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Note

de réflexion sur l’avenir de l’humanité



Dossier n° 4 – L’épuisement des ressources minérales



Sommaire
Page

1 La classification périodique des éléments : Le tableau de Mendeleïev. 5

2 La distinction commerciale et stratégique des métaux. 7

3 L’industrie des métaux. 9

3.1 La chaîne de valorisation des minerais 9
3.2 L’industrie minière 10
3.3 L’industrie métallurgique 17
3.4 Les facteurs de risque sur l’approvisionnement des métaux 19

4 La criticité des ressources minières. 20

5 Les métaux majeurs. 24

6 Les métaux rares. 28

6.1 Utilisation des métaux rares 28
6.2 Production des métaux rares 32
6.3 Contraintes environnementales 34
6.4 Considérations géoéconomiques 37
6.5 Réaction de l’Union européenne 41
6.6 Perspectives 42

7 Le recyclage des métaux. 44

8 L’espoir des grands fonds marins 46

8.1 L’expérience Nautilus Minerals Inc. 48
8.2 Les perspectives françaises 51

9 L’espoir de l’espace 52

10 Le sable 55

11 Conclusions 60




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Introduction

« Vers 2050, 9 milliards d’être humains consommeront 140 milliards de tonnes de minerais,
d’hydrocarbures et de biomasse (bois, cultures, élevage) », selon le rapport du PNUE
(Programme des Nations unies pour l’environnement). Soit 16 tonnes de ressources
naturelles englouties par an et par chaque habitant de la planète !

Au sein des pays riches, les écarts sont impressionnants. Un consommateur du Qatar,
d’Australie ou des États-Unis engloutit 40 tonnes de ressources naturelles par an quand un
Français, un Allemand ou un Italien en utilise environ 15 tonnes.
Ces chiffres ne reflètent la réalité que partiellement, notent les rapporteurs de l’ONU ; car
une tonne de cuivre extraite au Chili sera imputée dans leur calcul au consommateur chilien
même si elle est employée pour fabriquer un produit vendu en Chine ou en Europe.

Ces faiblesses méthodologiques ne modifient cependant pas le risque d’épuisement mondial
des ressources naturelles. Même si les pays industrialisés parvenaient à diviser par deux leur
consommation de matières premières d’ici à 2050, à 8 tonnes pas habitant, et que les pays en
voie de développement rejoignaient ce niveau sans le dépasser, le total s’élèverait à 70
milliards de tonnes, soit 40 % de plus qu’aujourd’hui. Ce scénario s’accompagnerait d’un
doublement des émissions de gaz à effet de serre, une trajectoire incompatible avec les
objectifs de la communauté internationale en matière de lutte contre le réchauffement, et
incompatible tout simplement avec la possibilité de vie sur terre.

Le graphique suivant représente l’empreinte écologique mondiale, et son évolution de 1961
à 2050. On voit que l’on passe du besoin d’une planète, à celui de 2,50 planètes dans cet
intervalle de temps ; or, nous ne disposons que d’une seule planète…


Graphe n° 1 – Empreinte écologique mondiale


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La demande en minerais a été multipliée par 27 depuis le début du Xxème siècle avec des
méthodes de forage minier dont l’efficacité a été multipliée par 90. Les minéraux et éléments
utiles sont globalement très diffus dans la croûte et les filons concentrées ont été exploités et
épuisés depuis belle lurette. Les rendements des exploitations minières sont donc de plus en
plus faibles car les concentrations des métaux sont de plus en plus faibles. C’est pourquoi
l’extraction de minerais consomme de plus en plus d’énergie. Les extraire hors d’un filon
réclame dix fois plus d’énergie que d’un gisement et déjà en 2012 on estimait que l’industrie
minière consommait de 4 à 10 % de l’énergie primaire produite dans le monde. Par exemple,
pour le pétrole, il faut consommer l’équivalent d’un baril de pétrole pour en extraire 18
aujourd’hui contre 1pour 100 vers 1950. Ce rapport ne cesse d’augmenter pour ce qui est de
l’extraction du pétrole conventionnel. Quant au pétrole non conventionnel (pétrole de
schiste par exemple), il est de l’ordre de un pour trois ! C’est dire le faible rendement.

L’épuisement de ces ressources est donc une quasi-certitude si l’on ne trouve pas des
procédés extrêmement efficaces de recyclage. Pour la plupart des éléments chimiques, les
procédés de recyclage ne sont pas connus. Pour les métaux classiques, comme le fer ou le
nickel, le taux de recyclage actuel est de l’ordre de 50 %. Ce qui implique que 50 % est perdu
à chaque cycle de vie des produits. L’épuisement n’est donc que retardé, mais gagner du
temps est déjà important. La question essentielle qui demeure est donc celle de l’échelle de
temps de l’épuisement.

Or il semble que le problème de l’épuisement risque de prendre de l’importance et de
devenir critique au cours de ce siècle.

On connait le stock de ressources naturelles à notre disposition ainsi que leur vitesse
d’exploitation. La date d’épuisement théorique est donc facile à extrapoler.
Bien des matières liés aux produits « écologiques » (panneaux solaires) ou aux énergies
renouvelables sont en voie d’épuisement plutôt rapide, dans le courant de la seconde moitié
du XXIème siècle : tout comme l’uranium, le pétrole, le gaz, les métaux rares et même non
précieux tels que le fer. Qu’il s’agisse d’électronique, d’environnement, ou d’énergie, le
progrès technologique passe quoi qu’il en soit par la maîtrise de matières premières rares
venant souvent du bout du monde.

Rajoutons que ces ressources naturelles ne sont pas gérées au bénéfice de l’ensemble de la
population comme un bien précieux commun à l’Humanité. Elles sont mises à disposition,
gratuitement, au bénéfice d’intérêts privés qui peuvent ainsi les commercialiser, et ceci dans
un modèle économique productiviste, donc sans recherche de modération ou d’économie.

Nous ne sommes pas dans une gestion raisonnable de ces ressources, en pensant à nos
générations futures, mais dans une gabegie effrénée.


Quelques mots sur l’appréciation des réserves :

Il existe trois niveaux pour qualifier et quantifier les réserves selon une approche
probabiliste :
− Réserve 1P – Réserve Prouvée
− Réserve 2P – Réserve Prouvée + Probable –
− Réserve 3P – Réserve Prouvée + Probable + Possible –

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Les réserves prouvées sont en quelques sortes les réserves garanties, puisque ce sont celles
sur lesquelles va se prendre la décision d’investir pour l’exploitation du gisement.
Ce sont des investissements très lourds, et les exploitants prennent donc des marges de
sécurité importantes. En particulier, les entreprises privées ne se lanceront pas dans une
aventure aléatoire, compte tenu des risques, et n’investissent que sur des réserves prouvées
offrant toutes garanties.

Les réserves probables résultent d’une analyse faite avec les paramètres estimés les plus
probables. Elles peuvent très bien s’approcher de la réalité. Pour un gisement donné, le
coefficient est généralement de 1,7 sur les réserves 1P

Les réserves possibles résultent d’une analyse faite avec les paramètres les plus optimistes.
Ce sont des réserves idéales, n’offrant aucune garantie, et jamais vérifiées.


Les minerais métallifères

Un minerai est une roche contenant des matériaux dont les propriétés intéressent les
industriels.
S’ils sont présents dans des quantités satisfaisantes d’un point de vue économique, ils seront
extraits et traités pour être livrés aux industriels qui les utiliseront. La majorité des minerais
métallifères rencontrés sur notre planète sont les suivants :
− des oxydes (bauxite pour l’aluminium)
− des sulfures (galène pour le plomb, sphalérite pour le zinc)
− des carbonates (malachite pour le cuivre, sidérite pour le fer)
− des silicates (garniérite pour le nickel et le magnésium)

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1. La classification périodique des éléments : le tableau de Mendeleïev

Le « tableau périodique des éléments, » également appelé « tableau ou table de


Mendeleïev », « classification périodique des éléments » ou simplement « tableau
périodique », représente tous les éléments chimiques ordonnés par numéro atomique
croissant et organisés en fonction de leur configuration électronique, laquelle sous-tend
leurs propriétés chimiques.

On doit ce tableau au chimiste russe Dimitri Ivanovitch Mendeleïev, qui en a réalisé la
première version en 1869, différente dans sa forme, mais semblable dans son principe.
Ce tableau a été régulièrement modifié et renseigné en fonction des découvertes, et sa
version actuelle a été mise à jour en 2016.

Ci-après, le tableau complet auquel on pourra toujours se référer, comportant l’ensemble des
caractéristiques.



Tableau n°2 – Tableau de Mendeleïev – Complet



Il comporte les caractéristiques des 118 éléments aujourd’hui recensés, depuis l’Hydrogène
1 H à l’Oganesson 118 Og.
On trouve sur cette table, le nom de l’élément, son symbole chimique, son numéro atomique,
et sa masse atomique relative (ou celle de l’isotope le plus stable).


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Le tableau recense dix séries chimiques aux propriétés physicochimiques homogènes.

• 6 séries de métaux

o les métaux alcalins – Colonne 1 hors hydrogène, soit les cases en rouge vermillon
(lithium, sodium, potassium, rubidium, césium et francium)

o les métaux alcalino-terreux – Colonne 2, cases en beige (béryllium, magnésium,
calcium, strontium, baryum et radium)

o les métaux de transition – Pavé formé par les colonnes 3 à 12 et les lignes 4 à 7 –
hors Lanthanides et Actinides -, soit le cases en rose incarnadin et gris clair
(scandium, titane, vanadium, chrome, manganèse, fer, cobalt, nickel, cuivre, zinc,
yttrium, zirconium, niobium, molybdène, technétium, ruthénium, rhodium,
palladium, argent, cadmium, hafnium, tantale, tungstène, rhénium, osmium, iridium,
platine, or, mercure, rutherfordium, dubnium, seaborgium, bohrium, hassium,
meitnerium, darmstadtium, roentgenium et copernicium).

o les métaux pauvres – Triangle formé par les colonnes 13 à 16 et les lignes 3 à 6 –soit
les cases en gris foncé (aluminium, gallium, indium, étain, thallium, plomb et
bismuth)

o les lanthanides, cases en mauve clair (lanthane, cérium, praséodyme, néodyme,
prométhium, samarium, europium, gadolinium, terbium, dysprosium, holmium,
erbium, thulium, ytterbium et lutécium).

Les quinze lanthanides forment, avec le scandium et l’yttrium, les matériaux que l’on
désigne sous le nom de « terres rares »

o les actinides, cases en rose (actinium, thorium, protactinium, uranium, neptunium,
plutonium, americium, curium, berkelium, californium, einsteinium, fermium,
mendelevium, nobelium et lawrencium).
Ils présentent pour caractéristique d’être tous des éléments radioactifs, dont
l’uranium et le plutonium sont évidemment les plus connus.

• 1 série, les metalloïdes, cases en vert kaki (bore, silicium, germanium, arsenic, antimoine,
tellure, et polonium (Po))
Ils ne peuvent normalement être classés ni parmi les métaux ni parmi les non-métaux,
du fait de propriétés physiques et chimiques réputées intermédiaires entre ces deux
groupes ; sauf l’antimoine et le tellure.

• 1 série, autres non-métaux, cases en vert clair (hydrogène, carbone, azote, oxygène,
phosphore, soufre, et sélénium)

• 1 série, halogènes, cases en jaune (Fluor, Chlore, Brome, et Iode)

• 1 série, Gaz nobles, cases en bleu clair (Hélium, néon, argon, krypton, xénon, et radon)




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La présente note s’intéressera à quelques éléments ou groupes d’éléments seulement :

− les métaux majeurs : Fer, Cuivre, Etain, Plomb, Aluminium, Zinc, Nickel, Or, Argent,
Magnésium, Titane, ainsi qu’un métalloïde, le silicium.

− Les matériaux rares, stratégiques
o Les métaux rares : Antimoine, Indium, Béryllium, Magnésium, Cobalt, Niobium,
Fluor, Platinoïdes : Ruthénium, Rhodium, Palladium, Iridium, Platine, Rhénium,
o Les terres rares : Scandium, Yttrium et les quinze lanthanides
o Gallium, Germanium, Tantale, Graphite, Tungstène.

Mais elle mentionnera également, pour information, un matériau qui n’est pas un élément en
soi, le sable ; ce matériau naturel, énormément employé dans de nombreux usages, est en
cours d’épuisement, et justifie que l’on aborde le sujet.



2. La distinction commerciale et stratégique des métaux

De l’Antiquité jusqu’à la Renaissance, l’humanité n’a utilisé que sept métaux : l’or, le cuivre, le
plomb, l’argent, l’étain, le fer et le mercure.


Figure n° 3 – Historique de découverte des métaux période pré-industrielle

On notera l’importance des métaux dans l’Histoire de l’Homme, ne serait-ce que par la
terminologie des périodes archéologiques depuis la dernière glaciation : âge de pierre, âge
du cuivre, âge du bronze, et âge du fer.

Puis quelques métaux se sont rajoutés à cette liste dans les siècles suivants, et ce jusque dans
les années 1970 : l’aluminium, le chrome, le zinc, le nickel, le titane, le manganèse et le
silicium. Ce sont les matériaux que l’on nommera les métaux majeurs, ceux dont la
consommation est la plus large dans l’industrie, et la plus importante en volume.
Jusqu’au début des années 1970, l’humanité n’a donc fonctionné qu’avec une petite
quinzaine de métaux seulement, sur les 86 du tableau de Mendeleïev.

Ce n’est qu’à compter des années 1970, que l’Homme a commencé à tirer parti des
fabuleuses propriétés d’une multitude de petits métaux, contenus dans les roches de la
croûte terrestre, dans des proportions très faibles. On les nomme les métaux rares.

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De fait, ces métaux ne sont pas rares, puisque l’on en trouve un peu partout, bien distribués
sur la terre, et en quantité conséquente ; par exemple, il y a plus de « terres rares » présentes
dans la croûte terrestre que d’or et d’argent.
Mais, ce qui les différencie, et c’est pourquoi l’on utilise le terme de « rare », c’est qu’ils sont
difficiles à détecter, à exploiter, et à isoler chimiquement. Leur très faible teneur dans la
roche rend leur exploitation très difficile et très délicate. Cette exploitation :

• est onéreuse, car il faut extraire ces métaux depuis de grandes quantités de minerais :
Par exemple, pour produire un kilogramme de :
o Vanadium, il faut 8,5 tonnes de roches
o Césium, il faut 16 tonnes de roches
o Gallium, il faut 50 tonnes de roches
o Lutécium, il faut 1.200 tonnes de roches
Dit autrement, 1 kilo de roche ne contient que 120 mg de vanadium, ou 66,5 mg de
Césium, ou 19 mg de gallium ou 0,8 mg de lutécium.

• est préjudiciable à l’environnement, puisqu’elle nécessite l’utilisation de nombreux
produits chimiques pour isoler les métaux recherchés, avec les rejets en résultant.

Différentes distinctions ont été faites pour tenter de classer les métaux ; de ce fait, les termes
employés ne recouvrent pas forcément les mêmes métaux, selon l’organisme ou l’autorité
qui l’emploie.
Quoi qu’il en soit, nous allons toujours retrouver les mêmes termes, métaux majeurs, métaux
de base, métaux critiques, métaux stratégiques, métaux rares et terres rares.
Seule la famille des terres rares est universellement définie.

J’ai essayé de comprendre l’emploi de ces diverses dénominations, mais je ne suis pas
parvenu à le faire de façon très satisfaisante ; il semble qu’il n’existe pas de norme sur le
sujet.
La distinction semble se faire en terme industriel (emploi dans l’industrie traditionnelle ou
de haute technologie) ou critique /stratégique (degré d’importance dans l’industrie et
risques sur les approvisionnements).
Selon les diverses classifications, les métaux de base peuvent être stratégiques ou non, les
risques sur l’approvisionnement situent le métal concerné en « critique » ou en
« stratégique », un métal pouvant être l’un et l’autre dans certains cas.
Bref, c’est un peu la foire… Alors, je vais simplifier !
Pour la suite, et ce sera purement conventionnel, je ne ferai que deux catégories :

− les métaux majeurs, seront les métaux obtenus en grande quantité, et utilisés
massivement dans l’industrie métallurgique traditionnelle comme dans l’industrie de
haute technologie. Ce sont les métaux cités plus haut, connus et utilisés avant 1970.
Certains pourront être critiques, s’ils présentent des risques d’approvisionnement, et/ou
stratégiques s’ils sont vitaux pour l’industrie.

− Les métaux rares, comprenant les terres rares, produits en plus petite quantité et
indispensables à l’industrie de haute technologie, principalement l’industrie des TIC
(Technologie de l’Information et de la Communication).
Les terres rares sont un groupement de dix-sept éléments utilisés principalement dans
les produits de haute technologie ainsi que dans les produits des nouvelles technologies
vertes. Ce sont les 15 éléments classés lanthanides auxquels s’ajoutent le Scandium et
l’Yttrium.
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3. L’industrie des métaux

3.1. La chaîne de valorisation des minerais

L’obtention d’un produit métallique fini est l’aboutissement d’une longue chaîne de
tâches, de toutes natures, scientifique, administrative, juridique, technique, économique,
etc.

En amont, il est nécessaire de déceler la présence de minerais dans les sols. C’est un
travail de géologie extrêmement long et méthodique, qui allie études cartographiques et
études de terrain ; reconnaissance, prélèvements, et analyse physicochimique des sols.

Puis il s’agit de déterminer l’intérêt économique de l’exploitation éventuelle d’un site,
sachant l’importance des investissements qui devront être mobilisés. Une telle décision
d’investissement doit s’appuyer sur des études sérieuses et des garanties de retour
financier.

Ensuite, mais c’est variable selon les législations, viennent les études d’impact
environnementales, et l’ensemble des démarches administratives et juridiques pouvant
être complexes. En France, et en Europe plus largement, c’est de loin l’étape la plus
longue et la plus difficile. Peu de projets parviennent à terme ; c’est ce qui explique que la
plupart des mines soient exploitées aujourd’hui dans des pays pauvres et pas trop
regardant sur les conditions de sécurité, les conditions sociales et d’environnement.

Après seulement, en cas d’agrément, peut se faire la phase d’extraction des minerais,
telle qu’on la verra au paragraphe suivant. C’est l’industrie minière.
L’exploitation d’une mine est généralement une activité de faible niveau technologique,
de faible qualification de main d’œuvre, mais de fort impact énergétique et
environnemental. L’activité d’une mine ne peut être délocalisé, mais un arbitrage peut se
faire entre différents sites possibles ; c’est ainsi que des mines ont été fermées dans
certains pays, pour une production venant dorénavant de l’étranger.

Puis vient le temps de l’industrie métallurgique, qui permettra de transformer le
minerais en matière première « brute ». C’est une activité industrielle lourde.

Enfin, des usines transformeront la matière première brute en produits semi-finis, puis
en produits finis.

Il convient de noter l’importance accordée au recyclage de la matière à tous les stades de
l’industrie. La matière première est précieuse, car son obtention est coûteuse, on s’en
doute ; de plus, elle devient rare car les gisements s’épuisent. Il convient de la
sauvegarder au maximum.

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Figure n° 4 – Chaîne de valorisation des minerais


3.2. L’industrie minière.

L’activité minière consiste traditionnellement à exploiter de manière commerciale les
ressources minérales ou énergétiques contenues dans les sols et plus récemment au
fond des océans.
Il s’agit d’une activité ancienne puisqu’en Europe, elle remonte à plus de 3.500 ans

En Europe, le XIXème siècle et la première partie du Xxème siècle ont connus une très
forte activité minière, spécialement dans le charbon et le fer.
Les conditions de travail dans les mines de charbon étaient épouvantables et
dangereuses. Les enfants y étaient employés dès leur plus jeune âge. Les effondrements,
les incendies, les coups de grisou et la silicose ont causé des ravages terribles dans les
populations de mineurs ; plus d’un million de morts dans les mines souterraines
mondiales durant ces deux siècles. Aucune source d’énergie n’a été aussi meurtrière.
Il faut relire Zola et « Germinal », ou Llewelyn et « Qu’elle était verte ma vallée » et revoir
le chef-d’œuvre qu’en a tiré John Ford, pour comprendre cette époque et la mine.


Dessin et photos n° 5 et 6 – Les enfants (et les chevaux) dans la mine

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L’activité minière européenne a graduellement diminué au 20ème siècle alors que le
charbon a cessé d’être la source majeure d’énergie et que l’extraction des autres
matières premières a été moins compétitive dans un monde de plus en plus globalisé.
Mais elle a été poursuivie et développée partout dans le monde où se trouvent les
minerais, et particulièrement dans les pays en voie de développement, où l’on exploite
plus facilement les hommes et la nature.
Deux activités minières coexistent aujourd’hui :

− Les mines industrielles de grande production, régulièrement déclarées et contrôlées,
dans lesquelles un minimum de garanties sont accordées aux mineurs (enfin, disons
le comme cela !). Elles sont conduites avec des moyens de production modernes,
mécaniques de forte puissance.
o Souterraines, elles bénéficient de « descenderies » permettant à des engins
puissants d’atteindre le front de taille, et à des véhicules de fort tonnage de
transporter les minerais à surface.
o A ciel ouvert, elles sont entièrement mécanisées avec des engins de très grandes
dimensions et de fort tonnage.

− Les mines artisanales, parfois tolérées mais souvent illégales et hors de tout
contrôle. Ces mines ne font pas toujours de grosses productions, mais elles
exploitent des minerais contenus en petites quantités dans la roche. Eventuellement
de l’or ou des pierres précieuses, mais actuellement les nombreux métaux rares
nécessaires aux TIC.

Les différents minerais contenant les matériaux nécessaires aux TIC proviennent
aujourd’hui largement des pays émergents ou sous-développés. Ils sont issus de mines
industrielles mais également artisanales. Les conditions d’exploitation sont
généralement déplorables : travail des enfants, absence de protections, dégâts
environnementaux, etc…


Photo n° 7 et 8 – Extraction de terres rares en Chine et au Congo

Si l’on fait exception des mines artisanales, le nombre de mines de niveau industriel
produisant des métaux dans le monde est évalué à 2.500 unités et 6 Milliards de tonnes
de minerais métallifères sont extraits chaque année (chiffre de 2012).

Cela donne une idée de l’énergie dépensée pour extraire ces métaux, et des
conséquences environnementales : Emissions de CO2 et rejet de déchets.




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Les différents types de mines

Les matériaux extraits des milieux naturels sont issus de quatre types de mines :

• les placers.
« gisement secondaire de roches sédimentaires, le plus souvent d’origine alluvionnaire,
produisant des métaux et des minéraux lourds, notamment de l’or et des pierres
précieuses ».
Les éléments recherchés sont triés naturellement par l’action des cours d’eau. Le
triage final des paillettes d’or peut s’effectuer à la batée (cuvette conique) ou à l’aide
d’une rampe de lavage. L’avantage que constitue ce type de gisement est son
accessibilité et la possibilité de fortes concentrations.
Les placers représentent de 4 à 5% des mines métallifères


Photos n° 9 et 10 – Placers aurifères


Photo n° 11 – Déforestation et placer illégal en Guyane.

Bien sûr, ces exploitations sont largement préjudiciables à l’environnement.


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• les mines de surface, ou « à ciel ouvert »

Les mines de surface représentent 52% des mines produisant des métaux et 83% des
minerais métalliques extraits. Leur développement s’est fait avec le pétrole.
C’est la méthode d’extraction privilégiée pour les gisements peu profonds. La
géométrie de ce type de mine est généralement plus large que profonde pour
accroitre la stabilité des parois.
Les mines à ciel ouvert constituent la méthode employée pour les extractions de
grande ampleur, alors que les mines souterraines concernent plutôt les extractions
de plus petite taille. Certains minerais sont extraits suivant les deux méthodes dans
des proportions plus ou moins importantes.


Photos n° 12 et 13 – Mines à ciel ouvert

La plupart de l’extraction de minerai de bauxite, de fer, de cuivre est réalisée à partir
de techniques à ciel ouvert. On peut y ajouter l’or, l’argent, le molybdène, le nickel
(latérites).
Les minerais de plomb et de zinc sont principalement issus de mines souterraines et
les métaux précieux, comme l’or particulièrement aux USA et en Australie, sont
extraits ces dernières années à partir de mines à ciel ouvert de faible concentration.


Photo n° 14 – Mine de cuivre de Chuquicamata (Chili). Plus grande mine de cuivre mondiale

Certains sites, dont les possibilités d’exploitation à ciel ouvert deviennent nettement
moins intéressantes, passent à une exploitation souterraine. C’est le cas de la mine
de cuivre à ciel ouvert de Chuquicamata au Chili (que nous avons visitée en 1997
avec Fanou) dont la fermeture était programmée en 2013 et la réouverture en mine
souterraine en 2018.
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Un réseau de quatre tunnels couvrant 1500 km sous le fond de la mine actuelle a été
mis en place. À la fin prévue de cette nouvelle phase d’exploitation, en 2060, ces
tunnels abaisseront le niveau actuel du fond de la mine de près de 800 m (il se situe
déjà aujourd’hui à -850m).

Dans certains cas, les mines ne forment pas des excavations sous le niveau du sol,
mais ce sont des arasements de montagnes. Je ne peux m’empêcher de citer les
dégâts de ce genre d’exploitation. En 1983, avec Fanou et les enfants, nous avions
passé trois jours dans les Appalaches ; cela ressemblait à la photo suivante.


Photo n° 15 – Les Appalaches avant l’exploitation

Depuis, de nombreux sommets ont été exploités pour sortir du charbon. Voilà
désormais à quoi ressemblent les Appalaches. C’est vraiment un crève-cœur !


Photos n° 16 et 17 – Les sommets des Appalaches, en cours d’exploitation


• les mines souterraines

L’extraction souterraine est divisée en deux grandes catégories selon qu’elle
s’effectue dans de la roche dure ou de la roche plus tendre.
Les minerais métallifères relèvent de la première catégorie, alors que la seconde
catégorie concerne plutôt le charbon ou les sables bitumineux.
43% des mines métallifères mondiales sont souterraines et génèrent 17% des
minerais métalliques extraits. Les techniques employées permettent de remonter à
la surface des minéraux durs, principalement des minerais métallifères contenant de
l’or, de l’argent, du fer, du cuivre, du zinc, du nickel, de l’étain et du plomb.

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L’extraction souterraine demande davantage d’énergie que l’extraction de surface à
cause des mécanismes pour ramener le minerai en surface, pour ventiler, et pour
pomper l’eau des galeries.
Par contre, ce type d’extraction génère beaucoup moins de déchets que l’exploitation
de surface ; ils ne dépassent pas 10% de la production totale de minerai métallique.


Photo n° 18 – Mine souterraine

L’accès à une mine souterraine peut être effectué, suivant la topographie du site, par
le biais d’une rampe, d’un puits vertical ou d’une galerie horizontale.
Ci-après, une descenderie en rampe, accessible aux engins de chantier et aux
transports de fort tonnage.


Photo n° 19 – Descenderie d’accès à la mine souterraine

Mais on peut également descendre dans la mine par un puits, et rejoindre les filons
par des galeries horizontales, ou de faible pente.


Schéma n° 20 – Mine Townsite (Orégon) Photo n° 21 – Galerie dans une mine de fer, abandonnée

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Les profondeurs parmi les principales mines souterraines sont impressionnantes :
− 3900 m pour la mine d’or de Tau Tona en Afrique du Sud, la plus profonde du
monde. A cette profondeur, la roche est à la température de 60° C, et la
descente en ascenseur vers le front de taille à -3900 m prend plus d’une heure.
− 3000 m pour la mine d’or, cuivre, zinc et argent de Laronde au Québec
− 2200 m pour la mine de platine et palladium de Merenski Reef en Afrique du
Sud
− 1800 m pour la mine de cuivre, zinc et plomb de Mt Isa en Australie
Déjà en 1977, la profondeur de 3500 m avait été atteinte en Afrique du Sud.

Mais aujourd’hui, face à la baisse des concentrations constatées, les compagnies
minières s’intéressent de plus en plus à l’extraction ultra-profonde. Ainsi, une
compagnie minière opérant en Afrique du sud espère toucher des concentrations
d’or de l’ordre de 25 g/tonne à des profondeurs de 5 km, voire plus !

• les sites en mer (mines offshore)

Longtemps laissée de côté pour des raisons de coût, l’exploitation de gisements
offshore tend aujourd’hui à se développer. On considère généralement cette
catégorie d’extraction réservée aux énergies fossiles (pétrole, gaz). En effet, devant la
déplétion des ressources terrestres, l’extraction sous-marine de pétrole est passée de
10% de la production mondiale en 1960 à 30% en 2010.
Comme pour l’extraction terrestre, l’extraction offshore des hydrocarbures doit être
réalisée de plus en plus profondément : on est passé de – 500 m à la fin des années
1970 à plus de – 2500 m à la fin des années 2000.

Si l’exploitation sous-marine des métaux est en phase de démarrage, en revanche des
navires miniers sont utilisés depuis de nombreuses années, notamment par le groupe
De Beers, pour exploiter les ressources en diamants au large de la Namibie.


Photo n° 22 et schéma n° 23 – Navire minier De Beers pour extraction de diamant

Le dernier navire acheté par un joint-venture entre De Beers et le gouvernement de la
Namibie (50/50), a nécessité un investissement de 568 M$. Il devrait entrer en
service en 2022, pour une production espérée de 500.000 carats par an (1 ct = 0,20g).



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Mais l’industrie minière commence à s’intéresser sérieusement à ce type d’extraction
pour les minerais.
« Pour alimenter les usines du monde, dont la production devrait doubler en 20 ans, il
faudra trouver de nouvelles ressources. Les gisements terrestres s’épuisant, c’est au
fond des océans que seront situées les mines de demain.
L’idée fait bondir nombre d’observateurs. Mais à bien y regarder, l’exploitation des
gisements sous-marins pourrait, dans certains cas, s’avérer moins polluante que celle
opérée actuellement à terre. Entre challenges technologiques et défis
environnementaux, la France s’y prépare patiemment, en bâtissant une filière
d’excellence. » - Article de l’Usine Nouvelle – publié le 02/04/2015

Concernant les matériaux des TIC, il semble que, devant l’urgence à disposer des
ressources stratégiques sans subir le monopole des principaux pays producteurs
actuels ou pour faire face à leur déplétion, la recherche de nouveaux gisements de
métaux rares au fond des océans s’organise. Les principales ressources minérales
sous-marines répertoriées comme potentiellement intéressantes à exploiter sont les
suivantes :



Dans ce domaine, plusieurs projets sont sérieusement à l’étude, pour développer
l’extraction de minerais dans les fonds marins. On verra cela plus loin.


3.3. L’industrie métallurgique.

La métallurgie est la science des matériaux qui étudie les métaux, leurs élaborations,
leurs propriétés, leurs traitements. Par extension, on désigne ainsi l’industrie de la
fabrication des métaux et alliages, qui repose sur la maîtrise de cette science.

L’industrie métallurgique désigne donc l’industrie d’élaboration et de transformation
des métaux, et comprend
− La métallurgie primaire ; c’est la transformation des matériaux naturels, donc des
minerais, en métal.
− La métallurgie secondaire ; c’est l’élaboration de matériaux utilisables par l’industrie,
qui comprend la réalisation d’alliages, les traitements thermomécaniques (laminage,
trempe, revenu), la mise en forme en semi-produits (tôles ou profilés par exemple).

Organisation et activités

La métallurgie recouvre un large éventail d’activités industrielles :
− l’extraction du minerai et sa première transformation ; c’est la minéralurgie,
− le recyclage des métaux ;
− la fonderie : hauts-fourneaux et affinage ;
17
− la fabrication de produits bruts, tôles, poutrelles, etc., par les laminoirs ;
− la transformation des produits bruts en produits semi-finis ;
− la fabrication de matériel et de produits finis pour l’industrie, le bâtiment et
le transport.

L’industrie de la métallurgie s’est organisée en trois spécialités principales. Chacune
demande une spécialisation différente des deux autres. Il y a, d’une part, la métallurgie du
fer et, d’autre part, celle des métaux non ferreux, lesquels se divisent en métaux précieux,
comme l’or, et non précieux, comme l’aluminium :
− la production d’acier et des alliages ferreux ; c’est la sidérurgie ;
− la production des métaux non ferreux et non précieux ;
− la production des métaux précieux.


Photo n° 24 – Haut fourneau


Photos n° 25 et 26 – Laminoirs


Photos n° 27 et 28 – Produits bruts et semi-finis : poutrelles et fer à béton

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Photo n° 29 – Produits semi-finis : tôles




3.4. Les facteurs de risques sur l’approvisionnement des métaux



Tableau n° 30 – Schéma des risques sur approvisionnement

Le schéma ci-dessus met en évidence le nombre et la nature des risques qui pèsent sur
l’approvisionnement des métaux.

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4. La criticité des ressources en minerais

Définir la criticité des matériaux est un sujet délicat : Le BRGM en donne la définition
suivante : « C’est une notion variable dans le temps qui s’exprime selon deux axes : la
disponibilité de la substance et son importance économique. Elle se traduit la plupart du temps
par un signal prix qui incite les acteurs économiques à prendre des dispositions pour en
atténuer les effets, soit en augmentant la disponibilité (nouvelles ressources) soit en réduisant
les besoins (changements technologiques). Dans ce contexte la connaissance et la
compréhension de la chaine de valeurs de chaque substance revêt une importance particulière
pour l’anticipation des besoins. »

L’utilisation des minerais augmente tant en nombre qu’en quantité, de manière très
importante.
− En nombre, nous avons vu que, jusque dans les années 1970, une petite quinzaine de
métaux étaient employés. Nous en utilisons une cinquantaine de plus aujourd’hui, que
l’on classe en « métaux rares » et « terres rares ».
− En quantité, depuis la même date, il y a donc 50 ans, la production mondiale a été
multipliée par un facteur 5.

Le BRGM (Bureau de Recherches Géologiques et Minières) a fourni une courbe d’évolution
des productions sur longue durée (un siècle), pour chacun des métaux. Ce n’est pas très facile
à lire, car il y a beaucoup de courbes, mais c’est globalement très parlant !
C’est d’autant plus significatif que ces courbes sont comparées à la courbe de la démographie
mondiale, en rouge, qui, pour le coup, paraîtrait presque plate…


Courbe n° 31 – Evolution de la production mondiale de minerais, par nature, sur un siècle

Nous verrons plus loin l’usage qui est fait de ces divers minerais, mais on sait déjà que
l’explosion des demandes en minerais conduit à un épuisement certain des ressources, à
brève échéance.

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La croissance démographique et économique mondiale est telle qu’il va falloir extraire dans
les 20 ans à venir autant de minerais que depuis les débuts de l’histoire de l’humanité ( !).
D’ores et déjà, la disponibilité de certains minerais est jugée critique, et le tableau périodique
suivant indique quels sont les éléments les plus critiques.


Tableau n° 32 – Tableau périodique indiquant l’état de criticité des éléments


Le BRGM a présenté cette criticité sous une forme permettant d’en appréhender le degré
d’importance. Elle figure sur un schéma en deux dimensions, en fonction du risque sur leur
approvisionnement en abscisse, et de leur degré d’importance stratégique dans l’industrie en
ordonnées. La criticité augmente du vert vers le rouge.


Schéma n° 33 – Evaluation de la criticité de certains métaux

21
Cette criticité des matériaux, se traduit bien évidemment sur les prix, ce qui donne un autre
indice.


Courbe n° 34 – Evolution de l’indice des prix des métaux de base sur 50 ans

De son côté, l’Union Européenne a établit une liste de matériaux critiques pouvant être inclus
dans cette catégorie : Il s’agit là, de minerais métalliques ou non.

La disponibilité géologique n’a pas été prise en compte comme critère de criticité dans le
cadre de l’étendue de cette étude, mais plutôt un risque de baisse d’approvisionnement (et
ses conséquences sur l’économie) plus élevé pour les 41 matières premières sélectionnées
que pour les autres matières premières. Deux types de risques ont été pris en compte :
− la disponibilité : basée sur la stabilité politico-économique des pays producteurs, le
niveau de concentration de la production, les possibilités de substitution et le taux de
recyclage.
− la protection de l’environnement : l’évaluation des impacts sur l’approvisionnement en
matières premières causé par la mise en oeuvre de mesures de protection de
l’environnement dans des pays de faible performance environnementale.

L’UE a donc identifié en 2014 :
− 14 minerais particulièrement critiques : (par ordre alphabétique)
Antimoine, Beryllium, Borate, Cobalt, Fluorine, Gallium, Germanium, Graphite, Indium,
Magnésium, MGP (métaux du groupe platine), Néodyme, Niobium, Tantale, Tungstène
− 12 minerais à haute importance économique :
Aluminium, Bauxite, Chrome, Fer, Magnésite, Manganèse, Molybdène, Nickel, Rhénium,
Tellurium, Vanadium, Zinc
− 14 autres minerais critiques :
Argent, Argiles, Barytes, Bentonite, Borate, Cuivre, Diatomite, Feldspath, Gypse, Calcaire,
Lithium, Perlite, Silice, Talc

22

Schéma n° 35 – Criticité des minerais selon l’Union européenne



Ce que l’on peut conclure de ces éléments, c’est qu’un grand nombre de matériaux sont déjà
considérés comme critiques, alors que nombre de pays très peuplés sont en plein
développement, particulièrement dans l’Asie du Sud-Est, et en début de développement
comme en Afrique, mais que

Tout semble devoir se régler par une diversification de la provenance des
approvisionnements, une substitution de matériaux pour satisfaire les besoins ou une
économie de matériaux résultant de progrès technologiques.

L’épuisement des ressources ne semble pas apparaître comme un élément critique, ce que je
trouve étonnant…


23
5. Les métaux majeurs

Je ne m’attarderai pas sur l’emploi qui est fait de ces matériaux ; ils sont utilisés dans
l’industrie depuis très longtemps, et sont nécessaires à toutes les productions industrielles.
Tout le monde peut constater leur emploi, et en dresser une liste ne présenterait pas
d’intérêt particulier.

Une exception cependant concernant le fer, qui n’est d’ailleurs jamais utilisé en tant que tel.
On utilise un alliage de fer et de carbone (dosé à moins de 1,8 %), nommé acier, qui peut
subir divers traitements mécaniques ou thermiques. Il existe donc, selon les dosages en
carbone et les traitements subis, divers aciers de qualités différentes selon les usages que
l’on veut en faire.
On parlera donc de minerai de fer, mais de production et d’utilisation d’aciers :

Selon le dosage en carbone, on aura des aciers doux (0,15% à 0,25%), des aciers demi-doux
(0,25% à 040%), des aciers demi-durs (0,40% à 0,60%), des aciers durs (0,60% à 0,70%).
Selon l’objectif de transformation, on fera des aciers moulés, coulés, tréfilés ou laminés.
Mais encore des aciers spéciaux, inoxydables, rapides, alliés (à d’autres métaux tels le nickel
ou le cuivre), etc.

Bien entendu, le métal le plus employé, et de très loin, est l’acier sous toutes ses formes.
Sa consommation, en tonnage, est trente fois plus importante que celle de l’Aluminium,
pourtant le second métal le plus employé.

Le premier consommateur d’acier est le domaine du bâtiment et des travaux publics, sous
forme de fers à béton, de poutres, poutrelles, profilés et bardages, mais aussi de tuyaux et
canalisations diverses.
Le second consommateur d’acier est l’industrie automobile pour un emploi sous toutes ses
formes. En effet, on retrouve le matériau phare dans la carrosserie, le moteur, la direction, le
châssis, ou encore dans la carcasse du pneu. Les statistiques dévoilent que l’acier représente
plus de la moitié du poids d’une voiture finie.
Le domaine médical apprécie lui aussi les propriétés de l’acier, notamment sous forme inox.
Neutre par rapport au tissu humain, ce dernier est ainsi utilisé pour les prothèses, les
aiguilles, ou encore les bistouris servant à opérer.

Consommation des métaux
Leur niveau de consommation actuel est très élevé : Ci-après, production annuelle en
millions de tonnes des dix plus grands métaux industriels, produits à plus d’un million de
tonnes chaque année. Chiffres de 2017.

o Minerai de fer : 1.800 Mt Quasiment dans toutes les activités sous la forme
d’acier (alliage fer-carbone)
o Aluminium : 58 Mt Construction, emballage, aéronautique, transports
o Chrome : 21 Mt Alliages inox, chimie
o Cuivre : 20 Mt Applications électriques
o Manganèse : 14 Mt Alliage d’aciers
o Zinc : 13 Mt Galvanisation, chimie
o Titane : 5 Mt Alliage pour aéronautique,
o Silicium : 5 Mt Allié à l’aluminium, semi-conducteur
o Plomb : 5 Mt Batteries
o Nickel : 2 Mt Aciers alliés, batteries

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Non seulement les consommations sont importantes, mais le rythme d’augmentation de
cette consommation est relativement élevé. Il est régulier pour la plupart des minerais, mais
marque une évolution très marquée à partir de l’an 2000 pour le fer (acier) et l’aluminium.
C’est l’impact du décollage économique de la Chine, et d’une croissance extraordinaire.


Courbe n° 36 – Production mondiale d’acier- Courbe n° 37 – Production mondiale de métaux majeurs


Epuisement des ressources
L’épuisement des ressources minières ne signifie pas que la planète ne recèle plus de
quantités diffuses mais que l’exploitation du matériau en question à l’échelle industrielle
n’est plus possible. Les estimations varient au fil du temps en fonction des découvertes et des
réévaluations de réserves.

L’évolution de la consommation va se poursuivre de manière soutenue par les pays en voie
de développement rapide et très peuplés.
Pour les trois principaux métaux majeurs, les prévisions de base indiquent une
augmentation de facteur 2,5 à 3,5 en trente ans depuis l’an 2000. Donc en moyenne un
triplement de la consommation.


Courbes n° 38 – Projection de la consommation des 3 principaux métaux de base


A ce rythme, on estime que les gisements métalliques à la base de notre économie moderne,
auront pour l’essentiel été consommés entre 2022, fin de l’argent, et 2140, fin de l’aluminium
et du titane.

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Dates prévisibles de fin de production des principaux minerais :
o 2022 Argent
o 2025 Or – Zinc – Chrome
o 2030 Plomb– Etain
o 2040 Cuivre – Tantale
o 2050 Nickel
o 2065 Manganèse
o 2075 Fer
o 2140 Titane – Aluminium

C’est un sujet dont on ne parle pas beaucoup dans les médias ; c’est pourtant un sujet
majeur, me semble-t-il.

A la question de l’épuisement des ressources terrestres qui risque de faire grimper les
prix, voire de menacer une économie (l’Union européenne est dépendante à 90 %
d’importations), s’ajoute un problème géopolitique majeur : les métaux sont
majoritairement localisés dans un nombre limité de pays. Le cuivre est principalement
produit au Chili, l’argent au Mexique, l’or en Australie et en Afrique du Sud, le zinc en Chine
et en Australie tandis que le cobalt se concentre en République Démocratique du Congo.

Bien sûr, pendant une certaine période nous tiendrons avec le recyclage. Les volumes de
métaux extraits et transformés sont importants, mais nous devrons nous attacher à ne pas
gaspiller cette ressource.

Cependant, il faut prendre conscience que nous ne pourrons pas consommer autant que
par le passé ; d’une part, à chaque cycle de recyclage, une partie de la matière sera perdue,
et d’autre part, l’épuisement des ressources minérales est concomitant avec celui des
ressources énergétiques. Or, le pétrole permettait la production d’un grand nombre de
matériaux complémentaires (ou de substitution) aux métaux, matériaux qui finiront par
faire défaut.


Figure n° 39 – Date prévisible d’épuisement des réserves – Courbe n° 40 – Ratio PIB / Conso. de métal



26
Par ailleurs, on rejoint la problématique des énergies fossiles abordées dans le dossier n°3.
On constate que le PIB est proportionnel à la consommation des métaux non précieux,
comme il l’était avec la consommation d’énergie ; cela est d’ailleurs facilement
compréhensible. Notre société de consommation est basée sur l’énergie et la matière.
De ce fait, la baisse de consommation des matériaux, comme celle de l’énergie, conduit à
une récession imparable.

Le calendrier n’est pas connu, et il est difficile de le concevoir. Mais avec le volume de
consommation actuel, et plus encore avec le volume d’augmentation prévu, il n’est pas
possible de se tromper de plusieurs dizaines d’années. Cette récession s’engagera
rapidement mais à un niveau acceptable, puis s’accélèrera pour atteindre un niveau
problématique dans quelques décennies.
La fin du siècle s’annonce déjà difficile, mais après c’est vraiment l’inconnu…


27
6. Les métaux rares.

Nous avons vu plus haut que nous inclurons dans cette terminologie, les métaux rares et les
terres rares.

6.1. Utilisation des métaux rares.

Ces métaux sont indispensables aux trois transitions technologiques en cours ; la
transition numérique, la transition énergétique et la transition de la mobilité.
Il faut y rajouter les besoins de la Défense, pour les armes modernes.

L’une des applications les plus réputées des terres rares est liée à leurs propriétés
magnétiques, en particulier celles du néodyme, du praséodyme, du dysprosium, du
samarium ou encore du gadolinium. Celles-ci ont permis de développer des aimants
permanents et particulièrement efficaces, que l’on retrouve aujourd’hui partout : des
moteurs électriques aux générateurs d’éoliennes, des systèmes d’enregistrement
magnétique haute densité aux appareils d’imagerie médicale. La transition énergétique
repose ainsi aujourd’hui en grande partie sur le développement de technologies
exploitant ces éléments : supraconducteurs à haute température, céramiques et alliages
en milieux extrêmes, batteries alcalines équipant les véhicules électriques hybrides.
On utilise par ailleurs les métaux rares dans l’optique pour les lasers monochromatiques
de grande puissance mais également dans l’optoélectronique pour leurs propriétés de
photoluminescence. Enfin, les propriétés chimiques de l’oxyde de cérium, un des
lanthanides, sont particulièrement utilisées pour la régulation des polluants dans les pots
catalytiques, la production d’hydrogène par transformation de la biomasse ou encore le
polissage des verres.

Ces matériaux permettant d’avoir des aimants «permanents» qui ont une force
d’aimantation très importante dans un très petit volume, sont donc utilisés dans des
systèmes qui exigent une miniaturisation : il peut s’agir d’un système de guidage de
missiles balistiques mais aussi d’un aspirateur haut de gamme ou du disque dur d’un
ordinateur. Ce dernier peut contenir jusqu’à 4,5 grammes de terres rares, un chiffre
modeste mais qui, multiplié par des centaines de millions d’unités, devient une quantité à
prendre en compte à échelle industrielle.
Dans le secteur des énergies renouvelables, l’éolien offshore est très consommateur
d’aimants permanents.

Ces matériaux sont essentiels dans les matériels de haute technologie, que l’on peut
grossièrement classer en quatre catégories (non exhaustives), comme citées plus haut :
• Matériels électroniques des TIC (Technologies de l’Information et de la
Communication) ; il s’agit des ordinateurs, tablettes, smartphones, écrans plats, et
tous les objets connectés. Il y en aurait 24 Milliards en 2020, plus de trois par
habitant !
• Matériels liés aux énergies renouvelables ; il s’agit des panneaux photovoltaïques,
des turbines d’éoliennes, etc. Le besoin de terres rares est de moins en moins fort
dans ce domaine, et des solutions de substitutions se mettent en place.
• Matériels de stockage d’énergie par batterie pour les véhicules électriques ou
hybrides.
• Matériels de l’industrie de défense ; on les retrouve dans les capteurs de radars et
sonars, et dans les systèmes d’armes et de ciblage.

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Schéma n° 41 – Utilisation des terres rares

Quelques exemples et commentaires :

Le smartphone
Notre téléphone portable est riche en métaux précieux comme l’or, l’argent et le
palladium, mais aussi en métaux rares comme le lithium, le tantale, le cobalt.
Il est également composé de métaux majeurs, cuivre, métaux ferreux, etc.
De sa fabrication à sa destruction, un téléphone portable épuise autant de matières
premières que l’extraction de 7,4 kg de cuivre, consomme autant d’énergie que 57 km en
avion, émet autant de gaz à effet de serre que 85 km dans une voiture moyenne.
La récupération et le recyclage de ces matériaux sont donc aujourd’hui plus que
nécessaires.

Certes, les quantités ne sont pas très importantes par nature de matériau, mais il faut
reconnaître l’extrême complexité de ce type de matériel.
On peut aussi appréhender la difficulté du recyclage, si la conception ne l’a pas prévue
sous forme de sous-ensembles standardisés.


Figures n° 42 – Utilisation de terres rares dans un smartphone

En 2020, on estime qu’environ 6 Milliards de smatphones sont utilisés dans le monde, et
qu’ils représentent environ 80% du trafic des données mobiles.

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L’ordinateur portable.

Ci-dessous, composition détaillée d’un ordinateur portable en deux schémas :
− Matériaux majeurs et plastiques, qui interviennent pour 99,81 %
− Matériaux en très faibles quantités, comprenant des métaux rares et des terres rares
(pour environ 4,5 grammes).


Figures n° 43 et 44 – Composition d’un ordinateur portable – nature et poids des composants

Comme pour le smartphone, on ne parle pas de quantités importantes par appareil, mais
le nombre d’appareils vendus (environ 280 millions par année) finit par conduire à des
quantités importantes, environ 1.300 tonnes de terres rares, soit 1% de la production.
On reste également impressionné par le nombre d’éléments entrant dans la composition
de cette petite merveille de technologie…

La voiture électrique


Figures n° 45 – Utilisation de terres rares dans un véhicule hybride

Cette photo (de 2011) est régulièrement présentée pour justifier un rejet de la voiture
électrique ou hybride. Il est vrai que ce véhicule emploie un certain nombre de métaux
rares, qui ne sont pas tous des terres rares, d’ailleurs.
Mais il faut constater que le message ne convient pas pour un véhicule électrique ; il faut
donc nuancer le propos :

30
− Additif au carburant diesel et convertisseur catalytique – Il n’y en a pas dans un
véhicule 100% électrique, seulement dans un véhicule hybride.
− Batterie NiMH (Nickel Métal-Hydrure) – Aujourd’hui, les batteries utilisées sont des
batteries Lithium-ion. La critique est justifiée pour la batterie.
− Micromoteurs, des ventilateurs aux lève-vitres. On retrouve bien des aimants
permanents, qui contiennent 30 % de terres rares, mais ce n’est pas spécifique aux
véhicules électriques, c’est le cas pour tous les véhicules.
− Pare-brise anti UV, vitres et miroirs, écran ACL, capteurs des composants : tout cela
n’est pas propre aux véhicules électriques, mais s’applique à tous les véhicules.
− Moteur et générateur électrique – Les constructeurs automobiles cherchent à réduire
leur dépendance aux terres rares, à l’instar de Toyota, qui a remplacé en partie le
néodyme des aimants de son moteur électrique par du cérium et du lanthane, plus
courants, et de Renault, qui a préféré, pour sa Zoé, un rotor à cuivre bobiné, plus
encombrant mais sans terres rares.

En définitive, le seul vrai problème que présente la voiture à moteur électrique par
rapport à la voiture à moteur thermique se situe au niveau de la batterie.
Pour comparer les véhicules thermiques aux véhicules électriques, à usage identique, il
convient donc d’estimer les avantages de la propulsion électrique, avec les inconvénients
d’une batterie de puissance bien supérieure.
La voiture hybride, quant à elle, si elle cumule les avantages d’usage des deux systèmes,
en cumule les inconvénients sur le plan environnemental.

Les accumulateurs (ou batteries) lithium-ion.
Aujourd’hui, ils équipent la plupart des voitures électriques, et utilisent du lithium et du
cobalt.
Le principe est le même que celui des batteries classiques des véhicules à moteur
thermique : Faire circuler des électrons afin de créer une différence de potentiel entre
deux électrodes : une positive (la cathode) et une négative (l’anode), la première étant
généralement composée d’un oxyde de métal, la seconde de graphite. Cette réaction est
rendue possible grâce à un liquide conducteur, appelé électrolyte et assurant le transfert
d’ions de lithium (ions Li+), dans lequel les électrodes sont immergées.
Mais déjà, plusieurs alternatives sont à l ‘étude pour que l’on puisse se dispenser de
l’utilisation du lithium ou de toute terre rare. En particulier une batterie tout solide :
l’électrolyte liquide serait remplacé par une plaque de verre ou de gel. Elle se
dispenserait du lithium, mais également du cobalt. A suivre…

Le solaire photovoltaïque
Dans le domaine du solaire photovoltaïque, très peu de métaux rares sont
utilisés. Selon la technologie : le tellure, le cadmium, l’indium et le gallium.
En revanche, aucun de la famille des terres rares ne figurent plus dans la
composition des panneaux actuels.
« 94 % du marché mondial est assuré par des technologies à base de silicium
cristallin, du sable purifié, assure Alexandre Roesch, délégué général du Syndicat
des Énergies Renouvelables (SER). Le silicium est la deuxième matière la plus
présente dans la couche terrestre. » Il semble que seule la technologie
photovoltaïque dite de CIGS, qui offre de meilleures puissances énergétiques,
utilise des terres rares telles que l’indium et le gallium.



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L’éolien
Les terres rares sont majoritairement utilisées dans les aimants permanents de l’éolien
en mer, ces terres sont le néodyme et le dysprosium. Les éoliennes sont très hautes pour
capter les vents puissants et il faut donc alléger leur poids. D’autre part, l’aimant
permanent nécessite une maintenance beaucoup plus facile qu’un système à bobinage,
ce qui est très appréciable en milieu marin.
Une éolienne géante de 7 MW peut comporter jusqu’à 4 tonnes d’aimants, qui requièrent
plus d’une tonne de terres rares.
Les éoliennes terrestres peuvent aussi en utiliser – c’est le cas de 3 % des installations en
France –, mais des alternatives existent. Il serait par exemple possible de fabriquer des
génératrices asynchrones ou génératrices synchrones sans aimant permanent,
permettant de réduire, ou d’éviter, le recours à ces terres rares.


6.2. Production des métaux rares.

La production mondiale de terres rares était de 144.000 tonnes en 2014, pour une
consommation d’environ 120 .000 tonnes.

En 2010, la production était de 130.000 tonnes ; le schéma suivant montre l’évolution de
la production depuis 1956, et la répartition par pays producteur, Chine, Etats-Unis et
Reste du monde. C’est très éclairant !


Courbes n° 46 – Production mondiale de terres rares – 1956 / 2010


En 1985, la Chine ne produisait pas.
Jusque dans les années 1980, par l’activité de l’installation industrielle Rhône-Poulenc de
La Rochelle, la France purifiait 8 à 10.000 tonnes de terres rares, soit 50% du marché
mondial de l’époque. Elle disposait d’un savoir faire chimique remarquable, et une forte
prééminence commerciale. Elle a mis fin à son activité sous la pression de mouvements
écologistes.

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La Chine a décidé de prendre le leadership de ce marché, au prix d’un dumping
économique, d’un dumping social et d’un dumping environnemental ; les autres
productions se sont mises à décliner, pour ne pas dire s’effondrer. Elle a finalement
produit à des coûts imbattables, poussant à l’arrêt les productions des autres pays.
Les Etats-Unis ont fini par arrêter, comme la France l’avait fait auparavant.


Photo n° 47 – Mine de terres rares en Chine

La photo ci-dessus montre ce qu’est un environnement de mine de terres rares, avec la
destruction et la pollution des sols, et des eaux.

Mais la Chine n’est pas le seul pays à exploiter des métaux rares, ou des terres rares dans
des conditions douteuses, pour ne pas dire insupportables :
L’Afrique produit deux éléments centraux dans l’électronique moderne : le tantale, qui
sert d’isolant dans les condensateurs, et le cobalt, qui tient un rôle crucial dans les
performances des mémoires magnétiques (disques durs), des piles et batteries destinées
aux appareils portables, téléphones, ordinateurs, etc.

La RDC, République Populaire du Congo exploite ces deux éléments :
− le cobalt, dont elle détient la moitié des réserves mondiales, et
− le coltan (pour le minerai associant colombite et tantalite dans des proportions
variables) dans la région du kivu. Du coltan, on extrait le néobium et le tantale.
Ce pays fait travailler ses populations, dont des enfants, dans des conditions inhumaines
condamnables :


Photos n°48 et 49 – Travail des enfants en RDC

33
Mais il y a plus encore. L’appropriation du coltan a déclenché une guerre meurtrière au
Kivu. Ci-après, article de Médiapart, de septembre 2012, suite à un reportage de Daniel
Mermet en RDC :
«La guerre (surtout dans les deux Kivu) a souvent été décrite comme une guerre
«ethnique». Aujourd’hui, tout le monde est presque unanime que le « coltan » est au cœur
de la guerre en République démocratique du Congo (RDC), l’un des conflits les plus
meurtriers depuis la Seconde Guerre mondiale. Plusieurs rapports, dont celui des Nations
Unies, des ONG et les témoignages des évêques et missionnaires qui travaillent dans cette
région, ont mis à nue la réalité de la guerre comme un conflit beaucoup plus vaste qui a des
implications économiques et stratégiques qui vont bien au-delà du Congo et de l’Afrique
même. Les différents mouvements de guérilla qui agissent dans les deux provinces
congolaises se disputent le contrôle des gisements miniers. Il y a derrière ces mouvements
plusieurs états africains, dont le Rwanda, l’Ouganda et le Burundi. Certaines
multinationales telles que Nokia, Alcatel, Apple, Nikon, Ericsson sont mises en cause de
financer indirectement les guerres par les taxes payées aux groupes rebelles. Doit-on
continuer à parler simplement de guerre « ethnique » ou « tribale » ? N’est-ce pas là une
manière d’occulter la réalité et, ce faisant, se rendre complice de ceux qui veulent continuer
à exploiter impunément cette région au détriment de ses habitants ? »


Photo n° 50 – Mine de coltan au Kivu – RDC

Je sais que l’on n’y peut rien à notre niveau, mais nous devons être conscients du
véritable prix de nos smartphones et autres objets connectés.


6.3. Contraintes environnementales.

Pour avoir ces métaux rares, il faut les extraire de la roche. Tout comme l’extraction du
charbon, celle des métaux rares est très polluante. Cette opération « de raffinage » porte
très mal son nom, puisqu’elle nécessite de broyer les roches, puis d’utiliser une pléthore
de réactifs chimiques, tels que des acides sulfuriques et nitriques…

Cette opération doit être répétée environ 10 fois pour obtenir un concentré de terres
rares pures (quasi 100 %) ! Les métaux rares ne sont pas radioactifs en eux-mêmes,
certes, mais ils sont naturellement associés dans la croûte terrestre à des minerais
radioactifs. Le raffinage produit alors des radiations dans des proportions non
négligeables. Bien que les déchets générés par l’exploitation des métaux rares présentent
un faible taux de radioactivité selon l’agence internationale atomique, ces déchets
nécessiteraient normalement d’être isolés pendant plusieurs centaines d’années.
34
De plus, la purification de chaque tonne de terres rares requiert l’utilisation d’au moins
200 mètres cubes d’eau qui se charge au passage d’acides et de métaux lourds…

Les conditions d’exploitation et de production des terres rares sont donc sujettes à
controverse. Les normes environnementales, les coûts de production élevés et les faibles
concentrations en métaux rares de certains gisements ont conduit des pays
industrialisés à abandonner progressivement cette production polluante et peu rentable.

Ces derniers ont, en quelque sorte, décidé de délocaliser leur pollution, et les chinois,
loin de s’en plaindre, l’ont accueillie à bras ouverts. Un industriel canadien, cité par
Guillaume Pitron, s’exprime ainsi : « Nous pouvons les remercier pour les dégâts
écologiques qu’ils ont subis afin de produire ces métaux à notre place. »
Au final, nous avons un pays sale et des pays qui paraissent propres.

Ces pays ont donc dû s’approvisionner auprès de fournisseurs étrangers, notamment en
Chine, contribuant ainsi à la mise en place de monopoles.

Les principales concentrations de minerai de terres rares se trouvent en Chine
(Mongolie intérieure), aux États-Unis, et en ex-URSS. Quelques pays complètent la liste.



Carte n° 51 - Localisation des principaux fournisseurs de métaux rares.


Photo n° 52 – Dégâts environnementaux

35
A 20 km de Baotou, cité industrielle de Mongolie intérieure, se cache un lac toxique.
Créé par le barrage d’une rivière, c’est devenu un dépotoir pour les usines productrices
de terres rares. L’extraction et la dissolution de ces minéraux produisent des déchets
extrêmement toxiques, néfastes pour la santé de l’homme et pour l’environnement.


Photos n° 53 et 54 – Lac et rejets toxiques radioactifs de baotou

Dans une usine de la ville, on produit de l’oxyde de cérium utilisé dans les écrans tactiles
pour les Smartphones et tablettes. Dans une autre, on fait du néodyme servant à colorer
le verre, à la fabrication de lasers, et dans les aimants puissants mais légers. Ils sont ainsi
insérés dans les écouteurs, les microphones des téléphones portables ou dans les
disques durs des ordinateurs.

Dans les eaux de ce lac de 10km2, se trouvent des substances chimiques toxiques mais
également des déchets radioactifs, comme du thorium, à l’origine de cancers du
pancréas, du poumon et du sang.

Cette région dispose du plus gros gisement connu au monde de terres rares. Depuis des
années, les associations de défense de l’environnement y dénoncent l’impact des terres
rares : rejets chimiques toxiques, notamment de thorium et d’uranium, radioactifs, dans
l’air, l’eau et les sols qui peut provoquer chez l’homme et l’animal des cancers et
malformations de naissance.

Les mines de Baogang, premier producteur en Chine de terres rares, sont situées à une
centaine de kilomètres de Baotou. A cause de cette activité, Dalahai, un village
avoisinant, est surnommé le « village du cancer » : 66 villageois ont décédé aux suite
d’un cancer entre 1993 et 2005. Les taux de thorium dans le sol de Dalahai seraient
trente-six fois plus élevés qu’à Baotou.



36
6.4. Considérations géoéconomiques.

Deux schémas résument la situation (les chiffres peuvent différer du fait des dates de
chacun des schémas ; l’idée reste la même) :


Schéma n° 55 – Répartitions ressources et production de terres rares

La Chine possèderait environ la moitié des réserves de terres rares, et assure 90 % de la
production de ces dernières. C’est une situation de quasi-monopole, qui place l’ensemble
des pays en situation de dépendance.

La Chine a commencé à réduire ses exportations de terres rares depuis quelques années,
et de manière significative, dans le but d’imposer l’implantation d’usines exploitant ces
minerais sur son sol pour en tirer économiquement une meilleure valorisation.
Selon un article du journal « Le Monde » :
« La Chine avait décidé des quotas d’exportation à ses terres rares à partir de 2005. Pour
Pékin, l’objectif avancé était de « protéger ses ressources naturelles et leur assurer un
développement économique durable ».
Américains Européens et Japonais se sont sentis discriminés par ces mesures de quotas et
ont porté plainte devant l’OMC, qui a mis en place en 2012 un panel, chargé de trancher le
litige.
Réagissant à cette décision, Bruxelles a indiqué dans un communiqué publié à Genève que
l’OMC « a tranché en faveur de l’UE ». « Cette décision soutient la position de l’UE et de ses
co-plaignants, le verdict est clair, les restrictions aux exportations ne peuvent pas être
imposées pour des soi-disant raisons de protection de l’environnement », alors qu’il n’y a
aucune restriction pour ces mêmes métaux sur le marché national, indique l’UE.
Les Etats-Unis ont aussi salué la décision de l’OMC. »

Une autre raison à ces restrictions serait de regrouper les producteurs pour mieux
contrôler les effets polluants sur l’environnement, ce qui devrait conduire à la fermeture
de petites exploitations artisanales les plus polluantes et réduire la production.
Mais dans le même temps, sa demande intérieure, qui atteint déjà 60% de la demande
mondiale, croît de 20% par an et sa production va diminuer, pour des motifs
environnementaux, ce qui va encore réduire les exportations et ainsi tendre le marché
des terres rares.
37
Pour contourner cette décision réduisant les exportations, le marché noir s’installe afin
de répondre à une demande mondiale croissante. Des mines illégales alimentent ce
marché noir, au mépris des conditions de travail et de l’environnement (pollution des
sols, des eaux).

Les industries étrangères à la Chine commencent à pâtir de cette situation, alors que
celles ayant accepté de s’installer sur le sol chinois bénéficient de l’accès à ses mines ; la
décision d’Apple de fabriquer les Ipods, Iphones et autres Ipads en Chine n’est
certainement pas un hasard

De même, la Chine est devenue en 2010 le premier fabriquant de panneaux solaires et de
turbines éoliennes au monde, deux industries grosses consommatrices de ces éléments :
la Chine assure 60% de la capacité mondiale de production de cellules photovoltaïques,
et 50% de la capacité mondiale de production d’éoliennes.

Une autre représentation schématique permet de comprendre la maîtrise de la Chine sur
les approvisionnements mondiaux. C’est le taux de production minière de la Chine, en
pourcentage de la production mondiale pour les vingt-huit matières premières dont elle
est le premier producteur.


Graphique n° 56 – Taux de production minière chinoise / mondiale

Mais la Chine ne se contente pas d’être le premier producteur mondial avec ses
ressources nationales. Depuis une vingtaine d’années, elle a entrepris de s’assurer une
part importante des ressources des autres pays, par une politique commerciale
agressive tous azimuts.

On trouvera ci-après le résultat après dix ans d’action. Je n’ai pas de données plus
récentes et c’est bien dommage, car on sait que cette politique s’est poursuivie et
accélérée dans la dernière décade.
En attendant, voici une carte sur laquelle figure les prises de participation dans les
industries minières mondiales. La Chine domine dès 2010, l’activité minière de
l’Australie, et prend une part active dans celle du sud de l’Afrique et dans celle du Canada
et de l’Asie centrale.

38

Cartes n° 57 – Prises de participation chinoises dans l’industrie minière mondiale

Aux USA, le président Donald Trump a pris conscience de la vulnérabilité des entreprises
américaines et de la sécurité-défense du pays, face à l’enjeu majeur que représentent les
terres rares.
Le retrait des USA des accords de Paris n’est pas étranger à la stratégie de Trump qui
veut appliquer au secteur minier son slogan “America First” en autorisant l’exploitation
de minerais critiques et stratégiques et en taxant à hauteur de 30% les panneaux
solaires importés de Chine, de Corée du sud et du Mexique…
En plus de sa réforme fiscale qui vise les énergies renouvelables et protège les
hydrocarbures, le président Trump a annoncé par décret, fin décembre 2017, une série
de mesures en faveur de la relance de l’extraction de minerais critiques sur le sol
américain : terres rares, cobalt, graphite, rhénium, platinoïdes, tantale, lithium…
Les États-Unis pourraient même se muer en exportateur de ces minerais. Ce qui
permettrait aux industriels européens, tout aussi dépendants de la Chine, de diversifier
leurs approvisionnements. Le décret de Trump ordonne notamment la mise à jour des
données minières, la relance de l’exploration sur le sol américain et l’amélioration des
technologies de recyclage.

À défaut de pouvoir relancer une exploration minière ambitieuse, la culture minière
ayant fortement reculé en Europe, l’Union Européenne doit investir dans des matériaux
alternatifs et dans la constitution de filières de recyclage pour que la transition
énergétique ait des retombées tangibles en termes d’emplois industriels sur son
territoire.

En Europe, au Japon, aux Etats-Unis, bon nombre de fabricants d’aimants de terres rares,
impactés par les quotas instaurés par Pékin, ont soit déposé le bilan, soit transféré leurs
usines en Chine.
Notre dépendance aux métaux rares devrait s’accroître dans les années à venir. Des
études prédisent qu’à l’horizon 2030 la demande de germanium va doubler, celle du
dysprosium et de tantale quadrupler, quand le marché du cobalt pourrait être multiplié
par 24 !

39
Aujourd’hui, l’intérêt stratégique de ces éléments pousse les dirigeants et les industriels
à repenser les modes d’approvisionnement de ces métaux et à leur chercher des
produits de remplacement.
La dépendance des industries high-tech européennes aux terres rares incite même la
France et l’Europe à engager une réflexion sur la reprise de l’exploitation sur leur sol.

Certains spécialistes, comme le journaliste Guillaume Pitron, auteur de l’ouvrage de
référence « La guerre des métaux rares », pensent qu’il faudrait rouvrir des mines en
France car l’enjeu n’est pas seulement de réduire notre dépendance dans
l’approvisionnement des métaux et terres rares, mais aussi de rompre avec une certaine
hypocrisie : les pays occidentaux se proclament au top de l’écologie tout en consommant
en abondance des biens dont la fabrication cause d’importants dégâts
environnementaux dans les pays qui en assurent la production.
Selon Guillaume Pitron, rouvrir des mines en France serait une façon d’assumer notre
part du fardeau dans la transition écologique et prendre conscience que nos modes de
consommation ont un impact direct sur l’environnement qui nous entoure

En attendant, l’Europe est entièrement dépendante de l’étranger pour
l’approvisionnement en matériaux stratégiques essentiels dans l’industrie des
technologies du futur.
L’Europe ne produit que 3% des matières premières qu’elle utilise.
Le tableau suivant donne le taux dépendance de l’Europe aux matières premières non
énergétiques. En rouge, apparaissent les matières premières pour lesquelles la Chine est
le premier producteur.


Tableau n° 58 – Taux de dépendance de l’Europe aux matières premières non énergétiques

Pour conclure je citerai Guillaume Pitron : « Exploiter ses propres ressources pour soi-
même ou en garantir les livraisons par delà les mers : cela fait des millénaires que ces deux
règles élémentaires agencent toute stratégie d’indépendance énergétique. Or, aucune d’elle
n’a été appliquée jusqu’à ce jour pour les métaux rares… Dépendre totalement des autres et
le revendiquer : ce qui apparaissait il y a peu comme une politique parfaitement suicidaire
est devenu la chose la plus communément admise. »


40
6.5. La réaction de l’Union Européenne.

La Commission Européenne a mandaté un groupe d’expertise sur les métaux rares,
ERECON (European Rare Earth Competency Network) dans le but de définir une
politique assurant l’approvisionnement de l’Europe en métaux rares. 3 groupes de
réflexion se penchent respectivement sur :
− l’exploitation des terres rares en Europe
− le recyclage des terres rares dans l’UE
− les pistes alternatives à la raréfaction des métaux rares
Il ne faudra cependant pas oublier que l’extraction et le traitement des terres rares sont
des activités extrêmement polluantes et nocives pour la santé. C’est précisément une des
raisons qui avaient poussé les pays occidentaux à abandonner ces activités aux chinois.

Un comité d’experts a rédigé un rapport concernant 41 matières premières indispensables
aux nouvelles technologies (électronique, métallurgie, technologies vertes) d’ici à 2030.
14 d’entre elles ont été qualifiées de critiques puisqu’elles font l’objet d’importation à
95% en moyenne pour l’année 2006, qu’elles sont très peu recyclées et que des
possibilités de substitution sont faibles. A court terme, c’est l’approvisionnement de ces
matériaux qui risque d’être remis en cause avec des conséquences désastreuses pour les
activités qui en dépendent.

Le Comité pour les métaux stratégiques

En France, le comité pour les métaux stratégiques (COMES), créé officiellement en
janvier 2011, est une structure de concertation entre les pouvoirs publics et les acteurs
économiques. Il a pour mission d’assister le ministre chargé des mines dans l’élaboration
et la mise en œuvre de la politique de gestion des métaux stratégiques, en vue de
renforcer la sécurité d’approvisionnement nécessaire à la compétitivité durable de
l’économie française. Le COMES a donc mis en place :
• un site web sur les minéraux permettant ainsi l’accès permanent aux informations
relatives aux ressources minérales ;
• un outil permettant le diagnostic de la vulnérabilité des entreprises face à
l’approvisionnement en matières premières critiques
Le Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM) est un acteur clé au sein de ce
comité.

Les enjeux

• des enjeux économiques. Le prix de métaux augmente aussi avec leur rareté ou leur
inaccessibilité, et pas seulement en fonction de la demande. Dans le cadre de
la transition écologique, l’économie circulaire invite à recycler ces ressources ainsi
qu’à les économiser et/ou à les remplacer par des alternatives quand cela est
possible ; ce qui pourrait être grandement facilité par une généralisation du principe
des écotaxes et de l’éco-conception.

• des enjeux géostratégiques. Ces produits rares sont d’une part nécessaire aux
industries impliquées par la défense et d’autre part sources de conflits pour leur
appropriation (ex Coltan en Afrique) ;

41
• des enjeux sociaux. Dans un contexte de mondialisation croissante, et de mobilité des
individus, les télécoms et les réseaux sociaux dépendent de plus en plus de ces
ressources

• des enjeux sanitaires. Plusieurs de ces métaux ou minéraux sont toxiques ou
reprotoxiques. Paradoxalement, certains sont toxiques mais également utilisés
comme médicaments (et alors également non recyclés bien que très coûteux ; le coût
moyen d’un traitement de cancer brochique varie entre 20 000 et 27 000 euros).

• des enjeux énergétiques. La production de ces métaux et de leurs composés requiert
une quantité importante et croissante d’énergie, et quand ils se raréfient il faut les
chercher plus profondément, plus loin et le minerai est parfois moins concentré. En
2012 ils ont nécessité de 7 à 8 % de toute l’énergie consommée dans le monde

• des enjeux environnementaux. Les mines dégradent l’environnement. La dispersion
de minéraux et métaux toxiques non-recyclés le dégrade aussi. Par ailleurs, les
aimants de moteurs électriques ou de turbines hydrauliques et de génératrices
d’éoliennes, ou certains composants de panneaux solaires nécessitent d’utiliser des
minéraux ou métaux rares.



6.6. Perspectives.

Les besoins en métaux rares font croître au rythme des transitions en cours, numérique,
énergétique et de la mobilité, c’est à dire à un rythme très soutenu.
Le tableau ci-après, déjà ancien,

42

Tableaux n° 59 et 60 – Taux de croissance de la production – constaté 1970/2010 et projection 2010/2030

Matériaux de substitution
Des pistes sont aujourd’hui explorées pour produire de façon moins polluante et s’affranchir
des fluctuations de prix sur les marchés. La première consiste à développer les recherches
dans le domaine de la chimie du solide afin de mettre au point de nouveaux matériaux
pouvant se substituer à ceux contenant des terres rares. Bien que difficile à réaliser pour
certaines applications reposant essentiellement sur leur configuration électronique très
particulière (la luminescence, les lasers ou le magnétisme), des recherches sont néanmoins
menées en ce sens.
Ainsi, des travaux ont montré qu’en nano-structurant des particules contenant des éléments
simples et largement disponibles comme le fer, le cobalt et le carbone, il est possible
d’obtenir des propriétés magnétiques rivalisant avec celles d’aimants permanents élaborés à
partir de métaux rares. L’objectif de réduction de l’utilisation des terres rares est également
à portée de main pour d’autres fonctions comme la catalyse en développant de nouveaux
catalyseurs bimétalliques à base d’éléments de transition ou pour les accumulateurs alcalins
avec la conception de nouveaux matériaux d’anodes sans terres rares, plus légers et résistant
bien à la corrosion.

Recyclage : alternative à l’exploitation minière
La seconde piste est celle du recyclage des objets existants pour récupérer les précieux
éléments qu’ils contiennent. Aujourd’hui, on peut considérer comme des mines hors sol les
montagnes de déchets technologiques produits par nos sociétés. Extraire et recycler les
métaux qui les composent pour pouvoir les réinjecter dans l’économie représente un enjeu
considérable sur le plan technologique.
C’est aussi une voie prometteuse pour s’affranchir des gisements miniers et de leurs
contraintes géographiques et environnementales. Ainsi, des industriels européens et
japonais se sont lancés dans des filières de valorisation en recyclant les aimants permanents
contenus dans nos produits high-tech (disques durs d’ordinateurs, haut-parleurs, petits
moteurs électriques) mais également pour d’autres filières comme les batteries nickel-métal
hydrure (NiMH), les lampes à fluorescence ou encore les poudres de polissage des verres.
Ces procédés devront toutefois rester suffisamment abordables et respectueux de
l’environnement pour être viables et compétitifs vis-à-vis de la production minière.
Pour atteindre ces objectifs, des recherches fondamentales devront être menées pour
permettre les avancées nécessaires à cette révolution dans le domaine des matériaux et nous
permettre de continuer à développer des technologies pointues mais respectueuses de
l’environnement et utile à nos sociétés modernes.

43

7. Le recyclage des métaux.

Recyclage des métaux de base.
Depuis quelques années déjà, le recyclage des métaux fait l’objet d’une attention toute
particulière, et il sera de plus en plus nécessaire avec la raréfaction des minerais.

Un équipement électrique ou électronique contient divers matériaux, comme le cuivre,
l’aluminium ou encore le verre, issus de matières minérales naturellement présentes dans la
croûte terrestre.
Lorsque l’équipement est recyclé, ces matériaux sont triés, séparés et, in fine, retransformés
en nouveaux matériaux. On régénère ainsi facilement du cuivre, de l’aluminium, etc. qui
peuvent être utilisés à la place de matériaux vierges.
Cela évite l’extraction de matières premières brutes, soit l’extraction de quantités
importantes de minerais. A titre d’exemple, pour produire des appareils à forte composante
électronique il faut mobiliser en moyenne de 50 à 350 fois leur poids en matières premières
brutes. Suivant les réserves disponibles et leur exploitation actuelle, certains matériaux sont
de plus jugés stratégiques ou critiques, comme l’or, l’argent, ou les platinoïdes qui sont
utilisés dans les cartes électroniques.


Schéma n° 61- Chaîne de recyclage de l’acier.

Taux de recyclage de certains métaux :
− Taux de recyclage en fin de vie EOL-RR (End Of Life Recycling Rate)
Rapport entre le métal fonctionnel obtenu et le métal recyclé entrant dans le cycle
− Taux de recyclage RC (Recycled Content)
Rapport entre le métal recyclé entrant dans le cycle et la production totale de métal.

EOL-RR mini RC mini
o Plomb 50% 50%
o Aluminium 50% 25 à 50%
o Or 50% 25 à 50%
o Nickel 50% 25 à 50%
o Cuivre 50% 10 à 25%
o Etain 50% 10 à 25%
o Chrome 25%
o Tantale 20%


44
Recyclage et énergie
A l’heure où l’accès à l’énergie commence à être une préoccupation majeure, il est
intéressant de comparer l’énergie dépensée pour extraire un métal natif du milieu naturel et
celle pour le recycler.
De nombreuses études scientifiques se sont attelées à cette tâche.


Tableau n° 62- Gain d’énergie dans la production d’un métal par recyclage

Le constat est donc sans appel !
Recycler les métaux permet simultanément de préserver la ressource de la matière
première, mais également d’économiser une grande partie de l’énergie que l’on aurait dû
dépenser pour l’extraire.
C’est donc une voie à poursuivre et à développer.


Recyclage des métaux rares.
Concernant les métaux rares, les taux de recyclage EOL-RR est inférieur à 1% et indique
clairement les difficultés à recycler ces matériaux.
Les raisons sont diverses :
− Le cours actuel de ces métaux n’est pas assez élevé pour rentabiliser les infrastructures
nécessaires à la mise en place d’un recyclage industriel.
− Le taux de collecte des équipements en fin de vie n’est pas suffisant.
− L’emploi de ces métaux en quantités infimes complexifie leur recyclage et multiplie les
traitements, donc les coûts.
− Il n’est pas évident que ces métaux recyclés retrouvent un niveau de pureté suffisant
pour pouvoir être réemployés dans les industries high-tech.

Parvenir à recycler ces métaux est pourtant un enjeu fondamental pour les pays n’exploitant
pas de sites miniers sur leur sol.
Cela permettrait de disposer de la matière première en toute indépendance, en faisant
l’économie de l’énergie importante nécessaire pour l’extraction de grandes quantités de
minerais, et en éliminant les désagréments écologiques.
Cela devrait être une priorité pour la recherche.

45
8. L’espoir des grands fonds marins.

Les mines terrestres seront en fin d’exploitation rentable d’ici la fin du siècle pour la plupart.
Vers quels terrains se tourner ? Certains, misent sur l’espace, paraît-il très prometteur. Je
suis personnellement très sceptique sur le sujet car je n’imagine pas que le bilan énergétique
puisse rendre cette option intéressante, pas plus que le bilan économique d’ailleurs. Mais par
soucis d’objectivité, et pour être exhaustif, j’aborderai le sujet au paragraphe prochain.

Auparavant, il y a sur notre planète des endroits qui semblent plus accessibles et également
très prometteurs, au fond de l’océan.
Ce n’est pas simple, mais tout de même plus accessible, et plus économe en énergie.

Dès 1968, le Monde Diplomatique titrait « les richesses du XXIème siècle sont à prendre au
fond des océans. »
En juin 2018, la revue Reporterre publiait l’article suivant :
« Cinquante ans plus tard, force est de constater que le journal a sans doute vu juste : le XXIe
siècle est en passe de voir se concrétiser des « mines sous-marines »
Epuisement des gisements terrestres, demande en métaux accrue... le constat des années 1960
est toujours d’actualité. Et avec la raréfaction des ressources apparaissent des tensions
relatives à leur approvisionnement. Alors, industriels et Etats regardent vers des espaces encore
vierges d’exploitation minière : les fonds marins.
Des gisements métalliques se trouvent dans tous les océans, à des profondeurs allant de
quelques centaines à plusieurs milliers de mètres. Des minéralisations profondes, telles que les
nodules polymétalliques, les encroûtements ou les sulfures hydrothermaux, contiennent des
métaux recherchés à la surface : cobalt, fer, manganèse, platine, nickel, or, argent, cuivre, terres
rares...
Leurs concentrations y sont souvent bien plus élevées que dans les gisements terrestres. Et les
zones qui pourraient être exploitées sous les océans sont plus étendues. 1,5 million de km2 des
fonds marins de l’océan Pacifique seraient actuellement sous permis d’exploration. Les
ressources s’avèrent immenses. »

Il semble que trois formes de métaux pourraient être exploitées, les nodules polymétalliques,
les encroûtements cobaltifères et les sulfures polymétalliques hydrothermaux.


Figure n° 63 – Localisation des minerais marins

46
− Les nodules polymétalliques : ces gros cailloux brun noir de 5 à 10 cm de diamètre
contiennent principalement du fer et du manganèse aux côtés du zinc, du cuivre et du
baryum. Ils gisent dans les plaines abyssales entre 4.000 et 6.000 mètres de profondeur.


Photos n° 64 et 65 – Nodules polymétalliques

− Les encroûtements cobaltifères : Ils se situent sur les monts sous-marins à une
profondeur située entre 400 et 4.000 mètres. Ils recèlent des minerais aussi variés que
l’oxyde de fer, le manganèse, le cobalt, le platine, mais également des terres rares.


Photos n° 66 et 67 – Encroûtements cobaltifères

− Les sulfures polymétalliques hydrothermaux : ils ressemblent à des cheminées d’usines
(d’où leur surnom de « fumeurs noirs ») et peuvent être éloignés les uns des autres de
plusieurs dizaines de kilomètres. Ils sont situés à proximité des sources hydrothermales
le long des dorsales océaniques, entre 1.500 et 5.000 mètres de profondeur.


Photos n° 68 et 69 – Fumeurs noirs et Amas sulfurés à 1.500 mètres de profondeur

47
Les fluides hydrothermaux, au contact des roches profondes, s’enrichissent en métaux et
subissent des mouvements de convection.
En remontant à la surface, au niveau de l’axe d’accrétion, les métaux précipitent sur le
plancher océanique sous forme d’accumulations de sulfures, une partie des métaux se
disperse sur plusieurs dizaines de kilomètres dans le panache hydrothermal.


Schéma n° 70 – Composition des minerais marins

L’accès aux nodules et aux encroûtements reste aujourd’hui très complexe. Du fait de leur
profondeur, leur exploitation serait encore trop coûteuse. En revanche, le potentiel des
sulfures se révèle plus prometteur. Les cheminées crachent des panaches d’eau acide, à près
de 400 degrés Celsius, qui contiennent de grandes quantités de fer, de cuivre et de zinc, ainsi
que des quantités minimes d’argent, d’or, de cobalt, de plomb, de baryum, de cadmium,
d’antimoine, de mercure, de terres rares…

Un véritable eldorado. D’autant que la densité des métaux dans les minerais sous-marins
pourrait être de 10 à 20 fois supérieure à celle des mines terrestres. La concentration en
cuivre peut atteindre jusqu’à 10 %, contre 1,5 % pour la plus grande mine chilienne. Ces
amas contiennent aussi jusqu’à 8 grammes d’or par tonnes, contre une moyenne d’un à deux
grammes pour les mines terrestres. La teneur en argent peut atteindre 200 grammes par
tonnes.
Ce sont ces zones – il y en aurait 250 exploitables dans le monde – qui sont visées en priorité.



8.1. L’expérience Nautilus Minerals Inc.

Il me semble intéressant de dire quelques mots de la société Nautilus Minérals Inc. et de
son projet Solwara 1, premier projet important d’exploitation minière des grands fonds
marins.

Nautilus Minerals Inc. est une société canadienne qui se consacre à l’exploration et à la
mise en valeur des fonds marins en eau profonde dans l’océan Pacifique occidental et de
gisements de nodules dans l’océan Pacifique oriental. Les principaux objectifs de la
Société sont l’extraction de gisements de cuivre, de zinc, d’or et d’argent.

48
Son projet principal est le projet Solwara 1 en Papouasie-Nouvelle-Guinée (PNG) dans la
mer de Bismarck.

Ce projet porte sur une zone d’environ 60 km2, comptant 19 « fumeurs noirs ».
La compagnie minière décrit le gisement de Solwara 1 comme se trouvant « sur les fonds
marins à une profondeur d’environ 1.600 mètres » et contenant «une teneur en cuivre
d’approximativement 7 %. Cela est à comparer avec les mines de cuivre terrestres, où la
teneur en cuivre est en moyenne de 0,6 %. De plus, des teneurs en or s’élevant à plus de 20
grammes/tonne ont été relevées dans certaines zones de Solwara 1 et la teneur moyenne est
approximativement de 6 grammes/tonne », commente Nautilus Minerals. A titre de
comparaison, le projet minier de la Montagne d’Or en Guyane prévoit d’exploiter une
mine à ciel ouvert où la teneur en or serait de 1,6 gramme par tonne de roche.

Pour son projet, la Société a conçu et fabriqué trois énormes machines, pesant de l’ordre
de 300 tonnes chacune, destinées à travailler dans les grands fonds :


Photo n° 71 – Engins d’excavation sous-marins

− La fraise auxiliaire « AC » est une machine préparatoire qui traite les terrains
accidentés et crée des bancs pour que les deux autres machines puissent
fonctionner. Elle possède une tête de coupe montée sur flèche pour plus de
flexibilité.
− Le Bulk Cutter « BC » a une capacité de coupe plus élevée mais son action se
limitera aux bancs de travail créés par l’AC.
− La machine de collecte « CM » ramasse le matériau coupé par les deux autres
machines sur le fond marin.

La roche est désagrégée au fond de la mer par les deux premières machines
robotiques qui excavent le matériau par un processus de coupe continue, un peu
comme le charbon ou d’autres machines d’extraction continue en vrac sur terre.
Les deux machines laissent le matériau coupé sur le fond marin pour la collecte par la
machine de collecte CM.
Le CM, également un grand véhicule robotisé, collectera les matériaux coupés (sable,
gravier, limon) en les aspirant sous forme de boue d’eau de mer avec des pompes
internes et en les poussant à travers un tuyau flexible vers le système de levage et de
levage.

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Le RALS comprend une grande pompe et une conduite montante rigide suspendue à
un récipient qui délivre la suspension à la surface. La pompe volumétrique proposée
est conçue et construite par GE Hydril (Houston, TX). La pompe est suspendue à un
tuyau vertical solide (colonne montante) suspendu sous le récipient de support. Le
tuyau est déployé sur le fond marin par un derrick et un système de tirage à bord du
navire.
Sur le pont du navire de soutien à la production, le lisier est essoré. Le matériau solide
déshydraté est évacué vers une barge de transport amarrée à côté. L’eau de mer usée
est pompée vers le fond marin par les tuyaux de la colonne montante et fournit de
l’énergie hydraulique pour faire fonctionner la pompe RALS. Le rejet de l’eau de
retour au fond de la mer évitera les impacts sur les eaux marines de surface chaudes,
minimisant ainsi l’impact environnemental de l’opération.


Dessin n° 72 – Mine sous-marine Photo n° 73 – Bateau usine Nautilus en construction

Le projet était bien avancé ; les droits d’exploitation obtenus, les matériels d’excavation
construits et le bateau usine en voie d’achèvement dans les ateliers de Fujian Mawei au
Japon.
En décembre 2018, Nautilus Minerals Inc. a eu des difficultés de financement et a tardé à
honorer ses règlements ; le constructeur japonais a vendu le bateau à une société indienne.
En févier 2019, Nautilus Minerals Inc. déposait le bilan.

On peut imaginer que son activité sera reprise, tant l’intérêt est grand pour l’exploitation des
fonds marins. L’avenir nous le dira.
Mais cela montre la difficulté de l’entreprise.

50
8.2. Les perspectives françaises.

La France vise aussi l’exploitation de ces cheminées, dans ses eaux territoriales. Disposant de
près de 11.000 kilomètres carrés de zones exclusives côtières (deuxième surface maritime
mondiale derrière les Etats-Unis) grâce aux Dom-Tom, elle peut en effet espérer devenir un
acteur majeur du secteur. Mais cela prendra du temps.

Aux dernières Assises de l’économie de la mer, en novembre 2017 au Havre, le Premier
ministre, Edouard Philippe, est resté plutôt vague. « Je souhaite qu’on mette l’accent sur
l’exploration de nos grands fonds marins […] pour que, d’ici à cinq ans, la France, qui dispose de
toute la chaîne pour explorer ces fonds, soit leader sur ce segment. »

Pour l’heure, les efforts portent sur la Polynésie française aux environs de Wallis-et-Futuna.
Trois campagnes d’exploration ont été menées entre 2010 et 2013 par l’Ifremer, en
consortium avec Eramet et Technip. Elles ont détecté un site prometteur d’amas sulfurés.
Francis Vallat, président du groupe de travail synergie grands fonds marins, est enthousiaste.
« La France est le seul pays au monde à disposer de leaders mondiaux dans les dix phases de
travaux nécessaires à l’exploration puis l’exploitation des futurs gisements. C’est une chance
sans précédent. En novembre 2017, le cluster a renouvelé son accord de coopération de 2015
avec la DeepSea Mining Alliance allemande pour des projets de coopération dans les mines
sous-marines. Que ce soit pour fabriquer des machines ou pour exploiter des mines ensemble.
Tout est sur la table. »

Reste que les projets français avancent doucement. Très doucement. Du côté des industriels
chez Eramet et Technip, on reconnaît que l’activité minière sous-marine n’est pas prioritaire.
« Il devrait s’écouler dix à quinze ans avant que nous ne voyions la première véritable mine
sous-marine française », prédit Francis Vallat. En cause, notamment, les préoccupations
environnementales. « Nous n’avons aucune connaissance précise de l’impact sur la biodiversité
environnante et ni quel sera l’effet à terme des retombées sédimentaires provoquées par
l’extraction du minerai », avertit Geoffroy Lamarche, géophysicien marin

Les ONG, elles, s’insurgent déjà contre les projets industriels. « Nous ne savons pas quel
niveau de dommages les océans peuvent tolérer sans perdre leur résilience et leur capacité à
fournir des fonctions vitales. Notre connaissance des écosystèmes et de la biodiversité de la mer
profonde est encore pauvre et nous ne comprenons pas complètement le rôle de la mer
profonde au niveau du système terrestre », disent-elles.
De même, la richesse de la flore et de la faune subaquatique ne sera-t-elle pas impactée par
l’extraction des minerais et la plume sédimentaire (retombées de sédiments provoquées par
l’extraction des métaux) ? « Les industriels sont très conscients des risques et de leur
responsabilité environnementale. Ils ne démarreront rien tant que toutes les assurances et
autorisations n’auront pas été prises pour éviter des dommages écologiques. », assure Francis
Vallat.

« Nous n’avons pas le choix. Tôt au tard, nous exploiterons les richesses minières de l’océan.
Alors faisons-le avec le maximum de précaution pour l’environnement et un impact minime.
Nous en avons les moyens », assure Geoffroy Lamarche.




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9. L’espoir de l’espace.

Les projets ne manquent pas dans l’espace, que l’objectif soit une planète du système solaire,
la Lune ou Mars, ou un astéroïde, et plus spécialement un géo-croiseur.
Un objet géo-croiseur est une comète ou un astéroïde du système solaire, que son orbite
autour du soleil amène à faible distance de l’orbite terrestre, et donc potentiellement près de
la Terre.


Photos n° 74 et 75 - Astéroïdes du système solaire

Des Etats s’y préparent, et deux Etats ont déjà pris des dispositions législatives :
− Les Etats-Unis : le 25 novembre 2015, le président des Etats-Unis Barack Obama signe le
Space Act, une loi qui autorise les entreprises privées à exploiter les astéroïdes et les
citoyens américains à posséder des parties de corps célestes. Cette loi viole le traité de
l’espace de 1967, du moins son esprit car on peut toujours jouer sur les mots…
− Le Luxembourg : le 1er août 2017, le Grand-Duché se dote d’une loi qui garantit aux
sociétés actives dans l’exploration et l’extraction de minerais célestes la propriété de
leurs trouvailles. Idem ; on ne voit pas trop l’autorité du Luxembourg dans ce domaine.
Le gouvernement luxembourgeois avait déjà lancé en 2016 « SpaceResources.lu », un
programme ambitieux visant à développer des activités économiques autour de l’espace
et plus particulièrement de l’exploitation des minerais célestes.

Mais ce sont des groupes privés qui en seront les opérateurs. Les premiers groupes qui se
sont constitués, ont été :
− « Planetary Resources » fondé en 2010 par quelques milliardaires américains, dont un co-
fondateur de Google Larry Page, son ancien PDG Eric Schmidt, le réalisateur James
Cameron, et quelques autres.
− « Deep Space Industries » fondé en décembre 2012 et basé au Luxembourg.

Selon Planetary Resources, il existe 16.000 astéroïdes proches de la Terre et riches en
ressources, sur environ 600.000 répertoriés.

Les chiffres annoncés, et/ou espérés sont vertigineux :
Dans son ouvrage « Mining the sky » de 1997, le planétologue américain John S. Lewis estime
la valeur de l’astéroïde « Amon », petit corps céleste de type M (métallique) d’environ 2 km
de longueur. Selon lui, il contiendrait l’équivalent de 6.000 Md $ de platine, 8.000 Md $ de
nickel et de fer, 6.000 Md $ de cobalt, et quelques autres trillions de dollars de composés
divers.
Encore plus fort ! Il semble admis que l’exploitation minière de l’astéroïde géant « Psyche
16 » pourrait représenter un montant de 700 quintillions de $. J’avoue que je ne connaissais
pas ce terme de quintillion, n’ayant jamais eu à l’utiliser puisqu’il signifie 10 puissance 18 $.
C’est cela, un 1 avec 18 zéros derrière. A ce prix là, j’offre la photo (ci-après). Sexy, non ?

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Photo n° 76 - Astéroïde Psyche 16

Exploiter ces ressources et pouvoir en profiter, règlerait bien entendu tous les problèmes
que l’on va bientôt rencontrer sur Terre. Encore faut-il pouvoir le faire.

Le problème des transports.
La première étape consistera à localiser, non pas les minerais, mais l’eau.
L’eau peut être divisée en ses parties constituantes, l’hydrogène et l’oxygène, les principaux
composants du carburant de fusée. L’extraction d’astéroïdes devrait donc conduire à la
construction et à l’exploitation de dépôts de propergols hors Terre, ce qui pourrait
révolutionner les vols spatiaux et l’exploitation en permettant aux vaisseaux spatiaux de
recharger leurs réservoirs de carburant lors de leurs déplacements.
Un responsable du Plan Canadien pour les Minéraux et les Métaux (PCMM), déclare à ce
sujet : « il faut surtout établir l'infrastructure requise pour assurer l'exploration et
l'exploitation minière sur la Lune, Mars ou des astéroïdes. Pour y parvenir, nous devons utiliser,
finalement, les ressources en place ou in situ…/… Par utilisation des ressources in situ, on
entend l'exploitation minière ou la prospection pour trouver certaines ressources, comme de
l'oxygène et de l'hydrogène, qui serviront comme agent de propulsion dans les vaisseaux
spatiaux afin de ne pas avoir à transporter tout le carburant requis à partir de la Terre. Cela
nous permettra d'assurer une exploration plus éloignée et plus longue dans l'espace, d'une
façon plus durable. »
Vers la fin des années 2030, soit le moment où les gens prédisent que Mars sera colonisée, je
crois que nous pourrons commencer à penser, de manière réaliste, qu’une industrie se
chargeant de rapporter des métaux utiles sur la Terre pourrait démarrer » a-t-il ajouté.

Exploitation des minéraux
Trois options prévalent :
− Extraire la matière brute et la raffiner ailleurs.
− Traiter la matière brute sur place.
− Transporter l’astéroïde dans une orbite sûre autour de la Terre ou de la Lune.

Seulement, à en croire l’astrophysicien français Francis Rocard, il n'est vraiment pas garanti
que les astéroïdes soient réellement exploitables. Responsable des programmes
d’exploration du système solaire au Centre national d’études spatiales (CNES), il a
notamment supervisé la mission Rosetta, première sonde mise en orbite autour d’une
comète.

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Avant d’y récupérer des minerais, plusieurs obstacles de taille restent à surmonter: « Les
astéroïdes sont d’une extraordinaire diversité. Malheureusement, nos possibilités de les
connaître à distance sont limitées ». Souvent rocheux, parfois hydratés ou métalliques, leur
composition est très variable, leurs profils très divers.
Concernant les astéroïdes métalliques, les plus intéressants du point de vue de la
prospection, Francis Rocard rappelle que l’ «on n’en a encore jamais visité ».
On en saura sûrement davantage en 2026, avec l’arrivée à destination de la mission Psyche
de la Nasa, dont le départ vers l’astéroïde métallique éponyme est prévu en 2022.
En attendant, « il reste beaucoup d’inconnues. C’est un peu le principe du gain au loto: la
probabilité de trouver un astéroïde métallique exploitable demeure très faible, même si leur
nombre est très grand ». Cette catégorie ne représenterait que 8% de l'ensemble des
astéroïdes environ. Quant à les exploiter…
« La perle rare serait un astéroïde métallique atypique [...]. Mais il faut reconnaître que pour
l’instant, personne n’a pu démontrer son existence ».
« Nous avons des météorites sur Terre; on a étudié leur composition, mais sans jamais trouver
de métaux rares en abondance, note l'astrophysicien. Dans les 5% de météorites métalliques de
nos collections, on trouve environ 90% de fer et 10% de nickel, ainsi que des traces d'iridium, de
chrome, de cobalt et de gallium. La perle rare serait un astéroïde métallique atypique
contenant ces éléments traces en grande quantité, les seuls à avoir potentiellement un intérét
commercial. Mais il faut reconnaître que pour l’instant, personne n’a pu démontrer son
existence ».
Francis Rocard se montre « beaucoup plus confiant » quant à l’hypothèse d’une extraction
d’eau, laquelle pourrait servir à alimenter une station spatiale ou à créer de l’hydrogène et de
l’oxygène liquide, utilisés dans certains moteurs: « La NASA pourrait trouver un intérêt à
développer ce genre de technologie ».

En attendant, les premières sociétés constituées ont connu quelques difficultés financières,
et ont été rachetées : Planetary resources a été reprise par ConSensys, une entreprise de
technologies de blockchain et Deep Space Industries a été rachetée début 2019 par Bradford
Space.
Dans les deux cas, l’activité est désormais plus tournée vers le développement de petits
satellites ou de technologies pour ces satellites.
L’objectif minier reste en arrière-plan en attendant que les nombreux obstacles
technologiques, réglementaires et financiers soient passés.

L’Histoire de la mine spatiale rejoint un peu celle de la mine offshore avec les déboires de
Nautilus Minerals Inc. précurseur également dans son domaine.

Mais, compte tenu des enjeux, il est raisonnable de penser que la recherche va se poursuivre,
et que l’on pourra en reparler dans quelques années.
A vrai dire, les problèmes de la technologie sont certainement ceux que l’Homme est en
mesure de surmonter. Il l’a déjà maintes fois démontré. Sa capacité à disposer de l’énergie
nécessaire à ces projets est sans doute moins évidente.

Apparemment, certains en sont persuadés ; selon Mathias Link, directeur des affaires
internationales au sein de Luxembourg Space Agency « un tel développement va se produire,
la seule incertitude est le timing ».

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10. Le sable

Il représente environ 200 usages quotidiens, allant de la filtration de l’eau à la fabrication de
microprocesseurs entrant dans la composition de nos produits de haute technologie. Le
sable est aussi transformé en verre ; c’est d’ailleurs l’une des principales utilisations.

A côté de ces domaines assez évidents, le sable se cache aussi dans des produits beaucoup
plus inattendus : parce qu’il est source de dioxyde de silicium, on en trouve ainsi dans le vin,
le papier, le dentifrice et des milliers d’autres choses.
On se sert aussi du sable pour construire des avions puisqu’il entre dans la composition du
plastique des réacteurs, de la peinture ou encore des pneus. En d’autres termes, dans notre
société actuelle, le sable est un peu comme l’air ou l’eau : on ne peut pas vivre sans.

Là où le sable est vital, c’est bien pour le secteur du bâtiment. Avec les granulats, il forme la
matière première du béton que l’on trouve dans quasiment tout type de construction.
Parce que son coût de production est relativement bas, et qu’il présente des qualités
inégalables, le béton armé est le matériau dominant à l’échelle planétaire.
Outre le bâtiment, le secteur des travaux publics est lui aussi très friand du sable puisqu’il en
a besoin pour construire ses routes par exemple.

Combien de sable ?
− Dans le monde, en utilise 15 milliards de tonnes de sable par an, soit 40 millions de
tonnes de sable par jour. A part l’eau, aucune ressource n’est exploitée à ce point.
− Pour construire un hôpital, ce sont 3.000 tonnes de sable qui sont utilisées.
− Pour construire une autoroute, 30.000 tonnes de sable sont englouties à chaque
kilomètre et 12 millions de tonnes pour une centrale nucléaire !

L’extraction du sable naturel provoque des déséquilibres. Or le sable est une ressource non
renouvelable.
L’exploitation du sable des rivières est progressivement interdit, car il entraînait deux
conséquences préjudiciables pour l’environnement : d’une part, l’extraction du sable
provoque des crues ; d’autre part, lorsqu’on décide d’extraire du sable des rivières, on
empêche le remblai naturel des plages. En effet, le sable présent sur les plages provient de
roches situées parfois à des milliers de kilomètres. Il est charrié par les cours d’eau et il
s’écoule entre un siècle et un millénaire avant son arrivée dans les mers et les océans.
Le sable des déserts est impropre à toute utilisation de construction, car il est formé de
grains ronds et lisses, résultat de l’érosion éolienne, ce qui interdit toute agrégation.

Le dernier endroit où trouver du sable naturel est donc au fond de la mer. Pour aller
chercher le sable au fond des océans, les industriels font intervenir d’immenses navires
spécialisés capables d’extraire et emporter jusqu’à 400.000 m3 de sable par jour. Ce pillage
des fonds marins entraîne de graves conséquences sur l’environnement.

Quand les dragues viennent pomper le sable au fond de l’eau, elles engloutissent une matière
qui a mis des dizaines voire des centaines de milliers d’années à se constituer.

L’exploitation des fonds marins représente une catastrophe pour tous les organismes
vivants. La destruction de l’habitat naturel des organismes situés au plus bas de la chaîne
alimentaire entraîne leur disparition, ce qui affecte tous les maillons situés au-dessus. Tous
les poissons meurent faute de nourriture : c’est donc la survie de toutes les espèces qui
dépend du sable.

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La biodiversité est menacée, engendrant des conséquences directes sur les hommes. En
Indonésie par exemple, de nombreuses familles vivent de la pêche ; 92 % du poisson
consommé là-bas provient de la pêche artisanale. Avec la destruction des fonds marins, ce
sont les ressources de milliers de familles qui sont elles aussi détruites.
L’Indonésie souffre de l’appétit de son voisin Singapour. La cité-Etat s’est agrandie de 130
km2 sur la mer, ces quarante dernières années. Ceci en achetant des milliards de tonnes de
sable à l’Indonésie, avec des conséquences irréversibles sur la région. Ainsi, 25 îles de
l’archipel indonésien ont été tout bonnement rayées de la carte à cause de cette prédation en
sable de Singapour.


Photo n° 77 - Singapour Photo n° 78 - Plage dégradée d’Indonésie

En exploitant à outrance le sable, c’est tout l’équilibre naturel qui est perturbé. Le pompage
du sable marin crée un vide que la nature comble rapidement par les actions combinées du
vent et des vagues. C’est alors le sable des plages et des îles voisines qui vient boucher les
gigantesques trous. On assiste à un phénomène global d’érosion des plages : 75 à 90 % des
plages du monde reculent, avec une tendance qui s’accélère.
Parfois, ce sont même des îles entières qui disparaissent.

Ces pratiques menacent aussi l’intégrité des infrastructures voisines des zones de dragage,
provoquant parfois l’écroulement de ponts.
Autre victime collatérale : l’agriculture. Avec la disparition du sable, l’eau de mer s’infiltre
dans les nappes phréatiques et empêche ainsi la culture de terres arables.

En Floride par exemple, 9 plages sur 10 sont en voie de disparition ; on assiste alors au
phénomène inverse ; on apporte du sable pour reconstituer la plage. C’est ainsi que la
célèbre plage de Miami beach fait régulièrement l’objet de travaux de ré-ensablement.


Photo n° 79 - Ré-ensablement de la plage de Miami Beach

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Dubaï est connu pour ses excentricités architecturales : toujours plus grand, toujours plus
haut, toujours plus cher, Dubaï ne s’impose aucune limite en matière de construction. Pas
même la mer. Au début des années 2000, l’émirat se lance dans la folie «Palm Islands ».
Parce qu’à cause des spéculations, il coûterait moins cher au pays de construire une île
artificielle plutôt que d’acheter des terrains, Dubaï investira plus de 12 milliards de dollars et
consommera 150 millions de tonnes de sable pour construire son archipel.


Photos n° 80 et 81- Palm Jumeirah

Insatiable, Dubaï part en 2003, à la conquête du monde via son autre grand projet, « The
World », un ensemble de 300 îles artificielles représentant la carte du monde.
Bilan : 14 milliards de dollars et plus de 500 millions de tonnes de sable pour un projet qui
s’arrêtera brusquement en 2008 à cause de la crise économique.


Photo n° 82- Maquette projet de The world Photo n° 83 - Etat du chantier après son abandon

On pourrait présumer que tout le sable utilisé provient des déserts tout proches. En fait il
n’en est rien. Car il est impossible de construire une île artificielle avec du sable du désert. Il
existe en effet différents types de sables. Selon leur provenance, ils ne présentent pas les
mêmes propriétés. Ainsi, les grains qui constituent le sable du désert sont tout ronds et lisses
du fait de l’action du vent qui rend de cette manière impossible toute agrégation.
Le sable, pour être exploité dans une construction, doit présenter des angles afin de pouvoir
s’agglomérer. D’où l’utilisation et la surexploitation du sable marin pour la construction, qui
n’est en rien une ressource durable.

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Les émirats ayant largement épuisé leurs stocks, se voient contraints à importer du sable.
Cela a été le cas pour Dubaï qui a importé 45 700 tonnes de sable d’Australie afin d’ériger sa
Burj Kalifa, devenue la plus grande tour du monde. L’exportation de sable aux pays du Moyen
Orient rapporte à l’Australie 5 milliards de dollars par an.

La Chine, premier consommateur de sable
L’Empire du Milieu utilise à lui seul 60 % de la production mondiale de sable. Preuve du
gigantisme de son boom immobilier : Ces deux dernières années, sa consommation égale
celle mesurée aux Etats-Unis au XXe siècle.
De façon générale, l’industrie du sable brasse des milliards de dollars. Le marché est
tellement gigantesque qu’il est gangrené par une véritable mafia.

Le sable, une ressource en voie de disparition
Qui dit surexploitation du sable dit raréfaction et donc prix qui augmentent. Cette
surenchère a donné naissance à une mafia du sable, qui sévit particulièrement en Asie.

Le continent asiatique vit un rythme de construction vertigineux. La demande en sable y est
tellement forte qu’elle a engendré un énorme trafic. Ainsi en Inde, la mafia du sable est
extrêmement puissante. C’est elle qui contrôle tout le secteur de la construction. Chaque
année, 2 milliards de tonnes de sable sont exploités illégalement dans le pays pour alimenter
le boom de la construction immobilière soit cinq fois la consommation de la France.
Singapour qui poursuit sa frénésie importerait illégalement du sable des pays voisins comme
le Cambodge, le Vietnam, la Malaisie et bien sûr l’Indonésie.
Ceux-ci, conscients de l’impact catastrophique de l’exploitation du sable de leurs plages ont
officiellement stoppé les échanges. Pourtant, Singapour continue son trafic au travers de
dealers et de sociétés fictives, avec la complicité de l’Etat.
Bien sûr, ce phénomène ne s’arrête pas aux frontières asiatiques. Le problème est mondial :
les mafias viennent voler du sable partout. Le pillage du sable touche tous les pays du monde,
sur tous les continents.

Au Maroc par exemple, la demande de construction explose. Le pays est devenu l’Eldorado
des retraités et est depuis longtemps une destination privilégiée des vacanciers. Et il faut
bien loger tout ce petit monde.


Photos n° 84 et 85 - Exploitations artisanales illégales de sable de plage au Maroc

Aujourd’hui, on estime que la mafia contrôle 45 % du sable des plages marocaines et
sénégalaises. De plus, ce sable est bien souvent mal lavé. Il n’est donc pas débarrassé du
sodium présent dans l’eau de mer, ce qui rend les constructions vulnérables à la corrosion.

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Le résultat, c’est que l’on retrouve des constructions de mauvaise qualité qui vieilliront mal,
pour loger les touristes et les retraités qui se retrouveront au bord de l’eau, mais sans plage
de sable…


Photo n° 86 - Constructions en bord de mer et disparition de la plage de sable




Protéger le sable
L’exploitation des ressources fait l’objet d’actions, d’ordre politique ou privée. On le voit
pour l’eau par exemple, même si le chemin est encore long. En revanche, la question du sable
n’est jamais à l’ordre du jour chez les plus hautes instances. Pourtant, il est plus qu’urgent de
changer nos méthodes de construction afin de nous passer du sable.





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11. Conclusions

Quels seront nos besoins futurs ? Une étude du CNRS a estimé la quantité de métaux
nécessaires à moyenne échéance pour soutenir nos modes de vie high-tech.
La conclusion paraît invraisemblable puisque la consommation mondiale de métaux croît à
un rythme de 3 à 5% par an ; « pour satisfaire les besoins mondiaux d’ici à 2050, nous devrons
extraire du sous-sol plus de métaux que l’humanité n’en a extrait depuis son origine ». Cela
signifie que nous allons consommer davantage de minerais durant la prochaine génération
qu’au cours des 70.000 dernières années !

Malgré les réserves dont nous disposons, au rythme actuel de production une quinzaine de
mines de métaux de base et de métaux rares seront épuisées en moins de cinquante ans.

De plus la quantité d’énergie dépensée pour aller chercher ces métaux, y compris les métaux
rares, de plus en plus profonds ou dans les océans, nous amène à une nouvelle limite de
l’extraction minière. Nous ne pouvons pas dépenser plus d’énergie que nous n’en récoltons.

Il semble donc que l’extraction des minerais rencontrera deux limites physiques ;
l’épuisement des ressources minières et l’épuisement des ressources énergétiques.

Nous pouvons rajouter, français et européens, l’extrême dépendance de nos économies à des
approvisionnements extérieurs, et particulièrement chinois pour les minerais nécessaires
aux industries de haute technologie. Ce qui est inquiétant.

On ne peut désespérer totalement des solutions offshore et spatiales, mais rien ne garantit
leur succès dans un avenir compatible avec les besoins humains.

En attendant une hypothétique réussite dans ces domaines, les solutions à nos problèmes de
ressources ne pourront venir que du réemploi des matériaux existants, par recyclage, et de
l’économie de produits finis par diminution de leur nombre et allongement de leur durée de
vie.
Voilà ce sur quoi nous devrions travailler d’urgence.










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