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pastorale liturgique
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revue de
pastorale
liturgique
L'hymnaire de
173 «Liturgia Horarum »
et sa
traduction française
Revue trimestrielle
publiée sous la direction du
Centre National de Pastorale Liturgique
4, avenue Vavin — 75006 Paris
Directeur de rédaction
Bernard MARLIANGEAS
::
France un an
Etranger un an
Le numéro
238F
CONDITIONS D'ABONNEMENT 1988
55F
:
C.C.P., Editions du Cerf, 4 263 95 D PARIS
(Changement d'adresse 5 F)
<
Directeur de la Publication :
dominicaine de France, Association de la Pensée chrétienne
Pascal Moity
ISSN 0025-0937
B-Plonche (
1988
LA MAISON-DIEU
SOMMAIRE
Jean-Louis CHARLET
romaine
latine — l'apport de la civili-
sation
Richesse spirituelle d'une
41
hymne d'Ambroise .-
Aeterne
rerum conditor 61
»
Dag NORBERT
Sœur ETIENNE
tunatpour la croix
Le «Pange lingua
Le cantique nouveau
de For-
de
71
l'Église en prière 81
Anselme DAVRIL Réforme de l'office divin et
tradition 101
Renée MOINEAU «Cathédrale, demeure de
Dieu, demeure des hommes » 123
Paul Card. POUPARD Image, imaginaire et foi. 133
René REMOND Paul VI et les arts 139
Gaston SAVORNIN Écho du colloque « Paul VI
»
et les arts 143
Comptes rendus
:
manifestations récentes dans le domaine des arts et de la
;
liturgie le colloque de Pont-à-Mousson (France), en juin
1987, sur les cathédrales le colloque de Sion (Valais),
en septembre 1987, sur «Image, imaginaire et foi ; la»
journée d'étude de janvier 1988, à Paris (Institut catholique
et UNESCO), sur Paul VI et les arts.
:
Depuis le concile Vatican II l'Office romain comporte
deux hymnaires qui se complètent l'un l'autre d'une part,
l'hymnaire traditionnel (en latin ou en traduction) et,
d'autre part, des hymnes composées en langue vernaculaire.
»
La « Liturgie des Heures des pays de langue française
contient principalement des hymnes composées en français.
Mais, par ailleurs, sur la demande de la « Commission
internationale francophone pour les traductions et la litur-
gie » (CIFTL), la traduction intégrale de l'hymnaire latin
vient d'être achevée, grâce aux efforts conjugués, d'une
part, d'un groupe de latinistes professeur d'université
constitué autour de Jacques Fontaine, professeur à la
Sorbonne, et, d'autre part, de moines de Solesmes. Cette
traduction a été confirmée par le Siège Apostolique et,
une fois publiée, elle se substituera aux traductions d'ori-
gine privée qui ont pu être utilisées jusqu'à maintenant.
Le moment était donc venu, pour La Maison-Dieu,
d'étudierl'hymnaire dans la tradition latine et romaine,
à la fois par un regard global et par des monographies
d'hymnes. Du premier point de vue, Jacques Perret, auteur
d'une admirable traduction de Virgile, met en lumière ce
grand cas d'inculturation de la révélation chrétienne en
poésie que représente l'apport de la civilisation romaine
à la liturgie. L'article général de Pierre-Marie Gy et les
deux articles de Jean-Louis Charlet et de Dag Norberg
amorcent une évaluation de l'hymnaire romain non seu-
lement comme « lex orandi » mais comme trésor pour la
prière.
dans deux directions :
Il convenait que cet ensemble d'études soit prolongé
celle de l'hymnaire français, qui
;
fait l'objet de l'article de Sœur Etienne, moniale bénédic-
tine celle aussi d'une réflexion sur l'hymnique comme
telle, sur l'importance de la «poésie pour Dieu », de ce
que le poète Patrice de la Tour du Pin a appelé la
« théopoésie », sœur de la théologie. On trouvera des
éléments en ce sens dans la table ronde placée en tête de
ce cahier.
La Maison-Dieu, 173, 1988, 7-17
TABLE RONDE
L'HYMNAIRE DE
«
LITURGIA HORARUM »
ET SA TRADUCTION FRANÇAISE
TABLE RONDE
:
à laquelle nous avons presque tous pris part, notre table
ronde réunit des compétences diverses celle du poète,
de M. J. Perret, le maître-traducteur de Virgile ;
auteur d'hymnes françaises, avec le P. D. Rimaud ; celle
celle
de M. J. Fontaine, qui fait autorité dans le domaine de
l'hymnique latine chrétienne. Le P. J.- Y. Hameline et
moi-même sommes ici comme liturgistes, lui surtout, au
point de jonction entre l'histoire de la liturgie et celle
de la musique. Certains d'entre nous ont-ils à s'exprimer
d'abord sur notre entreprise de traduction comme telle?
:
poète anglais du 17e s. converti au catholicisme. On y
trouve une image hardie lors de l'Assomption de Marie
« le ciel retourne chez lui », « Heaven goes home ».
;
D. Rimaud. — Il y a eu des essais de traduction avec
d'autres présupposés de ce que c'est que la poésie par
exemple, que la poésie française devait être obligatoi-
rement rimée, avec des alexandrins de préférence.
:
de l'hymnodie, depuis le 4e siècle, depuis que le français
était encore le latin, si j'ose dire c'est la façon de
prendre conscience de ce que nous portons en nous et
peut-être de percevoir aussi, par différence, ce que nous
apporte la modernité.
Il me semble important que cette poésie française
moderne puisse entrer en dialogue avec la tentative que
nous avons faite de tendre une passerelle entre le latin
et le français et de faire passer dans le français ce qui
ne paraissait accessible que dans le cadre d'une culture
latine.
D. Rimaud.
Tour du Pin
-- Permettez que je cite ici Patrice de la
il me disait qu'il voulait rendre à la
poésie son rôle de véhicule de la foi, ce qui est, à mon
avis, une très belle chose.
C'est vous, Père Gy, qui m'avez un jour éveillé à cela
en me parlant d'une poésie mystagogique, c'est-à-dire
une poésie dont la beauté vient de ce qu'elle contemple.
Je pense à l'expression de Patrice de la Tour du Pin,
«une hymne émerveillée ». Je trouve cela absolument
extraordinaire. Une hymne qui est émerveillée du mystère
qu'elle évoque. Alors, la poésie chrétienne est une véri-
table poésie et elle est intéressante pour nos contem-
porains parce qu'elle dit quelque chose du mystère qu'elle
contemple et sa beauté vient de la beauté qu'elle
contemple, et non pas d'abord du métier de l'auteur.
Pour dire cela, Patrice de la Tour du Pin a inventé le
mot de « théopoésie » à côté du vieux mot de théologie.
P. M. Gy. — Que pensez-vous des formes de cette
poésie latine que nous avons essayé de garder dans notre
traduction, à savoir, des octosyllabes, des quatrins ? Est-
ce que cette forme-même n'est pas une barrière aujour-
d'hui ?
»
J. Fontaine. — Les « petits vers — c'est une question
peut-être plus optique qu'acoustique.
J. Perret. — Regardez une hymne comme l'Ave Maris
Stella — je ne comprends pas comment on peut repousser
les petits vers et chanter YAve maris Stella !
Est-ce que, dans les derniers mois, vous avez eu
connaissance d'expériences qui aient été faites, d'utili-
sation de nos traductions à l'office?
;
du regard porté vers quelque chose.
On trouve cela dans Cicéron il y a toujours un regard
dans la métaphore — si je me souviens bien du de
oratore. Il y a l'aspect de cogitatio, comme exploration
des choses à entendre, à voir. Il s'agit, soit d'entendre,
de réentendre la vox ecclesiae, soit d'entr'apercevoir à
travers les mots, les choses qui sont désirables à connaître,
à aimer et à regarder et on se porte vers ces choses-là.
Pour ce qui est des époques plus récentes, je suis
frappé par l'importance de l'hymnodie dans les « revi-
:
valismes ». Tous les revivalismes à composante lettrée
voient une floraison d'hymnes — Mr J. Fontaine fait
allusion à cela à propos de Paulin ou de Prudence « on
se trouve là devant un phénomène assez proche d'un
Revival où des gens forment des communautés de vie ».
Et, là, on voit réapparaître l'élément de sociabilité, c'est-
à-dire que l'hymne n'est pas seulement une prière à
Dieu, mais devient d'une certaine façon un lien de
sociabilité. Ceci est extrêmement fort, par exemple à
l'époque de Wesley qui, pour moi, est le moment de la
;
naissance de l'hymnodie chrétienne moderne. C'est l'hym-
nodie de « Réveil », de type anglo-saxon c'est elle qui
va faire le fond de tous les mouvements de Réveil
américains, qu'on va retrouver également dans le Réveil
de langue allemande, ou pour la langue française, à
Genève, avec le pasteur Malan, et à Paris, avec le pasteur
Lutteroth. C'est cette hymnodie que vulgariseront les
« agences de Réveil », avec leurs chanteurs-compositeurs.
Dans cette hymnodie, la thématique est devenue réso-
lument adventiste. Ce qui l'emporte, ce n'est pas le cycle
du calendrier, mais l'attente du retour du Seigneur et
l'exhortation fraternelle pour pouvoir attendre ce retour.
C'est l'appel à la conversion immédiate dans le moment
qui suit — suivi par exemple d'une exclamation alle-
luïatique, quand celui qui fait son témoignage va pouvoir
rencontrer l'espace d'admiration de la communauté pour
le bon témoignage qu'il donne.
Pratiquement, le catholicisme a opposé des barrières
et liturgiques et musicales, à cette immense vague, jusque,
en gros, dans les années 1960.
Puis, pour des raisons qu'il faudrait élucider, soudain,
les digues se rompent et c'est vraiment un ras de marée,
à peu près dans toutes les églises chrétiennes, quelle que
soit leur langue, d'une hymnodie finalement de type
Wesleyen. Ce qui me gêne dans nos répertoires, actuel-
lement, ce n'est pas tellement que ce soit de mauvaises
musiques, mais, c'est que nous sommes pieds et poings
liés à une hymnodie moderne (et peut-être est-elle irré-
sistible ?) de type exagérément adventiste, dont les sup-
ports sont des supports de musique de Réveil. Même si
on en accepte le type de « sociabilité musicale » et les
aspects évidemment non négligeables d'édification fra-
ternelle, on peut en déplorer souvent la faiblesse de
contenu quant au mystère de la foi, l'insistance psycho-
logique et le peu de puissance métaphorique, sauf chez
les très grands auteurs (je pense à Wesley lui-même par
exemple ou César Malan).
J. Fontaine. — Nous, ce que nous voulons essayer,
c'est de faire affleurer à la conscience du peuple chrétien
les ressources qui sont, comme dit S. Augustin, « dans
les palais de la mémoire » et par conséquent renforcer,
si vous voulez, l'acte liturgique même, qui est actualisation
de tout le vécu de l'Eglise depuis son origine.
Il me semble que le retour à l'histoire auquel on
assiste aujourd'hui peut être une conjoncture favorable
pour que soit accueilli ce que nous avons essayé de faire,
même si c'est d'une façon abrupte, parce que nous avons
essayé d'être aussi exacts et honnêtes que possible avec
les poétiques successives.
EVODEBEAUCAMP
LES GRANDS THÈMES
DE L'ALLIANCE Les grands
thèmes
rJ
Evode Beaucamp de l'Alliance
lliW'Q
L'expérience de l'Alliance a fait éclater le mythe
de l'éternel retour et introduit une vision neuve
de l'histoire. Étudiée ici à travers les thèmes yr
Y x -V
majeurs qui l'expriment création, dont de la
terre, rédemption
l'Alliance
,
et
-
salut, péché et justice -
entre Israël et son Dieu apparaît
,
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+o"(A.).
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comme le fondement même de la religion de la
Bible.
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JQ.' ::f
Coll.LirelaBible
132 pages 88F
ri'81 lltnjfl
Q niM
La Maison-Dieu, 173, 1988, 19-40
Pierre-Marie Gy
étranger :
et seulement lieu d'admiration, c'est pour le visiteur
Pour ceux qui sont « de la maison de Dieu
(Ephésiens 2, 19), et même pierres vivantes formant
»
l'Eglise maison de Dieu et «société de la louange
divine » 4, la liturgie est, conjointement et inséparable-
ment avec l'amour de Dieu et du prochain, ce par quoi
ils sont pierres vivantes.
Hippolyte, que l'Eglise Romaine vénère comme saint
à cause du témoignage qu'il a scellé de sa mort, considère
qu'il est essentiel à l'Eglise d'être le sanctuaire, non
seulement de la vraie foi mais de la vraie doxologie,
étant entendu, comme l'écrira S. Basile que de la
première à la seconde il y a un enchaînement néces-
saire l'Eglise est le lieu spirituel où la Trinité est glori-
:
:
chances de remonter à l'hymnaire employé par S. Benoît.
A cela j'ajoute deux remarques La première est que
cette constatation au sujet des hymnes converge avec
une constatation plus générale, à savoir que l'Office
bénédictin tel qu'il nous est connu depuis l'époque caro-
lingienne est une reconstitution effectuée sur la base de
l'Office romain et de la Règle de S. Benoît.
Ma deuxième remarque est qu'il n'existe pas non plus
un recueil historiquement transmis des hymnes composées
par S. Ambroise, mais un recueil reconstitué à l'époque
13.
de S. Ambroise attestées par S. Augustin :
L'hymnaire de Liturgia Horarum contient les quatre hymnes
Deus creator omnium
(premières vêpres du dimanche), Aeterne renun conditor (laudes du
dimanche, 2e série), Veni redemptor gentium (office des lectures, 17-
24 décembre). On peut y joindre l'hymne Splendor paternae gloriae
(laudes du lundi, 2e série), d'authenticité quasi certaine, et les deux
hymnes Hic est dies (office des lectures au temps pascal) et Agnes
beatae virginis (Ste Agnès), dont l'authenticité est possible ou même
vraisemblable. Mais il me paraît difficile d'inclure dans ce groupe
l'hymne Apostolorum passio (laudes des SS. Pierre et Paul).
14. Plusieurs arguments paraissent aller dans ce
sens. En premier
lieu les hymnes inclus par Alcuin dans ses Libelli Precum (éd.
WILMART, Rome 1941 ; cf. également le libellus de Bamberg étudié
par R. CONSTANTINESCU, « Alcuin et les "Libelli Precum" de l'époque
carolingienne », Revue d'histoire de la spiritualité 50, 1974, 17-56)
correspondent déjà au nouvel hymnaire de Benoît d'Aniane. En
deuxième lieu l'étude textuelle des hymnes d'Ambroise faite par M.-
H. Jullien permet de déceler une précoce influence tourangelle en
direction de l'Aquitaine. En troisième lieu l'hymne Martine par
apostolis (que la Liturgia Horarum emploie pour le 11 novembre),
doit avoir été composée par S. Odon de Cluny alors qu'il était encore
chanoine à Saint-Martin de Tours. Enfin peut-être pourrait-on exa-
miner dans la même perspective les hymnes attribuées à Alcuin.
lavement des pieds, à la messe du jeudi saint, et l'Ave
maris stella. Heinrich Lausberg a prouvé que le Veni
creator prenait place de façon précise dans le débat
doctrinal franc au sujet de la procession du Saint-Esprit
ab Utroque, et il a même émis l'hypothèse que cette
hymne avait été créée par Raban Maur en 809, lors du
concile d'Aix-la-Chapelle sur le Filioque15. A dire vrai
:
la question du Filioque n'apparaît que dans la strophe
conclusive
Per te sciamus da Patrem
noscamus atque Filium,
te utriusque Spiritum
credamus omni tempore.
Fais-nous connaître Dieu le Père,
Fais-nous apprendre aussi le Fils
Et croire en tout temps que tu es
L'Unique Esprit de l'un et l'autre.
:
tradition de la prière a retenu — est invocation de
l'Esprit-Saint dans son mystère
Qui diceris Paraclitus,
donum Dei altissimi,
fons vivus, ignis, caritas
et spiritalis unctio.
Toi qu'on appelle Conseiller,
Don du Seigneur de majesté,
Source vive, Feu, Charité,
Toi qui es onction spirituelle.
COMPLÉMENTS À L'HYMNAIRE
Fondamentalement constitué en milieu monastique à
l'époque carolingienne, devenu d'un usage général dans
le rite romain vers le temps de la réforme grégorienne,
l'hymnaire a reçu au cours des siècles des additions dont
certaines sont de grands chefs d'œuvre de prière et de
:
de l'Arsenal, cod. 227), Roma 1979, n" 473 (texte de l'hymne) et
n" 407-408 «Intérim demittitur de camera ecclesiae super fontes
tornatile lignum in modum turritae civitatis. in cuius medio dependet
columba lignea ferens in ore ampullulam cum sacro chrismate. Tunc
canitur versus "Urbs beata Hierusalem". (408) Ad cuius inchoationem
descendit pontifex ab altari cum ordine praecedentium et subse-
quentium praesbiterorum et complet benefictionem fontis post decan-
tationem versus. »
poésie, et n'engendrent pas un manque d'harmonie avec
les pièces pré-carolingiennes ou carolingiennes parmi
lesquelles elles prennent place. On peut donner ici comme
exemples le Iesu dulcis memoria et les hymnes de la
Fête-Dieu. Le lesu dulcis memoria est un poème mystique
d'un cistercien anglais de la fin du 12e s. dont des
morceaux ont trouvé place dans la liturgie romaine 21 :
Iesu, rex admirabilis,
et triumphator nobilis,
dulcedo ineffabilis,
totus desiderabilis.
Jésus, le roi très admirable
et le noble triomphateur,
la douceur que nul mot ne dit,
le totalement désirable.
:
supernum prodiens nec Patris linquens dexteram qui
résume toute l'œuvre du Sauveur
Se nascens dedit socium,
convescens in edulium,
se moriens in pretium,
se regnans dat in praemium.
Naissant, il s'est fait compagnon,
convive, il s'est fait nourriture,
mourant, il s'est fait notre dette,
en son règne, il se donne en prix.
Roma 1946 ;
(Sacré-Cœur). Cf. A. WILMART, Le «Jubilus » dit deS. Bernard,
H. LAUSBERG, Der Hymnus « lesu dulcis memoria »,
München 1967.
22. Sur l'attribution cf. mon article « L'Office du Corpus Christi
et S. Thomas d'Aquin. Etat d'une recherche », Revue des Sciences
Philosophiques et Théologiques 64, 1980, 491-507.
Ailleurs c'est le jeu des idées et des mots qui l'emporte,
d'une manière qu'on pourrait à certains moments compa-
rer à la poésie métaphysique anglaise du 17e s. mais qui
à d'autres nous paraît aujourd'hui trop techniquement
théologique. Par exemple dans cette strophe du Pange,
lingua, gloriosi corporis mysterium :
caractères:
classique, offrent du point de vue des hymnes trois
En premier lieu il nous en reste certaines
hymnes de valeur telles que, à la fin du 17e s., les hymnes
pour S. Joseph qu'on attribue aujourd'hui au cardinal
Jérôme Casanate 27, ou encore l'hymne Cor, arca legem
continens pour le Sacré-Cœur ou, à l'époque contem-
poraine, l'hymne au Christ-Roi Te saeculorum principem.
Je ne sais si ceux qui ont préparé l'hymnaire de Vatican II
ont envisagé d'y faire place à l'une ou l'autre des très
belles œuvres de Santeuil, ce Victorin du 17e s. qui égalait
les poètes parisiens du 12e s. 28.
En second lieu, de manière négative cette fois, il y a
eu en Italie, aux 15e et 16e siècles, la tentation d'employer
des expressions néo-païennes, expressions rapidement res-
senties comme déplacées même si elles étaient dépourvues
de toute portée autre que purement littéraire. Enfin et
surtout les corrections très nombreuses (près d'un millier)
apportées à l'hymnaire dans un sens néo-classique par
Urbain VIII et ses collaborateurs, contestées ensuite,
firent l'unanimité contre elles au 19e s., et la constitution
Sacrosanctum Concilium décida qu'elles seraient aban-
PRINCIPAUX CARACTÈRES
DE L'HYMNAIRE ROMAIN
Hymnes à la Lumière
Quand cela est possible, et en tout cas pour laudes
et pour complies, la répartition des Psaumes est marquée
par le caractère des Heures, mais cette coloration est
beaucoup plus forte pour les hymnes, au point que c'est
à elles surtout qu'il appartient d'exprimer le sens de
chaque Heure, principalement par rapport à l'alternance
de la lumière et des ténèbres, et en second lieu en
la prière de l'Église :
général. Aussi cette thématique revient-elle souvent dans
Au Lumen Christi de la veillée
pascale et dans toute la liturgie de la nuit de Pâques 32 ;
dans les liturgies baptismales et par exemple dans l'oraison
romaine pour l'illumination des catéchumènes 33 ; dans
le symbole de Nicée lorsqu'il confesse le Fils Unique du
Père, «Dieu de Dieu, lumière de lumière ; dans les »
prières eucharistiques, par exemple dans la grande « théo-
logie» trinitaire — au sens de parole de louange sur
Dieu — que S. Basile déploie au commencement de son
;
anaphore 34 mais c'est principalement aux offices du
matin et du soir qu'il est question de la lumière, et
surtout au lucernaire, là où existe cet office ou cette
partie d'office du soir pour allumer et bénir la lumière.
Ce thème, qui apparaît dès le 3e s., à ce qu'il semble,
dans l'hymne Phôs ilaron, est constant dans les hymnes
de l'antiquité tardive et du haut moyen âge pour
laudes et vêpres, qui s'adressent au Christ comme la
lumière et le jour. Par exemple dans cette hymne,
affectée par Liturgia Horarum aux complies, et que
:
chantaient déjà les religieuses d'Arles du temps de
S. Césaire
Louange trinitaire
Wilmart, connaisseur exceptionnel des écrits spirituels
du moyen âge latin, a marqué vers la fin du 11es. une
sorte de césure jusqu'à laquelle la piété s'est à peine
éloignée de celle de l'âge patristique, tandis qu'a
commencé alors une évolution spirituelle assez rapide 38.
Il y a aussi une certaine césure dans les hymnes, mais
pas exactement au même moment et surtout avec cette
différence, essentielle à la prière liturgique, que celle-ci,
plus encore que la dévotion, se situe dans ce que les
historiens des mentalités appellent le « temps long et »
36. Cf. l'hymne ambrosienne citée à la note précédente et le début
de l'hymne Consors paterni luminis (Liturgia Horarum, office des
lectures du mardi de la Irc semaine) : « Consors paterni luminis/Lux
ipse lucis et dies/noctem canendo rumpimus/assiste postulantibus/Aufer
tenebras mentium. » (« Clarté de clarté, toi, le jour/Qui partages
l'éclat du Père/Soutiens-nous dans notre prière//Quand nos chants
déchirent la nuit/Chasse les ténèbres de l'âme. »).
37. Ainsi les hymnes de Liturgia Horarum pour complies, tous
deux adressés au Christ, le Christe qui splendor et dies, dont il a
déjà été question, et le Te lucis ante terminum. Le premier chante :
« Somno si dantur oculi/cor ad te semper vigilet/tuaque dextra protegas/
:
fideles, qui te diligunt. » (« Nos yeux se livrent au sommeil/Que nos
cœurs veillent pour t'attendre/Protège de ton bras puissant/Ceux qui
te gardent en ton amour »). Et le Te lucis ante terminum «Te
corda nostra somnient/te per soporem sentiant/tuamque semper glo-
riam/vicina luce concinant. » (« Fais que nos cœurs rêvent de toi/
!
Qu'ils te sentent dans leur sommeil !/Et, lorsque l'aube apparaîtra/
Qu'ils célèbrent toujours ta gloire »).
38. WILMART, Auteurs spirituels. (cf. note 16),60-63 Une compo-
sition religieuse du lIes. « est à part quelques détails très secondaires,
une image fidèle de la croyance et de la piété chrétiennes pour les
;
onze premiers siècles, à tel point, par exemple, qu'un fidèle du 4e
et du 5e s. aurait pu la réciter sans y rien trouver d'insolite et,
d'autre part, que son énumération minutieuse des circonstances de
la vie du Sauveur. contient en germe la religion des temps nou-
veaux. »
les liturgistes la tradition
réajuste, mais enlève à peine.
: la tradition liturgique ajoute,
AUX ORIGINES
DE L'HYMNODIE LATINE
L'APPORT
DE LA CIVILISATION ROMAINE
:
vif succès, fut reprise en plusieurs provinces; elle ne se
généralisa pourtant qu'à la longue. C'était en effet une
;-
aussi sans doute, doit vivre largement du trésor de ses
origines enfin, et plus ou moins dans la dépendance
de tout cela, un vocabulaire, une thématique qui, sous
;
le patronage d'Ambroise, tendent eux aussi à devenir
traditionnels
:
ces divers facteurs concourent à instituer
entre toutes les œuvres une sorte d'air de famille à
côté des Psaumes elles seront les Hymnes.
I POÉSIE
—
:
chez saint Paul. La fixation progressive d'un canon des
Écritures n'avait pas tari cette veine Clément de Rome,
l'auteur de la Didaché, Hippolyte composent ou repro-
duisent d'admirables prières. Un peu plus tard les Latins
ont connu quelque chose de cette audace créatrice, le
Gloria, le Te Deum, l'Exultet. Mais déjà, avec le foi-
garder, la tendance est à la fermeture :
sonnement de productions hérétiques dont il faut se
on voudra
n'employer pour la prière publique que les seuls textes
de l'Ecriture, Psaumes, cantiques de l'Ancien et du
Nouveau Testament. C'était sans doute une erreur il
aurait été fâcheux que dans les liturgies, l'homélie,
:
;
inévitablement vouée au didactisme, constituât le seul
élément vivant il est important d'avoir aussi, en rapport
avec les situations du moment, des prières qui se renou-
vellent.
; ;
vers. Commodien avait donné forme d'hexamètres à ses
invectives contre les Juifs et les païens
mètre Juvencus récrit les Evangiles
dans le même
Damase compose
en l'honneur des martyrs des épitaphes en vers. Si ces
tentatives, comme on l'admet généralement, ont préparé
l'initiative d'Ambroise, il nous importe de reconnaître
ce qui les inspirait. Les chrétiens, ce faisant, voulaient-
ils gagner les païens cultivés? On doutera, en tous cas,
que Commodien se soit proposé cette fin. La poésie
mentale à des fins de propagande ?
aurait-elle eu pour eux une fonction purement instru-
Ils ont dû le dire
quelquefois pour justifier des entreprises qui pouvaient,
;
beauté elle était la langue des dieux, celle de l'âge
d'or Orphée, Musée, pères de toute civilisation, s'étaient
exprimés en vers. Ces idées que Tacite (Dial. Or. 12-
ou se rencontrent souvent :
groupes, les réunions d'amis qui vivent en communautés
autour d'Augustin à Cassi-
ciacum, autour de Paulin de Nole, nous entrevoyons un
;
peu de leur vie, premières ébauches d'un monachisme
occidental là aussi on prie ensemble. Les prières parfois
étaient improvisées, Tertullien (Apol. 39, 18) l'atteste
expressément. Dans une civilisation où l'improvisation
poétique a toujours été pratiquée, honorée comme un
des éléments de la vie sociale, il y a fort à parier que
ces prières chantées étaient parfois en vers.
A plus forte raison la poésie se trouve-t-elle comme
:
en sa patrie propre dans le domaine illimité de la prière
personnelle dans l'effort de la composition poétique,
;
l'âme fidèle cherche un moyen de concerter son attention,
d'instaurer des images qui l'aideront à prier la quête
de mots appropriés arrache l'esprit à sa torpeur. De là
parfois le recours à des formes étranges et comme
héroïques, les centons où l'on mobilise des hémistiches
virgiliens pour chanter la gloire du Christ, certains peut-
être des acrostiches et poèmes figurés de P. Optatianus
Porfyrius (début du 4e siècle) il est beau de voir appa-
:
:
Ce type de prière personnelle est peut-être une des
formes constantes de la vie chrétienne poèmes de saint
Jean de la Croix, épigrammes chrétiennes de la Renais-
sance, poésies dévotes si sottement moquées dans les
Provinciales, Angelus Silesius ; sans oublier les poésies
de ses sœurs, souvent si touchantes;
que Thérèse de Lisieux improvise à son usage ou à celui
sans oublier pour
le Moyen Age tant de belles prières que des critères
destinées à la liturgie;
purement formels ont fait ranger parmi les hymnes
aux origines, les « »
hymnes
d'Hilaire, surtout la première, écrite en une métrique si
ambitieuse, pourraient bien appartenir à cette poésie de
dévotion où l'auteur se livre lui-même comme fidèle en
train de prier.
:
Tout cela nous permet de situer un peu l'hymnique
;
liturgique instituée par Ambroise elle n'est pas née de
rien, si nouvelle qu'elle fût le milieu, comme on dit,
était porteur. Elle répond à une religiosité qui n'est pas
celle de la tradition orientale ou juive, mais bien celle
:
de l'antiquité romaine dans ce qu'elle avait de plus
estimable confiante en la vertu de la beauté, profon-
dément attachée à ces perfections de la forme d'où naît
la beauté.
Le style d'Ambroise
L'œuvre d'Ambroise n'a pas été seulement d'introduire
dans la liturgie ecclésiale des prières composées selon
;
les canons de la poésie profane. Il a sa manière propre
de se rattacher à la tradition poétique romaine il a son
style à lui.
:
Plusieurs traits sont d'emblée saisissables ses hymnes
sont des pièces courtes (32 vers) alors que les poésies
religieuses en usage chez les chrétiens pour leur prière
privée ou semi-privée sont souvent beaucoup plus longues,
capables comme les Psaumes de se prolonger indéfini-
;
ment, quitte à s'interrompre soudain sans raison appa-
rente ses hymnes sont articulées en strophes, les mêmes
dans toutes les hymnes et d'une structure très simple,
étant composées de quatre vers identiques, eux-mêmes
d'un schéma très simple (le dimètre iambique), alors que
les autres poètes, même quand ils usent de formes
strophiques, ne s'astreignent pas à employer toujours la
;
simples
: 8x4x8,
même et usent souvent de strophes et de vers moins
toutes les hymnes qu'on peut raisonnablement
lui attribuer sont superposables 8 strophes de 4 vers
ayant presque toujours 8 syllables. singulière
formule.
Certains des traits que nous venons de rappeler peuvent
Ambroise a destiné ses hymnes :
s'expliquer en partie par les requêtes de l'usage auquel
elles seront courtes
parce que cette forme nouvelle doit se contenir dans des
bornes modestes, l'hymne devant être une sorte de
prélude à la liturgie traditionnelle qui suivra, ou au
contraire une conclusion par quoi se prépare le retour
»
des fidèles dans le «siècle ; la forme strophique ne
déconcertera pas des chrétiens habitués sans doute à
chanter certains psaumes en chœurs alternants, et tant
mieux si, à quelques-uns, elle peut rappeler Horace.
Mais cela n'explique ni le choix du dimètre iambique,
ni la constance sans faille avec laquelle toutes les hymnes
représentent la formule 8x4x8.
Quoi qu'il en soit, il est clair que toutes ces régularités
dont on ne retrouve nulle part ailleurs un semblable
groupement se renforcent mutuellement dans un effet
d'ensemble. Ambroise refuse l'indéfini, l'illimité, ce que
;
les Anciens appelaient l'apeiron et qui était pour eux
désordre et chaos il refuse même les agréments de la
variatio et toute possibilité de surprendre. Comme chez
nous dans le sonnet, le poète se donne à l'avance un
champ limité, peu étendu, à l'intérieur duquel tout devra
;
s'organiser, au terme préfix duquel une conclusion s'im-
posera c'est aussi l'esthétique du meilleur classicisme
romain, celui d'Horace en particulier. Laissons là le
;
sonnet
pensons en termes d'architecture :
comme Horace lui-même le fait quelquefois,
il est impossible de
ne pas ressentir devant ces formules rigoureuses la sug-
gestion d'une monumentalité faite pour durer.
:
L'étude de la phraséologie, du vocabulaire vient confir-
mer cette interprétation phrases courtes souvent conclues
dans les huit syllabes du vers, très peu de subordonnées,
simplicité de l'ordre des mots, peu d'adjectifs qualificatifs.
L'auteur semble avoir tablé sur le poids des réalités que
:
désignent soit les substantifs soit les verbes qui marquent
leurs relations
;
en pareil contexte ces mots se trouvent
en effet chargés d'efficacité la lecture spirituelle de
l'Écriture, un enseignement qui lie tout ce qu'il touche
;
stigieuses qui ont chance d'imprimer durablement un
caractère à une forme ce n'est qu'un élément sans ethos
propre et susceptible d'être employé à n'importe quoi.
Ambroise a donné à ce dont il va faire vraiment une
création neuve une carrure, une simplicité auxquelles le
dimètre iambique pouvait se prêter mais qu'il n'avait
:;
jamais eues et qui lui confèrent à la fois unité et dignité
il le contient dans des strophes tétrastiques régulières
;
il tent à en bannir les pieds trisyllabiques qui y avaient
toujours tenu tant de place il renforce le contraste entre
les pieds de chaque dipodie ; il ne se permet presque
aucune licence. Le vers ainsi bâti reste, malgré tout,
compte tenu des constantes du vocabulaire latin, assez
facile à employer, il n'oblige pas le poète à des contorsions
syntaxiques ou à l'emploi de mots « poétiques » :
;
rythme aisément perceptible aux chanteurs les moins
cultivés il traversera sans encombre la période difficile
où dans le rythme de la langue les intensités se subs-
titueront aux quantités.
Oui, le vers de l'hymne ambrosienne est un vers simple,
très propre à un emploi ecclésial, mais le dimètre iambique
n'est devenu tel que par la stylisation que lui a imposée,
à des fins supérieures, Ambroise, théologien, évêque et
II — MUSIQUE
;à
10e siècle il est douteux que les mélodies de cette époque
puissent nous renvoyer six siècles en arrière elles ne
sont d'ailleurs pas concordantes. Résignons-nous réflé-
chir seulement sur ce que pouvait être dans l'Eglise à
la fin du 4e siècle une musique nouvelle.
Cette nouveauté, évidemment, ne peut s'entendre que
Ce chant lui non plus nous ne le connaissons guère
mais nous savons ce qu'on chante, ce sont les Psaumes
;
par rapport au chant pratiqué jusqu'alors dans la liturgie.
:
ou dans les formes les plus simples de la psalmodie
d'aujourd'hui quelques accidents pour notifier les fins
de phrases ou de membres, le reste étant énoncé recto
tono.
Si les hymnes ont une autre musique, ce doit être une
:
musique étrangère à cette cantillation, et l'hypothèse se
trouve confirmée par la forme littéraire des pièces non
plus phrases amorphes d'une suffisante longueur pour
qu'un accident mélodique à valeur de ponctuation fût le
bienvenu afin d'en indiquer le terme ou les articulations,
mais vers très courts, exactement mesurés, où chaque
syllabe, selon un schème préfix, a une quantité (ou une
intensité), bref une qualité déterminée. Pour nous repré-
senter la musique qui pouvait animer des textes ainsi
structurés, il paraît presque inévitable de penser à la
musique qui dans cette même civilisation de la latinité
tardive accompagnait, dans des circonstances profanes,
« mondaines », « séculières », des textes en vers sembla-
blement composés, voire composés des mêmes vers. Cette
musique, nous la connaissons directement par quelques
textes notés selon la notation musicale antique, et beau-
coup mieux encore par les traités de théoriciens très
nombreux. Elle procède à partir de notes, définies par
;:
des rapports mathématiques qui instituent entre elles des
intervalles précis c'est la musique tonale, retrouvée par
l'Occident moderne «science des intervalles et des
accords» (Alypius, mus. 1, p. 367 Jan).
Si abstraite, si intellectuelle qu'elle nous apparaisse
chez les musicographes de l'antiquité, cette musique, par
la mobilité permanente de sa mélodie, une mélodie qui
animait la totalité de l'énoncé, avait — elle a toujours
— une présence, une puissance qui inquiétait les chrétiens.
Depuis que l'Église avait pénétré dans le monde grec et
romain, elle l'a toujours sentie comme une menace, une
tentation, et elle l'a souvent rejetée radicalement avec
horreur. Sans doute parce que cette musique était trop
étrangère aux traditions dont elle avait hérité de la
synagogue. Mais elle lui reprochait aussi d'être sensuelle,
d'ébranler l'imagination, de confisquer l'attention qu'on
aurait dû porter aux textes sacrés. Tous périls, en effet,
auxquels les fidèles ne risquaient guère d'être exposés
par la cantillation des Psaumes. Sensualité, ébranlement
affectif qui risquaient d'être d'autant plus néfastes que
cette musique avait partie liée, et à l'origine exclusive-
ment, avec les divertissements, cérémonies et liturgies
d'une société païenne hostile.
Peu à peu pourtant la situation se modifie, surtout
depuis que l'empereur est devenu chrétien et que l'Église,
:
face à la société, ne peut plus se poser comme un corps
étranger
;
dans la même famille certaines branches sont
chrétiennes, d'autres païennes les mariages mixtes sont
nombreux, facilités du fait que l'habitude de retarder
indéfiniment le baptême maintenait bon nombre de chré-
tiens dans un statut un peu équivoque. Sans doute les
répugnances anciennes n'ont pas disparu d'un seul coup
au goût d'Athanase, la cantillation psalmique elle-même
;
est déjà trop musicale et il conseille d'en aplanir le plus
possible les accidents mélodiques (cf. Augustin, Conf. 10,
50). Jérôme (Ep. 107, 4-8, vers 400) souhaite qu'une
jeune chrétienne ignore, bien entendu, les chansons du
monde, ignore même les noms de lyre et de cithare,
ignore au moins ce qu'on peut faire des objets que ces
noms désignent. Pour discréditer un doctrinaire (Bar-
;
desane, Arius, Paul de Samosate), on racontera qu'il
fait chanter comme au théâtre, comme dans les mauvais
lieux, des hymnes de sa composition les donatistes
s'excitent par le vin à chanter des psaumes qu'ils ont
inventés (Augustin, Ep. 55, 34) ; on réveillera contre
Ambroise les soupçons de magie qui s'attachent à une
;
musique inconnue (Ambroise, C. Auxentium, 34). La
musique est toujours du côté de l'hérésie si des ortho-
:
doxes s'y aventurent un peu, il faut leur chercher des
excuses c'est (Ephrem) pour combattre les hérétiques
avec leurs propres armes; Ambroise a voulu empêcher
;
le peuple de se démoraliser dans des circonstances cri-
tiques il avait d'ailleurs le précédent des églises orien-
tales (Augustin, Conf. 9, 15).
L'attitude de l'Église à l'égard de la musique du siècle
répond assez à ce que fut son attitude à l'égard de la
philosophie des sages de ce monde. Honnie, bannie,
radicalement exclue — au moins le croyait-on — à
l'origine, et par la suite indéfiniment vilipendée par ceux-
là mêmes qui en tirent parti. Philosophie, musique avaient
d'ailleurs une solide parenté, Pythagore, Platon présidant
à l'une et à l'autre. En la personne d'Ambroise on les
retrouve toutes deux et, de la part de ses admirateurs,
;
les mêmes imaginations à l'œuvre pour l'en disculper
comme d'une tare Paulin de Milan (Vita Ambrosii, 7-
9) tient à nous assurer qu'il voulait tout ignorer de la
philosophie, mais il avait lui-même prétendu le contraire
pour qu'on ne le choisît pas comme évêque. C'est dans
cette même intention — et nous retrouvons sans doute
ici la musique — qu'il aurait à la même époque et
ostensiblement fréquenté des femmes publiques (c'est
ainsi que les chrétiens appelaient alors chanteuses et
musiciennes)
Ces textes nous montrent les résistances que devait
affronter une innovation comme celle d'Ambroise. Il
fallait pour l'entreprendre une exceptionnelle autorité,
puis pour la mener à bien beaucoup de sûreté et de
justesse dans l'exécution. Son succès montre pourtant
qu'elle a rencontré des oreilles favorables. Ici, pour
comprendre un peu ce qu'on y a apprécié positivement,
nous sommes presque exclusivement tributaires d'Au-
gustin. La rareté des témoignages ne doit pas nous étonner
en une matière où il y avait à dire des choses fines,
neuves et qui allaient à contrecourant. Augustin d'ailleurs
n'est pas seulement une personnalité exceptionnelle dont
on pourrait penser que le témoignage ne vaut que pour
lui. Il s'est exprimé sur le sujetjusqu'à la fin de sa vie,
en des années où il avait des reponsabilités et ne pouvait
ignorer que son jugement aurait quelque poids pour
l'Eglise. Dans les Confessions, dans son traité De la
musique, dans ses lettres, ses sermons, dans les Rétrac-
tations pour finir, nous avons l'impression de percevoir
le retentissement, le choc de cette musique nouvelle dans
une âme qui reste sensible alors même qu'elle cherche
à se défendre de cette émotion et à en reconnaître le
principe.
La musique et l'âme
Il
pas honte de le confesser:
entend les hymnes d'Ambroise, il pleure et il n'a
« En ces jours-là (hiver 386),
je ne me rassasiais pas de la surprenante douceur que
j'éprouvais à considérer tes desseins salutaires. Combien
!
j'ai pleuré à entendre tes hymnes, tes cantiques, les
!
suaves accents dont retentissait ton Église Quelle émo-
tion j'en recueillais Ils coulaient dans mon oreille,
distillant la vérité dans mon cœur. Un grand élan de
;
piété me soulevait les larmes ruisselaient sur ma joue,
mais elles me faisaint du bien » (Conf. 9, 14).
Quelques semaines plus tard, au cours des mois où il
se prépare au baptême, il entreprend la composition d'un
traité De musica, œuvre improvisée, œuvre de néophyte
en ce domaine mais à laquelle il doit tenir puisqu'il
l'emportera en Afrique. Il y travaille encore et notamment
pour mettre au point le 1. VI à quoi doit aboutir tout
le reste et qu'il envoie en 409 à l'évêque Memorius
(Ep. 101). Or ce n'est pas un traité sur la « musique »
traditionnelle de l'Église, mais sur la musique tonale de
tradition grecque, la musique profane de son temps.
Chez un homme décidé à faire du christianisme le tout
de sa vie, une telle entreprise est bien remarquable et
d'autant plus que c'est une apologie en profondeur de
cette musique dont il rattache la vertu à celle des
harmonies numériques — le mot numerus revient sans
cesse — qui sont image ici-bas de la sagesse de Dieu.
Puis c'est la mort de Monique (automne 387). Augustin
rentre chez lui ivre de chagrin et sombre dans le sommeil.
Au réveil il se trouve apaisé et cette délivrance rappelle
à sa mémoire «les vers si vrais de ton Ambroise »,
; ;
l'hymne Deus creator omnium dont il cite les deux
premières strophes « je sentis la douceur de pleurer en
ta présence ces larmes furent comme un lit que j'étendis
sous mon cœur et où il trouva le repos
33).
» (Conf. 9, 32-
;
plus ardente, plus religieuse, quand elles sont ainsi chan-
tées, que si elles ne l'étaient pas je sens aussi que dans
la voix et le chant tous nos sentiments trouvent des
correspondances en rapport avec leur diversité, et je ne
sais quelle mystérieuse affinité qui les stimule. Quand je
me souviens des larmes que me tiraient les chants de
ton Église aux premiers temps de ma foi retrouvée et
qu'aujourd'hui même je suis ému non par le chant mais
parce ce qu'on chante quand c'est à voix pures et menées
convenablement, je reconnais une fois de plus la grande
»
utilité de cette institution (Conf. 10, 49-50). On notera
ce mot d'institution, comme en 9, 15 à propos de
l'initiative d'Ambroise.
Augustin ne s'est pas borné à constater l'efficacité
religieuse du chant des hymnes. Il a voulu en rendre
compte et les raisons qu'il nous donne nous permettent
d'entrevoir un peu ce qu'était l'ethos de cette musique.
Reprenons le De musica. En dépit de la généralité des
discussions poursuivies, on ne saurait douter en effet
qu'au 1. VI en particulier les problèmes sont posés dans
la perspective de l'hymne ambrosienne ce n'est pas un
:
;
un logos qui est l'archétype de la beauté qui est dans
les corps il provient d'un archétype plus beau qui est
dans l'âme. Celui-ci porte dans l'âme, pour l'ordonner,
une lumière plus haute encore, celle du Beau originel
ne résidant en rien d'autre qu'en soi. Il ne s'agit plus
cette fois d'un logos, mais du créateur (poietes) du logos
qui est dans l'âme» (Enn. 5, 8, 3).
Mais Augustin n'en reste pas là. Chez Plotin l'âme
:
Mais dans la création ambrosienne, c'est la musique,
croyons-nous, qui répond à l'intention fondamentale et
représente la plus grande nouveauté il y a poésie, c'est-
à-dire forme métrique, pour qu'il puisse y avoir chant
ou plus exactement ce chant qui serait de façon pénétrante
instaurateur de sérénité, approche de l'éternel. Et c'est
sa musique, nous l'avons vu, qui fit la fortune de
l'hymnodie.
Intégrées à la vie de l'Église, les hymnes y diffusent
1
conserveront la mémoire ;
leur influence. Inséparables de l'esthétique comme des
formes littéraires et musicales de l'Antiquité, elles en
sur les traces d'Augustin et
avec des exigences de plus en plus techniques, les chrétiens
étudieront les problèmes théoriques du chant, ils réveil-
leront de leur sommeil les musicographes d'autrefois,
d'où Boèce, Hucbald et la renaissance au 11e siècle d'une
notation musicale précise. Concrètement l'expérience
parallèle de l'hymnodie exercera son influence sur la
psalmodie elle-même qui dépouillera sa rudesse mono-
tone ; on verra naître des genres nouveaux, tropes et
séquences.
l'homme:
juive, la spiritualité des hymnes instaure une religion
moins pathétique, plus confiante en la docilité de
quelque chose de l'humanisme avec sa noblesse
et ses risques.
Dans le développement de l'Église, l'hymnodie
(Ambroise médiateur de la poésie et de la musique
romaines) joue au plan de la prière un rôle comparable
à celui des théologiens et moralistes (Ambroise encore
et Augustin) qui intègrent dans la doctrine les meilleures
parts du stoïcisme et du néo-platonisme. La religion du
Christ «s'inculture» dans un nouvel univers et intrin-
sèquement s'enrichit; Dieu en des langues et selon des
tonalités différentes sera plus universellement adoré
prière multiforme, écho de la sagesse multiforme de Celui
:
qui a tout créé, qui ne rejette rien de ce qu'il a créé,
mais au contraire le guérit, le dilate et l'assume en lui.
Deus creator omnium.
J. PERRET
La Maison-Dieu, 173, 1988, 61-69
Jean-Louis CHARLET
RICHESSE SPIRITUELLE
D'UNE HYMNE D'AMBROISE :
AETERNE RERUM CONDITOR *
1. Conf. 9, 15.
2.Conf.10,49-50.
3. Conf. 4, 15 ; 9, 32 ; 10, 52 ; 11. 35.
autre hymne, Aeterne rerum conditor 4, montrer quelle
richesse spirituelle les hymnes d'Ambroise peuvent appor-
ter à la prière chrétienne en cette fin du 20e siècle.
TEXTE 5 TRADUCTION
Aeterne rerum conditor, Éternel Créateur du monde
noctem diemque qui regis Qui régis la nuit et le jour
et temporum das tempora Et qui rythmes le cours du temps
ut alleues fastidium, Afin d'en alléger le poids,
:
lesu, labentes respice
et nos uidendo corrige
Regarde, ô Jésus, ceux qui tombent
En nous voyant relève-nous : ;
si respicis, lapsus cadunt A ton regard, l'erreur s'enfuit,
fletuque culpa soluitur. Les pleurs effacent le péché.
Tu lux, refulge sensibus
mentisque somnum discute
te nostra uox primum sonet
; Brille pour nos yeux, ô Lumière,
Éveille les cœurs endormis.
Que nos premiers chants soient pour toi :
et uota soluamus tibi. Pour toi, nos vœux soient accomplis !
Sit, Christe, rex piissime, Gloire à ton Père, à toi la gloire,
tibi Patrique gloria Roi de toute bonté, ô Christ !
cum Spiritu Paraclito, Gloire à l'Esprit Saint Paraclet,
in sempiterna saecula. Pour les siècles d'éternité.
:
du Christ, vrai Jour, Soleil de Justice. Ambroise part
d'un phénomène naturel le chant du coq qui annonce
le lever du jour. Mais, en s'appuyant sur le récit biblique
de la création de la lumière (première strophe cf. Gn 1, :
7. Ce que les latins
31.
appellent le gallicinium : voir ISID. nat. 2,
3-5) et sur la péricope du reniement de Jésus par Pierre
avant le chant du coq (v. 15-16 : cf. Le 22, 61-62 plutôt
que Mt 26, 34 ; Mc 14, 72 ou Jn 13, 38), il en dégage
la signification morale et spirituelle pour la vie des
chrétiens. A une première partie méditative et contem-
plative où domine l'indicatif (strophes 1 à 4) succède
une seconde partie d'exhortation et de demande où se
multiplient subjonctifs et impératifs (strophes 5 à 8).
Les deux premières strophes associent une invocation
au Dieu créateur du temps, du rythme alternatif du jour
et de la nuit qui remédie à la faiblesse humaine en
compensant l'activité diurne par le repos nocturne, à une
méditation sur les vertus du coq et de son cri héraut:
du jour, le coq annonce le lever du Jour véritable, du
Soleil de Justice. Les strophes 3 et 4 expriment les
bienfaits spirituels de ce chant pour les chrétiens :
par
lui, le lever du jour va dissiper non seulement les ténèbres
atmosphériques, mais encore les ténèbres morales. Le
calme revient sur les flots, mais aussi dans l'âme du
chrétien qui, une fois écarté le mal, retrouve à l'image
de Pierre au chant du coq la force du bien par le repentir.
»
figuré par le chant du coq et le lever du soleil. Le lever
ou redressement est donc non seulement physique, mais
moral et, finalement, résurrection spirituelle.
De la même manière, les iacentes du v. 18 désignent
au premier degré les dormeurs « couchés », « étendus»
;
sur leur lit au deuxième degré, l'homme qui, comme
Pierre avant le chant du coq, est tombé dans le mal
;
(image de la chute aux v. 24 à 27), qui gît endormi par
ses fautes au troisième degré — conséquence du second
—, l'homme étendu mort par le péché, qui n'a pas
encore été ressuscité par le Christ. Derrière le sommeil
physique, Ambroise suggère le sommeil moral et la mort
:
spirituelle. En définitive, le coq est le Christ qui nous
incite à ressusciter avec Lui d'où l'apostrophe finale à
Jésus, v. 25-32
Ambroise a donc su enraciner l'hymne dans l'expérience
humaine la plus concrète, la plus immédiate et la plus
large — donc accessible à tous — pour instruire mora-
lement celui qui chante et l'élever progressivement au
mystère de Dieu, inscrit dans la nature et révélé par
:
est un exercice spirituel qui fait progresser dans la voie
du salut par cette prière de louange et de demande,
;
les contemporains d'Ambroise ou que les chantres médié-
vaux à la valeur du chant du coq et le développement
de la lumière artificielle a quelque peu estompé l'op-
position entre la nuit et le jour. Il n'en reste pas moins
que le rythme d'alternance entre la nuit et le jour est
biologiquement ancré au plus profond de nous-mêmes.
Les vers d'Ambroise s'appuient sur une expérience inscrite
dans la nature humaine et donc, même pour un homme
»
de la fin du 20e siècle, ils partent de son « vécu (comme
disent les modernes !) pour le mener au mystère ineffable
de Dieu. C'est à ce titre que l'hymnodie ambrosienne
reste très moderne et demeure une source vivante de
prière pour les chrétiens du 20e siècle, et bientôt du 21e :
partir de l'homme dans le monde et dans le temps pour
le mener à Dieu, à l'éternité dans l'infini, n'est-ce pas
ce que recherche toute forme de prière ?
Jean-Louis CHARLET
LA FOI N'ESTPAS
CE QUE
VOUS PENSEZ
Bernard Bro
passij'ailafoi."Jecrois. Et
mavie.
jesaisquec'estleplusbeaucadeaude
"Je ne sais
--~
ce -
128pages,55F.
La Maison-Dieu, 173, 1988, 71-79
Dag NORBERG
LE « PANGE LINGUA »
DE FORTUNAT
POUR LA CROIX
VI une province
ERS de l'Empire romain,
la fin Gaule avait été
la
célèbre pour son érudition, son art
oratoire et sa littérature. Au 5e siècle quand les
Francs, les Goths et les Bourguignons s'étaient installés
dans le pays, on y trouvait encore des hommes qui
s'appliquaient à écrire avec l'élégance formelle de
l'époque passée. Mais au siècle suivant, la situation
changea. La disparition de l'administration romaine fut
définitive, les villes ne purent plus maintenir l'enseigne-
ment scolaire, l'évolution de la langue parlée ne fut plus
arrêtée par les règles de l'école. Les prêtres et les évêques,
pour que le peuple pût les comprendre, se trouvèrent
obligés de s'exprimer d'une manière plus simple et de
laisser de côté les subtilités rhétoriques, auparavant si
aimées des Gaulois. Nous pouvons en voir le résultat
chez Grégoire de Tours, conteur plein de vie et d'intérêt,
mais dont le latin diffère complètement de celui de
Cicéron et de saint Augustin. Cette différence est consi-
dérable même si l'on essaie de fermer les yeux sur
l'orthographe mérovingienne et d'entendre Grégoire lire
ses textes.
La situation de la poésie, dominée par la versification
dactylique, était pire encore. L'évolution de la langue
avait effacé l'ancienne distinction quantitative des syllabes
et la prosodie classique n'était plus perceptible aux oreilles
sans des études approfondies. Comment acquérir ces
?
connaissances quand les écoles avaient disparu Au début
du siècle vivaient encore certaines personnes qui avaient
étudié la versification classique. Tel était Avit, évêque
de Vienne, mort en 518. Il avait composé quelques livres
en hexamètres sur la création du monde et son histoire
primitive. Mais, ne sachant si ce qu'il faisait allait dans
le bon sens, il annonce dans une préface son intention
de finir «parce que ceux qui comprennent la mesure
des syllabes sont si peu nombreux ».
Bien que l'on ne possédât plus les connaissances néces-
saires pour écrire des vers, on ne méprisait pas l'art
poétique. Même les rois barbares trouvaient un certain
plaisir à entendre leurs vertus louées en vers latins. De
Chilpéric, roi à Soissons et à Paris et assassiné en 584
après une vie de crimes de toutes sortes, Grégoire de
Tours raconte qu'il avait lui-même écrit des vers latins
qui, cependant, étaient si mauvais que l'on ne pouvait
pas les accepter. Chilpéric, son frère Sigebert et d'autres
encore ont reçu le poète Venance Fortunat avec bien-
veillance quand celui-ci visitait leurs cours et exprimait
ses remerciements en poèmes latins.
Le « Pange lingua »
originale:
peut-être de ces mots quand il écrit, dans la version
dulce lignum dulce clavo dulce pondus susti-
nens, «o bois très doux qui porte un fardeau si doux
avec des clous si doux ».
Il est plus probable que Fortunat se souvient de la
strophe suivante dans le dernier chant de Prudence :
Solve vocem, mens, sonoram, solve linguam mobilem,
die tropaeum passionis, die triumphalem crucem,
pange vexillum, notatis quod refulget frontibus.
« Délie la voix harmonieuse, délie la langue mobile. Dis
le trophée de la passion, dis le triomphe de la Croix,
chante le signe qui brille sur les fronts qui en sont
marqués. »
Le sujet est le même dans la première strophe de
Fortunat, les mots sont partiellement les mêmes (pange,
lingua, tropaeo, die triumphum). Les reliques de la sainte
Croix ont été portées, comme dans une procession de
triomphe, au monastère de Radegonde. Fortunat savait
bien que dans un triomphe romain on montrait les
trophées conquis dans la bataille. Le Christ avait remporté
la victoire sur la croix, et la croix était donc devenue
son trophée.
Les pères de l'Église ont souvent interprété l'Ancien
Testament à la lumière du Nouveau. On a comparé Eve
et la sainte Vierge, l'arbre du serpent au milieu du
Paradis et l'arbre de la Croix. Le péché fut introduit au
monde par une femme, il fallut que le monde soit délivré
du mal par une femme. L'homme tomba par l'arbre du
Paradis, c'était du même arbre que dépendait la Rédemp-
tion. Dieu avait donc marqué l'arbre du Paradis, disait-
on, dont un plant fut sauvé dans le déluge pour devenir
l'arbre dont on a fait la Croix. Saint Ambroise dit, dans
son commentaire du Psaume 35, 3 « La croix du Christ
:
:
vigoureuse. Les particules de liaison sont aussi omises
dans la suite sanguis, unda profluit, terra, pontus, astra,
mundus quo lavantur flumine.
Dans les trois strophes finales Fortunat s'adresse direc-
tement à la Croix. Inutile d'essayer de paraphraser ou
d'expliquer ce texte. Aucune traduction, aucune inter-
prétation ne peuvent rendre justice à la beauté des vers
finaux. Il faut les lire dans leur forme latine originale
pour bien entendre la profondeur de l'émotion du poète.
Ils sont sublimes.
Dag NORBERG
e Sources Chrétiennes
TERTULLEEN
LE MARIAGE UNIQUE
Introduction, texte critique, traduction et notes par Paul MATTEI.
Troisième traité de ce père de la théologie latine sur le mariage. Dans son rigorisme même,
Tertullien est un témoin important de la sainteté et de la bonté de cette institution qui est
aussi un sacrement.
Sources ChrétiennesnO 343 430 pages 325F.
HILAIRE DE POITIERS
COMMENTAIRE SUR LE PSAUME 118
Introduction, texte critique, traduction et notes par Marc MILHAU.
Un des premiers essais de l'exégèse latine. ue ce psaume sapientiel par excellence. Hilaire
tire tout une doctrine de la perfection chrétienne.
Sources ChrétiennesnO 344 528 pages 164F.
Jean CHRYSOSTOME
COMMENTAIRE SUR JOB, tome 1
eu beaucoup à tirer du Livre de Job pour éclairer la vie quotidienne dans la foi mal,
tentation,salut, justice.
:
Le grand orateur a constamment commenté la Bible à l'usage du peuple. Et il y a toujours
RÉÉDITION
LETTRES DES PREMIERS
CHARTREUX, tome 1
rf
Introduction, texte critique, traduction et notes par un Chartreux.
Les lettres authentiques de saint Bruno et de quelques-uns des tout premiers prieurs de
Chartreuse permettent de saisir les débuts de l'étonnante aventure cistercienne.
Sources Chrétiennesno88 278 pages. 160F
La Maison-Dieu, 173, 1988, 81-100
Sœur ÉTIENNE
LE CANTIQUE NOUVEAU
DE L'ÉGLISE EN PRIÈRE
:
midi au jour qui s'achève, notre vie quotidienne est
marquée par cet écoulement du temps « Un jour nou-
veau commence », « Le jour s'achève », « Seigneur, au
seuil de cette nuit », « Voici la nuit ».
L'hymne trans-
forme le chiffre muet de notre montre à quartz en
:
louange du Créateur. Grâce à elle, chaque matin a la
saveur du premier matin du monde
:
Fin de la journée, fin de la vie, fin des temps l'hymne
du soir chante tout cela. Elle rassemble les voix d'un
peuple de veilleurs dans l'attente du Retour du Christ :
« Ilviendra,
Un soir
Pareil à celui-ci,
Peut-être.
Ilviendra,
Un soir
Sera le dernier soir du monde.
Un silence d'abord
!
Et l'hymne éclatera » (p. 599).
« 0
Fils unique, Jésus Christ,
Nous contemplons en ton visage
La gloire dont tu resplendis
Auprès de Dieu avant les siècles » (p. 662).
La Nuit de Pâque :
« 0 Nuit, de quel éclat tu resplendis ! » (p. 341).
Le jour de la Transfiguration :
« 0
Toi dont le chant éclaire
Le commencement du monde. » (p. 1278).
« Voici »
est encore un mot qui fait lever les yeux
:
pour contempler les merveilles de Dieu.
Au temps de l'Epiphanie
Hosanna !
Les portes de la ville
Béni sois-tu, Seigneur ! » (p. 290).
Le Vendredi-Saint :
« La Parole en silence
Se consume pour nous » (p. 315).
Le jour de Pâque :
« Lumière aux nuits de mort,
Feu de Pâque aujourd'hui,
Allume un chant d'espoir,
Dieu de Pâque dans nos vies » (p. 349).
Le jour de la Toussaint :
Aujourd'hui l'univers
«
met sa robe de gloire ,
l'ordre du monde est restauré » (p. 1366).
Avec cet «Hodie », nous sommes au centre d'une
spiritualité liturgique. Pour les croyants, Avent, Carême,
Temps Pascal, Temps ordinaire sont tous des moments
favorables, « le temps où Dieu fait grâce à notre terre»
(p. 1151). Mais l'hymne donne à chaque temps sa couleur,
! !
en mettant sur nos lèvres les acclamations traditionnelles
« Maranatha », « Hosanna
:
!
:
», « Alleluia
nouveaux dont le poète les habille
», et les mots
« !
Debout le Seigneur vient
Une voix prophétique
A surgi du désert
Un désir, une attente
Préparons-nous !
Ont mûri nos esprits
» (p. 1).
Jean-Baptiste est toujours là, au seuil de l'Avent, pour
inviter à la conversion.
:
Le chant des anges continue d'inspirer les hymnes de
Noël
!
On le voit, il n'y a pas que l'icône à être dans la
liturgie une théologie de la beauté Le langage poétique
de l'hymne introduit aussi à la connaissance savoureuse,
à la contemplation des mystères du Christ célébrés au
long de l'année liturgique.
:
« Sème les
nous te dirons » !
mots qui donnent vie
la liturgie:
présent — parle de son travail de poète écrivant pour
«Ce qui me fait prendre un crayon et du
papier, c'est souvent un mot de la Bible qui commence
à bouger en moi et ne me laisse plus de repos, ou deux
bouts de versets qui se mettent à jouer l'un avec l'autre
et trouvent du sens, ou telle image fugitive cueillie dans
la parole d'un autre et qui m'habite le cœur. Je ramasse.
Je ramasse avec le désir que ce que je reçois d'ailleurs
germe et donne une pousse neuve. Et si cette pousse,
longtemps taillée et retaillée, travaillée, me paraît avoir
suffisamment de vigueur et de rigueur, pour être risquée
dans l'univers liturgique, à côté des mots jaillis de la
bouche de David, d'Isaïe, de Job et de Jean et de tous
12. DSL, n" 24. Dans un article de La Maison-Dieu, 1982 (n" 150)
intitulé « Bible et poésie », Sœur Marie-Pierre Faure de la Commission
Francophone Cistercienne (CFC) a abordé ce sujet. Pour ce qui
concerne les hymnes p. 35 à 44. On sait qu'une centaine d'hymnes
de PTP viennent de la CFC.
risque ;
ceux qui ont fait le Livre, alors je lui laisse courir ce
mais c'est toujours en tremblant, toujours en
me demandant si j'ai assez contemplé ce que Dieu me
donnait à lire dans le monde, les hommes et la Bible u. »
Oui, l'Écriture, parce qu'elle est inspirée, est inspi-
rante !
:
» (p. 837).
!
ceux qui la chantent les propres acteurs de l'Histoire du
!
salut dont elle s'inspire Ils sont aujourd'hui Israël sortant
d'Égypte, les pèlerins sur la route d'Emmaüs
« Dieu est àl'œuvre en cet âge» :
des hymnes pour le temps présent
:
l'holocauste de milliers d'enfants juifs marqués de l'étoile
jaune
« L'enfant juif
L'enfant captif
Dans la nuit succombe
Il est mort
Sous l'étoile d'or
Écoutez pleurer Rachel
Au lendemain de Noël
Souvenez-vous de ses fils
Traqués dans l'ombre » (p. 1403).
2. « 0
toi, l'au-delà de tout, quelle hymne te dira
Chanter un Dieu inévident
? »
:
l'Incarnation et la Passion du Fils redoublent aussi le
Mystère et la foi s'étonne
?
Qui donc est Dieu, si démuni, si grand, si vulnérable
«
?
Qui donc est Dieu pour nous aimer ainsi » (p. 720).
?
Quel est donc le secret de ces ami( e)s de Dieu N'est-
15. Revue Église qui Chante, n" 232. Sœur Marie-Pierre présente
l'hymne « Humble servante du Seigneur ».
Le chant de l'Église à celui « qui habite
les hymnes d'Israël» (Ps 21, 4)
Sr ÉTIENNE, o.s. b.
Abbaye de Pradines
Quelle tradition
?
Question préalable, de quelle tradition s'agit-il A la
différence des rites sacramentels, l'office divin ne peut
pas se référer à une institution par le Christ, ni même
à une structure fondamentale remontant à l'époque apos-
tolique. L'apparition progressive, en Orient comme en
Occident, d'abord d'heures plus particulièrement affectées
à la prière, puis d'une structure de prière pour ces
différentes heures correspond pourtant au besoin de
répondre le moins mal possible au précepte évangélique
et apostolique de prier sans cesse3, tout en le conciliant
avec les nécessités de la vie concrète et, très particuliè-
rement lorsqu'il s'agit des ministres de l'Église, avec
l'exigence missionnaire. Mais ceci laisse toute liberté à
l'initiative de l'Église et bien qu'on puisse discerner des
structures de base communes à toutes les traditions
liturgiques 4, nous constatons pourtant des différences
profondes sur le plan de la réalisation concrète entre les
divers rites d'Orient et d'Occident. Ainsi, pour nous
limiter aux rites romain et byzantin, nous pouvons relever
la similitude de structure des offices du matin précédés
l'un et l'autre par une longue psalmodie monastique,
commençant par le psaume 50, utilisant des cantiques de
:
l'Ancien Testament et terminés par les psaumes de
laudes 148-150. Mais sous cette structure commune la
différence reste grande entre l'office romain presqu'u-
niquement composé de textes scripturaires et son parallèle
byzantin où la composition poétique en vient à recouvrir
ou même à remplacer le texte inspiré.
;
3.Lc18,1 1Th5,16.
4. Ceci a bien été mis en lumière par R. TAFT, The Liturgy of
the Hours in East and West, Collegeville, 1986.
En ce qui concerne le rite romain, nous nous trouvons
en face d'une tradition bien délimitée et facile à cerner
puisque l'office divin s'y est élaboré et constitué dans sa
structure entre le 4e et le 6e siècles. Si nous n'avons pas
de documents nous permettant de suivre les étapes de
cette élaboration, nous voyons apparaître dans la règle
de saint Benoît, vers le milieu du 6e siècle, une structure
d'office bien élaborée et qui se réfère explicitement à
un office de l'Église romaine déjà constitué 5. D'autre
part, la comparaison entre cet office bénédictin et l'office
romain tel que nous l'atteignons dans les documents du
9e siècle fait apparaître entre les deux une similitude de
structure qui ne peut s'expliquer que par la dépendance
de l'office bénédictin par rapport à l'office romain. Nous
sommes donc sur un terrain particulièrement solide, en
présence d'une tradition qui, déjà constituée au 6e siècle,
s'est conservée inchangée quant à ses lignes générales
jusqu'au 20e siècle 6. Certes les conditions dans lesquelles
cet office est célébré ont beaucoup changé au cours de
ce millénaire et demi, de la célébration uniquement
chorale on est passé à la récitation privée généralisée
par ailleurs des végétations parasites se sont développées
;
puis ont disparu, le répertoire s'est enrichi au cours des
;
de la semaine. Les autres heures avaient des psaumes choisis et
fixes aux laudes, seuls variaient un psaume et le cantique de l'Ancien
Testament.
Théologie de l'office divin
Tant que l'on reste dans le domaine des généralités
énonçant les principes sur lesquels est bâtie une doctrine
de l'office divin, la fidélité à la tradition ne soulève aucun
problème particulier.
L'office divin est présenté à l'article 83 comme parti-
cipation à la louange céleste du Christ prêtre et en même
temps intercession pour le salut du monde entier. Prier
les heures de l'office c'est donc participer à la prière
même du Christ tête et corps, c'est prendre sa part de
la prière de toute l'Église, idée développée, à la suite
de toute la tradition d'Orient et d'Occident, par la
Présentation générale de la liturgie des Heures 7.
Se référant explicitement à l'antique tradition chré-
tienne, l'article 84 rappelle que l'office divin consacre par
la louange de Dieu tout le déroulement du jour et de
la nuit, notion traditionnelle qui remonte plus haut que
la constitution de l'office proprement dit. On peut la
déceler déjà en germe à l'époque apostolique dans la
prescription de la Didachè demandant la récitation du
Pater trois fois par jour. Avec Tertullien nous avons la
mention explicite de la coutume de prier aux troisième,
sixième et neuvième heures du jour qui sont à la fois
les plus importantes de la journée et celles que les
apôtres ont fixé, heures au cours desquelles il faut
expliciter et actualiser la prière, étant sauf le précepte
de prier toujours et partout et en tout temps 8. Notion
qui sera reprise et développée par Cyprien, Jérôme,
Augustin, Cassien et, à travers ce dernier, par les règles
monastiques, et que nous retrouvons à l'article 86 de la
Constitution. Article ajouté au schéma lors de la dis-
cussion conciliaire et qui s'adresse plus particulièrement
aux prêtres adonnés au ministère pastoral pour leur rap-
peler la fécondité spirituelle de la prière au nom de
7.IGHL,5-9.
8. De ieiunio 10, 3-4, Corpus Christianorum Ser. Lat. 2, 1267.
l'Église, idée sur laquelle les Pères conciliaires reviendront
encore à l'article 90, lui aussi ajouté au cours de la
discussion, pour préciser que la célébration des heures
est non seulement la prière publique de l'Église, mais
doit être aussi la source de la piété et l'aliment de la
prière personnelle. Rappel hautement traditionnel qui
fait allusion à la recommandation de la règle de saint
Benoît ut mens nostra concordet voci nostrae 9.
Dans la mise en œuvre concrète, tout a été fait pour
que les heures de l'office puissent être récitées de façon
fructueuse et, comme le demande l'article 94 de la Consti-
tution, « au moment qui se rapproche le plus du temps
véritable de chaque heure canonique ». Pourtant, et nous
aurons l'occasion d'y revenir, la nécessaire adaptation
aux conditions de la vie moderne a amené à renoncer
à un temps de prière assigné pour la nuit, alors que
l'article 84 mentionnait explicitement le déroulement du
jour et de la nuit.
9. RB 19, 7.
comme prière du soir, d'après la vénérable tradition de
l'Église universelle 10, de sorte que ces heures constituent
le duplex cardo, les deux gonds sur lesquels s'articule
l'office quotidien. Aussi « doivent-elles être tenues pour
les heures principales et être célébrées en conséquence »,
ce qui ne signifie pas simplement précisa le rapporteur
que ces offices doivent être dits en temps opportun, mais
encore que les prêtres doivent les considérer comme
prière du matin et prière du soir La vénérable tradition
de l'Église universelle à laquelle se réfère le texte conci-
liaire est une allusion aux deux heures de l'office célébrées
quotidiennement avec et pour la communauté chrétienne,
cet office cathédral, comme l'appellent les historiens de
la liturgie, dont on discerne l'existence au 5e siècle en
Orient comme en Occident et dont on retrouve encore
les vestiges après sa fusion avec l'office d'origine monas-
tique. Et nous pouvons encore lire la vivante description
du lucernaire dans la Jérusalem du 4e siècle finissant telle
que la pèlerine espagnole Egérie la faisait à ses
correspondantes 12.
Le caractère populaire de cet office cathédral lui venait
du fait qu'il était composé d'un petit nombre de psaumes,
toujours les mêmes donc faciles à mémoriser, tandis
litaniques d'intercession et les rites sensibles :
qu'étaient davantage développés l'hymnodie, les prières
lumière,
encens, attitudes corporelles. Concrètement on ne pouvait
songer à revenir à la pratique des psaumes fixes alors
que la sensibilité contemporaine rejette toute idée de
répétition comme inévitablement entachée de routine, ce
qui avait déjà amené le bréviaire de Pie X à rompre
avec la tradition universelle dans tous les rites chrétiens
de terminer chaque jour l'office matinal par les
psaumes 148, 149, 150. Mais l'article 127 de la Présen-
tation générale nous informe que l'on a choisi pour ces
13.IGHL,84.
14. Art. 89c, « L'Heure qu'on appelle matines, bien qu'elle garde
dans la célébration chorale son caractère de louange nocturne, sera
adaptée de telle sorte qu'elle puisse être récitée à n'importe quelle
heure du jour, et elle comportera un moins grand nombre de psaumes
et des lectures plus étendues. »
15.IGHL,55.
de trois cantiques, selon la tradition du troisième nocturne
de l'office bénédictin, puis d'une lecture d'évangile
conclue par le Te deum.
Mais ces innovations, voulues en fonction des conditions
de vie du clergé, n'étaient pas destinées aux communautés
de vie contemplative. L'article 89c affirmait que cette
heure devait garder dans la célébration chorale son
caractère de louange nocturne. Surtout le rapport de
Mgr Martin aux Pères du Concile à propos de l'adaptation
de l'office aux conditions de la vie présente faisait
remarquer qu'il s'agissait « seulement de l'office à dire
par ceux qui mènent une vie active tels que les clercs
séculiers et religieux et non de l'office à dire par ceux
qui mènent la vie contemplative. Si le Concile décide
une nouvelle réforme et abréviation de l'office, il ne
conviendrait pas que cet office, abrégé à cause du minis-
tère des âmes, soit imposé aux moniales et aux autres 16.
Et en octobre 1966, au cours de la réunion du groupe
»
de travail du Consilium qui fixa définitivement la structure
du nouvel office, il était encore prévu des adaptations
particulières à envisager dans un second temps en ce qui
concerne la célébration nocturne des communautés de
vie contemplative 17.
Or pratiquement on n'a pas proposé aux moniales
(exception faite de celles qui utilisaient l'office bénédictin)
d'autre alternative que la Liturgie des Heures. Ceci
signifie que ces moniales n'ont plus jamais l'occasion de
pratiquer cet exercice fondamental de l'ascèse monastique
traditionnelle qu'est la psalmodie prolongée, cette lente
rumination des psaumes sans cesse répétés, semaine après
semaine, au milieu du silence nocturne qui a façonné
pendant près de deux mille ans l'âme des contemplatifs.
Psalmodier, écrivait Césaire d'Arles, «c'est comme si
l'on semait dans un champ, prier c'est comme si l'on
enfouissait et l'on recouvrait la semence en labourant
tempus longius :
de lecture pour ceux qui désireraient le prolonger per
A l'office férial on peut ainsi dire six
psaumes (ou fragments de psaumes), les trois de la
première (ou seconde) semaine suivis par la lecture
d'Écriture sainte et son répons, puis les trois de la
troisième (ou quatrième) semaine suivis par la lecture
patristique et son répons. Les dimanches et jours de fête
»
on peut enfin y joindre les « vigiles dont déjà il a été
question 2(). On ne peut certes pas encore parler de
psalmodie protracta, l'amélioration n'en est pas moins
notable. Mais qui connaît cette instruction qui n'a pas
été publiée en français ?
La suppression de l'heure de prime, prévue par
l'article 89d, ne semble avoir posé aucun problème. En
effet comme l'écrivait le Père P.M. Gy, faisant le
commentaire de ce chapitre, cette suppression « se justifie
à la fois par la tradition et par les conditions actuelles
de l'office divin. la cause qui a fait établir prime ayant
disparu, il est normal que cette heure ne soit pas
maintenue » 21.
»
Vient enfin la question des « petites heures de tierce,
sexte et none. Comme on l'a déjà vu, la coutume de
prier à tierce, sexte et none, déjà considérée comme
apostolique par Tertullien, pouvait se prévaloir d'un solide
poids de tradition. Mais Tertullien constatait que ces
la journée :
trois heures correspondaient aux grandes articulations de
«ces trois heures, écrivait-il, parce qu'elles
partagent le jour, qu'elles distinguent les occupations,
qu'elles sont annoncées en public, doivent aussi être les
8des(1972),
20. Notitiae 254-258. La «notificatio» de 1972 a été
comptétée par précisions publiées
par Notitiae 10 (1974), 39.
21. LMD 77 (1964), 165.
»
plus solennelles dans les prières 22. Et ici force est bien
d'admettre que les articulations de la journée moderne
sont différentes, prétendre rétablir la vérité des heures
et maintenir l'obligation de la célébration de ces trois
offices, et a fortiori de leur récitation en privé, c'était
s'engager dans une impasse. Aussi, une fois encore, la
tradition a-t-elle dû céder devant les nécessités de l'adap-
tation.
Pourtant la Constitution conciliaire fait-elle la distinc-
tion entre, d'une part, le prêtre et le laïc engagé dans
la vie active et récitant l'office hors du chœur et à qui
il est permis de choisir une seule de ces trois heures,
dite heure médiane, et, d'autre part, l'office choral où
l'on devra garder la célébration de tierce, sexte et none.
La Présentation générale maintient la même norme et
rappelle l'obligation de ces trois heures au chœur et pour
ceux qui mènent la vie contemplative23. Et pourtant
certaines communautés, même contemplatives, ne célè-
brent actuellement que la seule heure médiane, pratique
qui peut d'ailleurs se prévaloir des Directives pratiques
pour la célébration de la Liturgie des Heures, normes
insérées en tête du Thesaurus Liturgiae Horarum Monas-
ticae et approuvées en 1977 par la Congrégation pour
le Culte divin. D'après ces normes, en effet, il suffit de
célébrer au chœur au moins trois heures par jour, il est
seulement recommandé (commendatur) que la commu-
nauté se réunisse quatre ou cinq fois par jour pour la
prière liturgique. Une fois encore la tradition a dû céder
devant la pression des conditions de la vie moderne,
même dans les cloîtres. Cependant il faut reconnaître
que si tierce est parfois difficile à caser dans une journée
monastique, il ne semble pas tellement onéreux de célé-
brer sexte avant le repas et none avant de reprendre le
travail.
:
antécédent dans la pratique de l'office férial en hiver tel
que l'avait prévu la règle de saint Benoît « Aux vigiles,
on lira les livres de l'Écriture sainte, tant de l'Ancien
que du Nouveau Testament, ainsi que les commentaires
qui en ont été donnés par les plus qualifiés des Pères
orthodoxes universellement reçus 2'1. » Mais la règle ne
précise pas comment se faisait la répartition des trois
lectures quotidiennes entre Ecriture et textes patristiques,
et lorsque nous atteignons la pratique réelle des monas-
tères bénédictins du 9e siècle, nous constatons qu'on s'y
est alligné sur l'office romain où les lectures patristiques
ne figurent que les dimanches et jours de fête.
Enfin la solution adoptée par la Liturgie des Heures
pour les lectures des fêtes de saints est nouvelle en ce
qu'elle abolit l'usage de la littérature hagiographique
traditionnelle pour la remplacer par des lectures patris-
tiques en rapport avec la personne du saint fêté. C'était
sans doute le seul moyen de résoudre le problème, sans
cesse soulevé et jamais résolu, de la veritas historica
dans les vies de saints insérées dans le bréviaire.
Pour ce qui est des hymnes, la mesure traditionnelle
de l'office romain est conservée, il y a toujours une
31. Art. 95-96. Cf. P. SALMON, L'officedivin (Lex orandi 27), Paris,
1959, Ch. 1 Obligation de la célébration de l'office, 11-16.
32. LMD 156 (1983), 278.
la nature même de la liturgie, actualisation par toute
l'Église de l'œuvre salvifique du Christ en son mystère
pascal. Aussi la Présentation générale rend-elle à tous
les fidèles sans exception leur privilège baptismal
«Quand les fidèles sont convoqués et se rassemblent
:
pour la Liturgie des Heures en unissant leur cœur et
leur voix, ils manifestent donc l'Eglise qui célèbre le
mystère du Christ 33. » A la notion de députation est
substituée celle de mandat de célébrer la Liturgie des
heures, mandat que l'Église confie aux ministres sacrés,
évêques, prêtres et diacres, ainsi qu'aux communautés
religieuses astreintes au chœur 34, mais sans exclure pour
autant ceux qui décident de célébrer cette prière par
libre choix.
Même retour à la tradition, dans la Constitution comme
dans la Présentation générale, par les exhortations à
célébrer l'office divin en commun et en le chantant 35,
dans l'invitation également adressée aux laïcs eux-mêmes
à participer à la célébration de l'office en commun dans
l'église, voire même à la célébrer individuellement 3ft.
Malheureusement, du moins en France, très rares sont
les lieux où la possibilité d'une célébration commune de
la Liturgie des heures est offerte aux fidèles. Si, dans
tous les autres domaines de la liturgie, on peut se féliciter
des progrès accomplis depuis vingt ans, ici force est bien
de constater une pénible régression depuis la totale
disparition dans nos paroisses des vêpres dominicales 37.
Par contre on ne peut que se réjouir en constatant que
la célébration communautaire de la Liturgie des heures
est devenue la pratique habituelle de la plupart des
communautés de religieuses.
39. Cf. A. BUGNINI, op. cit., 503, décembre 1968, envoi d'un
spécimen du nouvel office aux évêques du monde entier.
je songe ici — pour ne parler que de quelques cas
personnellement connus — aux vêpres chantées chaque
jour à Saint-Leu, les jeudis à Saint-Sulpice, aux offices
du matin, de midi et du soir à Saint-Germain l'Auxerrois
à Paris, ou encore à la courageuse équipe de laïcs qui
célèbre l'office dans l'église Saint-Pierre du Martroi au
centre d'Orléans. Et on sait combien les nouvelles commu-
nautés de moines urbains, Saint-Gervais à Paris ou Saint-
Jean de Malte à Aix-en-Provence, d'autres encore, attirent
de nombreux fidèles à leurs offices.
?
Est-il permis de rêver à une nouvelle étape Il semble
qu'il faudrait en arriver à retrouver concrètement la
distinction entre office cathédral, disons plutôt paroissial,
et office monastique. Le premier ne comporterait que
les offices du matin et du soir dans lesquels on incor-
porerait les lectures scripturaires et patristiques de l'actuel
office de lecture, retour à la tradition, mais aussi et
surtout adaptation réaliste aux conditions de la vie
moderne. Les moniales pourraient alors retrouver un
office vraiment monastique adapté à leur vocation contem-
plative.
Anselme DAVRILO.S. b.
MUSIQUE ET LITURGIE
Le document Universa Laus
CI. Duchesneau
[
M. Veuthey
-1
Le rôle
et le fonctionnement
du chant et de la musique
dans la liturgie.
| - j
et
Tous les musiciens, pasteurs,
responsables, ou animateurs
de la musique dans la liturgie,
A f.,.Í •a.
trouveront dans ce livre une
information et une réflexion
solides pour le renouvellement
et l'approfondissement de leur
pensée et de leur pratique.
rites
ceîf,
symboles
CATHÉDRALE,
DEMEURE DE DIEU,
DEMEURE DES HOMMES »
COLLOQUE DE PONT-À-MOUSSON, JUIN 1987
hommes. »
« Cathédrale, demeure de Dieu, demeure des
ORGANISATION DU COLLOQUE
Ce colloque fut élaboré en liaison avec la Direction
du patrimoine au Ministère de la culture et de la commu-
nication et le Centre national de pastorale liturgique.
ce thème:
Plus de deux cents personnes se retrouvèrent autour de
des évêques, des responsables administratifs
de la Direction du patrimoine, de nombreux architectes
en chef, des inspecteurs des Monuments historiques, des
représentants de Commissions diocésaines d'art sacré,
des curés de cathédrales, des artistes.
Les cathédrales sont depuis quelques années au cœur
des préoccupations du Gouvernement et de celles du
Comité national d'art sacré.
« La cathédrale est un lieu privilégié où se concentrent
la pensée et l'imaginaire sur les rapports entre culte et
;
culture. C'est le lieu de l'évêque au milieu de son peuple
chrétien rassemblé pour le culte de Dieu mais en même
temps, elle constitue un grand centre d'intérêt pour la
communauté civile. Demeure de la présence de Dieu,
demeure des hommes, de tous les hommes, ces mots
reviendront comme un leitmotiv tout au long du colloque
et sous-tendront chacune des conférences et des inter-
ventions.
Des conférences consacrées à la cathédrale dans son
passé, son présent et son avenir, des ateliers mis en
place pour réfléchir à la conservation et à la mise en
valeur du bâtiment et à son fonctionnement liturgique,
une évocation sur place de l'histoire de la cathédrale de
Metz ont été proposés aux participants.
Les conférences
Les ateliers
:
dination des efforts apparurent très fortement.
Enfin un souhait celui de ne pas figer l'édifice mais
d'en faire un lieu de vie et de création.
Mgr P. Jounel termina sa conférence en faisant citation
d'un discours du Cardinal Pacelli sur la vocation de la
France, prononcée le 13 juillet 1937 à Notre-Dame de
Paris:
«Au milieu de la rumeur incessante de cette immense
métropole, parmi l'agitation des affaires et des plaisirs, dans
l'âpre tourbillon de la lutte pour la vie, témoin apitoyé des
désespoirs stériles et des joies décevantes, Notre-Dame de
; Orate fratres,
elle semble, dirai-je volontiers, être elle-
même un Orate Fratres de pierre, une invitation permanente
à la prière.
; ;
2. Les orgues (entretien, restauration et utilisations. 3. Les concerts
spirituels et les manifestations culturelles 4. L'accueil, les visites et
la sécurité
;
5. L'espace intérieur, l'éclairage, le chauffage, l'acous-
tique; 6. L'aménagement liturgique du choeur 7. Les autres lieux
liturgiques (réserve eucharistique, chapelle de semaine, lieu du bap-
tême ; 8. L'iconographie et la décoration.
Le Message de Notre-Dame de Paris, c'est le message de
toutes les cathédrales de France, de toutes les cathédrales du
monde. »
ÉVALUATIONS
IMAGE, IMAGINAIRE
ET FOI
!
A quoi bon posséder les dons les meilleurs si je n'ai
pas l'amour Tout est ordonné à l'amour. Voilà ce que
seuls peuvent comprendre les tout-petits, eux qui rendent
grâce de tout, sachant que la source de tout bien n'est
pas en eux, mais en Dieu seul.
Puissance de l'image, capable d'irradier l'Amour,
l'Amour qui s'est laissé clouer sur la croix, pour nous
:
régénérer en Lui, nous rendre cette beauté irradiée de
l'Unique beauté. Vocation de l'art religieux partager le
message de ce que nos yeux ont vu, de ce que nos
mains ont touché du Verbe de Vie, pour qui notre cœur
brûle, de ce trésor, caché et sans cesse révélé aux tout-
petits, à ceux dont l'esprit et le cœur sont ouverts à la
Vérité, que nous aimons sans l'avoir vu, en qui nous
croyons sans le voir encore, sur lequel nous fixons notre
regard, comme sur une lampe brillant dans un lieu obscur,
jusqu'à ce que luise le jour et que l'étoile du matin se
lève en nos cœurs.
thème;
A les entendre on prenait conscience de la richesse du
les textes où Paul VI précise sa pensée sont fort
nombreux et d'une grande variété. Ils constituent une
mine dont l'exploitation appelle et réserve encore des
découvertes. Il s'est adressé aux artistes, a entretenu des
Ses interventions couvrent un champ très vaste :
relations avec plusieurs, s'est entouré de leurs œuvres.
elles
concernent toutes les formes d'expression, les arts plas-
:
tiques aussi bien que la musique. Le cinéma n'est pas
absent c'est au début des années 1960 qu'il évoque le
;
rôle de l'image comme une caractéristique d'une civili-
sation nouvelle or à l'époque le thème de la civilisation
de l'image était encore loin d'être le lieu commun qu'il
est devenu aujourd'hui. Replacée en son temps, la décla-
ration du Pape retrouve sa nouveauté et révèle son
aptitude à discerner les signes du temps. Il traite de
toutes les sortes de relations qui peuvent s'établir entre
art et religion. L'Église a besoin du concours des artistes
pour annoncer l'Évangile et exprimer le mystère chrétien.
Sans cette médiation il manquerait une dimension essen-
tielle à l'attestation de la foi. Cet intérêt personnel, qui
est l'expression d'une authentique sensibilité artistique,
et cette conviction de la nécessaire harmonie entre la
mission de l'Église et le génie artistique se sont traduits
de multiples façons, en dehors des déclarations et écrits.
Ainsi Paul VI a opéré une profonde rénovation des
appartements pontificaux, qu'il a dépouillés de tout ce
qui y avaient accumulé, sans goût ni raison, les pontificats
précédents, et qui étaient l'héritage d'une Cour de l'ancien
régime, pour y substituer une sobre décoration mettant
en valeur quelques œuvres d'art tirées des réserves des
musées. Il a passé commande à des artistes. Les inter-
ventions ont particulièrement mis en évidence que la
pensée de Paul VI sur l'art et son action en ce domaine
étaient l'expression d'une étroite harmonie entre sensi-
bilité et réflexion. Elles s'enracinent dans une esthétique
et une vision de l'œuvre d'art qui se fondent elles-mêmes
sur une théologie du signe et de la fonction des symboles,
des relations entre le visible et l'invisible. On retrouve
de son pontificat:
à cet égard quelques-unes des orientations fondamentales
un grand respect pour la liberté de
l'homme qui a conduit Paul VI à demander pardon aux
; ;
artistes pour les temps où l'Église les contraignit une
vision optimiste de l'homme une ouverture à son temps
et à tout ce qu'il comportait de virtualité positive. Une
pensée qui fait le plus grand cas des médiations, dont
l'art est une des plus importantes et des plus originales,
entre Dieu et l'homme, l'action de l'Esprit et le génie
humain. Ces traits, en même temps qu'ils révèlent sa
personnalité, dessinent les grandes lignes d'un humanisme
pour notre temps dont on notera qu'il est en harmonie
avec l'ecclésiologie et la théologie des réalités terrestres
formulées par Vatican II.
René RÉMOND
Uneœuvre
référence
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La Maison-Dieu, 173, 1988, 143-152
Gaston SAVORNIN
ÉCHO DU COLLOQUE
«PAUL VI ET LES ARTS»
:
Le Président de l'Institut inaugurait alors la série de
citations qui allaient émailler les divers témoignages et
conférences «ô voix bienheureuse de l'art, écho
magique, toi qui, du mystère de la beauté silencieuse,
tire la musique des signes et des formes ». Par un autre
aspect encore, le colloque s'inscrivait dans une histoire
à la fois fort ancienne et très récente. Parmi les nom-
breuses personnes qui avaient répondu à l'invitation des
organisateurs, beaucoup s'étaient déjà rencontrés pour
mettre en commun, à propos de l'art sacré, les compé-
tences et finalités diverses qui sont celles des artistes,
des fonctionnaires du Ministère de la Culture, des théo-
logiens et liturgistes etc. L'évocation des relations de
Paul VI avec les artistes ne pouvait qu'enrichir ce dialogue
entre culte et culture dont le pape lui-même a souvent
évoqué l'histoire déjà longue et diverses péripéties :
« Nous vous avons quelque peu contrariés. Nous vous
avons imposé comme première règle l'imitation, à vous
qui êtes des créateurs toujours vivants, vous chez qui
pétillent mille idées de mille nouveautés. » Mais les
artistes présents au colloque ont pu témoigner à quel
point Paul VI a vécu de manière positive la relation avec
les artistes et a pratiqué les recommandations qu'on
trouvera exprimées dans le message aux artistes des pères
du Concile lors de sa clôture le 8 décembre 1965
L'Église
:
« a dès longtemps fait alliance avec vous. Vous
avez édifié et décoré ses temples, célébré ses dogmes,
enrichi sa liturgie. Vous l'avez aidée à traduire son divin
message dans le langage des formes et des figures, à
rendre saisissable le monde invisible. » En inaugurant la
séance qui, à l'UNESCO, allait donner la parole aux
artistes qui avaient collaboré avec Paul VI. M. Henri
:
Lopes, Sous-Directeur Général pour la Culture et la
Communication notait que « Paul VI s'est entouré d'ar-
tistes, de leurs œuvres et de leur amitié. Ce n'est pas
là un hasard car l'artiste, dans l'action, entre dans les
climats du mystérieux divin. Lui-même, moins encore
que quiconque n'est en mesure d'expliquer les forces
dont il est la proie lorsque l'inspiration l'agite et le
saisit. l'art a pour fonction ultime de répondre au
double besoin de connaître le réel et de dépasser le
réel. » Or, comme en témoignait un artiste présent au
LA SENSIBILITÉ ESTHÉTIQUE
DE PAUL VI
Après avoir évoqué des souvenirs personnels corres-
pondant à l'époque où Mgr Montini était Substitut de
la Sécrétairerie d'État et définissait les conditions d'un
dialogue positif avec le monde d'aujourd'hui, le professeur
Cappelletti, encyclopédiste, analyse deux homélies du
Cardinal-Archevêque de Milan. La première a été pro-
noncée en 1959 en la cathédrale de Crema lors de la
Dedicace de celle-ci. La deuxième a eu pour cadre le
Duomo de Milan. Le conférencier y vérifie la thèse selon
laquelle, pour Paul VI, l'art a été une manière anthro-
pologique fondamentale de concevoir et d'exprimer l'exis-
tence.
Cette vérification se fait dans la manière de concevoir
la cathédrale à la fois œuvre d'art, lieu de rassemblement
des croyants et édifice symbolique au sein de la cité.
Montini cherche l'idée exacte qui expliquerait le fait de
la cathédrale. Il ne la trouve pas dans l'histoire, pas
même dans l'identification de la cathédrale comme espace
et lieu de culte. Car la cathédrale avec ses composantes
de culture et d'architecture au sein de l'aventure de la
foi et de l'esprit devient symbole dans sa totalité. En
effet, l'art y a son propre langage où le règne subit des
transformations progressives, des torsions jusqu'à devenir
symbole. Alors il renonce au rapport conventionnel avec
l'objet et il le remplace par une analogie relative et
fondamentale. La cathédrale, de simple espace pour le
culte, devient la ville sur la montagne dont parle l'Evan-
gile.
La cathédrale est expression d'unité. Or l'unité réalisée
par la cathédrale est christocentrique ; tout converge vers
le tabernacle, se rapporte à la première création à travers
le verbe et à la deuxième, la Rédemption, à travers
l'homme-Dieu. « C'est une merveille que l'art chrétien
puisse exprimer l'invisible avec les éléments les plus
matériels, qu'il puisse chanter avec des éléments immo-
biles et muets, qu'il sache animer la matière avec tout
le paradis d'une communion des saints telle que l'exprime
le Dome de Milan. C'est comme une lévitation de la
matière qui prend son vol pour dépasser la mutabilité
de choses matérielles.
Art et liturgie
Selon Paul VI, cité par le professeur Cappelletti, il y
a identité du langage artistique et du langage liturgique.
Et pourtant, au centre de la liturgie, il y a ce mystère
qui séduit la raison en même temps qu'il la dépasse et
dont le rapport avec l'art n'est peut-être pas évident. Le
pain et le vin, tout en conservant leurs apparences propres
sont totalement remplis de transcendance, de sorte que
s'opère un changement de deux substances subordonnées
dans la hiérarchie de l'être en une présence parmi nous
de la substance suprême du Dieu qui s'est fait homme.
Quand le Pape reçoit les promoteurs de la messe des
:
artistes, le 7 mai 1964 il dit « notre ministère requiert
votre collaboration car, vous le savez bien, nous devons
rendre accessible et compréhensible, l'ineffable de Dieu.
Or vous êtes des maîtres en cette opération qui traduit
le monde invisible en formules accessibles, intelligibles,
c'est votre métier, votre mission à vous. Sans votre
aide, le ministère deviendrait bégayant, incertain. Ainsi,
par exemple, le chant augmente la noblesse de l'action
liturgique. ».
L'art donne au culte son langage ineffable qui rend
en quelque manière sensibles les choses spirituelles, tandis
que le culte donne à l'art un contenu que l'art ne pourrait
pas recevoir ailleurs.
:
pour revêtir d'expression, de formes, de couleurs, les
trésors du ciel, de l'esprit. Et Paul VI ajoute que « vous
avez cette prérogative qu'en rendant accessible et compré-
hensible le monde de l'esprit, vous lui conservez son
caractère ineffable et transcendant. » (Messe des artistes,
7 mai 1964). Les artistes ont donc pour mission de rendre
visible l'invisible par la voie poétique, la voie de l'émotion.
Cette voie est un mode de connaissance spécifique,
profondément riche, irremplaçable. « M. Chazal constate
que la définition du rôle de l'artiste, telle qu'elle se
précise, se développe, se déploie dans une série de
sur la Liturgie:
discours de Paul VI, est celle qu'exprime la Constitution
(n° 122) parmi les plus nobles activités
de l'esprit humain, on compte à très bon droit les beaux-
arts, mais surtout l'art religieux et ce qui en est le
sommet, l'art sacré. Par nature, ils visent à exprimer de
quelque façon dans les œuvres humaines la beauté infinie
de Dieu. »
Les modalités et conditions d'exercice
de la mission de l'artiste
La première condition est la liberté de l'artiste. « Nous
; ;
vous avons quelque peu contrariés. Nous vous disions
"nous avons ce style, il faut vous y adapter nous avons
:
;
cette tradition, il faut que vous y soyez fidèles nous
avons ces maîtres, il faut les suivre
; nous avons ces
règles, vous ne pouvez vous en écarter". Nous vous
:
avons parfois imposé une chape de plomb on peut bien
le dire pardonnez-le nous » (7 mai 1964). Paul VI
connaissait cet art contemporain parfois déroutant, il
savait, pour avoir rencontré les artistes, que «l'artiste
moderne est subjectif. C'est plus en lui-même qu'en
dehors de lui qu'il cherche les motifs de son œuvre ».
Mais cette indépendance farouche peut constituer une
chance pour l'Église. Or la liberté de l'artiste à l'égard
de l'Église a pour corollaire la liberté de l'Église à l'égard
:
de l'artiste et des formes que l'art a pu prendre au cours
de l'histoire « L'Église n'a jamais considéré aucun style
comme lui appartenant en propre, mais, selon le caractère
et les conditions des peuples, et selon les nécessités des
divers rites, elle a admis les genres de chaque époque. »
:
(Const. Lit. n° 123). Dès lors l'Église se considère comme
d'autant plus libre pour affirmer « Que l'art de notre
époque et celui de tous les peuples, et de toutes les
nations, ait lui aussi, dans l'Église, liberté de s'exercer. »
La deuxième condition du bon exercice de la mission
de l'artiste désireux de «servir les édifices et les sites
sacrés avec le respect qui leur sont dus » est, selon
:
Paul VI, leur enracinement dans la vie ecclésiale et la vie
spirituelle « vous êtes à la recherche de ce monde de
l'ineffable, et vous trouvez que sa patrie, son foyer, sa
source la meilleure c'est encore la foi, la prière, la
religion. Nous vous serons reconnaissants de venir puiser
chez nous le motif, le thème, parfois plus que le thème,
ce fluide sacré qui s'appelle inspiration, grâce, charisme
de l'art. ». Dès lors l'art trouve comme naturellement
sa place dans la liturgie et, en retour, il y trouve un
enrichissement car en se faisant liturgique, en pénétrant
dans le sanctuaire des réalités positives de la religion,
:
d'incertain et subjectif qu'il était, il devient sûr, objectif,
social «Insérez votre art, votre œuvre l'oblation de
;
votre génie et de votre travail dans le grand cycle de
la prière de l'Église dans la liturgie sacrée. Entrez dans
l'esprit et les finalités de la solennelle Constitution conci-
liaire sur la liturgie. » Paul VI a bien conscience que
l'artiste pourra éprouver quelque peine à maintenir l'équi-
libre entre les deux pôles de sa mission que sont, d'un
côté, l'indispensable liberté et, de l'autre, la fidélité aux
fins propres de l'Église. Pensant à la manière dont l'artiste
pourra participer à l'application de la Constitution conci-
liaire, il prévoit que « l'insertion de l'art dans le culte
entraînera pour l'artiste de nombreuses limitations, de
nombreuses prescriptions finalisées par le but fondamental
de la participation active du peuple de Dieu à l'action
liturgique mais, en dehors du moment liturgique, l'artiste
pourra revendiquer une plus grande, et dans un certain
sens, une complète liberté, car la liturgie pastorale voulue
par le Concile, n'épuise certainement pas l'immense
fécondité de l'art» (4 janvier 1967).
CRITÈRES D'APPRÉCIATION
DE L'ŒUVRE D'ART
En essayant de définir ces critères, développés à travers
:
plusieurs discours, Paul VI se réfère encore à la Consti-
tution sur la liturgie « L'Église s'est toujours comportée
en juge des beaux-arts, discernant parmi les œuvres des
artistes celles qui s'accordaient avec la foi, la piété et
les lois traditionnelles de la religion, et qui seraient
susceptibles d'un usage sacré. »
Le critère premier, pour Paul VI est celui d'une véri-
table création, car Dieu est vie et l'art naît de la liberté
de l'homme. L'Église doit donc faire appel à d'authen-
tiques créateurs.
Le deuxième critère est celui de l'intelligibilité. Le
Pape se souciait, en effet, du fossé existant non seulement
entre les artistes et le monde d'aujourd'hui, mais aussi
entre les artistes et le monde contemporain en général.
«Nous qui voudrions voir dans l'art une signification,
un service, un contenu, nous sommes comme devant une
tour de Babel. nous croyions que le royaume de l'art
était béatitude, alors qu'aujourd'hui il est souffrance et
confusion. » Aussi le Pape souhaite-t-il que les diverses
expressions de l'art concourent à la liturgie sacrée dans
laquelle, dit-il, « nous voulons que se fondent la beauté
et la simplicité, la plénitude et la brièveté, les sonorités
reçues du passé et les voix des temps nouveaux, tout
cela fondu en une sorte de nouvelle harmonie (13 octobre
1966).
Le troisième critère dégagé par Paul VI pour juger les
œuvres d'art est la beauté considérée comme liée à
l'harmonie et source d'intuition, de facilité, de bonheur
«cette facilité, ce bonheur, vous ne les donnez pas
:
toujours et, alors nous restons surpris, intimidés, loin-
»
tains (7 mai 1964).
pression:
Le quatrième critère pourrait s'appeler densité de l'ex-
«Notre âge est celui de la science, de la
recherche du réel dans le savoir et l'être. C'est l'ère de
l'essentiel où la rhétorique détonne car de toute chose
complexe on cherche le noyau, la force première. l'art
doit s'inscrire dans cette recherche de l'essentiel et se
distinguera « par une beauté simple et noble plutôt que
par la seule somptuosité ». C. Chazal a réuni dans sa
conclusion un certain nombre de propos de Paul VI
relatifs à la responsabilité que l'Eglise encourt dès lors
qu'elle définit la mission des artistes, les conditions de
son exercice et les critères d'évaluation des œuvres pro-
duites. Si l'artiste qui accepte d'entrer dans les finalités
propres de l'Église se sent responsable devant elle,
l'Eglise, en retour, ne doit pas manquer à sa tâche.
Il convient que l'Église soit active en faveur des artistes,
qu'elle affiche clairement et concrètement le besoin qu'elle
a d'eux.
L'Église doit laisser les artistes libres dans la forme,
tout en les enseignant sur le fond.
:
L'Église a pour tâche de chercher les signes des temps
perceptibles dans les œuvres d'art «Les artistes sont,
par leur farouche liberté et par leur quête d'intériorité,
sensibles très immédiatement à la dimension tragique de
la condition humaine contemporaine. L'Église doit inter-
roger cet art, en faire un objet d'étude tout à fait
particulier et engager un dialogue en profondeur avec
les créateurs. »
A propos de ce dialogue dont Paul VI a donné
l'exemple, le Cardinal Poupar note, dans son discours
:
de clôture à l'UNESCO, qu'il est aussi nécessaire aujour-
d'hui qu'autrefois « d'une part, l'application des textes
du Concile et des documents qui en ont spécifié la visée,
a provoqué de nombreuses initiatives, notamment en ce
qui concerne l'aménagement des lieux de culte. Dans le
fait que beaucoup d'aménagements ont un caractère
provisoire, faut-il voir, soit une négligence, soit un doute
sur l'aptitude de l'art contemporain à réaliser le cahier
des charges établi par les responsables d'Eglise, ou encore
une attente qu'il ne faudrait pas lasser par des délais
toujours prolongés.
D'autre part, une réelle prise de conscience de la part
de nos contemporains et les initiatives des responsables
en faveur du patrimoine artistique et de sa mise en
valeur, ont intensifié l'intérêt porté à l'art sacré ».
Sur la voie tracée par Paul VI, Jean-Paul II demande
:
qu'on avance avec ces convictions qu'il exprime devant
le Conseil pontifical pour la Culture et son Président,
le Cardinal Poupard « La quête de la beauté correspond
à une aspiration profonde de l'homme et l'ouvre à la
transcendance. Avec l'artiste, nous saisissons en un
éclair la mystérieuse unité des choses si recherchées dans
notre monde aux prises avec des bouleversements culturels
sans précédent. »
G. SAVORNIN
La Maison-Dieu, 173, 1988, 153-160
COMPTES RENDUS
: ;
Il n'est pas question de résumer ici les diverses contributions.
;
Elles sont regroupées en quatre parties 1) Problèmes d'identité
et de méthode 2) Questions d'herméneutique 3) Approches
christologiques ; 4) Perspectives ecclésiologiques. En début de
volume, après la table des matières, chacun des collaborateurs
est présenté de manière succincte et précise, puis une intro-
duction condense bien l'apport de chacun des auteurs.
Tout lecteur averti et patient trouvera dans ces quelque cinq
cents pages la matière et l'occasion de réflexions multiples et
contrastées. Celui qui s'intéresse à la liturgie ne sera pas le
moins gratifié. En effet, l'article le plus riche à cet égard est
:
Le Christ vivant est le seul facteur d'unité de l'humanité
entière il l'opère dans la liturgie, qui, seule, récapitule en
:
acte toutes choses en lui (cf. G. Martelet), ce qui constitue
le christocentrisme en acte c'est l'exercice en acte des média-
tions du Christ, de l'Église et des Écritures (cf. T. Citrini,
p. 244 s.) ; tout ceci dans l'Esprit Saint, dont la possession est
le critères de l'appartenance à l'Église du Christ (H. Fries,
p. 421-422 ; cf. J. Alfaro, p. 458-459).
Les Écritures viennent d'être évoquées. On sait la place
qu'occupe en théologie fondamentale la question de l'Écriture
et de la Tradition, mieux posée par la Constitution Dei Verbum
de Vatican II (n" 9). Or, il faut dire que les moments de la
rencontre liturgique sont le lieu de naissance et le milieu de
vie des plus anciennes traditions qui ont abouti aux textes du
Nouveau Testament (G. Ghiberti, p. 306). C'est aussi dans la
; :
liturgie que les deux Testaments montrent le mieux les rapports
qui les unissent Jésus est leur lien « son mystère est l'unique
»
réalité dont ils sont porteurs l'un et l'autre (P. Grelot, p. 265,
268).
:
La liturgie est, pour l'Église, la plus importante herméneu-
;
tique de l'Écriture l'interprétation d'un texte le fait renaître
comme parole vivante, adressée à quelqu'un dans la liturgie,
la Parole retrouve sa portée personnelle et communautaire,
de Dieu à nous et de nous à Dieu (R. Marlé, p. 121-122 ; cf.
P. Grech, p. 176). Tout cela permet de dire que la liturgie
constitue le « cercle herméneutique
(A. Dulles, p. 361-362).
» essentiel du théologien
:
307), occupe les pp. 73 à 416. Une seule remarque à son
propos on ne comprend pas très bien les raisons qui ont
guidé l'A. dans le choix des manuscrits figurant dans l'apparat
critique. Beaucoup des manuscrits retenus n'éclairent en rien
en quelconque aspect de T.
A la suite de l'édition, s'ouvre une « seconde section », que
l'on doit à Mgr G. Ferraris, consacrée à l'étude de fragments
d'un sacramentaire tridentin du 10e siècle et conservé à la
bibliothèque Capitulaire de Verceil (Cod. CXXVIII), et que
l'A. met en rapport évident avec T, tant du point de vue
paléographique, et iconographique que liturgique. C'est éga-
lement l'occasion pour Mgr Ferraris de nous offrir des pages
nouvelles sur la bibliothèque de Verceil au haut Moyen Age,
et sur le rôle joué par l'évêque Léon (998-1026) dans son
enrichissement, notamment par l'acquisition de l'un des sacra-
mentaires de Fulda de la fin du 10e siècle (Cod. CLXXXI).
Cette seconde section est close par une édition de ces fragments
du 10e siècle.
Soulignons, pour terminer, la qualité de l'illustration, tant
en noir et blanc qu'en couleur. Celle-ci est d'un grand intérêt
car elle facilite grandement les commentaires sur l'écriture ou
la décoration du manuscrit.
Eric PALAZZO
Eric PALAZZO
I
Dans la série « libri liturgici commentati », le P. Falsini,
o.f.m. professeur à l'Université Catholique de Milan, offre un
guide de lecture de la Présentation générale du Missel romain.
Il ne faut pas chercher dans ce petit livre une étude technique
ou historique de la Présentation, encore que l'auteur soit bien
au courant des difficultés rencontrées au cours de la genèse
du document et après sa publication. Visant un large public,
:
il va droit à l'essentiel. Son exposé suit donc les divers chapitres
de la Présentation du Missel il relève au passage les rédactions
successives de tel numéro (7, 48), en faisant observer que les
modifications de la seconde rédaction n'ont pas suffi à faire
taire les critiques mais ont énervé inutilement la vigueur de
l'exposé. L'auteur souligne aussi, avec bonheur, certains points
qui sont demeurés peu apparents ou lettre morte. Ainsi,
et l'Eucharistie de l'Eglise :
lorsqu'il note le lien au niveau rituel entre la dernière Cène
«La réflexion dogmatique ne
devrait pas s'isoler de ce cadre en opérant une séparation
injustifiée. Le donné liturgique mérite respect en tant qu'il
transmet le donné de la foi. Cela reste fondamental, malgré
les développements et les accentuations ultérieures »
51). De même, lorsqu'il s'agit de la prière eucharistique :(pp. 50-
:
des répercussions sur un mode de participation de l'assemblée
qui ne se contenterait pas d'une ratification finale les prières
eucharistiques actuelles ont déjà introduit une anamnèse dite
par l'assemblée. Une meilleure connaissance du rôle prévu
par la Présentation pour le prêtre célébrant devrait entraîner
« un nouveau style de présidence de l'Eucharistie » (pp. 61-
62). L'auteur note que dans les diverses formes de messes,
on ne parle pas des messes pour des groupes particuliers « et
pourtant il n'est pas douteux que l'expérience des dernières
années a démontré leur poids dans la dynamique de la célé-
bration » (p. 70).
L'interprétation des n. 38-39 est assez confuse : le verset
avant l'évangile n'est pas un autre chant qui suit l'alleluia, il
fait corps avec celui-ci, et ce n'est pas parce que l'alleluia est
Jean EVENOU
n RAISONS
I réition compacte"
pour choisir
I de la Bible de Jérusalem.
]LaBibledeJérusalemestle 5 Bleestàlafois
11
lestSeller" des Bibles en français. très lisible et très maniable.
[édition compacte présente le texte intégral de la Bible de
47
L'édition "compacte" réalise en effet le meilleur compromis
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