www.ferrovissime.

com N 97
N°97
Jan./Février 2019

Le magazine du train et de son histoire

P.66
NOUVELLE FORMULE

GARE ET DÉPÔT
vapeur P.24
CFTA GIRONDE P.1 2 USA1918
à la SNCF
PROVENCE
EXPRESS

R T
PO I LR A I T
D U RA
LA CC80001
France METRO : 9,50 € -BEL/LUX/ESP/ITA/PORT.CONT./D : 10.50 €

CC 80001
L 17305 - 97 H - F: 9,50 € - RD

LA ET LES
LOCOMOTIVES
CFD LOUÉES
À LA SNCF
Directeur de la publication
Christian Fournereau - 02 97 24 81 30
chfournereau@lrpresse.fr
Rédacteur en chef
Jehan-Hubert Lavie - 06 42 55 47 92

Les oiseaux rares

jhlavie@lrpresse.fr
Conseiller technique de la rédaction
Thierry Porcher
Conception graphique

de la traction diesel
BecomeDesign
contact@becomedesign.fr
Mise en page
Bertrand Bourn

Ont collaboré à ce numéro
Jean-Luc Bobier, Michel Boumier,
Frédéric Didelot, Jean-Michel Eich,
Gilles Germain, Régis Grannec,
Marc Le Gad, Jean-Pierre Lescure,
Christophe Masse, Jean-Michel Mitteau,
Aurélien Prévot, François Vielliard
Revendeurs & professionnels
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ISSN> 1961-5035
89491
LR PRESSE Sarl
BP 30104, F-56401 AURAY Cedex
Siège social: 2 rue de Suède, Auray
Tél.: 02 97 24 01 65
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Principaux associés:
Christian Fournereau,
& Friedel Fournereau
“Printed in France/
Imprimé en France”
L
a traction diesel est passionnante ! Et on aurait tort de limiter
son histoire aux 12 séries de locomotives apparues dans le
parc de la SNCF entre 1950 et 2000. Car la seconde moitié
du XXe siècle a vu naître en France bien d’autres machines,
souvent fort originales. Des oiseaux rares à qui nous consa-
crons une large place dans ce numéro.
Voyez les 20 pages de notre dossier central: un Portrait du rail consacré
aux locomotives diesel construites par les CFD. La plupart des séries ont
été louées à la SNCF à un moment ou un autre, ce qui explique leurs
immatriculations dans la tranche des prototypes BB 60000 et CC 80000.
Dans leur activité industrielle, les CFD ont été essentiellement les
concepteurs et constructeurs de boîtes de vitesses originales qu’ils
fabriquaient ensuite en série (ils ont équipé notamment les Y 7400
et les BB 71000 de la SNCF). Et les machines sorties de leur atelier de
Montmirail ont surtout servi de prototypes en vue de convaincre des
utilisateurs, dont la SNCF, du bien-fondé des solutions adoptées.
La locomotive la plus spectaculaire produite par les CFD est la
CC 80001, qui a tracté des express au départ de Paris-Saint-Lazare et
Paris-Montparnasse, méritant un article particulier.
Et si vous aimez la traction diesel en version originale, vous découvrirez
ce Trésor d’archives qu’est le dépôt-atelier de Lacanau des CFTA de la Gironde.
L’occasion de découvrir un autre monde du chemin de fer, celui des
secondaires, où le pittoresque se marie avec le système D. Dans
l’imagerie populaire, le chemin de fer d’antan est synonyme de traction
vapeur. L’étude réalisée par Gilles Germain nous montre qu’en Gironde,
la traction a été confiée, très tôt, au moteur à essence puis au diesel. ◼
rédacteur en chef

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COUVERTURE Grande photo : La CC 80001 stationne à Paris-Montparnasse en 1972.

© H. Daudonnet - Conception : BecomeDesign
 N°97
Janvier/Février 2019

53

66
P.32
LES PORTRAITS DU RAIL

12

P.58
Histoire au présent P.24 24_ STARS DU RAIL
4 _ Le retour attendu de la BB 25236 SUR LA BB 9329 EN TÊTE
5 _ Un Y 8000 passe en entretien chez DU PROVENCE EXPRESS
MGW service
6 _ Un ancien Eurostar passe chez Izy Les portraits du rail
7 _ La famille des Traxx Bombardier s’agrandit
8 _ Eurostar : un parc en évolution
32 _ CC 80001, prototypes BB 60000
ET LES LOCOMOTIVES CFD LOUÉES À LA SNCF
9 _ Clap de fin pour les Z 5300
10 _ La livrée Île-de-France Mobilités
se développe
Le monde des cheminots
53 _ CŒUR DE MÉTIER
11 - MÉDIATHÈQUE
Les plaques et feux de signalement et de clôture
Livres, revues, DVD
58 _ GARES & INSTALLATIONS
Montez à bord Tri à la bosse, un savoir-faire renouvelé
12 _TRÉSORS D’ARCHIVES MATÉRIEL ROULANT D’HIER
Lacanau, un grand dépôt-atelier 66 _ 2-232 TB, 2-141 TA, 140 G, 140 H, arrivées
des CFTA-Gironde il y a 100 ans
20 _COMMENT ÇA MARCHE 72 _ Il y a dix ans, le TPCF sauvait la grue de Sotteville
Les autorails anciens et 76 _ DES TRAINS SOUS LA LOUPE
les turbotrains aptes à l’UM Le Paris/Granville de Belphégor

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ferrovissime - 3
Histoire au présent

La 25236 est en tête du R160 n°886137 Lyon-Perrache/Valence. Elle traverse les vergers au sud de Tain-l'Hermitage, approchant de son terminus en 2009.
On remarque sur ses flancs les traces d'autocollants qui ont servi pour le film publicitaire réalisé pour Chanel peu de temps avant, avec l’actrice Audrey Tautou.

Le retour attendu
de la BB 25236 Texte et photos : Jean-Michel Mitteau

Voir rouler une locomotive de la famille MTE (9200, 16000…)

dans sa livrée verte à parements argentés est le plaisir que nous
réserve bientôt la 25236…

L ivrée à la SNCF le 1er juin 1966, la BB 25236

a la particularité d’avoir reçu des bogies
aptes à 250 km/h qui lui permettent de ré-
aliser, peu de temps après sa sortie d’usine,
des essais à grande vitesse en plaine d’Alsace.
Remise ensuite au type, elle connaît diffé-
rentes affectations, avant de rejoindre définitive-
miner des véhicules radiés avant que son état
l’oblige à cesser tous services.
Fort heureusement, cinq années passées aux
bons soins du dépôt Infra de Chalindrey lui ont
permis de revenir sur le devant de la scène. Ses
moteurs ont été remis en état, et il ne reste plus
qu’à changer ses réservoirs d’air et à effectuer
La 25236 dans ses
fonctions récentes au sud
de Tournon, le 29 avril
2011. Elle remorque un
train de machines pour
le salon «Perpirail»,
composé des 67470,
80010 ex-8188, 72064,
ment le Dépôt de Vénissieux en septembre 1993 mises au point et essais. On devrait donc pouvoir à de même qu’une 63500,
pour y assurer des TER, sur la région Rhône-Alpes. nouveau l’admirer en ligne en cette année 2019. ◼ les 68081 et 68537.
Équipée de la réversibilité par multiplexage
en 1987, elle conserve sa robe vert-bleuté clair
avec moustaches et enjoliveurs en aluminium,
afin d’intégrer ensuite le Musée français du Che-
min de Fer de Mulhouse. C’est d’ailleurs la seule
BB MTE préservée en version d’origine.
Au terme de sa carrière commerciale, elle est
mise à la disposition de l’Agence d’Essais Ferro-
viaire où elle est utilisée aux acheminements
de matériels à travers la France.
Depuis, elle appartient à la Cellule des Maté-
riels Radiés (CMR), basée au Mans, afin d’ache-

4 - ferrovissime
L’Y 8329 aux couleurs
de MGW service stationne
au Port de Strasbourg en
octobre 2018.

Un Y8000 passe en entretien

chez MGW service Texte et photos: Régis Grannec

Avec MGW service, c’est un

nouveau mainteneur qui
s’installe désormais en France!

S ociété spécialisée dans l’entretien et les

réparations des locomotives, MGW ser-
vice a été rachetée, il y a deux ans, et
fait désormais partie du groupe Akiem.
L’objectif initial de l’entreprise est alors d’assurer
la maintenance des locomotives allemandes
d’Akiem – notamment de 52 TRAXX – et de
Le bleu est la couleur
BB 37000 circulant en Allemagne.
de MGW, tandis que
Actuellement, MGW service étend son do- les berlingots sont
maine d’action à l’entretien des locotracteurs Y utilisés dans la livrée
8000 d’Akiem, pour lesquels il est prévu d’adopter rouge d’Akiem.
un cycle de révisions et une maintenance sur
site, mieux adaptés aux besoins spécifiques des
clients utilisateurs sur installations terminales
embranchées (ITE). algré leur âge,
MGW service a adopté une livrée comportant s Y 8000 restent
s locotracteurs
des berlingots de couleur bleu, mixage entre s appréciés, aux
les berlingots rouges d’Akiem et la teinte bleue ractéristiques
d’origine de MGW. ◼ odernes.

ferrovissime - 5
Histoire au présent

La rame TMST Izy est encadrée

par la motrice de tête 3213 où
le logo Izy est apposé sur son
nez, détail absent sur la motrice
de queue 3224. Elle est prise
en territoire belge à Rumes,
le 17 novembre 2018.

© N. BEYAERT

Un ancien Eurostar
passe chez Izy
Izy, c’est l’offre «mobilité à
bas coût» France/Belgique à la
manière de OuïGo sur le réseau
national français.
Texte : Christophe Masse

A u changement d'horaires du 9 décembre

© C. MASSE

2018,larameTGVRéseautricourant4551,
miseàdispositionparlaSNCFpourassurer
le service low-cost Izy de Thalys depuis le La motrice 3224 au heurtoir de Paris-Nord. La livrée Izy change sensiblement
printemps 2016, a été remplacée par une rame l’aspect des rames TMST!
Eurostar, class 373, Trans Manche Super Train
(TMST).ElleassurelaliaisonParis/Bruxellesjusqu’à
deux allers-retours par jour.
Pour ce faire, une rame a été reconstituée à
partir des deux demi-rames n°3213 / 3224 de one des
10 caisses non rénovées qui avoisinent chacune aies vert
7 millions de kilomètres. Les voitures sont pelli- rintemps,
ortes et
culées aux couleurs Izy aux ateliers londoniens
iture
de Temple Mills et les motrices au technicentre iolettes,
du Landy, à Paris. A noter que cette rame est s teintes
louée par Thalys mais conserve son numéro UIC hoisies sont
© C. MASSE

de l’opérateur Eurostar (EIL) largement visible raiment

sur les bas de caisses. ◼ riginales!

LA RAPIDITÉ ET LE CONFORT DU THALYS AU PRIX DU BUS

6 - ferrovissime
 En 2012, la Traxx
E 186 304 de
l’opérateur ECR
circule près de
Clermont-Ferrand.

La famille des Traxx

Bombardier s’agrandit
Produites à plus de 2200 exemplaires depuis 1997, les Traxx de Bombardier
constituent l’une des plus grandes familles de locomotives électriques.
Texte: Frédéric Didelot /Photos: Jean-Pierre Francon

P roduites à plus de 2200 exemplaires depuis

1997, les Traxx se répartissent en quatre
grandes familles:
- AC, monocourant 15 kV, aptes à circu-
ler en Allemagne, Autriche et/ou Suisse, le cas
échéant avec un groupe diesel Last Mile (BR 145,
146, Re 482…) avec des variantes 15/25 kV (BR 185,
La troisième génération, lancée en 2012 avec
les AC3 (BR 147, 187) pouvant comporter en op-
tion un groupe Diesel Last Mile de 180 kW pour
assurer des dessertes terminales non électrifiées,
vient de s’enrichir des versions DC3 (E 494) qui
pourront également rouler en Slovénie et MS3
(BR 188) capables de circuler jusque dans 14 pays.
CFL 4000), Une déclinaison française est envisageable, pour
- DC, monocourant 3 kV, aptes à circuler en Italie accompagner les ac-
(E 483), en Pologne (5170) ou Espagne (253), tuelles BR 185 DB (20),
- MS, multisystème 1,5 kV, 3 kV, 15 kV et 25 kV BR 186 ECR (65), Fret
(BR 186, Re 484, type 28/29…), sous différentes SNCF (12) et Lineas (5)
versions en fonction des systèmes de sécurité qui roulent dans notre
de chaque pays, pays depuis 2005. ◼
- DE ou ME, diesel-électrique (BR 285, 245, 246)
avec un ou plusieurs moteurs.
Desserte de la SE
En fonction des services à assurer, elles sont
Mozac en mars 201
configurées en version F140 (Fret 140 km/h) ou par la E 186 322 d
P140/160 (Voyageurs 140 ou 160 km/h). DB Carg

ferrovissime - 7
Histoire au présent

La première
génération d’Eurostar,
dérivée des TGV
français, appartiendra
bientôt au passé.

© F. DIDELOT

Eurostar
en évolution
La première génération d’Eurostar dérivée des TGV
français part en retraite. Place à la seconde génération
née chez Siemens.
Texte : Frédéric Didelot

L ivrées par Alsthom entre 1993 et 1996, les nuit, gris et jaune avec un nouveau logo. 19 rames
31 rames TMST (Trans Manche Super Train) devenues excédentaires sont radiées entre 2014 et
sont dérivées des TGV français, mais elles s’en 2018. Onze ont bénéficié entre 2015 et 2018 d’une
distinguent par leur composition (18 voitures opération mi-vie avec rénovation des aménagements
encadrées par deux motrices) sécable en son milieu, intérieurs et apposition d’une nouvelle livrée calquée
leur gabarit britannique et leur motorisation asyn- sur celle des Velaro. La rame 3213/24 vient d’être
chrone. En complément, sept rames dites NOL (North mise à disposition de Thalys en étant recouverte
La seconde génération,
type Velaro Siemens,
passe ici en gare de
Survilliers-Fosses.

Of London) sont livrées en 1995-96, avec seulement d’un pelliculage Izy pour remplacer les deux rames
14voitures intermédiaires. Louées jusqu’en décembre PBA 4521 et 4551 qui officiaient depuis avril 2016.
2014 pour compléter le parc du TGV Nord, elles sont L’avenir de la 3214/23, non traitée et encore en livrée
alors toutes radiées, la rame 3304/08 n’ayant par d’origine, reste en suspens. ◼
ailleurs jamais roulé.
En 2010, dix nouvelles rames
e320 sont commandées auprès
de Siemens, dérivées de la plate-
▶ SITUATIONDUPARCENNOVEMBRE2018 ◀
Séries Type Propriétaire initial Parc initial Radiées
forme Velaro, complétées par
3001/02 à 3021/22 TMST e300 Eurostar UK 11 9
sept rames supplémentaires
3101/02 à 3107/08 TMST e300 SNCB 4 4
en 2014. Livrées entre janvier
3201/02 à 3231/32 TMST e300 SNCF 16 6
2014 et mars 2018, elles sont
aptes à 320 km/h et arborent la 3301/02 à 3313/14 NOL Eurostar UK 7 7
nouvelle livrée à base de bleu 4001/02 à 4033/34 Velaro e320 Eurostar International 17 0

8 - ferrovissime
La Z 5323 dessert
Ponthierry-Pringy le 9 août
2018. Elle appartient à la
première tranche de 1965
reconnaissable à l’encadrement
en inox des fenêtres.

© D.M. COSTES
Clap de fin pour les Z5300
Indissociables des banlieues de Paris-Gare de Lyon, Texte : Frédéric Didelot
Austerlitz et Montparnasse pendant plus de 50 ans,
les Z 5300 viennent d’achever leur service.

61 rames à trois caisses, reconnais-

sables à l’encadrement en inox
des fenêtres, sont livrées entre
décembre 1965 et octobre 1968.
Elles permettent de remplacer une partie des
Z 4100 sur la banlieue Sud-Ouest et d’épauler
les Z 5100 sur celle du Sud-Est. Une seconde
rejoignent Bordeaux en attendant l’arrivée des
AGC. Après l’abandon du RER C en 2002, les
radiations débutent, en priorité avec les élé-
ments les plus récents non équipés EAS. Elles
quittent la banlieue de Montparnasse en 2015,
ne conservant que des missions vers Melun dans
l’attente des livraisons des Regio2N Z 57000. Le
Fin de carrière
à Bordeaux en
attendant l’arrivée
des AGC pour la
Z 5421, appartenant
à la seconde tranche
construite dans
sous-série (Z 5362 à 5445), avec des joints en 9 décembre 2018 marque la fin des petits gris les années 1970
néoprène autour des fenêtres, apparaît entre sous 1 500 V, la Z 5327 étant conservée pour la avec des joints en
février 1972 et novembre 1975, dans la pers- Cité du Train.◼ néoprène autour des
pective du RER C. En parallèle, sept rames fenêtres.
assurent des liaisons rapides Paris/Orléans/
Tours à 140 km/h en configuration deux caisses
entre 1968 et 1978.
L’arrivée des Z2N d’abord sur le RER C à partir
de 1983-84, puis sur le RER D à partir de 1989,
conduit à muter une partie du parc sur la banlieue
de Paris-Montparnasse en modernisant légère-
ment les intérieurs. À partir de 1994, quelques
rames sont reportées sur des TER de la région
© F. DURIVAULT

Centre sur les axes Paris/Chartres/Le Mans (portes

bleu clair) et Paris/Orléans/Tours et Limoges
(portes bleu foncé). En 2002-03, quelques rames

ferrovissime - 9
Histoire au présent

Une Régio2N en vitesse à Champagne-sur-Seine. De face, on remarque les deux lignes d’un bleu plus pâle que les bandeaux latéraux.

La livrée Île-de-France Mobilités

se développe Texte: Jehan-Hubert Lavie / Photos: François Durivault

Après la livrée blanche avec portes et nez carmillon, les trains

de la grande couronne parisienne changent de robe, en passant
du rouge au bleu.

C réé dans la foulée d’un changement de

majorité politique à la région, Île-de-
France Mobilités, appelé STIF jusqu'en
juin 2017, est le nom public du Syndicat
des transports d’Île-de-France. Cet établisse-
ment public est l'autorité organisatrice des
transports de la région Île-de-France.
STIF laisse progressivement place, sur le matériel
roulant, à une robe en deux tons de gris avec
parements en deux tons de bleus.
Cette nouvelle livrée est appliquée, en
priorité, au matériel roulant neuf en cours de
livraison.
Mais des engins plus anciens en bénéficient
Pour marquer visuellement ce changement, lors des passages en révision. ◼
la livrée blanche à portes et nez carmillon du

Sur cette vue latérale d’une Régio2N, on note l’importance donnée au Les tram-trains sont également concernés par la nouvelle livrée.
nom de l'autorité organisatrice des transports de la région Île-de-France.

10 - ferrovissime
Médiathèque
Texte : Aurélien Prévot
Les Chemins de
fer Impériaux
d’Alsace-Lorraine
Par Jean-Georges Trouillet. 472 pages richement
illustrées en N&B et couleurs sous couverture
cartonnée illustrée protégée par une jaquette en
couleurs aux Éditions Drei Exen. En vente pour
64 euros + port chez LR Presse (code CFI).
L’histoire des Chemins de fer Impériaux d’Alsace-
Lorraine est relativement mal connue en France
en raison en particulier de sources d’archives
en langue allemande. Après 18 ans de travaux
de recherche, Jean-Georges Trouillet se lance
dans la publication d’une grande encyclopédie
pour présenter de manière exhaustive l’ancêtre
du septième grand réseau français. Ce premier
tome, d’une série que l’on espère complète,
aborde la genèse du réseau, son administration,
son personnel et son trafic. Les accidents ne sont
pas oubliés ni la fin du réseau suite au traité de
Versailles et la création de l’AL qui en découle.
L’iconographie (plus de 400 illustrations!),
originale et souvent inédite, est fort bien mise
en valeur par une mise en page moderne
et très agréable. Un ouvrage indispensable
pour qui souhaite en savoir plus sur l’histoire
méconnue en France de l’Elsass-Lothringen.
Les locomotives électriques
1500V de vitesse, hors-série
Ferrovissime n°10
Par Jean-Michel Eich. 160 pages richement illustrées en N&B et couleurs aux
Éditions LR Presse. En vente pour 25 euros + port chez LR Presse (code HSFME010).
Ce nouvel hors-série Ferrovissime est consacré aux lévriers du rail, ces machines à
adhérence totale qui ont ouvert la voie à la grande vitesse en France. Ce hors-série
comprend à la fois une présentation des prototypes réussis (CC 7001/2, BB 9001
à 4) et l’étude des locomotives de
série qui en ont résulté comme les
BB MTE, les CC 6500… Le sommaire
comprend aussi des articles historiques
et témoignages de cheminots ayant
connu ou conduit ces machines. Ainsi,
le fameux record du monde de vitesse
de 1955 est analysé en détail à travers
un témoignage exceptionnel. En plus
d’informations solides et précises,
on retrouve donc de nombreuses
anecdotes et souvenirs qui rendent
la lecture très agréable. Le dépôt de
Chambéry, haut lieu de la traction
électrique 1500 V, est présenté. Un
ouvrage indispensable pour tous les
amoureux de la traction électrique!
La saga de la Petite
Ceinture: 1991-2017
Par Jean-Emmanuel Terrier et Samuel Delziani. 160 pages richement
illustrées en couleurs sous couverture cartonnée illustrée aux éditions La
Vie du Rail. En vente pour 39 euros +
port chez LR Presse (code CEINTURE2).
Qui ne connaît pas la Petite Ceinture de
Paris, cette ligne de rocade construite
aux limites de la capitale ? Son avenir
ne cesse de faire débat: réouverture,
transformations, disparition… de nombreux
acteurs politiques ou associatifs militent
pour tel ou tel projet. Ce livre présente la
situation actuelle et les projets imaginés
par les élus pour certains tronçons. Peu
de trains au fil des pages mais beaucoup
d’aménagements tendance sur un espace
qui attise bien des convoitises…
ferrovissime - 11
Trésors d’archives

LACANAU, UN GRAND
DÉPÔT-ATELIER
DES CFTA-GIRONDE

Après Saint-Symphorien étudié dans le n°94 de

Ferrovissime, voici Lacanau, un ensemble gare-atelier-
dépôt typique d’un secondaire d’autrefois.
Texte et photos : Gilles Germain

12 - ferrovissime
Train 411 du 19 juillet 1976.
Parti de Bordeaux-Docks à 8h31, il entre
en gare de Lacanau tiré par la BB 4029 et
manœuvre pour déposer ses wagons de
queue sur la voie devant le BV. En tête, le
couvert Standard appartient au parc SNCF
tandis que les plats chargés de dosses
figurent à l’effectif des CFTA Gironde.

ferrovissime - 13
Trésors d’archives
> Rendez-vous sur le blog Ferrovissime <
Au cours du mois de janvier 2019, des
informations complémentaires sur Lacanau,
concernant notamment les matériels
préservés, seront publiées sur le blog
Ferrovissime. Alors, n’oubliez pas, connectez-
En juillet 1976 le BV, vous sur http://blog.ferrovissime.com
côté cour. Il est pimpant,
ravalé peu de temps
auparavant. Il y a déjà
quatre ans que Madame
Dubos n'est plus chef
de gare et le nom de la
personne du 1er étage
n'est pas connu.

I
l est moins simple de décrire le dépôt-atelier
de Lacanau que celui de Saint-Symphorien.
Moins de choses ont été mémorisées et les
témoins sont plus rares. Reste la “littéra-
ture savante” et les clichés d'époque, qui
en disent déjà pas mal.
En 1886, la commune compte 1007 habi-
tants. Ils sont 2038 en 1975. Une progression
régulière, sans à-coup. L'activité économique est
marquée par le tourisme depuis 1900. Il devient
prépondérant vers 1980. Cela génère une évo-
lution sociologique radicalement différente de
celle de Saint-Symphorien : le passé ferroviaire
n'a pas le même sens ici.
Pour moi, il évoque une sortie de la journée
effectuée en autorail spécial, affrété par la col-
onie d'Andernos où j'ai passé le mois de juillet
avec mon frère, en 1959. Nous avions eu droit
à un voyage en forêt suivi d’une balade jusqu'à
l'étang de Lacanau, avec baignade sur place et
retour en fin d'après-midi.
Le centre technique du réseau
est à Lacanau
Je n'ai trouvé nulle part de date de mise en ser-
vice du «centre technique». Dans la pratique, il est
forcément contemporain de l'inauguration de la
ligne Facture/Lesparre ou de Bordeaux/Lacanau, soit
1884 ou 1885. Quelle était sa consistance initiale
et quand a-t-il pris sa forme définitive, c'est une
question sans réponse certaine à ce jour.
Le De Dion M5 à Arès
en 1967, entretenu tout
au long de sa carrière à
Deux éléments permettent d'avancer une hy- Lacanau. Il sera démoli
en 1970, malgré son
pothèse: l'aspect, les techniques de construction
bon état général. Seul
des bâtiments et aussi l'existence du plan « Gare de la série, le M7 sera
de Lacanau - éclairage électrique - échelle 1/500e » préservé, à l'initiative
(non daté, mais sûrement très proche de 1930, de l'ABAC.
car l'électricité arrive ici en 1928).
Le site est plus vaste que Saint-Symphorien,
son homologue du sud : 400 m de long, entre le
ruisseau au sud et le PN de l'avenue du Lac. Une
largeur moyenne de près de 100 m. La surface
est donc de 4 ha environ.
Les éléments les plus anciens visibles sur place en
1973 montrent les mêmes matériaux et une mise en
œuvre analogue à ce que l'on a à Saint-Symphorien,
en moins sophistiqué. Ils datent des années 1920,
sans rénovation lourde 20 ans après.
Les bâtiments 2, 3 et 5 (partie nord) sont à
structure bois : poteaux, poutres et fermes. Le
remplissage est là aussi en briques apparentes,
avec des parties de bardage bois. Couverture en
tuiles. L'éclairage zénithal est plus simple qu'à
Saint-Symphorien: à-plats de verrières, en nom-
bre et surface limités. Pas de lanterneau, sans
doute du fait qu'il n'y a jamais eu ici d'entretien
important de machines à vapeur.
Quatre hectares pour gérer
et entretenir le matériel
La cuve de 50 m3 du château d'eau est perchée sur
une tour en maçonnerie. L'ensemble fait 10,50 m
de haut. Trois grues hydrauliques (GH) sont ▶▶▶

Visitons les remises du dépôt-atelier

Les bâtiments 2 et 3 sont pratiquement en état
d'origine. Seuls les pignons nord ont été repris, en
béton et briques enduites, avec portes coulissantes
métalliques. Le 5, lui, doté d'une toiture à sheds,
a été prolongé au sud par un corps en briques
enduites et couverture en amiante-ciment ondulée.
Cette extension a pu coïncider avec la suppression
du chariot transbordeur, car il n'y a plus que
deux grandes portes au gabarit ferroviaire, côté
nord. Le plan de 1930 montrait les trois voies
pénétrantes de la configuration originelle. Ces
travaux importants datent sans doute de 1935/40.
On trouve aussi, datant du début des années 1940,
Devant le portique et
en 1, le curieux abri-atelier ouvert, sur fosse, avec l'abri-atelier ouvert,
son portique de levage (idem à Saint-Symphorien). l’autorail De Dion
Le château d'eau et la première cuve à gasoil, M104 stationne en
désaffectés, restent en place. Plus au nord, à côté de avril 1973. Il est attelé
ce qui était historiquement le dépôt, deux nouvelles à une remorque Verney
Unifiée XR 9100 mise à
cuves à carburant resteront en service jusqu’à la fin. disposition par la SNCF.
Le train de secours, avec la grue Dyle et
Vignette: Restauré
Bacalan n°2, est stationné au sud, sur une à Guîtres, voici
des voies passant à l'est de la gare. l'intérieur du M 104.

14 - ferrovissime
 Lacanau, état des lieux 1973 Infographie : Gilles Germain

LA GRANDE ÉVOLUTION DÉMARRE EN 1931 AVEC LA MISE EN

SERVICE DES PREMIERS AUTORAILS RENAULT TE

ferrovissime - 15
Trésors d’archives

Le 19 avril 1973, la BB 4033 stationne au dépôt. Francis Méoul fait le niveau d'huile moteur. Derrière la loco, à gauche, on devine le De Dion
M105 et un wagon couvert. À droite, devant la remise, un fourgon.

Le site vu depuis le PN, au nord, en juillet 1976. Toutes les voies sont peu ou prou occupées durant le tri des deux convois qui vont bientôt repartir, l'un vers
Facture, l'autre vers Naujac. De gauche à droite: les voies de contournement, avec les portiques de transbordement des bois – le BV – les wagons et la BB
qui les manœuvre – le château d’eau et les cuves à fuel, 1re et seconde générations – l’atelier mécanique-dépôt et les draisines du service de la Voie.

16 - ferrovissime
L'AUTORAIL M11 EST ASSEMBLÉ À LACANAU EN 1937 À PARTIR
D'ÉLÉMENTS NEUFS COMMANDÉS CHEZ DE DION
▶▶▶ alimentées: une au nord et deux au sud. Juste
àcôtéaétéimplantéelapremièrecuveàcarburant,
sans doute au moment de l'arrivée des autorails
en 1931 ou 1932.
La plaque et les voies de l'ouest du site (repré-
sentées en tireté sur le schéma) n'ont pas toutes
laissé de trace visible sur le terrain. On ne connaît
pas de clichés les représentant: c'est le plan de
1930 et, pour partie, les photos aériennes IGN
des 8/07/1945 et 17/08/1947 qui nous renseignent.
Ainsi, le pont transbordeur semble avoir déjà
été démantelé à l’été 1945. Sur son emplacement,
ontrouvel’extensiondubâtiment5–grandatelier
de réparation – édifiée juste avant la guerre. On
constate également que les grands réservoirs à
gasoilqu’oninstalleraàl’anglesud-estdubâtiment
2 ne sont pas en place en août 1947, alors que
les BB General Electric sont déjà arrivées l’année
passée. Ils ont dû être montés en 1948/50.
L’ancien EP quittant le site au nord-ouest, qui
fonctionne en 1945, est désaffecté en 1947. Le
tronçon inscrit à l’intérieur du site sert encore
aux manœuvres et garages, mais plus pour très
longtemps.Ilserasupprimélorsd’unremaniement
des installations du service Voies et Bâtiments.
La maison de garde-barrières et le PN marquent
la limite nord des emprises.
Un dépôt très actif dès la naissance
de la traction diesel
Que fait-on à Lacanau, depuis l'ouverture de
l'établissement?Onytravaille,etengrandnombre!
Placé en vis-à-vis de la gare et des voies à quai, il
remplit à l'origine les mêmes fonctions que celui
de Saint-Symphorien, précédemment décrit. Les
séries de machines sont les mêmes. L'effectif doit Vue prise en 1976
là aussi se situer à une douzaine de locomotives, depuis l'échelle du
château d’eau. Les
entre 1930 et 1953. Les lignes desservies sont Bor-
deux convois sont
deaux/Lacanau-Océan et Lesparre/Arès/Facture. La sur le départ avec
grande évolution démarre en 1931 avec la mise en les BB 4031, 4029
service des premiers autorails Renault TE, neufs, et 4035. Au fond,
M1 à M4. D'autres Renault TE sont acquis, repris à gauche du BV, on
d'occasion au Réseau de l'Etat: M21 à 30. Puis des distingue les portiques
De Dion arrivent en 1937 et 1938: M5 à 10, avec de chargement des
wagons de la cour de
les remorques assorties.
débord.
Tous ces engins sont à deux essieux, poste de
conduite unique et dispositif de retournement
intégré. Il n'y aura jamais de plaque de grand ▶▶▶
Coup d’œil au service VB
Le service Voie et Bâtiments du réseau est dirigé, depuis Bordeaux,
par Monsieur Lacroix. A Lacanau, le service est logé dans un
bâtiment immédiatement au sud du PN de l'avenue du Lac. Le
parc de matériel et les draisines du service sont également là.
En 1968, il y a encore 40 agents affectés à ce service (90 vers 1938).
Ils sont organisés en quatre équipes chargées d'un linéaire de voies,
dotées de moyens techniques. En 1976, il reste 20 agents, parant
seulement au plus pressé pour maintenir la voie en fonctionnement.
Les draisines sont délaissées, au profit de deux fourgons Citroën
type H, peints en rouge et crème, couleurs du matériel CFTA.
Le wagon désherbeur local, n° H3003, est ici aussi de fabrication
maison. Il s'agit d'une citerne unique et horizontale, courte,
posée sur un châssis de wagon plat. Le réservoir est susceptible
d'être mis sous pression, pour pulvériser le produit actif. Il est
en assez bon état, toujours utilisé en 1973. En 1976, un cliché
couleurs le montre dégradé, probablement inutilisable.
Tout au sud, le service VB stocke les rails et
traverses nécessaires aux remplacements.
ferrovissime - 17
Trésors d’archives
La sortie sud de
Lacanau avec
des wagons
CFTA. Notez
l’état du plan de
voies.

En juillet 1976, draisines Billard et remorque bâchée du

service VB, devant le PN de l'avenue du Lac, seul élément
bâti du site ferroviaire toujours debout en 2018.

La 4029 manœuvre les wagons du train de desserte 411 du 19 juillet 1976. La grue de secours Dyle et Bacalan en 2012, restaurée à Guîtres. Elle
À l’époque, ni casque, ni radio, ni EPI et la permission (l’obligation ?) pour est, comme plusieurs véhicules, inscrite à l'Inventaire supplémentaire
l’homme d’équipe de se tenir sur le marchepied du diesel durant l’évolution. des Monuments Historiques.

▶▶▶ diamètre sur le réseau. Les remises d'Arès,
Hostens, Belin, constituent des annexes du dépôt.
Les De Dion M101 à 105 de 1938, à moteur
Willème 180 ch, feront une carrière à éclipses.
Propriété de la SE (et non du département), deux
ou trois appareils sont loués par la Gironde en juillet
1944. En 1948, les cinq exemplaires sont là, mais ils
repartent en 1951. Les 102, 104 et 105 reviennent à
Lacanau en 1967, jusqu'à la fin du service régulier,
fin 1970. Ils sont puissants, rapides et confortables
(tout est relatif, compte tenu de l'état des voies…).
Des ateliers pour les voitures et wagons
Dès l'origine, l'entretien, la réparation, les trans-
formations et reconstructions de voitures à voya-
geurs et fourgons ont été du ressort des ateliers de
Lacanau. Cette fonction se poursuit tout au long
de l'existence du réseau. Pour ce faire, on dispose
d'ateliers de menuiserie, tôlerie, peinture, sellerie,
puis mécanique (avec l'arrivée des autorails).
Les modèles de voitures sont nombreux et
très variés : 25 types différents, acquis neufs ou
d'occasion. Quelle que soit la date de leur ach-
at, l'essentiel du parc date d'avant la Première
Guerre mondiale. Après-guerre, seules huit
voitures de 11 m de long sont commandées et
livrées en 1923 : il s'agit de reconstructions sur
des châssis anciens.
Quant aux fourgons, il y en a eu au moins sept
types différents, pour une vingtaine de véhicules !
L'entretien d'un tel parc requiert du personnel,
en nombre et de compétences variées. En 1929,
une belle photo regroupe une grosse cinquantaine
de salariés du site, dont une seule femme…
Ici comme partout en France, la métallisation
du matériel voyageurs est une tendance lourde,
mais les fourgons resteront en bois jusqu'à la fin.
Il y aura toujours un bel atelier de menuiserie
à Lacanau, dirigé par Henri Dubos, mais la tôlerie
prend de l'importance. Cela se confirme avec la
prise en charge des autorails et remorques.
Assez logiquement, la diésélisation du trafic
voyageurs conduit à attribuer à Lacanau la main-
tenance globale de tous les autorails et remorques.
Les ateliers sont adaptés à cet effet.
Des autorails reconstruits,
d’autres livrés en kit
L'autorail M11 est assemblé à Lacanau en 1937 à
partir d'éléments neufs commandés chez De Dion.
Durant la guerre, la pénurie de produits pétrolier
amène la SE à équiper plusieurs autorails de gazo-

CES CHANTIERS SUPPOSENT LA PRÉSENCE SUR PLACE D'UNE

FONCTION BUREAU D'ÉTUDES, MÊME SI ELLE EST LIMITÉE
18 - ferrovissime
 Tracteur léger TX202
à moteur Unic 150 ch,
gènes.En1948,LacanauproduitleM12enn'achetant terventions ont lieu dans les bâtiments 3 et 5. Par utilisé depuis 1970 à
qu'un châssis De Dion, qui est allongé. Puis la mo- contre, les camions de messageries qui sillonnent Lacanau par le service
de la Voie. Il peut
torisation et la caisse sont également réalisées sur le département restent entretenus à Bordeaux. remorquer 80 t. Cet
place.Unesériede5enginsestensuiteproduitede Les dernières années, les responsables du site, ancien Renault TE en
1948 à 53: issus de modèles Renault TE, les MX201 René Baraud et Monsieur Dehase sont plutôt est à sa 3e configuration
à205sontallongésà11m,dotésd'unsecondposte tolérants à l'égard des visiteurs photographes. de châssis et d'usage! Il
deconduiteetd'unecaisseentièrementmétallique. avait été transformé en
Ceschantierssupposentlaprésencesurplaced'une 40 ans après la fermeture MX 202 vers 1950, puis,
en 1955, en tracteur
fonction bureau d'études, même si elle est limitée. En2018,leshistorienslocauxestimentquevers
léger, tel que nous le
En 1958, il y a encore à l'inventaire 17 voitures à 1950, le chemin de fer faisait vivre 300 personnes voyons avec, à ces
voyageurs, 6 fourgons, 16 autorails et 8 remorques. dans le bourg : cheminots, familles et emplois occasions, allongement
C'est considérable, si l'on prend en compte qu'à induits. La vie était rythmée par les heures d'em- puis raccourcissement
cette époque, l'activité voyageurs se résume à Fac- bauche et de sortie du site, matin, midi et soir. du châssis!
ture/Arès et aux trains d'été sur Bordeaux/Lacanau. 40 ans après la fermeture, Lacanau a tourné la
Le matériel circule peu, sauf les autorails les plus page: le tourisme est aujourd'hui omniprésent!
performants. Les derniers autorails Bordeaux/ Mais plusieurs anciens et des familles se souvien-
Lacanau-Océan roulent en septembre 1962. nent des parents, grands-parents, qui travaillaient
Une nouvelle activité a donc logiquement vu au chemin de fer, comme ouvriers aux ateliers,
le jour : l'entretien des autocars qui ont repris le à la Voie, garde-barrières, chefs ou gérantes de
trafic des lignes transférées (pas toutes). Ces in- gares, agents de manœuvre… ◼

Le bâtiment voyageurs, les débords et l’Exploitation

Lacanau, gare principale, dispose d’un
«somptueux» bâtiment voyageurs, géré
par un(e) chef de gare et non une gérante,
comme dans les établissements moins
importants. Ce BV sera soigneusement
entretenu jusqu’à la fin de l’activité.
Les derniers voyageurs ferroviaires
sont loin, mais le trafic par autocars
reste important jusqu’à la fermeture.
Billetterie et salle d’attente sont toujours
avenantes dans les années 1970.
La cour, non enclose, est desservie par
deux longues voies de contournement
et reste très active. Elle a été dotée,
en partie nord, de longs portiques de
transbordement du bois qui n’existent
pas en 1947. Ils arrivent sans doute à
la fin des années 1950, car l’important
réseau forestier à écartement de 0,70 m,
qui apportait son trafic au chantier du
Huga, point d’échanges sur la ligne
de Lacanau-Océan, a fermé. Ce sont
donc les camions qui livrent ici, en
gare, les forts tonnages de grumes
destinées au transport ferroviaire.
En tous cas, les trafics restent importants.
Il n’est pas étonnant, dans ces conditions,
d’observer trois trains en gare, dont
un facultatif, un lundi de juillet 1976
(voir Ferrovissime n° 94, page 21).

ferrovissime - 19
Comment ça marche ?
Les autorails anciens et
les turbotrains aptes à l’UM
Après les locomotives électriques et diesel couplables en UM (Unités
Multiples), Sylvain Assez nous présente le cas des autorails les plus anciens.
F
errovissime démarre une série de
plusieurs articles présentant les
autorailsetlesautomotricespou-
vant circuler en UM en France,
que ce soit en voie normale ou
envoiemétrique.Pourlaisserunelarge
place à l’illustration, nous avons séparé
les autorails entre «anciens» et «mo-
dernes», en nous appuyant sur leur nu-
mérotation. Ce premier article s’arrête
donc aux X 4900 – les EAD triples bien
sûr, pas les ADP! – le suivant commen-
çant par les X 72500.
D’emblée, rappelons qu’il ne faut pas
confondre l’UM, qui est la circulation
en convoi de plusieurs autorails me-
nés par un seul agent de conduite
(ADC) placé dans la cabine de tête,
avec le jumelage qui est la circula-
20 - ferrovissime
tion en convoi de plusieurs autorails
équipés, chacun, d’un ADC commu-
niquant avec les autres à l’aide de
signaux lumineux et acoustiques, ou
par interphonie. C’est la circulation
en UM qui fait l’objet de ces articles.
La situation avant 1950
Accoupler plusieurs autorails en
UM est une idée qui naît dès le début
des années 1930 à une époque où ces
engins, pour la plupart démunis de
tampons, ne remorquent pas. Seuls les
engins diesel sont concernés, car cette
possibilité n’est pas envisagée sur les
autorails à moteur à essence, ni sur les
engins à gazogène à charbon minéral
ou à charbon de bois. Facile à mettre en
œuvre avec des autorails à transmission
Le Rapide 1re classe OG Nantes/
Lyon du 2 août 1970 vient
d’arriver à son terminus, sur
une des voies en impasse côté
nord de la gare de Perrache.
Les X 2774 et 2772 en UM
(RGP 1 rouges) sont prêts à
rejoindre le dépôt de Vaise.
© T. PORCHER
Texte : Sylvain Assez
électrique, l’UM est plus complexe à réal-
iser avec une transmission mécanique.
Après quelques tentatives expérimen-
tales, notamment sur des Renault VH,
une solution fiable est mise au point
sur les Renault ABJ en faisant appel à
une commande électropneumatique
de la boîte de vitesse et de l’embrayage.
Avant-guerre, dans la catégorie des
autorails à transmission mécanique,
les Renault ABJ sont, pour la plupart,
prévus pour circuler en UM2, de même
que les types dérivés (ADP, ADX…).
Certains autorails De Dietrich et
quelques prototypes divers sont aussi
aptes à l’UM.
L’aptitude à l’UM est bien plus répan-
due chez les autorails à transmission
électrique.
© T. PORCHER
Le Rapide 1579 Strasbourg/Lyon du 24 avril 1988 traverse la gare d’Erstein, visiblement en tractionnant ! Il est assuré par deux RTG,
non plus en jumelage mais désormais en UM, ainsi que l’atteste la présence du câblot d’UM, bien visible à l’avant de la motrice de tête.
© T. PORCHER
L’Express 5376 du 5 avril 1986, composé d’une UM de deux EAD triples X 4900, dessert Montdauphin-Guillestre.
Toutefois, deux éléments vont
réduire, de manière drastique, les pos-
sibilitésd’UMentreautorailsàtransmis-
sion mécanique à partir de 1950:
- un règlement est mis en application,
suite à plusieurs incidents, qui impose
la présence d’un agent de la SNCF dans
tout autorail occupé par des voyageurs
et circulant avec son moteur diesel en
fonctionnement;
- l’extension de l’usage des remorques
d’autorails, après-guerre, permet d’aug-
menter la capacité des rames à un coût
bien inférieur à l’accouplement de deux
autorails en UM, au prix, il est vrai, d’une
baisse acceptée des performances.
L’UM pour les transmissions
électriques et hydromécaniques
Vers 1950, les câblots d’UM sont pro-
gressivement démontés sur les autorails
à transmission mécanique, notamment
les ABJ. Bien qu’à transmission élec-
trique, les autorails Decauville XDC 2000
et 2100 ignorent l’UM. À l’époque, l’ef-
fectif des autorails restant couplables en
Les limites
géographiques
de nos études
Ne sont pas pris en compte
dans ce recensement les
engins étrangers qui ne
vont pas au-delà de la gare
située immédiatement après
la frontière. Par exemple,
les autorails allemands ne
dépassant pas Wissembourg
ou Lauterbourg ne sont pas
concernés. Il en était de
même avec les machines
électriques ou diesel. Ainsi,
les locomotives italiennes
ne dépassant pas Modane et
les locomotives espagnoles
allant à Hendaye ou Cerbère
n’avaient pas été mentionnées.
Thierry Porcher
UM ne comprend plus que des engins
à transmission électrique:
- les deux séries d’autorails Berliet
«voyageurs» XBE 1000 et 3000. Ces
deux séries sont couplables entre elles
jusqu’à trois unités avec un seul con-
ducteur. Munis d’attelages automa-
tiques, ces autorails sont inaptes au
remorquage,
- les autorails TAR Franco-Belge qui,
après élimination de la série TAR 34 XF
1000, ne comprend plus que les TAR
36 XF 1100 couplables en UM2, ▶▶▶
ferrovissime - 21
 Comment ça marche ?
Les étonnants services des autorails de la SWEG
Même s’ils ne font que 8 km en France, de Kehl à Strasbourg,
ces autorails traversent deux gares intermédiaires: Strasbourg-
Port-du-Rhin et Strasbourg-Neudorf. Il est donc légitime de les
évoquer ici. Il s’agit d’une série de 32 engins, dont seulement 5
(les VT 509 à 513), équipés du KVB, sont habilités à circuler en
France. Deux UM2 sont en général engagées entre Offenburg
et Strasbourg, soit 4 autorails sur 5: cela exige donc une forte
disponibilité de la série. Mais il y a mieux: certains week-ends
chargés, une UM3 et une UM2 circulent simultanément sur
Strasbourg, soit la totalité de la série! Bien sûr, on pourrait se
dire que l’autorail placé au centre d’une UM3 n’a pas besoin du
KVB, et peut donc être un autorail quelconque de la série. C’est
d’ailleurs une configuration que j’ai pu observer une (seule) fois.
Mais si elle est logique et sans risques particuliers, elle n’est pas

© S. ASSEZ
strictement «légale»… En photo, les VT511 et 512 à Strasbourg.
Thierry Porcher
© T. PORCHER

© T. PORCHER
L’Express 3058 du 11 juillet 1981, composé des X 4790 et X 4791 UM et jumelage peuvent cohabiter sur un même train: à Andrézieux,
«Basse Normandie» en UM, entre en gare de Paris-Montparnasse. l’autorail 7582 du 4 avril 1986, à destination de Clermont-Ferrand, est
composé d’une UM de deux X 4630, d’un X 2800, et d’une XR 6000.

▶▶▶ - les autorails Alsthom-Somua XZ
AT 1001 et 2 amphibies, qui perdent
bientôt leur pantographe pour ne
circuler qu’avec leurs moteurs die-
sel en conservant leur transmission
électrique.
Mais dès 1955, l’UM connaît un nou-
veau développement avec l’arrivée de
la transmission hydromécanique qui
équipe les RGP monomoteur X 2721 à
38 puis, l’année suivante, leurs sœurs
TEE X 2771 à 81. Couplables entre elles,
ces deux séries peuvent former des UM3.
L’année 1957 voit naître la fameuse
série X 2800 équipée, elle aussi, de la
transmission hydromécanique permet-
tant l’UM3.
Retour de la transmission électrique
sur les autorails panoramiques X 4200
en 1959. Ils peuvent circuler en UM
si deux engins de la série sont attelés
l’un derrière l’autre, composition effec-
tivement appliquée au début de leur
carrière sur des relations express.
À partir des années 1960,
l’UM devient la norme
En prévision de la sortie des Elé-
ments Automoteurs Diesel (EAD) X
4300/4500, les règlements sont revus
pour permettre à ces nouveaux en-
gins, qui sortent en 1963, de circuler
en UM, bien que les premières séries
soient munies d’une transmission
mécanique – mais avec passage au-
tomatique des rapports de la boîte
de vitesses.
Toute la famille des EAD – X 4300/
4500/4630/4750 à deux caisses et 4900
à trois caisses – est donc apte à l’UM3
sans dépasser 7 caisses (ce qui con-
stitue une dérogation à la composition
maximum des autorails, normalement
fixée à 6 caisses). Ainsi, trois X 4900
ne peuvent être accouplés, ni deux
X 4900 et un EAD double (que ce soit
en UM ou en jumelage, d’ailleurs).
La génération suivante – X 2100/
2200/92100/92200 – est apte à l’UM3,
possible avec un X 2800. Avec des XR, la
composition est de 6 caisses maximum
sans dépasser 4 remorques. Seules des
XR 6100, 6200 et 96000 peuvent être
intercalées entre des autorails en UM.
Les X 2800, notamment après leur
modernisation en robe bleue, étendent
leur UM3 aux X 2100/2200/92100/92200,
RGP monomoteurs X 2721 à 38 et TEE
X 2771 à 81. Avec des XR, la composition
est également de 6 caisses maximum

22 - ferrovissime
 © T. PORCHER
Le train 12208 du 11 juin 1980, composé des ALn 668 3006 et ALn 668 1099 des FS en UM, dessert
la monumentale gare de Saint-Dalmas-de-Tende.

DÈS 1955, L’UM CONNAÎT UN NOUVEAU DÉVELOPPEMENT

AVEC L’ARRIVÉE DE LA TRANSMISSION HYDROMÉCANIQUE
sans dépasser 4 remorques. Seules des
XR 6100, 6200 et 96000 peuvent être
intercalées entre des autorails en UM.
Lorsque ce sont des XR unifiées (ce qui
était fréquent dans les années 1960/70),
lesautorailssontalorsenjumelage,donc
avec un conducteur sur chaque engin.

Mais aussi des séries

bien particulières
Dès la fin des années 1950, des au-
tomoteurs TEE étrangers roulent sur
les rails français. Ainsi, les rames dites
hollando-suissesRAm1001à3desNSet
RAm501et2desCFFsontaptesàl’UM2.
UM également pour les VT 11.5 et
VT 12.5 de la DB.
Sur la relation Nice/Coni, ce sont
les autorails italiens ALn 663 et ALn
668 qui roulent en UM3.
Àlamêmeépoque,lesturbotrainsRTG
T 2000 reçoivent (tardivement!) l’unité
© T. PORCHER

multiple pour être engagés en UM2.

Enfin, entre l’Allemagne et l’Alsace,
les autorails VT 500 SWEG sont aptes à Le 7 avril 1980, entre Capdenac et Figeac, l’Omnibus 7922 à destination de Brive est assuré
l’UM6,maisseuls5enginssontautorisés par les X 2820 et X 2861 en UM devant deux remorques bleues: du fait notamment des
à venir en France. ◼ manœuvres de ce train à Capdenac, ces remorques ne sont pas intercalées entres les autorails.

ferrovissime - 23
© Y. BRONCARD Stars du rail

SUR LA BB 9329 EN
TÊTE DU PROVENCE
EXPRESS
Quand un passionné demande l’autorisation d’accompagner un train, c’est souvent
un rapide prestigieux. Mais Jean-Luc Bobier a fait un tout autre choix… Texte: Jean-Luc Bobier

24 - ferrovissime
 UN ME 120 À DESTINATION DE
RUNGIS PARTICULIÈREMENT
SUIVI: CE N’EST PAS UN TRAIN
DE MARCHANDISES ORDINAIRE!
Passage à Ternay
Dans les années 1960, en avant et arrière
saison, quand on sait que la composition
de la rame sera courte, Le Provence Express
peut être confié à une BB 9400. La rame
est, ici, limitée à 14 couverts Kv4 (futurs
Gs4). Les wagons placés en 2e, 3e et 4e
positions portent l’ancienne livrée brun
unifié qui vire au gris noirâtre avec la patine
du temps. Les autres wagons arborent le
classique rouge wagon apparu en 1959.
L
e Provence Express n’est pour assurer le Provence Express
certes pas un train banal, 50564 d’Avignon à Dijon, un ME 120
mais rares sont les ama- à destination de Rungis particulière-
teurs qui ont le courage ment suivi : ce n’est pas un train de
de se lancer dans une marchandises ordinaire ! Au bureau
équipée ferroviaire es- de la feuille, il annonce son train :
sentiellement nocturne de plus de dix « 50564 ! ». La réponse vient aussitôt :
heures… Pour le plus grand bonheur «Tu as la 9329. Tu la trouveras sous la
des lecteurs de Ferrovissime, Jean-Luc rotonde Ouest!».
a pris des notes très précises lors de Habitué des BB 9200, le Provence
cette tournée mémorable ! Express s’offre ce soir une BB 9300!
Dépôt d’Avignon, au début de l’été Damien en est plutôt satisfait: il pour-
1976. Il fait beau et chaud sur toute ra caser ses grandes jambes sous le
la France. Damien prend son service poste de conduite unifié, ce qui serait
à 19 h 55. Ce soir, il est commandé impossible avec une 9200. Rendu sur
place, il effectue une simple remise en
service (RS) et sort du dépôt, après un
passage en plaque tournante.
Relais traction à Avignon
Avignon-Fontcouverte, 20h47. La
BB67580 amène le 50564 depuis Cavail-
lon. La machine est rapidement dételée
tandis que Damien fait la mise en tête
dela9329.Attelageetessaidefreindans
la foulée, puis remise du bulletin de
composition: 21 wagons, 525 t.
21h05: le signal de sortie s’ouvre,
le chef de service nous présente la pa-
lette blanche et verte de son guidon
de départ: on y va!
Manette d’inversion sur AV, ven-
tilateurs des moteurs de traction sur
marche : décibels garantis en cabine !
Desserrage du frein direct, manipula-
teur de traction sur stop et premiers
crans rhéostatiques en série-parallèle:
« stop à +, stop à + »… Au décollage,
Damien abaisse le panto avant. Sorti
du faisceau à 30 km/h, le Provence Ex-
press passe devant le Poste 1 et prend
le raccordement de Paris. Vitesse limite
100 km/h. Au dégagement des aiguilles
par la rame, Damien reprend la traction
cran par cran. À 45 km/h, avec 650 A
à l'ampèremètre moteur, il soulève
la manette de couplage parallèle et la
pousse en position TR (comme TRansi-
tion d’un couplage à l’autre). Rotation
de l'arbre à cames solidaire du servo-
moteur de commande JH1 qui réalise
le changement du circuit électrique :
sur les BB 9300, c’est encore le règne de
l’électromécanique… et c’est efficace!
À la bifurcation, il s’engage sur la
voie 2 de la Ligne Impériale. Poursuite
de l’accélération en parallèle cran par
cran. Le train n’est pas encore trop char-
gé et le profil est facile. La vitesse de
120 km/h est facilement atteinte ▶▶▶
ferrovissime - 25
Stars du rail

© Y. BRONCARD
Une BB 9200 emmène l’un des premiers Provence Express dont la rame est composée de 34 couverts en ancienne livrée brun unifié.
La longueur du train impressionne pour un RA à marche très tendue.

«TU AS LA 9329. TU LA TROUVERAS SOUS LA ROTONDE OUEST!»

▶▶▶ et tenue jusqu’à Orange : 28 km
en 21 mn avec la sortie du faisceau, il
ne faut pas traîner !
La BB 9329 tient facilement
l’horaire
À l’approche d’Orange, ralentis-
sement et rappel de ralentissement
sont présentés: on va bien au faisceau
d’Orange-voyageurs! Arrivée à 21h26,
pile à l’heure. Il y a 40 mn d’arrêt pour
manœuvre. Les wagons à prendre pro-
viennent de la ligne et des gares de
Pernes et de Carpentras.
Nouvel essai de frein et nouveau
bulletin de composition: on a désor-
mais 28 wagons pour 702 t.
Départ à 22h07 pour la prochaine
étape: Chasse-sur-Rhône. Décollage du
train qui est un peu plus chargé. Dès
le 30 km/h atteint, le manipulateur de
traction est ramené à zéro. En sortie
du faisceau, on cisaille la voie 1 pour
reprendre la voie 2. Au dégagement de
la dernière aiguille, Damien reprend
l’accélération d’abord en série-paral-
lèle puis en parallèle, avec en toile de
fond le chant des moteurs de la 9329.
Une fois atteinte la vitesse limite de
120 km/h, retour au couplage série-
parallèle pour maintenir un effort de
tractionsuffisantafindetenirl’horaire.
Pierrelatte est traversée à 120 km/h
tandis que la nuit tombe.
Au passage du viaduc sur la déri-
vation du Rhône, on croise le Rapide
5009, CC 6500 en tête. Puis, c’est le
défilé de Donzère et encore une 6500
qui emmène le TEE 17. Les lumières
des voitures TEE Mistral 69 défilent
à toute allure. Dans la foulée, le Pro-
vence Express traverse Valence à
23h02, et croise le 5015 à Saint-Vallier-
sur-Rhône : toujours une CC 6500 !
Damien maintient sa vitesse de croi-
sière autour de 115/120 km/h. La 9329
est parfaitement à l’aise sur ce par-
cours, malgré les 702 t remorquées.
100 km/h de moyenne pour
un train ME 120
Vienne est traversée à 23h47. Après
Estressin, ralentissement et rappel de
ralentissement:nousarrivonsàChasse.
À 30 km/h, le Provence Express passe
devant le poste 2 et le BV de Chasse-
sur-Rhône. Arrêt à 23h56 au faisceau,
soit une moyenne départ-arrêt depuis
Orangede100km/htoutjuste:passimal
pour un ME 120! Il est vrai que c’est un
trainultra-prioritaire;d’ailleurs,enligne,
nous n’avons pas rencontré le moindre
avertissement fermé! Nous laissons à
Chassequelqueswagonsdestinésaumar-
chélyonnaisetenprenonsplusieursen
provenancedelarivedroite.Nousavons
maintenant 34 véhicules, pour 853 t.
LedépartdeChasseestdonnéà0h33.
Après le poste 1, on rejoint la voie 2

26 - ferrovissime
 © J.M. EICH
Les BB 9300 n’ont remorqué qu’exceptionnellement le Provence Express. Celle-ci stationne à Cerbère dans la livrée gris ciment appliquée
à la série à partir de 1985. La photo a été prise dans les années 1990. À l’époque, cette série de machines a l’occasion d’enlever des trains
d’agrumes venant d’Espagne composés, comme le Provence Express, de wagons couverts.

pour transiter par Perrache, comme

les rapides! D’ici Rungis, il n’y a plus
d’arrêts commerciaux et, sans être ex-
cessivementtendu,l’horairenécessitele
plus souvent de bien «s’en occuper»! La
vitesse limite est de 120 km/h jusqu’au
pont de la Croix Barret, puis 90 ensuite.
Les 100 km/h sont atteints en longeant
le triage de Sibelin. On croise l’Hispania
Express 377 en provenance de Ham-
bourg et Genève, remorqué par une
BB 9200. Le 90 est respecté sans un coup
de frein, puis c’est le pont sur le Rhône et
latraverséedelagaredeLyon-Perrache,
bien déserte à cette heure, sans arrêt à
30 km/h. Il est 0h53: 20 km en 20 mn,
les belles moyennes promises seront Voici le pupitre
pour plus tard! d’une BB 9300,
Après Perrache, notre vitesse limite similaire à
est de 110 km/h, puis de 120 km/h celui que Jean-
dès le BV de Vaise, 5 km plus loin. En Luc Bobier a
pu observer
pleine accélération avec 853 t, la 9300 lors de son
© F. DURIVAULT

donne tout ce qu’ellepeutentraversant accompagnement

le tunnel de Sainte-Irénée, en légère du Provence
rampe de 3 mm/m. ▶▶▶ Express.

ferrovissime - 27
Stars du rail

© Y. BRONCARD
Le Provence Express monte fruits
et primeurs à Paris
Dédié à l’acheminement des fruits et légumes des Bouches-du-Rhône et du Vaucluse
vers la Capitale, le Provence Express est l’héritier d’un train de messageries
direct connu sous le nom de Flèche des halles qui relie, dans les années 1950,
Avignon à Paris-Bercy en 11h15. À l’époque, le rail domine encore la route pour
le transport des denrées périssables. La concurrence des camions sur ce marché
bien spécifique a vraiment commencé durant la seconde moitié des années 1930.
Les transporteurs routiers s’intéressent d’abord aux produits les plus fragiles.
Après-guerre, les Bernard, Somua, Berliet et Unic sont chaque année plus
nombreux à emprunter les routes nationales 6 et 7 pour monter, en saison, les
abricots et les pêches vers les Halles de Baltard. Ils ont un avantage sur le train:
non contraints de suivre un horaire figé, ils offrent une souplesse qu’apprécient
coopératives fruitières et grossistes expéditeurs. À côté, la Flèche des halles
quitte Avignon à 11h00: beaucoup trop tôt pour satisfaire les chargeurs!
Voilà pourquoi est créé le Provence Express, dont le premier convoi quitte la
gare d’Orange le 27 mars 1961 en début d’après-midi, pour arriver en gare
de Paris-Bercy 8h06 plus tard. Juste le temps pour qu’un petit bataillon de
camions transfère caisses et cageots jusqu’aux halles parisiennes, où les
transactions entre grossistes et marchands de fruits et légumes se font la nuit.
La SNCF a bien fait les choses: la traction est confiée aux nouvelles BB 9200
en cours de livraison. Et 300 couverts UIC à deux essieux ont été affectés
en rames blocs à ce train de messageries circulant en Régime Accéléré. En
avril 1962, suite à la modification des freins des wagons, le Provence Express
est autorisé à circuler à 120 km/h, réduisant son temps de trajet à 7h20.
Jehan-Hubert Lavie
Vue latérale de la rame du Provence Express. Sur les
portes des wagons, une pancarte rappelle le nom du
train Provence Express écrit en vert sur fond blanc.

EN PLEINE ACCÉLÉRATION AVEC 853 T, LA 9300 DONNE TOUT

CE QU’ELLE PEUT EN TRAVERSANT LE TUNNEL DE SAINTE-IRÉNÉE,
EN LÉGÈRE RAMPE DE 3 MM/M
Nous croisons les grands
trains de nuit
Après Villefranche-sur-Saône, le
50564, bien à l’heure, croise le 183 Le
TrainBleuetmaintientunevitessecom-
prise entre 110 et 120km/h, conformé-
mentàlafiche-train.Mâconestfranchi
à 1h40: 91 km/h de moyenne depuis
le passage à Perrache, 82 km/h depuis
le départ de Chasse. À l’approche de
Tournus, les signaux nous indiquent
qu’onrentresurévitement:unarrêt-cir-
culation – arrêt facultatif qui peut être
supprimé d’office si les signaux sont
ouverts–estprévudanslamarche(sous
laformed’un[C]àcôtédel’horaire)pour
laisser passer le 5286 Riviera-Flandres.
Il se fait un tout petit peu attendre
et nous repartons avec 3 mn de retard.
Damien effectue la mise en vitesse
au cran par cran en observant l’am-
pèremètre pour gagner du temps et
atteint 120 km/h, vitesse qu’il main-
tient ensuite grâce à sa connaissance
de ligne pour faire une « marche au
trait». Chalon-sur-Saône est traversée à
2h22:uneminuteaétéreprise.Puison
croise l’Express 5059 à destination de
Hyères. Après les trains de soirée, c’est
letourdestrainsdenuit!Chagny2h30,
croisement de l’Express-Poste 5037,
Nuits-Saint-Georges 2h46: 114 km/h
demoyennedepuislepassageàChalon.
Après avoir «tiré dessus» jusqu’au bout,
on entre en gare de Dijon-Ville à 3h00,
presque à l’heure.
Mission accomplie pour Damien
qui a rassemblé ses affaires avant
Gevrey et descend rapidement de
machine. La relève est là, sur le quai.
Ici, c’est un arrêt [S], un arrêt de ser-
vice facultatif pour les besoins de la
traction.
L’arrêt de service
de Dijon-Ville
Il pourrait, comme l’arrêt [C] de
Tournus, être supprimé s’il n’y avait
pas de relève à Dijon… ce qui ne se
produirait, dans le cas de ce train à
l’horaire très étudié et intégré très tôt
dans les roulements traction, qu’en
cas de perturbations exceptionnelles!
Salutations d’usage et Hervé monte
à bord. Il s’installe rapidement, mais
sans précipitation: pose de la marche
du train sur le pupitre, consultation du
carnet de bord, desserrage de la rame
à 5,4 bars en mettant la surcharge, ser-
rage du frein direct puis commande de

28 - ferrovissime
surcharge sur arrêt lorsque la conduite
générale est bien remplie.
3h06: départ avec 2 mn de retard.
Sortie de gare à 30 km/h, puis vitesse
limite 110 jusqu’à Blaisy-Bas, en rampe
de 8 mm/mquasi continue: il va y avoir
du sport! Les crans passent, série-pa-
rallèle, transition, couplage parallèle,
shuntage: la 9329 a du répondant! Ce
sont des machines nerveuses très ap-
préciées par les conducteurs. Le 110 est
atteint rapidement: un vrai plaisir ! Les
viaducs se succèdent sur cette section
de ligne, aussi belle de nuit en cabine
que de jour, en voyageur…
À hauteur du BV de Mâlain, le 50564
croise le 9657, un train auto-couchettes
en provenance de Boulogne-sur-Mer.
On s’engouffre peu après dans le tunnel
de Blaisy, où la rampe n’est plus que de
4 mm/m. Hervé maintient néanmoins
© J.P. THERNISIEN

l’effort moteur, puis coupe la traction

justeavantlasortiedetunnel.Revenuà
l’airlibre,leProvenceExpressestdirigé
surlavoie2bisetpasseà3h25, toujours Un autre point de vue du poste de conduite depuis la place occupée autrefois
à 110 km/h, au BV de Blaisy-Bas. ▶▶▶ par l’aide-conducteur.

ferrovissime - 29
 Stars du rail

© J.P. THERNISIEN
La vision que l’auteur a du pupitre de la BB 9300 quand il se place derrière l’agent de conduite.

ON S’ENGOUFFRE PEU APRÈS DANS LE TUNNEL DE BLAISY, OÙ LA RAMPE N’EST

PLUS QUE DE 4 MM/M. HERVÉ MAINTIENT NÉANMOINS L’EFFORT MOTEUR

Tous les détails de la

© PHOTOS J.P. THERNISIEN

cabine d’une BB 9300

pour vous mettre
dans l’ambiance de
l’accompagnement réalisé
par Jean-Luc Bobier.

30 - ferrovissime
© Y. BRONCARD

Au début des années 1960, une BB 9400 livre des wagons vides pour le Provence Express à Sorgues-Châteauneuf-du-Pape.

Passage à Blaisy…
La ligne descend ensuite en pente
de 8 mm/m. La vitesse limite de notre
train, désormais de 120 km/h, est
rapidement atteinte en marche sur
l’erre. Il faut donc bientôt utiliser le
frein rhéostatique : la rame pousse
bien! Déverrouillage mécanique du
manipulateur de traction, lequel est
placé sur la position P puis sur “stop”,
progressiondesservomoteursJH,amor-
çage progressif des “génératrices”, puis
trois crans, “stop à +, stop”. Les 900 A
qui traversent le rhéostat et donnent
le tempo à ses ventilateurs après les
avoir bien réveillés font apprécier au
mécano la puissance de retenue de la
9300. Quelques à-coups sont percep-
tibles à chaque changement de cran.
Après Thénissey, la pente s’adoucit
et Hervé réduit l’effort de retenue. La
gare des Laumes-Alésia est traversée
à 3 h 41, toujours avec 2 mn de re-
tard. Bientôt, le frein rhéostatique
est inutile. Les gares s’enchaînent
comme dans une vidéo : Montbard,
Aisy, Nuits-sous-Ravières. À partir de
là et jusqu’à Saint-Florentin-Vergigny,
il n’y a plus que deux voies : ici, pas
question de traîner ! Hervé reprend
donc la traction par intermittence,
car le profil, moins sévère, devient en
dents de scie. C’est alors qu’on trouve
désormais moins tendue et le 50564
passe facilement à l’heure à Monte-
reau : la moyenne depuis Laroche est
tombée à 92 km/h.
L’arrivée à Rungis
On quitte maintenant l’itinéraire
des grands rapides pour prendre celui
des marchandises, des messageries ou
de quelques express de nuit: direction
Héricy, vitesse limite 110 km/h et pro-
fil facile. Hervé maintient la traction,
mais il lui suffit de rouler autour de
100 km/h pour tenir l’horaire. Puis à
5h50 on passe Melun à 70 km/h: direc-
tion Corbeil pour accéder à Rungis via
Juvisy, sans rebrousser à Valenton. Les
vitesses limites sont en général de 105
ou110etlamarcheesttracéeà87km/h.
Corbeil-Essonnes est traversée à
6h14 et Juvisy Poste B à 6h25: fini le
PLM, bonjour le P.O!
Le 50564 passe ensuite Athis-Mons,
traverse les tunnels des Noyers et de
la Faisanderie puis emprunte la voie
MG (dite « le cor de chasse ») qui va
lui permettre de rejoindre la ligne
de Choisy-le-Roi à Massy-Palaiseau.
Après Orly et Pont-de-Rungis, le Pro-
vence Express termine sa course à
l’intérieur des installations du MIN
de Rungis. En abordant le quai, Hervé
réduit sa vitesse à 15 km/h puis stoppe
son train au frein direct et serre aus-
sitôt le frein automatique pour éviter
les réactions « d’accordéon » dans la
rame : la vie ordinaire d’un train pas
vraiment ordinaire, qui participe à
l’alimentation en produits frais de
la région parisienne ! ◼
© F. DURIVAULT

le véritable plaisir de conduire ! La-

roche-Migennes est passée à 120 km/h,
à 4h35 : depuis Blaisy, 133 km ont été
parcourus en 1 h 10, à 114 km/h de Si les BB 9300 ont très rarement tracté le Provence Express, elles ont néanmoins remorqué
moyenne. Pas mal! Mais la marche est de nombreux trains de messageries, comme celui-ci, à Villeneuve, dans les années 1990.

ferrovissime - 31
 Les portraits du rail

PORTRAIT DU RAIL

LA CC 80001
ET LES LOCOMOTIVES CFD LOUÉES À LA SNCF
Texte : Frédéric Didelot

DES
TRANSMISSIONS
ORIGINALES EN
DIESEL !
Engagée sur Paris-Saint-Lazare/
Cherbourg (ici sur la photo) et sur Paris-
Montparnasse/Granville, la CC 80001
a été l’un des prototypes marquants
des années 1970 en traction diesel.
© J.H. RENAUD / COLL. R. THÉVENIN

32 - ferrovissime
ferrovissime - 33
Les portraits du rail
© C. SCHNABEL / COLL.H.DUPUIS
Trois prototypes 020 C
pour la voie normale
LES CFD DÉBUTENT EN VOIE NORMALE AVEC DES
LOCOMOTEURS MUNIS DE DEUX MOTEURS DIESEL.
D
ans le contexte de crise écono-
mique qui frappe la France au
début des années 1930, les CFD
sont, comme tous les réseaux
ferrés, confrontés à la hausse
de leurs coûts de production et
à la baisse de leurs recettes, aux-
quelles s’ajoute la concurrence
des transports routiers en plein
essor. Pour y faire face, les CFD se
lancent en 1936 dans la construction de deux
locotracteurs à voie métrique, plus souples et
▶ LES CFD, UN EXPLOITANT
CONSTRUCTEUR ◀
Constituée en 1881, à une époque où le réseau
français est en plein développement dans le cadre
du plan Freycinet, la compagnie des Chemins de
Fer Départementaux (CFD) a vocation à exploiter
des voies ferrées secondaires, à voie métrique ou
normale, d’intérêt général ou local. Au plus fort de
son activité, avant la Seconde Guerre mondiale,
elle exploite plus de 2000 km de lignes,
notamment les réseaux de Corse, du Vivarais et
de la Lozère, de la Charente et des Deux-Sèvres,
d’Indre-et-Loire, de la Dordogne, de l’Isère, de
Saône-et-Loire, de la Manche, de Seine-et-Marne…
34 - ferrovissime
En 1953/54, ce
locomoteur 020
C 110 est mis à
disposition de
la SNCF pour
remorquer le
train omnibus
marchandises
de la ligne Les
Laumes/Epinac.
moins coûteux que les locomo-
tives à vapeur.
En 1948, les CFD rachètent
l’ancien dépôt SNCF de Mont-
mirail, dans la Marne, pour le
transformer en atelier. Y se-
ront regroupés les personnels
d’autres sites, au fur et à mesure
des fermetures des réseaux ex-
ploités. Ne souhaitant plus dé-
pendre uniquement de la mise
à disposition de locomotives à
vapeur par la SNCF et décidés
à exploiter plus économique-
ment la ligne Chinon/Richelieu et le Réseau
du Morvan à voie normale, les CFD étudient la
construction de deux locomoteurs de 400 ch,
à deux essieux et à voie normale.
Deux moteurs diesel sont montés
sur chaque engin
Ces locomoteurs reprennent l’allure générale
des engins fabriqués pour la voie métrique,
mais avec un plus grand empattement (4,92 m
contre environ 2,40 m). Deux moteurs Wil-
lème 517P 8 cylindres de 180 ch sont installés,
permettant de rouler à 40 km/h, mais aussi
de tracter 200 t en rampe de 15 pour mille.
Le 020 C 110 A est affecté à Autun en octobre
1949, le 020 C 110 B à Richelieu en juin 1950.
 © J.H. RENAUD / COLL. R. THÉVENIN
Après avoir été affecté à Richelieu puis dans le Morvan, le locomoteur 020 C 110B est vendu à la Régie Mamers-Saint-Calais
où il porte le n°9 pour desservir les deux lignes sarthoises du réseau et l'antenne SNCF Thorigné/Montmirail-Melleray.

L’UN D’ENTRE EUX EST ESSAYÉ PAR LA SNCF AU DÉBUT DES

ANNÉES 1950 SUR LA LIGNE LES LAUMES/EPINAC
Un troisième tracteur, selon la dénomination
CFD, numéroté 020 C 113 est mis en service en
février 1951 pour assurer la réserve à Autun.
L’un d’entre eux est même essayé par la SNCF au
début des années 1950 sur la ligne Les Laumes/
Epinac. L’arrivée d’engins plus puissants et à
bogies sur le Morvan conduit les CFD à muter
le 020 C 110 A à Richelieu en décembre 1955.
Il y rejoint son frère 020 C 110 B, mais pour
peu de temps car celui-ci est vendu dès l’année
suivante au Mamers-Saint-Calais, qui l’utilise
jusqu’en 1978 sous le numéro 9, avant qu’il soit
cédé à l’entreprise de travaux publics Delolme
de Lentilly (69). Le 020 C 110 A est revendu à la
verrerie de Vayres (33) en 1969. Il est remplacé
en septembre 1969 par le 020 C 113 qui est
muté d’Autun à Richelieu, avant d’être vendu
à la Régie Ferroviaire Richelaise en 1974. ◼

ferrovissime - 35
Les portraits du rail
À Bapaume, au début des années 1960, la locomotive de 550 ch BB 402 roule pour
la Régie Départementale du Pas-de-Calais.
Les BB 200 partagés entre
locomoteurs et locomotives
F iables et solides, les 020 C connaissent une
rapide descendance avec quinze BB 200
construits entre 1953 et 1958. Si la vaste ca-
bine centrale est conservée avec des accès
latéraux, les performances sont revues à la hausse,
avec cette fois quatre essieux moteurs reliés par
des bielles et des moteurs plus puissants sur une
partie de la série.
L’un reçoit deux diesel Berliet de 200 ch (203),
septbénéficientdedeuxmoteursPoyaudde207ch
(208 à 212, 214, 215), un de deux moteurs Poyaud
de 250 ch (205) et trois de deux moteurs Poyaud
de 275 ch (202, 207, 213 après remotorisation).
Seuls quatre conservent des moteurs Willème de
180ch (201, 204, 206, 213 à l’origine). L’innovation
principale concerne la transmission, constituée
de deux boîtes Asynchro à quatre ou six vitesses
avec un combinateur, intégrant un coupleur
hydraulique Ferodo à la place d’un embrayage
classique sur les 020 C.
Une carrière jalonnée de mutations
Dix engins sont vendus à des industriels: cinq
aux mines de Zolder en Belgique (208, 210, 211,
212, 215), deux aux centrales GDF de Saint-Denis
(203) et Gennevilliers (206), deux à des industriels
de la sidérurgie ARBED au Luxembourg (201) et
SOLLAC (202), un au Pontcharra-La Rochette-Alle-
vard (204 : BB 06). Les CFD enconserventdeuxpour
leurs besoins à Richelieu (205) et Autun (207). La
Régie des Transport de l’Aisne (RTA) en acquiert
deux également (209 et 214 : devenant BB 401
36 - ferrovissime
▶ TRACTEURS, LOCOMOTEURS
ET LOCOMOTIVES ◀
Quand ils sont utilisés par la SNCF, les BB 200
sont des locomoteurs si leur puissance ne
dépasse pas 500 ch ou des locomotives au-delà
de ce seuil. Mais dans le vocabulaire des CFD,
tous les engins diesel de puissance moyenne ou
réduite sont appelés tracteurs. Rappelons qu’à
la SNCF, le terme de locotracteur s’appliquait à
© DR / COLL. J.P. VERGEZ-LARROUY
des engins d’une puissance égale ou inférieure
à 300 ch et celui de locomoteur de 301 à
500 ch. Définies en 1948 et rappelées dans une
notice technique de 1961, ces correspondances
entre puissances et désignations sont
devenues aujourd’hui obsolètes à la SNCF.
Jehan-Hubert Lavie
et 402), tandis que les Voies Ferrées des Landes
(VFL) en achètent un (213: BB 01) pour la desserte
Labouheyre/Mimizan puis Laluque/Tartas.
La carrière de certains tracteurs est évolutive.
Le 205 est loué par la SNCF en décembre 1955
pour effectuer des manœuvres à Montchanin.
Le 202 est revendu aux CFD Autun en 1976 avant
d’être cédé aux Voies Ferrées du Dauphiné en
1978 (T15) où il rejoint le 205 acquis dès 1962
(T10) pour les manœuvres entre Jarrie et Vi-
zille-Terrasse. Le 207 est muté par les CFD à
Richelieu en 1972 puis vendu aux VFL en 1979
pour rejoindre le 213. En 1970, les deux tracteurs
GDF changent de propriétaires: le 203 est vendu Le locomoteur de
à la Cimenterie d’Origny (02) alors que le 206 est 360 ch BB 213,
transféré sur une cimenterie à Voreppe (38). En devenu BB 01
1983, à la cessation de son activité marchandises, aux Voies Ferrées
la RTA se déleste de ses deux engins : le 209 est des Landes,
transféré sur un embranchement particulier à nous montre
sa silhouette
Beauvais (60), le 214 également mais à Fère-en-
parfaitement
Tardenois (02). ◼ symétrique avec
cabine centrale.
© J.P. VERGEZ-LARROUY

La BB 60602 manœuvre deux XR 8800 Michelin et une XR 7800 unifiée à Saint-Etienne le 21 septembre 1962.
La transmission Asynchro
se développe avec les BB 400
A près ces succès auprès des industriels, les
CFD cherchent à participer à la diésélisation
du parc SNCF. Trois nouveaux prototypes
sont lancés en 1958, qui reprennent les
solutions techniques éprouvées sur les BB 200,
notamment la transmission Asynchro.
Le premier prototype, du type 433 A, reçoit
deux moteurs Poyaud de 275 ch et conserve les
bielles reliant les essieux. Son esthétique globale
est revue, avec des capots et une cabine plus
anguleux (comme sur les Y 51100 et 7100), les
Acquise par les portes d’accès étant reportées sur les coursives
CFSTA en février latérales, en quinconce. Il est livré en juin 1958
1962, la BB 551 aux CFD à Autun et circule sur l’ensemble des
manœuvre à
lignes affermées du Morvan. Il sera vendu en
Provins en nous
montrant ses 1986 à la CCI de Colmar.
bielles.
© G. GERMAIN
© M. LAVERTU
Cinq tracteurs de série sont construits à la suite.
Le 433 B est acquis en mars 1960 par la RTA, où
il porte le numéro BB 403, puis sera vendu en
1983 à la sucrerie de Guignicourt (02). Comme
les autres engins que possède cette Régie, il est
équipé à l’origine de deux moteurs Poyaud de
207 ch, qui seront par la suite remplacés par des
Poyaud de 275 ch.
Les BB 60601 à 3 louées à la SNCF sont
affectées à Saint-Etienne et à Montchanin
Trois autres engins sont pris en location par
la SNCF : les 433 C, 433 D et 889, qui sont imma-
triculés BB 60601 à 3 respectivement en mars
1960, janvier 1961 et novembre 1961. Le 60601,
équipé de deux moteurs Poyaud de 275 ch sura-
limentés, est positionné à Saint-Etienne, avant
d’être restitué aux CFD dès 1963. Il est alors
vendu à la RTA en juillet 1964, qui le renumé-
rote BB 404 à la suite du BB 403. Devenu sans
activité en septembre 1981 lors de la reprise de
ce réseau par la SNCF, il est cédé en 1984 à la
coopérative agricole Roquette de Lestrem (62).
Le 60602, qui reçoit deux moteurs Poyaud
atmosphériques de 300 ch, est également affecté
à Saint-Etienne jusqu’en 1962. Il est alors vendu
au Pontcharra-La Rochette-Allevard (PLA) en ▶▶▶
ferrovissime - 37
Les portraits du rail
TROIS ENGINS SONT PRIS EN LOCATION PAR LA SNCF
QUI SONT IMMATRICULÉS BB 60601 À 3
▶▶▶ juillet 1963, où il devient le BB 07 à la suite
du BB 06 (type 200) acquis en 1955. Les deux
seront ferraillés à Culoz en 1986.
Le 60603, pourvu des classiques moteurs
Poyaud de 275 ch suralimentés, est basé à
Montchanin jusqu’en 1966, où il rejoint le ré-
seau CFD d’Autun. Il est revendu à un industriel
du nord de la France en 1986.
La BB 60601 louée à la SNCF. Elle est décorée en vert Alsace, bandes de visibilité jaune paille, des teintes spécifiques aux CFD
qui souhaitaient employer des livrées particulières.
38 - ferrovissime
Le dernier engin de la série, 433 E, équipé de
deux moteurs Poyaud de 275 ch, est acquis par
les CFSTA en février 1962 (devenus CFTA en 1966)
qui le numérotent BB 551. Basé à Provins (77),
il parcourt la ligne Longueville/Villiers-Saint-
Georges. En 1986, il est muté à Sézanne pour
assurer des dessertes céréalières vers Anglure
et Esternay. ◼
© T. LELEU
 Entre 1961 et 1966, la BB 60603 est louée à la
SNCF. Affectée au Dépôt de Montchanin, on la voit
ici en gare d’Avallon, en tête de l’Express 2056 pour
Paris-Lyon qu’elle remorque jusqu’à Laroche (l’été,
car elle ne chauffe pas la rame: une A7myi PLM, trois
B10smyfi Bruhat et un fourgon Dqm OCEM 30).

▶ LA TRANSMISSION ASYNCHRO EST

MONTÉE À LA SNCF SUR LES Y 7400,
LES BB 71000 ET UN X 2800 ◀
Les CFD ne sont pas adeptes de la transmission électrique,
qu’ils jugent trop lourde et compliquée, d’autant qu’elle
nécessite une maintenance avec des compétences
particulières. Ils préfèrent les transmissions mécaniques, qui
ont un meilleur rendement et sont plus rudimentaires, donc
plus faciles à entretenir. La principale problématique résulte
non pas du dimensionnement des dentures des engrenages,
mais de la difficulté à accoupler les parties en mouvement
lors des changements de vitesse ou de combinaison.
Pour les faibles puissances, cette difficulté est résolue par
l’utilisation de synchroniseurs, qui agissent comme des freins
pour absorber la différence entre les énergies cinétiques
© Y. BRONCARD des masses à accoupler (arbre moteur, pignons), mais leur
dimensionnement maximum ne peut excéder 200 ch.
Pour contourner cette contrainte pour les puissances
plus importantes, les CFD mettent au point en 1953 une
transmission dénommée Asynchro, qui s’affranchit de tout
dispositif de synchronisation (d’où son nom commençant
par le a privatif). Elle comporte un embrayage frein en
entrée (côté arbre moteur) et une roue libre en sortie (côté
engrenages), ce qui permet d’isoler totalement les pièces
en mouvement qui sont arrêtées lors du changement de
vitesse. Les manœuvres de crabotage entre les arbres
et les engrenages sont réalisées lorsque ces pièces sont
Rare photo de la immobilisées, en moins d’une seconde. Cette technique
BB 551 en tête d’un
omnibus devant entraîne une rupture de l’effort de traction et donc un léger
l’ancien BV de à-coup lors du changement de vitesse. Il est néanmoins
Provins. Elle est possible d’y remédier en installant deux groupes moteurs
© DR / COLL. LR PRESSE

en tête d’une rame et en décalant de quelques instants le passage des

de voitures semi- vitesses d’un groupe moteur par rapport à l’autre.
métalliques à deux
essieux et portières La variation de couple se fait mécaniquement en changeant
latérales type DR 27. les vitesses. Comme il n’y a pas de convertisseur mais
un coupleur, il est nécessaire de disposer d’un certain
nombre de rapports de vitesse (6 à 8 habituellement) pour
disposer d’un couple important à basse vitesse qui devient
dégressif au fur et à mesure de la montée en vitesse.
Au total, 630 transmissions Asynchro sont produites. Outre
les matériels CFD, elles équipent plusieurs séries SNCF.
À titre d’essai, l’X 2803 reçoit cette transmission de janvier
1962 à mai 1966. Sur la base de l’Y 7192 à transmission
hydraulique, l’Y 7001 joue le rôle de prototype en recevant
cette transmission Asynchro montée sur un locotracteur
SNCF. Les essais mettent en évidence un gain de 20% sur
la consommation de carburant et des montées en vitesse
© J.P. DEMOY

plus rapides. Ils débouchent sur la construction des Y 7401

à 7488 entre 1963 et 1972. À cela s’ajoutent les trente
En mai 1980, à Cravant, la BB 60603 prend encore en charge trains de desserte et trains BB 71000, livrées en 1965-66 sur la base du 433 F.
de travaux. Ici, l’acheminement des wagons-étalon pour la vérification des bascules.

ferrovissime - 39
Les portraits du rail

La BB 60001,
prototype
des BB 71000

U n nouveau prototype, désigné 433 F, est

mis en service en avril 1959. S’il dispose des
traditionnels essieux accouplés par bielles,
il reçoit en revanche un moteur unique MGO
de 500 ch, suralimenté, qui est prêté par la SNCF.
De ce fait, sa cabine est décentrée vers l’arrière.
Mis à disposition de la SNCF, il est immatri-
culé Y 9006 comme un locomoteur et effectue
des manœuvres à Dijon, puis dans les différents
chantiers autour de la gare de Paris-Saint-Lazare,
où ses accélérations brutales et ses à-coups ne sont
pas toujours très appréciés.
En juin 1961, après une présentation offi-
cielle en compagnie d’autres engins CFD, il est
pris en location par la SNCF et possède alors
un moteur Poyaud V12 de 600 ch : devenu une
locomotive, son immatriculation devient 040
DI 1 puis BB 60001 en 1962. Elle est testée sur
plusieurs sites du réseau, en particulier à Chartres,
Poitiers, Avignon, Pas-des-Lanciers, avant d’être
finalement affectée à Saint-Etienne pour assurer
un service de manœuvres.
L’expérience acquise en tant que prototype
conduit la SNCF à commander trente BB 71000
en 1963-64 (étudiés dans Ferrovissime 75 de mai/
juin 2015). Sa location prend fin en juin 1968 et
elle est alors reprise par les CFD à Autun. Elle
parcourt la ligne du Morvan, d’Etang-sur-Arroux
à Laroche-Migennes et s’avère bien utile pour as-
© Y. BRONCARD
surer le remplacement des 5-242 TC qui viennent
de s’éteindre. Elle est vendue en mai 1978 pour
assurer des manœuvres dans un embranchement
particulier des Ciments Lafarge au Maroc. ◼
© T. LELEU

,
À la SNCF, la BB 60001 est peinte
Paris/Le par les
Mans, CFD
est en vert Alsace,
toujours là… bielles rouge vif, bandeaux jaune jonquille, traverses de choc jaune jonquille
bordées d’un cadre rouge vif (déjà vu sur le BB 551 de Provins).

40 - ferrovissime
 La BB 60001 dans l’une de ses affectations à la SNCF. Si ses à-coups au démarrage et au passage des vitesses ne sont guère appréciés,
sa consommation raisonnable de gazole fait, par contre, le bonheur des gestionnaires.

Gros
© Y. BRONCARD

plan
sur un
bogie.

ferrovissime - 41
Les portraits du rail

IL EST PRIS EN LOCATION PAR LA SNCF EN 1962, QUI L’IMMATRICULE

BB 60432 ET L’AFFECTE À SAINT-ETIENNE AFIN DE COMPARER LA
TRANSMISSION ASYNCHRO AVEC CELLE, ÉLECTRIQUE, DES BB 63500

42 - ferrovissime
 Sur la ligne
Cravant-Bazarnes/
Avallon affermée
par la SNCF aux
CFD, la BB 60432
passe en gare de
Vermenton avec
un train de ballast.

La silhouette de

© Y. BRONCARD
la locomotive
est parfaitement
symétrique.

La BB 60432 abandonne les bielles

L
© Y. BRONCARD

e troisième prototype, du type 432, appa- Notez bien: les locomotives des CFD affectées
raît en juin 1959 avec deux moteurs MGO aux trains de travaux feront l’objet d’un article
de 400 ch. Il n’a pas de bielles, ses bogies qui paraîtra ultérieurement.
étant d’un type proche de ceux équipant les D’autre part, les tracteurs ou locomotives
BB 63000. Son esthétique est différente, avec des CFD conçus ou transformés pour la voie
toujours une cabine centrale, mais des capots métrique seront également traités dans une
plus longs et plus hauts. étude spécifique. ◼
Il est pris en location par la SNCF en 1962,
qui l’immatricule BB 60432 et l’affecte à
Saint-Etienne afin de comparer la transmis-
sion Asynchro avec celle, électrique, des BB
63500 d’une puissance similaire. Cette location
cesse en octobre 1968 : il est récupéré par les
Aux CFD, les
bandes jaunes
CFD à Autun, où il poursuit sa carrière sur les
de visibilité lignes du Morvan et remplace les 5-242 TC

© Y. BRONCARD
ne suivent, qui viennent d’être radiées, en particulier sur
en général, Autun/Laroche-Migennes. Il est ensuite vendu
que les arêtes à SPENO en 1986 après avoir été remotorisé
horizontales. avec deux moteurs de 600 ch, pour assurer la Vue prise dans les années 1960 à Saint-Etienne, notez que
traction de trains de travaux. les CFD sont fidèles aux tampons ronds et aux fanaux d’angle.
© T. LELEU

La BB 60432 reste fidèle au vert pâle du parc CFD.

© Y. BRONCARD

ferrovissime - 43
Les portraits du rail
La CC 80001 Belphégor
A u début des années 1960, les CFD cherchent
à démontrer que leur transmission Asyn-
chro est compatible avec les fortes puis-
sances. Plutôt que de développer une loco-
motive spécifique d’environ 3 000 ch, les CFD
préfèrent acquérir les deux CC 80000 (ex-060
GA 1 et 2), construites par Renault en 1959 et
1961, pour expérimenter un générateur à pistons
libres Pescara accouplé à une turbine Rateau et
sans emploi depuis 1963. Ce choix leur permet
de réutiliser une plateforme immédiatement
disponible, ce d’autant que ces locomotives
disposent d’une transmission purement mé-
canique par arbres et cardans. Néanmoins, seule
la CC 80001 est transformée par les CFD, la CC
80002 servant de banque d’organes: elle ne sera
finalement détruite qu’à la fin des années 1970.
44 - ferrovissime
Une locomotive puissante
à transmission mécanique
La CC 80001 adopte une nouvelle livrée à
base de bleu et blanc. Elle conserve son surnom
Belphégor, qui lui avait été donné en référence
à sa livrée originale reçue chez Renault à base
de teintes bleu clair et blanc, empruntées à la
gamme automobiles de la Régie. Il peut provenir
aussi de ses circulations nocturnes (les 060 GA
assuraient des trains RA entre La Rochelle et
Nantes-Etat), du sifflement des turbines et du
bruit de marteau-pilon de son générateur à pis-
tons libres. La caisse, les bogies et la transmission
de la CC 80001 sont conservés. Quelques modi-
fications sont apportées au niveau esthétique :
un troisième feu est ajouté, les trompes à deux
tons remplacent le sifflet d’origine, les portes
 Premiers tours de roues
dans le Morvan pour la
CC 80001, en 1967.

▶ L’ABANDON DE LA TRANSMISSION ASYNCHRO ◀

Au milieu des années 1970, des études sont lancées pour
remplacer la transmission Asynchro, qui se révèle dépassée par
les avancées technologiques des transmissions hydrauliques.
Une nouvelle transmission hydromécanique, dite powershift, est
mise au point par les CFD pour des puissances de 300 à 900 ch.
Des nouvelles locomotives sont construites, destinées
essentiellement à l’exportation, à l’industrie et aux entreprises
de génie ferroviaire. En parallèle, plus d’une trentaine de
locotracteurs, à transmission hydraulique et à deux ou trois
essieux, à voie métrique ou normale, sont aussi livrés pour
assurer des dessertes d’embranchements particuliers ou
d’usines. C’est une nouvelle ère qui commence alors pour
l’atelier CFD de Montmirail, renommé CFD-Industrie.

© G. DAUVET
© Y. BRONCARD

En août 1973, la CC 80001 assure l’Omnibus 6436 Argentan/

Paris-Montparnasse.

LES CHANGEMENTS DE VITESSE NE SE FONT PAS EN MÊME

TEMPS SUR LES DEUX MTOTEURS, POUR NE PAS COUPER
COMPLÈTEMENT L’EFFORT
d’accès au centre de la caisse sont condamnées
et soudées. En revanche, l’ensemble de la mo-
torisation d’origine est démonté. À la place
sont installés deux moteurs SEMT-Pielstick
12PA4 (montés sur les BB 66691 et 92, version
12 cylindres du 16PA4 qui équipe la famille des
BB67000), développant chacun 1100 kW (1500ch
à 1 550 tr/mn). Chaque moteur est associé à un
coupleur hydraulique Ferodo 19 pouces, en lien
avec une boîte de vitesses Asynchro à 8 rapports
de vitesse pour chaque sens de marche. Lors
d’un changement de rapport, la boîte de vitesses
est isolée du moteur par un embrayage-frein,
tandis qu’une roue libre l’isole des engrenages
reliés aux essieux. Les changements de vitesse
ne se font pas en même temps sur les deux
groupes moteurs, de façon à ne pas couper com-
plètement l’effort moteur et éviter les à-coups.
Le passage des vitesses peut s’effectuer soit de
façon automatique, soit de façon manuelle par
un grand levier.
La 80001 doit convaincre la SNCF
Ce prototype CFD vise à convaincre la SNCF
non pas d’acheter directement des locomotives
de forte puissance (les commandes des A1A A1A
68000/500 et BB 67000/300 sont en cours), mais
d’utiliser la transmission Asynchro sur les ▶▶▶

ferrovissime - 45
Les portraits du rail

CE PROTOTYPE CFD VISE À CONVAINCRE LA SNCF

D’UTILISER LA TRANSMISSION ASYNCHRO SUR LES FUTURES
LOCOMOTIVES DIESEL DE LIGNE DE FORTE PUISSANCE

46 - ferrovissime
 Passant à Pont-
Cardinet en
août 1968, la
CC 80001 assure
l’Express 309
Paris-Saint-
Lazare/Cherbourg.

© J. CHAUSSARD / COLL. J. BANAUDO

La CC 80001
participe aux travaux
de reconstruction de
la ligne Nice/Coni.

▶▶▶ futures locomotives diesel de ligne de forte reusement, les commandes des CC 72000 sont
© J. PORCHER

Sur Paris/Cherbourg,
la CC 80001 parvient
à convaincre, mais,
faute de chauffage,
elle ne peut tracter des
voitures métallisées ou
OCEM que l’été. Seules,
les rames de voitures
USI à chauffage
autonome parviennent
à résoudre le problème.
puissance, alors en cours de gestation. L’argu-
ment principal est le rendement de cette trans-
mission, bien supérieur à celui d’une transmis-
sion électrique : environ 95% de la puissance du
moteur diesel est disponible pour la traction,
contre 80 % avec une transmission électrique.
Mise en service en juillet 1967, elle est d’abord
essayée par les CFD sur la ligne du Morvan, où
elle remorque des trains lourds issus des carrières
de la région et des trains de bois jusqu’à la fin
du printemps 1968. Les bons résultats obtenus
incitent les CFD à proposer cette locomotive en
location à la SNCF, pour la tester sur un service
en ligne. Elle est mutée à Caen en juin 1968,
avec les pièces de la CC 80002, notamment les
bogies. Aux côtés des A1A A1A 68000, elle est
utilisée sur l’axe Paris-Saint-Lazare/Caen/Cher-
bourg et sur l’antenne vers Coutances en tête
d’express, de trains de messageries ou de mar-
chandises. Elle s’avère fiable et convaincante,
parvenant à tracter 955 t en palier à 128 km/h
ou 580 t à 81 km/h en rampe de 10. Malheu-
déjà intervenues et la SNCF ne souhaite pas
commander des locomotives bimoteur (cf. les
prototypes BB 69000 et CC 70000, restés sans
suite). L’arrivée des ETG puis des RTG sur cette
ligne conduit à repositionner Belphégor sur la
ligne Paris-Montparnasse/Argentan/Granville,
tant en tête d’express que d’omnibus ou, les
nuits des dimanches aux lundis, un train de
messageries.
Détachée au Dépôt d’Argentan
Elle est détachée à Argentan en 1972, dont
le dépôt est mieux positionné pour assurer ces
dessertes. Sur Cherbourg, elle avait remplacé
sans difficulté une UM de BB 67000. Sur Paris/
Granville, quand elle est indisponible, une UM
de A1A A1A 68000 est même nécessaire pour la
remplacer sur les trains lourds. L’inconvénient
majeur de la CC 80001 reste son impossibilité
de chauffer : elle n’est donc utilisée, comme les
BB 67000 et A1A A1A 68000/500, qu’en tête de voi-
tures USI équipées d’un système de chauffage ▶▶▶

Comme pour ses machines de plus aible puissance, les C D ont adopté, pour la 80001, les couleurs SNC mais dans des tons très di érents.
Le bleu est beaucoup plus vif.
© Y. BRONCARD

ferrovissime - 47
Les portraits du rail

© G. DAUVET
En escale entre deux trains, Belphégor se repose au pied du PRS de Montparnasse en 1973.

© M. THUILLIER
En mai 1984, la CC 80001 est toujours fidèle au poste aux couleurs de D&G.

48 - ferrovissime
© Y. BRONCARD
Jusqu’en 1972,
la CC 80001
reste fidèle à ▶▶▶ autonome Avialex. À partir de 1976, les
la ligne Paris/ USI à chauffage autonome sont remplacées
Cherbourg avant
d’être détachée par des USI à chauffage électrique, associées
à Argentan. à des BB 67300 chauffantes. La CC 80001 est
donc reléguée à des services supplémentaires
ou omnibus, ainsi qu’à des trains de marchan-
dises. La rupture d’un des arbres moteurs en
novembre 1977 entraîne son retrait de service.
Or, ni la SNCF, ni les CFD ne souhaitent financer
la réparation.
L’INCONVÉNIENT MAJEUR DE LA CC 80001
RESTE SON IMPOSSIBILITÉ DE CHAUFFER
Contre toute attente, elle est finalement ré-
parée aux ateliers de Montmirail, car la société
de travaux de voies Desquenne & Giral (D&G)
cherche une locomotive puissante, fiable, avec un
couple important à faible vitesse. Sortie d’atelier
en août 1978, elle est d’abord testée sur la ligne du
Morvan, puis utilisée pour la reconstruction de la
ligne Nice/Coni qui s’étale jusqu’en octobre 1979,
après avoir transité par Modane et Turin.
Une troisième vie aux travaux
Désormais prénommée Lucie, en hommage
à une aubergiste voisine de la ligne, elle donne
toute satisfaction sur cette ligne de montagne
comportant de fortes rampes et de nombreux
tunnels. Elle est achetée à l’automne 1979 par
D&G, qui la repeint dans une livrée orange
à bandes et toiture blanches. Elle est alors
positionnée sur le chantier de la LGV Paris-
Sud-Est en cours de construction pour remor-
quer des trains de ballast et de pose de voie.
Elle est ensuite utilisée au fil des chantiers
de RVB dans différentes régions françaises
(Île-de-France, Limousin, zone de Miramas). Sa
troisième carrière s’achève
en 1985, D&G ne souhaitant
pas procéder à l’onéreuse ré-
vision de ses moteurs et de
sa transmission (le coût est
estimé à 3 millions de francs).
Elle est remplacée par des
V200 allemandes, certes moins puissantes,
mais couplables en UM.
En 1989, son constructeur d’origine, Renault,
désire la restaurer pour la présenter dans son
futur musée. Elle reste propriété de D&G, qui
souhaite le maintien de la livrée portant ses
couleurs. Elle est alors garée dans leurs ateliers
des Mureaux jusqu’en juillet 1992, puis trans-
férée dans les ateliers Renault de Meudon, à
proximité de l’île Seguin, avant de rejoindre
un hangar de l’usine de Flins en novembre
1993, aux côtés de l’autorail Panoramique X
4204. Sa remise en état n’a cependant toujours
pas débuté. ◼
ferrovissime - 49
Les portraits du rail

© G. GERMAIN
La BB 551 des CFTA Provins en gare de Villiers-Saint-Georges en 1973.

Caractéristiques des
engins CFD à transmission

© DR / COLL. J.P. VERGEZ-LARROUY

classique et Asynchro
C’est avec ce 020 C 110A que l’aventure de constructeur d’engins
à voie normale a commencé pour les CFD.

Divers 020 C 200 400 432 / 433 60001 80001

Longueur 5,30 à 6,40 m 10 m 11,030 m 10,75 m 14,020 m 11,740 m 21,300 m
Largeur 2,10 à 2,40 m 3m 2,90 m 2,50 m 2,96 m 2,960 m 2,880 m
Hauteur 3,0 à 3,2 m 3,48 m 3,50 m 3,75 m 3,900 m 3,885 m 4,220 m
Masse 15 à 18 t 33 t 42 à 52 t 32 t 68 t 50 t 108 t
Nombre d’essieux 2 ou 3 2 4 4 4 4 6
Nombre de moteurs 1 ou 2 2 2 2 2 1 2
CLM, Berliet, V8 MGO puis 12 PA 4 SEMT
Type de moteur Willème, Renault Willème Poyaud Poyaud Poyaud V12 Poyaud Pielstick
Puissance du moteur 85 à 90 ch 180 ch 207, 250, 275 ch 207 ch 207 ou 275 ch 650 ch 1500 ch
Vitesse 40 à 45 km/h 40 km/h 50 km/h 45 km/h 70 km/h 60 km/h 130 km/h
Années de mise en service 1936 à 49 1949-51 1953-57 1962-66 1959-61 1959 1967

50 - ferrovissime
© Y. BRONCARD

En 1972, la
BB 60001

Les CFD sur le Morvan

stationne en gare
d’Autun, sur une
voie parallèle à

T
celle qui reçoit
l’express de Paris,
alors composé de ous les engins diesel à voie normale réa-
▶ AFFECTATION DES ENGINS
voitures OCEM RA.
lisés par les CFD ont été essayés dans le
Morvan. Voici pourquoi. En 1939, les CFD
sont désignés pour exploiter sous le régime
de l’affermage les lignes du Morvan Avallon/
ET PÉRIODE DE CIRCULATION ◀
Dracy-Saint-Loup et Epinac/Dijon. La SNCF met 020 C 110 A 10/1949 à 12/1955
à disposition des locomotives à vapeur, à charge 020 C 113 2/1951 à 9/1969
pour les CFD de les conduire et de les exploiter BB 207 8/1955 à 1972
comme bon leur semble en tête de leurs trains. 433 A 6/1958 à 1986
En parallèle, les CFD participent, cette fois sous
le régime du concours-traction, à la conduite de 603 (ex 60603) 1966 à 1986
locomotives à vapeur SNCF sur les lignes Avallon/ 80001 7/1967 à 5/1968
Laroche-Migennes, Autun/Etang/Montchanin et 433 F (ex 60001) 6/1968 à 3/1978
Autun/Dracy/Epinac, dont l’exploitation reste 432 10/1968 à 1986
du ressort de la SNCF.
À partir de 1948, les CFD souhaitent ne plus BB 202 1976 à 1978
dépendre exclusivement des moyens de trac-
tion fournis par la SNCF. Ils utilisent donc, en les BB 207, 433A, 603 sont préférés sur les trains
parallèle aux 5-242 TC fournies par la SNCF, des légers, les 433F et 432 étant réservés aux trains
tracteurs diesel construits dans leurs ateliers lourds entre Autun et Laroche. En 1979, cinq
de Montmirail et basés à Autun. BB 71000 de Nevers sont mises à disposition par
À partir de 1967, les 5-242 TC sont radiées. la SNCF pour se substituer aux locomotives CFD.
Seul le parc CFD est utilisé pour assurer la trac- En 1988, ces BB 71000 sont remplacées par des
tion des trains de marchandises, transportant BB 63000, avant que les CFD achètent quatre Class
majoritairement des produits de carrière et du 20 anglaises, numérotées 2001 à 2004, utilisées
bois, mais aussi des produits sidérurgiques et de 1993 jusqu’à la fin du contrat d’affermage qui
du coke. En fonction des tonnages à remorquer, intervient en 1996. ◼

ferrovissime - 51
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LES PLAQUES ET FEUX DE
SIGNALEMENT ET DE CLÔTURE
Pontivy le 3 novembre 1979. Assuré par l’X 3971 du centre de Rennes, l’Omnibus 8580 signale, par sa plaque verte à liseré blanc
portée à l’arrière, qu’il est la dernière circulation avant la période de fermeture de la ligne à destination de Saint-Brieuc. Notez que
les écrans translucides rouges ont été posés du côté opposé au liseré blanc.
N
ombre de nos lecteurs
seront sans doute
étonnés:surcertaines
lignes, souvent à voie
unique, certes, mais
parfois aussi à double voie,
il a existé des passages à niveau ne
disposant ni de dispositifs d’annonce
des trains, ni du téléphone. Et cela
alors que les premiers TGV roulent
déjà à 270 km/h entre Paris et Lyon !
Incroyable ? Pas tant que ça…
À l’époque, l’objectif prioritaire
en matière de PN, qui est mené à
marche forcée, est de les supprimer
ou de les automatiser. De ce fait, tout
investissement dans des moyens de
communication destinés aux gardes
Jusqu’aux années 1980, les gardes de certains PN ne
pouvaient connaître la circulation que par des moyens
rustiques. Retour sur une époque pas si lointaine…
deviendrait vite inutile, en raison de
leur disparition programmée.
Les informations connues suffisam-
ment à l’avance sont évidemment dis-
tribuées par le courrier de service, les
fameux «plis de service», mais pour les
modifications de circulation inopinées,
comment faire ? Tout simplement en
utilisant les trains pour fournir aux
gardes des PN concernés des rensei-
gnements sur la circulation, au moyen
de signaux particuliers.
Cœur de métier
© J.H. LAVIE
Texte: Michel Boumier
Informer les PN en utilisant
les signaux portés par les trains
On sait que les trains portent à
l’avant et à l’arrière une signalisation
dont le but est d’en repérer les extré-
mités et le sens de marche, mais aussi
(et surtout !) de donner aux intéressés
l’assurance que le train est complet.
En septembre 1958, une révolution
intervient dans la signalisation d’ar-
rière des trains: les feux dits « de côté »
et l’utilisation de drapeaux de ▶▶▶
ferrovissime - 53
Cœur de métier
Passant à Charmont, l’X 3983 remorquant une XR 7800 porte le signal de clôture sous la forme d’un écran vert disposé sur son phare
avant droit. Il signale qu’il est le dernier train avant une période de fermeture de la ligne Troyes/Châlons-sur-Marne.
▶▶▶ signalement vont être suppri-
més, en raison de la mise en place
progressive d’un nouvel équipement
unifié des voitures et des wagons,
constitué par deux porte-signaux
installés au-dessus des tampons.
La signalisation complémentaire
s’adressant aux gardes des PN, appli-
cable à partir de cette époque, utilise
dorénavant des feux et des plaques
circulaires de couleurs différentes.
Les lignes concernées sont de deux
sortes et sont désignées au livret de
la marche des trains (L.M.Tr.) par les
mentions « ligne à signalement obli-
gatoire» ou «ligne à signal de clôture».
Ces deux notions peuvent s’appliquer
à une même ligne, car elles répondent
à des besoins différents.
Le critère de désignation d’une
ligne comme étant à « signalement
obligatoire » est le non équipement
des PN en avertisseurs automatiques
de l’arrivée des trains. Afin de facili-
ter le service des gardes, la mise en
54 - ferrovissime
marche des trains non réguliers doit
leur être signalée par le train précédent
de même sens, qui peut être le dernier
train de la veille. Pour cela, il est fait
usage d’une plaque circulaire placée
sur la face arrière du dernier véhicule,
blanche pour signaler un train faculta-
tif, spécial ou à marche indéterminée,
jaune pour un train supplémentaire.
La nuit, la plaque est remplacée par
un feu de même couleur.
Les lignes à signalement
obligatoire
Lorsqu’exceptionnellement, en cas
de circulation d’un train de secours
par exemple, ce signalement n’a pas
pu être effectué, l’agent-circulation
expédiant le train non régulier donne
au mécanicien, par écrit, l’ordre de
siffler à plusieurs reprises aux abords
des PN qui lui sont désignés et de régler
sa vitesse de manière à pouvoir s’arrê-
ter avant le PN au cas où les barrières
seraient ouvertes.
© J.H. RENAUD
Sur certaines lignes désignées au
Livret de la marche des trains (L.M.Tr.)
« ligne à périodes de fermeture à la
circulation», mention complétée si né-
cessaire par « et à signal de clôture », le
service des trains est suspendu pendant
certaines périodes, notamment la nuit,
au cours desquelles le gardiennage des
PN n’est pas assuré.
Lorsqu’il peut parfois y avoir un
doute sur le dernier train circulant
avant la cessation du service des
PN, notamment si une ou plusieurs
marches facultatives sont tracées der-
rière le dernier train régulier précé-
dant certaines périodes, un signal dit
de clôture, constitué par une plaque
circulaire verte ou un feu vert la nuit,
est utilisé pour autoriser les gardes de
PN à quitter leur service. Ce signal est
placé à l’arrière, sur le dernier véhi-
cule, ou à l’avant du dernier train de la
période d’ouverture de la ligne. Il est
souvent placé à l’avant sur les lignes
« à signalement obligatoire », pour évi-
 © J.F. BRÉTÉCHÉ
En gare de Saint-Eloy-les-Mines, dans les années 1960, cet X 3600 (ABJ4) porte à l’arrière la plaque circulaire blanche indiquant
qu’un train spécial ou à marche indéterminée de même sens est annoncé. Les gardes des PN concernés doivent donc s’attendre à
son arrivée à n’importe quel moment, pendant leurs heures de service.

ter que le dernier véhicule supporte
trois signalisations différentes au cas
où il doit aussi signaler un train non
régulier. Toutefois, il est possible de
faire porter les trois signalisations
par le dernier véhicule, en fixant un
porte-signal amovible au crochet de
traction pour y placer l’une des deux
signalisations particulières.
Les lignes à signal de clôture
La ligne peut être fermée sens par
sens, c’est-à-dire que le dernier convoi
de chaque sens porte un signal de clô-
ture. Cette méthode est notamment
utilisée en voie unique, lorsque ces
deux trains se croisent sur la section
concernée. Cela évite ainsi de confier
à la gare de croisement la mise en ▶ RÈGLEMENT S1E DE 1976 ◀
place des signaux de clôture (risque
de pertes de temps et d’oubli).
Par ailleurs, sur les lignes désignées
au L.M.Tr. « ligne à périodes de non
gardiennage des PN », mention com-
plétée si nécessaire par «et à signal de
clôture», les PN peuvent être ouverts et
non gardés pendant l’ouverture de la
ligne, entre le passage de deux trains
désignés. Pour les mêmes raisons que
Le signal de clôture
celles indiquées précédemment, il peut
être fait usage du signal de clôture, et
cela dans les mêmes conditions. ▶▶▶

UN SIGNAL DIT DE CLÔTURE, CONSTITUÉ PAR

UNE PLAQUE CIRCULAIRE VERTE OU UN FEU
VERT LA NUIT, EST UTILISÉ POUR AUTORISER
© DR

LES GARDES DE PN À QUITTER LEUR SERVICE L’annonce d’un train non régulier

ferrovissime - 55
Cœur de métier

© B. WEYLAND
Jour de pointe en gare de Dinard le 22 août 1985: la BB 67406, remorquant l’Express 3682 à destination de Paris-Montparnasse,
porte à l’avant le signal blanc annonçant la mise en marche d’un train non régulier de même sens.

▶▶▶ Lorsqu’exceptionnellement un
train doit circuler pendant une pé-
riode de non gardiennage des PN, si
la reprise du gardiennage n’a pu être
obtenue, l’agent-circulation expédiant
le train donne au mécanicien, par écrit,
l’ordre de siffler à plusieurs reprises
aux abords des PN qui lui sont désignés,
de s’arrêter avant de les engager et de
fermer ou faire fermer les barrières
avant de les franchir.
On remarque que l’ordre donné au
mécanicien dans le cas présent – où
le gardiennage n’est pas assuré – est
différent de celui qui est utilisé sur
les lignes à signalement obligatoire.
En effet, dans ce dernier cas, les PN
sont gardés, mais le train concerné
n’est pas annoncé.
Observer les signaux portés
par les trains
Sur les lignes à signalement obliga-
toire et/ou à signal de clôture, les gardes
de PN ont l’obligation d’observer les
signaux portés par les trains.
© Y. BRONCARD
La règlementation sur ces deux su-
jets a bien sûr évolué, en raison d’une
part de la diminution du nombre de PN
gardés, d’autre part de l’équipement
progressif (en avertisseurs automa-
tiques d’annonce et en téléphones)
des PN amenés à subsister encore
longtemps.
C’est ainsi qu’en 1972, ont été
créées les lignes à signalement par
téléphone et qu’en 1988, le signale-
ment des trains par plaques ou feu et
le signal de clôture ont été officielle-
ment supprimés, l’obligation pour
les gardes d’observer les signaux des
trains l’étant également.
Après ces modifications, seule de-
meure en queue des trains la signali-
sation d’arrière classique, constituée
par les feux électriques fixes sur
certains véhicules, les plaques et les
lanternes de queue. Une pratique du
vieux chemin de fer a ainsi disparu,
au désespoir de quelques amateurs

nostalgiques bien informés… mais

pas des cheminots concernés, pour
qui c’était une procédure lourde et
La signalisation d’arrière ordinaire: en gare de Aubrais, le 18 juin 1967, le CRAR contraignante, sans parler des inci-
dispose un écran rouge à liseré blanc à l’arrière de l’X 5524 à destination de Pithiviers. dents toujours possibles ! ◼

56 - ferrovissime
© J.H. LAVIE

En 1987, le train 6103, acheminant derrière une 67400 des Corail en provenance de Montparnasse, porte la plaque verte
de clôture annonçant une période de fermeture sur la ligne Auray/Quiberon.

EN 1988, LE SIGNALEMENT DES TRAINS PAR PLAQUES OU FEU ET LE SIGNAL

DE CLÔTURE ONT ÉTÉ OFFICIELLEMENT SUPPRIMÉS

▶ UNE HISTOIRE DE SIGNAL DE CLÔTURE ◀

Par une triste journée pluvieuse de décembre
1970, alors que je suis en poste à Thouars
depuis quelques mois comme adjoint au
chef d’Agence, je compte passer la journée
au bureau pour tenter de me mettre «à
jour». Hélas, en milieu de matinée, alors
que le chef et moi sommes studieusement
plongés dans nos dossiers, un coup de fil
du chef de gare de Cerizay, sur la ligne de
Thouars à La-Roche-sur-Yon, vient bousculer
notre programme : il nous apprend qu’au
cours de la manœuvre avec le TOM, le
train omnibus de marchandises, un wagon
a déraillé dans un endroit stratégique
de la gare: sur l’aiguille d’entrée, côté
La-Roche-sur-Yon, interdisant ainsi la
traversée de la gare à toute circulation. Le
temps de s’assurer que les avis ont bien
été lancés: PC, chef de dépôt et chef de
section, et nous voilà partis tous les deux
par la route pour le lieu de l’évènement.
Arrivés en gare de Cerizay, nous nous
rendons immédiatement sur le site du
déraillement. Ce n’est pas très spectaculaire,
il s’agit d’un wagon STEF vide, retombé assez
près du rail. Le relevage ne sera donc pas très
long, mais il ne pourra commencer que dans
l’après-midi compte tenu du délai nécessaire
au train de secours pour venir de Thouars.
Le temps passe très vite et il est plus de
17 heures lorsque le wagon déraillé est remis
sur les rails. Le temps de le garer sur voie
de service, de reformer le train de secours
sur la voie d’évitement, d’examiner l’aiguille
pour s’assurer qu’elle n’a pas été avariée,
d’arranger un peu le ballast autour, et il est
près de 18h30 lorsque la circulation des
trains peut enfin reprendre normalement en
gare de Cerizay. Il est donc décidé de laisser
d’abord passer les trains de voyageurs, les
autorails 2827 et 2826, derniers trains de
la journée, et de n’expédier qu’ensuite le
train de secours en marche indéterminée
(MI) sur Thouars. C’est donc lui qui fermera
la ligne entre Cerizay et Thouars; sur cette
ligne, le signal de clôture est utilisé et
porté par le dernier train de chaque sens.
Avant de reprendre la route, je recommande
au chef de gare de ne pas oublier que le
signal de clôture devra être enlevé du
2826 pour être mis sur le train en MI.
Malgré l’heure tardive – lorsque nous
arrivons à Thouars il est environ 20 heures –
nous décidons de repasser par le bureau.
En arrivant à la porte, nous entendons
le téléphone sonner; je me précipite
pour répondre et j’entends alors le chef
de gare de Cerizay m’annoncer avec une
gêne certaine que l’autorail est parti avec
le feu vert en direction de Bressuire!
Le MI ne pourra donc pas partir avant
que le chef de canton soit passé dans les
PN pour leur faire reprendre le service:
de ce fait, le train de secours n’est
arrivé au dépôt que vers minuit! Il y a
vraiment des jours où tout va mal…

ferrovissime - 57
Gares et installations

Tri à la bosse,
unsavoir-faire renouvelé
En 2018, le triage de Woippy reste
fidèle au débranchement par gravité
et au tir au but pour expédier
20000 wagons chaque mois.
Texte et photos : Jean-Michel Eich

58 - ferrovissime
À Woippy,
on débranche
à la gravité!
Un lot de wagons
débranché à la butte
en cours de freinage
sur l’un des six freins
primaires du site.

ferrovissime - 59
Gares et installations
Mur de soutènement en béton, longue main courante de protection, et petite cabine au point le plus haut, Woippy utilise une butte tout à fait classique.
M
is en service à la
fin des années
1960, le triage de
Woippy demeure,
avec ceux de Sibe-
lin, Miramas et Le
Bourget, l’une des
dernières installations de ce type
encore en activité. Thiery Martin,
Dirigeant de Proximité (DPX) Tri
Manœuvre, nous en explique le
fonctionnement et les dernières
évolutions.
Un triage à vocation
internationale
Jean-Michel Eich (Ferrovissime):
Comment peut-on caractériser
aujourd’huiletriagedeWoippy?
ThieryMartin: Dans la terminolo-
gie actuelle, il s’agit d’un atelier
de production triage rattaché à
la Direction Fret Charbon Acier
(DFCA) située à Lille. À côté de
quelques trafics historiques liés
aux productions locales d’acier
(ArcelorMittal) et à des échanges
60 - ferrovissime
surl’artèreNord-Est,laproximité
de l’Allemagne, du Luxembourg
et de la Belgique lui confère une
position internationale. Woippy
accueille tous les types de tra-
fics: produits chimiques, trains
Combi-Express ou conteneurs…
Enfin le triage joue également
un rôle dans les échanges régio-
nauxvialestrainsdedesserte(ex:
Solvay à Sarralbe, Saint-Gobain
à Pont-à-Mousson…).
J-M. E. : Comment fonctionne
le triage ?
T.M.: Le triage est divisé en trois
parties, correspondant à trois
faisceaux de voies: réception,
débranchement et départ. Le
faisceau-relais, destiné aux
trains entiers en transit, ne
participe pas au tri des wagons.
Les trains à trier sont reçus au
faisceau réception constitué
de 17 voies accessibles par le
nord (Luxembourg, Belgique,
Allemagne via Apach, Thion-
ville…) comme par le sud
(région parisienne, sud de la
France, Allemagne via Forbach,
Suisse et Italie…).
À son arrivée, le train est com-
primé afin de détendre les at-
telages. La locomotive est alors
dételée puis rejoint le dépôt
de Woippy ou va se mettre en
tête d’un autre convoi. Le train
entre alors en phase de prépa-
ration. Les freins des wagons
sont inhibés par vidange de
la conduite générale et purge
des distributeurs. Les coupes
sont réalisées pour séparer les
wagons en fonction de leur des-
tination, à partir d’un plan de
préparation.
Un débranchement Un lot de wagons
à la gravité descend par gravité
J-M. E. : À l’issue de cette prépa- vers le faisceau de
ration, le train est dirigé vers la débranchement.
À l’arrière-plan à
bosse ?
droite, le couplage
T.M.: Effectivement, une fois la BB 64700/800 en
préparation réalisée, il est pos- charge des pousses
sible de passer à la phase ▶▶▶ à la bosse.
 ▶ UN FONCTIONNEMENT EN CONTINU ◀
Le triage de Woippy, à ce jour encore le plus
important de France, emploie une centaine de
personnes. Il débranche et expédie environ
20 000 wagons par mois (soit malgré tout trois fois
moins qu’il y a 40 ans). Au cours du mois d’octobre
2018, 738 trains y ont été reçus et 811 expédiés.
Le site de 114 ha fonctionne en 3x8, 7j/7, avec
toutefois quelques périodes de figeage d’activité
le samedi après-midi, dimanche après-midi (pour
des raisons d’organisation du travail) et lundi
matin (réservé à l’entretien des installations).

Vue générale du faisceau de débranchement du triage de Woippy, avec la butte à La bosse franchie, le wagon est détecté en coupant
droite de l’image, au premier plan. le faisceau de détecteurs.

LA PROXIMITÉ DE L’ALLEMAGNE, DU LUXEMBOURG ET DE LA

BELGIQUE LUI CONFÈRE UNE POSITION INTERNATIONALE

ferrovissime - 61
Gares et installations
Avec une vue panoramique sur la bosse et les 48 voies du faisceau de débranchement, le poste D est un point stratégique du site. L’opératrice
surveille les débranchements et peut intervenir à tout moment sur le «tir au but». Elle télécommande ici la vitesse de la locomotive de pousse
à la bosse. À gauche, le coordinateur débranchement assure la préparation des plans et commande les agents du faisceau réception.
▶▶▶ de débranchement du train.
Sur le site de Woippy, il s’agit
de débranchement par gravité,
en utilisant la technique la plus
moderne, le « tir au but ».
Le train est poussé par un die-
sel de manœuvre vers la bosse
de triage. Les wagons sont di-
rigés vers l’une des 48 voies
du faisceau de débran-
chement. La locomotive
est télécommandée par
un opérateur installé
au poste D (Débranche-
ment). Il s’agit essentiel-
lement de couplages avec
truck (BB 64700/800) ou,
dans une moindre mesure, de
BB 60000.
J-M. E. : Les opérations de dé-
branchement sont toutes au-
tomatisées ?
T.M.: Dès qu’un wagon quitte la
bosse, il est pris en charge par
un système informatique dans
lequel a été au préalable intro-
duit l’ensemble des données. Un
plan de débranchement est ainsi
62 - ferrovissime
créé pour chaque train poussé à
la bosse. Alors que l’automate de
débranchement est chargé d’ex-
pédier les wagons sur la bonne
voie, le tir au but est destiné à
gérer leur vitesse en sortie des
freins de voie pour optimiser
l’accostage. Cette vitesse dépend
de la masse du wagon et de la
LE TRIAGE EST DIVISÉ EN TROIS PARTIES
CORRESPONDANT À TROIS FAISCEAUX DE VOIES:
RÉCEPTION, DÉBRANCHEMENT ET DÉPART
place disponible sur la voie, la
force des freins étant plus ou
moins importante, selon les be-
soins. L’installation comprend
6 freins de voies primaires (cha-
cun ayant en charge 8 voies du
faisceau de débranchement) tan-
dis que chacune des 48 voies est
également équipée d’un frein
secondaire, permettant d’ajuster
la précision du tir.
Après le tri, les opérations
de départ
J-M. E.: Les rames sont ensuite
préparées pour être expédiées ?
T.M.: Quand tous les wagons
pour une destination sont dé-
branchés, on passe à la partie
«formation». Le dernier wagon
est calé et on comprime la rame
à l’aide d’un locotracteur. Une
fois tous les wagons en contact,
c’est la phase d’attelage: l’atte-
leur réalise les liaisons mé-
canique (par le crochet) et
pneumatique (par le demi-ac-
couplement) des wagons. Les
rames sont remises « à l’air »
grâce aux installations fixes
sur le faisceau de débranche-
ment. Suivent les opérations
Frein primaire associé à huit voies de débranchement et possédant des mâchoires appliquées sur les deux files de rail. Le locotracteur
Y 8004 est utilisé en appui-voie dans le faisceau débranchement.

Frein secondaire (une seule mâchoire de freinage) équipant chacune Radar destiné à mesurer la vitesse des wagons entre les freins
des 48 voies du faisceau de débranchement. primaire et secondaire. À noter la présence d’un tapis anti-végétation.

de sécurité, différentes selon
la destination de la rame: un
train pour l’étranger subit une
visite technique (aujourd’hui
appelée contrôle annexe 9)
alors que s’il est limité à un par-
cours français, on procède seu-
T.M.: Plusieurs opérations sont
encore réalisées : mise en tête
de la locomotive, mise en place
des lanternes de queue par le
lampiste et essai de frein.
En règle générale, l’ensemble
des trains subit au départ d’un
Un train international, qui a
auparavant subi un contrôle
annexe 9 (anciennement visite
technique) avec vérification du
fonctionnement du frein, ▶▶▶

▶ LA FIN DES ENRAYEURS ◀

lement à une «vérification en
cours d’acheminement» (simple
examen visuel). Ces opérations
techniques de sécurité termi-
nées, le train est transféré sur
l’une des 14 voies du faisceau
d’attente départ à l’aide d’un
diesel de manœuvre de type
BB 60000 ou BB 64700/800.
J-M. E. : C’est la dernière étape
avant le départ ?
triage un essai de freins com-
plet, au cours duquel sont véri-
fiés les freins de chaque wagon.
Une opération qui va prendre
de 45 mn à une heure pour
une rame de 750 m. Si l’en-
semble des wagons a stationné
moins de 24 heures, un essai de
continuité suffit. Un cas qui se
raréfie depuis la rationalisation
des dessertes.
Le tir au but a permis de supprimer l’intervention des
enrayeurs, qui plaçaient des sabots d’enrayage (encore
appelés sabots-cales) sous les roues des wagons, afin
de les freiner et d’arrêter leur course. Cette nouvelle
technique offre à la fois une plus grande sécurité
pour le personnel et une meilleure productivité du
triage. Seuls des doubles sabots accueillent encore
au fond de la voie le premier wagon déjà ralenti.

ferrovissime - 63
Gares et installations
▶ LES LANTERNES DE QUEUE : ▶ SITUATION DU TRIAGE DE WOIPPY ◀
ADIEU MAGELAN ◀
Dans l’organisation actuelle, les
lanternes sont récupérées au faisceau
réception et acheminées par une
voiture de service jusqu’au faisceau
départ. Le système Magelan (Méthode
d’acheminement et de gestion des
lanternes), mis en place dans les années
1990 et consistant à ce que chaque
locomotive soit équipée de lanternes
de queue, a été abandonné faute de
fiabilité. Il n’était pas rare en effet que
les locomotives arrivent sur le faisceau
de départ sans lanterne à bord.
▶▶▶ ne sera concerné que par un
essai de continuité, l’essai com-
plet ayant déjà été réalisé à poste
fixe. L’essai de frein terminé, le
train peut recevoir l’autorisation
de départ et quitter le triage.
Les frontières sont
franchies sans formalités
J-M. E. : Quelles ont été les
grandes tendances à Woippy
ces dernières années ?
T.M.: Le trafic international s’est
développé,notammentdepuisla
mise en service de l’interopéra-
bilité au début des années 2000.
Les frontières sont aujourd’hui
franchies sans formalités et
sans relève de conducteur, de
manière souple et rapide.
La mixité des trains est au-
jourd’hui utilisée pour obtenir
demeilleurstauxderemplissage.
LE TIR AU BUT EST DESTINÉ À GÉRER LA VITESSE DES WAGONS
EN SORTIE DES FREINS DE VOIE POUR OPTIMISER L’ACCOSTAGE
64 - ferrovissime
Gros plan sur la télécommande du
diesel de manœuvre qui évolue ici à
4,8 km/h en approche de la butte.
Un train entier peut ainsi être
mixé avec un train multi-lots/
multi-clients (MLMC). Deux cri-
tèressontprisencomptepourop-
timiserlesacheminements:une
longueur maximale de 750 m
et une charge maximale liée au
type d’engin moteur et au profil
de la ligne. Des convois formés
de plusieurs lots font également
partieduquotidien,notamment
pour les trains de dessertes.
J-M. E.: Va-t-on vers des convois
encore plus longs ?
T.M.: D’autres évolutions appa-
raîtront prochainement concer-
nant la manière de gérer le rem-
plissage des trains. On met en
œuvre aujourd’hui des trains
de 850 m sur certaines destina-
tions (Sibelin par exemple) avec
des contraintes particulières,
aucune voie n’ayant une telle
Cartographie : Vincent Babilotte
longueur. Ces trains doivent
être formés par adjonction de
lots (deux trains de 400/450 m
raccordés et mis au départ sur
la plus grande voie, longue de
794 m) le plus rapidement pos-
sible, de manière à générer le
moinsdeperturbationspourles
autres mouvements. De telles
configurations, aujourd’hui
marginalesentermesdevolume,
sont certainement appelées à se
développer. De même que sont
également à l’étude des trains
encore plus longs et plus lourds
sur certaines destinations.
Les agents deviennent
multi-fonctions
J-M.E.: Les métiers du triage ont
également évolué ?
T.M.: Le travail à la butte propre-
ment dit n’a pas subi de grands
Les manœuvres dans le triage sont principalement réalisées à l’aide de locomotives diesel BB 64700 attelées à demeure à des trucks TBB 64800.
changements ces derniers temps,
l’automatisation du triage re-
montant aux années 1980. L’au-
tomate de débranchement qui
gère l’ensemble des parcours des
wagons débranchés a quant à
lui été mis en service au début
des années 2010. Cette innova-
tion a mis fin au poste de chef
de bosse qui commandait sur
son pupitre les itinéraires des
wagons à débrancher en fonc-
tion du plan.
Après sa mise en
tête, l’opérateur
départ procède
à l’attelage de la
locomotive.
Lors de l’essai de
frein, l’opérateur
ne se contente
pas d’un examen
visuel mais appuie
sur la semelle de
frein pour vérifier
le serrage.
Alors que les agents n’ont long-
temps réalisé qu’un seul type
de tâche (essais de freins par
exemple) durant l’ensemble de
leur service, la polyvalence s’est
développée ces dernières années.
L’organisation gagne ainsi en
souplesse. Certaines fonctions
ont par ailleurs été regroupées.
C’est notamment le cas sur le
faisceau réception où le chef de
manœuvre D est dorénavant aus-
si vérificateur ou sur le faisceau
Autorisation de départ
pour le train 44241
formation/départoùlesfonctions (1982 t/685 m)
à destination de
d’opérateurdépartetdelampiste
Mannheim.
sont désormais cumulées.
J-M. E. : Quelles sont les
contraintes d’une telle instal-
lation ?
T.M. : À côté de la sécurité, la
plus forte contrainte c’est le
temps : le travail est lié aux
horaires d’arrivée et de départ
des trains et soumis à des pics
d’activité dans la journée. Le
délai minimal de correspon-
dance pour un wagon (entre
son arrivée et son départ) est de
4 heures dans le cas d’un train
national et de 4 h 30 pour un
trafic international. ◼
ferrovissime - 65
Matériel roulant d’hier
© Y. BRONCARD
2-232 TB, 2-141 TA, 140 G,
140 H, arrivées il y a 100 ans
Les locomotives reçues
des alliés en 1918/19 sont
encore bien présentes à la
création de la SNCF avec
quatre séries qui vont
mener de longues carrières.
Texte : Aurélien Prévot
66 - ferrovissime
E
n 1919, après la Première
Guerre mondiale, de très
nombreuses locomotives
construites pour les
armées alliées (britan-
niques et américaines) sont
encore sur le sol français. Ces
locomotives sont alors acquises
par le ministère des Travaux
publics et attribuées en répara-
tion aux différentes compagnies
de chemin de fer qui avaient
subi de lourdes pertes durant
le conflit. En 1938, à la création
de la SNCF, quatre séries de ma-
chines construites pour ou par
les alliés sont encore en service.
Au 1er janvier 1938, la Ré-
gion Nord de la SNCF hérite
de deux séries de locomo-
tives-tender issues des effectifs
du Railway Operating Division
Le dépôt de Quimper a utilisé des 3-140 H jusqu’en 1962. Leur tender 3-18 H est muni d’un écran facilitant la marche tender en avant, comme ici,
à droite, en tête d’un omnibus au départ de Douarnenez pour Quimper. À gauche, la 3-140 H 808 est en tête d’un train de marée.

britannique : les 2-232 TB et
les 2-141 TA.
Les 2-232 TB:
des anglo-néerlandaises
livrées en France
Les quatorze 2-232 TB 1 à 14,
construites par Beyer Peacock à
Manchester, ont été comman-
dées par les chemins de fer néer-
landais mais ne sont pas encore
livrées au début de la guerre.
Réquisitionnées par le War
Office,onlestransfèreenFrance,
où elles restent après l’Armis-
tice. Elles sont peu transformées
(porte de boîte à fumée Nord,
turbo-dynamo…) par la Com-
pagnie du Nord qui les récupère.
tion de la 2-232 TB 10, puis des
mutations. Les 2-232 TB 3 et 7
sontdétachéesàLille-Délivrance
pour la traction de navettes.
Les 2-232 TB 11 et 8 sont en-
voyées à Saint-Omer et au dépôt
annexedeSaint-Pol.Lesradiations
s’échelonnentde 1947(2-232TB
3)à1954(2-232TB5deTourcoing).
Les 2-141 TA : des Consoli-
dation canadiennes qui se
font Mikado
Autres machines-tender, les
2-141 TA ont une histoire fort
originale. Il s’agit en effet de
locomotives à tender séparé de
type 140 construites au Canada,
que la Compagnie du Nord a trans-
dans douze dépôts : Aulnoye (4),
Hirson (1), La Plaine (7), Laon
(1), Lens (2), Lille-Délivrance (7),
Mitry(1),Saint-Omer(1),Somain
(1), Tergnier (8), Tourcoing (3) et
Valenciennes (1).
Elles sont essentiellement
utilisées pour les manœuvres Lignes sobres
de gare, d’où le très faible effectif typiquement
dans certains dépôts. ▶▶▶ britanniques pour
les 2-232 TB.
© DR / COLL. A. PRÉVOT

En 1938, elles sont réparties formées en Mikado-tender (voir

entre deux dépôts : Fives (5) et encadré page suivante).
Tourcoing (9). La Seconde Guerre En 1938, à la création de la
mondiale entraîne la destruc- SNCF, les 2-141 TA sont affectées

ferrovissime - 67
Matériel roulant d’hier

© Y. BRONCARD
Après radiation à la SNCF, certaines 140 G sont vendues à des entreprises. Ici, la 4-140 G 2229 ex-AL affectée, avec plusieurs de ses sœurs,
au réseau industriel de Wendel et Compagnie en Lorraine, où elle porte le n°150 et tracte notamment le train de ramassage ouvrier.

▶▶▶ Celles de La Plaine sont
parfoisemployéespourdepetits
parcours marchandises et pour
desremontesderamesvoyageurs
de banlieue entre les chantiers
des Joncherolles ou du Landy et
la gare de Paris-Nord. Lorsque
le dépôt est proche d’un triage
(comme à La Plaine, Lille-Déli-
vrance,Tergnier,etc.),les2-141TA
sont aussi utilisées pour les dé-
branchements à la butte.
Chassées par les 2-050
TD et la traction diesel
La série sort sans perte de
la Seconde Guerre mondiale.
En 1950, on trouve ainsi cinq
2-141TA au dépôt de Douai (n°5,
14, 19, 24 et 31), neuf à celui de
La Plaine (n° 3, 13, 15, 18, 21,
23, 32, 34 et 36), dix à Tergnier
(n° 4, 7, 9 à 12, 17, 28, 29, 37),
six à Tourcoing (n°6, 8, 22, 25
à 27), le reste de l’effectif étant
ventilé entre les dépôts d’Arras
et de Paris-La Chapelle. Leur ser-
vice ne change pas: manœuvres
dans les dépôts ou les gares, pe-
tit trafic marchandises sur la
Ceinture et remorque des trains
de jonction entre les gares de
Paris-Nord et Paris-Lyon pour
celles du dépôt de La Plaine. À
Tourcoing, ces machines sont
utilisées en plus du triage pour la
remonte des trains de Belgique.

▶ LES 140 CANADIENNES DEVIENNENT DES 141 T ◀

L’histoire des 2-141 TA est peu banale.
Il s’agit en effet de locomotives à
tender séparé de type 140 construites
par la Canadian Locomotive
Company de Kingston (Ontario).
Très vite, la Compagnie du Nord,
qui les récupère, les transforme en
locomotives-tender. Une soute à
combustible, pouvant emporter 4,3 t
de charbon, est rajoutée derrière
la cabine portant la longueur totale
à 12,746 m (contre environ 11,5 m
auparavant). Un bissel est inséré sous
la cabine pour supporter la masse
ajoutée. Les caisses à eau rivetées
(pouvant emporter 7,5 m3 d’eau) sont
disposées classiquement de part
et d’autre du corps cylindrique. La
cabine est évidemment profondément
remaniée, avec la suppression des
deux portes vitrées permettant
auparavant l’accès aux tabliers latéraux
supprimés par l’installation des caisses
à eau. Sur chaque côté de l’abri, la
fenêtre extérieure est redécoupée pour
permettre l’accès à la cabine. Ce sont
les ateliers de la Compagnie du Nord
à La Chapelle, les entreprises Fives-
Lille et Franco-Belge qui procèdent
à ces lourdes transformations.

68 - ferrovissime
 © DR / COLL. D. WALIGORA
La 2-141 TA 32 en 1964, peu de temps après sa radiation au dépôt de Tergnier.

L’arrivée des 2-050 TD, plus

récentes, au dépôt de Tourcoing
entraîne la mutation des
2-141 TA vers les dépôts de La
Plaine et de Douai. Cependant,
les radiations s’enchaînent et il
ne reste que dix-neuf 2-141 TA
aux effectifs en 1957. Ainsi, elles
ne sont plus que cinq à La Plaine
en 1959 (n° 15, 22, 25, 32, 35)
et les huit encore présentes à
Tergnier au 1er janvier 1962 (n°4,
15, 19, 22, 25, 32, 35 et 36) sont
radiées dans l’année.
140 G: des Américaines
pour les marchandises
Lasérielaplusimportanteres-
tée en France est sans nul doute
celledes140G,construitesàplus
de 2 000 exemplaires en 1917
par Baldwin à Philadelphie et
assemblées dans les Chantiers de
Penhoët et de la Loire à Saint-Na-
zaire. Ces locomotives, à deux
cylindres simple expansion sont
équipées de la surchauffe. Elles
sont désignées Pershing (loco-
motives ayant été employées
par l’armée américaine), Felton
(machines en commande ou en
construction après l’Armistice)
ACQUISES PAR LE MINISTÈRE DES TRAVAUX
PUBLICS ET ATTRIBUÉES EN RÉPARATION AUX
DIFFÉRENTES COMPAGNIES
Toutes ces machines sont
puissantes, robustes, simples et
fiables, ce qui permet de confier
leur entretien à du personnel
peu qualifié. Mais elles n’ont
pas que des qualités : elles sont
instables en ligne (d’où leur vi-
tesse limitée à 70 km/h), mal
équilibrées en raison du long
porte-à-faux arrière et surtout
elles consomment beaucoup
de combustible malgré la sur-
chauffe. Pourtant, il en reste
encore 2 014 (dont 1 299 ayant
été réellement employées par
les Américains) aux effectifs en
1938, même si beaucoup sont
garées ou en attente de décision.
Elles sont alors immatriculées
1-140 B (Est), 2-140 B, C ou D
(Nord), 3-140 B (Ouest), 4-140 D
(Sud-Ouest) et 5-140 G (Sud-Est).
Les sœurs du ROD
D’autres Consolidation (type
ROD. Elles se distinguent des ma-
chines construites pour l’armée
américaine par de nombreuses
cotes différentes et par l’absence
de surchauffe. Elles sont numé-
rotées 2-140 B, ou 2-140 D après
avoir reçu la surchauffe entre
1940 et 1947.
La guerre entraîne de nom-
breuses radiations et destruc-
tions. Cependant, en 1945-46,
du fait de la pénurie de maté-
riel moteur, on retrouve ces ma-
chines en tête de toutes sortes de
trains, y compris ceux de la ▶▶▶
Vers 1950, cette 140 G
du dépôt de La Plaine
assure la traction des
trains de jonction JJ sur
la Petite Ceinture entre
Paris-Lyon et Paris-
Nord, acheminant
notammentlesvoitures
CIWL empruntées par
les voyageurs anglais
se rendant sur la Côte
d’Azur.
© Y. BRONCARD

ou Slade (machines acquises di- 140) théoriquement similaires

rectement par le ministère des avaient été livrées précédem-
Travaux publics). ment par Baldwin en 1915-16 au

ferrovissime - 69
Matériel roulant d’hier
La 1-140 G 1007 du Dépôt de Château-Thierry nous présente la livrée SNCF qu’elle porte dans
les années 1950. L’une des baies de l’abri est bouchée par une tôle.
SIMPLES À CONDUIRE ET À ENTRETENIR, ROBUSTES
ET FIABLES, ELLES RENDENT D’IMMENSES SERVICES
▶▶▶ banlieue parisienne ! En
1947, la SNCF décide de rationali-
ser les numérotations. Toutes les
machines deviennent alors des
140 G (y compris les machines
du ROD), et ce, quelle que soit
la région. Elles tractent alors de
nombreux trains de marchan-
dises et aident à la reconstruction
du réseau. Leur carrière prend
fin en 1955 au Sud-Est. Les 140 G
ROD roulent encore jusqu’en
1957 pour celles de Tergnier et
d’Aulnoye.
140 H : leur inspiration
française leur réussit bien
Durant la Grande Guerre, des
réseaux passent commande à
l’American Locomotive Company
(ALCO) de machines de type 140 :
40 pour le Midi et 100 pour l’État.
En 1917, l’armée américaine
commande à la même entreprise
150 locomotives identiques. Ce
sont les futures 140 H qui s’ins-
pirent des 3-140 C du réseau de
l’État. Cependant, ALCO améri-
canise la locomotive française en
70 - ferrovissime
construisant un châssis en barres
moulées, en surélevant le corps
cylindrique, etc. À la différence
des 140 G construites par Bald-
win au gabarit britannique, ces
machines produites par ALCO
sont au gabarit continental.
En 1938, les 290 machines sont
réparties à l’Ouest (145 : 3-140
A), au Sud-Ouest (116 : 4-140 E)
et au Sud-Est (29 : 5-140 H).
Chaque ancien réseau a per-
sonnalisé ses machines, d’où
quelques légères différences :
réchauffeur Schmitt et échap-
pement trèfle au Sud-Est, pompe
frein bi-compound et échappe-
ment Kylchap au Sud-Ouest,
pompe frein double phase Fives-
Lille et parfois échappement Le-
maître à l’Ouest. Pouvant circuler
jusqu’à 85 km/h, ces locomotives
donnent satisfaction en tête de
trains de voyageurs (omnibus, et
même express en Bretagne), de
messageries ou de marchandises.
La guerre entraîne la destruc-
tion et la radiation de plusieurs
dizaines de machines. En 1947,
Dans les années
1950, la 2-141 TA 22
est affectée au dépôt
de La Plaine. Notez la
petite vitre de l’abri
et la livrée verte de la
machine.
Entre 1948 et 1955,
les 3-140 H assurent la
© J.H. RENAUD / COLL. R. THÉVENIN
© DR / COLL. LR PRESSE
traction des trains de
toutes catégories
(y compris les express)
entre Le Croisic et
Saint-Nazaire (alors
gare en impasse). L’une
d’elles longe les marais
salants de Batz avec un
train de messageries.
pour faciliter l’entretien et l’utili-
sation, les 237 machines encore
en service sont toutes affectées
à l’Ouest et sont renumérotées
140 H. Elles rendent encore
d’importants services en tête
de trains de marchandises. Le
développement de la traction
diesel leur est cependant fatal :
de 171 locomotives en 1958,
l’effectif fond à 37 en 1960, ré-
parties entre Caen, Saint-Brieuc
et Quimper. La 140 H 706 est la
dernière à être radiée en 1962.
Construites rapidement du-
rant la guerre, les locomotives
alliées n’en sont pas moins
de grande qualité. Simples à
conduire et à entretenir, robustes
et fiables, elles rendent d’im-
menses services et permettent
le redémarrage de la France après
chacune des deux guerres mon-
diales. La concurrence des 141 R
d’une part et le développement
de la traction diesel d’autre part,
entraînent leur radiation, après
plus de 40 ans de service pour
certaines machines. ◼
© Y. BRONCARD
ferrovissime - 71
Matériel roulant d’hier

© G. DAUVET
La GD 355 en 1987 dans son fief: le Dépôt de Sotteville.

Il y a dix ans, le TPCF sauvait

la grue de Sotteville
On préserve souvent des locomotives et des autorails, parfois des
voitures et des wagons. Mais rarement des grues… Le TPCF a sauvé
une Caillard de 50 t.

I
Texte : Jean- l y a dix ans, le TPCF (Train
Pierre Lescure du Pays Cathare et du Fe-
nouillèdes) se voit confier
une pièce de haute valeur :
la grue Caillard de 50 t du
dépôt de Sotteville. Les grues
ferroviaires de relevage sont des
engins extraordinaires, par leur
taille et par les levages spectacu-
laires qu’elles peuvent effectuer.
Grâce au fameux modèle
H0 réalisé par Jouef, tous les
amateurs connaissent les grues
Cockerill de 85 t dont la SNCF
a possédé quatre exemplaires.
Moins célèbres sont les grues de
50 t, pourtant bien plus nom-
breuses avec un effectif de 14 uni-
tés. Construites par Caillard au
Havre, ce sont aussi les seules du
parcSNCFquisoientdeconstruc-
tion française. Ce sont aussi les
grues les plus anciennes de la
SNCF, puisque livrées en 1912
et ce sont elles qui ont mené la
carrière la plus longue.
Une grue sur un touristique
Le TPCF préside aux destinées
du chemin de fer touristique Le

72 - ferrovissime
© G. DAUVET
La GD 354 était autrefois basée au Mans. En avril 1976, nous la voyons ici sur l’Est, au Dépôt de Chalindrey.
Train rouge depuis 2002. C’est
en 2008 que la SNCF lui confie
la sauvegarde de la grue Cail-
lard GD 355, radiée au dépôt
de Sotteville.
Cette année-là, il ne reste plus
aucune grue Caillard à l’inven-
taire de la SNCF. Celle d’Achères,
identique à celle de Sotteville,
vient alors d’être ferraillée. Il ne
reste donc plus que la GD 355 sur
les 14 grues de 50 t construites
par Caillard.
© G. DAUVET
En 1973, la GD 558 est affectée au Dépôt de Villeneuve-Saint-Georges.
L’équipe du TPCF est
consciente de la grande valeur
de cette pièce du musée, dont
l’histoire mérite d’être contée
. - Masse de l’ensemble grue/
Le Réseau de l’Etat
l’affecte à Mantes
Elle est mise en service sur le
Réseau de l’Etat qui l’affecte au
Dépôt de Mantes-Gassicourt et
lui attribue le numéro 2.
A la fin des années 1920, la grue
est réimmatriculée 81-2, tout ▶▶▶
▶ LES CARACTÉRISTIQUES DE
LA GRUE CAILLARD GD 355 ◀
wagon porte-flèche: 103,2 t
- Vitesse d’acheminement: 80 puis 90 km/h
- Longueur hors tout avec le wagon porte-flèche:
22,444 m (châssis de la grue 10,300 m)
- Empattement de la grue: 5,70 m
et entraxe des bogies: 3,70 m
- Largeur hors tout de la grue: 3 m
- Hauteur maximum de la grue au
niveau de la toiture: 4,178 m
- La grue, pour sa mise en place pour
un relevage, est autonome et se
déplace par ses propres moyens.
Équipement moteur
- Groupe diesel électrique comprenant
un moteur diesel PERKINS type 6354
D, une génératrice LEROY type C 250c
et une excitatrice LEROY C 132.
- Moteur de travail LEROY type C 315a.
- Moteurs de translation au nombre
de deux, LEROY type C 180c.
- Une armoire d’appareillage électrique, un
manipulateur à commande progressive
et un combinateur à deux sens de
marche complètent les équipements.
ferrovissime - 73
Matériel roulant d’hier
Le 2 septembre1976, suite au déraillement du 16189, la GD 252 intervient
à Longueuil-Annel.
CE SONT LES GRUES LES PLUS
ANCIENNES DE LA SNCF, PUISQUE
LIVRÉES EN 1912
▶ POINTS D’ATTACHE DES GRUES CAILLARD DE
50 T AU 18/06/1968 ◀
Région de l’Est
- Dépôt de Chalindrey: GD 150
- Dépôt de Metz: GD 151
Région du Nord
- Ateliers du Landy: GD 252
- Dépôt de Fives: GD 253
Région du Sud-Est
- Dépôt de Dijon-Perrigny: GD 557
- Dépôt de Villeneuve: GD 558
- Dépôt de Nevers: GD 559
▶▶▶ en restant basée à Mantes.
En1938,lacréationdelaSNCFne
change pas son affectation.
Au cours du second conflit
mondial, les déraillements, pro-
voqués par les actes de guerre et
lessabotages,nécessitentdefaire
fréquemmentappelauxgrueset
la81-2deMantesestmiseàcontri-
butiondansl’Ouest,notamment
enNormandie,maisaussidansle
NordetleSud-Estpourremplacer
le matériel de relevage indispo-
nible ou saboté.
En juillet 1944, elle est mutée
audépôtdeSottevilleoùellereste
jusqu‘àsafindecarrièreen2004.
C’est en 1965 que toutes les
grues de la SNCF reçoivent une
74 - ferrovissime
© G. DAUVET
- Dépôt d’Ambérieu: GD 560
- Dépôt de Lyon-Mouche: GD 561
Région de l’Ouest
- Dépôt de Le Mans: GD 354
- Dépôt de Sotteville: GD 355
Région du Sud-Ouest
- Dépôt de Limoges: GD 456
Région de la Méditerranée
- Dépôt de Marseille: GD 662
- Dépôt d’Avignon: GD 663.
numérotation uniformisée, et
notre grue se voit attribuer le
n°355 avec les lettres GV (pour
Grue à Vapeur), donc immatricu-
léeGV355àSotteville.Equipéeà
sa construction d’une chaudière
à vapeur, elle est modernisée en
1969 par les Ateliers de Saintes
et devient GD (pour Grue Diesel)
355. L’installation d’un groupe
électrogène Perkins simplifie la
mise en route, l’utilisation de la
grue et sa maintenance.
Depuis son arrivée au TPCF,
elle est affectée à Caudiès de Fe-
nouillèdes, siège du chemin de
fertouristique,oùelleestépisodi-
quement employée aux levages
de pièces lourdes. ◼
© J.P. LESCURE
Une BB 63000, un wagon
de secours et la GD 355
en approche d’un chantier
de relevage: une scène
typique, autrefois, à la
SNCF. Mais nous sommes,
ici, au TPCF et ces engins
sont des pièces de musée.

ferrovissime - 75
Des trains sous la loupe
La CC 80001 est en tête du 3073 à Paris-Montparnasse au service d’hiver 1972/73.
Le Paris/Granvil e de Belphégor
Surnommée Belphégor, la CC 80001 apporte, de 1972 à 1976,
une touche d’originalité au parc traction de Montparnasse en
remorquant des express Paris/Granville.
A
vec ses deux moteurs diesel V12 totali-
sant 3000 ch et sa transmission méca-
nique, la CC 80001 surclasse aisément
une A1A A1A 68000, machine diesel
de référence de la ligne Paris-Montpar-
nasse/Granville dans les années 1970.
Officiellement affectée au Dépôt de
Caen mais détachée en permanence à Argen-
tan, Belphégor est confiée à un petit contingent
d’agents de conduite spécialement formés. Il est
vrai que la différence est grande entre le pupitre
d’une 68000 à transmission électrique et celui de
la machine louée à CFD, avec sa boîte à 8 vitesses
que l’on peut soit laisser passer automatiquement,
76 - ferrovissime
© H. DAUDONNET
Texte : Jehan-Hubert Lavie
soit passer manuellement avec un grand levier
près du manipulateur !
Fidèle aux trains Express 3060/3073
Au cours de ces cinq années de service sur Gran-
ville, le roulement de la CC 80001 n’a que peu
varié. Démunie de toute installation de chauffage,
elle doit remorquer obligatoirement, l’hiver, une
rame à chauffage autonome. Le parc de l’Ouest
compte alors les voitures de 1re classe A4t4 USI 62
sur bogies Y 24, les voitures de 2e classe B10t USI
60 et 61 sur bogies Y 16, B10t USI 62 sur bogies
Y 24 et les voitures mixtes 2e classe-fourgon B4D
OCEM RA équipées du chauffage autonome Avialex.
 © I. BORY / COLL. T. PORCHER
Le 23 mai 1976, voie 10, Belphégor assure le 3075 pour Argentan, ce jour-là forcé de deux B10t USI devant son B4D OCEM de
tête. À droite, voie 9, la BB 25217 est en tête de l’Express 3645 pour Le Mans, départ 19h28, sept minutes avant le 3075.

ELLE DOIT REMORQUER

En temps normal, chaque jour, la CC 80001
arrive à Paris-Montparnasse – généralement

OBLIGATOIREMENT, L’HIVER, UNE

voie 20 – avec l’Express 3060 l’après-midi (16 h 47
au service d’été 1973). Après dételage de la ma-

RAME À CHAUFFAGE AUTONOME

chine, la rame est manœuvrée par une BB 1300,
tirée dans l’avant-gare, puis refoulée voie 11 pour
assurer l’Express 3073 à destination de Granville,
départ 19 h 18 à la même époque.

D’autres trains aussi

▶ COMPOSITION DES TRAINS ◀ Périodiquement, elle rentre au Dépôt d’Argen-
Infographie : Jehan-Hubert Lavie et Marc Le Gad tan. La CC 80001 se voit alors confier, à partir
de l’hiver 1972/73, quand il abandonne ses B10
Express 3073 - Service d’hiver 1972/73 métallisées Etat et son A8 OCEM PL pour des voi-
Paris-Montparnasse/Granville tures USI, l’Express 3075 quittant Paris à 19 h 35
pour Argentan.
En sens pair, on peut voir épisodiquement
B10t USI 61
Belphégor rallier Montparnasse au 3050 (arrivée
CC 80001
8h20) ou au 3054 (arrivée 10 h 29). En attendant de
remorquer le 3073, elle stationne à Montparnasse
pour le plus grand plaisir des photographes, ou
D OCEM 32 B10t USI 61 remonte à Montrouge.
En 1972, elle arrive régulièrement, les lundis
et lendemains de fêtes, en tête du train de mes-
B4D OCEM RA A4t4 USI 62 sageries qui prend le numéro 48082 du triage de
Trappes à Paris-Vaugirard (citernes à lait, plats
UFR et couverts à petits animaux).
B10t USI 61 B4D OCEM RA Maintes fois, il m’est arrivé de monter à bord de
Belphégor entre Montparnasse et Montrouge. Et
tous les agents de conduite rencontrés se disaient
attachés à ce drôle d’oiseau rare de la traction
B10t USI 61
diesel française. ◼

ferrovissime - 77
 Le magazine du train et de son histoire

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