Le magazine du train et de son histtoire

Le hors-série N°10
164 pages de pur plaisir ferroviaire
Ne ratez pas le nouveau hrs-série Ferrvissime
LES LOCOMOTIVES ÉLECTRIQUES 1500 VOLTS DE VITESSE
2 E PARTIE : LES LÉVRIERS DU RAIL

N o u v e a u e 8 2
z - le p a g
a n d e
Comm ode HSFME010
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MI-NOVEMBRE
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IS É
ÉPU

N°1 N°2 N°3 N°4 N°5 N°6 N°7 N°8 N°9

LES AUTORAILS LES LOCOMOTIVES LES TRAINS LES LOCOMOTIVES WAGONS PLATS LES LOCOMOTIVES LES TRAINS LES LOCOMOTIVES 50 ANS D’AUTORAILS
DE PRESTIGE ÉLECTRIQUES DES VACANCES DIESEL DE VITESSE D’HIER ET DIESEL MIXTES ET DE MARCHANDISES ÉLECTRIQUES SUR LES LIGNES
25000 VOLTS D’AUJOURD’HUI DE MANŒUVRE SUR LES LIGNES 1500 VOLTS DE SECONDAIRES
SECONDAIRES VITESSE. 1ÈRE PARTIE 1948/1998
 www.ferrovissime.com N 96
N°96
Nov./Décembre 2018

Le magazine du train et de son histoire

Z 3600, Z 3700, P.68 P.24

BB 12000
Z 3800, Z 4700 P.30 sur la Bosse
J’CONDUIS LE
CHASSE-NEIGE !

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Que sont devenues les

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LOCOMOTIVES ARMISTICE 1918 à la SNCF ?

Directeur de la publication
Christian Fournereau - 02 97 24 81 30
chfournereau@lrpresse.fr
Rédacteur en chef
Jehan-Hubert Lavie - 06 42 55 47 92
jhlavie@lrpresse.fr
Conseiller technique de la rédaction
Thierry Porcher
Conception graphique
BecomeDesign
Quand l’actualité
contact@becomedesign.fr
Mise en page
Bertrand Bourn se réfère à l’histoire
C
Ont collaboré à ce numéro
ette fin d’année est marquée par le centenaire de l’Armis-
Didier Delattre, Frédéric Didelot,
Alain Dubois, François Durivault,
tice de 1918. Pour les ferroviphiles, le mot Armistice évoque
Jean-Michel Eich, Dominique Paris, les locomotives que l’Allemagne a remises à la France au
Aurélien Prévot, François Vielliard titre des dommages de guerre. La dotation n’était pas sym-
bolique, puisque près de 70 types différents de machines
Revendeurs & professionnels sont attribués aux grands réseaux. Et nous ne prenons pas en compte
Magalie Rous - 02 97 59 37 66
les locomotives qui, comme les 1-232 TC, sont des machines acquises
pros@lrmodelisme.com
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au cours de la période où les départements du Haut-Rhin, du Bas-Rhin
Denis Fournier Le Ray - 02 97 24 01 65 et de Moselle étaient rattachés à l’Empire allemand.
publicite@lrpresse.fr Avant la seconde guerre mondiale, le parc «Armistice 1918» est par-
Inspection des ventes tagé entre tous les grands réseaux puis régions de la SNCF. Mais seules
Pagure Presse les plus grandes séries passeront le cap des années 1940. Elles sont alors,
Tél. 01 44 69 82 82
Photogravure
pour la plupart, regroupées sur l’Est et le Nord. Loin d’avoir un rôle mar-
Photext ginal sur ces régions, les célèbres P8 et G8.1 prussiennes, par exemple,
Flashage/Impression s’octroient une bonne part des omnibus et des trains de desserte jusqu’à
Rectiligne (Feytiat - Haute-Vienne) l’arrivée de la traction diesel dans les années 1960.
ISSN> 1961-5035 À côté du centenaire de l’Armistice, un autre évènement d’actualité
CPPAP> 0423 K 89491
nous ramène à l’histoire: les trains Intercités normands vont perdre
leurs rames Corail, remplacées par des automotrices à deux niveaux
aptes à 200 km/h. Cette nouvelle nous rappelle qu’il y a 80 ans, les in-
LR PRESSE Sarl génieurs du réseau de l’Etat, suivant à la lettre les principes de desserte
BP 30104, F-56401 AURAY Cedex définis par Raoul Dautry dès le début des années 1930, n’avaient pas hé-
Siège social: 2 rue de Suède, Auray sité à adopter des solutions audacieuses pour constituer un parc d’auto-
Tél.: 02 97 24 01 65
motrices particulièrement performantes. Des automotrices à qui nous
Fax: 02 97 24 28 30
SARL au capital de 84500 € consacrons le Portrait du rail de ce numéro. ◼
RCS Lorient B.381289719
Principaux associés:
Christian Fournereau, rédacteur en chef
& Friedel Fournereau
“Printed in France/
Imprimé en France”

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COUVERTURE Grande photo : La 2-230 C 52 du dépôt de Beauvais à Paris-Nord dans

les années 1950. © J.H. Renaud / Coll. R. Thévenin - Conception : BecomeDesign
 N° 96
Nov./Décembre 2018

51

56
P.30
LES PORTRAITS DU RAIL

12

P.68
Histoire au présent P.24 24_ STARS DU RAIL
4 _ Des BB 36000 et 27000 en Hongrie DEMAIN, JE VAIS CONDUIRE
5 _ Les BB 17000 font de la résistance LA BB 4123 CHASSE-NEIGE !
6 _ Nouvelles régions sur les flancs
des automoteurs bimodes Les portraits du rail
7 _ Clap de fin pour les TGV PSE sur le Sud-Est
8 _ Une tranche de BB 7200 condamnée
30 _ Z 3600, Z 3700, Z 3800 et Z 4700
à disparaître AUTOMOTRICES MODERNES NÉES AVANT-GUERRE
9 _ Que deviennent les CC 92000 ?
10 _ Résurrection de la relation
Le monde des cheminots
Paris-Nord/Namur 51 _ CŒUR DE MÉTIER
Comment effectue-t-on un croisement
11 - MÉDIATHÈQUE
en voie unique ?
Livres, revues, DVD
56 _ GARES & INSTALLATIONS
Montez à bord Histoires de traversées à niveau
12 _ TRÉSORS D’ARCHIVES MATÉRIEL ROULANT D’HIER
Que sont devenues les locomotives 62 _ Les draisines Billard modernisées
à vapeur Armistice 1918 à la SNCF ? 68 _ Il y a 60 ans, les BB 12000 arrivent sur la Bosse
22 _ COMMENT ÇA MARCHE 76 _ DES TRAINS SOUS LA LOUPE
La structuration du graphique Le Mistral de 1958, seigneur du rail

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ferrovissime - 3
Histoire au présent
© R. VIELLARD
Des machines
françaises en Hongrie
Véritables locomotives européennes, les BB 36000
tentent leur chance en Hongrie.
P our leurs 20 ans, les BB 36001 à 30 ap-
partenant au loueur Akiem bénéficient
progressivement d’une opération mi-vie
réalisée dans les ateliers Alstom de Belfort
(voir le reportage dans Ferrovissime n° 93).
Si sept locomotives (36007, 10, 11, 12, 13, 15,
23) continuent d’être exploitées par Thello sur
des trains de voyageurs France/Italie, les autres
© J.M. EICH
4 - ferrovissime
Tout juste sortie
d'opération mi-
vie, la 36005
vient d'assurer
son premier train
d'essai en roulant
à 160 km/h haut-
le-pied. Budapest
Ferencvaros.
Texte : Frédéric Didelot
sont désormais inutilisées après leur retour du
Maroc (36001 à 6 et 8) ou après leur restitution
par Fret SNCF, en raison de leur impossibilité de
circuler en Belgique liée à l’absence de système
de sécurité valide (ERTMS ou TBL1+).
Leur transformation en 36300 pour circuler
en Italie n’étant pas d’actualité, des essais ont
débuté le 8 juin dernier en Hongrie pour les
homologuer dans ce pays équipé
de caténaires 25000 V. Les modi-
fications nécessaires portent sur
l’installation d’archets de pan-
tographes spécifiques et du sys-
tème de sécurité local EVM120.
Les 36004 et 36005, tout juste
sorties d’opération mi-vie, ont
ainsi rejoint les 27175 et 27177
arrivées sur place en avril dernier.
Des circulations commerciales
sont envisagées dès le premier
semestre 2019. ◼
a BB 36005 alors qu’elle se trouvait
Belfort en révision mi-vie.
Une image qui s’efface
rapidement en banlieue
de Paris: une BB 17000

© D.M. COSTES
poussant/tractant une RIB!
La 17050 est déjà radiée.

Les BB 17000 font ▶ EFFECTIF D’ACHÈRES ◀

de la résistance
Au 01/09/2018 :
- 17053 - 17071
- 17054 - 17075
- 17055 - 17077 en
La carrière de ces locomotives 25000 V n’ira pas - 17068 en attente de
attente de radiation
au-delà de l’année 2020. En attendant, les amateurs radiation
suivent de près leurs derniers tours de roues.
Texte : François Durivault et Jehan-Hubert Lavie

L a série 17000 est née en 1965 avec une forte

ambition: remplacer toutes les séries de
locomotives à vapeur employées entre Pa-
ris-Saint-Lazare et Le Havre. Des Pacific Etat
3-231 D et G des Batignolles engagées sur les
rapides et express aux 141 R fuel de Sotteville
affectées aux trains de marchandises lourds,
circulent alors quotidiennement. Ce sont souvent
les 17055 et 17071.
La BB 17016 est préservée pour la Cité du
train de Mulhouse. ◼
En été 2018, la
17075 fréquente
encore la gare
Saint-Lazare.

en passant par les 3-141 TC et TD assurant l’in-

tense trafic de banlieue. Et les BB 17000 y ont
presque réussi! Seuls les rapides circulant à plus
de 140 km/h leur ont échappé, à cause de leurs
bogies monomoteurs à court empattement en-
gendrant des mouvements de lacet incessants
- ces fameux mouvements qui leur donneront
leur surnom de «Danseuses»!
Aujourd’hui, avec 58 années de service, la
série se dirige inexorablement vers la réforme
définitive.
© F. DURIVAULT

Le 4 septembre 2018, sept machines restent

affectées à Achères mais deux unités seulement

ferrovissime - 5
Histoire au présent

Portant le logo de
la Région Grand Est,
la B 85026 stationne
au butoir de Paris-Est.

Nouvelles régions sur les flancs

des automoteurs bimodes
Lorsqu’une desserte change de gestionnaire, il est fréquent que la livrée
du matériel engagé soit modifiée. En voici deux exemples.
Texte et photos : François Durivault

D epuis la reprise de la gestion de la ligne 4

de l’Est par la région Grand Est au
1er janvier 2018 est apparu, sur les flancs
des rames Coradia B 85000, le logo de cette
nouvelle région administrative. Dans l’immédiat,
le changement se limite au logo. Mais il n’est pas
impossible qu’une livrée entièrement nouvelle
voie le jour par la suite.
Rappelons que les B 85000 sont des auto-
moteurs bimodes électriques + diesel. Appar-
tenant à la famille Coradia conçue par Alstom,
ces B 85000 remplacent des trains Corail sur
des lignes non électrifiées.
À l’ouest, c’est l’unification de la région
Normandie qui impose l’adoption d’un logo
unique sur l’ensemble du parc régional de maté-
riels, en remplacement des anciennes marques
« Haute-Normandie » et « Basse-Normandie ». Le
nouveau logo unique est donc apparu sur les
automoteurs bimodes Regiolis B 84500 qui des- Un drakkar façon bande dessinée, voici donc le nouveau logo normand
servent la ligne Paris-Montparnasse/Granville. ◼ appliqué en grande taille, sur les flancs de cabine des B 84500.

6 - ferrovissime
 © F. DIDELOT
À la fin de la pointe estivale 2018, les TGV-SE assurent leurs dernières rotations Paris/Nice.

Clap de fin pour

les TGV PSE sur le Sud-Est
Après 37 ans de présence, les pionnières, les célèbres rames TGV
PSE, quittent la ligne qui leur a donné ce nom.
Texte : Frédéric Didelot

L a fin se rapproche pour les rames TGV

Sud-Est. Livrées entre 1978 et 1985 en
109 exemplaires (plus 3,5 rames postales)
avec leur célèbre livrée orange, elles ont
bénéficié d’une première modernisation entre
1994 et 2001 pour se mettre au niveau des TGV
Duplex (vitesse portée à 300 km/h, nouveaux
mas, ainsi que pour des renforts saisonniers vers
les vallées alpines et le littoral méditerranéen.
La refonte horaire à venir sur l’axe Sud-Est,
liée à la mise en service du contournement
Nîmes-Montpellier, ainsi que la poursuite des
livraisons des TGV EuroDuplex va mettre fin à
leur présence sur la LGV Sud-Est dès le change-
Construits dans les
années 1970/80, les
TGV-SE reçoivent un
petit compartiment-
fourgon en bout de
rame qui les distingue
des autres TGV. Ici,
en septembre 2018 à
aménagements intérieurs, livrée Atlantique). ment de service du 9 décembre 2018. ◼ Paris-Lyon.
Pour leurs 30 ans, un tiers du parc bénéficie
d’une seconde rénovation (nouveaux sièges,
livrée Carmillon), tandis que les autres rames
sont progressivement radiées entre 2012 et 2017.
Le parc résiduel est partagé entre l’axe Nord
(19 rames, ex-Rénov2: 1, 3, 4, 6, 7, 8, 9, 12, 13, 14,
17, 19, 23, 31, 39, 40, 41, 42, 60) et l’axe Sud-Est
(15 rames, ex-Rénov1 : 2, 5, 11, 15, 16, 18, 20, 21,
24, 25, 27, 44, 45, 64, 74). Sur cette zone, elles
n’ont été régulièrement utilisées ces dernières
années que sur quelques allers-retours Paris/
© J.H. LAVIE

Dijon/Besançon ou Chalon-sur-Saône, Paris

Annecy, Paris/Grenoble et Paris/Avignon/Mira-

ferrovissime - 7
Histoire au présent

La BB 7437, assurant un train

Sibelin/Fos, passe à Sarras
dans la Vallée du Rhône.

© J.P. FRANCON

Une tranche de BB 7200

condamnée à disparaître
Les BB 7411 à 7440, dédiées au fret, sont condamnées à disparaître en raison
de la baisse de trafic entre Dijon et Modane. À photographier d’urgence…
Texte : Frédéric Didelot

P armi les 240 BB 7200 livrées entre 1976 et

1985, 68 unités sont équipées d’origine
pour la circulation en UM avec un rapport
de réduction de 2,807 limitant leur vi-
tesse à 100 km/h. Livrées en 1981-82 et affectées
à Villeneuve, les BB 7343 à 7380 permettent
d’augmenter les tonnages remorqués sur l’axe
affectées aux axes Gevrey/Sibelin/Miramas et
Gevrey/Modane, outre des pousses sur la Mau-
rienne. Las, la baisse du transit franco-italien
et la validation des BB 27000 sur cet axe, où
elles égalent leurs performances, ont conduit
à débuter leur radiation en 2015. ◼
Villeneuve/Miramas par Limoges ou Lyon. Les
bons résultats obtenus conduisent à commander
les BB 7411 à 7440 qui apparaissent en 1984-85.
Ces 30 locomotives bénéficient d’évolutions
▶ À PHOTOGRAPHIER ◀
Parmi les 30 machines,
techniques, avec le freinage par récupération,
seules sept disposent
la commande des circuits de traction par micro-
encore de leurs plaques
processeur et de nouveaux hacheurs de courant.
d’immatriculation
Basées à Chambéry, elles sont spécialisées au
trafic France/Italie entre Dijon et Modane, où d’origine (7421, 23,
elles peuvent monter 1 600 t sur les rampes 25, 29, 35, 39, 40).
de la Maurienne, soit 200 t de plus que deux
couplages de BB 8100 UM ou 400 t de plus que
© F. DURIVAULT

La BB 7427 est en
deux CC 6500 sur régime PV. En 2004, ces deux escale à Villeneuve
sous-séries sont mutées à Dijon et désormais en décembre 2010.

8 - ferrovissime
Londres King’s Cross
le 18 août 2018, l’ex-CC
92033 SNCF vient d’assurer
le Caledonian Sleeper en
provenance d’Edimbourg,

© D. DELATTRE
Glasgow et Aberdeen.

Que deviennent les CC 92000 ?

Londres King’s Cross, 18 août
2018. Le Caledonian Sleeper
entre en gare. En tête, une
locomotive qui a appartenu
au parc SNCF. Explications…
Texte : Didier Delattre et Jehan-Hubert Lavie

L orsque de l’ouverture du tunnel sous la

Manche, il est prévu de confier la traction

des trains de fret à 46 locomotives CC 92000
que l’anglais Brush et le suisse ABB livrent
en 1994-96. Ces grosses CC sont imposantes, bien
que plus courtes que nos 40100 (21,340 m contre
22,030 m). C’est sans doute leur gabarit réduit bri-
tannique qui leur procure cette longue silhouette!
D’ailleurs, sur ces engins bicourant 750V/25000V,
tout est so british, du pavillon arrondi, cachant
les pantos lorsqu’ils sont baissés aux 12 frotteurs
latéraux captant le courant sur le troisième rail
latéral en passant par le nez jaune imposé aux
trains outre-Manche.
Parmi ces 46 locomotives, 37 sont anglaises
tandis que les neuf autres appartiennent à la
SNCF. Elles sont immatriculées CC 92006, 10,
14, 18, 23, 28, 33, 38, 43 et portent le logo dit « à
casquette ». Mais dès 2011, ces neuf machines
sont revendues à l’opérateur Europorte. Ce n’est
là que le début d’une cascade de transactions qui
vont toucher bon nombre des 46 unités.
© D. DELATTRE
En 1995, la même
machine CC 92033
Si bien qu’aujourd’hui, les ex-CC 92010, 14, stationne, en livrée
18, 23, 33 et 38 de la SNCF, repeintes dans une SNCF, au dépôt de
sobre et élégante livrée bleu nuit, sont passées Calais-Frethun. Elle
sous le pavillon de First ScotRail et devenues porte le nom de
des Class 92 (mêmes numéros). Elles sont enga- Berlioz.
gées sur des liaisons voyageurs entre Londres et
des villes d’Ecosse en empruntant l’itinéraire
occidental de la West Coast Main Line. Elles
assurent le Caledonian Sleeper, normalement
réceptionné à Londres Euston, mais, suite à des
travaux les week-ends, ce train est détourné sur
King’s Cross en fin de semaine.
NeufautresmachinessontpartiesenRoumanie
pour DB Cargo Romania. Et quatre locomotives
circulent en Bulgarie pour DB Cargo Bulgaria.
Une épopée européenne peu banale ! ◼

ferrovissime - 9
Histoire au présent

Esthétique étonnante mais confort assuré dans les automotrices AM 96 SNCB qui viendront à Maubeuge.

Résurrection de la relation
Paris-Nord/Namur Texte : Régis Chessum / Photos : François Durivault

Thalys a abandonné il y a trois

ans la relation Paris / Namur
via Liège. Belle occasion pour le
train classique d’y revenir !

A bandonnéeparThalysen2015,larelation
Paris-Nord/Namur via Liège (dorsale wal-
lonne) renaîtra en décembre prochain
sous la forme classique, par Maubeuge,
sans réservation obligatoire des places.
Elle se fera d’abord avec correspondance des
rames Corail Intercités SNCF à Maubeuge, à raison Les locomotives série 18 SNCB sont en cours d’homologation
pour venir jusqu’à Paris.
de deux AR par jour en automoteur AM 96 belge.
Deux AR en correspondance à Aulnoye-Aymeries
pour Mons sont aussi prévus. Dans une seconde
étape dont l’échéance n’est pas communiquée
pour l’instant, la relation entre Paris et Namur
devrait être assurée sans rupture de charge et
intégralement en matériel moteur et remorqué
belge (locomotive série 18 en cours d’homolo-
gation sur le réseau ferré national français et
voitures récentes). ◼
Les voitures Namur/Paris seron
de type moderne SNCB

10 - ferrovissime
Médiathèque
Texte : Aurélien Prévot
Des trains
pas comme
les autres
Par Philippe Gougler. 208 pages
(format 19 x 24 cm) en couleurs sous
couverture souple illustrée en couleurs
aux éditions Albin Michel. En vente
en librairie pour 29,90 euros.
Qui ne connaît pas l’émission télévisée
Des trains pas comme les autres ? Ce livre,
écrit par Philippe Gougler présente un
certain nombre de liaisons ferroviaires hors
normes dans le monde. Il y a bien sûr la
Micheline de Madagascar, le Buscarril de
Bolivie (engin étonnant construit à partir
d’un autobus Mercedes), le train des nuages
en Argentine, le métro de Chicago, etc.
Un tour du monde en treize étapes. Suivant
les cas, le train est le sujet principal
du chapitre (comme à Madagascar) ou
le prétexte à une découverte d’un lieu
(comme pour l’Argentine, où il n’y a
que trois photos du train!). Un ouvrage
sympathique destiné au grand public.
Une belle invitation au voyage.
Revue d’Histoire des Chemins
de fer n°48-49
Vingt années sous la Manche, et au-
delà ?, publiée par Rails et Histoire
(www.ahicf.com), 520 pages (format
24 x 16) illustrées en couleurs,
En vente auprès de l’AHICF.
Ce nouvel opus de la Revue
d’Histoire des Chemins de fer publie
les actes de quatre rencontres
internationales de 2015-2016
autour de la liaison ferroviaire
transmanche. Au fil des 520 pages
sont abordés le financement des
projets hors normes comme le tunnel
sous la Manche, l’impact du tunnel
sur les flux de transport nationaux
et régionaux, la transformation
de Lille en carrefour européen, les apports belges dans le trafic
ferroviaire du tunnel, etc… Un ouvrage scientifique qui fait le point sur la
construction du tunnel certes, mais surtout sur ses enseignements et ses
conséquences. Attention, beaucoup d’articles sont rédigés en anglais…
Quarante ans de tramways
en France
Collectif. 508 pages (format 17 x
24 cm) en couleurs sous couverture
souple illustrée aux éditions Libel. En
vente en librairie pour 30 euros.
Cet ouvrage regroupe les études et les
témoignages des intervenants au séminaire
«Réinventer le tramway ? Quarante années
de transports en commun en site propre et
transports guidés en France: controverses
et réalisations» coorganisé par Rail et
Histoire, le CNRS, le GETUM et l’association
P2M. À la lecture de cet ouvrage, on saisit
toute l’originalité du tramway à la française,
imaginé par Alain Carignon à Grenoble dans les années 1980. Depuis,
dans l’hexagone, l’arrivée du tramway est toujours l’occasion de vastes
opérations de rénovations urbaines de grande ampleur de façade à façade.
Des études de cas (Tours, Strasbourg, Clermont-Ferrand…) complètent
la réflexion, tout comme des comparaisons avec des villes étrangères.
Un ouvrage scientifique pour amateur averti de transports urbains.
ferrovissime - 11
Trésors d’archives

Une grosse série

armistice 1918
En 1918, le type G8.1 Prusse est livré
par l’Allemagne à tous les grands
réseaux français. La SNCF les regroupe
sur les régions Est et Nord où elles
portent le matricule 040 D. Ici, au
dépôt de Béthune en mai 1966, la
2-040 D 155 est, avec les 040 D
186 et 323, l’une des trois dernières
affectées dans cet établissement.

12 - ferrovissime
 LES SERVICES
DES LOCOMOTIVES
ARMISTICE 1918

Que sont devenues à la SNCF les locomotives que

l’Allemagne avait remises à la France en 1918, au titre des
dommages de guerre ? “Hercule Prévot” mène l’enquête.
© DR / COLL. D. WALIGORA

Texte : Aurélien Prévot

ferrovissime - 13
Trésors d’archives
Au début des années 1950,
elle a encore fière allure,
la 2-230 C 57 du dépôt de
Beauvais avec sa livrée
vert et noir filets rouges,
son tender et sa porte de
boîte à fumée Nord!

Locomotives Prusse
T14 livrées en 1918 à
l’Est (SNCF 1-141 TA
656 à 682) et à l’Etat
(SNCF 3-141 TA 901 à
923 puis 1-141 TA 301
à 323).
© DR / COLL. J. FLORIN

A
près la victoire française lors de la de se séparer de certaines séries de machines Ar-
Première Guerre mondiale, l’Allemagne mistice en les cédant à d’autres compagnies ou en
est contrainte de verser des réparations les ferraillant. C’est le cas par exemple du réseau
financières et matérielles. Des milliers de l’État. En 1938, sur les 25 séries de machines
de locomotives, voitures et wagons sont différentes récupérées après l’Armistice, il n’en
donc livrés aux autorités françaises pour re- reste plus que douze (y compris celles qui sont
constituer les parcs des grandes compagnies, rapidement radiées comme les P8, immatriculées
décimés par un conflit de quatre ans. Dans le 3-230 E 943 à 959, toutes rayées des inventaires
même temps, le réseau de l’Elsass-Lothringen durant l’année 1940 sauf la 3-230 E 943 mutée
(EL) redevient français. L’Allemagne abandonne à l’Est). Ce sont les petites séries qui, en géné-
alors 2 017 km de voies ferrées. ral, disparaissent en premier en raison de coûts
Le matériel roulant et le personnel sont égale- d’entretien très élevés (pièces peu nombreuses
ment transférés: c’est la naissance, en 1920, du et donc onéreuses à refaire).
septième grand réseau français, l’Alsace-Lorraine La Compagnie du Nord se distingue cependant
(AL). Lui aussi récupère quelques locomotives en en faisant le choix inverse. En effet, elle conserve
provenance directe d’Allemagne, parfois du même toutesseslocomotivesArmistice, qui formentilest
type que celles acquises par l’EL précédemment. vrai un parc homogène principalement composé
de grosses séries venues de Prusse. L’ensemble
Des choix différents est donc immatriculé à la SNCF en 1938. Cette
Les locomotives fournies par l’Allemagne au originalité s’explique sans doute par les lourdes
titre des réparations sont cependant de types pertes subies par le réseau en 1918 (c’est la com-
très variés: près de 70 différents ! Certaines sont pagnie qui a perdu le plus de matériel roulant).
livrées à un seul et unique exemplaire (comme
la 2-040 B 75 par exemple), mais d’autres le sont De lourdes pertes durant la seconde
en grand nombre comme les G8.1 ou les P8. guerre mondiale
Une fois la paix revenue et les blessures de la Sans surprise, les effectifs de locomotives
guerre pansées, beaucoup de réseaux décident Armistice fondent durant le second conflit mon-
dial, l’occupant spoliant un
certain nombre de machines
Les chemins de fer français dans pour satisfaire les besoins
la Première Guerre mondiale de l’armée allemande. Les
locomotives Armistice
Historien, Aurélien Prévot est l’auteur d’un livre édité par présentent en effet l’im-
LR Presse qui nous fait revivre l’histoire mouvementée du chemin mense avantage d’être bien
de fer français et son rôle décisif durant la guerre de 14-18. connues Outre-Rhin et donc
- «Cette guerre est une guerre de chemins de fer» écrit le d’être facilement conduites
Maréchal Joffre à propos de la Première Guerre mondiale. À travers par des équipes germaniques. Garée en 1938, cette
19 chapitres thématiques contenant plus de 600 illustrations, Beaucoup de machines sont 230-914 bavaroise
est unique en se
cet ouvrage dresse un bilan transversal de l’histoire des soit détruites, soit con- distinguant par ses
chemins de fer pendant la guerre et sous tous ses aspects. sidérées comme des prises roues de 1,64 m de la
Deuxième édition du livre disponible, réf. CFF1418 de guerre en Europe de l’Est série 230-915 à 930
https://trains.lrpresse.com après la défaite nazie. ▶▶▶ à roues de 1,87 m.

14 - ferrovissime
 © J.H. RENAUD / COLL. R. THÉVENIN
© DR

ferrovissime - 15
Trésors d’archives

© DR
Cette locomotive est issue d’un lot livré par l’Etat Saxon au P.O comprenant trente 050 à tender séparé de trois types différents, se subdivisant
en plusieurs sous-séries. La photo montre le type XI-H à 2 cylindres, simple expansion et surchauffe, devenu 4-050 A 532 à 534 à la SNCF.
Le Sud-Ouest les cède à la région Ouest dès octobre 1938, où elles sont saisies par l’occupant ou radiées avant 1941.

Un parc hétérogène : l’exemple des 230 saxonnes

D es modèles réduits très réussis ont popularisé en France les
230 type XII – H2 des chemins de fer saxons, machines à
simple expansion et surchauffe. L’Armistice en attribue 25 unités
au réseau de l’Etat, où elles deviennent 230-960 à 984. Leur
silhouette est très particulière avec leur tablier très surélevé et
incliné vers l’avant, tout comme leurs petites roues motrices (pour
des 230!) de 1,58 m seulement. La première photo ci-dessous
montre l’une de ces machine typiques, devenues 3-230 E 971.
Or, c’est là un exemple caractéristique de l’hétérogénéité
du parc cédé à l’Armistice de 1918: seules, les 20 dernières
machines de la série, les 3-230 E 965 à 984 (construites
de 1917 à 1918) répondent à ce descriptif.
Les 3-230 E 960 à 963 sont, pour leur part,
construites en 1910/11 et présentent un aspect
© DR
différent, plus classique, avec un tablier bas.
Quant à la 3-230 E 964, construite en 1916 (seconde photo),
elle marie la chaudière et l’abri des 230 E 965 à 984, avec
le tablier bas et certains détails des 230 E 960 à 963.
En 1938, dix machines – les 230 E 961 à 963, 968 à
970, 972, 974, 979 et 983 – sont déjà garées bon état.
On note que certaines ont tout juste 20 ans d’âge!
En 1942, les unités utilisables sont emmenées en Allemagne.
Retenues en zone soviétique en 1945, elles sont incorporées à la DR
(Allemagne de l’Est) en 1948 où elles mènent une longue carrière.
La SNCF avait prévu de muter sur la Région Est la machine
de 1916 et celles de 1917-18, où elles auraient formé la série
1-230 E 364 à 384 – opération annulée par les évènements.
Jehan-Hubert Lavie

© DR

16 - ferrovissime
© DR
Les bombardements alliés de 1944 entraînent la
destruction de bon nombre de machines. Par exemple,
les 3-231 A 997 et 998 (ex-Classe C du Wurtemberg)
au Mans le 1er mai 1944.
Du type Prusse G12.1, cette Decapod
fait partie de la série 1-150 B 546 à
562 comprenant cinq locomotives
livrées par la Prusse à l’Est et 12 unités
commandées directement par l’AL.
▶▶▶ Ainsi l’Ouest, après la radiation le 1er mai
1940 de dix unités de 3-230 E (Classe XII H2 de
Saxe, 3-230 E 960 à 984), perd ses quinze 3-230
E restantes, ou la totalité de ses 3-050 TA (Classe
XI HT de Saxe). Au Sud-Ouest ce sont les 4-040 G
(G7.1 de Prusse) qui sont largement impactées:
sur les 29 machines en service au début de la
guerre, seules six circulent encore après 1945.
Elles sont toutes radiées avant la fin 1950.
Mais ce sont surtout les régions Est et Nord
de la SNCF qui sont le plus touchées par les
ponctions de l’occupant. Nombre de G7.2 (1-040 B,
2-040 B), G8.1 (1-040 D, 2-040 D) ou P8 (1-230 F,
2-230 C) construites à l’origine pour la Prusse
ne reviennent pas en France, une fois le conflit
achevé. Certaines séries disparaissent totalement
des inventaires comme les 1-150 D (classe XIII H
de Saxe) ou les 2-130 A (P6 de Prusse). Des dix
2-230 E (S10.2 de Prusse), seule la 2-230 E 4 finit
sa carrière en France, à Amiens, en 1950.
CE SONT LES PETITES SÉRIES QUI, EN GÉNÉRAL, DISPARAISSENT
EN PREMIER EN RAISON DE COÛTS D’ENTRETIEN TRÈS ÉLEVÉS
© DR / COLL. J. FLORIN
Les locomotives-tenders
ne sont pas épargnées
Les ponctions allemandes concernent égale-
ment le parc de machines-tender. Ainsi, toutes les
5-130 TB (T11 de Prusse) disparaissent en Europe
de l’Est. Sur les douze 2-130 TC (T12 de Prusse),
seules cinq finissent leur carrière en France, les
dernières étant radiées en 1951 à Béthune, Fives
et Lens. Sur les seize 2-130 TF (T13 de Prusse),
six ne reviennent jamais. Sur les dix restantes,
la dernière est radiée le 30 avril 1960 à Calais.
Enfin, la moitié des 2-050 TB (T16 et T16.1 de
Prusse) disparaît durant le conflit. L’autre moitié
finit sa carrière avant 1955, avec la 2-050 TB 17
à Hazebrouck.
Les bombardements alliés de 1944 visant de
nombreux dépôts entraînent la destruction de
bon nombre de machines et donc leur radiation,
comme les 3-231 A 997 et 998 (Classe C du Wurtem-
berg) au Mans le 1er mai 1944 par exemple. ▶▶▶
ferrovissime - 17
Trésors d’archives

© J.H. RENAUD / COLL. R. THÉVENIN

Locomotives type Prusse T13 dont 19 unités sont cédées au Nord en 1918. Trois sont vendues aux Mines d’Anzin en 1935 (futures
HBNPC D1 à 3). Il reste 16 machines en 1938, devenues 2-040 TF 1 à 16. Sur la photo, la 2-040 TF 13 est la dernière radiée, en 1964.

© DR

Machines bien connues des modélistes pratiquant le H0 et le N, ces XIV-HT ont été livrées par la Saxe à l’Etat. En 1938, la série, déjà incomplète,
devient 3-131 TB entre 916 et 921. À l’inventaire de 1948, il ne reste plus que les 131 TB 916 et 917, présence théorique car retenues en Allemagne.

18 - ferrovissime
© DR
Les machines Prusse T9-3 ont existé au parc de l’AL (SNCF 1-130 TA), du Nord (2-130 TB), du P.O (4-130 TB) et du PLM (5-130 TA). La photo montre
la 2-130 TB 502 du dépôt de Compiègne, mutée au Nord en 1945 par la région Sud-Est où elle portait précédemment le numéro 5-130 TA 9.
▶▶▶ Des locomotives reviennent d’Allemagne,
mais en piteux état. Les frais à engager sont tels
que certaines ne sont jamais rallumées et sont
donc radiées dans les années qui suivent la fin
de la guerre, comme les 3-231 A (Classe S3/6 de
Bavière), radiées entre 1945 et 1949.
La guerre 1939/45 octroie un sursis
à certaines séries
À l’inverse, la guerre octroie un sursis à cer-
taines séries en raison du manque de matériel
moteur. C’est par exemple le cas de la 1-150 A 15
réformée le 22 mars 1945 : 25 ans de service, c’est
à la fois peu pour une locomotive très appréciée
en tête des trains lourds du bassin de Briey, mais
aussi beaucoup pour un exemplaire unique !
C’est également le cas des 1-040 B de con-
ception ancienne. Beaucoup sont radiées avant-
guerre, mais les dernières le sont dans l’immédiat
après-guerre, après avoir beaucoup circulé du-
rant le conflit. Les 1-050 TA (ex T15 de Prusse),
spécialisées dans les manœuvres de triage, sont
également toutes radiées en 1945/46.
De son côté, l’occupant fait également remettre
en état des machines radiées peu auparavant
par la SNCF, comme les 3-140 D entre 908 et 952
(Classe G4/5 de Bavière). De retour en France
en très mauvais état, elles sont transférées à la
Région Est (1-140 D entre 308 et 352) mais ne
reprennent jamais du service et sont radiées à
Réding en 1949.
La SNCF rationalise le parc
Dès sa création, la SNCF poursuit la politique
de rationalisation du parc des vapeurs Armi-
stice entreprise par les anciennes compagnies
en regroupant les séries par région. Ainsi, le 28
février 1939, quatre S10 ex AL sont mutées au
Sud-Est sous le numéro 5-230 D 1 à 4 où elles sont
utilisées en tête de trains d’essais jusqu’en 1951.
La SNCF vend également certaines séries à des
compagnies étrangères. Toutes les 2-040 C sont
ainsi vendues au Liban en 1939. Enfin, elle radie
certains «oiseaux rares » comme la 1-050 A 5 ▶▶▶
Pour résumer les origines et les époques
- Au cours de l’époque II (1920/1950), les locomotives de l’Armistice
1918 sont réparties sur tout le territoire. Les machines venues de Prusse
y règnent sans grand partage, sauf à l’Etat puis à la SNCF région Ouest,
où les locomotives proviennent des réseaux de Bade, Bavière, Prusse,
Saxe et Wurtemberg. À l’exception des prussiennes, la quasi-totalité de
ces locomotives, disparues entre 1941 et 1945, n’a côtoyé, plus tard, ni
les machines à vapeur unifiées, ni les 141 R, ni les Prises de guerre 1945.
- Au cours de l’époque III (1945/1970) les locomotives de l’Armistice 1918
sont regroupées à l’Est et au Nord et elles sont d’origine prussienne.
Jehan-Hubert Lavie
ferrovissime - 19
Trésors d’archives
Locomotives type G12 Prusse devenues 1-150 C à la SNCF. Si l’AL a acquis
directement 118 machines de ce type, 9 ont été reçues par la Compagnie
de l’Est au titre de l’Armistice de 1918.
La saga des 131 T badoises
Le réseau français de l’Etat avait reçu aussi des machines
des C.F. de l’Etat de Bade. Par exemple, ces petites Prairie
VIc que la SNCF réimmatricule 3-131 TB 901 à 915. Les
machines 901, 902, 906 et 915 avaient reçu la réversibilité
pour assurer des navettes Paris-Montparnasse/Clamart.
L’électrification les conduit à la réforme dès 1937/38, suivies
▶▶▶ le 1er mars 1939 ou des séries (ou sous-séries)
entières comme certaines des 3-230 E le 1 mai 1940.
er
Cette politique s’accélère après la Libération.
En 1945, les G10 du Sud-Est (5-050 B) sont mutées
à l’Est pour compléter le parc des 1-050 B tout
comme les 4-230 H (P8) du Sud-Ouest qui devi-
ennent alors théoriquement (elles sont encore
toutes en Allemagne) des 1-230 F. Les G8.1 sont
regroupées sur l’Est et le Nord en 1945.
Des regroupements par type
dans une région
Les 3-040 B et les 5-040 E deviennent alors des
2-040 D tandis que les 4-040 K deviennent des
1-040 D. On retrouve la même politique pour les
20 - ferrovissime
© DR / COLL. J. FLORIN
© DR / COLL. J. FLORIN
Locomotives type Prusse G10. 93 unités venues d’outre-Rhin ont été
partagées entre l’AL, le P.O et le PLM. En 1938, elles deviennent 1-050 B
entre 401 et 455 (ex-AL), 4-050 D 526 et 531 puis en 1948 1-050 B 126 et
131 (ex-P.O), 5-050 B 1 à 49 puis en 1948 1-050 B 501 à 549 (ex-PLM).
par cinq autres unités début 1941. Il reste 6 machines (904,
907, 910 à 913) en juillet 1941, expédiées à la DR et retenues
en Allemagne de l’Est après-guerre. Finalement, seule la
3-131 TB 909, partiellement découpée, reste à Batignolles
pour permettre aux élèves d’étudier les circuits de vapeur.
Jehan-Hubert Lavie
© DR
locomotives-tenders. Ainsi, les T14 de Prusse sont
toutes regroupées sur la région Est d’où la mutation
des 3-141 TA en 1945 qui deviennent des 1-141 TA.
Cependant cette rationalisation n’est pas com-
plète. En 1945, la SNCF décide de regrouper une
partie des T9.3 prussiennes sur le Nord. Les 5-130 TA
deviennent alors des 2-130 TB. Mais dans le même
temps, elle laisse au Sud-Ouest les trois 4-130 TB…
Par la suite, on assiste à de nouvelles mutations
entre les régions Est et Nord, celles qui ont le
plus de locomotives Armistice. Le Nord accueille
les 1-040 D (G8.1) ayant encore un fort potentiel
kilométrique et dans le même temps mute à
l’Est treize P8 en 1950. Ces 2-230 C deviennent
alors des 1-230 F.
© JJ BUCKLEY / COLL. D. WALIGORA
SANS SURPRISE, LES EFFECTIFS DE LOCOMOTIVES ARMISTICE
FONDENT DURANT LE SECOND CONFLIT MONDIAL
De nombreuses radiations
dans les années 1950
Ledéveloppementdelatractionélectriquedans
lesrégionsEstetNorddanslesannées1950entraîne
de très nombreuses radiations de locomotives à
vapeur désormais inutiles. Ainsi, les cinq 1-230 G
(S10.1dePrusse)Armisticequicomplétaientpourt-
ant une série de 17 locomotives construites pour
l’AL entre 1912 et 1916 terminent leur carrière
lors de l’électrification de Thionville en mai 1956.
De même, les T16 et T16.1 disparaissent dans
les années 1950, que ce soit au Nord (2-050 TB,
chassées par les nouvelles 050 TQ) ou au Sud-Est
(5-050 TA). Les T14 (1-141 TA) spécialisées dans le
trafic marchandises (après un passage à la ban-
lieue parisienne pour certaines en provenance de
l’Ouest) sont aussi radiées à la fin des années 1950.
Des vétérans au cœur des Sixties
Finalement, peu de séries circulent encore dans
les années 1960. Sans surprise, ce sont des locomo-
tives faciles d’emploi et présentes en grand nombre
en France. Les dernières P8 sont radiées au Nord ↑
(2-230C)en1962etàl’Est(1-230F)en1966.Ducôté En juillet 1964, la
des G8.1, les 1-040D disparaissent des inventaires 2-040 D 20 est l’une
en 1965 et les dernières 2-040 D en 1968. Cette des 30 machines de
ce type affectées à
longévité exceptionnelle, en particulier pour des Lille-Délivrance. Notez
locomotives de conception étrangère, s’explique l’excellent état et la
aussi par les qualités de ces machines. livrée noire impeccable
C’estainsiaux2-040DdeLille,pourtantconçues de cette locomotive.
pour les marchandises, que l’on confie, jusqu’en À l’époque, elle
1965, la reprise des trains de voyageurs à desti- remorque notamment,
de Lille à Tourcoing, les
nation de Tourcoing remorqués depuis Paris en
prestigieuses rames inox
traction électrique, dont de prestigieux rapides venues de Paris!
en rames de voitures DEV inox. Plus étonnant, cer-
taines machines uniques car rescapées de séries
plus importantes sont encore aux effectifs comme
une 2-040 TF (T13 de Prusse) radiée au Bourget en
janvier 1964 quand toutes ses sœurs ont été rayées
des inventaires avant le milieu de l’année 1960.
Les locomotives Armistice ont donc rendu d’im-
portants services en ayant d’abord aidé au relèvement
du pays après 1918 avant, pour certaines, de partici-
per à la reconstruction de la France après 1945. ◼
ferrovissime - 21
Comment ça marche ?

© J.H. LAVIE
Sur TER Auvergne-Rhône-Alpes, les trains pour Saint-Gervais circulent à des minutes de départ et d’arrivée dans chaque gare qui sont toujours
les mêmes. Et, sur cette voie unique, ils se croisent systématiquement à la minute 30 toutes les heures en gare de Marignier, ici en photo.

La structuration du graphique
Comme chaque année, un nouveau service annuel va (cisaillement à une bifurcation, es-
pacement en ligne, croisement sur
débuter le deuxième dimanche de décembre. Mais le voie unique…), des concertations
sont organisées pour trouver une
travail de conception a commencé 3 ans plus tôt! solution acceptable par chacun des
demandeurs.
Texte : Frédéric Didelot
Des trames répétitives
Cette première étape porte sur

T
rois ans avant un nouveau ser-
vice, les demandeurs de sillons
doivent définir les évolutions des
horaires qu’ils souhaitent. Après
les avoir étudiées en interne, le
cas échéant avec leur autorité organi-
satrice (la Région, l’Etat), ils doivent
en effet transmettre plus de 25 mois à
l’avance leurs expressions de besoin
pour chaque mission souhaitée : ori-
gine/destination, politique d’arrêts,
matériel de référence, souhaits de
correspondance et de positionnement
horaire, cadence entre deux trains
d’une même mission. Les horairistes
de SNCF-Réseau ont alors six mois
pour apporter une réponse, en res-
pectant les règles de la construction
horaire (marche de base, marge de
régularité, normes de tracé…) et en
tenant compte des autres demandes.
Lorsque des conflits apparaissent
une plage de 2 heures d’une jour-
née-type d’une année donnée : c’est
la trame 2 heures. Cette structure
horaire, qui servira ensuite à affi-
ner progressivement les horaires de
chaque train pour chaque journée de
l’année, repose sur quatre principes
fondamentaux.
Le premier est de simplifier le
nombre de missions sur une origine/
destination donnée, limité à trois : la

22 - ferrovissime
© SNCF RÉSEAU

Structuration graphique obtenue par ordinateur.

LES MINUTES DE DÉPART ET D’ARRIVÉE DANS CHAQUE GARE

SONT TOUJOURS LES MÊMES POUR UNE MÊME MISSION
mission intervilles (qui ne dessert que de déplacement. Un second TGV Paris/ base du même exemple, le TGV Paris/
les principales gares, voire aucune Lyon positionné avec une cadence Lyon qui arrive à Lyon-Part Dieu à la
gare intermédiaire), la mission accé- de 30 mn partira à la minute 29 de minute 56 donne correspondance à
lérée (qui dessert une ou plusieurs Paris-Gare de Lyon et arrivera à la des TER qui partent à la minute 12
gares supplémentaires) et la mission minute 26 à Lyon-Part-Dieu. pour Ambérieu, à la minute 16 pour
périurbaine (qui dessert toutes les Grenoble et à la minute 20 pour Va-
gares). Chaque train d’une même Des dessertes symétriques lence. Par symétrie, les trains venant
mission dessert toujours les mêmes Le troisième principe est la symé- de Valence arrivent à la minute 40,
gares, quel que soit le sens. trie autour de la minute 00 pour les ceux de Grenoble à la minute 44, ceux
Le deuxième principe repose sur trains des deux sens de circulation. d’Ambérieu à la minute 48, et donnent
la répétitivité. Les minutes de départ Sur la base de notre exemple, pour un correspondance au TGV Lyon/Paris
et d’arrivée dans chaque gare sont TGV Lyon/Paris, le départ s’effectue à qui part à la minute 04. Le temps
toujours les mêmes pour une même la minute 04 (ou 34) de Lyon-Part-Dieu de correspondance est toujours le
mission. Par exemple, pour un TGV et l’arrivée s’effectue à la minute 01 même, quel que soit le sens.
Paris/Lyon, le départ s’effectue à la (ou 31) à Paris-Gare de Lyon. Le recours Quatrième principe : les trains
minute 59 de Paris-Gare de Lyon et à cette symétrie permet d’optimiser rapides, sans ou avec peu d’arrêts,
l’arrivée s’effectue à la minute 56 l’infrastructure et l’exploitation (les sont positionnés avant ceux qui en
à Lyon-Part-Dieu. L’intervalle entre trains se croisent toujours à la même ont plus, donc plus lents. Cela permet
deux trains d’une même mission doit minute et au même point, que ce de mieux utiliser la capacité de la
être régulier : 15, 20, 30 mn, 1 heure soit en ligne ou en gare), mais aussi ligne tout en évitant qu’un train lent
ou 2 heures, en fonction des besoins les correspondances. Toujours sur la ralentisse un train rapide. Le sillon
accéléré Lyon/Aix-les-Bains sans arrêt
entre Lyon et Ambérieu qui part à
la minute 08 n’est pas gêné par le
▶ DESCONTRAINTESPOURFACILITERLACONSTRUCTIONHORAIRE ◀ sillon périurbain qui part à la minute
Ces règles peuvent paraître contraignantes: l’organisation des horaires sur 12. Par symétrie, le périurbain Am-
les lignes adjacentes est tributaire de ceux de la ligne principale, et toute bérieu/Lyon arrive à la minute 48 à
Lyon, en ayant desservi les six gares
modification survenant sur une mission a des répercussions sur une autre…
intermédiaires, mais sans gêner le
Cependant, elles permettent de faciliter les étapes suivantes de la construction
sillon accéléré sans arrêt qui arrive
horaire, qui seront présentées dans les prochains numéros de Ferrovissime.
à Lyon à la minute 52. ◼

ferrovissime - 23
 Stars du rail

Entre Latour-de-Carol
et Ax-les-Thermes,
le train 3418 du
27 décembre 1968
traverse un paysage
enneigé.
© T. PORCHER

DEMAIN, JE VAIS
CONDUIRE
LA BB 4123
CHASSE-NEIGE!
Au chemin de fer, certains roulements de conducteurs
vont jusqu’à prendre en compte les caprices de la
météo, comme nous le raconte Raymond Cassaigne.
Texte : Raymond Cassaigne

E
n 1976, je suis jeune
conducteur, affecté au
dépôt de Toulouse. Le
27 mars, j’arrive ainsi à
Latour-de-Carol en tête
de l’Express 4873. Mon
roulement y prévoit un RHR (Repos
Hors Résidence) et un retour sur Tou-
louse le lendemain matin. Mais cette
dernière journée de service comporte
une variante : s'il ne neige pas, j’assure
l’Omnibus 7824 jusqu’à Toulouse; s'il
neige, je descends avec le chasse-neige
jusqu’à Ax-les-Thermes, d’où je fais
le 7824.
Comme le temps est radieux en
Cerdagne en ce tout début de prin-
temps, je me suis assis sur un banc pour
prendre le soleil. Daniel, un collègue
de Toulouse, me rejoint. Il est détaché
ici pour une «décade», c’est-à-dire pour
la période de travail entre deux repos
périodiques: il assure la réserve chasse-
neige à Latour. Son travail consiste à
le maintenir en état de marche : tous
les jours, il fait fonctionner les ventila-
teurs pour maintenir la charge batterie
et il effectue diverses vérifications. Il
assure aussi, si nécessaire, des sorties
pendant la journée.
La neige est annoncée
En cette fin d'après-midi, le chef
de service se dirige vers nous et an-
nonce « demain, le chasse-neige est
commandé ! ». En effet, le bulletin
météo qui est arrivé au PC (Poste de
Commandement) de Toulouse prévoit
des chutes de neige dans la nuit. Les
montagnards le savent : ici, le temps
change rapidement ! Outre nous deux,
sont commandés les chefs de service
de Latour-de-Carol, de L'Hospitalet
(pour l'ouverture des portes du tunnel),
d'Ax-les-Thermes et l'agent Equipe-
ment qui va m'accompagner. Daniel

24 - ferrovissime

doit assurer jusqu’à Ax le 7824 (dont
je vais reprendre ensuite la conduite
jusqu’à Toulouse) et il va remonter le
chasse-neige à Latour à l’espacement
du 4871, l’express de nuit venant de
Paris-Austerlitz. Donc pour moi, de-
main, prise de service à 3 h 00…
Après un réveil bien matinal et un
bol de café chaud, je me dirige vers la
remise des locomotives. La marquise
de la gare est déjà éclairée : le chef
de service est à son poste ! Effective-
ment, une couche de 1 à 2 cm de neige
recouvre tout le faisceau, mais il ne
neige plus. Mes pas crissent dans la
neige, qui commence à geler.
J'ouvre la petite porte de la remise
à trois voies et j'y entre. À droite la
BB 4123 équipée de ses socs chasse-
neige, à gauche la BB 4152 arrivée hier
soir au 7827 et prévue pour le 7824.
Au centre, deux braseros donnent une
lumière dantesque et surtout une
chaleur douce, leur raison d’être ! Je
monte sur la BB 4123 et me dirige
dans son couloir pour la mettre en
service. Je ferme les interrupteurs gé-
néral et d’éclairage et j’ouvre le petit
réservoir de secours afin de monter
le pantographe. Le sol du couloir est
encombré par un gros tube de près
de 4 m de long : c'est la barre de se-
cours qui sert lorsque le chasse-neige
tombe en panne. Mise en route des
compresseurs et ventilateurs, dont le
bruit retentit dans tout le bâtiment.
BB 4100, reines des
rampes pyreneennes
Similaire à la BB 4123, héroïne de
notre récit, voici la BB 4119 chasse-
neige qui côtoie la BB 4104 – une
machine ordinaire de la série 4100
qui monte encore des express à
Latour-de-Carol en 1976!
© T. LELEU
Prêt pour le déneigement !
Tout à coup, les néons de la remise
s’allument : Roger, l'agent Equipement,
arrive emmitouflé et botté. Il connaît
l'emplacement des boutons d’éclai-
rage, lui ! Il dépose une pelle dans la
cabine puis ouvre les deux battants du
portail. Arrive le chef de service, botté
lui aussi, qui nous autorise à sortir. Je
passe quelques crans et arrête la BB
près du bâtiment. L'agent Equipement
ferme le portail et remonte en cabine.
De mon côté, je procède à une rapide
visite des fanaux de signalisation. Je ne
contrôle pas les sablières, car Daniel l'a
fait hier. Le chef de service me remet
le bulletin « Train de Travaux » : outre
les parcours sur lesquels je peux ▶▶▶
ferrovissime - 25
Stars du rail
La BB 4119 sommeille sous la remise en 1985. Au premier plan, le brasero qui assure un chauffage bienvenu.
▶▶▶ si besoin faire des allers et retours
et revenir sur mes pas, la vitesse limite
de 30 km/h y est prescrite.
Avec le chef de service, nous nous
dirigeons vers le tiroir, puis rebrous-
sons vers les voies de service. Il nous
fait arrêter, descend de machine, dé-
cadenasse des aiguilles et appuie sur
le bouton de fermeture du PN voisin :
le guidon d'arrêt s'éteint, départ ! Il
est 3 h 25.
Seule, la BB Midi répond bien et il
n'y a pas besoin de monter les crans.
Nous atteignons 30 km/h. Tout est
blanc alentour. Après le palier de
Quers, la rampe est plus rude et la
couche de neige semble plus épaisse.
Cela ne nous gêne pas, nous roulons
en série shunté. Nous passons le pa-
lier de l'ex-gare de Porta, puis nous
arrivons à Porté-Puymorens : 10 cm
de neige. C'est pour si peu qu’on nous
a fait sortir ?
UNE COUCHE DE 1 À 2 CM DE NEIGE RECOUVRE TOUT
LE FAISCEAU, MAIS IL NE NEIGE PLUS
26 - ferrovissime
Le feu vert du signal protégeant les
portes du tunnel étant allumé, nous
y entrons. Les vitres de la BB 4123 se
couvrent de buée : c’est la condensa-
tion de l'air humide du tunnel, vite
éliminée par quelques va-et-vient
d’essuie-vitre. Après avoir franchi
le sommet, nous descendons sur les
crans rhéostatiques.
Surprise à la sortie du tunnel
La sortie du tunnel arrive et là,
surprise ! Une épaisse couche de
neige recouvre la voie, peut-être 50
à 60 cm! On ne distingue plus les rails,
on devine seulement la plateforme
en suivant du regard les poteaux ca-
ténaire. Cette neige nous freine et
je dois passer un ou deux crans de
marche. Roger me demande d'avan-
cer doucement et de m'arrêter sur
le PN de la RN 20, que la DDE a déjà
dégagé. Il descend avec sa pelle et ôte
© R. CASSAIGNE
de la chaussée les mottes de neige
que les socs ont entraînées avec eux.
À 50 m sur notre droite, la barrière
de la route est abaissée, le feu rouge
allumé : la route du Col du Puymorens
et de l'Andorre est fermée !
Roger remonte et nous entrons en
gare de L'Hospitalet. Le chef de service
est en train de dégager un peu son quai.
Oh pas beaucoup, juste un passage
d'un mètre de large sur la longueur
de deux voitures : les voyageurs, pré-
venus par le contrôleur, utiliseront
l'intercirculation pour descendre.
Je demande à Roger si nous passons
aussi sur la voie d'évitement. Nous
n'avons pas le temps, nous la ferons au
retour, répond-il. Et nous continuons la
descente à 30 km/h vers Ax-les-Thermes,
toujours au frein rhéostatique. De
temps en temps, les oscillations de
la caténaire font tomber devant nous
des paquets de neige. ▶▶▶
 © T. LELEU
La 4119 sur le pont tournant du dépôt de Toulouse-Matabiau en 1982, en cours de préparation pour la saison hivernale.

© T. LELEU
À l’époque, une BB 4100 est positionnée à Foix, prête à intervenir, dès le mois d’octobre.

ferrovissime - 27
Stars du rail
En 1986, la BB 4119 évolue à Foix devant la locomotive à vapeur restaurée 141 TD 740.
Des locomotives modiiées en chasse-neige
Les BB 4100 n’ont pas été les seules
locomotives modifiées en chasse-
neige pour la ligne transpyrénéenne
Ax-les-Thermes/Latour-de-Carol. Dès
leur réforme définitive, elles ont été
remplacées par les BB 8553 et 8556,
de construction bien plus récente.
Plus au nord, dans le Massif central,
UNE ÉPAISSE COUCHE DE NEIGE
RECOUVRE LA VOIE, PEUT-ÊTRE 50 À 60 CM!
ON NE DISTINGUE PLUS LES RAILS
Vingt centimètres de poudreuse
AprèsletunnelhélicoïdalduSaillens,
la neige est beaucoup moins épaisse,
30cm environ. Peu après avoir franchi
le pont des Bordes, des silhouettes s’en-
foncent dans les bois. Des isards, dit
Roger, venus chercher de la nourriture
dans quelque grange. Sur la RN 20, les
rares automobilistes montent lente-
ment, équipés de chaines.
Mérens-les-Vals: 20 cm de poudreuse,
arrêt demandé par Roger pour dégager
un peu le quai. Et nous continuons la des-
cente vers Ax. Dans les gorges de l'Ariège,
nous voyons des traces dans l'axe de la
voie, sur une centaine de mètres, puis
elles la longent pour finalement plonger
sur la gauche, vers l'Ariège, en contrebas.
Sans doute un renard solitaire.
28 - ferrovissime
© R. CASSAIGNE
une locomotive diesel, la BB 60021
née en 1934 au PLM, est transformée
en chasse-neige rotatif et basée à
Aurillac. Toutefois, cette machine a
perdu son autonomie de circulation
et doit être poussée par des
locomotives BB 69000 de l’Infra.
Jehan-Hubert Lavie
Enfin c’est Ax-les-Thermes. Nous
stoppons à l'aiguille d'entrée, puis
nous nous arrêtons sur la voie d'évi-
tement. Il est 4 h 55 : 40 km en 1 h 30,
nous avons bien roulé !
Roger se dirige vers le bureau du
chef de service. De mon côté, j'ouvre
les interrupteurs des ventilateurs et
des compresseurs, le disjoncteur et je
baisse le pantographe. Le chasse-neige
doit remonter vers Latour-de-Carol
et je le prépare pour cela. Je le laisse
sous tension, tous freins serrés, venti-
lateurs en marche et chauffage cabine
en service : Daniel va apprécier !
De mon côté, avec le 7824, je vais
retrouver dans quelques heures les
douces températures de la Ville
© T. LELEU
Rose ! ◼
 À Foix, vue de
face d’une 4100
transformée
«chasse-neige».

ferrovissime - 29
Les portraits du rail

PORTRAIT DU RAIL
Z 3600, Z 3700, Z 3800, Z 4700
D’AUTOMOTRICES MODERNES
NÉES AVANT-GUERRE
Texte : Frédéric Didelot

30 - ferrovissime
 © J.D. HÉRAIL

Le 1er juillet 1980, les Z 3719 (tête)

et 3718 (queue) sont au départ du
Mans pour assurer l’Omnibus 6546 à
destination de Paris-Montparnasse.

ferrovissime - 31
Les portraits du rail

© DR
La Z 3802 dans les années 1950. À l’époque, ces automotrices de ramassage ont des accélérations comparables à celles
d’une automobile Dyna Panhard, ce qui est exceptionnel!

Le réseau de l’Etat est un précurseur

AUJOURD’HUI, ON PRÉFÈRE LES AUTOMOTRICES AUX RAMES TRACTÉES.
DÈS 1934, L’ETAT AVAIT DÉJÀ FAIT CE CHOIX POUR SES SERVICES DE
RAMASSAGE ET DE GRANDE BANLIEUE.

L'
électrification en courant 1500 V de
la ligne Paris/Le Mans, réalisée par le
réseau des Chemins de fer de l’Etat
entre novembre 1934 et mai 1937, a
introduit des innovations touchant
tant le matériel moteur que l’exploi-
tation. Parmi ces avancées novatrices,
trois automotrices électriques se dis-
tinguent particulièrement, chacune
dans un domaine particulier. Ce sont
ces automotrices que nous étudions aujourd’hui,
en ajoutant deux prototypes de la même veine,
conçus avant-guerre par le P.O-Midi mais livrés
seulement à la SNCF en 1947. ◼
© DR / COLL. D. WALIGORA

Changement d’équipe, mécano et chef de train, en

gare de Rambouillet le 18 juin 1960. À l’époque,
Rambouillet est une gare de province, la banlieue
Montparnasse s’arrêtant à Versailles-Chantiers.

32 - ferrovissime

© J.D. HÉRAIL
La double carrière des Z 3600
D ans le cadre de l’électrification par 3e rail
de la banlieue Etat ex-Ouest en 650 V,
18 automotrices Z ABEyfp TE 1001 à 1018
(futures Z 23011 à 28), dites de 1re série,
sont commandées en 1912 auprès des construc-
teurs Jeumont, Thomson, ANF, CFMCF pour
compléter le parc des cinq rames Sprague et
Thomson à caisse en bois construites lors de
l’inauguration de la première ligne en 1900.
Livrées en 1912-13, elles sont basées au dépôt
du Champ-de-Mars pour assurer les dessertes
sur Invalides/Versailles-Rive-Gauche et son em-
branchement Champ-de-Mars/Avenue Henri
Martin. Disposant d’une caisse entièrement
métallique et d’un aménagement décrit comme
PLUS CAPACITAIRES ET DONC BIEN ADAPTÉES
AU SERVICE DE PROCHE BANLIEUE
luxueux à l’époque, ces 18 automotrices, aux
caractéristiques très en avance sur leur temps,
comportent 16 places assises en 1re classe et
24 en 2e classe, outre respectivement 24 et
30 places debout.
Aptes à circuler à 80 km/h, elles développent
une puissance de 346 kW, seul l’un des deux
bogies étant motorisé. Dépourvues de tampons,
elles sont équipées d’attelages automatiques
Boirault et couplables entre elles jusqu’à quatre
unités. Avec l’arrivée des rames Standard (fu-
tures Z 1300, 1400 et 1500), ces 18 rames sont
garées en 1927, puis démotorisées et transfor-
Fin de carrière pour
cette Z 3600 garée
au dépôt du Mans.
mées en remorques en 1931 pour accompagner
les automotrices de la 2e série (futures Z 23029
à 54 puis Z 1200) après le démontage des équi-
pements électriques et le maintien d’une seule
des deux cabines.
Une transformation en 1500 V
inattendue
Dans le cadre de l’électrification Paris/
Le Mans et compte tenu des contraintes budgé-
taires, le réseau de l’Etat décide de faire trans-
former par les Ateliers de la Folie en 1937/38 ces
18 remorques pour les affecter aux relations à
courte distance Paris-Montparnasse/Clamart/
Versailles. Neuf véhicules (réimmatriculés
Z 23681 à 23689, futures
Z 3601 à 9) reçoivent cha-
cun quatre moteurs neufs
SW (un par essieu) ainsi
que des équipements élec-
triques 1 500 V fournis par
Jeumont et deux pantographes E14/E15. Les
neuf autres, qui conservent leur cabine de
conduite, restent des remorques (qui devien-
dront les ZRx 13601 à 9), systématiquement
accouplées à une automotrice pour conserver
la réversibilité, indispensable en banlieue.
Désormais aptes à circuler à 100 km/h, ces
automotrices, surnommées Rosalies et affectées
au dépôt de Montrouge, sont bien moins véloces
que les matériels neufs acquis à cette occasion,
mais très bien adaptées à ce service de proche
banlieue, car plus capacitaires et disposant de
quatre larges portes par face. Renumérotées ▶▶▶
ferrovissime - 33
Les portraits du rail

© D.M. COSTES
Le 16 juin 1973, ces deux Z 3600 en UM arrivent à Paris-Montparnasse en assurant la navette ouvrière en provenance
de Montrouge-Chatillon.

▶▶▶ Z 3601 à 3609 en 1948, elles ne peuvent cou- En 1961, la Z 3605, accouplée à la ZRx 13602,
vrir tous les trains nécessaires à la desserte de la bénéficie d’une RG avec un recâblage complet
banlieue Paris-Montparnasse/Versailles-Chan- accompagné d’une simplification des équipe-
tiers, d’autant plus qu’elles sont généralement ments électriques qui sont repositionnés dans
engagées en UM. Elles partagent donc cette l’ancienne cabine 2 de la partie automotrice.
mission avec des rames de voitures à étages Finalement, cette opération coûteuse n’est pas
Etat – alors très modernes, vers 1950 – enca- étendue au reste de la série. À l’issue d’une se-
drées par deux BB 800 fonctionnant en UM. conde carrière d’environ 35 ans, ces couplages
sont radiés entre 1971 et 1973. Les navettes sont
Une carrière longue de 60 ans alors reprises par les Z 3700 et les Z 5100. ◼
Après-guerre, elles sont engagées
principalement sur les omnibus Pa-
ris-Montparnasse/Sèvres-Rive Gauche.
On les utilise aussi sur la Grande-Cein-
ture entre Versailles et Juvisy, nouvelle-
▶ COMPOSITION DES RAMES ◀
ment électrifiée. L’arrivée des Z 5100 les Motrice Remorque Radiation
chasse progressivement des services de Z 3601 = Z ABEyfp 1002 ZRx 13601 = Z ABEyfp 1016 11/1973
banlieue au profit des navettes ouvrières
réservées aux personnels de la SNCF
Z 3602 = Z ABEyfp 1005 ZRx 13605 = Z ABEyfp 1009 2/1972
et des entreprises connexes. Z 3603 = Z ABEyfp 1006 ZRx 13603 = Z ABEyfp 1001 1/1973
Dans ce domaine, elles assurent en Z 3604 = Z ABEyfp 1007 ZRx 13604 = Z ABEyfp 1014 8/1971
UM2 ou 3 la navette Paris-Montpar-
Z 3605 = Z ABEyfp 1008 ZRx 13602 = Z ABEyfp 1010 5/1971
nasse/Montrouge-Chatillon, en UM2
Le Mans-Pontlieue/Le Mans-Maroc, Z 3606 = Z ABEyfp 1012 ZRx 13606 = Z ABEyfp 1004 11/1973
en US Versailles-Chantiers/Versailles- Z 3607 = Z ABEyfp 1013 ZRx 13607 = Z ABEyfp 1003 1/1973
Matelots/Trappes et la navette interne de Z 3608 = Z ABEyfp 1015 ZRx 13608 = Z ABEyfp 1011 1/1973
Trappes-Triage, de même que le « train
d’embauche » matinal Paris/Trappes. Z 3609 = Z ABEyfp 1018 ZRx 13609 = Z ABEyfp 1017 11/1973

34 - ferrovissime
 © J. PORCHER
Une UM2 de Z 3700
quitte la vieille gare
Montparnasse en
1963. C’est l’époque
des pubs sur les
flancs des voitures
de banlieue.
Z 3700 : la révolution
de l’automotrice inoxydable fois des accélérations
rapides et des vitesses
élevées. Cela implique

P our l’électrification de la ligne Paris/

Le Mans, Raoul Dautry est marqué par
l’influence de l’autorail, dont il est un
fervent partisan depuis son arrivée à la
tête du réseau de l’État. L’expérience acquise
pendant une décennie le conduit à en décliner
les principes d’exploitation sur cette grande
qu’il n’y ait pas de remorques et que les force-
ments soient assurés par des mises en unités
multiples.

Le choix de l’acier inoxydable

ligne, d’autant plus qu’un schéma de desserte
novateur est prévu.
Pour éviter des arrêts trop fréquents, consom-
mateurs de temps et d’énergie, aux trains à
longue distance, il prône la mise en place de
services rapides de grande banlieue ainsi que de
services omnibus accélérés, dits de ramassage.
Pour y parvenir, deux types d’automotrices
sont mis en chantier, mais avec des principes
communs. Tout d’abord, ces matériels doivent
être à adhérence totale pour permettre à la
Pour le type le plus capacitaire, il faut que
le matériel soit léger tout en étant robuste. Les
caisses sont donc construites en acier inoxydable
18/8 (18 % de chrome, 8 % de nickel) soudé par
points, selon le procédé mis au point par l’amé-
ricain Budd et dont les établissements Carel &
Fouché disposent de la licence d’exploitation en
France. Cette innovation majeure permet d’éviter
le recours à un châssis-poutre bien plus lourd.
Les cannelures sur les faces latérales sont
obtenues par un système de galets (roulements
à billes) de plus en plus serrés qui permettent de
plier les tôles en acier inoxydable en leur ▶▶▶

ferrovissime - 35
Les portraits du rail

© J.D. HÉRAIL
L’ACCÈS S’EFFECTUE PAR LE BIAIS DE MARCHEPIEDS
ESCAMOTABLES RÉTRACTABLES PNEUMATIQUEMENT
▶▶▶ donnant une rigidité renforcée. Ce système, unique est suffisant, tout en conservant une ↑
utilisé sur des matériels américains dès le début charge à l’essieu de 13 t. Le 15 mai 1975,
des années 1930, permet d’importantes écono- l’Omnibus 6503, mené
par la Z 3714, parti de
mies en matière de préparation de la surface et Prévues pour les quais hauts Paris-Montparnasse à
de peinture, car aucune protection n’est néces- et les quais bas 10h53 et attendu au
saire. Le gain de masse est d’environ 40 % par L’accès s’effectue par des marchepieds esca- Mans à 13h43, dessert
rapport aux automotrices d’origine P.O ou Midi motables rétractables pneumatiquement, avec Le Theil-la-Rouge,
de construction métallique classique. Les caisses deux niveaux permettant de desservir tant les comme toutes les
étant autoportantes, il s’ensuit également un quais hauts que les quais bas tout en limitant le gares de Rambouillet
gain sur la masse du châssis (celle de la partie temps d’échange des voyageurs. Chaque caisse au Mans!
mécanique, y compris les engrenages, ne dé- comporte deux doubles portes coulissantes à
passe pas 50 t). Ce mode de construction sera assistance pneumatique, donnant sur une plate-
d’ailleurs repris après-guerre sur l’ensemble du forme recevant sur la caisse A quatre strapontins.
matériel banlieue pendant plus de 30 ans. Avec Dans celle-ci, le compartiment de 1re classe de
une masse totale en ordre de marche de 78 t 28 places assises jouxte un WC-toilette. Le second
pour les deux caisses, un bogie intermédiaire compartiment de la caisse A, côté intercircula-

▶ BIEN AVANT RIO ET VO2N, LES Z 3700 PARTAGENT LEURS DESSERTES AVEC DES RAMES TRACTÉES ◀
La banlieue Montparnasse est courte:
de Paris-Montparnasse (ancienne
gare) à Versailles-Chantiers, la distance
n’excède pas 17 km. Au-delà, Saint-Cyr,
Trappes, La Verrière, Rambouillet, c’est
la province! Car la notion de «grande
banlieue» n’existe pas sur le plan
tarifaire! Or, Versailles et ces «au-delà»,
c’est justement le domaine privilégié des
Z 3700 qui vont également à Chartres
et même au Mans. Des relations qu’elles
partagent avec des rames tractées à qui
l’on réserve les trains des heures de pointe
et les relations avec peu d’arrêts. Sur
Paris/Chartres, on retrouve les modernes
voitures à étage Etat composant, ici,
des rames non réversibles confiées
généralement aux 2D2 5400. Des rames
Talbot, non réversibles mais équipées du
chauffage électrique, circulent également
sur Chartres, voire Le Mans, normalement
derrière une BB 900 ou plus rarement,
dans les années 1950, une des BB 8100
affectées à Montrouge. Mais c’est sur
Paris/Le Mans que les Z 3700 ont le
beau rôle quand on les compare aux
autres trains assurant, dans les années
1950, les semi-directs en rames tractées
sur cette liaison: des rames dites «TP»
composées, pour l’essentiel, de C10 ty
à portières latérales multiples confiées
à une BB 900 ou une 2D2 5400!
Jehan-Hubert Lavie

36 - ferrovissime

Au printemps
1960, cette longue
UM4 (soit 8 demi-
voitures) de tion, comporte 28 places assises non-fumeurs
Z 3700 longe les de 2e classe. La caisse B est composée de deux
travaux entrepris compartiments non-fumeurs de 28 et 38 places
à Montparnasse. de 2e classe. S’y ajoute à l’extrémité un local à
bagages de 9 m² comportant trois strapontins.
Le revêtement intérieur est jaune limon avec
des sièges rouges en 1re classe, celui de 2e classe
est vert d’eau avec des sièges en skaï vert foncé. Le
mobilier intérieur est de fort bon goût et respire
la qualité. La toiture est peinte en noir, comme
celle des voitures DEV Inox, les tentatives de
revenir à la teinte inox comme sur les Z 5100
ayant buté dans les années 1960 à l’accumulation
de la crasse. Le confort n’est pas oublié, avec un
chauffage par air pulsé et un éclairage intérieur
par lampes à incandescence disposées dans des
appliques à l’esthétique soignée.
Un matériel peu modifié
Tout au long de leur carrière, les Z 3700 n’ont
pas subi de modification importante. Tout au
plus les ouvrants des baies vitrées ont été mo-
difiés dès 1939 pour améliorer la ventilation
intérieure.
Comme pour les autres matériels nés lors
de l’électrification Paris/Le Mans, les deux
feux centraux (un feu blanc à deux régimes
© B. PORCHER
d’éclairage fanal ou projecteur et un feu rouge
de plus petit diamètre) ont été démontés au
début des années 1960 et remplacés par deux
feux blancs symétriques.
À cette occasion, les deux feux d’angle rouges
pour la signalisation d’arrière ont été obturés.
À la même époque, l’un des deux pantographes
a été démonté.
Une carrière sur 211 km
Livrées entre novembre 1937 et mars 1939 au
dépôt de Montrouge où elles ont effectué toute
leur carrière, ces 20 rames doubles, conçues
« pour la grande banlieue et l’interville » selon
la revue Traction Nouvelle, assurent la plupart
des missions semi-direct et omnibus entre Pa-
ris-Montparnasse, Rambouillet, Chartres et
Le Mans.
Dans un premier temps, elles sont par contre
écartées du service banlieue, la largeur de leurs
quatre portes n’étant pas adaptée. Grâce à leur
adhérence totale et leur forte puissance mas-
sique, elles peuvent développer une accélération
de 1 m/s² jusqu’à 60 km/h. Cela leur permet
d’atteindre facilement les 130 km/h et de pro-
poser des temps de parcours inédits, même si
leur tenue de voie se révèle perfectible à ▶▶▶
ferrovissime - 37
Les portraits du rail

38 - ferrovissime
 LORS DES ESSAIS RÉALISÉS EN
1937-38, LA VITESSE DE 186 KM/H
EST MÊME ATTEINTE
▶▶▶ haute vitesse. Lors des essais réalisés en
1937-38, la vitesse de 186 km/h est même atteinte.
À titre d’exemple, les 88 km entre Paris et
Chartres sur les missions omnibus nécessitent
1h20 avec 16 arrêts, à comparer aux 1 h 07 dé-
volues aux missions semi-directes avec un arrêt
à Versailles puis omnibus (6 gares) entre Ram-
bouillet et Chartres. Entre Chartres et Le Mans,
les 123km sont parcourus en 1h40 avec 16 arrêts,
soit seulement 10 mn de plus que les Z 3800 dont
la vitesse maximale est supérieure de 10 km/h.

La concurrence des Z 5100

En dépit de leurs performances de haut
niveau, les Z 3700 subissent dès le milieu des
années 1950 la concurrence des Z 5100, plus
adaptées à la densification continue du trafic,
même si elles sont moins faciles d’accès, moins
véloces et moins bien suspendues. Les Z 3700
sont réutilisées sur la Grande Ceinture entre
Versailles et Juvisy entre 1964 et 1968, puis à ▶▶▶

▶ PÉRIODE DE CIRCULATION ◀
Mise en service Radiation
Z 3701 11/1937 12/1982
Z 3702 12/1937 1/1973
Z 3703 1/1938 12/1982
Z 3704 1/1938 5/1982
Z 3705 2/1938 12/1983
Z 3706 3/1938 5/1985
Z 3707 3/1938 5/1982
Z 3708 4/1938 12/1983
Z 3709 4/1938 2/1982
Z 3710 5/1938 12/1981
Z 3711 5/1938 1/1989
Z 3712 6/1938 12/1983
Z 3713 6/1938 5/1985
Fin de règne pour Z 3714 7/1938 12/1983
la vieille gare Z 3715 7/1938 4/1982
En septembre 1965, la vieille Z 3716 9/1938 4/1982
gare Montparnasse est toujours
active! Les Z 3700 ont déjà Z 3717 10/1938 5/1985
perdu l’un de leurs deux pantos, Z 3718 12/1938 12/1983
mais le bloc-feux central de la
Z 3719 8/1938 12/1983
© J. PORCHER

signalisation d’avant, typique de

Paris/Le Mans, est toujours là… Z 3720 3/1939 12/1976

ferrovissime - 39
Les portraits du rail

© J.D. HÉRAIL
Le 5 août 1977, la Z 3704, en UM avec l’une de ses sœurs, assure, sur la Grande Ceinture, le train 280 Versailles-Chantiers
(18h24)/Jouy-en-Josas (18h31)/Juvisy (19h02).

© J.D. HÉRAIL
En septembre 1977, ces trois Z 3700 en UM ont 40 ans. Or, leur esthétique reste dans le coup, même (surtout ?) par rapport
aux Z 5100, à gauche, qui ont 15 ans de moins !

40 - ferrovissime
© J.D. HÉRAIL

En 1977, les Z 3700 sont très présentes sur la section Juvisy/Versailles de la Grande-Ceinture.

des Z 3800. En parallèle, elles prennent également

la suite à partir de 1972-73 des Z 3600 sur les na-
vettes ouvrières du personnel SNCF à Montrouge
et Trappes.

Fin de carrière sur Paris/Sèvres

et les navettes
Suite à un incendie, la Z 3702 est radiée dès
© B. PICARD / COLL. B. WEYLAND

1973, suivie par la Z 3720 trois ans plus tard. Les

ELLES PEUVENT DÉVELOPPER
UNE ACCÉLÉRATION DE 1 M/S²
JUSQU’À 60 KM/H
↑ ▶▶▶ nouveau au début des années 1970 jusqu’en
En octobre 1983, 1975 où elles se partagent cette desserte jusqu’à
les Z 3700 ne font la livraison de la totalité du parc des Z 5300.
plus guère, comme Elles continuent épisodiquement à fréquenter
celle-ci à quai, que cette ligne jusqu’en 1979, date de la refonte
les navettes du
personnel SNCF horaire liée à la mise en service de la jonction
entre Montparnasse Invalides/Orsay du RER C.
et Montrouge- Sur la ligne Paris/Le Mans, elles sont en re-
Chatillon. vanche reléguées au second plan au profit de
rames tractées plus capacitaires et plus modernes
(RIO et VO2N accouplées à des BB 8500 ou 25500)
mais avec des détentes horaires non négligeables.
Elles sont désormais surtout utilisées en service
omnibus entre Chartres et Rambouillet, mais
aussi entre Le Mans et Chartres suite au retrait
radiations massives débutent avec 8 rames entre
décembre 1981 et décembre 1982. La Z 3711 est
placée en Utilisation Spéciale à compter d’avril
1981 pour assurer des essais Radio Sol-Train.
6 autres rames sont amorties en décembre 1983.
Cela marque la fin de leur service commercial
sur Rambouillet/Chartres/Le Mans. Les quatre
rames restantes assurent des navettes entre
Montparnasse et Montrouge-Chatillon, voire
quelques renforts sur des omnibus Paris/Sèvres-
Rive Gauche. Trois sont radiées en mai 1985, la
dernière, la Z 3711 continuant à assurer cette
mission jusqu’en décembre 1988 avant d’être
radiée le mois suivant. Certaines ont parcouru
près de 4 millions de km au cours de leur carrière.
Deux rames n’ont pas été immédiatement
démolies. La Z 3701 est rachetée en 1984 par
son constructeur, la société Carel & Fouché,
qui la place à l’entrée de son usine d’Aubevoye.
À sa disparition, elle est récupérée par une
association d’Elbeuf avant d’être démolie, au
début des années 1990 semble-t-il, après la dis-
solution de l’association. La Z 3714 a bénéficié
d’une complète remise en état d’origine par
les ateliers de Vitry avant d’être transférée
au musée de Mulhouse en 1998. Placée sous
scellés suite à une affaire judiciaire, elle a été
malheureusement vandalisée et n’est pas pour
le moment exposée. ◼

ferrovissime - 41
Les portraits du rail

© ALSTHOM

La ZZCE-3-23801 arrive neuve des usines Alsthom en mai 1938. Elle est peinte dans la livrée des autorails Etat, caisse rouge rubis pavillon
gris perle, mais ses faces latérales portent déjà les lettres SNCF. En 1948, elle deviendra Z 3801.

42 - ferrovissime
 Z 3800 : les rouges
sont des automotrices
de ramassage

Les rouges dans
leur fief : Le Mans
Une UM3 de Z 3800 est arrivée
au Mans à 7h42, le 12 avril 1974,
après avoir couvert l’Omnibus
6587 en provenance de Chartres.
© J.D. HÉRAIL
C
es automotrices de ramassage ont vocation
à mettre en pratique la doctrine prônée par
RaoulDautry,àsavoirpartirdevantouderrière
untrainrapideouexpresspourprendreoude
déposerdesvoyageursdanslesgaresintermédiaires,
sans gêner les autres trains, tout en permettant
descorrespondancescourtes. Cenouveauconcept
d’exploitation nécessite donc un matériel à la fois
rapide et léger, capable de fortes accélérations et
décélérations, de façon à maintenir une vitesse
moyenneélevéeendépitdesarrêtsintermédiaires.
Pour marquer les esprits et la spécificité du service,
ces automotrices arborent la livrée rouge rubis
pavillon gris perle des autorails de l’Etat, ce qui
motive leur surnom de «rouges». Leur esthétique
estégalementsoignée,avecunhublotàl’extrémité
1 pour éclairer le couloir donnant accès à la cabine
deconduiteouauWCetaccessoirementpermettre
une vision de la voie, à l’origine de leur deuxième
surnom «œil de bœuf». Et pour parfaire leur ana-
logie avec les autorails, elles sont, dès l’origine,
munies de leur trompe à deux tons!
Des champions poids-plume
La masse à vide en ordre de marche n’est que de
42,7 t, soit l’équivalent d’une voiture voyageurs

métallique. Des efforts notables ont permis de

limiter la masse de la caisse à 14 t, celle ▶▶▶

LA VITESSE DE 100 KM/H EST ATTEINTE EN MOINS DE 30 S

▶ CARRIÈRE ◀
Mise en service Radiation
Z 3801 5/1938 12/1975
Z 3802 5/1938 12/1975
Z 3803 5/1938 12/1975
Z 3804 7/1938 12/1975
Z 3805 8/1938 12/1975

Aperçu de la toiture bien lisse

d’une Z 3800. Celle-ci assure
© J.D. HÉRAIL

l’Omnibus 6591 à destination

du Mans, arrivée 17h50.

ferrovissime - 43
Les portraits du rail
▶▶▶ des équipements électriques à 6,8 t, celle des
moteurs à 4,9 t et celle des bogies à 4,2 t. La caisse
métallique, entièrement soudée électriquement
et de type poutre à revêtement travaillant, est
construite par Somua. Les bogies sont fabriqués
par Alsthom. La liaison caisse/bogie s’effectue par
le biais d’appuis latéraux, le pivot des bogies ne
supportant aucune charge. Les boîtes d’essieux
SKF sont à rouleaux. La partie électrique est livrée
par Oerlikon, en particulier les quatre moteurs
de traction du type EM36 autoventilés suspendus
par le nez. Chaque moteur fonctionne en série
avec le plus proche. La transmission de l’effort
sur un essieu s’effectue par un train d’engrenages
droits. L’ensemble de l’équipement électrique
est placé sous la caisse de façon à dégager la
surface du plancher pour les voyageurs. Les deux
pantographes en toiture sont du type Faiveley
Etat E14-E15, d’origine avec une monopalette. A
partir des années 1960, le panto arrière est déposé
et le panto avant conservé côté hublot devient
44 - ferrovissime
bipalette. Le frein à air et le frein rhéostatique ↑
sont conjugués et commandés par un robinet Le Theil-la-Rouge,
unique JMR 53C. Comme les Z 3700 et les 2D2 5400, 15 mai 1975,
12h52: départ de
elles reçoivent des blocs feux centraux composés
l’Omnibus 6590 en
d’un feu blanc à deux régimes d’éclairage (fanal provenance du Mans
ou projecteur) et d’un feu rouge de plus petit et à destination de
diamètre, qui complète les deux feux d’angle en Chartres où il sera
limite de pavillon pour la signalisation d’arrière. reçu à 13h48.
En fin de carrière, ils sont remplacés par des feux
blancs unifiés, la couleur rouge étant fournie par
l’ajout d’un disque translucide.
Conçues pour la vitesse
L’accès s’effectue par le biais de quatre portes
doubles coulissantes à fermeture automatique par
dispositif Faiveley. À la différence des Z 3700, l’em-
marchement est fixe. L’aménagement intérieur est
composé d’un compartiment unique de 3e (puis 2e)
En 1975, une UM3 de
classe de 78 places en banquette 3+2 places. Chaque
Z 3800 à destination de
plateforme d’accès accueille quatre strapontins, Chartres est en gare du
celle à l’arrière faisant également office de fourgon Theil-la-Rouge.
 à bagages sans séparation, avec un strapontin sup-
plémentaire au niveau de la face frontale.
Une petite cabine de conduite est positionnée
dans l’angle gauche à chaque extrémité de la
caisse. Les trompes à deux tons sont intégrées
dans la caisse, juste au-dessus de l’attelage au-
tomatique Boirault-Compact qui assure égale-
ment la connexion électrique et pneumatique.
Dépourvues de tampons, elles peuvent circuler
en UM jusqu’à 4 unités, mais dans ce cas, la
quatrième ne tractionne pas pour éviter de
faire disjoncter les sous-stations.
Dans les années 1950/60, leur livrée est mo-
difiée: toiture, jupes et pantographes sont noir
à train 901, les inscriptions jaune bouton d’or
411. En fin de carrière, la caisse est entièrement
peinte en rouge vermillon 605, les jupes et
bogies devenant gris ardoise 807, les panto-
graphes gris touterelle 840 et les inscriptions
jaune jonquille 401.

Des performances hors du commun

Les essais réalisés au moment de leur livrai-
son confirment les performances attendues :
la vitesse de 100 km/h est atteinte en moins
de 30 s, celle de 140 km/h en moins d’une mi-
nute, l’accélération moyenne de 1 m/s² étant
maintenue jusqu’à environ 90 km/h ce qui est
remarquable et comparable à une automobile
moyenne de l’époque ! Les distances de frei-
nage sont également inhabituelles, avec un
arrêt en 450 m à 120 km/h en palier, avec une
© J.D. HÉRAIL

décélération moyenne de 1 m/s². Prévues pour

circuler à 140 km/h, l’une d’elle a atteint ▶▶▶

LES DISTANCES DE FREINAGE

SONT INHABITUELLES, AVEC UN ARRÊT EN 450 M À 120 KM/H
© J.D. HÉRAIL

ferrovissime - 45
Les portraits du rail

© J.D. HÉRAIL
La face frontale portant l’œil de bœuf donne tout leur sel aux Z 3800 ! Une esthétique originale et très moderne avait
été recherchée, notamment sous l’égide de l’architecte Henri Pacon, pour le matériel de l’électrification Paris/Le Mans.

▶▶▶ 166 km/h en essai dans des conditions de
tenue de voie remarquables.
Réceptionnées à partir de février 1938, les
Z 23801 à 5 entrent en service commercial dès
le mois de mai de la même année. Initialement
basées à Montrouge, ces automotrices sont
rapidement mutées à Chartres entre avril et
octobre 1939 en raison de leur capacité insuf-
fisante, les Z 3700 leur reprenant les missions
entre Paris, Versailles et Rambouillet. Elles
rejoignent finalement Le
Mans-Pontlieue en mai
1941 où une remise parti-
culière leur est construite. 166 KM/H EN ESSAI DANS DES CONDITIONS
Pour le reste de leur car-
rière, elles sont quasi DE TENUE DE VOIE REMARQUABLES
exclusivement utilisées
sur des rotations entre
Le Mans et Chartres (1 AR), avec des mouve-
ments partiels Le Mans/Connéré-Beillé (1 aller,
3 retours) et Le Mans/Nogent-le-Rotrou (1 AR).
Trois lignes de roulement sont nécessaires
pour assurer ce service de navettes, certaines
missions étant assurées en UM.
Une carrière dédiée aux omnibus
Renumérotées Z 3801 à 5 au 1er janvier 1948,
elles sont dédiées aux omnibus, avec arrêt
dans toutes les gares, sans qu’il y ait systé-
matiquement – comme cela était initialement
prévu – des correspondances courtes devant
ou derrière un rapide ou un express au Mans
ou à Chartres. Leur vélocité est néanmoins
appréciée. À titre d’exemple, les 23 km entre
Connéré-Beillé et Le Mans sont parcourus en
20 mn avec quatre arrêts intermédiaires, là
où une Z 3700 a besoin de 3 mn supplémen-
taires pour la même desserte. Les 123 km entre
Chartres et Le Mans nécessitent 1 h 35 avec
16 arrêts, soit 5 minutes de plus que pour une
Z 3700 assurant une mission semi-directe avec
seulement huit arrêts ou que pour une 2D2
5400 remorquant un direct avec quatre arrêts.
Le principal incident concerne la Z 3803,
qui est hors service pendant deux ans suite
à un incendie survenu en juin 1961 et fait
l’objet d’une reconstruction quasi-complète.
Les révisions sont arrêtées en 1974, la Z 3802
étant garée en mars 1975 suivie par ses quatre
sœurs le 31 mai 1975. Leurs missions sont
alors reprises par les Z 5100. Aucune de ces
automotrices n’a été préservée. ◼

46 - ferrovissime
 Le 24 septembre
1950, la Z 4702
est en gare de
Montauban
en assurant
l’Omnibus 1057
Cahors/Toulouse.
Z 4700 : premiers prototypes
des automotrices express
L es résultats prometteurs des nouveaux ma-
tériels acquis par le réseau de l’Etat pour la
ligne Paris/Le Mans conduisent le P.O-Midi
à étudier à son tour des automotrices de
forte puissance et à lancer un concours en dé-
cembre 1936. Commandées en novembre 1937
auprès d’Alsthom et Somua, constructeurs des
Z 3800, ces deux automotrices reprennent l’ar-
chitecture des Z 3700, avec une caisse double
reposant sur trois bogies, une masse limitée, une
adhérence totale et un freinage puissant. Le but
recherché est de mettre en place des services
rapides inter-villes, qui se seraient appelées “Ru-
ban-Bleu”, au moyen de rames électriques légères
autour de Bordeaux et Toulouse.
Bien que ce projet ne soit pas repris par la
SNCF, la commande de ces prototypes n’est pas
annulée, mais leur construction effective est re-
tardée du fait de la seconde guerre mondiale. À
son issue, l’idée est désormais de les utiliser pour
un service Paris/Tours à 180 km/h, qui n’aura pas
non plus de suite du fait de la préférence pour
les trains lents, lourds et longs. Développant une
puissance unihoraire de 912 kW et aptes à circuler
à 140 km/h grâce à leurs six moteurs entièrement
suspendus, elles sont capables de fortes accéléra-
tions, grâce à leur masse
à vide limitée à 79 t et à
▶ CARRIÈRE ◀ leur caisse tubulaire.
Mise en service Radiation Concurrencer l’Etat
Z 4701 2/1948 12/1968 Deux minutes sont
Z 4702 12/1948 11/1973 seulement nécessaires
pour atteindre 140 km/h.
© J. PORCHER
Les bogies, d’un empattement de 3 m, intègrent
une transmission Alsthom bilatérale par arbre
creux à anneaux dansants et silentblocs. Leur
freinage est également remarquable, du fait de
la combinaison frein à air automatique et frein
électrique rhéostatique : 640 m sont suffisants
pour s’arrêter en roulant à 140 km/h. A la dif-
férence des Z 3700, elles disposent d’organes
de choc unifiés et de marchepieds fixes.
Les 144 places assises sont réparties entre la
voiture A (68 places de 3e classe, 16 strapontins)
qui comporte aussi un compartiment postal
et la voiture B (24 places de 2e classe, 18 de
3e classe, 18 strapontins) qui dispose également
d’un WC avec eau chaude, d’une planche à ba-
gages et d’un vaste compartiment à bagages de
12 m². Le chauffage est assuré par des radiateurs
électriques. L’intercirculation s’effectue par un
bourrelet étanche en caoutchouc, ce qui est une
innovation majeure.
Conçues pour les performances
Les essais des Z 23071 et 2 débutent en sep-
tembre 1947 et la configuration particulière du
bogie médian moteur ne pose pas de difficulté
particulière, à la différence des automotrices
articulées hollandaises en service à la même
époque et dont la vitesse a dû être limitée à
125 km/h. La Z 23071 atteint 172 km/h à cette
occasion sur la ligne des Landes.
Leurs mises en service commercial n’in-
terviennent respectivement qu’en février et
décembre 1948. Renumérotées Z 4701 et 2 le
1er janvier 1948, elles sont affectées toute ▶▶▶
ferrovissime - 47
Les portraits du rail

© DR / ALSTHOM
En 1947, la Z 23071 atteint 172 km/h lors d’essais dans les Landes. En 1948, elle devient Z 4701. À l’époque, son aménagement est mixte 2e et 3e classes.

© C. LAPIERRE / COLL. J.H. LAVIE

48 - ferrovissime
 ▶ COMPARATIF ENTRE LES 4 SÉRIES ◀
Z 3600 Z 3700 Z 3801 à 5 Z 4701 et 2
Numérotation initiale Z CE 23681 à 89 Z BCE 23701 à 20 Z BDtmy 23801 à 5 ZB4C10PEtpyf 23071 et 23072
Effectif 18 puis 9 20 5 2
Mise en service 1913 puis 1938 1937-1939 1938 1948
Longueur 22,360 m 40,710 m 22,260 m 41,630 m
Largeur 2,940 m 2,920 m 2,920 m 2,900 m
Hauteur 4,179 m 4,185 m 4,195 m 3,700 m
Masse 64 t 78 t 42,7 t 79 t
Pantographes 1x E14/E15 2x puis 1xE14/E15 2x puis 1x E14/E15 2x E20 puis 2x AM14
Diamètre roues 925 mm 950 mm 900 mm 1000 mm
Moteurs 4x SW 9273 6x SW 9273 4x EM 36 6x TA 614A
Rapport d’engrenage 3,56 2,842 2,63 3,387
Puissance continue 733 kW 883 kW 471 kW 846 kW
Puissance unihoraire 770 kW 965 kW 624 kW 912 kW
Places assises 1re/2e 0 / 64 28 / 94 0 / 78 24 / 88
Places debout 1re/2e 104 24 / 60 0 / 34 ?
Strapontins 0 11 9 34
WC 0 1 0 1
Compartiment bagages 5 m² 9,4 m² 9 m² 13 m²
Vitesse maximale 100 km/h 130 km/h 140 km/h 140 km/h
Radiation 1971-1973 1973-1989 1975 1968-1973
Attelage Boirault Boirault Boirault unifié

▶▶▶ leur carrière à Toulouse. Dans un premier
temps, elles sont graphiquées pour assurer
l’unique aller-retour express Toulouse/Brive
Demi-tour pour la
Z 4702 à Latour-de- ainsi qu’un aller-retour omnibus Toulouse/
Carol en août 1954. Cahors/Brive. En fonction des besoins, elles
remorquent un ou plusieurs autres véhicules,
le cas échéant en panachage : voiture à essieux
ou à bogies, remorque d’autorails XR 7200 De-
cauville, wagon de marchandises ou fourgon.
En théorie, elles peuvent aussi circuler en UM.
Rare photo d’une Z Munies du freinage par récupération, elles sont
4700 en fin de carrière aussi tout indiquées pour assurer deux allers-re-
avec ses pantos tours 3423/3424 et 3417/3414 sur la ligne Toulouse/
unijambistes AM14.
Latour-de-Carol, qui cumulent un service semi-di-
En 1969, elle quitte
Toulouse-Matabiau vers rect entre Toulouse et Foix avec quatre arrêts, puis
le nord par le Poste 4.
© T. LELEU
omnibus au-delà. Elles remplacent les rames com-
posées de voitures à essieux et portières latérales
remorquées par des BB 1600. Les gains de temps
sontimportants,carellespeuventgravirlesrampes
de40°/°° jusqu’à 70 km/h. Leur puissance élevée est
particulièrement appréciée pour remorquer des
voitures supplémentaires selon les fluctuations
du trafic voyageurs ou des wagons pendant les
périodes de transhumance des animaux.
Fin de carrière aux essais pour la Z 4702
Au cours des années 1960, les pantographes
d’origine E20 sont remplacés par des AM14 uni-
jambistes pour limiter le soulèvement de la ca-
ténaire. Leur service commercial prend fin dès
juillet 1968. Si la Z 4701 est immédiatement radiée,
la Z 4702 poursuit sa carrière en étant placée en
utilisation spéciale. Mutée à Brive-la-Gaillarde en
août 1968, elle sert à tracter la voiture pendulaire
Mauzin-Chartet pendant ses essais entre Brive
et Toulouse, sa forte puissance massique étant
appréciée, tout comme la possibilité d’y installer
dans de bonnes conditions les ingénieurs et les
appareils de mesure. Elle sert aussi à participer
aux essais de hacheurs de courant avec la Z 4203.
Elle est finalement radiée en novembre 1973. Bien
que sans descendance directe immédiate, ces deux
prototypes peuvent néanmoins être considérés

comme les inspirateurs des automotrices Z2. ◼

ferrovissime - 49
 LILLE - LE GRAND PALAIS

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European Model Show
Europäische Modellbau-Messe

COMMENT EFFECTUE-T-ON UN
CROISEMENT EN VOIE UNIQUE ?
Entre Capdenac et Viviez, le disque impair de la gare de Penchot précède un petit tunnel.
R
églementairement,ily
a croisement lorsque,
dans une gare inter-
médiaire d’une ligne
à voie unique (VU),
deux trains de sens contraire
doivent se rencontrer avant de
poursuivre, l’un et l’autre, leur chemin
vers la gare suivante. Il n’y a donc pas
croisement, au sens propre, si l’un des
deux trains concernés est terminus ou
origine ; ni, par ailleurs, dans une gare
d’extrémitédelaligneàVUdanslaquelle,
pardéfinition,touslestrainssont,selon
leur sens, origine ou terminus.
Les lieux de croisement découlent
des horaires et sont repérés d’une fa-
çon particulière dans les documents
concernés, fascicules-horaires ou avis-
Cœur de métier
© B. PORCHER
Un croisement semble être une action banale mais il
importe de ne pas la faire machinalement, chaque geste
doit être réfléchi. Comment procède-t-on ?
Texte : Michel Boumier
trains. Sur les tableaux de succession sont à appliquer avec rigueur dans
des trains des gares de VU, une men- tous les cas :
tion en regard de chaque train croiseur - L’agent-circulation doit prendre les
rappelle l’opération à effectuer. Bien mesures utiles pour arrêter et retenir
entendu, un croisement ne peut se chacun des trains jusqu’à l’arrivée
faire que dans une gare, c’est-à-dire un du train croiseur.
lieu ouvert au service de la circulation. - Les trains croiseurs doivent être re-
çus sur des voies différentes. Il est en
Les règles de croisement effet interdit de prévoir leur réception
Les opérations à effectuer diffèrent sur la même voie, même si le délai
selon les types de VU et leur équipe- est suffisant pour manœuvrer et dé-
ment, mais deux règles essentielles gager la voie pour la rentrée du ▶▶▶
ferrovissime - 51
 Cœur de métier

© DR/SNCF
© T. PORCHER

En voie unique, un train spécial nécessite des mesures de sécurité spécifiques. Le Le signal d’entrée d’une gare sous sa forme la plus
4 octobre 1981, un train d’amateurs remorqué par la 140 C 27 préservée passe à toute simple: le repère d’entrée en VUSS. Saulxures, entre
vapeur au point d’arrêt de Dorlisheim, peu après Molsheim sur la ligne vers Sélestat. Saales et Rothau, le 12 novembre 1982.

▶▶▶ deuxième train. En effet, en cas
de retard du premier train, le risque
de nez à nez serait réel.
Dans une gare, la voie principale
étant dédoublée par une voie d’évi-
tement, par une aiguille appelée ai-
guille d’entrée/sortie, on utilise ces
deux voies pour faire les croisements.
Le choix de la voie de réception de
chaque train est fonction de plusieurs
paramètres : consistance des installa-
tions, longueur de la voie d’évitement
notamment,naturedestrainscroiseurs,
voyageurs ou non, emplacements
respectifs des voitures et des wagons
dans les MV, composition habituelle de
chaque convoi, autorails avec ou sans
remorques ou rames tractées. Le délai
s’écoulant entre l’arrivée de chaque
train peut influencer le choix de la
voie de réception. Il faut s’efforcer en
premier lieu de faciliter le service en
évitant, par exemple, de bloquer trop
longtemps la clientèle descendue sur
le quai opposé au BV, certains usagers
pressés étant tentés de prendre des
risques pour traverser.
Sur les voies uniques à
signalisation simplifiée…
L’arrivée habituelle de voyageurs
au dernier moment est également à
prendre en compte si le flux de clients
au départ est important. En cas de croi-
sements réguliers, le choix entre ces
deux voies est fait au début du service
horaires et ne varie pas, sauf si le re-
tour d’expérience en montre l’intérêt.
En cas de croisements accidentels ou
exceptionnels, circulation d’un train
spécial par exemple, la réflexion est
à faire chaque fois. Dans les cas les
plus courants, chaque train croiseur,
en partant, talonne l’aiguille de sortie.
Après ces mesures générales, exami-
nons les procédures particulières pour
les types de VU les plus fréquemment
rencontrés: la voie unique à signalisa-
tion simplifiée (VUSS), les voies directes
type ancien Ouest ou type SNCF.
La procédure la plus simple pour la
préparation d’un croisement concerne
les lignes à VUSS. Les gares y étant toutes
d’arrêt général, aucune mesure n’est
à prendre pour arrêter les trains et il
suffit de placer, sur chaque voie de ré-
ception, un signal d’arrêt à main (SAM)
au point que ne doit pas dépasser la tête
de chacun d’eux. L’agent-circulation
décadenasse en temps utile les deux

52 - ferrovissime

L’AGENT-CIRCULATION DOIT PRENDRE LES MESURES UTILES POUR ARRÊTER
ET RETENIR CHACUN DES TRAINS JUSQU’À L’ARRIVÉE DU TRAIN CROISEUR
aiguillesd’entréeetdisposel’uned’elles
pour la voie d’évitement, l’autre conti-
nuant à donner la direction de la voie
habituelledecirculation.Aprèsl’arrivée
de chaque train, et après avoir vérifié
qu’il est complet, l’agent-circulation
enlève le SAM retenant l’autre convoi.
Les gares de voie directe
type ancien Ouest
Les gares de voie directe type ancien
Ouest sont habituellement précédées
seulement d’un disque de chaque côté.
Les aiguilles d’entrée sont normale-
ment verrouillées dans la position où
elles assurent la continuité de la voie
directe, voie permettant le passage
de trains sans arrêt. La manœuvre
de ces aiguilles et de leurs verrous
se fait à pied d’œuvre. La fermeture
des deux disques est nécessaire pour
le déverrouillage par le biais d’un
enclenchement par serrures. Pour
un croisement, l’agent-circulation
déverrouille les deux aiguilles d’en-
trée et dispose l’une d’elles pour la
voie d’évitement, l’autre continuant
à donner la direction de la voie directe.
Chacun des trains croiseurs rencontre
par conséquent le disque fermé, ce-
lui-ci annonçant par ailleurs le SAM
placé au point que ne doit pas dépasser
la tête des convois. Après l’arrivée de
chaque train, et après avoir vérifié
qu’il est complet, l’agent-circulation
enlève le SAM retenant l’autre convoi.
Dans ces gares, les horaires peuvent
prévoiruncroisementsansarrêtdel’un
© T. PORCHER
des trains croiseurs. Le train avec arrêt
est alors reçu sur la voie d’évitement et,
après sa réception, l’aiguille d’entrée
est remise dans la position habituelle
et verrouillée. Le SAM s’adressant au
train sans arrêt peut alors être effacé et
le disque correspondant ouvert. Après
le passage de ce dernier, l’aiguille de
sortie est déverrouillée pour le départ
du train qui était « enfermé » sur la
voie d’évitement, après enlèvement
du SAM qui le retenait.
Lesmêmesdispositionspeuventêtre
appliquées pour un croisement avec
arrêt des deux trains. Cette mesure a
sonintérêtlorsquel’undestrainsesten
retard: celui-ci rencontre alors le disque
ouvert et, étant dispensé de marche à
vue, regagne ainsi un peu de temps. ▶▶▶
ferrovissime - 53
Cœur de métier

© DR / SNCF
Gare de voie directe type ancien Ouest.

© DR / SNCF
Gare de voie directe type SNCF avec signal unique de sortie.

Un élément important de la
sécurité sur certaines lignes
à voie unique : les cloches
électriques. Ossès-Saint-Martin-
d’Arrossa, le 5 juin 1982.
© T. PORCHER

DANS UNE PETITE GARE DE VOIE UNIQUE, UN CROISEMENT EST UN MOMENT

TRÈS IMPORTANT DE LA JOURNÉE
Les gares de voie directe
type SNCF
Les gares de voie directe type SNCF
sont précédées de chaque côté d’un
disque et d’un avertissement. Un TIV
de rappel 30 ou 40 est présenté au droit
de l’aiguille d’entrée lorsque celle-
ci est déverrouillée. Ces gares com-
portent, en principe, un sémaphore
de sortie commun à la voie directe et
à la voie d’évitement, permettant de
retenir les trains. Aiguilles et verrous
sont manœuvrables à pied d’œuvre ou
à distance selon les installations et en-
clenchés par serrures avec les disques.
Pour un croisement, l’agent-circula-
tion déverrouille les deux aiguilles
d’entrée et dispose l’une d’elles pour
▶ L’EXIGENCE D’UNE ATTENTION SOUTENUE ◀
Dans une petite gare de voie unique,
un croisement est un moment très
important de la journée. L’agent-
circulation, qui peut être seul, doit
effectuer dans un laps de temps
très court des tâches élémentaires
nombreuses, mais toutes aussi
indispensables les unes que les autres.
Sur ces lignes, la sécurité repose sur
le respect par les gares de l’ordre
normal des circulations. L’application
stricte des procédures de croisement y
la voie d’évitement, l’autre continuant
à donner la direction de la voie directe.
Les disques peuvent alors être ouverts,
chaque train étant reçu sur avertisse-
ment fermé et TIV présenté, l’avertis-
sement annonçant le sémaphore de
sortie qui est maintenu fermé jusqu’à
l’arrivée du train de sens contraire.
Si les horaires prévoient un croi-
sement sans arrêt de l’un des trains
croiseurs, le train avec arrêt est reçu
sur la voie d’évitement, le disque étant
ouvert,l’avertissementetlesémaphore
étant maintenus fermés et, après sa
réception, l’aiguille d’entrée est remise
danslapositionhabituelleetverrouillée.
Les signaux s’adressant au train sans
arrêt peuvent alors être ouverts. Après
contribue. L’agent-circulation doit veiller
à ne pas se laisser distraire pendant la
préparation et l’exécution du croisement,
notamment par les voyageurs, qui
peuvent être nombreux lors des pointes
journalières, tout en veillant à leur
accueil et à leur sécurité. Sans parler des
agents d’autres services, qui peuvent
parfois avoir la fâcheuse habitude de
stationner inutilement dans le bureau
de l’agent-circulation, sans se rendre
compte de la gêne ainsi occasionnée!
le passage de ce dernier, l’aiguille de
sortie est déverrouillée pour le départ,
aprèsouverturedusémaphore,dutrain
stationnant sur la voie d’évitement.
Les autres procédures
Le Règlement ne prévoit pas la pos-
sibilité d’utiliser la même procédure
dans le cas où les deux trains ont un
arrêt prévu. En effet le gain de temps
est ici quasiment nul, contrairement
aux gares de VD type ancien Ouest,
puisque les trains sont reçus avec
disques ouverts.
Ilnefautpasoublierqu’àcesactions
strictementliéesauxcroisementssesu-
perposent les opérations de cantonne-
ment,téléphoniqueouparblockmanuel
par appareils, devant se faire dans un
ordre bien précis. La reddition de voie
libre derrière un train doit impérati-
vement précéder l’annonce du train
croiseur. Par ailleurs, certaines lignes
sont équipées de cloches électriques
permettantd’annonceràdespointsin-
termédiaires,établissementsdepleine
ligneoupassagesàniveauparexemple,
ledépartoulepassagedechaquetrain
en distinguant le sens de circulation.
En cas de croisement, il est prescrit
de n’annoncer chaque train qu’après
l’arrivéedutraincroiseur,afind’éviter
que celui-ci ne soit arrêté en raison de
l’annonced’untraindesenscontraire. ◼

54 - ferrovissime
 © T. PORCHER
Un croisement sans arrêt: le Rapide 1577 Strasbourg/Lyon, composé de deux RTG en jumelage, croise en gare d’Arbois l’Omnibus 7224 assuré
par une UM d’X 2800 et une remorque. Si ce dernier doit stationner plusieurs minutes, le rapide traverse la gare à la vitesse maximale autorisée.
© T. PORCHER

Bourbourg, entre Calais et Dunkerque, le 23 août 1986: croisement entre les trains 7193 (X 4569) et 7192 (X 4548).

ferrovissime - 55
Gares et installations
Histoires de traversées
Les traversées à niveau de
voies ferrées n’ont pas été
très nombreuses en France.
Mais des exemples existent,
anciens bien sûr… mais
aussi modernes!
Texte et photos : Dominique Paris
56 - ferrovissime
L
es traversées à niveau de
lignes ferroviaires, qui ont
existé en France de façon
ponctuelle, ont concerné
notamment des voies fer-
rées de grands réseaux et des
lignes d’intérêt local.
Lorsque je découvre une
telle installation, surnommée
le « Carré de Picardie », encore
active dans le secteur minier du
nord de la France, au milieu des
années 1980, il me vient l’idée
d’organiser des prises de vues
avec les trains des deux lignes
qui se croisent, les deux convois
s’approchant au plus près, afin
de conserver un témoignage
d’une installation destinée à
disparaître à brève échéance ;
en effet, l’une des deux voies est
une ligne minière et la fin de
l’exploitation des houillères est
désormais proche.
Quelques années plus tard,
c’est la construction tout à fait
inattendue d’une telle traversée
à niveau entre la voie ferrée
SNCF Nantes/Châteaubriant et
la ligne 1 du tramway nantais
qui va motiver une semblable
démarche.
Le «Carré de Picardie»
En 1985, non loin de la grande
gare de Somain, une installation
originale et peu courante sur
le réseau français vit ses ▶▶▶
 En septembre 1985, le train de
desserte SNCF, revenant d’Aniche
avec des trémies vides et se
dirigeant vers Somain, traverse à
niveau la voie Sainte-Hyacinthe/ ▶ UN PROBLÈME
Somain/Fosse Barrois des HBNPC.
DE VOCABULAIRE ◀

Le train miniature a popularisé un

élément de voie en forme de croix
désigné, dans les catalogues, par le
terme de croisement. Une référence à

à niveau la pratique routière, sans doute. Car

dans le monde du chemin de fer, on
emploie le terme de traversée pour
nommer deux voies dont les itinéraires
s’entrecoupent. Les traversées à niveau
formant des angles proches de l’angle
droit, comme celles décrites dans cet
article, sont plutôt rares en France. La
plus célèbre est sans doute celle de
La Voulte-sur-Rhône. Par contre, les
traversées obliques (TO), les traversées
de jonction simple (TJS) et les traversées
de jonction double (TJD) sont courantes.
Cependant, il faut savoir que ces
traversées, qu’elles soient proches de
l’angle droit, obliques ou de jonction,
comportent aussi deux croisements.
Car dans la terminologie des appareils
de voie, le croisement est la partie d’un
appareil qui comprend la pointe de cœur.
On trouve donc deux croisements sur les
traversées et il y a aussi un croisement
sur un branchement - l’appareil que
les modélistes nomment aiguillage.
Jehan-Hubert Lavie

Tracté par la A1A A1A 62012, le train de desserte SNCF ramène les wagons qui ont servi à livrer
du sable pour les verreries.

ferrovissime - 57
Gares et installations
Arrêtés et retenus en amont par des signaux disposés à cet effet, les trains de la SNCF et ceux des houillères ne pouvaient, en effet, se rencontrer sur
cette traversée. Ici, la scène a été organisée pour le photographe en annulant les dispositifs de sécurité.
▶▶▶ derniers temps d’activité.
Il s’agit d’une traversée à niveau
entre l’ancienne ligne SNCF So-
main/Aubigny-au-Bac et une voie
ferrée privée appartenant aux
Houillères du Bassin du Nord et
du Pas-de-Calais (HBNPC). Les
cheminots de Somain ont cou-
tume de l’appeler le «Carré de
Picardie».
La ligne SNCF Somain/Aubi-
gny-au-Bac, fermée aux voya-
geurs en 1939, a été limitée
après-guerre au tronçon Somain/
Azincourt-Garage, soit 8 km,
mais elle a cependant été électri-
fié en 1957 en 25000 V/50 Hz en
raison de l’importance du trafic
marchandises. Un trafic dont le
volume a par la suite très forte-
ment baissé au moment de la
fermeture, au cours des années
1970, du complexe sidérurgique
d’Usinor-Denain. Ainsi, en ce
milieu des années 1980, le trafic
ne concerne plus, pour l’essen-
tiel, que les verreries d’Aniche,
58 - ferrovissime
le tronçon Aniche/Azincourt-Ga-
rage n’étant plus desservi, tan-
dis que la caténaire 25 000 V
semble bien inutile, puisque les
dessertes s’effectuent en diesel
depuis Somain.
Une voie des houillères…
La voie ferrée perpendicu-
laire, appartenant aux HBNPC,
est un moignon subsistant de
l’ancienne ligne Somain/Douai
par le sud, construite à l’origine
par les Mines d’Aniche, qui des-
servait notamment Lewarde
où se situe l’actuel centre his-
torique minier. Déposée entre
Sainte-Hyacinthe et Dechy, près
de Douai, ce qui reste de la ligne
survit alors grâce à la desserte
du dépôt HBNPC de Sainte-Hya-
cinthe, à Auberchicourt. Cet éta-
blissement abrite les quelques
diesel qui tournent encore
pour la desserte du dernier
puits de mine de charbon du
secteur, doté d’installations
très modernes, la fosse Bar-
rois, à Pecquencourt, près de
Montigny-en-Ostrevent. Bien
que l’extraction de la houille ait
cessé depuis juin 1984 à la fosse
Barrois, il subsiste encore un
trafic sur le site, le lavoir retrai-
tant les terrils pour en extraire
le charbon résiduel, opération
qui perdurera jusqu’en 1988.
Contact est donc pris avec
l’Etablissement Exploitation
de Somain, qui trouve l’idée
séduisante et qui se met à son
tour en relation avec les HBNPC
à Sainte-Hyacinthe qui acceptent Cette fois, nous
de leur côté de relever le défi. sommes à Nantes. En
avril 1989, le temps
des prises de vues,
Un making off complexe le train SNCF venu
La chose n’est guère aisée, car de Châteaubriant
il faut faire venir spécialement marque l’arrêt à la
une machine des Houillères Haluchère, à côté du
depuis Sainte-Hyacinthe, juste tramway, qui est alors
au moment où passe le train en phase de marche
à blanc, juste avant
SNCF. On doit aussi mobiliser des
l’ouverture au public
agents du service électrique pour du prolongement de
neutraliser la signalisation ▶▶▶ la Beaujoire.
Le passage à niveau non gardé, longeant la voie des houillères, complique un peu plus cette disposition de voies exceptionnelle.

UNE INSTALLATION ORIGINALE ET PEU COURANTE SUR

LE RÉSEAU FRANÇAIS VIT SES DERNIERS TEMPS D’ACTIVITÉ

ferrovissime - 59
Gares et installations
▶▶▶ ferroviaire et permettre
aux deux trains de s’approcher
de l’appareil de voie de traversée
à niveau, les signaux étant évi-
demment positionnés en retrait.
Mais avec les bonnes volontés de
tousetledésirdegarderunetrace
de cette installation qui vit ses
derniers temps, rendez-vous est
pris un jour de septembre 1985.
Le matin, tout le monde s’est par-
faitement coordonné, les trains
sont bien au rendez-vous… mais
unbrouillardtrèsdensecontrarie
passablement la séance de prises
de vues et l’on se donne une se-
conde chance au retour du train
SNCF. Entretemps, le brouillard
s’estengrandepartiedégagéetles
prises de vues peuvent avoir lieu
sans encombre: quand le train
SNCF revient d’Aniche, la diesel
des HBNPC, la 040 DE15, est reve-
nuedeSainte-Hyacintheprendre
la pose: mission accomplie!
Traversée de la Haluchère
Lorsqu’est décidé, en 1988, le
prolongement de la première
ligne du tramway nantais entre
le terminus de la Haluchère et le
stade de la Beaujoire, je m’aper-
60 - ferrovissime
çois sur les plans du projet qu’il
y a franchissement de la ligne
SNCF Nantes/Châteaubriant par
la double voie du prolongement
du tram. Par un coup de fil à la
Semitan qui exploite les trans-
ports urbains nantais, j’apprends
à ma grande surprise que l’on ne
construira, non pas un pont, mais
une traversée à niveau, une telle
disposition étant jugée acceptable
QUELQUES DIESEL QUI TOURNENT ENCORE
POUR LA DESSERTE DU DERNIER PUITS DE
MINE DE CHARBON DU SECTEUR
depuis que la ligne SNCF a perdu
ses trains de voyageurs et qu’elle
n’accueille plus qu’un unique train
de fret quotidien. Je prépare donc,
dès cette époque, le reportage en
prenant des clichés du site où se
situera la traversée avant travaux,
pour revenir plus tard, quand la
construction aura avancé.
En avril 1989, profitant de
la phase de marche à blanc du
tramway avant la mise en service
du prolongement de la Beaujoire,
Pas de cœur ici
et donc pas de
j’obtiens l’accord de la SNCF et de croisement à
la Semitan pour organiser une proprement parler.
Tout est réalisé à
mise en scène voisine de ce qui partir de courtes
avait été fait près de Somain, sections de rails.
quatre ans plus tôt. Là aussi, la
signalisation est neutralisée et
il est convenu que le train de
fret arrivant de Châteaubriant
stationnera quelques minutes,
le temps de pouvoir réaliser plu-
sieurs clichés sous divers angles.
Le photographe officiel de la
Semitan est également présent.
Aujourd’hui, la ligne de Châ-
teaubriant ne voit plus de fret La voie des houillères
depuis longtemps, mais elle a est empruntée par
été rouverte aux voyageurs avec l’une des nombreuses
une desserte type tram-train, et locomotives diesel
la traversée à niveau est de ce Brissonneau et
fait toujours bien active. Mais, Lotz des HBNPC,
similaires aux
situés sur une plateforme en-
BB 63500 de la SNCF.
tièrement engazonnée, ses rails Ici, la 040 DE 15
se détachent nettement moins arrive du dépôt de
qu’auparavant! ◼ Sainte-Hyacinthe.
▶ SITUATION GÉOGRAPHIQUE DE LA TRAVERSÉE DITE « DU CARRÉ DE PICARDIE » ◀
Infographie: Dominique Paris

Le site de la Haluchère dans son

état actuel, où le tram-train de
Châteaubriant traverse la voie du
tram urbain.

ferrovissime - 61
Matériel roulant d’hier
Les draisines
Billard
modernisées
Les draisines se sont vu appliquer les modernisations
les plus radicales. Et nombreuses sont les Billard qui ont
bénéficié d’une véritable reconstruction.
À
la création de la SNCF,
le service Voie et Bâ-
timents récupère un
effectif important
de draisines Billard
construites pour les
anciens réseaux. Dans
un premier temps, ces draisines
conservent, pour l’essentiel, leurs
caractéristiques d’origine et leurs
particularités régionales. Ce n’est
que dans les années 1950, une fois
les reconstructions de la guerre
achevées, que des opérations de
modernisations sont mises en place.
Les Billard 4-4-29
modernisées
Dans l'état de 1961, les 4-4-
29 sont équipées d'un moteur à
essence Delahaye 140FK, d'une
boîte à 3 vitesses Billard (celle
d'origine ?) ou 4 vitesses De-
lahaye, et d'un inverseur Latil.
Toutes ont donc fait déjà l'objet
d'une première modification.
C'est sans doute une profonde
modernisation qu'amorce le Sud-
62 - ferrovissime
Texte : A.M.C.L. / Alain Dubois
Ouest,après1963,commesemble
l'indiquerunplanrégionalquipré-
voitunecaissebois.Outrelefaitde
recevoirunenouvellecaisseetun
nouveau capot, le châssis semble
reconstruit, en version soudée et
nonrivetée,avecunempattement
nettementallongéetconservation
du tamponnement par ressort à
lames. Mais c'est avec une caisse
polyester et un capot unifié à vi-
sière qu'on les trouve en fin des
années 1960, avec un diesel Per-
kins4.203etuneboîtedevitesses
de camionCitroënT55.Ellessont
alors équipées d'un attelage auto-
matique à tulipe avec conservation
du ressort de tamponnement.
Si la Région Sud-Ouest a mené
le projet de modernisation, elles
y ont peut-être constitué le début
de la série 2P600. Elles sont en-
suite affectées au Réseau Sud-Est
(conséquence de la régionalisa-
tion ?) et reçoivent la numérota-
tion unifiée 2.001 à 2.007.
Elles sont aujourd'hui toutes
réformées.
Les Billard 4-4-31
modernisées Sud-Ouest
Sur la Région Sud-Ouest, les
4-4-31 connaissent une moder-
nisation dans les années 1950.
Leur forme parallélépipédique
est remplacée par une association
capot/caisse bois SO/coffre arrière,
leur donnant l'aspect classique
des draisines de cette époque.
Cette 5M465 est
Elles sont alors numérotées une Billard D80D1,
dans le groupe 2P ou 2M, dans la sans doute l’ex-PLM
série 600 (sans doute à partir du 635, dans un état
n°611 et jusqu'aux environs du intermédiaire entre la
n°660). Elles figurent dans l'état situation d’origine et
du parc de 1961 sous la désigna- celle définitive. La caisse
est une métallique Sud-
tion Billard 4-4-31. Est et le capot ne semble
À cette occasion, elles re- plus celui d’origine.
çoivent un moteur à essence De- Ce nouveau capot
lahaye 140FK avec boîte 3vitesses était peut-être justifié
Billard (d'origine?) ou 4 vitesses par le remplacement
Delahaye (comme les 4-4-29). Le du moteur CLM,
encombrant en hauteur,
tampon à lame est conservé,mais
par un Unic M32S.
un attelage manuel pour barre à
boule est monté. Après 1963, le
moteur Delahayeestremplacésur
certaines par un diesel Perkins
(4.192 semble-t-il). ▶▶▶
 > Précision <
La photo parue en pages 70 et 71
de Ferrovissime n° 95 montre une
draisine Renault SM modernisée
Sud-Ouest et non une Billard, dont
certaines unités présentaient néan-
moins un aspect proche.

© DR / COLL. LR PRESSE

▶ DES BILLARD D80D1

DEVIENNENT CHASSE-NEIGE ! ◀
Draisine Billard D80D1 modernisée
en chasse-neige, n°6.262, vue aux
Ateliers de Brive après sa réforme.
On notera la hauteur des phares pour
éclairer au-dessus de l'étrave, les
hublots dégivreurs sur le pare-brise,
les renforts de châssis, et le déflecteur
jaune et noir encore présent à l'arrière.
© A.M.C.L. / ALAIN DUBOIS

La caisse Sud-Est présente ici la

particularité de ne pas avoir de
nervures sur la face latérale.

ferrovissime - 63
Matériel roulant d’hier
© T. LELEU
C'EST AVEC UNE CAISSE POLYESTER ET UN CAPOT UNIFIÉ
À VISIÈRE QU'ON LES TROUVE EN FIN DES ANNÉES 1960
▶▶▶ Après la réforme de la plu-
part d'entre elles, certaines se
sont retrouvées comme engin
de manœuvre sur des embran-
chements particuliers (une
barre d'attelage étant sans
doute utilisée). Ainsi, au dé-
but des années 1980, il était
possible de voir en gare d'Ussac,
au nord de Brive sur la ligne
Paris/Toulouse, la 2P629 à l'état
d'épave, dont l'absence de capot
laissait voir le nom de Delahaye
sur le moteur.
Il est probable que des châssis
de 4-4-31 aient été utilisés pour
construire les draisines dites “La-
til”, de même apparence que les
4-4-31Sud-Ouest,etquiserontvues
ultérieurement.
Les Billard 4-4-31
modernisées Sud-Est
Les exemplaires mutés sur le
Sud-Est lors de la création de la
SNCF se voient modernisés dès
l'après-guerre selon des dispo-
sitions propres à cette Région.
Ces draisines sont numéro-
tées dans la série 2P, à partir du
n° 411 et figurent aussi à état
64 - ferrovissime
des effectifs de 1961 sous la
désignation Billard 4-4-31. Au
moins quatre types de caisses,
certains assez proches l'un de
l'autre, sont connus.
Ces engins sont équipés à
cette occasion d'un moteur es-
sence Renault Etendard et d'une
boîte mécanique à 4 vitesses
de la même marque (plus un
inverseur Latil).
Un attelage léger type Est
y est monté et l'attelage d'ori-
gine à cheville par manchon
est conservé.
Les Billard 4-4-31
modernisées Méditerranée
SurlaRégionMéditerranée,en
findesannées1940,laSNCFafait
recarrosserunesériededraisines
par un constructeur de Valence,
auquel elle fournissait les roues
et les châssis.
Au vu des organes de roule-
ment, il semble qu'il s'agit de
4-4-29 ou 4-4-31, sans doute ve-
nues du P.O-Midi, ou de celles se
trouvant sur la Région Sud-Est
avant la création de la Région
Méditerranée.
Draisine Billard 4-4-31
(sans doute la 2P613) du
Train Touristique Guitres-
Marcenais. Sa grille de
radiateur est absente.
La 4-2M651 à Pau
en novembre 1972.
C’est une Billard
4.4.29 ou 31
modernisée une
seconde fois.
© A.M.C.L. / ALAIN DUBOIS
Ultérieurement, dans la deu-
xième moitié des années 1960,
ce sont peut-être ces mêmes
© DR / COLL. TRANSVAP
draisines qui sont remoderni-
sées par installation d'une caisse
métallique Sud-Est, d'un tampon-
nement léger type Est et d'un
attelage automatique à tulipe.
Un dessin des Ateliers SNCF de
Brive de 1967 montre ce type de
draisine, en le nommant “Groupe
2 Méditerranée”.
Une caisse de forme légère-
ment différente de la précédente
semble avoir été utilisée sur ces
draisines, peut-être sur les pre-
mières remodernisées. Elle com-
porterait des accès latéraux et
non à l'arrière, les faces extrêmes
étant alors identiques, avec des
vitres de pare-brise légèrement
moins hautes et une visière plus
basse. Les parois semblent lisses
et non rainurées.
Les Billard 3P modernisées
Il semble que certaines 3P à Sur cette draisine
moteur Panhard, réaffectées à récupérée par la
Transvap, capot et
la Région Méditerranée, aient
phares extérieurs à
été modernisées par Billard en l’ancienne, mais cabine
type D50D5. Elles devaient ▶▶▶ nervurée moderne.
ferrovissime - 65
 Matériel roulant d’hier

© A.M.C.L. / ALAIN DUBOIS

Draisine Billard 4-4-29 modernisée à caisse polyester n° 2.004 du Chemin de Fer de Haute-Auvergne, vue à Bort les Orgues.

Draisine Billard La 4-2P631 à

remodernisée Bort en juin
© DR / COLL. TRANSVAP

© DR / COLL. TRANSVAP

Méditerranée, 1966. C’est une

dans l'état où Billard 4-4-29 ou
la Transvap 31 ex-P.O-Midi
l'a récupérée en version «2e
en 1994. modernisation».

▶▶▶ donc avoir une apparence Les Billard D80D de châssis leur a été appliqué. Ul-
similaireauxautresdraisinesdes modernisées térieurement, elles ont été dotées
types D50D. Les D80D et D80D1 sont mo- d'une petite grue hydraulique.
Dans les états de 1961, toutes dernisées en recevant une caisse Cette première modernisation
sont numérotées en groupe 3P, métallique Sud-Est et un capot les fait équiper d'un moteur Unic
désignées Billard 3P, en trois “à visière”. Numérotées 5.061 à M32S et d'une boîte de vitesses mé-
dispositions différentes : 065 dans le système de 1970, canique SOCOFER. Elles reçoivent
- avec moteur Ballot et boîte Bil- elles conservent leur désignation aussi l'attelage automatique à boule.
lard à 3 ou 4 vitesses, donc sans D80D1 dans l'état de parc. Une nouvelle modernisation leur
doute celles du Sud-Ouest avec Elles sont utilisées comme fait bénéficier d’un moteur RVI
moteur d'origine, plus certaines draisines chasse-neige, équipées 798 avec boîte mécanique Renault
de l'Est ; d'étraves à l'avant et à l'arrière, et BDSL, ce qui les fait passer en
- avec moteur Delahaye 140FK de hublots dégivreurs sur les vitres groupe 6, série 6.261 à 265.
et boîte Billard à 3 ou 4 vitesses, de pare-brise. C'est sans doute Elles sont toutes réformées
sans doute modernisées en pro- pour cette raison qu'un renfort depuis la fin des années 2000. ◼
venance de l'Est ;
- avec moteur Panhard 4HL et
boîte Billard à 2 fois 4 vitesses,
sans doute celles modernisées en
CETTE PREMIÈRE MODERNISATION LES
D50D5 de la Région Méditerranée. FAIT ÉQUIPER D'UN MOTEUR UNIC M32S
66 - ferrovissime
▶ DRAISINES BILLARD 4-4-31 MODERNISATION SUD-EST ◀ ▶ DRAISINES BILLARD
Infographies : A. Dubois SNCF CONSERVÉES ◀
- Billard 4-4-15: aucune 4-4-15 SNCF
n'a été conservée, mais les chemins
de fer touristiques possèdent de
très nombreux exemplaires venant
de chemins de fer secondaires,
quelquefois en quasi-état d'origine.
- Billard 4-4-20: aucune 4-4-20 n'a été
conservée. Le modèle à voie normale
présenté comme la B35 du P.O au
musée de Mulhouse semble être en
réalité une 4-4-15 du réseau de Franche-
Comté des CFTA; elle a été restaurée
par les Ateliers SNCF de Brive.
- Billard 4-4-29 modernisées (caisse
polyester): la 2.002 est sur le Chemin
de Fer Touristique du Rhin. La 2.003
est au musée Historail de Saint-
Léonard-de-Noblat. La 2.004 est sur
le Chemin de Fer de Haute-Auvergne.
- Billard 4-4-29 ou 4-4-31
modernisation Méditerranée (caisse
métallique Sud-Est): la Transvap en
possède une qui devait auparavant
appartenir à une entreprise ou un
embranché. Il semble que le Chemin
de Fer Touristique du Breda avait
aussi un type similaire. Un exemplaire
de couleur verte se trouve au dépôt
de Pontcharra (c'est peut-être celle
du CFTB). Le Train Touristique des
Cévennes en possédait une aussi.
- Billard 4-4-31 modernisation
Sud-Ouest (caisse bois Sud-Ouest):
les 2P613 et 2P661, ainsi que les
Diagrammes simplifiés de draisines Billard 4-4-31 modernisation Sud-Est, avec plusieurs formes 2P653 et 2P656 démotorisées,
de caisse. À l'origine, il y avait deux portes par face, l'une d'elles ayant été supprimée par la suite.
De haut en bas: 2P417, 2P420, 2P411, 2P422. ont été conservées sur le Train
Touristique Guitres-Marcenais.
Aujourd'hui, la 2P661 a été transférée
sur le Vélorail de Médréac et les
▶ MODERNISATION DE LA RÉGION MÉDITERRANÉE ◀ Infographies : A. Dubois démotorisées en Guadeloupe,
après mise en voie métrique.
- Billard 4-4-31 modernisation
Sud-Est: l'Association Lorraine
d'Exploitation et de Modélisme
Ferroviaire possédait la 2P417, avec
la première forme de caisse. Elle se
trouve maintenant sur le Chemin
de Fer de la Vallée de la Canner.
- Billard D80D1 modernisation
Allure de minibus sur rail pour ces draisines Billard modernisées pour la Région Méditerranée Sud-Est: la 6.263 a été
par un carrossier de Valence. conservée par le Conifer.

ferrovissime - 67
Matériel roulant d’hier

Il y a 60 ans, les BB 12000

arrivent sur la Bosse

Quand elles arrivent dans le Jura en 1958 pour circuler

sous une caténaire légère, les BB 12000 étonnent avec
leur cabine centrale et leur robe bleue...
Texte : Jean Cuynet

68 - ferrovissime
Qu’elle est belle
en robe bleue!
Arrivée depuis peu de
Strasbourg, la BB 12039 est
saisie sur le pont tournant
de Dole. La nappe de fils
caténaire dessert les voies
électrifiées de la rotonde.

© B. COLLINS

ferrovissime - 69
Matériel roulant d’hier

Le 505 entre en
gare de Frasne
derrière la
BB 12045, en
août 1962.
© G. ALBRICI / COLL. CB ROSSINELLI

A
vril 1958, à Mouchard.
Depuis la fenêtre
de ma chambre, je
guette l'apparition
des premières ma-
chines électriques sur
la Bosse : par bonheur,
la voie arrivant de Dole n'est qu'à
une vingtaine de mètres ! Après
deux années de chantiers, les
trains de travaux ont disparu, les
caténaires sont en place, mais les
141 R restent encore maîtresses
de la traction. Il y en a d’ailleurs
toujours quelques-unes au repos
à l'annexe traction de Mouchard :
elles assurent des renforts de
traction pour les trains allant
en direction de la Suisse, qui
doivent affronter les rampes
de 20 pour mille de la fameuse
Bosse du Jura.
Je suis en cours quand la
BB 12035 fait la première recon-
naissance de ligne. Après 18 h,
je passe au boulodrome proche
de la maison. Il y a là plusieurs
cheminots qui parlent avec fierté
de cette machine bleue à cabine
centrale. Son esthétique rompt
avec les formes traditionnelles
des BB 8100, CC 7100 ou 2D2 9100
que l'on peut observer à Dole de-
puis maintenant plus d'un an. Les
Alors que le train est allé faire
lignes de contact des caténaires
une brève visite à Pontarlier, la
sont également différentes : plus BB 12042 attend son retour pour
légères, à peine visibles de loin. partir sur Vallorbe où des festivités
Comme elles sont montées ▶▶▶ sont organisées.

▶ LES BB 12000 DE LA BOSSE (LIGNE DOLE/VALLORBE) ◀

Numéro Livraison Arrivée Dole Départ
12035 31.7.57 S - A 13.4.58 21.6.63 T
12036 7.10.57 S 17.4.58 8.6.63 M
12037 23.10.57 S - A 26.3.58 8.6.63 T
12038 13.11.57 S 17.4.58 8.6.63 T
12039 9.12.57 S 17.4.58 8.6.63 T
12040 3.1.58 S 24.4.58 8.6.63 T
12041 27.12.57 S 22.4.58 8.6.63 T
12042 21.1.58 S 17.4.58 8.6.63 T
© B. COLLINS

12043 21.1.58 S 24.4.58 1.6.61 L

12044 31.1.58 S 8.5.58 29.5.63 T
12045 14.2.58 S 8.5.58 8.6.63 T Document exceptionnel: depuis une
12046 6.3.58 S 15.6.58 8.6.63 T 141 R arrêtée à la sortie de la voie
12047 26.2.58 S 22.6.58 8.6.63 T directe de la gare de Mesnay-Arbois,
Nota : la BB 12041 est détachée à Annemasse du 8.5.60 au 29.9.60. vue de la 12042 en tête du train
Abréviation des dépôts : S = Strasbourg, A = Annemasse, M = Mohon, T = Thionville, L = Lens. inaugural du 25 avril, qui croise en
passant sur la voie d’évitement.

70 - ferrovissime
 © B. COLLINS
© G. ALBRICI / COLL. CB ROSSINELLI

Revenue de réparation, la BB 12044 arbore des parements jaunes et porte une livrée verte beaucoup moins seyante que les deux tons de bleu
d’origine. Gare de Frasne, train 506 arrivant de Vallorbe.

ferrovissime - 71
Matériel roulant d’hier
Toute pimpante,
la BB 12039
passe en plaque.
▶▶▶ depuis plusieurs mois,
nous avons eu le temps de nous
habituer à leur présence. Des si-
gnauxlumineuxontremplacéles
vieilles “tôles” du PLM et le nou-
veau poste d'aiguillage laisse voir,
de nuit, les feux multicolores de
son TCO (Tableau de Contrôle Op-
tique). Le progrès est en marche,
mais de machine point encore!
Les BB 12000
remplacent les 141 R
Enfin j'en vois une, durant la
pause de midi. Elle passe, majes-
tueuse, tractant une rame d'essai.
Bon sang, qu'elle est belle! Grâce
à la Vie du Rail, j'en connais les
principales caractéristiques.
L'inauguration officielle a lieu le
24 avril. C'est un mardi et, bien
sûr, je ne peux y assister. Je dois
aller en cours et j'enrage toute la
L'UNE D'ENTRE-ELLES, LA BB 12044, REVIENT RÉPARÉE MAIS HÉLAS
EN LIVRÉE VERTE AVEC DES PAREMENTS JAUNES
72 - ferrovissime
journée. Enfin libéré, je saute sur
mon vélo et me précipite en gare
juste à temps pour voir la queue
dupremiertraincommercialqui,
jel'apprendraiplustard,esttracté
par la BB 12035. Je me renseigne:
le train inaugural de retour de
Vallorbe et Pontarlier est passé
depuis longtemps, hélas!
Mais les BB 12000 remplacent
rapidement les 141 R et je peux
enfin les admirer tout à loisir.
Elles passent devant ma fenêtre,
puissantes et légères, dans le ron-
flement des ventilateurs et des
moteurs. Je ne peux que m'émer-
veiller devant les performances
de la traction électrique : toute
l'énergie passe par un simple fil à
peine plus gros que le doigt et le
pantographe semble bien fragile
pour transmettre une telle puis-
sance. Là où il fallait deux 141 R
© J. CUYNET
soufflant et crachant, une seule
BB 12000 est capable d'enlever
avec aisance le lourd Rapide 505,
un train international de jour re-
liant Paris à la Suisse et à l’Italie.
Parmi les cheminots bou-
listes, il y a Louis Marquis. C'est
un grand gaillard proche de la
retraite, patron de l'annexe trac-
tion de Mouchard, à l'autorité
incontestée. Lui, un vétéran de
la vapeur, s'est reconverti à l'élec-
tricité. Je l'aborde timidement; il
me répond: “ça t'intéresse petit,
viensmevoirdemainà14heures,
je serai dans mon bureau”. Le roi
n'est pas mon cousin!
Découverte
d’un nouvel univers
Pile à 14 heures, je pénètre
dans la vaste remise. Il fait beau
et chaud. Deux BB 12000 sta-

Une manœuvre particulière à Pontarlier est imposée en raison de l’absence de voie commutable entre le courant SNCF, 25 kV 50 Hz,
et celui des CFF, 15 kV 16 2/3 Hz. Le 515, tranche Berne du 505, comporte un wagon-restaurant non autorisé à franchir la frontière.
La BB 12000, pantographes baissés, et le WR sont tirés par la Re 4/4 qui les renvoie ensuite sous caténaire SNCF.
tionnent dans la pénombre sur
la seule voie équipée de caténaire.
LebureaudeLouisesttoutaufond.
Je suis dans le saint des saints,
émucommepourunpremierren-
dez-vous. Je frappe à sa porte et
j’entends un vigoureux “entrez”.
Il est au téléphone. “Attends-moi,
j'arrive”. Il me fait monter dans
la BB 12037 et dit: “on va faire
un tour, attention ça va claquer!”.
Effectivement, le disjoncteur
s'enclenche avec un grand bang.
Louis fait quelques tours avec le
“coupe-jambon” et, lentement, la
machine sort de la remise. Après
une centaine de mètres, Louis
stoppe : “je vais couper le cou-
rant et nous allons regarder ce
qu'elle a dans le ventre”. C'est ma
plus belle leçon d'électricité ! Du-
rant deux heures, il m'explique
le circuit traction, le système de
variation de la tension à la sortie
du transformateur (le graduateur)
les redresseurs à ignitron, ▶▶▶
▶ UN PEU DE TECHNIQUE ◀
L
ors de la commande des quatre
séries BB 12000, BB 13000,
CC 14000 et CC 14100, le principe du
redressement du courant monophasé pour
alimenter des moteurs à courant continu
via des tubes ignitrons ne paraît pas être
la meilleure formule. De grands espoirs
se portent sur les BB 13000 à moteurs
directs (donc à courant alternatif), mais
la technologie en décide autrement.
Les BB 13000 sont aptes à la traction
de trains légers, mais apparaissent peu
efficaces lorsque les charges s'accroissent.
Les CC 14000 utilisent une technologie
complexe et si leur puissance est
remarquable, elles souffrent d'une fiabilité
médiocre. Les CC 14100 répondent bien aux
attentes, mais elles ne sont construites que
pour du trafic marchandises lent et lourd.
Par contre, les BB 12000 font preuve de
© G. ALBRICI / COLL. CB ROSSINELLI
qualités inattendues: elles sont capables
d'enlever des trains lourds et de tracter
des rames voyageurs à 120 km/h! Leur
seul inconvénient provient de leur type
de construction avec une cabine centrale:
en recherchant la simplicité et l'économie
avec un seul poste de conduite, la
marche en unités multiples ne peut être
installée. D'autre part, les conditions
de conduite sont plutôt spartiates.
Cependant leur schéma électrique fait
florès et sera repris sur les BB 16500. Elles
sont suivies par de nombreuses séries de
machines qui, avec des variantes, utilisent
le même principe. Les redresseurs ignitrons
sont remplacés par des excitrons, puis par
des diodes silicium (redresseurs secs).
Il faudra attendre la mise en service du
TGV Atlantique et des Sybic pour qu'une
nouvelle chaîne de traction soit employée.
ferrovissime - 73
Matériel roulant d’hier

© G. PERROT / COLL. E. SEIBEL

En 1960, la BB 12045 est au « levage » au dépôt de Dole. Les bogies restent sur la voie, alors que la caisse est hissée par de puissants vérins.

© B. COLLINS
© J. CUYNET

La vue depuis le poste de conduite est relativement réduite, mais le La BB 12035 est la première à circuler sur Dole/Vallorbe, d’abord seule puis
long capot plongeant permet d’observer la voie de manière correcte. avec une rame composée d’un fourgon avec vigie et d’une dizaine de voitures.
© J. CUYNET
© P. PETIT

En 2000, à l’occasion de la manifestation Espérail, la BB 12035 réformée L’ergonomie et le confort ne sont pas les qualités premières des BB 12000 :
est présente en gare de Pontarlier. La plaque de l’inauguration et les le chauffage y est insuffisant et la position du conducteur, qui doit tourner
drapeaux sont en place, comme 42 ans plus tôt. la tête pour observer la voie, rendent la conduite plutôt pénible.

74 - ferrovissime
© DR / COLL. M. STEFANI
Scène typique en gare de Dole: la BB 12041 vient d’être mise en tête du Rapide 505 qui va s’élancer en direction de Frasne, où sera détachée
la tranche Berne. À droite, la 2D2 9122 qui a tracté le 505 depuis Paris va refouler jusqu’au gril 1500 V situé à l’autre extrémité de la gare.
L’autorail ABJ assure une correspondance en direction de Besançon.
▶▶▶ les selfs de lissage, les mo-
teurs, la ventilation, le groupe
Arno, les commandes. Il ouvre
tous les panneaux et nous nous
faufilonsdansdespassagesétroits
pour découvrir les moindres dé-
tails. Nous sommes couverts de
sueur et de poussière. Je le remer-
cie chaleureusement, des étoiles
plein les yeux. Qui est le plus
heureux des deux, l'adolescent
ou l'adulte, l'élève ou le maître ?
Un mois plus tard, en visite
à l'exposition universelle de
Bruxelles, je découvre au pavil-
lon français la maquette d'une
BB 12000 en plexiglas à une
échelle imposante, qui montre
son équipement intérieur. Et je
me demande encore aujourd’hui
ce qu'est devenue cette intéres-
sante maquette…
Les 12000 règnent
sur la Bosse
Rapidement, les BB 12000
de Dole prennent en charge
l’essentiel du trafic de la Bosse.
Elles assurent aussi bien le
Simplon-Orient-Express que
le trafic marchandises. Elles
côtoient des 141 R devenues Vallorbe ou Pontarlier, parfois
plus rares, mais aussi les ABJ de en double traction. Puis en 1963,
Besançon, les RGP faisant Lyon/ elles disparaissent car en juin les
Strasbourg et des prototypes BB 12000 doloises partent pour
comme la BB 20103, machine Thionville, Mohon ou Lens. Une
bi-fréquence qui tracte le 505 page se tourne.
et fait la couverture de La Vie Désormais, des BB 16500
du Rail en 1960. En octobre de prennent la relève. Cependant,
la même année, la BB 10001, il est encore possible d’obser-
future BB 20006, est amenée ver des 12000 à Dole après 1970,
à circuler de Dole à Pontarlier venant de Strasbourg. En juin
LES BB 12000 FONT PREUVE DE QUALITÉS INATTENDUES :
ELLES SONT CAPABLES D'ENLEVER DES TRAINS LOURDS
ET DE TRACTER DES RAMES VOYAGEURS À 120 KM/H
et prend en charge les trains 2000, à l'occasion de l'opération
516-506. En 1961, les BB 12000 Espérail – une grande exposition
croisent les rames CFF RAe qui organisée avec les clubs modé-
assurent le TEE Cisalpin. listes du Jura – la BB 12035 radiée
Louis prend sa retraite; l'an- revient à Pontarlier. Munie de la
nexe traction n'héberge plus de plaque de l'inauguration préser-
BB 12000. L'une d'entre-elles, la vée par miracle, elle rappelle la
BB 12044 accidentée à Vallorbe, présence de ces vaillantes ma-
revient réparée mais hélas en chines qui affrontèrent les dures
livrée verte avec des parements rampes et la neige du Jura durant
jaunes. Elles continuent à par- ces cinq années dont je garde
courir la Bosse, allant de Dole à tant de beaux souvenirs… ◼
ferrovissime - 75
Des trains sous la loupe

© DR / COLL. D. WALIGORA
Le Rapide 1 le Mistral quitte Paris-Gare de Lyon en 1958 derrière la CC 7133.

Le Mistral de 1958, seigneur du rail

Durant 20 ans, de 1950 à 1970, le train français le plus prestigieux est
sans conteste le Mistral. Retour en arrière de très exactement 60 ans…
Texte : Jehan-Hubert Lavie

P
our tous les Français, entre 1950 et
1970, le Mistral est le train le plus pres-
tigieux de la SNCF. Symbolisant à la
fois le luxe et la vitesse sur rail, c’est
le train le plus connu du grand public.
Cette belle renommée, le Mistral n’a pas
attendu son classement comme TEE pour
la gagner: dès 1956, sa rame climatisée en acier inoxy-
dable le fait accéder au summum de la modernité.
Étudions ce train il y a 60 ans, au service d’été 1958.
Le train le plus rapide du monde
À l’époque, la SNCF présente le Mistral comme
le train le plus rapide du monde. Et il est vrai que,
depuis le 2 juin 1957, il abat les 510,9 km entre
Paris et Lyon-Perrache en 4h00, avec un arrêt de
2 mn à Dijon-Ville. La vitesse moyenne s’élève à
127,7 km/h, un chiffre remarquable pour l’époque.
C’est alors le seul train de la SNCF autorisé à
150 km/h. Cette performance est d’autant plus > En savoir plus <
significative que le Mistral est lourd entre Paris Le Ferrovissime hors-
et Lyon : 694 à 737 t suivant les jours, le tonnage série n° 10 est consacré
aux locomotives
maximum ne devant pas dépasser 750 t. 1 500 V de vitesse à
Le Rapide 1 le Mistral quitte Paris à 13 h 10, adhérence totale.
dessert Dijon à 15 h 36/38 (129,2 km/h), Lyon-Per-
rache à 17 h 10/17 (128,2 km/h), rebrousse à Mar-
seille-Saint-Charles à 21 h 00/06 pour une arrivée
à Nice à 23 h 55.
Il faut aussi retenir l’extrême rapidité de cer-
taines opérations qui nous paraît impensable
aujourd’hui : l’échange traction à Lyon-Perrache
entre la CC 7100 et la 241 P avec coupure sur place
d’une tranche de 4 voitures en 7 mn ; le tête à
queue de Marseille-Saint-Charles en coupant à
un bout la 241 P et 2 voitures tout en attelant la
141 R à l’autre bout de la rame en 6 mn.

76 - ferrovissime
▶ LE SUMMUM ▶ COMPOSITION DE TRAIN ◀ Infographie : Jehan-Hubert Lavie et Marc Le Gad
DÈS LA NAISSANCE ◀ Rapide 1 le Mistral - Service d’été 1958
En 1958, le Mistral a huit ans, Paris/Lyon
/ Paris/Marseille
sa création remontant au ser-
vice d’été 1950. Preuve de la
volonté de la SNCF de placer CC 7100
d’emblée ce nouveau train au
plus haut niveau, elle lui attri-
bue les numéros 1 et 2. Rap-
A8myfiDEV 53
pelons qu’à l’époque, chaque
Région de la SNCF a sa propre
numérotation des trains. Pour
le Rapide le Mistral, les nu- A8myfiDEV 53
méros 1 et 2 concernent les
Régions Sud-Est et Méditer-
ranée, mais d’autres rapides A8myfiDEV 53
portent ces mêmes numéros
sur d’autres Régions.
CIWL_WR
Les charges sont plus réduites
en traction vapeur
Au retour, le Rapide 2 le Mistral quitte Nice à
12 h 00, fait son demi-tour à Marseille-Saint-Charles
à 14 h 50/57, dessert Lyon-Perrache à 18 h 40/48, Di-
jon-Ville à 20 h 21/23 (126,8 km/h) et arrive à Paris
à 22 h 51 (127,7 km/h). À ce service d’été 1957, il n’y
a que 8 parcours départ-arrêt à 120 de moyenne
sur la SNCF : 1 au Sud-Ouest et 7 au Sud-Est… dont
4 pour le Mistral !
Il faut noter que les tonnages sont nettement in-
férieurs en traction vapeur, la clientèle étant moins
nombreuse quand on s’éloigne de Paris : 500 t derrière
la 241 P et même 400 t avec la 141 R chauffée au fuel.
Le prestige exceptionnel du Mistral est tel que
la circulation à l’heure de ce train rapide est un
impératif bien intégré par tous les cheminots,
en particulier les Régulateurs. En la matière, la
comparaison avec l’époque actuelle est cepen-
dant moins aisée, presque tous les trains étant
désormais prioritaires !
Une rame composée avec
les meilleurs matériels
Depuis 1952, la traction du Mistral est confiée aux
CC 7100 qui ont acquis une immense notoriété en
1955 lors du record mondial de vitesse. A partir du
22 décembre 1954, elles portent, en tête du Mistral,
une plaque frontale à lettres d’or sur fond rouge.
La rame comporte essentiellement des voitures
A8 myfi 5021 à 42 type DEV U53 en acier inox
montées, à l’époque, sur bogies Y20H équipés du
frein haute puissance (HP), obligatoire pour pou-
voir circuler à 150 km/h. Ces A8 myfi sont munies
de l’équipement d’air conditionné Stone Carrier.
Les baies vitrées, pourvues d’un double vitrage,
peuvent ainsi être fixes, améliorant l’insonorisa-
A8myfiDEV 53 A8myfiDEV 53
A8myfiDEV 53
A8myfiDEV 53
Paris/Nice
CIWL_WR
A8myfiDEV 53
Pullman CDA
A8myfiDEV 53
Dsmyfi générateur
A5smyfi
tion des compartiments. Ceux-ci sont aménagés
avec six fauteuils revêtus de drap rouge ou vert.
Chaque rame comprend une voiture-bar dont il
existe trois unités (A5 smyfi 5081 à 83), également
climatisées. Deux d’entre elles, d’abord numéro-
tées A5 smyfi 5019 et 20, circulent dès 1954 dans
le Mistral, encore composé de voitures OCEM RA.
Le fonctionnement de leur air conditionné est
alors alimenté par une dynamo.
Un fourgon pour fournir l’énergie
Pour climatiser toute la rame, cette solution
n’est pas retenue, car elle aurait réduit les perfor-
mances du convoi. Préférence a donc été donnée
à un fourgon générateur alimentant l’ensemble
de la rame par une ligne de train.
Anciens fourgons-chaudière d’origine P.O-Midi,
5 fourgons-générateur Dsmyi 5901 à 5 ont été
réalisés d’après une étude de la DEV. Peints en
bleu roi 203, ils sont équipés de deux moteurs
diesel Poyaud de 400 ch et de bogies Y 20.
La rame comprend également une voiture Pull-
man type Côte d’Azur reconnaissable à ses sept baies
latérales. Trois voitures sont en roulement (CIWL
4151, 61 et 63). Elles sont accompagnées de trois
voitures-restaurant de 52 places (CIWL 3353, 55
et 58). Ces six voitures sont équipées de l’air condi-
tionné et de bogies Schlieren autorisés à 150 km/h.
Deux voitures-restaurant supplémentaires as-
surent la réserve. Numérotées 3342 et 45, leur
aménagement a conservé les 56 places d’origine
et si elles ont reçu des bogies Schlieren, elles n’ont
toutefois pas la climatisation, mais seulement une
conduite blanche au bénéfice du reste de la rame.
Depuis 1957, les voitures inox – mais pas les autres –
ont reçu des plaques latérales de 3,65 m portant les
lettres Mistral de couleur bronze clair… La classe ! ◼
ferrovissime - 77
 Le magazine du train et de son histoire

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22 x 27 cm - 216 p.

22 x 27 cm - 160 p.
24 x 32 cm - 192 p.

22 x 27 cm - 160 p.

14,8x21cm,138 p.

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1975-2004
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15,6 x 23,4cm, 340 p.
14,5 x 21 cm - 156 p.

14,8 x 21 cm, 250 p.

14,5 x21cm - 144 p.
14,8x21cm, 130 p.

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