www.ferrovissime.

com N°105
Mai/Juin 2020

Le magazine du train et de son histoire

P.28 P.58
DOSSIER 20 PAGES
72000
+TGV-A
VENDÉE P.2 2 BB 25150
ULTIMES MTE
SOUVENIRS
DE DIETRICH

TRÉSORS

4-141 E F
S
‹ ‹
D ’A R C H I V E
LES
ÉLECTRIQUES BB 25150

RENCONTRE AVEC
LE CHEF MÉCANICIEN SAUVESTRE
France METRO : 9,50 € -BEL/LUX/ESP/ITA/PORT.CONT./D : 10.50 €

L 17305 - 105 - F: 9,50 € - RD

‹‹ Ultimes Reines du Sud-Ouest

‹‹
Directeur de la publication
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Rédacteur en chef

Ferrovissime aime
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Conseiller technique de la rédaction
Thierry Porcher

remonter le temps
Conception graphique
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Mise en page

Bertrand Bourn
Ont collaboré à ce numéro
Frédéric Didelot, Jean-Marc Dupuy,
François Durivault, Jean-Michel Eich,
André Francisco, Gilles Germain,
Éric Hospital, Marc Le Gad,
Christophe Masse, Aurélien Prévot,
Patrice Robinet, Pierre-Yves Toussirot,
Romain Vergnères, François Vielliard,
Étienne Woessner
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ISSN> 1961-5035
CPPAP> 0423 K 89491
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Principaux associés:
Christian Fournereau,
& Friedel Fournereau
“Printed in France/
Imprimé en France”
L
es dernières Mikado PLM, les 141 E et F, ont disparu il y a 50 ans.
Fidèle à sa vocation qui est de privilégier les souvenirs des cheminots,
le magazine Ferrovissime a demandé à Georges Sauvestre de nous
raconter les actions qu’il a menées, comme Chef Mécanicien, pour
tirer le meilleur de ces machines. Les Mikado PLM ont été transformées
en 141 E dans les années 1940 et certaines en 141 F entre 1951 et 1958.
Ancien apprenti du P.O âgé aujourd’hui de 99 ans, Monsieur Sauvestre
nous livre de précieux témoignages sur des pratiques jamais publiées
dans les livres consacrés à l’histoire de la vapeur.
Le dossier central de ce numéro de Ferrovissime met en lumière un trait
marquant de certains matériels ferroviaires: la longue période durant
laquelle ils ont été fabriqués. La dynastie des locomotives électriques
BB MTE a débuté en 1957, lorsque la BB 9201 est sortie d’usine. Et ce
n’est que vingt ans plus tard, en 1977, qu’est livrée à la SNCF l’ultime
BB MTE, la BB 25195, dernière machine de la série 25150 qui fait l’objet
du Portrait du rail.
Enfin, ce numéro fête un anniversaire concernant une famille
d’autorails célèbres. Il y a juste 70 ans, l’X 3720 achevait la production des
De Dietrich 320 ch, commencée en 1935. La guerre était passée par là,
prolongeant la période de construction de cette longue lignée d’engins
qui a marqué les rails d’Alsace, comme en témoignent deux cheminots.
Ferrovissime, magazine du train et de son histoire, aime remonter
le temps et célébrer aussi le passé au travers d’événements présents,
comme l’opération «Au revoir Patrick»: un magnifique hommage à la
rame 01 du TGV-PSE, après plus de 40 ans de service et 13,5 millions de
kilomètres parcourus. Le chemin de fer n’est-il pas le champion de la
construction durable ? ◼
rédacteur en chef
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COUVERTURE Grande photo : L’une des Mikado PLM qui étaient PLacées sous
La resPonsabiLité de GeorGes sauvestre. © J. Bazot - ConcePtion : BecoMeDesiGn
 N°105
Mai/Juin 2020

LES PORTRAITS DU RAIL 58

P.28
49

4 P.72
Histoire au présent P.22 22_ STARS DU RAIL
4 _ Le réseau Léman-Express est IL Y A 20 ANS, NAISSAIT
déployé intégralement EN VENDÉE UN DRÔLE DE TGV
5 _ Les rames Omnéo Normandie
entrent en scène Les portraits du rail
6 _ TGV-PSE, rame 01 : au revoir Patrick !
7 _ La grue KRC 1200 de TSO
28 _ Les BB 25150
ULTIME SÉRIE DE LOCOMOTIVES BB MTE
8 _ BB 22200: couleurs de Provence à Paris-Est
9 _ Alstom, Bombardier et les autres Le monde des cheminots
10 _ BB 15000: bientôt le déclin en Normandie 49_ CŒUR DE MÉTIER
11 - MÉDIATHÈQUE L’activité de la gare de Concarneau au fil du temps
Livres, revues, DVD
55 _ GARES & INSTALLATIONS
Montez à bord Le pont tournant d’Aigues-Mortes
58 _MATÉRIEL ROULANT D’HIER
12 _ TRÉSORS D’ARCHIVES
Quelques souvenirs des autorails De Dietrich
Le Chef Mécanicien Sauvestre
et les 141 E/F de Montluçon 66 _ Les fourgons à huit portes Nord-Express
20 _COMMENT ÇA MARCHE de la CIWL
Les évolutions de la technologie 72 DES TRAINS SOUS LA LOUPE
des LRS 1948-1958: regard sur les omnibus du Sud-Ouest

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ferrovissime - 3
Histoire au présent

Mixité du matériel en gare d’Annemasse: une UM de Régiolis attend son entrée au technicentre, alors qu’une rame Flirt arrive tout juste de Coppet.

Le réseau Léman-Express est

déployé intégralement Texte et photos : Christophe Masse

Depuis le 22 janvier 2020, LEX (Léman-Express) est totalement opérationnel,

au service d’une population de plus d’un million d’habitants!

A vec quelques semaines de retard pour

cause de mouvement social national,
un des plus grands réseaux ferroviaires
transfrontaliers régionaux d’Europe est
né ! Ce sont désormais 240 trains qui transitent
quotidiennement par la seule gare haut-
savoyarde d’Annemasse.
Le Léman-Express, réseau ferroviaire franco-suisse,
relie 45 gares dans un rayon de 60 kilomètres
autour de Genève. Il s’étend dans les départements
de l’Ain et de la Haute-Savoie en France et dans
les cantons suisses de Vaud et de Genève, au bord
du lac Léman.
Les trains LEX circulent sur 230 kilomètres et
sont organisés en six lignes. Une septième ligne
du Réseau Express (RE) des CFF relie Saint-Maurice
(Valais) et Vevey à Annemasse.
Si quelques ajustements techniques et organi-
sationnels restent encore nécessaires pour faciliter
la coopération franco-suisse et apporter un service
de qualité, les fréquentations des trains sont déjà
plus qu’encourageantes, preuve que le LEX va
répondre aux besoins des frontaliers. ◼

4 - ferrovissime
© F. DURIVAULT

Le 17 février 2020, premier jour de circulation commerciale, la rame 605 XL passe à Clichy-Levallois.

Les rames Omnéo Normandie

entrent en scène Texte : Christophe Masse et Romain Vergnères

Voilà plusieurs mois que les rames à deux niveaux Omnéo sont visibles sous
le ciel de Normandie. Le temps est désormais compté pour les BB 15000…

L a première rame Omnéo Normandie

Régio2N de Bombardier a été livrée au
cours de la première quinzaine du mois
de janvier 2020. Venue à Caen depuis
Valenciennes, elle a aussitôt entamé des essais de
validation à 200 km/h entre Caen et Cherbourg.
Portantlematricule605XL(motricesZ56609/10),
cette rame Omnéo en version grandes lignes re-
jointensuiteSotteville,sontechnicentred’attache,
pour entreprendre de nouveaux parcours d’essais
entre Sotteville et Le Havre.
Et dès le 17 février 2020, la rame 605 XL as-
sure une première journée de service commercial.
Partant de la voie 23 de Paris-Saint-Lazare, elle
assure le train 3307 à destination de Cherbourg.
© R. VERGNÈRES

À noter qu’à défaut de bar, les rames Omnéo

Normandie Régio2N sont équipées de machines
à café. Un service offert tout ce qu’il y a de mini-
maliste, susceptible de laisser quand même sur Lors de son transfert entre Caen et Sotteville sous la marche 766700, la rame
leur faim certains voyageurs… ◼ Omnéo 605 XL est aperçue du côté de Ménerville, le 15 janvier 2020.

ferrovissime - 5
Histoire au présent

La motrice TGV 23001 a retrouvé son emblématique livrée orange.

TGV-PSE, rame 01 :
au revoir Patrick !
Avec plus de 9500 visiteurs, l’intérêt porté par
le public pour la toute première rame TGV Sud-Est Le pupitre de la 23001, très proche de celui d’une
a dépassé les prévisions les plus optimistes! BB 22200 – série à laquelle les motrices du TGV Sud-Est
ont emprunté l’essentiel de leur technique – a beaucoup
vieilli ! Aux commandes, Rodolphe Sabiron, l’un des agents
Texte et photos : Jehan-Hubert Lavie de conduite bénévoles de l’opération Patrick.

V oilà un événement qui n’est pas pas-

sé inaperçu : après plus de 40 ans de
service et 13,5 millions de kilomètres
parcourus, la première rame Sud-Est,
surnommée Patrick, a entrepris une tournée
d’adieu dans le cadre de l’opération « Au revoir
Patrick». Commencée à Villeneuve-Saint-Georges
compté leur temps lors de cette opération. Et
c’est aussi l’occasion de rappeler que Patrick
et sa sœur Sophie ont été à l’origine de la plus
grande révolution que le chemin de fer français
ait connue depuis bien longtemps… ◼

le 5 févier 2020, cette tournée a fait halte dans

plusieurs technicentres avant d’aller à la ren-
contre du grand public à Paris-Lyon, puis à Lyon.
Elle devait se poursuivre à Marseille, mais les
contraintes sanitaires de confinement ont écour-
té ce périple. Patrick côté
Avec les motrices de Patrick qui ont retrouvé motrice 23002,
lors de la
la fameuse livrée orange des débuts du TGV, présentation à
il faut saluer cette initiative qui a fait la joie Paris-Lyon qui a
de tous les passionnés du rail et remercier les connu un grand
nombreux cheminots bénévoles qui n’ont pas succès populaire.

6 - ferrovissime
La grue Kirow KRC 1200
de TSO le 24 janvier 2020,
à Villeneuve-Saint-Georges.

La grue KRC 1200 de TSO

Texte: Jehan-Hubert Lavie / Photos: Gérard Dauvet

Les méthodes actuelles de

renouvellement d’appareils
de voie imposent l’utilisation
d’engins de levage adaptés à
ce travail.

A ujourd’hui, la SNCF renouvelle ses ap-

pareils de voie en les amenant à pied
d’œuvre, déjà assemblés. C’est une révo-
lution par rapport à la méthode ancienne,
où les appareils étaient montés en atelier pour
vérification, démontés, puis remontés sur place.
Pour cela, il a fallu mettre au point des wagons-
Dans la rame, le wagon contrepoids est
placé derrière la grue.
Le wagon porte-flèche est un plat de
grande longueur.

pupitres et des engins de levage adaptés.
SNCF Réseau et plusieurs entreprises de génie
ferroviaire ont fait l’acquisition de grues de
levage. C’est ainsi que la société Travaux du
Sud-Ouest (TSO) détient, depuis 2018, la grue
Kirow KRC 1200 n° 99 87 931 9 508-7.
Construite à Leipzig (Allemagne), cette grue
de 98 t permet le levage d’appareils de voie de
30 t et 30 m de long. Mais sa capacité maximale
de levage est de 150 t, pour une vitesse de dépla-
cement de travail de 30 km/h.
Ne nécessitant pas de dossier de transport
exceptionnel, cette grue est acheminée dans une
rame généralement remorquée par une loco-
motive diesel de l’entreprise TSO et composée
de quatre wagons plats à bogies : wagon porte-
flèche, wagon contrepoids, wagon porte-agrès
et wagon-atelier. ◼

ferrovissime - 7
Histoire au présent

Escale à Paris-
Ourcq pour

BB 22200 : couleurs
les BB 22235
et 22298 le
5 février 2020.

de Provence à Paris-Est
Le remplacement des rames tractées par des automotrices induit
des mutations de locomotives parfois étonnantes!
Texte : Frédéric Didelot / Photos : François Durivault

D epuis le début de l’année, on peut se de-

mander si la gare de Paris-Est n’a pas été
délocaliséeenProvence:laplupartdesTER
Grand Est Paris/Châlons-en-Champagne/
Bar-le-Duc ou Saint-Dizier et Paris/Strasbourg
assurés en rames tractées Corail sont désormais
confiés à des locomotives bicourant BB 22200
par multiplexage, en complément des BB 26140 à
153 associées aux rames Corail réversibles Alsace.
Les BB 22200 RC devraient dès 2021 remplacer les
dernières BB 25500 alsaciennes et retrouver leur
vocation première: être associées à des RRR, cette
◼
fois autour de Strasbourg vers Saverne et Sélestat.
Les BB 22270
et 22235 sont
aux heurtoirs de
Paris-Est dans
leur livrée PACA.

RC. Dix locomotives (22235, 236, 259, 263, 270,

276, 282, 298, 301, 305) précédemment affectées
au TER Provence-Alpes-Côte d’Azur ont rejoint
le TER Grand Est, mais ont conservé leur jolie
livrée colorée et très caractéristique! Ne restent
dans leur région d’origine que six locomotives
(22243, 250, 252, 256, 258, 261), actuellement
sans roulement suite à l’arrêt des RRR PACA.
Ce service n’est que temporaire: il cessera au
fur et à mesure de l’arrivée des BB 26158 à 168 en
cours de modification pour devenir réversibles

8 - ferrovissime
Histoire au présent

© C. MASSE
Régiolis est actuellement produit par Alstom. Ici, le 29 février 2020, le TER 877957 est assuré par le B84695 en livrée spécifique
Cévenol. En provenance de Clermont, il passe sans arrêt la gare de Boucoiran, entre Alès et Nîmes.

Alstom, Bombardier
et les autres Texte : Jehan-Hubert Lavie

Février 2020. Coup de

tonnerre : les médias
annoncent le projet d’accord
entre le secteur ferroviaire
d’Alstom et Bombardier.

D' emblée, l’affaire fait grand bruit, y

compris dans le milieu des amateurs

© J.H. LAVIE
de trains. D’autant plus que certains
médias présentent l’industrie ferro-
Z 21500 et Z 21700 (ici, à Rennes) sont des rames à trois caisses comportant
viaire française sous un jour plutôt sombre, en deux motrices Alstom encadrant une remorque Bombardier.
la comparant avec celle de la Chine, évoquée
de façon idyllique. Le soufflé est vite retombé
avec la crise du Covid-19 et, début avril 2020,
on ne parle plus guère de ce fameux accord qui
devrait marier Alstom et Bombardier. Pourtant,
il y a quelques points qu’il est utile de préciser.
Si Alstom et Bombardier sont certes des
concurrents frontaux sur le marché ferroviaire
© F. DURIVAULT

français, ils coopèrent plus qu’on ne le pense

sur des projets communs. Des exemples : les
automotrices Z 21500 ou les TGV Réseau et
Duplex, dont les motrices sont réalisées par
Alstom tandis que les remorques sont construites
par Bombardier. Mais aussi les rames de métro
MF01 de la RATP ou le futur RER NG.
Sans oublier que si la presse généraliste a insisté
sur la nationalité canadienne de Bombardier, les
Bombardier renouvelle une bonne partie du matériel de la banlieue de Paris avec
ses Z 50000, que l’on voit ici à Saint-Lazare.
grandes séries de matériels ferroviaires que
cette entreprise livre à la France sont conçues et
fabriquées dans des usines françaises, à Crespin
(ex-ANF), dans le Nord. ◼

ferrovissime - 9
Histoire au présent
BB 15000 : bientôt le déclin
en Normandie
Avec encore 36 locomotives sur les 47 en service,
les lignes normandes restent un bastion important
des BB 15000. Mais ça ne va pas durer…
L ivrées à 65 exemplaires entre 1971 et 1978,
les BB 15000 sont indissociables des lignes
de l’Est jusqu’à l’arrivée du TGV en 2007.
Depuis, elles ont remplacé les BB 16000 en
Picardie et en Normandie. Le dernier contingent
circulant en Champagne a été radié en juin 2019.
L’effectif actuel comporte 11 engins réver-
sibles associés à des rames V2N sur Paris-Nord/
Saint-Quentin ou Amiens, 22 réversibles et 14 non
réversibles étant utilisées sur Paris/Rouen/
Le Havre et Paris/Caen ou Trouville-Deauville,
voire Cherbourg en cas d’indisponibilité d'une
BB 26000. L’arrivée progressive des 40 nouvelles
10 - ferrovissime
Avec en arrière-plan Mantes-
la-Jolie, la BB 15014 est en
tête du 3343 Paris-Saint-
Lazare/Caen avec une rame
Corail Normandie.
Texte et photos: Frédéric Didelot et RomainVergnères
rames Regio2N Omnéo Z 56600 va entraîner à
court terme la radiation des 15004, 09, 10, 13, 14,
16, 17, 19, 20, 21, 22, 23, 25, 51 non réversibles,
certains de leurs trains ayant déjà été repris par
des BB 26000. L’avenir des 15000 réversibles reste
suspendu à la livraison du 2e lot de rames Omnéo
prévu à partir de 2023, d’autant que les 16 rames
TER2N NG Z 26500 pentacaisses vont être cédées
à Grand Est pour circuler sur le sillon mosellan.
Les BB 15000 vont donc continuer à parcourir
les lignes Paris/Rouen et Paris/Évreux avec des
VO2N et V2N, derniers matériels non climatisés
en service TER. ◼
epartant de Bréval, le TER
51024 en provenance de
erquigny et à destination de
aris-Saint-Lazare est assuré
ar la BB 15031 remorquant
ne rame VO2N.
Médiathèque
Texte : Aurélien Prévot

Cheminots, portrait
d’une communauté de travail
Par Ariane Verderosa et France
Berlioz. 143 pages (format 16,6 x
23 cm) illustrées en couleurs sous
couverture souple illustrée aux
Editions Autrement en partenariat
avec Rail et Histoire. En vente
en librairie pour 17 euros.
La fin d’année 2019 a été riche
de discussions autour de la
réforme ferroviaire et du statut
des cheminots. Ce livre est une
réponse aux nombreuses fausses
informations colportées alors.
Il se compose de neuf chapitres : Gares et
corporation, contrat social, métier,
grille de salaire, protection, facilités
réseaux ferrés
de circulation, militants, grèves N° 160 de la revue trimestrielle 303 arts,
et adaptation. Chaque chapitre comprend à la fois une analyse des recherches, créations. 96 pages (format
auteurs et le témoignage d’un acteur de terrain. Cette véritable enquête 22,5 x 30 cm) illustrées en couleurs sous
sociologique permet de mieux comprendre le monde cheminot, son couverture souple illustrée. En vente chez
identité, ses pratiques et ses règles. Celles-ci ne sont pas simplement LR Presse pour 15 euros + port.
citées, elles sont expliquées et remises dans le contexte de leur création. La revue 303 arts, fondée en 1984, a pour
objectif de révéler les richesses patrimo-
niales et la création artistique en Pays de
La Suisse et ses chemins la Loire ; d’où le titre, 303 est l’addition
des cinq numéros de départements de la
de fer région. Ce numéro 160 est consacré aux
gares et réseaux ferrés. J’ai particulière-
Par Jean Tricoire. 272 pages ment apprécié l’article sur le lien très fort
(format 22 x 27 cm) illustrées en entre chemin de fer et lotissement de La
N&B et couleurs sous couverture Baule à partir du XIXe siècle et celui sur le
cartonnée illustrée aux Éditions quartier du Maroc au Mans. Mais les autres
de La Vie du Rail. En vente sujets sont également passionnants :
chez LR Presse pour 49 euros l’histoire du dépôt du Mans, la présenta-
+ port (code SUISSE). Même tion des archives historiques du groupe
quand on peut voyager, le faire SNCF, l’architecture des gares en Pays de
depuis son canapé est fort la Loire… Les deux derniers articles de la
agréable! Ce beau livre permet revue sont également fort intéressants.
de découvrir un pays souvent Le premier est consacré à Roger Tallon,
surnommé le paradis des trains… le célèbre designer et le second, plus éton-
la Suisse! L’ouvrage est découpé nant dans sa forme, est un entretien avec
en neuf chapitres. Les compagnies Rudy Ricciotti, l’architecte de la nouvelle
(les CFF, le BLS, la RhB, la MGB, gare de Nantes. Une belle revue qui ravira
la SOB, le MOB, les compagnies les amateurs ferroviaires de la région.
locales), leur histoire et les lignes desservies. Les deux derniers
chapitres, très courts, présentent en quelques lignes les autres
lignes et quelques principes de base de la signalisation.

ferrovissime - 11
Trésors d’archives

LE CHEF MÉCANICIEN
SAUVESTRE ET LES
141 E/F DE MONTLUÇON

Rencontre avec un cheminot entré au chemin de fer

avant la création de la SNCF: Georges Sauvestre
est un ancien du P.O… et la vapeur, il connaît!
Texte : Patrice Robinet

12 - ferrovissime
MIKADO PLM À MONTLUÇON
Une 141 E montluçonnaise, attelée à une 141 TA
usselloise munie d’un réchauffeur ACFI, manœuvre sur
le pont sur le Cher à la sortie de la gare de Montluçon
le 30 août 1964.. La présence d’une 141 TA usseloise
reste exceptionnelle en ce lieu, la ligne d’Eygurande-
Merlines à Montluçon étant alors majoritairement
parcourue par des machines du dépôt de Montluçon.

© J. BAZOT

ferrovissime - 13
Trésors d’archives
© J. BAZOT
G
eorges Sauvestre est un personnage con-
nu de nos lecteurs, puisque plusieurs
articles lui ont été consacrés dans les
numéros 40 et 41 de Ferrovissime. Entré
au P.O le 1er octobre 1937 comme sim-
ple apprenti au dépôt de Montluçon, la passion
de son métier et la qualité de son travail lui
permettent de gravir rapidement les marches
de la hiérarchie. Cette passion, il la partage
rapidement, puisqu’en octobre 1940, soit tout
juste trois ans après son entrée au chemin de
fer, il devient moniteur auprès des apprentis
de 2e année du dépôt de Montluçon.
La 4-141 E 534 à l’essai
Après les années d’incertitude de la guerre, en
1948, à 27 ans seulement, il est reçu à l’examen
de Chef Mécanicien. Et c’est à ce titre qu’en 1951
il est chargé d’évaluer les performances d’une
nouvelle venue : la Mikado 141 E 534 d’origine
PLM. Mutée quelques temps auparavant du
dépôt de Roanne à celui de Saint-Sulpice-Lau-
rière, où elle effectue plusieurs trains d’essais,
la locomotive arrive sur les rails du dépôt
montluçonnais début juin 1951. La machine
est confiée à Georges Sauvestre qui prend le
poste du mécanicien et à son ami Raymond
Rabette, ancien apprenti du dépôt, en qualité
de chauffeur.
Comment bien
prononcer 141 E…
Dans le jargon des cheminots,
du moins ceux du Sud-Ouest, on ne
dit pas cent-quarante-et-un E (heu),
mais cent-quarante-et-une É (hé).
14 - ferrovissime
Une scène quotidienne en
gare d’Eygurande-Merlines,
le 21 août 1963. Les rames
en provenance d’Ussel et du
Mont-Dore et à destination
de Paris viennent d’être
raccordées. Le train tracté
par la 141 E 631 va partir
dans quelques instants en
direction de Montluçon.
On aperçoit, sur la gauche,
la 141 TA qui a amené les
voitures en provenance du
Le 4 août 1964, sous Mont-Dore. La 141 E, quant à
un soleil rasant de fin elle, est arrivée directement
de journée, le train de d’Ussel avec l’autre rame.
marchandises Guéret/
Montluçon musarde
dans la campagne
creusoise, non loin de
Lavaufranche.
Le lundi 11 juin, l’équipe de conduite découvre
la locomotive, garée froide sur une voie du dépôt.
Dès le lendemain, un premier train d’essais en tête
du marchandises 6896 est organisé entre Mont-
luçon et Gannat, section de ligne comportant
de nombreuses rampes de 15 0/00. Le tonnage
remorqué est de 520 t, celui habituellement tiré
© J. BAZOT
par les 4-150 A à qui est régulièrement confié
ce train. Le lendemain, la 141 E 534 revient à
Montluçon en tête du MV 4421. Les séances
d’essais se poursuivent et, entre le 11 et le 20 juin,
© J. BAZOT
l’équipe assure 12 trains d’essais sur la section
Montluçon/Gannat.
Le 26 juin, la 141 E 534 est engagée pour la
première fois sur la ligne de Montluçon à Ussel
via Eygurande-Merlines, présentant des rampes
allant jusqu’à 25 0/00. Ce premier train est le
marchandises 8557 composé de 35 wagons
vides tarant 355 t. Les inspecteurs traction MM.
Parrouty et Faucher accompagnent Georges
Sauvestre et son compagnon. Finalement, 18 mn
sont gagnées sur la marche de ce train, confié
habituellement aux 4-150 A.
Premiers trains commerciaux
avec la E 534
Le 28 juin, la 141 E 534 est attelée pour la
première fois en tête de l’Express 2009 de Mont-
luçon à Ussel : elle gagne 13 mn sur le parcours.
Jusqu’au vendredi 6 juillet, 10 trains sont assurés
par la 141 E 534 sur la section Montluçon/Ussel. En 1963, l’Express
À chaque parcours, un gain de temps est enre-
gistré par rapport aux machines habituellement
2008 en provenance
d’Ussel et à destination
engagées sur cette ligne (4-150 A et 4-141 TB). de Paris, tracté par une
141 E montluçonnaise,
Aucun incident n’est constaté, à part quelques
traverse le viaduc de
patinages que l’on attribue à un rail trop gras. la Tardes près d’Evaux-
Le 4 juillet est consacré à des essais de démar- les-Bains, sur la section
rage en rampe de 20 0/00 et courbe de 250 m de de ligne Eygurande-
rayon près de Lavault-Sainte-Anne, dans ▶▶▶ Merlines/Montluçon.
ferrovissime - 15
Trésors d’archives
Outre la ligne Ussel/Eygurande-Merlines/Montluçon, les sections Montluçon/Saint-Sulpice-Laurière et Montluçon/Gannat sont très empruntées
par les 141 E et F de Montluçon. Le 24 juillet 1968, la 141 E 425 montluçonnaise stationne à Gannat, avant de repartir vers son dépôt.
DURANT PLUS DE 15 ANS, LES 4-141 E, REJOINTES AU DÉBUT DES
ANNÉES 1960 PAR DES F, CIRCULENT EN TÊTE DE TOUS TYPES DE TRAINS
▶▶▶ les faubourgs de Montluçon, sur la ligne
d’Eygurande. Trois trains composés de voitures
voyageurs à bogies vides tarant respectivement
375 t, 415 t et 432 t sont démarrés sans problème.
Le 12 juillet, Georges Sauvestre et Raymond
Rabette reconduisent la 141 E 534 à Roanne,
après avoir effectué 22 trains d’essais. Cette
locomotive est malheureusement ferraillée
le 24 mars 1954 à la suite d’un grave accident.
Aprèscesessaisencourageants,àl’automne1951,
les 141 E 211, 300, 472, 521, 668 de Paray-le-Monial
et 576, 669 de Besançon arrivent à Montluçon.
Elles reprennent en priorité la traction des
express Bordeaux/Genève et retour entre Saint-
Sulpice-Laurière et Gannat et Paris/Ussel et retour
entre Montluçon et la sous-préfecture corrézienne.
Leur arrivée provoque l’arrêt d’anciennes loco-
motives d’origine P.O, les 4-150 A des dépôts de
Montluçon et d’Ussel, mais aussi des 4-141 B de
Saint-Sulpice-Laurière.
L’avis du Chef Mécanicien Sauvestre
À l’exception des «Reines de Tours» (4-231 F et
H), dont Georges Sauvestre a particulièrement
apprécié les qualités de traction et de roulement
lors de différents stages, de son avis, les 4-141 E
sont les meilleures locomotives utilisées sur
16 - ferrovissime
© A. PLAIDY
la Région Sud-Ouest au lendemain de la guerre.
Ce sont aussi les premières engagées en banalité
totale avec les équipes de conduite du dépôt de
Montluçon, ce qui n’est pas favorable en matière
d’entretien. En effet, l’utilisation par des équipes
peu habituées à ces machines se termine souvent
par d’importantes fuites de vapeur aux joints
des circuits d’admission et aux garnitures des
tiges de pistons.
C’estlaconséquencedelapositiontrèsenavant
sur le corps cylindrique du dôme de prise de va-
peur et d’un niveau d’eau trop important dans
la chaudière au cours des manœuvres en gare.
Georges Sauvestre se plaît à dire que le seul
titulaire de ces locomotives est le Chef Méca-
nicien ! Si une équipe lui rapporte un incident
ou un problème technique constaté sur une
de ces machines, le Chef Mécanicien organise
alors une de ses prochaines tournées de façon
à accompagner la locomotive, pour constater
par lui-même les problèmes rencontrés.
Un des seuls soucis soulevés par les 141 E
sont des patinages récurrents à faible vitesse.
En effet, les marches tracées à l’époque sur les
lignes accidentées du centre de la France le sont
souvent à des vitesses de l’ordre de 20 km/h dans
les fortes rampes, fréquentes dans cette région.
 Toutes les 141 F sont équipées de l’ACFI

L
a série 141 F est créée à partir de
1952 par transformation de 141 E,
afin d’obtenir des locomotives
plus rapides: 105 km/h pour les
141 F contre 90 km/h pour les 141 E.
Lorsqu’on compare une 141 E et une
141 F, il est souvent difficile de les
distinguer autrement que par leurs
immatriculations. Pourtant un détail
particulier caractérise les 141 F.
Lors de la transformation de 141 E
en 141 F, la suspension du 2e essieu
et l’articulation du bissel, assujetties
fréquemment à des ennuis mécaniques,
sont améliorées. Mais un autre problème
apparaît lors de cette transformation.
Certaines 141 E sont munies d’un
© J. BAZOT
réchauffeur ACFI possède une pompe
entraînée par un moteur à vapeur et
fonctionne donc indépendamment
de la vitesse de rotation des roues.
La transformation en 141 F ayant pour
objectif de porter la vitesse à 105 km/h,
il a été choisi dans un premier temps
de transformer majoritairement
des 141 E équipées d’origine d’un
réchauffeur ACFI. Par la suite, les
141 E équipées d’un réchauffeur
DABEG qui ont été transformées en
141 F ont vu ce dernier déposé et
remplacé par un réchauffeur ACFI. Il
est d’ailleurs curieux de constater que
pour certaines machines, lors de cet
échange de réchauffeur, la pompe à

Dans les années 1960, l’express Ussel/Paris quitte la gare
d’Evaux-les-Bains. Le train dépassant les 480 t, la 141 E
a reçu le renfort d’une 141 TA montluçonnaise. L’ordre
des machines en tête du train n’a pas d’importance du
point de vue exploitation. Mais comme le train est sous la
responsabilité de l’équipe de la 141 E, cette locomotive est
toujours placée en tête en cas de double traction.
© J. BAZOT
réchauffeur DABEG, alors que d’autres
sont équipées d’un réchauffeur ACFI.
La pompe des réchauffeurs DABEG est
entraînée par un système mécanique
qui décroche au-delà d’une vitesse de
rotation des roues de 250 tr/mn (environ
77,8 km/h pour les 141 E). Mais le
eau a été installée sur le côté droit du
tablier plutôt que sur le côté gauche,
comme il était de coutume pour les
locomotives équipées d’origine d’un
réchauffeur ACFI. Contrairement aux
141 E, les 141 F ont donc toutes été
équipées d’un réchauffeur ACFI.

Arrêt le 1er août 1963 en

Augmenter la vitesse pour réduire
les risques de patinage
Si ces basses vitesses conviennent parfaite-
ment aux séries de locomotives d’origine P.O,
ce n’est pas le cas pour les 141 E sujettes à des
patinages, souvent difficiles à endiguer, dans
ces conditions de circulation. Georges Sauvestre,
en sa qualité de Chef Mécanicien s’est donc rap-
proché de sa hiérarchie pour demander que les
marches soient retendues sur plusieurs sections
de ligne de l’arrondissement de Montluçon, ce
qui est partiellement fait.
gare de Lavaufranche du
Georges Sauvestre est aussi à l’origine d’une train de marchandises
transformation sur les 141 E qui ne semble pas quotidien Guéret/
Montluçon, tracté par la
avoir été répertoriée officiellement dans les
141 E 678 de Montluçon.
améliorations apportées à ces locomotives. Suite On remarquera l’état
à ses conseils, une vis est installée par les ateliers impeccable de la gare,
du dépôt de Montluçon sur la pompe Dabeg. Cette aussi bien pour les
vis permet d’alimenter la chaudière en eau froide bâtiments que pour la
directement à partir de la pompe, ce qui est bien voie et les abords.
pratique en cas de défaillance de l’injecteur d’eau.
Lors d’un arrêt de la machine, le mécanicien,
muni d’une clé à molette, desserre la vis et lorsque
la machine se remet à rouler, la pompe ▶▶▶

ferrovissime - 17
Trésors d’archives
Coup d’œil côté tender: le 4-25 A 593 est attelé à la 4-141 E 425.
Georges Sauvestre, un Chef Mécanicien qui prend ses responsabilités
G
eorges Sauvestre a toujours su prendre ses
responsabilités. Sa connaissance approfondie
des machines et des lignes parcourues lui permet
d’évaluer rapidement les risques attendus en cas d’avarie
de machines. C’est ainsi que dans la revue La Vie du Rail
n°627 de décembre 1957, nous pouvons lire ceci:
«Le 25 août 1957, le train de pèlerins 16871, composé de
14 voitures 712 tonnes, a quitté Montluçon remorqué en
double traction par les locomotives 141 E 559 et 141 E 300.
Par suite d’avarie, la première de ces machines a dû être
différée à Cressat. Le Chef Mécanicien Sauvestre qui
accompagnait le train décida, malgré la surcharge, de
remorquer avec la seule 141 E 300 équipe Gaumot-Bonnamour,
du dépôt de Montluçon. 11 minutes furent néanmoins
regagnées en marche de Cressat à Saint-Sulpice-Laurière.
C’est un fait analogue qui s’est produit dans la nuit du 6 au
7 septembre 1957 au train 2009 qui, avec 10 voitures
430 tonnes, était remorqué à partir de Montluçon par les
locomotives 141 E 631 et 141 TA 306. À Létrade, la 141 E avariée
fut différée. Le Chef Mécanicien Sauvestre pris la responsabilité
d’emmener le train jusqu’à Eygurande-Merlines, bien que sa
charge dépasse notablement la limite permise sur la section
18 - ferrovissime
© A. PLAIDY
pour la 141 TA 306 conduite par l’équipe Dumazet-Laurent,
du dépôt de Montluçon. Au total à l’arrivée à Ussel, il n’y avait
qu’une minute de perdue en marche au compte Traction».
Ce que le journaliste de La Vie du Rail ne dit pas, c’est que ce
jour-là Georges Sauvestre n’est pas en service. Ce dernier a
pris place dans le train comme simple voyageur (à 1h25!),
afin de rejoindre des amis pour une partie de pêche à Ussel.
Arrivé en gare de Létrade, son instinct de Chef Mécanicien lui
fait penser qu’il y a un problème. Il vient à la rencontre des
équipes de conduite et constate l’avarie subie par la 141 E.
C’est lui qui prend alors la décision de garer cette machine
et de continuer avec la seule 141 TA. Habillé de sa tenue de
pêcheur, bottes en caoutchouc aux pieds, il accompagne l’équipe
de la 141 TA dans la cabine afin de les conseiller, mais aussi
pour endosser la responsabilité de son action en cas d’échec.
Le train arrive bien à Ussel, mais la rampe de 20 0/00 dite
des «sapins de Giat», juste avant la gare de Giat, a failli être
fatale: la 141 TA est arrivée en haut de la rampe complètement
à «bout de souffle»! Quant au train de pèlerins 16871,
Georges Sauvestre m’a dit que «Peut-être la présence du millier
de pèlerins bourbonnais accompagnés de pas mal de prêtres
avait eu une influence bénéfique sur l’issue de l’affaire…»!
© J. BAZOT

Le samedi 8 février 1969, la 141 F 299 se prépare à sortir du pont tournant du dépôt de Montluçon. La locomotive va être attelée pour
la dernière fois à un train de marchandises à destination de Moulins. Il sera ajouté exceptionnellement à ce train une voiture voyageurs,
pour les nombreux amateurs ferroviaires venus, malgré le temps glacial, rendre hommage une dernière fois à cette série de locomotives.

LE 8 FÉVRIER 1969, LA 141 F 299 Utilisation sur les lignes

de l’étoile de Montluçon
ASSURE LE DERNIER TRAIN Durant plus de 15 ans, les 4-141 E, rejointes au
début des années 1960 par des 4-141 F, circulent
TRACTÉ PAR UNE DE CES MIKADO principalement en tête de toutes les catégories
de trains sur les lignes allant vers Saint-Sulpice-
Laurière, Vierzon, Moulins, Gannat et Ussel. Sur
En 1964, une 141 E ▶▶▶ fonctionne et alimente directement la cette dernière ligne, elles s’approprient la trac-
montluçonnaise chaudière en eau froide. Cette transformation tion des Express 2009/2012 Paris/Ussel et retour,
en tête d’un train n’apparaît bien sûr pas dans le mode d’emploi souvent en double traction avec une 4-141 TA
de pèlerins pour officiel de la locomotive et Georges a donc dessiné de Montluçon. Ces locomotives sont utilisées en
Lourdes s’apprète
à griller à toute un schéma de la pompe Dabeg à l’intérieur de banalité complète par des équipes de conduite
vitesse la gare de la cabine afin d’expliquer le fonctionnement d’autres dépôts (Ussel et Clermont-Ferrand). On
Lavaufranche. sur de ce bricolage aux équipes de conduite. Mais peut ainsi voir, vers le milieu des années 1950,
la gauche, on voit si la machine part en révision dans un atelier une locomotive partir le soir de Montluçon avec
la voie à destination autre que celui de Montluçon, elle en revient l’Express 2009 pour Ussel, puis continuer dans
de la courte antenne automatiquement avec le trou de la vis bouché la matinée en tête d’un train de marchandises
desservant la gare
et tout est à recommencer ! vers Clermont-Ferrand via Laqueuille et revenir
de Boussac.
en fin de journée à Montluçon via Gannat : une
tournée de plus de 325 km sur des lignes difficiles!
Ainsi, les 141 E et F ont assuré un service
dur mais sans faille sur les lignes de l’étoile
de Montluçon. Au 1er janvier 1969, seules les
141 E 435, 545, 141 F 299 et 589 sont encore en
service. Le 8 février 1969, la 141 F 299 assure
le dernier train tracté par une de ces Mikado,
en tête d’un marchandises entre Montluçon
et Moulins. Fin mai 1969, lors du passage au
service d’été, ces quatre dernières machines
sont définitivement radiées. Quant à Georges
Sauvestre, il va poursuivre sa carrière, pour la
terminer le 1er juin 1978 avec le grade d’Ingénieur
© J. BAZOT

Principal Adjoint. ◼

ferrovissime - 19
Comment ça marche ?

© B. JUILLARD
Même sur les lignes secondaires, on utilise des techniques modernes: RVB avec bien souvent des LRS, comme ici à Marcillac – entre Capdenac
et Rodez – en 2010. Si l’investissement est important, les futures dépenses d’entretien sont bien moindres!

Les évolutions de la technologie

des LRS Texte: André Francisco

Après avoir décrit dans Ferrovissime n° 101 les règles de maintenance

des LRS (Longs Rails Soudés), André Francisco évoque maintenant leurs
progrès techniques.

L
es LRS, très répandus aujourd’hui,
ont entraîné progressivement une
profonde évolution des règles de
maintenance de la voie et des ma-
tériaux mis en œuvre. Leur dilata-
tion est pourtant minime : 1 mm par
100 m de rail et par degré. Mais compte
tenu des plages de température entre
hiver et été, cela représente tout de
même des variations de l’ordre de 7 cm
sur 100 m entre – 25° et + 45°, norme
adoptée sous nos latitudes. Cependant,
la dilatation ne peut avoir lieu que
sur les 150 premiers mètres du LRS à
partir d’un joint. Il faut donc à la fois
permettre cette dilatation et maintenir
fermement la voie en place dans le
corps du LRS.
Des technologies au service
de LRS de plus en plus longs
Un certain nombre de technologies
complémentaires ont donc dû être
inventées, développées et améliorées:
- Appareils de dilation spécifiques
permettant le déplacement de l’ex-
trémité d’un LRS, y compris quand
il faut relier deux LRS entre eux, par
exemple au franchissement des ou-
vrages d’art longs.
- Technologie particulière très élabo-
rée pour les appareils de voie, qui sont
désormais en principe tous soudés
sur la plupart des lignes des groupes
UIC 1 à 5.
- Joint isolant collé, pour permettre
la segmentation des circuits de voie
sans coupure mécanique du rail et ul-
térieurement circuit de voie sans joints.
- Attaches dites élastiques, permettant
de tenir fermement le rail fixé à la
traverse même sous de fortes charges,
en supprimant tout risque de che-
minement du rail, ce qui pourrait
concentrer les contraintes sur une

20 - ferrovissime
© T. PORCHER

La construction d’une infrastructure nouvelle permet de travailler dans d’excellentes conditions, en l’absence de circulations
commerciales sur la voie voisine et avec une voie provisoire à disposition pour la pose de la première voie.

LA DILATATION NE PEUT AVOIR LIEU QUE SUR LES

150 PREMIERS MÈTRES DU LRS À PARTIR D’UN JOINT
portion localisée de la voie, avec risque
de déformation de celle-ci.
- Mise en œuvre d’une résistance
du châssis de la voie la plus élevée
possible, pour se prémunir de tout
mouvement parasite. C’est ainsi que
s’est développée la technologie de
la traverse béton monobloc pesant
jusqu’à 250 kg, à comparer aux 80 kg,
au maximum, d’une traverse bois.
Mais ce n’est pas tout : au-delà de la
surveillance à pied ou en train, essen-
tiellement visuelle, un certain nombre
d’engins sont utilisés pour suivre l’état
de la voie. Il s’agit notamment des
voitures IRIS 320, Mauzin, Matisa,
ESV qui permettent de contrôler les
défauts de nivellement, dressage et
écartement, les amorces de déforma-
tion ainsi que la tenue des attaches.
période chaude, il ne faut pas oublier
qu’en hiver les contraintes s’inversent:
au lieu de «pousser», le rail «tire» et
casse beaucoup plus facilement. C’est
ainsiquel’onpeutavoirdeslacunestrès
importantes en cas de rupture. J’ai eu
pour ma part à gérer un déraillement
importantsurlaligneVeynes/Briançon,
provoqué par une rupture de LRS en
courbe en plein hiver, avec une très
forte lacune dans un zone sans circuit
de voie. D’autres engins ont été déve-
loppéspourcontrôlerl’étatdesattaches
par relevé et analyse photographique.
Toutcelafaitbiensûrl’objetdeprocé-
dures strictes, évoluant grâce au retour
d’expérience. Ainsi, lorsque le châssis
de voie a été trop remanié, suite à des
travaux par exemple, il faut procéder à
une homogénéisation des contraintes
et à une fixation du rail autour d’une
température moyenne de 25°. Cette
opération, appelée libération du rail,
se réalise aujourd’hui à une tempéra-
ture inférieure à 25°, avec des tendeurs
hydrauliquespermettantd’étirerlerail
à la longueur qu’il aurait à la tempé-
rature de 25°, sa fixation immédiate
empêchant alors tout mouvement du
rail «libéré». Cette opération fige ainsi
l’état des contraintes de la voie et lui
permet de se comporter comme s’il avait
fait 25° au moment où on l’a effectuée.
Ces innovations et ces nouvelles
procédures permettent de mettre en
œuvre des LRS de plus en plus longs,
dans des conditions de sécurité et de
coût sans cesse améliorées. ◼

Des contrôles pour

prévenir les risques
De même, pour la vérification de
l’état des rails, la voiture Téléweld per-
met de détecter les défauts invisibles et
donc d’anticiper les ruptures possibles
aux points les plus fragiles. Car s’il existe
un risque important de déformation en
Pas de rails de 100 à 200 m de long !
Un calcul de forces montre que seuls les 150 derniers mètres d’un LRS
peuvent se dilater. De ce fait, un LRS ne peut pas mesurer moins de
300 m, mais par contre il peut avoir une longueur infinie. Pour les barres
normales avec joints, la longueur maximum est de 36 m. Conséquence
logique: il n’y a donc pas de rails posés en voie entre 36 m et 300 m!

ferrovissime - 21
Stars du rail
IL Y A 20 ANS,
NAISSAIT EN VENDÉE
UN DRÔLE DE TGV
Le 28 mai 2000 débute,
en Vendée, l’épisode
le plus étonnant de
l’histoire du TGV
Atlantique : sa traction
par une locomotive
diesel !
Texte et photos : Éric Hospital
22 - ferrovissime
Juillet 2001: la 72061
quitte Nantes et la
caténaire pour les Sables.
À l’arrière-plan, le dépôt
des trams nantais.
S
tation balnéaire, port de
pêche et cœur d'une ag-
glomérationde50000habi-
tantsàl’économietrèsdyna-
mique,LesSables-d'Olonne
sont desservis par une voie
unique de 36 km, greffée en gare de La
Roche-Sur-Yon sur l'artère Bordeaux/
Nantes.76kmdedoublevoiepermettent
ensuitederejoindreNantes.Les112km
duparcoursLesSables/Nantesprésentent
un profil très bosselé, caractérisé par
de courtes mais nombreuses rampes
atteignant 10 mm/m.
Vapeur, diesel puis TGV
Cette antenne à voie unique connaît
une importante desserte régionale ain-
si qu’un trafic grandes lignes axé sur
Paris, mais caractérisé par des pointes
estivales très marquées. Du temps de la
vapeur, ces périodes de fort trafic sont
Près de Gorges,
la 72064 file vers
les Sables avec son
TGV Atlantique sous la
chaleur de juillet 2003.
l'occasion de voir arriver aux Sables un
festival de trains express au crochet des
Pacific, voire des 141 R fuel, nantaises
ou des 141 R charbon thouarsaises.
Les vapeur sont remplacées, dès le
début des années 1970, par la palette
complète des diesel de ligne présents
dans le secteur – des vieilles CC 65000
aux jeunes CC 72000 en passant par les
A1A A1A 68000 et les grandes familles
des 66000 et 67000.
L'arrivée du TGV à Nantes fait ger-
mer l'idée de pousser l'électrification
jusqu'auxSables,qui rejoindraient ainsi
leclubdesstationsbalnéaires desservies
directement par le TGV, un bel argument
de promotion touristique ! Mais l’im-
portance de l'investissement financier
entraîne alors de vives réactions, à même
de compromettre le projet. Heureuse-
ment il y a, parmi les élus vendéens et
les dirigeants de la SNCF, des esprits
L’ÉPHÉMÈRE TGV TRACTÉ VA RENDRE ÉVIDENT POUR TOUS
QU’IL N'EXISTE PAS D'AUTRE VOIE QUE L'ÉLECTRIFICATION
clairvoyants et pugnaces pour pousser
le dossier dans un contexte souvent dif-
ficile. Ils sont bien aidés en cela par une
expérienceaussioriginalequeprovisoire,
lancée pour amener le TGV aux Sables
sans caténaire: l’éphémère TGV tracté
va rendre évident pour tous que pour le
remplacer,iln'existepasd'autrevoieque
l'électrification. Celle-ci est finalement
opérationnelle fin 2008. Mais en atten-
dant le déroulement de la caténaire, les
techniciens ont un beau défi à relever.
Un TGV Atlantique
derrière une CC 72000
L'idée est simple mais osée : faire
circuler le TGV jusqu'aux Sables sur
une voie non électrifiée. Comme il
n'existe pas de TGV bimode, il faut nécessaire à tous les auxiliaires utiles
donc trouver un engin diesel capable en matière de sécurité et de confort.
de remorquer les 444 t d'une rame Seules deux solutions apparaissent
TGV A à une vitesse raisonnable, tout alors possibles, compte tenu du parc
en lui fournissant le courant 1 500 V thermique français : ▶▶▶
Les modifications appliquées aux CC 72000
Trois CC 72000 (72061, 62 et 64), affectées à Nevers, arrivent au dépôt de
Nantes après modifications. Par ailleurs, huit rames TGV A (372 à 379), basées
à Châtillon, voient leurs attelages Scharfenberg équipés du coupleur spécial
1500 V. Ce sous-parc est totalement compatible avec les rames TGV A non
modifiées afin de pouvoir circuler en UM avec l'une d'elles sur l'ensemble
du réseau. Par contre, ce système ne permettant pas de contrôler, depuis
le pupitre de la 72000, l'état de fonctionnement de la rame, la présence
d'un conducteur dans la cabine du TGV A est indispensable. Il ne participe
pas à la traction mais a en charge la surveillance de sa rame.
ferrovissime - 23
Stars du rail

Des faces de cabines

profondément modifiées
Côté poste 2, la 72061 nous montre sa face: le
coffre pour l'attelage est bien visible. Le coupleur
1500 V est le petit capot rouge visible sur le côté
gauche (dans l'orientation de la photo) du «Scharf».

24 - ferrovissime
Quittant Nantes en juin 2004, la 72061 est en route pour les Sables.
▶▶▶ - soit une UM de BB 67400 (avec
ses 1525 kW une seule machine ne
serait pas assez puissante) ;
- soit une CC 72000 (2 250 kW).
La première solution est rapide-
ment éliminée pour une question de
longueur de voie : la gare des Sables
ne peut recevoir, sans restructura-
tion importante et donc avec un
surcoût inadmissible, une rame
TGV A (237,590 m) remorquée par
une UM de 67400 (34,180 m). Reste
donc l'hypothèse CC 72000 (20,190 m)
qui va être creusée pour aboutir à
l'expérience du TGV tracté.
Ce concept est accueilli avec beau-
coup de scepticisme par nombre de
techniciens de la traction et du matériel,
mais la force de conviction de certains
dirigeants a eu raison des réticences
internes et le projet a pris corps.
Les modifications à apporter à la
CC 72000 portent sur trois domaines
principaux. Il faut modifier la tra-
verse de tamponnement pour la
doter d'un coupleur Scharfenberg
identique à celui équipant les rames
TGV A. Mais on doit aussi trouver le
moyen de modifier ce coupleur afin
de faire passer par son intermédiaire
le 1 500 V nécessaire au fonctionne-
ment de certains auxiliaires de la
rame. Il est également impératif de
monter sur la 72000 un assécheur
d'air Knorr pour alimenter le TGV A
en air sec.
Des 72000 sans tampons
Le premier volet de ces modifica-
tions consiste à déposer les tampons
CE CONCEPT EST ACCUEILLI AVEC
BEAUCOUP DE SCEPTICISME
PAR NOMBRE DE TECHNICIENS DE
LA TRACTION ET DU MATÉRIEL
classiques, installer sur chaque tra-
verse un coupleur Scharfenberg type
TGV A monté sur une structure per-
mettant de le disposer suffisamment
en avant du nez de la 72000 pour
permettre les passages en courbe.
La disparition des tampons mo-
difie sensiblement la silhouette de
l'engin et ce gros appendice mon-
té en important porte-à-faux n’est
vraiment pas esthétique. De même,
l'imposant coffre fixé sous l'emplace-
ment du tampon gauche uniquement
côté cabine 2 et contenant un atte-
lage de secours, nécessaire en ▶▶▶
ferrovissime - 25
Stars du rail
Juin 2002: la 72064 traverse en vitesse la gare du Pallet avec un TGV Les Sables/Paris.
▶▶▶ cas de remorque par un engin
classique, alourdit la silhouette de
l'engin. Mais peu importe l'esthé-
tique : seul le résultat compte !
Pour la liaison électrique, on re-
nonce au câblot 1 500 V classique
qui aurait dû être mis en place ou
retiré manuellement. Les techniciens
optent pour un coupleur automatique
monté sur le côté droit des Schar-
fenberg. La mise au point n’est pas
évidente, mais la Direction du Ma-
tériel réussit sa gageure et, une fois
Un TGV pour Paris arrive à Nantes en franchissant la Loire sur le pont de la Vendée, en mai 2001.
LA DISPARITION DES TAMPONS MODIFIE SENSIBLEMENT
LA SILHOUETTE DE LA 72000
26 - ferrovissime
le système fiabilisé, elle procède à la
transformation du parc dédié.
La période d'essais achevée, le pre-
mier TGV commercial pour les Sables
circule le 28 mai 2000 selon une grille
reposant sur deux aller-retours quoti-
diens, avec adaptations les week-ends
et en période de forte demande.
Cette solution transitoire
s’avère coûteuse
À l’usage, le système fonctionne
correctement sauf le coupleur 1 500 V,
principale cause d'incidents hélas
assez fréquents. Comme l'absence
de 1 500 V prive la rame de climati-
sation et de verrouillage des portes
d’accès, cela interdit la circulation
en charge pour d’évidentes raisons
de sécurité. Il faut donc recourir, plus
souvent que de raison, à des mesures
de substitution routière ou ferroviaire
selon que l'incident se produit aux
Sables ou à Nantes.
Si les clients sont satisfaits de ne
plus avoir à changer de train à Nantes,
les financiers sont d'un avis différent.
L'accord SNCF/Conseil Général de la
Vendée prévoit que ce dernier com-
penserait les pertes subies par la SNCF
pour cette desserte. Or, un important
déficit apparaît dès le début, au point
d'envisager la fin de ce service pour
décembre 2003. L'échéance est fina-
lement repoussée à décembre 2004,
alors que l’électrification est enfin
actée. Toutefois, les clients doivent
attendre quatre ans avant d'arriver
de nouveau aux Sables en TGV, cette
fois-ci sous la caténaire inaugurée le
11 décembre 2008. ◼
 Lignes empruntées par le TGV A
remorqué par une CC 72000
Infographie : Vincent Babilotte

Sans tampon et avec son «Scharf» dont l’aspect rappelle un attelage en N,

la 72061 ressemble à un modèle Arnold qui aurait grandi 160 fois!

Les modifications appliquées

aux infrastructures
Côté installations fixes, d'une part il faut rehausser les quais
à La Roche-sur-Yon et aux Sables, d'autre part, comme il
n’est pas envisageable de laisser le moteur de la CC 72000
tourner lors du stationnement au terminus, il est nécessaire
d’installer une portion de caténaire alimentée en 1500 V sur la
voie jouxtant le BV. Une fois la 72000 dételée, le conducteur
lève le pantographe permettant au TGV A de s’alimenter.

En mars 2000, en gare de Nantes, départ vers les Sables du premier train d'essai tracté par la 72061, il y a tout juste vingt ans.

ferrovissime - 27
 PORTRAIT DU RAIL

BB 25150
‹ ‹
LES
ULTIME SÉRIE DE LOCOMOTIVES BB MTE
Texte : Frédéric Didelot

La BB 25193, en tête du train 5640/41 pour Nice-Ville,

en gare de Saint-Gervais-le-Fayet, le 6 avril 1984. Le panneautage
de ses persiennes présente une anomalie fréquemment
© É. HOSPITAL

vue tout au long de la carrière de ces machines - et encore

maintenant en Roumanie ! L’UM3 de Caravelles visible sur
la gauche vient d’arriver de Lyon-Perrache en 5247.

28 - ferrovissime
ferrovissime - 29
Les portraits du rail
© LAFORGERIE / PHOTOTH. LR PRESSE
Une seconde série de BB 25100
remises au goût du jour
DÉRIVÉES DES BB 25100 (FERROVISSIME N°98),
LES 25150 BÉNÉFICIENT, AU FIL DES SOUS-SÉRIES,
DE SOLUTIONS TECHNIQUES PLUS MODERNES.
À
l’issue des livraisons des BB 25101
à 125, intervenues entre juillet
1964 et juin 1965, la SNCF passe
commande de 20 locomotives
supplémentaires pour pour-
suivre l’effacement des fron-
tières électriques. Livrées entre
septembre 1967 et juin 1969, les
BB 25151 à 170 sont limitées à
130 km/h comme leurs devan-
cières et conservent le rapport d’engrenage
3,476, qui les distingue des BB 25200 aptes à
rouler à 160 km/h avec leur rapport 2,92.
Elles reprennent l’aspect extérieur et la
plupart des caractéristiques techniques des
BB 25101 à 125. Cette nouvelle tranche de nu-
▶ DATES DE LIVRAISON ◀
1967 (8): 25151 à 158 1974 (4): 25172 à 175
1968 (11): 25159 à 169 1976 (9): 25176 à 184
1969 (1): 25170 1977 (11): 25185 à 195
1973 (1): 25171
30 - ferrovissime
Première de la série, la
BB 25151 présente un
aspect extérieur proche
de celui des BB 25201 à
246, notamment la livrée
vert bleuté clair. En 1975,
elle stationne ici à Culoz.
Première version de la
livrée «Savoie» vert
bleuté foncé avec sigle
SNCF frontal jaune
jonquille, bien peu visible
sur le bandeau blanc
cassé. Nous sommes fin
juillet 1976 et la BB 25179
vient d’être livrée.
mérotation s’explique par quelques modifi-
cations techniques sans incidence sur les per-
formances. Les bogies comportent des boîtes
d’essieux à rouleaux et non plus à coussinets.
Un nouveau disjoncteur est installé, ainsi qu’un
système d’antipatinage par shuntage d’induit.
Et les feux rouges sont incorporés dès l’origine
aux extrémités.
Un pupitre plus moderne
Le pupitre de conduite est beaucoup plus er-
gonomique que celui, avec le petit manipulateur
de traction circulaire, équipant les BB 16000 et
25100. Dit unifié, il est plus moderne, moins
haut pour permettre de mieux voir la voie et ses
abords. Le manipulateur de traction comporte
désormais un grand volant et, en son centre,
un emplacement pour la fiche horaire. Le frein
PBL 2 remplace le H7A, alors que l’indicateur
de vitesse Téloc évince le Tachro.
En juillet 1971, la SNCF passe commande
de cinq locomotives supplémentaires, qui sont
mises en service entre janvier et avril 1974.
Hormis l’installation d’un nouveau type de ▶▶▶
 © DR / COLL. B. WEYLAND
© J.J. BUCKLEY / COLL. B. WEYLAND

Le 9 juillet 1979, c’est encore l’époque des rames composées de vieilles voitures métallisées! En gare du Fayet, celle-ci est remorquée par la BB 25182.

ferrovissime - 31
Les portraits du rail

© G. DAUVET
Vue latérale de la BB 25173 en attente en gare de La Roche-sur-Foron en 1976.

▶▶▶ disjoncteur, cette courte sous-série bénéfi-
cie de deux évolutions esthétiques notables : les
persiennes latérales sont désormais agrandies,
verticales et en aluminium, les traverses de choc
sont renforcées pour préparer l’installation de
l’attelage automatique – qui n’aura finalement
jamais lieu – ce qui entraîne la suppression des
jupes frontales. Longues de 16,730 m au lieu de
16,200 m, elles sont semblables aux BB 25247
à 251, livrées juste après, entre mai et juillet
1974, pour compléter l’effectif des BB 25200.
Une version Savoie
En 1974, une troisième sous-série est com-
mandée, comportant 20 exemplaires qui sont
livrés entre mai 1976 et novembre 1977. Cette
acquisition peut sembler tardive, alors que
120 BB 22200, plus modernes et équipées d’un
schéma électrique avec des thyristors, ont été
commandées en octobre 1973. En fait, il s’agit
d’homogénéiser le parc sur le secteur savoyard et
de sécuriser les performances en saison hivernale
avec un matériel connu et qui a fait ses preuves.
Ces locomotives sont équipées de chasse-
pierres et leur structure est renforcée en cer-
tains points, ce qui porte leur masse de 84 à 87 t.
Par rapport aux BB 25171 à 175, les BB 25176 à
179 reçoivent une livrée innovante, à base de
807, presque blanc, au niveau des feux et cein-
turant toute la caisse. Il intègre le numéro sur
les faces latérales et les lettres SNCF sur les faces
latérales et frontales, qui sont jaune jonquille,
donc peu visibles sur fond blanc. Les enjoliveurs
en aluminium disparaissent et sont remplacés
par une discrète moustache blanche stylisée in-
tégrant le numéro de l’engin en jaune jonquille.
Loin de faire l’unanimité, cette livrée expéri- En 1987, la
mentale évolue dès la 25180 vers la livrée Savoie, BB 25171
à base de vert bleuté foncé 312. Le bandeau gris à grandes
persiennes
807 disparaît entre les feux tandis que la taille
quitte la gare
de la moustache blanche s’agrandit, le numéro de Chambéry
étant désormais en blanc dans un cadre noir. La en tête d’un
police des caractères évolue également et s’épaissit. omnibus pour
Annecy.
© G. DAUVET

vert bleuté foncé 312 à la place du vert bleuté

clair 313, agrémentée d’un large bandeau gris

32 - ferrovissime
© G. DAUVET
En août 1987, la BB 25175 est en tête d’un train complet d’eau minérale d’Evian en gare d’Annemasse.
LES PERSIENNES LATÉRALES SONT DÉSORMAIS AGRANDIES,
VERTICALES ET EN ALUMINIUM, LES TRAVERSES DE CHOC
SONT RENFORCÉES
À partir de 1985, l’ensemble des locomotives
reçoit la livrée béton, les enjoliveurs et plaques
en aluminium étant démontés sur les 25151 à
175, tout comme les jupes sur les 25151 à 170.
Les BB 25151 à 195 renforcent
les parcs de trois zones du réseau
Héritières directes des BB 25101 à 125, les
BB 25151 à 195 sont destinées à franchir trois
frontières électriques entre le 1 500 V et le
25 000 V. Huit locomotives (25156 à 159, 162
à 165) sont livrées neuves à Chalindrey entre
novembre 1967 et avril 1968. Elles sont intégrées
au fur et à mesure dans le même roulement
que les BB 25101 à 125. Ce renfort permet de
réduire les relais de traction à Chalindrey avec
les locomotives monocourant 25 000 V de/vers
la Lorraine et d’améliorer les temps de parcours
entre les triages lorrains de Blainville, Conflans,
Metz-Sablon, Thionville et ceux dijonnais de
Gevrey et Perrigny. Progressivement, leur rayon
d’action augmente pour atteindre les triages
d’Hausbergen et Strasbourg-Cronenbourg (via
Nancy) et Woippy, mais aussi les gares frontières
d’Apach et Forbach, ainsi que Creutzwald.
De façon éviter de saturer le nœud dijon-
nais avec les relais, les BB 25100/150 poussent
jusqu’aux triages d’Ambérieu via la ligne de la
Bresse électrifiée à compter de mai 1969 et de
Sibelin. Elles assurent aussi la traction de trains
de voyageurs: un aller-retour rapide Nancy/Dijon;
les quatre paires d’express (deux de jour, deux
de nuit) de Metz ou Strasbourg vers Vintimille
ou Cerbère, jusqu’à Dijon ; les TAC circulant
l’été, depuis la gare frontière luxembourgeoise
de Bettembourg pour les trains en provenance
de Belgique et des Pays-Bas, mais aussi depuis
Forbach ou Strasbourg pour les trains en pro-
venance d’Allemagne.
D’abord sept locomotives
pour l’étoile de Savoie
Le détachement depuis 1965 de plusieurs
BB 25100 de Chalindrey à Chambéry, lors des
pointes saisonnières, pour assurer des trains sup-
plémentaires vers Saint-Gervais et Évian, ▶▶▶
ferrovissime - 33
Les portraits du rail

34 - ferrovissime
Pour les trains
de toutes
catégories
Les 25150 «Savoie», c’est
aussi la traction de rapides
et express! En 1987, la
BB 25195 est en tête d’un
© G. DAUVET

train de nuit pour Saint-

Gervais à La Roche-sur-Foron.

ferrovissime - 35
Les portraits du rail

© G. DAUVET
En 1987, la BB 25183 est en gare de La Roche-sur-Foron avec un train de nuit pour Saint-Gervais.

LES CINQ DERNIÈRES MACHINES DE CETTE TRANCHE

(25166 À 170) SONT AFFECTÉES À MARSEILLE-BLANCARDE

© G. DAUVET

36 - ferrovissime
 © G. DAUVET
▶ CARACTÉRISTIQUES ◀
Constructeur: MTE
Effectifs: 45
Puissance sous 1,5 kV: 3400 kW
Puissance sous 25 kV: 4130 kW
Vitesse limite: 130 km/h
Masse: de 84 à 87 t
Pantos: un AM 18 B
et un AM 18 U

Munie de petites
persiennes, la
BB 25162 arbore
la livrée béton en
décembre 1989.

À la fin des années
1980, la BB 25180
franchit la gare d’Evires
et se dirige vers
La Roche-sur-Foron.
▶▶▶ avait montré l’intérêt de disposer d’engins
puissants et fiables. Sept locomotives (25151 à
155, 160 et 161) sont livrées neuves à Chambé-
ry entre septembre 1967 et février 1968 pour
être utilisées sur l’étoile de Savoie électrifiée en
25000 V, à savoir Aix-les-Bains/Annecy /La Roche-
sur-Foron jusqu’à Annemasse ou Saint-Gervais,
et en permettre l’accès par la gare d’Aix-les-Bains
électrifiée en 1 500 V.
Elles visent à renforcer la petite série des
CC 20001, 25001 à 9, mais aussi à préparer le re-
trait des prototypes encore en service (CC 20002,
BB 20004 ex-16540, BB 20005 ex-16028, BB 20006
ex-10001). Ces sept machines sont utilisées
comme de véritables locomotives mixtes, tant
sur des omnibus que des express de jour ou de
nuit en provenance de Paris, Hendaye, Vinti-
mille vers Saint-Gervais, à partir de Chambéry,
que sur des trains de marchandises. Au-delà
de 750 t, elles sont utilisées en double traction
entre elles ou avec d’autres séries pour affronter
les rampes de 20 pour mille entre Aix-les-Bains,
Annecy et La Roche-sur-Foron.
Cinq BB 25150 sur les bords
de la Méditerranée
Enfin, les cinq dernières machines de cette
tranche (25166 à 170) sont affectées à Mar-
seille-Blancarde, les quatre premières étant
livrées entre mai et août 1968, la dernière
n’arrivant qu’en juin 1969. Elles y épaulent les
BB 25536 à 555, apparues entre octobre 1965
et juin 1968, suite à l’électrification de la ligne
de la Côte d’Azur. Comme elles sont limitées à
130 km/h, elles sont prioritairement utilisées
sur les trains de messageries et de marchandises
provenant d’Avignon ou Miramas et allant vers La
Seyne-sur-Mer, Cannes-La Bocca, Nice-Saint-Roch,
Vintimille-La Roya en transitant par le raccorde-
ment des Chartreux qui permet de contourner la
gare en impasse de Marseille-Saint-Charles. Elles
remorquent aussi des trains entiers de bauxite
entre Le Luc-Le Cannet et Saint-Marcel. Leur
puissance supérieure par rapport aux BB 25500
est bienvenue dans les rampes de 8 pour mille
qui ponctuent cette ligne. Cela permet aussi
d’éviter de recourir à des UM de BB 25500 et
donc d’économiser des engins de traction. En
complément, elles apportent aussi un soutien
aux BB 25220 à 246, livrées neuves à Marseille
entre juin 1966 et avril 1967. C’est en particulier
le cas sur les trains de nuit – dont le fameux
Train Bleu – en assurant le relais de traction
à Avignon avec les locomotives monocourant
2D2 9100 ou BB 9200, mais aussi sur des omnibus
Marseille/Toulon.
La dotation provençale
est de courte durée
Cette affectation prend fin en septembre 1971,
après l’arrivée des six BB 25570 à 575 livrées
neuves entre mai et septembre 1971 à Marseille.
Elles rejoignant Chambéry pour renforcer le
parc existant qui vient de perdre la CC 20002.
Cet apport est indispensable car l’électrification
Bellegarde/Annemasse est effective au même
moment, puis va être prolongée un an plus tard
jusqu’à Evian. Les BB 25150 remplacent sans
difficulté les dernières 141 R fuel d’Annemasse
en tête des trains d’eau d’Évian jusqu’à Ambé-
rieu, mais également sur les trains de sable issus
des carrières de Viry, le cas échéant en ▶▶▶

ferrovissime - 37
Les portraits du rail
En février 2003, c’est la livrée Fret qui est appliquée à la BB 25179 qui est, ici, en attente à Valenton.
PAS MOINS DE 20 LOCOMOTIVES SUPPLÉMENTAIRES
SONT DONC COMMANDÉES EN 1974
▶▶▶ double traction. Elles se rendent également
au triage suisse de Genève-La Praille et assurent
les trains de voyageurs de la ligne du Chablais.
À l’issue de ce regroupement, la série est répartie
entre Chambéry (12) et Chalindrey (8).
Le parc savoyard est renforcé
en deux temps
Comme précisé précédemment, la SNCF
passe commande en juillet 1971 de cinq loco-
motives supplémentaires, mises en service
entre janvier et avril 1974. L’objectif est de se
séparer des derniers prototypes, notamment
de la BB 20005 qui sera remise au type (16000)
en 1975, et de faire face à l’augmentation ré-
gulière du trafic.
Cette arrivée de matériel neuf est toutefois
insuffisante. En effet, les CC 25002, 04 et 07 ont
dû être amorties par anticipation dès 1973 suite
à des accidents ou incendies. La radiation des
six autres locomotives de la série, outre celle
du prototype CC 20001, est à prévoir car leur
puissance de 300 kW sous 1 500 V est incompa-
38 - ferrovissime
© G. DAUVET
tible avec les besoins. Pas moins de 20 locomo-
tives supplémentaires sont donc commandées
en 1974, de façon à faire également disparaître
les relais de traction en gare de Bellegarde sur
les trains du RO et du RA qui relient le Cha-
blais aux triages d’Ambérieu, Chasse-sur-Rhône,
Lyon-Guillotière, Sibelin mais aussi de Gevrey.
Suite à l’amortissement des dernières CC, elles
sont désormais omniprésentes sur l’ensemble
de l’étoile de Savoie. ◼
▶ LES MODIFICATIONS APPORTÉES ENTRE 1978 ET 1995 ◀
Quelques modifications techniques sont apportées sur la série. Des
graisseurs de boudins de roue sont installés à partir de 1978, tout
comme la Conduite Principale indispensable pour tracter des voitures
Corail. À partir du milieu des années 1980, des prises d’interphonie
sont installées au-dessus des baies frontales. De nouveaux équipements
de sécurité apparaissent progressivement, avec la Radio Sol Train et
la mémorisation de la vigilance en 1986-87, l’asservissement traction-
freinage, l’asservissement à l’urgence et le KVB à partir de 1995.
 La BB 25173 passe
à Pringy, peu
avant son terminus
d'Annecy, avec le

© B. WEYLAND
TER 884158 Saint-
Gervais/Annecy du
16 novembre 2004.

Elles assurent des trains

de toutes catégories

À l’issue des dernières livraisons, en 1977,

le parc est réparti entre Chalindrey (20)
qui dispose des BB 25151 à 170 (en plus
des BB 25101 à 125) et Chambéry (25) qui
possède les BB 25171 à 195, plus récentes. Cette
répartition reste stable jusqu’en 1992, mis à part
la mutation à Chambéry de la 25170 début 1980.
Les premières sont utilisées sur les flux de trafic
Lorraine/Bourgogne,deboutenboutentreWoippy
et Ambérieu ou Sibelin, permettant d’éviter des
relaisdanslenœuddijonnais.Ellesatteignent,vers
l’Allemagne,lespointsfrontièresd’Apach,Forbach
et Überherrn, mais aussi le triage luxembour-
geois de Bettembourg. En Lorraine, elles enlèvent
également des trains du
RO pour soulager le parc
Jusqu’en 1985, elles conservent les allers-re-
tours voyageurs entre Dijon, Culmont-Chalindrey
et Nancy, avant qu’ils ne soient repris par les
BB 22200. En contrepartie, les 25100 et 25150
investissent l’artère Nord-Est en tête de trains
de marchandises jusqu’à Aulnoye, Somain et
Lille-Délivrance, et reprennent en journée des
omnibus autour de Metz vers Conflans-Jarny,
Forbach, Thionville et Luxembourg.
Les renforts d’hiver en Savoie
restent en vigueur
Lors des pointes hivernales, quelques BB25151
à 170 continuent à être détachées à Chambé-
ry pour renforcer le parc local sur les trains de
voyageurs, mais vers Saint-Gervais et Évian uni-

▶ LES LIVRÉES ◀ des BB 12000 et 16500,

Vert bleuté clair: 25151 à 175
Savoie expérimentale: 25176 à 179
Savoie définitive: 25176 à 195
Béton: 25151 à 195
Multiservices: 25160
Fret: 25152, 153, 157, 176, 178 à 183
En Voyage: 25177
qui remplacent par déca-
lage des BB 13000, dont
l’amortissement a débuté.
En outre, elles reprennent
aux CC 14100 – limitées
à 60 km/h – des trains
lourds, leur vitesse supé-
rieure tout comme leur
puissance sous 25 000 V
étant un atout certain.
quement. Certains trains d’agences ou supplé-
mentaires sont mêmes repris depuis Chalindrey,
voire depuis Paris-Est, jusqu’à leur terminus alpin.
L’électrification de Lyon/Grenoble et de son an-
tenne vers Chambéry en février 1985 est sans effet
sur les BB 25150 savoyardes qui ne fréquentent
pas ces itinéraires, sauf lors de travaux sur l’axe
principal Lyon/Ambérieu/Chambéry. En revanche,
la mise sous tension de la ligne de la Tarentaise de
Saint-Pierre-d’Albigny à Albertville en 1500 V en
mai 1988, puis jusqu’à Bourg-Saint-Maurice ▶▶▶

ferrovissime - 39
Les portraits du rail
© P. JULIEN
EN LORRAINE, ELLES ENLÈVENT ÉGALEMENT
DES TRAINS DU RÉGIME ORDINAIRE POUR SOULAGER
LE PARC DES BB 12000 ET 16500
▶▶▶ six mois plus tard en 25 000 V, leur permet
d’accroître leur périmètre d’intervention. Ces
incursions sont cependant limitées aux pointes
hivernales et aux JO d’Albertville en 1992. Outre
la traction des TER, elles prennent aussi en
charge des trains de marchandises pour Ugine
et Pomblières-Saint-Marcel.
Les 25150 quittent Chalindrey
pour Thionville
La mise en service progressive des BB 26000,
à partir de 1990-91, conduit à redéployer les
BB22200 sur certains trafics fret à longue distance
et à supprimer des relais maintenus jusqu’alors en
raison de l’insuffisance du nombre de locomotives
bicourant. En parallèle, le parc des locomotives
opérant sur le Nord-Est évolue, avec les radiations
progressives des BB 12000 et CC 14100.
Les 25150 de Chalindrey sont par conséquent
mutées en janvier 1992 à Thionville, où la fonction
bicourant de la série ne va quasiment plus être
utilisée, sauf pour atteindre épisodiquement le
complexe dijonnais. En effet, leur puissance de
3400 kW sous courant continu, à comparer aux
4130 kW sous courant monophasé, est devenue
un handicap avec l’augmentation à 100 km/h
de la vitesse limite des trains de marchandises.
Désormais, les BB 25150 circulent sur l’ensemble
du Réseau Nord-Est, en Alsace jusqu’à Hausber-
gen, Strasbourg-Port-du-Rhin, Mulhouse-Nord,
40 - ferrovissime
▶ AFFECTATIONS ◀
Chalindrey: 11/1967 à 1/1992
Chambéry: 9/1967 à 9/2009
Marseille: 5/1968 à 9/1971
Thionville: 1/1992 à 12/2005
Rennes: 6/2004 à 9/2007
Vénissieux: 12/2003 à 12/2013
Le 30 janvier 2010,
un TER Lyon/
Chambéry passe
dans la Cluse des
Hôpitaux, entre
Ambérieu et Culoz,
derrière la BB 25193.
Bantzenheim; sur l’artère Nord-Est jusqu’à So-
main, Lille-Délivrance, Dunkerque ; mais égale-
ment en Picardie, en région parisienne jusqu’aux
triages de Vaires, Noisy, Le Bourget, Argenteuil,
Achères, et même en Normandie jusqu’à Sotteville
et Le Havre en transitant par la Grande Ceinture.
En complément, elles assurent aussi quelques
TER autour de Metz et Nancy, en remplacement
des dernières BB 13000 radiées.
Une première incursion bretonne
À l’inverse de ces changements sur l’Est, le
service des chambériennes n’évolue pas. Les
25170 à 195 continuent à assurer des trains de
Grandes Lignes avec des rames Corail sur Belle-
garde/Evian, Chambéry/Aix-les-Bains/Annecy/
Saint-Gervais, mais aussi des TER avec voitures
USI et UIC. Au Fret, elles restent fidèles à la ligne
du Chablais avec les trains d’eaux minérales entre
Publier (Evian) et Ambérieu, en double traction
ou en pousse, ainsi qu’aux dessertes locales vers
Albertville, Annecy, Pomblières, Viry.
Mais à l’automne 1992, l’électrification des
lignes bretonnes s’achève. Pour augmenter le
tonnage des trains de marchandises, notamment
de céréales et de granulats, les BB 25176 à 184 de
Chambéry sont mutées à Rennes et échangées
contre les BB 25203 à 209, à couple 160, qui vont
assurer en priorité les trains de Grandes Lignes
aboutissant aux vallées alpines. Elles circulent ▶▶▶
 © N. POISSON
En 2002, la BB 25170 roule en Normandie, à Serquigny.
© J.P. FRANCON

La BB 25188 stationne à Lyon-Perrache le 15 septembre 2011, entre deux remontes de rames TER vers les faisceaux de remisage du nœud
ferroviaire lyonnais.

ferrovissime - 41
Les portraits du rail
Sous la rotonde d’Annemasse, à côté de la «grand-mère» CC 20001, la BB 25173 vert bleuté clair permet de comparer sa livrée avec celle
de la BB 25188 vert bleuté foncé.
▶▶▶ sur les axes Trappes/Le Mans/Rennes/Brest
et Quimper, Le Mans/Nantes, Rennes/Nantes,
Donges/Nantes/Saint-Pierre-des-Corps. A partir
de juin 1993, ces locomotives sont également
réutilisées depuis Saint-Pierre-des-Corps sur Poi-
tiers/La Rochelle dès sa mise sous tension.
Cette incursion bretonne prend fin dès sep-
tembre 1995,suite à la modification du couple des
BB 25203 à 25235, désormais ramené à 130 km/h.
Ces neuf 25100 rejoignent alors Thionville, qui
en possède désormais 28, ce qui permet de pour-
suivre les radiations des BB 12000 et CC 14100.
A partir de janvier 1998, le roulement des cham-
bériennes évolue avec trois journées prévoyant
une réutilisation au-delà de Dijon vers Mulhouse,
Conflans et Woippy. Finalement, trois locomotives
(25170, 185 et 187) sont mutées de Chambéry à
Thionville en novembre 1998.
Une fin de carrière prématurée
En 1999, la mise en place de la Gestion par
Activités entraîne l’attribution de l’ensemble
de la série à Fret, avec ajout de l’indice 4 de-
vant leur numéro. Thionville dispose alors de
31 locomotives (25151 à 170, 176 à 185, 187), en
plus des 25101 à 125, tandis que 14 sont basées
à Chambéry (25171 à 175, 186, 188 à 195). Cette
affectation au Fret est cohérente avec les services
42 - ferrovissime
© Y. BRONCARD
effectués sur le Nord-Est,
mais moins avec ceux as-
surés en Savoie, qui sont
▶ TRANSFORMATIONS ◀
25180 = 25258 (10/2006 – 10/2010)
plus diversifiés, puisqu’ils
comportent également des 25183 = 25259 (11/2006 – 12/2011)
trains de voyageurs TER et 25184 = 25254 (10/2003 – 1/2012)
Grandes Lignes. Elles sont 25194 = 25255 (12/2003 – 1/2012)
finalement toutes réattri-
buées à l’Activité TER en 25195 = 25256 (3/2004 – 12/2009)
2002.
À la fin des années 1990, l’avenir des BB 25150
semblant assuré, dix d’entre elles (25152, 153, 157,
176, 178 à 183) commencent à recevoir la livrée
Fret, la 25160 ayant précédemment bénéficié
de la livrée multiservices suite à une réparation
accidentelle. Cependant, le plan Fret de 2003
condamne la série, jugée insuffisamment poly-
valente avec sa puissance limitée sous 1500 V et
trop coûteuse en entretien. Les révisions générales,
effectuées tous les 2,4 millions de km aux Ate-
liers d’Hellemmes jusqu’en 1998, puis à Oullins,
sont arrêtées et les premières radiations sont
prononcées. Les locomotives arrivées à échéance
de potentiel sont les premières touchées, tout Dans les
années 2000,
comme celles nécessitant de grosses réparations, à Vénissieux,
d’autant que les BB 27000 commencent à être la BB 25175
très présentes en Lorraine. Elles restent néan- porte la livrée
moins actives, avec des parcours d’environ ▶▶▶ béton.
 © B. WEYLAND
La BB 25193 est en tête d’un TER à Grésy-sur-Isère le 12 février 2006.

POUR AUGMENTER LE TONNAGE DES TRAINS DE MARCHANDISES,

LES BB 25176 À 184 DE CHAMBÉRY SONT MUTÉES À RENNES
© F. DURIVAULT

ferrovissime - 43
Les portraits du rail
Les 25150 ont été présentes à l’Est. Ici, la BB 25152 évolue à Thionville.
▶▶▶ 12000 km/mois pour celles de Thionville
et 7500 km/mois pour celles Chambéry.
Une reconversion au TER
En Savoie, leur présence sur les trains de fret
et sur les dessertes locales décline rapidement,
leurs trafics étant repris par les BB 26000. Elles
conservent la traction de deux trains de nuit, le
Talgo Zurich/Barcelone sur le parcours Genève/
Chambéry et le Paris/Saint-Gervais, qui ne cir-
cule plus que les vendredis et dimanches, à partir
d’Aix-les-Bains. Elles accompagnent le développe-
ment des TER entre Lyon et Aix-les-Bains, Annecy,
Evian, Modane, Saint-Gervais, ainsi que sur Lyon/
Chambéry via Saint-André-le-Gaz. Cela justifie la
mutation de deux locomotives (25177, 184) en
juin 2003, puis de quatre autres (25179, 180, 182,
183) en décembre 2005, de Thionville à Chambéry
pour être affectées à l’Activité TER.
Pour compenser la suppression des automoteurs
pendulaires ETR 460 sur Lyon/Milan, deux TER
sont créés entre Lyon et Chambéry pour assurer
les correspondances avec les TGV. Trois locomo-
tives (25184, 194, 195) sont alors modifiées pour
44 - ferrovissime
© G. DAUVET
La livrée béton s’applique aussi aux 25150 des tranches à grandes persiennes.
Ici, la BB 25182 est en attente au dépôt de Villeneuve-Saint-Georges.
© F. DURIVAULT
© É. HOSPITAL
En mai 2001, à Sainte-Luce-sur-Loire, la BB 25180 est en tête d'un train
de citernes Donges/Saint-Pierre-des-Corps.
circuler à 160 km/h avec changement du rapport
d’engrenage et renumérotées BB 25254, 255 et 256
en 2003-04. La première est équipée en plus du
multiplexage pour circuler en réversibilité, ce qui
permet de compenser les immobilisations suite à
incendie de plusieurs BB 25200 réversibles. Basées à
Vénissieux, elles sont affectées au TER Rhône-Alpes
et conservent leur livrée béton. Deux autres trans-
formations ont lieu en 2006, les BB 25180 et 183
devenant les BB 25258 et 259. Elles reçoivent alors
la livrée En Voyage et bénéficient du multiplexage
pour être attelées à des rames Corail réversibles.
Un retour en Bretagne
pour épuiser les potentiels
La situation du parc moteur demeurant tendue,
la 25177 bénéficie d’une ultime RG en juillet 2005
à la demande de la région Rhône-Alpes et reçoit
la livrée En Voyage. Cependant, sa fiabilité in-
suffisante suite à des incidents répétitifs sur le
transformateur et le graduateur entraîne sa mise
hors service prématurée en juin 2006.
Pour compenser les radiations intervenues par-
mi les 25200 bretonnes à couple 130, les 25151
▶ RADIATIONS ◀
2002 (1): 25167
2003 (2): 25154, 163
2004 (6): 25156, 159,
161, 166, 168, 187
2005 (8): 25155, 160, 169,
171, 173, 174, 178, 185
2006 (8): 25151, 152, 153,
157, 158, 165, 175, 177
2007 (7): 25162, 164,
170, 172, 181, 189, 191
2009 (5): 25176, 186,
190, 192, 195*
2010 (2): 25180*, 182
2011 (3): 25179, 183*, 193
2012 (2): 25184*, 194*
© J.H. LAVIE

2013 (1): 25188

* modifiées en 25200 En fin de carrière, les BB 25150 roulent en Bretagne. Première de la série, la 25151 est en attente de prendre le relais d’une
UM de BB 67300 sur un train pair, alors que la caténaire 25000 V venue de Rennes s’arrête encore à Lorient, en 1992.

EN JANVIER 2006, LE PARC EST DÉSORMAIS RÉPARTI

ENTRE CHAMBÉRY (11) ET RENNES (10)
et 152 en juin 2004, puis les 25153 et 157 en no-
vembre-décembre 2004, sont mutées à Rennes car
elles disposent encore d’un bon potentiel kilomé-
trique. Elles sont rejointes tout au long de l’année
2005 par les 25158, 160, 162, 164, 165, 169, 170,
176, 181. Affectées aux Zones Locales Grand Ouest
et Centre-Atlantique, elles sont utilisées au départ
des triages de Trappes et du Mans vers les deux
radiales bretonnes, ainsi que sur Saint-Pierre-des-
Corps/Nantes/Rennes, et Saint-Pierre-des-Corps/
Poitiers/La Rochelle-Pallice. Elles remorquent de
lourds trains de céréales, de produits pétroliers, de
pièces sidérurgiques, de matériaux de carrière…
© G. DAUVET
En Lorraine, suite à la mise en place des zones
locales fret, les BB 25150 perdent leurs tournées à
longs parcours qui sont reprises par des locomotives
plus récentes, en particulier les BB 26000 et 27000.
Elles sont réorientées sur le corridor Bettembourg/
Bâle, aux côtés des types 13 belges et 3000 luxem-
bourgeoises, en attendant l’arrivée des BB 37000.
Dernier refuge en Rhône-Alpes
Elles assurent aussi la desserte de la Zone Locale
Lorraine, autour de Woippy vers Blainville,
Conflans, Creutzwald, Forbach, Longwy, Neuf-
château, Revigny… À partir de mai 2005, elles
agrandissent leur domaine d’intervention et par-
courent la ligne Lunéville/Saint-Dié venant d’être
électrifiée, avec des trains de ballast sortant des
carrières de Raon-l’Etape. En décembre 2005, la
série quitte le dépôt de Thionville, avec transfert
à Rennes, Chambéry… ou radiation sur place.
En janvier 2006, le parc est désormais réparti
entre Chambéry (11) et Rennes (10). L’effectif bre-
ton s’étiole au fil des mois, suite à l’atteinte des
potentiels de révision, ou en cas de gros incident.
Il disparaît définitivement en décembre 2006, la
25176 étant la seule à rejoindre Chambéry. Leurs
prestations sont reprises par des BB 22200 et 26000.
En Rhône-Alpes, les BB 25150 restent indispen-
sables pour assurer les TER de renfort en matinée

et soirée, les effectifs des Z 23500 et 24500 et les

transformations des BB 22200 en locomotives
Dans sa sobre livrée vert bleuté foncé, la BB 25176 est en attente de croisement réversibles étant insuffisants pour faire face à la
en gare de Groisy-Thorens-La Caille en 1987. densification des dessertes. Elles apportent ▶▶▶

ferrovissime - 45
Les portraits du rail

© P. JULIEN
Sur la ligne Ambérieu/Culoz, à Artemare, un TER Lyon/ Chambéry passe derrière la BB 25179 en livrée Fret le 10 mai 2008.

▶▶▶ également un soutien bienvenu lors des
pointes de neige de décembre et février. En jan-
vier 2008, il ne reste plus que huit locomotives
(25176, 179, 182, 186, 188, 190, 192, 193) pour les
services TER sur l’étoile de Chambéry vers Annecy,
Bourg-Saint-Maurice, Modane, Saint-Gervais et
sur Bellegarde/Annemasse/Évian et Saint-Gervais.
Au changement de service de décembre 2008, les
25150 ne conservent plus que 2 AR Chambéry/
Modane et 1 AR Aix-les-Bains/Modane, avec de
courtes rames Corail. Elles perdent leurs derniers
services réguliers en juillet 2009.
sieux et n’achève sa carrière qu’en décembre 2013,
avant d’être préservée par l’APMFS à Chambéry.
Si les engins de la première sous-série ont par-
couru entre 4 et 6,3 millions de km en 40 ans de
carrière, les performances kilométriques des deux
autres sous-séries sont bien moindres, avec 2,9 et
3,5 millions de km.
Six locomotives (25162, 164, 170, 176, 181, Seconde carrière
186) ont été revendues en Roumanie à l’opéra- chez GFR en
teur GFR. ◼ Roumanie pour
la BB 25176.

La dernière est radiée

en décembre 2013
Les cinq dernières locomotives basées à Cham-
béry (25179, 186, 188, 192, 193) sont mutées à
Vénissieux au printemps 2009, pour assurer les
remontes entre les différents chantiers du nœud
ferroviaire lyonnais. Occasionnellement, en cas
de défaillance de BB 22200 ou 25200 réversibles,
elles les remplacent sur des rames Corail. La 25188
est la dernière à être retirée du service, lors du
© P. CLUZEL

changement d’horaire de décembre 2011. Mais elle

est remise en service deux mois plus tard à Vénis-

EN RHÔNE-ALPES, LES BB 25150 RESTENT INDISPENSABLES

POUR ASSURER LES TER DE RENFORT EN MATINÉE ET SOIRÉE
46 - ferrovissime
▶ AU PUPITRE D’UNE BB 25150 ◀ Texte : Rémy Sarrade avec la contribution de Romain Vergnères
Photo : Bertrand Vimont

1 - Manipulateur de
frein direct
2 - Manipulateur du
frein automatique
3 - Bouton poussoir d’urgence
4 - Boîtier de mémorisation
5 - Interrupteur du feu
rouge gauche
6 - Sonnette et trompe
de la VACMA
7 - Manomètres (CG,
RP/RE, CF)
8 - Lampes de signalisation
9 - Voltmètre ligne
monophasé, voltmètre
ligne continu, ampèremètre
bogie 2, bogie 1,
voltmètre moteur
10 - Manipulateur de traction
11 - Boîte à leviers (disjoncteur,
compresseur, fanaux, …)
12 - Bouton poussoir
d’acquittement
13 - Manipulateur de shuntage
14 - Inverseur
15 - Interrupteur de
l’alerte lumineuse
16 - Avertisseur
17 - Sélecteur du pantographe
(à gauche position
continu, à droite
position monophasé)
18 - Indicateur de position
du graduateur
19 - Indicateur-enregistreur
de vitesse
20 - Combinés de radio sol-
train et interphonie
21 - Sélecteur et commande
essuie-vitres/lave-vitres

ferrovissime - 47
Le magazine du train et de son histtoire
Le hors-série N°12
164 pages de pur plaisir ferroviaire
À ne surtout pas rater,
votr
otre no eau hors-séri errovissime
ON

ible
p a g e 8 2,
a n d e z - le e . c om
C o m m . lrp r e s s
t r a i n s
ou sur 012
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sur www ferrovissime com

 Cœur de métier

L’ACTIVITÉ DE LA GARE DE
CONCARNEAU AU FIL DU TEMPS
© D. PHILIPPON

Le 1er avril 1984, la 68025 manœuvre un couvert sur l’embranchement Carnaud-BMA, en sortie de gare. Il s’agit probablement d’une expédition
de boîtes de sardines neuves, fabriquées et imprimées sur le site, à destination de la conserverie cannoise «la Monégasque», seul client de Carnaud-
BMA à recourir au transport ferroviaire du produit fini.

Après la description physique du site et de Le niveau du trafic voyageurs es-

compté est très vite atteint après la
son environnement dans le numéro 103 de mise en service, malgré les change-
Ferrovissime, voici, décrite à grands traits, ments de train découlant de l’absence
de voitures directes vers Concarneau
l’activité de cette gare. depuis Paris et Quimper. À l’apogée,
en 1920, 100 000 voyageurs passent
Texte : Gilles Germain en gare, mais dès 1926, ils ne sont
plus que 61 500. Puis le trafic fléchit

C
oncarneau est une gare en cul-
de-sac. Durant ses 115 années
de fonctionnement, ce petit
terminus breton a toujours
accueilli des trains légers
mais lents, même lorsque le trafic
était important et les locomotives
plutôt puissantes. Le profil diffi-
cile et les courbes serrées en sont
la cause. Malgré cela, les détresses
n’ont pas manqué, que ce soit en trac-
tion vapeur et diesel, ou même plus
récemment en traction électrique
pour la desserte de l’ITE (Installation
Terminale Embranchée) Eureden de
Coat-Conq.
très vite à partir de 1930, suite à la
concurrence routière.
Des trains de voyageurs
bien lents
Les relations voyageurs depuis Ros-
porden sont assurées par des trains
lents, composés de matériel ancien.
Le Chaix du service d’hiver 1938 in-
dique qu’il faut 23 à 28 mn pour ▶▶▶

ferrovissime - 49
Cœur de métier

© D. PHILIPPON
© C. SCHNABEL / COLL. H. DUPUIS
Au début des années 1950, les 3-030 C 721 et 781 du dépôt de Quimper
passent aux manoeuvres locales et trains de travaux en abandonnant tous
services réguliers sur la ligne de Concarneau.

© C. SCHNABEL / COLL. H. DUPUIS

Affectée à Quimper en juin 1957, la 3-141 C 116 (tender 3-22 B 637) et ses sœurs
de la série, accompagnées de quelques 3-140 C, vont progressivement prendre
la place des 3-140 H sur Concarneau.

▶▶▶ faire les 15 km et que ces
trains sont rares: 4 à 5 par sens,
dont des marchandises-voya-
geurs (MV).
En 1951, les quatre trains
du sens impair sont des MV.
L’unique vrai train de voya-
geurs est l’omnibus 3782 de
8 h 38. Les temps de parcours
sont plus longs qu’avant-guerre:
28 à 34 mn!
Ainsi, la fermeture au service
voyageurs, le 4 octobre 1959,
n’est pas une surprise.
Les protestations du conseil
municipal sont formelles. La
même année, ce conseil adopte
unedélibérationdemandantàla
SNCF de réduire les manœuvres
sur le port et d’utiliser des diesel,
pour faire cesser les fumées des
locomotives à vapeur…
Des trains spéciaux de voya- à l’arrivée, de forts tonnages de
geurs circulent cependant, de charbon. À partir de 1920, des Prochainement
temps en temps. Un omnibus wagons de rouleaux de fer blanc Dans un futur
Lorient/Concarneau et retour, arriventdesForgesd’Hennebont numéro de
Ferrovissime,
en rame tractée, chaque été et de Nantes pour les usines de nous étudierons
des années 1960, pour la fête boîtes de conserves, dont les l’autre « gare » de
des Filets Bleus; les colonies de produits finis repartent pour Concarneau, celle
vacances de l’Haÿ-les-Roses à la l’essentiel en camions. Au total, qui desservait
le port.
même époque ; quelques au- 91800 t de marchandises sont
torails lors de certains matchs traitées en 1926.
de foot ; un autorail X 2400 La mise à voie normale de l’em-
spécial COPEF en 1984 ; les branchement portuaire, en
sorties scolaires de la ville de 1942, supprime une rupture
Brest jusqu’en 1988, en rame de charge.
Corail ; quelques voyages de Le trafic de charbon disparaît
comités d’entreprises… quasiment vers 1952/53, avec
la généralisation du diesel sur
Les courants de trafic les navires. Cependant, de 1950
marchandises sont variés à 1970, l’activité marchandises
L'activité du port de pêche em- reste importante. En 1962, 30%
plit des trains de marée. Mais il y du poisson est encore expédié
a aussi des produits agricoles et, par le rail. En 1970, 70000 t ▶▶▶

50 - ferrovissime
 IL N’Y A JAMAIS EU DE VOITURES
DIRECTES VERS CONCARNEAU
DEPUIS PARIS ET QUIMPER

L’automne 1989 voit stationner, voie 4, un étonnant lot de wagons frigorifiques roumains, accompagnés d’un long fourgon générateur
d’énergie – local de vie pour le personnel d’accompagnement ! Ils restent là plusieurs jours, le temps de charger de la viande congelée
issue des entrepôts Nicot – le fonctionnement des groupes frigorifiques, nuit et jour, suscite pas mal de plaintes du voisinage.

▶ LA GARE DE CONCARNEAU EN 1985 ◀ Infographie : Gilles Germain

1: BV avec commodités – 2: entreprise Le Borgne, négoce de matériaux de construction – 3: halle marchandises et enregistrement «Petite
vitesse» – 4: silos à ciment en vrac, installés vers 1965 – 5: entreprise Le Borgne, magasin édifié vers 1965 – 6: entrepôt avec voie couverte
de la Société lorientaise de construction – 7: ex remise Cfdf, transformée en habitation, puis Resto du cœur – 8: bâtiment et dépôt de
M. Jaouën, ferrailleur implanté en 1967 – 9: entreprise Hellio, fuel et gaz domestiques – et parc à charbon Le Coz. De 1987 à 1990, secteur
du cantonnement de France-Télécom – 10: entrepôt des grossistes en boissons Guernec, puis Beaujean; bâti en 1964 – 11: point origine de
l’embranchement portuaire

ferrovissime - 51
Cœur de métier
LA FERMETURE AU SERVICE DES VOYAGEURS, LE 4 OCTOBRE 1959,
N’EST PAS UNE SURPRISE
▶▶▶ sont transportées : poisson,
bobines de fer blanc, ferraille,
ciment, sable, graviers et autres
matériaux, primeurs, engrais,
bitume, fuel et wagons de détail
(colis et messageries).
Après mai 1968, le déclin du
trafic de marée s’aggrave, puis
cesse définitivement vers
1975/76. Un regain du trafic
lourd est enregistré entre 1967
et 1975 avec la livraison de mil-
liers de tonnes de ciment, agré-
gats et fers à béton nécessaires
à la construction du viaduc du
Moros, puis de la grande darse
de l’arrière-port.
Dans un registre différent, le
chauffeur du Sernam et son
camion desservent le secteur,
depuis la gare, à partir de 1971.
La fin des livraisons à la centrale
à béton bitumineux Viafrance,
sur le port, a lieu en 1975.
L’effondrement du fret
s’accélère après 1990
Jusqu’en 1975, trois allers-re-
tours par jour atteignent Concar-
neau, dont un descendant au
port tous les soirs. Les wagons
arrivent soit de Quimper, soit
de Lorient et au-delà. En 1982, il
y a encore deux rotations quoti-
diennes, mais une seule en 1990.
52 - ferrovissime
De 1980 à 1993, la totalité
des eaux minérales du magasin
Leclerc parvient à Concarneau
par le rail: c’est un wagon par
semaine en moyenne.
Dans les années 1980, l’EP
Coopagri de Coat-Conq reçoit
et expédie 60000 t d’engrais et
d’aliments pour animaux.
Les destructions de l’ouragan
du 15 octobre 1987amènent un
dernier sursaut de vie dans la
cour marchandises. France Té-
lécom y fait stationner un train
de cantonnement de son per-
sonnel – trois allèges postales
courtes – de 1988 à 1990 et du
matériel est livré par wagons :
câbles, poteaux…
Les années suivantes, il n’y
a plus guère que trois navettes
hebdomadaires de bobines de
tôle étamée.
L’ultime train de marchan-
dises pour Concarneau-gare
circule en septembre 1998. Il
est bien maigre : trois wagons
de fret pour GDF remorqués
par le locotracteur de Lorient
approvisionnent un chantier
à la Forêt-Fouesnant.
Longtemps après la suppres-
sion des trains voyageurs, le bâti-
ment abrite une boutique SNCF,
avec des recettes supérieures à
Au milieu des années 1950,
© G. GERMAIN
Quimper possède neuf 3-140 H
en service et 14 en réparation
différée. C’est alors le type de
base sur les antennes du Finistère
sud. Le tender 3-18 H à écran
abrite l’équipe quand la machine
roule tender en avant. Les wagons
STEF et Rail-Route sont alors
nombreux sur Concarneau.
Malgré la présence
d’une ligne de contact
25000 V, ce sont des
UM de BB 60000 qui
remorquent les trains
entiers pour Eureden
à Coat-Conq.
© C. SCHNABEL / COLL. H. DUPUIS
celles de la gare de Rosporden:
18000 billets vendus en 1991 !
L’ancien logement de fonction
est loué à des particuliers depuis
1978. Enfin, la fermeture défini-
tive intervient en janvier 2016.
© G. GERMAIN
De modestes machines
à vapeur
Les locomotives à vapeur en-
gagées sur Concarneau n’ont
jamais été des «grandes roues».
Les 030 à tender séparé de 7 à
10 m3 des origines, devenues
3-030 C, dureront très long-
temps et resteront présentes
en tête des trains de marchan-
dises omnibus.
Mais dès le début des années
1950, des séries plus modernes
et plus puissantes, toujours du
dépôt de Quimper, s’emparent
des omnibus et des MV. Entre
1952 et 1958, les 3-140 H règnent
mais laissent quelques trains
aux 3-230 K (ex-P.O). Puis sont
engagées des 3-140 C (ex-Etat)
en tête des trains de desserte Le 4 mars 1983 en
marchandises. Enfin, au milieu fin d’après midi,
des années 1960, les 3-141 C la BB 67539 est
clôturent l’ère de la vapeur. en gare, voie 2.
Michel Herpin,
L’absence de plaque à chef de gare (au
Concarneau impose des centre), va donner
marches tender en avant, limi- le départ pour
tant la vitesse à 50 km/h. ▶▶▶ Rosporden.
Cœur de métier

© D. PHILIPPON

UN REGAIN DU TRAFIC LOURD EST ENREGISTRÉ ENTRE 1967 ET 1975

AVEC LA LIVRAISON DE MILLIERS DE TONNES DE MATÉRIAUX
▶▶▶ La majorité des 3-030 C,
140 H, 140 C, 230 K et 141 C en-
gagées sur la ligne ont donc des
tendersmunisd’écrans,unesorte
dedemi-abriprotégeantl’équipe
lorsdesmarchestenderenavant.
En 1968, on peut voir en gare
de Concarneau un modeste
locotracteur Y 2200 de 60 ch au
milieu d’une trentaine de wa-
gonsdivers.Maislesmanœuvres
sont en général assurées par les
machinesderemorquedestrains
de desserte.
À partir de 1967, les diesel
prennent le relais de la vapeur:
BB 63500, 66000, 67000, 67300,
67400 et A1A A1A 68000 du dépôt
de Rennes. La double traction
ou l’UM ne sont pas rares. Les
tonnages admissibles vont de
400 t pour les 63500 à 675 t pour
les 67400 et 68000. La vitesse est
limitée à 30 km/h.
En trafic voyageurs, assuré ↑
jusqu’en 1959, les rames sont La 66502, attelée
composées de voitures à deux es- à une 67000,
sieux. Des B6t modernisées Ouest stationne devant le
BV Au fond, à droite,
circulent les dernières années, trois wagons trémie
mais les types à portières laté- attendent devant la
rales restent présents jusqu’à la halle marchandises,
fin, notamment pour assurer les voie 5.
circulations estivales et lors des
pointes de trafic. Il n’y a jamais
eu d’autorail en service régulier
sur Concarneau. ◼

▶ L’ITE EUREDEN DE COAT-CONQ ◀

L’installation terminale embranchée de la coopérative
agricole Eureden est l’une des 33 dernières à fonctionner
en Bretagne en 2019. Longue de 600 m, elle comprend un
faisceau de six voies et un tiroir. Elle date de 1981, lors de
la construction de l’usine Coopagri et de ses silos, repris
ensuite par Triskalia devenue Eureden début 2020.
L’ITE a bénéficié en 1992 de l’électrification en 25 kV par
ligne de contact trolley. La traction a été confiée un temps
aux BB 25150 (voir le dossier central de ce numéro), 25200,
25500 et même 26000. Cependant, la traction électrique
est actuellement abandonnée au profit de machines
diesel BB 60000, normalement engagées en UM.
La coopérative Eureden dispose d’un engin de manœuvre Zephyr.
À peu près une fois par mois, le train complet 423755 de
20 wagons Ermewa chargés de céréales et d'engrais arrive en
gare de Rosporden en provenance de Rennes, un mardi en début
d’après-midi. Coupé en deux, le convoi est acheminé jusqu’à
Coat-Conq. Le retour à vide après déchargement est assuré, en
réattelant les deux demi-rames, le jeudi après-midi suivant.
Le train 423756 repart de Rosporden pour Rennes à 19h02.

54 - ferrovissime
Gares et installations

© J.H. LAVIE
En octobre 2019, la rame bimode B 84695M quitte Aigues-Mortes et franchit le pont tournant en se dirigeant vers Le Grau-du-Roi.

LE PONT TOURNANT
D’AIGUES-MORTES Texte : Jehan-Hubert Lavie

Voilà un ouvrage d’art hors du commun dont le fonctionnement

spectaculaire ne manquera pas d’intéresser les modélistes.

ferrovissime - 55
Gares et installations

Depuis la tour
de Constance
Une BB 66000 remorque
un train de citernes. Le
trafic fret, essentiellement
sur Les Salins du Midi, a
cessé en 2008. À droite,
la cabine de commande de
rotation du pont.

© É. HOSPITAL

56 - ferrovissime
 ▶ LA LIGNE NÎMES/LE GRAU-DU-ROI ◀
Infographie : Vincent Babilotte
© J.H. LAVIE

Le pont en cours de rotation. La voie unique est à droite.

▶ LES CARACTÉRISTIQUES DE L’APPAREIL ◀

L’actuel pont tournant d’Aigues-Mortes date de 1923. C’est donc un ouvrage
d’art bientôt centenaire dont l’originalité en fait une pièce patrimoniale
d’importance. Entièrement riveté, il assure à la voie unique une rotation
de 90° à partir d’un axe latéral. Entraîné par un moteur électrique, sa
manœuvre est assurée par le gardien du PN 40, dans une cabine montée
sur le pont, distincte de l’abri d’où sont commandées les barrières du PN.
Détail peu banal : cet agent, qui porte le gilet orange de l’équipement de
protection individuel, dispose, dans son poste, d’un gilet de sauvetage!

LE PONT TOURNANT PERMET DE FRANCHIR LE CANAL DU RHÔNE À SÈTE

C
e pont tournant-là n’est pas fait
pourvirerleslocomotivesdans
un dépôt. À Aigues-Mortes, le
pont tournant permet de
franchir le canal du Rhône à
Sète,surlequelnenaviguentplusdésor-
mais que des bateaux de promenade.
Long de 21 m, il est situé au Pk 39,598
de la ligne Nîmes/Le Grau-du-Roi.
© J.H. LAVIE
Venant de Saint-Césaire, la voie
unique est ouverte en 1873 jusqu’à
Aigues-Mortes, jusqu’au bord du
canal. C’est en 1909, quand la ligne
est prolongée d’Aigues-Mortes au
Grau-du-Roi qu’un pont tournant est
construit à une dizaine de mètres au
sud de la gare, à proximité immédiate
du PN 40.
Comme beaucoup de voies uniques
secondaires, les années 1950 sont
difficiles pour cette petite ligne du
Gard. Une partie des dessertes est
alors confiée à des cars avant que le
service voyageurs ferroviaire ne soit
suspendu en 1972 et seulement réac-
tivé en période estivale. Il est vrai que
l’examen du Chaix de 1966 montre
clairement quelle est la vocation de
cette ligne: 2 AR en autorail en hiver,
mais 5 les dimanches et fêtes d’été,
dont 4 en rame tractée.
Le trafic voyageurs est à nouveau
assuré toute l’année par le rail à
partir de 1985, confié aujourd’hui
au TER Occitanie. La consistance de
desserte est à peu de choses près celle
de 1966, mais avec un temps de trajet
moyen ramené de 1 h 13 à 53 mn, ce
qui est une belle performance ! En

effet, la vitesse est désormais portée

à 100 km/h. De son côté, le trafic fret
Le pont tournant vu depuis le canal. est abandonné en 2008. ◼

ferrovissime - 57
Matériel roulant d’hier

Quelques souvenirs des

autorails De Dietrich

Composition classique
Le 23 avril 1959, un autorail De Dietrich à
nez rond est de passage à Oberstinzel en
début d’après-midi. Il assure une liaison
en provenance de Metz ou Sarreguemines
à destination de Sarrebourg.

58 - ferrovissime
ferrovissime - 59
© P. BERNIER / COLL. D. LEROY
Matériel roulant d’hier

© Y. BRONCARD
Voilà un De Dietrich tel que l’auteur pouvait en observer dans son enfance. Il s’agit de l’X 3716 desservant ici Lutzelbourg.

Bien qu’autorisé à de nombreux engins, Étienne Woessner

n’a jamais conduit les De Dietrich. Mais comme beaucoup,
il en a gardé quelques souvenirs précis. Texte : Étienne Woessner

L
a première fois que j’ai vu ces
autorails, c’est lorsque mes pa-
rents et moi avons déménagé à
Mundolsheim, une commune
de la banlieue nord de Stras-
bourg. En effet, chaque jour
ou presque j’en aperçois un,
stationné au-dessus du pont du che-
min de fer. J’apprends rapidement par
mes nouveaux copains que c’est en fait
la «Schnerr», un autorail réservé aux
agents de la SNCF qui fait la navette
jusqu’à Strasbourg chaque heure du
jour et de la nuit, chaque jour de l’année,
assurant une desserte parfaitement ca-
dencée. À l’époque, les De Dietrich ont
l’exclusivité de ce modeste service : les
X 4300 flambant neufs qui arrivent au
compte-gouttes sur les rails alsaciens
sont évidemment réservés aux missions
commerciales, sur de plus grands trajets.
De Dietrich à cabines
arrondies et De Dietrich
à cabines en étrave
Bien que tout novice au contact des
trains, qui me passionnent cependant
déjà, j’aime d’emblée la forme arron-
die de leur face avant, que je trouve
plaisante avec mes yeux d’adolescent :
les goûts personnels, ça ne s’explique
pas ! Mais parfois c’est un autre engin,
de forme différente, qui arrive : cu-
rieusement, sa face avant descend en
étrave. Toutefois, au bruit particulier
qu’il fait au démarrage, identique à
celui des autres, je me doute fort qu’il
s’agit de la même mécanique, mais
que c’est simplement la caisse qui est
différente.
Dès la rentrée des classes suivante, en
septembre 1962, je prends le train pour
rejoindre la grande ville. C’est du clas-
sique de la banlieue strasbourgeoise :
le matin, une BB 12000 ou 13000 re-
morque les Romilly bondées de cet om-
nibus venant de Saverne. Mais le soir, je
voyage dans des voitures à deux essieux
Modernisées Ouest : c’est une 1-230 F,
une de ces fameuses P8 prussiennes,
qui est en tête du modeste Omnibus
926 vers Wingen-sur-Moder (1h34 pour
52,3 km avec 11 arrêts intermédiaires,
à 33,4 km/h de moyenne !).
Mais là où ça devient très intéressant,
c’est quand l’autorail omnibus venant
de Wissembourg arrive un tout petit
peu en retard et stationne à Mundol-
sheim en même temps que notre train,
sur le même quai. En effet, c’est un
De Dietrich avec une remorque et… un
wagon de lait pour la Laiterie Centrale
de Strasbourg. Un attelage étonnant et
insolite à souhait qui me ravit ! ▶▶▶

60 - ferrovissime
 ▶ POURQUOI CE SURNOM DE SCHNERR ? ◀
Ce train de service cadencé à l’heure a circulé dès la
création du triage d’Hausbergen, en 1904. C’est alors
une machine à vapeur qui emmène 3 ou 4 voitures à
30 km/h maximum. Mais avec les manœuvres à chaque
extrémité, il ne faut pas traîner et le mécanicien doit
faire des accélérations rapides après chacun des six
arrêts intermédiaires. Les usagers l’ont bien remarqué et
très rapidement disent en dialecte alsacien «er muess
© J. KEITH / COLL. D. LEROY

schnerre», ce que l’on peut traduire par «il doit se

hâter avec lenteur». De ce verbe a été tiré le nom de
Schnerr, inusité hors du contexte ferroviaire alsacien, et
conservé jusqu’à la fin de ce service en 1989, malgré le
Seule la caisse est différente sur cet X 42000 à faces frontales en étrave, assurant remplacement de la traction vapeur par des autorails…
l’Omnibus 1736 Molsheim/Saverne, ici au point d’arrêt de Papeterie vers 1965. Les deux Étienne Woessner
moteurs Saurer de 160 ch sont les mêmes que sur les De Dietrich à faces arrondies.

UN DE DIETRICH AVEC UNE REMORQUE ET… UN WAGON

DE LAIT POUR LA LAITERIE CENTRALE DE STRASBOURG
© J. KEITH / COLL. D. LEROY

Au cours de l'été 1962, un autorail De Dietrich assure l'Omnibus 3252 à destination de Sewen. Il est vu ici au pied de l'église Saint-Vincent de Kirchberg.

ferrovissime - 61
Matériel roulant d’hier
Une vue contemporaine des omnibus remorqués par des 1-230 F qui faisaient le bonheur du jeune Étienne! En gare de Saint-Dié,
un De Dietrich remorquant une très ancienne voiture à portières latérales type Est voisine avec deux Picasso. Celui de droite est
attelé à une petite remorque XR 9100, typique des petites lignes vosgiennes.
Les De Dietrich assurent
la Schnerr
Dix ans plus tard, j’intègre la SNCF
et y commence ma carrière en tant
qu’aide-conducteur au dépôt de Stras-
bourg. Là, j’ai l’occasion de côtoyer ces
vieux autorails chaque fois que nous
avons un trajet de ou vers Hausbergen
pour relever une équipe à la gare de
triage ou pour récupérer une locomo-
tive au dépôt. En effet, nous prenons
alors le TP, ce fameux train de person-
nel communément appelé la Schnerr,
que je voyais autrefois stationner à son
terminus de Mundolsheim.
Le confort y est assez spartiate, compa-
ré aux tout nouveaux EAD. Il me semble
LA « SCHNERR », UN AUTORAIL RÉSERVÉ
AUX AGENTS DE LA SNCF QUI FAIT
LA NAVETTE JUSQU’À STRASBOURG
62 - ferrovissime
qu’avec l’âge leurs banquettes sont deve-
nues assez dures. Parmi ces De Dietrich,
je me souviens avoir fait quelques par-
cours dans un engin à la configuration
intérieure assez particulière, qui a cir-
culé jusque vers la fin 1973. Il comporte
en effet deux compartiments séparés
de la plateforme centrale par des portes
coulissantes.Lepetitcompartiment,côté
fourgon,adessiègesenmoleskinerouge,
c’est donc un ex-1re classe.
D’autresfoisc’estun«pointu», comme
on les surnomme alors à Strasbourg, qui
assure la Schnerr. Je me rappelle avoir
vu les derniers en service, mais n'ai
jamais eu l'occasion d'y monter. Cepen-
dant ça reste un De Dietrich, avec la
mêmesonoritéetlebruitcaractéristique
au démarrage, lorsque le mécanicien
débraye : c'est comme une série de
disques métalliques en liberté sur une
barre de fer, s'entrechoquant en musique.
Très particulier et inoubliable !
Jumeler un X 4300 avec un
De Dietrich crée des secousses
Mais j’ai quand même deux anec-
dotes précises qui me reviennent en
mémoire à propos de ces autorails.
Tout d’abord une composition assez
étonnante, dans laquelle j'ai eu l'occa-
sion de voyager une seule fois, pour
un acheminement « en voyageur »
lors d’une de mes journées de service
d’aide-conducteur, en 1974 ou 1975.
Jugez plutôt : un De Dietrich X 3700
arrive en omnibus de Colmar et sta-
tionne en gare de Sélestat, en attendant
l’X 4300 venant de Sainte-Marie-aux-
Mines. Ce dernier, arrivant côté nord,
vient naturellement se mettre en ▶▶▶
 ▶ LES RARES SOUVENIRS DE THIERRY PORCHER ◀
Les De Dietrich ne me sont pas familiers
et ne m’ont laissé que peu de souvenirs.
Logique: ils n’ont jamais roulé dans
«mon» Sud-Ouest après 1938! En dehors
de quelques photos que j’ai pu faire en
différents lieux de ce qu’on n’appelait pas
encore le Grand Est, je retrouve aussi trace
de cinq trajets avec ces autorails dans
mes fameux carnets: c’est bien peu!
Pourtant, la lecture de ces brèves informations
ravive des souvenirs anciens… Les trois
premiers trajets sont liés à des périodes
militaires à Colmar. Fin janvier 1970, je profite
d’un dimanche où je suis resté sur place pour
aller parcourir la ligne Saverne/Obermodern/
Haguenau, peu avant sa fermeture qui
interviendra fin mars. C’est l’X 42505 seul
qui assure l’autorail Omnibus 947 partant
de Saverne à 13h07. Bien chargé le samedi,
cet autorail est fort peu occupé, à l’heure du
déjeuner dominical: je suis à mon aise!
En 1971, par contre, ce sont des autorails
parfois bondés qui acheminent jusqu’à
Strasbourg, le vendredi ou le samedi en fin
de matinée, des militaires en garnison à
Colmar. De Strasbourg, ils peuvent rejoindre
des trains vers Nancy et Paris: en milieu de
journée, il n’y a pas de bonne liaison Colmar/
Nancy via Saint-Dié, les deux allers-retours
© Y. BRONCARD
© T. PORCHER
Cet X 42000 à doubles portes centrales entre en gare de Metzeral en avril 1971.
d’autorails rapides circulant le matin et
le soir, en correspondance à Nancy avec
des rapides à supplément reliant Paris à
Strasbourg. Mes deux trajets – en mars avec
le 3056 et en août avec le 1632 – ont lieu
dans une belle composition «réversible»:
deux autorails (séries 3700, 42000 ou
42100) encadrent deux remorques unifiées.
L’Express 1632 ne dessert que Sélestat,
avec un horaire très convenable pour ces
vénérables engins bien chargés: Colmar/
Sélestat en 15 mn à 90,4 km/h et Sélestat/
Strasbourg en 28 mn à 92,6 km/h.
En 1972, c’en est fini de la vie militaire: je suis
affecté à la Circonscription Exploitation de
Longwy, dépendant de la Région de Metz. Pour
rentrer de la direction régionale en fin d’après-
midi, nous prenons parfois l’autorail Express
1076 Metz/Longuyon via Thionville, où il
rebrousse. Il arrive que l’X 4300 qui l’assure
soit forcé de Metz à Thionville par un De
Dietrich. En tête au départ de Metz, cet engin
est coupé lors du rebroussement à Thionville,
comme en décembre 1972 avec l’X 42502.
Enfin, le 27 juillet 1973, je vais parcourir
la ligne Metz/Conflans-Jarny par Batilly
avant sa fermeture, sans être conscient
que c’est mon adieu aux De Dietrich…
Thierry Porcher
ferrovissime - 63
Matériel roulant d’hier
▶ QUAND LA LIGNE METZ/CONFLANS-
JARNY PAR BATILLY A-T-ELLE ÉTÉ
FERMÉE AU TRAFIC VOYAGEURS ? ◀
Les sources les plus facilement accessibles sur
internet nous donnent comme date de fermeture
le 6 juin 1973. Mais voilà, en cherchant dans mes
carnets, je constate que je l’ai parcourue 51 jours
plus tard avec l’autorail Omnibus 8458! Y aurait-
il une erreur dans mes notes ? Impossible… au
moins sur ce point précis: mes trajets sont notés
au fur et à mesure, dans l’ordre chronologique, et
j’ai pris une bonne cinquantaine de trains dans
ce laps de temps. Il me faut donc approfondir les
recherches! «Trains oubliés» annonce une fermeture
au cours de l’été 1973 : ah, le 6 juin, ce n’est pas

© GOUAULT / COLL. D. LEROY

encore l’été, on est peut-être sur la bonne piste!
Enfin, l’Encyclopédie des chemins de fer d’Alsace-
Lorraine (Ed. LR Presse) nous donne la clé de
l’énigme: la fermeture a eu lieu le 6 août 1973…
Sans doute une erreur de recopie de la date!
Image du grand dépôt mulhousien d’Île-Napoléon en 1967, qui possède une dotation Thierry Porcher
d’autorails De Dietrich – ici, un X 42000 en virage sur le pont tournant.

© É. WOESSNER

Le 20 mars 1975, en gare de Saverne, un X 3700 est prêt au départ pour Strasbourg. Il remorque une XR 8100 portant la livrée à toiture rouge,
comme l’autorail.

64 - ferrovissime
 © É. WOESSNER
© T. PORCHER

En janvier 1970, un X 42000 est prêt au départ

de Saverne pour Haguenau via Obermodern.

L’X 3715 est l’un des De Dietrich

alsaciens qui assurent la Schnerr.
Il est vu ici dans l’avant-gare
de Strasbourg, le 31 juillet 1976.

ON REPART, MAIS AU MOMENT DE PASSER LA DEUXIÈME,

LE MOTEUR ARRIÈRE CALE
▶▶▶ tête pour continuer en jumelage premier arrêt est à cent mètres, ça ira. quantaine de mètres derrière moi le
jusqu'à Strasbourg. Comme ce train Redémarrage du quai 1 puis, au mo- 3718 avoir quelques « gros» problèmes.
est plein à craquer, mon mécanicien ment de passer à nouveau la deuxième, Je revois Michel deux jours plus
et moi nous nous installons dans la rebelote. Là, notre mécanicien (appe- tard : au terminus de Mundolsheim,
cabine arrière du 4300. Le résultat lons-le Michel) accélère avec le seul il a fait un rapide dépannage et a neu-
de ce jumelage est assez incongru : moteur avant puis rembraye celui de tralisé le moteur fautif. Retour sur
chacun des deux engins moteurs passe l’arrière : quelques secousses mais ça Strasbourg avec un seul moteur, puis
ses vitesses avec force secousses et à marche, il se remet en route. Arrêt au rentrée au dépôt avec l’engin porté
des moments différents, ce qui rend quai 2 et redémarrage, puis passage « Hors Service ». Carrière terminée
le trajet plutôt pénible. Mais quelle de la deuxième… idem ! Je descends pour l’X 3718, mort sans gloire au
image nous est offerte, à mon mécani- au quai 3 (celui du dépôt) pour faire champ d’honneur sur la mission la
cien et à moi, peu habitués à voir cir- ma tournée, mais j'entends à une cin- moins prestigieuse qui soit… ◼
culer ces engins : de la cabine arrière
du 4300, nous voyons le conducteur
du De Dietrich gigoter avec ses gros
leviers pour débrayer, passer une vi-
tesse, réembrayer et accélérer ! Et nous,
dans l’X 4300, subissons les secousses
à chaque changement de vitesse de
l'un ou l'autre des engins…

La triste fin de l’X 3718

Enfin, le dernier tour de la Schnerr
assuré par un De Dietrich dans lequel
j’ai eu la chance d’être « en voiture
TP », a été fait avec l’X 3718. Et quel
tour! Départ de la gare de Strasbourg à
23h28, direction Hausbergen. Comme
souvent, le carré d’entrée du triage est
© T. PORCHER

fermé, puis s’ouvre quelques secondes

après notre arrêt. On repart, mais
au moment de passer la deuxième, En avril 1971, un De Dietrich assurant un omnibus Colmar/Metzeral dessert Luttenbach-
le moteur arrière cale. Qu’importe, le près-Munster. Notez la position de la plaque de queue.

ferrovissime - 65
Matériel roulant d’hier

© P. LAURENT / COLL. P.Y. TOUSSIROT

Premier de la série, le fourgon 1245 stationne à Paris-Ourcq le 26 avril 1947.

Les fourgons à huit portes

Nord-Express de la CIWL
L
Au sein du parc de la CIWL, e parc de la Compa-
gnie Internationale des
les fourgons métalliques F Wagons-Lits a possédé
sont des véhicules peu deux types de fourgons
de construction entière-
étudiés. Nous vous ment métallique à bo-
gies. Aujourd’hui, nous
présentons ici le type Nord- étudions le type Nord-Express
Express à huit portes. à huit portes formant la série
1245 à 1256, apparue en 1926.
Ces douze véhicules ont
été construits en France par
Texte : Jean-Marc Dupuy
la Compagnie Générale de
Construction à Marly les Va-
lenciennes. D’une longueur de
23,452 m, ces fourgons sont do-
tés de quatre compartiments à
bagages desservis par un cou-
loir latéral. Afin de permettre
la circulation des personnels
ainsi qu’éventuellement des
passagers, les deux extrémités
sont pourvues de soufflets. Une
vigie est placée au-dessus de la
toiture en position centrale et
à l’aplomb du local pour le per-
sonnel d’accompagnement. Les
deux compartiments adjacents

66 - ferrovissime
© P. LAURENT / COLL. P.Y. TOUSSIROT
Le fourgon 1251 à Villeneuve-Prairie en août 1947.
© G.K. / COLL. FRENCH RAILWAYS SOCIETY
Le 1255 à Nice en 1936.
offrent des couchettes, tandis
qu’un petit cabinet de toilette
avec WC complète les aména-
gements internes.
Affectés d’abord
sur le Nord-Express
Ces douze fourgons débutent
leur carrière dans la composi-
tion du Nord-Express (huit
unités sur Paris/Riga), ainsi que
dans celle du Calais-Méditerra-
née-Express (quatre unités). On
les voit ensuite temporairement
© P. LAURENT / COLL. P.Y. TOUSSIROT
Le 1254, utilisé comme atelier d’entretien à poste fixe à Paris-Ourcq
en novembre 1953.
sur le Rome-Express (étés 1929 ractérise leurs prestations, avec
et 1930), puis à partir du mois des services sur le Nord-Express
de décembre 1929 dans les deux mais aussi sur le Paris-Méditer-
rames du Côte-d’Azur-Pullman- ranée-Express.
Express mis en circulation au En juin 1936, six unités sont
cours de la saison hivernale. mutées sur le Sud-Express (Paris-
Suite à la crise économique Austerlitz/Irun), tandis que les
des années 1930, leurs roule- six autres conservent leurs at-
ments sont temporairement ras- tributions sur le Nord-Express.
semblés au départ de Paris-Nord
pour y assurer les rapides l’Etoile Réutilisés dans des navettes
du Nord et Nord-Express (hiver de servitude de la CIWL
1930/31). Ensuite, jusqu’à l’été Au service d’hiver 1936/37, le
1936, une relative stabilité ca- parc du Nord-Express est ▶▶▶
ferrovissime - 67
Matériel roulant d’hier
Le PAz 50 87 00 69 013-6 Presse Parisienne ex-1254 en octobre 1974.
LE FOURGON 1248 INTÈGRE AINSI
LA COMPOSITION DE L’ORIENT-EXPRESS DÈS
SON RÉTABLISSEMENT EN 1946
▶▶▶ amputé de trois fourgons
qui ont été dirigés vers Calais
afin de servir à nouveau sur le
Calais-Méditerranée-Express.
Cette situation perdure en-
suite jusqu’à l’approche de la
Seconde Guerre mondiale.
À l’issue du conflit, la CIWL
récupère l’intégralité des douze
fourgons huit portes Nord-
Express. Le 1248 intègre ain-
si la composition de l’Orient-
Express dès son rétablissement
en 1946. Il est épaulé, jusqu’en
1948-49, par le fourgon 1247.
La fin des années 1940 voit
la série garée à Villeneuve pour
En acheminement de nouvelles utilisations dans
vide, le PAz 50 le parc de service de la CIWL.
87 00 69 009-4
des Presses
C’est ainsi qu’au début des an-
Parisiennes nées 1950, les fourgons 1245,
ex-1256 en 1250 et 1253 sont spécialisés
octobre 1976. dans les navettes entre les dif-
68 - ferrovissime
© G. RANNOU / COLL. Y. BRONCARD
férentes caves de stockage des
vins et spiritueux de la CIWL.
De leur côté, les fourgons 1246
et 1247 servent aux transports
de ligots (petites bûchettes de
bois utilisées pour l’allumage
des chaudières et des four-
neaux), alors que les fourgons
1248 et 1254 sont employés
comme atelier à poste fixe dans
l’entretien de Paris-Ourcq et
à Saint-Denis.
Fin de carrière aux
Nouvelles Messageries
de la Presse Parisienne
Ces affectations cessent en
1956/57 et la série est alors pro-
posée à la vente. Les Nouvelles
Messageries de la Presse Pari-
sienne (NMPP) se portent acqué-
reur de onze des douze exem-
plaires (sauf le fourgon ▶▶▶
 © M. MERTENS / COLL. Y. BRONCARD
Peu après son passage aux NMPP, le fourgon 1249 porte l’immatriculation SNCF 500130.

© G. RANNOU / COLL. Y. BRONCARD

ferrovissime - 69
Matériel roulant d’hier
En mai 1982, à Serqueux, le 1245 circule toujours, profondément modifié, pour le compte de la STSI. Il porte le marquage RT2 - PN 900.
▶▶▶ 1246, détaché à Lourdes
comme annexe pour la CIWL
jusqu’à la fin des années 1960).
Pour cette nouvelle affec-
tation, les ateliers CIWL leur
apportent des modifications.
Extérieurement, on remarque
d’emblée l’obturation des baies
et la mise en peinture rouge
grenat des caisses (toiture et
bogies en noir) avec inscrip-
tions « PRESSE PARISIENNE »
en jaune jonquille au milieu
des faces latérales.
70 - ferrovissime
Unsystèmedechauffageauto-
nome est installé pour le person-
nel de convoyage des journaux.
Ces onze fourgons des NMPP
sont immatriculés à la SNCF
commevéhiculesdeparticuliers
du parc voyageurs. Ils portent
les numéros 500115 à 500122
et 500128 à 500130 puis, après
1969, le marquage UIC PAz et PA
50 87 00 69 005 à 015.
Leur seconde carrière aux
NMPP s’achève à la fin des an-
nées 1970. Deux unités sont
alors acquises par des entre-
prises de travaux de génie
ferroviaire : les 1252 et 1253
sont achetés par la société
Déhé. Le 1251 est acquis par
la SNCF comme wagon de ser-
vice à l’Equipement. Quant au
fourgon 1245, il entre au parc
de la société STSI, spécialisée
dans les transports exception-
nels par voie ferrée, notamment
des appareils lourds de grandes
dimensions utilisés dans la pro-
duction d’énergie électrique. ◼
 ▶ INVENTAIRE DES FOURGONS HUIT PORTES DE 1938 À 1964 À LA CIWL ◀
Hiver 1937/38 - Ourcq F n°1254
- Nord-Express F n°1245 à 1247 - Navettes caves F n°1245, 1250, 1253
- Calais-Méditerranée-Express F n°1248 - Navettes ligots (bûchettes de bois) F
à 1250 n°1246, 1247
- Sud-Express F n°1251 à 1256 - Garés Villeneuve F n°1249,
1251, 1252, 1255, 1256
Hiver 1946/47
- Orient-Express F n° 1248 Été 1954
- Nord F n°1247 - Boulogne F n°1251
- Bordeaux F n°1246 - Ourcq F n°1254
- Garage Villeneuve F n°1245, - Navettes caves F n°1249, 1250
1249 à 1251, 1256 - Ateliers F n°1245, 1252
- Garage Bonson F n°1252, 1254, 1255 - Navettes ligots (bûchettes
- Sofia F n°1253 (ateliers) de bois) F n°1247, 1253
- Garés Villeneuve F n°1246,
Été 1948 1248, 1255, 1256
- Orient-Express F n°1247, 1249
- Navettes Saint-Denis/Saint-Ouen/ Hiver 1955/56
Villeneuve F n°1246, 1248, 1251, - Navettes Ourcq F n°1254
1255, 1256 - Caves F n°1249, 1250
- Garage Villeneuve F n°1245, - Ateliers F n°1245, 1252
1250, 1252 à 1254 - Navettes ligots (bûchettes
de bois) F n°1247, 1253
Hiver 1948/49 - Garés Villeneuve F n°1246,
- Paris F n°1245 à 1256 1248, 1251, 1255, 1256

Été 1952 Hiver 1956/57

- Ourcq magasin F n°1249
- Navettes ateliers CIWL F
n°1247, 1248, 1253
- Caves F n°1245, 1250
- Charbon Montparnasse F n°1246
- Loués SNCF F n°1251, 1252, 1254 à 1256
- Caves F n°1250
- Ateliers F n°1245
- Garés Villeneuve F n°1246
- Réformé 1955 F n°1253
- Vendus à réformer F n°1247 à
1249, 1251, 1252, 1254 à 1256

Hiver 1952/53 Été 1960

- Paris F n°1245 à 1256 - Lourdes F n°1246

Hiver 1953/54 Été 1964

- Saint-Denis F n°1248 - Lourdes F n°1246

© G. RANNOU / COLL. Y. BRONCARD

LES NOUVELLES MESSAGERIES

DE LA PRESSE PARISIENNE
(NMPP) SE PORTENT
ACQUÉREUR DE ONZE
DES DOUZE EXEMPLAIRES
Le fourgon 1253
© P.Y. TOUSSIROT

termine sa carrière
chez Déhé, tout
comme le 1252.

ferrovissime - 71
Des trains sous la loupe

1948-1958
Regard sur les
omnibus du Sud-Ouest
Issu de deux anciens réseaux – le P.O et le Midi –
le parc omnibus du Sud-Ouest est composé, dans
les années 1950, de types de voitures très variés.
Texte : Jehan-Hubert Lavie

C
omme pour l’Ouest
(voir Ferrovissimen°101
et 102), la Région Sud-
Ouest possède, entre
1948 et 1958, un parc
de voitures omnibus
d’une étonnante va-
riété. Dans la présente étude,
nous allons donner un aperçu
de cette diversité en observant
les différentes familles de voi-
tures utilisées.
Nous présenterons aussi
une composition en traction
électrique – une spécialité du
P.O et du Midi – et une autre en
traction diesel. Les compositions
vapeur seront étudiées dans le
prochain numéro de Ferrovissime.
Le Sud-Ouest est la
première région qui
modernise son parc
Sur le Sud-Ouest, la période
1948-1958 voit l’arrivée puis
le développement rapide des
voitures modernisées. C’est en
effet cette région qui ouvre le
bal, à la SNCF, de la grande
vague de modernisations qui
va toucher en particulier les
voitures d’omnibus à essieux.
Ce parc est étudié en détail
dans le Ferrovissime hors-série
n°11 (page 74 à 85) et nous n’y
reviendrons pas.
Bien sûr, ces voitures d’om-
nibus à essieux type Moder-
nisé Sud-Ouest, dont les pre-
mières unités sortent en 1948,
n’entrent que progressivement
dans la composition des trains,

72 - ferrovissime
 © DR / COLL. A. PRÉVOT
C’est une voiture extraordinaire qui est vue à Pâques 1946 en gare de Bourges:
la A2cLB3ty «4» 311, seule unité de la série à avoir conservé ses fauteuils
transformables en couchettes. Après 1948, elle n’est plus engagée que dans des
trains de petit parcours!
en panachage avec des types
anciens à portières latérales.
Mais la progression va vite : le
1er mars 1949, 75 voitures an-
ciennes, tant d’origine P.O que
Midi, sont déjà transformées et
l’effectif atteint les 893 voitures
sept ans plus tard !
Des voitures ex-P.O Midi
très anciennes
Paradoxalement, les voitures
à deux essieux à portières la-
térales, qui servent de base à
ces modernisations, ne dispa-
© L.M. VILAIN / PHOTOTH. LR PRESSE
raissent pas pour autant et as-
surent même des trains du ser-
vice commercial jusqu’au début
des années 1960 : 65 voitures
à portières latérales figurent
encore à l’inventaire de 1961 !
Petit détail pittoresque : sur la
Image d’un omnibus de la Région Sud-Ouest vers 1950 au Région Sud-Ouest, certaines voi-
Lioran, une fin d’après-midi d’été. Une 4-141 TA est en tête d’une tures anciennes, notamment
composition ô combien variée, chacun des neufs véhicules de la des mixtes-fourgon, conservent
rame étant différent!
leur guérite serre-frein jusqu’à
leur réforme…
En 1948, cette région utilise
CONTRAIREMENT AUX encore un grand nombre de voi-
tures à deux essieux très courtes,
AUTRES RÉGIONS DE LA sans couloir et à portières laté-
rales (A4, B5, C5, C6…), d’ori-
SNCF, LE SUD-OUEST gine P.O comme d’origine Midi,
à châssis bois ou mixte bois et
DÉTIENT PEU DE VOITURES fer. Obsolètes et non moder-
nisables, la plupart vont être
ARMISTICE 18 À ESSIEUX radiées rapidement, éliminées
par le développement du parc
d’autorails. Mais le P.O avait fait
construire, au tout début du
XXe siècle, un fort contingent
de longues (15 m) voitures à
portières latérales et à deux
essieux à grand empattement
(de 7,20 m à 8,50 m). Le Midi
avait fait de même avec des
voitures à châssis métallique.
Ces voitures longues ont
généralement une toiture
plate pour celles construites
jusqu’en 1914 et légèrement
bombée pour celles construites
plus tard, jusqu’en 1923.
Des voitures bavaroises
sont modernisées
Contrairement aux autres
régions de la SNCF, le Sud-Ouest
détient peu de voitures Armis-
tice 18 à essieux. La Compagnie
du Midi n’a reçu aucune voi-
ture allemande à essieux lors
de l’attribution des dommages
de guerre en 1919. Le P.O, quant
à lui, dispose de 159 voitures
à deux ou trois essieux dont
seulement huit prussiennes
classiques à trois essieux, lan-
terneau et portières latérales. La
dotation principale est consti-
tuée par 97 voitures bavaroises
à trois essieux, couloir central
et plateformes extrêmes ou-
vertes. Elle est complétée par
quelques voitures badoises
et wurtembergeoises. ▶▶▶
ferrovissime - 73
Des trains sous la loupe
En 1948, Étampes, située sur l’artère Paris/Orléans, est gare d’embranchement avec les voies uniques vers Pithiviers et Auneau.
Ici, la 4-141 TB 710 (à ne pas confondre avec les TB de l’Est!) remorque une rame voyageurs avec un wagonde lait attelé en queue.
Deux voitures portent encore une livrée bicolore: ex-Est ? ex-PLM ? Ou bien dans une teinte claire récupérée au hasard, en cette
période où l’approvisionnement est encore contingenté et soumis aux tickets.
▶▶▶ 54 de ces voitures ont été
modernisées par le P.O entre
1932 et 1934, avec une nouvelle
caisse semi-métallique plus mo-
derne comprenant une salle
1re/2e classesàcouloircentralavec
accès par une seule plateforme
extrême fermée et un compar-
timentfourgonaveclocalpostal
desservi par une porte roulante
par face. Ces voitures moderni-
séesvontroulerlongtemps.Dans
les années 1950, on voit souvent
descompositionsavecuneseule
de ces voitures mixtes-fourgon
atteléesur uneramede voitures
C6t modernisées ou non.
Côté parc à bogies, le Sud-
Ouest a hérité de 103 voitures al-
lemandes à portières latérales:
des C10tyf ex-Midi, des C9 1/2tyf
et C8 1/2tyf ex-P.O.
Voitures de luxe
pour trains omnibus
Pas de voitures TP au Sud-
Ouest. Par contre, le Midi a
fait construire tardivement
(1908/1914) des C10yfi à por-
tières latérales et à intercircula-
tion par soufflets de conception
74 - ferrovissime
ENGAGÉE AUTOUR DE BOURGES DANS DES OMNIBUS
SANS MODIFICATION DE SON AMÉNAGEMENT,
IMMATRICULÉE A2CLB3TY « 4 » 311
proche, mais avec des aména-
gements améliorés. Décrites
dans Ferrovissime hors-série n°11
(page99), ces voitures, équipées
du chauffage 1 500 V, sont en-
gagées notamment sur des
trains omnibus et directs sur
des grandes lignes, derrière des
locomotives comme des BB 300,
4200,4700,2D25105à120,5500
et même des CC 7100 !
Quant au P.O, si ses voitures à
portières latérales sont rares, elles
battent le record de l’originalité.
Il y a, d’une part, onze anciennes
voitures mixtes de 14,990 m dont
les deux essieux ont été rempla-
cés par des bogies Pennsylvania.
Construites en 1910/12 comme
voitures couchettes avec compar-
timents de luxe, ces voitures ont
été déclassées et se retrouvent,
dans les années 1950, dans des
compositions omnibus. Dix voi-
© L.M. VILAIN / PHOTOTH. LR PRESSE
tures ont été réaménagées en
voitures mixtes 3e classe/classe
commune 1re/2e, immatriculées
AB2 1/2sC3ty. Par contre, l’une
d’entre elles est engagée autour
deBourgesdansdesomnibussans
modification de son aménage-
ment, immatriculée A2cLB3ty
«4» 311, portant encore la men-
tion «couchettes» sur ses portes
de1re classe,lescouchettesn’étant
pas déployées, évidemment!
Les extraordinaires
voitures articulées ex-P.O
En 1911, le P.O procède à une
expérimentation pour le moins
étonnante: jumeler deux caisses
de voitures anciennes à portières
latérales à essieux en réalisant
un ensemble articulé reposant
sur trois bogies Pennsylvania.
Deux prototypes sont réali-
sés dont les bons résultats ▶▶▶
 ▶ OMNIBUS 749 BORDEAUX-SAINT-JEAN => ARCACHON
OMNIBUS 724 ARCACHON => BORDEAUX-SAINT-JEAN ◀
L
a Compagnie du Midi a été
Service d’été 1954 fort novatrice dans les débuts
de la traction électrique en
France. Il est donc normal que notre
première composition concerne
un train circulant sous caténaire!
BB 4531 à 4550 Nous avons néanmoins choisi
une ligne en antenne d’Aquitaine
connaissant des pointes de trafic lors
de la saison estivale, notamment
B3C4t-PO Midi
les dimanches. Nous sommes au
service d’été 1954. Cinq allers-
retours omnibus quotidiens figurent
au tableau 412 de l’indicateur
C6t Modernisée Sud-Ouest
Chaix donnant les horaires entre
Bordeaux et Arcachon. D’autres trains
figurent à ce tableau, notamment
Dqm Midi
des relations directes depuis Paris
entre le 25 juin et le 2 octobre
offrant le choix entre voiture-lits
1re et 2e classes, voitures places
assises des trois classes et voitures
couchettes 2e classe. Ce tableau 412
comporte aussi le fameux train
circulant à certaines dates et assurant
une relation directe Bordeaux/
Arès en empruntant la ligne des
Economiques de la Gironde depuis
Facture (voir Ferrovissime n°94 et 97).
© Y. BRONCARD
Infographie : J-H Lavie et Marc Le Gad
L’Omnibus 749 est ouvert aux
2e et 3e classes. Circulant tous les
jours, il quitte Bordeaux-Saint-Jean
à 18h56 et arrive à Arcachon à
20h09 après avoir desservi les
13 stations intermédiaires. Retour le
lendemain matin avec l’Omnibus 724,
départ d’Arcachon à 7h18, arrivée
à Bordeaux-Saint-Jean à 8h31 en
desservant les mêmes arrêts.
La rame, comprenant une voiture
modernisée, une voiture à
portières latérales et un fourgon,
correspond à une composition
alors très employée sur la ligne.
En 1954, les Omnibus 749/724
sont confiés à une BB 4531 à
4550. Une série de machines qui a
connu une histoire mouvementée.
Nées en 1922 «locomotives pour
trains de marchandises» sous les
numéros Midi E 4001 à 20, elles sont
modifiées, à partir de 1926, pour
remorquer les trains de voyageurs
et renumérotées E 4531 à 4550.
À partir de 1931, quelques machines
de la série reçoivent de nouveaux
moteurs et sont renumérotées
E 4593 à 4599, celles conservant
leurs moteurs d’origine portant les
numéros 4531 à 4543. Toutes sont
affectées au dépôt de Bordeaux-
Saint-Jean pour services notamment
sur Pointe-de-Grave et Arcachon.
En 1948, elles deviennent BB 4531
à 43 et 4593 à 99. La photographie
illustrant cette composition montre
la BB 4543 en 1954. Or, à partir de
cette année-là, les machines de cette
série sont une nouvelle fois modifiées.
Il s’agit dorénavant, pour elles,
d’assurer des manœuvres et elles
entrent alors dans la série BB 1600.
Un omnibus de la ligne Bordeaux/
Arcachon en été 1954, juste avant
que les machines BB 4531 à 4550,
affectées au dépôt de Bordeaux-
Saint-Jean, soient transformées
en locomotives de manœuvre et
renumérotées BB 1600.
ferrovissime - 75
Des trains sous la loupe

© DR / COLL. P.Y. TOUSSIROT

Exclusivité de la Région Sud-Ouest, l’extraordinaire B7C5Dty 10117, voiture à portières latérales double articulée sur trois bogies, vue
dans les années 1950. Elle est équipée des chauffages vapeur et électrique 1500 V. La partie fourgon a conservé sa vigie à l’ancienne.

JUMELER DEUX CAISSES DE VOITURES ANCIENNES À PORTIÈRES

LATÉRALES À ESSIEUX EN RÉALISANT UN ENSEMBLE ARTICULÉ
REPOSANT SUR TROIS BOGIES
▶▶▶ obtenus, en matière de Région pilote de la
confort, incitent la Compagnie modernisation des
d’Orléans à réaliser 28 jume- voitures à portières
lages supplémentaires. latérales, le Sud-
Ouest possède
Après 1948, la plupart de ces
à son effectif un
jumelages proposent un amé- contingent de voitures
nagement mixte comprenant modernisées qui va
2e et 3e classes, compartiment
© DR / PHOTOTH. LR PRESSE

fourgon et, pour 17 d’entre eux,
compartiment postal: B7C5Dty
et B7C5PDty… Tous les services
offerts dans un train omnibus
concentrés en une seule voiture!
Et avant 1948, avec la
1 classe en plus, cet aménage-
re
mentétaitabsolumentcomplet!
Cette classe supérieure avait
d’ailleurs laissé des traces sur
croissant de 1948 à
1958. Au début, elles
sont engagées sur
des parcours comme
Paris/Tours pour cette
C6t 46953 à 47850.
les faces latérales des véhicules, On peut d’ailleurs s’étonner
sous la forme de compartiments que les dernières voitures de ce
plus spacieux avec des baies de type en circulation n’aient été
custode comportant un bord radiées qu’en 1959 ! ◼
inférieur arrondi…

▶ FERROVISSIME HORS-SÉRIE N°11 : 50 ANS DE TRAINS OMNIBUS EN RAMES TRACTÉES 1958/2008 ◀

Disponible à LR Presse*, le hors-série n°11 de
Ferrovissime vous présente, sur 164 pages et
environ 400 illustrations, la grande époque des
trains omnibus, directs et MV assurés notamment
avec les différents types de voitures modernisées
à essieux ou à bogies, les Boîtes à tonnerre,
les Bastille et tous les types composant le parc
alors fort varié de chaque région SNCF.
Mais il existait évidemment des omnibus avant 1958!
Voilà pourquoi nous publions, dans les numéros
bimestriels de Ferrovissime, des articles sur les rames
employées au cours de la décennie précédente, 1948-
1958. Celles des Régions Sud-Est et Méditerranée ont
été présentées dans le n° 100, les voitures du parc
Ouest dans le n° 101, les compositions Ouest dans le
n° 102, le Nord dans le n° 103, l’Est dans le n°104.
* Disponible d’un clic sur www.ferrovissime.com
ou par téléphone au 02 97 24 01 65

76 - ferrovissime
 ▶ MV 4253 MONTARGIS => ORLÉANS ◀ Infographie : J-H Lavie et Marc Le Gad
C
irculant de Montargis à Orléans au
Service d’hiver 1954/55 service d’hiver 1954/55, le MV 4253
est un train de messageries-
voyageurs qui, nous dit le renvoi du
tableau 405 de l’indicateur Chaix, «ne
040 DE
circule que le dimanche et peut être
supprimé sans préavis». Contrairement à
un train de marchandises-voyageurs qui
peut acheminer des wagons du Régime
XR 9800 Ordinaire (RO) comme du Régime
Accéléré (RA), un train de messageries-
voyageurs ne prend en charge que des
wagons du RA. La composition du MV
XR 9800 4253 comprend deux voitures voyageurs
qui offrent un aspect moderne, à l’époque
considérée, puisqu’il s’agit de C6t à deux
essieux modernisées Sud-Ouest. Mais
Dqm Midi ces deux voitures sont peintes en rouge
vermillon et crème (ou rouge rubis et
gris perle: les deux livrées sont possibles
à l’époque) et administrativement
Kf2 OCEM 29 classées dans la catégorie des
remorques d’autorails, série XR 9800.
La raison de cette bizarrerie mérite
d’être contée. Depuis 1950, les petites
K2 OCEM 29 lignes de l’étoile d’Orléans font l’objet
d’une expérimentation de desserte
JQ2 OCEM 29 en traction diesel, suivie à l’échelon
national. Tous les engins moteurs
© J. PORCHER
sont basés à Orléans: locomotives
040 DE (futures 63000) à moteur
6 cylindres Sulzer, locomoteurs
Y 9100, autorails FNC X 5600, bientôt
remplacés par des U 150 série X 5500.
Trois autorails omnibus desservent
dans chaque sens, les jours ouvrables,
Orléans/Montargis, une section de la
ligne construite autrefois par l’éphémère
Compagnie d’Orléans à Châlons (OC).
Il faut 1h50 environ aux autorails
X 5500 pour parcourir ces 74 km en
s’arrêtant aux 13 stations intermédiaires.
Du lundi au samedi, l’autorail Omnibus
1261 part de Montargis à 16h54 pour
être reçu à Orléans à 18h50. C’est cet
autorail qui est remplacé, les dimanches
et fêtes, par le MV 4253. Bien plus
lent que l’autorail, il quitte Montargis
dès 15h41, pour arriver à Orléans à
18h53. Il faut signaler, bien sûr, aux
modélistes que notre MV dessert à
18h04 Fay-aux-Loges, petite gare
devenue célèbre par la maquette H0
conçue par Alain Pras que la firme MKD
a vendue à des milliers d’exemplaires!
Dans sa partie messageries, le MV
4253 achemine surtout des wagons
citernes à lait et des couverts.
20 mars 1955,
17h02: le MV 4352
à destination
d’Orléans est en
gare de Bellegarde-
Quiers. Derrière
la 040 DE 13 du
dépôt d’Orléans,
deux voitures
modernisées Sud-
Ouest passées au
parc des remorques
d’autorails. Ces
XR 9800 sont
peintes en rouge
et crème. Les
wagons de ce train
de messageries-
voyageurs sont
classés en queue,
derrière le fourgon.
ferrovissime - 77
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