www.ferrovissime.

com N°108
Nov./Décembre 2020

Le magazine
g du train et de son histoire
DOSSIER 22 PAGES
TRAINS P.75 P.26
CC 20001,
CC 25000 P.3 4 PRESSEDE LA CONDUCTEUR
TRAIN JAUNE

TRÉSORS
S
D’ARCHIVE

241 P
CC 20001, CC 25000

S E
À NEVERS
France METRO : 9,50 € -BEL/LUX/ESP/ITA/PORT.CONT./D : 10.50 €

L 17305 - 108 - F: 9,50 € - RD

Directeur de la publication
Christian Fournereau - 02 97 24 81 30
chfournereau@lrpresse.fr
Rédacteur en chef
Jehan-Hubert Lavie - 06 42 55 47 92
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Conseiller technique de la rédaction
Thierry Porcher Le vrai début du
“50 périodes” a 70 ans !
Conception graphique
BecomeDesign
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Mise en page

Bertrand Bourn
Ont collaboré à ce numéro
Robert Alvernhe, Sylvain Assez,
Frédéric Didelot, Jean-Marc Dupuy,
François Durivault, Jean-Michel Eich,
Gilles Germain, Baptiste Grandclément,
Éric Hospital, Nicolas Husson,
Marc Le Gad, Christophe Masse,
Aurélien Prévot, Romain Vergnères,
François Vielliard
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ISSN> 1961-5035
CPPAP> 0423 K 89491
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BP 30104, F-56401 AURAY Cedex
Siège social: 2 rue de Suède, Auray
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SARL au capital de 84500 €
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Principaux associés:
Christian Fournereau,
& Friedel Fournereau
“Printed in France/
Imprimé en France”
I
l fallait évidemment marquer l’anniversaire de l’un des
évènements majeurs de l’histoire du rail français, voire mondial :
le 15 octobre 1950, la CC 6051 – future 20001 – assure les premiers
trains réguliers sous une caténaire raccordée au réseau public
d’électricité et alimentée en 20 kV/50 Hz. L’évènement a lieu en Savoie,
sur les 39 km de la voie unique Aix-les-Bains/Annecy.
Sous l’impulsion de Louis Armand, entouré d’une solide équipe
d’ingénieurs, cette expérimentation va donner d’emblée des résultats
qui suscitent beaucoup d’espoir pour les futures électrifications. En
évitant d’avoir un réseau d’alimentation électrique spécifique et en
réduisant les installations fixes ferroviaires par rapport aux autres
systèmes, ce « 50 périodes », comme on l’appelle alors, permet des
réductions considérables des coûts d’investissement – jusqu’à 40 % !
Pour célébrer cet anniversaire et la locomotive, aujourd’hui préservée,
qui en est l’héroïne, un modèle réduit est proposé aux modélistes qui
découvriront toute l’histoire de cette machine et de sa descendance
dans les 22 pages du dossier publié dans ce numéro.
Un numéro dont le sommaire contient également une étude sur
les 241 P de la ligne du Bourbonnais. La construction de ces grosses
machines est contemporaine de celle de la CC 20001 et leur puissance
est comparable. Mais les 241 P arrivent à la fin de l’épopée de la
locomotive à vapeur, quand la CC 20001 révèle des possibilités de
développement qui nous ont conduits en droite ligne jusqu’au TGV !
Et puis, comme votre magazine d’histoire ferroviaire n’oublie pas
les évènements d’actualité, la grave crise qui frappe, en France, la
distribution des journaux nous amène à revenir sur une époque pas
si lointaine où les journaux étaient transportés par le train. ◼
rédacteur en chef
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proche, allez sur
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COUVERTURE Grande photo : Une 241 P sUr le BoUrBonnais

© Y. Broncard - ConcePtion : BecomeDesign
 N°108
Novembre/Décembre 2020

20

57
P.34
LES PORTRAITS DU RAIL

7 P.63
Histoire au présent P.26 26_ STARS DU RAIL
4 _ Les V2N à un tournant de leur carrière UN JEUNE BITERROIS
5 _ Dernières RIB à Paris-Est À LA DÉCOUVERTE
6 _ Clap de fin pour les rames tractées
DU « TRAIN JAUNE »…
en Franche-Comté
7 _ Trois trains saisonniers pour
Les portraits du rail
la période estivale 34 _ CC 20001, CC 25000
8 _ Conquête inattendue pour la caisse mobile PREMIÈRES LOCOMOTIVES BICOURANT
9 _ Le point sur les BB 60000 SUR LE RÉSEAU FRANÇAIS
10 _ Le retour des trains du Père Noël
Le monde des cheminots
11 - MÉDIATHÈQUE
Livres, revues, DVD
57_ CŒUR DE MÉTIER
Le poste de permanent «panto» au PC
de Montpellier
Montez à bord 63 _GARES ET INSTALLATIONS
12 _ TRÉSORS D’ARCHIVES Poisson, charbon, goudron au port de Concarneau
241 P: dix ans de service à Nevers 70 _MATÉRIEL ROULANT D’HIER
20 _COMMENT ÇA MARCHE Les fourgons de l’Orient-Express CIWL 1263 à 1296
Le frein à air, un système ancien 75 DES TRAINS SOUS LA LOUPE
toujours utilisé Quand les journaux étaient transportés par le train

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ferrovissime - 3
Histoire au présent

© R. VERGNÈRES
Voici la BB 15041 en tête d’une rame V2N Hauts-de-France récemment rénovée (portes bleues), assurant le TER 847912
Saint-Quentin/Paris-Nord, du côté de Louvres.

Les V2N à un tournant

de leur carrière Texte : Romain Vergnères

Début septembre, une dizaine de V2N du Landy ont été

radiées. Mais le reste du parc a encore un avenir en attendant
un futur matériel.

L es voitures à deux niveaux V2N sont issues

des ZR2N, que l’on retrouve sur la série
Z 20500. Formant des rames de 7 à 10 voi-
tures, aptes à 160 km/h, elles ont commencé
avec des BB 9700 sur les relations Paris/Monte-
reau, et des BB 16100 sur les axes Paris/Le Havre
et Paris/Amiens. Le confort devait s’approcher
de celui des voitures Corail, les trajets pouvant
© F. DURIVAULT

largement dépasser une heure, mais avec une

capacité accrue et sans la climatisation. À partir
de 2002, les V2N ont été modernisées, avec une
nouvelle décoration intérieure et la livrée TER,
à base de gris avec bandeau bleu en bas et haut
de caisse. À la fin des années 2000, les BB 9700
et BB 16100 ont été remplacées respectivement
par des BB 7200 R et des BB 15000 R.
Après radiation de dix voitures excédentaires
au parc Picardie, le reste bénéficie d’une légère
rénovation au technicentre de Saintes, avec
remise à neuf des intérieurs et une opération
caisse. On les distingue des voitures non encore
rénovées par leurs portes d’accès bleues. ◼
Vue à Paris-Saint-Lazare, la 50 87 36 74 040-0 est l’une des deux mixtes
avec une classe différente par niveau!
▶ UNE BIZARRERIE CHEZ LES V2N ◀
Sur les V2N mixtes, chaque classe est répartie sur les
deux niveaux, à une extrémité ou à l’autre de la voiture.
Or, deux V2N de 2e classe Be 26 77 110 et 112 ont été
transformées en mixtes 36 74 040 et 041 avec la 1re classe
au niveau inférieur et la 2e classe au niveau supérieur!
François Durivault

4 - ferrovissime
 © F. DURIVAULT
Fin de service pour les RIB à Paris-Est. La rame 212 stationne en attendant de repartir sur La Ferté-Milon.

Dernières RIB à Paris-Est

Ne les appelez plus «P’tits gris»! À Paris-Est, les RIB ont terminé
leur carrière avec une livrée bleue cachant partiellement leur inox.
Texte : Frédéric Didelot

A pparues dès 1963 sur la banlieue de Paris-

Est, les dernières RIB (Remorques Inox
Banlieue) viennent d’achever leur car-
rière, dans la plus grande discrétion, lors
de l’application du service d’été le 7 juillet 2020.
Elles n’assuraient plus que deux allers-retours
directs en pointe entre Paris-Est et La Ferté-Milon,
Rénovées profondément entre 2002 et 2007,
elles avaient bénéficié de sièges individuels type
Z2N et de la livrée Smarties Transilien à domi-
nante bleue. C’était aussi la dernière occasion
de côtoyer dans Paris intra-muros des BB 67400,
tant en livrée Arzens, En Voyage ou Fret, basées
à Longueau. Les AGC bimode sont désormais
le parc des AGC B 82500 étant insuffisant pour les seuls engins utilisés sur La Ferté-Milon, la
assurer l’ensemble des trains, malgré le renfort section entre Trilport et ce terminus n’étant
de quelques exemplaires Grand-Est. pas électrifiée. ◼
© F. DURIVAULT

© C. MASSE

Verte banlieue près de Nangis : la rame 260 est tractée par une BB 67400. C’est une BB 67559 en triste état extérieur qui
amène ces RIB à La Ferté-Milon.

ferrovissime - 5
Histoire au présent

Les 3 B6Dux du parc comtois sont les dernières en France à comporter un fourgon à bagages. Le 16 octobre 2018,
l’une d’entre elles passe le célèbre site de Deluz en tête d’un Belfort/Lyon.

Clap de fin pour les rames

tractées en Franche-Comté
Après le retrait des BB 25500 associées aux RRR en 2017, c’est au tour
des six BB 22200 et des 30 voitures Corail de quitter les rails comtois.
Texte et photos : Baptiste Grandclément

L es compositions comptant quatre ou cinq

caissesassuraientcinqARBelfort/LyonviaBe-
sançonetLons-le-Saunier,ainsiquedeuxAR
Dijon/Besançonpourpermettreleséchanges
avec l’atelier directeur de Dijon. Désormais, ces
relations sont reprises par les 24 Regiolis Z 51500.
Une partie de ce parc est réemployée : les
nières à conserver leur fourgon d’origine), sont
récupérées par le TER Auvergne-Rhône-Alpes
pour composer trois nouveaux coupons de quatre
voitures et amortir quelques Z2. Les BB 22359
et 361 ont rejoint le parc TER PACA en juin. La
dernière B7uh est reprise par la CMR. La BB22356
et les autres voitures viennent renforcer les TER
4 voitures-pilote B5uxh ont été modifiées par Bourgogne Paris/Dijon/Lyon en fonction des
les Ateliers de Périgueux pour devenir aptes à potentiels résiduels.
200 km/h et rejoindre cet été le parc Grand Est. Un voyage d’adieu a été organisé pour les
Les BB 22248, 249 et 354, accompagnées de trois journées du patrimoine le 19 septembre 2020
B7uh (avec accès PMR) et de trois B6Dux (les der- entre Belfort et Bourg-en-Bresse. ◼
erniers tours de roues
13 mars 2020 pour
composition R160
94219 Dijon/Besançon.
uelques jours plus tard,
confinement aura
aison des rames tractées,
ois mois avant leur
uppression programmée
u service d’été.

6 - ferrovissime
 © N. HUSSON
Le B 85073L de fluo Grand Est manœuvre en gare de Vittel.

Trois trains saisonniers

pour la période estivale
Texte: Frédéric Didelot

Malgré la crise sanitaire, trois

relations saisonnières ont
circulé cet été, entre Paris et
des sites touristiques, grâce
à des rames Regiolis bimode.

L
© J.P. FRANCON

a relation directe Paris-Est/Vittel via

Culmont-Chalindrey et Merrey, rétablie
en 2019 par la région Grand Est, circule à
nouveau les dimanches. Cette année, c’est Assurant une relation
un train dédié, avec neuf arrêts intermédiaires, de locomotives à Rouen n’ont plus lieu, ce qui Paris-Montparnasse/
Pontorson-Mont-
qui renforce les dessertes de la ligne 4 en direction permet de réduire les temps de parcours.
Saint-Michel, le
des Vosges, et non plus la coupe-accroche d’une À côté de ces relations hebdomadaires, c’est B 84557 en UM avec
rame à un train Paris/Mulhouse. un AR quotidien qui relie Paris-Montparnasse à le B 84567 passe
Depuis début février, un aller le samedi matin Pontorson et permet d’accéder au Mont-St-Michel, dans la tranchée de
et son retour le dimanche soir permettent de moyennant un court trajet en car, en moins de Chaville-Rive-Gauche
rejoindre Dieppe et la côte d’Albâtre. Par rapport quatre heures. Prévu d’abord dès le début mai, il le 9 juillet 2020.
aux relations directes en rame Corail existant circule du 6 juillet au 27 septembre, en complé-
jusqu’en 2014, les manœuvres et les changements ◼
ment de la desserte habituelle Paris/Granville.

ferrovissime - 7
Histoire au présent

Deux caisses mobiles

Conquête inattendue
AFC Recycling
prennent place
sur chacun des
wagons spécialisés
composant les trains

pour la caisse mobile

de récupération de
ballast.

D’abord employée pour le transport de fret à haute valeur ajoutée,

la caisse mobile développe son hégémonie en chargeant du vieux ballast.
Texte : Jehan-Hubert Lavie / Photos : Nicolas Husson

U ne caisse mobile est une unité de trans-

port intermodal (UTI) qui peut être
chargée sur un wagon ou un camion
comme un conteneur. Mais, contrai-
rement à ce dernier, elle n’est pas apte au
transporteur maritime et n’est pas conçue
Dans le n°107 de Ferrovissime nous avons vu
que les ordures ménagères de Marseille uti-
lisent des caisses mobiles bennes de 20 pieds.
C’est dans un matériel de type très proche
que l’entreprise AFC Recycling transporte du
ballast usagé, évacué depuis des chantiers de
Les wagons utilisés
sont des Sgmnss
pour être empilée sur plusieurs niveaux ni renouvellement de voie. ◼ 731 immatriculés en
saisie par le haut.
Sa manutention est assurée par des engins
munis de pinces au niveau de plaques ren-
forcées ou d’encoches à sa base. Bien que les di-
mensions des caisses mobiles soient différentes,
elles sont néanmoins cohérentes avec celles
des conteneurs et leur base est munie de pièces
de coin permettant de poser la caisse mobile
en la verrouillant au moyen de twist-locks sur
des châssis ferroviaires ou routiers adaptés au
transport de conteneurs normalisés.
La caisse mobile a d’abord été employée pour
des chargements exigeant un acheminement
rapide, mais au fil du temps, son usage n’a
cessé de s’élargir. Et aujourd’hui, ce sont tous
les chargements susceptibles de passer du rail
à la route qui font appel à la caisse mobile.

8 - ferrovissime
 © F. DURIVAULT
Stationnant le 20 septembre 2020 à Nangis, l’ex- BB 60176 d’E-Génie appartient dorénavant à TSO tout en ayant conservé la livrée
jaune à bandeaux bleus d’E-Génie. Elle porte l’EVN 92 87 00 60176-0-F-TSO.

Le point sur les BB 60000

La revente de certaines
BB 60000 a multiplié
les livrées appliquées à
ces locomotives diesel
reproduites en modélisme.
Faisons donc le point.

© J.M. EICH
Texte : Jehan-Hubert Lavie

E
Ancienne locomotive de Fret SNCF, la 60105 a été rachetée par ETF qui lui
ntre 2006 et 2011, ce ne sont pas moins de a appliqué la livrée blanche de cette entreprise de travaux.
177 locomotives diesel de ce type qui ont
été assemblées par Vossloh à Valence (Es-
pagne) sous la maîtrise d’œuvre d’Alstom.
155 machines (60001 à 155) ont été attribuées
à Fret SNCF et 20 (60156 à 175) à SNCF Infra.
Les deux locomotives BB 60176 et 177, quant à
elles, ont été acquises par l’entreprise de génie
ferroviaire E-Génie.
Actuellement, cette répartition a été modifiée
par la vente de six locomotives de Fret SNCF à
© R. VERGNÈRES

l’entreprise de génie ferroviaire ETF : 60015,

020, 072, 086, 093 et 105.
D’autre part, les deux locomotives BB 60176
et 177 achetées à l’origine par E-Génie ont été La BB 60093 appartient aussi dorénavant à ETF. Toutefois, elle a conservé
revendues à TSO. ◼ la décoration classique verte et grise des machines de Fret SNCF.

ferrovissime - 9
Histoire au présent
Le retour des trains
du Père Noël
La situation sanitaire permettra-t-elle, en décembre 2020,
la mise en marche des trains du Père Noël ?
C' est devenu une tradition. C’est aussi
un excellent moyen pour les chemins
de fer touristiques et les associations
préservant du matériel ancien de se
faire plus largement connaître en dehors du
cercle habituel des amateurs de chemins de
fer. Reste à savoir si la situation sanitaire au
cours des mois de décembre 2020 et janvier
2021 permettra à ces trains de circuler et dans
quelles conditions.
10 - ferrovissime
Les X 2204 et X 4567
en gare de Chorges
en décembre 2019.
Texte et photos : Nicolas Husson
Si l’on prend, par exemple, les circulations «au-
torails du Père Noël», organisées le 1er décembre
2019 sur l’Etoile de Veynes entre Aspres-sur-Buëch
et Chorges par l’Association Train Touristique du
Centre Var avec les X 2204 et X 4567, ce ne sont
pas moins de 170 voyageurs qui ont pris place à
bord de ces autorails anciens préservés achemi-
nés depuis Carnoules. Un réel succès pour cette
association dont c’étaient les premiers trains
circulant pour le Père Noël. ◼
n gare d’Aix-en-
rovence, l’XR 8380
st en tête du train
’acheminement
03820.
Médiathèque
Texte : Aurélien Prévot
L’Histoire
prend le train
Par Sophie Dubois-Collet. 240 pages (format
13 x 20 cm) aux éditions de l’Opportun.
En vente auprès de LR Presse pour
17,90 euros + port (code QUANDHIST).
Le chemin de fer a, depuis sa naissance, joué
un rôle majeur dans l’Histoire en transformant
la perception du monde, en aidant à l’unité
nationale, en favorisant le développement
économique… On ne compte plus le nombre
d’ouvrages scientifiques à ce sujet. Dans ce
livre, l’auteur a fait le choix de s’intéresser à
40 (petites) histoires qui rejoignent parfois la
grande. On retrouve ainsi bien sûr le fameux
voyage de Lénine entre la Suisse et la Russie
en «wagon plombé» ou les voyages du
président de la République dans la magnifique
voiture PR 1 avec un coup de projecteur
sur la visite du président Albert Lebrun
au Royaume-Uni en 1939. Les voyages de
Gandhi en train en Afrique du Sud, prémices
de ses réflexions politiques, sont également
présentés. Mais d’autres chapitres sont
consacrés à des faits plus anecdotiques (mais
parfois très célèbres!) comme le spectaculaire
accident de la gare Montparnasse. Chaque
chapitre est parfaitement indépendant et
se lit aisément. Un livre idéal pour tous
ceux qui aiment les trains… et l’Histoire!
Quand de Gaulle
prenait le train
Film de 30 minutes de Jean Denis, édité par
La Vie du Rail. En vente auprès de LR Presse
pour 15 euros + port (code DVDDEGAULLE).
Exceptionnel. Ce DVD est un document
historique de premier ordre. En effet, ce
film, tourné en 8 mm en 1965, présente
le voyage présidentiel effectué cette année-
là par le général de Gaulle dans l’ouest de
la France. Réalisé par Jean Denis, l’un des
chefs de Traction des voyages du Président,
il présente la totalité du déroulé du voyage,
de la préparation de la rame plusieurs semaines à l’avance à l’arrivée finale à
Paris-Montparnasse. Les commentaires, de Jean Denis, ne manquent jamais
d’humour ce qui ne gâche rien au plaisir. On apprend ainsi que le Général emprunte
essentiellement la RGP aux heures des repas car cela lui permet de gagner du
temps (manger en circulant) et lui évite la rigueur du protocole! La Compagnie des
Wagons-Lits a bien sûr dépêché sur la RGP ses meilleurs cuisiniers qui réalisent
de véritables prouesses gastronomiques. Si la présence de nombreux gendarmes
le long des voies et la circulation d’un autorail avant la RGP présidentielle comme
«véhicule balai» sont connus (le risque d’attentat est alors très important), j’ai
été personnellement très surpris par la foule se pressant le long des voies, aux
passages à niveau, ou même simplement aux balcons des immeubles bordant les
voies pour acclamer le président de la République. Je n’ai finalement regretté qu’une
seule chose: le salon présidentiel est régulièrement cité… mais jamais montré à
l’écran, sans doute pour des raisons de sécurité ? Un DVD vraiment exceptionnel
pour tous les amateurs de RGP et plus globalement d’Histoire contemporaine.
Se souvenir et commémorer
dans l’Aisne
Mémoires (tome LXIV) de la Fédération
des Sociétés d’Histoire et d’Archéologie de
l’Aisne. En vente auprès de la Fédération
(histoireaisne.fr) pour 19 euros + port.
Rassemblant un grand nombre d’articles
fort intéressants sur le travail de Mémoire
effectué après la Première Guerre mondiale
(avec en particulier des études sur certains
monuments aux morts des guerres de
1870, 1914 ou 1940), ce tome présente
également un article sur le rôle décisif
du chemin de fer dans l’Aisne durant
la Première Guerre mondiale. Un ouvrage qui passionnera tous ceux
qui s’intéressent à ce département et à la mémoire combattante.
ferrovissime - 11
 Trésors d’archives

ULTIMES MOUNTAIN
FRANCAISES
En 1964, une 241 P est en gare
de Saint-Germain-des-Fossés
avec un petit express.
© DR / COLL. B. WEYLAND

12 - ferrovissime
 241 P : 10 ANS DE
SERVICE À NEVERS

En 1969, les 241 P terminent leur carrière au Mans

et à Nevers. Après l’Ouest dans Ferrovissime n° 100,
nous examinons leurs roulements sur le Bourbonnais.
Texte : Frédéric Didelot

ferrovissime - 13
Trésors d’archives
En 1965, la 241 P 8
stationne en gare de
Saint-Germain-des-
Fossés. Les agents
de manutention
s’affairent au droit du
fourgon de tête.

Coup d’œil sur la

livrée de cette 241 P
à Clermont en 1964:
la locomotive est
noire sauf les flancs
de l’abri peints en
vert extérieur 306,
filet rouge sur l’écran
pare-fumée, tender
vert extérieur 306
sans filet, hotte noire.
© DR / COLL. D. WALIGORA

L
ivrées entre mai 1948 et juin 1952, les 241P
sont d’abord destinées à remorquer des
trainslourdssurl’artèreimpériale.Ellessont
affectéesàDijon-PerrignypuisLyon-Mouche
etMarseille-Blancarde,aufuretàmesurede
branches Nevers/Moret-les-Sablons, Nevers/
Clermont-Ferrand et Clermont-Ferrand/Vierzon.
Pour faciliter les rentrées au dépôt qui est au
centre des trois lignes parcourues, des relais
sont pratiqués entre deux locomotives 241 P

© DR / COLL. B. WEYLAND
l’avancementdel’électrificationParis/Lyonachevée sur certains trains.
en mai 1952. En prévision de la mise sous tension Celle qui assure le 1109 Paris/Clermont à
delasectionChasse-sur-Rhône/Loriolenseptembre partir de Moret (journée 2) est échangée en
1958, les 241 P 22, 23 et 24 de Lyon-Mouche sont 6 minutes contre l’une de ses sœurs (journée 5)
mutées en mai 1958 au dépôt de Nevers pour pendant l’arrêt commercial en gare de
une utilisation sur la ligne du Bourbonnais. Aux Nevers (21h47/53). Au cours de celui-ci, les trois
côtés du prototype 241 C 1 (qui sera amorti en voitures de queue, plus une facultative le cas
1961), elles remorquent les Rapides 1109 et 1110 échéant, sont détachées. Cette même opération
Paris-Gare de Lyon/Clermont-Ferrand à partir de est pratiquée également sur le 1110 Clermont/
Moret-les-Sablons, où elles relaient une 2D2 9100. Paris (journées 6 et 2), cette fois en 8 minutes
Cet effectif est complété par la 241 P 10 en 1960 (10h41/49). Le même jeu de trois ou quatre voi-
puis par les 241 P 1, 2 et 3 en 1962, qui sont libérées tures est raccordé préalablement à la nouvelle
par l’achèvement de l’électrification de l’artère 241 P, avant la remise en tête du train.
impérialejusqu’àMarseille.Grâceàleurpuissance
supérieure à celle des Pacific d’origine PLM, le Des échanges de machine
tonnage des trains peut être augmenté avec des lors de brefs arrêts
compositions atteignant 14 voitures. Ces relais ont aussi lieu sur le messageries
44565 en 10 minutes (1h52/2h02) avec les jour-
Exploitées en banalité, nées 4 et 3, mais cette fois sans remaniement
comme les 141 R de la composition du train. ▶▶▶
Ces sept machines sont exploitées en banalité
par plusieurs équipes de conduite, ce qui permet
de les utiliser plus intensément sans être tribu-
taires des temps de repos de l’équipe titulaire. Présence des 241 P
Chaque mois, chaque locomotive parcourt ainsi à Nevers
plus de 10 000 km, ce qui représente le double - 241 P 1: 1962-65 - 241 P 10: 1960-67
des pratiques habituelles pour des services simi-
- 241 P 2: 1962-67 - 241 P 14: 1966-67
laires. Six lignes de roulement sont graphiquées,
la septième servant à assurer la maintenance - 241 P 3: 1962-68 - 241 P 15: 1966-67
courante au dépôt de Nevers. - 241 P 6: 1966-68 - 241 P 22: 1958-67
L’utilisation des 241 P de Nevers est équilibrée - 241 P 7: 1965-69 - 241 P 23: 1958-68
avec deux allers-retours sur chacune des trois - 241 P 8: 1965-69 - 241 P 24: 1958-69

14 - ferrovissime
 Les machines à vapeur les plus puissantes d’Europe

A
vec leurs 4000 ch, les 241 P sont les locomotives deux tranches, l’une limitée à Nevers avec une voiture
à vapeur les plus puissantes d’Europe. Elles sont de 1re classe et deux de 2e classe (147 t), l’autre circulant
parfaitement adaptées pour tracter les trains lourds, de bout en bout avec un fourgon, deux voitures de
composés de plusieurs tranches. Ainsi, la charge des Express 1re classe, un wagon-restaurant, six voitures de 2e classe
2019/2022 Paris/Béziers atteint 705 t, avec 16 voitures (446 t). Cela représente donc 593 t pour 13 voitures,
sur le parcours Vierzon/Saint-Germain-des-Fossés: une voiture supplémentaire (49 t) étant facultative.
- un fourgon (20 t) et trois voitures (135 t) Paris/Béziers,
- un ambulant postal (47t) et une voiture (44t)
Paris/Clermont-Ferrand,
- un fourgon (23 t) et un ambulant postal (47 t)
Paris/Saint-Étienne,
- quatre voitures (200 t) Paris/Lyon
via Roanne et Saint-Étienne,
- un fourgon (40 t) et trois voitures (149 t)
Tours/Lyon via Roanne et Saint-Étienne.
La composition de l’Express 1111/1114 Paris/
Nîmes, avec ses tranches Vichy (un fourgon et trois
© DR / COLL. B. WEYLAND

voitures, 178 t), Clermont (un ambulant postal et

trois voitures, 183 t), Nîmes (un fourgon et quatre
voitures, 250 t), atteint 611 tonnes pour 13 caisses.
Quant au Rapide 1109/1110 Paris/Clermont via Nevers,
doté de voitures aptes à 140 km/h, il ne comporte que Le 25 août 1966, la 241 P 7 est en gare de Nevers.

ferrovissime - 15
Trésors d’archives
Départ de Saincaize pour cet Express 1111 remorqué par une 241 P.
Deux allers-retours sur chacune des trois branches
Nevers/Moret, Nevers/Clermont et Clermont/Vierzon
▶▶▶ Enfin, cette opération est également réalisée
en gare de Saincaize sur le 2022 Béziers et Nîmes/
Paris en 6 minutes (2h16/22), ce qui nécessite de
recourir à deux courts parcours HLP (10 km)
entre Saincaize et Nevers. Là aussi, il n’y a pas
de remaniement de composition. À l’époque,
la desserte des gares au sud de Clermont-
Ferrand s’effectue depuis Paris-Austerlitz en
passant par Vierzon, où un relais avec une
2D2 5500 est réalisé.
Les changements d’orientation des machines
sont assurés soit par un passage sur la plaque
tournante des dépôts de Nevers, Vierzon ou
Clermont-Ferrand, soit par l’utilisation du
16 - ferrovissime
© DR / COLL. B. WEYLAND
triangle de retournement de Moret-les Sablons
(le pont tournant de 23 m de cette annexe-
traction est d’une longueur insuffisante), avec
l’emprunt sur quelques centaines de mètres des
voies principales en configuration tender en
avant. Par contre, avant d’assurer le 2022 de
Saincaize à Vierzon, la 241 P circule HLP tender
en avant de Nevers à Saincaize, comme le montre
la moyenne de 44 km/h environ sur ce trajet,
la vitesse étant limitée à 50 km/h dans ce cas.
L’électrification de Le Mans/Rennes effective
en juillet 1965 permet de renforcer la dotation de
Nevers, qui récupère les 241 P 6, 7, 8, 14 et 15 du
dépôt du Mans en 1965-66. Cet apport permet ▶▶▶
© Y. BRONCARD
Une 241 P en
virage sur le pont
tournant de la
rotonde de Nevers.
 © M. AUBERT
La 241 P 24 remorque le Rapide 1110 Clermont-Ferrand/Paris vers 1965. La machine est attelée à une voiture-restaurant bleue,
suivie d’une voiture-fauteuils de 1re classe.

Premier roulement des 241 P de Nevers

Journée Parcours Trains assurés Km Utilisation
1 Nevers 1h45 / Saincaize 2h00 HLP 335 5h22
Saincaize 2h22 / Vierzon 3h52 2022
Vierzon 11h03 / Clermont 14h40 1111
2 Clermont 23h49/Saincaize 2h16 2022 527 6h38
Saincaize 2h30 / Nevers 2h40 HLP
Nevers 10h49 / Moret 12h42 1110
Moret 19h39 / Nevers 21h47 1109
3 Nevers 2h02 / Clermont 7h35 44565 332 11h15
Clermont 16h10 / Nevers 21h52 45482
4 Nevers 6h45 / Moret 9h10 1020 372 5h11
Moret 23h06 / Nevers 1h52 44565
5 Nevers 21h53 / Clermont 0h08 1109 411 5h48
Clermont 14h19 / Vierzon 17h52 1114
6 Vierzon 23h20 / Clermont 3h27 2019 411 6h33
Clermont 8h15 / Nevers 10h41 1110
7 - Entretien 0 0
Nevers-Dépôt

ferrovissime - 17
Trésors d’archives

© Y. BRONCARD
Livrée noire charbonneuse pour la 241 P 10 accouplée au tender 34 P 317.

la puissance limitée des BB 67000 oblige à recourir

à des UM pour concurrencer les 241 P

©DR / COLL. B. WEYLAND

Le signal donne le «blanc»: la 241 P est prête à manœuvrer avec un fourgon modernisé «Trois pattes» et un couvert G4 pour venir en tête
d’une rame dont la longueur sera mieux en rapport avec la puissance de la machine.

18 - ferrovissime
© DR / COLL. D. WALIGORA
En mars 1965, la 241 P 22 présente encore un bel aspect. Elle quitte ici le pont tournant du dépôt de Nevers.
© DR / COLL. B. WEYLAND
Sur la ligne du
Bourbonnais, les
241 P remorquent ▶▶▶ de compenser la radiation de la 241 P 1 arri-
aussi des trains vée en 1965 à échéance de chute de timbre, mais
de messageries. aussi de détendre l’utilisation de ces locomotives.
Ici, à Clermont- En effet, l’arrivée des diesel se profile et il faut
Ferrand le 8 août limiter les kilométrages parcourus par machine
1968.
pour réduire les frais d’entretien et pour retar-
der l’arrivée de l’échéance kilométrique prévue.
Les BB 67000 remplacent les 241 P
HuitBB67000sontlivréesen1964-65àClermont-
Ferrand pour assurer les trains de la ligne des
Cévennes. Parmi elles, les BB 67041, 42 et 43 sont
prioritairement engagées sur les trains précédem-
ment remorqués par les 241 P en relayant soit à
Moret,soitàVierzonlestrainsassurésde/versParis
sous caténaire 1500 V. En effet, leur moteur est
utilisé à sa puissance nominale de 2400 ch, alors
que les autres locomotives de la série sont détarées
à 2000 ch. L’objectif est de tester la tenue de ces
moteurs pendant un an avant de les homologuer
pour les BB 67300. Leur puissance limitée oblige
cependant à recourir à des UM pour concurrencer
les 4000 ch des 241 P. Bien que peu nombreuses,
les BB 67000 reprennent aux 241 P le rapide d’été le
Thermal sur le parcours Vierzon/Clermont-Ferrand
dès l’été 1966. L’année suivante, les 241 P ne vont
plus à Vierzon et demeurent dès lors cantonnées
sur l’axe Moret/Clermont-Ferrand. Cela permet de
garer les 241 P 2, 10, 14, 15 et 22 en 1967, puis les
241 P 3, 6 et 23 au cours du printemps 1968. Les
241 P 7 et 8 conservent jusqu’en janvier 1969 la
traction de l’aller-retour 1109/1110 entre Moret
et Clermont, la 241 P 7 restant encore utilisée
jusqu’en septembre 1969 en service facultatif et
sur des trains de messageries entre Moret et Nevers.
Sa radiation marque la fin d’une carrière d’à peine
20 ans pour ces Mountain unifiées, dont un peu
plus de 10 ans à Nevers. ◼
ferrovissime - 19
Comment ça marche ?

À gauche, le dispositif vide/chargé en fonction de la masse totale du wagon, ici une ballastière, qui donne la masse freinée réalisée du véhicule.
On voit que c’est à partir de 40 t de masse sur rail que l’on passe sur «chargé». À droite, le dispositif Marchandise/Voyageur qui agit sur la vitesse
de réaction du freinage.

Le frein à air, un système ancien

toujours utilisé Texte et photos : Sylvain Assez

Après un bref historique des premiers systèmes de freinage, Sylvain Assez

nous présente le fonctionnement du plus répandu d’entre eux, le frein à air.

C
omme tout mobile, un train a
besoin de freins pour réduire sa
vitesse et s’arrêter. La sécurité
des circulations repose donc aus-
si sur un freinage fiable, efficace
et adapté à l’adhérence ferroviaire, qui
nécessite souvent de longues distances
d’arrêt. Un bref historique montre que
le développement de cette technique
a été relativement long.
Les premiers trains, lents et légers,
se sont contentés du freinage de la
seule locomotive, réalisé par l’applica-
tion manuelle de sabots sur les roues
au moyen de leviers. Puis, la masse
et la vitesse allant croissant, il a fallu
trouver un système plus efficace pour
garantir la sécurité. Apparaît alors
le freinage pneumatique, d’abord
uniquement sur les machines, asso-
cié au freinage des wagons réalisé par
des serre-freins, agents placés dans
une guérite et serrant ou desserrant
les freins commandés par un volant,
sur ordre du mécanicien au moyen
du sifflet.
Le frein à air est appliqué
d’abord sur les machines
Le freinage pneumatique des
véhicules remorqués fait ensuite son
apparition, avec d’abord un système
rudimentaire qui consiste à envoyer
de l’air dans une conduite pour appli-
quer les sabots sur les roues. Mais si
la technique évolue, un grave défaut

20 - ferrovissime

subsiste: en cas de rupture d’attelage
ou de déraillement, rien n’arrête auto-
matiquementlesvéhiculesquipeuvent
aller loin, voire repartir en sens inverse,
puisqu’il faut envoyer une pression
dans la conduite pour freiner.
C’est en 1872 que naît le frein tel
que nous le connaissons aujourd’hui,
le frein à air automatique inventé par
l’Américain Georges Westinghouse.
Le principe est simple: de l’air envoyé
dans la CG (Conduite Générale) sous
une pression de 5 bars permet le desser-
rage des freins, ce qui fait qu’en cas de
chute de pression, volontaire (frein-
age par le conducteur ou signal ▶▶▶
L’utilisation des masses freinées
Un conducteur sait que le freinage
de son train est conforme ou non en
fonction des indications portées sur le
bulletin de freinage. Pour circuler à la
vitesse nominale du train, il faut que
la masse freinée réalisée soit au moins
égale à la masse freinée nécessaire en
fonction de la tare du train. Exemples:
MA 100 de 1600 t ne dépassant pas
800 m: il faut une masse freinée
réalisée minimale de 912t; V 160 de
8 véhicules de 425 t: il faut une masse
freinée réalisée minimale de 550 t.
Si au départ du train le freinage n’est
pas réalisé, le bulletin de freinage porte
Sur cette photo d’une extrémité
de wagon, on peut voir le demi-
accouplement CG, avec la clé ouverte
pour vidange de la CG, la semelle
de frein appliquée sur la roue et la
timonerie qui la relie à l’autre semelle.
Ce système est
appelé frein continu
automatique
Les masses freinées et la masse de la
BB 4813 CFTA sont apposées sur les
panneaux latéraux de la cabine.
une mention indiquant au conducteur
la catégorie dont il doit respecter
la vitesse. Par contre, si en ligne le
conducteur isole un ou plusieurs
véhicules suite à incident, c’est à lui de
déterminer les conditions de reprise de
marche en consultant les tableaux de
freinage de son mémento. La vitesse
peut d’ailleurs ne pas être réduite
si, après isolement, la masse freinée
réalisée reste supérieure ou égale à la
masse freinée nécessaire. Par exemple,
si notre MA 100 de 1600 t a une masse
freinée réalisée de 840 t, sa vitesse
de circulation est celle des MA 90.
ferrovissime - 21
Comment ça marche ?

Le bulletin de freinage reprend les

caractéristiques de composition du
train avec, dans la deuxième partie,
les informations relatives au freinage.
Le freinage réalisé est de 373 t pour un
nécessaire de 363 t. Le train peut donc
circuler à 160 km/h sans restriction.

Sur la traverse d’attelage de ce

G 1000 ECR, les demi-accouplements
CG et CP sont bien identifiés. Ils
sont doublés pour éviter d’avoir à les
croiser sous le tendeur d’attelage.

▶▶▶ d’alarme)ouinvolontaire(rupture
d’attelage,déraillement,etc.),lesfreins
se mettent en action et le train s’arrête.
Ce système est appelé frein continu
automatique: continu car pouvant être
mis en action depuis plusieurs points du
train et automatique car fonctionnant
seul lors du fractionnement du train
ou d’une interruption de la CG. À noter
qu’il existe aussi un autre système de
frein automatique développé princi-
palement dans les pays anglo-saxons
et leurs colonies, le frein à vide. Une
pompe à air fait le vide dans la conduite
et le freinage entre en action lors d’une
remontée de pression. Ce système n’est
quasiment plus utilisé aujourd’hui.
Examinons donc de plus près le
frein à air automatique Westinghouse.
Sur chaque engin moteur se trouve un
compresseur qui alimente un réservoir
de stockage, le RP (Réservoir Principal),
à une pression comprise entre 7 et
9 bars. Entre le compresseur et le RP,
on trouve un réfrigérant, pour abaisser
la température de l’air chauffé par la
pression, et un déshuileur qui élimine
l’humidité aspirée. Outre le freinage,
cet air est utilisé pour les asservisse-
ments tels qu’essuie-glaces, pantos,
sifflet, suspension pneumatique, etc.
Une fois stocké dans le RP, l’air est
envoyé vers les divers asservissements
sous sa pression de régime, et vers la
CG en passant d’abord par un déten-
deur qui abaisse sa pression à 5 bars.
Comment fonctionne
le système ?
Lorsque le frein n’est pas en service,
la CG est à 0. De ce fait, les freins sont
serrés puisqu’il faut de l’air pour les

Sur chaque engin moteur se trouve un compresseur qui

alimente un réservoir de stockage, le RP, à une pression
comprise entre 7 et 9 bars
22 - ferrovissime
 La main sur la commande du frein
automatique, le conducteur va faire sa
dépression en tirant le petit levier vers
lui, et surveiller la valeur de celle-ci par
observation du manomètre du réservoir
égalisateur qui retransmettra cette
valeur à la CG. La commande plus grosse
à sa gauche est celle du frein direct.

Sur ce wagon porte-

conteneurs, on voit
les semelles de frein
appliquées sur la roue
à l’occasion d’un serrage.

desserrer. Une fois la commande du
frein en service, sous réserve que les
RP soient alimentés à la pression de
régime, il est possible de desserrer
les freins. La commande de serrage/
desserrage des freins (sabots ou se-
melles sur les roues ou freinage à dis-
que) se fait par variation de la pression
dans la CG depuis le Robinet du Méca-
nicien, appellation réglementaire de la
commande de frein. Cette variation de
pression agit sur un distributeur, qui
lui-même envoie une pression dans
les CF (Cylindres de Frein), diminue
celle-ci ou les vidange en fonction de
ce que l’on veut obtenir. L’intérêt du
distributeur est qu’il est modérable au
serrage et au desserrage, permettant
un freinage « fin », contrairement à
la triple valve conçue à l’origine par
Westinghouse qui n’est pas modérable
au desserrage.
Le frein peut fonctionner sous deux
régimes: voyageurs (V) pour les trains
devoyageurs,demessageriesetcertains
trains de marchandises; marchandises
(M) pour les trains de marchandises, de
travaux, etc. La différence entre V et M
portesurletempsderéactionduserrage
et du desserrage. Un train de voyageurs
circulant à 160 a besoin d’un freinage
plusréactifqu’untraindemarchandises
de1600 t circulant à 100. Et du fait qu’un
train de marchandises a ses attelages
détendus, il ne faut pas non plus que le
desserrage soit trop rapide pour ne pas
entraîner une réaction brutale pouvant
amener à la rupture d’attelage. On ne
freine donc pas de la même manière
suivant la catégorie du train.
Et en cas de défaillance ?
En cas de blocage d’un véhicule,
c’est-à-dire qu’il ne desserre pas mal-
gré une commande de desserrage, il
faut intervenir directement sur celui-
ci. Le principe est simple: isolement
du distributeur et purge des cylindres
de frein. Et si ça ne desserre toujours
pas, il faut agir sur le régleur des CF,
voire démonter la timonerie. Il ne faut
pas oublier qu’un véhicule non freiné
modifie les caractéristiques de freinage
du train. C’est là qu’entre en compte
ce qu’on appelle la masse freinée, une
donnée exprimée en tonnes qui in-
dique la puissance de freinage d’un
véhicule. Par exemple, une BB 22200
dont la tare est de 90 t a trois masses
freinées différentes : 66 t si les ré-
gimes de frein sont sur V; 47 t si ▶▶▶

ferrovissime - 23
Comment ça marche ?

Le 30101 Bettembourg/Le Boulou est un MA 100 composé de wagons porte-conteneurs en tête et Modalohr en queue. Son freinage se fait
avec les équipements de frein disposés sur le régime «marchandise». Il passe au Pk 324,3 entre Ouges et Saulon, le 20 juin 2020.

Sur ce wagon porte-conteneurs allemand, on observe: le dispositif marchandise/voyageur marqué G/P (Güterzug = Marchandise/Personenzug = Voyageur;
ce terme allemand n’est pas un problème pour un conducteur étranger, car tous connaissent la signification de G/P); viennent ensuite le robinet d’isolement
– ici en position verticale donc en service – avec au-dessus l’indication MAX 72 t indiquant que c’est un véhicule auto-variable dont la masse freinée
s’adapte toute seule en fonction du chargement sans dépasser 72 t; enfin, tout à droite, la tirette pour purger les freins après leur isolement.

24 - ferrovissime
Sur ce véhicule desserré et en circulation, on voit bien les semelles écartées de la table de roulement. Même si la partie basse de la semelle
frotte légèrement sur la table de roulement, ce n’est pas un problème et cela contribue au nettoyage de celle-ci.

Pour les TGV et automoteurs, le freinage n’est pas calculé

par rapport à la masse mais par rapport au nombre de bogies
▶▶▶ les régimes de frein sont sur M ;
107 t si les régimes de frein sont sur
V et qu’il y a utilisation du freinage
d’urgence. Dans ce dernier cas, en plus
du freinage pneumatique, le freinage
électrique entre aussi en action.
Un wagon ou une voiture a deux,
voire trois pour certains wagons,
masses freinées : à vide et en charge.
Le passage de l’une à l’autre se fait
soit par une manette dite vide/chargé,
soit automatiquement en fonction de
la charge. Que ce soit pour un engin
moteur ou un véhicule remorqué,
les masses freinées sont toujours in-
diquées sur la caisse.
trains freinés à la masse, l’isolement
d’un ou plusieurs bogies d’un élément
automoteur n’entraîne pas nécessaire-
ment un abaissement de la vitesse de
circulation. Concrètement, sur un
TGV Duplex en US, 2 bogies inactifs en
frein rhéostatique ou un bogie inactif
et un isolé en freinage pneumatique
n’empêchent pas de rouler à 320 km/h.
Par contre, 2 bogies isolés en frein
pneumatique font tomber la vitesse
maximale à 160 km/h, et si on rajoute
2 bogies inactifs en freinage électrique
à ces 2 bogies déjà isolés, on tombe à
80 km/h de vitesse maximale. Dès que
le nombre de bogies isolés en freinage
pneumatique atteint 4, c’est la demande
de secours. Dans ce cas, une autre rame
doit venir s’accoupler en UM pour aug-
menter les performances de freinage
de l’ensemble. La vitesse maximale de
circulation est alors déterminée en se
référant au tableau relatif aux UM.
Un TGV (ou un automoteur, un auto-
rail) étant considéré comme un unique
engin moteur, en cas d’isolement de frein,
c’est le guide de dépannage qui indique
au conducteur la vitesse à respecter et
non les textes réglementaires comme
pour les trains classiques. ◼

Le cas particulier des TGV

et des automoteurs
Tout ceci ne concerne pas les TGV,
automotrices et autorails qui ne sont
freinés qu’au frein V. De plus, leur
freinage n’est pas calculé par rapport
à la masse mais par rapport au nom-
bre de bogies freinés. Comme pour les
Quelques engins ont
un freinage purement électrique
Certains engins comme les Z 22500, mais aussi les MI 79 et 84
conçus par la RATP il y a pourtant plus de 30 ans, ont un freinage
purement électrique. Il n’y a donc pas d’action sur la CG comme pour
les autres trains. Par contre, ces engins ont quand même une CG afin
de pouvoir être acheminés en véhicule par une locomotive.

ferrovissime - 25
Stars du rail

UN JEUNE BITERROIS
À LA DÉCOUVERTE
DU « TRAIN JAUNE »…
Texte : Robert Alvernhe

26 - ferrovissime

F
Le hasard des ils et petit-fils de cheminot,
c’est tout naturellement
nominations va amener que j’essaie à la fin de
mes études secondaires
Robert Alvernhe sur une d’intégrer cette grande
ligne bien particulière: entreprise qu’est la SNCF
en me présentant au concours d’entrée
la voie métrique du centre d’apprentissage de Béziers.
Les postulants viennent de tous les
Villefranche/La Tour- départements du Languedoc-Roussil-
de-Carol. Suivons ses lon, mais aussi de l’Aveyron, d’où ma
famille est originaire.
premiers pas. Nous sommes 30 élus sur 360 ins-
crits, provenant majoritairement de
la classe de 3e, le BEPC en poche. Et
c’est ainsi qu’en septembre 1971 je
fais mes premiers pas au sein de la
Septembre 1986
,
modernisée, stationnent dans
l'atelier du dépôt de Villefranche.
© É. HOSPITAL
SNCF. Après deux années d’études
générales et surtout de pratique en
atelier, je rejoins l’équipe « moteurs »
à l’atelier du dépôt de Béziers. Des
mois d’atelier interrompus par un
an de service militaire au 53e RCT de
Fribourg (Allemagne).
Élève conducteur
au dépôt de Béziers
À l’aube de mes 21 ans, je décide
de m’inscrire à la formation d’ELCR
(ELève ConducteuR). J’ai ainsi le plaisir
de succéder à mon père, également
apprenti (promotion 1941/44) au dépôt
de Béziers, parti à la retraite comme
conducteur quelques jours avant ▶▶▶
ferrovissime - 27
Stars du rail
En juin 1986, à Villefranche-Vernet-Les-Bains, alors qu'un train s'apprête à partir vers La Tour-de-Carol, du matériel marchandises
est garé sans utilisation depuis mi-1974.
▶▶▶ mon arrivée dans le service de
la Traction. Son professionnalisme
dans la formation de nombreux jeunes
élèves ainsi que son état d’esprit ont
laissé de lui une image très positive et
c’est un bonheur de suivre ses traces.
Ma réussite à l’examen d’ELCR en
janvier 1978 valide ces 18 mois de for-
mation. Les nominations à ce grade se
faisant rare sur Béziers, je postule pour
tous les autres sites de la région pour
accélérer ma promotion. C’est ainsi
que je découvre les Pyrénées-Orientales
et l’annexe-traction de Villefranche-
Vernet-les-Bains.
Un matin de mars 1980, j’arrive
au volant de mon Alfa Sud à Ville-
franche-de-Conflent. Un peu avant
cette cité fortifiée par Vauban, je
tourne à droite, traverse le pont sur
la Têt et arrive devant cette gare de
Villefranche-Vernet-les-Bains. Tous
ces noms sont encore inconnus pour
moi, « l’étranger » de Béziers arrivant
en terre catalane.
Je vais devenir à 24 ans un conducteur
du célèbre Train Jaune
28 - ferrovissime
J’y suis enfin ! Je vais devenir à
24 ans un conducteur du célèbre
Train Jaune, plutôt un ELCR car je
suis venu ici prendre mon premier
grade de conduite. J’aurais pu être là
depuis un an mais Didier, un Biterrois
également, futur camarade et ami a
postulé et obtenu cette nomination,
étant devant moi sur le tableau d’ap-
titude. Finalement il a bien fait, car
je n’étais pas encore prêt, en 1979, à
quitter ma ville natale.
Mon arrivée à Villefranche
Après avoir garé mon Alfa, je
contemple les alentours. Tout en
haut, au-dessus du village, accroché
à la montagne, domine un château
fort. Je saurai bientôt que c’est le
fort Libéria et quelques années plus
tard Villefranche-de-Conflent sera
classée au patrimoine mondial de
l’UNESCO. Dans la cour de la gare,
à gauche, se trouve le buffet qui
va devenir rapidement ma cantine.
© É. HOSPITAL
À droite s’étalent des anciens quais
de déchargement. Vu leur ampleur,
je devine que l’animation du lieu a
dû être bien différente !
En gare, je demande à mes futurs
camarades comment me rendre au
bureau du Chef de Traction. Je traverse
les voies principales sur le passage pro-
tégé et me trouve devant mon futur
outil de travail: un Train Jaune, prêt
à emporter à son bord quelques voya-
geurs. Je regarde la plaque métallique
accrochée sur le flanc de l’automotrice
indiquantdesnomsdegaresdesservies.
Mais à part Font-Romeu, toutes me
sont inconnues. Il faut dire que je n'ai
jamais séjourné dans cette contrée: le
ski n’est pas mon sport de prédilection
et mes origines familiales m’ont ame-
né à me diriger plutôt vers l’Aveyron.
Tout est neuf pour moi : ces au-
tomotrices en bois rouges et jaunes
alimentées par troisième rail et qui
circulent sur une voie métrique. Et
cette voie sur ce mur à 3 m de hau-
teur, que fait-elle là-haut ? Plus tard,
j’apprendrai que cette voie métrique
a servi jusqu’aux années 1960 au
transbordement du minerai de fer des
mines du Conflent en provenance ▶▶▶
 © É. HOSPITAL
La voie en estacade ayant servi au transbordement par gravité du minerai est toujours en place en juin 1986.
© É. HOSPITAL

En février 1971, arrivée à Villefranche-Vernet-les-Bains à bord d'une Z 100 non modernisée. On voit de droite à gauche le BV, le quai central
mixte voie normale/voie métrique, le chantier de transbordement marchandises voie normale/voie métrique et enfin le dépôt.

ferrovissime - 29
Stars du rail

Le parc du Train Jaune

Les véhicules de la ligne de Cerdagne, comme
tous les engins SNCF, sont désignés par
des chiffres et des lettres. Les automotrices
électriques du Train Jaune sont des Z 100,
les remorques des ZR 20000 et les fourgons
automoteurs du chasse-neige les Z 201 et 202.
Ces automotrices construites en 1908 par les
ateliers Carde et Cie à Bordeaux et modifiées

© É. HOSPITAL
en 1962 par les ateliers de Marseille-Blancarde
sont entretenues uniquement à Villefranche.
En juillet 1986, au dépôt de Villefranche, les socs des Z 201 et 202 sont
déposés pour l'été. Cela permet de bien observer les différences entre les
deux étraves, notamment dans leur partie supérieure.

▶▶▶ des gares de Serdinya et de Jon-
cet, minerai qui était basculé dans
des wagons-trémies à voie normale.
Premier contact avec le dépôt
Je continue sur le quai, pénètre dans
le dépôt et trouve une porte vitrée
avec l’inscription « Chef de Traction».
Je vais enfin découvrir mon nouveau
chef! Assis derrière son bureau, il finit
d’écrire quelques mots, puis il lève la
tête et me dit « Oh, c’est toi le jeune
Robert ! Bonjour et bienvenue dans
la maison ». À ces premiers mots, je
comprends tout de suite que lui aussi
n’est pas du cru. Yves, c’est son pré-
nom, est originaire du Gard. Un petit
gars avec une grande gueule, un vrai
«Sudiste». Dans son bureau se trouve
également le secrétaire administratif,
José. La moustache rebelle, les cheveux
au vent, lui est un vrai de vrai, un Ca-
talan pure souche.
Yves m’explique le déroulé de ma
formation : une journée de découverte
du site, une journée de formation théo-
rique sur notre réglementation spéci-
fique et 20 jours de formation en ligne
avecJean-Marie,unautreNîmois,arrivé
commeconducteurdepuisquelquesan-
nées.Yvesmeprendparlebrasetmedit
«Allez petit, enfile une blouse et je vais
te faire découvrir l’atelier». Passant une
porte métallique, je découvre des lieux
à la Zola. J'ai l'impression de faire un
bond en arrière de quelques décennies
et revois soudain la première fois où
chines-outils (tour, fraiseuse, étau-li-
meur, perceuse à colonne), devant moi
des bogies, un peu plus loin des roues,
des boîtes d’essieu et à gauche des mo-
teurs. Il y a même une sous-station
électrique au sein de l’atelier. Juste
derrière nous se trouve le bureau des
chefs d’équipe.
Dans l’atelier, des hommes
qui font des prouesses
Les ouvriers sont capables de refaire
entièrement une motrice. Des artisans,
chacun dans leur spécialité, main-
tiennent un matériel vieux de 70 ans.
Peut-être atteindra-t-il les 100 ans en
2010 ? Avec mon nouveau chef nous
traversons l’atelier pour atteindre un
grand hangar où se trouvent quatre
voies, une qui semble servir à désosser
les automotrices et trois réservées aux
visites courantes du matériel. Magni-
fique de voir ces hommes, dans un si
petit espace, faire de telles prouesses.
La visite est finie, il est presque
17 heures et je ne sais pas encore où
je vais manger et dormir ce soir. Yves
m’informe que l’appartement du chef
de gare, au premier étage de la gare,
n’est pas utilisé; seule une chambre est
occupée par un agent du service élec-
trique.Mevoilàpartipourdécouvrirles
lieux. En montant l’escalier je croise un
grand gaillard de mon âge: c’est Serge,
qui fait demi-tour pour me faire visiter
l’appartement,devenulelieudescourts
séjoursdescheminotsendéplacement à
Villefranche.Biensympamonnouveau
compagnon, photographe passionné et
scénariste amateur, venu comme moi
du Biterrois. L’appartement est équipé
du strict minimum. Dans la cuisine
on trouve un vieux réfrigérateur, un
petitréchaud,unetable,quatrechaises,
quelques couverts et de la vaisselle lais-
sés par de précédents occupants. L’équi-
pement de la chambre est encore plus
sommaire que celui de lacuisine: ▶▶▶
© É. HOSPITAL

je suis entré dans l’atelier de Béziers…

Mais ici, c’est dix fois plus petit!
J’aperçois les hommes et les ma- En juin 1986, l'entrée du dépôt de Villefranche est telle que Robert l’a franchie
chines. À droite se trouvent les ma- le jour de son arrivée en terre catalane.

30 - ferrovissime
 © É. HOSPITAL
Le 13 avril 1989, sous une averse de neige printanière, le wagon de secours du Canari a été dépêché en gare de La Tour-de-Carol suite
au déraillement sans gravité d'une Z 100, juste sortie des rails au cours d'une manœuvre.

Une journée de découverte du site, une journée

de formation théorique sur notre réglementation
spécifique et 20 jours de formation en ligne
© É. HOSPITAL

Vue sur l’ancien chantier de transbordement VN/VM au début des années 1980, avec du matériel à voie métrique en garage Z.

ferrovissime - 31
 Stars du rail

© É. HOSPITAL
Le chasse-neige à fraise ZRHK 20127 système Bouhey stationne au dépôt de Villefranche en février 1971.

Des artisans, chacun dans leur spécialité, maintiennent un matériel

vieux de 70 ans. Peut-être atteindra-t-il les 100 ans en 2010 ?
© É. HOSPITAL

© T. PORCHER

Quand Robert arrive à Villefranche-Vernet-les-Bains en mars 1980, la Vue sur le dépôt de Villefranche en février 1970.
voie normale vers Perpignan n’est plus exploitée en traction électrique,
mais seulement avec des EAD et des BB 63000. Cette photo est prise
en février 1974.

32 - ferrovissime
© É. HOSPITAL
Le 18 mars 1989, les wagons soc ZR 20321 et 20322, neufs, construits par les ateliers de Béziers, vont être déchargés au dépôt de Villefranche.
▶▶▶ un petit lit en quatre-vingts avec
un sommier métallique et un matelas
qui doivent avoir presque le même âge
que les murs de la demeure !
Automotrices, remorques
et fourgons automoteurs
J'ailestrictnécessairepourlesjoursà
venir, un toit, sans compter des compa-
gnonsbiensympas.Pourdormirj’aiun
duvetetcommetoutpersonnelroulant
mon drap-sac ou «sac à viande», bien
enroulé dans son fourreau marron.
La soirée, après un dîner au buffet,
sera tranquille et la nuit aussi, dans
cette chambre bien pratique mais un
peu sordide quand même!
Le lendemain matin à 8 heures je
retrouve Yves pour une journée de
formationthéorique.Lesautomotrices,
construites en 1908, comportent deux
postes de conduite, un au sein du four-
gon à bagages avec l’appareillage, un
à l’autre extrémité, dans un habitacle
pouruneseulepersonneencompagnie
d’unecaissecomprenantlecompresseur.
La conception électrique est très
simple : captation du courant élec-
trique par quatre frotteurs situés aux
quatre coins de la Z 100; un contacteur
principal suivi d’un fusible 400 A sous
la caisse; un contacteur général; deux
autres contacteurs accompagnés d’un
fusible (un pour protéger les moteurs
et un pour protéger les auxiliaires).
Quatre moteurs Thomson-Houston
de 90 ch entraînent chacun un essieu,
permettant à l’automotrice de tracter
une remorque au maximum, soit 50 t,
dans des rampes de 60/1000. La compo-
sition maximale est de six pièces, soit
150 t (3 automotrices et 3 remorques).
La découverte des règlements
et documents de service
Yves passe le reste de la journée à me
faire découvrir les règlements spéci-
fiques à cette ligne à signalisation sim-
plifiéeetàcantonnementtéléphonique.
Je découvre ainsi ces nouveaux textes:
- Consigne Régionale S1A n° 11 : si-
gnaux spéciaux repérant les zones
de vitesses limites autorisées.
- CR PS9E n° 1 : Dispositions particu-
lières de sécurité du personnel.
Le 16 juin 1986,
chargée sur
un plat à voie
normale, la
Z 113 revient
des ateliers de
Béziers après la
grande révision
au cours de
laquelle elle a
reçu sa nouvelle
livrée jaune.
- CR S4C n° 11 : dispositions particu-
lières applicables sur la ligne de Ville-
franche à La Tour-de-Carol-Enveitg.
- CR S11 n° 13 : prescriptions d’exploi-
tation des installations de traction
électrique par rails de contact 850 V
courant continu.
- Renseignements Techniques 5066
Villefranche-Vernet-les-Bains/La
Tour-de-Carol-Enveitg.
- Consigne d’Etablissement TR3 D3
n°16: attribution des agents assurant
le service de RAD (Réserve A Disposi-
tion), préparation et garage des rames
entre le dépôt et la gare.
Après une telle journée, j’ai la tête
pleine comme une citrouille ! Il me
tarde d’être à demain pour retrouver
Jean-Marie, mon formateur en ligne,
pour découvrir enfin le parcours… ◼
© É. HOSPITAL
ferrovissime - 33
Les portraits du rail

PORTRAIT DU RAIL

CC 20001,
CC 25000,
PREMIÈRES LOCOMOTIVES BICOURANT
SUR LE RÉSEAU FRANÇAIS
Texte : Frédéric Didelot

La CC 20001, d'abord
numérotée CC 6051 et
surnommée affectueusement
"la grand-mère", évolue en
gare de La Roche-sur-Foron.
© DR

34 - ferrovissime
ferrovissime - 35
Les portraits du rail
© G. DAUVET
La difficile gestation du 25 kV 50 Hz
AU LENDEMAIN DE LA SECONDE GUERRE MONDIALE,
UNE POIGNÉE DE VISIONNAIRES SOUHAITE RACCORDER
LA CATÉNAIRE DU CHEMIN DE FER AU RÉSEAU PUBLIC
D’ÉLECTRICITÉ.
A
u début du XXe siècle, les réseaux
françaisexpérimententdifférentes
techniques d’électrification avec
plus ou moins de bonheur. Finale-
ment, après une mission d’étude
aux États-Unis et de façon à se dé-
marquer des choix faits par les
pays d’obédience germanique, le
gouvernement français décide en
1920 d’adopter le courant continu
1500 V pour électrifier les voies ferrées. Ce choix
ne fait pas l’unanimité, car certains l’estiment
déjà dépassé, avec une tension insuffisamment
élevée pour les lignes à fort trafic, d’autant qu’elle
exige des investissements extrêmement lourds
pour les installations fixes (dimensions dela ligne
de contact et des fils porteurs, espacement réduit
des sous-stations …). Le réseau du Midi, qui avait
engagé un vaste programme d’électrification
▶ POURL’EXPÉRIMENTATION,LALIGNEDESAVOIEPRÉSENTEDENOMBREUXAVANTAGES ◀
Envisagé initialement sur les Cévennes – mais il y a
trop de tunnels – le choix se porte finalement sur la
ligne Aix-les-Bains/Annecy. Cette localisation comporte
de nombreux avantages pour devenir un laboratoire
grandeur nature: le trafic est réduit, les conditions
climatiques sont variées et les rampes atteignent
20 pour mille. L’accès à l’alimentation électrique
36 - ferrovissime
Arrivant d’Aix-les-
Bains en tête d’un
express vers 1960, la
CC 20001 approche
de Lovagny, dans les
gorges du Fier, avant
d’atteindre Annecy.
En septembre 1973,
la CC 20001 est en relais
en gare d’Aix-les-Bains.
en courant alternatif 12 000 V 16 2/3 Hz, se voit
obligé de réélectrifier la plupart de ses lignes
© DR / PHOTOTH. LR PRESSE
du piémont et des vallées pyrénéennes pour se
mettre en conformité avec cette décision.
Le 1500 V continu, pour ne pas faire
comme l’Allemagne
Mais ce choix controversé présente aussi des
avantagesnonnégligeable: en particulier, il simpli-
fie grandement les schémas électriques des engins
moteurs et permet d’utiliser des moteurs à courant
continu qui sont tout à fait adaptés pour décoller
des trains lourds grâce à leur couple important au
démarrage. Les électrifications progressent sur les
réseaux de l’État (Paris/Le Mans et banlieue ouest),
du P.O (Paris/Tours, Paris/Brive et banlieue), du
Midi (sur une grande partie du réseau principal,
à l’exception notable de Bordeaux/Toulouse) et
du PLM (Culoz/Modane). À la création de ▶▶▶
est aisé grâce aux ressources hydroélectriques
disponibles à proximité. L’expérimentation porte
aussi sur le type de caténaires à adopter: certaines
sections sont équipées de caténaire polygonale (ou
droite, telle que retenue finalement) ou ondulée (ou
gauche, dérivée du type Midi) afin de comparer leur
tenue et leur coût pour de futures électrifications.
© D. PESCE

Devenue CC 20001, la 6051 va connaître une longue carrière. En 1978, elle remorque des voitures Corail à La Roche-sur-Foron.

ferrovissime - 37
Les portraits du rail
Prototype révolutionnaire en 1950, la CC 6051 est très entourée, en Savoie, par des ingénieurs venus du monde entier ou des amateurs.
▶▶▶ la SNCF en 1938, 3368 km sont électrifiésen
1500 V et les projets en cours concernent Brive/
Toulouse et Paris/Lyon.
Il n’en demeure pas moins que le choix dog-
matique de 1920 a montré ses limites et des ré-
flexions sont menées pendant le second conflit
mondial pour tirer profit des progrès technolo-
giques intervenus. En particulier, une poignée
de visionnaires – dont un certain Louis Armand –
souhaite pouvoir se raccorder sur le réseau public
d’électricité, afin de limiter le coût des installa-
Se raccorder sur le réseau public d’électricité, afin de limiter
le coût des installations fixes et d’éviter de créer et d’entretenir
un réseau d’alimentation électrique spécifique
tions fixes: le gain est d’environ 50 %, en partie
lié aux moindres besoins en sous-stations et en
cuivre. Et cela évite aussi de créer et d’entretenir
un réseau d’alimentation électrique spécifique :
usines de production ou de conversion de courant
et lignes de transport à haute tension.
Utiliser le réseau public d’électricité
Plusieursexpériencesétrangèressontanalysées:
enHongrie,laligneBudapest/Hatvanestélectrifiée
en 1936 en 16 kV 50 Hz, mettant en pratique avec
succès les idées développées chez le constructeur
38 - ferrovissime
© C. SCHNABEL / COLL. H. DUPUIS
national Ganz par l’ingénieur Kalman de Kando.
En Allemagne, patrie du monophasé à fréquence
spéciale, la difficile ligne de montagne du Höllental,
en Forêt-Noire, sert de terrain d’expérimentation
à partir de 1936 au 20 kV 50 Hz. Toutefois, elle ne
donne pas satisfaction à la Deutsche Reichsbahn,
faute d’une technologie suffisamment mûre pour
être capable de régler l’ensemble des problèmes
techniques liés à l’alimentation des moteurs de
traction. Enfin, en URSS, une locomotive CC expé-
rimentale type OR.22 est construite en 1938 pour
circuler sous 20 kV 50 Hz avec des redresseurs à
vapeur de mercure.
À la Libération, bien que la priorité soit d’élec-
trifier Paris/Lyon en 1500 V, Louis Armand et son
équipe bénéficient d’un coup de pouce de l’his-
toire: la ligne du Höllental étant située dans la
zone d’occupation française, il leur est possible de
remettre sommairement en état les installations et
les engins moteurs, malgré les difficiles conditions
de pénurie de l’époque, pour tester leurs idées. Ces
premiers résultats leur permettent de convaincre
de poursuivre cette expérimentation en France. ◼
 © DR / COLL. R. SERMET
Côtoyant la BB 8051 en 1952, la CC 6051 est en tête d’une rame omnibus composée de «Trois pattes» PLM à portières latérales.

La première locomotive
à moteurs directs 50 Hz

Venue du Höllental,
la E 244-22
participe aux essais
P our pouvoir utiliser des locomotives sous
courant 50 Hz, il reste alors à régler la diffi-
culté principale: alimenter les moteurs de
traction. Deux solutions sont possibles: soit
les locomotives convertissent le courant alternatif
en courant continu pour alimenter des moteurs
de traction classiques (via des redresseurs ou des
à bord de la locomotive le courant alternatif en
courant continu, ce qui nécessite des équipements
lourds, complexes et chers (groupes tournants,
convertisseurs) qui annulent le gain financier
obtenu sur les installations fixes. La deuxième
semble donc plus logique, mais les expériences
menées sur le Höllental ont montré la difficulté
en Savoie sur
quelques sections convertisseurs), soit le courant alternatif est uti- d’utiliser des moteurs directs fonctionnant à la
de voie compatibles lisé directement par les moteurs. Si la première fréquence de 50 Hz. Cette voie prometteuse jus-
avec son large solution est plus simple, elle oblige à transformer tifie cependant le lancement d’un appel d’offres
gabarit allemand. auprès des constructeurs pour fournir une loco-
motive destinée à un service mixte, capable de
remorquer 530 t à la vitesse de 60 km/h dans les
rampes de 20/1000. Elle doit pouvoir fonctionner
à la tension nominale de 20 kV, celle-ci pouvant
varier entre 16 et 23 kV, mais aussi circuler à
puissance réduite sous courant continu 1,5 kV.
© C. SCHNABEL / COLL. H. DUPUIS

Le choix audacieux du moteur direct

L’expérience acquise par le constructeur suisse
Oerlikon dans la fabrication de moteurs directs à
fréquence spéciale depuis 1902 s’avère décisive.
L’artifice de la fréquence spéciale consiste à diviser
la fréquence industrielle (50 Hz) par trois ▶▶▶

ferrovissime - 39
Les portraits du rail

© D. PESCE

Oerlikon est l’un des rares industriels européens à être

persuadé que l’avenir réside bien dans l’utilisation directe
de la fréquence industrielle
40 - ferrovissime
 Pour un prototype aussi novateur,
le bilan de la carrière de la
CC 6051/20001 est exceptionnel
et valide les choix réalisés par les
pères du «laboratoire de Savoie».

▶▶▶ (16 2/3 Hz) ou par deux (25 Hz). Mais cela
oblige à recourir à des démarrages rapides, donc
parfois à limiter les masses remorquées, pour
permettre au moteur direct d’atteindre rapide-
ment son régime de fonctionnement nominal et
éviter les avaries liées à la mauvaise commutation
pendant la phase de montée en vitesse. Oerlikon
est l’un des rares industriels européens à être
persuadé que l’avenir réside bien dans l’utilisation
directe de la fréquence industrielle, qui marque-
ra un progrès décisif pour la traction électrique.
Oerlikon parvient à mettre au point un procédé
permettantauxmoteursàcollecteursdesupporter
le 50 Hz: l’enroulement double-parallèle, qui per-
met d’atténuer fortement certains phénomènes
électriques parasites. Le rotor et l’induit reçoivent
chacun un second enroulement, ce qui permet
de doubler le flux dans l’induit, de maintenir la
force électromotrice entre deux lames de collec-
teurs à un faible voltage et de réduire de moitié
la réactance de chaque spire d’induit. Le facteur
puissance atteint ainsi 0,9 (pour 1 recherché), les
caractéristiques obtenues étant proches de celles
des meilleurs moteurs sous 16 2/3 ou 25 Hz.

Le procédé de l’enroulement
double-parallèle
Concrètement, la puissance pour chaque
pôle du moteur est doublée, sans avoir besoin
d’augmenter la tension aux bornes (le courant
alternatif est abaissé de 25 000 V à 300 ou 600 V
par le transformateur, selon qu’ils sont couplés
en parallèle ou en série-parallèle). Les problé-
matiques d’isolement, avec les matériaux de
l’époque, sont contenues grâce au feuilletage
des circuits magnétiques. En contrepartie, le
moteur comporte 80 balais (5 par pôle), ce qui
constitue cependant une fragilité acceptable. Ce
moteur (type 16W880) à 16 pôles fonctionne sous
230 V, pèse 2,96 t mais ne développe que 535 kW
(720 ch). A titre de comparaison, c’est deux fois
moins puissant qu’un moteur continu de masse
similaire. Les 6 moteurs de traction sont couplés
en permanence en série parallèle (3 branches
de 2 moteurs en série). Le réglage de la vitesse
s’effectue uniquement en faisant varier la ten-
sion d’alimentation des moteurs. Ils autorisent
le freinage par récupération (75 kN à 60 km/h,
où deux moteurs excitent les quatre autres). ◼
© DR / COLL. R. SERMET

Une des premières photos en

Savoie de la CC 6051, alors qu’elle
vient d’arriver de Suisse. Elle porte
alors une livrée usine dont les
teintes sont sujettes à discussion.

ferrovissime - 41
Les portraits du rail

La CC 20001 :
une conception
très helvétique

À
peine deux ans après sa commande, la
CC 6051 est livrée par Oerlikon début sep-
tembre 1950 à Chambéry. La prouesse est
réelle, car les deux autres prototypes CC 6052
et BBB 6053 ne seront mis en service qu’en sep-
tembre 1951 et mai 1955…
À l’automne 1951, lors du fameux congrès
d’électrotechnique d’Annecy qui regroupe des
constructeurs, des exploitants et des représentants
des pouvoirs publics français et européens, Louis
Armand démontre le bien fondé du choix du 50 Hz
grâce à la CC 6051 et l’intérêt d’électrifier désormais
en courant monophasé le réseau français et même
européen. L’expérimentation en Savoie n’est qu’un
ballon d’essai, qui est transformé avec la décision
d’électrifier les 363 km de l’artère Nord-Est (Valen-
ciennes/Thionville et quelques antennes) où les
enjeux ne sont pas minces. Si le trafic voyageurs
est pour le moins réduit (au mieux une dizaine
d’express par jour et quelques rares omnibus en
rame tractée), environ 300 locomotives (150 C,
Un engin novateur
Lorsqu’il stationne en gare d’Aix-les-
E, P, X) sont nécessaires pour écouler l’intense Bains en 1978, sa silhouette, à la
trafic marchandises composé de nombreux trains sobre esthétique intemporelle, ne
complets de minerai, de coke et de produits sidé- laisse pas supposer tous les progrès
rurgiques, sans oublier les trains du lotissement. qu’il a apporté en trois décennies.

Les prototypes de Savoie

servent à valider les choix
pour Valenciennes/Thionville
Les tests grandeur nature sur l’étoile de Savoie,
qui n’ont pas nécessairement repris les options
essayées sur le Höllental, ne sont pas encore
terminés, alors qu’il faut valider les choix tech-
nologiques, que le recul manque cruellement et
que le temps presse. Pour ces trains lourds, la
SNCF décide de ne pas construire de prototype
spécifique et fait confiance à l’expérience et aux
capacités d’innovation des constructeurs, avec
qui des liens étroits se sont tissés. Elle retient deux
séries. D’abord les CC 14000, avec une formule
monophasé-triphasé dérivée des essais réalisés
en Hongrie, ainsi que par Krupp sur le Höllental
avec la E.244-31 et le choix d’Oerlikon pour la
partie électrique, mais dont la mise au point
n’avait pas pu être terminée avec les moyens
de l’époque. Ensuite les CC 14100 avec la tech-
nologie monophasé-continu utilisée aux ▶▶▶
▶ DES CHOIX TECHNIQUES VENUS DE SUISSE ◀
La conception technique de la CC 6051 est éloignée des procédés utilisés
sur les locomotives dérivées des 2D2 du P.O ou des BB Midi. Le châssis
est composé de deux longerons reliés entre eux par des entretoises et
par les deux traverses de tête aux extrémités. Le plancher est surélevé
au niveau des bogies pour intégrer les moteurs de traction. Les faces
latérales sont constituées de profilés recouverts de panneaux de tôles
d’acier soudées. Elles intègrent sur chaque face quatre groupes de
persiennes équipées d’un tamis à maille très serrée et deux baies pour
l’éclairage naturel. L’intérieur de la caisse comporte un couloir latéral
donnant accès à un compartiment haute tension 1500 V verrouillé côté
extrémité 2 et un compartiment central comportant les appareillages
(transformateur, pompe à huile, compresseur, ventilateur…). Des
lanterneaux en toiture facilitent l’installation et le démontage des
appareillages. Les pantographes, fournis par Faiveley, sont de type
GM (G Monophasé). Leur montée est pneumatique par action sur
les cylindres des ressorts, leur descente s’effectuant par ressorts.

42 - ferrovissime
 © D. PESCE
© DR / PHOTOTH. LR PRESSE

Avant 1953,
certains trains
de Saint-
Gervais sont
courts! Trois
voitures sont
attelées à la
CC 6051.

ferrovissime - 43
Les portraits du rail

Le choix de la ligne Aix/Annecy

oblige la CC 6051 à circuler sous
1500 V en gare d’Aix-les-Bains
▶▶▶ États-Unis sur des réseaux électrifiés en
11000 V 25 Hz. Elle commande aussi deux petites
séries pour les trains de voyageurs et de mes-
sageries. L’une, les BB 12000, est limitée à cinq
exemplaires équipés de redresseurs. L’autre série,
finalement plus classique, comprend 15BB13000
à moteurs directs (18 pôles, 500 kW, 4,35 t), dé-
coulant des essais de la CC 6051.
Ces moteurs directs servent également de base
à ceux équipant les BB 20101 et 20102 (20 pôles,
840 kW, 4 t) et les C 20150 (540 kW) ainsi que
quelques locomotives japonaises et surtout des
automotrices japonaises, portugaises et turques.
Paradoxalement, ce choix technologique profite
aussi aux moteurs fonctionnant en 16 2/3 Hz :
il sera utilisé sur les Ae 6/6 mises en service en
1951 (la CC 6051 leur sert de banc d’essai) puis
sur les Re 4/4 et Re 6/6 (1239 kW, 4 t) jusque dans
les années 1970, même si, dès 1957, la mise au
point des redresseurs rend les moteurs directs
obsolètes sous 50 Hz.

La première locomotive bicourant

Le t de la ligne Aix/Annecy oblige la CC 6051
à circuler sous 1 500 V en gare d’Aix-les-Bains,
car il n’est pas réaliste de créer une gare commu-
table. Un groupe tournant continu-monophasé
de faibles dimensions est donc installé à bord,
400 ch étant suffisants pour les démarrages d’Aix.
Un moteur continu prend le courant 1,5 kV à la
caténaire et entraîne un alternateur qui délivre
du monophasé 35-50 Hz pour alimenter les mo-
teurs directs en courant alternatif.
Le sectionneur rotatif continu/monophasé en
toiture est à commande électropneumatique. Un
disjoncteur à huile assure la protection de l’en-
semble des circuits pendant le fonctionnement
sous monophasé. Un disjoncteur ultrarapide,
de type JRT 47 E protège les circuits pendant le
fonctionnement sous courant continu.
Le transformateur principal, immergé dans
une cuve d’huile, comporte au primaire une
prise 1 380 V pour le chauffage train et au se-
condaire huit prises délivrant entre 127 et 575 V.
Son refroidissement s’effectue par circulation
d’huile vers deux réfrigérants.
Le châssis des bogies est constitué de profilés
soudés, la suspension primaire est composée
de deux ressorts hélicoïdaux à fil carré ▶▶▶

44 - ferrovissime
Ae 6/6, filles
de la CC 6051
Les Ae 6/6 des CFF ont été
construites après la CC 6051
qui leur a servi de prototype.
Celle-ci roule entre Pontarlier
et Les Verrières, en territoire
français, sous caténaire SNCF
alimentée en courant suisse!

© C. MASSE

ferrovissime - 45
Les portraits du rail

Immédiatement, la CC 6051 impressionne: ses performances sont

nettement supérieures à celles fixées par le cahier des charges
© C. SCHNABEL/ COLL. H. DUPUIS

Le pupitre de
conduite de
la CC 6051 en
état d’origine.

46 - ferrovissime
 Un prototype
à la vide dure
La CC 20001 en tête d’un
train de Saint-Gervais dans les
années 1980, seule machine
«Savoie» encore en service.
© É. HOSPITAL
© D. PESCE
Sous cet angle, la CC 20001 montre bien sa grande analogie
avec les Ae 6/6 suisses.
▶▶▶ reposant sur les boîtes d’essieux Athermos
avec un amortisseur à friction. Pour la suspension
secondaire, la caisse repose sur les bogies par
deux appuis latéraux élastiques avec ressorts
doubles à lames. Des amortisseurs à friction
permettent de contrôler les mouvements de
rotation du bogie. La transmission de l’effort
est assurée pour chaque sens de marche par des
pivots d’entraînement surbaissés. Les essieux,
munis de roues à rayons, sont entraînés par des
pignons à denture hélicoïdale avec transmis-
sion unilatérale élastique à anneaux flottants
développée par SLM.
Les services de la CC 6051
devenue CC 20001
Commandée en 1948, la CC 6051, livrée début
septembre 1950 au dépôt de Chambéry, est le
premier des trois prototypes du «laboratoire de
Savoie». Bien que d’une technologie entièrement
nouvelle, elle assure dès le 16 septembre son
premier train, composé de cinq voitures et d'un
fourgon, qui marque l'inauguration officieuse
du tronçon Aix-les-Bains/Annecy.
Immédiatement, la CC 6051 impressionne :
ses performances sont nettement supérieures
à celles fixées par le cahier des charges. Elle
pèse 10 t de moins, remorque 900 t en rampe de
15/1000 contre 650 t demandées pour la section
Aix-les-Bains/Annecy, mais aussi 740 t en rampe
de 20/1000 contre 530 t pour la section Annecy/
La Roche-sur-Foron. La crainte principale, relative
à la tenue des moteurs directs, est rapidement
levée, la solution technique choisie par Oerlikon
s’avérant adaptée. Du 22 février au 23 mars 1952,
la CC 6051 est transférée sur la ligne allemande
du Höllental pour y être testée dans les rampes
de 55/1000. Elle parvient à y décoller 215 t, mais
assure aussi le service quotidien en tractant 190 t
sans difficulté.
De retour en France, elle débute son service
commercial sur les 78 km de la ligne Aix-les-
Bains/Annecy/La Roche-sur-Foron. Preuve de
sa fiabilité, elle parvient à parcourir jusqu’à
740 km par jour et 20 000 km par mois. Elle est
engagée dans un roulement commun avec la
CC 6052, équipée également de moteurs directs
par Alsthom. Le 3 novembre 1953, elle est renu-
mérotée CC 20001 en application du nouveau
plan de marquage, confirmant ainsi son statut
de prototype bicourant. Au même moment, son
transformateur est remplacé pour tenir compte
de l’augmentation de 20 à 25 kV de la tension
sur la ligne le 15 novembre 1953. Son champ
d’action est prolongé à partir du 28 juillet 1954
jusqu’à Annemasse, puis le 18 octobre 1955
jusqu’à Saint-Gervais-le-Fayet. ◼
ferrovissime - 47
Les portraits du rail
Relais en gare d’Aix-les-Bains pour la CC 25006 en septembre 1973.
Les CC 25000 suivent la CC 20001
A lors que le troisième prototype BBB 6053
n’est toujours pas livré (il portera donc
directement le numéro BBB 20003) et que
la mise au point de la BB 8051 équipée de
redresseurs par Alsthom se poursuit, la SNCF
choisit de commander dès juillet 1953 quatre
locomotives de série (CC 25001 à 4) directement
issues de la CC 20001, sans différences signifi-
catives par rapport au prototype. Deux autres
commandes sont passées, en mars 1954 pour
trois locomotives supplémentaires (CC 25005
à 7) et en décembre 1955 (CC 25008 et 9) pour
les deux dernières. La livraison des CC 25001
à 7 s’échelonne entre décembre 1955 et sep-
tembre 1956, les 25008 et 9 apparaissant en
juillet et octobre 1958. Toutes sont affectées
directement à Annemasse, la CC 20001 l’étant
48 - ferrovissime
© G. DAUVET
le 3 octobre 1954 suite à l’électrification de la
section La Roche-sur-Foron/Annemasse.
Assimilées techniquement à la CC 20001, les
CC 25001 à 9 partagent un roulement commun
avec elle et avec la CC 20002 Alsthom (ex-6052),
dont la fiabilité est cependant moyenne. Elles
permettent de ne plus recourir à la BBB 20003,
véritable « bête à chagrin » qui sera ultérieure-
ment transformée en locomotive monocourant
BBB 6003 (voir Ferrovissime n° 75 et 104).
Des moyennes kilométriques
intéressantes malgré un champ La CC 25009
d’utilisation très réduit est à quai avec
La BB 10001 (ex-8051) est également régu- un express en
lièrement utilisée aux côtés des onze CC, sous gare d’Annecy en
réserve de la réceptionner obligatoirement ▶▶▶ avril 1970.
© G. DAUVET
ferrovissime - 49
Les portraits du rail

▶ LES CC 20001 ET 25000 CÔTOIENT

LES FERS À REPASSER ◀
À peine livrées sur l’artère Nord-Est, quelques
BB 13000 sont détachées à Annemasse pour fournir
un renfort aux prototypes lors des pointes estivales
et de fin d’année. À l’époque, les pointes neige de
février n’existent pas encore, mais des circulations
périodiques ou supplémentaires et des renforcements
de composition sont programmés sur la ligne Aix/
Annecy/La Roche-sur-Foron, ce qui nécessite parfois
de recourir à la double traction. La 13005 est ainsi
utilisée en Savoie en juillet-août 1955, puis ce sont
les 13007 et 10 qui descendent pour les fêtes de fin
d’année alors que la section Annemasse/Saint-Gervais
est également sous tension. La 13007 y retourne de
juin à septembre 1956. Cependant, cette solution
palliative n’est plus reconduite ultérieurement car
les 13000 sont loin de donner entière satisfaction,
notamment pour les démarrages et dans les rampes.
Malgré la livraison des CC 25001 à 9 entre décembre
1955 et octobre 1958, les besoins de renfort
demeurent, de sorte qu’entre 6 et 15 BB 12000
de Mohon, Dole puis Lens et Thionville sont
régulièrement détachées à Annemasse à partir de
1957. Elles y assurent un véritable service mixte,
remorquant à la fois des express, des omnibus
et des trains de marchandises. Les rampes de
20/1000 menant au Col d’Evires nécessitent
régulièrement le recours à des doubles tractions.
Malgré l’absence de frein électrique qui constitue
un handicap dans les pentes, leur présence se
poursuit jusqu’au printemps 1976, laissant alors
© G. DAUVET

les BB 25176 à 195 «Savoie» prendre le relais.

© G. DAUVET

En 1972, la CC 25005 arrive en gare de Saint-Gervais-le-Fayet en tête d’une courte rame voyageurs.

50 - ferrovissime
 La CC 25004 est en escale à l’annexe-traction de Saint-Gervais-le-Fayet en juin 1972.

Assimilées techniquement à la CC 20001, les CC 25001 à 9

partagent un roulement commun avec elle et avec la CC 20002
▶▶▶ à Aix-les-Bains sur la voie en impasse, la
seule alimentée en 25 kV. Cette contrainte va
disparaître en 1964, lorsqu’elle est modifiée
en recevant un équipement bicourant. À la
même époque, la CC 20002 perd tout service
régulier en Savoie.
Leurs moyennes kilométriques restent
proches des 10 000 km mensuels, alors qu’elles
ne peuvent parcourir que 142 km de lignes
électrifiées en 25 kV. Leurs seules incursions
régulières sous 1,5 kV ne concernent que le
parcours Aix-les-Bains/Chambéry avec des trains
de desserte marchandises ou des omnibus. Elles
© G. DAUVET

sont parfois acheminées en véhicule à Oullins

pour de grosses opérations d’entretien. ◼
En avril 1962, c’est l’âge d’or des 25000. Ici, la CC 25004 est en attente au Fayet.

ferrovissime - 51
Les portraits du rail

© G. DAUVET © É. HOSPITAL

La CC 25008 en fin
de carrière. Haut
de caisse et bas
de caisse semblent
être de deux
teintes différentes,
mais c’est un effet
d’optique.

52 - ferrovissime
 Les BB 25100/25150
éliminent les CC Savoie

À
partir de 1965, les détachements de
BB 25100 lors des pointes saisonnières
montrent l’intérêt de disposer d’engins
puissants et fiables sur l’étoile de Savoie.
Cela motive l’arrivée de sept locomotives (25151
à 155, 160 et 161) neuves à Chambéry entre
septembre 1967 et février 1968, suivies par
la BB 20005, prototype des 25100/150/200, en
septembre 1969. Ces « grandes bicourant » sont
utilisées prioritairement sur les trains lourds,
car elles peuvent remorquer 750 t, soit 100 t
de plus que les CC 25000. Elles assurent aussi
quelques omnibus et express de jour ou de nuit,
en provenance de Paris, Hendaye, Vintimille
vers Saint-Gervais, à partir de Chambéry pour
ceux qui y passent, évitant alors le changement
de machine à Aix-les-Bains.
L’arrivée de ces locomotives puissantes
– 4130 kW contre 3200 kW pour les CC – conduit
à cantonner essentiellement les CC 25000 aux
On les appelle trains omnibus et aux dessertes marchandises
locales. Elles ne parcourent plus qu’entre 6 000
CC Savoie et 8 000 km par mois, en tête de rames com-
Mai 1976. La CC 25001
est en tête d’un train posées de voitures Romilly ou de Trois pattes
pour Saint-Gervais en et de trains de marchandises. Elles retrouvent
gare d’Aix-les-Bains. la traction des express lors des pointes saison-
nières, le cas échéant en double traction avec
une BB 25150 ou une BB 12000. ▶▶▶

▶ STATISTIQUES ◀ ▶ CARACTÉRISTIQUES ◀
MISE EN ATTENTE
NUMÉRO MISE EN SERVICE RADIATION KM PARCOURUS
D’AMORTISSEMENT CC 20001 et CC 25001 à 9
CC 20001 16.10.1950 24.4.1980 31.12.1980 2 438 556 Longueur 17,250 m
CC 25001 30.12.1955 9.7.1977 8.12.1977 1 697 023 Largeur 2,950 m
CC 25002 10.3.1956 1.1971 14.5.1971 1 205 000 Hauteur 3,720 m
CC 25003 20.4.1956 4.5.1976 9.12.1976 1 503 922 Masse 106 t
Diamètre des roues 1,400 m
CC 25004 1.6.1956 1972 24.1.1973 1 244 604
Rapport d’engrenage 4,19 (88/21)
CC 25005 1.7.1956 24.6.1976 9.12.1976 1 513 000
Puissance unihoraire sous 25 kV 4320 ch
CC 25006 14.7.1956 1.11.1978 6.12.1978 1 478 937 Puissance continue sous 25 kV 4140 ch
CC 25007 28.9.1956 1973 20.11.1973 1 340 321 Puissance unihoraire sous 1,5 kV 400 ch
CC 25008 31.7.1958 12.10.1979 17.12.1979 1 401 900 Vitesse maximale 100 km/h
CC 25009 25.10.1958 6.5.1976 9.12.1976 1 332 949 Pantographes 2x GM puis MT

ferrovissime - 53
Les portraits du rail
La célèbre «grand-mère» CC 20001 est la seule à être préservée, par l’APMFS à Chambéry.
Derniers sursauts avant réforme
L’électrification de la ligne du Chablais en 1971-
72, à partir de la bifurcation de Longeray-Léaz près
de Bellegarde jusqu’à Evian, nécessite de recourir
impérativement à des locomotives grandes bicou-
rant. Les CC 25000 retrouvent par conséquent une
activité plus importante sur leur territoire, malgré
leur conception ancienne et leurs performances
limitées. Elles reprennent la traction d’express
Lyon/Saint-Gervais,avecvoituresOCEMetBacalan
accompagnées de fourgons OCEM, certains om-
nibus étant désormais assurés avec des voitures
Bruhat. Néanmoins le parc s’est réduit, avec le
retrait de la CC 25002 à la suite des avaries causées
La CC 25001 en juillet 1970 lors d’une collision avec une rame
stationne à à l’arrêt. Les CC 25004 et 25007 sont également
l’annexe-traction radiées prématurément en janvier et novembre
de Saint-Gervais 1973, victimes d’incendies. En octobre 1972, la
en septembre 1973.
© G. DAUVET
54 - ferrovissime
© F. COPPA
série est mutée officiellement à Chambéry, mais
les CC 25000 continuent à stationner essentielle-
ment à Annemasse, ne se rendant dans leur dépôt
titulaire que pour y effectuer des opérations de
maintenance.
Meilleur parcours kilométrique
à la «grand-mère» CC 20001
L’arrivée des BB 25171 à 175, commandées en
juillet 1971, entre janvier et avril 1974 permet de
compenser les radiations intervenues, d’autant
plus que la BB 20005 est remise au type (BB 16000)
en 1975. Mais c’est la livraison des BB 25176 à 195,
entre mai 1976 et novembre 1977, qui met fin à la
carrièredesCCSavoie.LesCC25003et5sontplacées
enréparationdifféréefin1975,avantd’êtreradiées
fin 1976, la CC 25001 est mise en attente d’amor-
tissement en juillet 1977 et radiée en décembre.
À partir de 1978, les trois survivantes côtoient et
même remorquent parfois les voitures Corail qui
atteignent Saint-Gervais. La CC 25006 cesse son
service en novembre 1978, puis est radiée le mois
suivant. À peine âgée de 20 ans, la CC 25008 clôt
l’existencedelasériefinoctobre1979,saradiation
intervenant en décembre. Ne reste en service que
la«grand-mère»CC20001quicirculejusqu’enavril
1980, avant d’être radiée en décembre après avoir
parcouru plus de 2,4 millions de km, soit bien plus
que sa descendance dont les kilométrages varient
de 1,2 à 1,7 millions de km. Elle est la seule à être
préservée, par l’APMFS à Chambéry. ◼
Note: les autres prototypes «Savoie» feront l’objet
d’un prochain Portrait du rail
© Y. BRONCARD
 ▶ LIVRÉES ◀
- CC 6051: caisse gris foncé 809 (une
teinte qui vire vers le bleu), toiture
gris métallisé, traverses rouges
- CC 25001 à 7: caisse gris foncé 809
(une teinte qui vire vers le bleu),
toiture gris argent 811, traverses
rouge vif 601, bogies noir à train
901, pantos gris container 814
- CC 25008 et 9: caisse vert extérieur
306, intérieur des bandes d’enjoliveurs
médianes bleu roi 203, toiture vert
extérieur 306, traverses rouge
vermillon 605, bogies noir à train
901, pantos gris container 814
- État final 20001 + 25000: caisse vert
© DR / COLL. B. WEYLAND

celtique 301, intérieur des bandes

d’enjoliveurs médianes bleu roi 203,
toiture vert celtique 301, traverses
rouge vermillon 605, bogies gris
ardoise 807, pantos gris ardoise 807
En avril 1968, la CC 25006 assure encore des express, ici à La Roche-sur-Foron.

Ne reste en service que la « grand-mère » Fin de service pour

les CC Savoie: leur

CC 20001 qui circule jusqu’en avril 1980 dernier roulement

leur attribue
notamment des trains
omnibus en Romilly.

ferrovissime - 55
 U
E A
V E! LE RESEAU BRETON
U
O IVR Tome 1 | De la création aux années 1940
N L par Dominique Paris et Pierre-Henri Emangard
-F 3⼞TFBV
Ce nouvel ouvrage retrace l’histoire complète de ce célèbre réseau
à voie métrique qui desservait principalement l’intérieur et l’ouest
%F MB DS⼞BUJPO BVY BOO⼞FT  de la péninsule bretonne. Dans ce premier volume, les auteurs
R DOMINIQUE PARIS
PAR
& PIERRE-HENRI EMANGARD 5 0 . &  retracent l’histoire du réseau depuis sa création jusqu’à l’immédiate
après-guerre, accompagnée d’une étude complète du matériel
”‘—Žƒ–†‡Žƒ’±”‹‘†‡Ǥ˜‹”‘ͫͨͨ’Š‘–‘•ǡ’Žƒ•‡–†‘ —‡–•
Couverture non contractuelle

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 Cœur de métier

LE POSTE DE PERMANENT
«PANTO» AU PC DE MONTPELLIER

En juillet 1990, le 5540 Narbonne/Montpellier arrive à Sète. Il est remorqué par la BB 67542, suite à la détresse de la 7200 titulaire
en gare d'Agde. Cette dernière est restée en véhicule en tête du train.

Après Jean-Paul Malabiau qui nous a pu s’occuper du stagiaire qui est resté
dans son dos, cherchant à comprendre
expliqué le fonctionnement de la permanence son futur travail dans les relents de fu-
«marches» dans Ferrovissime n°107, Robert méedecigarettesenpapiermaïs.Après
quatre années à m’oxygéner dans les
Alvernhe aborde le côté Traction. Pyrénées catalanes, je me suis brutale-
ment retrouvé en formation au-dessus
Texte : Robert Alvernhe / Photos : Éric Hospital d’une«141R»!Lespremiersjoursont été,

E
je dois bien l’admettre, assez difficiles.

n m’expatriant en pays catalan
d’avril 1980 à juin 1984, j’ai passé
quatre merveilleuses années à
conduire le Train Jaune, sur la
ligne de Cerdagne (voir dans ce
même numéro de Ferrovissime). Je re-
joins ensuite le PC de Montpellier au
grade de KST TTR (Kontrôleur STagiaire
Transport-TRaction), après réussite à
l’examen correspondant. À cette époque,
au moins 50% des postes de cette filière
sont tenus par du personnel issu de la
conduite, à la suite de problèmes de
santé ou par choix personnel.
Comme l’ont déjà raconté plusieurs
de mes collègues, l’ambiance dans un PC
est assez hallucinante pour un novice. De
plus, mes premiers jours de formation
ont eu lieu en plein conflit social. Mon
formateur, pris dans la tourmente, n’a
Un poste qui gère les
locomotives électriques
En 1984, la permanence Traction de
Montpellier comporte quatre postes:
deuxappelés«panto»,lesgestionnaires
desenginsmoteursélectriques,en3x8;
unposte«enginsmoteursthermiques»
en 2x8 (en journée seulement les
samedis, dimanches et fêtes), assurant
aussi la gestion des autorails et ▶▶▶

ferrovissime - 57
Cœur de métier
La permanence du PC de Montpellier au début des années 1980. Le permanent panto Nîmes est assis de dos, au premier plan.
▶▶▶ automotrices sur les lignes se-
condaires; un permanent équipes en
3x8. Les premiers postes tenus par les
nouveaux arrivants sont les panto. Les
mêmespermanentsyalternenttousles
trois mois. Ces deux postes ont respec-
tivement pour domaine l’est et l’ouest
de Sète, un reliquat des anciennes com-
pagnies, puis des arrondissements de
Nîmes et de Béziers.
LepostepantoNîmescouvreleslignes
de Sète inclus à Tarascon et de Nîmes à
L’Ardoise,surlarivedroiteduRhône.Les
sites de formation des trains sur ce terri-
toiresontSète-VilleetSète-Méditerranée
(qui dessert le port), Frontignan (raffi-
nerie), Vestric (source Perrier), le triage
de Nîmes-Courbessac et enfin l’Ardoise.
Un large rayon d’action
Le panto Nîmes est en relation avec
tous les PC du réseau Sud-Est, sauf Cler-
mont-Ferrand, liaison pure thermique
oblige. Cela concerne essentiellement
les trains suivants :
- Paris-Lyon pour des voyageurs GL et
un fret, le MA 68096, dédié à l’origine
au transport de vin du Midi.
58 - ferrovissime
-Dijon,pourlestrainsmessageries(ME)
et marchandises (MA) en transit vers
l’est de la France ayant pour origine
Perpignan-Saint-Charles, Cerbère et
Port-BoupourletraficEspagne/Benelux
ou Allemagne.
- Chambéry, pour un AR GL et quelques
trains de fret.
-Lyon,pourl’ARTalgo71/72(quichange
de mode de traction à Valence), des MA
à destination principalement de Sibe-
lin et quelques trains en transit vers le
Nord et l’Est. En règle générale, le PC
de Lyon n’intervient pas sur les trains
n’ayant pas de relais sur son territoire,
appelés les PDB (Passe DeBout).
- Marseille, pour tous les types de trains
transitant par nos deux régions: des GL
essentiellementàdestinationd’Avignon
ou de Marseille-Saint-Charles, les trains
allant au-delà de Marseille vers l’Italie
relayant à Saint-Charles, ou Blancarde
pour ceux passant par le raccordement
desChartreux,commelespèlerins;des
MA, en général pour Miramas.
- De tous les PC du Réseau Sud-Est, celui
de Marseille est notre principal interlo-
cuteurparlenombredetrainséchangés.
Un poste en relation
avec le Sud-Ouest
Le poste panto Narbonne est surtout
en relation avec son homologue de
Toulouse, sur le Réseau Sud-Ouest. Il
couvre la ligne du littoral au-delà de
Sète jusqu’àPort-Bou et, côté Sud-Ouest,
de Narbonne à Carcassonne inclus.
Les sites de formation sont Bé-
ziers (trains de desserte vers Nîmes,
Perpignan, Le Boulou, Narbonne et
Port-la-Nouvelle), Perpignan (trains de
primeurs ME 140 et 160 vers Rungis)
ainsi que Le Boulou pour les trains du
combiné et de pièces autos arrivant
d’Espagne par la route.
Autre lieu très stratégique, le point
frontière de Cerbère/Port-Bou. Côté
français, Cerbère expédie les trains de
wagons TRANSFESA venant d’Espagne
etpassésparlechantierdechangement
d’essieux.Côtéespagnol,Port-Bounous
remet des wagons dans lesquels des
marchandises ont été transbordées.
En trafic voyageurs, les trains Talgo
pour Genève et Paris-Austerlitz doivent
être remorqués par des sous-séries de
locomotives spécialement adaptées :
 En juillet 1990, En novembre
la BB 22200 1984, la
assurant le train BB 8111
31073 «TUI achemine en
Ferien Express» tête du train
Hamburg/Port- 58487 Avignon-
Bou a demandé Champfleury/
le secours Montpellier-
en arrivant à Arènes une
Nîmes. Elle a été BB 9400 en
remplacée par la véhicule.
CC 7120.

Des pluies
diluviennes
en juin 1984
ont provoqué
l'interception de
la transversale
sud peu après
Lunel. De ce fait,
un train spécial
à destination
de Fribourg
composé de
voitures CFF
est retenu
longuement
en gare de
Montpellier.

Le panto Nîmes est en relation avec tous les PC du réseau

Sud-Est, sauf Clermont-Ferrand
BB 7200 de Villeneuve (7281 à 96) et
BB 9200 de Paris-Sud-Ouest (9274 à 79).
Pour tous les trains franchissant la
frontière avec le Réseau Sud-Ouest, le
panto Narbonne est en relation uni-
quement avec le PC de Toulouse.
À l’époque, le permanent
n'a pas d’ordinateur
Voilà quels sont les deux postes sur
lesquels j’ai été formé dès mon arrivée
au PC. Mais avec quels outils et quels
supports travaille-t-on à cette époque ?
Il n’y a pas encore d’ordinateurs et tout
se fait à la main: crayons de couleurs,
gomme…etfaxpourenvoyerlescopies
de certains documents que nous élabo-
rons,sansoublierletéléphone,biensûr!
Le premier support de travail, ce sont
les feuilles de roulement des engins mo-
teurs circulant sur la région, c’est-à-dire
les extraits nous concernant des rou-
lements établis au niveau des réseaux.
Ces feuilles, écrites à la main sur des
calques, sont élaborées avant chaque plus fréquemment sur la région, dans
changement de service par un agent l’ordre: BB 7200 de Villeneuve, BB 9400
du PC. Il y en a cinq types différents: le d’Avignon, BB 8100 d’Avignon et Dijon,
JOB (les fameuses journées ouvrables CC7100d’Avignon; on retrouve ensuite
de base: mardi, mercredi, jeudi) et des – sans la liste des numéros – des feuilles
variantes de couleurs différentes pour pour les BB 7200 de Paris-Sud-Ouest,
les autres jours de la semaine: violet, BB 7200 PV de Limoges et Chambéry,
jaune, rose et vert. Les principaux rou- CC 6500 de Paris-Sud-Ouest et Vénis-
lements d’engins moteurs électriques sieux, BB 9300 de Toulouse, BB 9200 de
concernant la région de Montpellier Paris-Sud-Ouest et Bordeaux et enfin une
sont alors les BB 7200 de Villeneuve partie « divers » pour les BB 4100/4200
et Paris-Sud-Ouest, les BB 9200 de Bor- et quelques séries venant occasionnel-
deaux,lesBB8100deDijon,lesBB8100, lement, comme les 2D2 9100 ou 5500.
BB 9400 et CC 7100 d’Avignon, sans Il y a ensuite le cahier de com-
oublier les BB 4100/4200 d’Avignon mande, avec en tête une page permet-
pour la ligne des Causses. tant d’inscrire les engins présents sur
les lieux de remisage lors du pointage
Des outils de travail en début de service, suivie de pages
à l’ancienne pour y noter d’abord les trains facul-
Le deuxième support de travail tatifs entrant côté Sud-Est, puis ceux
est appelé le «tapis». Constitué d’une au départ de nos gares et enfin ceux
dizaine de pages format A3, on y re- qui entrent côté Sud-Ouest.
trouve d’abord tous les numéros des En dernier lieu, on a la feuille de
engins moteurs des séries circulant le graphiquage du service facultatif : ▶▶▶

ferrovissime - 59
Cœur de métier
En août 1988, à Sète, la
BB 7378 vient de sortir un TC
d'hydrocarbures de l'EP de la
raffinerie de Frontignan et va
l'acheminer jusqu'à Toulouse
(EP des Magasins Généraux).

La BB 7200 devant
assurer le train 5198
Cerbère/Strasbourg
du 28 août 1982 a
demandé le secours
au départ et a été
remplacée par une
CC 7100 disponible.
Le train passe ici
à Villeneuve-les-
Maguelonne.

Jusqu’à un déficit de 6 à 8 engins moteurs, nous faisons face

à la demande à l’issue de multiples croisements d’engins moteurs
▶▶▶ les trains figurant sur le cahier
de commande sont graphiqués sur ces
feuilles afin d’en assurer la couverture
en engins moteurs.
Les missions du permanent
panto
Enfin,venants’ajouterauxsupports
de travail que nous élaborons, il y a
la «bible», le répertoire sur lequel on
trouve tous les trains circulant sur la
région, dans l’ordre croissant de leurs
numéros, avec l’indication de leur
équipement en personnel et en engin
moteurpourchaquejourdelasemaine.
Et avec tout ça, que fait l’agent qui
tient le poste panto ? Il doit gérer les
engins moteurs électriques sur sa zone
d’action.Ditcommeça,c’esttoutsimple.
Concrètement, c’est juste un peu
plus compliqué ! Il doit en effet :
- Assurer la couverture des trains en
roulement – dans le respect des roule-
ments des engins moteurs autant que
possible – et des facultatifs.
- Diriger les engins moteurs à échéance
de visite vers leur lieu de maintenance.
- Permettre l’entretien courant des en-
gins moteurs en les acheminant vers
des lieux de maintenance adaptés, si
possible sur la région: bandes d’usure
des pantographes, remplacement de
sabots de frein, changement de bande
graphique (lorsqu’elle arrive à trois
traits, il reste moins de 900 km avant
la fin de la bande).
- Utiliser au mieux les engins moteurs
en tenant compte d’éventuelles res-
trictions : isolation de la VA (Veille
Automatique), utilisation d’un seul
poste de conduite, vitesse limitée, etc.
Un manque chronique
d’engins moteurs
À l’époque, la Région de Montpel-
lier ne dispose pas de dépôt titulaire.
L’avantage, c’est de ne pas avoir le
souci permanent de faire rentrer
les engins moteurs à temps pour les
opérations de maintenance. Mais
en contrepartie, il n’y a pas la res-
source constituée par les machines
sortant d’atelier. Ainsi, nous sommes
presque toujours en déficit d’engins
pour couvrir les roulements et les
trains facultatifs. Nous dépendons
donc totalement des aides fournies
par les autres régions. Tous les ma-
tins, les dirigeants Traction du PC
contrôlent les roulements et tapis
des pantos et valident ou non nos
demandes d’assistance. Jusqu’à un
déficit de 6 à 8 engins moteurs, nous
faisons face à la demande à l’issue de
multiples croisements d’engins mo-
teurs, mais malheureusement en ne
respectant pas toujours les roulements
théoriques. Au-delà de ce nombre, les
dirigeants demandent assistance à
la CCL (Commande Centralisée des
Locomotives) qui orchestre au niveau
du réseau l’équilibre des besoins entre
les régions. Deux marches de trains
de machines sont d’ailleurs en roule-
ment au départ de Dijon et Lyon ▶▶▶

▶ LES OUTILS DE TRAVAIL DU PERMANENT PANTO DE MONTPELLIER ◀

En 1984, les ordinateurs sont encore absents des PC et
c’est donc avec un stylo, des crayons noirs et couleurs,
que sont indiqués sur le tapis les engins moteurs et leur
localisation. Par exemple, en dehors de ceux inscrits
d’office sur le tapis, tous les engins moteurs du Sud-
Ouest sont notés en violet, ceux d’Avignon en vert, ceux
de Lyon en bleu, ceux de Dijon en noir et ceux de Paris
en rouge. Chaque lieu de stationnement de la région est
matérialisé sur le tapis par un point de couleur: vert pour
Nîmes et Sète, bleu pour Béziers, orange pour Narbonne,
violet pour Perpignan, Le Boulou et Cerbère. Il faut aussi
une bonne règle et l’indispensable outil de rattrapage:
la gomme… à utiliser quand même avec modération, afin
de garder une trace des modifications successives.
Le moyen de communication privilégié, c’est un bon vieux
téléphone à cadran couplé avec un boîtier muni de touches
d’appel direct pour nos correspondants les plus courants:
PC voisins et dépôts de la région. Mais il y aussi le fax,
pour envoyer les photocopies des tapis à la CCL, qui est
située en gare de Paris-Lyon pour les régions du Sud-Est.

60 - ferrovissime
Au milieu des années 1980, suite à un déraillement en gare de Perpignan, les deux Z2 prévues pour assurer un AR sur Villefranche-Vernet-
les-Bains sont prisonnières sur un tiroir. On a donc utilisé au pied levé une rame RB disponible avec la BB 9523 stationnée sur une voie non
concernée par le déraillement.

ferrovissime - 61
Cœur de métier

Les trains de pèlerins italiens, très souvent remis en retard à la frontière, parfois de plusieurs heures, ont toujours été un casse-tête pour la permanence
Traction. Ici, en octobre 1991, la CC 7002 repart de Sète vers Lourdes après un long arrêt nécessaire pour refaire le plein en eau des voitures.

▶▶▶ pour nous porter assistance. Mais
en dehors de cette procédure officielle,
ons’arrangesouventdirectemententre
pantos des PC voisins. Une certaine
camaraderie existe entre régions li-
mitrophes : avec Marseille (Miramas
n’est pas loin de Nîmes), mais aussi
avec Lyon et Toulouse. Les rencontres
professionnelles, sportives ou festives
facilitent ces échanges! Et comme nous
changeons de postes tous les trois mois,
c’est toujours avec un certain plaisir
que je retrouve mes interlocuteurs
du Sud-Est, « galette » à Marseille et
«Pinpin» à Lyon, ou du Sud-Ouest, «le
canard» à Toulouse entre autres.
Le panto est la dernière roue
de la charrette
L’assistance pour la couverture des
trains se fait également en interne à la
région. Bien qu’il soit très mal vu, dans
ces années-là, de faire circu-
ler des engins thermiques
sous caténaires, c’est fré-
quent sur des parcours
Bien qu’il soit très mal vu, dans ces années-là,
limités : les conducteurs
assurant des trains autour
de faire circuler des engins thermiques sous
de Nîmes et autorisés «ther- caténaires, c’est fréquent sur des parcours limités
62 - ferrovissime
mique» peuvent faire des demi-tours
Beaucaire, Vestric (desserte Perrier) ou
l’Ardoise avec ce mode de traction.
Pourtant, la vie n’est pas toujours
rose : hiérarchiquement, dans le PC,
le panto est « la dernière roue de la
charrette» lors de la création de trains
supplémentaires. Le permanent ache-
minement monte une marche suivant
les besoins des clients, si possible
en concertation avec le permanent
«équipes». Ensuite, suivant une expres-
siondevieuxpermanents,l’intendance
suit… et l’intendance, dans ce cas, est
le plus jeune à la table du PC: le panto!
En situation normale, tous les
trains partant pendant le service sui-
vant doivent être pourvus en engin
moteur ; mais cela ne signifie pas que
la relève ne devra pas revenir sur ces
commandes, suite à des retards ou
incidents arrivés entre-temps.
Les difficultés du métier
Lorsque le déficit en engins mo-
teurs est trop important et qu’après
moult réflexions et simulations le
panto doit rendre les armes pour la
première fois, c’est avec déchirement
qu’il déclare le train commandé «T2»,
c’est-à-dire supprimé par manque
d’engin moteur.
Certaines périodes, avec ces déficits
récurrents, sont difficiles à vivre et
bien souvent les nuits après – et même
avant – le service sont perturbées. Il
n’est pas rare de revivre en cauchemar
les problèmes des journées de travail
écoulées.
Pourtant, je garde un bon souve-
nir des sept années passées au panto,
que je vais quitter pour m’essayer aux
postes de permanent « thermiques »
et « équipes » … mais c’est une autre
histoire ! ◼
 Gares et installations

POISSON, CHARBON, GOUDRON

AU PORT DE CONCARNEAU © G. GERMAIN
L’embranchement portuaire le 12 juin 1984. L’appareil dérailleur est toujours là. Il a servi au moins une fois… Plus loin, on distingue le poteau
portant les pancartes «ARRET» et S (Sifflez!).

Après la description de la gare de Concarneau dans Ferrovissime n° 103

et l’étude de son activité dans le n° 105, voyons son embranchement
portuaire. Texte : Gilles Germain

L'
embranchement du port de
pêche est en fait l’ancienne
extrémité ouest de la ligne
à voie métrique Quimperlé/
Concarneau des Chemins
de fer départementaux du
Finistère (CFDF).
Le heurtoir de la gare du P.O, décrite
dans les n° 103 et 105 de Ferrovissime,
est implanté à 200 m à vol d’oiseau,
mais 22 m plus haut, sur l’ancienne
commune de Beuzec-Conq.
Ouverte en 1909, la ligne CFDF à voie
métrique venant de Quimperlé est fer-
mée dès 1936. La faute à la concurrence
routière et aux faibles performances :
peu de trains, très lents.
Jusqu’en 1936, les expéditions de
poisson, charbon, huiles, matériaux
de construction sont chargées, le long
du port, dans des wagons à voie normale,
posés sur des paires de trucks métriques,
puis remorqués jusqu’à la «grande gare».
Là, ils sont transférés sur voie normale
et pris en charge par le P.O (voir plans
dans Ferrovissime n° 103 et 105).
L’embranchement métrique
est mis à voie normale
Au 1er janvier 1937, les mareyeurs
et autres clients du rail se trouvent
face à une rupture de charge beaucoup
plus pénalisante. Il faut dorénavant
affréter des camions pour 400 m de
trajet en ville, le long de l’avenue de
la gare. Le Conseil municipal ▶▶▶

ferrovissime - 63
Gares et installations
Vue aérienne de 1955
Cette vue colorisée donne un aperçu
général des installations de l'époque.
En haut et à gauche, les voies de la
gare SNCF; au centre le quai Carnot,
bordé par l’ancienne gare CFDF, le
bureau des douanes (ex-remise à
machines), les voies longeant la criée
et deux wagons STEF, à droite.
▶▶▶ délibère pour s'opposer au déclas-
sement du tronçon allant du port à la
gare SNCF et demander sa conversion
à voie normale. Les études techniques
sont menées et le non déclassement
est acté. Mais ni l’Etat, ni la SNCF, ni
la ville ne veulent payer les travaux.
La guerre arrive et ce sont les occu-
pants allemands qui imposent la mise
en œuvre du projet, pour des raisons
stratégiques.
Le Ministre des transports de Pétain
signe l’autorisation d’exploitation par
la Chambre de commerceetd’industrie
(CCI) le 17 novembre 1941.
La SNCF concède à la CCI la réalisa-
tion et l’exploitation d’un «embranche-
64 - ferrovissime
ment particulier de mise en commu-
nication du port de Concarneau avec
le chemin de fer». La concession date
du 18 août 1942 et sa durée est de 18
ans. Le coût de premier établissement
des ouvrages est de 3 366000 F, pour
un linéaire total de 2 300 m de voies
établies avec des rails double champi-
gnon, traverses et aiguilles de réemploi
fournis par la SNCF. L’Etat finance 8%,
la CCI 92%.
La voie est posée successivement
sur les emprises SNCF, puis sur le do-
maine public départemental, puis sur
le domaine public maritime.
La SNCF assure la traction, les
manœuvres, l’enregistrement
Forte rampe et courbes serrées
La ligne CFDF quitte la gare P.O
vers Quimperlé par une courbe de
100 m de rayon, en pente de 23 °/°°.
Une grande boucle de 1050 m, pour
partie en tranchée maçonnée, conduit
au port. Le passage à voie normale ne
change pas la topographie, mais le dé-
but du tracé est modifié de manière à
obtenir un rayon minimum de 150 m,
toujours en pente de 23 °/°°. Cela permet
aussi de donner une longueur plus im-
portante au tiroir pour la manœuvre
des convois remontant du port.
Puis, 60 m avant de déboucher sur
l’avenue de la Gare au niveau du port,
un appareil dérailleur est implanté ▶▶▶
 © COLL. G. GERMAIN
© ARCHIVES CCI QUIMPER
Le plan annexé au traité de concession de la Chambre de commerce en 1941.
© DR
▶ L’EXPLOITATION DES TRAINS DE MARÉE ◀
Les remorques rail-route UFR des transports Mélédo (Lorient) sont
utilisées dès mai 1956. Chargées sur des wagons plats spéciaux en
gare de Quimperlé ou Lorient, elles sont descendues sur l'EP portuaire
où elles reçoivent leur chargement de poisson. Puis les wagons
repartent vers la gare Concarneau, d’où ils sont expédiés en RA.
Horaires et délais d’acheminement ont évolué dans le temps.
Jusqu’en septembre 1965, par exemple, le train de marée de 13 h
part vers la Normandie les lundis, mardis, jeudis et samedis.
À 14h30, les wagons pour le sud de la France sont collectés du
lundi au samedi et attelés, à Lorient, à un train de messageries
arrivant à Lyon-Guillotière le lendemain matin à 6h06.
Mais la plupart des wagons de marée sont envoyés à la gare de
Paris-Vaugirard via Rosporden, Rennes et Trappes. Expédiés
7 jours sur 7 à 16h15, ces wagons venant de Concarneau
Le chantier de
mise à voie
normale de
l’embranchement
en 1942.
arrivent en gare de Vaugirard au train de messageries
4076 à 2h03 (avancé à 1h50 les dimanches et fêtes).
Déchargées aussitôt avec célérité, les remorques rail-
route livrent ensuite leur poisson principalement aux
halles centrales de Paris construites par Baltard.
Par la suite, il n’y a plus que deux trains, partant à 13h et 16h.
À partir du 4 mars 1969, les wagons UFR expédiés de Concarneau
sont partagés entre Paris-Vaugirard et le nouveau Marché d’intérêt
national de Rungis. C’est l’ultime train de marée de Concarneau
qui fonctionne jusqu’en 1975 pour ces deux destinations.
Les remorques rail-route vides et leurs wagons porteurs repartent
de Paris-Vaugirard en soirée pour Quimperlé ou Lorient,
attelés en queue d’un train de messageries. Au service d’hiver
1972/73, c’est le 48601 (départ 19h57) qui a cette charge.
ferrovissime - 65
Gares et installations

© COLL. G. GERMAIN

© M. DOERFLINGER
En 1962, la 3-141 C 83 vient se mettre en tête d’une rame de wagons En 1963, un train de marée à Rosporden. À l’époque, ces trains du RA sont
de marée en cours de chargement. normalement confiés en Bretagne-Sud aux 141 P du dépôt de Rennes.

© J. RANNOU / COLL. G. GERMAIN

Une 3-140 C du dépôt de Quimper, attelée au tender à écran 3-18 C 638, traverse prudemment la chaussée en remorquant
un fourgon-frein porteur dans lequel ont pris place les agents de manœuvre.

▶▶▶ pour limiter les conséquences
d’une dérive. Enfin, 100 m plus loin,
le bâtiment de l’ancienne gare CFDF
est identique à ceux de Pont-l’Abbé et
Moëlan, toujours visibles. Il étonne
par son orientation : c’est un pignon
aveugle qui fait face à la voie. En fait,
il a été conçu comme une gare termi-
nale, ce qu’il a été jusqu’en 1908. Le
site est doté d’une remise à machines
devenue, à la même époque, halle
aux marchandises, puis bureau de
douane. En 1959, à la démolition de
la gare CFDF, elle est dédiée à la vente Un bureau de 25 m², commun à la
des billets des cars départementaux. SNCF et à la STEF est situé, après 1959,
Il y a aussi un pont-bascule, probable- dans les locaux de la criée.
ment démantelé en 1942. Les trucks
porteurs à voie métrique sont vendus Des courants de trafic
et ferraillés en 1946. principalement liés à la pêche
Au-delà, on trouve un faisceau de Dans les années 1950 à 70, la ges-
3 voies. La voie sud longe un quai haut tion de l’embranchement nécessite
de 200 m, en prise directe avec les ma- à longueur d’année l’équivalent de
gasins des mareyeurs. Les deux autres cinq agents SNCF et STEF à mi-temps.
servent aux manœuvres. En bout de Ils sont chargés de la traction, des
faisceau, la voie en cul-de-sac sert de manœuvres (dont les traversées de
tiroir et donne aussi accès à des EP. la voirie urbaine, qu’ils protègent),

66 - ferrovissime
© G. GERMAIN

En 1981, l’ancienne remise à machines des CFDF, aujourd’hui bureau de vente des billets des cars départementaux, a servi entre-temps
de halle marchandises puis, à la guerre, de bureau de la douane. Elle va encore subsister une dizaine d’années!

du contrôle des expéditions et de la
facturation.
Le personnel de la CCI assure les
relations clients ainsi que les manu-
tentions.
Les tonnages sont longtemps satis-
faisants, puisqu’ils atteignent 8 000 t /
an de poisson de 1956 à 59. Cela baisse
ensuite lentement. En 1962, 7 000 t
sont expédiées par le rail et 16 000 t
par la route.
Le trafic de charbon tient d’abord
une place importante, mais disparaît
en octobre 1954. Il est remplacé sur
les navires par le fuel des moteurs
diesel ; mais, vers 1960, la Coop-ma-
ritime se fait livrer par mer. Cepen-
dant, quelques wagons-citernes de fuel
transitent encore occasionnellement.
L’usine Vialit (puis Via-France)
reçoit de très nombreuses citernes
d’huile et des tombereaux d’agrégats.
Le trafic décroît à la fin des années De 1965 à 73, la construction du
1960, puis cesse en 1975. viaduc routier sur le Moros et des quais
La Française-maritime (SFIM) col- du bassin du Moros génère des ton-
lecte les déchets de poisson et d’abat- nages importants, avec de nombreux
toirs dans des wagons tombereaux, arrivages de wagons de ciment, fers,
au bout de l’embranchement. Ces sable et cailloux.
produits sont ensuite envoyés par
camion à l’usine de Beuzec. La fin de l’histoire
Jusque vers 1970, les mareyeurs Dès l’après-guerre, les commerçants
se font livrer de pleins couverts de et la mairie se plaignent des fumées
caisses à poissons neuves, en bois. des locomotives, des interruptions ▶▶▶
▶ LE FINANCEMENT DE L’EMBRANCHEMENT À VOIE NORMALE ◀
Les redevances d’exploitation dues à la SNCF sont fixées au départ à
1,20 F par quintal expédié ou reçu. La CCI, elle, facture 1,80 F par quintal
au titre de ses frais propres. La SNCF perçoit la totalité des montants dus
par les clients, à charge pour elle de restituer mensuellement sa part à la
CCI. Ces tarifs seront ensuite âprement discutés, au long des 35 années
de l’exploitation, qui démarre en mars 1943. Le trafic annuel est estimé
initialement à 8000 t de poisson et à 10000 t de charbon de soute.

L’exploitation d’un «embranchement particulier de mise en

communication du port de Concarneau avec le chemin de fer»
ferrovissime - 67
Gares et installations
Plan du site en 1966

© COLL. G. GERMAIN
En 1965, les dockers de la CCI chargent les STEF (au moins

© COLL. G. GERMAIN
cinq simultanément) alignés au nord de la criée, à proximité
immédiate des chalutiers amarrés au port. Dans les toutes
prochaines années, les caissettes de poisson en bois seront
remplacées par des emballages jetables en polystyrène.

© G. GERMAIN
© LE MERDY

Le site en 1939, vu depuis les remparts de la Ville close: on distingue, L’aiguille triple de l’extrémité ouest du faisceau de la criée est
sur le quai Carnot, l’ex-gare CFDF, dorénavant «gare routière» pour les toujours là, symbolisant la mémoire du lieu, emprisonnée depuis plus
autobus départementaux; à droite, sous l’enseigne du marchand de de 40 ans dans le goudron municipal; la voie s’incurvait pour laisser
vin, l’ex-remise des machines CFDF est alors utilisée par la douane. sur sa gauche le bâtiment couvert de tuiles rouges de la pâtisserie…

Le début du tracé est modifié de manière à obtenir

un rayon minimum de 150 m, toujours en pente de 23°/°°
▶▶▶ de la circulation routière lors du
passage des convois et de la présence de
la « petite gare » qui rétrécit la chaus-
sée. Le Conseil municipal délibère en
1959, puis en 1960, pour critiquer cette
situation.
Le 30 mars 1961, l’appareil dérail-
leur situé près du port a joué plus que
son rôle: il a fait se coucher la 3-141 C
114 et son tender sur le flanc. Aucun
wagon n’a cependant déraillé. Pas de
blessé – le mécanicien et le chauffeur
ont sauté – mais il faut faire venir la
grue de 50 t de Rennes.
NouvelledélibérationduConseilmu-
nicipal le 30 janvier 1963 et polémique
parvoiedepresse:«laSNCFsemoquede
nous,ilsn’ontqu’àmettredesdiesel…»,
dit le maire, Charles Linement.
Malgré tout, la CCI et la SNCF y
croient encore. En juin 1965, un projet
de prolongement de l’embranchement
▶ DES EP CÔTÉ TIROIR ◀
Au-delà du faisceau, la voie en cul-de-sac
vers l’est, en direction de la nouvelle
a une double fonction: tiroir, mais aussi
darse, est examiné par le Conseil por- desserte des entreprises de l’est du port:
tuaire, qui y est très favorable. Mais la - trois parcs à charbon de soute avec
mairie et les Ponts et chaussées font chacun son aiguille, jusqu’en 1954,
en sorte que cela n’aboutisse pas. pour alimenter les chalutiers à vapeur,
Au milieu des années 1970, les tra- - le dépôt de pétrole côtier de
fics chutent: il n’y a quasiment plus la Coop-maritime, dès 1954 (à
de poisson après 1974 et les arrivées l’emplacement des parcs à charbon),
d’huiles et d’agrégats (Via-France) et de - l’usine Vialit, qui produit des
fuel (DPC) cessent en 1975. Quelques enrobés routiers, à partir de 1954.
wagons circulent encore épisodique-
ment jusqu’en 1976. à la demande des autorités militaires,
En 1978, la mairie qui veut faire un que ce serait réversible… De fait, les
parking de 150 places, fait noyer les deux aiguilles triples et les rails restent
rails du faisceau dans le bitume, pour jusqu’à ce jour aussi visibles qu’irré-
un montant de 164000 F, en précisant, cupérables! ◼
© G. GERMAIN

68 - ferrovissime
Un profil de ligne exceptionnel
La rampe est raide; les arcs-boutants en moellons de
granit se sont révélés indispensables pour tenir les
talus; l’humidité fréquente de la tranchée a eu raison
des traverses d’origine et le rail Vignole a remplacé le
DC à cet endroit.

ferrovissime - 69
Matériel roulant d’hier

© M. MERTENS
Le fourgon 1285 stationne à Villeneuve-Prairie en 1962.

Les fourgons de l’Orient-

Express CIWL 1263 à 1296
Une étonnante carrière : après avoir débuté dans l’Orient-Express,
ces fourgons accompagnent le Train Bleu avant d’assurer le transport
des journaux. Texte : Jean-Marc Dupuy

L
e parc de fourgons mé-
talliques de la CIWL est
restreint. Nous avons
vu, dans le n° 105 de
Ferrovissime, le premier
type dit Nord-Express apparu
en 1926 (série 1245 à 1256) et
caractérisé par ses huit portes.
Aujourd’hui, nous voyons le
second type que la compagnie
reçoit, en 1928, sous la forme
d’une première tranche de
fourgons du type dit Orient-Ex-
press, à six portes, immatricu-
lée CIWL 1263 à 1276.
Construits par Metropoli-
tan Carriage Wagon and Fi-
nance à Satley - Birmingham
(Grande-Bretagne), ces four-
gons ont une longueur de
20,800 m pour une masse de
37 t et sont dotés de bogies PP.
Équipés d’une vigie en toi-
ture, ces fourgons métalliques,
aptes à transporter 10 t, sont
munis de trois portes cou-
lissantes par face, ainsi que

70 - ferrovissime
© M. MERTENS

Ancien du Train Bleu, le fourgon 51 66 09 40 283-4 assure les navettes de linge sale entre Villeneuve-Prairie et Saint-Denis.
Il est vu ici en octobre 1977.

▶ AFFECTATIONSAUSERVICE
D’HIVER1937/38 ◀
- Bombay-Express F n°1272, 76
- Calais-Méditerranée-Express F n°1274, 75
- Simplon-Orient-Express FP
n°1263 à 71, F n°1282 à 91
- Rome-Express F n°1277 à 81
© P.Y. TOUSSIROT

- Riviera-Express F n°1273
- Ostende-Vienne-Orient-Express F n°1292 à 96
Acquis par l’AJECTA, le 1270 est vu ici côté couloir à Longueville en 2019.

d’une porte d’accès à chaque
extrémité de la caisse. Pour le
Simplon-Orient-Express, les
fourgons n° 1263 à 1272 sont
équipés, par la suite, d’un petit
local postal (indice FP dans leur
marquage).
Une seconde tranche
complète l’effectif
Vingt fourgons supplémen-
taires, numérotés 1277 à 1296,
sont livrés en septembre 1929
par la même usine de Me-
tropolitan Carriage Wagon
and Finance. Reprenant le
diagramme intérieur des qua-
torze fourgons précédemment
livrés en 1928, les fourgons
1277 à 1296 comprennent trois
compartiments à bagages des-
servis par un couloir latéral et
une niche à chiens est présente
en extrémité de caisse. Un com-
partiment à deux couchettes
est destiné au personnel de
la CIWL (une seule couchette
dans le n° 1280).
Pour offrir plus de confort
à sa clientèle, la CIWL a prévu
une cabine de douche nécessi-
tant un réservoir d’eau d’une
contenance de 600 l placé
en toiture, correspondant à
20 douches de 30 l. L’eau est
portée à la bonne température
par une chaudière au charbon
ou par une dérivation sur la
conduite de chauffage à ▶▶▶

ferrovissime - 71
Matériel roulant d’hier

© P.Y. TOUSSIROT
© P.Y. TOUSSIROT

© P.Y. TOUSSIROT

À l’intérieur du 1276 du parc RENFE: à droite, le couloir latéral, La vigie du 1276 du parc RENFE: volant du frein à vis et cloche
au milieu, l’escalier d’accès à la vigie, à gauche, le petit bureau du frein à vide.
du chef de train.

72 - ferrovissime
 © P.Y. TOUSSIROT

Le fourgon 51 66 09 20 270-5 avant remise en peinture par l’AJECTA. Notez qu’il est limité à 120 km/h.

> Les voitures et les Trains de la CIWL <

À l’été 1964, le Train Bleu
n° 3/4 conserve encore
les 1283 à 85, 87, 90,
94, mais ils sont retirés
du service peu après
Disponible fin octobre sur trains.lrpresse.com

Le fourgon 1270
de l’AJECTA vu côté
compartiments à ▶▶▶ vapeur. L’accès des voya-
bagages en septembre geurs se fait par la plateforme
2019. du fourgon. En conséquence,
celle-ci doit être positionnée
côté rame afin d’éviter aux voya-
geurs la traversée du fourgon.
Cette installation, réservée
aux voyageurs de l’Orient-Ex-
press, du Simplon-Orient-Ex-
press et du Rome-Express, est
placée sous la responsabilité
d’un agent spécialement formé.
Il assure les opérations de net-
toyage et de remplissage éven-
tuels lors des arrêts en gare. Ce
service payant doit faire l’objet
d’une réservation préalable lors
de l’achat des billets.
Après la Seconde Guerre
mondiale, cette installation
est démontée dans la plupart
des fourgons (n° 1280, 83 à 85,
87 à 90, 92, 94).
Avant 1938, ces 34 fourgons
Express retrouvent leurs an-
ciens fourgons. Mais la série
est désormais éparpillée en
Europe, de Lisbonne à Istan-
bul en passant par Athènes et
Budapest !
Au service d’été 1948, la for-
mation des diverses branches
de l’Orient-Express nécessite
cinq unités (n° 1268, 73, 77, 79,
80). Peu après, le Train Bleu, à
nouveau entièrement composé
de voitures-lits, accueille ces

▶ SITUATION SUR LE RÉSEAU FRANÇAIS EN 1946 ◀ entrent dans la composition de

grands trains de la CIWL, de
- Orient-Express F n° 1277, 80 l’Orient-Express à l’Oiseau Bleu
- Simplon-Orient-Express F n° 1283 à 85, 87, 88, 92, 94 en passant par l’Etoile du Nord.
- Garés F n° 1268, 70 (Lyon), F n° 1278, 89
(Bordeaux), F n° 1267 (Montrouge-Chatillon), Ils quittent les trains
F n° 1291 (Auxerre), F n° 1265, 73 (Villeneuve- de luxe français
Saint-Georges), F n° 1263, 69 (Bonson) Après les épreuves du se-
cond conflit mondial, l’Orient-
- Utilisation spéciale F n° 1290 (Bâle)
Express et le Simplon-Orient-
fourgons qu’il va alors partager
avec le Rome-Express.
Leur utilisation sur ce der-
nier cesse au service d’hiver
1952/53 et seul le Train Bleu
garde encore un unique four-
gon dans sa composition. À l’été
1954, aux antipodes des pres-
tigieux services sur les grands
trains de luxe, la CIWL ▶▶▶

ferrovissime - 73
Matériel roulant d’hier

© G. RANNOU / COLL. Y. BRONCARD

En mars 1975, le PAz 50 87 00 69 003-7 ex-1290 a encore fière allure en livrée NMPP.

La CIWL vend alors les quatre fourgons n°1285,

87, 90, 94 en juillet 1968 aux Nouvelles
Messageries de la Presse Parisienne (NMPP)
▶▶▶ utilise, jusqu’au début
des années 1960, le fourgon
n° 1280 comme dépôt de char-
bon à Salzburg (Autriche) !
À l’été 1964, le Train Bleu
n°3/4 conserve encore les 1283
à 85, 87, 90, 94, mais ils sont
retirés du service peu après.
La CIWL vend alors les
quatre fourgons n° 1285, 87,
90, 94 en juillet 1968 aux Nou-
velles Messageries de la Presse
Parisienne (NMPP).
Nouvelle carrière
aux NMPP
Réimmatriculés D(myi)
500111 à 500114, leur caisse
est modifiée par l’obturation
des baies et la mise en pein-
ture rouge grenat (teinte des
véhicules des NMPP), toiture
et bogies noirs, complétée
par l’inscription « PRESSE PA-
RISIENNE » en jaune moyen
au milieu des faces latérales.
La numérotation UIC leur est
appliqué peu après : 50 87 00
69 001 à 004 PAz. Utilisés au
transport de journaux et ma-
gazines périodiques, notam-
ment sur Paris/Nancy et Tours,
ils sont retirés du service en
février 1974.
Ce ne sont pas les seuls four-
gons Orient-Express encore
actifs dans les années 1970.
À l’été 1971, les 1272, 74, 76, 96
accompagnent les rames REN-
FE du Sud-Express. En France,
le 1283, réimmatriculé UIC
51 66 09 40 283-4, assure des
navettes CIWL entre Saint-
Denis et Villeneuve-Prairie, le
plus souvent chargé de linge
sale. Cette utilisation lui per-
met, en janvier 1974, d’entrer
dans la composition du convoi
formé pour le tournage du film
Le crime de l’Orient-Express.
Aujourd’hui, quelques uni-
tés ayant miraculeusement
échappé au chalumeau des
démolisseurs restent encore
présentes, dont le 1270 (renu-
méroté UIC 51 66 09 20 270-5)
sauvé par l’AJECTA à Longue-
ville. ◼
▶ TRAINSASSURÉSAUSERVICED’ÉTÉ 1952 ◀
- Train Bleu n°3/4 (Paris/Vintimille)
- Rome-Express n°7/8 (Paris/Turin) avec les fourgons
n°1283 à 85, 87 à 90, 92, 94, réserve n°1273

74 - ferrovissime
 Des trains sous la loupe

© J.H. RENAUD / COLL. R. THÉVENIN

En 1969, deux fourgons NMPP ayant assuré, la nuit, le train de presse Paris/Sud-Ouest retournent de Tours à Paris-Tolbiac
dans un train de messageries remorqué par la 2D2 5510. En tête, les deux fourgons vides des NMPP.

Quand les journaux étaient

transportés par le train Texte : Jehan-Hubert Lavie

La presse française est malade de sa distribution. La chute de son messager

nous incite à revenir sur l’époque où les journaux prenaient le train.

P
resstalis, qui a repris aux
Nouvelles Messageries
de la Presse Parisienne
> Rectificatif < (NMPP) la distribution
Composition des journaux et publica-
du Rapide 471, tions périodiques en 2010, a été
Ferrovissime n° 107,
page 73. Suite à placée en liquidation judiciaire
une information le 1er juillet 2020. Un évènement
d'un lecteur qui gravissime pour les éditeurs,
a été confirmée,
nous précisons que
puisque la loi Bichet du 2 avril
le Vru du 471 était 1947 a attribué le monopole de la
un Gril Express. La distribution aux NMPP. Cette loi
mention Gril Express avait notamment pour objectif
n'apparaissant pas
sur le livret RA, notre d’accorder à chaque titre le droit
source documentaire, automatique d’être proposé aux
nous l’avions acheteurs dans tous les points
illustrée avec une de vente existants. Un objectif
voiture restaurant
type DEV 66. ambitieux pour lequel les NMPP
font appel à tous les moyens de
transport et en particulier à la
SNCF qui achemine, chaque
mois, plus de 5000 t de presse
au début des années 1950. Ces
journaux sont chargés princi-
palement dans les fourgons des
trains de voyageurs.
En 1955, la progression
constante du volume à transpor-
ter oblige les NMPP à revoir leur
plan d’acheminement. Repre-
nant en partie l’idée des autorails
Renault ZO Etat d’avant-guerre
qui, grâce à des sièges rapide-
ment démontables, chargeaient
des journaux entre Paris et la pro-
vince et prenaient des voyageurs
au retour, les NMPP choisissent
d’abord la solution de l’autorail,
mais en démontant les aménage-
ments voyageurs pour un usage
purement « fourgon ».
Un matériel particulier
Deux Bugatti allongées de
Batignolles-Remblai sont affec-
tées à la liaison Paris/Nancy. Mais
ces engins en fin de vie, équipés
de deux moteurs 8 cylindres à es-
sence, sont remplacés dès l’année
suivante par deux De Dietrich
XD 2513 et 2515 qui sont à leur
tour modifiés pour le transport
de journaux.
Les autorails ayant montré
leurs limites en matière de capa-
cité, onze fourgons Nord-Express
sont alors rachetés en 1956/57 ▶▶▶

ferrovissime - 75
Des trains sous la loupe

▶ LE TRAIN DU SUD-OUEST EN 1969 ◀ ▶ LA PRESSE, ÇA PRESSE ! ◀

Les autorails de presse Paris/Nancy ne traînent pas en route.
Paris / Tours
Lors de ce parcours sans arrêt, les gares intermédiaires
desservies sont franchies à 30 km/h, portes ouvertes, de
solides gaillards des NMPP larguant sur les quais, en s’aidant
CC 7100 des pieds, les paquets de journaux dans un geste calqué
sur celui des figurines des jeux de baby-foot! Le regretté
Pierre Pichon, qui a conduit ces Bugatti, racontait ce procédé
pittoresque, mais rapide et efficace, également employé
NMPP Orient-Express par le service routier des NMPP dans les années 1970.
De service de nuit dans des gares de banlieue, j’ai observé
le spectaculaire passage du camion des NMPP, un Renault
Goélette rouge grenat foncé empruntant le trottoir au droit du
NMPP Nord-Express
BV: les portes arrière s’ouvrent pour le largage des journaux et
Paris/Bordeaux le camion continue sans s’arrêter en faisant hurler son moteur à
essence. À moi de me précipiter avec un chariot pour récupérer
les journaux et les amener devant le kiosque de la gare!
NMPP Nord-Express

▶ RETOUR DE TOURS À PARIS EN 1969 ◀

NMPP Nord-Express Tours/Paris-Tolbiac

NMPP Nord-Express
2D2 5503/37

NMPP Nord-Express
NMPP Nord-Express

NMPP Nord-Express
NMPP Orient-Express
Paris/ Le Mans

Gs3.11
NMPP PA 21m
Paris / Nantes
Gs3.11

NMPP Nord-Express

Paris/Vierzon ou Bourges Gbs7.23

NMPP Nord-Express Gbs7.23

▶ LES AUTORAILS PARIS/NANCY ◀ Gbs7.23

Bugatti XB 3000 Gbs7.23

De Dietrich XD 2513 Gbs7.23

Infographies : J-H Lavie et Marc Le Gad

76 - ferrovissime
▶▶▶ à la CIWL et transformés
pour assurer le tri et le transport
des journaux (voir leur histoire
dans Ferrovissime n° 105). Tous af-
fectés au Sud-Ouest, ils forment
la série Dmyi 50115 à 50122 et
50128à50130–«P» (D = fourgon,
m = métallique,y = à bogies,i = à
intercirculationparsoufflets–le
«P» final indiquant un véhicule
de particulier), devenue, en 1969,
50 87 00 69 005 à 015 PAz.
En 1958, le parc grandit sen-
siblement par la location aux
PTT de vingt ambulants postaux
OCEM 28/30 type 21,60 m. Affec-
tésau Nord, à l’Est, auSud-Ouest
et au Sud-Est, ils forment la série
PAyi entre 42501 et 45630 – «P»
(P = véhicule postal, A = Atelier
de tri, y = à bogies, i = à inter-
circulation par soufflets – le «P»
final indiquant un véhicule de
particulier), devenue, en 1969, 50
87 00 60 ou 47 341 à 360 PAz (60 =
chauffage vapeur uniquement, 47
= chauffages vapeur et électrique).
En 1968, nouvelles acquisi-
tions de quatre fourgons ex-CIWL
du type Orient-Express D 500111
à 500114 puis 50 87 00 69 001 à
004 PAz que nous avons présen-
tés dans les pages précédentes.
Ils sont utilisés au Sud-Ouest et à
l’Est pour remplacer les autorails
De Dietrich désormais radiés.
Un Paris/Nancy puis un
Paris/Tours à cinq tranches
En 1955, les autorails Bugat-
ti puis, à partir de 1956, les De
Dietrich sont engagés sur Paris/
Nancy. Une nouvelle étape est
franchie avec l’arrivée des four-
gons NMPP ex-CIWL puis des PAz
loués aux PTT. Car ces véhicules
sont aménagés pour assurer le tri
des liasses et paquets de journaux
durant le trajet. Suivant les pé-
riodes et les jours de circulation,
les rames sont composées de sept
à douze véhicules dont le premier
est aménagé pour l’utilisation de
machines de mise sous bande.
Le train de presse du Sud-
Ouest quitte Paris-Austerlitz à
destination de Tours vers minuit,
après le départ du dernier ex-
© M. MERTENS
press. Aux Aubrais, un premier
lot comprenant un ou deux four-
gons NMPP est coupé en queue,
pour Vierzon et Bourges. Le re-
broussement en gare de Tours
est mis à profit pour dételer un
ou deux fourgons et les raccorder
à l’Express LO à destination de
Nantes. Un autre fourgon rejoint
un train de messageries pour Le
Mans tandis qu’un lot de cinq
ou six fourgons est accroché à
l’Express Poste 4021 les lundis
et vendredis ou à un train de
messageries les autres jours pour
Poitiers, Angoulême et Bordeaux.
Reste alors au heurtoir de
Tours, attelé derrière la locomo-
tive, le premier fourgon NMPP
aménagé pour l’utilisation de
machines de mise sous bande.
Or, le tri est maintenant terminé.
Dorénavant inutile, ce fourgon
est accroché à un train de messa-
geries Tours/Paris-Tolbiac, accom-
pagné d’un second fourgon NMPP
vidé à Tours. Quant au personnel
NMPP assurant le tri, il prend
place à bord du premier express
utile vers Paris-Austerlitz.
Les relations assurées
sur le Sud-Est et le Nord
Les NMPP mettent en marche
quotidiennement plusieurs
trains de presse. À l’époque, la
plupart des grands journaux
nationaux ayant leur siège et
leurs imprimeries à Paris entre
Réaumur et Opéra, tous ces
trains partent de Paris.
Dans le plan de transport que
les NMPP étudient en 1955, les
trains composés exclusivement Les parcours
de fourgons de presse sont limi- terminaux du train de
tés à 130 ou 140 km/h. Même presse mis en marche
en tenant compte des parcours entre Paris et Tours
comme le retour à
terminaux en trains de message- vide s’effectuent dans
ries (alors limités à 100 km/h), il des trains express
semble qu’aucun trajet supérieur ou dans un train de
à 600 km n’ait été prévu (582 km messageries.
pour Paris/Bordeaux via Tours).
Au Sud-Est, le train de presse
Paris/Lyon laisse un lot à Dijon.
Au Nord, le Paris/Lille comprend
des lots pour Amiens et Douai.
Et si la Région Ouest ne possède
pas son propre train de presse, c’est
parce que les horaires nocturnes
pour transporter les journaux de
Paris à Nantes permettent d’utili-
ser l’ancien itinéraire du P.O Paris-
Austerlitz/Tours/Nantes avec
acheminement jusqu’à Tours par
le train spécialisé du Sud-Ouest
puis par l’Express LO, comme
précisé ci-dessus.
La baisse des ventes des jour-
naux quotidiens, l’avènement
de nouvelles techniques d’im-
pression et la mise en place de
relations assurées par le SER-
NAM entraînent la suppression
des trains de presse entre 1973
et 1975. Les anciens fourgons
de la CIWL sont alors radiés
et certains connaîtront une
troisième et dernière carrière
ferroviaire dans diverses entre-
prises, tandis que les ambulants
OCEM loués sont restitués à la
Poste qui les réutilise sous la
forme d’allèges. En 1978, c’est
le SERNAM qui transporte les
journaux, mais en utilisant
aussi bien le rail que la route ! ◼
ferrovissime - 77
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