# 109 OCTOBRE 2020

SWISS MADE GRETA THUNBERG GOLDORAK

SOUS LA PEAU : UNE S'ATTAQUE AU MONDE CE N'EST QU'UN AU
ÉTUDE INTIME DE LA VIE DANS UN NOUVEAU REVOIR !
TRANSGENRE FILM-DOCUMENTAIRE
 DAILY MOVIES
# 109 OCTOBRE 2020

Une publication
Daily Media Sàrl

06

I AM GRETA FILMO 2020 20 Daily Media/Daily Movies
Rue Gutenberg 5
1201 Genève
+41 (22) 796 23 61

08 Neverr
info@daily-movies.ch

21
www.daily-movies.ch
facebook.com/

09 Calamity
dailymovies.ch

IMPRESSION
10 Sous la peau Du rose pour les filles, PCL Presses Centrales
des bleus pour les garçons ?
12 Les Internationale
SA

Kurzfilmtage Winterthur
You Will Die at 20 24 EN COULISSES

14
Directeur de Publication

Pablo Briones The Hate U Give 25

Carlos Mühlig
Directeur de Publication

16 Goldorak
adjoint : David Margraf

27
Rédacteur en chef

Heilung « Futha » Yamine Guettari

Abonnement

SWISS MADE 29
abo@daily-movies.ch
Distribution
distro@daily-media.ch

30
Corrections

Nanar mon amour

Yamine Guettari, David
Margraf,
Carlos Mühlig

Vercingétorix Marketing et vente

édito
Carlos Mühlig,
David Margraf
Création/Mise en page
Jordan Gazeau

ACCESS POINT
Disponible dans les
Fnac, les cinémas

par Yamine Guettari indépendants, les festi-

vals, Mediamarkt, etc.
Tous les lieux sur :
www.daily-movies.ch
En plein conflit contre l’Allemagne nazie, le Parlement questions. Un certain sens des priorités… On pourrait
britannique proposa à Winston Churchill de couper s’arrêter deux secondes et se demander pourquoi
dans le budget de la culture pour aider l’effort de on travaille, dans quel but la vie économique doit
guerre. Il répondit tout simplement : « Mais alors continuer, si c’est pour que toute vie culturelle cesse, REDACTEURS
pourquoi nous battons-nous ? ». Aussi édifiante soit- faute d’acteurs encore vivants. L’horizon doit-il se Alain Baruh
elle, on ne trouve aucune trace de cette anecdote résumer à métro-boulot-dodo ? Une réflexion pas Claire Blanchard Buffon
dans les minutes du Parlement ni dans les écrits de incompatible avec les précautions sanitaires minimum Etienne Rey
Churchill. Pourtant, à chaque fois que la culture est à appliquer pendant cette épidémie.L’immense Frédéric Grob
laissée dépérir, voire attaquée, fleurit sur les réseaux Churchill n’avait peut-être pas posé la question en Jonathan Tholoniat
sociaux cette fameuse citation. Quoi de plus normal, introduction de cet édito, mais il avait dit ceci dans Lauren Von Beust
lorsque le pouvoir politique choisit de laisser mourir un discours devant l’Académie Royale le 30 avril Laurent Billeter
les acteurs de la culture en les empêchant d’exercer 1938 : « Les arts sont essentiels à toute vie nationale Pauline Brandt
leur activité, tout en leur octroyant avec parcimonie complète. L’Etat se doit de les soutenir et les Patricia Beauverd...
et réticence des aides pour survivre. Par contre, en encourager. Le malheur guette la race qui échoue à Vincent Rohrer
parallèle, le peuple est encouragé à continuer à saluer les arts avec la révérence et le grand plaisir qui Simon Brunner
s’entasser dans les transports en commun pour aller leur sont dus. » A méditer… Lucie Biré
travailler contre vents et marées, tout en étant prié
d’envoyer ses enfants à l’école sans trop se poser de
04.10 SORTIES

Adolescentes

21.10
Adieu les cons Peninsula
07.10

About Endlessness The Singing Club

Antebellum Un pays qui se tient sage Al-Shafaq Sous la peau

L'île aux oiseaux Poly The Assistant Yalda

Never Rarely Sometimes Le mur de l'ombre Hotel Beograd

Always

Parents d'élèves
14.10

30 jours max Calamity

28.10

After We Collided Trolls World Tour (3D)

ADN Sin señas

particulares
Cunningham (3D)
Sous les Etoiles de
16.10

Miss Paris

A Perfectly Normal
I am Greta Family
En salles
I AM GRETA
Le Militantisme et la Jeunesse verte
Porte étendard malgré elle de l’écologie moderne, Greta Thunbreg suédoise de 15 ans se bat pour ses convictions
contre l’urgence de la cause climatique.
Depuis qu’elle se passionne pour le sujet de la destruction de
notre planète, Greta décide de ne pas rester sans rien faire et
entame une protestation pacifique aux pieds du parlement
suédois. Son action fait très vite parlée d’elle tout à fait par
hasard, mais on dit qu’il n’y a pas de hasard. Les médias et les
communautés politiques s’intéressent alors à elle plus qu’à
son combat et l’utilisent rapidement comme une Jeanne d’Arc
de l’écologie en la propulsant parfois dans des réunions et
des congrès qui ne se soucient pas vraiment de la catastrophe
écologique.
Ses détracteurs ainsi que ceux qui la soutiennent devant les
projecteurs sont tous aussi influents et célèbres les uns que
les autres. Seulement Greta a une volonté de fer et ne déroge
pas à ses habitudes et faire prendre vie à ses arguments
jusqu’à ne voyager que en train, en bus et finalement une fois
en voilier aller-retour pour un sommet écologique à New York.
Mû par son désir de réveiller les consciences des dirigeants
du Monde, quitte à être bien en retard sur l’issue fatale, Greta
continue toujours sa grève du vendredi en Suède, allant ainsi
conter son confort. Elle inspire la jeunesse ainsi que tous les
âges. Elle montre une détermination sans faille pour sauver
son avenir et celui des autres.
La tâche est certes titanesque mais pas aussi utopique que
beaucoup le soutienne. L’addition de petits changements
est la formule de succès pour une somme à l’échelle
mondiale pour autant que la peur ne prenne pas le dessus
sur l’endurance. Cela fait plus de 40 ans que la communauté
scientifique explique, implore, supplie et enfin exhorte les
gouvernements à évoluer leurs politiques pour une égalité
des ressource, un respect de l’environnement et une prise de
conscience collective à chaque niveau national. Seulement le
saint dollar est plus fort et l’humain est un animal vil, cupide
et égoïste qui va droit dans le mur s’il n’évolue pas enfin très
vite. Les personnalités comme Greta Thunberg secouent
le sable et lance des brindilles dans les rouages de cette
terrifiante machinerie de pouvoir des 1% de la planète qui
pourrait hélas si facilement changer la donne pour les 99%.
Nous avons avec les données actuelles plus de chances
de persévérer dans notre extinction de masse personnelle
que de sauver l’humanité. Heureusement que la Terre, elle,
subsistera à ce cancer que nous sommes. Un documentaire
intéressant qui semble plus expliquer que la jeune suédoise
n’a jamais cherché la notoriété que les véritables causes de
son combat légitime. Une chose est cependant sûre : Greta
continuera à suivre sa voie verte en grandissant, puisqu’elle
6 DAILY MOVIES • #109 • OCTOBRE 2020
ne fait pas partie de ses idéalistes du dimanche qui relaient
leur activisme sitôt l’âge adulte venu. Nous pouvons toujours
faire la différence.
L’actu Greta
La jeune militante suédoise Greta Thunberg a retrouvé les
bancs de l’école après avoir pris une année sabbatique pour
défendre la cause du climat. Elle a notamment participé à la
COP25 à Madrid et passé onze semaines aux Etats-Unis.
«Je me sens tellement bien d’être
enfin de retour à l’école!», Greta Thunberg.
Comme à son habitude, l’adolescente de 17 ans avait annoncé
son retour à l’école via tweeter et accompagné d’une
photographie d’elle souriante, sac sur le dos et un vélo à la
main. Elle n’a pas précisé dans quel établissement ni dans
quelle ville elle comptait poursuivre sa scolarité pour éviter
toute polémique qui pourrait la mettre en danger.
Scolarisée jusqu’en juin 2019 en neuvième année, Greta
Thunberg a par la suite, suivi ses cours à distance en raison
de ses nombreux déplacements.
De l’Europe à l’Amérique
Alors qu’elle devait faire son entrée au collège à la rentrée
2019, la militante avait annoncé prendre une année
sabbatique pour se rendre à la conférence de l’ONU sur le
climat de Santiago du Chili (COP25), puis annulée en raison
des graves troubles sociaux et, finalement, déplacée à Madrid.
Refusant de prendre l’avion afin de limiter son empreinte
carbone, elle avait fini par trouver une place à bord du
catamaran d’un jeune couple d’Australiens pour regagner
l’Europe, après onze semaines bien remplies passées sur
le continent américain. Elle a pu rencontrer les dirigeants
mondiaux à l’ONU, rencontré l’ancien président américain
Barack Obama, reçu les clés de Montréal et sillonné les Etats-
Unis et le Canada et pour la petite anecdote, à bord d’une
Tesla prêtée par Arnold Schwarzenegger.
CBB
De Nathan Grossman
Avec Greta Thunberg
Filmcoopi
16.10.2020 au cinéma
Note : 5/5
7
En
Ensalles
salles

De Eliza Hittman
Avec Sidney Flanigan, Talia Ryder,
Théodore Pellerin
Universal Pictures
07.10.2020 au cinéma
Note : 4/5

NEVER RARELY
SOMETIMES ALWAYS
Devant faire face à une grossesse non-désirée, Autumn, 17 ans, ne bénéficie ni du soutien familial ni de celui de la communauté
locale. Désemparée, mais épaulée par sa cousine Skylar, elle va chercher de l’aide dans le New York de tous les possibles. Eliza
Hittman pointe ici des similitudes d’ambiance avec la série « 13 Reasons Why » pour laquelle elle avait aussi réalisé quelques
épisodes.

« Nous allons prendre quelques minutes pour parler de vos
relations. Tout ce que vous avez à faire est de répondre par
« Jamais », « Rarement », « Parfois » ou « Toujours ». D’accord,
Autumn ? », informe la conseillère du planning familial new-
yorkais. Quelques questions doivent être posées avant que les
médecins ne procèdent à l’avortement. « Avez-vous déjà connu
des rapports sexuels non-consentis ? Jamais… Rarement…
Parfois… Toujours…? », questionne-t-on la jeune femme de 17
ans. Ses larmes montent.
Autumn (Sidney Flanigan) et sa cousine Skylar (Talia Ryder)
sont deux adolescentes, proches l’une de l’autre, qui résident
au sein d'une zone rurale de l’état de Pennsylvanie. Autumn
fait face à une grossesse non désirée, avec tous les états
d’âme que cela implique. Elle dit ne pas se voir mère. N’étant
soutenue ni par sa famille, à laquelle elle préfère cacher son
secret, et trahie par la communauté locale, la jeune femme se
lance avec l’aide précieuse de sa confidente dans un périple
parsemé d’embûches jusqu'à New York.
comme prête à l’engloutir, c’est pourtant elle qui tend la main
à Autumn et la sauve. L’immensité de la ville dépasse certes
les deux jeunes femmes qui n’y sont pas adaptées. Mais
enceinte et en quête d’aide extérieure, Autumn y rencontre
une bienveillance, presque comme un amour maternel. Une
proximité s’installe avec des gens qu’elle ne connaît pas, mais
dont elle croise la route. Une proximité qu’elle ne connaîtra
sûrement jamais avec les siens.
Comme symptomatique de ce qu’Autumn veut cacher ou
la place que lui laisse la société, le film se veut basé sur
l’économie de mots. On nous parle peu. Les filles parlent
peu. Même entre elles. On ne leur fait dire que ce qu’il est
nécessaire. On ne nous dit pas tout parce que l’on est capable
de comprendre par nous-mêmes. La narration mise sur les
intuitions et connaissances universelles. Autumn et Skylar
parlent peu, mais elles parlent aux femmes.
Lauren von Beust

Car les deux adolescentes sont poussées à devenir femmes.

Violemment contraintes à le devenir rapidement. « Le monde
est hostile aux jeunes femmes », a confié la réalisatrice
Eliza Hittman dans une interview. Et le monde hostile que
représente leur ville natale ne les laisse pas être des filles de
leur âge. Elles doivent grandir, assumer les responsabilités de
l’âge adulte, mais aussi subir le sort que l’on réserve encore
trop souvent aux femmes. L’univers dans lequel Autumn
et Skylar évoluent n’est pas absolument pas sécurisant ni
réconfortant. La sphère professionnelle est profondément
malsaine et ce sentiment s’étend jusqu’au sein du foyer
familial.

Mais peut-être que cette hostilité n’est que géographique. Si

le petit coin de Pennsylvanie reste bloqué dans des traditions
bien ancrées, New York, fidèle aux attentes que l’on en a,
ouvre le champ des possibles. Alors que la grosse pomme peut
paraître étourdissante, voire menaçante par sa grandeur,

8 DAILY MOVIES • #109• OCTOBRE 2020

 CALAMITY,
une enfance de Martha Jane Cannary
Il a fallu cinq ans et un budget de 7,9 millions d'euros pour que le film soit fabriqué par une équipe de 170 personnes. Le résultat est
convaincant et remporte le 20 juin 2020 le cristal du long métrage au Festival d'animation d'Annecy, la principale récompense du
festival.
À la fin du XIXème siècle parmi les nombreux convois de
pionniers partis dans l’Ouest américain, la famille Cannary
orpheline de mère affronte les périls de cette entreprise
remplie d’espoir pour l’avenir. Parmi les voyageurs, une jeune
fille rebelle et volontaire Martha Jane la future Calamity
Jane. Son caractère incisif forcera l’éducation et la bien
séance de la société jusqu’à l’impensable.
Un film d’animation fantastiquement bien conçu et sans
appât d’audimat. Les couleurs saturées rappellent les
bandes-dessinées vivantes où le scénario et les messages
sont plus importants que la vitrine. S’attaquer à une légende
américaine comme celle de Calamity Jane est ambitieux,
car nombreux sont les films, les livres et les bandes-
dessinées justement où la période hors-la-loi de cette femme
d’exception a été dépeinte.
De Rémi Chayé
Avec Salomé Boulven, Alexandra Lamy,
Alexis Tomassian
14.10.2020 au cinéma
Agora Films
Note 4/5
Il est intelligent de la part du réalisateur de s’appuyer
sur la genèse de sa vie plutôt sur sa carrière féministe.
Un portrait de femme ou plutôt de fillette engagée sur la
voie de la libération de sa condition. C’est un des modèles
anachroniques de féminisme de l’histoire de l’humanité
que le pouvoir des hommes n’a pas réussi à dompter et à
soumettre, du coup son histoire personnelle a été salie. Il est
agréable de voir ici un film qui remet l’église au milieu du
village, ne serait-ce que pour ses jeunes années.
C’est un plaisir d’accompagner la fillette dans ses aventures
au travers des grandes plaines presque vierges de ce rêve
américain. Les soldats de l’Union, les pilleurs, les ours, les
aventuriers de toutes sortes et les chercheurs d’ors viennent
naturellement étoffer cette épopée qui n’était finalement que
le quotidien de beaucoup d’immigrants de cette époque où
tout était encore neuf. Il ne faut pas voir plus loin avec les
conséquences de la colonisation des terres américaines que
nous connaissons aujourd’hui, car personne ne pouvaient
s’en douter à cette période. L’ambition des uns, n’a-t-elle pas
toujours étouffé la quiétude des autres ?
CBB
9
Swiss Made
Sous la peau
Ils s’appellent désormais Söan, Logan et Effie Alexandra et tous trois ont en commun le désir d’adapter leur genre à
leur identité sexuelle. Le lausannois Robin Harsch les a suivis en pleine période de transition et raconte leurs luttes au
quotidien.
Ce documentaire du diplômé de l’Ecal Robin Harsch
(« Biceps ») débute par une courte séquence où le cinéaste
demande à ses deux tout jeunes fils s’ils se voient plutôt
« garçon » ou « fille ». Suite à la réponse du second qui avoue
se sentir bien comme fille et aimer les vêtements féminins,
le réalisateur avoue à la caméra que si un jour celui-ci lui
annonçait vouloir changer de sexe, le sol s’effondrerait
probablement sous ses pieds. Et que ce qui le sauverait sans
doute serait de tenter de le comprendre un peu. C’est ainsi qu’il
entreprit, entre 2016 et 2018, de suivre trois jeunes trans sur
ce « champ de bataille où s’affrontent questions de genre et
surtout d’identité. »
Durant deux ans, Robin Harsch a alors interrogé et
accompagné ces adolescents, filmé leur combat de tous les
jours, leurs moments de joies et de peines et rencontré une
partie de leur entourage. En particulier certains parents et les
éducatrices du centre d’accueil pour LGBTQI+ « Le Refuge » à
Genève qui les conseillent, les soutiennent et les encouragent.
Le documentariste, devenu confident, a tourné et assemblé
une grande variété de séquences pour tenter de détailler
au maximum les étapes physiques et psychologiques d’un
changement de sexe et d’identité. Il en va de l’annonce à
ses parents et proches du désir de transition, du choix et de
l’acceptation d’un nouveau prénom, des séances d’injections
d’hormones ou de testostérone et d’opérations chirurgicales
10 DAILY MOVIES • #109• OCTOBRE 2020
aussi espérées que redoutées… autant d’épreuves que ces trois
courageux jeunes gens ont accepté de partager avec la caméra
dans l’espoir d’aider le public à entendre leurs souffrances,
mieux les comprendre et éviter les drames. Comme celui de
cet inconnu que le metteur en scène ne peut filmer, caché dans
un appartement pour éviter que sa famille ne le retrouve ou
encore de tous ces autres qui n’apparaissent désormais plus
que dans de tristes statistiques parce qu’ils n’ont jamais trouvé
la compréhension et le soutien dont bénéficient par exemple
ici Söan, Logan et Effie Alexandra.
En un peu moins de nonante minutes, Robin Harsch réussit
à faire un tour, forcément subjectif mais aussi complet que
possible, de la problématique extrêmement complexe du
changement de genre. Tout en sachant, sans en édulcorer les
aspects les plus sombres, constamment maintenir une note
positive. En cela, il est d’ailleurs bien aidé par les personnalités
attachantes de ses protagonistes qui livrent ici avec un
courage remarquable une part très intime d’eux-mêmes.
Etienne Rey
De Robin Harsch
Avec Söan, Logan et Effie Alexandra
Aardvark
11.03.2020 au cinéma
Note : 4/5
 Festival

VIFFF
Vevey International Funny Film Festival
Du 22 au 25 octobre 2020
Vevey
Fort de ses dernières éditions couronnées de succès le Vevey International Funny Film Festival (VIFFF) a décidé de
remettre ça malgré la COVID ! L’objectif reste le même : rassembler des spectateurs de tous les horizons autour de
films du monde entier aussi divers qu’hilarants.

La sixième édition du VIFFF - Vevey International Funny Film
Festival aura lieu du 22 au 25 octobre 2020, au cœur de Vevey.
Contre vents et marées, l'équipe du festival concocte une édition à
la hauteur de notre besoin collectif de rire et de se rassembler : les
films seront projetés en salle, en public et en présence d'invités.
Hommage à Lynn Shelton
Reine du Mumblecore, mouvement indépendant américain
réunissant des films aussi fauchés qu’audacieux, la cinéaste,
actrice et productrice américaine Lynn Shelton est tristement
décédée à 55 ans en mai dernier.

Jean-Luc Bideau : Invité d'honneur 2020

Pour sa sixième édition, le VIFFF reçoit l’un des comédiens les
plus iconiques du cinéma suisse. Jean-Luc Bideau, immense
acteur aux plus de 150 films et séries, qui a tourné pour les grands
noms du cinéma – d’Alain Tanner à Bertrand Tavernier, de Claude
Goretta à Jean-Pierre Mocky – viendra présenter quelques-uns de
ses films durant les quatre jours du festival. Il donnera également
une masterclass le samedi 24 octobre à 14h30 (animée par
Stéphane Gobbo, journaliste, Le Temps) pour revenir sur les 55 ans
d'une carrière toujours aussi intense. "Incroyable!"

En 2019, le VIFFF avait projeté en compétition internationale son

dernier film, Sword of Trust. À l'issue de sa cinquième édition,
l’équipe du festival était en discussion avec la cinéaste pour
l’inviter à Vevey en 2020. À travers une sélection de films, le
VIFFF rendra hommage à l’une des créatrices les plus originales
de sa génération.

La programmation complète est disponible sur : www.vifff.ch

11
 Festival

Les Internationale
Kurzfilmtage Winterthur
Du 3 au 8 novembre 2020
Winterthur
Les Internationale Kurzfilmtage Winterthur se tiendront du 3 au 8 novembre 2020, sous une forme qui satisfera le public sur
place ainsi que les professionnels de la branche du monde entier.

La 24e édition des Internationale Kurzfilmtage Winterthur Première projection au ZFF

se déroulera pour la première fois sous une forme
hybride: outre les projections, dont celles des films des
compétitions suisse et internationale, des programmes
thématiques seront proposés en ligne. Par ailleurs, des
installations et interventions exploreront les possibilités
artistiques du court métrage. Les offres d’information
et de formation ainsi que les activités de réseautage
destinées à la branche seront quant à elles entièrement
numériques. «C’est de cette manière que nous pourrons
vous présenter les créations des cinéastes et les soutenir
cette année, tout en continuant de proposer au public et
aux professionnels un festival riche et varié», ont déclaré
Stefan Dobler et John Canciani, les deux directeurs
du festival. En raison des restrictions imposées sur
les déplacements et afin de protéger le public, les
Kurzfilmtage renoncent à recevoir des invités suisses ou
étrangers cette année.
La bande-annonce a été projetée pour la première fois
durant le Zurich Film Festival (ZFF), dans la section
«Neue Welt Sicht», avec la France en tant qu’invité.
Fidèles au partenariat de longue date qui existe entre les
deux festivals, les Kurzfilmtage offrent à nouveau un bloc
de courts métrages intitulé «Ah, les jeunes !». Les quatre
films sélectionnés figurent sans doute parmi les genres
les plus classiques et productifs. Ils racontent des récits
initiatiques originaux axés sur la périphérie française:
petits villages au milieu de nulle part et banlieues,
amours interdites et conflits de loyauté, désespoirs
silencieux et intenses espoirs y sont les principaux
sujets.
La programmation complète est disponible sur :
www.kurzfilmtage.ch

Une ode à la tronçonneuse

Les Kurzfilmtage donnent chaque année carte blanche
à un ou une cinéaste suisse afin qu’il ou elle réalise leur
bande-annonce. Cette année, cette tâche a été confiée à
Rhona Mühlebach. L’auteure et réalisatrice thurgovienne
consacre sa bande-annonce à la tronçonneuse, arme par
excellence des meurtriers au cinéma. L’idée de départ:
une bucheronne explique en chantant de manière
théâtrale que la tronçonneuse n’est en fin de compte pas
la meilleure amie des tueurs. Le résultat: une vidéo pleine
d’ironie, de chants d’opéra dramatiques et de musique
pop contemporaine.

12 DAILY MOVIES • #109• OCTOBRE 2020

 Festival

19e édition du Lausanne

Underground Film & Music
Festival
14 - 18 octobre 2020-Lausanne
Le Lausanne Underground Film & Music Festival fêtera sa 19ème édition du 14 au 18 octobre 2020 au Casino de Montbenon
et dans divers lieux satellites lausannois.
figures devenues cultes telles que Sono Sion ou Shinya
Malgré des temps troubles et incertains, il repose Tsukamoto.
plus que jamais la nécessité de défendre et de lutter
pour une contre-culture riche et vivante. A la veille Evénement majeur, la cérémonie de clôture accueillera
de son vingtième anniversaire, le LUFF propose cette #ShakespeareShitStorm, adaptation très irrévérencieuse
année une programmation inédite, mouvante et
variable soumise à l’incertitude de la tenue du festival.
Cependant, toute l’équipe s’est engagée dans un pari
audacieux qui fait depuis tant d’années la singularité du
LUFF.

Côté cinématographique : poésie, douceur, sexe et Satan

avec des films-rêves aux senteurs d’éther, des adieux
au langage, du punk antisocial japonais et un accueil à
nos amis sinistrés de la Covid : La Fête du Slip et le 2300
Plan 9.

Identité visuelle 2020

Conçue par les graphistes Estelle Vanmalle et Marcel
Mrejen, l’identité visuelle de l’édition 2020 se devine
comme un reflet de nos sociétés en ces périodes
troubles. S'inspirant des systèmes de reconnaissance
faciale et en détournant des scripts Python, le binôme
a souhaité s'interroger sur la part de l'aspect robotique
de notre époque et soulever une réflexion sur la place
laissée à l'humain.
de La Tempête de Shakespeare et nouveau long métrage
du célèbre cinéaste américain, big boss de Troma
Entertainement, Lloyd Kaufmann qui a, par ailleurs, été
le parrain de la première édition du LUFF en 2002.
Tandis que le cinérama Adieu au Language présentera
une sélection de longs métrages qui se passent de
dialogue ou utilisent des langues méconnues à l’instar
du film Incubus de Leslie Stevens - l’un des rares longs
métrages de l’histoire du cinéma ayant été entièrement
tourné en esperanto, avec en rôle principal William
Shatner -, Maxime Lachaud reviendra au LUFF avec
un programme autour des film-rêves également appelé
films-trips. Ces oeuvres, proposant un voyage aux
confins de l’hypnose et de l’inconscient, se reflètent
comme des songes, imprégnés de symbolisme,
d'érotisme et d'inquiétante étrangeté.

Les salles obscures abriteront également un accueil aux

Film
Le réalisateur japonais punk antisocial Masashi
Yamamoto sera à l’honneur dans le cadre d’une
rétrospective sélective qui mettra en lumière quatre
films emblématiques de différentes époques de
sa carrière. Son dernier long-métrage "Wonderful
Paradise", comédie socio-loufoque, fera l'ouverture
et, sera projeté au LUFF en première européenne.
En parallèle, le programme Japanese 8mm Madness
proposera une série de films réalisés au courant des 80’s
au sein de la scène underground japonaise, autour de
festivals-amis 2300 Plan 9 et la Fête du Slip contraints
d'annuler leur édition au printemps dernier. Tandis
que le festival Chaux-de-Fonnier proposera deux longs
métrages de son cru 2020, le festival pluridisciplinaire
qui s'intéresse aux corps et aux sexualités dans l’art,
présentera sa compétition internationale de courts
métrages.
Pour la programmation complète c'est sur : www.luff.ch

13
Interview
Pablo Briones :
« le film n’idéalise pas non plus l’enfance »
Le premier long métrage suisse du cinéaste argentin Pablo Briones décrit le quotidien de deux enfants cubains.
Un film qui suscite les rires avec une touche de nostalgie positive, qui le rend d’emblée très sympathique.
La Berlinale a d’ailleurs été conquise. Rencontre avec son réalisateur qui nous en dévoile un peu plus sur ce premier
long-métrage.
C’est un premier long-métrage documentaire ou fiction ?
Ou les deux ?
Oui, c'est un premier long métrage et c'est un film…
Disons que dans tout le processus j'ai essayé justement
d’ignorer cette frontière entre documentaire et fiction,
de ne pas trop me faire de soucis à savoir ce qui était
étranger à la vraie histoire ou bien l'inverse, mais plutôt
de travailler librement en essayant quand même de
toujours rester assez fidèle et même très fidèle à mes
personnages, aux lieux dans lesquels ils existent. Mais
bien sûr, là-dedans, il y a quand même beaucoup de
fiction, même s’il est difficile de voir où elle est.
Du coup, comment vous avez fait pour surfer entre la
fiction et le documentaire ?
Alors, il y a eu une écriture de scénario de fiction basée
sur leur vraie histoire, en anticipant un petit peu l'histoire
des protagonistes. Et ensuite, on a organisé un tournage
comme si c'était un tournage de fiction basé sur le
scénario, mais en ayant de la marge pour qu'il y ait de
l'improvisation à chaque fois qu'on était à un endroit
pour tourner une scène. Voilà, ce qui est important, c'est
que les enfants, les protagonistes du film, soient habités
par l'énergie du moment de la scène et puis de ce que
je souhaitais produire chez eux comme personne, pour
que ce qui se passe à l'image soit vrai, pour qu'ils vivent
vraiment ce qui est en train de se jouer dans le scénario.
Pour revenir aux origines du film. Comment est né le
projet ?
Depuis assez jeune j'ai un intérêt pour Cuba, je sens
une sorte d'affinités avec. Et donc, j'ai eu l'occasion de
me rendre à Cuba une première fois pour présenter un
court métrage à l'école de San Antonio de Los Baños, et
je voulais absolument revenir pour faire des repérages,
pour m'intéresser davantage à la réalité cubaine. Et j'ai eu
14 DAILY MOVIES • #109• OCTOBRE 2020
l'occasion de le faire lors d'un atelier, à l'école de cinéma
même, qui était dirigé par Abbas Kiarostami (ndlr :
célèbre réalisateur iranien). Et pendant cet atelier-là, j'ai
réalisé un court métrage qui s'appelle « Pezcal » et avec
les mêmes protagonistes du long-métrage. Donc, je les ai
rencontrés pour ce court et l'expérience a été tellement
profitable, si on peut le dire comme ça, que j'ai voulu
retourner travailler encore avec eux. Six mois plus tard,
j'étais de retour avec un scénario en ayant entretenu ma
relation avec eux à distance, par téléphone et avec une
histoire écrite sur leur vie, pour le temps d'un été, donc,
vivre un été avec eux.
Vous filmez des gens heureux dans un pays pauvre.
C’était voulu ?
Alors c'est marrant. Je pense que c'est aussi une question
de perspective. Parce qu'il y en a qui voient dans le film
beaucoup de nostalgie et même un peu de tristesse, alors
que c'est vrai, quand même, ce qui est le plus représenté
c'est quand même des moments d'enfance qui ne sont pas
forcément joyeux, mais des moments pleins où il y a des
belles choses qui se passent. Toutefois, le film n’idéalise
pas non plus l'enfance. Donc, il y a justement cette
intention d'essayer de montrer autre chose, pas un cliché
d'enfance, mais une enfance dans laquelle il y a aussi, par
exemple, comme c'est le cas dans le film, soudainement
beaucoup de solitude et on doit faire face à ça. Et voilà
donc, ces enfants-là se retrouvent justement dans ce
moment de la vie où elle commence gentiment à nous
mettre à l'épreuve.

Comment avez-vous réussi à rendre les dialogues des
enfants si naturels ?
Alors, il y a peut-être deux choses qui tiennent à ce
sentiment de proximité avec les protagonistes. Et
donc, d'un côté, il y a mon travail de direction d'acteur
avec eux et puis d'écriture de scénario en écrivant un
scénario et des dialogues qui leur étaient très proches.
Et d'un autre côté, il y a aussi un travail de la caméra
remarquable de Jace Freeman de Moving Picture Boys
et aussi de la prise de son de Sean Clark. Eux, ils sont
dans une tradition de documentaire, d’observation et
de proximité avec les personnages donc ils ont une
façon de travailler, cette capacité à être très proches
des personnages sans les déranger et ça, c'était un gros
avantage. Et moi, je prépare le terrain et je les dirigeais
pendant. Mais disons que pour avoir ce côté naturel,
c'est qu’ils ne sont pas en train de faire semblant. Ils font
vraiment ce qu'ils vivent et ils vivent vraiment ce qu'ils
parlent.
Avez-vous des nouvelles des enfants ?
Alors, le plus grand, au risque de spoiler le film, habite
maintenant à La Havane. C'est en lien avec la trame du
film. Il habite à La Havane et il a un compte Instagram,
plusieurs comptes Facebook, des choses comme ça, où il
se met beaucoup en valeur. Et il essaie de garder cet élan
du cinéma… il aimerait bien. Et Leonel est dans une réa-
lité un peu différente parce que lui, il habite toujours au
Pueblo Textil et c'est aussi en lien avec la trame du film
et ils sont très grands maintenant. De Leonel, je n'ai plus
vraiment d'images parce qu'il habite dans une réalité
très différente à celle d'Antuán.
Comment voyez-vous l’avenir d'Antuán ?
Il se profile plus dans une vie cubaine avec un rôle
qui servirait au pays. Il est plus pris par cette envie de
prendre soin de son pays. Et puis, il songeait à la pos-
sibilité de devenir marin parce qu'il aimait bien l'idée
d’aller un peu partout dans le monde pour amener les
bonnes choses à Cuba.
Avec le succès du film à la Berlinale, c’était plus facile de
trouver un distributeur ?
Il y a eu beaucoup d'intérêt de la presse internationale
pour le film une fois qu'on l’a présenté à la Berlinale.
Par contre, la distribution, c'est un terrain qui est beau-
coup plus difficile parce qu’il y a quand même beaucoup
de beaux films chaque année et les distributeurs font
leurs choix et leurs choix ne sont pas forcément ceux
du cœur. Par exemple, on avait plusieurs grands dis-
tributeurs – des distributeurs importants – qui étaient
intéressés parce qu'ils aimaient beaucoup le film. Mais
c'était en contradiction avec d'autres choix qu'ils de-
vaient faire, qui étaient peut-être plus stratégiques par
rapport à… des fois, ça se joue sur ce qui se passe sur la
scène politique à l'international. S'ils ont déjà un film
avec des enfants qui sont en train de devenir adoles-
cents, mais qui se passe dans une région où il y a un
conflit plus important sur le plan de la politique interna-
tionale, là, tout à coup, ils privilégient celui-là. Et donc,
il y a ça. Et il y a aussi une question de stratégie, de
savoir quand proposer le film au distributeur au bon mo-
ment et qui est aussi un jeu très difficile à faire et qui ne
m'appartient plus. Pour le coup, toutefois, on a eu quand
même un bon distributeur, Sweet Spot Docs, dont on est
très content.
CH, USA, ESP – 2019 – 90min
Documentaire / Fiction
De Pablo Briones
Avec Leonel Aguilera, Antuan Aleman
C-Side Prod
09.09.2020 au cinéma
15
 Dossier

Goldorak,
ingrédients d’une série puissante
Enfants, les combats de Goldorak et des robots géants nous fascinaient. Adultes, nous pouvons
désormais apprécier la richesse de réalisation derrière cet anime pas vraiment rétro (laser). Ce
mois-ci, nous vous présentons quelques ingrédients prompts à montrer à quel (fulguro) point
cet OVNI culturel est animé d’une grande puissance.

La puissance de la réalisation
La conception et la réalisation d'une telle série, bien que produit
industriel, découle d'un effort collectif concentré dans un temps
court. Le résultat montre la haute spécialisation des artistes à
l’œuvre, leur abnégation et leur incroyable capacité à imaginer des
univers, monter des intrigues et trouver des solutions techniques,
tout cela coordonné entre différents corps de métier. Outre ses
thèmes narratifs matures, les techniques de prise de vues, les
décors et la musique sont les principaux ingrédients qui font la
puissance de Goldorak. Ils visent à créer des contrastes marquants
et à se concentrer sur l'histoire et les émotions des personnages,
offrant des « vides » que le spectateur, actif, est invité à combler.

Le réalisateur Tomoharu KATSUMATA en 2013, interviewé par Marco PELLITTERI. Il ne cache pas préférer le
genre pour filles (shōjo) - comme Cutie Honey - aux anime pour garçons (shōnen). © Marco Pellitteri

Tomoharu KATSUMATA
L’auteur et chercheur Marco PELLITTERI, qui nous a confié
quelques éléments de ses recherches, a rencontré Tomoharu
KATSUMATA. Né en 1938, celui-ci est l’un des plus grands
La stratégie de prise de vues est empruntée au cinéma : travelling, champ/contrechamp, gros plan,
mouvement dynamique ou lent, effets de lumière, etc.
réalisateurs de séries animées des années 1960 à 80. Diplômé en
études cinématographiques en 1960, il a d’abord assisté de grands
maîtres du cinéma et des dramas, au sein de la Toei Company. Il
pensait que les anime ne l’intéresseraient pas, considérant qu’il
ne s’agissait que de déplacer des images en 2D. Mais réaliser Tiger
Mask l’a fait changer d’avis, parce qu’il intégrait des tragédies, des
émotions et des problématiques sociales diverses. L’anime était
devenu d’un grand intérêt pour le réalisateur, au-delà de ce qui
peut sembler violent si l’on se focalise uniquement sur l’action,
conçue pour fasciner le spectateur. Il décrit Toei Animation comme
une gigantesque machine créative où sont nés des artistes comme
Hayao MIYAZAKI et feu Isao TAKAHATA.

Goldorak est aussi une puissance financière : ce cellulo original s'est vendu à 13 000 € aux enchères au début de l'année !

Un des livres référence de Marco PELLITTERI

16 DAILY MOVIES • #109 • OCTOBRE 2020

La force des décors

Les décors de la Terre ont la particularité d’être tirés de lieux

japonais réels et d’offrir des couleurs et lumières très réalistes
(Monts Yatsugatake, Alpes japonaises, Tokyo, etc.). Par mise en Alpes japonaises (épisode 29)
contraste avec les décors extraterrestres, leur beauté et leur fragilité
encouragent un sentiment de paix contraire au chaos de la guerre...

Explosion atomique lors de l’attaque d’Euphor (épisode 2) Les charmes de la nature rendus dans toute leur splendeur
.

Toshio KATSUTA, au Super Robot Manga Festival 2017
Toshio KATSUTA, responsable du planning de la série, précisait
en 1978 : « Je voulais mettre en scène notre nature splendide
pour créer un contraste saisissant avec la science-fiction et
la mécanique. » La mise en scène des contraires, davantage
basée sur la philosophie orientale du Yin-Yang que sur le
manichéisme occidental, semble être une spécificité de la série.

Naida (Aphélie, épisode 25), création des

chara-designers et animateurs Shingo ARAKI (ci-

dessus) et Michi HIMENO. Au sein du studio Araki

Production, ils formaient l’un des piliers créatifs

de la série. Tous deux ont apporté une grâce

et une intensité particulière aux personnages,

contribuant à les rendre inoubliables.

Shingo ARAKI au sujet de la série, en 2004 :
« Il s’agissait d’une pensée profonde.
Nous ne devions pas seulement très bien
dessiner, nous devions donner un sens profond
au dessin. » Shingo ARAKI au sujet de la série, en 2004 : « Il s'agissait d'une pensée profonde.
Nous ne devions pas seulement très bien dessiner, nous devions donner un sens
profond au dessin. »

17

La magie de la musique
Un maître : Shunsuke KIKUCHI
Il est à la télévision et au cinéma japonais ce que feu Ennio
Morricone et John Williams sont au cinéma occidental. Ses
musiques, souvent réutilisées dans des adaptations étrangères,
sont encore célébrées de nos jours. Né en 1931, cinéphile dès
l’enfance (il aime Disney, Charlie Chaplin et Fred Astaire), il fut
l’un des compositeurs les plus prolifiques du Japon, créant les
musiques – génériques, chansons à thèmes et BGM – d’Anime
(Grendizer, Getter Robot, Dr Slump, etc.), de tokusatsu (Kamen
Rider), mais aussi de films de monstres, de téléfilms policiers, etc.
Tiger Mask, Dragon Ball et Captain Harlock (Albator) figurent aussi
à son impressionnant répertoire.
Plusieurs fois primé, il a reçu en 1983 le Prix JASRAC de la
musique la plus diffusée à l’étranger avec UFO Robo Grendizer. Son
interview par Marco PELLITTERI paraîtra en 2022 dans son nouvel
ouvrage : The Palgrave Handbook of Music and Sound in Japanese
Animation.
Orchestre Triptyque rend hommage à des compositeurs
japonais, en traversant les genres que sont musique
contemporaine et musique de film (à droite : Takuya
IMAHORI ). © Yutaka WATARAI
Hommage de Orchestre Triptyque à Shunsuke KIKUCHI.
Dossier
En 2014, Shunsuke KIKUCHI confiait à Marco PELLITTERI : « Merci infiniment de me faire savoir que vous appréciez
autant ma musique. Et merci pour votre amour de la musique en général. La chose la plus importante qui soit, je crois,
en écoutant de la musique et en regardant un film, est de ressentir de la Joie, pendant et après. J'espère que vous
pourrez continuer d’écouter de la musique et regarder des œuvres qui nourriront votre esprit. »
© Marco Pellitteri
… et des héritiers
Takuya IMAHORI, compositeur, témoigne en tant que grand fan
du Maître et arrangeur de concerts : « J’ai étudié à la Haute Ecole
de Musique de Genève, puis à l’Accademia Nazionale di Santa
Cecilia de Rome. J'ai eu l'occasion d'orchestrer, en 2017, le concert
produit en hommage à Kikuchi-sensei et ses œuvres pour films
et séries. Je connais mal Grendizer, car je suis né en 1978. Comme
d'autres de ma génération, j'y suis venu via la série de jeux vidéo
Super Robot Taisen, apparue dans les 90s. Merci aux fans qui nous
encouragent en achetant nos CDs. Vos voix comptent et pourraient
porter un nouveau projet, incluant la bande son de Grendizer… en
tournée européenne ?! »
Florian GUILLOUX, professeur à La Sorbonne et arrangeur, lui
rend hommage dans son « Plaidoyer pour une musique débile »
paru dans le livre Goldorak, l’aventure continue dirigé par Marie
PRUVOST-DELASPRE et Sarah HATCHUEL (éd. PUFR, 2018). Il y
pointe le remarquable travail de Shigeru MIYASHITA, sélectionneur
des musiques de Grendizer.
Olivier B., fan incontesté lui aussi de Goldorak et de Shunsuke
KIKUCHI, célèbre son travail sur le site www.goldorak-ost.fr, qui
recense toutes les musiques de la série, éditions et supports,
ainsi que des BGM complémentaires issues d'anciennes banques
sonores. Point d’orgue : des réorchestrations de BGM jamais éditées
et des arrangements inédits offerts avec le « G-Project » !
Auteurs : Sabine Luquet, Gilles Broche
Remerciements : Marco Pellitteri, Olivier B.
"Kyeongtchal", Takuya Imahori et Orchestre
Tryptique
UFO Robo Grendizer / Goldorak est © Dynamic
Planning / Toei Animation
Francorak sur Facebook :
www.facebook.com/FrancorakGo
La page d’accueil du site Goldorak-ost.fr
19
 Filmo
Le 6 juin 2019, à l’initiative des Journées de Soleure et du
fonds de soutien Engagement Migros, est lancé FILMO, la
première édition en ligne du cinéma suisse. filmo proposera
des œuvres clés du patrimoine cinématographique suisse sur
des plateformes de vidéo à la demande existantes et assurera
plus de visibilité dans l’espace numérique à ces classiques du
cinéma. filmo est un programme qui s’étend à l’ensemble de
la Suisse et est disponible dans trois langues nationales.
La 7e saison débute le 8 octobre avec de nombreuses
nouvelles perles et des films suisses, qui seront disponibles en
ligne et en qualité HD pour la toute première fois dont voici
une sélection des films à ne pas rater :
Hécate (1982)
De Daniel Schmid
Julien Rochelle prend son premier
poste d’ambassadeur de France au
Maroc, à l’époque coloniale. Il y est
mal à l’aise et s’ennuie – jusqu’au
jour où il rencontre la mystérieuse
Clothilde. Pour la première fois, Julien
a l’impression de vivre vraiment.
Pourtant, sa liaison joyeuse avec
cette femme se transforme en
une obsession dangereuse qui le
poursuivra des années durant. Une histoire sur la passion
physique, l’échec de l’amour et les limites de la folie.
La Dentellière (1977)
De Claude Goretta
En vacances en Normandie, Pomme,
jeune fille timide (Isabelle Huppert),
fait la connaissance de François,
étudiant en philosophie. C’est son
premier amant et elle s’installe chez
lui. Follement amoureux, le jeune
couple inexpérimenté regagne Paris
plein de rêves. Mais les différences
sociales et culturelles font obstacle
à leur bonheur. La rencontre pour
laquelle Pomme se réservait inconsciemment n’aura pas lieu
et François la détruira sans le vouloir.
20 DAILY MOVIES • #109• OCTOBRE 2020
Marie-Louise (1944)
De Leopold Lindtberg
En 1943, Marie-Louise figure parmi les
300 enfants français qui ont la chance
de passer trois mois en Suisse pour fuir
la guerre. A l’arrivée, aucune famille
ne se présente pour l’accueillir. Une
assistante de la Croix-Rouge la prend
en charge sans hésiter tout en sachant
que son père, un homme bourru, ne
verra pas son geste d’un bon œil. Mais
Marie-Louise a tôt fait de gagner la
sympathie du directeur de fabrique,
au point qu’il s’oppose au départ de la
fillette comme toute la famille quand les autorités helvétiques
veulent la renvoyer en France. Un classique qui a décroché
l’Oscar à Hollywood.
Die Vogelpredigt (2005)
De Clemens Klopfenstein
Max et Polo se rendent en Italie
pour proposer leur idée de film
au réalisateur Klopfi. Celui-ci les
envoie dans la forêt sous un prétexte
quelconque… Entre sarcasmes contre
les médias et « Projet Blair Witch » –
comédie, satire, film expérimental et
film d’horreur, tout en un. Réflexion
brillante et divertissante sur les
embûches du métier de cinéaste en
Suisse. Avec une apparition d’Ursula
Andress, ex-James Bond girl, en mère
de Dieu.
www.filmo.ch

Du rose pour les filles,
des bleus pour les garçons ?
D
epuis leur début dans les années 50, comme le
souligne Céline dans l’introduction de son texte : « les
personnages féminins ont participé conjointement
au développement de cette forme médiatique toujours si
populaire que sont les séries télévisées et à la diffusion des
luttes féministes, en 1950, comme aujourd'hui ». Changeant
de formes, de propos et s’adaptant aux évolutions et aux
révolutions dont ils peuvent être, dans une certaine mesure
témoins, les récits sérialisant offrent une vision syncrétique
d’un certain état du champ des représentations, notamment
de genre. Aujourd’hui, alors que des séries telles que
Game of Thrones ou Breaking Bad mobilisent des larges
spectres d’audience, elles sont aussi le lieu de traduction
et d’expression d’objets sociaux qui, par la structure sérielle
qu’elles offrent, permettent de suivre l’évolution des
personnages surtout compte tenu de l’augmentation du
nombre d’héroïnes à l’écran durant ces dernières années.
L’analyse d’un extrait de Body of Proof propose humblement
une perspective sur comment la séquence tendrait, par la
manière dont elle convoque des figures stéréotypales tant
esthétiques que narratives, à reconduire certains aprioris
de genre qui sont loin d’être aussi roses que la tenue du Dr
Megan Hunt (Dana Delany).
Dossier
La séquence, située au début de l’épisode, commence par un
travelling d’accompagnement cadré sur les jambes, portées
par les talons aiguilles du Dr Hunt. Instrumentalisant le corps
féminin, ou du moins ses morceaux fétichisés, comme lieu
de l’expression du « male gaze », et construite pour flatter le
regard masculin, cette scène plaide d’une certaine misogynie.
Ainsi, amorcée comme objet de désir, la caméra dévoile
progressivement la légiste sertie dans un imperméable rose et
parée d’un collier mettant en exergue une féminité séduisante.
Bien qu’elle détonne sur ses collègues et qu’elle présente,
à l’instar de la volubile Chloé Saint-Laurent (Profilage, Tf1,
2009), des compétences professionnelles hors normes ainsi
qu’une féminité mise en valeur, elle diffère de sa consœur
hexagonale par la perte de certains attributs comme « la
gentillesse, l’humanité, le côté maternant ». Cette forme de
masculinisation du personnage est soulignée par exemple
lors de sa traversée du couloir pour aller à son bureau, qui la
construit comme implacable, envoyant paître à leur champ
ses interlocuteurs, à la manière du quasi omniscient Gregory
House. Concernant la manière dont sont construits les
rapports entre les personnages, le nom du Dr Hunt fait à la fois
écho à la détermination farouche qui l’anime mais peut-être
aussi, par extension, à la déesse de la chasse Artémis symbole,
selon l’interprétation de Jean Shinoda Bolen,
« du Women’s Movement, une sorte de mère ourse» Je me
réjouis de constater que l’archétype d’Artémis se répand dans
notre culture, incarné par des héroïnes qui ont confiance
en elles. Il existe aujourd’hui pour les femmes une réelle
possibilité d’incarner l’archétype Artémis ; ce qui ne l’était pas
auparavant. ».
21
 Dossier
Dossier
Une mère Ours donc mais, dans une impossibilité relationnelle
avec sa progéniture soulignant les problèmes soulevés par
l’émancipation du corps, la quête du bonheur personnel
et la conquête des champs professionnels par les femmes
proposant ainsi un modèle de féminité complexe et
contradictoire. Concernant les figures masculines, celle de
l’inspecteur (John Carroll Lynch) représente une forme de
virilité établie, cynique et confiante, même si, durant plusieurs
échanges, on assiste à un renversement des rôles stéréotypés
de genre. Et, c’est justement où semble se passer le
changement qu’une rigidification des pôles advient. En effet,
rejouant des stéréotypes, comme l’allusion au café qui sous-
tend la distribution hiérarchique assignée aux rôles de genre,
au lieu de dépasser les représentations, celles-ci s’inversent,
ce qui cristalliseraient les représentations hétéro-normatives.
Ainsi, souligné par Sarah Sépulchre :
« Les femmes se placent mieux dans l’échiquier des rôles,
mais il ajoute que le fait de changer de cases ne remet pas
en causes les catégories elles-mêmes.». En inscrivant sur le
corps du Dr Hunt des attributs féminins tout en lui prêtant
des affects masculinisants, la série brouille les pistes. Mais
c’est encore au prix d’une masculinisation que la série en fait
la protagoniste principale et l’on retrouve cette illégitimité
qui, chez Loïse Bilat et Gianni Haver, reprise par Sépulchre,
« montrent que le mot « héroïne » lui-même semble subir
une discrimination par rapport à son équivalent masculin ».
Ce besoin de figurer dans un corps féminin, une psychologie
typiquement codée comme masculine, suggère que
l’accession à un rôle central et le processus d’héroïsation
n’advient qu’à condition d’une préservation de la domination
symbolique masculine sous une forme déguisée. On pourrait
supposer que l’héroïsation passerait ainsi par l’érotisation,
la sauvegarde du confort de l’homme blanc restant l’unité
ontologique à partir de laquelle sont difractées toutes les
autres. Le titre Body Proof pourrait suggérer la manière dont
le corps peut être lu comme surface d’inscription en révélant
la dimension performative comme le souligne Judith Butler.
D’ailleurs, le discours du Dr Hunt peut y référer lorsqu’elle dit :
« the answers are here (..). The body for what he tell me about
Angela Swanson’s life ». Une autopsie du Dr Hunt, l’associant
à la jeune femme par le chromatisme (de leur vêtement,
gourde, ongles peints jusqu'à la chair de la victime ), ainsi que
par les questions qu’elle pose vis-à-vis du corps qui pourraient
renvoyer aux interrogations du légiste concernant sa situation
personnelle et, plus généralement, à des questions de
positionnement concernant la place d’une féminité tiraillée
22 DAILY MOVIES • #109• OCTOBRE 2020
entre plusieurs injonctions, devant trouver une place dans des
représentations dont les frontières normatives sont plus floues
que jamais. Les modèles de féminité alternative présentés
sont plus neutralisés, comme l’assistante afro-américaine
(Sonja Williams) peut-être symbole de sa connivence avec
le patriarcat : « he’s usally not so pleasant » (parlant de son
patron) ce à quoi le docteur rétorque « me neither » se
démarquant de sa collègue en revendiquant un modèle de
féminité égalitariste, ne craignant pas la confrontation aux
hommes. Si le Dr Hunt est d’un côté féminisée notamment
par les éléments qui lui sont rattachés, même le téléphone
que sa fille utilise pour ne pas la joindre est rose pailleté, de
l’autre elle affiche certains stigmates que l’on peut rattacher
à une référence au post féministe. Car si la légiste montre
des compétences hors pair dans le champ professionnel,
il en va tout autrement du champ familial, où la maîtrise
semble s’inverser. En effet, les compétences de déduction
du légiste jusqu’ici mises en avant se voient renversées dans
la sphère privée. Elle commence par une fausse assomption
sur l’endroit où se trouve le téléphone de sa fille, puis échoue
dans sa négociation pour être présente à l’anniversaire de
cette dernière. On apprend également que son ex-mari bloque
ses appels soulignant les problèmes de communication du
personnage qui, pourtant, a fait preuve durant le reste de
l’extrait d’une verve impressionnante, problématisant ainsi
les transformations des impératifs de communication et les
transfigurations de la structure du couple. La présence de la
balance, présente en arrière-fond, pourrait faire référence à
la sanction légitimée par le discours de la série infligée aux
femmes fortes. Citant Geneviève Sellier, Sepulchre précise
que « la perte de féminité est une punition narrative ». Ici,
c’est au prix d’un double échec sur le plan affectif, sa fille
ne veut pas lui parler et son ex-mari lui raccroche au nez. La
phrase de ce dernier, « tu nous as perdus », pourrait faire meta
textuellement au post-féminise et comment le récit nous
donne à voir une figure féminine forte mais fragilisée sur le
plan familial. Toutefois, comme l’ont souligné différemment
de nombreux auteurs, ces séries, et leur manière de mettre en
scène des personnages féminins : « ne sont plus simplement
déterminées par les oppositions dialectiques et des dualismes
structurants, ces héroïnes ne s'ancrent plus de façon simple,
dans un rapport de genre au sens masculin-féminin ». Ce
qui, bien sûr, témoigne d’une évolution dans la manière
de représenter les genres mais constitue également un
croisement complexe qui pousse à la prudence interprétative.
En conclusion, Boody of Proof s’inscrirait dans une posture
post féministe tendant à suggérer au public que le féminisme
est dépassé en mettant en scène leur situation de fragilité
malgré leurs acquis dans le champs professionnel qui ne
fait finalement que reconduire un idéal individualiste celui-
ci convoquant l’idée d’une forme de désolidarisation des
femmes et de dépolitisation du mouvement féministe le
reléguant à un combat personnel. L’autopsie de la séquence
pourrait s’étendre à l’anatomie de la série bien qu’un extrait
puisse sembler insuffisant pour une portée heuristique
suffisante. Sépulchre suggère que « Si les personnages
évoluent (…) les caractéristiques principales des protagonistes
sont fixées dès le début ». Ainsi, Boody of Proof offre la vision
d’une féminité ayant conquis le champ professionnel au prix
d’une perte de maîtrise de la sphère familiale, ce qui tend à
reconduire des stéréotypes de genre et donc à réaffirmer des
rapports de domination sous couvert fuchsia. Nous devons
ainsi, comme le Dr Hunt, examiner avec soin les preuves qui
jaillissent pour l’œil agile des corpus de séries afin de dresser
un portrait d’une féminité contemporaine où la sexualité est
moins normée et où les femmes sont confrontées à la double
injonction de concilier finance et famille, témoignant d’une
évolution dans le champ des représentations notamment
concernant l’espace dans lequel la femme se présente et est
représentée. La série participe néanmoins d’une tendance qui
place les femmes sous les feux des projecteurs concourant à
l’évolution, certes lente, mais présente des représentations qui,
pavé après pavé, parsèment le chemin imprévisible des
(r)évolutions.

Bibliographie :
• MORIN, Céline, Les héroïnes de séries américaines : de
« Ma sorcière bien aimée » à « The Good Wife », Tours, Presses
universitaires François-Rabelais, 2017.
• SEPULCHRE, Sarah, «Policier/scientifique, féminin/masculin
dans les séries télévisées. Dépolarisation des caractérisations
et réflexion sur les outils d’analyse», dans Béatrice Damian-
Gaillard, Sandy Montañola et Aurélie Olivesi (dir.), L’assignation
de genre dans les médias. Attentes, perturbations,
reconfigurations, Rennes, Presses universitaires de Rennes,
2014, pp. 93-107.
• MULVEY, Laura, « Plaisir visuel et cinéma narratif » [1975],
CinémAction, n°67, 1993, pp. 17-23.
• Bolen , Jean Shinoda, «Artemis, the Indomitable spirit in
every woman », Conari Press , 2014

Simon Rodriguez

23

The Hate U Give
Les listes des mauvais films sont souvent nourries des meilleures intentions. Et c’est presque un miracle que « The Hate U Give »,
l’adaptation du best-seller d’Angie Thomas sur la vie tragique d’une jeune Afro-Américaine s’en sorte très bien.
Starr Carter est une adolescente qui semble presque
ordinaire dans une école privée. A cela près qu’elle est issue
de la communauté noire américaine et que tous les matins
elle arrive directement de son quartier à majorité noire et
défavorisée. Essayant chaque jour de donner le change
face au quotidien bourgeois et surtout très blanc de ses
camarades et amis. Un soir, le fossé fragile éclate suite au
meurtre insensé de son meilleur ami d’enfance par un policier
blanc un brin trop nerveux. Cette situation dramatiquement
clichée entraîne une suite d’événements dont Starr semble
être l’épicentre. Elle devra rapidement faire un choix dans ses
comportements, son entourage et ses prétentions d’avenir
afin de survivre tout simplement dans un monde d’une
cruauté affligeante.
Ce film est avant tout une adaptation du roman de même
titre d’Angie Thomas. C’est une assez bonne interprétation.
Il est toujours bon de rappeler au monde la réalité de
ségrégation que vivent les différentes communautés. Même
si les exemples ici sont fidèles à la vie américaine et citadine,
des exemples similaires en corrélation avec chaque pays
sont existants. Ce n’est pas parce qu’on en parle pas tous les
jours que ces problèmes sont résolus. La tension sociale et les
incompréhensions sont décrites avec justesse et simplicité
sans tomber dans le piège de l’exagération et de la prise de
Blu-ray
De Georges Tillman Jr
Avec Amandla Stenberg/Regina Hall/
Russell Hornsby/K.J. Apa/Sabrina
Carpenter
20th Fox
Note : 4/5
parti. Cette histoire est surtout un tableau des différences
et du lot de problèmes qu’elles apportent malgré elles. Bien
entendu, les trois plus grandes disparités sont la religion,
la classe sociale et l’ethnie. Le scénario a pour avantage de
pouvoir couvrir les trois secteurs. Côté distribution, nous
retrouvons K.J. Apa, célèbre Archie Andrews de Riverdale,
dans le rôle du petit ami hyper compréhensif. Son jeu est tel
que l’on a l’impression qu’il va craquer et laisser tomber Starr
a tout moment. Beaucoup d’émotions dans ce long métrage
malgré le sujet traité qui est usé et limé. La preuve qu’on n’en
dira apparemment jamais assez.
C’est un film pour ado certes, mais pour ados concernés par
l’évolution des mentalités, en ce qui concerne l’égalité de tous
en tous cas. L’héroïne ne part pas gagnante, car elle affiche à
elle seule également trois fardeaux connus pour ralentir les
combats et la crédibilité : c’est une femme, noire et issue du
milieu défavorisé… Comme disait Whoopi Goldberg dans son
interprétation du personnage de Celie : « Je suis une femme,
je suis noire et je suis peut-être pauvre, mais je suis libre ! ».
Ce qui résume tout cela.
(CBB)
25
BO

Heilung « Futha » Denmark

Season Of Mist

La musique d'HEILUNG est présente dans la toute nouvelle saison de la série «Vikings». L'épisode 10 de la
saison 6 présente plusieurs fragments et on peut également retrouver un extrait dans l'une des scènes de
Rus Army - Attack the Beach.

Le groupe de neofolk danois Heilung avait dévoilé deux
premiers extraits de son prochain album, « Futha », sorti le
28 juin 2019 chez Season Of Mist. Les morceaux s’intitulent
« Norupo » et « Othan ». Le premier se base d’ailleurs, sur
un poème runique norvégien. Le groupe a également sorti
un teaser pour « Futha » qui montrait vraiment l’ambiance
si proche de la série « Vikings » et on comprend pourquoi
ils sont présents dans cette série dont tout le monde parle
depuis des années et qui a relancé la musique nordique à
travers le monde.
« Futha » est le résultat de trois ans de travail. Il a été
achevé dans l’obscurité du milieu d’hiver danois. Mais après
l’obscurité vient la lumière, après l’hiver vient le printemps,
après la souffrance vient l’apaisement et après « Ofnir » vient
« Futha ». Surprise par les excellentes critiques et les shows
spectaculaires du groupe, la maison de disque Season Of
Mist décide de rééditer le premier album du groupe « Ofnir »,
sorti en 2015.
tente de s’éloigner de la politique moderne et du contexte
religieux actuel, pour se rapprocher d’un temps où ceux-ci
n’existaient pas.
La musique singulière du groupe a été utilisée par HBO
Latin America et Game Of Thrones pour un teaser de la série
à succès, disponible sur le compte Facebook de Season Of
Mist.
Les membres du groupe étaient en tournée européenne
d’octobre au mois de novembre 2019. Elle avait commencé
à Varsovie le 22 octobre et s’était terminé le 20 novembre à
Paris avec un arrêt par Zürich au Volkshaus le 5 novembre
2019. L’ambiance y était présente et le groupe a conquis les
nombreux fans de musique nordique mais aussi les fans de
la série Viking. L’histoire ne dit pas si on les reverra en 2020
mais on peut toujours les suivre sur la page du groupe.
www.facebook.com/amplifiedhistory

Heilung signifie « guérison » en allemand et c’est l’essence Elsa Kunikowski

même de l’esprit du groupe. Sa musique est faite dans
l’espoir de détendre l’auditeur, de le relaxer, pendant un
voyage musical parfois turbulent. Heilung puise dans l’âge
du fer germanique et dans la période des Vikings pour créer
une expérience sonore unique. Les paroles des chansons
proviennent de textes historiques et sont parfois des
traductions de textes originaux et de poèmes. La formation

27
Multimédia

Enceintes sans fil

EXTRA BASS XB43 de Sony
L'enceinte sans fil SRS-XB43, robuste et facile d'utilisation, offre des basses puissantes et dynamiques tout en restituant des voix
claires. Profitez de la fête du cinéma sans avoir à vous soucier d'autre chose.

Vous vous demandez sûrement pourquoi nous parlons d'un est très présente. Quelques débordements provenant de
tel artefact ? Tout simplement parce que c'est la découverte l’extrême grave lorsqu’on pousse le volume à fond mais qui
de la rédaction, qui est toujours à la recherche du meilleur écoute au maximum de sa puissance ? Cela dit, certains sons
équipement pour écouter la musique mais aussi pour regar- parasites peuvent se faire entendre selon le type de conte-
der les films, séries, courts-métrages, à la maison ou ailleurs. nu et les conditions d’écoute lorsque le mode Extra Bass
Et actuellement, vous avez sûrement remarqué, la mode est est enclenché. Il n’y a heureusement là rien de rédhibitoire
au mini projecteur pour la maison. Un appareil très intéres- puisqu’un petit passage par l’EQ de l’application suffit à ré-
sant pour un prix très raisonnable si on ne veut pas passer gler le problème sans nuire aux performances de l’enceinte
par le projecteur pro à quelques milliers de francs. et au plaisir d’écoute. En revanche, absolument rien à redire
d’autre sur les médiums et aigus, le rendu dans ces zones est
L'avantage des mini-projecteurs c'est le prix et l'installation à la fois précis et défini.
simple dans une chambre ou dans un petit salon mais le
seul hic c'est le son. Certes, la qualité est déjà très impres- Points positifs
sionnante pour une telle taille mais le son pour un cinéphile
est très important et si nous ne voulons pas investir dans un • Une qualité audio améliorée grâce aux haut-parleurs
équipement cher et qui prend de la place, les enceintes sans X-Balanced Speaker
fil Extra Bass XB43 de Sony sont la solution.
• Fabrication très robuste, résistante à l’eau
Parmi la nouvelle ligne d’enceintes portables lancée par Sony
en 2020, la SRS-XB43 se place comme la pièce maîtresse et • Très belle ergonomie
le remplaçant haute gamme de l’ancienne génération. Au
prix de CHF 249, ce modèle reprend une grande partie des • Commandes exhaustives, connexion multipoint.
caractéristiques du modèle XB33, c’est-à-dire, conception
robuste, waterproof, jeu lumineux, powerbank, Bluetooth 5.0 Points faibles
multipoint, haut-parleurs X-Balanced, compatibilité avec les
applications Sony Music Center… mais dans un format plus • Quelques débordements dans l'extrême grave avec le
grand ; mais pas aussi lourd et encombrant comme on pour- mode Extra Bass
rait l’imaginer.
• Des aigus qui auraient pu être plus précis
Le son pour le cinéma
Puisque ce qui nous intéresse c’est le cinéma et la qualité du
son, la SRS-XB43 surprend en bien par la richesse de sa res-
www.sony.ch/fr
titution sonore. Malgré sa taille, l’enceinte qui se transporte
facilement, parvient à fournir des basses étonnamment
profondes et intenses compte tenu de sa taille. L’assise est
très solide, la sensation d’impact est très bien retranscrite et Carlos Mühlig
la définition est plus que satisfaisante lorsque nous regar-
dons un film d’action ou un film romantique où la musique

28 DAILY MOVIES • #109 • OCTOBRE 2020

 Vankyo 5000 Lumens
Video Projecteur 720P Full HD 1080P Native
Un mini vidéoprojecteur était encore il y a quelques années un doux rêve à cause du prix, mais pas seulement. Gros, lourds,
bruyants et souvent peu pratiques à utiliser, ils cumulaient les inconvénients comme les défauts. Heureusement la technologie
a fait des progrès et on peut désormais bénéficier du meilleur mini vidéoprojecteur pour le prix que coûtait un modèle d’entrée
de gamme il y a à peine cinq ans.

Les conséquences d'une telle accessibilité, les ventes se Connectivité multiple :

sont envolées et le nombre de modèles proposés aussi,
rendant ainsi le choix un peu plus difficile. Parmi tous les
modèles, nous avons découvert le Vankyo 5000. Un mini
projecteur de Cinéma Maison: Avec la résolution native 1280
X 720P et le rapport de contraste de 3000: 1, en résumé, il
améliore votre expérience visuelle comme si vous étiez au
cinéma mais à une distance raisonnable. Il supporte les
sources d’entrée vidéo 480P, 720P et 1080P, idéal pour le
divertissement à domicile, pour regarder vos chaînes télé
préférées et grâce à sa compatibilité avec Chromecast ou à
lAppel TV regarder du contenu Netflix, Amazone Prime ou
encore Disney+.
Le vidéo projecteur est équipé de multiples ports, incluant
un port HDMI, VGA, USB, sortie audio et AV. Il peut faci-
lement être connecté avec votre téléphone, PS3, PS4 ou
X-Box One pour visionner des vidéos, séries télévisées, par-
tages des photos, jeux, etc.
Si vous aimez le cinéma ou que vous souhaitez bénéficier
d’un grand écran qui ne prenne pas toute la place dans une
pièce, comme une chambre par exemple, le mini vidéopro-
jecteur Vankyo 5000 est la solution idéale avec un prix très
raisonnable par rapport à la concurrence et en plus, il se
range facilement lorsque l'on a plus besoin.

Images Nettes et Claires :

La technologie LED améliorée rend Vankyo mini-projecteur www.ivankyo.com

plus brillant que les autres projecteurs, ce qui vous offre
des images nettes, claires et réalistes sans risque de fatigue Carlos Mühlig
oculaire. Petit bémol, la qualité se dégrade au passage du
cinéma à la télé.

Grand écran et haut-parleur intégré:

Le vidéo projecteur Vankyo 5000 a une taille de projection

de 39″-250″ avec une distance de projection de 1.3-8.1m.
Le haut-parleur stéréo intégré fournit une qualité de son
clairement équilibré, une expérience de son vraiment in-
croyable mais il est conseillé tout de même d'ajouter un son
externe pour obtenir une meilleur qualité du son, surtout
si vous regardez un film. L'appareil possède également un
mode écologique qui réduit le bruit de dissipation ther-
mique de 30% à 50% ce qui est très intéressant.

29
Nanar mon amour An 2000, juste après les célébrations bien arrosées du nouveau
millénaire. Tout est aligné pour produire une grande fresque
épique sur Vercingétorix, on y croit, on s’emballe. Vercingétorix,
un personnage archi-connu des Français mais à qui on n’a
consacré aucun film jusque-là (ou plus précisément un seul, en
1909), c’est un sujet en or. Ça va être le « Braveheart » français,
un grand film historique avec beaucoup de soin apporté à la
reconstitution. La civilisation gauloise va enfin sortir de l’ombre
de Rome et retrouver sa gloire ! Sauf que…

VERCINGÉTORIX
Tout le monde était bourré… Tout le monde était bourré…

Christophe Lambert Et pourtant on y croit. Ça

acceptele rôle-titre. Il en a
marre de jouer des mecs
avec des épées mais il y va
quand même. Ça va être
un film important, qu’on
montrera dans les écoles,
dont les profs se serviront
pour parler des Gaulois aux
gamins. C’est l’occasion enfin
de sortir des daubes pour
ados style « Fortress » et
« Beowulf » qu’il enchaînait
à l’époque, et de rejouer
dans une production un peu
prestigieuse.
va être une grande co-
production avec un casting
européen. Le premier
blockbuster français du
nouveau siècle, on va tourner
simultanément en français
et en anglais et aller vendre
le film dans tous les pays !
Pour une princesse belge,
prenons Inès Sastre et son
accent espagnol ! Et Klaus
Maria Brandauer pour jouer
un Italien. Et Max von Sydow
en druide celte !

Tout le monde était bourré… Tout le monde était bourré…

Le réalisateur, Jacques
Dorfmann, part tourner en
Bulgarie. Fan de rugby, il
engage Vincent Moscato,
Jean-Pierre Rives et Denis
Charvet, des joueurs pros,
solides sur les appuis. La
descente solide aussi. C’est
Moscato qui raconte : le
réalisateur allumé du matin
au soir, Lambert qui s’y
met aussi, puis le reste du
casting et de l’équipe. Le
tournage est long, en plein
air. On s’emmerde, on a froid
et l’alcool n’est pas cher en
Bulgarie.
La reconstitution est un
naufrage. Pour chaque scène
montrant le raffinement de
la civilisation des Gaulois,
la suivante les dépeint en
barbares crasseux, au mieux
en villageois querelleurs
tout droit sortis d’Astérix.
Les Romains ne s’en sortent
pas mieux : mal peignés,
mal rasés, on dirait qu’ils
sont en vacances tellement
ils n’en ont rien à foutre.
Ils sont une trentaine de
figurants pour faire 10 légions
romaines, mais le réalisateur
voit double alors ça passe.
Plus personne ne compte
les anachronismes, les
consultants sont partis au
bistrot.

De Jacques Dorfmann
Avec Christophe Lambert, Max Von
Sydow, Klaus Maria Brandauer, Ines
Sastre, Denis Charvet, Vincent Moscato

30 DAILY MOVIES • #109 • OCTOBRE 2020

Tout le monde était bourré…
Comme les acteurs, les
dialogues sont pétés comme
des coings. Vercingétorix
entame ses discours par
“Gauloises, Gaulois !”. Lambert
proteste : c’est ridicule.
Dorfmann lui rétorque “Où
tu crois que de Gaulle a
été chercher “Françaises,
Français ?”. Tant pis, il aura
essayé, il se ressert un shot.
De toutes façons il a lâché
l’affaire quand il a dû donner la
réplique à “Si tu sais ce que tu
veux, ton adversaire le voudra
aussi.” Ou alors c’était quand
on lui a sorti “Le savoir des
rêves appartient seulement à
celui qui rêve", il ne se rappelle
plus. C’est pas grave. Éclair
de lucidité ou emblème du
renoncement total, à un
moment Max von Sydow lui
lance “Le bien n'engendre
pas la force, le mal non plus,
mais le mal appartient à ce
monde des conflits humains
où on est tous prisonniers,
c'est là le véritable piège”
et Lambert répond “Tes
propos incompréhensibles
ne m'aident pas”. Christophe
Lambert qui d’ailleurs fait la
même tronche pendant tout
le film quoi qu'il arrive. Son
non-jeu assure la nanardise
même quand il ne se passe
pas grand-chose.
Tout le monde était bourré…
Les scènes de bataille sont
incompréhensibles. Gergovie
est gagnée par les Gaulois
en balançant des poulets sur
les Romains pendant que
les femmes montrent leurs
seins. Alésia au moins c'est
simple : il ne s’y passe rien. On
comprend vaguement que ça
se conclut quand ni Gaulois
ni Romains n’ont plus rien
à manger. Tant qu’il reste à
boire...
Tout le monde était bourré…
Pendant le tournage, la
critique est optimiste. Le
grand projet prend forme,
les articles de presse sont
élogieux. En retournant à ses
origines la France va revenir
en force sur la scène culturelle
internationale. En post-prod
pourtant c'est la gueule de
bois. Quasiment toutes les
scènes de bataille sont bonnes
à jeter, et vu ce qu’il reste
dans le montage final on
tremble en imaginant à quoi
doivent ressembler les rush.
Le film s’ouvre sur une vue du
système solaire en images de
synthèse et personne ne sait
pourquoi. En anglais, le film
s'appelle “Druids”, on ne sait
pas trop pourquoi non plus
mais sans doute en espérant
draguer les rôlistes. Ailleurs
qu’en France le film sort
directement en vidéo, cette
fois personne ne se demande
pourquoi.
Tout le monde était bourré…
Les salles étaient vides. Et
depuis 20 ans les nanardeurs
rigolent car le film est
finalement très agréable à
regarder… à condition que tout
le monde soit bourré !
Julien Gautier
Retrouvez l'intégralité
de cette critique – et des
centaines d'autres – sur
nanarland.com, le site des
mauvais films sympathiques !
31