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Note

de réflexion sur l’avenir de l’humanité



Dossier n° 3 – L’épuisement des ressources énergétiques



Sommaire
Page


1 L’énergie. 4

2 Les sources d’énergie fossile. 10
2.1 Le charbon 10
2.2 Le pétrole et le gaz naturel 12

3 La fin des énergies fossiles 20

4 Energie et Economie. 25

5 Conséquences sur la population à l’avenir 30

6 Les économies d’énergie – Baisse de la consommation 33

7 Les autres sources actuelles: nucléaire et énergies renouvelables. 38
7.1 – L’énergie nucléaire 39
7.2 - L’énergie hydraulique 46
7.3 - L’énergie éolienne 47
7.4 – L’énergie issue de la biomasse 49
7.5 - L’énergie solaire 52
7.6 - L’énergie géothermique 54
7.7 – Les énergies marines 55

8 – Le stockage d’énergie 55

9 – Conclusions 59



1
Introduction

« Vers 2050, 9 milliards d'être humains consommeront 140 milliards de tonnes de minerais,
d'hydrocarbures et de biomasse (bois, cultures, élevage) », selon le rapport du PNUE
(Programme des Nations unies pour l'environnement). Soit 16 tonnes de ressources
naturelles englouties par an et par chaque habitant de la planète !

Or il semble que le problème de l’épuisement risque de prendre de l’importance et de
devenir critique au cours de ce siècle.
Nous allons tout d’abord nous intéresser à l’épuisement des ressources d ‘énergie fossile.

Le premier à s’être posé la question en terme moderne est Marion King Hubbert (1903-
1989), un géologue et géophysicien américain. Il travaillait au laboratoire de recherche de
Shell à Houston, au Texas, terre de pétrole. Il a apporté plusieurs contributions importantes à
la géologie, à la géophysique et à la géologie pétrolière, notamment la courbe de Hubbert et
la théorie du pic de Hubbert, un concept à la base de la notion de « pic pétrolier », avec
d’importantes ramifications économiques.
L'idée de Hubbert est que la production suit la courbe de découvertes, décalée de quelques
décennies (le temps de mettre en exploitation et de faire monter la production).
Le fait de connaitre les découvertes passées donne donc une idée de la courbe de production,
à condition, bien sûr, que les évaluations des ressources contenues dans les gisements
découverts soit correctes.

Le modèle du pic de Hubbert dit que pour une zone géographique donnée, d’une région
productrice de pétrole à la planète dans son ensemble, le taux de production pétrolière tend
à suivre une courbe en forme de cloche. Après une phase de croissance, similaire à une
croissance exponentielle, la production annuelle ralentit pour atteindre un maximum puis
décroit de manière symétrique à la montée. Il existe donc un maximum de production
annuelle qui se produit une année spécifique, l’année du pic de production. Ensuite, après ce
pic, la production ne peut que décroitre.


Courbes n° 1 – Découverte et Production de pétrole.
Chiffres constatées, et courbes de Hubbert

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Quelques mots sur l’appréciation des réserves :

Il existe trois niveaux pour qualifier et quantifier les réserves selon une approche
probabiliste :
− Réserve 1P – Réserve Prouvée
− Réserve 2P – Réserve Prouvée + Probable -
− Réserve 3P – Réserve Prouvée + Probable + Possible -

Les réserves prouvées sont en quelques sortes les réserves garanties, puisque ce sont celles
sur lesquelles va se prendre la décision d’investir pour l’exploitation du gisement.
Ce sont des investissements très lourds, et les exploitants prennent donc des marges de
sécurité importantes. En particulier, les entreprises privées ne se lanceront pas dans une
aventure aléatoire, compte tenu des risques, et n’investissent que sur des réserves prouvées
offrant toutes garanties.
Les réserves probables résultent d’une analyse faite avec les paramètres estimés les plus
probables. Elles peuvent très bien s’approcher de la réalité. Pour un gisement donné, le
coefficient est généralement de 1,7 sur les réserves 1P

Les réserves possibles résultent d’une analyse faite avec les paramètres les plus optimistes.
Ce sont des réserves idéales, n’offrant aucune garantie, et jamais vérifiées.

Les réserves sont déclarées par trois canaux :

− Les entreprises privées qui exploitent seules des gisements suite à une licence qui leur a
été accordée, qui sont cotées en bourse, et qui ont une obligation légale de déclarer les
réserves. Elles présentent un certain degré de fiabilité.

− Les Etats extracteurs de pétrole, qui n’ont aucune obligation, mais qui peuvent être
amenés à déclarer les réserves. En particulier, les Etats membres de l’OPEP, c’est à dire
exportateurs de pétrole, se répartissent les quotas de production en deux temps : Tout
d’abord, ils fixent le volume global des productions exportées, pour soutenir le cours du
pétrole, puis se répartissent ce volume au prorata des réserves déclarées par chacun. Il
n’est pas besoin d’explications complémentaires pour imaginer le degré de fiabilité.

− Les Etats extracteurs de pétrole, non exportateurs, qui conservent donc leur production
pour leurs besoins domestiques. Ils sont totalement indépendants, et n’ont aucune
obligation. Ils peuvent toutefois communiquer sur leurs réserves.

Sachant que les entreprises du premier canal représentent 10% du total, il est aisé de
comprendre le degré de crédibilité que l’on doit accorder aux prévisions déclarées.

Quoi qu’il en soit, globalement, les réserves ne doivent pas être sous-estimées. Il y a peu de
chances d’avoir de bonnes surprises…
Pour toutes ces raisons, je reste persuadé que les réserves annoncées, particulièrement
celles qui concernent le pétrole, sont plutôt surévaluées.

3
Note préliminaire

Concernant le thème de l’énergie, je recommande le visionnage des conférences ou
interventions de Jean-Marc Jancovici, nombreuses sur le net, ou la lecture de ses ouvrages.
Il a créé et préside un Think tank, « the Shift Project », consacré aux thèmes de l’énergie et du
climat. Il enseigne à l’Ecole des Mines de Paris ; son cours, visible sur youtube, comprend huit
conférences de deux heures et demie, absolument passionnantes. Il a fait de nombreuses
interventions dans les plus grandes écoles, se rapportant toujours à l’énergie et au
réchauffement climatique.
Il est membre du Haut Conseil sur le climat, créé en 2018, auprès du Premier ministre.
Il a été auditionné par des commissions de l’Assemblée Nationale ou du Sénat en tant
qu’expert, et ces auditions sont également disponibles. Il y a de grands moments !
Tout cela est disponible sur youtube ; C’est passionnant sur le fond, présenté avec beaucoup
de rythme et teinté d’un humour caustique assez remarquable… Je ne suis pas toujours
d’accord avec lui sur certaines analyses des causes et interprétations de résultats, mais mes
divergences ne sont pas fondamentales. J’adhère globalement à ses analyses.
Pour la suite, je prendrai beaucoup dans son discours et j’emprunterai quelques diapositives
de ses conférences. Je le citerai sous ses initiales, JMJ.

Par ailleurs je me suis beaucoup référé au site « connaissance des énergies », pour trouver de
nombreuses informations sur les diverses sources d’énergie, et j’ai utilisé de larges extraits
de ses fiches pédagogiques. La qualité des nombreux experts intervenant dans cette
fondation me semble une garantie de sérieux, pour des sujets que l’on ne maîtrise pas
toujours très bien.



1. L’énergie.

« La capacité à contrôler l’énergie, qu’il s’agisse de faire des feux de bois ou d’ériger des
centrales électriques, est une condition préalable à la civilisation. »
Isaac Asimov (1991)

« Il est évident que l’avenir de la population mondiale, pour le meilleur ou pour le pire, est
inextricablement lié à l’usage qui est fait des ressources énergétiques. »
Marion King Hubbert (1969)

Définition de l’énergie

Ce mot vient du grec « energeia », soit « force en action ». C’est le « moteur du monde »
Selon le Larousse, c’est la « grandeur caractérisant un système et exprimant sa capacité à
modifier l’état d’autres systèmes avec lesquels il entre en interaction. »
Plus simplement JMJ dit que « L’énergie, c’est ce qui quantifie la transformation de
l’environnement ».
Elle s’exprime par une quantité, et son unité officielle est le Joule, J, que l’on n’emploie que
très rarement. On préfèrera parler de kilowatt-heure, kWh, qui équivaut à 3,6 MJ
Les énergéticiens préfèrent utiliser la « tonne équivalent pétrole », tep, qui vaut 41,8 GJ ou
bien 11.600 kWh
Tout ce qui se passe a besoin d’énergie, un changement de température, de phase, de
forme, de vitesse, de mouvement ; tout cela utilise ou consomme de l’énergie.

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Lois fondamentales régissant l’énergie

Il existe deux lois fondamentales qui régissent l’énergie dans l’Univers, ce sont les
principes de la thermodynamique:

• 1er principe : Il est connu sous le nom de « principe de conservation ».
Il stipule que dans un système fermé, la quantité d’énergie est constante. Elle peut
changer de forme, mais ne peut apparaître ex nihilo, ou disparaître dans le néant sans
laisser de traces.
Ce principe établit l’équivalence des différentes formes d’énergie, notamment la
chaleur et le travail, et implique que la somme des différentes énergies associées à un
système se conserve, même si ces énergies peuvent se transformer les unes dans les
autres en fonction de leur équivalence.
Ce principe a été formulé au XIXème siècle par l’allemand Julius Robert Mayer, et
James Prescott Joule le consolida par ses expériences en laboratoire.
Ce principe mit fin à l’idée d’un monde éternel. En effet, le soleil est la principale
source d’énergie de la Terre, et selon cette loi, il ne peut irradier sa chaleur et sa
lumière pour toujours. Sinon, il aurait besoin d’un apport infini d’énergie.
Or, comme tous les corps, il n’en renferme qu’une quantité finie.

• 2 principe : Il est connu sous le nom de « principe d’entropie ».
ème

Il a été formulé pour la première fois en 1824 par Sadi Carnot.


Il affirme que lorsque l’énergie est convertie d’une forme à l’autre, au moins une
partie de celle-ci est dissipée, principalement sous forme de chaleur. Bien que cette
fraction dissipée, existe toujours, elle est alors diffuse et éparpillée, donc moins
accessible et utile. Si nous pouvions la rassembler et la concentrer de nouveau, nous
pourrions encore l’utiliser, mais cela nécessiterait davantage d’énergie. Ainsi, en
réalité, l’énergie accessible est toujours progressivement perdue.
Cette part d’énergie, qui n’est plus, en pratique, capable d’être convertie en travail, a
été nommée « entropie », et le second principe nous apprend que l’entropie, dans un
système isolé, croît inévitablement à mesure que le temps passe.
Sachant que le fait de créer et préserver un ordre au sein d’un système isolé, requiert
du travail, le principe d’entropie nous enseigne qu’à l’issue de la lutte entre l’ordre et
le chaos, c’est finalement le chaos qui l’emportera.
Ce principe implique que, dans l’Univers, la chaleur s’écoule continuellement des
corps chauds vers les corps froids.

Les conséquences pour l’Humanité.

Selon le premier principe, tant que l’Homme n’est pas capable d’extraire de l’énergie de
son environnement, il ne peut rien produire, rien transformer. Il faut pouvoir consommer
de l’énergie pour pouvoir produire quelque chose. Ce qui signifie qu’utiliser de l’énergie,
c’est l’extraire de notre environnement, la transformer, et l’exploiter à notre profit.

L’énergie que l’on sort de l’environnement est appelée « énergie primaire ». Elle n’est que
rarement utilisée sous sa forme primaire ; elle est donc transformée pour pouvoir l’être, et
devient alors ce que l’on nomme « l’énergie finale ».
Par exemple : Le pétrole passe par une raffinerie, est transformé en essence avant d’être
mis dans le moteur thermique d’une voiture, ou bien, le charbon est brûlé en centrale
thermique pour produire de l’électricité qui pourra alimenter un réfrigérateur.

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L’énergie primaire est celle qui est extraite de l’environnement (pétrole et charbon dans
nos exemples), et l’énergie finale est celle qui passe par le compteur avant d’être
directement utilisée (compteur à la pompe et compteur électrique).
Compte tenu des principes de la thermodynamique (pertes de rendement dans la chaîne
de transformation), l’énergie finale est toujours inférieure à l’énergie primaire. Ces pertes
de rendement peuvent être très importantes, par exemple dans une centrale thermique.

Dans un second temps, pour pouvoir profiter d’une énergie finale, il faut aussi disposer
d’un matériel que JMJ nomme un « convertisseur d’énergie ».
Dans les exemples cités plus haut, c’est bien sûr la voiture et le réfrigérateur.
Sans eux, la disponibilité de l’énergie, même finale, est sans effet, donc sans intérêt.
« L’énergie utile » est celle qui est exploitée en sortie du convertisseur d’énergie, dans nos
exemples pouvoir se déplacer et créer du froid. Compte tenu des pertes de rendement
dans le convertisseur d’énergie, l’énergie utile est toujours inférieure à l’énergie finale.

En résumé, pour bénéficier de l’énergie, il faut une source d’énergie primaire, un moyen
de transformation de celle-ci en énergie finale, et un convertisseur d’énergie pour
produire une énergie utile. Chaque transformation entraine des pertes d’énergie.

Un peu d’Histoire

Au début de leur Histoire, les hommes ne disposaient que de deux éléments : Une source
d’énergie primaire et un convertisseur d’énergie. L’énergie primaire était principalement
leur nourriture, et le convertisseur était leur propre corps.
Cette nourriture est un apport d’énergie, que le corps de l’Homme transforme en chaleur
et en travail (en mouvement). En effet, pour permettre la vie, le corps humain doit se
maintenir à une température de l’ordre de 37°C ; or, selon le second principe de la
thermodynamique, la température de ce corps, généralement supérieur à la température
ambiante (la température moyenne de la Terre est de l’ordre de 15°C), devrait s’abaisser
continuellement et irréversiblement. Cette perte de chaleur, donc d’énergie, doit être
compensée par un apport d’énergie, et c’est le rôle de la nourriture.
Cette nourriture permet également une « dépense physique » d’énergie, qui permet un
travail au sens physique du terme. Les bras et jambes deviennent donc des moyens de
production.
Les Hommes bénéficiaient également d’une seconde source d’énergie primaire, c’est le
soleil. La chaleur du soleil réchauffe le corps humain, et apporte donc sous cette forme
une part de l’énergie nécessaire. C’est pourquoi l’Homme a moins besoin de manger en été
qu’en hiver.

Tant qu’il est resté sur ce principe, l’Homme n’a pas créé de production matérielle, de
richesse, au delà de ce qu’il était en mesure de produire lui-même. Or, trouver sa
nourriture était sa tâche principale, on peut même dire essentielle. Elle lui prenait tout
son temps. Il ne pouvait donc rien produire de plus avec le peu d’énergie dont il disposait.
C’est ainsi que les siècles succédaient aux siècles, sans qu’une évolution notable soit
constatée.
Pour que cela change, il a fallu que l’Homme change quelque chose dans le cycle, en
trouvant plusieurs moyens pour améliorer la production d’énergie :
− Trouver et exploiter de nouvelles sources d’énergie primaire, plus énergétiques.
− Trouver des moyens de transformation de cette énergie pour pouvoir en bénéficier.
− Trouver d’autres convertisseurs d’énergie et des moyens de mieux utiliser l’énergie.

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C’est ainsi que l’Homme a progressivement maîtrisé le feu, qu’il a su utiliser le vent, le
courant des rivières, la biomasse, à l’aide d’outils de transformation de cette énergie. Il a
donc utilisé les sources d’énergie renouvelables, et a trouvé le moyen de les transformer à
son profit : moulins à vent, roue à aube, voiles…
A l’aval, il a créé des outils pour gagner du temps sur le travail, des armes pour gagner du
temps sur la chasse…
Puis il a utilisé d’autres « convertisseurs d’énergie » à son profit : Les animaux, ânes et
chevaux pour les déplacements, bêtes de somme pour le transport, animaux de trait pour
les travaux des champs…
Puis il a utilisé des hommes, de diverses façons : esclaves, serfs, serviteurs,…

Avec le temps, il a perfectionné des outils permettant une meilleure performance de ses
animaux ou de ses hommes, mais sans changement fondamental. Les sources d’énergie
primaires sont restées les mêmes, et ses convertisseurs d’énergie n’ont guère évolué.
Il a pu cependant progresser ainsi et créer des civilisations déjà avancées.

Mais cela a pris du temps, des millénaires…
J’ai toujours été impressionné par l’idée que des générations aient pu vivre la vie de leurs
lointains ancêtres, dans les mêmes conditions. Indépendamment des chasseurs-cueilleurs,
je pense aux civilisations de longue durée, comme celle de l’Egypte antique, où des
générations différentes ont pu vivre la même vie à mille ou deux mille ans d’intervalle.

L’Homme a donc vécu très longtemps avec les seules sources d’énergie primaires
renouvelables, et les seuls convertisseurs vivants, humains ou animaux.
C’était le temps du 100% renouvelable, de l’énergie verte !

Et cela jusqu’à la fin du XVIIIème siècle !

Tout a changé rapidement avec l’exploitation de nouvelles sources d’énergies primaires,
les sources d’énergie fossile. Cela a débuté avec l’exploitation du charbon, puis s’est
poursuivi avec le pétrole et le gaz naturel. Une révolution, on peut le dire…

Le charbon a provoqué la première révolution industrielle dans les années 1770 en
Grande Bretagne; elle est liée à l’utilisation de la machine à vapeur pour actionner des
machines, en particulier dans l’industrie textile et dans la métallurgie.

Cette révolution a également été permise par un mouvement de désintégration sociale qui
a provoqué un exode rural britannique ; C’est l’application de « l’enclosure Act » qui a
transformé l’agriculture traditionnelle qui fonctionnait dans un système de coopération et
de communauté d’administration des terres, en un système de propriété privée. Cette loi
abolissait dans le même temps les droits d’usage, en particulier les communaux dont
dépendaient beaucoup de paysans.
C'est le début de la "révolution agricole". L'augmentation des productions permet alors de
subvenir aux besoins d'une population toujours croissante. De plus, les exploitations
nécessitant de moins en moins de main d'œuvre, les travailleurs se tournent vers d'autres
secteurs d'activité, tels que l'industrie.

L’industrie textile est la première touchée. Alors que les filateurs travaillent principalement à
domicile, l'utilisation de la force hydraulique pour faire fonctionner de nouvelles machines à
tisser va donner naissance à une activité en atelier. Les fabriques et les manufactures vont alors

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se développer considérablement, provoquant la ruine des artisans. Tous ces progrès
permettent un essor et une productivité sans précédent pour l'industrie du coton.

Les paysans chassés de leurs terres, et les artisans chassés de leurs locaux ont pu fournir
la main d’œuvre dont l’industrie avait besoin, dans les mines et les ateliers.
La machine à vapeur se développe de plus en plus au sein des industries, et remplace peu à peu
l'énergie hydraulique. La métallurgie connaît également une mutation importante, avec
notamment l'utilisation du coke et l'invention du puddlage (procédé d’affinage de la fonte). Il faut
du fer pour fabriquer les machines, du charbon pour alimenter la machine à vapeur et donc,
toujours plus de produits miniers et des procédés toujours meilleurs. Bientôt, la vapeur, le fer et
le charbon vont permettre le développement des chemins de fer, qui vont eux-mêmes relancer
l'industrie. Les transports ferroviaires ou maritimes vont en effet donner naissance à de
nouveaux marchés.

La révolution industrielle s’étend alors à de nombreux pays durant le XIXème siècle :
France, Belgique, Suisse, puis Allemagne, Suède, Japon, Etats-Unis, et enfin Espagne, Italie,
Autriche-Hongrie et Russie.

Après une dépression économique de plusieurs années (1873-1896), une seconde révolution
industrielle se produit. Elle débute à la toute fin du XIXe siècle et ne s'achève qu'en 1929, lors de
la grande crise économique.
Alors que la première révolution industrielle repose sur le charbon, la métallurgie, le textile et la
machine à vapeur, la seconde trouve ses fondements dans l'électricité, la mécanique, le pétrole
et la chimie.

Au XXème siècle, l’emploi des sources d’énergie fossile se généralise sur la planète, et
donc l’emploi des machines pour remplacer la force musculaire humaine ou animale.
L’Homme a trouvé une énergie primaire facilement exploitable, en grande quantité, et
« gratuite ». De plus, elle présente une capacité énergétique sans commune mesure avec
les énergies naturelles, et permet un emploi en tout temps et en tout lieu.
Il n’est pas nécessaire d’attendre que le soleil brille ou que le vent souffle, et il n’est pas
nécessaire de s’installer en bordure de rivière ou sur une source d’eau chaude.

Les révolutions industrielles ont également transformé la relation des Hommes avec leurs
convertisseurs vivants :
Les animaux ont disparu dans le domaine du travail (ils restent dans celui des loisirs) ;
On ne se déplace plus à cheval, ces derniers ne tirent plus de diligence ou de chariot, il n’y
a plus d’ânes bâtés, plus de bêtes de somme sur les routes ou de trait dans les champs.
La première révolution industrielle a mis fin à l’esclavage : le coût de l’esclave (qu’il faut
bien acheter, garder, nourrir, loger, soigner) étant bien supérieur à celui de la machine qui
le remplace, on a pu abolir l’esclavage. Cette abolition de l’esclavage résulte d’un motif
purement économique, même si l’Histoire Universelle a préféré en retenir de plus nobles.
Notons que pour les mêmes raisons, la seconde révolution industrielle, par l’avènement
de l’électricité et de l’électroménager, a mis fin aux emplois domestiques (à part dans une
caste particulière, mais négligeable).
D’autres relations se sont alors nouées avec « la classe ouvrière » et l’on a pu se rendre
compte immédiatement qu’en effet, seule la motivation économique régissait bien les
relations humaines. Mais c’est un autre sujet…

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En moins d’un siècle, les moyens de transformation de l’énergie primaire en énergie finale
se sont multiplié et se sont améliorés :
− Les turbines hydro-électriques, les centrales thermiques, puis les centrales nucléaires
ont permis de transformer la force de l’eau, le charbon et l’Uranium en électricité ;
Cette énergie finale extrêmement souple a révolutionné la vie des populations,
particulièrement par son usage domestique.
− Les raffineries ont permis de transformer le pétrole en une multitude de produits,
dont une grande partie sous forme d’énergie finale :
o Carburants pour véhicules terrestres : essence, gazole ou diesel,
o Carburants pour avions : kérosène
o Carburants pour chaudière : mazout lourd ou fioul lourd
Cela a révolutionné les transports, terrestres et maritimes, puis plus tard a permis le
transport aérien, car seul le carburant issu du pétrole permet la navigation aérienne.

Mais à l’échelle du temps humain, il est indispensable d’appréhender la vitesse des
changements. C’est pourquoi nous pourrons parler de la période présente, lorsqu’elle se
sera refermée, de parenthèse dans l’Histoire de l’humanité.


L’énergie dans le monde aujourd’hui.

Les sources d’énergie primaires peuvent être classées en diverses catégories.
• Les énergies fossiles, issues de la lithosphère : Charbon, pétrole, gaz naturel
• Les énergies renouvelables : Hydraulique, biomasse, éolienne, solaire, géothermie…
• L’énergie nucléaire.

La consommation mondiale actuelle est de l’ordre de 14.000 Mtep, soit une évolution de
400% en seulement 50 ans, et se répartit ainsi selon les sources :


Graphique n° 2 - Consommation d’énergie primaire.

On notera le poids des énergies fossiles : de l’ordre de 85 % !

Les prévisions pour 2050 conduisent à une augmentation de 57% de cette valeur, soit
à une consommation de l’ordre de 22.000 Mtep !
Mais c’est une prévision d’économistes…

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2. Les sources d’énergie fossile

2.1. Le charbon

Le charbon est un combustible fossile d’origine organique. Il est le résultat de la
transformation de biomasse (résidus de forêts notamment) enfouie dans le sol au cours
des temps géologiques.

Il est connu depuis longtemps ; on brûlait déjà du charbon en Chine, il y a 4.000 ans.
Dans l’Europe médiévale, on connaissait le charbon, mais il était considéré comme un
combustible inférieur, car il produisait beaucoup de suie et de fumée. De plus, il
n’affleurait pas dans toutes les régions et devait donc être transporté. On lui préférait le
bois.
Ce sont les pénuries de bois qui ont poussé à l’usage du charbon pour le chauffage des
habitations, et ce dès la fin du XIIIème siècle.
Puis on découvrit des avantages au charbon par le niveau de température que l’on
pouvait obtenir de sa combustion, en particulier pour le travail du métal. Cela fut encore
plus net lorsque l’on s’aperçut que le procédé de combustion utilisé pour produire le
charbon de bois pouvait être adapté au charbon pour obtenir un combustible brûlant à
des températures extrêmement élevées, « le coke ».
Au début du XVIIème siècle on se mit donc à utiliser le coke pour la production de fer et
d’acier, et cela a sans doute ouvert la voie à la révolution industrielle.

A l’origine de cette révolution, le charbon demeure au XXIe siècle une énergie privilégiée
dans le monde, et sa production n’a jamais baissé. Il permet d’assurer les besoins
énergétiques de l'équivalent de presque un homme sur trois (le charbon a satisfait 28,1
% de la consommation d’énergie primaire en 2015 selon l’AIE). Il est la première source
d’énergie utilisée pour produire de l’électricité (environ 39% de l’électricité mondiale a
été produite à partir de charbon en 2015).

Le charbon présente l’avantage d’être abondant et relativement bien réparti sur la
planète. Il n’y a pas eu de guerres pour la maîtrise du charbon.
Il présente par contre l’inconvénient d’être la source d’énergie la plus polluante, celle qui
émet le plus de CO2 dans l’atmosphère : 1 kg de CO2 par kWh produit. C’est énorme.

Pour satisfaire les besoins en charbon, les techniques d’exploitation des mines se
modernisent et des progrès sont réalisés dans la sûreté de l’extraction améliorant la
sécurité des mineurs. Rappelons que l’exploitation du charbon a causé la mort de plus
d’un million d’hommes au cours des XIXe et XXe siècle : les causes principales en ont été
le grisou, un gaz naturel se dégageant des couches de charbon causant des explosions
meurtrières appelées « coups de grisou » (ex : catastrophe de Courrières en 1906, 1 099
morts), des incendies (ex : incendie de 1956 à Marcinelle, 262 morts), la silicose (une
maladie pulmonaire mortelle provoquée par l’inhalation de particules de poussières de
silice dans les mines), des effondrements, etc…

Au cours du XXe siècle, le charbon est progressivement délaissé en Europe au profit du
pétrole et du gaz du fait de leur pouvoir calorifique plus élevé et de l’épuisement des
mines locales. Au moment où la France a fermé ses dernières mines de charbon, la
demande mondiale est repartie à la hausse, principalement en raison du développement
économique des pays d’Asie (Chine, Inde, Indonésie) qui possèdent d’importantes
réserves de charbon.

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En Asie du Sud-Est, le charbon pourrait satisfaire 40% des besoins supplémentaires
d'énergie d'ici à 2040 selon un rapport d’octobre 2017 de l’AIE. Il en résulterait une très
forte hausse des émissions de CO2 liées à l’énergie dans cette région (+ 75% d’ici à 2040)
malgré le recours à des centrales au charbon supercritiques ou ultra-supercritiques.

Les réserves prouvées sont les ressources disponibles jugées exploitables et rentables
selon les techniques actuelles utilisées. Elles sont estimées à 1 100 milliards de tonnes
(Gt) selon le BP Statistical Review of World Energy, soit de quoi subvenir à nos besoins
pendant plus de 150 ans selon le rythme de production et les prix actuels.

L’amélioration de l’efficacité énergétique des centrales à charbon et l’intégration des


technologies de « captage et stockage géologique » du CO2, CSC (le terme anglophone
CCS– Carbon Captur & Storage – est le plus utilisé) participent au développement du
« charbon propre ». Avec les méthodes de CSC, le CO2 rejeté dans l’atmosphère est
récupéré puis séquestré (généralement sous terre dans des couches profondes).
Toutefois, les projets de CSC sont encore confrontés actuellement à des contraintes
économiques et techniques freinant leur développement.

Si les moyens mis en œuvre sur le plan des recherches et développements


technologiques laissent entrevoir d’importants progrès des méthodes de CSC, la
diffusion de ces pratiques dépend également des politiques mises en place pour lutter
contre le réchauffement climatique, en donnant notamment un prix suffisant au carbone.

La gestion de l’impact climatique de l’utilisation du charbon est devenu un enjeu central.

Cela dit, comment réagiront les Etats au moment de l’épuisement des autres sources,
pétrole et gaz, surtout si la transition vers d’autres solutions n’a pas été bien préparée,
ou se révèle délicate, ce qui est fort probable ? Rappelons que l’on n’a pas, à ce jour, de
solution de remplacement du pétrole et du gaz au niveau des besoins, et que l’on aura du
mal à en trouver.
En aurons-nous même un jour ?

On a vu que les Etats-Unis, en 2017, ont repris l’exploitation du charbon lorsqu’ils ont
décidé que l’autosuffisance énergétique devait être leur priorité.

On a vu également qu’un pays plus évolué dans ce domaine, l’Allemagne, était également
revenu au charbon, lorsqu’il a décidé d’abandonner le nucléaire après l’accident de
Fukushima.

Malgré les problèmes gigantesques de pollution due au charbon, en Chine, il n’est pas
évident que ce pays abandonne rapidement cette source d’énergie. Il construit des
centrales à un rythme effréné.
Je ne suis donc pas persuadé de la fin du charbon à court terme, sachant que les réserves
estimées de charbon sont principalement situées aux Etats-Unis, en Russie et en Chine.
Dans ces conditions, on peut craindre que l’Homme n’envoie encore quelques centaines
de Gt de CO2 dans l’atmosphère, dans les cent ou cent vingt ans à venir.

Cela n’est pas compatible avec la limite acceptable de l’élévation de température sur la
Terre, et tout simplement avec la poursuite de la vie sur la Terre. Il faut le savoir…



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2.2. Le pétrole et le gaz naturel

« En 1859, l’espèce humaine découvrit un énorme trésor dans son sous-sol. Il s’agissait du
pétrole et du gaz, sources d’énergie fantastiquement abordables et accessibles. Nous avons
agi, en tout cas certains d’entre nous, comme n’importe qui découvrant un trésor dans sa
cave : nous en avons profité pleinement, le dépensant pour notre plus grand plaisir.
Kenneth E. Boulding (1978)

Ces produits sont d'origine organique et se sont formés à partir de la décomposition de
plancton et d'algues sur plusieurs millions d'années. En effet, la plupart des déchets
organiques sont détruits et digérés par les bactéries. Une infime partie de la matière
résiduelle (0,1%) se dépose toutefois au fond des océans (où elle est protégée de l'action
des bactéries car le milieu est trop pauvre en oxygène) et se mélange à des sédiments
(sable, argile, sel). Ce mélange forme une couche de boue qui durcit au fil des ans pour
devenir de la "roche mère". Sous le poids des nouveaux sédiments qui s'y déposent, la
roche mère s'enfonce très lentement dans la croûte terrestre : elle peut parcourir
quelques mètres à quelques centaines de mètres par millions d'années. La pression et la
température augmentent au fur et à mesure que la couche mère s'enfonce dans les
profondeurs.
La matière organique la composant se transforme en Kérogène puis, à partir de 2.000
mètres en dessous du niveau de la mer, en hydrocarbure (carbone et hydrogène) :
− entre 2.000 et 3.800 mètres, le kérogène se transforme en pétrole ;
− entre 3.800 et 5.000 mètres les sédiments forment des hydrocarbures non plus
liquides mais gazeux : le gaz méthane (le plus léger des hydrocarbures) ;
− en dessous de 8.000 mètres, on ne trouve plus d'hydrocarbures car les températures
très élevées les détruisent.

Les hydrocarbures remontent vers la surface de la terre car ils sont plus légers que l'eau.
Si rien ne les arrête, ils s'échappent et suintent à la surface de la terre ou se solidifient en
bitume perdant leur constituant volatil. S'ils rencontrent une couche imperméable
appelée couverture, ils restent enfermés dans une poche qu'on appelle roche réservoir où
la partie gazeuse remonte au dessus du pétrole en repoussant vers le bas la nappe d'eau.
La sédimentation évolue en moyenne de 50 mètres par million d'années, il faut donc
environ 60 millions d'années pour que le plancton mort se transforme en hydrocarbure
liquide (pétrole) et 85 millions pour que se forme un hydrocarbure gazeux. On comprend
dès lors pourquoi le pétrole ou le gaz naturel ne sont pas considérés comme des énergies
renouvelables.

Le gaz naturel

Au départ, les exploitations de gaz naturel apparaissaient comme un dérivé des
exploitations de pétrole La prospection initiale du gisement étant réalisée en vue d'une
exploitation pétrolière, le gaz naturel fut initialement brûlé avec des torchères afin de
limiter les risques d'incidents sur les sites d'extraction. Aujourd'hui, la chaîne de valeur
du gaz naturel est mieux structurée et le gaz est désormais également recherché pour son
utilisation directe.

Troisième source d’énergie consommée dans le monde (23,40%) derrière
le pétrole (34,20%) et le charbon (27,60%), le gaz naturel occupe désormais une place
majeure dans le bouquet énergétique.

12
Le gaz peut être utilisé comme matière première pour l’industrie (production
d’hydrogène, de méthanol, d'ammoniac, etc.) ou, compte tenu de son haut pouvoir
calorifique, comme combustible industriel ou domestique (chauffage, cuisson).
Il participe pour plus de 20% à la production de l’électricité. Considéré comme un
combustible souple, efficace et simple d’utilisation, il peut être stocké et transporté. Lors
de sa combustion, le gaz génère, à production d’énergie équivalente, de 30 à 50%
d’émissions de CO2 en moins que le pétrole, soit environ 400 g de CO2 pat kWh produit.

Les gisements sont inégalement répartis dans le monde : 42,7% des réserves prouvées
de gaz dans le monde sont notamment situées au Moyen-Orient. En dépit de ses
réserves, cette zone ne fournit que 13,7% du marché international.
Les plus gros producteurs de gaz naturel sont les États-Unis, la Russie, le Qatar, l'Iran et
le Canada. A eux cinq, ils représentent plus de la moitié de la production mondiale. Grâce
à l’exploitation des gaz de schiste, les États-Unis sont les plus gros producteurs de gaz
naturel depuis 2009.
En termes industriels, le premier producteur de gaz au monde est la compagnie russe
Gazprom avec une production annuelle de 443,9 milliards de m3 en 2014.

Les réserves prouvées de gaz dans le monde (dont la rentabilité économique est garantie
à 90%) sont estimées à 187.100 milliards de m3. Compte tenu de la consommation
annuelle, soit 3 393 milliards de m3 en 2014, ces réserves correspondaient à cette date à
près de 55 ans de consommation. Ces chiffres s’inscrivent dans un contexte général où le
gaz représente plus d'un cinquième de la consommation énergétique mondiale.

Le pétrole : une énergie exceptionnelle.

Le pétrole, du latin « petra » et « oleum », soit « huile de pierre » est une huile minérale
naturelle utilisée comme source d’énergie. Il est issu d’un mélange variable
d’hydrocarbures (molécules composées d’atomes de carbone et d’hydrogène) associé à
d’autres atomes, principalement de soufre, d’azote et d’oxygène. Certains de ses
composants peuvent être gazeux, liquides et parfois solides selon la température et la
pression. Cela explique la consistance variable du pétrole, plus ou moins visqueuse ou
liquide.
L'exploitation du pétrole comme source d’énergie, dite fossile, est l’un des piliers de
l’économie industrielle contemporaine; Sur les douze plus grandes sociétés privées de la
planète, sept sont pétrolières : Royal Dutch Shell, Sinopec Group, China National
Petroleum, Exxon Mobil, BP, Total, Chevron.

Dense, facilement stockable et transportable, le pétrole fournit la quasi-totalité des
carburants liquides. Il est aussi fréquemment utilisé pour la pétrochimie (caoutchoucs,
plastiques, textiles, chimie).

Dans l’usage, on distingue les pétroles « conventionnels » faciles à extraire et à raffiner
parce qu’ils restent fluides et pompables du puits au stockage de surface, des pétroles
« non-conventionnels » qui requièrent des techniques d’extraction plus sophistiquées. On
peut citer parmi les pétroles non-conventionnels l'huile de schiste, le pétrole extra-
lourd, les sables bitumineux et les schistes bitumineux.

Le pétrole brut n’est pas utilisé tel quel et nécessite une transformation : le raffinage. Il
consiste en premier lieu à distiller le pétrole afin de séparer les hydrocarbures suivant
leur densité. Au fil du temps, nombre de procédés ont été développés (craquage,

13
reformage) pour accroître la part des hydrocarbures les plus profitables (ex : essence et
gazole) en diminuant celle de fioul lourd, et pour rendre les carburants plus propres à
l’emploi (élimination du soufre).
Les zones de production sont le plus souvent éloignées des zones de consommation. Pour
acheminer le pétrole d’une zone à l’autre, deux modes de transports principaux sont
utilisés : l’oléoduc (ou pipeline) et le pétrolier par voie maritime.

A l’origine de la deuxième révolution industrielle, le pétrole s’est rajouté au charbon, sans
le remplacer, et a rapidement suscité un vif intérêt économique pour les pays
producteurs. Source d’énergie ou de matière première, c’est dans les transports que sa
domination est la plus nette. Pour ce qui relève de la production d’électricité, le pétrole a
vu sa part diminuer progressivement depuis 30 ans. S’y sont souvent substitués le gaz
naturel, le nucléaire et les énergies renouvelables.

Étroitement lié à d'importants enjeux économiques et énergétiques, le pétrole a un fort
impact géopolitique. L'approvisionnement en pétrole est libre sur un marché mondial
très ouvert. Il pose cependant aux pays importateurs de nombreux problèmes,
principalement d'ordre politique (dépendance), financier (devises) et environnemental
(émissions de CO2, pollution en ville).
Plusieurs pays (européens entre autres) ont donc engagé une politique de réduction de
leur dépendance au pétrole depuis les chocs pétroliers de la décennie 1970.

La production mondiale a atteint 100 millions de barils/jour en 2018. Près de 42,1% de
cette production est issu des pays membres de l’OPEP (Organisation des Pays
Exportateurs de Pétrole) :
− en Afrique : Algérie, Angola, Libye, Nigeria ;
− au Proche Orient : Arabie Saoudite, Émirats arabes unis, Irak, Iran, Koweït, Qatar ;
− en Amérique : Équateur, Venezuela.
Hors OPEP, les principaux pays producteurs/exportateurs de pétrole sont la Russie, les
États-Unis, la Chine, le Canada, le Mexique, le Brésil, la Norvège et le Kazakhstan.

Le pétrole est utilisé pour des applications variées depuis des siècles (ex : calfatage des
bateaux, source de chauffage, d'éclairage, produit pharmaceutique). C’est au tout début
du XXe siècle qu’il devient une donnée essentielle de l’économie en raison de son
utilisation pour l’éclairage d’abord puis comme carburant pour les moteurs à explosion
(automobile).

La période 1920-1970 est marquée par une série de grandes découvertes de gisements,
en particulier au Proche Orient. En parallèle, les marchés liés au pétrole se développent :
les carburants (essence, gazole, fioul lourd) pour les transports, les filières industrielles
du pétrole (pétrochimie), les produits dérivés (matières plastiques, caoutchouc, etc.).
Après une période de stabilité avec un baril à 2 $, la période 1973-1980 marque l'histoire
du monde avec les deux chocs pétroliers (augmentation brutale du prix du pétrole). A
partir de 1985, le contre-choc pétrolier voit le prix du baril diminuer. En 2003, le prix du
baril remonte pour atteindre un sommet de 147 $ en juillet 2008. Depuis, son prix a
baissé avant de fortement remonter en 2011 et début 2012 (atteignant 125 $ le baril en
mars 2012). Au mois de juillet 2014, le prix du baril de pétrole atteignait près de 108 $ en
moyenne. Récemment son prix a fortement chuté du fait d’une guerre des prix entre la
Russie et l’Arabie saoudite. Il est récemment tombé à 30 $.

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Il faut retenir que le prix du pétrole est absolument sans rapport avec sa rareté, et ne
résulte que de considérations commerciales ou géopolitiques. Cela signifie que l’on ne
verra pas venir la fin du pétrole par une hausse anormale de son prix.
Notons que la dépendance des pays développés vis-à-vis du pétrole est telle, que sa
convoitise a déclenché de nombreuses guerres.

L'avenir de la production pétrolière mondiale dépend de la prospection de territoires
encore inaccessibles (raisons politiques ou climatiques) et de l’évolution des technologies
(profondeur des forages offshore, exploration en zone arctique). Ces points convergent
pour aboutir à un pétrole plus rare et plus cher.
Par ailleurs, des découvertes exceptionnelles peuvent avoir lieu à l’instar du gisement
géant du Tupi identifié fin 2007 dans la baie de Santos au Brésil, enfoui à 6 000 m de
profondeur.

Le pic pétrolier est aujourd’hui matière à débat. Il désigne le moment où la production
mondiale de pétrole plafonnera puis commencera à décliner du fait de l'épuisement des
réserves de pétrole exploitables. Un consensus existe sur le fait que le pic pétrolier du
pétrole conventionnel des ressources connues a été franchi en 2008.
Pour la suite, l'exploitation de pétroles non conventionnels pourrait encore fortement
influer sur le niveau de la production mondiale dans les années à venir.
Selon l’AIE, la croissance de la demande de pétrole (103 Mb/j à l'horizon 2030)
continuera à être satisfaite au-delà de 2030.

Le pétrole présente tous les avantages ; il est d’une grande capacité énergétique, il est
facile à extraire, il est liquide donc facile à transporter et à stocker.

Pour considérer l’apport du pétrole à l’humanité, Jean-Marc Jancovici illustre son propos
avec l’image de « l’esclave des temps modernes ».
Il compare l’énergie musculaire d’un homme, à celle contenue dans le pétrole.
L’énergie contenue dans un litre de pétrole est équivalente à celle dépensée par un
homme déplaçant 6 m3 de terre à la pelle, un jour de travail sur deux pendant un an, soit
pendant environ 100 jours.
Ou bien, que 10 litres de pétrole correspondent à l’énergie dépensée par un homme de 80
kg portant un poids de 10 kg sur un dénivelé de 2.000 mètres, un jour sur deux pendant
un an de travail, donc pendant 100 jours également.



Schéma n° 3 - Equivalence énergie musculaire et pétrole

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En terme financier, avec l’hypothèse d’un litre de pétrole (gazole) à 1,50 €, et un salaire
annuel brut de 20.000 €, il montre que l’énergie produite par le pétrole est 500 fois
moins onéreuse que l’énergie produite par un homme avec ses jambes, et 5.000 fois
moins onéreuse que l’énergie produite par un homme avec ses bras (et son dos dans le
cas présent). Même l’énergie obtenue d’un esclave coûterait 100 fois plus cher que celle
obtenue du pétrole.

A partir de là, il a quantifié, en terme d’énergie, les divers auxiliaires créés et utilisés par
l’homme pour son développement, dont les puissances sont connues. Sur la diapo ci-
dessous, il a considéré un tracteur agricole, un tractopelle ou une petite pelle
hydraulique, un camion routier de fort tonnage, un avion long courrier et un laminoir
sidérurgique.
Il a ainsi déterminé les équivalences en termes énergétiques.


Schéma n° 4 - Equivalence énergie musculaire et pétrole

Poursuivant sur sa lancée, il en conclut que chaque individu bénéficie d’un nombre
« d’esclaves des temps modernes », mis à son service par le pétrole, chaque jour, pour lui
permettre de vivre matériellement dans les conditions qui sont les siennes aujourd’hui.
Ses calculs conduisent au résultat suivant : chaque être humain utilise en moyenne les
services de 200 esclaves en permanence, (les français en utilisant 600).


Schéma n° 5 - Les esclaves des temps modernes

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Il ressort que le moindre smicard français bénéficie actuellement d’un niveau de vie de
nabab, puisqu’il a plusieurs dizaines, ou centaines, d’esclaves à son service. Il n’est donc
pas tenu de travailler en permanence pour sa survie, et peut bénéficier de bons moments
de la vie (Etudes, 35 h, congés, retraite, etc…)
Et je ne parle pas de ceux qui sont à un niveau supérieur de revenus, qui ont eu le loisir
de poursuivre des études et qui n’ont pas le souci matériel du lendemain.

La question angoissante en suspens est donc la suivante : Comment fera-t-on sans ces
esclaves, après la fin du pétrole ?

Quels sont les substituts qui pourraient permettre le maintien de notre mode de vie ?
Et à quelle date peut-on estimer la fin de la production du pétrole ?

Le rapport Meadows prévoyait que 2030 serait l’année du début du déclin ; Il y a eu des
découvertes nouvelles, des avancées technologiques permettant de réduire les
consommations, l’emploi de pétroles non conventionnels (sables ou schistes
bitumineux) qui n’avaient pas été appréhendé en 1970.

Richard Heinberg parlait de 2010 pour le pic et 2060 pour la fin de l’extraction.
On admet depuis, que le pic des pétroles dits conventionnels a eu lieu en 2008.
En 1956, lors d'un meeting de l'American Petroleum Institute à San Antonio, au Texas,
Marion King Hubbert fit la prédiction que la production globale de pétrole aux États-
Unis atteindrait son maximum aux alentours de 1970, avant de commencer à décroître.
Un maximum fut atteint en 1971. La courbe qu'il employa dans son analyse est connue
sous le nom de Courbe de Hubbert, et le moment où elle atteint son maximum (en
théorie unique) le Pic de Hubbert.
Malheureusement pour cette prévision, la production américaine a recommencé à
croître en 2011, mais c’était du fait de l’exploitation des schistes bitumineux, non connus
à l’époque de Hubbert.
On peut remarquer également que la production de la Norvège correspond assez bien à
la courbe de Hubbert.


Courbe n° 6 – Production Etats-Unis Courbe n° 7 – Production Norvège
Courbe et pic de Hubbert Courbe et pic de Hubbert

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Cette représentation fait l'impasse sur toutes les fluctuations possibles dues à des causes
externes, guerres, crises économiques, révolutions, qui peuvent donner un aspect bien
plus chaotique aux courbes de production réelles.

Par exemple :
− l'Iran : La production à fait une chute en 1979 au moment de la révolution, puis a pris
une allure de croissance irrégulière.
− La Russie : La production a chuté après un premier pic de production, avec
l’éclatement du bloc soviétique en 1989, avant de remonter vers ce qui semble être un
nouveau pic.
− L’Arabie Saoudite : La production de ce pays sert un peu de variable d’ajustement à la
production mondiale, et s’adapte aux variations de l’offre et de la demande. Cela
explique son caractère irrégulier.


Courbe n° 8– Production de l’Iran Courbes n° 9 – Production de divers pays
Iran en vert, Russie en orange, Arabie en noir


Concernant le pétrole conventionnel, le pic est passé en 2008, sans faire la une des
journaux. La courbe de Hubbert pourrait être du type de celle représentée ci-dessous,
donnant une indication sur l’origine des gisements

Il semble vraisemblable qu’à l’horizon 2040 les quantités disponibles soient réduites de
moitié par rapport à celles consommées aujourd’hui, et qu’en 2060 elles le soient des
deux tiers.


Courbe n° 10 – Production mondiale de pétrole conventionnel (et pic de production)
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L’exploitation des pétroles non conventionnels a pris la relève et l’on constate que les
productions de pétrole ne ralentissent pas.

Les prévisions réactualisées avec le pétrole non conventionnel tendent à repousser le pic
aux alentours de 2030 / 2040. Selon les organismes concernés, la courbe devrait ensuite
suivre une décrue telle que définie sur la courbe suivante dans le cadre actuel :


Courbes n° 11 - Extrapolation de la production mondiale de pétrole MB/j – Période 1900 - 2250


La courbe de production peut être imaginée différemment si l’on s’intéresse au
réchauffement climatique, et aux politiques ou contraintes envisagées


Courbe n° 12 - Extrapolation de la production selon la politique menée.

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− Current Policies – la courbe intègre les politiques actuelles
− Stated Policies – la courbe intègre les politiques et mesures nouvelles affichées
− Sustainable Policies – la courbe intègre les politiques nécessaires pour atteindre
les objectifs affichés de réduction des températures à +2°C. La décroissance doit
être engagée immédiatement.

Quelques soient les hypothèses retenues dans ces diverses courbes, par ces divers
organismes, on voit bien une tendance nette : Pic de la production de pétrole vers 2040
au plus tard, puis baisse plus ou moins forte pour tendre vers la moitié de la production
actuelle entre 2070 et 2080. C’est vrai que la fourchette est de l’ordre de dix ans, mais ce
n’est finalement pas grand-chose… Vers l’an 2100, on ne pourra plus compter sur le
pétrole, dans toutes les hypothèses, et définitivement…



3. La fin des énergies fossiles

Fin du pétrole en 2070 / 2080, du gaz naturel en 2070 et du charbon en 2150.
Quelles seront les conséquences de la fin des énergies fossiles ?

Elles peuvent être dramatiques si elles ne sont pas anticipées, car en valeur absolue, le
besoin de substitution est énorme : Voir courbe ci-après.


Courbe n° 13 - Energie mondiale

On voit, sur cette courbe, que la consommation moyenne annuelle atteint 14.000 Mtep, dont
11.500 Mtep proviennent de sources d’énergie fossile, soit un ratio de 82 %, très proche de
celui obtenu par ailleurs (voir plus haut) de 85 % ! Cette différence vient de la date et de la
source consultée, mais l’ordre de grandeur est le même.

C’est bien de cet ordre de grandeur que l’on parle, quand on parle de trouver des énergies de
substitution aux énergies fossiles. Il faut être réaliste ; cela ne sera pas possible.

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On se rend compte immédiatement, qu’avec l’hypothèse d’un épuisement à court terme des
ressources fossiles, il ne sera pas possible de substituer leur volume par les autres énergies
déjà utilisées. On ne passera pas le volume de l’énergie nucléaire et des énergies
renouvelables de 15 ou 20% aujourd’hui à 100% des besoins, d’autant que ces besoins
continuent de croitre avec la population.
L’abandon des énergies fossiles, contraint par la raréfaction (gaz, pétrole), ou par le climat
(charbon) devra donc s’accompagner de trois types d’actions :
− Le développement des autres énergies déjà employées,
− Le développement de nouvelles énergies,
− La réduction des consommations d’énergie, qui devra être importante.

Et je pense que le troisième type d’action doit être envisagé rapidement. Il peut l’être
immédiatement par chaque individu conscient du problème, indépendamment des décisions
politiques ou des performances technologiques. Il ne doit pas être symbolique ; il ne suffira
pas d’éteindre la lumière en sortant…

Si l’on observe maintenant la part de ces énergies fossiles dans l’économie, par secteur
d’activité, on constate qu’elle est très importante, et essentielle dans certains secteurs :


Schéma n° 14 - Sources d’énergie par secteur d’activité

Sur le schéma ci-dessus, les sources d’énergie sont classées par nature, et les sources
d’énergie fossile sont entourées d’un trait mauve. De gauche à droite :

• Conséquences sur les logements.
On constate que la part des énergies fossiles représente environ 60% du total de l’énergie
nécessaire dans les logements pour le chauffage et l’eau chaude sanitaire, en gros 20% de
pétrole, et 40% de gaz.
Deux actions permettront sans doute de solutionner le problème :
− Une économie importante de la consommation, par une volonté forte d’isoler les
logements existants, et de construire les nouveaux sur des critères thermiques
sévères. Tout cela est techniquement possible, et devrait aussi l’être économiquement.
− Une transition vers des modes alternatifs de chauffage, action déjà en cours et bien
avancée. Là aussi, ce sont des mesures techniquement et économiquement possibles.

21
Je pense que le sujet des logements trouvera des solutions, si les pouvoirs publics
affichent une réelle volonté. Cela passera par des mesures réglementaires contraignantes.

• Conséquences sur le tertiaire.
Cela concerne le parc immobilier du tertiaire, services et commerces.
Le sujet est du même ordre que celui des logements, et les solutions devraient être les
mêmes.

• Conséquences sur l’industrie.
La substitution d’énergie dans le secteur industriel est plus difficile à appréhender, car les
besoins sont plus divers, et je n’ai pas d’idée sur le sujet. Je pense que l’électricité et le
charbon remplaceront progressivement le pétrole et le gaz, mais surtout je pense qu’au
moment de la disparition des énergies fossiles la décroissance de l’activité industrielle
sera déjà très avancée…

• Conséquences sur l’agriculture.
Le poids du pétrole est prédominant et presque exclusif dans l’agriculture, où toute la
mécanisation en est dépendante. Mais ce n’est pas le plus gros volume de consommation.
Le développement démographique de la planète a pu se faire par le passage de
l’agriculture traditionnelle à l’agriculture intensive. Cette dernière nécessite en particulier
deux facteurs : La mécanisation et les engrais.
La mécanisation a besoin d’une source d’énergie qui est aujourd’hui assurée par le
pétrole. Sans doute sera-t-il remplacé par l’emploi d’agro-carburants. Il faudra voir la
compatibilité des besoins avec la possibilité de ressources.
En tous cas, ce devrait être un secteur prioritaire pour l’emploi de ces agro-carburants.

• Conséquences sur les transports.
On voit clairement le poids du pétrole dans les transports, que ce soit le transport des
voyageurs, comme celui des marchandises : plus de 90% de l’énergie nécessaire, et un
volume énorme d’environ 520 TWh.
Les transports consomment environ 70% du volume mondial de pétrole à eux seuls…
C’est donc le secteur qui sera particulièrement impacté par la fin de son exploitation, et
l’on peut être certain qu’il subira une transformation fondamentale.

− Les transports aériens - Il n’existe aucune alternative connue à ce jour, du moins à
l’échelle des besoins, et même en réduisant fortement ces besoins.
La piste des agro-carburants est étudiée, mais elle se heurtera à la même
problématique que pour les véhicules terrestres. Pourra-t-on à la fois assurer la
nourriture et les déplacements de la population humaine avec les ressources de
l’agriculture ? La réponse est connue et elle est négative. Et ce n’est même pas une
question d’arbitrage, c’est une question de limite physique, on le verra plus loin.
Les avions ne pourront plus voler tant que l’on n’aura pas trouvé une nouvelle source
d’énergie accessible pour leur permettre de le faire.

− Le transport maritime – Il ne pourra pas se maintenir au niveau actuel, et il faudra
revenir à la vapeur si l’on poursuit l’extraction du charbon…ou à la voile.
Il est peu vraisemblable que la propulsion nucléaire soit admise pour des usages non
militaires et, de toutes manières, l’uranium sera également épuisé dans des délais à
peine supérieurs à ceux du pétrole. Cela portera un coup d’arrêt à la globalisation.

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− Le transport routier – Les poids lourds pour le transport des marchandises n’auront
guère d’alternative, du moins à leur échelle de volume et de tonnage. Des solutions
type hydrogène (piles à combustible), ou électrique à caténers sont à étudier, mais on
verra plus loin que ce n’est pas si simple. Ce sera le retour du ferroviaire.
Je pense que l’on reviendra forcément vers une économie locale.
Les véhicules légers devront passer aux énergies alternatives, à l’électrique, aux agro-
carburants, au solaire, ou à l’hydrogène. Mais des questions subsistent : A quelle date
seront nous prêts, et pour quel parc automobile ? Pourra-t-on généraliser le
changement d’énergie au parc actuel ? Certainement pas. Comment se feront donc les
arbitrages ? Très certainement des règlementations contraignantes interdiront
certains types de véhicule, voire certaines utilisations, comme les voitures privées.

Production d’électricité.
Il existe une demande croissante d’énergie électrique. Le tableau suivant nous donne
plusieurs indications utiles.


Courbes n° 15 – Production électrique par sources d’énergies

Tout d’abord, on remarque que la production a été multipliée par 2,7 en trente trois
ans, entre 1985 et 2018, passant de 10.000 TWh à 27.000 TWh.

Les sources d’énergie électriques sont approximativement les suivantes :
o Centrales à charbon : 39%
o Centrales à gaz : 20 %
o Centrales à fuel : 4%
o Centrales nucléaires : 12 %
o Centrales hydrauliques : 15 %
o Energies renouvelables : géothermie, éolien, solaire… 10 %

La part des centrales à fuel et à gaz est de 24 %. Pourra-t-elle être compensée par des
énergies renouvelables après leur épuisement ?

23
La part des centrales à charbon est de 39%. Pourra-t-elle être maintenue du fait de
leur effet sur le réchauffement climatique ? Ces centrales sont en effet les plus
polluantes quant au rejet de CO2 dans l’atmosphère.
Une solution partielle pourrait être de capter le CO2 émis par la combustion du
charbon, pour éviter son envoi dans l’atmosphère, et de l’enfouir dans le sol. Ce
procédé est à l’étude et en expérimentation à petite échelle. Des efforts devraient être
portés sur le sujet pour une utilisation industrielle. Le seront-ils, compte tenu des
impacts économiques ?

Piste d’amélioration : Capture et stockage du CO2.
Ci-après un article de « connaissance des énergies ».
« La capture du CO2
La combustion de ressources énergétiques fossiles, charbon, gaz naturel, pétrole, mais aussi
de ressources énergétiques renouvelables (biomasse) ou de dérivés de ces ressources
entraîne la formation de molécules de dioxyde de carbone ou CO2.
Le procédé de capture (parfois appelé captage) du CO2 (CSC, le terme anglophone CCS -
pour Carbon Capture and Storage - étant plus utilisé) consiste à piéger les molécules de
CO2 avant, pendant ou après l’étape de combustion a4n d’éviter sa libération dans
l’atmosphère (gaz à effet de serre). Trois familles de procédés de capture sont ainsi
envisagées :
− la capture avant la combustion : c’est la précombustion ;
− la capture après une combustion classique (à l’air), avec peu ou pas de modi4cation du
procédé de combustion : c’est la postcombustion ;
− la capture après une combustion à l’oxygène pur : c’est l’oxycombustion.
Le CO2 extrait est obtenu sous forme gazeuse ou liquide, généralement mélangé à d’autres
espèces gazeuses minoritaires.

Le stockage du CO2
En amont du stockage, le CO2 doit être transporté, soit par pipeline, soit par bateau, soit
encore par camion pour de petites quantités. Le CO2 extrait est ensuite stocké dans des
formations géologiques du sous-sol permettant sa séquestration sur le long terme,
typiquement plusieurs siècles.
Deux facteurs influent sur le coût final de l’énergie produite :
− un surcoût de fabrication des centrales, surcoût initial parfois très important (40% en
moyenne selon IFP EN). Ce coût est répercuté sur l’énergie produite ;
− un surcoût d’exploitation : l’étape de capture du CO2 est coûteuse en énergie. On parle
de pénalité énergétique. Pour une centrale électrique, cette pénalité énergétique peut
représenter plus de 25% de l’énergie produite.
Le coût du procédé est actuellement autour de 50 à 100 €/t CO2 (60 euros la tonne en
moyenne selon le GIEC, dont 85% pour le seul captage) . Ce coût est à comparer avec le
faible prix de la tonne de CO2 sur les marchés internationaux du carbone. L’amélioration
des procédés pourrait permettre une diminution de ces coûts.

La capture du CO2 n’est pas encore déployée à grande échelle. De nombreuses
expérimentations sont en cours, soit sur des centrales existantes, soit sur des unités neuves,
principalement dans les pays développés (Europe, Amérique du Nord, Australie pour
l’essentiel) ainsi qu’en Chine. Potentiellement, la capture du CO2 pourrait être utilisée dans
le monde entier.
Des sites de stockage sont également exploités. Ils peuvent être situés en mer (stockage de
Sleipner, au large de la Norvège) ou sur les continents (stockage de Lacq, dans le Sud de la
France).
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Le potentiel de réduction des émissions de gaz à effet de serre grâce aux technologies de
capture et de stockage du CO2 est important. L'Agence Internationale de l'Énergie (AIE)
estime qu'elles pourraient contribuer à 20 % des efforts de réduction des émissions en 2050
dans un contexte de diminution par deux des émissions mondiales entre 2005 et 2050. »


4. Energie et Economie

Je vais rappeler la citation de Kenneth Ewart Boulding que j’ai placée en introduction de ma
note de réflexion :
« Celui qui croit qu'une croissance exponentielle peut continuer indéfiniment dans un monde
fini est soit un fou, soit un économiste. »

Pour valider cette réflexion de bon sens quant aux économistes, je voudrais apporter deux
exemples :

« Les ressources naturelles sont inépuisables, car sans cela, nous ne les obtiendrions pas
gratuitement. Ne pouvant être ni multipliées ni épuisées, elles ne sont pas l’objet des sciences
économiques. » Jean-Baptiste Say, dans son traité d’économie politique de 1803

« Le monde peut, en fait, se passer des ressources naturelles ».
Robert Solow, Prix Nobel d’Economie

De fait, ces économistes raisonnent avec les idées du début de la révolution industrielle
(Adam Smith ou JB Say) dans un monde « sans limite physique » ; ils ne considèrent que les
deux facteurs de production contraignants à l’époque, le capital financier et le travail humain
avec son organisation.
Ce n’est plus vrai de nos jours, et c’est la faille du raisonnement.

Jean-Marc Jancovici résume parfaitement cela par un dessin en deux phases :


Schéma n° 16 - Capital et travail assurent la production

De nos jours :
− L’argent, est facile à trouver. Quand on en manque on l’emprunte (on le créé ex nihilo).
− Les Hommes ne manquent pas, et ils sont mis en concurrence pour l’emploi dans un
cadre de « moindre coût de production » à l’échelle mondiale.
Du point de vue de l’Economie, la croissance peut donc s’installer durablement, justifiant le
modèle économique libéral productiviste quasiment généralisé sur la planète.
25
L’Economie oublie deux éléments indispensables, et de plus en plus contraignants, que sont
la matière et l’énergie, qui ont des limites physiques, celles de la Terre.
La matière constituant les produits finis et l’énergie nécessaire à sa transformation, doivent
nécessairement venir de quelque part. Sans matière, ou sans énergie, pas de production !
Le schéma réel doit donc être complété de la façon suivante.


Schéma n° 17 - Système productif réel

On introduit dans le schéma, d’une part la Terre avec ses ressources en matière et en énergie
primaire, et d’autre part le parc de machines (de transformation ou convertisseurs
d’énergie) et les stocks d’énergie finale qui leur sont indispensables.
Tous les produits finis sont constitués de matière première prise à la Terre, transformée
grâce à une énergie primaire prise à la Terre, à l’aide de moyens matériels. C’est aussi le cas
des moyens matériels de transformation eux-mêmes.
La production de produits finis sera donc limitée par la disponibilité de matière et d’énergie
issues de la Terre, et donc contrainte par ses limites, et sera fonction non pas du nombre
d’hommes, mais du nombre de machines, en fait de la puissance du parc de machines.
Sur le schéma 17, on supprime l’énergie primaire et finale, donc on supprime la production.

A ce stade, il faut signaler le rapport direct qui existe entre le PIB et le parc de machines, soit
entre le PIB et la consommation d’énergie. La courbe suivante est basée sur les cinquante
dernières années.


Courbe n° 18 - Rapport entre le PIB et la consommation d’énergie

26
On constate que c’est quasiment une droite, ce qui signifie que le PIB est directement
proportionnel à la consommation d’énergie utilisée, ce qui est très intéressant pour
comprendre le moteur de la croissance.

Par contre, cela rend plus dramatique l’approche de la lutte contre le réchauffement
climatique, car cela signifie que toute réduction de la consommation d’énergie (aujourd’hui
majoritairement d’origine fossile) entraînera une baisse du PIB, donc une récession.

C’est clair, il ne peut y avoir de baisse du niveau d’émission de CO2 dans l’atmosphère
(fonction de la consommation d’énergie), sans baisse du PIB mondial, c’est à dire sans une
récession mondiale.
On comprend mieux les échecs des sommets internationaux. Qui va défendre cette thèse ?

Cela dit, qu’on l’accepte ou non, cette récession est inévitable, car nous abordons une période
d’épuisement des ressources de matière et d’énergie. C’est encore peu sensible, mais cela va
se poursuivre et s’accélérer. Cela entraînera, de fait, la récession et le chômage.
Aucune politique, dans le modèle économique actuel, ne peut changer cela.

Tout se passe comme si les responsables politiques n’étaient pas conscients de ce problème.
Mais comment gagner une élection en promettant une décroissance, une réduction du niveau
de vie, du chômage, bref, « du sang et des larmes » ?
Les politiciens préfèrent donc suivre le discours des économistes plutôt que celui des gens
raisonnables. La réalité finira par rattraper tout le monde.

On peut d’ailleurs observer ce phénomène en grandeur réelle, même si les attendus se
posent différemment :
L’activité industrielle est en décroissance dans les pays de l’OCDE (les pays riches), et en
particulier en Europe. La principale cause de ce déclin vient de ce que ces pays ont décidé de
délocaliser une grande partie de leur production industrielle vers les pays à main d’œuvre
bon marché et dénués de législations sociales et environnementales. La course au
profit immédiat !

Prenons le cas de l’Europe


Courbe n° 19 - Evolution de l’activité industrielle des 25 dernières années

27
D’une part, on constate que la croissance était générale jusqu’à l’adoption de l’euro. Puis elle
a marqué un palier jusqu’en 2007/2008, où elle a enregistré une chute assez brutale avant
de marquer un nouveau palier dans la dernière décade. Aucun pays n’a retrouvé son niveau
d’activité de l’avant euro, sauf l’Allemagne. Cela devrait d’ailleurs interroger…
C’est valable pour la France, mais aussi pour l’Italie, l’Espagne, la Grande Bretagne., comme
pour l’ensemble de l’OCDE.
Globalement, pour les seuls pays concernés, la baisse totale est de 7%, avec un niveau de 15
à 20% pour les pays de l’Europe du sud.

On peut confirmer cela par un autre indicateur, celui du transport routier de marchandises,
par exemple.


Courbe n° 20 - Evolution du transport routier de marchandises en Europe

Si l’on prend le cas particulier de la France, on constate que cette baisse affecte le transport
routier, mais également le transport ferroviaire.


Courbe n° 21 - Evolution du transport de marchandise en France


D’autre part on constate (voir courbes page suivante) que le volume d’énergie fossile
employée en Europe a diminué de façon sensible depuis 2006/2007 et sur dix ans, de l’ordre
de 10 à 15%, baisse qui s’explique par les diminutions d’activité citées plus haut, de
production industrielle et de trafic de marchandises ; on constatera qu’elles sont de même
ordre.

28

Courbe n° 22 - Consommation en pétrole de l’UE + Norvège


Courbe n° 23 - Consommation de gaz de l’UE + Norvège

Une baisse de l’activité industrielle entraîne donc une baisse de consommation d’énergie,
conformément aux conclusions que l’on pouvait tirer de la courbe n° 18.
Des choix politiques ont conduit à cette situation, qui pourrait être inversée par d’autres
choix de politique industrielle.

Cela fait des années que les hommes politiques ne tiennent qu’un seul discours et leurs
slogans ne font référence qu’à « la crise », « la croissance », « l’emploi », et « la
compétitivité des entreprises». C’est une situation durable, qu’ils ont créée eux-mêmes, et
l’on reste dans le domaine de la communication.

A l’inverse, une baisse subie d’approvisionnement d’énergie, prévisible à plus ou moins court
terme, entraînera une baisse de production industrielle subie, donc une récession.
Nous continuerons donc d’entendre les mêmes discours d’espoir de jours meilleurs, mais ce
sera encore en vain. La situation sera irréversible, et là, quelles que soient les politiques
menées sur les deux seuls paramètres que sont le capital et le travail.
La récession s’imposera, et la seule action pour résoudre les problèmes humains qu’elle va
occasionner, ce sera un changement de modèle économique et social.

Nous serions inspirés de le comprendre vite.

29
5. Conséquences sur la population à l’avenir

Sur la population totale

Le pétrole a permis la révolution de l’agriculture, ce qui a conduit à un accroissement
extraordinaire de la population.
Richard Heinberg montre la corrélation entre la courbe démographique de l’Humanité et la
production pétrolière. La population est parvenue à 1 Md en plusieurs millénaires, jusqu’au
début de la révolution industrielle, puis a décollée au rythme de la production pétrolière.


Courbe n° 24 - Production de pétrole Courbe n° 25 - Population mondiale
Evolution 1600 à 2000 - Projection 2000 à 2200 Evolution 1600 à 2000 - Projection 2000 à 2200

Que se passera-t-il au moment du déclin de cette production ? Richard Heinberg imagine une
chute assez brutale de la population, comme le prévoyait le rapport Meadows, mais avec un
décalage de trente ans, soit à compter de 2060 environ.
Cela dit, il retrouve le chiffre de 4 Md d’habitants en 2100 annoncé par le rapport Meadows.


Courbe n° 26- Courbes du rapport Meadows (1972)

Richard Heinberg et le Rapport Meadows prévoient donc une chute de la population, en
relation directe de l’épuisement des ressources naturelles, et particulièrement du pétrole.

Sur l’activité humaine.

On a vu plus haut que les révolutions industrielles, par l’utilisation des énergies fossiles,
avaient permis un développement extraordinaire de la production de biens divers.
La production de l’Homme a été multipliée par 200 environ selon les estimations de Jean-
Marc Jancovici (voir les 200 esclaves des temps modernes).
Cela signifie aussi que le mode de fonctionnement de l’Homme a été bouleversé.
30
Dans les temps anciens, les Hommes passaient tout leur temps à chercher de quoi se
nourrir ; ils ne pouvaient se consacrer à rien d’autre, ils ne produisaient rien.
Au début de la révolution industrielle, il y a un peu plus de deux siècles, la population
travaillant la terre représentait les deux tiers de la population. On sait ce que signifie
travailler la terre ; c’est un emploi à temps plein, douze mois sur douze. Les enfants
commençaient à 12 ou 13 ans et n’avaient pas le temps d’étudier. Les vieux n’avaient pas le
temps de s’arrêter.
Les deux tiers de la population pour nourrir l’ensemble, cela implique qu’un tiers de la
population seulement pouvait se consacrer à d’autres tâches. Compte tenu des besoins d’une
société complexe, autant dire que ces tâches étaient utiles. Là encore, on commençait le
travail très jeune, et on l’arrêtait très tard. Et l’on n’avait pas le temps pour les tâches
superflues, sauf, bien sûr pour une certaine caste dominante.

Les machines ont démultiplié le travail de l’homme.
Un tracteur, c’est des centaines d’hommes libérés du travail de la terre. Progressivement, les
champs se sont vidés, et les hommes ont pu s’occuper à d’autres tâches. Les emplois dans
l’industrie se sont multipliés, entraînant les emplois de services qui vont avec.

Puis les machines se sont imposées dans l’industrie, de plus en plus nombreuses, et de plus
en plus puissantes, vidant à leur tour les usines de leurs travailleurs.
Mais les emplois de service ont poursuivi leur progression car ils ne sont pas liés au nombre
d’hommes, mais à la puissance de travail installée, en d’autres termes à la consommation
d’énergie.

Puis s’est développée une activité économique détachée des besoins de base. Cette activité a
pris de l’ampleur avec le temps disponible pris sur les activités de base, et les services
rattachés à cette activité ont suivi la progression.

C’est l’énergie, abondante et facilement obtenue, qui a réduit le travail des hommes, par
l’intermédiaire des machines. C’est donc l’énergie qui a permis les changements de société ;
− Développement de l’Education avec les études pour tous, et les études longues,
− Développement des services de Santé,
− Développement des déplacements,
− Réduction du temps de travail,
− Droits aux congés,
− Droits à la retraite dans de bonnes conditions,
− Développement des activités sportives, de loisir, de tourisme,
− Etc.

Aujourd’hui, 3% de la population nourrit l’ensemble. Les autres peuvent produire les biens
nécessaires ou utiles, mais aussi beaucoup de biens superflus. Une grande partie de
l’humanité se consacre à une activité de production ou de services sans rapport avec les
besoins de base des Hommes.
Et beaucoup profitent de temps libre.

Jean-Marc Jancovici présente cela sous la forme de courbes de populations, selon les chiffres
de l’INSEE, réparties en trois catégories :
− actifs dans l’agriculture,
− actifs dans l’industrie,
− actifs dans les services.
Il a ainsi observé l’évolution sur deux siècles pour établir sa démonstration.
31

Courbes n° 27 - Nombre d’actifs par catégorie, de 1906 à 1996

On peut analyser ces courbes en distinguant plusieurs époques

1ère période – 1800 / 1940
Les emplois agricoles atteignent un maximum vers 1840, puis ils stagnent jusqu’en 1870
avant d’entamer une baisse régulière limitée, jusqu’à la seconde guerre mondiale.
Durant cette période, les emplois industriels augmentent régulièrement et constamment
ainsi que les emplois de service qui les suivent.

2ème période – 1945 / 1975 – Les trente glorieuses
Les emplois dans l’agriculture s’effondrent du fait de la mécanisation et du développement
de l’agriculture intensive, et cette tendance se poursuivra jusqu’à nos jours.
La tendance haussière se poursuit après la guerre pour les emplois industriels et de service,
avec l’abondance des énergies fossiles, jusqu’aux chocs pétroliers des années 70/80.

3ème période – 1975 / 1996 et quelques années de plus
Les emplois industriels s’effondrent du fait d’une part de la mécanisation des tâches
(robotisation) et des politiques industrielles (délocalisation de la production à forte main
d’œuvre et développement des productions à forte valeur ajoutée), tandis que les emplois de
service s’envolent, suivant l’évolution de l’activité économique.
En contre partie, le chômage se développe…

4ème période – L’avenir ; les tendances ne figurent pas sur les courbes ci-dessus.
Que peut-il se passer avec l’épuisement des ressources naturelles, d’ici quelques années, ou
quelques décennies ? On peut faire quelques suppositions :
La baisse de production d’énergie primaire va entraîner une baisse du parc de machines, et
la chute du PIB, comme nous l’avons déjà vu.
Il s’en suivra une baisse de production industrielle, et donc une baisse de l’emploi, un peu de
l’emploi industriel, pour ce qu’il en reste, mais surtout de l’emploi de service, qui risque à son
tour un effondrement. On peut même le prévoir assez brutal.
La baisse des ressources, associée à la baisse des matières premières va contraindre les
Hommes à se recentrer sur les productions de base, agricoles et industrielle.
Il va falloir gérer cela… Quoi qu’il en soit, l’impact sera énorme sur les activités humaines.
Avec la décroissance, les jeunes seraient bien avisés de considérer la nouvelle donne avant
de décider la voie qu’ils devront choisir…

32
6. Les économies d’énergie

La seule certitude que nous ayons sur l’avenir, c’est que ces économies seront effectives,
volontaires ou imposées par la nature, et nous devons en être conscients.
Elles sont liées à la disparition prochaine des sources d’énergies fossiles.
− D’une part, la raréfaction du gaz et du pétrole dans le courant de la seconde moitié du
XXIème siècle ne sera pas entièrement compensée par les autres sources d’énergie.
− D’autre part, la limitation de l’emploi du charbon est nécessitée par la limite de la hausse
des températures permettant le maintien de la vie sur la Terre.

Un nouvel équilibre est donc à trouver impérativement avec le renoncement aux énergies
fossiles, le développement possible des autres énergies, et la réduction des besoins.
Quels sont les leviers sur lesquels il serait possible d’agir ?

L’équation de KAYA

On nomme ainsi la formule mathématique présentée en 1993 par un économiste japonais,
Yoishi Kaya, qui relie le taux d’émission de gaz carbonique dans l’atmosphère, à divers
paramètres d’ordre démographique, économique et énergétique.
Kaya expose que le niveau total d’émission peut s’exprimer comme le produit de quatre
facteurs : la population, le PIB par habitant, l’intensité énergétique et le contenu en CO2 de
l’énergie consommée.
Cette équation est utilisée par les experts du GIEC pour analyser ou simuler l’évolution des
émissions mondiales de CO2 dans le cadre de la lutte contre le réchauffement climatique.
Elle s’écrit :


avec :
• CO2 : émissions anthropiques mondiales de CO2,
• POP : population mondiale,
• PIB : PIB mondial,
• E : consommation d'énergie primaire mondiale
mais aussi:
• PIB / POP : PIB par habitant. C'est une mesure économique du niveau de vie moyen.
• E / PIB : Intensité énergétique du PIB. C'est la quantité d'énergie qu'il faut utiliser pour
produire un euro de biens ou services.
• CO2 / E : Contenu en CO2 de l’énergie. C'est la quantité de CO2 que l’on émet pour
disposer d'une quantité d'énergie donnée. Il dépend de la part des diverses
sources d'énergie dans la consommation mondiale. Pour le faire baisser, il faut
augmenter la part des énergies "sans carbone".
On peut vérifier la cohérence (validité) mathématique de cette équation en simplifiant les
termes jusqu'à obtenir : CO2 = CO2

Cette équation a été utilisée par Jean-Marc Jancovici pour démontrer les difficultés qui se
posent lorsque l’on envisage une réduction des émissions de CO2.
En s’appuyant sur les courbes prévisionnelles de variation des températures en fonction des
émissions, présentées par le GIEC, et si l’on veut tenir les engagements des accords de la COP
21, soit limiter à 2°C l’élévation de température à l’horizon 2100, il faut diviser par trois le
niveau actuel des émissions, à l’horizon 2050.

33
La formule choc de JMJ, c’est dire que mathématiquement, lorsque l’on divisera par trois le
premier terme de l’égalité, c’est à dire lorsque l’on émettra trois fois moins de CO2, si l’on ne
change pas les trois derniers facteurs du second terme de l’égalité, on divisera par trois la
population mondiale.
Il vaudrait mieux, en conséquence, parvenir à réduire les trois derniers facteurs :

− CO2 / E Il n’y a qu’une solution : décarboner l’énergie. Cela veut dire qu’il faudrait
laisser au plus tôt les sources d’énergie fossile dans le sous-sol, et particulièrement le
charbon et utiliser des énergies « propres ». Les actions seront donc politiques et
technologiques. C’est la transition énergétique.

− E / PIB Pour réduire l’énergie nécessaire, il faut améliorer la performance de l’énergie,
c’est à dire augmenter le rendement « énergie utile / énergie primaire » et cela relève
principalement de la technologie. Il faut améliorer les rendements des installations qui
permettent de passer de l’énergie primaire à l’énergie finale, et améliorer les rendements
des convertisseurs d’énergie qui permettent de passer de l’énergie finale à l’énergie utile,
celle qui répond au besoin. C’est l’efficacité énergétique. Ce travail est régulièrement fait,
mais on constate que cela ne baisse pas la consommation. En fait cela améliore le service.
Par exemple, on constate que la consommation des moteurs thermique des véhicules a
baissé, à poids de véhicule constant. Mais au lieu de conserver des véhicules de même
poids, on a profité du gain pour pouvoir, à consommation égale, avoir des véhicules
mieux équipés et plus lourds. L’Homme est ainsi fait… mais il devra changer.

− PIB / POP Pour réduire ce rapport, il n’y a malheureusement qu’une solution, c’est la
baisse de la consommation, et donc la décroissance. Notons qu’elle est en route, subie par
une partie de la population, malheureusement la plus pauvre, qui s’enfonce un peu plus
dans la pauvreté. Il faudrait qu’elle soit volontairement le fait de la population qui peut se
le permettre ; c’est la sobriété énergétique


Schéma n° 28 - Economie sur les phases de transformation d’énergie

Les actions sont claires : Transition énergétique, efficacité énergétique, sobriété énergétique.
Cela relève du niveau politique, technologique, et personnel.
Changer d’énergie primaire, réduire les pertes dans les transformations d’énergies (primaire
à finale et finale à utile), réduire la consommation d’énergie finale.
34
Tout cela ne doit pas empêcher de travailler sur le premier terme, la limitation de l’évolution
de la population humaine. C’est un sujet délicat, qui se règlera par l’éducation des femmes
(planning familial) et l’élévation du niveau de vie des sociétés concernées. Mais ce sera long,
et… consommateur d’énergie !

Bien sûr, cela n’est pas possible dans le cadre de notre modèle socio-économique.
Il faudra donc en changer (je crois l’avoir déjà dit, non ?).


Baisse de la consommation : économie d’énergie

Quelles que soient les hypothèses concernant les réserves de carburants fossiles, de
complément ou de substitution par des énergies nouvelles ou renouvelables, on doit
admettre que l’on se dirige vers un monde qui devra fonctionner avec beaucoup moins
d’énergie à sa disposition.

Volontairement ou forcément, nous devrons réduire, et fortement, notre consommation
d’énergie. Qu’on le veuille ou non, nous serons obligés de faire avec beaucoup moins.

Quelles seront les habitudes qu’il faudra modifier, les secteurs qu’il faudra privilégier ou
ceux qu’il conviendra d’abandonner ? Quelles seront les méthodes qui nous conduiront à
cette réduction d’énergie ?
Le schéma de répartition du paragraphe 3 (schéma n°14) nous indique déjà que le point
crucial sera celui des transports. Mais l’effort devra porter sur l’ensemble.

Vaste sujet, auquel je ne prétends pas apporter de réponse. Tout au plus, pourrais-je aborder
quelques pistes.

La baisse de la consommation par la justice fiscale : politique des taxes.

« Les économistes reconnaissent largement le besoin d’un transfert fiscal – diminuer les impôts
sur le revenu tout en augmentant les ponctions sur les activités destructrices pour
l’environnement – afin que les prix du marché reflètent la réalité.
Il est navrant de constater que le modèle économique désastreux dans lequel nous vivons est
subventionné. Je pense que c’est une aberration. » Lester R. Brown
C’est l’idée de la Taxe Carbone.

J’ai cité dans la note de présentation la remarque de Oystein Dahle, « Le socialisme s’est
effondré parce qu’il n’autorisait pas le marché à dire la vérité économique. Le capitalisme
pourrait s’effondrer parce qu’il ne permet pas au marché de dire la vérité écologique. »
Il s’agit donc de dire cette vérité écologique, dans un nouveau système.

Les transports

• La voiture
Par exemple, alors qu’il est généralement admis que la société du tout-voiture est la cause
de nombreux maux, le coût du carburant est subventionné par l’ensemble de la
population, qu’elle possède une voiture ou qu’elle n’en possède pas, qu’elle roule
beaucoup ou qu’elle ne roule pas. Il serait plus juste, et surtout plus efficace, de faire payer
au consommateur le coût réel.

35
Une étude menée aux Etats-Unis par l’Internationnal Center for Technology Assesment en
1998, a déterminé le coût réel du litre de carburant aux Etats-Unis à cette époque. Ce
montant tient compte de tous les coûts indirects, non pris en compte dans le prix à la
pompe, tels que : les remises d’impôt aux compagnies pétrolières, les coûts liés à la
protection des approvisionnements en pétrole, les subventions à l’industrie pétrolière et
les coûts médicaux du traitement des maladies respiratoires liées aux gaz d’échappement.
Le montant des ces coûts indirects atteignait alors 2,35 $ par litre. Ces coûts sont réels !
Le prix à la pompe était alors de 53 cents par litre. Il aurait dû être de 2,88 $, c’est à dire
cinq fois et demi plus élevé.
Il est certain que l’application du prix réel à la pompe, participerait à la baisse de la
consommation. Ben entendu, cela ne pourrait s’envisager qu’avec une modification en
profondeur des politiques de transport, afin de permettre à tout le monde de pouvoir se
déplacer dans des conditions acceptables. Cette modification de politique serait ainsi
financée… Cet exemple est un exemple parmi d’autres.

• L’avion
A défaut de supprimer totalement les voyages en avion, il serait bon dans un premier
temps d’éviter tous les vols « évasion » par voyagistes Low-Cost qui sont des aberrations
économiques et écologiques.
En tous cas, il faudrait au moins facturer le coût réel de cette activité.
Supprimer toutes les subventions, taxer l’activité normalement, et taxer le carburant avec
un taux permettant de financer les coûts indirects de cette activité, etc.
Multiplier ainsi le prix des billets par facteur 10 ou 15 refroidirait sans doute les ardeurs.
Une réglementation contraignante pourrait aussi interdire les vols courte distance
réalisables par voie ferroviaire.

• Le bateau
De la même façon, la fiscalité sur le carburant devrait être appliquée pour tenir compte
du coût réel à la société. Cela est vrai pour les cargos et porte-conteneurs, les chalutiers,
mais aussi les Yachts et bateaux de plaisance, qui bénéficient aujourd’hui de fuel détaxé !
Quand aux méga bateaux de croisière, c’est pour moi la même aberration que les low-cost
aériens. A défaut de pouvoir les supprimer, il faudrait les taxer pour ce qu’ils coûtent à la
collectivité, afin de pouvoir financer les coûts indirects qu’ils occasionnent.

• Le retour à l’économie locale. La fin du pétrole risque fort de mettre fin à la globalisation,
au commerce international à grande échelle, aux échanges internationaux, à la mobilité
débridée.
Ce pourrait être le retour à l’activité locale ou régionale, le rapprochement de l’activité et
de l’habitat, avec toutes les économies que cela représente.

L’habitat

La difficulté de l’exercice, c’est de savoir quel sera l’habitat qui se développera.
Actuellement, la tendance est la poursuite de l’urbanisation. Voir projection ci-après.

Le déplacement des populations depuis les zones rurales vers les zones urbaines, initié par
les pays développés, se généralise sur la planète.
La tendance est très nette, et le basculement est réalisé depuis 2007. Il y a aujourd’hui, dans
le monde, davantage d’urbains que de ruraux.

36

Courbe n° 29 - Evolution des habitats urbains / ruraux

Rappelons qu’un habitant sur 10 vivait en ville en 1900 ; trois habitants sur 10 en 1950, et
donc 5 habitants sur 10 en 2007. Les prévisions indiquent qu’ils seront 6 sur 10 en 2030…
Il est généralement admis que la tendance va se poursuivre.

Mais ce n’est qu’une opinion, et j’aurais personnellement tendance à penser comme Lester
Brown que le mouvement risque de s’inverser:
« Les villes nécessitent une concentration de nourriture, d’eau, d’énergie et de matériaux que la
nature ne peut pas fournir. Concentrer ces volumes de ressources, puis les disperser sous forme
de déchets, de rejets d’égouts et de polluants de l’air et de l’eau est un défi pour tous les
gestionnaires des grandes villes. »

« Les premières villes reposaient sur les campagnes alentour pour leur approvisionnement en
nourriture et en eau. Mais de nos jours, les villes dépendent souvent de ressources distantes,
même en ce qui concerne ces besoins alimentaires. La ville de Los Angeles, par exemple, tire
l’essentiel de son apport en eau douce du Colorado, rivière distante de plus de 970 kilomètres.
Mexico, à plus de 3.000 mètres d’altitude, dépend du pompage coûteux d’une eau distante de
150 km et située plus de 1.000 mètres plus bas pour compléter ses ressources propres devenues
insuffisantes. Pékin envisage de pomper l’eau du Yang-Tsé-Kiang, à près de 1.500 km de la
ville. » La nourriture provient de plus loin encore, et bien souvent de l’autre côté du monde.

« Dans un monde où la terre, l’eau et l’énergie deviennent rares, la valeur de chacune de ces
ressources peut croître substantiellement, modifiant le poids des échanges économiques entre
les campagnes et les villes. Depuis les débuts de la Révolution Industrielle, les échanges ont
favorisé les villes parce qu’elles contrôlent les ressources les plus rares : le capital et la
technologie. Mais si la terre et l’eau deviennent les ressources les plus rares, alors les habitants
des zones rurales qui les contrôlent pourraient reprendre le dessus. Dans une nouvelle économie
basée sur les énergies renouvelables, une fraction très importante de ces énergies,
particulièrement de l’énergie éolienne et des biocarburants, viendra des zones rurales
avoisinantes. »
Ajoutons que le télétravail et le commerce par internet réduiront l’avantage de la vie en ville.

Quoi qu’il en soit, nous serons amenés à réduire la consommation de tout ce qui touche à
l’habitat, qu’il soit urbain ou rural, surfaces de construction, consommation énergétique,
mais aussi distances de déplacement pour le travail ou l’approvisionnement.

37
L’industrie : La fin du superflu

La fin du pétrole nécessitera vraisemblablement que l’on se concentre sur la production et
les activités essentielles, et un mode de vie économe et efficace.
Les transports non nécessaires devraient être évités, voire supprimés

Concernant l’industrie, nous sommes dans le même schéma :
Les coûts réellement pris en compte dans le prix de vente, même si l’on ne tient pas compte
des nombreuses subventions et réductions d’impôts dont bénéficient les industriels, ne
prennent en compte que les coûts directs.
La collectivité assume les coûts indirects que sont les infrastructures de transport,
l’évacuation et le traitement des déchets sous toutes les formes (solides, liquides, gazeux), la
réhabilitation des sites industriels abandonnés, etc…

Personne n’assume le coût de la matière première issue des ressources naturelles de la
Terre. On devrait pouvoir y mettre une valeur.


7. Les autres sources d’énergie: nucléaire et énergies renouvelables.

Nous avons vu plus haut que les énergies fossiles pesaient pour 85 % au niveau mondial.
Cela laisse donc un complément de 15 % assuré par les autres énergies, surtout dans le
domaine de la production de l’électricité, que l’on peut classer en deux catégories :
− Une énergie tirée d’un minerai non renouvelable, l’Uranium, mais qui présente l’avantage
de ne pas émettre de gaz à effet de serre.
− Une énergie dite renouvelable, car produite à partir d’une source primaire renouvelable,
Biomasse, Soleil, Vent, Eau, Géothermie. En fait deux énergies dominent, celle du bois et
celle de l’hydraulique. Pour le moment, le reste est très marginal, et cela laisse perplexe,
car c’est sur ces énergies très marginales que semblent reposer nos espoirs.
Que peut-on attendre de ces sources d’énergies, et peuvent-elles se développer ?

Concernant l’électricité
La production mondiale d’électricité en 2016 s’élevait à 25.000 TWh, répartis de la façon
suivante :


Schéma n° 30 - Production mondiale d’électricité


On notera la particularité de la production française par rapport à la production mondiale.
Les poids de l’électricité d’origine thermique à flamme et d’origine nucléaires sont inversés.

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Schéma n° 31 - Production française d’électricité

Les énergies que l’on va considérer, sont dites « propres » au sens des émissions de carbone,
par rapport aux énergies fossiles « sales », et grandes émettrices de carbone.
Mais pour apprécier ce caractère de propreté, il faut appréhender l’ensemble du cycle, et
inclure donc la construction et le fonctionnement des installations.
La construction d’équipements lourds, tels que centrales thermiques nucléaires, barrages et
centrales hydrauliques, fermes d’éoliennes, représente une pollution carbone très
importante du fait des matériaux utilisés pour leur construction, le béton et l’acier en
particulier.
Les génératrices d’éolienne, particulièrement celles des éoliennes offshore, comportent des
minerais, classés dans les terres rares, dont l’extraction est un désastre écologique.
Les panneaux photovoltaïques nécessitent un peu de métaux rares, mais aussi des gaz tel que
le NF3, qui est un puissant gaz à effet de serre.

Il n’y a pas de solution parfaite, on le voit bien, et l’on doit être prudents dans l’appréciation
de l’étiquette « énergie verte ».

Nous allons maintenant analyser l’ensemble des autres ressources, pour mieux les connaître
et pouvoir estimer leur capacité d’évolution dans l’objectif de substitution aux énergies
fossiles. Quelles devraient être les pistes pour l’investissement dans la « Production » et dans
la « Recherche & Développement » ?


7.1. L’énergie nucléaire

Définition et catégories
L’énergie nucléaire est l’énergie de liaison des constituants du noyau des atomes. Ce
noyau est un assemblage de protons de charge positive, et de neutrons sans charge très
fortement liés malgré la répulsion électrique entre protons. Le noyau est extrêmement
compact (10-12 mm), 100 000 fois plus petit que l’atome lui-même.

− La fission. Dans les atomes lourds, le noyau contient beaucoup de protons qui se
repoussent. Certains de ces noyaux (par exemple d'uranium ou de thorium) peuvent
devenir instables et se rompre en libérant une partie de leur énergie de liaison.
C’est la fission de l’atome.
− La fusion. Dans les atomes très légers, au contraire, deux noyaux peuvent se fondre
pour former un atome plus lourd mais plus stable en dégageant une énergie
considérable.
C’est la fusion, par exemple de noyaux d’hydrogène en noyaux d'hélium.

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L’atome a été découvert en 1912 (Rutherford, Bohr), le neutron en 1922, la fission
spontanée et le dégagement d’énergie en 1938 (Curie), puis en 5 ans, dans l’urgence de
la Deuxième Guerre mondiale, la bombe atomique (1945).
Les premières applications de l’énergie nucléaire ont été militaires, qu’il s’agisse de
l’exploitation de la fission (Bombe A - Hiroshima et Nagasaki - 1945) ou de la fusion
(Bombe H - bombe à hydrogène - 1952).
Les applications civiles de la fission contrôlée ont démarré dès 1950 aux États-Unis pour
la production d’électricité. Elles se poursuivent et s’amplifient aujourd’hui.
La fusion contrôlée est encore au stade des laboratoires de recherche.
L’énergie nucléaire a aussi donné lieu à d’autres applications majeures pour l’humanité,
en particulier en médecine, en radiothérapie et en imagerie médicale, et dans le spatial
pour la propulsion des satellites.

L’industrie de la fission nucléaire.

Le principe. Ayant découvert et compris la fission vers 1930, l’Homme a entrepris
d’exploiter la fission des atomes lourds pour en extraire de l’énergie nucléaire. Dans la
croûte terrestre, le minerai d’uranium naturel est constitué à 99,3 % d’uranium 238
stable et de 0,70 % d’uranium 235 fissile. Le combustible nucléaire est constitué
d’uranium enrichi en isotope 235.



Figure n° 32 - La fission nucléaire : Projection du neutron et fission de l’atome

Le principe consiste à casser des noyaux lourds, comme ceux de l’uranium 235 ou du
plutonium 239, sous l’effet de l’impact d’un neutron. Cela transforme chaque noyau en
deux autres noyaux environ deux fois plus petits. C'est l'énergie libérée par cette
réaction qui est utilisée dans les réacteurs électronucléaires ; elle apparaît sous forme de
chaleur et, comme pour la combustion thermique, sa conversion en électricité a un
rendement limité (près de 35% pour les réacteurs de 2e génération, 37% dans le cas
de l'EPR).

A chaque désintégration, un noyau d’uranium 235 émet plus de deux neutrons. Au-delà
d’une certaine concentration, un de ces neutrons provoque la désintégration d’un autre
noyau d’uranium 235, et il peut se produire une réaction en chaîne.
S’il est présent, l’uranium 238 peut aussi absorber un neutron pour se transformer en
plutonium 239, lui aussi très instable comme l'uranium 235. En contrôlant cette réaction
en chaîne, on dispose d’une source d’énergie continue puissante et compacte.

L’utilisation de l’énergie nucléaire mobilise un ensemble complexe d’industries et fédère
de multiples sous-traitants maîtrisant des technologies très diverses. Il s’agit d’une part
de construire et de maintenir en bon état des centrales de production d’énergie et

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d’autre part de fournir les éléments combustibles qui permettront les réactions
nucléaires et in fine la production d'électricité au sein de ces centrales.
Ces dernières activités, regroupées sous le vocable « cycle de combustible », vont de
l’extraction de la matière première, l’uranium, jusqu’au traitement des éléments usés et
au stockage des déchets ultimes. S'y ajoutent les opérations de démantèlement des
installations obsolètes ou inutilisées.

Les centrales nucléaires se composent de deux éléments principaux : l'îlot nucléaire
comprenant le réacteur qui génère de la vapeur, et l'îlot conventionnel qui utilise cette
vapeur pour produire de l'électricité au moyen de turbines et de générateurs.
− L’îlot nucléaire - Il englobe le réacteur nucléaire et les installations relatives au
combustible, ainsi que les équipements nécessaires au fonctionnement et à la sécurité
de cet ensemble.
− L’îlot conventionnel (ou « îlot turbine ») - Il comprend la turbine à vapeur,
l’alternateur, le condenseur, les séparateurs-surchauffeurs et les équipements
auxiliaires qui assurent la transformation de la vapeur produite par le réacteur
nucléaire en électricité.

Démantèlement - Après l'arrêt définitif de l'exploitation, une centrale nucléaire et ses
réacteurs sont en principe entièrement démantelés. Très peu d’installations ont été
démantelées pour le moment. Le coût évalué par le Nuclear Regulatory Commission
(NRC) est de 300 millions de dollars par centrale nucléaire. En France, le ministère de
l’industrie a estimé, en 1991, à 15% du coût d’investissement net, le coût du
démantèlement. En l’absence de véritable expérience industrielle sur des réacteurs de
grande puissance, ce ratio constitue aujourd’hui une base pour la provision destinée aux
démantèlements des équipements nucléaires.

Déchets - Deux solutions coexistent en ce qui concerne la destination à donner aux
éléments combustibles nucléaires irradiés ou usés :
− considérer ces combustibles comme des déchets et les stocker tels quels (ex : États-
Unis). C’est un « cycle ouvert ». La très grande majorité du stock de combustibles
usés est entreposée dans des piscines auprès des réacteurs ou sur les sites d’usines
de retraitement.
− retraiter les combustibles usés afin de récupérer les matières énergétiquement
valorisables (essentiellement l’uranium 235 résiduel et le plutonium 239). Elles sont
séparées des véritables déchets qui, eux, seront conditionnées sous une forme inerte
et sûre par vitrification et stockés dans des sites spécialisés. C’est un « cycle fermé ».
De leur côté, les matières fissiles récupérées serviront à fabriquer du combustible
MOX.
Actuellement, les deux principales usines de retraitement au monde sont l’usine BNFL de
Sellafield au Royaume-Uni et l’usine Areva de La Hague en France.

Aujourd’hui, 250 centrales nucléaires existent dans le monde, comportant 449 réacteurs
opérationnels, dont 58 réacteurs en France. L’ensemble constitue une puissance totale
de 400 Gigawatts produisant environ 10 % de l'électricité mondiale (10,40 % en 2016).
En 2016, l’industrie du nucléaire a permis de produire un total de 2.606 TWh, dont 805
TWh aux Etats-Unis, 380 TWh en France, 247 TWh en Chine et 187 TWh en Russie.

Avec une capacité installée de 63,13 GW, le parc nucléaire français est le deuxième plus
important parc au monde en puissance, derrière celui des Etats-Unis. En 2018, il a

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produit 393,2 TWh d’électricité, soit 71,7% de la production électrique totale en France
métropolitaine.
Le parc nucléaire français compte 58 réacteurs nucléaires en fonctionnement répartis
sur 19 sites (centrales), 12 réacteurs arrêtés en cours de démantèlement. Une des
particularités du parc est sa standardisation : tous les réacteurs nucléaires actuellement
en fonctionnement sont des réacteurs à eau pressurisée (REP) de deuxième génération.

Les nouveaux réacteurs de 3ème génération (EPR par exemple), et surtout les réacteurs
de 4ème génération, ouvrent une possible phase de transition technologique
conditionnant l’avenir du nucléaire.

En effet, les prochaines décennies seront marquées par des besoins croissants en
énergie, l'épuisement progressif des ressources fossiles et la logique de réduction des
émissions de gaz à effet de serre.
Toutes les sources d’énergie devront être mises à contribution pour répondre à la
situation et le nucléaire, aux côtés des énergies renouvelables, est susceptible de jouer
un rôle fondamental dans le « bouquet énergétique » de demain. Compétitif, il ne produit
pratiquement pas de gaz à effet de serre et permet d’assurer une production d’électricité
massive et régulière.

Ce recours au nucléaire devrait engendrer une consommation accrue du minerai
d’uranium et implique de préserver cette ressource. Inscrire le nucléaire dans une
perspective de développement durable suppose ainsi de développer une nouvelle
génération de réacteurs : « la quatrième génération », capable d’utiliser directement
l’uranium naturel ou appauvri et de produire 50 à 100 fois plus d’électricité avec la
même quantité de minerai que les réacteurs nucléaires actuels.

Réacteurs de 3ème génération.
Afin d’assurer un éventuel renouvellement de son parc, EDF a misé sur une 3e génération
de réacteurs, les EPR. Ces derniers présentent les avantages suivants :
− un meilleur rendement de production électrique (rendement de 37%, à comparer
avec le rendement de 33% des REP actuels),
− une utilisation plus efficace du combustible (diminution de 17% de la consommation
d’uranium enrichi par rapport aux réacteurs REP de 1 300 MW),
− une durée de vie prévue de 60 ans ;
− un niveau de sûreté accru. Ils intègrent généralement des systèmes de récupération
du corium en cas de fonte du cœur ainsi que des redondances accrues pour les
systèmes de sécurité interne et externe et de contrôle commande.

Le premier EPR en France est en cours de construction au sein de la centrale nucléaire
de Flamanville mais sa mise en service a déjà été retardée à plusieurs reprises.

Réacteurs de 4ème génération.
Des recherches internationales sont en cours visant à développer à plus long terme des
réacteurs nucléaires de 4ème génération à neutrons rapides, consommant tout l’uranium
et produisant moins de déchets, qui constitueraient une rupture en matière de
rendement, de longévité et de sûreté.
Mais ces réacteurs nécessitent l’emploi de matériaux résistants aux hautes températures
et aux flux intenses, et cette génération reste actuellement un sujet d’études.

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Le thorium – C’est un métal très lourd de couleur argentée. Il est abondant dans la croûte
terrestre où il est présent sous la forme d’un seul isotope, le thorium 232.
Le thorium 232 est très faiblement radioactif mais il est fertile, c'est-à-dire qu’il peut se
transformer par absorption d’un neutron en uranium 233, élément fissile. La fission de
l’U233 est semblable à celle de l’U235 ou du Pu239, dégageant une énergie considérable
et produisant un minimum de déchets grâce à un très fort rendement global. Le couple
Th232-U233 permet, comme U238-Pu239, la surgénération avec des neutrons rapides
mais a également cette possibilité dans une moindre mesure avec des neutrons lents.
Une voie prometteuse semble être celle d’une utilisation du mélange thorium-uranium
sous la forme de sel fluorés fondus, servant à la fois de combustible et de caloporteur
dans un réacteur à sel fondus (RSF). Ce type de réacteurs a été retenu pour les
développements de systèmes de 4ème génération.


La recherche en fusion nucléaire

Depuis une cinquantaine d’années, de nombreux laboratoires étudient la fusion
contrôlée de deux noyaux légers comme ceux du deutérium et du tritium qui sont deux
isotopes lourds de l’hydrogène.


Figure n° 33 - Fusion de deux noyaux légers

La « fusion nucléaire » aussi appelée « fusion thermonucléaire » est la réunion de deux
noyaux atomiques légers pour former un noyau unique plus lourd et plus stable. Au
cours de cette réaction de fusion, la masse du noyau produit est inférieure à la somme
des masses des noyaux légers d'origine. Or, en vertu de la célèbre relation établie par
Albert Einstein « E=mc2 », la différence de masse est convertie en énergie.

De très grandes quantités d’énergie sont libérées par le processus de fusion nucléaire.
Pouvoir reproduire ce phénomène sur Terre permettrait en théorie de satisfaire
définitivement les besoins énergétiques de l’humanité. C’est précisément l’enjeu majeur
de la recherche sur la fusion nucléaire « contrôlée ». Les combustibles nécessaires à la
fusion sont deux isotopes de l’hydrogène : le deutérium, disponible en quantités
pratiquement illimitées dans l’eau des mers, et le tritium que l’on produit à partir du
lithium relativement abondant dans l’écorce terrestre.

Des efforts de recherche sont menés depuis plus de 50 ans pour recréer les conditions
de la fusion nucléaire au sein d’un réacteur. Toutefois, la maîtrise d’un processus
contrôlé de fusion n’est pas encore démontrée et les technologies et matériaux adaptés à
ces températures et pressions extrêmes ne sont pas encore disponibles pour une
utilisation industrielle. Recréer un processus de fusion nucléaire s’avère beaucoup plus
complexe que d’explorer la réaction de fission en chaîne.

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Figure n° 34 - Condition de température de la fusion nucléaire

Ce domaine est encore au stade de la recherche. Deux voies sont explorées : la fusion
rapide par confinement inertiel au moyen d’un laser et la fusion lente par confinement
magnétique. La production industrielle d’électricité par fusion n’est pas envisageable
avant plusieurs décennies.

Les avantages de ce procédé
Si le principe novateur des centrales à fusion nucléaire est validé scientifiquement et
technologiquement il permettra de développer une nouvelle source abondante d’énergie
complémentaire de la fission nucléaire.

− Les avantages écologiques.
La fusion génère peu de déchets radioactifs, en plus de courte durée de vie, et pas
de gaz à effet de serre. De plus, elle écarte tout risque d’emballement de la réaction
nucléaire et donc toute menace d’explosion. Contrairement au procédé de fission
nucléaire, la moindre perturbation au sein d’un réacteur à fusion par confinement
magnétique entrainerait un refroidissement puis un arrêt spontané des réactions de
fusion.
− Les avantages économiques
La fusion nucléaire fait appel à des combustibles (deutérium, lithium) présents en
grandes quantités sur notre planète, de quoi alimenter les éventuels réacteurs à
fusion pour de nombreux millénaires. Les risques de pénurie énergétique seraient
donc écartés. Quelques grammes de combustible suffiraient pour déclencher et
entretenir les réactions de fusion. Une centrale à fusion de 1 000 MWh aurait ainsi
besoin de 125 kg de deutérium et de 3 tonnes de lithium (contre 2,7 millions de
tonnes de charbon pour une centrale thermique de même puissance) pour
fonctionner toute une année.

Les limites
− Les limites technologiques
L’état actuel des connaissances scientifiques ne permet pas aujourd'hui d’extraire
suffisamment d'énergie des réactions de fusion pour produire de l'électricité. De
plus, on ne sait pas encore fabriquer de matériaux pouvant résister assez longtemps
au rayonnement et au flux de neutrons libérés au cours de ces réactions. Les
scientifiques estiment que les technologies nécessaires à la mise en œuvre de la
fusion nucléaire contrôlée à des fins de production énergétique ne seront pas
disponibles avant de nombreuses décennies.
− Les limites financières
Le coût financier des installations de recherche se chiffre en milliards d’euros sur
plusieurs décennies. Ce coût est donc très important pour des bénéfices potentiels
éloignés dans le temps. L’investissement dans le programme ITER a par exemple été
évalué initialement à 5 milliards d’euros. Selon les dernières estimations du
programme en 2012, le coût prévisionnel de construction de la machine avoisinerait
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maintenant 13 milliards d’euros. Par ailleurs, les coûts de production de l’énergie de
fusion restent une inconnue tant que le procédé n’aura pas atteint une maturité
scientifique et technologique.

Mon avis est que les limites technologiques sont contraignantes, contrairement aux
limites financières ; le budget de l’armement mondial en 2018 s’établit à 1.800 Md $


Les enjeux de l’industrie nucléaire.

Les enjeux géopolitiques et environnementaux placent l’énergie nucléaire au cœur des
débats. Ses caractéristiques sont les suivantes :

• une exceptionnelle densité (1 gramme d’uranium 235 produit la même quantité


d’électricité que 2 tonnes de fioul ou que 3 tonnes de charbon).
• un fonctionnement sans émission de dioxyde de carbone.
• Des réserves de combustibles relativement bien réparties géographiquement, d’un
siècle au minimum aujourd’hui, devenant millénaires dans le cas de réacteurs
surgénérateurs capables de recycler les déchets accumulés par les centrales actuelles,
en consommant beaucoup moins de matériaux fissiles ;
• l’énergie nucléaire de fission nécessite au départ des investissements lourds, obstacle
important même si, in fine, elle s’est historiquement avérée très rentable ;
• la maîtrise de sa sûreté est très exigeante et fait l'objet d'un renforcement des
normes, comme cela a été le cas suite à l’accident de Fukushima.
• Les risques de prolifération (nouveaux pays s’équipant d’armes nucléaires) sont
difficiles à éliminer totalement ;
• Ses déchets pourtant en faible volume, sont considérés comme dangereux, objet de
débats où s’affrontent des logiques différentes.

L’avenir de l’énergie nucléaire



De nouvelles opportunités pourraient stimuler le développement de l’énergie nucléaire
civile dans les décennies à venir :
− l’intensification des recherches technologiques en vue de maîtriser les réacteurs de
quatrième génération pourrait résoudre les problèmes de sécurité
d’approvisionnement et de déchets.
− l’émergence des « smart grids » (réseaux de distribution électriques intelligents),
conjuguée à celle de petits réacteurs modulaires (150 MW), consommateurs
d’uranium appauvri, pourrait constituer une source d'approvisionnement électrique
local.
− les progrès attendus en fusion nucléaire, énergie puissante et disposant également de
ressources naturelles considérables, pourraient ouvrir une seconde voie de
production d’énergie nucléaire

En conclusion

L’énergie nucléaire représente environ 6% de l’énergie totale consommée au niveau
mondial, mais 70% au niveau national. En tout cas, pour nous elle est aujourd’hui
essentielle.
Cette énergie fait l’objet, en France et dans quelques pays, de débats passionnés qu’il
conviendrait peut-être de relativiser par une approche objective.

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Cette approche doit comporter l’analyse des faits objectifs suivants : C’est une industrie :
− Sûre. Un seul accident mortel (Tchernobyl) depuis le début de l’exploitation de cette
source d’énergie, et il faut analyser le contexte de l’accident…
C’est sans commune mesure avec la mortalité des autres sources importantes.
− Propre, qui ne rejette pas de GES dans l’atmosphère. Il existe certes, un problème de
traitement des déchets, mais qu’il conviendrait également de relativiser (risques par
rapport aux déchets de l’industrie chimique par exemple).
− Essentielle en France. Du fait du poids énorme de cette industrie, plus de 70% de
l’électricité, et du fait que l’on n’a pas d’alternative sérieuse à court terme.
− Transitoire : Les gisements d’Uranium ne sont pas éternels et seront épuisés avant la
fin du siècle (dans l’hypothèse des générateurs actuels de seconde génération).
Les troisième et quatrième générations permettraient de prolonger la production.

En conséquence, il ne sera pas possible de se passer brutalement de l’énergie nucléaire,
sauf à accepter de revenir « à la bougie », c’est à dire remonter un siècle en arrière, ce
que même les détracteurs les plus virulents refuseront.
Il faut surtout espérer que la recherche sur la fusion nucléaire aboutisse avant
l’épuisement des ressources naturelles d’uranium, de plutonium ou de thorium…


7.2. L’énergie hydroélectrique

L’hydroélectricité ou énergie hydroélectrique exploite l’énergie potentielle des flux d’eau
(fleuves, rivières, chutes d’eau, courants marins, etc.). L’énergie cinétique du courant
d’eau est transformée en énergie mécanique par une turbine, puis en énergie
électrique par un alternateur.
L’hydroélectricité constitue la première source renouvelable et la troisième source
générale de production électrique au monde (16,3 % en 2011) derrière le charbon
(40,6%) et le gaz (22,2%). En France, la production hydroélectrique était de 63,1 TWh
en 2018, soit 13,4 % de la production totale d’électricité du pays.

Les centrales gravitaires

Les centrales gravitaires mettent à profit l’écoulement de l’eau et un dénivelé. Elles
peuvent être classées en fonction du débit turbiné et de leur hauteur de chute. Il existe
trois types de centrales gravitaires :
− Les centrales au fil de l’eau, qui utilisent le débit d’un fleuve ou d’une rivière, et qui
produisent une énergie immédiatement réinjectée sur le réseau.
− Les centrales d’éclusée dans les grands fleuves à forte pente. Des barrages sur le
fleuve ou un canal parallèle provoquent des suites de chutes d’eau.
− Les centrales-lacs sont associées à une retenue d’eau créée par un barrage. Elles
permettent une modulation de la production électrique.

Quelques chiffres

• Dans le monde - Chaque année, plus de 4.000 TWh d’électricité sont produits à partir
de l’énergie hydraulique, ce qui représente 16 à 17 % de la production mondiale.
Une dizaine de pays, dont quatre en Europe, produisent plus de la moitié de leur
électricité grâce à l’hydraulique. La Norvège vient en tête avec 98%, suivie par le
Brésil avec 86%, la Colombie, l’Islande, le Venezuela, le Canada, l’Autriche, la
Nouvelle Zélande et la Suisse.
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L’hydroélectricité fait l’objet d’investissements importants, en particulier en Asie et
en Amérique latine, car il existe encore d’importantes ressources naturelles non
exploitées. La production hydroélectrique mondiale a augmenté de 1 000 TWh en
1965 à plus de 4.000 TWh aujourd’hui. En Chine elle augmente de 10% par an, la
Chine étant devenue le premier producteur mondial devant le Brésil en 2004 avec
plus de 500 TWh (722 TWh en 2010 selon l'AIE).

• En France – En 2018, la puissance installée est de 25,5 GW, ce qui représente 20%
des capacités électriques françaises. La production hydroélectrique atteint 63 TWh,
soit 13,4 % de la production totale d’électricité.
EDF possède 640 barrages et 447 centrales de production. Son parc hydraulique
français comporte 1 500 km de galeries d’adduction d’eau, 580 km de canaux de
dérivation, 270 km de conduites forcées et 6 300 vannes.
Environ 2.270 centrales au fil de l’eau, d’une puissance inférieure à 10 MW,
produisent environ 6 TWH par an, soit environ 10% de la production
hydroélectrique française.
Il ne sera quasiment pas possible de créer de nouvelles retenues conséquentes.
Cependant, dans le cadre du Grenelle de l’Environnement, il était envisagé
d’accroître la production de 5 TWh d’ici à 2020 et d’augmenter les moyens de pointe
de 3 000 MW. La petite hydroélectricité pourrait connaître un développement
soutenu.

7.3. L’énergie éolienne

L’énergie éolienne est l’énergie cinétique des masses d’air en mouvement autour du
globe. La racine étymologique du terme « éolien » provient du nom du personnage
mythologique Éole, connu en Grèce antique comme le maître des Vents.

L’énergie éolienne est une forme indirecte de l’énergie solaire : les rayons solaires
absorbés dans l’atmosphère entraînent des différences de température et de pression.
De ce fait les masses d’air se mettent en mouvement et accumulent de l’énergie
cinétique. Celle-ci peut être transformée et utilisée à plusieurs fins :
− la transformation en énergie mécanique : le vent est utilisé pour faire avancer un
véhicule (voilier ou char à voile), pour pomper de l’eau (éoliennes de pompage pour
irriguer ou abreuver le bétail) ou pour faire tourner la meule d’un moulin ;
− la production d'énergie électrique : l’éolienne est couplée à un générateur
électrique pour fabriquer du courant continu ou alternatif. Le générateur est relié à
un réseau électrique ou bien fonctionne au sein d'un système « autonome » avec un
générateur d’appoint (par exemple un groupe électrogène), un parc de batteries ou
un autre dispositif de stockage d’énergie. Une éolienne est parfois qualifiée
d’aérogénérateur dès lors qu'elle produit de l'électricité.

L’énergie éolienne est une énergie renouvelable qui ne produit pas directement de gaz à
effet de serre en phase d’exploitation.
Les éoliennes se présentent sous deux modes d’exploitation :
− Les éoliennes terrestres dites « onshore » sont installées sur la terre.
− Les éoliennes dites « offshore » sont installées en mer.
On distingue par ailleurs deux typologies d’installations :
− industrielles : les grands parcs éoliens (ou « fermes éoliennes ») raccordés au réseau
électrique ;
− domestiques : des petites éoliennes installées chez les particuliers.
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L’énergie électrique ou mécanique produite par une éolienne dépend de trois
paramètres : la forme et la longueur des pales, la vitesse du vent et enfin la température
qui influe sur la densité de l’air.
La puissance maximum récupérable (P) est donnée par la loi de Betz : P = 0,37. S. V3
où 0,37 est la constance de l’air à pression atmosphérique standard (1 013 hPa), S la
surface balayée et V la vitesse du vent.
En conséquence, une éolienne produit quatre fois plus d’énergie si la pale est deux fois
plus grande et huit fois plus d’énergie si la vitesse du vent double. La densité de l’air
entre également en jeu : une éolienne produit 3% de plus d’électricité si, pour une même
vitesse de vent, l’air est plus froid de 10°C.

L’énergie éolienne est donc une énergie intermittente et aléatoire.
D’après le GWEC (Global Wind Energy Council), la capacité installée du parc éolien
mondial a plus que doublé entre fin 2010 et fin 2015. A cette date, elle atteint près de
432,4 GW. Malgré cette croissance, sa part dans la production d'électricité mondiale
totale reste limitée à environ 3 %.

L’éolien onshore.
Les éoliennes terrestres ont une puissance unitaire de 1,8 à 3 MW.
Une éolienne de 2 MW installée en France produit en moyenne 4 millions de kWh par an,
d'après le facteur de charge du parc éolien français (23%), ce qui correspond à un
fonctionnement à plein régime d'un peu plus de 2 000 heures par an, soit de 6 heures
par jour. Cette éolienne produit donc, en moyenne, une énergie électrique satisfaisant les
besoins d’environ 500 foyers.

En France, la puissance installée était de 15.000 MW fin 2018, et l’objectif fixé par la loi
de transition énergétique pour la croissance verte de 2015 serait d’atteindre 26.000 MW
installés fin 2023.

L’éolien offshore - Les nouvelles technologies de l’éolien offshore sont aujourd’hui les
plus prometteuses.
Construire ces aérogénérateurs au large, où les vents sont plus forts et plus constants,
répond à la fois aux impératifs sociétaux et aux impératifs énergétiques. Notons
également que des recherches portent désormais sur l’éolien flottant.

Avec ses 3.500 km de côtes, la France dispose d’un potentiel d’installation important, de
l’ordre de 80.000 MW, le second européen après le Royaume Uni.
Les objectifs fixés par la loi de transition énergétique pour la croissance verte de 2015,
sont d’atteindre 2.400 MW installés en 2023 et 4.700 MW installés en 2028.


Photo n° 35 - Parc éolien offshore Schéma n° 36 - Types de fondations

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Carte n° 37 - Projets offshore français Carte n° 38 - Puissance de l’éolien offshore en Europe


Perspectives.

Faut-il croire à l’énergie éolienne ?
Les parcs d’éoliennes sont de grands consommateurs de matière.
A capacité de production électrique équivalente, les infrastructures éoliennes
nécessitent 15 fois plus de béton, 90 fois plus d’acier, de cuivre et de verre que les
installations utilisant des combustibles traditionnels. Si l’on se fonde sur les objectifs de
croissance communément admises, les besoins en matériaux sont considérables ; d’ici
2050, il faudrait 3.200 Mt d’acier, 310 Mt d’aluminium et 40 mt de cuivre. On verra dans
le dossier n°4, les conséquences quant à la disponibilité des matériaux.


Figure n° 39 - Empreinte acier des sources d’énergies (ramenée au KWh produit)

De plus, la durée de vie d’une éolienne est de 30 ans, à l’issue desquels, tout est
démonté ; seul le mât métallique est facile à recycler, ce qui n’est pas le cas des pales en
matériaux composites à base de fibre de verre ou de carbone.
Je pense qu’il faudra faire un bilan de tout cela dans quelques années, mais à mon avis,
l’énergie éolienne restera marginale, et une formule d’appoint, pour ce qui concerne la
production d’électricité.
Elle pourra cependant être utile localement.

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7.4. L’énergie issue de la biomasse

La biomasse désigne l’ensemble des matières organiques pouvant se transformer en
énergie. On entend par matière organique aussi bien les matières d’origine végétale
(résidus alimentaires, bois, feuilles) que celles d’origine animale (cadavres d’animaux,
êtres vivants du sol).

Les centrales biomasse
Pour transformer la biomasse en énergie, deux processus peuvent être employés :
• la combustion directe : les matières organiques sont brûlées directement dans une
chaudière de façon à produire de la vapeur. Cette vapeur fait tourner une turbine
rattachée à un alternateur, et produit ainsi de l’électricité ! Il est possible de
récupérer la vapeur restante pour produire de la chaleur. On parle alors de
production d’énergie par « cogénération ».
• la méthanisation : les matières ne sont pas directement brûlées. Elles sont d’abord
fermentées grâce à des micro-organismes (bactéries), puis transformées en
« biogaz ». Ce biogaz, très proche du gaz naturel et composé essentiellement de
méthane, est ensuite brûlé dans une chaudière à turbine pour produire de
l’électricité et, éventuellement, de la chaleur.

L’intérêt de la biomasse est multiple : il s’agit d’une énergie renouvelable, propre et
fiable. En effet, contrairement à l’énergie solaire ou à l’énergie par éolienne, l’électricité
produite par la biomasse ne dépend pas des conditions climatiques ! En outre, la
biomasse permet de faciliter la gestion des déchets urbains et industriels.
La puissance installée en France est d’environ 2.000 MW pour une production de 7 TWh
renouvelables, soit 1,30 % de la production électrique totale.
Au niveau mondial, cette énergie représente 2,00 % de la production totale.

Les agro-carburants, ou biocarburants
Alors que la langue anglaise n’a retenu que le terme de biofuel, il y a débat en France sur
la terminologie, mais ces deux termes signifient la même chose, c’est un carburant issu
de matériaux organiques non fossiles provenant de la biomasse. Je retiendrai le terme
agro-carburant pour les carburants issus de l’agriculture, retenu par les parlementaires
français pour transposer les directives européennes, et préféré par les écologistes pour
enlever la connotation biologique. Ces carburants sont issus de l’agriculture, et non de
l’agriculture biologique.
On notera cependant que le Journal Officiel retient le terme biocarburant, car il définit
deux générations de carburants.

− Première génération
« est constitué d'alcools, d'huiles, d'esters d'huiles ou d'hydrocarbures qui sont obtenus
après transformation de produits agricoles destinés habituellement à l'alimentation
humaine ou animale (les produits agricoles utilisés proviennent notamment de plantes
sucrières, amylacées ou oléagineuses). Équivalent anglais : first-generation biofuel. »

− Deuxième génération
« est constitué de composés oxygénés ou d'hydrocarbures qui sont obtenus à partir de
bois, de cultures spécifiques non destinées à l'alimentation humaine ou animale, de
résidus agricoles et forestiers ou de déchets ménagers. Équivalents anglais : advanced
biofuel, second-generation biofuel. »

50
Une troisième génération de biocarburants créés à partir d’hydrogène produit par des
micro-organismes ou à partir d’huile produite par des microalgues est en phase d’étude.
Les biocarburants de 2e et 3e génération ont entre autres pour vertu de ne pas
« occuper » un territoire agricole en compétition avec la production d’aliments pour
l’homme. Leur maturité industrielle, tout particulièrement pour la 3e génération, reste à
établir.

En France on produit deux sortes d’agro-carburants, du « bioéthanol » et du « diester »,
que l’on mélange généralement à l’essence et au gazole.

− Le bioéthanol, qui est un éthanol donc un alcool, peut être de première ou de
deuxième génération, selon la définition ci-dessus ; le bioéthanol de première
génération est issu de plantes riches en sucre ou en amidon, principalement du colza
et de la betterave à sucre (à l’étranger, on le produit surtout à partir du mais et de la
canne à sucre), quand le bioéthanol de deuxième génération est issu de déchets
organiques, allant de la paille aux déchets d’équarrissage.
Dans certaines stations services, on peut trouver du super-éthanol E85, qui contient
85% de bioéthanol. Peu performant, mais plus écologique, et de coût plus élevé, il est
subventionné par l’Etat pour être vendu aux environs de 70 cts le litre. Mais son
emploi nécessite un moteur spécialement adapté. Il n’est proposé que dans 15% des
stations service sur le territoire (environ 1.600 sur 11.000).
En 2019, il s’en est vendu 34 millions de litres.
On trouve par contre partout le supercarburant SP95-E10, contenant 10% de
bioéthanol, qui va progressivement se substituer à l’essence.

− Le diester est le nom donné au « biogazole » produit en France.
Il est produit à partir de plantes riches en huile, principalement de fleurs de colza et
de tournesol.
Il est mélangé dans le gazole. Actuellement le taux de diester dans le gazole est de
7% :

On notera que les huiles végétales, après un traitement chimiques approprié, peuvent
être utilisées directement comme carburant dans un moteur diesel. Dans certaines
régions, les bus des transports en commun roulent à l’huile végétale de colza.

Rendement des agro-carburants

Les études effectuées montrent qu’un hectare consacré aux agro-carburants permet de
récupérer environ 0,75 tep.
Substituer le volume de carburants utilisé en France dans le seul domaine des transports
nécessiterait de cultiver les agro-carburants sur environ 4 fois la surface totale de
cultures en France.
Par contre, il serait possible, avec une utilisation d’environ 15 à 20 % de la surface de
culture, de produire le volume nécessaire au fonctionnement de l’agriculture. C’est sans
doute une limite haute, mais ce schéma permettrait de contenir le sujet des agro-
carburants dans le domaine agricole, qui doit être prioritaire, et non dans un objectif
énergétique, qu’il faudra régler autrement.



51
Problème des agro-carburants

Il y a deux sortes de problèmes avec les agro-carburants.
− Un problème environnemental si les agro-carburants sont produits sur des terres qui
ne sont pas prises aux terres cultivables actuelles ; il faudrait alors pratiquer une
déforestation complémentaire pour libérer des emprises.
D’une part la déforestation produit des émissions de GES, et d’autre part la réduction
des surfaces boisées réduit la capacité d’absorption du CO2 de l’atmosphère. Les deux
préjudices s’ajoutent.
Au total, selon les estimations de Greenpeace, la production et la consommation
d’agro-carburants conduiraient à une augmentation des 80% des émissions de GES
par rapport à l’emploi du diesel.
− Un problème de compétition des terres entre les cultures destinées à l’alimentation
des hommes, et celles destinées à l’alimentation des machines.
Compte tenu de l’augmentation exponentielle de la population humaine, cette
compétition risque de se dérouler de manière dramatique.
Exemple : actuellement aux Etats-Unis, 40% de la production de mais est destinée aux
agro-carburants, 40% à l’alimentation animale, et 20% à l’alimentation humaine.
Les énergies fossiles présentent de nombreux inconvénients, mais ont quelques
avantages ; en particulier, elles sont extraites du sous-sol, et offrent donc à l’homme
toute la disponibilité de la surface de culture.

L’avenir sera sans doute un mix de ces deux cas.
La Chine avait comme objectif la production d’agro-carburants à hauteur de 15% en
2020.
L’Union européenne avait, pour cette même date, un objectif fixé à 10%


7.5. L’énergie solaire

L'énergie solaire est l'énergie diffusée par le rayonnement du Soleil.
Des ondes radio aux rayons gamma en passant par la lumière visible, tous ces
rayonnements sont constitués de photons, les composants fondamentaux de la lumière
et les vecteurs de l’énergie solaire.
L’énergie solaire est issue des réactions de fusion nucléaire qui animent le Soleil.
Sur Terre, l'énergie solaire est à l'origine du cycle de l'eau, du vent et de la
photosynthèse du règne végétal. Le règne animal, y compris l’humanité, dépendent des
végétaux sur lesquels sont fondées toutes les chaînes alimentaires.

L'énergie solaire est ainsi à l'origine de toutes les formes de production énergétique
aujourd’hui utilisées sur Terre, à l'exception de l'énergie nucléaire, de la géothermie et
de l’énergie marémotrice. L’homme utilise l'énergie solaire pour la transformer en
d'autres formes d'énergie : énergie chimique (les aliments que notre corps utilise),
énergie cinétique, énergie thermique, énergie électrique ou biomasse.

L'énergie solaire reçue en un point du globe dépend de :
− l'énergie solaire envoyée par le Soleil, qui fluctue avec son activité de fusion ;
− la nébulosité (nuages, brouillards, etc.), qui est par exemple importante à l'équateur
et plus faible en milieu intertropical ;
− la latitude, la saison et l'heure, qui influent sur la hauteur du soleil dans le ciel et donc
l'énergie reçue par unité de surface au sol.
52
Par extension, l'expression « énergie solaire » est souvent employée pour désigner
l'électricité ou l'énergie thermique obtenue à partir de la source énergétique primaire
qu’est le rayonnement solaire.
Actuellement, il existe deux voies principales d’exploitation de l’énergie solaire :
− le solaire photovoltaïque qui transforme directement le rayonnement solaire en
électricité ;
− le solaire thermique qui transforme directement le rayonnement en chaleur.
Le solaire dit « thermodynamique » est une variante du solaire thermique. Cette
technique se différencie en cela qu’elle utilise l’énergie thermique du soleil afin de la
transformer dans un second temps en électricité.
De nombreux programmes de recherche sont en cours afin d’améliorer les rendements
des nouvelles technologies d’exploitation de l’énergie solaire.

Répondre aux enjeux économiques et environnementaux
L’énergie solaire est souvent considérée comme l’énergie de l’avenir : elle est
renouvelable et potentiellement inépuisable à l'échelle humaine. L’enjeu est de taille
dans le contexte de dérèglement climatique et de fortes variations des cours des
ressources fossiles (charbon, gaz naturel, pétrole). Ce fort potentiel couplé à la nécessité
de réduire les gaz à effet de serre font de l’énergie solaire un axe de développement
privilégié aujourd’hui.

Accroître la rentabilité et le rendement
L’investissement initial dans une centrale solaire est toujours important mais, une fois
l’installation amortie, ses frais de fonctionnement sont faibles. De nombreux pays ont
mis en place des systèmes d'incitation financière (sous forme de détaxation, de
subventions, ou de tarifs avantageux pour le rachat de l'énergie produite) afin
d’encourager l’innovation et les premières installations.
L'utilisation de ces systèmes de production d'énergie solaire se justifie immédiatement
dans les situations où il est très coûteux de transporter des combustibles (fossiles), de
procéder à un raccordement au réseau électrique, comme pour des appareils isolés
(balises marines, horodateurs) ou dans des zones isolées ou peu peuplées.

Perspectives.

Dans le monde, des projets de centrales électriques voient le jour presque partout. Selon
Patrick Jourde et Jean-Claude Muller, chercheurs au Commissariat de l'énergie atomique
(CEA) et au CNRS, 5% de la surface des déserts permettraient de produire toute
l'électricité dont a besoin la planète.
L'électricité d'origine solaire (solaire photovoltaïque et thermodynamique
confondus) pourrait représenter jusqu'à 20% à 25% de la production mondiale
d'électricité d'ici 2050, estimait l'AIE en mai 2010 lors de la Conférence plan solaire
méditerranéen organisée par la présidence espagnole de l'UE.

La limite principale de cette technologie, comme pour l’éolien, résidera dans
l’approvisionnement de certains matériaux constitutifs des installations de production
d’énergie solaire ; et pas seulement pour les terres rares des panneaux photovoltaïques,
problème qui semble devoir être prochainement réglé du fait des progrès
technologiques accomplis. Aujourd’hui, on peut réaliser des panneaux sans terres rares.
Voir dossier n°4 sur les matériaux. Et voir figure n° 39, page 49.

Pour résumer, on peut lister les avantages et les limites de cette source d’énergie :

53
Avantages
− L’énergie solaire est, à l’échelle humaine, inépuisable et disponible gratuitement en
très grandes quantités. De plus, lors de la phase d’exploitation, la production
d’électricité au moyen de panneaux photovoltaïques n’est pas polluante.
− Le silicium, matériau utilisé dans les panneaux solaires actuels les plus répandus, est
très abondant et n’est pas toxique.
− Les panneaux solaires ont une durée de vie de 20 à plus de 30 ans et sont presque
intégralement recyclables.
− La modularité des panneaux est très importante, c'est-à-dire qu’il est possible de
concevoir des installations de tailles diverses dans des environnements très variés.
Ceux-ci sont par conséquent adaptés à la production décentralisée d'électricité en
sites isolés.
− Les panneaux photovoltaïques peuvent être utilisés à des fins domestiques de petite
échelle, comme à des fins de production énergétique industrielle à grande échelle.

Limites
− La technologie photovoltaïque est encore coûteuse même si son coût de production a
fortement baissé au cours des dernières années
− Les panneaux photovoltaïques les plus répandus, faits de silicium cristallin, sont
lourds, fragiles et difficiles à installer.
− La technologie est grande consommatrice de matériaux
− Une centrale requiert de vastes espaces bien que la densité tende à être améliorée
− L’impact environnemental et énergétique de la fabrication des panneaux de silicium
n'est pas nul. Une cellule photovoltaïque doit fonctionner entre un an et demi et cinq
ans pour compenser l'énergie utilisée pour la fabriquer.
− L’énergie électrique n’est pas « directement » stockable, c'est-à-dire sous sa forme
primaire. Il est en revanche possible de la stocker « indirectement » dans des
batteries sous forme chimique ou dans des accumulateurs cinétiques sous forme
mécanique. Les technologies existantes sont encore coûteuses.


7.6. L’énergie géothermique

La géothermie, du grec Géo (la terre) et Thermos (la chaleur) désigne à la fois la chaleur
terrestre et son exploitation par l’homme.
La chaleur terrestre provient, pour l’essentiel (80-90%) de la désintégration
radioactive dans les roches constituant la terre des atomes fissiles (uranium, thorium,
potassium) qu’elles contiennent. Le reste (10%) est le reliquat de la chaleur de
formation initiale, il y a 4,5 milliards d’années.

La géothermie est la seule énergie qui soit à la fois quasi-inépuisable, omniprésente,
stable et propre. Sa faible accessibilité en restreint cependant drastiquement l’emploi.
La géothermie exploite le différentiel thermique de l’écorce terrestre pour en extraire de
la chaleur utilisable par l’homme.

On distingue trois types :
− la géothermie profonde à haute énergie : 150 à 250°C vers 2 500 m de profondeur
dans des zones au gradient géothermal anormalement élevé, pour la production
d’électricité (vapeur + turbine) ; Mais on ne sait pas aujourd’hui forer au-delà de
quelques kilomètres. La chaleur terrestre profonde reste encore largement hors de
portée.
54
− la géothermie moyenne à basse énergie : 30 à 150°C dans les aquifères, pour le
chauffage urbain collectif par réseau de chaleur ; En France, les régions Aquitaine et
Île-de-France ont développé cette filière pour chauffer près de 200.000 logements ;

− la géothermie moyenne à très basse énergie (<30°C). Elle extrait la chaleur terrestre
et solaire présente à faible profondeur dans le sol vers 10 à 100 m, par pompe à
chaleur (PAC). Ce procédé est adapté au chauffage et à la climatisation des logements
individuels.

Seul l’avenir de la géothermie à très basse énergie est aujourd’hui assuré. Les progrès en
fiabilité, performance et coût des pompes à chaleur devraient en faire rapidement un
moyen de chauffage très répandu.
Au-delà, c’est l’accessibilité à la chaleur intense et profonde qui va dimensionner le
développement de la géothermie. Les solutions, si elles existent, devraient venir de ceux
qui maitrisent le mieux les technologies des forages et les disciplines associées, sismique,
géologie,… La stratégie d’investissement de la puissante industrie pétrolière sera
décisive pour l’avenir de la géothermie.


7.7. Les énergies marines

La planète est recouverte à plus de 70% par les océans et les mers. Ceux-ci recèlent
d’énormes quantités de flux énergétiques qui ont deux origines :
− l’énergie solaire qui est à l’origine des vents, de la houle, des grands courants marins
et des différences de température de la mer ;
− la variation de la gravitation due aux positions respectives de la Terre, de la Lune et
du Soleil qui engendrent les marées.
Dans la recherche de nouvelles sources d’énergie n’émettant pas de gaz à effet de serre,
les énergies marines peuvent apporter une contribution à la diversification du bouquet
énergétique mondial.

Il existe plusieurs technologies permettant d’utiliser la mer comme une source d’énergie.
Celles-ci ne se trouvent pas toutes au même stade de développement, et sont très
marginales quant au niveau de leur production.

Je les cite pour information, mais il ne faudra pas compter sur elles pour régler des
problèmes à court terme.

• L’énergie marémotrice issue des marées
• L’énergie hydrolienne issue des courants
• L’énergie houlomotrice issue des vagues et de la houle
• L’énergie thermique des mers issue de la chaleur des océans
• L’énergie osmotique issue de la salinité


8. Le stockage d’énergie

Le stockage de l’énergie consiste à préserver une quantité d’énergie pour une utilisation
ultérieure. Par extension, l’expression désigne également le stockage de matière
contenant l’énergie.

55
Le stockage de l’énergie est au cœur des enjeux actuels, qu’il s’agisse d’optimiser les
ressources énergétiques ou d’en favoriser l’accès. Il permet d’ajuster la « production » et
la « consommation » d’énergie en limitant les pertes. L’énergie, stockée lorsque sa
disponibilité est supérieure aux besoins, peut être restituée à un moment où la demande
s’avère plus importante. Face à l’intermittence ou la fluctuation de production de
certaines énergies, par exemple renouvelables, cette opération permet également de
répondre à une demande constante.

Les méthodes de stockage dépendent du type d’énergie. Les sources d’énergies fossiles
(charbon, gaz, pétrole), sous forme de réservoirs à l’état naturel, remplissent
naturellement la fonction de stocks. Une fois extraites, elles peuvent facilement être
isolées, hébergées et transportées d’un point de vue technique. Le stockage s’avère plus
complexe pour les énergies intermittentes : leur production est relayée par des vecteurs
énergétiques tels que l’électricité, la chaleur ou l’hydrogène, nécessitant des systèmes
spécifiques de stockage.

Ø Stockage sous forme d’énergie mécanique.
Cette catégorie regroupe les voies les plus connues de stockage à grande échelle : le
stockage hydraulique et à air comprimé. Elle inclut aussi les volants d’inertie.

• Énergie mécanique potentielle

− Stockage hydraulique
Il permet de stocker de grande quantité d'énergie électrique par l'intermédiaire
de l'énergie potentielle de l'eau. Une STEP (station de transfert d'énergie par
pompage), type de centrale hydroélectrique, est utilisée pour transférer l'eau
entre deux bassins situés à des altitudes différentes.


Schéma n° 40 - Principe de fonctionnement d’une STEP

Lorsque le réseau fournit un surplus d'électricité, l'eau du bassin inférieur est
pompée dans le bassin supérieur. Sous l'effet de la pesanteur, cette masse d'eau
représente une future capacité de production électrique. Lors d’un déficit de
production électrique, la circulation de l'eau est inversée : la pompe devient
turbine et restitue l'énergie accumulée. Avec un rendement pouvant atteindre
plus de 80%, il s’agit de la solution la plus employée pour stocker l’énergie des
centrales électriques.

56
− Stockage à air comprimé
Quand la demande d’électricité est faible, les systèmes existants utilisent
d’anciennes mines de sel comme réservoirs et un ensemble moteur-générateur-
turbine. Quand la demande d'électricité est importante, l'air comprimé est utilisé
pour faire tourner une turbine couplée à un alternateur produisant de
l'électricité. Le rendement, actuellement aux environs de 50%, est un axe de
recherche et de développement.

• Énergie mécanique cinétique
L'énergie peut être stockée sous forme d'énergie cinétique dans un « volant
d’inertie », dispositif en forme de roue tournant autour de son axe central. Une
machine électrique lui fournit l’énergie cinétique (fonctionnement moteur) et la
récupère selon les besoins (fonctionnement générateur), entraînant une baisse de la
vitesse de rotation du volant d'inertie. Ce système permet de restituer plus de 80% de
l’énergie accumulée mais pour un temps de stockage limité. En pratique, le volant
d’inertie est utilisé pour un lissage à très court terme de la fourniture d’énergie au
sein d’appareils de production. C’est notamment le cas des moteurs thermiques et
surtout des moteurs Diesel.

Ø Stockage sous forme d’énergie chimique : Production d’hydrogène
Le dihydrogène, communément appelé hydrogène, n’existe pas à l’état naturel mais est
très abondant sur Terre sous forme atomique H (eau, hydrocarbures, etc.). De nombreux
procédés de production existent dont
− le reformage de combustibles fossiles, mais il faut du combustible fossile.
− l’électrolyse de l’eau, mais il faut de l’électricité.
L’hydrogène n’est donc pas une source d’énergie primaire, mais un vecteur d’énergie,
tout comme l’électricité. C’est pourquoi je traite ce sujet dans le cadre du stockage
d’énergie, et non dans le cadre des combustibles.
L’électrolyse, qui consiste à décomposer la molécule d’eau en hydrogène et en dioxygène,
nécessite donc de l’électricité ; le procédé peut être rentable si la production d’électricité
présente elle-même un coût peu élevé. L’hydrogène a la faculté de restituer de l’énergie,
ce qui en fait une forme particulièrement intéressante de stockage.

L’hydrogène peut être utilisé directement comme carburant de véhicules équipés de
moteurs à combustion fonctionnant au gaz.
Il peut aussi être stocké avant d’être reconverti en énergie au moyen d’une pile à
combustible, fournissant de l’électricité et de la chaleur. Son usage est également
envisagé pour des applications stationnaires (électricité et chaleur dans les maisons).

L’hydrogène présente l’intérêt de pouvoir être produit à partir de toutes les sources
d’énergie primaires (fossiles, éolien, solaire). Toutefois, les systèmes électrolyseur-
hydrogène-pile à combustible ont un coût d’investissement encore très élevé, pour un
rendement global de moins de 50%. De plus, leur durée de vie s’avère insuffisante dans le
cadre d’applications couplées au réseau électrique.
Des progrès récents sur la composition des électrodes des piles à combustible semblent
très prometteurs, et permettent d’espérer une augmentation très sensible du rendement,
qui pourrait atteindre 75 à 90%. Ces résultats de laboratoire récents devront être
confirmés au stade industriel.



57
Ø Stockage sous forme d’énergie thermique.
Actuellement, le stockage thermique est peu exploité. Son usage devrait croître à
l’occasion du développement des fermes solaires thermodynamiques.

• Stockage par chaleur sensible
L’élévation de la température d’un matériau permet de stocker de l’énergie. Ce
principe est, entre autres, celui des chauffe-eau solaires : ils récupèrent la chaleur
dans la journée pour la restituer ensuite, avec un rendement moyen de l’ordre de 40%
pour les systèmes les plus récents. Les matériaux privilégiés sont l’eau, l’huile de
synthèse, la roche ou encore le béton.

• Stockage par chaleur latente
Ce mode de stockage est basé sur l’énergie mise en jeu lorsqu’un matériau change
d’état (par exemple solide-liquide). La transformation inverse permet de libérer
l’énergie accumulée sous forme de chaleur ou de froid, avec un rendement d’environ
60%. Cette technique peut être appliquée dans les bâtiments, par l’intermédiaire des
Matériaux à Changement de Phase (MCP). Incorporés aux parois, ils servent de
régulateur thermique en fonction de la chaleur apportée par le soleil.

Ø Stockage sous forme d’énergie électrochimique.Le stockage de l’énergie dans les
batteries électrochimiques est la technique la plus répandue pour les petites quantités
d’énergie électrique. En fonction du type de batterie (plomb-acide, lithium-ion, nickel-
métal hydrure, etc.), différentes réactions chimiques sont provoquées à partir de
l’électricité : il s’agit de la phase de charge de la batterie. Selon la demande, les réactions
chimiques inversées produisent ensuite de l’électricité et déchargent le système.

Les batteries électrochimiques sont souvent destinées à des applications portables. De


puissance relativement faible, elles présentent néanmoins une grande capacité de
stockage pour des durées de décharge élevées (jusqu'à plusieurs heures) avec un taux de
rendement de 70 à 80%. Ces dispositifs peuvent également avoir des fonctions de
secours lorsque le réseau électrique est défaillant ou dans le cas d’une production
d’électricité issue des énergies renouvelables, avec des valeurs d’énergie stockée de
quelques Wh jusqu’à 40 MWh. L’inconvénient majeur est lié à leur durée de vie, limitée
par les dégradations chimiques des réactions et leur coût.

Ø Stockage sous forme d’énergie électrique.


Certains systèmes permettent de stocker directement l’énergie sous forme électrique. Il
s’agit principalement des supercondensateurs, composants électriques constitués de
deux armatures conductrices stockant des charges électriques opposées. Ils sont capables
de délivrer une forte puissance pendant un temps très court. À la différence des batteries
électrochimiques, ils peuvent se décharger en un temps de l’ordre de la seconde ou moins
avec un rendement compris entre 80% et plus de 90%. Toutefois, ces dispositifs ne
stockent pas de grandes quantités d’énergie.
Une autre piste est celle du stockage électromagnétique (ou SMES pour « Superconductor
Magnetic Energy Storage ») à base de matériaux supraconducteurs. Ce système se destine
au stockage de grandes quantités d’énergie, dont 50% peuvent être restituées en moins
d’une seconde. De plus, un tel dispositif bénéficie d’un rendement de 75% à plus de 90 %.
Toutefois, les applications de SMES, aux coûts encore très élevés, sont encore limitées et
doivent démontrer leur faisabilité à grande échelle, du fait de la nécessité de maintenir
une température très basse. Elles sont développées essentiellement aux États-Unis.

58
9. Conclusions

Concernant les ressources énergétiques employées actuellement sur la Terre, on constate
qu’environ 85% d’entre elles sont d’origine fossiles ;

• Le charbon est principalement employé dans les centrales thermiques pour produire
de l’électricité ; C’est le principal contributeur à l’émission de dioxyde de carbone
dans l’atmosphère et donc au réchauffement climatique. Ses réserves sont estimées à
plus de 150 ans, mais il serait sage de ne plus l’employer, sauf si l’on parvient à capter
le dioxyde de carbone et à l’enfouir selon le procédé CCS, qu’il faut donc mettre au
point. Le charbon sera la dernière ressource fossile épuisée, et les principaux
utilisateurs étant la Chine, les Etats-Unis et la Russie, on peut craindre que l’espoir de
voir son emploi s’arrêter soit bien mince.

• Le gaz naturel et le pétrole seront épuisés avant la fin du siècle, et il paraît
vraisemblable que des baisses de production sensibles interviennent dans les trente à
cinquante prochaines années, avec des conséquences importantes en terme de
stabilité géopolitique et d’approvisionnement énergétique.

La fin du gaz et du pétrole aura principalement un impact sur les ressources financières
de certains pays qui n’en possèdent pas beaucoup d’autres ; de plus, ces pays sont en
croissance démographique soutenue, et seront vraisemblablement touchés par les effets
du réchauffement climatique, avec la perte de ressources agricoles. On peut s’attendre à
des manifestations violentes et des mouvements massifs de population.

En terme de ressources énergétiques, la fin du gaz aura des conséquences principalement
sur la production d’électricité et le chauffage des immeubles, alors que la fin du pétrole
affectera l’agriculture et les transports dans leur ensemble ; les activités de transport
aérien, maritime et terrestre de marchandises n’ont guère d’alternative à ce jour.

La question de l’avenir de nos sociétés se pose alors de façon critique, car il semble
improbable que nous puissions substituer les énergies fossiles par d’autres ressources à
l’échelle actuelle. Et que dire si l’on doit tenir compte des projections faites sur le futur,
quand on estime que dans les trente ans qui viennent, il faudrait augmenter la production
d’énergie de plus de 50% !
Les projections tendancielles ont cela de terrible, c’est comme leur nom l’indique, qu’elles
poursuivent une tendance, et sans limite. C’est une démarche d’économiste, si j’ose dire.
Or, nous l’avons vu, une tendance de croissance ne peut se poursuivre dans un monde
fini.

Il faut donc nous préparer à remplacer des énergies fossiles en voie d’épuisement dans la
mesure de ce que l’on pourra faire, mais aussi nous préparer à une très forte réduction de
consommation globale d’énergie. Ce n’est pas 50% de plus qu’il faut viser pour 2050,
mais plutôt 50% de moins, à minima.

Nous sommes donc devant deux types d’interrogations toutes aussi importantes :
− Comment produire de l’énergie finale à hauteur des besoins fondamentaux de notre
espèce ? Et à quel niveau ce situe ce besoin ?
− Comment ramener notre consommation à hauteur des capacités maximales de
production de cette énergie ? Et à quel niveau se situe cette capacité ?

59
Les deux actions seront déjà très difficiles à mener, mais il faudra ensuite espérer que les
deux niveaux objectifs soient de même ordre pour être compatibles.

Ce qui est certain, c’est que l’exploitation des énergies dites renouvelables ne suffira pas :
Le graphique n°2, page 9, et la courbe n°13, page 20, ci-dessus sont explicites. Le pétrole
et le gaz représentent 57,60% de la production totale actuelle, soit environ 7.780 Mtep et
le charbon 27,60%, soit 3.720 Mtep. Les énergies renouvelables, hydroélectricité
comprise, représente 10,30%, soit 1.390 Mtep.
On peut s’amuser à faire toutes les simulations que l’on veut sur les dates de fin des
diverses énergies fossiles, du coefficient probable d’évolution des consommations
souhaitées, sur la capacité d’augmentation de chacune des énergies renouvelables, il n’y
aura pas de solution satisfaisante à court et moyen terme sans une chute brutale de la
consommation. C’est la seule chose dont nous soyons certains, sans connaître pour autant
un agenda précis.

Pour assurer le moyen terme, il faudra développer les énergies renouvelables dans la
mesure du possible, ce qui sera très insuffisant, mais aussi et surtout travailler sur le
procédé CCS pour pouvoir bénéficier du charbon tant que cela sera possible, et sur le
développement des troisième et surtout quatrième génération de réacteurs nucléaires.

Je pense que pour le plus long terme, il faudrait « mettre le paquet » sur la recherche en
matière de fusion nucléaire, comme il a pu être fait en d’autres temps sur la fission pour
des motifs militaires. Une mobilisation générale !
Il peut se passer plusieurs dizaines d’années avant qu’elle n’aboutisse, mais il serait
souhaitable que ce soit avant la fin du siècle. Aucune autre solution connue ne permettra
d’espérer poursuivre après cette date.

En attendant, il faut pouvoir tenir jusqu’à ce que cette technologie aboutisse, ou qu’une
autre solution n’apparaisse (?), et pour cela il faudrait réduire drastiquement, et dès à
présent, les consommations d’énergie pour assurer la continuité.

Par ailleurs, la priorité devrait être mise sur la production d’électricité et l’adaptation des
déplacements et des transports à l’électricité :
− Transport en commun par métro, tramways, trolleys, trains, et non par autocar ou
bus.
− Transport de marchandises par train, ferroutage ou routes électrifiées, et diminution
des camions thermiques au strict minimum

Il faudrait tendre vers l’interdiction des déplacements inutiles, dont les déplacements
touristiques de masse par air ou par mer, et vers l’interdiction des voitures privées ; il
faudrait mettre en place des moyens de transport collectif par minibus électriques.

Il faudrait aussi parvenir à modifier le parc immobilier en imposant l’isolation des
bâtiments anciens, et tendre vers l’autonomie énergétique pour les constructions
nouvelles.

Il faudrait également éviter toute production dévoreuse de ressources naturelles,
énergétique ou minérale, qui ne soit pas indispensable.

Il faudra, pour cela, une modification totale de notre modèle économique, financier et
social, mais aussi et surtout de notre mentalité.

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