www.ferrovissime.

com N°115
Janv./Février 2022

Le magazine du train et de son histoire

P.22 P.51
DÉPÔTS
NANTES P.5 6 CC 6500 VIN
DU BIFOUDRE
ANNÉES 1950 200 KM/H ! À LA CITERNE

R PAGES
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PO AI L
DU R
040 D EST ET NORD
France METRO : 9.80 € - BEL/LUX/ESP/ITA/PORT.CONT/D : 10.80 €

LES 040 D DE L’EST ET DU NORD

DE
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Directeur de la publication
Christian Fournereau - 02 97 24 81 30
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Rédacteur en chef
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Conseiller technique de la rédaction
Frédéric Didelot

De la doc sous le sapin

Conception graphique
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Mise en page

Bertrand Bourn & Benjamin Madelainne
Ont collaboré à ce numéro
Jean-Pierre Francon, Laurent Gosselin,
Lionel Hadrot, Baptiste Hilleret,
Nicolas Husson, Éric Hospital,
Marc Le Gad, Claire Lefort,
Philippe Marassé, Christophe Masse,
Gérald Morel, Aurélien Prévot,
François Vielliard,
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ISSN> 1961-5035
CPPAP> 0423 K 89491
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Principaux associés:
Christian Fournereau,
& Friedel Fournereau
“Printed in France/
Imprimé en France”
C
haque année, le sommaire de Ferrovissime publié en janvier fait
la part belle aux nouveaux modèles de trains qui paraissent ou
sont annoncés à l’occasion des fêtes. La sortie prochaine d’une
040 D de l’Est et du Nord nous conduit tout naturellement à leur
consacrer notre dossier Portrait du rail. Car ces locomotives à vapeur
allemandes, affectées en France à la suite des deux guerres mondiales,
ont mené une longue carrière dont l’étendue et la variété est mal connue.
Se souvient-on que ces vaillantes petites machines ont tout remorqué – du
train omnibus marchandises sur ligne secondaire aux rames de voitures
inox des rapides Paris/Lille qu’elles emmenaient à Tourcoing!
Les CC 6500 sont également d’actualité, notamment deux modèles de
l’«époque IV» (1971-1990) reproduisant des machines qui étaient alors
affectées au Sud-Ouest où elles tractaient notamment des TEE, sur la
ligne classique Paris/Bordeaux, à 151 km/h de moyenne avec de longues
pointes à 200 km/h.
Un autre modèle réduit, récemment sorti, avait étonné plus d’un
amateur avec sa longueur et son gabarit réduits: la voiture-lits type F.
Début d’explication dans les pages de ce numéro, vous présentant le
Night Ferry, un train à nul autre pareil, dont les voitures-lits traversaient
la Manche sur un bateau en prévoyant des gilets de sauvetage dans les
compartiments des voyageurs!
Enfin, nous continuons l’étude des chasse-neiges, clin d’œil à une
présentation de modèles réalisée dans un dossier paru dans les pages
du numéro de décembre 2021 de Loco-Revue.
À l’aube de l’année 2022 pour laquelle nous vous présentons nos
meilleurs vœux, Ferrovissime reste fidèle à sa volonté d’offrir la
documentation qui intéresse l’amateur de chemin de fer comme
le modéliste. ◼
rédacteur en chef
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COUVERTURE Grande photo : La 2-040 D 138 sur le TOM Persan/ Luzarches.

© J. Renaud / Coll. R. Thévenin - Conception : BecomeDesign
 N°115
Janvier/Février 2022

LES PORTRAITS DU RAIL 72

P.30
51

P.64
Histoire au présent P.22 22_ STARS DU RAIL

4 _ Les BB 15000 ne verront plus

« leur » Normandie
5 _ RITA ou Rénovation InOui TGV Atlantique
6 _ La livrée ZOU ! en voie métrique aussi
7 _ Une Brissonneau des charbonnages
restaurée par le CMCF
8 _ Trois Soulé fidèles au poste en Balagne
9 _ Le retour d’une 140 C sur le RFN
10 _ Les Prima fêtent leurs 20 ans
11 - MÉDIATHÈQUE
Livres, revues, DVD
Montez à bord
12 _ TRÉSORS D’ARCHIVES
De Lyon-Perrache à Paris-Gare de Lyon
via Paray-le-Monial
20 _COMMENT ÇA MARCHE
La protection contre le givre
DES CC 6500 À 200 KM/H
SUR LE SUD-OUEST
Les portraits du rail
30 _ Les 040 D de l’Est et du Nord
DE VAILLANTES PETITES MACHINES EN TÊTE
DES TRAINS LES PLUS VARIÉS
Le monde des cheminots
51_ CŒUR DE MÉTIER
1946-1956 : la spectaculaire mutation
du transport des vins
56 _GARES ET INSTALLATIONS
Les dépôts vapeur de Nantes des origines à 1960
64 _MATÉRIEL ROULANT D’HIER
Le chasse-neige CNS et les BB 66000 à socs
72 DES TRAINS SOUS LA LOUPE
De Paris à Dunkerque dans le Night Ferry

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ferrovissime - 3
Histoire au présent

La BB 15010 en livrée «coup de soleil», qui s’harmonisait autrefois avec les voitures Grand Confort, assure le TER 3380
Deauville/Paris-Saint-Lazare, le 26 août 2020.

Les BB 15000 ne verront

plus « leur » Normandie
Fin de service en Normandie pour les BB 15000 nées en 1971
et les voitures Corail apparues en 1975.
Texte et photos : Jean-Pierre Francon

A u début de leur carrière, les BB 15000

assurent des trains prestigieux sur l’ex-
Région Est tels que les TEE « Goethe »,
«Iris» et «Stanislas». Puis l'ouverture de
la LGV-Est en 2007 signe leur mutation sur les
régions Hauts-de-France et Normandie.
Parmi les 22 machines affectées au dépôt
d'Achères, certaines reçoivent l'équipement
pour la réversibilité en multiplexage (pousse
des rames Corail réversibles et V2N), d'autres
non transformées assurent des trains Corail
classiques sur Le Havre, Caen, Cherbourg et
Trouville-Deauville.
Mais c’est la fin pour leur aventure normande
où elles sont désormais remplacées par des au-
tomotrices Omneo Premium Z 56600 à deux
niveaux très capacitaires avec leurs 10 caisses.
Il reste, toutefois, onze machines basées au
Landy pour assurer, au départ de Paris-Nord, des
trains à destinations d’Amiens, Saint-Quentin,
Creil et Compiègne. Mais pour combien
de temps ? ◼

La BB 15045 R en
livrée Corail Plus
passe à Asnières en
pousse de l'Intercités
3112 Le Havre/
Paris-Saint-Lazare le
15 août 2018.

4 - ferrovissime
La rame RITA 398 est en tête d’une UM assurant le TGV 8707 à destination de Quimper en novembre 2021.

RITA ou Rénovation InOui

TGV Atlantique Texte et photos: Jehan-Hubert Lavie

Après avoir fait plus de 30000 fois le tour de la Terre pendant plus de
30 années, 28 rames TGV Atlantique bénéficient d’une opération confort.

S
ur un effectif initial de 105 TGV Atlan-
tique, il reste 28 rames en service qui
vont bénéficier d’une opération confort
dénommée RITA – acronyme de Rénova-
tion InOui TGV Atlantique.
Au 1er novembre 2021, huit rames (343, 367,
368, 388, 398, 399, 402, 404) avaient été rénovées,
vingt autres (340, 356, 358, 360, 361, 362, 364,
366, 369, 370, 372, 379, 386, 387, 391, 392, 395,
401, 403, 405) restant à traiter jusqu’en 2022.
Les rénovations RITA se déroulent dans les
établissement SNCF de Bischheim et de Rennes-La
Janais, dans l’ancienne usine Citroën de Saint-
Jacques-de-la-Landes devenue annexe du Techni-
centre de Rennes depuis 2014. L’atelier alsacien et
l’atelierbretontraitent,chacun,unerameparmois.
À cette occasion, elles reçoivent la livrée InOui rehoussage des sièges, l’installation du WIFI, une La rame RITA 343
agrémentée, sur les motrices, de stickers verts modification de l’éclairage et la rénovation des est en attente de
mettant en avant leur fonctionnement bas car- toilettes. Certaines rames bénéficient en plus départ pour Nantes
en gare de Paris-
bone, leur économie d’énergie et leur durabilité. d’autres opérations plustechniques. RITA redonne
Montparnasse en
Mais RITA applique surtout une remise à ni- aux TGV A du potentiel jusqu’en 2029. Avec de novembre 2021.
veau des intérieurs Lacroix avec notamment un futurs records kilométriques à la clé ? ◼

ferrovissime - 5
Histoire au présent

Un AMP 800 en livrée ZOU! passe au Chaudan dans la vallée du Var en juin 2021 en assurant le train 6 Saint-André-les-Alpes (15h24) / Nice (17h45).

La livrée ZOU ! en voie

métrique aussi
La livrée ZOU! va très bien aux autorails AMP 800 des Chemins de fer
de Provence, intégrés au réseau ZOU ! depuis 2018.
Texte : Jehan-Hubert Lavie / Photos : Lionel Daumas

L es Chemins de fer de Provence (CP) ex-

ploitent une ligne à voie métrique longue
de 151 km assurant un service suburbain
de voyageurs entre Nice et La Vésubie-Plan-
du-Var ainsi que la desserte des hautes vallées
jusqu’à Digne-les-Bains.
Depuis janvier 2014, l’exploitation est assurée
par la Régie Régionale des Transports de Pro-
vence-Alpes-Côte d’Azur (RRT) dont les dessertes
ont intégré le service TER Provence-Alpes-Côte
d’Azur (PACA) qui porte maintenant la marque
ZOU ! Et une seyante livrée à dominante bleue.
En cours d’application sur le matériel à voie
normale engagé sur les TER PACA et sur les cars de
la région, la livrée ZOU ! est également porté par
les quatre autorails doubles AMP 801/802, 803/804,
805/806 et 807/808 construits en 2010/11. ◼
Le train 7 Nice (17h15) / Saint
André-les-Alpes (19h45) travers
Le Salvaret le 17 juillet 2021

6 - ferrovissime
© L. GOSSELIN

La 040 DE 45, magnifiquement restaurée par le CMCF en août 2021.

Une Brissonneau des charbonnages

restaurée par le CMCF Texte : Laurent Gosselin

Le CMCF de Oignies est réputé pour l’excellence de ces restaurations de

machines. Une réputation qui se confirme avec cette cousine des BB 63500.

A chetés par les HBNPC (Houillières du Bas-

sin Nord et du Pas-de-Calais) en 109exem-
plaires, ces locomotives construites par
Brissonneau-et-Lotz sont directement
dérivées des BB 63500 achetées par la SNCF,
mais avec un moteur MGO sans turbo.
Notre engin, sorti d'usine sous son numéro
de série 040 DE 46, commence sa carrière au
groupe de Béthune en 1961 sous le numéro 24. Il
est ensuite muté au groupe de Lens-Liévin, avant
d'être transféré le 31 mars 1984 au groupe Centre
où il prend le numéro 45. En 1980, il est rattaché
au groupe d'Hénin Lietard.
En avril 1990, il est repris par la cokerie de
Drocourt jusqu’à sa fermeture en 2002. Le CMCF
© N. DELDYCKE

s'en porte alors acquéreur. La 040 DE 45 sert

alors de locomotive de dépannage chez des em-
branchés. Puis, de 2008 à 2011, elle est prêtée
comme machine de réserve à LDCT avant d’être
utilisée pour les manœuvres sur la plateforme Le freinage, la partie électrique, la révision Côté grand
de Dourges Delta 3. du diesel, tout y passe. capot, la 040
À son retour à Oignies, le constat est sans ap- Aujourd’hui, c’est une machine restaurée DE 45 exposée
pel. L'engin doit subir une profonde rénovation. conforme que le CMCF peut présenter, précieux à Oignies.
C'est au printemps 2019 que l'équipe s'attaque témoignage des réseaux miniers des HBNPC
à un énorme travail de chaudronnerie. d’autrefois. ◼

ferrovissime - 7
Histoire au présent

À l’automne 2020, l’X 97054 longe la plage de Calvi en direction d’Isula-Rossa.

Trois Soulé fidèles au poste

en Balagne Texte et photos : Jehan-Hubert Lavie

32 ans de carrière sur des lignes aux conditions de circulation

très difficiles : les vaillants X 97050 corses à voie métrique
méritent un coup de chapeau !

P ointe du trafic voyageurs entre Calvi et

Isula-Rossa (Ile-Rousse), la saison esti-
vale 2021 a bien débuté pour les deux
autorails Soulé affectés au service des
Tramways de la Balagne, immatriculés X 97054
et 97055. Un troisième engin, l’X 97051, passait
alors en révision aux Ateliers de Casamozza.
dessertes Calvi/Isula-Rossa et à la banlieue de
Bastia. Pour prolonger leur carrière, les X 97051,
97054, 97055 ont bénéficié d’une opération de
rénovation en 2019. ◼

Rappelons que les X 97050 sont des autorails

monocaisse construits par Soulé à Bagnères-de-
Bigorre en 1989 (97051 à 55 à deux moteurs
Poyaud) et 1997 (97056 et 57 à deux moteurs
Cummins). L’effectif d’origine de sept autorails
est accompagné par six remorques XR 9701 à 6
munies d’une cabine pour marche en réversibilité.
Cela permet d’adapter les compositions: X + XR,
éventuellement avec un second autorail, avec ou
sans remorque, pour former une rame de trois
ou quatre caisses. Toutefois, les autorails étant
équipés d’une cabine de conduite aux deux bouts,
il est possible de les engager également en solo.
Remotorisés avec deux moteurs MAN, ces
autorails à transmission hydraulique Voith ont Il y a 20 ans, les Soulé roulent parfois en solo durant les périodes creuses. Comme ici,
été engagés sur la ligne Bastia/Ajaccio de 1989 l’X 97057, alors très récent, qui entre en gare de Vizzavona en transportant les étudiants
à 2012 avant d’être remplacés par les puissants et lycéens montés à Corte. Il nous montre sa face généralement attelée à une remorque.
AMG 800. Les X 97050 sont alors affectés aux À l’époque, la SNCF est partie prenante dans l’exploitation des CFC.

8 - ferrovissime

Le retour d’une 140 C
sur le RFN
Voilà plus de 30 ans qu’elle n’avait pas roulé sur le réseau ferré
national, cette 140 C avec son tender 34 X. Autant dire que son
retour était attendu!
L a140C27estsortiedesateliersNorth-British
Locomotive Company Limited de Glasgow
en 1917. À l’issue de sa carrière commer-
ciale à Sarreguemines, elle est sauvegardée
par la CITEV et assure des trains spéciaux avant
d’être classée Monument Historique en 1987. Sa
dernière sortie sur le RFN remonte au printemps
1989, à l’occasion du 150e anniversaire de la ligne
Montpellier/Sète...
Bénéficiant d’une grande révision en 2011,
elle est cantonnée aux allers et retours entre
Anduze et Saint-Jean-du-Gard, sur la ligne tou-
ristique de 13 kilomètres du Train à Vapeur des
Cévennes, jusqu’au samedi 9 octobre 2021,jour
La 140 C 27 est
vue 'haut-le-
pied' traversant
la petite halte de
Boucoiran avant un
arrêt technique à
Nozières-Brignon.
Texte et photos : Christophe Masse
de son retour entre Alès et Nîmes sur le grand
réseau !
Après deux années de démarches adminis-
tratives, le Groupement d'Aide au Développe-
ment des Exploitations Ferroviaires Touristiques
(GADEFT) a obtenu l'agrément pour faire circuler
la 140 C 27 sur les lignes de SNCF Réseau. Désor-
mais à l'abri au musée ferroviaire de Nîmes, cette
140 C présente la particularité d’être accouplée
au gros tender 34 X 151 provenant d’une 150 X.
Les nombreux amateurs présents lors de son
grand retour rêvent déjà d’un train spécial sur
la ligne des Cévennes, rêve qui pourrait devenir
réalité courant 2022… ◼
ferrovissime - 9
Histoire au présent
Les six BB 27000 vendues à Captrain sont les BB 27034, 27037, 27042, 27046, 27048, 27051.
Les Prima fêtent leurs 20 ans
La locomotive modulaire développée et fabriquée
par Alstom à Belfort fête ses vingt années de carrière.
C ommandéesparlaSNCFà180exemplaires,
les locomotives BB 27000 construites
par Alstom sur la base de la plateforme
Prima débutent leur service en Avignon
dès le 2 décembre 2001 avec un petit roulement
de 5 journées, commutable avec les CC 6500 et
BB 25500. Au 1er janvier 2002, le parc des nou-
velles locomotives Fret comptabilise 10 engins
(27002, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 14). Les livraisons
vont s’étaler jusqu’au début de l’année 2006.
La baisse du trafic marchandises conduit
Fret SNCF à vendre 70 Prima EL 2U (BB 27111
à 180) à Akiem en 2010 pour les louer
10 - ferrovissime
© F. DURIVAULT
Texte Nicolas Husson
auprès d’autres entreprises ferroviaires :
VFLI (aujourd’hui Captrain), ECR, ETF, CFL
Cargo, Colas Rail, Combiwest, Lineas France,
Naviland, Regiorail… Parmi les nouveautés,
trois locomotives (27155, 175 et 178) ont été
modifiées récemment par Akiem pour rouler en
Hongrie et forment la série 491 000. La 27028E
est le prototype pour l’équipement ERTMS, qui
est en cours d’installation sur les 27093 à 27110.
Enfin rappelons que Fret SNCF s’est séparé
dernièrement de six engins vendus à Captrain
et que la 27115 a été accidentée en 2012 puis
radiée. ◼
u tout début de sa
arrière, la BB 27010,
ui fait partie du
remier lot livré,
volue à Woippy.
© N. HUSSON
Médiathèque
Texte : Aurélien Prévot
CC 72000
Par Thierry Nicolas. 380 pages (format
29,7 x 21 cm) richement illustrées en
couleurs sous couverture souple illustrée.
En vente en librairie pour 57 euros + port.
Les CC 72000 sont des machines
mythiques: les diesel les plus puissants
de la SNCF, construits à 92 exemplaires.
Ce livre leur rend hommage d’une manière
originale. Après un bref rappel historique et
un tableau des principales caractéristiques
techniques, l’auteur évoque quelques
machines originales et indique les lignes
parcourues régulièrement par ces engins.
Suivent ensuite plus de 370 pages de photos
classées par ordre de numéro. Ainsi la
CC 72001 est traitée des pages 7 à 16 avec
des clichés des années 1970 à 2006. Puis
c’est au tour de la CC 72002 des pages 17
à 23 et ainsi de suite jusqu’à la CC 72092.
Les dernières pages sont consacrées aux
machines de la même famille roulant au
Portugal, en Argentine et au Maroc. Une
manière originale de traiter une série
d’engins mais qui présente l’avantage de
n’oublier aucune machine et ravira donc
tous les aficionados de ces fabuleux engins.
La longue marche du dépôt
du Mans
Par Benoît Hardy. 160 pages (format
27,5 x 22,5 cm) illustrées en couleurs
sous couverture souple illustrée.
En vente chez LR Presse pour 32
euros + port (code DEPOTMANS2).
Ce deuxième tome de l’histoire du
dépôt du Mans par Benoît Hardy évoque
les quarante dernières années en
commençant par les modernisations
des années 1980 qui entraînent
la fermeture du dépôt-triage de
Le Mans-Maroc et le développement
du dépôt de Pontlieue. Les services
évoluent dans les années 1990 avec
les différentes réorganisations qui touchent la SNCF. Si le fret a tendance déjà
à diminuer, l’activité est compensée par la possibilité pour les Manceaux de
conduire des TGV. Du côté du TER, c’est l’arrivée de matériel neuf qui dope
la fréquentation des lignes. La dernières partie, très courte, évoque le début
du XXIe siècle. Comme dans le premier tome, l’ouvrage parle à la fois du
dépôt et de son histoire, mais aussi et surtout des engins de traction qui y
ont séjourné avec une analyse de l’évolution des roulements. De nombreux
métiers du dépôt sont expliqués ainsi que leur évolution au cours des années.
On regrettera l’absence de sommaire ou de table des matières détaillées.
Pékin-Hankou,
la grande épopée
Collectif. 272 pages (format 23,5 x
31 cm) richement illustrées en N&B et
couleurs sous couverture cartonnée
illustrée aux éditions Cana. En vente chez
LR Presse pour 34,90 euros + port.
Dépaysement garanti avec ce remarquable
ouvrage sur une ligne hors norme
construite de 1899 à 1905 pour relier
Pékin à Hankou (Wuhan). Les Chinois,
se méfiant des visées impérialistes de la France, du Royaume-Uni, des
États-Unis ou du Japon, confient la construction à la Société générale
de Belgique afin d’avoir accès aux technologies et financements
occidentaux sans danger. C’est Jean Jadot, ingénieur belge qui supervise
la construction et surmonte les difficultés: révolte des Boxers, traversée
du Fleuve jaune… L’iconographie du livre est exceptionnelle.
ferrovissime - 11
Trésors d’archives

DE LYON-PERRACHE À
PARIS-GARE DE LYON
VIA PARAY-LE-MONIAL
12 - ferrovissime
 En mai 1980, le 5984 qui
a été forcé de 2 éléments
au passage à Nevers
redémarre vers Paris après
avoir desservi la gare de
La Charité-sur-Loire.

Express 1120/19, 1520/19, 5964/65 ou bien 5984/85 :

portés au fil des services par le même train, ces numéros
cachent une vraie curiosité : un long parcours « autorail ».
Texte et photos : Éric Hospital

ferrovissime - 13
Trésors d’archives
Le 27 juillet 1981, le 5485 croise aux environs de St Agnan (entre Paray-le-Monial et Gilly-sur-Loire) la RGP 1 vaisoise
assurant le 1562/63 Metz/Clermont-Ferrand.
L
e parc autorails de la SNCF d’après-guerre a
eu pour vocation essentielle d’effectuer des
liaisons à courtes ou moyennes distances, à
l’exception des RGP en charge des grandes
courses à travers l’hexagone. Mais il y a eu
quelques moutons à cinq pattes qui ont permis
de voir des autorails du parc ordinaire assurer des
liaisons particulièrement longues. On peut citer
Nantes/Limoges (341 km, voir Ferrovissime n°58),
Marseille/Clermont-Ferrand (432km), Toulouse/
Lyon (671km) et quelques autres.
L’une d’elle, inattendue, mérite une atten-
tion particulière. Apparue au service d’hiver
1963-64, cette relations joint Lyon-Perrache à
Paris-Gare de Lyon par un itinéraire alternatif à
la grande ligne du PLM et pour le moins original
Dans la boucle de Claveisolles, le 5485 croise en mai 1981 un train complet
d’hydrocarbures Lyon/Paray-le-Monial remorqué par une UM de BB 67000
(67005 menante).
14 - ferrovissime
puisqu’il passe par Paray-le-Monial, Moulins et
Nevers. Alors que le tracé par Dijon fait 512 km,
celui via Paray-le-Monial affiche 509 km. Les deux
itinéraires, qui font route commune sur 20 km
entre Perrache et St Germain-au-Mont-d’Or et sur
68 km entre Moret-les-Sablons et Paris-Gare de
Le 22 juillet 1981,
Lyon, sont donc de longueur équivalente mais le 5985 s’apprête
tellement différents à parcourir. à desservir la
gare de Lamure-
Départ de Perrache sur-Azergues
Montons à bord de l’autorail en gare de Perrache. où stationne
Départ… À hauteur du grand triage situé au nord un X 3800
immobilisé là
de Lyon, la double voie pour Roanne quitte l’artère suite à un incident
impériale et s’infléchit sur la gauche vers l’horizon ayant entraîné
barré par les monts du Beaujolais et le Mont d’Or. une demande de
Elle commence à s’élever en pente douce vers ▶▶▶ secours.
 Les EAD de Nevers ont longtemps assuré les 5984/85. Trois d’entre eux stationnent en juillet 1992 sur les voies de sortie de leur dépôt
d’attache aux côtés d’un ETG en fin de carrière, relégué à des courses Nevers/Dijon.

Profil et tracé sont tellement trompeurs que notre double

voie se donne un air de ligne de montagne

Par une chaleur écrasante d’août 1976 au lieu-dit Pont-Carreau à proximité de Saincaize, l’EAD en charge du 5985 roule à travers
la campagne nivernaise vers Moulins et Lyon.

ferrovissime - 15
Le 5985 a un stationnement de 18 mn à Moulins en juillet 1983 pour relever la correspondance du Rapide 3505 Nantes
/Lyon-Perrache via Roanne, à qui le chef de service donne le départ.

▶▶▶ le «mur des Sauvages» mais notre relation
n’aura pas à l’affronter puisqu’après avoir franchi
un court souterrain (200 m) dès la sortie de la gare
de Lozanne, elle bifurque vers la droite. C’est ici
que débute vraiment la ligne dite de «l’Azergues»
en s’insérant dans la vallée éponyme.
Notre parcours n’a été ouvert en totalité que
tardivement puisqu’il faut attendre 1900 pour
que l’ultime tronçon (Lozanne/Paray-le-Monial)
soit mis en service. Créé dans le but de soulager
la ligne impériale, notamment pour les trains
de messagerie, cet itinéraire a aussi vocation
à offrir une possibilité aisée de détournement
entre Paris et Lyon en cas d’interception de la
grande artère.
Après le souterrain de Lozanne, le profil com-
mence à se raidir en remontant le cours de la
rivière qui prend un petit air de torrent et c’est
une rampe continue atteignant 10 mm/m qui
permet à la ligne de gagner Lamure-sur-Azergues.
À partir de là, le profil et le tracé sont tellement
trompeurs que notre double voie se donne un air
de ligne de montagne, ce qu’elle n’est pourtant
pas. En effet, même si la rampe ne dépasse pas
les 10 mm/m, nous arrivons au pied d’une cu-
riosité du réseau national plutôt spécifique des
régions montagneuses. Dès la sortie de gare de
St Nizier-d’Azergues, la ligne s’engouffre dans
le souterrain de Claveisolles dont le portail se
situe juste sous le viaduc dit «de la Boucle» qui
supporte notre ligne et sur lequel nous passerons
dans quelques minutes.
Une boucle complète à Claveisolles
Vous l’aurez compris : il s’agit d’un tracé
formant une boucle hélicoïdale, la boucle de
Par une froide
Claveisolles, qui permet à la voie en suivant une journée de
rampe quasi constante de 10 mm/m de racheter décembre 1981,
42 m de dénivelé. Un premier quart de tour est après avoir été
effectué dans le souterrain de Claveisolles (1262 m), arrêté au carré
puis la double voie continue à l’air libre dans un d’entrée de
paysage alpestre de sapins en effectuant un demi- Nevers, le 5984
redémarre dans
tour grâce à une courbe serrée de 500 m de rayon, un panache de
enfin elle traverse la modeste halte de Claveisolles fumée noire
(qui a perdu sa desserte ferroviaire depuis 1997) caractéristique de
avant de pénétrer dans le souterrain de Viguès ▶▶▶ ces engins.

Pendant l’été 1976, le 5984 vient de franchir le grand pont sur la

Loire et s’apprête à marquer l’arrêt en gare de Nevers distante de
quelques centaines de mètres.

16 - ferrovissime
Scène de correspondances à Paray-le-Monial en août 1984: le 5985 (15h38/40) dépose des voyageurs dont certains emprunteront
l’X 3837 pour Montchanin assurant le 7521 (départ 15h45) tandis que certains voyageurs arrivés de Montchanin par le 7516
(EAD XR 8653, arrivée 15h24) embarquent dans le 5985.

L’étonnant parcours de l’autorail

Paris/Lyon via Paray.

10 août 1966: le dépôt de Paray-Le-Monial avec ses 141 E et 242 TC est encore tout imprégné
de ses origines PLM, un régal pour l’amateur.

Une fréquentation raisonnable basée sur du cabotage local

C’est donc à l’hiver 1963-64 qu’apparaît pour la première
fois la relation Lyon-Perrache / Paray-le-Monial / Moulins /
Nevers / Paris-Gare de Lyon. Numéroté 1120 et repris comme
«Express» dans le Chaix avec l’énigmatique carré noir (voir
Ferrovissime n°57), l’autorail quitte Lyon à 9h35 pour rejoindre
son terminus à 16h12, soit un parcours de 6h37 offrant une
moyenne de 76,92 km/h. Une performance respectable
quand on sait qu’il observe 20 arrêts intermédiaires (il est
omnibus de Moulins à Nevers !) et stationne 15 mn à Nevers
pour permettre le forcement éventuel de la composition.
Dans le sens impair, le 1119 quitte Paris-Gare de Lyon à 11h20
pour arriver à Lyon-Perrache à 17h43, toujours avec 20 arrêts
intermédiaires. La marche impaire est donc légèrement plus
rapide que celle du 1120 : 6h23 pour une belle moyenne de
79,73km/h. En comparaison, le 53, seul Express diurne reliant
Paris à Lyon via Dijon met quand même 5h17. Durant toute
leur existence, les horaires de nos relations ne varient qu’à la
marge avec la suppression de l’arrêt de St Pierre-le-Moutier
et la réduction du temps de stationnement à Nevers.
Ces autorails circulent majoritairement seuls sur la
totalité du parcours. Cependant, certains services les
voient circuler en 1520 jusqu’à Nevers puis jumelés au
1120 (venant alors de Clermont) pour Paris. Au retour,
le dégroupement a lieu à Moulins (1119 et 1519).
Leur fréquentation est raisonnable et basée sur du cabotage
local, ainsi que sur la liaison des localités du Charolais-Brionnais
avec la capitale : ils représentent leur seul lien direct avec
Paris. A l’intention de ces voyageurs, la vente de paniers-repas
au passage à Nevers est même prévue pendant un temps. Les
clients utilisant la relation de bout en bout sont anecdotiques.

ferrovissime - 17
Trésors d’archives
La plus longue relation assurée
par des Caravelles ?
Au début, ce sont les X 2800 du
centre autorails de Lyon-Vaise qui
sont à la tâche. Ils excellent sur
un tel parcours où leurs 825 ch
font merveille. Hélas, pour les
conducteurs et les clients, cette
situation ne dure qu’un an car
dès le service d’hiver 1964-65,
le dépôt lyonnais engage ses
X 4300 certes tout neufs mais
bien moins puissants et moins
confortables. La puissance limitée
de ces engins (425 ch) complique
Été 1976 : il y a beaucoup de monde en cabine de l’XR 8654
(des conducteurs en formation) pour assurer le 5984 forcé
la tâche des conducteurs qui
à 3 éléments au départ de Nevers sur la voie 2 Paris, comme doivent faire preuve d’une grande
l’indique le caisson lumineux visible à droite du cliché. dextérité pour tenir l’heure tant
la marche est serrée. L’arrivée au
dépôt de Nevers des X 4630 qui
reprennent ces trains au début
des années 1970 n’apporte pas de
remède au manque de puissance,
mais les voyageurs gagnent en
confort avec la transmission
hydraulique Voith qui évite l’effet
accordéon lors des démarrages.
Les EAD restent fidèles à ces
relations jusqu’à leur limitation
à Nevers. Il faut noter que
ces trains ont probablement
été les plus longues relations
assurées en roulement par
des X 4300/4500/4630.

▶▶▶ (260 m de long en courbe resserrée à 400 m).
Ça y est, le tour complet est réalisé et notre autorail
passe sur le viaduc de la Boucle au-dessus de la
gare de St Nizier-d’Azergues. La rampe s’adoucit
à la traversée de la gare de Poule-les-Echarmeaux,
puis le faîte de la ligne est atteint au milieu du
long souterrain des Echarmeaux (4153 m) mar-
quant l’entrée en Bourgogne. Depuis Lozanne,
la rampe est continue et nous avons rattrapé un
dénivelé de 326 m en 46 km.
Désormais, la vallée de l’Azergues est aban-
donnée et une longue pente (11 puis 10 mm/m)
de 48 km conduit notre ligne à travers les prairies
du Charolais jusqu’à Paray-le-Monial. Le passage
sur le grand viaduc en pierre de Mussy (561 m)
est un moment fort de cette section.
Jadis grand centre ferroviaire, Paray-le-Mo-
nial voit converger trois doubles voies venues
de Lyon, Montchanin et Moulins ainsi que deux
voies uniques arrivant du Coteau (Roanne) et
de Mâcon. Un dépôt conséquent a été édifié dès
1870 à l’ouest de la gare voyageurs.
Deux rotondes au dépôt
de Paray-le-Monial
Doté de deux rotondes partiellement cou-
vertes et d’un atelier de levage, cet établissement
compte jusqu’à 123 locomotives à son effectif en
1937. Paray-le-Monial a été autrefois un terrain
de prédilection pour tout amateur de chemin de
fer. Lorsqu’en 1966, je découvre ce temple, quelle
surprise de trouver autour du pont tournant, bien
sûr les omniprésentes 141 R en service, mais
aussi des ex-PLM : 5-141 E et F ainsi que quelques
5-242 TC hélas froides depuis peu de temps. Une
étape à Paray-le-Monial est alors toujours source de
surprises. Ainsi, en juillet 1969, outre les ultimes
141 R charbonnières chaudes de Nevers venant
encore relayer dans ce dépôt, ai-je pu découvrir
des engins inédits, tous issus du PLM : 5-030 TD 2,
5-030 A 1, 5-040 A 51, 5-230 B 114, 5-231 H 8. Un
festival de photos rendu possible grâce à l’am-
abilité du personnel de l’époque qui accueille
avec sympathie les amateurs même non munis
de l’autorisation officielle. Toutes ces vapeurs,
évidemment froides, sont là en vue d’intégrer
pour certaines la collection de Mulhouse après
remise en état.
C’est désormais une ligne au profil haché que
notre autorail 5984 suit jusqu’à Moulins. Une
succession de nombreuses mais courtes pentes et
rampes de 10 mm/m enlève toute monotonie à la
conduite sur cette ligne, à voie unique depuis ses
origines entre Gilly-sur-Loire et Moulins (37 km).
En 1984, la rotonde à quatre voies couvertes de
L’autorail
Gilly-sur-Loire est toujours debout, vestige de la franchit le viaduc
bifurcation vers Cercy-la-Tour. Bientôt surgit sur de la Boucle
notre gauche une autre rotonde, le fantôme du surplombant la
dépôt de Moulins voué depuis la fin de la vapeur voie désormais
à des fonctions moins ferroviaires. unique depuis
septembre 1995,
la gare de St
En route pour Paris par l’artère Nizier-d’Azergues
du Bourbonnais est cachée par la
C’est l’entrée en gare de Moulins et nous voilà forêt à la sortie
sur l’artère du Bourbonnais. Notre autorail re- de la courbe.

18 - ferrovissime
Une UM2 d’X 4630 (dont l’élément de tête à la livrée impeccable sort tout juste de révision) assure le 5984 sous le soleil estival de juin 1976.
Sur l’artère du Bourbonnais au nord de Nevers, la modernisation n’est pas encore d’actualité, comme en témoigne l’abondante nappe téléphonique.
Le 5984 composé ce 23 avril 1987 d’une UM2 d’X4630 dessert Digoin, gare
fret dotée d’une halle de transbordement rail/route (notamment de coïls)
car elle traite le trafic des Forges de Gueugnon, distantes d’une quinzaine
de kilomètres et non reliées au rail.
trouve la double voie qui va le mener sans au-
cun obstacle de profil jusqu’à son terminus. Mais
auparavant, il va traverser quelques points remar-
quables : Saincaize où se détache la transversale
vers Nantes, Nevers siège d’un grand dépôt ther-
mique et de grands ateliers du Matériel que l’on
aperçoit peu après le départ de la gare. Puis ce sera
Cosne-sur-Loire, Montargis et Moret-les-Sablons où
notre itinéraire vagabond rejoint la ligne impériale
Histoire d’eau
Ce 23 avril 1987, le 5984 (X 4638+XR
8650) est mis à quai à Lyon-Perrache
sans eau pour les toilettes. La situation
est inadmissible pour une course de
509 km et de plus de 6h ! On imagine
la situation des malheureux voyageurs
si le plein n’avait pas été finalement
effectué en gare sur intervention du
contrôleur. Voilà bien une preuve que les
EAD, surnommés « Caravelles », n’étaient
pas conçus pour les grands parcours.
électrifiée quittée à St Germain-au-Mont-d’Or, et
que nous empruntons jusqu’à Paris-Gare de Lyon.
Les Lyon/Paris via Paray ne survivent pas à
l’électrification du Bourbonnais et sont logique-
ment limités au trajet Lyon/Nevers à la mise sous
tension de Paris/Nevers.
Aujourd’hui, la ligne de l’Azergues est fantoma-
tique. Victime collatérale de la mise en service
du TGV Sud-Est qui a redéfini le rôle de l’artère
impériale, elle n’a cessé de décliner pour être
finalement mise en voie unique de Lozanne à
Paray-le-Monial le 25 septembre 1995. ◼
ferrovissime - 19
Comment ça marche ?
Dédiée pendant la saison hivernale au raclage mécanique de la section Brive-la-Gaillarde/Vierzon, la BB 22212
est équipée de deux pantographes continu racleurs en acier, reconnaissables à leurs cornes jaunes.
La protection contre le givre
P
L’hiver, le givre est hénomène météorologique na-
turel et fréquent, mais qui reste
combattu par les difficile à prévoir, le givre génère
exploitants car il un mauvais captage du courant
et des disjonctions fréquentes
peut occasionner pour les engins moteurs électriques.
Constitué de cristaux de glace plus ou
des dégradations sur moins séparés par des inclusions d’air,
le matériel moteur et il forme un léger isolement entre le fil
de contact et le pantographe, notam-
sur les installations. ment par temps de brouillard lorsque
la température est inférieure à 0°C.
Texte : Frédéric Didelot
Lorsqu’un train roule, le givre en-
gendre la formation d’arcs électriques
entre le fil de contact et l’archet du
pantographe, lesquels provoquent
un échauffement qui va entraîner
la détérioration des bandes d’archet
du pantographe, qu’elles soient en
cuivre ou en carbone. La répétition
de ces arcs électriques peut entrainer
au bout de plusieurs dizaines de kilo-
mètres la rupture de l’archet, voire la
20 - ferrovissime
© B. HILLERET
destruction du pantographe. Ce phé-
nomène d’échauffement peut aussi
se rencontrer à l’arrêt, au niveau du
fil de contact lors des opérations de
préchauffage d’une rame, de démar-
rage ou d’accostage d’une locomotive,
pouvant entrainer sa rupture.
Ce phénomène est plus particuliè-
rement gênant sous caténaire 1500 V,
car les intensités à l’origine de ces arcs
électriques sont bien plus importantes
qu’en 25000 V.
Les mesures préventives
appliquées
Pour éviter ces conséquences, plu-
sieurs types de mesures préventives
sont possibles. Tout d’abord, l’agent de
conduite (ADC) doit lever, s’il existe, le
2ème pantographe de façon à amélio-
rer le captage du courant en ajoutant
un autre point de contact entre le fil de
contact et le circuit électrique de l’en-
© N. HUSSON

La fréquence régulière des circulations entre Paris et Orléans a permis de dégivrer le fil de contact,
alors que les autres éléments de la caténaire et l’ensemble de la végétation sont recouverts de givre.

Ces arcs électriques peuvent entrainer la rupture

de l’archet, voire la destruction du pantographe
gin moteur. Le premier pantographe
joue également un rôle de raclage pour
enlever la pellicule de givre. L’ADC doit
aussi s’efforcer de limiter la puissance
absorbée, en utilisant la position 1 du
sélecteur de puissance quand il existe,
et ne pas utiliser les crans de shuntage.
D’autre part, des locomotives, équi-
pées de pantographes spéciaux avec
des archets en acier (plus résistants
que ceux en cuivre ou carbone, mais
moins bons conducteurs électriques),
peuvent aussi être mises en circulation
sur les sections de ligne où ces phéno-
mènes de givre sont récurrents, afin
d’assurer le raclage mécanique du fil
de contact. Des BB 8100 ou 9200 hors
service, encadrées par des engins diesel,
ont joué ce rôle pendant des années.
Actuellement, ce sont des BB 7200 ou
22200, à pantographes équipés d'archets
en acier spécifiques, qui assurent cette
fonction, en circulant haut-le-pied à 100
km/h. Conduites par des ADC dédiés à
cette tâche, elles sont alors interdites
de remorquer des circulations com-
merciales pendant la saison hivernale.
D’autres mesures parfois contrai-
gnantes pour les circulations
En complément, un dégivrage du fil
de contact par effet Joule est également
possible sur certaines sections de ligne
équipées. Il s’agit de faire fondre le
givre, en « réchauffant » temporaire-
ment la caténaire, en jouant sur les
intensités appelées par l’engin mo-
teur ou en effaçant une sous-station
sur deux.
Néanmoins, l’effet de ces deux
solutions n’est que de courte durée :
elles ne peuvent protéger que certains
trains et n’ont pas une efficacité ab-
solue, le givre se reformant au bout
de quelques dizaines de minutes. Des
expérimentations sont en cours sur
plusieurs réseaux pour éviter que le
givre adhère au fil de contact en pul-
vérisant régulièrement des produits
hydrophobes, permettant une protec-
tion de l’ensemble des circulations
commerciales.
Lorsque ces méthodes se révèlent
insuffisantes, plusieurs mesures pallia-
tives peuvent être prises, mais qui ont
des impacts sur les plans de transports.
Les circulations en mode thermique
peuvent être privilégiées, notamment
avec des TER bimode (AGC, Regiolis)
pour préserver les archets des pan-
tographes. Des limitations de vitesse
à 70, 100 ou 120 km/h peuvent être
également décidées par les gestion-
naires des circulations, tout comme
des modifications des ordonnance-
ments des circulations en modifiant les
horaires de certains trains pour qu’ils
se succèdent à des intervalles réduits
et éviter que le givre se reforme. ◼

ferrovissime - 21
Stars du rail

DES CC 6500
À 200 KM/H
SUR LE SUD-OUEST
Texte: Frédéric Didelot

22 - ferrovissime

Grâce à leurs 8000 ch,
les CC 6500 étendent le
200 km/h au quotidien.
À l’heure où ces machines
font l’actualité modéliste,
revenons sur cette
glorieuse épopée.
P
eu après sa livraison en
août 1969, la CC 6502
réalise plusieurs essais
au cours de l’automne
pour vérifier son aptitu-
de aux grandes vitesses.
Avec son rapport de réduction GV per-
mettant de rouler à 220 km/, elle valide
les options techniques retenues. Sans
préparation particulière, elle parvient
à atteindre 240 km/h entre Les Au-
brais et Vierzon, mais aussi à respecter
l’horaire du Capitole avec un tonnage
presque doublé, porté à 700 t au lieu
Par tous les temps,
le Capitole roule
Il neige en cette fin de matinée de février
1971 alors que la CC 6521 démarre de
Brive-la-Gaillarde en tête du TEE 1029
«Le Capitole du Matin» pour Toulouse.
© E. HOSPITAL
des 370 t habituelles permises pour
les BB 9200.
D’autres essais sont menés au cours
du premier semestre 1970 avec les
CC 6508 et 09, qui sont détachées
temporairement de Lyon-Mouche à
Paris-Sud-Ouest, pour vérifier le com-
portement des installations électriques
existantes sur Paris/Bordeaux et Paris/
Toulouse. Pour utiliser toute la puis-
sance disponible des CC 6500, il est in-
dispensable de renforcer la caténaire
(construction de nouvelles sous-stations,
rénovation de celles d’origine, ▶▶▶
ferrovissime - 23
Stars du rail

© F. DURIVAULT
Dès le début des années 1980, la 2e classe est introduite sur les trains C200 confiés aux CC 6500. Ici, à Paris-Austerlitz,
derrière la CC 6522, les trois voitures Grand Confort qui suivent l’A4Dtux ont été réaménagées en 2e classe.

La CC 6518 a quitté Brive depuis quelques minutes et emmène vers Paris-Austerlitz le TEE 1030 "Le Capitole du Matin" dont l'habituelle composition © E. HOSPITAL
homogène de voitures Grand Confort est forcée de deux A9 UIC rouges aptes à 200 km/h, anciennes habituées du Capitole remorqué par les légendaires
BB 9200 rouges.

Deux conducteurs en cabine

à 200 km/h
À l’origine, les trains circulant à 200 km/h avec les CC 6500 sont
systématiquement assurés par deux Conducteurs Electriciens.
Sur Paris/Bordeaux, il n’y a pas d’arrêt intermédiaire et les
deux agents se partagent la conduite, en théorie à mi-parcours
au niveau de Poitiers, entre deux zones à 200 km/h. Sur Paris/
Toulouse, la présence des deux agents est limitée à la
© S. ASSEZ

section de la ligne au nord de Limoges où 121 km sur 401 km

sont parcourus à 200 km/h. Il y a systématiquement une relève Pas d’automatisme ni de vitesse imposée sur une CC 6500…
de conducteur à Limoges, pour respecter les connaissances Sur les parcours à 200 km/h, la présence d’un second
lignes des conducteurs ou leurs amplitudes de travail. conducteur qualifié est exigée.

24 - ferrovissime
 © E. HOSPITAL
En juillet 1971, la CC 6518, en tête du TEE 1030, le "Capitole du matin", quitte les quais de Brive et passe sous l'ancien poste B,
démoli depuis, qui commande l'extrémité nord (côté Paris) de la gare voyageurs.

Respecter l’horaire du Capitole avec 700 t

au lieu des 370 t habituelles permises pour les BB 9200
▶▶▶ installationd’unfeeder),maisaussi
d’adapter la voie (installation du dispo-
sitif de préannonce, renouvellement
de certaines sections, rectification de
certaines courbes car pour rouler à
200 km/h, le rayon doit être supérieur
ou égal à 1 700 m).

D’abord reprendre le Capitole

Les CC 6512 à 6531 sont livrées
neuves à Paris-Sud-Ouest entre février
1970 et mars 1971. Pour le changement
de service d’été débutant le 31 mai
1970, les six locomotives disponibles se
rendent depuis Paris à Tours, Bordeaux,
© J.C. MARACHIN

Tarbes, Hendaye et Limoges. Au fur et

à mesure des livraisons, elles écartent
En août 1970, la CC 6512 est à Morcenx avec le Sud-Express composé de voitures DEV les BB 9200 et les CC 7100 des trains les
inox et une A7D UIC limitées à 160 km/h. plus lourds et les plus prestigieux: ▶▶▶

ferrovissime - 25
Stars du rail
© D. ROLLAND
▶▶▶ Puerta del Sol, Drapeau, Etendard,
Iberia-Express.
Pour le service d’hiver1970-71, elles
investissent la radiale Paris/Toulouse,
remplaçant les BB 9200 qui assu-
raient les quatre Capitole (1029/1030,
1009/1010). Ces quatre trains troquent
alors leurs voitures UIC contre les
lourdes et luxueuses voitures Grand
Confort.LasectionGuillerval/Cercottes
désormais parcourable à 200 km/h, en
complément de celle entre le pont de
la Loire au sud d’Orléans jusqu’au tun-
nel de l’Alouette au nord de Vierzon,
permettent d’atteindre une moyenne
honorablede120km/h,les712kmétant
parcourus en 5h56 malgré les faibles
vitesses permises au sud de Limoges.
Comme la charge remorquée est limi-
tée à 570 t, soit 10 voitures, des trains
supplémentaires sont mis en place
lors des pointes de trafic. Les CC 6500
remorquentcesdédoublements(notam-
ment le vendredi), mais aussi les triple-
ments (lors des grands départs jusque
Brive) et même les quadruplements
(Pâques, Pentecôte) du Capitole, qui
sont assurés en voitures UIC « rouges »
ou DEV Inox, à la vitesse maximale de
160 km/h.
Sur Bordeaux, un lancement
en fanfare avec l’ORTF
Les CC 6500 sont alors partagées lement vers Limoges et Narbonne ;
dans trois roulements : - roulement 922 commutable CC 6500 /
- roulement 920 pur CC 6500 avec CC 7100 avec 2 journées de roulement
2 AR Paris/Bordeaux, 2 AR Paris/Hendaye, vers Biarritz avec notamment des TAC.
2 AR Paris/Toulouse, 1 AR Paris/Limoges,
26 - ferrovissime
Le TEE 5/4
« Etendard »
ne rejoint les
trains tracés à
200 km/h qu’à
l’été 1973.
Roulement 920 – 28 septembre 1980
CC 6500 avec préannonce
Journée Parcours Trains assurés Km
1 Toulouse 1h51 / Juvisy 12h31 Messagerie 55490
1292
Paris 21h53 / Bordeaux 3h32 307
2 Bordeaux 8h00 / Paris 11h58 TEE 2 Aquitaine
Paris 17h00 / Bordeaux 21h05 163 Montaigne 1737
Bordeaux 23h34 / Paris 5h34 4716
3 Paris 8h04 / Poitiers 10h48 161
Poitiers 11h24 / Paris 14h13 3452 1464
Paris 19h00 / Limoges 22h32 4413
4 Limoges 23h34 / Paris 5h13 Messagerie 58446
Paris 7h41 / Toulouse 13h48 TEE 75 Capitole du matin 1426
Toulouse 17h44 / Paris 23h52 TEE 76 Capitole du soir
5 Paris 7h39 / Bordeaux 11h53 TEE 5 Etendard
Bordeaux 17h50 / Paris 21h40 TEE 4 Etendard 1747
Paris 23h56 / Bordeaux 6h10 4025
6 Bordeaux 9h05 / Paris 13h40 168 Drapeau
1158
Paris 17h50 / Bordeaux 21h40 TEE 1 Aquitaine
7 Bordeaux 6h00 / Paris 10h05 162 Montaigne
Paris 13h25 / Toulouse 20h23 4409 2005
Toulouse 21h43 / Paris 6h29 4424
8 Paris 9h38 / Narbonne 18h45 471 Barcelona Talgo
1138
Narbonne 20h22 / Marseille 23h17 4553/52
1 AR Paris/Tarbes, soit 7 journées de lance en fanfare le 200 km/h sur Paris/
roulement pour 10 955 km. Bordeaux. Une émission spéciale est dif-
- roulement 921 commutable CC fusée par l’ORTF pendant 4 heures, en
6500 / BB 9200 avec 3 journées de rou- direct depuis un train spécial Aquitaine
200, suivi par un hélicoptère assurant
le relais. Remorqué par la CC 6516, il
est composé d’une voiture électrotech-
nique et de sept voitures Grand Confort.
Le dimanche 16 mai 1971, la SNCF Il s’apparente à un studio de ▶▶▶
Roulement 921 du 28 septembre 1980
CC 6500 sans préannonce
Journée Parcours Trains assurés Km
1 Paris 6h45 / Irun 14h04 4001
Hendaye 19h22 / Dax 20h30 4008 985
Dax 23h32 / Pau 4826
2 Pau 6h06 / Bordeaux 8h30 4001/00
Bordeaux 12h58 / Paris 18h55 4010 1523
Paris 21h59 / Toulouse 6h09 4429
3 Toulouse 10h21 / Limoges 14h22 4406
Limoges 16h18 / Paris 20h41 4402 1426
Paris 21h53 / Toulouse 6h59 4425
4 Toulouse 7h07 / Narbonne 9h18 90501
Narbonne 12h48 / Toulouse 14h18 470 Barcelona Talgo 1013
Toulouse 21h05 / Limoges 1h14 4420
5 Limoges 3h08 / Paris 7h33 4416
1624
Paris 18h02 / Irun 0h30 303 Puerta del Sol
6 Hendaye 3h10 / Paris 10h15 300 Puerta del Sol
Paris 18h30 / Poitiers 21h07 167 1433
Poitiers 22h48 / St Pierre-des-Corps 0h01 Messagerie 53436
7 Tours 1h45 / Bordeaux 5h17 4099
Bordeaux 6h45 / Paris 11h33 4040 1330
Paris 18h19 / Limoges 22h25 4433
8 Limoges 1h40 / Paris 5h44 4422
Paris 9h10 / Irun 17h00 4003 1301
Hendaye 22h28 / Dax 23h38 170
9 Dax 6h25 / Tarbes 8h18 172
Tarbes 13h41 / Paris 21h34 4803/160 1251
Paris 23h59 / Tours 2h26 4359
10 St Pierre-des-Corps 4h45 / Poitiers 6h00 Messagerie 54359
Poitiers 9h49 / St Pierre-des-Corps 11h25 Messagerie 38394
Tours 15h37 / Paris 18h14 3426 937
Paris 21h28 / Brive-la-Gaillarde 3h13 4417
11 Brive-la-Gaillarde 4h27 / Juvisy 13h15 Messagerie 58544
621
Paris 18h13 / Les Aubrais 19h22 4637
12 Les Aubrais 0h28 / Limoges 3h58 Messagerie 58165
Limoges 6h18 / Paris 9h49 4412
Paris 13h40 / Limoges 19h13 Messagerie 58159 1180
Limoges 21h36 / Brive-la-Gaillarde 23h27 24059
13 Brive-la-Gaillarde 1h34 / Limoges 2h48 4416
Limoges 14h33 / Paris 18h00 4406 1211
Paris 20h19 / Toulouse 4h21 4415
14 Toulouse 5h46 / Paris 13h25 4404
1292
Paris 18h50 / Bordeaux 23h30 169 Drapeau
15 Bordeaux 3h52 / Irun 7h12 307
Hendaye 8h53 / Dax 10h02 4006
Dax 12h52 / Tarbes 14h33 4810 1336
Tarbes 16h02 / Paris 23h35 4811/4000
16 Paris 4h05 / Bordeaux 13h16 4017
1158
Bordeaux 17h53 / Paris 23h08 4002

ferrovissime - 27
Stars du rail
© J.C. MARACHIN

CC 6513 et voitures Grand Confort : en août 1970, l’Etendard entre en gare de Bordeaux-St-Jean.
Malgré le matériel engagé, ce train est encore limitée à 160 à l’époque du fait de son tonnage.

▶▶▶ télévision, avec journalistes, ani-
mateurs et techniciens de l’ORTF à bord.
Cette mise en scène marque l’opinion
publique, qui découvre que 181 km
sur les 579 km de cette relation sont
parcourables à 200 km/h, autorisant
une moyenne de 145 km/h. Cet exploit
quotidien justifie que le TEE Aquitaine,
équipé de 9 voitures et tarant 510 t,
reçoive les numéros 1/2. Le TEE Eten-
dard, numéroté 5/4, ne rejoindra le
cercle des trains aptes à cette vitesse
qu’à l’été 1973, le temps d’adapter la
transmission des CC 6500 pour re-
morquer jusqu’à 680 tonnes, soit 14
voitures. Les travaux d’amélioration
de l’infrastructure s’achèvent en 1976,
ce qui permet de gagner une dizaine
de minutes sur Paris/Bordeaux. Les TEE
Aquitaine et Etendard sont alors tracés
en 3h50 à 151 km/h de moyenne.
outre la 6534 de mai 1976 à mai 1978),
provenant de Lyon-Mouche entre mars
1975 et mai 1978. Elles n’intègrent pas
immédiatement le roulement noble
comportant les trains à 200 km/h, car
elles restent limitées à 160 km/h, le
temps de les équiper de la préannonce
et de resserrer leur pas de maintenance.
Pour réagir à la baisse de fréquenta-
tion des TEE, la SNCF décide de créer
à l’automne 1980 le premier Corail
200, baptisé « Montaigne ». Numéroté
163/162, il relie Paris à Bordeaux en
4h05 et ouvert aux deux classes. Les
adaptations sur les voitures Corail se
limitent à l’ajout d’anti-enrayeurs.
Le parc des CC 6500 du Sud-Ouest est
réparti entre deux roulements :
• d’une part, le 920 réservé aux CC
6500 équipées de la préannonce, qui
comporte9journéesderoulementpour
13 817 km, soit une moyenne journa-
lière de 1535 km. 25 trains sont au pro-
gramme, dont les 8 TEE et seulement
deux messageries, les autres étant des
rapides et express.
• d’autre part, le 921 destiné aux CC
6500 non équipées de la préannonce
ou dont l’équipement n’est pas opé-
rationnel, qui ne comporte donc pas
de train roulant à 200 km/h. Il déroule
16 journées pour 19 621 km parcourus,
soit une moyenne journalière de 1226
km. 47 trains sont au programme, dont
six trains de messageries.
La 2e classe en conquête
Le succès de la formule « 2e classe »
conduit à créer chaque année une fré-
quence Corail 200 supplémentaire :
le Drapeau 169/168 en septembre
1981, le 4001/4000 Paris/Hendaye en

Sur Toulouse, on augmente

les charges
Sur Paris/Toulouse aussi, les tonnages
remorqués augmentent, à la suite de
la livraison de voitures Grand Confort
supplémentaires. Les Capitole peuvent
désormais comporter 12 voitures à par-
tir de l’été 1974, puis 14 à partir du
service d’hiver 1974, soit le maximum
permis pour les trains roulant à 200
km/h. Malgré 100 t de plus, le temps
de parcours n’augmente que de 3 mi-
nutes à 5h59.
© F. DURIVAULT

Pour remplacer les 2D2 5500 en

cours de réforme, l’effectif des CC
6500 de Paris-Sud-Ouest est renforcé Entrée en gare de Bordeaux-St-Jean en 1986 de la CC 6520 avec un express Corail
par 12 locomotives (CC 6502 à 11, 32, 33, comportant une allège postale PEz en tête.

28 - ferrovissime

La CC 6524 de PSO en charge du TEE 1030 «Le Capitole du Matin» vient de desservir la gare de Brive-la-Gaillarde et longe les installations
du triage d’Estavel en octobre 1970.
septembre 1982, puis les 4007/4006
en 1983 et 4009/4014 Paris/Tarbes en
1984. A l’été 1984, les TEE Aquitaine
et Etendard perdent leur statut de
TEE et intègrent des voitures Corail.
Le même phénomène se rencontre
sur Paris/Toulouse, où des voitures de
2ème classe sont adjointes aux deux Ca-
pitole en deux temps, en juin 1982
puis en septembre 1984. Pour accom-
pagner ces développements, l’effectif
de Paris-Sud-Ouest est renforcé en dé-
cembre 1984 par la CC 6534, puis en
entre octobre et décembre 1985 par
les CC 6535 à 38.
L’arrivée du TGV Atlantique sur Paris/
Bordeaux à partir du 30 septembre 1990
entraine la quasi-disparition de tous
les trains classiques aptes à 200 km/h
sur Paris/Bordeaux/Hendaye, à l’excep-
tion de deux allers-retours de fin de
semaine et quelques supplémentaires
d’été. Les CC 6500 aptes à 200 km/h
conservent ces trains, mais se recentrent
sur les lignes Paris/Les Aubrais/Tours et
L’opinion publique découvre que 181 km sur les 579 km
de cette relation sont parcourables à 200 km/h
Paris/Limoges/Brive/Toulouse, où de
nouveaux trains aptes à cette vitesse
sont créés en réutilisant les voitures
Corail adaptées.
Néanmoins, le comportement à
200 km/h des CC 6500 pose difficul-
té, en raison des dégradations sur les
tables de roulement des roues. Pour
limiter ces effets et mieux contrôler
la puissance transmise, un automate
programmable est installé en 1988
sur les 6534, 36 et 37, permettant de
jouer le rôle d’un système de vitesse
imposée au-delà de 150 km/h, et des
amortisseurs anti-lacet sont également
mis en place.
Fin de l’aventure en 1998
Le moindre besoin en locomotives
aptes à 200 km/h conduit à ramener la vi-
tesse maximale à 160 km/h d’une partie
du parc de Paris-Sud-Ouest, en modifiant
le rapport de réduction GV par le biais
du remplacement d’un pignon moteur.
Elles sont progressivement mutées à
© E. HOSPITAL
Vénissieux en 1992 (6507, 09, 16, 20, 26),
1993 (6517, 33, 35, 38), 1994 (6505, 08, 18,
21, 25, 28, 32), 1996 (6514) et 1997 (6527,
34, 36, 37). Gravement accidentée, la
6519 est amortie par anticipation en
mai 1994.
Ces mouvements sont rendus pos-
sibles par la modification des trois BB
7261, 62 et 63, aptes à V200, qui récu-
pèrent le train de nuit Barcelona-Tal-
go en mai 1993, et par l’arrivée des
BB 26000 sur Paris/Limoges/Brive. Les
15 dernières CC 6500 de la première
sous-série perdent en septembre 1997
leur monopole d’accès à Toulouse depuis
Paris, à la suite de la modernisation de
la courte section de 16 km entre St Jory
et Toulouse avec installation d’une ca-
ténaire unifiée. Ne conservant que la
traction du Capitole, de 2 AR Paris/Brive
et quelques trains de nuit pour encore
une année, elles sont mutées à leur tour
en janvier 1998 (6503, 06, 22, 23, 29, 30)
puis en novembre 1998 (6502, 04, 10,
11, 12, 13, 15, 24, 31) à Vénissieux. ◼
ferrovissime - 29
Les portraits du rail

Au milieu des années 1960, la 2-040 D 138

du dépôt de Persan-Beaumont stationne
en gare de Presles-Courcelles. Elle assure
le train couvrant la desserte marchandises
© A. LEPAGE

omnibus Persan-Beaumont/Monsoult-
Maffliers/Luzarches et retour.

30 - ferrovissime
 PORTRAIT DU RAIL

LES 040 D DE L’EST

ET DU NORD
DE VAILLANTES PETITES MACHINES
EN TÊTE DES TRAINS LES PLUS VARIÉS
Texte : Frédéric Didelot

ferrovissime - 31
Les portraits du rail
© Y. BRONCARD / COLL. T. NICOLAS

La 2-040 D 270 devant la rotonde n°1 de son dépôt d’attache : Longueau. Construite
pour l’Alsace-Lorraine alors allemande (EL), elle n’a pas été modifiée par le Nord.

Le triomphe de la surchauffe
EN 1902, LES CHEMINS DE FER
PRUSSIENS KPEV METTENT EN SERVICE
LES G 8 SELON LES PRINCIPES DE LEUR
INGÉNIEUR ROBERT GARBE QUI PRÔNE
© DR / COLL. D. WALIGORA

UNE SIMPLICITÉ DE CONCEPTION ET

L’APPLICATION DE LA SURCHAUFFE.

L
es résultats obtenus avec ces G 8 à sur-
chauffe sont éloquents : elles tractent
700 t là où le type précédent à vapeur
saturée - les G7.1 - ne prend que 350 t.
Ce sont donc les G 8 de Robert Garbe
qui consacrent la technique de la
surchauffe, brevetée en 1895 par un
ingénieur de Kassel, Wilheim Schmidt.
Les bons résultats obtenus avec le
type G 8 conduisent les KPEV à étu-
dier une variante - les G 8.1 - pour corriger les
quelques défauts mis en évidence. Tout d’abord,
la structure est renforcée avec l’utilisation de tôles
plus épaisses. Une nouvelle chaudière mieux
dimensionnée est installée, avec un timbre qui
passe de 12 à 14 hpz, tandis que la surface de grille
et celle de la surchauffe augmentent d’environ
20%. Cela est rendu possible par la mise au point
de nouvelles huiles résistantes aux hautes tem-
pératures. En contrepartie, la masse augmente,
ce qui permet d’améliorer l’effort de traction,
mais elles ne peuvent plus circuler que sur des
lignes autorisant 18 t par essieu. Une partie du
parc reçoit des améliorations supplémentaires,
avec un réchauffeur Knorr ou un système de
détartrage installé au niveau du dôme.
D’emblée, il est bon de préciser que ce sont
les G 8.1 qui forment, après-guerre en France, la
série 040 D sur les Régions Est et Nord, tandis que
les G 8 « tout court » forment la série 040 C ▶▶▶

32 - ferrovissime
 La 2-040 D 61 au dépôt de
Longueau en octobre 1967. Machine
attribuée au Nord, sa porte de boîte

▶ CARACTÉRISTIQUES GÉNÉRALES ◀ à fumée arbore encore le macaron

de son ancien réseau.
G 8.1
Longueur: 10,880 m
Masse en ordre de marche: 67 t
Vitesse maximale : 55 ou 60 km/h
Puissance: 1 270 ch
Diamètre des roues motrices: 1,350 m Les G8 de Robert Garbe
Timbre : 14 hpz
Surface de grille: 2,63 m²
consacrent la technique
Surface de chauffe: 147,1 m²
Surface de surchauffe: 49 m².
de la surchauffe

ferrovissime - 33
© DR / PHOTOTHÈQUE LR PRESSE Les portraits du rail

Petite, trapue, avec de longs porte-à-faux avant et arrière encadrant les quatre essieux moteurs, voici la G 8.1 prussienne.
Ici, la 1-040 D 101 attribuée à l’AL lors de l’Armistice de 1918.

▶ DES LOCOMOTIVES SUPPLÉMENTAIRES

Les G 8.1 forment, après DITES « PRISE DE GUERRE » ◀
guerre, la série 040 D, tandis Pour compléter ce parc « Armistice », une dépêche
ministérielle du gouvernement français du 31 août 1919

que les G 8 « tout court » décide que les compagnies sont considérées comme
acquéreur des matériels ferroviaires allemands restés
sur leur territoire au moment de l’armistice. Cela permet
forment la série 040 C à l’Est et au Nord, mais aussi à l’AL, de bénéficier de
locomotives supplémentaires dites « prise de guerre ».
© Y. BRONCARD / COLL. T. NICOLAS

Comme la quasi-
totalité des G 8.1,
la 2-040 D 454 est
attelée à un petit
tender prussien
à 3 essieux, ici,
le 2-16 C 125).

34 - ferrovissime
© Y. BRONCARD / COLL. T. NICOLAS

La 2-040 D 454
(ex-Est et aupara-
vant ex-P.O) vient
terminer sa carrière ▶▶▶ de l’Est et du Nord (ces dernières feront
au dépôt de Calais
l’objet d’une étude ultérieure dans Ferrovissime).
en 1969.
Un effectif colossal de 5111 machines !
5111 exemplaires sont construits entre
1912 et 1921. Plusieurs réseaux allemands en
commandent (outre ceux de Prusse, ceux du
Mecklembourg et d’Alsace-Lorraine) tout comme
des industriels sidérurgiques pour leurs propres
besoins, mais aussi les chemins de fer polonais,
roumains, lituaniens, suédois.
La G 8.1 est si réussie qu’elle sert de base aux T
14, une locomotive tender développée dès 1914,
en particulier pour assurer la traction des trains de
minerais de fer et de houille. 36 sont construites
pour l’EL en 1915-17 et six supplémentaires re-
joignent le parc AL après l’Armistice (8501 à 8546,
futures 1-141 TA 501 à 546). Deux autres réseaux
français en récupèrent : l’Est (4656 à 4682, futures
1-141 TA 656 à 682) et l’Etat (42-901 à 923, futures
3-141 TA 901 à 923 puis 1-141 TA 301 à 323).
Très utilisées pendant la première guerre mon-
diale en tête de lourds trains de marchandises,
plus de 1500 de ces G 8.1 sont attribuées à titre de
dommages de guerre dans plusieurs pays d’Europe,
notamment la France, la Belgique, la Pologne…
Bien que concurrencé par des locomotives plus
puissantes à cinq essieux moteurs (G 12/BR 58
puis BR 44 et 50) dans les années 1930, le parc
resté en Allemagne formant la série BR 55 à la
DB et à la DR circule en RDA jusqu’en 1965 et
en RFA jusqu’en 1971. ◼

▶ LES MACHINES « DOMMAGES DE GUERRE » DE L’ARMISTICE ◀

À l’issue de la première guerre
mondiale, le traité de Versailles
prévoit que l’Allemagne doit
réparer les dommages causés
pendant la guerre, étant le pays
considéré comme à l’origine
du conflit. Il est décidé que des
ponctions seront faites sur le
parc de locomotives à vapeur
allemandes. Les compagnies du
Nord et de l’Est le demandent
particulièrement, car leurs
infrastructures situées sur la
ligne de front des tranchées,
mais aussi leurs matériels et
leurs ateliers ont été les plus
touchés. Si le parc des autres
compagnies est resté similaire,
l’entretien a en revanche été quasi
inexistant alors que le matériel
servait beaucoup, du fait des
difficultés d’approvisionnement,
les matières premières étant
utilisées pour les besoins de
l’industrie de l’armement.
La demande initiale des
compagnies françaises porte
sur 5000 locomotives récentes,
soit l’équivalent du parc du
PLM à l’époque. D’autres pays
d’Europe réclament aussi leur part.
Finalement, 1946 locomotives
sont attribuées par la commission
interalliée aux réseaux français :
Nord (544), Est (311), Etat (303),
AL (286), P.O (254), PLM (177)
et Midi (71). S’y ajoutent plus
de 55000 wagons. Contre toute
attente, aucun critère industriel
n’est retenu pour définir les
locomotives à prélever sur le
parc allemand : le choix par la
commission interalliée se fait sur
l’état d’usure des bandages des
locomotives, sans considération
de l’état des autres organes de la
locomotive ou d’une quelconque
vision de standardisation.

ferrovissime - 35
Les portraits du rail

© DR / COLL. A. PRÉVOT
Stationnant près
de la 1-242 TA 606

865 G 8.1 partagées entre

d’Hausbergen en
1962, la 1-040 D
403 symbolise les
mutations qui ont

les sept réseaux français émaillé la carrière

des G 8.1 françaises.
En 1938, elle était

A
lors partie intégrante de l’empire allemand,
les chemins de fer impériaux d’Alsace-Lor-
raine (EL : Elsass-Lothringen) reçoivent
137 locomotives neuves de type G 8.1 entre
1913et1919,construitespourlaplupartàGraffens-
tadenparl’ElsässischeMaschinenbauGesellschaft,
future SACM (Société Alsacienne de Constructions
Mécaniques). Elles sont numérotées 5151 à 5287
par l’AL, mais dix sont manquantes (5169, 5196,
5198, 5202, 5227, 5237, 5239, 5242, 5248 et 5271)
car conservées en Allemagne : elles intègreront
ensuite l’effectif de la DRG.
Ces parc est complété, d’une part par 138 loco-
motives, immatriculées 5001 à 5138, versées par
l’Allemagne à titre de prestations d’armistice par
plusieurs directions régionales prussiennes des
KPEV, et d’autre part par 72 locomotives, numé-
rotées 5301 à 5372, appartenant aux KPEV mais
à l’Ouest sous le
restées sur le territoire d’Alsace-Moselle et consi- numéro 3-040 B 903.
dérées comme prises de guerre. Affectée au Nord en
1945 sous le numéro
Pour renforcer le parc luxembourgeois, 20loco- 2-040 D 303, elle y
motives (5119 à 5138) sont mises à disposition de est modifiée avec une
la Société royale grand-ducale des chemins de fer penture de porte de
Guillaume-Luxembourg de 1920 à 1923, qui est boîte à fumée en Y.
exploitée par l’AL. En 1935, le parc AL est réduit Puis mutée à l’Est où
de 70 unités. 30 locomotives sont vendues aux elle devient 1-040 D
403.
Chemins de Fer Algériens qui les immatriculent
4-E 1 à 30. 39 autres sont vendues à la Compagnie
de l’Est, tandis que la 5158 est cédée à la DRG à
la suite du référendum du 13 janvier 1935 qui
rattache la Sarre à l’Allemagne.
L’AL améliore ses locomotives
Au cours de leur carrière, elles bénéficient de
certaines améliorations, avec une nouvelle pompe
à air bi-compound et un réchauffeur ACFI pour

36 - ferrovissime
© DR / COLL. D. WALIGORA

Une autre G 8.1 qui a bien vécu : la 2-040 D 549 a été attribuée au P.O qui l’a rétrocédée au
PLM. En 1938, elle est renumérotée dans la série 5-040 E avant d’être affectée après 1945 au
Nord sous le numéro 2-040 D 549, où elle mène une longue carrière - ici, chaude en 1966.

Sur l’AL, une nouvelle pompe à air

Une 1-040 D
bi-compound et un réchauffeur ACFI
alsacienne vient
d’être virée sur pour une cinquantaine d’entre elles
le pont tournant
de Saales.
une cinquantaine d’entre elles qui bénéficient
de tenders de 18 m3 et 5 t de charbon, initia-
lement attelés aux G 11. Ces G 8.1 de l’AL sont
reconnaissables par le maintien de leur cloche à
vapeur, accessoire indispensable pour les lignes
en accotement routier. Leur effectif important les
conduit à être réparties dans l’ensemble des grands
dépôts titulaires de locomotives marchandises :
Thionville, Metz, Réding, Saverne, Strasbourg,
Sélestat, Colmar, Mulhouse.
Elles assurent la traction des trains de mar-
chandises lourds reliant les différents triages du
réseau, mais aussi les trains internationaux vers
le Luxembourg et la Suisse. Elles sont bien plus
© Y. BRONCARD/ COLL. T. NICOLAS

appréciées que d’autres locomotives d’origine

prussiennes G 7 (4301 à 4351, futures 1-040 B
301 à 351), G 8 (5380 à 5393) et G 10 (5401 à 5455
équipées d’une chaudière de P 8 sur un châssis de
T 16, futures 1-050 B 401 à 455). Preuve de leurs
qualités, elles peuvent remplacer sur ces trains ▶▶▶

ferrovissime - 37
Les portraits du rail
© Y. BRONCARD/ COLL. T. NICOLAS

Cette 2-040 D, probablement ex-Etat, assure un train de desserte

sur une voie unique du Nord à la fin des années 1950.

▶▶▶ les G 12 (5563 à 5680 et 5151 à 5159 ex-Est, Là encore, elles sont utilisées sur des trains
futures 1-150 C 563 à 689). En complément, elles lourds de marchandises, notamment les trains
assurent aussi des trains omnibus, notamment de houille dans le bassin minier.
avec des voitures à deux essieux et à plateformes Fidèle à ses habitudes, le Nord apporte plusieurs
ouvertes. modifications à son parc pour unifier les organes :
pompe à air bi-compound, échappement Lemaître
Sur les grandes radiales puis Kylchap, porte de boîte à fumée type Nord
de la Compagnie de l’Est et à penture en Y. Elles sont principalement
La Compagnie des chemins de fer de l’Est reçoit basées dans les dépôts situés à proximité des
au titre des prestations d’armistice 108 locomotives ports de Boulogne, Calais et Dunkerque, mais
du type G 8.1 qui sont numérotées 4292 à 4399 également des grands triages pour assurer les Passée par le P.O
dans la série XII S (S pour Surchauffe). Du fait de relais : Hirson, Laon, Lille-Délivrance, St-Omer, puis le PLM, la
leur charge à l’essieu relativement élevée, elles Valenciennes… 2-040 D 507 a
reçu les apparaux
sont principalement utilisées sur les grandes
de sa dernière
radiales et transversales du réseau en tête de trains région : le Nord.
de marchandises, laissant aux 40001 à 35 (futures
1-140 C 1 à 35) les dessertes plus légères et aux
Decapod de divers types les trains les plus lourds.
Elles sont notamment affectées aux dépôts de
Bar-le-Duc, Belfort, Chalindrey, Chaumont, Epinal,
Longwy, Nancy, Reims, Toul… En 1923, l’Est rachète
52 G 8.1 du P.O et les immatricule en amont de la
série initiale 4240 à 4291, permettant de combler le
manque de locomotives à quatre essieux moteurs.
En 1935, 39 locomotives de l’AL sont rachetées
également par l’Est pour renforcer son parc.
© Y. BRONCARD/ COLL. T. NICOLAS

Au Nord, des machines modifiées

et « nordisées »
La Compagnie des chemins de fer du Nord bé-
néficie également d’un nombre conséquent de
G 8.1 au titre des prestations d’armistice, avec pas
moins de 212 locomotives qui sont numérotées
4.351 à 4.562.

38 - ferrovissime

Une alsacienne typique ! Attribuée au réseau AL à l’Armistice, la 1-040 D 63 a été équipée d’un réchauffeur
ACFI (spécificité AL) et d’une cloche (à droite de la cheminée) utilisée pour annoncer le train circulant sur les
petites lignes alsaciennes établies en accotement ou sur la chaussée des routes.
© Y. BRONCARD/ COLL. T. NICOLAS
Vers 1960, les 2-040 D assurent couramment sur le Nord, des trains omnibus
composés de voitures à essieux modernisées Sud-Ouest et d’un fourgon Nord.
Fidèle à ses habitudes, le Nord
apporte plusieurs modifications
© DR / COLL. LR PRESSE
À l’État, triage à la butte,
manœuvre et pousse
L’Administration des chemins de fer de l’Étatob-
tient 41 locomotives de type G 8.1 au titre des
prestations d’armistice qui sont immatriculées
040-901à941.Ellesbénéficientdeplaqueslatérales
installées sur les flancs de la chaudière. Après un
début de service comme sur les autres réseaux
en tête de trains de marchandises, elles sont fi-
nalement reversées au service de la manœuvre,
où leur puissance à basse vitesse et leurs quatre
essieux moteurs sont appréciés en comparaison
des nombreuses 030 existantes anciennes et peu
performantes. Leur arrivée permet à l’Etat d’éviter
de développer des locomotives de manœuvre
spécifiques envisagées de type 050 T, alors même
que son parc de locomotives mixtes est renouvelé
avec la livraison récente des 140-101 à 370 neuves
(futures 3-140 C 101 à 370) ainsi que des Consoli-
dation d’origine américaine (futures 3-140 A, B, G
et H) et bavaroises (futures 3-140 D) et des 250 Mi-
kado (futures 3-141 C). Pour faciliter la vision des
équipes de conduite lors de ces manœuvres, la
rehausse de la soute à charbon des tenders est dé-
montée, sans que cela péjore leur autonomie ▶▶▶
ferrovissime - 39
© Y. BRONCARD/ COLL. T. NICOLAS Les portraits du rail

En juillet 1963, la 2-040 D 105, typiquement Nord, se distingue de bon nombre de machines vues précédemment par
ses deux baies latérales identiques et la peinture vert 306 (salie !) sur les flancs de son abri et les côtés de son tender.

▶ RÉPARTITION RÉGIONALE ◀
Ancien Numéro
Réseau Ancien Réseau Nombre Origine Numérotation 1938 Numérotation finale
AL 5001 à 5138 138 Armistice 1-040 D 1 à 138 1-040 D 1 à 138
5151 à 5287 127 EL 1-040 D 151 à 287 1-040 D 151 à 287
et 2-040 D entre 213 et 270
5301 à 5372 72 Prises de guerre 1-040 D 301 à 372 1-040 D 301 à 372

Est 4292 à 4399 108 Armistice 1-040 D 492 à 599 1-040 D 492 à 599
1-040 D440à 491ex-PO 1 et 2-040 D 440 à 491 ex-P.O
Nord 4351 à 4562 212 Armistice 2-040 D 1 à 212 2-040 D 1 à 212
État 040-901 à 941 41 Armistice 3-040 B 901 à 941 1-040 D 401 à 403
et 2- 040 D 301 à 341
P.O 1301 à 1370 70 Armistice Est / PLM
Midi 2201 à 2251 51 Armistice 4-040 K 501 à 541 1-040 D 703 à 743
puis 040-501 à 551
PLM 4201 à 4246 46 Armistice 5-040 E 1 à 46 1-040 D 601 à 608
puis 4 E 1 à 46 5-040 E 47 à 64 ex-P.O 2-040 D 501 à 555
Hors inventaire DRG Prises de guerre 1945 1-040 D 801 à 888
2-040 D 601 à 607
Hors inventaire DRG Prises de guerre 1945 en 2-040 D 341 à 380
partie restituées DR+PKP

40 - ferrovissime

La 1-040 D 339 n’est pas une « Armistice » mais une « prise de guerre 1918 », c’est-à-dire une machine allemande capturée
sur le sol français en Alsace et conservée par le réseau AL. Notez l’immatriculation sur la cabine et la pompe ACFI à droite.
▶▶▶ pourleservice.Encomplément,ellesassurent
également la pousse de certains trains lourds
dans les rampes, notamment autour de Rouen.
Peu appréciées au P.O, chassées
par l’électrification au Midi
La Compagnie du chemin de fer de Paris à
Orléans recueille 70 locomotives G 8.1 par le
© DR/COLL. LR PRESSE
« Prise de guerre 1918 » ex-AL, la 1-040 D 346 présente les détails communs
au plus grand nombre de G 8.1 : plaques SNCF, baies arrières de cabine plus
hautes que les baies avant, sablières cubiques équidistantes du dôme.
© DR / COLL. LR PRESSE
biais des prestations d’armistice, numérotées
1301 à 1370. Destinées là-aussi à tracter des
trains lourds, elles sont attribuées aux dépôts
de Bordeaux, Orléans, Poitiers et Vierzon. Peu
appréciées, vraisemblablement du fait du type
de charbon utilisé par cette compagnie, elles
sont revendues dès 1924 à deux autres réseaux :
Est (52) et PLM (18).
La Compagnie des chemins de fer du Midi
se voit octroyer 51 locomotives de type G 8.1
qui sont numérotées 2201 à 2251. Basées à Bor-
deaux, Narbonne, Tarbes et Toulouse, elles sont
utilisées sur les trains de marchandises lourds, aux
côtés des 140 d’origine américaine 4101 à 4140
(futures 4-140 H 801 à 840). Pour améliorer leurs
performances, un nouveau type de réchauffeur
plus économique est essayé sur la 2206 en 1929,
mais l’expérience qui devait porter sur d’autres
locomotives n’est pas étendue, peut être en raison
de la crise économique et des électrifications
réalisées. La fusion de ce réseau avec celui du P.O
en 1934 entraine la numérotation de la série :
040 501 à 551, mais les électrifications réalisées
conduisent le P.O-Midi à se séparer d’une partie
de ces locomotives devenues inutiles. 15 sont ven-
dues aux Chemins de fer du Maroc où elles ▶▶▶
ferrovissime - 41
Les portraits du rail

© DR / COLL. LR PRESSE
La 1-040 D 370, munie de deux pompes à air, nous montre un détail spécifique
aux G 8.1 de l’Est : le gabarit en tube métallique monté sur le tender.

▶▶▶ prennent les numéros 040 A 1 à 15 et sont
affectées sur la partie orientale du réseau, no-
tamment sur le Transsaharien. 17 sont garées à
Bordeaux, deux locomotives sont radiées avant
la création de la SNCF.
Très rapidement déclassées au PLM
La Compagnie des chemins de fer de Paris à
Lyon et à la Méditerranée bénéficie de 46 locomo-
tives G 8.1 au titre des prestations d’armistice qui
sont numérotées 4201 à 4246. Elles sont basées
dans un premier temps dans les dépôts d’Avi-
gnon, Dijon, Dole, Le Teil, Lons-le-Saunier, Mi-
ramas, Nevers, Paris, Villeneuve. Pour renforcer
son effectif, le PLM rachète 18 locomotives du
P.O en 1924, en complément du parc des 140
A 1 à 170 (futures 5-140 J 1 à 170) construites en
1923-25. Elles permettent de remplacer d’autres
séries plus anciennes. L’ensemble est renuméroté
4 E 1 à 64 en 1925. Leur vitesse limitée à 55 km/h
devient rapidement un handicap sur les grandes
lignes du réseau, surtout avec l’arrivée des loco-
motives Mikado PLM (cf. Ferrovissime 90). Plus
assurer la traction des trains de marchandises sur
la ligne du Puy-en-Velay, le cas échéant en double
traction. En 1930, elles sont toutes regroupées à
Avignon et à Langeac, et servent sur des lignes
secondaires sur des trains légers et de desserte.
La crise économique des années 1930 entraine
leur repli sur des services de manœuvre dans
les triages pour le débranchement de trains de
marchandises, mais aussi pour les remontes et la
mise à quai de rames voyageurs. Les trois quarts Affectée au
du parc sont progressivement arrêtés, seule une dépôt de Persan-
Beaumont, la
quinzaine de locomotives restant à l’effectif lors 2-040 D 138 a
de la nationalisation. échappé à toute
« nordification » !
© Y. BRONCARD/ COLL. T. NICOLAS

d’une trentaine de locomotives sont alors basées

à Dole pour être utilisées en tête de trains lourds
sur les lignes de l’étoile vers Dijon, Bourg-en-Bresse
et Besançon/Belfort via la vallée du Doubs. Une
vingtaine d’autres sont affectées à Langeac pour
assurer la pousse sur la ligne des Cévennes et

42 - ferrovissime
 © Y. BRONCARD/ COLL. T. NICOLAS
© DR / COLL. LR PRESSE
Dans sa livrée noire, la 2-040 D 334 (ex-Etat « nordifiée ») La 1-040 D 742 a une origine peu courante
manœuvre avec un train de desserte. puisque c’est une ex-4-040 K ex-Midi.

Reversées à la manœuvre, leur puissance à basse vitesse

et leurs quatre essieux moteurs sont appréciés à l’État
1938 - 1940 : trois années en demi-teinte • Région Sud-Ouest (28) : 4-040 K 501 à
Lors de la création de la SNCF, le parc de G 8.1 541 (ex-Midi), 15 ayant été vendues pour le
attribué aux anciens réseaux à l’issue de la pre- Maroc
mièreguerremondialeapeuévolué.Au1erjanvier • Région Sud-Est (environ 15) : 5-040 E 1 à 64,
1938, il est réparti dans les cinq régions avec des les trois quarts n’étant plus utilisées
lettres de série différentes :
• RégionEst(466):1-040D1à138,151à287,301 Si les régions Est et Nord continuent à les
Ex- 4-040 K, à 372 (ex-AL), 440 à 491 (ex-P.O), 492 à 599 (ex- utiliser intensément en service marchandises en
la 1-040 D 707 Est), 30 ex-AL ayant été vendues pour l’Algérie ligne, celles de la région Ouest ne font que de la
(tender 1-16 C 627) • Région Nord (212) : 2-040 D 1 à 212 (ex-Nord) manœuvre, alors que celles affectées aux régions
est garée en Attente • Région Ouest (41) : 3-040 B 901 à 941 (ex-Etat) Sud-Est et Sud-Ouest n’ont qu’une activité très
d’Amortissement limitée. De ce fait, quelques G 8.1 de la région
(AA). Sud-Est sont mutées vers l’Est, en partie pour
compenser le détachement de sept locomotives
(1-040 D 12, 55, 89, 137, 164, 334 et 342) sur
le réseau de la Société royale grand-ducale des
chemins de fer Guillaume-Luxembourg.

Durant la seconde guerre mondiale, cette série

de locomotives, tout comme d’autres séries Ar-
mistice, sont prélevées par priorité par l’occupant
allemand, d’autant qu’elles correspondent à des
types connus (BR 55), à simple expansion, d’en-
tretien et de conduite faciles. Elles sont utilisées
en Allemagne, mais aussi sur le front oriental.
Une partie est détruite (114 locomotives ex-AL
notamment), d’autres sont conservées par la DR
(à titre d’exemples, la 4-040 K 524 ex-Midi est
© DR / COLL. LR PRESSE

devenue la 55.7259 à la DR, les 1-040 D 5, 72 et

88 ex-AL sont incorporées à la DR et renumérotées
en conservant leurs numéros d’ordre français
55.5005, 55.5072 et 55.5088). ◼

ferrovissime - 43
Les portraits du rail

Les G 8.1
sont regroupées
sur l’Est et le Nord

À
la Libération, la SNCF reprend son action
de rationalisation et de regroupement des
séries de locomotives d’origine Armistice
sur les régions Est et Nord exclusivement.
Les trois dernières 3-040 B Ouest sont mutées sur
Nord et deviennent temporairement les 2-040 D
401 à 403, avant de finalement rejoindre la région
Est en conservant leurs nouveaux numéros pour
devenir les 1-040 D 401 à 403. Le parc d’origine
PLM est partagé, devenant des 2-040 D 501 à 555
en conservant leur numéro d’origine sur le Nord
ou des 1-040 D 601 à 608 pour celles rejoignant
la région Est.
Le parc SNCF est complété par 16 locomo-
tives de la DRG restées sur le sol français et
qui sont considérées comme « prise de guerre ».
9 sont attribuées à la région Est et deviennent
les 1-040 D 801, 810, 829, 835, 850, 851, 853,
873 et 888, les 7 autres à la région Nord où elles
sont numérotées 2-040 D 601 à 607.
Désormais, toutes les G 8.1 sont regroupées
dans la même série 040 D, qu’elles soient sur la
région Est ou Nord. En revanche, il existe des
numéros d’ordre en doublon, de sorte qu’en La 2-040 D 200
cas de mutation d’une région à l’autre, des re- est une locomotive
numérotations sont nécessaires. proximité de la frontière suisse, avec des rames attribuée au Nord à
composées de voitures Armistice C6t à portières l’Armistice de 1918.
Sur l’Est, un déclin rapide latérales multiples, encadrées par des fourgons,
dès la fin des années 1950 puis, par la suite, des voitures métalliques ex-
En janvier 1950, 428 locomotives sont à l’ef- DR à plateforme d’extrémité ouvertes, dites
fectif de la région Est, mais une partie est hors Boîtes à tonnerre. Elles sont aussi utilisées sur
service car en mauvais état à la suite de leur les trains de dessertes locales pour les gares et
séjour en Allemagne. Du fait de leur conduite les embranchements particuliers, sans oublier
à droite, elles sont principalement utilisées sur des manœuvres dans les triages.
les lignes ex-AL, en étant concentrées dans les En Lorraine, les locomotives basées à Epinal et
dépôts d’Haguenau, Hausbergen, Mulhouse, St Dié réalisent, comme leurs sœurs alsaciennes,
Sarrebourg et Sarreguemines. Elles assurent les dessertes marchandises des lignes à voie
des trains de voyageurs omnibus sur les lignes unique vosgiennes qui ont alors encore une activi-
touchant le massif vosgien, mais également à té industrielle importante. D’autres G 8.1 sont ▶▶▶

44 - ferrovissime
 © J.H. RENAUD / COLL. R. THÉVENIN

Service de prestige
vers 1960 autour de
© Y. BRONCARD / COLL. T. NICOLAS

Lille pour les G 8.1

qui remorquent
rapides et express.
Ici, la 2-040 D 572
(ex Compagnie de
l’Est) est en tête de
voitures DEV.

ferrovissime - 45
Les portraits du rail

▶ AFFECTATIONS À L’EST ◀ ▶ AFFECTATIONS AU NORD ◀

AULNOYE 1950 / 1966
AMAGNE 1950 / 1956 BEAUVAIS 1950 / 1957
AUDUN LE ROMAN 1950 / 1965 BETHUNE 1950 / 1966
CHALINDREY 1950 / 1953 BOULOGNE 1950 / 1960
CHALONS SUR MARNE 1950 / 1952 BUSIGNY 1950 / 1953
CHAUMONT 1955 / 1958 CALAIS 1950 / 1969
COLMAR 1950 / 1955 CAMBRAI 1950 / 1955
EPINAL 1950 / 1960 COMPIEGNE 1952 / 1967
FORBACH 1950 / 1957 CREPY 1950 /1951
GRAY 1952 / 1962 DOUAI 1950 / 1965
HAGUENAU 1950 / 1959 DUNKERQUE 1950 / 1955
HAGARTEN FALCK 1950 / 1956 FIVES 1950 / 1952
HAUSBERGEN 1950 / 1965 HIRSON 1950 / 1953
LONGUYON 1950 / 1956 LAON 1950 / 1967
LUMES 1950 / 1953 LA PLAINE 1952 / 1959
METZ FRESCATY 1950 / 1961 LE TREPORT 1950 / 1962 Un destin puremen
MIRECOURT 1950 / 1960 alsacien pour l
LILLE DELIVRANCE 1950 / 1968 1-040 D 255 (+ 1-1
MULHOUSE NORD 1950 / 1966 LONGUEAU 1952 / 1968 C 255) : construit
NANCY HEILLECOURT 1955 / 1959 MITRY 1952 / 1965 pour le résea
NEUFCHATEAU 1950 / 1955 PERSAN BEAUMONT 1952 / 1966 Elsass-Lothringe
SAINT DIE 1950 / 1960 SAINT OMER 1950 / 1951 alors allemand, ell
SARREBOURG 1950 / 1961 devient français
SAINT POL 1950 / 1951 quand l’Alsace et l
SARREGUEMINES 1950 / 1961 SOMAIN 1950 / 1963 Moselle reviennent
STRASBOURG 1950 / 1956 TERGNIER 1950 / 1967 la France
THIONVILLE 1950 / 1957 TOURCOING 1950 / 1960
VAIRES 1957 / 1959 VALENCIENNES 1950 / 1959
Jehan-Hubert Lavie Jehan-Hubert Lavie

▶▶▶ employées pour les dessertes des nom-

breuses mines et usines sidérurgiques situées au-
tour de Thionville, Metz, Nancy, Neuves-Maisons.
Elles assurent la traction des trains de travaux
pour les électrifications en 25000 V des prin-
cipales lignes d’Alsace et de Lorraine. Une fois
ceux-ci achevés, les radiations sont nombreuses
et rapides, d’autant que la diésélisation est en
cours. En 1958, il n’y a plus que 151 locomotives
en service et seulement 41 en 1962. La 1-040 D
260 est la dernière en service et est éteinte en
juillet 1966 à Mulhouse-Nord.
Une remarquable résistance
sur la Région Nord
En 1950, le parc de la région Nord s’élève à
274 locomotives. Elles sont reconnaissables à
leur boîte à fumée spécifique avec le macaron
central et non pas le volant. Elles continuent à
être appréciées pour leurs démarrages vigoureux,
leur facilité de conduite et d’entretien, leurs
freinages efficaces sans oublier leur vaste abri
équipé de rideaux. Elles remplacent des loco-
motives pures Nord, telles les 2-230 A et D, mais
aussi des 2-140 G Pershing d’origine américaine,
tout comme les 2-140 A pourtant plus récentes.
▶ DES G 8.1 EN BELGIQUE ET AU LUXEMBOURG ◀
À la suite de l’Armistice, 583 G 8.1 des KPEV sont attribuées
à la Belgique, où elles forment le type 81 (8100 à 8675 en
1924). Omniprésentes, elles forment la série la plus importante
du réseau belge et constituent la série de base pour le trafic
marchandises à partir des années 1920 jusqu’au début des
années 1960. Les dernières locomotives sont radiées en 1967.
En mai 1946, la SNCF cède aux Chemins de Fer
Luxembourgeois, nouvellement créés, plusieurs G 8.1 qui
intègrent la série 46. Cinq sont d’origine AL : 4601 à
4603 (040 D 35, 164, 334), 4611 et 4612 (040 D 89 et
111) ; les sept autres 4621 à 4627 sont d’origine Est.
Elles demeurent indispensables pour assurer Départ nocturne
les dessertes marchandises locales, autour des pour cette rame de
triages vers les embranchements particuliers, voitures Express
mais aussi les manœuvres. Nord, avec une
Mais c’est à la fin des années 1950 que les 2-040 D engagée
pour acheminer
2-040 D remorquent leurs plus beaux trains: elles
des trains grandes
reprennent entre Lille-Flandres et Tourcoing, lignes entre Lille et
après le changement de sens imposé à Lille, ▶▶▶ Tourcoing.

46 - ferrovissime
 © DR / COLL. LR PRESSE

Elles assurent des trains de voyageurs omnibus avec des voitures

Armistice à portières latérales et des voitures dites Boîtes à tonnerre
© Y. BRONCARD / COLL. T. NICOLAS

ferrovissime - 47
Les portraits du rail

© DR / COLL. LR PRESSE
La 1-040 D 159 est également une Alsacienne hors Armistice, passée de l’EL sous direction allemande au réseau français AL.

▶ DES G 8.1 SUR LES SECONDAIRES ◀

Les 2-040 D Pour pouvoir assurer la traction des trains
dans le cadre du contrat d’affermage mis
Gray par la ligne 25.5 au retour.
Les 1-040 D 97, 514, 561 et 606 sont
remorquent en place pour l’étoile de Gray, la SNCF
met à disposition de la Société générale
les premières affectées à Gray, les trois
premières ayant conservé leurs tenders
leurs plus beaux des chemins de fer Economiques (SE) à
la fin des années 1940 plusieurs G 8.1.
prussiens 1-16 C, alors que la dernière
a reçu un tender 12 A PLM également à
trains : des Elles viennent assister sur les trains de
marchandises lourds les 1-130 B, qui
trois essieux. En janvier 1959, la 1-040 D
494 provenant d’Hausbergen remplace
rapides de/ sont des reconstructions de 030 datant
de 1859 à 1883 avec notamment une
la 606 accidentée. En avril 1961, elle est
échangée contre la 1-040 D 330 d’Epinal.
vers Paris-Nord chaudière neuve, réalisées entre 1906 et
1926 par les ateliers d’Epernay. Pouvant
L’effectif est complété par les 1-040 D 370
et 545. La 040 D 561 est arrêtée en juillet
assurées en tracter 1100 t, elles circulent sur les lignes
Gray/Vesoul, Gray/Chalindrey, Gray/Is-
1962, la 330 en octobre 1962 et la 514
en octobre 1963. Elles sont remplacées

voitures DEV Inox sur-Tille/Châtillon-sur-Seine/Troyes. En

particulier, elles assurent notamment le
« train tournant » Gray/Vesoul/Chalindrey
par la ligne 4 à l’aller puis Chalindrey/
par des 1-140 C, rendues disponibles
par les électrifications et la diésélisation
en cours des lignes de la région Est, qui
peuvent remorquer jusqu’à 1700 t.

48 - ferrovissime
 © DR / COLL. A. PRÉVOT
En mai 1967, la 2-040 D 549 est à Saint-Omer en tête d’une rame d’Express Nord mise en marche à l’attention de steam lovers
britanniques. Cette machine sera radiée au dépôt de Calais le 11 janvier 1969.

▶▶▶ la traction des rapides de/vers Paris-Nord

assurées en voitures DEV Inox (A9 à comparti-
ment, A9s à couloir central, A5s bar-téléphone,
A6s avec cuisine permettant de prendre un repas
à la place) et accompagnées de fourgons OCEM
en livrée vert bleuté clair. Sur cette section ter-
minale, elles remorquent aussi des trains postes,
les LD/DL pour Dijon via Laon et Reims, ainsi
que des trains internationaux vers la Belgique.
Comme sur l’Est, elles participent aux tra-
vaux d’électrification et subissent également
les effets de la diésélisation. En 1958, l’effectif
est ramené à 121 locomotives, partagées entre
© DR / COLL. A. PRÉVOT

les dépôts d’Aulnoye, Béthune, Boulogne-sur-

Mer, Calais, Compiègne, Lille-Délivrance, Laon, La
Plaine, Le Tréport, Longueau, Persan-Beaumont,
Somain, Tergnier, Tourcoing et Valenciennes.
En 1967, la 2-040 D 20 est l’une des huit G 8.1. affectées au dépôt En 1963, l’effectif tombe à 93 locomotives
de Longueau. Elle stationne ici devant la rotonde n°1. puis à 50 en 1966. Les huit dernières, utilisées
autour de Boulogne, Calais et Persan-Beaumont,
sont éteintes en 1968 et amorties au début de
l’année 1969. ◼

ferrovissime - 49

1946-1956 : LA SPECTACULAIRE
MUTATION DU TRANSPORT DES VINS
© F. FÉNINO / COLL. D. PARIS
Avant 1952, les wagons bi-foudres sont plus nombreux que les citernes métalliques dans cette rame manœuvrée par la 030 TX 3 devant
l’EP des Vins Postillon, quai d’Ivry.
Dix années suffisent pour voir disparaitre
les wagons-foudres, détrônés par les wagons-
citernes. Une mutation induite par des motifs
que nous rappelle Philippe Marassé.
Texte : Philippe Marassé
C
onçu à la fin du XIX siècle en
e
réaction aux réticences du né-
goce à l'égard des citernes en
tôle étamée, le wagon-foudre
s'impose rapidement pour
expédier les vins de consommation
courante produits dans le Midi de la
France. Le transport en wagon est en
effet plus économique qu'en fûts : la
tare du wagon plein n'est pas taxée
et le retour à vide coûte moins cher.
De son côté, le chemin de fer bénéfi-
cie d'une économie de poids mort et
supporte une moindre responsabilité,
le wagon revenant mieux et plus vite
que la futaille. Véhicules spécialisés,
les wagons-foudres sont des «wagons
de particuliers » régis par le tarif 29
Cœur de métier
(chapitre 4). Ce texte alloue une rede-
vance kilométrique aux propriétaires
(usagers ou loueurs) qui supportent les
charges d'intérêt et d'amortissement
et les dépenses d'entretien.
Les wagons-foudres
exigent une maintenance
contraignante et couteuse
En 1939, l'effectif des wagons pour
lesvinsimmatriculésparlaSNCFestde
11547 unités, soit 9312 wagons-foudres
et 2235 wagons-réservoirs métalliques.
Construits après 1918, ces derniers
portent une citerne en tôle rivetée ou
soudée dont l'intérieur est émaillé ou
vitrifié pour éviter l'altération du vin et
faciliter le lavage. Les wagons-foudres
représentent donc près de 81% du ▶▶▶
ferrovissime - 51
Cœur de métier
Sur cette photo d’un train militaire prise à une date inconnue, bi-foudre (à gauche) et mono-foudre (au milieu) ont l’aspect
qu’ils conserveront jusqu’à leur réforme.
▶▶▶ parc mais ils cumulent les in-
convénients : prix de revient élevé
du bois (chêne de Bourgogne ou de
Russie), faible capacité (100/190 hl),
spécialisation des véhicules pour
les vins rouges (wagons lie rouge) ou
blancs (wagons lie blanche). Le coût
de la maintenance est important, du
fait des nombreuses interventions exi-
geantes, parfois avec «tombage» des
foudres: lavage, méchage, trappage,
jointage, piquage, serrage des agrafes
et tirants, rebattage, remplacement de
douelles, sommiers, etc. S’y ajoutent
des variations de la contenance liées
aux déformations du bois (d'où la né-
cessité de renouveler le jaugeage), des
soins à donner aux récipients lorsque
le véhicule chôme et des risques de vol
de vin. Par ailleurs, des déformation
des longerons dues au mode de fixa-
tion des foudres par tirants obliques
peuvent être constatés, d’autant qu’ils
présentent une faible résistance aux
chocs, notamment dans les triages,
entraînant des avaries générant un
abondant contentieux. À ces défauts
52 - ferrovissime
L'effectif des wagons pour les vins immatriculés
par la SNCF est de 9 312 wagons-foudres
et 2 235 wagons-réservoirs métalliques
structurels s'ajoute, au sortir de la
deuxième guerre mondiale, la vétusté
du parc (sans compter les véhicules
détruits ou disparus: 312 wagons-ré-
servoirs n'ont pas encore été retrouvés
au 1er décembre 1947).
Le déclin du wagon-foudre
avait débuté avant-guerre
La décennie 1946-1956 voit donc
le réservoir métallique éliminer
progressivement le foudre en bois,
mutation amorcée avant 1939 mais
contrariée par le conflit. Pour financer
cette modernisation, conforme aux
prévisions du plan Monnet, les pro-
priétaires peuvent obtenir le concours
de la caisse de reconstruction des wa-
gons-réservoirs et containers-citernes
créée en 1943.
© DR / COLL. P. MARASSÉ
La modernisation du matériel s'ef-
fectue de deux façons:
- livraison de wagons neufs (châssis et
citernes) par les constructeurs comme
Cadoux ou Fauvet-Girel. Implantée à
Saint-Laurent-Blangy (Pas-de-Calais),
cette dernière entreprise «place» son
matériel par l'entremise de repré-
sentants (elle en emploie un à Sète).
Jusqu'aux années 1960, les commandes
portent exclusivement sur des wagons
à 2 essieux car leur capacité répond
aux besoins du négoce. De plus, ils
reviennent moins cher que les wagons
à bogies. Enfin, leur entretien est plus
économique et plus facile en raison
de l'interchangeabilité de certaines
pièces avec celles utilisées par la SNCF.
- sur les wagons en service, substitution
aux foudres en bois d'une citerne ▶▶▶
© DR

Ici, nous ne sommes pas dans le Languedoc mais en Anjou : une rame de wagons des Établissements Grandin est en attente
en gare d’Ingrandes-sur-Loire.

▶ DES CARACTÉRISTIQUES
BIEN DÉFINIES ◀
Créée en 1943, la caisse de
reconstruction des wagons-réservoirs
et containers-citernes s'emploie non
© DR / COLL. P. MARASSÉ

Cette photo
seulement à financer la mutation, mais ancienne montre
également à normaliser le matériel en la morphologie
imposant des types bien définis. Cette classique d’un
caisse tire une partie de ses ressources wagon foudre.
d'un prélèvement sur les loyers perçus
par les propriétaires-exploitants.
Les nouvelles citernes sont en acier Atelier de
soudé d'une capacité de 200 – pour transformation
les plus courantes – à 350 hl. Elles de wagons-
sont classiquement surmontées d'un foudres en
dôme de dilatation percé d'un trou wagons-citernes
d'homme accessible par une échelle métalliques.
Au premier
et fermé par un couvercle. La vidange
plan, le frein
s'effectue par gravité au moyen d'une d’immobilisation
vanne. Cette vanne est obturée par un à levier et
bouchon à vis (vidange languedocien). l’absence de frein
La citerne est reliée au châssis par un à air montrent
© DR / COLL. P. MARASSÉ

berceau fixé à la partie inférieure du qu’il s’agit d’un

réservoir par l'intermédiaire d'ailerons châssis très
en profilés (disposition déjà observée ancien qui va
sur les wagons conçus par l'OCEM). donc recevoir une
citerne en acier.

ferrovissime - 53
Cœur de métier

© DR / COLL. P. MARASSÉ
Citerne neuve sur un vieux châssis Midi non freiné mais muni de la conduite blanche pour ce Scw 7575228 immatriculé à la SNCF
et appartenant à la Compagnie des Wagons Foudres de Marseille. Sa gare d’attache est Béziers.

▶▶▶ en acier, le châssis subissant à
cette occasion une transformation
plus ou moins profonde en vue de sa
réimmatriculation (remplacement
des brancards ou des traverses de tête,
pose d'organes de choc et de traction
unifiés, application du frein à air, etc.).
Des citernes en tôle de 8 mm
Lorsqu'elles ne sont pas exécutées
par les propriétaires (à l'image de
Pujas à Narbonne), ces modifications
sont confiées aux ateliers privés de
réparations agréés par la SNCF (IP).
Les citernes sont fournies par des
constructeurs (Coder à Marseille, La-
zareth à Annecy, etc.) ou fabriquées
sur place. Tel est le cas aux Ets Julien,
à Cazouls-lès-Béziers, reconvertis en
1948 après s'être consacrés aux wa-
gons-foudres pendant près de trois
décennies. Les tôles de 8 mm com-
posant la citerne sont roulées sur
plus de 2 mètres de diamètre pour
former des viroles qui, placées sur
mannequins, sont assemblées par
soudure électrique avec les fonds
livrés par Arbel.
Après sablage et application d'un
revêtement intérieur émaillé, la ci-
terne est passée au four puis montée
sur son berceau, peinte et dépotée :
le wagon métamorphosé est prêt à
partir !
Début 1951, Julien a déjà trans-
formé 131 wagons. Les foudres de
voyage étant d'excellente facture
(leur douelles sont plus épaisses que
celles des foudres de garde), nombre
d'entre eux connaîtront une nouvelle
carrière dans une cave viticole! Quant
aux châssis qui ne peuvent être réu-
tilisés, ils sont découpés en ferraille
pour la refonte ou expédiés en mar-
chandise roulante en Italie...
En 1956, les wagons-foudres ont
pratiquement disparu puisqu'il n'en
subsiste plus que 550 (sur un total de
5350 wagons-réservoirs). Ils quitteront
la scène peu après mais l'histoire n'a
pas retenu la date du dernier voyage! ◼
> Pour information <
Un prochain article (Dispositions
commerciales et nouvelles
solutions de transport) étudiera les
évolutions en matière de transport
qui ont touché l’acheminement du
vin depuis le Languedoc.

La modernisation s'effectue de deux façons: livraison de wagons

neufs ou substitution aux foudres d'une citerne en acier
54 - ferrovissime
© DR / COLL. P. MARASSÉ

Propriétés de G. Bessière à Sète et immatriculés à la SNCF, ces quatre wagons munis d’une citerne neuve en acier ont été obtenus en remplaçant les
anciens réservoirs en bois. Les vieux châssis sont maintenant munis du frein à air et le wagon au premier plan a perdu sa guérite dans l’opération.
© DR

Cette vue d’un train militaire déraillé permet d’observer la morphologie des wagons-foudre.

ferrovissime - 55
Gares et installations

Les dépôts vapeur de

Nantes des origines à 1960
La présence de trois dépôts, Nantes le doit à sa situation frontière
entre le P.O et l’État, puis, un court moment, entre les Régions Ouest
et Sud-Ouest de la SNCF. Texte : Éric Hospital

56 - ferrovissime
Le gril de Nantes- ▶ LES INSTALLATIONS DU BLOTTEREAU
Blottereau AU TEMPS DE LA VAPEUR ◀
L
À gauche, le bâtiment du
bureau de la feuille. Les 241 P e schéma diffère radicalement des deux autres dépôts nantais.
du dépôt du Mans sont reçues Ici, les concepteurs ont vu grand, rationnel et fonctionnel. Pas
en escale à Nantes à partir de de rotonde mais un plan de voies optimisé avec notamment un
1959. “gril américain”, ou gril en épis, permettant de classer beaucoup
de locomotives sur un espace réduit. Le grand atelier comporte une
première partie accueillant 17 voies couvertes qui débouchent sur
un pont transbordeur de 24 m, lequel dessert la deuxième partie de
l'atelier également couverte. Cet atelier permet de traiter simultanément
pas moins de 35 locomotives en réparations courantes, tout en
assurant également des levages de machines en grande révision.
De nombreuses voies extérieures et parallèles à l'atelier permettent
le stockage d'engins en service ou en attente de maintenance. Il faut
rajouter un pont tournant de 24 m permettant le virage des locomotives
les plus longues sans dételer le tender, ainsi que tous les attributs
classiques d'un grand établissement: vaste parc à charbon de 20000 t
associé à un toboggan mélangeur et distributeur, installation de lavage
des chaudières, TIA, locaux administratifs, foyer des roulants pour
les équipes étrangères, centre d'apprentissage … Le fait de créer un
nouveau dépôt "ex nihilo" dans une zone ne présentant pas de contrainte
d'urbanisme a permis de réaliser une installation très rationnelle. La
comparaison avec le dépôt de Rennes, ayant un effectif voisin, est
édifiante : sur le Blottereau, le kilométrage de voies posées ainsi que
l'espace correspondant à chaque machines ont été divisés par trois, tout
en améliorant grandement les évolutions du matériel dans les emprises.
La proximité immédiate du triage limite au maximum les parcours
des locomotives assurant le trafic marchandises. Les engins rentrant
de la gare de Nantes-Orléans bénéficient d'une voie de circulation
spécialisée entre cette gare et le dépôt. Par contre, et c'est là un vrai
défaut de conception, les locomotives allant assurer un train au départ
de la gare voyageurs ne peuvent emprunter la voie d'échange qui
n'est pas parcourable dans les deux sens et doivent circuler par voie
principale (V1 Angers), ce qui complique la gestion des circulations.
© G. GAUTIER

L
e 16 août 1851 le chemin
de fer en provenance de
Paris via Tours et Angers
arrive à Nantes, ville
que sa situation géogra-
phique appelle à devenir
un important centre
ferroviaire. Dans les années
qui suivent, l'étoile se densifie
rapidement avec des ouvertures
multiples mais deux compagnies
sont présentes, ce qui complique
les choses. La chronologie des
principales ouvertures de lignes
et leurs appartenances peuvent
être ainsi résumées: vers Angers
(1851, P.O), Saint-Nazaire (1857,
P.O), Quimper (1863, P.O), Napo-
léon-Vendée - devenue La Roche-
sur-Yon en 1870 - via Clisson (1866,
État), Sainte-Pazanne et Pornic
(1875, État), Châteaubriant (1877,
P.O), Croix-de-Vie-Saint-Gilles
(1881, État), Segré (1885, État).
Avec une telle étoile de lignes,
la nécessité d'un gros dépôt de
locomotives se fait jour. Mais les
deux compagnies ne travaillant
pas de concert, l’inévitable se
produit: Nantes est doté de deux
dépôts de locomotives, un pour
les machines P.O et un pour les
machines État.
Un dépôt pour le P.O
Le premier établissement à
voir le jour est créé par le P.O. Dé-
nommé Nantes-Mauves, il est ins-
tallé à proximité immédiate, côté
Angers, de la gare de la Prairie de
Mauves située à l'emplacement
de la gare actuelle. Le deuxième
apparaît en 1866: la Compagnie
des Chemins de Fer Nantais (re-
prise par l'État peu après) crée
une première infrastructure
sur l'île de la Prairie au Duc, en
milieu de Loire, qui est très vite
agrandie par l'État dès 1878 pour
devenir le dépôt de Nantes-État,
rebaptisé Nantes - Sainte-Anne
à la création de la SNCF.
Mais la croissance des trafics
amène vite les décideurs à mesu-
rer l'inconfort de cette situation à
deux dépôts. Dès la fin du premier
conflit mondial est lancée l'idée
de créer un établissement unique
destiné à rassembler les activi-
tés de Nantes-Mauves et ▶▶▶
© É. HOSPITAL

ferrovissime - 57
Gares et installations
La rotonde de Nantes - Sainte-Anne en 1954 montre le déclin de l’établissement qui va fermer deux ans plus tard.
▶▶▶ Nantes-État. Le dossier met-
tra deux décennies pour voir le
jour et c'est en novembre 1941
qu'est enfin mis en service le dé-
pôtdeNantes-Blottereau,installé
juste en face du triage éponyme
à l'extrémité côté Angers des ins-
Une surprenante
tallations ferroviaires nantaises.
curiosité: en 1937,
Nantes-Mauves
reçoit quatre Pacific Nantes-Mauves, 10 mois
Midi 231.051 à 054 sur la Région Sud-Ouest !
puis SNCF 4-231 C Le dépôt de Nantes-Mauves
destinées à assurer prend sa forme définitive en
du service sur la 1858 avec la mise en service d'une
ligne Nantes/Saint-
Nazaire. L’une
rotonde à 12 (ou 15) voies et d'un
d’elles circule ici en atelier. Mais il s'avère vite trop
tête d’un train Quai petit car l'ouverture de la ligne
de la Fosse.
© DR
58 - ferrovissime
vers Quimper génère un besoin
importantderelaisdelocomotives.
Et dès 1866, le dépôt est agrandi
tout en gardant sa physionomie.
Puisilestdenouveaul'objetdemo-
dificationsvers1924sansqu'ilsoit
aujourd'huipossibledeconnaître
la nature exacte de ces travaux.
Au 1er janvier 1938, Nantes-
Mauves est attribué à la Région
Sud-Ouest de la nouvelle SNCF.
Mais dès le 2 octobre suivant, il
est rattaché à la Région Ouest, lo-
giquegéographiqueoblige,suiteà
unredécoupagerégionalentreles
RégionsOuestetSud-Ouestquiva
sefaireenplusieursétapesétalées
jusqu'à dans les années 1940! Le
1er novembre1941,Nantes-Mauves
est fermé, absorbé par le nouvel
établissement de Nantes-Blotte-
reau. Il est partiellement démoli
et les installations restantes sont
utiliséescommeCentreautorails
(voir Ferrovissime n°113) avant de
cesser toute activité en septembre
1980. Aujourd'hui plus rien ne sub-
siste du dépôt de Nantes-Mauves.
Le dépôt gère uniquement des
locomotives P.O jusqu'à la nationa-
lisation en possédant un parc axé
sur les services mixtes, omnibus
et marchandises.
© C.SCHNABEL
Passé à l’Ouest, Nantes-
Mauves reste très P.O
Le service des rapides et ex-
press sur la transversale jusqu'à
Saint-Nazaire est l'apanage du
dépôt de Tours qui l'assure avec
ses locomotives “grandes roues”
mais la nationalisation change
quelque peu la donne.
À la mi-1939, Nantes Mauves
possède 67 locomotives de types
variés: 3-221 A 8 (ex-P.O, ultime
de la série), 3-030 F (7, ex 4-030 A),
3-230 D (2), 3-230 K (4, ex 4-230
G), 3-040 A 361 et 405 (ex 4-040
F), 3-140 A (12, ex 4-140 E), 3-030
TD 25 (ex 4-030 TB), 3-030 TE 40
et 57 (ex 030 TC), 3-030 TF 91 et
93 (ex 4-030 TD), 3-030 TG (2, ex
4-030 TG), 3-130 TA 864 et 865
(ex 4-130 TA), 3-050 TB (4, dont
les 509 et 521 ex 4-050 TA).
On voit apparaître quelques
machines de vitesse pour le
service express: une 3-231 C (ex
3641 à 3680 P.O TP type État),
les onze 4-231 K 301 à 311 (ex
4-231 D à deux cylindres simple
expansion), appuyées par dix
3-231 C et D 501 à 783 ex État.
Il faut ajouter à cet effectif une
surprenante curiosité: en août
1937, le dépôt de Nantes-Mauves

© C.SCHNABEL
© C.SCHNABEL
reçoit en mutation du dépôt de
Narbonne quatre Pacific Midi
qui sont numérotées par le
P.O-MIDI 231.051 à 054 et de-
viendront les 4-231 C 051 à 054
destinées à assurer du service sur
la ligne Nantes/Sainte-Nazaire.
Ces quatre étrangères respirent
l'air de l'Atlantique durant deux
ans avant de regagner les rivages
de la Méditerranée en août 1939,
sans qu'aujourd'hui puisse être
mis en évidence l'intérêt de cette
éphémère mutation de quatre
locomotives totalement incon-
nues non seulement pour les trac-
tionnaires nantais, mais aussi
Au 1er janvier 1938, Nantes-Mauves est attribué au Sud-Ouest
avant d'être rattaché, dès le 2 octobre suivant, à la Région Ouest
Le pont-tournant de
Nantes - Sainte-Anne
Anne, vu depuis la
rotonde.
En 1955, Nantes -
Sainte-Anne détient
encore trois locomotives
3-230 G ex-État (rien
à voir avec les 4-230
G ex-P.O!) dont la 805
ici garée froide. Peut-
être est-elle rallumée
l’été pour des omnibus
Pornic, Les Sables ou
Croix-de-Vie ?
pour les personnels de l'atelier côté de la rotonde tandis qu'un
en charge de leur entretien! triangle de retournement est
Mais la fin approche et le Blot- implanté au sud du chantier. S'y
tereau rafle la totalité de la mise ajoutent deux voies de rentrée et
deux ans plus tard entraînant la deux voies de sortie, dont une dite
disparition de Nantes-Mauves. “de secours”. Nantes-État est un
dépôt petit en surface, mais assez
Des machines de toutes richeenaffectations(83enginsen
catégories à Nantes-État 1920, 111 en 1930) ayant à l'effec-
Le dépôt de Nantes-État est im- tif tous les types de locomotives:
planté à proximité immédiate de manœuvres, mixtes et voyageurs.
la gare et du triage de Nantes-État. Suivant la tradition État, le
Il comprend essentiellement une type 230 est omniprésent, mais
rotonde à 18 voies couvertes sur dès les années 1920, sa suprématie
fosses et 4 voies non couvertes est entamée par l'arrivée de Pacific
desservies par un pont tournant en charge des express, en particu-
de 17 m. Un atelier est édifié à lier sur la ligne de Bordeaux. ▶▶▶
ferrovissime - 59
Gares et installations
Le fer de lance de Nantes - Sainte-Anne au début des années 1950,
ce sont ses vingt-deux locomotives 3-040 TA. À l’époque, on
envisage de les équiper de la chauffe au fuel mais la commande des
futures 040 DE 500 (futures BB 63500) fera échouer le projet.
Affectée à Nantes -
Sainte-Anne, la
3-040 TA 102 est
utilisée, en 1954,
notamment au triage
RA de Nantes-État.
La cabine – très
ouverte – est encore
celle d’origine.
▶▶▶ Tout d'abord, les remar-
quables S3/6 bavaroises renu-
mérotées 231.981 à 996 État
qui deviennent les reines de la
ligne avant d'être bousculées
par des 231-501 à 783. Les S 3/6
nantaises roulent aussi sur la
ligne Nantes/Rennes via Blain.
Devenues 3-231 A à la création
de la SNCF en 1938, la série est
regroupée au dépôt de Saintes.
RetournéesenAllemagnedurant
le conflit, sept d'entre elles (re-
prises à l'effectif SNCF de 1948)
reviennent avariées.
En 1938, le dépôt de
Nantes-État devient
Nantes - Sainte-Anne
À la nationalisation, le dépôt,
rebaptisé Nantes - Sainte-Anne,
voit son étoile pâlir. Début 1939,
il ne compte plus que 53 locomo-
tives actives: 3-121 C (4), 3-030
C (2), 3-230 G (16), 3-231 B (4),
60 - ferrovissime
© C.SCHNABEL
Une 3-140 H à Nantes - Sainte-Anne.
3-231 C (9), 3-140 A futures 3-140
H (4), 3-141 B futures 3-141 C (5),
3-030 TB (2) et 3-040 TA (7), toutes
ex-État sauf deux 3-230 K qui
sont d’ex-4-230 F d’origine P.O.
Tout comme Nantes-Mauves, le
dépôt de Nantes - Sainte-Anne
est condamné par l'ouverture
du dépôt du Blottereau en 1941.
Dès lors, son effectif ne cesse de
décroître. Il est bientôt dépos-
sédé de ses machines de vitesse
et cantonné au service mixte et
surtout aux manœuvres.
Au début des années 1950, on
ne dénombre pas moins de vingt-
deux 3-040 TA (12, 15, 20, 24, 31,
43,44,83,86,89,100,101,102,105,
107, 108, 110, 115, 120, 121, 126,
142) et une 050 TX qui œuvrent
surl'ensembledeschantiersdela
zone nantaise. Le 1er janvier 1955,
Nantes - Sainte-Anne ne possède
plus que 26 locomotives: 3-230 G
(3), 3-140 H (8), 3-040 TA (15). L'ef-
© C.SCHNABEL
© C.SCHNABEL
fectif tombe à 18 engins en avril
1956 et le 7 mai 1956, le dépôt de
Nantes - Sainte-Anne est fermé,
ses attributions étant reprises par
l'établissement du Blottereau. Ses
installations disparaissent une
vingtaine d'années plus tard.
Après-guerre, l’avenir
est au Blottereau
Le dépôt de Nantes-Blottereau
est établi environ 3 km à l'est de
la gare voyageurs sur la ligne
d'Angers, côté voie 1. Le projet
d'un nouveau dépôt prend corps
au début des années 1930 mais
n'aboutit que dix ans plus tard.
Il s'appuie sur les importants
travaux effectués dans la zone
par les Américains en 1918-19. Le
dépôt de Nantes-Blottereau est
mis en service en novembre 1941.
La mise en service du dé-
pôt se fait dans des conditions
chaotiques dues au conflit. ▶▶▶
 © A. LEPAGE
La 141 R 1193 en tête d’un express lourd passe à Mauves-sur-Loire.

Les remarquables S 3/6 bavaroises renumérotées 231.981

à 996 État qui deviennent les reines de la ligne avant d'être
bousculées par des 231-501 à 783

▶ LE PLAN DU DÉPÔT DE NANTES - SAINTE-ANNE AVANT SA SUPPRESSION ◀ Infographie : A. Prévot

Cité des agents 25

4 sinistrés
1
2

12
3
13
26
11 28
27
14
29
24
15 16
5
6 23
17 20. Voie de la grue
7 8 19
21. Voie des wagons en déchargement
20 18 22. Voie des machines sortant de grande révision
9
21 18 23. Voie de rentrée et de charge
10 22 24. Sortie de secours
25. Triangle de retournement
1. Foyer 6. Transformateur 11. Parc 16. Sablerie 26. Voie de desserte des wagons vides
2. Vestiaire et Foyer 7. École d’apprentissage 12. Charbon de forge et coke métallurgique 17. Laboratoire TIA et portique 27. Voie des machines en attente de réforme
3. Rotonde 8. Cercle des apprentis 13. Briques réfractaires et coke de distribution ou en Entretien Différé
4. WC 9. Forges et vestiaire des apprentis 14. Fagots 18. Combustible 28. Desserte wagons chargés
5. Magasin à voie 10. Terrain de sports 15. Abri en ogive et parc à coke récupéré 19. Wagon de secours 29. Tenders disponibles ou en attente de réforme

ferrovissime - 61
Gares et installations

© C. SCHNABEL
La 3-230 K 427 de
Nantes-Blottereau
est l’une de ces ▶▶▶ En 1942, il compte 75 ma- raculeusement pas souffert des (1), 121 A (2), 4-050 TB (4), 050 TX
machines P.O à avoir chines à l'effectif: bombardements alliés, ni des sa- (2) ainsi que 7 locomotives de
été accouplée à un
3-121 A (3), 3-221 A 8 (1), 3-030 botages perpétrés par l'occupant. manœuvre diverses.
tender à bogies
3-18 C ex-Etat, les C/ E/ F/ TB/ TD/ TE/ TG (15), 3-050 A La remise en route du transport L'important parc de Pacific
mêmes que ceux 551et560(2ex-Saxepuis4-050C), en est grandement facilitée. 3-231 D et H parcourt les doubles
des 3-140 C. Elle 3-050 TB (4), 3-230 K (5), 3-140 A/B Àmi1945,ledépôtn'aligneque voies de la région (Tours, Le Mans,
quitte Nantes avec futures 3-140 H et G (6), 3-121 TA 49locomotivesbonnespourleser- Saint-Nazaire, La Roche-sur-Yon)
un omnibus Savenay 366 et 382 (2), 3-131 TA (1), 3-231 D vice parmi lesquelles on trouve ainsi que les antennes côtières en
en 1953. (25), 3-231 K (11 ex 4-231 D). une majorité de Pacific: 3-231 D voie unique (Pornic, Les Sables
Le parc monte à 103 unités (14), 3-231 F (2), 3-231 H (1) et 3-231 d'Olonne, Le Croisic). Mais ces
en avril 1943, mais la situation K (10), 3-140 A (10). Pour pallier le Pacific Etat ne vont pas sur La
demeure très fluctuante pen- manque d'engins assurant le tra- Roche-sur-Yon/Bordeaux, chasse
Après avoir possédé dant les hostilités. A la Libéra- fic marchandises, vingt-cinq 140 gardée des machines rochelaises,
des 3-231 C, F et H, tion, intervenue en août 1944, d'originediverses(Sud-Ouest,Sud- ni sur Savenay/Quimper aux
et avant de recevoir si le tableau n'est pas brillant Est et 140 W “Austerity”) arrivent mains des machines d'Auray. Les
trois G pour la fin, au point de vue de l'effectif ,il en renfort à la fin de l'année. 3-231 K (ex 4-231 D) sont enga-
Nantes-Blottereau faut noter que les installations gées sur des omnibus et express
a été le paradis des toutes neuves du dépôt n'ont mi- Les R arrivent… Nantes/Saint-Nazaire (alors gare
3-231 D.
Mais dès février 1946, de rebroussement) et assurent des
Nantes-Blottereau béné- trains de messageries sur Nantes/
ficie de l'affectation de Auray. Elles ne vont normalement
141 R charbon fraîche- pas au-delà pour éviter de leur
ment débarquées, qui faire franchir le viaduc d’Henne-
apportent un renouveau bont. 1947 voit le remplacement
salutaire à l'effectif et des 141 R charbon par 23 unités
entraînent le départ des chauffées au fuel qui prennent en
140 W britanniques. charge marchandises et messa-
Si bien qu'un an plus geries ainsi que quelques express
tard, le Blottereau est ti- lourds sur lesquels la nervosité
tulaire de 101machines: de leur démarrage compense le
3-231 D (24), 3-231 H (5), handicap de leur VL 100.
3-231 K (7), 3-140 A (12), Les performances kilomé-
© G. GAUTIER

3-140 B (11), 141 R char- triques inconnues jusqu'alors ré-

bon (17), 3-230 G (9), 120 A alisées par les 141 R entraînent

62 - ferrovissime

Les 3-231 D
du Blottereau
descendent unechuteirrémédiabledesséries
également vers anciennes. L’effectif global s'en
le sud jusqu’aux
ressentavec81unitésendécembre
Sables d’Olonne.
1949: 3-231 D (26), 3-231 H (6), 141
R fuel (20), 3-030 C/F/TG (6), 121 A
(1),3-050TB(5),3-140H(17). Ilfaut
remarquer que les 3-140 H de ce
fortcontingentnantaisontl’éton-
nanteparticularité,àl’époque,de
remorquerdesrapidesetexpress
de Saint-Nazaire au Croisic dont
certains sont composés des pre-
mièresvoituresDEV:unspectacle
aussi insolite qu'éphémère!
Les machines de Nantes
- Sainte-Anne viennent
en renfort au Blottereau
Restent seulement 73 ma-
chines en avril 1954. Mais en
mai 1956, le Blottereau récupère
l'effectif de Nantes - Sainte-Anne.
De ce fait, il abrite 114 locomo-
tives au 1er janvier 1957: 3-231 D
(22), 3-141 C (24), 141 R charbon
(10), 141 R fuel (20), 3-140 C (7),
3-140 H (3), 3-030 C (2), 030 TU (4),
3-040 TA (14), 3-230 G (2), 3-230 K
(6). Ces dernières méritent deux
commentaires particuliers:
- Le Blottereau possède les deux
typesde3-230K:d’unepartcelles
bien connues correspondant aux
4-230 G qui sont les 3-230 K 401 à
451 à roues de 1,76, d’autre part
les 3-230 K 491 à 498 à grandes
roues de 2,05 m correspondant
aux 4-230 F engagées sur des
directs et express sur Nantes/
Saint-Nazaire/Le Croisic.
- Au début des années 1950, dans
le cadre des travaux de l'impor-
tante rectification de tracé de la
ligneNantes/Saint-Nazairedansla
traverséedelavilledeNantes,cer-
taines3-230K401à451deNantes
ont été attelées à des tenders à
bogies 3-18 C à écran pour tirer
et pousser les trains de travaux
générésparlepercementdulong
tunnel Nantes/Chantenay (2871
m),tenderqu’ellesvontconserver
ensuite longtemps.
À l'orée des années 1960, l'ef-
fectif chute avec 93 locomotives
en service: 3-230 K (5), 3-231 D
(22), 3-141 C (28), 141 R fuel (24),
3-140 C (4), 3-030 C (1), 030 TU
(2), 3-040 TA (7).
Les 3-231 K sont engagées sur
des omnibus et express Nantes/
Saint-Nazaire et assurent des trains
de messageries sur Nantes/Auray
© M. DAHLSTRÖM
Après l'arrivée des 141 R, le
Blottereau ne reçoit plus de ma-
chines neuves et ne comportera
jamais à son effectif les séries
unifiées qui font les beaux jours
des dépôts voisins de Rennes (ar-
rivée des premières 141 P dès
1946) et du Mans (affectation de
141 P dès la fin de 1945 et 241 P
en 1959). Nantes perd peu à peu
une bonne partie des services
rapides et express sur la ligne
de Paris et le Blottereau doit se
contenter d'accueillir les petites
et grosses P en relais, même si les
équipes nantaises sont bientôt
autorisées à la conduite des 241 P
mancelles.
Cependant, à l'aube des an-
nées 1960, Nantes-Blottereau
reste un grand dépôt vapeur
ayant encore devant lui une
décennie d'existence riche en
événements… que nous étudie-
rons prochainement. ◼
ferrovissime - 63
 Matériel roulant d’hier

Un ancêtre
toujours vaillant!
Le CNS au travail, poussé
par une BB 69000 en livrée
Infra. Un wagon chasse-
neige ferme le convoi.
© B. HILLERET

64 - ferrovissime
 Le chasse-neige CNS
et les BB 66000 à socs
Après les Beilhack, stars des chasse-neige présentés dans
Ferrovissime n° 114, voyons d’autres engins du parc SNCF
en motorisation diesel.
Texte : Baptiste Hilleret avec la contribution de Gérald Morel

ferrovissime - 65
Matériel roulant d’hier
© J.P. FRANCON
A
u sortir de la guerre et
jusqu’au milieu des an-
nées 1950, les moyens
de déneigement sont
constitués de chasse-
neige à vapeur, de
chasse-neige équipant
d’anciens tenders de locomotives
à vapeur ou encore de soc que l’on
dispose sur les locomotives. Ces en-
gins, souvent issus des anciennes
compagnies, commencent alors
à prendre de l’âge. En 1956, les
ateliers SNCF de Villeneuve-Saint-
Georges, après étude, construisent
le premier chasse-neige à deux
turbines sur la base d’un châssis
de tender PLM à trois essieux. Un
brevet est déposé pour la partie
turbine. Immatriculé SZw 998 668,
il est basé à Pontarlier et est utilisé
pour déneiger les lignes du Jura.
En 1963, un second chasse-
neige est construit avec le même
modèle de turbine, par les ate-
liers de Nevers et d’Oullins. Ce
chasse-neige, immatriculé Z 691,
est à voie métrique pour la ligne
Saint-Gervais/Vallorcine.
Les bons résultats obtenus
avec ces deux premiers chasse-
neige à turbine incitent la SNCF
à réaliser un engin à plus haut
potentiel.
La reconversion de la
première diesel française
à adhérence totale
En 1967, il est décidé de réa-
liser un nouveau chasse-neige
pour voie normale équipé du
66 - ferrovissime
Le CNS en cours
d’acheminement
passe à Arvant
en février 2010.
même type de turbine que le
chasse-neige de Pontarlier. Il
est réalisé sur la base d’une
locomotive prototype diesel du
PLM, la 4-CMD-1 construite par
Schneider en 1934. Première
locomotive diesel française
à adhérence totale, c’est une
BB de 72 t, équipée à l’origine
d’un moteur diesel 2 temps Bur-
meister & Wain à 6 cylindres
de 600 ch (420 kW) à régime
lent (380 à 550 tr/mn). Sa trans-
mission électrique comprend
un appareillage Schneider-SW
avec quatre moteurs de traction.
Fiable, elle assure la manœuvre
à Bercy puis à Villeneuve-Saint-
Georges. En 1948, le nouveau
plan de marquage de la SNCF
la réimmatricule 040 DC 1
avant qu’elle soit garée, faute
de pièces de rechange pour
réparer une avarie.
En 1955, elle est alors pro-
fondément transformée par les
Ateliers de Nevers. Le châssis
et les bogies sont conservés
mais la caisse est allongée en
supprimant l’unique disgra-
cieux capot qu’elle avait à une
extrémité. Le moteur Burmeis-
ter & Wain, obsolète, est rem-
placé par un moderne diesel
V12 MGO turbocompressé de
825 ch (607 kW), celui monté
sur les BB 63500. Elle reprend
son service à la manœuvre, af-
fectée à Dijon-Perrigny et en
1962, elle est réimmatriculée
BB 60021.
Le Chasse-Neige Spécial
(CNS) d’Aurillac, le plus
puissant chasse-neige
à turbine SNCF
Ses deux cabines étroites sont
peu commodes pour ce service,
comparée à la grande cabine su-
rélevée des BB 63500. Encore en
bon état général après sa pre-
mière transformation survenue
10 ans auparavant, elle bénéficie
d’une seconde transformation en
chasse-neige. Désormais imma-
triculée Uz 998 701, ce dénommé
Chasse-Neige Spécial (CNS) reçoit
à une extrémité une étrave à
deux turbines et deux coffres
orientables. Seul le bogie de
l’extrémité 2 reste moteur pour
permettre à l’engin d’évoluer en
autonome dans les dépôts. Par
contre, il doit être poussé par
une ou plusieurs machines diesel
pour déneiger.
Basé à Chambéry à sa sortie
d’atelier en 1967, il permet de
remplacer le chasse-neige rota-
tif à vapeur Henschel, qui reste
placé en réserve pour pouvoir
intervenir en cas de besoin
simultané sur les lignes de la
Maurienne et de la Tarentaise.
Toutefois, en décembre 1970,
il déneige la Vallée du Rhône
autour de Valence.
L’exploitation du CNS est com-
pliquée sur les lignes de la Mau-
rienne et de la Tarentaise, car il
nécessite une machine de pousse
pour le déneigement et doit
être réorienté sur un pont ▶▶▶
© G. MOREL

Compartiment moteur du CNS, avec au premier plan, la génératrice

électrique, puis l’excitatrice et au fond le moteur MGO de 825 ch.
© G. MOREL

© G. MOREL

Dans le compartiment moteur du CNS, le diesel MGO. Cabine de conduite du CNS. À droite, la commande
de la BB 66000/69000 de pousse.

Il est construit sur la base d’une locomotive

prototype diesel du PLM, la 4-CMD-1

▶ CARACTÉRISTIQUES DU CNS ◀
- L’extrémité 1 est équipée des deux
turbines. En cas de détresse, il est
possible d’utiliser un attelage de
secours démontable à n'utiliser qu'en
cas de force majeure. Les pièces de cet
attelage sont déposées dans un coffre
repéré situé à l'extérieur de la caisse.
- L’extrémité 2 est équipée
d'un attelage normal
- Vitesse de déneigement de 0,5 à 30 km/h
- Capacité de déneigement: 8500 tonnes/h
- Un moteur diesel MGO type
12 V 175 ASH d’une puissance 825 ch
-Une génératrice principale fournissant le
courant nécessaire aux moteurs de traction
- 2 moteurs de traction sur le bogie 2
permettant à l'engin de se déplacer
par ses propres moyens sur de
faibles parcours à l'intérieur d'un
établissement (dépôt ou gare)
- 2 turbines frontales chasse-neige
entraînées par le moteur diesel
par l'intermédiaire d'un réducteur
de vitesse et d'un embrayage à
commande pneumatique
- 2 cheminées orientables pour
l'évacuation de la neige
- 1 liaison téléphonique permettant
de communiquer avec le mécanicien
de la locomotive de pousse
- 1 seule cabine de conduite
- l'eau de refroidissement du moteur
diesel est traitée à l’antigel
- poids à vide: 64 t
- capacité des réservoirs de
combustible: 1500 litres
- tension de la batterie: 72 volts
- 1 convertisseur électronique: 72V/24V
- le freinage des deux bogies est
commandé par un distributeur
Un dispositif de commande à distance
permet, depuis la cabine du chasse-
neige, la commande de certaines
fonctions de la machine de pousse
si celle-ci est une BB 66000 ou
BB 69000: arrêt du moteur Diesel de la
machine de pousse, inversion du sens
de marche, traction et accélération.

ferrovissime - 67
Matériel roulant d’hier

© J.P. FRANCON
© G. MOREL

Dans la cabine de conduite du CNS, Mesurant à peine plus de 10 m, le CNS est un engin très court.
les volants de manœuvre des tuyères
d’éjection de la neige des turbines.

© G. MOREL

68 - ferrovissime

© B. HILLERET
© DR / COLL. P. ROBINE
Un “nez de cochon” (soc chasse-neige dans le jargon local) hérité
d’une 4-141 TA, monté sur une BB 66000 en 1968.
Le Poujet, le 11 mars
2006. La BB 66110
rentre sur Aurillac
après avoir ouvert et
dégagé les congères
de la ligne du Lioran.
▶▶▶ tournant pour traiter la
deuxièmevoie,élémentencours
de disparition sur ces lignes.
En 1973, avec l’arrivée des
chasse-neige Beilhack, le CNS
est muté à Aurillac où il rem-
place le chasse-neige rotatif à
vapeur ZR1 de l’ex-compagnie
du P.O construit par ALCO en
1909 qui peut alors couler des
jours tranquilles au Musée de
Mulhouse.
Les zones d’action du CNS
Engagé normalement sur les
lignes du Cantal, le CNS a l’oc-
casion d’intervenir sur d’autres
lignes au cours de sa carrière:
- 18 janvier 1978: Langogne à
La Bastide;
En 1973, avec
l’arrivée des
chasse-neige
Beilhack, le
CNS est muté
à Aurillac
Le CNS dans son
fief: Le Lioran!
© DR / COLL. P. ROBINE
Vue arrière du «nez de cochon» avec ses dispositifs de fixation.
- 2 février 1986: Ax-Les-Thermes Après réparation, lors de
à Latour-de-Carol; son acheminement de Nevers
- 11 février 1986 : Mende à La à Aurillac, c’est un problème
Bastide; d’étanchéité des boites d’essieu
- 2 mars 2005 : Laqueuille au qui apparaît. Finalement, après
Mont-Dore; la reprise complète du système
- 29 Janvier 2006: Saint-Chély- de freinage et des organes de
d’Apcher à Millau; roulement, le CNS devrait pou-
- 22 Janvier 2007et 17 décembre voir continuer à rouler jusqu’en
2008 : Saint-Chély-d’Apcher à 2028-2029. Cet engin, d’une très
Aumont-Aubrac. haute valeur historique, aura
Sa dernière RG remontant alors l’âge très respectable de…
au 6 septembre 1984, il est dé- 95 ans!
cidé de réaliser une GVG++ en
2018. Sa remise en service est Des BB 66000 héritières
laborieuse: après sa réalisation, des 4-141 TA à soc
une fuite au cylindre de frein Avec la fin des locomotives à
est détectée et nécessite son vapeur 4-141 TA équipées d’un
rapatriement au Technicentre soc pour le déneigement, un
Industriel de Nevers. contingent de BB 66000 est ▶▶▶
ferrovissime
o - 69
Matériel roulant d’hier
▶▶▶ modifié à la fin des an-
nées 1960 pour recevoir un soc
chasse-neige. Dénommé « soc
lourd type Sud-Ouest », ce soc
est développé en reprenant le
modèle de ceux équipant les
4-141 TA, en tenant compte des
améliorations apportées par
Monsieur Martinat, alors Chef
de dépôt d’Aurillac.
Pour permettre le montage
sur l’extrémité 1 des BB 66000
(long capot), deux pattes sont
soudées sur la traverse de choc.
Ces pattes permettent la fixation
des tirants de maintien du soc. Le
châssis est aussi percé au niveau
des marchepieds pour la fixation
latérale. La partie basse du soc
se reprend sur les fixations du
chasse-obstacle. Les deux tam-
pons sont déposés et le soc est
boulonné à leur emplacement.
Dans les années 1980, pour
régler le problème de calfeu-
trage des radiateurs du moteur
diesel par la neige, deux coffres
sont réalisés et positionnés sur
la passerelle, afin de protéger
la grille d’entrée d’air du ven-
tilateur.
70 - ferrovissime
Au total, entre 1966 et 2013,
16 BB 66000 sont modifiées
pour l’équipement du soc type
Sud-Ouest. Ces locomotives
sont d’abord issues du dépôt
de Limoges et immatriculées
BB 66254, BB 66257, BB 66260
et BB 66315.
Par la suite, les machines sui-
vantes du dépôt de Nevers sont
utilisées : BB 66004, BB 66014,
BB 66043, BB 66082, BB 66091,
BB 66110, BB 66244, BB 66245,
BB 66246, BB 66248, BB 66259
et BB 66293.
Les déneigements assurés
par les BB 66000 à soc
Du 15 novembre au 15 mars,
deux engins pré-équipés sont
détachés à la résidence traction
d’Aurillac.
Lessocssontmontéssurplace
par les agents de la brigade Voie,
sous la responsabilité d’un sur-
veillantdedépôt,etunefoiséqui-
pée, la fiche rose de la BB66000
reçoit la mention: “Vitesse limi-
tée à 60 km/h – locomotive équi-
pée de soc chasse-neige lourd
type Sud-Ouest.”
© G. LAFORGERIE/COLL. P. ROBINET
Les BB 66000 sont engagées ↑
HLP en ouverture de ligne. La Au début des
années 1980, la
circulation soc en arrière étant BB 66160 munie
interdite, elles sont réorientées d’un soc chasse-
à l’aide des ponts tournants de neige et attelée
Neussargues et Aurillac. à une remorque
Jusqu’au début des années XR 7000 est prête
2000, en cas de grosses tour- au départ en gare
mentes, elles sont régulière- de Neussargues
afin de remplacer
ment mises en renfort en tête un X 2800 à
des trains autorails composé destination de
de X 2800, X 2100 ou X 2200 Bort-les-Orgues.
pour être sûr de passer le faîte
du Lioran. L’attelage Schar-
fenberg des automoteurs
modernes mettra fin à cette
pratique.
Avec la fin des BB 66000, une
pré-étude est lancée en 2011
pour envisager d’utiliser des
BB 69000 pour cette fonction,
mais en modifiant l’étrave afin
que la locomotive puisse rouler
avec l’étrave à l’arrière. La nou-
velle règlementation applicable
ne permet pas d’aboutir à cette
solution. À partir de 2013, les
BB 66000 Soc sont remplacées
par deux wagons chasse-neige
type Nevers mutés de Nîmes à
Aurillac. ◼
 © É. HOSPITAL
En ce 24 février 1974, en gare du Lioran, la BB 66260 équipée d'un soc chasse-neige est en tête d'un train de skieurs Le Lioran/Aurillac.
Un fourgon-chaudière chauffe la rame composée de 6 voitures à 3 essieux ex-PLM modernisées .

Les BB 66000
sont engagées
HLP en ouverture
de ligne
© É. HOSPITAL

Le soc de la 66260
vu de face.

ferrovissime - 71
Des trains sous la loupe

G. RANNOU / COLL. T. NICOLAS

G. RANNOU / COLL. T. NICOLAS

Le Night Ferry en ligne remorqué par sa BB 16000.

72 - ferrovissime
 De Paris à Dunkerque
dans le Night Ferry
Aller de Paris à Londres sans quitter sa voiture-lits.
Jusqu’en 1980, c’est possible grâce au Night Ferry. Dans ce
premier article, nous allons de Paris à Dunkerque.
Texte : Lionel Hadrot

P
our comprendre l’ambiance de ce train
très particulier qu’est le Night Ferry,
je vous invite à bord, pour un voyage
de Paris à Londres. Nous sommes le
13 juillet 1978, à la gare de Paris-Nord.
Il est 20 h 45 et à la voie n° 4, un agent
SNCF vient accrocher la pancarte du
Le Night Ferry passe train n° 491 « Night Ferry », départ 21 h 25, train
devant le chantier 1re et 2e classe et voiture- lits de 1re classe. Gares
de maintenance et desservies: Lille, Dunkerque-Ville, Dover Priory
de formation des et Londres Victoria.
rames voyageurs
du Landy. La photo On note que les gares de Dunkerque-Ferry
montre un train pair et Dover Ferry Berth ne sont pas mentionnées
en provenance de sur la pancarte ; ce ne sont que des arrêts tech-
Londres, bientôt niques où il n’est prévu ni montée, ni descente
arrivé à Paris-Nord. de voyageurs. D’ailleurs, du temps de la CIWL,
les conducteurs des voitures-lits avaient ordre
par mesure de sécurité de verrouiller toutes les
portes et de fermer toutes les fenêtres pendant
les opérations d’embarquement et de débarque-
ment sur les navires. En bas de la pancarte, on
trouve la numérotation bien mystérieuse des
voitures composant le train ce soir : n° 80, 81,
82, 583 et 584 pour les voitures-lits et voitures
n° 41, 42, 43, 44, 45 et 141 pour les voitures
places assises de 1e et de 2e classes.
L’attente à Paris-Nord
La rame n’est pas encore là, mais les voya-
geurs commencent à se répartir le long du quai.
Visiblement, il y a beaucoup d’habitués qui se
placent à l’endroit estimé où s’arrêtera la voiture
correspondant à leur réservation.
20 h 55, la rame refoule à quai sous l’œil vigi-
lant de l’agent préposé au « nicottage » (voir en-
cadré ci-dessous) placé dans le fourgon de queue.
En cette veille de fête nationale, la composition
du train bénéficie des forcements engagés ha-
bituellement la veille d’un week-end prolongé.
En queue, nous trouvons les deux fourgons
type Nord à deux essieux spéciaux ferry. Ils sont
marqués de la traditionnelle ancre. L’un d’eux
est réservé au courrier, l’autre aux bagages. En
remontant la rame vers la tête, les quatre voi-
tures-lits type F habituelles sont renforcées ce
soir par une cinquième. Puis ce sont les cinq
voitures places assises comprenant trois B10
DEV AO, une A2 ½ B6 DEV 46 AO et une A8 type
Nord Rapide. Enfin, en tête, une quatrième B10
DEV AO vient forcer la rame. ▶▶▶
▶ L’AGENT PRÉPOSÉ AU « NICOTTAGE » ◀
Le Nicot est un appareil employé pour le
refoulement des rames. Relié à la conduite
générale (CG) des freins, il est confié à un
agent - le nicotteur - placé en tête de la
manœuvre. Des explications complémentaires
sur le nicottage seront développées dans une
prochaine rubrique « Comment ça marche? ».

ferrovissime - 73
Des trains sous la loupe
© L. HADROT
▶▶▶ Pour la traction, la BB 16043 est déjà là
puisque c’est elle qui a refoulé la rame depuis
les garages du Landy.
On monte à bord
Il est temps de prendre place dans le com-
partiment de ma voiture-lits. Ce soir, je voyage
dans la voiture à la livrée TEN. Un cheminot
britannique m’accueille. La maîtrise de son
français n’est pas parfaite mais son amabilité
compense largement ses lacunes. Il m’ouvre
mon compartiment et ce qui frappe le plus,
c’est l’exiguïté des lieux. À gauche, un petit
meuble toilette, surmonté d’un porte bagage
qui se prolonge au-dessus de la porte. La cou-
verture sur le lit est siglée de la double flèche
de British Rail, sigle qu’on retrouve également
sur l’enveloppe navette qui servira cette nuit
aux contrôles par les services de police, sans
déranger les voyageurs. Deux ans auparavant,
tout cela portait encore le sigle des Wagons-Lits.
L’accompagnateur m’explique que depuis le
1 janvier 1977, la CIWL s’est retiré de ce train
er
et que c’est maintenant British Rail qui assure
le service. Il ajoute également que, pendant près
de quinze années, il a assuré l’accompagnement
des «Intercity Sleepers» en Grande-Bretagne, sur
Nous trouvons les quatre voitures-lits type F habituelles
renforcées ce soir par une cinquième
74 - ferrovissime
Le Night Ferry refoule
à Paris-Nord. Equipé
de son casque blanc,
les relations vers l’Écosse. Habitant au sud de le nicotteur se tient
Londres, le Night Ferry fut une aubaine pour lui, sur le marchepied
même s’il trouve que les conditions de travail, du fourgon, sifflet
dans ces vieilles voitures, sont moins bonnes en bouche pour
que sur les services intérieurs… prévenir du danger
un voyageur qui
« Mais l’ambiance est tellement attachante s’approcherait du bord
sur ce train ! » me confie-t-il. « Peut-être qu’un du quai. On aperçoit
jour, nous verrons des voitures-lits anglaises le tuyau du nicot à
en France ? ». Malheureusement, l’histoire ne l’angle du châssis.
lui a pas donné raison et les « Intercity Sleepers
Mark 2 » de British Rail n’ont jamais pris le ba-
teau pour venir en France.
Aucun noyé en 35 années de service !
Une fois seul dans le compartiment, la porte
refermée, je découvre l’affichette bien parti-
culière qui n’existe que dans les voitures-lits
type F. Elle explique comment enfiler, en cas
d’urgence, le gilet de sauvetage qui encombre
une bonne partie du porte-bagage. Une exclu-
sivité mondiale pour ces voitures qui en furent
donc dotées dans chaque compartiment.
Une mesure visant probablement plus à rassu-
rer les voyageurs qu’à avoir une réelle efficacité
en cas de naufrage. On peut se féliciter qu’en
trente-cinq années de circulation du Night Ferry,
aucun accident n’ait été à déplorer. ▶▶▶
© L. HADROT

En 1978, le Night Ferry n’est déjà plus un train de luxe. On aperçoit beaucoup de jeunes dans sa clientèle.
© L. HADROT

Les portes sont bouchées à l’une des extrémités des petites voitures-lits type F à gabarit britannique. Celle-ci est en livrée TEN.

ferrovissime - 75
Des trains sous la loupe

▶ RAPIDE 491 « NIGHT FERRY » ◀ Infographie : J-H Lavie et Marc Le Gad

Service d’été 1978

Composition après rebroussement à Lille

Paris / Dunkerque Bruxelles / Londres

BB 16000 VLA type F B10 DEV AO VLA type F

Milan / Dunkerque Paris / Dunkerque B10 DEV AO Dd2fkaiz

AB type X FS B10 DEV AO (forcement) Paris / Londres Dd2fkaiz

Bâle / Dunkerque A8 Nord Rapide VLA type F

A4B5 UIC A2 1/2B6 DEV46 AO VLA type F

B10 UIC B10 DEV AO VLA type F

▶▶▶ En effet, être réveillé par la série de coups
de sirène courts suivi d’un long, sortir du com-
partiment, puis du couloir, puis de la voiture,
puis de la cale du navire indemne, le tout sans
oublier d’avoir mis au préalable son gilet de
sauvetage aurait probablement tenu du miracle !
En route !
Il est 21 h 25 précises et la BB 16043 « décolle »
doucement la rame. Rapidement, le va-et-vient
dans le couloir s’estompe, puis disparaît. Vingt mi-
nutes plus tard, c’est le franchissement à 140 km/h
de la fameuse gare de Chantilly. Les petites voitures-
lits ont encore un roulement confortable sur
leurs bogies « PP ». Après la bifurcation de Creil,
c’est la longue montée vers le plateau picard. Un
fort devers nous indique que nous franchissons
la gare de Longueau en direction d’Arras et Lille.
Voilà exactement une heure que nous roulons.
Tout de suite après l’agglomération amiénoise,
la ligne suit la vallée de la Somme jusqu’à Corbie
puis celle de l’Ancre que nous allons longer sur
une trentaine de kilomètres, jusqu’à Achiet.
Coïncidence amusante pour un train marqué
de l’ancre signalant l’aptitude à être embarqué
sur un Ferry-Boat ! Depuis Longueau et jusqu’à
Lille, la ligne est équipée en rails soudés et le
roulement est très doux.
Puis le train s’arrête doucement. Il est 23 h 30,
nous sommes à Lille. Il règne très peu d’activité,
à cette heure, dans la gare. Une BB 63000 tire au
garage la rame vide de l’express 2736 en prove-
nance de Bruxelles.
Sur la voie en face, stationnent les trois voitures
de la tranche Milan/Bâle/Dunkerque, ainsi que la
voiture-lits directe Bruxelles/Londres. Ces quatre
voitures vont être raccordées sur notre train. Ce
soir, il y a là une voiture UIC X des chemins de
fer italiens, une A4B5 et une B10 UIC SNCF ainsi
que la voiture-lits type F n° 3984 en livrée TEN.
▶ UN BEAU PANACHAGE DE LIVRÉES ◀
En juillet 1978, le parc des voitures-lits ne cesse d’évoluer, passé en quelques
années de la CIWL à la SNCF avant d’intégrer le service Trans-Euro-Nuit (TEN).
Voilà qui donne à la tranche des wagons-lits de mon Night Ferry un beau
panachage de livrées! La 3983 porte la livrée classique des voitures CIWL sans
le monogramme, la 3989 est en livrée TEN, la 3985 porte la livrée classique
sans monogramme et son intérieur a été rénové, la 3787 est très proche de
l’état d’origine puisqu’elle possède encore la partie extérieure du monogramme
CIWL. Enfin, la 3984 porte la livrée classique sans le monogramme.

76 - ferrovissime
© L. HADROT
Bien qu’elles appartiennent au parc de la SNCF, certaines voitures-lits type F portent encore la livrée de la CIWL mais le fameux macaron
central a été déposé.
17 véhicules, 64 essieux, 730 t, la rame est au maximum
de charge. Il va falloir toute la puissance de la BB 16043
On manœuvre à Lille
Les agents du service de gare s’activent à
charger les bagages en provenance de Bruxelles
et Bâle dans le fourgon de notre train. Le temps
presse car il faut procéder aux manœuvres de
raccordement des voitures directes, puis faire
la remise en tête de la BB 16043. Celle-ci a été
coupée du train et je l’entends déjà qui passe
sur la voie d’à côté à hauteur de ma voiture-lits.
L’accostage de la machine de manœuvre pro-
voque une légère secousse. Essais de freins et
tout de suite, on entame les manœuvres de
raccordement. Pas une minute à perdre car le
temps est compté, le Night Ferry ne stationne
que 24 minutes en gare de Lille. Après une
manœuvre des voitures-lits Paris/Londres depuis
l’avant-gare pour chercher les quatre voitures
directes, la rame repart raccorder le tout sur
la tranche des voitures à places assises Paris/
Londres, restées à quai.
La machine de manœuvre cède la place à la
BB 16043 et après un nouvel essai de freins, le train
est enfin prêt au départ. 17 véhicules, 64 essieux,
730 t, la rame est au maximum de charge. Il va
falloir toute la puissance de la BB 16043!
Dernière étape pour Dunkerque
À 23 h 53 précises, le train s’élance. On passe
la bifurcation de Baroeul à vitesse réduite, puis
c’est la gare de la Madeleine, franchie à un petit
60 km/h pour aborder la bifurcation de Saint-
André qui laisse sur la droite la ligne de Comines.
Les voitures « dansent » un peu au passage
de la bifurcation de Lambersart. Juste avant la
gare de Pérenchies, le conducteur peut enfin
lâcher les chevaux de la BB 16043.
L’arrivée à Dunkerque-Ville est prévue dans
40minutes et le train file dans les plaines du Nord
en traversant des villes endormies: Armentières,
Bailleul, Hazebrouck, Cassel… Arrive enfin la
bifurcation de Capelle, annonçant l’arrivée du
train en gare de Dunkerque-Ville, pile à l’heure.
La traversée de la Manche approche : nous em-
barquerons dans un prochain article ! ◼
ferrovissime - 77
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