblée
dominicale, on lit la Loi, les Prophètes, les Mémoires des Apô-
tres : la Loi et les Prophètes commentés par les Apôtres.
Aujourd'hui, l'assemblée liturgique est le lieu privilégié
où nous est annoncée la Parole de Dieu. Sans doute, tout
chrétien peut lire, et est invité à lire, la Parole de Dieu con-
tenue dans la Bible, même en dehors de l'assemblée. Cepen-
dant, il n'y a pas de messe sans une liturgie de la Parole
épître, évangile, psaumes; et, surtout, la liturgie rend cette
:
Parole actuelle. Jésus a déclaré que là où plusieurs seraient
réunis, il serait lui-même au milieu d'eux.
L'annonce de la Parole réalise une présence mystérieuse du
Seigneur. La Parole est actualisée par l'homélie, car la parole
de Dieu, c'est le texte évangélique avec un commentaire qui
l'actualise. Remarquons que l'on rend à la Bible et spéciale-

même:
ment à l'Évangile les hommages qui sont rendus au Christ lui-
à la procession d'entrée du célébrant, correspond la
procession de l'évangile (chœur, flambeaux, encens, livre). Un
lieu spécial est prévu pour la proclamation de la Parole, c'est
l'ambon. La lecture publique est confiée à un lecteur (un diacre
pour l'évangile), mais l'homélie revient à l'évêque ou au prê-
tre.
Cette parole nous appelle, elle nous « provoque », elle nous
purifie, elle nous réunit dans la foi, l'espérance et l'amour.
C'est pourquoi il est tellement important de l'annoncer dans
la langue des fidèles et de l'écouter ensemble (« l'Église n'est
pas un restaurant, mais la table de famille », selon l'expression
du cardinal Lercaro).

:
Célébration
Nous allons l'écouter et l'acclamer. Alleluia, Laudate Dominum
omnes gentes.
Évangile du lundi de Pâques. Je crois en Dieu.

3) L'Église est le lieu de la prière commune.

L'assemblée chrétienne, qui a reçu la Parole dans la foi,


ne peut lui répondre que dans la prière. L'église est le lieu
de la prière personnelle et intime, mais
pas au moment de
l'assemblée liturgique de la messe. Quand
on écoute ensem-
ble, on prie ensemble.
e Cette prière est hiérarchique aux deux sens du mot :
chef de la communauté avec la partici-
— présidée par le
pation active du peuple
— et où s'affirme la :
hiérarchie des intentions in primis
pro Ecclesia.
:
e Cette prière est catholique une place est faite pour tous
les besoins; une place est faite aux absents; une place est
faite au souci missionnaire de l'Église.
Malheureusement, dans l'état actuel de notre liturgie, cette
prière de la communauté n'a plus dans la messe la place

en avons encore des éléments précieux :


qu'elle a conservée dans les autres liturgies. Cependant, nous
le Kyrie eleison, le
Pater, les prières du Prône, et au vendredi saint, les grandes
oraisons.
Célébration:
Prière litanique prise dans Invitatoires.
Prière silencieuse.
Prière du célébrant clôturée par le Sanctus.

II. — LE MYSTÈRE DE L'AUTEL


D'APRÈS LES RITES DE LA CONSÉCRATION

L'autel consacré est un Mystère, c'est-à-dire une réalité


visible qui est signe d'une présence invisible. L'autel est sym-
bole du Christ victime. C'est pourquoi l'Église s'adresse par-
fois à lui comme à une personne vivante. Elle lui rend des
hommages pour lui-même.
Essayons de découvrir le sens de ce mystère à partir des
rites mêmes de consécration. Qu'est-ce donc que l'autel?

1) Une pierre consacrée.

a) L'Église exige que l'autel soit de pierre. Il n'existe


qu'un seul autel en bois, celui de la basilique du Latran, à
Rome. Pourquoi une pierre ?
C'est en référence aux autels
de l'Ancien Testament, à cette prière qu'érigea Jacob au lieu
où il avait dormi et où, dans son sommeil, il avait entrevu
l'échelle mystérieuse qui reliait la terre au ciel (Gen., 28,
10 s.), à l'autel que Moïse construisit de douze pierres (Ex., 24,
4), mais surtout en référence au Christ, dont saint Paul nous
dit qu'il était symbolisé dans le rocher que frappe Moïse le
rocher était le Christ. Cette pierre est marquée de cinq croix,
:
comme le cierge pascal.
b) Cette pierre est consacrée par une sorte de baptême ou
deconfirmation :1
— elle est lavée par l'eau sainte (les cinq croix et tout l'au-
tel);
— elle est ointe du saint chrême, l'huile qui confère l'Es-
prit-Saint;
— elle est enveloppée d'encens;
— pour finir, on fait brûler l'encens, là où sont gravées les
cinq croix, au chant du Veni Sancte Spiritus.
Cette pierre consacrée est d'abord le symbole du Christ,
mais elle est aussi le symbole du chrétien qui par son bap-
tême et sa confirmation est cc mis à part pour Dieu », et dont
la vie de fidélité à Dieu est le véritable sacrifice agréable au
Seigneur.

Célébration:
Lire dans le Pontifical romain un passage de la prière de consécra-
tion de l'autel où se développe magnifiquement tout le symbolisme de

:
l'Ancien Testament et toute sa signification spirituelle.
Puis, chant du cantique Tu es, Seigneur, le lot de mon cœur.

2) Le tombeau des martyrs.

Dans toute pierre d'autel il y a un tombeau. Il est consacré


par l'évêque et scellé par lui quand on y a déposé quelque
parcelle du corps d'un ou plusieurs martyrs.
- :
Ceci rappelle la relation entre le martyre et le sacrifice
de l'Eucharistie l'Eucharistie est le sacrement de l'immola-
tion du Christ total.
— Mais c'est aussi un symbolisme de l'autel du ciel (cf. l'A-

que jour à la messe :


pocalypse). L'autel sublime auquel nous faisons allusion cha-
« Ordonne que cette offrande soit portée
par les mains de votre saint ange sur votre autel sublime »;
sur cet autel céleste fume l'encensoir d'or; et sous cet autel
il y a les âmes des premiers martyrs. Jean fait allusion cer-
tainement à ceux du Vatican, à Paul.
— Cela suggère enfin le rôle médiateur des martyrs.
Célébration:
Chant:
Écoutons la lecture de l'Apocalypse (Apoc., 6, 9-11 et 8, 3-4).
Ceux qui sèment dans les larmes.

3) La table du Repas du Seigneur.

L'autel est une table :si maintenant la nappe y est instal-


lée à demeure, de même que la croix de procession et les cier-
ges des acolytes, et la cassette de la réserve eucharistique, si
l'autel disposé jadis entre le célébrant et le peuple s'est reculé
vers le fond et a été décoré d'un retable, il reste que l'essen-
tiel est la table. C'est la table du cénacle au soir du jeudi
saint, mais aussi la table du soir de Pâques et de l'Ascension,
la table des premières célébrations apostoliques.
L'autel est destiné à l'Eucharistie. C'est la célébration de
:
l'Eucharistie qui constitue l'essentiel de la consécration de
l'autel il y a donc une progression dans cette célébration
comme on en trouve dans la nuit pascale.
Célébration:
Nous allons revivre le premier repas eucharistique en chantant
l'Agnus Dei et en écoutant le récit évangélique de la Cène. Évangile

:
(Marc, 14, 17-25).
Pour conclure Pater Noster.
Bénédiction du célébrant, qui va baiser l'autel avant de nous bénir,
pour nous faire comprendre que tout nous vient par l'autel.

PIERRE JOUNEL.
Le rite byzantin de la consécration
et dédicace d'une église

L E rite byzantin de la Dédicace, dont nous publions la tra-


duction française, est sans exagération une des plus belles
et des plus imposantes cérémonies de la tradition litur-
gique byzantine. A ceci, sans doute, ont contribué pendant des
siècles la capacité propre au rite d'accepter et d'offrir un sym-
bolisme riche et profond; la générosité impériale, qui érigeait
dans toutes les villes du monde chrétien des « maisons de Dieu»,
n'épargnant rien pour leur donner la beauté et la grandeur qui
convenaient à de tels donateurs; et enfin la présence, lors de la
dédicace, d'un grand nombre d'évêques en grand apparat, et
l'affluence du clergé et des fidèles, pleins d'enthousiasme, d'ad-
miration et de gratitude envers Dieu.
Aujourd'hui, la cassette royale n'est plus là et la plupart du
temps un seul évêque est présent, assisté par le clergé des parois-
ses voisines, mais le rite de la Dédicace garde toujours sa splen-
deur liturgique et mytique, car en célébrant la Dédicace d'un
Temple~(Naôç), nous avons en vue de le rendre « symbole de la
très sainte Église, c'est-à-dire symbole de notre propre corps,
que le très vénérable apôtre Paul appelle « temple et membres
du Christ», selon les paroles de la prière prononcée par l'évê-
que avant d'ouvrir les portes de la nouvelle église et d'y entrer
avec les reliques.
Le plus ancien texte de ce rite de l'Église byzantine se trouve
dans le Codex Barberini1, le fameux Euchologe du 8e siècle, qui
doit remonter sans doute à une tradition manuscrite plus an-
cienne mais dont nous ne possédons aucun témoignage anté-
rieur. Il est profondément regrettable que jusqu'à maintenant ce
manuscrit, le plus beau des manuscrits liturgiques selon l'expres-
sion du cardinal Pitra, n'ait pas été entièrement édité.
Le rite, tel qu'il se présente dans le Barberini, est très simple,
n'étant pas encore compliqué par les prescriptions minutieuses

I. Voir la description du manuscrit que donne le P. A. STRITT-


MATER, The Barberinum S. Marci of Jacques Goar, dans Epheme-
rides Liturgicae, XLVII (1933), pp. 329-361.
qu'on rencontrera dans les manuscrits des siècles suivants2.
Dans le Barberini et dans la presque totalité des manuscrits con-
tenant le rite en question, il y a une distinction entre la consé-
cration (xaEh£procnc;) et la dédicace ~(ÈyxaÍvla = inauguration).
L'ordo de l'un et de l'autre est donné séparément, et l'ordo
~d'Éyxat'yia suit immédiatement celui de la consécration. Dans
celui-ci, il s'agit de la consécration de l'autel et de l'église, et
dans celui-là de la translation et de la déposition des reliques
et de la célébration de la première divine liturgie dans l'église
qui vient d'être consacrée. Dans les livres liturgiques actuels,
cette distinction ne se fait plus. Chez les Grecs, le terme ÈyxaÍvla
comprend tout, comme chez les Slaves le terme osviachenie
(consécration)
Dans le rite byzantin actuel, trois moments se distinguent,
tous les trois étant étroitement liés à l'autel, qui est le centre
de l'édifice. En parlant de la consécration d'une église, c'est
d'abord la consécration de J'autel qu'on entend, parce que
:
de l'autel la grâce de sanctification est répandue à tout le reste
de l'église8. Ces trois moments sont les suivants

1. La construction de l'autel. L'autel est seulement à demi


érigé par les maçons. La mise en place de la plaque de marbre
ou de bois, et sa consolidation est faite par les mains de l'évê-
que lui-même, aidé par ses assistants.
II. La consécration de l'autel. Elle est analogue à l'initiation
de chaque fidèle. Elle se fait par l'ablution, qui est comme un
baptême, et par la chrismation (quoique l'on évite ce terme,
réservé au sacrement de confirmation). L'onction par le saint
chrême est en tout cas attestée dès l'époque du Pseudo-Denys4.
L'aspersion avec l'eau bénite de l'église et des éléments cons-
titutifs de l'autel n'est pas attestée dans la tradition manuscrite
et n'est pas en usage dans les Églises grecques. On la trouve seu-
lement dans la pratique de l'Église russe6, et il se peut que ce
soit une influence de la pratique occidentale6 introduite de Kiev
au temps de Pierre Moghila (1597-1646).

Voir l'édition du texte du rite selon plusieurs manuscrits par le


2.
professeur P. TREMPELAS, dans son « ~Mixpov EUX0^Yl0V- », t. II,
pp. 103-146, Athènes, ig55.
3. Saint Syméon DE SALONIQUE, De la consécration de l'église,
P.G.,155,305A.
4. De Hierarchia Ecclesiastica, 4, 12, P. G., 3, 484C.
l
5. K. NIKOLSKY, Manuel pour étude du typikon de l'Eglise
doxe (en russe). n. 801. Saint Peterburg. 1900.
- - Ortho-
6. L. DUCHESNE,Origines du Culte chrétien, p. 390, Paris, 1889
III. La translation et la déposition des reliques des saints. La
distinction entre les reliques de martyrs, qui étaient exigées an-
ciennement, et celles de saints n'ayant pas subi le martyre
n'existe plus. Il a été signalé plus haut que la translation et la
déposition appartiennent à la cérémonie de l'inauguration de
l'église déjà consacrée.
L'ordre dans lequel nous avons énuméré les trois moments ou
parties du rite, est celui qui se trouve dans les manuscrits, mais
selon le rite que l'on trouve actuellement dans l'Euchologe7 en
usage par les Églises grecques, la translation et la déposition des
reliques a lieu avant la construction et la consécration de l'autel.
L'Église russe garde l'ordre ancien, qui est d'ailleurs plus cor-
rect, car la consécration de l'autel el de l'église ne relève pas de
la déposition des reliques, comme on peut le déduire de la prière
dite après la déposition des reliques sous l'autel.
La Consécration et la Dédicace sont précédées par un office
solennel de vêpres, vigile et matines, qui est repris de la fête
de la Dédicace de l'église de la Résurrection à Jérusalem, dont
la commémoration se célèbre le 13 septembre8. Bien entendu,
l'ordo subit de légères modifications selon le jour et selon le
saint à qui l'église est dédiée. La plupart des hymnes de l'office
d'èyxai'via appartiennent à saint Jean Damascène, qui a été
inspiré par le 44e (alias 43) discours de saint Grégoire de Na-
zianze9.
Pendant la célébration du rite, chaque action comporte des
prières et le chant de psaumes. Les prières sont inspirées de
celles de la dédicace du temple de Salomon à Jérusalem; elles
sont toutes adressées à Dieu le Père. Mais il faut noter les deux
prières qui suivent la consécration de l'autel et l'onction des
murs de l'église, la première fait mémoire de l'institution de
l'Église et du Sacerdoce, et l'autre demande grâce et sanctifica-
tion pour l'autel, afin que les oblations puissent devenir le corps
et le sang du Christ.
Le plus ancien élément du rite est, sans doute, le chant du
psaume 23, que le peuple chanta lors de la dédicace de l'église
de Tyr, comme nous pouvons le constater dans le discours qu'Eu-

7. Ce texte était compilé à partir de divers manuscrits vers 1700.


- Il a été'imprimé pour la première fois en 1703 en Bucarest. Une copie
se trouve dans la Bibliothèque du Musée Britannique. Dans l'Eu-
chologe imprimé, on le trouve à partir de r803.
8. Le texte de l'office se trouve dans les Ménées de septembre, et
aussi dans l'Euchologe.
9. P. G., 36, 608-621. In Novam Dominicam (dimanche après
Pâques).
sèbe de Césarée prononça en l'honneur de son ami Paulin à cette
occasion10.
La cérémonie est couronnée par la concélébration de la
Sainte Eucharistie, en vue de laquelle tout était consacré et dé-
dié. La divine liturgie est célébrée quotidiennement pendant les
sept jours qui suivent la dédicace à l'imitation, sans doute, des
sacrifices offerts pendant sept jours lors de la dédicace du temple
de Salomon.

ANDRÉ K. FYRILLAS,
de l'Institut « Saint-Serge ».

10. H. E., X, 4, 9 (Sources Chrétiennes, t. 55, p. 83).


ORDO DE LA DÉDICACE
au rite byzantin ancien
(CodexBarberini)

L'ORDO ET L'OFFICE POUR LA DÉDICACE D'UN TEMPLE


ET POUR LA CONSÉCRATION DE SON SAINT AUTEL
A LA VEILLE DE LA DÉDICACE

Construction de l'autel

Avant l'arrivée du patriarche dans le temple qui sera consacré, le minis-


tre de l'ordination y est envoyé, et il donne l'ordre aux marbriers de
monter l'autel. Et dès que ceux-ci ont achevé leur travail et se sont éloi-
gnés, le patriarche fait son entrée dans le temple. Et aussitôt les laïcs

close de tous côtés, un des diacres fait la prière en disant :


sortent et personne ne reste à l'intérieur sauf le clergé. L'Église étant
— Prions en
paix le Seigneur; et le patriarches'agenouille devant les portes du sanc-
tuaire parce que l'autel, qui y est monté, n'est pas encore consacré; quand
le patriarche s'est levé, le diacre dit:
Accueillez-nous, sauvez-nous, ayez pitié de nous, soutenez-nous et
gardez-nous, ô Dieu, par votre grâce. Pour la paix céleste et pour le
salut de nos âmes, prions le Seigneur.
Pour la paix dans le monde entier, la stabilité des saintes églises de
Dieu et l'union de tous. Prions le Seigneur.
Pour notre évêque, et pour l'œuvre de ses mains, pour ses assistants les
prêtres, les diacres et tous les autres. Prions le Seigneur.
Pour les très pieux empereurs, protégés par Dieu, pour tout le peuple
et son armée. Prions le Seigneur. *

Pour cette ville et pour toutes les villes, les régions et les fidèles qui y
habitent. Prions le Seigneur.
Pour un climat tempéré. Prions le Seigneur.
Pour les navigateurs. Prions le Seigneur.
Pour que nous soyons préservés de tous tourments, châtiments et
nécessités. Prions le Seigneur. -

Et pour tous ceux qui ont besoin de l'aide et du soutien du Seigneur.


Prions le Seigneur.
Faisons mémoire de notre très sainte, immaculée, toute bénie et glo-
rieuse Dame, la Mère de Dieu et toujours Vierge Marie, des très dignes
apôtres, du saint auquel ce temple est dédié, et de tous les saints;
offrons nous nous-mêmes, les uns les autres au Christ, notre Dieu.

Et le patriarche s'agenouille, puis se lève et le diacre prononce la prière


suivante:
0 Dieu, vous êtes sans commencement, vous êtes à jamais; vous avez
amené toutes choses du néant à l'existence; vous habitez une lumière
inaccessible; pour trône vous avez le ciel, la terre est l'escabeau de vos
pieds. Après avoir donné vos ordres à Moïse et lui avoir remis le modèle
qu'il aurait à suivre, vous avez rempli Bézéléel d'un esprit de sagesse.
C'est ainsi qu'ils purent édifier la tente du témoignage où se déroulaient
les ordonnances rituelles, images et ombres de la vérité. Vous avez
accordé à Salomon munificence et générosité de cœur, et par lui vous
avez élevé le temple ancien. Par vos saints et illustres apôtres, vous avez
inauguré le culte en esprit comme aussi la grâce du tabernacle véritable,
et par eux, Seigneur des Puissances, vous avez établi dans toute la terre
, vos saintes églises et vos autels, pour que l'on vous y offre des sacrifices
sacrés et non sanglants. Et ce temple, vous avez maintenant daigné le
faire élever au nom de saint N. pour votre gloire, pour celle de votre
Fils unique et de votre très saint Esprit. Roi immortel et riche en bien-
faits, souvenez-vous de la compassion et de la miséricorde qui sont vôtres
depuis toujours. Ne vous détournez pas de nous, tout souillés que nous
sommes par une multitude de péchés, et ne brisez pas votre Alliance à
cause de notre impureté. Ne regardez pas à présent nos transgressions,
mais par la descente et la grâce de votre saint et vivifiant Esprit, donnez-
nous la force et rendez-nous capables d'accomplir sans condamnation la
dédicace de ce temple et d'y consacrer un autel, afin que nous puissions
vous y louer par des psaumes, des hymnes et la célébration de vos
mystères, et y magnifier toujours votre miséricorde. Oui, Maître et Sei-

pécheurs qui vous supplions :


gneur, notre Dieu, espoir de tous les confins de la terre, exaucez-nous,
envoyez votre très saint, adorable, et
tout-puissant Esprit, et sanctifiez ce temple et cet autel. Remplissez-le
de la lumière éternelle; choisissez-le pour votre demeure; faites-en le
lieu où réside votre gloire; ornez-le de vos grâces divines qui sont étran-
gères à ce monde. Faites-en le havre de ceux qui sont ballottés par la
tempête, le lieu de guérison des souffrances, le refuge des faibles, la
terreur des démons. Que vos yeux soient ouverts sur ce temple jour et
nuit, que vos oreilles soient attentives aux prières de ceux qui entreront
ici avec crainte et révérence et y invoqueront votre nom si vénérable et
digne d'honneur. Tout ce qu'ils vous demanderont, vous l'écouterez en
haut dans le ciel, vous leur ferez miséricorde et vous aurez pitié d'eux.
Rendez ce lieu inébranlable jusqu'à la fin des siècles et l'autel qui s'y
trouve, faites-en le Saint des saints par la force et la puissance de votre
Saint-Esprit. Accordez-lui unegloire supérieure à celle du propitiatoire
de la Loi. Ainsi les actions sacrées qui s'y célébreront parviendront-elles
à votre saint autel céleste et spirituel, et nous vaudront-elles la grâce
d'être couverts de votre ombre très pure. Nous nous confions en effet
non en l'œuvre de nos mains, mais en votre ineffable bonté.

Lustration de l'autel
Après l'amen, on donne au patriarche des linges blancs, qu'il met sur
le saint autel en forme de croix; et ensuite on présente un récipient plein
d'eau du saint baptême; le patriarche incline la tête au-dessus de l'eau,
en priant ainsi:
Seigneur, notre Dieu, vous avez sanctifié les eaux du Jourdain par votre
manifestation salvatrice; envoyez aussi à présent la grâce de votre Saint-
Esprit et bénissez ces eaux par votre Esprit sanctifiant et bénissant. Car
vous êtes béni dans les siècles des siècles. Amen.

Puis il répand l'eau, en trois fois, sur l'autel, disant:


Au nom du Père, et du Fils, et du Saint-Esprit.

Ensuite il essuie l'autel et ses colonnes avec des linges blancs. Il le

:
nettoie et essuie avec un nouveau linge ce qui reste de l'eau. Ce faisant,
il entonne le psaume Que tes demeures sont désirables, que tous
chantent avec lui, une ou plusieurs fois, jusqu'à ce qu'il ait fini de
:
nettoyer l'autel.Alors il rend gloire et supplie, en disant
Gloire à notre Dieu dans les siècles des siècles. Amen.

en disant:
Après quoi il prend un vase et il fait trois ablutions en forme de croix,

:
Aspergez-moi, etc.; et il le répète trois fois. Et cela fait, il
achève le psaume. Puis il rend gloire et supplie Dieu Béni soit Dieu
dans les siècles des siècles.
Il prend alors un nouveau linge qu'il met sur l'autel, puis l'essuie, en

essuyé; rend gloire à Dieu et il ajoute de nouveau


notre Dieu, dans les siècles des siècles.
:
disant le psaume 131, une ou deux fois, jusqu'à ce qu'il soit parfaitement
il Gloire au Christ,

Onction de l'autel
-
:
Et pendant que le diacre dit Soyons attentifs, le patriarche prend le
saint myron, qu'il répand sur l'autel en forme de croix, faisant trois
croix, une au milieu, et une de chaque côté, en même temps qu'il dit
trois fois l'alleluia, comme pour le baptême; et lorsqu'il a rendu le
myron, il fait une onction d'huile avec la main sur toute la surface de
l'autel, en partant de ces trois croix qu'il a faites; il trace aussi des croix
sur les colonnes de l'autel en disant tout le psaume 132, et il rend gloire
:
en terminant Gloire à la sainte Trinité, notre Dieu dans les sièclesdes
siècles. Ceci fait, il se lave les mains, prend la nappe, et la déploie sur
le saint autel en disant le psaume 92 : Dieu règne, vêtu de majesté, une
ou plusieurs fois, jusqu'à ce qu'il soit complètement recouvert; puis il
rend gloire.

Encensement de l'autel et de l'Église. Onction de l'Église

:
Et après avoir dit amen le patriarche reçoit l'encensoir et encense le
saint autel, le sanctuaire et tout le peuple, en disant le psaume
pour moi, Seigneur, une ou plusieurs fois, jusqu'à ce que tout soit
Justice

encensé. Pendant que le patriarche encense, un des évêques assistants


porte l'ampoule d'huile sainte, il le suit et fait des croix avec le myron
sur chaque colonne de l'église. Puis ayant effectué les encensements
comme on l'a dit, et achevé le psaume indiqué, après avoir rendu gloire,

encore:
le diacre fait la prière collective; et après le Agréez-nous, etc., il dit
Faisons mémoire de notre très sainte et immaculée Mère de
Dieu, notre Dame, et du Saint en l'honneur duquel ce temple est
dédié, etc.

Prière de dédicace
Le patriarche s'incline auprès du saint autel mais il ne s'agenouille
pas, et il prie ainsi :
Seigneur du ciel et de la terre, qui dans votre indicible sagesse avez
fondé votre sainte Église et avez établi sur terre l'ordre du sacerdoce
comme une image du mystère exercé au ciel par les anges, Seigneur riche
en bienfaits, accueillez-nous, tandisqu'à présent nous vous prions, non
que nous soyons dignes de demander ces choses, mais pour que vous
nous manifestiez l'excès de votre bonté. En effet, vous n'avez cessé —
et de diverses manières, — de faire du bien au genre humain. Mettant le
comble à vos bienfaits, vous nous avez donné la présence dans la chair
de votre Fils unique. Il s'est fait voir sur terre et a fait lever pour ceux
qui étaient dans les ténèbres la lumière du salut; il s'est offert lui-
même en sacrifice pour nous et s'est fait propitiation pour le monde
entier, en nous donnant de participer à sa propre résurrection. Il est
monté aux cieux, et de là, selon sa promesse, il a revêtu ses disciples et
apôtres de la force d'en haut, qui n'est autre que cet Esprit-Saint, ado-
rable, tout-puissant, procédant de vous, Dieu le Père. Rendus par lui
puissants en œuvres et en paroles, ils nous ont transmis le baptême
d'adoption des fils; ils ont élevé des églises, fondé des autels et établi
les canons et les lois du sacerdoce. Et nous, tout pécheurs que nous
soyons, nous gardons leur tradition, nous nous prosternons devant
vous, Dieu éternel, et nous vous prions, vous qui êtes miséricordieux.
Ce temple, bâti pour qu'on y chante votre louange, remplissez-le de
votre divine gloire; cet autel que nous avons érigé, faites-en un lieu
très saint, de sorte que nous, qui nous tenons ici devant lui comme
devant le trône redoutable de votre royauté, vous servions sans con-
damnation, vous présentant des supplications pour nous-mêmes et pour
tout le peuple, et offrant à votre bonté le sacrifice non sanglant pour
nos fautes volontaires et involontaires. Accordez-nous votre pardon, une
conduite qui vous plaise, l'amendement de notre vie et la plénitude de
la justice. Car béni est votre très saint Nom, Père, Fils et Saint-Esprit,
maintenant et toujours et dans les siècles des siècles.

: : :
Et après l'amen, il dit Paix à tous. Le diacre dit Inclinez vos têtes
devant le Seigneur; et alors l'évêque prononce cette prière
Nous vous rendons grâces, Seigneur, Dieu des Puissances, de ce que,
ayant répandu votre grâce sur vos saints apôtres et sur nos vénérables
Pères, vous avez daigné, dans votre amour des hommes, l'étendre jus-

:
qu'à nous, vos serviteurs pécheurs et inutiles. Nous vous en prions,
Maître grand en piété remplissez de gloire, de sainteté et de grâce cet
autel, afin que les offrandes non sanglantes que l'on vous y offrira soient
changées au corps très pur et au sang précieux de votre Fils unique,
notre Seigneur, Dieu et Sauveur, Jésus-Christ, pour le salut de tout
votre peuple ainsi que de notre indignité. Car vous êtes notre Dieu, le
Dieu qui aime et qui sauve, et nous vous rendons gloire, Père, Fils et

:
Saint-Esprit, maintenant et toujours, et dans les siècles des siècles.
Et ayant dit amen, le diacre dit sortons en paix.

L'ORDO A SUIVRE « IN ENCAENIIS »,


C'EST-A-DIRE POUR LA DÉDICACE DU TEMPLE

Le jour de la consécration de l'oratoire, on aura d'abordcélébré les


vêpres et les vigiles nocturnes dans une des églises tout proche de l'ora-
toire qui va être consacré, et l'assemblée sera convoquéepubliquement
par le héraut; et là resteront en évidence les saintes reliques; dès l'au-
rore le patriarche vient s'y joindre; et quand le diacre a fait la prière
collective du Trisagion, le patriarche prie ainsi :
Seigneur, notre Dieu, qui êtes fidèle à vos paroles, sincère dans vos
promesses; qui avez accordé à vos saints martyrs de livrer le bon com-
:
bat, de suivre jusqu'au bout la voie de la piété et de demeurer iné-
branlables dans la confession de la vraie foi vous, Maître très saint,
laissez-vous fléchir par leurs prières et accordez-nous, à nous qui som-
mes vos indignes serviteurs, d'avoir notre part et héritage avec eux,
afin que, devenus leurs imitateurs, nous soyons jugés dignes des biens
qui leur sont réservés. Par la pitié et l'amour de votre Fils unique avec
qui vous êtes béni en même temps que votre très saint, bon et vivifiant
-
Esprit,maitnant et toujours et dans les siècles des siècles.
Et aprèsl'amen, le patriarche entonne :
Gloire à vous, ô Christ Dieu, fierté de tous, joie des martyrs.

Translation des reliques

L'évêque porte avec sesassistants les saintes reliques, et prend part à


la supplication dans l'église à consacrer. Lorsqu'on est arrivé dans le
narthex auprès de la grande porte qui est au milieu du temple, il dit :
Vous êtes béni, ô Christ Dieu, dans les siècles des siècles. Les chantres
entonnent alors le tropaire : Portes, levez vos frontons, et ce qui suit.
Et une fois les portes ouvertes, il entre avec tout le peuple. Et pendant
qu'on chante le tropaire cité, le patriarche dépose les saintes reliques
dans le lieu qui leur est préparé, et il fait cette prière :
NoLre Dieu, qui avez accordé aux saints martyrs, qui ont combattu
pour vous, la gloire de voir leurs reliques portées dans toute la terre
et conservées dans vos saintes églises pour s'y épanouir en fruits de
guérisons. Vous donc, ô Maître, donateur de tous les biens, par l'inter-
cession des saints dont vous avez voulu que les reliques soient déposées
dans cet autel sacré, rendez-nous dignes d'y offrir sans condamnation le
sacrifice non sanglant, donnez-nous ici tout ce que nous demanderons con-
formément à notre salut. A ceux qui ont combattu pour votre saint
nom, accordez ici également en récompense le don d'opérer, par leurs
reliques, des miracles pour notre salut. Car à vous est la royauté, Père
et Fils et Saint-Esprit, maintenant et toujours et dans les siècles des
siècles.

Ensuite les chantres rendent gloire et ilsyajoutent le Trisagion et en-


suite on célèbre toute la liturgie.

f
**
Note sur la messe de la Dédicace
Les Euchologes, tant grecs que slaves, renvoient pour l'Épître et rÉ.
vangile de la liturgie de la Dédicace à la fête du 13 septembre, qui com-
mémore la dédicace de l'Anastasis à Jérusalem (335). Or ces deux lectures
consistent dans Hébreux, 3, 1-4 et Matthieu, 16, 13-18 (Tu es Pierre et sur
cette pierre je bâtirai mon Église). L'Euchologe édité par Goar ne con-
naît pas encore d'autre formulaire. Mais nombre d'exemplaires orthodoxes
de l'office de la Dédicace de date plus récente ont substitué à la lecture
de Matthieu, 16 celle de Jean, 10,22-30, qui commence par ces mots :
On célébrait à Jérusalem la Dédicace 1
P. J.
1. S. SALAVILLE, Cérémonial de la consécration d'une église selon le
rite byzantin, Tipografia poliglotta vaticana, 1937, pp. 48-53.
La dédicace de la basilique ambrosienne
par saint Ambroise
Lettre 22 de saint Ambroise à sa sœur Marcellina

s (UNT Ambroise raconte lui-même à sa sœur comment le


17 juin 386 il a découvert les corps des saints Gervais et
Protais. Les faits sont attestés également par saint Augus-
tin, De civitate Dei, 22, 8 et sermo in natali Gervasi et Protasi;
par Paulin de Milan, Vita Ambrosi, 33, par Gaudentius de BrBS-
cia. Ce qui est peut-être le plus intéressant dans ce récit, c'est
l'indication que nous fournit Ambroise des psaumes chantés du-
rant la veillée et dont il tire la substance de son homélie impro-
visée. Mais on notera aussi la spontanéité du peuple qui impose
à diverses reprises à son évêque le style de la célébration — fût-
ce au prix d'un miracle1.

A Madame ma sœur,
plus chère que ma vie et mes yeux,
-
son frère.
Puisque j'ai l'habitude de ne laisser ignorer à votre sainteté
rien de ce qui se passe ici en votre absence, sachez aussi que
nous avons découvert des saints martyrs. Car, comme j'avais

tu l'as fait pour la basilique romaine3.


:
consacré une basilique2, beaucoup de gens se mirent à m'inter-

» Je répondis :
peller comme d'une seule voix et à me dire « Consacre comme
« Je le
ferai si je trouve des corps de martyrs. » Et aussitôt je fus envahi
par une sorted'ardeur prophétiqne.
:
Bref, le Seigneur donna sa grâce j'ordonnai aux clercs, eux-

I. On lira avec profit H. DELEHAYE, Origine du culte des martyrs,


pp. 75-8O, 337. — Texte de la lettre. P. L.. 16. col. 1019-1026.
- - 2. Il s'agit de la basilica ambrosiana, aujourd'huiSant'Ambrogio
maggiore.
»
3.La basilique « romaine est celle qui se trouvait à la Porta
Romana de Milan.
mêmes saisis par la crainte, de déblayer la terre à l'endroit qui
se trouve devant les cancels des saints Félix et Nabor 4.
J'ai trouvé
des indices concordants; puis je fis approcher ceux à qui je devais
imposer les mains5; alors les saints martyrs commencèrent à
surgir; jusqu'à ce que, au milieu de notre silence, on levât le
sarcophage, et on l'étendit tourné vers l'emplacement du sépul-
cre saint. Nous avons trouvé deux hommes d'une taille surpre-
nante, comme il était habituel dans les temps anciens. Tous les
ossements intacts, beaucoup de sang. Énorme concours du
peuple tout au long de ces deux jours. Bref, nous avons tout
renfermé avec ordre; nous avons fait la translation, comme le
soir tombait déjà, à la basilique de Fausta6; là, vigiles toute la
nuit, imposition des mains. Le lendemain, nous avons transporté
ces restes dans la basilique qu'on appelle ambrosienne. Pendant
ce transfert, un aveugle fut guéri. Voici quel fut mon discours au
peuple :
Tandis que je vous observais rassemblés en une foule si débordante et
si extraordinaire, et que je considérais les dons de la largesse divine qui
brillèrent dans les saints martyrs, je me jugeais, je l'avoue, inférieur à
une telle tâche; et il me paraissait impossible d'épuiser dans un discours
ce que notre esprit peut difficilementfixer, nos yeux difficilement embras-
ser. Mais lorsqu'on a commencé à lire la suite des Écritures, le Saint-
Esprit, qui a parlé par les prophètes, m'a donné d'exprimer quelque chose
qui soit digne d'une telle assemblée et de votre attente, comme des
mérites des saints martyrs.
Les cieux, dit-il, racontent la gloire de Dieu (Ps. 18, 2). Lorsqu'on lit
ce psaume, il arrive que ce ne sont pas tant les éléments matériels que
les mérites célestes qui semblent apporter à Dieu une digne louange.
Aujourd'hui cependant, par cette lecture fortuite, on a vu avec évidence

:
quels sont les cieux qui racontent la gloire de Dieu. Regardez à ma
droite, regardez à ma gauche les reliques très saintes voyez ces hommes

cieux qui racontent la gloire de Dieu :


à la vie céleste, voyez les trophées d'une âme sublime. Les voilà, les
voilà les œuvres de ses mains,
que le firmament annonce. Car ce n'est pas la jouissance mondaine, mais

:
la grâce de l'action divine qui les a élevés au firmament d'une passion
très sainte et bien auparavant, par la louange de leurs mœurs et de leurs
vertus, (Dieu) a annoncé qu'ils subiraient le martyre, c'est-à-dire que
contre les séductions de ce monde ils devaient demeurer inébranlables.

4. Il s'agit de la chapelle cimitériale des saints Félix et Nabor, dans


la zone cimitériale de la Porta Vercellina.
5. La fin de la lettre laisse entendre qu'il s'agit d'énergumènes ou
possédés (P. L., 16, col. 1025 C).
6. La basilique de Fausta n'était pas très éloignée de la chapelle
des saints Félix et Nabor.
C'était un ciel, ce Paul qui a dit : Notre cité est dans les cieux
(Phil., 3, 20). C'étaient des cieux, Jacques et Jean, aussi sont-ils appelés
fils du tonnerre (Marc, 3, 17); et c'est pourquoi, étant un ciel, Jean a vu
le Verbe en Dieu (Jean, 1,1). Le Seigneur Jésus lui-même était le ciel
d'une perpétuelle lumière, lorsqu'il racontait la gloire de Dieu, mais
:
celle que personne auparavant n'avait vue. Et c'est pourquoi il dit Dieu,
personne ne l'a vu, mais le Fils unique qui est dans le sein du Père, lui
l'a raconté (Jean, 1, 18). Si vous cherchez encore l'œuvre des mains de
:
Dieu, écoutez Job qui dit C'est l'Esprit divin qui m'a fait (Job, 33, 4).
Et c'est pourquoi, solide contre les tentations du diable, il a continué à
marcher sans que sa constance fût ébranlée. Mais passons à la suite du
texte.
Le jour, dit le Saint-Esprit, profère au jour la parole (Ps. 18, 3). Voici
les vrais jours que n'interrompt aucuneobscurité nocturne. Voici les vrais
jours pleins d'unelumière et d'une splendeur éternelles; ils ont proféré
la parole de Dieu non pas en prononçant un discours passager, mais du
fond du cœur, en étant constants dans leur profession de foi, persévérants
dans leur martyre.
:
Un autre psaume qu'on a IJ1 dit ceci Qui est comme le Seigneur notre
Dieu, qui habite dans les hauteurs et regarde ce qui est bas au ciel et sur
la terre (Ps. 112, 5) ? Certes Dieu regarde ce qui est bas, lui qui révéla

:
à son Église les reliques des saints martyrs cachées sous un terre-plein
vulgaire, dont les âmes sont au ciel, et le corsp dans la terre Relevant
l'indigent au-dessus de la terre, il retire le pauvre de son fumier (ibid.,
7); et vous voyez comment il les a établis avec les princes de son peuple.
Qui devons-nous appeler princes du peuple sinon les saints martyrs, au
nombre desquels sont maintenant en bonne place Protais et Gervais,
longtemps ignorés auparavant, qui ont fait que l'Église de Milan, stérile
en martyrs, se réjouisse désormais de l'honneur et des exemples de leur
pression comme la mère de nombreux enfants?
Et cette autre explication ne répugne pas à la vraie foi : le jour au
jour profère la parole (Ps. 18, 2), l'âme à l'âme, la vie à la vie, la
résurrection à la résurrection. Et la nuit à la nuit transmet la connaissance,
c'est-à-dire la chair à la chair, chez ceux dont la passion a transmis à tous

:
la vraie connaissance de la foi. Nuits bienfaisantes, nuits lumineuses, qui
ont des étoiles. Car une étoile, diffère en éclat d'une autre étoile ainsi
en va-t-il de la résurrection des morts (1 Cor., 15, 41).
Ce n'est pas sans raison que beaucoup appellent cette invention des
martyrs une résurrection. On peut cependant se demander si les martyrs
ont ressuscité pour eux-mêmes, quand il est certain qu'ils ont ressuscité
pour nous. Vous avez appris, ou plutôt vous avez vu par vous-mêmes que
plusieurs ont été délivrés du démon; et que plusieurs, dès qu'ils tou-
chèrent de leurs mains le vêtement de ces saints, furent délivrés des
infirmités dont ils souffraient; voici renouvelés les miracles de cet ancien
temps où, par l'avènement du Seigneur Jésus, une grâce plus abondante
se répandait dans le monde, puisque vous voyez que beaucoup ont été
guéris comme par l'ombre des saints corps. Combien jette-t-on de linges!
combien d'étoffes sur ces saintes reliques, et par cet attouchement même
on en attend la guérison! Tous se plaisent à toucher l'extrémité du linge;
et celui qui touchera sera sauvé.
Je te rends grâces, Seigneur Jésus, de ce que tu réveilles pour nous les
esprits des saints martyrs, en ce temps où ton Église a besoin de plus
puissantes protections. Que tout le monde sache quels combattants je
cherche, qui puissent combattre, et qui n'aient pas coutume d'attaquer.
Je te les ai procurés, peuple saint, capables de servir tout le monde et de

:
ne nuire à personne. Voilà les défenseurs que je désire, voilà les soldats
que je possède non pas des soldats du siècle, mais des soldats du Christ.
Je ne crains pas que de tels défenseurs attirent sur moi l'envie, alors
que leur patronage est d'autant plus sûr qu'ils sont plus hauts placés.
Je souhaite leur protection envers ceux-là même qui me portent envie.

pas d'être entouré par ces armes-là :


Qu'ils viennent donc, et qu'ils voient mes gardse du corps; je ne refuse
Ceux-ci se confient dans leurs
chars, ceux-ci dans leurs chevaux; mais nous mettons notre puissance dans
le nom du Seigneur notre Dieu (Ps. 19, 8).
La sainte Écriture rapporte qu'Elisée, tandis qu'il était assiégé par

:
l'armée des Syriens, disait à son serviteur effrayé, pour dissiper sa
crainte nous en avons davantage pour nous que contre nous (4 Rois, 6,
16); et pour le prouver, il demanda que les yeux de Giezi s'ouvrissent;
ils s'ouvrirent, il vit que le prophète était assisté par d'innombrables
armées angéliques. Quant à nous, si nous ne pouvons pas les voir, nous
sentons leur présence. Vos yeux étaient fermés aussi longtemps que les
corps des saints étaient cachés et recouverts. Le Seigneur a ouvert nos
yeux; nous avons vu les renforts qui nous ont souvent défendus. Nous ne
le croyions pas, mais nous ne les avions pas moins. C'est pourquoi le
Seigneur, pendant que nous tremblions, nous a dit en quelque sorte
Voyez quels martyrs je vous ai donnés. Ainsi, nos yeux étant dessillés,
:
nous contemplons la gloire du Seigneur, celle que lui donna jadis la

sommes déchargés, mes frères, du poids d'une grande honte :


passion des martyrs, celle que lui donnent maintenant leurs œuvres. Nous
nous
avions des protecteurs et nous l'ignorions, Nous avons trouvé cela seul
qui semble nous donner l'avantage sur nos aînés. La connaissance des
saints martyrs, qu'ils ont perdus, nous l'avons reçue.
Ces nobles restes sont extraits de leur sépulcre obscur, ces trophées
sont montrés au ciel. Le tombeau est baigné de sang, on y voit clairement
la marque de leur triomphe, les reliques inviolées se trouvent rangées à
leur place, la tête détachée des épaules. Les vieillards se rappellent
maintenant que jadis ils ont entendu les noms de ces martyrs, et lu leur
épitaphe. Cette cité avait perdu ses propres martyrs, elle qui avait ravi
des martyrs étrangers. Bien que ce soit un don de Dieu, je ne puis
cependant nier la grâce que le Seigneur Jésus a accordée aux temps de
mon épiscopat, et puisque je ne mérite pas d'être martyr moi-même, je
vous ai acquisces martyrs.
Que ces victimes triomphales accèdent au lieu où le Christ est hostie.
Mais lui sur l'autel, car il a souffert pour tous. Eux sous l'autel, car ils
ont été rachetés par sa souffrance. Je m'étais réservé cet emplacement;
car il est digne que le pontife repose là où il offrait le sacrifice; mais je
cède à ces victimes sacrées le côté droit; cette place d'honneur était due
7.
à des martyrs Ensevelissons donc ces saints restes, portons-les dans un
monument digne d'eux, célébrons la journée entière par une prière
assidue.

Le peuple réclama à grands cris qu'on reportât au dimanche


l'ensevelissement des martyrs; mais j'obtins finalement qu'on le
ferait le lendemain. Le lendemain, voici le deuxième sermon que
je fis au peuple.
Ambroise reprend son texte Dies diei eructat verbum pour
l'appliquer aux prières ininterrompues qui ont eu lieu jour et
nuit. Il invoque ensuite le témoignage d'un aveugle guéri, et des
démons eux-mêmes qui confessent être chassés par la vertu des

mis ariens. Il termine ainsi


« On a satisfait à votre demande :
martyrs, pour défendre l'authenticité de ceux-ci contre ses enne-
:
nous avons différé à ce
jour l'ensevelissement des reliques qui devait avoir lieu hier. »

7. Effectivement, en 1864, on a trouvé les deux loculi sous l'autel de


Sant'Ambrogio maggiore : l'un, plus grand, celui des deux martyrs,
du côté nord, c'est-à-dire à droite par rapport à celui qui célèbre face
au peuple; l'autre, plus étroit, à gauche, dans lequel le corps du
saint évêque a reposé jusqu'au 9e siècle. Voir pour plus de détails
A. PAREDI, S. Ambrogio ela sua età, 2e éd., Milano, Hoepli, 1960,
pp. 350, 358, 526, 528, 548.
Les rites de la dédicace en Gaule

Les saintes vigiles près des reliques des martyrs, leur triomphale trans-
lation dans la nouvelle basilique, leur déposition sous l'autel, tous ces rites
de la dédicace que décrit saint Ambroise à la fin du 4e siècle n'étaient pas
célébrés uniquement dans l'Église milanaise. Grégoire de Tours ~(t 594)
fait allusion à plusieurs reprises à la procession des reliques, qui marquait
également en Gaule la dédicace d'un nouveau lieu de culte. C'est ainsi
qu'il raconte comment l'évêque Namatius de Clermont (-¡- vers 460)
accueillit les reliques des saints Vital et Agricol, que l'on apportait de
Bologne, et les déposa dans la basilique qu'il consacra en leur honneur
(dédicace que le martyrologe hiéronymien commémore au 14 mai). Gré-
goire de Tours rapporte également comment il célébra lui-même la dédi-
cace de son oratoire privé, en y déposant les reliques de son prédéces-
seur saint Euphrone ~(t 573) avec celles de saint Saturnin et de saint
:
Martin. Les deux récits ne manquent pas de couleur. Le second présente
par ailleurs un double intérêt il nous montre la transformation en lieu
de culte d'une pièce domestique et il atteste qu'au 6e siècle on ajoutait
déjà volontiers les reliques des confesseurs à celles des martyrs.
La dédicace de la basilique des saints Vital et Agricol à Clermont

LA DÉDICACE DE UASIIJQUE DES SAINTS VITAL


LA
ET AGRICOL A CLERMONT

N AMATIUS, évêque de Clermont, demanda dévotement à installer les

:
reliques de ces martyrs dans l'église que lui-même avait cons-
truite et il envoya là-bas un prêtre qui, partant avec la grâce de
Dieu, rapporta ce qu'il avait demandé. Sur le chemin de retour, avec
ses compagnons, ils firent étape à cinq milles de Clermont, et ils en-
voient des émissaires à l'évêque, pour qu'il daigne leur ordonner ce
qu'ils doivent faire.
Le matin venu, l'évêque, qui avait alerté les citoyens, s'avance très
dévotement à la rencontre des saintes reliques avec les cierges et les

:
croix. Et comme le prêtre lui offrait de regarder les saintes reliques, s'il
le voulait, il dit « Je préfère les croire que les voir; ainsi lisons-nous
dans les saintes Écritures que le Seigneur lui-même juge bienheureux
ceux qui ont cru en lui sans l'avoir vu » (Jean, 20, 29).
L'évêque ayant ainsi manifesté sa foi, Dieu glorifie ses saints par un
miracle. Car, comme ils approchaient, le ciel s'obscurcit subitement,
et voici qu'une pluie noire tomba sur eux; et cette pluie était si abon-
dante qu'on aurait cru les routes changées en fleuves. Cependant, autour
des saintes reliques, sur l'espace d'un bon arpent, on ne vit pas tom-
ber une seule goutte. Et comme ils avançaient, la pluie les suivait de
loin, comme pour leur rendre hommage, enveloppant la foule, mais ne
touchant pas les porteurs de reliques.
En voyant cela le pontife rendit gloire à Dieu qui, par égard pour
sa foi, daigna opérer de si grandes choses pour la gloire des saints. Et
devant les citoyens rassemblés avec beaucoup de joie et de dévotion, il
consacra l'église sainte honorée par ces reliques.
(A la gloiredes Martyrs, 44; P. L., 71, col. 746.)

LA DÉDICACE DE SAINT EUPHRONE A TOURS

A u sujet. de notre oratoire, dans lequel ont été installées les reliques
de saint Saturnin martyr et de l'évêque Martin avec le confesseur

:
Illidius et d'autres saints, je raconterai volontiers quelque chose
pour l'instruction des fidèles comment la puissance de saint Martin se
manifesta, si bien qu'apparut à beaucoup ce terrible globe de feu qui
jadis s'était élevé au-dessus de lui pendant qu'il célébrait la messe,
jaillissant au sommet de sa tête, mais visible à peu de spectateurs.
Mon esprit, inspiré par l'instinct de la piété divine, eut l'idée de con-
sacrer fidèlement pour en faire un oratoire la cellule gracieuse que saint
Euphrone avait possédée comme appartement. Lorsque celle-ci eut été
aménagée avec diligence, et l'autel placé comme de coutume, nous
passâmes une nuit en vigiles à la sainte basilique et le matin, venant à
la cellule, nous consacrâmes l'autel que nous avions érigé. Nous retour-
nâmes à la basilique et solennellement, précédés par les croix et les
cierges brillants, nous apportâmes les reliques de ce saint avec celles des
martyrs Saturnin et Julien, et aussi du bienheureux Illidius. Il y avait un
groupe considérable de prêtres et de diacres en vêtements blancs, et la
classe illustre des fonctionnaires civils, et encore un grand rassemblement
du peuple de la classe inférieure. En portant hautement les saintes
reliques dans des étoffes et des cassettes décorées, nous parvînmes à la
porte de l'oratoire. Tandis que nous entrions, tout à coup un éclair
terrible remplit cette cellule, au point que les spectateurs, effrayés et
éblouis, fermaient les yeux. C'était comme un éclair qui parcourait la
cellule, nous inspirant une grande crainte; personne ne pouvait savoir ce
que c'était et tous, abattus par la frayeur, gisaient sur le sol. Alors je
leur dit : « Ne craignez pas. C'est un miracle des saints que vous voyez;
et surtout, rappelez-vous le livre de la vie de saint Martin, et souvenez-

:
vous comment, tandis qu'il prononçait les paroles sacrées, un globe de
feu sortit de sa tête et parut s'élever jusqu'au ciel par conséquent, ne
soyez pas effrayés, mais croyez qu'avec les saintes reliques il nous a
visités. » Alors, ayant chassé la crainte, nous glorifiâmes Dieu, en disant
Béni celui qui vient au nom du Seigneur, le Seigneur Dieu, et il nous
:
illumine (Ps. 117, 26-27). Mais jadis ce miracle fut vu d'un petit nombre,
aujourd'hui il apparut à tous les peuples; jadis il fut le signe d'un
mystère, aujourd'hui il est un débordement de grâce; jadis il fut caché
pour éviter la vantardise, aujourd'hui il est montré à tous en vue de la
gloire; alors, selon la coutume, les mystères accomplis avec foi sont
proclamés à Dieu, ici, dans l'inauguration de cet oratoire, est consacré
par la glorification des saintes reliques ce qui peut servir à la louange de
Dieu. Il faut donc qu'avec la foi qui convient, nous demandions et priions
que visite ce peuple, celui qui plusieurs fois, par ce feu sacré, a élevé
vers le ciel les aspirations de la prière. Ce feu, soit lorsque j'ai raconté
qu'il (sortait du) moine en prière, soit lorsque j'ai rapporté que l'abbé
Brachio l'a vu sortir des reliques des saints, je pense que c'est un feu
mystique, parce qu'il ne brûle pas, mais illumine; et ce n'est pas sans
une faveur de la majesté divine qu'il peut soit se montrer, soit apparaître
à quelques-uns (seulement).

(A la gloire des Confesseurs. 20; P. L., 71, col. 812.)


Changements dans le
Ritus servandus in celebrationemissae

L promulgation du Codex rubricarum de 1960 a entraîné des


A
modifications nombreuses dans la rédaction des rubriques
éparses dans le missel, le bréviaire et le graduel. C'est
pourquoi la Congrégation des Rites ne pouvait se contenter des
Ordinationes générales adressées aux éditeurs et promulguées le
26 juillet 1960 : dans ces mêmes Ordinationes, elle leur annonçait
l'envoi ultérieur du libellé des rubriques spéciales qu'ils devraient
insérer dans des nouvelles éditions. De fait, c'est en plusieurs
fois que les éditeurs ont reçu des listes de corrections à apporter
au texte reçu. Ces envois successifs ont parfois manifesté l'hésita-
tion, aisément compréhensible, de la Congrégation des Rites
devant certains problèmes. On a même pu constater des incohé-
rences sérieuses, notamment dans les Variationes in cantu : il
semble qu'on ait d'abord oublié de corriger, en tête du Graduale,
le De ritibus servandis in cantu missae et que ces corrections
aient été ajoutées en hâte au dernier moment, avant de publier
le fascicule; c'est pourquoi elles sont d'ailleurs trop insuffisantes,
comme l'a bien noté aussitôt M. Jounel dans les Notes de pasto-
rale liturgique1; j'aurais même été beaucoup plus sévère que lui
dans l'appréciation de ces Variationes, car les titres donnés aux

:
groupes de pièces du Kyriale dans l'édition Vaticane ne corres-
pondaient à aucune tradition solide ilfallait donc les supprimer,
non les corriger, de même qu'on aurait dû faire disparaître les
préfaces solemniores, si décadentes.
Les Ordinationes concernant l'édition du missel romain appor-
tent des Variationes jusque dans le texte du Ritus servandus in
celebratione missae. Ce sont ces dernières qui nous retiendront

successives :
actuellement. Mais elles ont fait l'objet de deux rédactions
la première, communiquée au mois d'octobre 1961,
a été décrite aussitôt dans diverses revues, notamment Paroisse

i. N. P. L., 35, 1961, pp. 43-44.


et liturgie2, Liturgia3. La seconde, envoyée en décembre et
publiée partiellement par C. Braga dans Ephemerides litur-
gicae4, comporte des changements par rapport à la première.

:
L'un d'entre d'eux est bien significatif et vient combler le vœu
que nousexprimions dans La Maison-Dieu, 63 bis il s'agit de la
place et de l'attitude du célébrant pendant l'épître de la messe
solennelle ou chantée. Le Codex rubricarum, au n° 523, ne
prévoyait pas que le célébrant pût s'asseoir à ce moment-là; il
l'excluait même, comme le montre le n° 524. En cela cependant,
il ne faisait que reproduire le texte des anciennes Rubricae gene-
rales Missalis, tit. 17, n. 6-7. Était-ce distraction? Car il était
normal, selon les anciennes rubriques, que le célébrant demeurât
à l'autel, puisqu'il devait lire privément à voix basse dans son
missel le texte sans se soucier de la proclamation qu'en faisait
le ministre auquel il tournait même le dos (comme d'ailleurs
celui-ci, en vertu d'une mauvaise traduction de la rubrique,
tournait souvent le dos au clergé et aux fidèles à qui il était censé
faire entendre la lecture). Un changement considérable a été
introduit par le n° 473 du Codex rubricarum qui étend à toute
l'année l'heureuse disposition que l'on avait tant appréciée pen-
dant la semaine sainte depuis la réforme de 1956 : désormais le
célébrant ne lira plus en aparté à l'autel les leçons et l'épître que
proclament à la messe solennelle ou chantée les ministres com-
pétents. Heureusement déchargé de sa lecture privée, il faut que
le célébrant écoute la lecture faire par le ministre, donc qu'il
soit tourné plutôt vers lui et, puisque toute l'assemblée est
assise, qu'il soit lui-même assis à son siège selon le magnifique
»
principe « sedentes auscultant inscrit dans la Vigile pascale dès
1
951. Ajoutons que les anciennes rubriques du samedi saint,
prévoyant que le chant des leçons était plus long que leur lecture
à voix basse, envoyaient le prêtre, par le plus court chemin,
s'asseoir à la banquette avec ses ministres dès qu'il avait terminé
cette lecture. Eh bien, non seulement cette solution a été ignorée
dans la rédaction du n° 523 du Codex rubricarum, mais elle était
exclue nommément par divers commentateurs dans leurs articles

modifiant le Ritus servandus, fixaient ainsi le cérémonial


célébrant ayant terminé la collecte demeure debout à l'autel
:
ou leurs réponses à des dubia5. Bien plus, lors de leur premier
envoi aux éditeurs, les Ordinationes circa editiones missalis,
le

2. V. VERRAES, Chronique de droit liturgique, dans Paroisse et


liturgie, 43, 1961, p. 605.
3. Liturgia, 16, 1961, pp. 349-354.
4. Ephemerides liturgicae, 75, 1961, pp. 427-439.
5. V. VERRAES, dans- Paroisse et liturgie, 43, 1961, pp. 133-134,
276-277, 440, 605; Ephemerides liturgicae, 75, 1961, pp. 255-256.
auprès du livre et tourné vers celui-ci, « versus librum6 ». Quelle
tentation de se remettre à lire comme par le passé!
Le ridicule de cette précision montre combien il faudra de
temps aux rubricistes pour s'adapter à la nouvelle mentalité créée
par les réformes de Pie XII et de Jean XXIII. Heureusement,
l'anomalie a cessé dans le second texte des Ordinationes, dont
voici la rubrique (n. 681, Ritus VI, t,)
In missa solemni, subdiaconus circa finem ultimac orationis
accipit ambabus manibus librum epistolarum, deferens illud supra
pectus et, facta altari genuflexione in medio, vadit ad partem epis-
tolae contra altare, et cantat epistolam quam celebrans sedens
auscultat. Epistola cantata, celebrans redit ad librum, et suodiaco-
nus facit iterum genuflexionem in medio ac vadit ad celebrantem
et genuflectens osculatur ejus manum, etc.

Nous nous permettrons trois remarques en guise de commen-


taire de cette rubrique. C'est par le plus court chemin et sans
génuflexion (breviori) que le célébrant va du livre à la banquette
comme il le fait éventuellement pour le Kyrie ou pour le Graduel,
comme il le faisait également dans l'ancien rite du samedi saint.
Mais c'est aussi par le plus court chemin qu'il reviendra à l'autel
et au livre à la fin de l'épître, comme cela se pratiquait jadis le
samedi saint et à la différence des autres moments de la messe.
Il y arrivera donc avant le sous-diacre qu'il doit accueillir et
bénir; après quoi il lit - -
hélas les pièces chantées qui suivent
l'épître. Aux messes des morts, il sera plus rationnel que le
:
célébrant, n'ayant pas à bénir le sous-diacre, ne revienne pas au
livre aussitôt il suffit qu'il ait, vers la fin des chants, le temps
nécessaire pour lire ceux-ci avant l'évangile.
Nos deux autres remarques visent la partie du texte qui n'a pas
été modifiée. Lorsqu'on dit que le sous-diacre « accipit librum »,
cela veut dire qu'il va le prendre lui-même sur la crédence ou
dans l'armoire où il se trouvait; d'où vient donc l'habitude de
faire remettre le livre au ministre par un quelconque clerc ou

:
cérémoniaire, avec force saluts et cérémonies? Outre la blâmable
complication que cela entraîne, deux éléments de symbolisme
liturgique en sont compromis car les ministres ne doivent pas à
leur tour être servis au risque d'être confondus avec l'unique
célébrant, et le livre mérite le même respect que sa lecture.
Mais j'aurais trop de développements à faire sur ce sujet. Lors-
que enfin on dit que le sous-diacre « vadit ad partem epistolae
contra altare », cette formule s'entend tout autrement qu'elle ne
sonne à nos oreilles, puisque, plus loin, pour l'évangile, le diacre

6. Cité par V. VERRAES, op. cit., p. 605.


va « ad locum evangelii contra altare versus populum » :
cela sup-
pose donc que « contra altare » puisse être en même temps « ver-
sus populum », ce qui n'est réalisable, me semble-t-il, que si le
célébrant est derrière l'autel et face au peuple comme dans les
basiliques romaines et bon nombre d'églises du moyen âge
méridional7.
Relevons maintenant dans les Variationes du Ritus servandus

dont la clarté lèvera désormais toute difficulté :


une précision, qui ne modifie certes pas la loi ancienne, mais
il s'agit de
l'encensement de l'autel. Le tableau qui est placé en tête du
missel et schématise les lancées (ductus) de l'encensoir décrira la
façon dont on doit procéder lorsqu'on peut faire le tour complet
de l'autel, soit que celui-ci soit face au peuple, soit qu'il soit
simplement dégagé sur toutes ses faces (ordo incensationis altaris
quod commode circuiri potest) : on s'apercevra que c'était la
seule façon vraiment normale d'encenser, et qu'elle avait été
toute disloquée lorsque, les autels étant fixés au mur, il n'avait
plus été possible de tourner autour; et même, dans bien des cas,
la chose aurait été matériellement possible, mais le célébrant ne
se serait pas hasardé dans cette région scabreuse de débarras
hétéroclites et de poussière qui déshonorait la partie invisible de
l'abside! Un décret de la Congrégation des Rites, n. 3413, du
3 février 1877, approuvait cependant les cérémoniaires de la
cathédrale de Grenade d'avoir conservé l'usage du tour complet
de l'autel. Le rite lyonnais y est également demeuré toujours
fidèle, et on y est revenu à notre époque, lorsqu'on a recommencé
de construire des autels dégagés et accessibles sur toutes leurs
faces.
Nous ne pouvons entrer dans le détail des autres changements
apportés par les Variationes aux rites de la célébration. La plupart
sont de peu d'importance, comme la suppression de l'encense-
ment du célébrant à la fin de l'évangile à la messe chantée sans
ministres. Un bon nombre répondent à une volonté de simpli-
et
fication méritent de ce fait notre reconnaissance. C'est ainsi
que l'on a supprimé des rubriques qui étaient tombées en désué-
tude, comme la prescription de revêtir le surplis avant de pren-
dre les ornements, celle qui concerne le troisième cierge ou les
ablutions à présenter aux fidèles qui communient. Le port de
la barette, pour le célébrant, cesse d'être obligatoire (il faut con-
venir que c'est une coiffure fort disgracieuse, surtout telle qu'elle
a évolué depuis deux siècles). Les prières de la préparation et
celles de l'action de grâces sont présentées comme expressément
facultatives, de façon à dirimer toute controverse à l'avenir.

7. Cf. N. P. L., 6, 1955, p. 15.


:
On a supprimé la distinction entre les inclinations à faire vers
le livre et celles que l'on faisait vers la croix on dit désormais
« caput inclinans » sans aucune précision; cela supprime les
mouvements assez disgracieux que l'on voyait accomplir au
nicantes de Noël); cela supprime aussi une anomalie :
célébrant au cours de certaines prières (par exemple, le Commu-
au cours
du chant de l'évangile, le célébrant, qui était tourné vers le
diacre proclamant la lecture, se détournait vers l'autel pour
saluer chaque fois qu'il entendait le nom de Jésus; ce manège
était d'ailleurs accentué par les cérémoniaires qui se tournaient
eux-mêmes vers le célébrant afin de l'inviter à saluer! Pour
l'homme d'aujourd'hui, le sérieux et l'attention avec lesquels
doit s'écouter la Parole du Christ ne souffrent plus de tels diver-
tissements.

devient moins rigide :


Le geste des mains étendues pour les prières sacerdotales
« manus ante pectus extendit, digi-

sions anciennes:
tis simul iunctis », est-il dit simplement, au lieu des préci-
« ita ut palma unius manus respiciat alteram,
et digitis simul junctis, quorum summitas humerorum altitudi-
nem, distantiamque non excedat »; le célébrant n'est pas un
robot, les gestes qu'il fait sont des gestes humains, naturels,
admettant la part de personnalité qui ne nuit pas au hiératisme.
Enfin, pour la distribution de la communion, que les hosties
consacrées soient sur le corporal, dans un ciboire ou dans le
tabernacle, il n'y aura jamais plus d'une génuflexion à faire
avant Ecce agnus Dei ni plus d'une également si l'on rapporte
des hosties à l'autel après avoir communié les fidèles.
Je trouve moins heureuse la rubrique du Flectamus genua :
« manibus super altare extensis, ut se ipsum sustineat, utrum-
que genu flectit ac, - junctis manibus, per aliquod temporis spa.
tium in silentio orat; deinde dicit : Levate, surgit et, manibus
extensis, dicit orationem ». Je ne vois pas bien pourquoi, une
fois à genoux, on change la position des mains, d'autant que les

à genoux contre l'autel :


mains jointes sont une attitude peu naturelle pour le célébrant
il eût été mieux de laisser les deux
mains posées sur l'autel; d'autre part, l'ancienne rubrique, pré-

:
voyant que celui qui dit Levate se lève d'abord, était aussi plus
naturelle on ne donne pas un ordre en demeurant à genoux.
Apporter des corrections au Ritus était sans doute utile, voire
nécessaire, mais c'était également très dangereux. Nous ne pou-

?
vieilles
:
vons que répéter la question que nous posions dans La Maison-
Dieu, 63 bis peut-on mettre du vin nouveau dans des outres trop
A partir du moment où l'on fait quelques retouches,
l'attention est attirée sur une foule d'anomalies que le progrès
de la vie liturgique a fait découvrir depuis une vingtaine d'an-
nées dans ces textes dont l'auteur n'eût jamais imaginé qu'ils

lors on se demandera :
traverseraient trois siècles sans être remaniés et qu'ils dussent être
interprétés avec la rigidité qu'y ont mise les rubricistes. Dès
pourquoi avoir fait telle correction et
n'avoir pas accompli telle autre? A quoi il faut apporter une
double réponse. D'une part, la méthode qui consiste à procéder
par réformes progressives est la meilleure actuellement; elle
évite les trop grands bouleversements d'habitudes chez les prê-
tres et chez les fidèles; elle permet aux esprits de s'ouvrir à une
:
mentalité différente, ce qui ne peut se faire sans un certain
délai les nouvelles rubriques de 1960 n'ont pu être accueillies et
comprises que parce qu'elles avaient été précédées par le décret
de 1955, et à leur tour elles permettront de désirer et compren-

:
dre d'autres réformes ultérieures. Mais d'autre part, le Ritus ne
pourra être indéfiniment corrigé la méthode avec laquelle il a
été conçu était mauvaise dès le départ; en effet, ce n'est pas de
la messe « privée » qu'il fallait partir,- celle que célèbre un
prêtre seul avec son ministre dans l'alcôve d'une chapelle laté-
rale, - mais de la messe épiscopale et même papale, dont la
messe solennelle et la messe lue ne sauraient être que des réduc-
tions : c'est une chose que Mme Boulet a magnifiquement mon-
trée dans l'Eglise en prière8. Ainsi, faudrait-il partir d'une ré-
forme du Caeremoniale episcoporum, dont la réforme du Ritus
serait la suite logique.
Cependant, après les retouches qui viennent d'être faites, le
Ritus demeure encore en désaccord sur bien des points avec la
législation en vigueur. M. Jounel a noté très justement que, en
le lisant, on ne pourrait soupçonner l'existence de l'Instruction
du 3 septembre 1958, canonisée cependant par le Codex rubri-
carum. Jem'associe pleinement à ses critiques9. Sans doute,
cela vient de ce que, le Ritus ignorant le cas d'une messe lue
à laquelle un peuple serait présent, il eût fallu en ajouter la des-
cription complète. Mais le mal est plus profond, puisqu'on
affirme toujours nécessaire l'usage de la sonnette (campanula)
pour avertir les fidèles do certains moments de la célébration
cela suppose qu'ils ont de la peine à voir et entendre ce qui se
:
passe à l'autel et qu'on en prend son parti. Or, la sonnette, ins-
trument assez ridicule et de surcroît fort malmené par les enfants
de chœur, n'était à l'origine qu'un substitut de la sonnerie des
cloches au clocher, comme en témoigne l'usage, heureusement
maintenu, des Cisterciens et de beaucoup d'églises pyrénéennes.
Dans une célébration vraiment communautaire, la sonnette de-

L'Église en prière, Desclée, 1961.


8.
9.N.P.L.,35, - 1961,pp.44-45. v ,..PD. 306-308.
vrait être considérée comme aussi inutile que gênante, - c'est
pourquoi elle était exclue de la messe pontificale, où fâcheuse-
ment la Congrégation des Rites l'a prescrite il y a quelques
années! Ce n'est d'ailleurs pas uniquement avec la lettre et l'es-

:
prit de l'Instruction du 3 septembre que le Ritus demeure sou-
vent en désaccord on a oublié de corriger VI, 6 : « si autem sit

: :
praedicandum. », qui ne correspond guère au n. 474 du Codex
rubricarum. Plus grave on a refait X, 6, en laissant subsister
le si blâmable début « Si qui sunt communicandi in missa »
l'hypothèse était bien nécessaire au i68 siècle, mais après saint
Pie X, après Mediator Dei et Sacram communionem, après l'Ins-
truction du 3 septembre 1958 (n. 22 c) et le n. 502 du Codex
rubricarum, c'est l'hypothèse contraire qui devrait être formu-
lée : si forte nemo sit qui communicet.
Toutes ces remarques font souhaiter que la réforme des rubri-
ques, si heureusement entreprises par Pie XII et continuée avec
ténacité sous le pontificat de Jean XXIII, soit poursuivie encore
pendant longtemps, à la lumière de la tradition que les siècles
nous ont léguée et de l'expérience des assemblées vivantes d'au-
jourd'hui. En attendant, puissent les prêtres d'aujourd'hui
apporter à l'observance du Ritus le même soin religieux que leurs
devanciers, qui en relisaient le texte, chaque année, durant leur
retraite sacerdotale.

AIMÉ-GEORGES MARTIMORT.
Une chaire Dom Lambert Beauduin
à l'Institut supérieur de Liturgie de Paris

L'Institut supérieur de Liturgie de Paris vient d'être offi-


ciellement approuvé par le Saint-Siège. L'occasion a paru
bonne aux fondateurs
l'Abbaye du Mont César
-- le Centre de Pastorale Liturgique et
pour ériger une chaire sous le
nom de Dom Lambert Beauduin. Les liens personnels qui les
rattachent au grand promoteur du mouvement liturgique les
autorisent à se considérer comme ses héritiers spirituels. En
fondant l'Institut de Paris en 1956, ils n'ont fait d'ailleurs
que reprendre un vieux projet de Dom Beauduin, déjà ébau-
ché en 1911.
Ils souhaitent donc dédier à sa mémoire une chaire de
cours spéciaux, qui serait occupéesuccessivement par les meil-
leurs liturgistes, de quelque nationalité qu'ilssoient. Cette
initiative ne pouvait être prise avant que l'Institut reçoive
son statut définitif. Maintenant que c'est chose faite, le direc-
teur et les membres du Conseil se permettent de solliciter
l'aide des amis, disciples et admirateurs de Dom Lambert
Beauduin pour mener à bien cette entreprise et rassembler les
fonds qui assureront la permanence de cette chaire. Ils pro-
fitentégalement de l'occasion pour attirer l'attention de tous
ceux qui s'intéressent au mouvement liturgique sur l'Institut
Supérieur de liturgie qui a assumé depuis 1956 la formation
des futurs professeurs de liturgie des séminaires.

:
Pour le Conseil
Compte-chèque :
B. BOTTE, O. S. B., directeur.

Paris 12792.45
Centre de Pastorale Liturgique,
11, rue Perronet, Neuilly-sur-Seine
e
IX Semaine d'étude
pour professeurs de liturgie
16-21 juillet 1962, abbaye du Mont César (Louvain)

Dom B.
Programme

:
BOTTE
: Les liturgies non romaines

Liturgies locales et problème de l'adap-


tation dans l'antiquité (2 leçons).
- Le rite éthiopien (2 leçons).
Mgr BORELLA : Le rite ambrosien (4 leçons).
Dom RENOUX : Le rite arménien (3 leçons).
R. P. GY : Lectures de la messe et liturgie comparée
(3 leçons).
M. JOUNEL : Les récentes découvertes archéologiques
et leur importance pour l'histoire liturgique (2 le-
çons)

Des carrefours se tiendront, sous la direction du


R. P. Gy et de M. Jounel, sur l'usage du manuel dans
les cours de liturgie et sur les récentes publications de
textes liturgiques.
Les cours commenceront le lundi 16 à 9 h 30 et se
termineront le samedi 21 à Il h 30. Les participants

: :
seront attendus dès le dimanche 15 dans l'après-midi.
Frais d'inscription aux cours 100 fr. belges.
Frais de séjour à l'abbaye 500 fr. belges.
-
Pour les inscriptions, s'adresser à Dom B. BOTTE,
abbaye du Mont César, Louvain.
LITURGIE ET VIE SPIRITUELLE
4e Congrès du Centre de Pastorale Liturgique
Angers, 10-13 juillet 1962

Mardi 10 juillet
Nous avons tous besoin, en 1962, d'une vie spirituelle.
Conférence par le R. P. J. LAPLACE, S. j.
Liturgie et vie spirituelle des laïcs.
Témoignages présentés par M. le chanoine J. HÉON, de
l'aumônerie nationale de l'A.C.I.
La participation à la liturgie, source de la vie spirituelle.
Conférence par S. Exc. Mgr P. VEUILLOT, archevêque
coadjuteur de Paris.

Mercredi 11 juillet
Peut-on prier dans la célébration liturgique?
Conférence par S. Exc. Mgr J. GUYOT, évêque de Cou-
tances.
Liturgie et viespirituelle dans les Églises d'Orient.
Communication par le R. P. M.-J. LE GUILLOU, o.p., du
«
Centre Istina ».
La liturgie et les dévotions.
Communication par le R. P. A.-M. ROGUET, o. p.
Liturgie et prière personnelle.
Conférence par le R. P. LUCIEN, o. c. d.
Jeudi 12 juillet

Liturgie et combat spirituel.


Conférence par le R. P. A.-M. BESNARD, o. p., maître des
novices.
Liturgie et vie spirituelle dans l'éducation religieuse.
Communication par M. l'abbé M. SAUDREAU, directeur
diocésain de l'enseignement religieux de Paris.
Liturgie et engagement.
Conférence par FÉLIX LACAMBRE, secrétaire général DE
l'A.C.O.

,
Vendredi 13 juillet

Les rythmes de la prière du chrétien.


Conférence par le R. P. J. GELINEAU, s. j.
Liturgie et vie spirituelle chez les adolescents.
Communication par le Fr. DIDIER, F.E.C., chargé de Tra-
vaux pratiques de l'Institut catéchétique.
Liturgie de la terre et du ciel.
Conférence par le Rme P. Dom DE SAINTE-MARIE, Abbé
de Clervaux (Luxembourg).

Selon les jours : conférences par séries (prêtres, reli-


gieuses, etc.) ou carrefours divers.
Célébrations liturgiques, psalmodie des heures de l'Office
divin.
Manifestations artistiques, expositions, hall de documentation.
:
Le Congrès est ouvert à tous prêtres, séminaristes, religieux,
religieuses, laïcs.
Demandez le bulletin-dépliant au « Congrès C.P.L., 2, rue de
l'Oisellerie, Angers (Maine-et-Loire) », en y joignant une enve-
loppe timbrée à votre adresse.
BIBLIOGRAPHIE

Dom A. VERHEUL, o.s.b., Inleiding tot de liturgie,, Ed. Patmos,


Anvers, 1961, in-8°, 222 pp.

Ce petit volume est le fruit de longues années passées dans


l'enseignement de la liturgie en Belgique. On ne peut le compa-
rer à la récente Introduction à la Liturgie publiée par le
C.P.L. : le souci de l'auteur est beaucoup plus exclusivement
théologique et volontiers pastoral. Ce mérite ne l'empêche pas

ment:
de recourir aux leçons de l'histoire et de se documenter sérieuse-
les considérations qu'on y lit ne sont pas de pures spé-
culations ni des anticipations pastorales oublieuses des réalités,
canoniques et autres, qui entrent en ligne de compte en ce do-

:
maine. La partie proprement théologique présente la liturgie
dans une vision très sûre de l'économie chrétienne le Christ,
puis l'Église et toute l'économie sacramentelle de celle-ci, vien-
nent tour à tour circonscrire le problème de la place de la litur-
gie dans toute cette économie. On remarque ensuite les pages
consacrées par Dom Verheul aux rapports entre liturgie et piété
populaire, entre Bible et liturgie, et finalement aux perspectives
œcuméniques du mouvement liturgique. Les bibliographies
données régulièrement tiennent compte des lecteurs, belges et
néerlandais, auxquels l'auteur s'adresse. Ils trouveront en ce
volume un bel instrument de travail et une occasion excellente de
réflexion théologique.

F. VANDENBROUCKE, o.,s.b.
Collection « UNAM SANCTAM » .h-
N°39

L'ÉPISCOPAT ET L'ÉGLISE UNIVERSELLE

ouvrage publié sous la direction de


Y. Cm.cAR, o. p., et B.-D. Dupuy, o. p.
Préface de S. Exc. Mgr A.-M. CHARUE

Collaborateurs :
L.-C. BAAS; B. BAZATOLE; R. CARPENTIER, s. j.; M. CLÉMENT;
J. COLSON; Y. CONGAR, o.p.; G. DEJAIFVE; \V. DEWAN;
B.-D. Dupuy, o.p.; S. Exc. Mgr ELCBlNGER; Fr. HOUTART;
A.-M. JAVIERRE; Archimandrite O. KERAME; J. LEClTYER; H. MA-
ROT, o.s.b.; Mgr O. PERLER; K. RAHNER, s. j.; O. ROUS-
SEAU, o.s.b.; Th. STROTMANN, o.s.b.; G. THILS; C. VOGEL.

Un volume in-8° carré de 832 pages 39NF + t. 1.

:
Depuis quelques décennies, on assiste à un important développement
a
des recherches sur l'Eglise, Corps mystique du Christ. Cerenouveau été
rendu nécessaire par les acquisitions de l'époque contemporaine retour
à la Bible et aux Pères, Action catholique, œcuménisme, distinction
plus précise des compétences propres de l'Eglise et de l'Etat. Un do-

années :
maine, cependant, demeurait à peine abordé jusqu'à ces dernières
la théologie de l'évêque. Lacune paradoxale et regrettable, si
l'on songe que les évêques sont le fondement de l'Eglise : « L'évêque
est dans l'Eglise, et l'Eglise est dans l'évêque Il (saint Cyprien).
Le présent ouvrage rassemble les contributions d'une vingtaine d'au-
teurs, choisis parmi les plus compétents, et constitue, par son enver-
gure, par sa richesse en données de tradition, par son attention à la
situation actuelle, une véritable Somme théologique sur l'évêque.
Sans chercher à être davantage qu'un instrument de travail, et sans
prétendre à faire œuvre définitive, il offre cependant la base d'infor-
mation la plus solide et la plus complète parue à ce jour.
Au moment où va s'ouvrir le prochain concile œcuménique, qui réu-
nira les évêques du mondeentier, une enquête approfondie sur la place
et le ministère des évêques dans l'Eglise universelle ne pouvait qu'inté-
resser le peuple chrétien tout entier. C'est cette enquête que ce livre
lui offre.

Derniers ouvrages parus dans la collection « Unam Sanctam » :


36. Hans KUNG : Concile et Retour à
l'unité, 186 p 9,60 NF + t. 1.
37. J.-P. TORRELL, o. p. : La théologie de
l'épiscopat au premier concile du
38.
Vatican, 336 p
Problèmes de l'autorité, 320 p.
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Collection « SOURCES CHRÉTIENNES » w.
N°82
« Textes monastiques d'Occident »
GUILLAUME DE SAINT-THIERRY
EXPOSÉ SUR LE CANTIQUE DES CANTIQUES

Texte latin, introduction et notes de J.-M. DECHANET, o.s.b.


Traduction française de M. DUMONTIER, O.C.S.O.
Un volume in-go écu de 420 pages 21,00 NF + t. 1.

Non 83-84-85
DIDYME L'AVEUGLE
SUR ZACHARIE
Texte inédit d'après un papyrus de Toura.
Introduction, texte critique, traduction et notes
de Louis DOUTRELEAU, s.j.
3 volumes in-8° écu, 1210 pages 84 NF + t.1.

n° 86
« Textes monastiquesd'Occident »
DEFENSOR DE LIGUGÉ
LIVRE D'ÉTINCELLES
TOME II
Texte latin. Traduction et notes de H.-M. ROCHAIS
Un volume in-8* écu de 352 pages 15,00 NF + t. 1.

n° 87
ORIGÊNE
HOMÉLIESSURSAINT LUC

,. Introduction, traduction et notes par H. CROUZEL, S. j.


F. FOURNIER, s. j.; P. PÉRICHON, s. j.
Un volume in-8° écu de 566 pages

LES ÉDITIONS DUCERF


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CATÉCHISME
BIBLIQUE
DES ENFANTS
Le Catéchismebiblique des enfants qui paraît aujourd'hui,
traduction du livre paru aux Éditions Herder, constitue l'année
préparatoire au Grand Catéchisme (Catéchisme biblique).
Il est plus simple, plus court, que le Catéchisme biblique et
s'adresse à des enfants plus jeunes. Il présente néanmoins toute
la matière du catéchisme, et s'il le fait d'une manière plus suc-
cincte, il n'en est pas moins complet. Il accorde plus de place
à la participation au sacrement de l'eucharistie, les récits bibli-
ques et évangéliques sont plus nombreux. Il n'est donc nulle-
ment un simple résumé du Catéchisme biblique, bien qu'il en
soit une préparation et que le passage de l'un à l'autre doive
se faire tout naturellement.
Par sa valeur, par son adaptation aux jeunes enfants, ce
Catéchisme biblique des enfants est appelé à trouver auprès du
public français un succès équivalent à celui déjà obtenu par le
Catéchismebiblique.

Un volume de 224 pages 4,95 NF+ t.).


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Manuel du Catéchisme biblique,
tome 12,00 NF+t.l.
tome 1/2 12,60NF4-t.l.
tome IIIII
H. FISCHER :Histoire et significa-
tion du Catéchisme biblique,
15,00 NF+t.l.

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LES ÉDITIONS DU CERF HERDER
PARIS FRIBOURG-EN-BRISGAU
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LES MOINES
D'ORIENT
TOME III
1er fascicule

Les moines de Palestine

4 hors-texte et 2 cartes.
Un volume in-8° raisin de 158 pages avec
16,50 NF +
Parmi les hagiographes du Ve et du VIe siècle, Cyrille de Scytho-
t. 1.

polis est sans doute le plus sérieux, si sérieux que l'un des meilleurs
historiens de notre temps, Eduard Schwartz, a pris la peine, malgré
son énorme travail sur les Conciles, d'éditer lui-même l'original grec
des Vies des Moines Palestiniens. On trouvera la traduction française
de ce texte dans les trois fascicules de Moines d'Orient, t. III.
La traduction est ici précédée d'une introduction sur l'auteur,
Cyrille, et les sources qu'il a utilisées, de notes sur sa langue et son
style, d'une chronologie complète de toutes les vies, d'une brève
introduction géographique due au R. P. Du Buit. Des cartes et des
photographies illustrent le volume. Des index détaillés le complètent.

Précédents volumes :
Les Moines d'Orient. Tome Culture ou
? 1
:
sainteté Introduction au monachisme orien-
tal, 98 pages et 2 hors-texte 9 NF + t. 1.

Les Moines d'Orient. Tome II : Callinicus :


Vie d'Hypatios. Anonyme : Vie de Daniel le
Stylite, 178 pages et 5 hors-texte 18 NF + t. 1.

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LES ŒUVRES DE PHILON D'ALEXANDRIE
•J Traduites en français sous la direction de J»
JI R. ARNALDEZ, C. MONDÉSERT, J. POUILLOUX iJ
i[ Tome
V
JI

l'ome 26.
2. Legum allegoriae, par Claude
pages24,60NF+
MONDÉSERT, s.
320
j. Un volume de

De virtutibus, par R. ARNALDEZ,


t.1. "J

ij
!

', P. DELOBRE,M.-R. SERVEL, JI


JI A.-M. VERILHAC. Un volume de I'•
jj
ij 160 pages 15,00 NF + t. 1.

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LES EDITIONS DU CERF
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OLIVIER A. RABUT

LA VÉRITÉ DE L'ACTION
Un volume in-8° écu de pages 9 NP+ t.
184 1.

Cet ouvrage s'adresse autant aux croyants qu'aux incroyants.


Approfondissant les thèmes modernes de la sincérité et de l'authenti-
cité, qu'il préfère désigner par la formule la vérité de l'action, ou la
vérité de l'existence, l'auteur propose un cheminement de pensée qui,
dans un souci d'extrême objectivité, manifeste la nature de l'action et
ses exigences de dépassement.
Ce livre rendra service aux croyants en les amenant à se poser des
questions sur des attitudes spirituelles qui pouvaient sembler aller de
soi, mais réciproquement il pourra aider les incroyants en leur mon-
trant tout ce qu'exige une action humaine pour être vraie.

Du même auteur aux Editions du Cerf :

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.,.
Dialogue avec Teilhard de Chardin.. 6,30 NF + t. 1.

Collection « EPIPHANIE » "01"01"'-"


JOSEPH RATZINGER
FRÈRES DANS LE CHRIST
L'esprit de la fraternité chrétienne
traduit de l'allemand par
Dom H.-M. ROCHAIS, o.s.b., et Dom J. EVRARD, o.s.b.
Un volume in-8° couronne de 120 pages 5,70 NF + t.1.
Dans cette étude pertinente et fort suggestive sur la notion de
'<
»
frère dans le christianisme, l'auteur montre que cette idée de fra-
ternité existait déjà dans le monde grec, et surtout dans l'Ancien Tes-
tament, mais qu'elle n'atteint son plein développement que dans le
message du Christ.
Sur l'Eucharistie qui est par excellence le sacrement fraternel, sur
la communauté paroissiale qui devrait être un exemple de fraternité
vécue, sur la mission considérée comme une forme de service fraternel,
sur le rapprochement des chrétiens séparés et l'effort œcuménique
qu'il requiert, on trouvera dans ce livre des réflexions profondes,
ouvrant souvent des perspectives nouvelles et rarement envisagées
avec une telle lucidité.

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eee Collection TOUT LE MONDE EN PARLE "eee
XAVIER GRALL

LA GÉNÉRATION
DU DJEBEL
Un volume de 128 pages
4,50 NF + t. 1.
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Voici la génération sérieuse, réaliste, courageuse du djebel, voici la
génération qui a fait la guerre d'Algérie et qui demain, qu'on le
veuille ou non, fera la France.

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A l'heure où le contingent se trouve pris entre le plastic des uns et
la propagande des autres, à l'heure où il est la clé et le témoin et
la victime d'un nationalisme qui se perd et d'un autre qui se crée,
nous avons jugé bon de publier l'enquête faite par un grand magazine
français en dehors de toute querelle politique.
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Collection RENCONTRES
En préparation :
MORALE
ET
GUERRE NUCLÉAIRE
Traduit de l'américain

Le sujet est actuel et risque, hélas, de le rester. Pour le traiter ici,


on s'est livré non à une rhétorique sentimentale, mais à une analyse
faite par les plus diverses compétences intéressées, telles que
J.-C. Murray, professeur de théologie; G.-C. Zahn, professeur de
sociologie; W.-V. O'Brien, professeur de science politique; W.-J. Na-
gie, directeur de l'Organisation de recherches de sciences sociales;
T.-E. Murray, membre de la Commission de l'énergie atomique, etc.,
ce qui n'exclut pas ici et là l'éloquence ni la passion. La politique,
l'hisfoire, le droit, la stratégie, la casuistique, l'idéologie pacifiste

••• •••
ont ici des avocats très représentatifs du catholicisme aux Etats-Unis.

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4. GEORGES HOURDIN :

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5. MÂTI ROBERT :
paraître le 25 septembre

BONHEUR AVEC LES ENFANTS

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LA CLINIQUE DU CŒUR

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LA LITURGIE
DES PREMIERS SIÈCLES
JUSQU'A L'ÉPOQUE DE
GRÉGOIRE LE GRAND
traduit de l'américain

Un vu!uniein-8" écu de 480 pages 16,50 NF + t. 1.

Le 1'. J. A. Jungmann est bien connu du public français, notam-


ment par son savant ouvrage historique sur la messe, Missarum
Solemnia. Sans doute la messe constitue-t-elle le centre et le sommet
de la liturgie. Néanmoins il nous manquait encore une histoire de la
liturgie aux premiers siècles chrétiens qui nous fasse connaître aussi
la naissance et le développement de l'année liturgique et de ses fêtes,
de l'office divin, de la discipline pénitentielle, etc. Mais ce qui fait
peut-être le plus grand mérite de ce nouvel ouvrage, c'est qu'il ne

:
considère pas la liturgie comme une spécialité, comme un monde
clos il la replace dans le milieu de culture où elle a évolué, il la
montre influencée par la lutte doctrinale contre les hérésies, par des

p.
coutumes païennes en elles-mêmes indifférentes, par le rayonnement
des grands centres de civilisation.
Ajoutons que ce livre, né d'un cours professé aux Etats-Unis,
garde la trace de ses origines parlées et ne fait jamais étalage d'éru-
dition : on comprendra que sa lecture soit très attrayante pour
tout catholique un peu curieux des origines de sa prière.

Autres ouvrages du P. Jungmann parus aux Éditions du Cerf :


La grande prière eucharistique, 140 p. 3,90 NF + t. 1.

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Des lois de la célébration liturgique,
192 5,40NF+ 1. t.
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DE THEOLOGIE
BIBLIQUE
sous la direction de X. LÉON-DUFOUR, s. j.
et de J. DUPLACY, A. GEORGE, P. GRELOT, J. GUILLET,
M.-F. LACAN,

avec le concours de nombreux collaborateurs

Répondant à une orientation doctrinale, cherchant à préciser le


sens des mots dans la Bible pour faire apparaître l'événement de
l'histoire du salut et l'enseignement révélé qui s'y rattachent, le
Vocabulaire de théologie biblique est l'œuvre collective de soixante-
dix professeurs d'Ecriture sainte et le résultat de quatre années de

:
travail dans une étroite collaboration.
Son objet Par l'étude des thèmes que signalent les mots clefs de
la Bible (300 notices), tenant compte des résultats, anciens et récents,
de l'archéologie, de l'histoire, de la philosophie et de la critique lit-
téraire et de façon accessible aux non-spécialistes, servir une intelli-
gence authentique de la foi.

un volume in-40 couronne de 608 pages,


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SM 45-93 (A)
LITANIES ET BÉATITUDES J. GELINEAU
I
CHORALE HOSANNA direction J. GELINEAU

Les quatre chants inclus dans ce disque comportent quatre des plus
grands textes lyriques du culte chrétien. Ils sont nés de besoins con-
« Hosanna »
crets, ressentis dans la vie de communauté de prière. La chorale
:
de l'Eglise Saint-Ignace de Paris, pour laquelle trois
d'entre eux furent créés, les interprète

Jean..
io LES LITANIES DES SAINTS (fiche W 12) : la transposition fran-
çaise a été faite d'abord pour les Rogations, conformément à une
mention du Nouveau Code des Rubriques.
2° ANAMNESE ET DOXOLOGIE (fiche C 56).
30 BEATITUDES (fiche Y 7) : le texte ici retenu est le texte officiel
du « Lectionnaire » français.
40 HYMNE AU VERBE DE VIE : prologue de l'Evangile de saint
,

notre n° 100
ACCLAME DIEU Lucien DEISS, Cs.sp.
SCHOLA DES PÈRES DU
SAINT-ESPRITDECHEVILLY
nrAi/^rr
PSAVMES
CHORALE E. BRASSEUR SM 33-100 (A)

{HpraB- Ma R
GA DEZMON
888'h*
TERRE ENTIERE AC-
CLAME DIEU (Ps. AME
rao).
mm ,

DANS LA PAIX (Ps. 131).

HONNEUR,LOUANGE o SEIGNEUR ENVOIE


TON ESPRIT (Ps. 104).
IvXlmllL
flCSw
MWSÈM L
C'ESTLEJOUR
F\
I
,
ET GLOIRE (Ps. 23). 0
SEIGNEUR ECQUTE ET
PRENDS PITIE. DEVANT
TON AUTEL (Ps. 43).
DU SEI-
GNEUR (Ps. II8). 0 SEI-
GNEU R T
C'ES TOI
ïiiifk stnts m (Ps. 63). JEVOUS SALUE,
MARIE (Ps. 45). QUAND
VIENT LA NUIT (Ps. 134)'
l'.-.-J-.-.V.J".-J-",-. Collection
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LE CINÉMA
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manière le mystère spirituel.
Un nouveau chapitre intitulé « Dix ans plus tard » met à jour cette
étude de l'expression du sacré par le 7e Art.

Derniers ouvrages parus dans la même collection :

J. SICLIER : Nouvelle vague? 136 pages 7,20 NF + t. 1.

P. LEPROHON : Histoire du cinéma,


tome 1 : Vie et mort du cinémato-
graphe (1895-1930),290 pages 11,10 NF+ t.1.
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TROIS ÉGLISES
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On n'a pas hésité à présenter dans ce numéro l'ensemble d'une étude


sur les églises économiques conduite par M. Pierre Dumas, architecte
en Suisse.
L'Eglise de France a besoin d'églises construites vite, à peu de
frais. Voici un chemin qui nous préserve de l'enlisement des églises
provisoires qui prolongent indéfiniment leur existence.
Voici une leçon pour tant de constructeurs qui réclament d'abord
une centaine de millions avant de songer à la réalisation.
Ces projets, ces devis soigneusement vérifiés sont des faits.
Nous recommandons ce numéro aux curés, aux paroissiens qui se
posent l'angoissant problème de la construction de leur église.
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TENTATION DU MONDE
RÉVEIL DU CHRÉTIEN
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Conférence de clôture des Journées d'études des I. C. I.
(20 mai 1962)

En choisissant l'athéisme comme sujet de leurs journées d'études de


1962, les Informations Catholiques Internationales avaient le sen-
timent d'aborder le problème n° 1 de l'Eglise et du monde.
Le R. P. Liégé, des Frères Prêcheurs, avait la lourde charge de
tirer les conclusions de ces journées. Son exposé plein de foi, de cha-
leur, et d'une très grande hauteur de vues, a été enregistré dans la
salle même où il fut prononcé, avec les réactions du public, comme
cela avait déjà été fait l'année précédente pour la conférence du
P. Congar dont on sait le prodigieux succès (disque JER 15). Le
présent disque s'inscrit dans la même série, destinée à fournir aux
chrétiens, aux paroisses, aux mouvements, des thèmes de réflexion et
de méditation sur les grands problèmes de l'Eglise.
En exergue, le P. Liégé inscrit cette parole de saint Justin qui,
:
défendant au Ille siècle les chrétiens contre l'accusation d'athéisme,
déclarait « On nous appelle athées. Eh bien, oui, nous le proclamons,
nous sommes des athées, les athées de tous les prétendus dieux. »
Etonnante profession de foi qui n'a rien perdu de sa force paradoxale,
car elle nousoblige à purifier notre christianisme, à nous montrer
des « briseurs d'idoles JI, celles de tous ces « prétendus dieux » que
nous mêlons trop souvent à notre religion.
A la veille du Concile, cette conférence du P. Liégé est un message
de foi et d'espoir, un appel à la méditation et à l'action, très subs-
tantiel et fortement tonique.
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On retrouvera dans ces Conférences


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le texte définitif
- dont la présente édition offre
la spontanéité d'expression, la sûreté doctrinale, la
connaissance précise de l'homme d'aujourd'hui qui, au terme de ce
Carême, faisaient dire à S. Em. le cardinal Feltin que le R. P. Carré
s'inscrivait dans la grande lignée du P. Lacordaire.

Du même auteur, dans la mêmesérie :


Le vrai visage du prêtre, 176 pages 6,00 NF + t. 1.
Le Sacerdoce des laïcs, 184 pages 6,00 NF + t. 1.
Prêtres et laïcs Apôtres de Jésus-
Christ, 174 pages 6,00 NF+ 1. t.

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O. ROUSSEAU Histoire du mouvement liturgique.

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4,80
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H. CHIRAT L'assemblée chrétienne à l'âge apos-

:
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J. DANIÉLOU Bible et liturgie
Le mystère de la mort et sa célébration
9,30
9,60
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J. PASCHER L'évolution des rites sacramentels
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Communion solennelle et profession de foi 5,40
J. JUGLAR Le sacrifice de louange
:
6,60

France.
I). BARSOTTI La Parole de Dieu dans le mystère
:
chrétien 8,85
G. COHEN:
C. KOROLEVSKIJ : Liturgie en langue vivante
Anthologie du drame liturgique en
6,00
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L. BOUYER
: La vie de la liturgie
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R.GUARDINI La messe
Etudes sur le sacrement de l'Ordre
9,90
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J. LEMARIÉ : La Manifestation du Seigneur 18,00

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J. LÉCUYER : Le sacerdoce dans le mystère du
Christ 9,90
Parole de Dieu et Liturgie 9,60
G. HUDON : La perfection chrétienne d'après les

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sermons de saint Léon
P. SALMON L'office divin
A.-G. MARTIMORT et F. PICARD :
Liturgie et Musi-
9,90
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P.-Th. CAMELOT Spiritualité du baptême
7,50
A. PAULIN Saint Cyrille de Jérusalem, catéchète. 10,80
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E. H. SCIIILLEBEECKX : Le Christ, sacrement de la
rencontre de Dieu 10,50
L. BOUYER : Le rite et l'homme 12,00
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R. DELAVIGNETTE. La torture, corruption de l'Etat.


L. GUINCHARD Le désert politique français.
E. LISLE.
H. JANNÈS
Dix ans de prospérité, et après?
Des ombres sur la conjoncture allemande.
D. DUBARLE L'âge de raison nucléaire?
P. CORNIÈRE. Les grands ensembles et la crise des effec-
tifs sacerdotaux.
J. BÉCARUD Grèves en Espagne.
A.-Z. SERRAND Délivrer les captifs.

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Liminaire. L'esprit conciliaire et la mission.


La mission auprès des « baptisés ».
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H. FÉRET .;agesse
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chrétienne et merveilleux.
Sur les conditions de la connaissance de
Dieu, d'après les Pères.
C. BOURBONNAIS Une pastorale missionnaire au Venezuela.
J.-M. DÉCIIANET En* marge du monachisme africain, la
Jamaa.
A.-M. CATHERIN Jeunes laïcs envoyés en mission, etc.

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Numéro de juin 1962

QU'EST-CE QU'UN CHRÉTIEN ?


Aux pratiquants comme aux
non-pratiquants
A ceux qui cherchent et à
ceux qui ne cherchent pas
assez, ce numéro pose des
questions.

AU SOMMAIRE

Etre chrétien, c'est avoir de la religion. Oui, mais


laquelle ?
Etre chrétien, c'est croire la Parole de Dieu.
Etre chrétien, c'est prier Dieu comme on parle à son
Père.
Être chrétien, ce n'est pas seulement aller à la messe.

Thèmes étudiés depuis le 1er :


janvier
La Prostitution : Savez-vous qui elles sont?
Mort sur une croix. Pourquoi ?
La Semaine Sainte.
Le Ciel et l'Enfer existent-ils?
Nous allons nous marier.

Chaque numéro :0,80 NF


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Lecteurs de la Maison-Dieu
abonnez-vous à

AMEN
Cette petite revue d'initiation liturgique pour les fidèles est le pro-
longement direct de La Maison-Dieu et des Notes de Pastorale Litur-
gique.
Suivez et épaulez cet effort du Centre de Pastorale liturgique
pour une large initiation des chrétiens à la prière de l'Eglise.
Fous savez l'importance de cette initiation tant pour la par-
ticipationactive des fidèles que pour son bénéfice spirituel en
chacun d'eux.
l'ous savez ses difficultés, dues au manque de temps comme
aux exigences de langage, à la complexité historique des rites,
à la profondeur mystérieuse des symboles.
Amen est pensé et rédigé pour aider les pasteurs dans cette
tâche.
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