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UNIVERSITE DE KINSHASA

FACULTE DES SCIENCES ECONOMIQUES ET DE GESTION

« THEORIE GENERALE DU MANAGEMENT »

NOTES DE COURS A L’ATTENTION DES ETUDIANTS


DE G2 ET DE L1/LMD

Pr Odilon GAMELA NGINU

ANNEE ACADEMIQUE 2021-2022


2

OBJECTIF ET PLAN DU COURS

Ce cours a été conçu pour deux publics spécifiques : d’abord, les étudiants du premier
cycle en sciences économiques et de gestion, et ensuite les étudiants des autres facultés.

Pour les étudiants en sciences économiques et de gestion, ce cours constitue une


introduction aux différents cours spécifiques de gestion figurant dans leur programme
universitaire. Ces cours correspondent au découpage traditionnellement adopté pour
l’enseignement en gestion, { savoir la gestion de la production, la gestion des ressources
humaines, la gestion financière et la gestion commerciale. Point de départ de la
formation en gestion, ce cours a pour eux comme pendant final, l’enseignement délivré
dans le cours de « Politique d’Entreprise » ou de « Management Stratégique », lequel
cours fait la synthèse des cours de gestion ci-dessus cités dans une optique systémique,
intégrative, stratégique ou de politique générale.

Pour les étudiants des autres facultés qui, dans leur cursus universitaire, ne pourront
suivre d’autres enseignements conséquents en sciences de gestion, ce cours constitue
une première ouverture { l’univers des différents outils dont ils doivent nécessairement
se munir puisqu’appelés { gérer des organisations de toutes natures dans leur future vie
professionnelle.

Ce cours se concentre ainsi plus spécifiquement sur les problèmes des entreprises, c.à.d.
des organisations à but lucratif. En effet, les entreprises constituent, pour les étudiants
en sciences de gestion, le terrain de prédilection sur lequel ils seront appelés à exercer
leurs talents { l’issue de leur formation universitaire. De ce fait, tout le contenu de ce
cours est orienté vers une recherche permanente de la performance à travers les notions
d’efficacité et d’efficience qui sont les marques des organisations compétitives. Ceci est
la conséquence du fait que l’économie, dont le management est la pratique, est avant
tout la science de la recherche de l’efficacité et de l’efficience dans un contexte où il s’agit
de satisfaire des besoins illimités, par définition, avec des ressources limitées, par
définition. Mais en plus de l’efficacité et de l’efficience comme paramètres, la
performance a aussi une troisième, l’effectivité, dans un contexte où les « parties
prenantes » ont de plus en plus de l’importance dans la gestion des entreprises.

Les différents concepts et thèmes sont abordés de façon à couvrir la palette des
problèmes qui se posent { tout manager ou dirigeant d’une entreprise quel que soit son
niveau hiérarchique (du cadre subalterne ou agent de maîtrise chargé de la supervision
de quelques collaborateurs, au cadre supérieur ou cadre de direction responsable de
plusieurs milliers d’employés, en passant par le cadre intermédiaire,) et quelle que soit
la taille de son entreprise (TPE, PME, grande entreprise, entreprise multinationale ou
entreprise transnationale).

Mais le contenu de ce cours s’adresse aussi aux futurs managers des organisations { but
non lucratif (organisations à caractère politique, social, culturel, religieux, philosophique
3

ou autre), dans la mesure où ces organisations s’assignent aussi des objectifs


généralement ambitieux qu’elles cherchent { atteindre avec des ressources forcément
limitées. Ainsi, la recherche de l’efficacité, de l’efficience et, bien entendu, de l’effectivité,
est aussi une nécessité pour ces organisations dont les managers n’ont souvent et
malheureusement pas été initiés aux principes du management au cours de leur
formation académique.

Quoiqu’abordant des concepts et des thèmes universels par définition, ce cours fait un
effort de contextualisation, c.{.d. un effort d’adaptation au contexte spécifique et {
l’environnement particulier des pays en développement en général, et de la République
Démocratique du Congo en particulier, pour mieux rapprocher la théorie de la pratique
et mieux illustrer des concepts parfois arides.

Cette contextualisation a été facilitée par l’expérience accumulée par l’auteur dans le
domaine de la gestion tant dans le secteur privé (Président de la Compagnie Sucrière de
Kwilu-Ngongo), dans le secteur public (Président Directeur Général de l’Office des
Routes), dans l’Administration Publique (Directeur du Cabinet du Ministre de
l’Economie, du Ministre des Finances et du Gouverneur de la Province du Kongo Central,
Conseiller du Ministre du Portefeuille et à la Présidence de la République) que dans le
monde académique (Recteur de l’Université Kongo). Cette contextualisaion n’est bien
entendu pas synonyme de cloisonnement, car la mondialisation à laquelle aucun pays
n’échappe désormais, implique concurrence et échanges entre entreprises évoluant dans
des environnements caractérisés par des niveaux de développement très différents
(pays développés, pays émergents et pays en voie de développement).

In fine, ce cours a comme ambition de doter le public cible des moyens nécessaires lui
permettant d’appréhender les différentes tâches dévolues au manager, de les aborder
comme des éléments d’un processus intégré et récurent, de maîtriser le processus de
prise de décision, de comprendre l’importance de la variable « environnement » dans la
mise en œuvre du processus managérial, de prendre conscience de la responsabilité de
l’entreprise vis-à-vis de la société dans laquelle elle opère du fait de la place particulière
qu’elle y occupe, et d’intérioriser la logique qui sous-tend les grandes décisions
stratégiques telles que les restructurations, les délocalisations, les externalisations, les
alliances stratégiques, les fusions ou les absorptions.

Pour atteindre cet objectif, ce cours a été subdivisé en cinq parties. La première partie
est consacrée aux principaux concepts de base et outils qui seront abordés de manière
plus détaillée dans les quatre autres parties. Ces dernières traitent respectivement des
quatre fonctions traditionnelles du management, { savoir la planification, l’organisation,
la direction et le contrôle.
4

PREMIERE PARTIE : PROLEGOMENES

Cette première partie va baliser les principaux concepts qui vont être développés dans
les quatre autres parties de l’ouvrage qui, elles, vont être consacrées { l’examen des
quatre fonctions managériales de planification, d’organisation, de direction et de
contrôle.

Elle est répartie en cinq chapitres portant respectivement sur :

- les origines du management à travers ses principales écoles et les principaux auteurs
qui les ont marquées ;
- les contours du concept du management ainsi que les concepts qui lui sont liés,
notamment ceux de l’environnement et des objectifs ;
- le processus managérial lui-même qui s’articule autour des quatre fonctions
managériales ;
- le concept de la coordination, condition sine qua non de l’efficacité du processus
managérial ;
- la prise de la décision qui est l’essence même du travail du manager.
5

CHAPITRE 1 : BREF HISTORIQUE DU MANAGEMENT

Dans ce chapitre, nous allons passer en revue les principales étapes du management en
tant que science, { travers les différents courants de pensées qui l’ont marqué ainsi que
leurs principaux auteurs. Ce faisant, nous allons seulement survoler les théories et les
auteurs sur lesquels nous reviendrons de façon plus détaillée dans les quatre parties
réservées aux quatre fonctions traditionnelles du management.

Ceci dit, on peut considérer que le management est né au même moment que les
activités organisées de l’homme. Autrement dit, le management remonte à la nuit des
temps.

1.1. Le management dans la période préindustrielle

Déjà dans la Bible, qui est un des plus anciens livres du Monde (« Les Prophètes » p.ex.
couvrent la période allant de la conquête de la Terre Promise à la fin de la Royauté, soit
la période allant du XIIème au VIème siècle avant notre ère)1, on trouve les premières
traces écrites des principes du management, notamment quand Jéthro, beau-père de
Moïse, donne à ce dernier une leçon magistrale sur la délégation des pouvoirs en lui
demandant de déléguer son pouvoir de juge à des « chefs du peuple, chefs de mille, chefs
de cent, chefs de cinquante et chefs de dix » afin de ne pas s’épuiser : ces chefs devaient
donc juger au nom de Moïse et ne porter devant celui-ci que les affaires difficiles2.

En remontant encore plus loin dans la nuit des temps, on peut citer les pyramides dont
les plus célèbres datent de la IIIème à la VIème dynastie de l’Ancien Empire, soit du
XXVIIIème au XXIVème siècle avant notre ère (de 2780 à 2380)3. Quand on voit leur
gigantisme et leur raffinement, on peut conclure que leur construction a nécessité
l’indispensable présence de managers avisés, puisqu’elle a impliqué entre autres la
mobilisation d’impressionnantes ressources (matérielles, financières et humaines),
l’acquisition de très nombreux biens et services, la gestion d’immenses stocks, la
planification des tâches, la présence des milliers de travailleurs pendant de très longues
années sur les chantiers, la formation de ces travailleurs pour les rendre aptes aux
diverses tâches { exécuter, l’affectation de ces travailleurs, la coordination des
différentes tâches ou encore le contrôle de la qualité des différentes tâches.

Il en est de même de la construction des cathédrales, des palais royaux et princiers, des
châteaux, des murs de fortification et autres ouvrages de travaux publics, sans oublier la
conduite des guerres qui ont émaillé l’histoire de l’Humanité.

1
Dictionnaire Universel, Hachette Livre International, Edition Spéciale République
Démocratique du Congo, Paris, 2010, p. 1030.
2
Exode 18, 13-27.
3
Dictionnaire Universel, op. cit., p. 141.
6

C’est donc la preuve que le management est contemporain { l’activité organisée de


l’homme, même si c’est { partir de la Révolution Industrielle (fin du XVIIIe siècle) qu’il
s’est imposé comme discipline au même titre que les autres sciences. Le management se
retrouve ainsi dans toute organisation humaine, de la gestion du ménage à celle des
Etats, en passant par celle des TPE aux plus grandes multinationales

1.1. La Révolution Industrielle

La Révolution Industrielle a donc marqué l’entrée du management dans le cercle


restreint des sciences.

Cette révolution s’est caractérisée par l’avènement de l’énergie mécanique qui, { son
tour, a permis l’avènement de deux phénomènes concomitants, { savoir la production de
masse (avec le travail mécanisé) et les modes de transport de masse (particulièrement le
chemin de fer et le bateau à vapeur).

Tout naturellement, la production de masse a donné naissance à des grandes entreprises


qui se sont substituées aux entreprises artisanales (basées sur le travail manuel) de l’ère
préindustrielle. Le financement de ces grandes entreprises a, à son tour, nécessité
d’importants capitaux dont la mobilisation a été facilitée par la naissance des bourses de
valeurs. Or, qui dit capitaux importants, dit automatiquement accroissement des enjeux
et des risques financiers. D’où, la naissance d’un besoin nouveau, celui de disposer d’un
corps formel de connaissances théoriques, capable de guider les managers dans la
gestion de leurs affaires.

Les premiers pas de ce corps formel de connaissances théoriques, vont ainsi voir le jour
au début du XXe siècle avec l’Ecole Classique, qui sera suivie successivement de l’Ecole
des Relations Humaines, de l’Ecole Quantitative et de l’Ecole Contemporaine.

1.2. L’Ecole Classique

Cette école s’est fixée comme objectif de formuler un ensemble de principes rationnels
en vue d’améliorer l’efficacité des entreprises, jetant ainsi les bases théoriques d’une
nouvelle discipline, à savoir le management. Elle est représentée par deux grands
courants ayant des préoccupations différentes :

- le courant dit du « management scientifique » : préoccupé par l’accroissement de la


productivité des ouvriers, il a été animé principalement par Frederick Taylor, Henry
Ford, Franck Gilbreth, Lilian Gilbreth et Henry Gantt ;
- le courant dit de la « théorie administrative » : préoccupé par l’organisation globale
de l’entreprise ainsi que par les moyens de la rendre plus efficace, il a été animé
principalement par Henri Fayol et Max Weber.
-
7

1.2.1. Le courant du Management Scientifique

a. Frederick Taylor (1856-1915)

Son ouvrage publié en 19114 est considéré comme l’acte de naissance du management
moderne. Ainsi, Taylor est considéré comme le père du Management Scientifique que
l’on peut définir comme l’utilisation d’une méthodologie scientifique pour définir la
manière optimale de réaliser une tâche donnée. C’est le fameux « One Best Way », c.à.d.
« La Seule Meilleure Façon » (de réaliser une tâche donnée). Notons que le Management
Scientifique est plus connu sous la dénomination de l’ OST ou « Organisation Scientifique
du Travail ».

Cet ingénieur mécanicien américain a fait ses recherches dans les entreprises
sidérurgiques « Midvale & Bethlehem » (Etat de Pennsylvanie, Etats-Unis). Il a constaté
que les ouvriers utilisaient chacun sa méthode pour réaliser une même tâche : d’où,
perte de temps et inefficacité. C’est pourquoi, il va décider d’étudier de façon scientifique
comment le travail des ouvriers devait être fait, en établissant des règles pour améliorer
la productivité du travail. Ces règles sont au nombre de quatre et leur observance devait
donner satisfaction à tous les partenaires : elle permettait d’accroitre la productivité du
travail et, par conséquent, aux employés d’accroitre leur rémunération et aux
employeurs d’accroitre leurs profits. Il s’agit des règles ci-après :

- première règle : substituer la connaissance scientifique des différents aspects du


travail de chaque individu { l’empirisme traditionnel ;
- deuxième règle : sélectionner, former, éduquer et perfectionner scientifiquement les
ouvriers qui ne doivent plus être seuls à choisir leurs métiers et qui ne doivent plus
exercer leurs métiers sans être formés ;
- troisième règle : établir une coopération franche avec les ouvriers afin de s’assurer
que l’ensemble du travail est effectué conformément aux principes scientifiques
établis ;
- quatrième règle : séparer et répartir le travail et les responsabilités de manière à peu
près égale entre la direction et les ouvriers, chacun des deux groupes se chargeant
des tâches pour lesquelles il se montre plus compétent que l’autre, c.{.d. la
conception à la direction et l’exécution aux ouvriers, alors qu’auparavant, la quasi-
totalité du travail et la majorité des responsabilités incombaient aux seuls ouvriers.

L’application de ces quatre règles a effectivement permis d’augmenter les gains de


productivité dans des proportions très notables. C’est ainsi que la quantité de fonte
chargée sur des chariots par un ouvrier, est passée de 12,5 T/jour à 48 T/jour suite à
une meilleure combinaison de postures, de procédures, de techniques et d’outils
ainsi que l’adoption du salaire au rendement.

Taylor F., Principes de l’organisation scientifique des usines, Dunod, Paris, 1911.
4
8

Il faut souligner ici le caractère réellement révolutionnaire des innovations


introduites par F. Taylor, car il n’existait { l’époque aucune norme pour mesurer
l’efficacité du travail. Ainsi, les ouvriers faisaient exprès de travailler lentement,
tandis que les dirigeants prenaient des décisions basées sur leur intuition, c.à.d. sans
base rationnelle : il ne pouvait en être autrement du fait que rien n’étant fait pour
savoir si le poste auquel un ouvrier était affecté, correspondait bien à ses capacités et
aptitudes. Par conséquent, chacun des partenaires estimait que ce que l’un avait
gagné l’avait été { son détriment (équation { sommes nulles).

Taylor a eu quatre principaux disciples qui ont étudié, chacun, un aspect particulier
du Management Scientifique pour mettre au point leurs propres méthodologies :
Henry Ford, les époux Gilbreth et Henry Gantt.

b. Henry Ford (1863-1947)

Henry Ford est un industriel qui a fondé la société automobile Ford Company en
1903. En 1908, il a lancé la Ford T, un modèle économique qui deviendra vite le
symbole de la société de consommation de masse naissante aux Etats-Unis : il va le
fabriquer en si grande série que ce modèle va représenter la moitié des véhicules
circulant aux Etats-Unis en 1918. Pour arriver à cette performance inouïe, il a
combiné les principes de l’O.S.T. avec ses propres innovations technologiques et
salariales connues sous le nom de Fordisme5, à savoir :

- Le travail à la chaîne ou ligne de montage par : (i) l’utilisation d’un convoyeur qui
transporte les pièces d’un poste { un autre et qui réduit ainsi les temps morts (ce
ne sont plus les ouvriers qui se déplacent, mais les pièces) ; (ii) l’introduction du
travail { la chaîne (dont il est l’inventeur et non F. Taylor) qui impose un rythme
de travail aux ouvriers et qui permet donc d’augmenter les cadences. C’est ainsi
que le temps de montage de la Ford T est passé de 12 h en 1908 { 1h20’
seulement en 1920.
- La standardisation par la fabrication d’un même modèle (la Ford T) d’une même
couleur (le noir), d’où réduction importante du coût des intrants, du coût unitaire
total et donc aussi du prix de vente.
- La production de masse qui permet de faire des économies d’échelle et donc de
réduire encore plus le coût unitaire et donc le prix de vente.
- L’augmentation très sensible des salaires (5$/jour contre une moyenne de
2$/jour dans l’industrie automobile de l’époque) suite { l’augmentation de la
productivité, afin de permettre { tout le monde de s’acheter sa propre voiture,
c.à.d. la Ford T. C’est ainsi qu’en 1921, la Ford T ne coûtait que 415 $ alors que le
salaire d’un ouvrier de Ford atteignait 480 $/mois (120 $/semaine).

5
Ford H., Ma vie et mon œuvre, Payot, Paris, 1925.
9

c. Franck B. Gilbreth (1868-1924) et Lilian Gilbreth (1878-1972)

Franck Gilbreth (ingénieur en bâtiment) et son épouse Liliane Gilbreth (psychologue)6


ont dirigé leurs études vers deux objectifs : (i) éliminer les gestes inutiles (notamment
dans la briqueterie) ; (ii) concevoir et utiliser les outils les mieux adaptés pour
maximiser les performances des ouvriers. A cet effet :

- ils ont été parmi les premiers { utiliser des films d’animation pour étudier les
mouvements du corps et des membres ;
- ils ont inventé le micro-chronomètre capable de mesurer les temps à 2
microsecondes près : en plaçant l’appareil dans le champ du sujet photographié
pour pouvoir déterminer le temps exact consacré par l’ouvrier { chacun de ses
mouvements, ils ont pu identifier et donc éliminer les gestes inutiles, invisibles { l’œil
nu ;
- ils ont élaboré un système répertoriant 17 mouvements élémentaires du corps qu’ils
ont baptisé THERBLIGS (anagramme de Gilbreth), ce qui a facilité la mesure des
temps (mesure des temps des mouvements ou motions times measurement) et
l’allocation des temps aux ouvriers pour l’exécution des tâches (temps alloués).

d. Henry Gantt (1861-1919)

Ce collaborateur de Taylor chez « Midvale et Bethlehem » a spécifié sa pensée dans deux


ouvrages7. On retiendra qu’il est surtout connu pour :

- avoir mis au point une méthode de motivation consistant, d’une part, { accorder une
prime aux ouvriers qui achèvent leur tâche avant le temps imparti, et, d’autre part,
une prime au contremaître pour chaque ouvrier ayant respecté les délais lui impartis
ainsi qu’une bonification si toute son équipe y arrive ;
- avoir inventé un graphique à barres comme outil de planification et de contrôle du
travail, plus connu sous le nom de « Diagramme de Gantt »8.

1.2.2. Le courant de la Théorie Administrative

a. Henri Fayol (1841-1925)

6
Gilbreth F., Motion study, D. Van Nostrand, New York, 1911) ; Gilbreth F. et
Gilbreth L., Applied motion study, Sturgis & Walton Co, New York, 1917; Gilbreth F.
et Gilbreth L., Time and motion study as fundamental factors in planning and control, The
Mountain Press, New Jersey, 1921.
7
Gantt H., Work, wages and profits, Engineering Magazine Co, New York, 1916 ; Gantt
H., Organizing for work, Harcourt, Brace and Howe, New York, 1919.
8
Voir point 16.2.3. du chapitre 16.
10

Alors que F. Taylor est un scientifique qui s’intéresse au management des ateliers, H.
Fayol (France) est le Directeur Général d’une grande entreprise charbonnière (la
Compagnie de Commentry, France) qui s’intéresse { la direction des entreprises. H.
Fayol est donc { la direction ce que F. Taylor est { l’atelier.

Il a ainsi défini les cinq fonctions managériales que sont prévoir, organiser, commander,
coordonner et contrôler9, en affirmant que la gestion est un métier que l’on doit
apprendre sur les bancs de l’université comme on apprend { devenir médecin,
ingénieur, biologiste, psychologue ou avocat. Nous reviendrons plus en détail sur ces
cinq fonctions au chapitre 3 de cette partie et de façon encore plus détaillée dans les
quatre autres parties.

b. Max Weber (1864-1920)

Ce sociologue allemand a élaboré un modèle théorique d’organisation appelé


« bureaucratie », modèle basé sur six principes, à savoir : (i) la division du travail ; (ii) la
hiérarchisation du pouvoir ; (iii) la sélection formelle ; (iv) les règles et les normes
formelles ; (v) l’impersonnalité ; (vi) l’évolution professionnelle10.

A partir de ces six principes, on peut définir la bureaucratie comme un modèle théorique
d’organisation caractérisé par la division du travail et la mise en place d’une hiérarchie
clairement définie, des règles et des normes précises, ainsi qu’un mode de relations
impersonnel.

1.3. L’Ecole des Relations Humaines

Les insuffisances de l’Ecole Classique, la grande crise de 1929 et l’influence de la


psychologie appliquée (issue des travaux de Sigmund Freud), ont entrainé une certaine
contestation de la pensée classique et de son rationalisme. C’est ainsi qu’est née l’Ecole
des Relations Humaines dont le point de départ est le constat suivant : les résultats
obtenus par les managers sont en grande partie tributaires de la collaboration qu’ils
obtiennent ou qui s’établit avec leurs agents. De l{ découle son principe fondamental qui
peut ainsi se résumer : il faut humaniser les méthodes de management pour la
satisfaction des employés, car un employé satisfait devient automatiquement plus
productif.

Cette école nous a permis d’asseoir bon nombre de nos connaissances actuelles sur la
gestion des ressources humaines à travers les notions et techniques ci-après : le
leadership, la motivation, la détection des profils psychologiques, la définition des postes
et des organigrammes, le travail en équipe, l’évaluation des performances, la gestion des

9
Fayol H., Administration Générale et Industrielle, Dunod, Paris, 1918.
10
Weber M., The social and economic organizations, Free Press, New York, 1947.
11

conflits, les enquêtes sur les attitudes, l’orientation professionnelle, la formation des
cadres, la participation, les systèmes de rémunération par équipe ou encore les
techniques de négociation.
Comme on le voit { travers l’ensemble du corps de connaissances mis au point, cette
école compte de très nombreux tenants, principalement des psychologues et des
sociologues, dont voici les principaux.

a. Robert Owen (1771-1858)

Ce chef d’entreprise écossais peut être considéré comme le précurseur de cette école. En
effet, il a été révolté par les conditions de travail de son époque (travail des enfants de
moins de 10 ans, journées de 13 heures de travail, mauvaises conditions de travail,….),
reprochant ainsi aux industriels de « mieux traiter leurs équipements que leurs
ouvriers ». Il s’est donc rangé du côté des réformistes, en améliorant les conditions de
travail des ouvriers, ce qui devait avoir comme conséquence directe l’accroissement du
profit des entreprises.

C’est ainsi que dès 182511, il va favoriser les horaires réglementés, la pause repas payée,
la législation sur le travail des enfants, la promotion de l’instruction publique, la
fourniture des outils de travail par l’entreprise et les projets d’utilité publique.

b. Hugo Munsterberg (1863-1916)

Il est considéré comme le père de la psychologie industrielle12. Celle-ci peut se définir


comme l’étude scientifique des individus au travail en vue d’optimiser leur productivité
et leur adaptation professionnelle.

Il recommande notamment : (i) l’adoption des tests psychologiques pour améliorer la


sélection des employés ; (ii) l’apprentissage comme moyen de formation ; (iii) l’étude du
comportement humain pour déterminer les techniques de motivation les plus efficaces.

Ce faisant, il a établi un lien entre deux disciplines, le management scientifique et la


psychologie industrielle : il veut donc améliorer l’efficacité des entreprises industrielles
par l’analyse scientifique et par un meilleur ajustement des compétences industrielles
aux exigences des différents emplois.

A ce titre, il doit être considéré comme le précurseur des connaissances actuelles en


matière de sélection, de formation professionnelle, de définition des postes et de
motivation.

Owen R., A new view of society, E. Bliss & White, New York, 1825.
11

Munsterberg H., Psychology and industrial efficiency, Houghton Mifflin, New York,
12

1913.
12

c. Mary Parker Follett (1868-1933)

Elle soutient que l’organisation des entreprises peut être étudiée du point de vue des
comportements individuels et collectifs13. Elle donne ainsi une vision humaniste de
l’entreprise en estimant notamment que la gestion des entreprises doit se fonder sur
une éthique collective plutôt que sur l’individualisme, le potentiel de chacun ne pouvant
s’exprimer qu’{ travers le groupe.

Elle en conclut que le travail du manager doit consister à harmoniser les efforts
individuels pour arriver { les coordonner dans un effort collectif impliquant l’exercice
du pouvoir avec les employés14. Ainsi, managers et travailleurs sont des partenaires au
sein d’un même groupe. Ce qui implique que les managers doivent diriger les employés
en s’appuyant sur leur expertise et leurs connaissances, et non sur l’autorité formelle
liée à leur position.

d. Chester Barnard (1886-1961)

Contrairement { M. Weber qu’il a beaucoup lu, cet homme d’affaires américain


(Président de Bell Telephone Cy New Jersey) ne considère pas l’entreprise comme un
système impersonnel, mais plutôt comme un système composé d’êtres humains et donc
reposant sur l’ensemble des interactions sociales.

D’où, la principale fonction du manager consiste { communiquer avec ses collaborateurs


et { les stimuler pour obtenir d’eux un effort plus important. Par conséquent, la réussite
d’une entreprise dépend en grande partie de la capacité du manager { entretenir de
bonnes relations avec ses employés et à obtenir leur soumission à son autorité15.

La réussite de l’entreprise dépend aussi de la qualité des relations que le manager


pourra nouer avec les individus et les institutions que l’entreprise est appelée { côtoyer
régulièrement (actionnaires, fournisseurs, banquiers, clients, pouvoirs publics,…). Par
conséquent, le manager se doit d’abord d’examiner l’environnement externe de son
entreprise pour, dans un deuxième temps, adapter ses méthodes de gestion.

e. Elton Mayo (1880-1949)

13
Follett M., The new state : group organization, the solution of popular government,
Longman Green, Londres, 1918.
14
Voir la cogestion au point 9.3.7. du chapitre 9.
15
Chester I. Barnard, The function of Executive, Harvard Business Press, Cambridge,
Ma, 1938.
13

Ce professeur de Harvard est le fondateur du « Mouvement des Relations Humaines » et


de la sociologie du travail. Il a réalisé beaucoup d’enquêtes et d’expériences sur la
psychologie industrielle dont la plus connue est celle qu’il a conduite, { partir de 1927,
dans les usines Hawthorne de Western Electric Co à Chicago avec ses collaborateurs de la
Harvard Business School16.

Dans cette expérience, il a voulu étudier l’effet des variations de l’environnement


physique du travail et des conditions de travail et de rémunération (éclairage, définition
des postes, horaires et aménagement du temps de travail quotidien et hebdomadaire,
introduction du temps de repos, primes et grilles des salaires individuelles et
collectives) sur la productivité d’un groupe expérimental de six ouvriers dans un atelier
de bobinage. On peut ainsi résumer les résultats de cette expérience :

- la productivité du groupe expérimental a augmenté avec l’amélioration des


conditions de travail et de rémunération par rapport à celle du groupe témoin
(c’était l’effet attendu) ;
- la productivité a continué à augmenter dans le groupe expérimental même si on
détériorait les conditions de travail et de rémunération (c’était l’effet inattendu
appelé « Effet Hawthorne »).

Il en a tiré la conclusion que l’augmentation de la productivité n’était pas seulement due


{ l’amélioration des conditions de travail et de rémunération, mais au changement des
relations sociales : (i) au sein du groupe expérimental devenu homogène ; (ii) entre le
groupe expérimental et la Direction (du fait notamment de l’attention leur apportée par
leurs chefs). D’où, la motivation économique (l’argent) n’est pas la seule explication du
comportement humain : il faut aussi y ajouter des facteurs de groupes que sont les
normes, les sentiments et la sécurité du groupe. C’est ainsi que E. Mayo a proposé la
mise en place des structures d’autorité donnant plus de responsabilité aux travailleurs.

f. Kurt Lewin (1890-1947)

Il est { l’origine de la dynamique des groupes17, notion qui s’applique notamment aux
champs ci-après :

- la décision du groupe comme procédure de changement : il est plus facile de changer


les individus appartenant { un groupe que de changer chacun d’eux séparément ;
- les styles de leadership et leur influence tant sur l’atmosphère du groupe que sur le
fonctionnement du groupe ;

Mayo M., The human problems of an industrial civilization, McMillan, New York, 1933.
16

Lewin K., A dynamic theory of personality, Selected papers, Lewin Press, 2013 (première
17

publication en 1935).
14

- les processus d’émergence des structures de groupes en relation avec les processus
d’influence.

g. Frederick Herzberg (1923-2000)

Ce professeur de psychologie a fait beaucoup de recherches sur la motivation de


l’homme au travail et l’adéquation des méthodes d’organisation du travail aux besoins
de l’homme au travail. Il est connu pour sa « Théorie des deux facteurs »18 que nous
allons examiner plus loin19.

h. Dale Carnegie (1888-1955)

Il a eu une forte influence entre 1930 et 1950 sur des millions de lecteurs comme sur des
milliers de managers assistant à ses séminaires. Il explique que pour réussir, il faut
notamment : (i) faire en sorte que les autres se sentent importants, en leur témoignant
une sincère reconnaissance de leurs efforts ; (ii) convertir les autres à ses propres vues
en leur laissant la parole, en se montrant compréhensif et en ne les accusant jamais
d’avoir tort ; (iii) changer l’attitude des autres en mettant en valeur leurs bons côtés et
en permettant aux fautifs de sauver la face20.

i. Abraham Maslow (1908-1970)

Ce psychologue a classé les besoins de l’homme en cinq catégories et, à partir de cette
classification, il a élaboré une théorie de la motivation connue sous le nom de « Théorie
des besoins de Maslow » ou la « Hiérarchie des besoins de Maslow »21, théorie sur
laquelle nous allons revenir plus loin22.

j. Douglass Mc Gregor (1906-1964)

Il est surtout connu pour ses deux théories contradictoires sur la nature humaine, la
« Théorie X « et la « Théorie Y »23, théories sur lesquelles nous allons revenir
ultérieurement24.

k. Les « behavioristes » ou comportementalistes

18
Herzberg F., Work and the nature of man, World Publishing, 1966.
19
Voir point 12.2.3.du chapitre 12.
20
Carnegie D., How to win friends and influence people, Simon & Schuster, New York,
1936.
21
Maslow A., A theory of human motivation », in Psychological Review, Juillet 1943, pp.
370-396.
22
Point 12.2.1. du chapitre 12.
23
Mc Gregor D., The human side of enterprise, McGraw Hill, New York, 1960.
24
Voir point 12.2.2. du chapitre 12.
15

Contrairement aux précédents chercheurs qui se sont plus basés sur leurs convictions
que sur les résultats sur le terrain, les « béhavioristes » vont faire des recherches
objectives en écartant tout préjugé personnel. Les plus connus d’entre eux sont F.
Skinner, N. Miller, J.C. Dellard et A. Bandura.

Pour eux, les comportements humains sont le produit des interactions entre les hommes
et leur environnement. C’est ainsi qu’ils se sont appliqués { mettre au point des
protocoles expérimentaux susceptibles d’être reproduits par d’autres chercheurs afin
d’arriver { bâtir une véritable science du comportement organisationnel.

1.4. L’Ecole Quantitative

Cette école est souvent désignée sous le nom de « Recherche Opérationnelle » (R.O.) ou
de « Science du Management ». Elle s’est développée { partir des méthodes
mathématiques et statistiques mises au point pendant la IIème Guerre Mondiale.

En effet, devant exploiter au mieux ses faibles moyens aériens face à ceux de
l’Allemagne, l’Angleterre a demandé { ses scientifiques de concevoir un modèle de
répartition optimale de ses ressources. De même, l’armée américaine avait demandé {
ses scientifiques de déterminer la puissance optimale des grenades sous-marines que
ses avions et ses navires devaient larguer sur les sous-marins allemands afin
d’augmenter les chances de survie de leurs convois pendant la traversée de l’Atlantique
Nord.

C’est ainsi que ces méthodes quantitatives utilisées par les militaires pendant la IIème
Guerre Mondiale, seront transposées après le fin de cette dernière dans le monde des
affaires afin d’améliorer l’efficacité de la prise des décisions. De nombreux officiers se
reconvertiront ainsi dans les affaires dont l’un des plus connus est Robert McNamara
(qui fut successivement officier de l’armée américaine, Président de Ford, Secrétaire { la
Défense et Président de la Banque Mondiale).

L’approche quantitative du management, fait recours aux statistiques, aux simulations


informatiques, aux modèles mathématiques d’optimisation et de gestion de
l’information. C’est ainsi que la programmation linéaire va être utilisée pour améliorer la
répartition des ressources, que la prévision et l’exécution des tâches vont se baser sur la
détermination du chemin critique et que la détermination du niveau optimal du stock
sera facilitée par des modèles économiques de réapprovisionnement25.

Cette approche quantitative du management sera surtout utilisée dans les fonctions
managériales de planification et de contrôle qui se prêtent le mieux aux méthodes
quantitatives.

Voir point 5.8. du chapitre 5.


25
16

1.5. L’Ecole Contemporaine

Le management d’aujourd’hui est une synthèse des trois écoles ci-dessus analysées.
Pour le comprendre, commençons par identifier les causes qui sont à la base de chacune
de ces trois écoles du management. En effet, les évènements économiques et sociaux ont
une influence sur la réflexion des théoriciens et sur les préoccupations des managers.
D’où, il existe une relation de cause { effet entre les problèmes de la société et
l’émergence des nouvelles approches pour résoudre ces problèmes.

1.5.1. Les déterminants de l’évolution des différentes écoles de management

a. Les déterminants de l’approche classique

A la fin du XIXème Siècle et au début du XXème Siècle, les entreprises industrielles et les
économies de leurs pays respectifs avaient quatre principales caractéristiques :

- la gestion des entreprises n’était généralement ni planifiée ni organisée : d’où, les


responsabilités professionnelles étaient vagues et ambiguës, les managers n’ayant
aucune idée exacte de ce qu’il fallait faire ;
- l’émergence de l’énergie mécanique qui a permis la production de masse, donnant
ainsi naissance à des grandes entreprises : d’où, la nécessité de mobiliser des
capitaux de plus en plus importants, accroissant ainsi les enjeux et les risques
financiers ;
- l’exode rural était très fort avec un transfert massif de la main-d’œuvre agricole vers
les usines : d’où, la coexistence du machinisme avec une main-d’œuvre très peu
formée ;
- le niveau de vie de la population était très bas, de même que les salaires des ouvriers
étaient très modestes : d’où, l’impossibilité pour la population en général, et pour les
ouvriers en particulier, d’acquérir des biens durables ou d’être propriétaires de leurs
logements.

Dans ces conditions, l’objectif de l’approche classique a été d’augmenter l’efficacité des
entreprises et d’accroitre les rendements. Ce qui a été fait, avec comme conséquences :

- des gains de productivité qui ont augmenté les profits des entreprises ;
- une baisse très sensible du prix de revient des produits (acier, briques et autres
matériaux de construction,…) et donc du prix de vente des produits, particulièrement
des biens durables ;
- une augmentation des salaires des ouvriers et l’amélioration de leur niveau de vie ;
17

- l’accès des ouvriers aux biens durables tels que les réfrigérateurs, les véhicules, les
logements,… ;
- un accroissement de la demande et donc la création de nouveaux emplois.

b. Les déterminants de l’approche des relations humaines

Quant { l’approche des relations humaines (début des années 1930), elle doit son
émergence à deux déterminants :

- L’aliénation de l’ouvrier consécutivement { l’approche classique de l’O.S.T. de F.


Taylor (séparation entre les tâches de conception et les tâches d’exécution),
aliénation à laquelle il fallait remédier pour escompter accroitre les rendements. En
effet, pour les classiques, les employés sont des machines { qui il suffit d’assigner un
objectif et qu’il faut motiver { travers une rémunération conséquente. Or, ceci s’est
avéré faux du fait que l’aliénation consécutive { l’application de l’O.S.T. a été au
contraire une cause de blocage des rendements, voire carrément de leur baisse.
- La crise de 1929 qui a frappé les Etats-Unis de plein fouet et qui n’a pu être jugulée
qu’avec la mise en œuvre de la politique du « New Deal » par le gouvernement
américain. Cette politique du « New Deal » s’est concrétisée par un certain nombre
de mesures favorables au monde du travail, notamment la revalorisation des
pensions de retraite, l’instauration du salaire minimum ou l’indemnisation des
chômeurs. Ainsi, l’humanisation du travail a été la réponse aux préoccupations de la
société.

c. Les déterminants de l’approche scientifique

Quant { l’approche quantitative, elle a été motivée par la nécessité d’exploiter une
opportunité, { savoir la disponibilité d’un ensemble de techniques mathématiques et
statistiques qui avaient été mises au point pendant la IIème Guerre Mondiale
(programmation linéaire, théorie des files d’attente, théorie des jeux, théorie des
probabilités,…) pour résoudre des problèmes militaires, et dont l’application était
susceptible d’accroître l’efficacité des entreprise.

1.5.2. Les approches contemporaines du management

Comme on vient de le voir, les trois écoles ci-dessus examinées ont été, à chaque fois, des
réponses aux problèmes posés par la société, mais des réponses isolées. C’est ainsi que
les chercheurs se sont penchés sur la question pour tenter de mettre au point des
théories unificatrices qui sont au nombre de trois.

a. L’approche par les processus


18

C’est Harold Koonz26 qui en est le fondateur : il a ainsi fait une revue des trois approches
et il est arrivé { la conclusion que beaucoup d’entre elles n’étaient que des outils de
gestion.

En conséquence, il a proposé une théorie unificatrice, l’approche par les processus,


fondée sur les quatre fonctions managériales de Fayol. On peut donc avancer que c’est
Fayol qui a introduit cette approche.

b. L’analyse systémique

Cette approche considère l’entreprise comme un système, c.{.d. un ensemble composé


de plusieurs sous-ensembles, interdépendants, hiérarchisés, aux sous-objectifs souvent
divergents et devant être agencés de façon à former un tout cohérent pour atteindre
l’objectif assigné au système.

Il existe deux types de systèmes : (i) les systèmes fermés qui n’interagissent pas avec
leur environnement (ni influence sur leur environnement, ni conséquence de leur
environnement) ; (ii) les systèmes ouverts qui interagissent de façon dynamique avec
leur environnement.

Quant { l’entreprise, elle est un système ouvert qui est en dialogue permanent avec ses
partenaires ou ses parties prenantes que sont les employés, les actionnaires, les clients,
les fournisseurs, les banquiers, les concurrents, les pouvoirs publics, les syndicats, les
groupes de pression,… : ses partenaires de l’entreprise constituent son environnement
social, culturel, politique, économique et technologique.

Etant donné que l’entreprise ne fonctionne pas en vase clos, cette théorie conclut donc
que sa survie dépend de l’interaction que le manager va établir avec son environnement.

D’où, le rôle du manager est de coordonner et de combiner les éléments


interdépendants de cet environnement tant interne qu’externe, pour atteindre son
objectif. Par conséquent, le manager doit être le lien entre l’entreprise et son
environnement, lequel représente à la fois des opportunités et des contraintes/menaces
pour son entreprise. Il doit donc se montrer attentif vis-à-vis des partenaires les plus
pertinents pour son entreprise.

Comme on le voit, cette approche se situe dans la droite ligne de Chester Barnard dont
on peut dès lors dire qu’il en est le précurseur.

Un des principaux tenants de cette approche systémique est Henry Minzberg27. Nous
allons ultérieurement revenir sur son approche28.

Koonz H., The management theory jungle, in Journal of Academy of Management,


26

Décembre 1961, pp. 174-188 ; Koonz H. & al. : Toward a unified theory of management,
McGraw Hill, New York, 1964.
19

c. La théorie de la contingence ou l’approche situationnelle

D’après cette approche mise au point par Paul Lawrence et Jay Lorsch29, il n’existe pas
des méthodes ou des principes applicables de la même façon à toutes les entreprises et
adaptables à toutes les situations. Il faut donc, à chaque fois, adapter les méthodes et les
principes à chaque environnement particulier, à chaque entreprise particulière et à
chaque situation particulière en tenant compte des variables dites de contingence dont
quatre principalement :

- la taille de l’entreprise : plus l’effectif d’une entreprise est important, plus les
problèmes de coordination se posent, avec comme conséquence que la structure
organisationnelle d’une grande entreprise sera rarement adaptée à une PME, et vice
versa ;
- la qualification des technologies : les structures organisationnelles, les modes de
gestion et les systèmes de contrôle ne seront pas les mêmes selon que l’entreprise
exploite une technologie usuelle ou une technologie non standard ;
- l’incertitude environnementale : le processus managérial ne sera pas le même selon
que l’entreprise évolue dans un environnement très incertain et instable ou dans un
environnement certain et stable sur le plan économique, politique, technologique,
sociologique ou culturel ;
- les particularités individuelles : les techniques de motivation, le système de
leadership ou la définition des postes, ne seront pas les mêmes selon le niveau
d’ambition, d’instruction, d’autonomie ou des attentes des employés (les deux
derniers étant eux-mêmes particulièrement tributaires des cultures dont sont issus
les employés dans certains cas).

1.6. Les sources du management

Comme nous venons de le voir, le management est une science interdisciplinaire qui
puise dans beaucoup de disciplines scientifiques. Nous allons donc terminer ce chapitre
par les six plus importantes disciplines qui interviennent dans cette science.

1.6.1. L’économie

L’économie est la science de l’affectation des ressources qui sont limitées par définition,
à des besoins qui sont illimités par définition.

27
Minzberg H., Structure et dynamique des organisations, Editions d’Organisation, Paris,
1982 ; Minzberg H., Le management, voyage au centre des organisations, Editions
d’Organisation, Paris, 1998, 2004, 6ème tirage 2011.
28
Point 4.3.2. du chapitre 4 et point 9.1. du chapitre 9.
29
Lawrence P. et Lorsch J., Organization and environment : managing differentiation and
integration, Harvard Business School Classics, Paperback, May 1, 1986.
20

Son apport au management est déterminant, car elle permet de mieux comprendre
l’environnement économique dans lequel l’entreprise évolue, et donc de déterminer les
contraintes auxquelles cette dernière doit s’adapter et les opportunités qu’elle doit
saisir. Cet environnement est constitué notamment de l’évolution de la conjoncture
économique (croissance, emploi, inflation, valeur de la monnaie, taux d’intérêt, épargne
intérieure, consommation, balances extérieures, coûts des facteurs…), du niveau l’offre
des biens et services, du niveau de la demande des biens et services, de la concurrence,…

A ce titre, elle est la discipline la plus proche du management, car ce dernier n’est rien
d’autre que la mise en pratique des principes de l’économie au niveau des entreprises {
travers la recherche permanente de l’efficacité et de l’efficience.

1.6.2. La psychologie

La psychologie est la science qui cherche à évaluer, à expliquer et à modifier les


comportements humains, y compris la nature des interactions des individus entre eux.

Son apport au management est donc essentiel, car elle permet de mieux comprendre les
besoins à la fois variés et en constante évolution des travailleurs, à travers les notions de
la perception, de la motivation, du leadership, de l’autorité, de la confiance, des conflits
ou de la communication.

1.6.3. La sociologie

La sociologie est l’étude des interactions sociales et culturelles entre individus et


groupes. Alors qu’en psychologie l’objet premier de l’étude est l’individu, la sociologie
s’attache avant tout { étudier les groupes pour comprendre les déterminants de leurs
attitudes et de leurs comportements.
Son apport au management est aussi essentiel, car elle permet de comprendre
notamment :

- en quoi l’évolution des sociétés affecte la pratique du management (globalisation et


diversité culturelles, urbanisation, genre, laïcisation, modèles de vie familiale,…) ;
- en quoi les changements démographiques ont un impact sur le marché du travail et
sur la demande des biens et services (taux de mariages, taux de divorces, taux de
familles monoparentales, taux d’urbanisation,…) ;
- l’impact des nouvelles méthodes d’enseignement et d’apprentissage sur la
qualification du personnel (e-learning p.ex.) ;
- l’impact des NTIC sur les organisations.

1.6.4. L’anthropologie
21

L’anthropologie est la science qui étudie les sociétés afin d’expliquer le fonctionnement
des êtres humains et leurs activités. Elle est subdivisée en deux sous-disciplines. D’un
côté, l’anthropologie sociale qui cherche { établir les lois de la vie en société sous l’angle
du fonctionnement des institutions et des organisations. De l’autre côté, l’anthropologie
culturelle qui accorde une importance particulière aux objets ainsi qu’aux phénomènes
de constitution et de transmission de la culture.

Son apport au management est essentiel, car elle a permis de mieux comprendre les
valeurs, les principes, les attitudes et les comportements des ressortissants de différents
pays, ainsi que la culture propre à chaque organisation30.

1.6.5. La philosophie

La philosophie étudie la nature des choses, notamment l’éthique et les valeurs. L’éthique
est l’établissement des normes devant s’appliquer { la conduite des hommes : elle porte
ainsi sur la raison d’être des organisations. C’est ainsi que l’on peut avoir plusieurs
éthiques telles que :

- l’éthique de la liberté qui considère que les droits légaux de l’homme sont la liberté,
l’égalité, la justice et la propriété privée (Locke) ;
- l’éthique protestante qui met en avant l’épargne, le travail et la réussite (Calvin) ;
- l’éthique libérale pour laquelle seules les forces du marché (l’offre, la demande et la
concurrence) peuvent intervenir comme régulateur de l’économie, l’Etat devant se
cantonner à ses fonctions régaliennes (Adam Smith).

Son apport au management est donc aussi important, car la philosophie est à la base de
la création des organisations, toute organisation étant porteuse de valeurs qui
définissent sa finalité. Bien plus, tout manager, { l’instar de tout être humain, a
intériorisé un certain nombre des valeurs qui ont une incidence directe sur sa pratique
managériale et donc sur sa capacité à réaliser les objectifs assignés à son entreprise31.

1.6.6. La science politique

La science politique est à la croisée de plusieurs disciplines, à savoir la sociologie, la


philosophie et l’anthropologie. Elle est l’étude des comportements des individus et des
modes de régulation des groupes dans un environnement institutionnalisé de pouvoir.

Son apport au management est essentiel, car elle permet de mieux comprendre de
nombreux concepts, tels que la structuration et la résolution des conflits, l’attribution et
les jeux du pouvoir ou les stratégies des organisations.

30
Voir point 3.5. du chapitre 3 sur la culture d’entreprise.
31
Voir point 2.3. du chapitre 2 sur la notion de philosophie du management
22

CHAPITRE 2 : LES CONCEPTS DE BASE EN MANAGEMENT

Dans ce chapitre, nous allons passer en revue le concept du management (définition,


importance et principes) ainsi qu’un certain nombre d’autres concepts qui lui sont liés,
particulièrement celui d’objectif. En effet, au vu de son importance dans le processus
managérial, nous allons très longuement nous étendre sur ce concept d’objectif.

2.1. La définition du management et des notions connexes

Le management peut se définir comme le processus qui consiste à fixer des objectifs et à
les atteindre en utilisant les ressources disponibles (ressources humaines, financières,
matérielles et immatérielles). Ce processus est constitué d’un ensemble de quatre
fonctions ou activités de base reliées entre elles et donc interdépendantes, à savoir la
planification, l’organisation, la direction et le contrôle.

Cette définition du management fait ainsi appel à cinq autres concepts ou notions :

- la notion de processus qui implique une série d’activités récurrentes ;


- la notion d’objectif ou de résultat (extrant ou output) qui donne un sens au
processus de management ;
- la notion d’efficacité qui est liée { celle d’objectif : c’est la capacité d’une personne ou
d’une organisation { atteindre l’objectif qui lui a été assigné ;
- la notion de ressources (intrant ou inputs) sans lesquelles le processus managérial
ne peut être mis en œuvre et l’objectif ne peut donc être atteint ;
- la notion d’efficience qui est liée { celle des ressources et qui est la capacité à
atteindre l’objectif { un coût moindre (en argent, en temps, en espace, en
personnel,….), c.{.d. par une amélioration continue du rapport Output/Input ou
Production/Ressources : c’est un concept clé du fait qu’il permet la baisse des coûts
et qu’il est donc source de compétitivité pour l’entreprise.

Revenons plus particulièrement sur les deux notions d’efficacité et d’efficience qui,
comme on le voit, sont aussi très proches. Ainsi, on peut avoir une personne ou une
organisation :

- efficace et efficient(e) : on ne se contente pas seulement d’atteindre les objectifs


assignés, mais on le fait à un coût moindre en améliorant le rapport Output/Input ;
- efficace et non efficient(e) : on se limite à atteindre les objectifs fixés sans améliorer
le rapport Output/Input ;
23

- efficient(e) et non efficace : on améliore le rapport Output/Input sans pour autant


atteindre les objectifs assignés (cas d’une université qui, pour résorber son déficit,
procède à une compression drastique de toutes ses dépenses, y compris sur le poste
enseignants, avec comme conséquence une forte baisse du taux d’encadrement des
étudiants et donc de la qualité de l’enseignement) ;
- non efficace et non efficient(e) : on est incapable d’atteindre les objectifs assignés,
encore moins d’améliorer le rapport Output/Input.

2.2. Les managers

Ceux qui conduisent ce processus managérial sont appelés « managers » ou dirigeants. A


ce titre, ils sont au cœur du processus managérial.

Il faut souligner que les managers peuvent, selon les cas, se confondre avec les
propriétaires, être différents d’eux ou cohabiter avec eux. C’est ainsi que dans les TPE et
dans les entreprises familiales, les propriétaires sont généralement eux-mêmes les
managers. Cependant, quand l’entreprise augmente sa taille (PME et grandes
entreprises), les propriétaires, parmi lesquels on retrouve aussi des managers, font
appel à des managers professionnels : ainsi, il y a cohabitation entre les deux groupes de
propriétaires et de managers professionnels.

C’est ce groupe de managers professionnels que John K. Galbraith a appelé la


« technostructure »32. Galbraith considère que, dans les grandes entreprises, les
managers professionnels constituent une nouvelle classe, celle qui détient le pouvoir
réel, les propriétaires n’ayant plus qu’un rôle passif d’apporteurs de capitaux. Autrement
dit, les fonctions de direction (rôle actif de gestion) sont ainsi séparées de celles de
propriétaire (rôle passif d’apporteurs de capitaux). Ce pouvoir détenu par les managers
professionnels et non propriétaires, qu’il appelle le « pouvoir managérial », est
imputable à leur maîtrise des techniques dont l’entreprise a besoin pour se développer,
c.à.d. à leurs compétences techniques, financières, commerciales et en ressources
humaines. Galbraith ajoute que les membres de la technostructure utilisent souvent ce
pouvoir managérial pour leurs propres intérêts au détriment de ceux de l’entreprise.

Les managers (dirigeants) sont donc les membres du personnel qui ont comme tâche de
coordonner et de diriger les activités d’autres membres du personnel, qu’ils soient eux-
mêmes managers ou simples employés. Ils se situent dans la partie supérieure de la
pyramide et ont différentes appellations, telles que contremaître, chef d’équipe, gérant,
superviseur, chef de division, directeur, directeur principal, directeur général,
administrateur délégué ou président.

Les managers sont différents des employés (exécutants ou collaborateurs) qui


constituent la deuxième catégorie des membres d’une organisation et qui se situent au

Galbraith J., Le Nouvel Etat Industriel, Gallimard, Paris, 1974.


32
24

bas de la pyramide : ils sont chargés de l’exécution d’une tâche spécifique, ont peu ou
pas du tout de responsabilités, ont peu ou pas du tout de personnes à superviser. Les
managers se répartissent à leur tour en cinq catégories, à savoir :

a. Les cadres subalternes ou agents de maîtrise

Ce sont des cadres de premier niveau. Il s’agit soit des diplômés des universités ou de
l’enseignement supérieur qui sont en début de carrière, soit des simples employés qui
ont gravi les échelles par promotions successives.

Ils sont responsables des unités de petite taille composées de travailleurs non cadres,
c.à.d. des employés (personnes ne possédant pas un diplôme universitaire ou de
l’enseignement supérieur) : leur tâche consiste à gérer les activités quotidiennes
d’autres employés. Ils travaillent en suivant scrupuleusement les instructions émanant
des cadres intermédiaires ou supérieurs.

Ils portent les titres tels que surveillant, contremaître, chef d’atelier, chef de section, chef
d’équipe ou chef de bureau.

b. Les cadres intermédiaires

Ils se situent entre les cadres subalternes (travail de terrain) et les cadres supérieurs ou
de direction (sommet de la hiérarchie).

Ils supervisent plusieurs unités de petite taille (tâches de coordination). Leur rôle est de
traduire les objectifs de la haute direction en objectifs opérationnels. A ce titre, ils
dirigent les cadres subalternes.

C’est le cas des chefs d’agences bancaires, des chefs de service (achats, comptabilité,
statistiques,…), des directeurs d’usines, des directeurs régionaux de vente, des
directeurs de collèges ou de lycées, des chefs de projets …

c. Les cadres dirigeants, supérieurs ou de direction

Ils se situent au sommet de la pyramide et leur responsabilité s’étend au niveau de toute


l’organisation ou au niveau des principales composantes de l’organisation.

Ils ont comme tâche de prendre les décisions concernant l’ensemble de l’organisation ou
les grandes subdivisions de l’organisation, et d’adopter des règles qui s’appliquent {
tous. Ils sont donc responsables de la gestion stratégique de l’organisation, c.{.d. qu’ils
doivent sans cesse penser le futur de l’entreprise pour élaborer les stratégies { partir
d’une analyse permanente de l’environnement qui leur permet de déceler les
25

menaces/contraintes/risques et les opportunités, tout en établissant un équilibre entre


les différents objectifs de l’organisation (profit, croissance, survie et autonomie) et entre
les différents horizons temporels (très court, court, moyen et long termes).

Ils portent des titres tels que Président Directeur Général (PDG), Président
Administrateur Délégué (PAD), Président, Vice-Président, Directeur Général,
Administrateur Délégué, Secrétaire Général, Membres du Comité de Direction, Directeur
Principal, Directeur ou Chef de Département. Ils dépendent directement du Conseil
d’Administration (du moins certains d’entre eux), { qui ils doivent rendre compte, qui
les nomme et les relève de leurs fonctions.

d. Les Administrateurs

Bien que n’étant pas impliqués dans la gestion quotidienne des entreprises, cette
catégorie de personnes joue un rôle essentiel pour la réalisation de leurs objectifs.

En effet, le Conseil d’Administration est un organe hautement technique qui est composé
des membres désignés par les actionnaires pour représenter leurs intérêts, soit par
manque de temps, soit au regard de la technicité des problèmes de l’organisation (voir
supra la notion de technostructure).

A ce titre, ils ont généralement une triple mission : (i) définir ou approuver les
orientations stratégiques de l’entreprise (mission d’administration) ; (ii) veiller à la
bonne application de ces orientations stratégiques (mission de contrôle) ; (iii) procéder
{ la nomination ou au relèvement des cadres supérieurs (mission de nomination). C’est
donc au Conseil d’Administration que les cadres supérieurs rendent compte.

e. Les cadres hiérarchiques et les cadres-conseils

Il y a aussi une autre distinction qu’il convient de souligner entre les managers ou
cadres : les cadres hiérarchiques et les cadres-conseils.

Les cadres hiérarchiques ou line managers sont les cadres qui sont investis du pouvoir
de prendre des décisions dans le cadre des tâches qui leur sont confiées. Ces dernières
sont généralement directement liées { la mission même de l’organisation. C’est le cas
notamment des responsables de la production, des finances et du marketing.

Les cadres-conseils ou staff managers sont des cadres qui viennent en soutien ou en
appui aux cadres hiérarchiques et qui ont donc pour tâche de les conseiller et de leur
faire des recommandations afin de les éclairer pour la prise de décisions judicieuses.
Leurs tâches ne sont généralement pas directement liées à la mission même de
l’organisation et ils n’ont généralement pas de pouvoir de décision. C’est le cas des
responsables fonctionnels (ressources humaines, contentieux ou relations publiques) et
26

des membres d’Etats-Majors, c.{.d. des cadres œuvrant dans des structures de soutien
directement rattachées { des responsables opérationnels (cabinet, bureau d’étude,
service d’audit, unité de planification, …).

2.3. L’universalité et l’importance du management

Etant donné que toutes les activités de l’homme et toutes les organisations humaines
(usines, banques, magasins, hôtels, syndicats, gouvernements, écoles, hôpitaux, églises,
équipes de sport, ménages,…), doivent nécessairement être efficaces (c.à.d. atteindre des
objectifs) et rechercher l’efficience (c.{.d. atteindre ces objectifs en utilisant le moins de
ressources possible), le management doit être considéré comme un facteur universel : il
est le même quelque soient les types d’organisations et les environnements. C’est ainsi
que :

- la survie, le profit, la croissance et l’autonomie de l’entreprise, surtout quand celle-ci


évolue dans un contexte de concurrence et/ou dans un environnement en
changement rapide, sont conditionnés par l’utilisation d’un management efficace et
efficient ;
- la réalisation des objectifs des organisations sans but lucratif, dépend de la
compétence de leurs managers : il en est ainsi des organisations à caractère social
(associations caritatives, syndicats, établissements d’enseignement public), des
organisations à caractère politique (partis politiques, gouvernements, assemblées,
cours et tribunaux) ou des organisations à caractère spirituel (églises, groupes de
prière, groupes de méditation, sectes et cercles ésotériques).

En effet, un management efficace permet de canaliser les efforts des hommes pour les
rendre plus performants, il permet de s’adapter au changement et libère la créativité.
Bref, l’amélioration des résultats constitue son souci permanent.

2.4. Les principes du management

Un management efficace implique l’utilisation d’un certain nombre de principes qui ont
fait leurs preuves. On peut définir un principe comme une vérité fondamentale ou un
précepte qui sert de guide { la réflexion et { l’action, et dont l’application permet au
manager, toutes autres choses étant égales par ailleurs, d’atteindre ses objectifs, de voir
ses efforts récompensés et d’éviter les erreurs graves. A ce titre, le principe s’applique {
une série de phénomènes et son contenu spécifie les résultats auxquels son application
conduit. A titre illustratif, H. Fayol a retenu, sur base de son expérience, quatorze
principes qu’il juge fondamentaux en management33.

En effet, les principes du management sont basés sur de nombreuses années


d’observation et/ou d’expérimentation. C’est ainsi que certains principes du

Voir point 3.1.1. du chapitre 3.


33
27

management sont bien établis, d’autres ont été mis { jour, mais ne sont pas encore
formulés de façon claire ou ne sont pas encore reconnus universellement. Par ailleurs, il
y a des domaines du management pour lesquels aucun principe n’a encore été établi et
qui constituent de ce fait des bons domaines de recherche.
La mise au point des principes du management a toujours comme point de départ la
résolution des problèmes qui se posent dans une société donnée. C’est ainsi que la quasi-
totalité de ces principes ont été mis au point dans les sociétés les plus avancées sur le
plan du développement économique, c.à.d. aux Etats-Unis principalement et
secondairement dans les autres pays industrialisés (pays d’Europe de l’Ouest, Japon et
Canada) qui partagent grosso modo le même type d’environnement (économique, social,
culturel, politique,…). Ce n’est que plus tard que ces principes ou préceptes font l’objet
d’une application dans les pays moins avancés (pays émergents et pays en voie de
développement), et ce, moyennant un effort d’adaptation tenant compte de leur
environnement spécifique.

Etant donné que le management est une science humaine, il faut souligner avec force
que les principes du management sont des fondements et non des lois absolues comme
c’est le cas dans les sciences exactes (physique ou chimie p.ex.). Ceci implique que l’on
n’obtiendra pas un résultat identique chaque fois que les circonstances paraitront
identiques. Les principes du management sont donc flexibles, dans la mesure où leur
application doit tenir compte des conditions particulières et spécifiques de chaque
situation ainsi que de leur évolution. Considérons le cas du principe selon lequel « Pour
atteindre une efficacité maximale, les coûts totaux doivent être minimisés » : ce principe
ne peut être appliqué tel quel en cas de force majeure ou quand il faut défendre
l’entreprise contre une action hostile pouvant mettre sa survie en danger.

Par conséquent, la connaissance d’un principe de management est utile, mais l’habilité
dans son application est tout aussi utile. Autrement dit, l’analyse de l’environnement
doit toujours précéder l’application de tout principe de management si l’on veut
atteindre les objectifs que l’on s’est fixés.

Etant donné la position centrale qu’occupent les hommes dans le processus du


management et donc dans l’application des principes du management, la connaissance
des ces derniers n’exclut pas de nombreux impondérables dans le processus managérial.
En effet, du fait que les hommes sont caractérisés par leur subjectivité (motivations,
pensées, émotions, relations,… dont la connaissance s’accroit de jour en jour), ils ne
peuvent être catalogués comme les éléments chimiques de la table de Mendeleïev.

En conséquence, il faut souligner que les principes du management sont des guides
indispensables pour une meilleure compréhension et une meilleure conduite du
processus du management, mais ces principes doivent être appliqués en tenant compte
de chaque environnement particulier, voire de chaque situation particulière.
28

2.5. Le management et l’environnement

Comme cela vient d’être souligné, le manager doit tenir compte des caractéristiques du
contexte dans lequel il opère, c.à.d. de son environnement. En effet, les organisations
sont des « systèmes ouverts » sur un environnement externe comme l’a spécifié H.
Minzberg34, lequel environnement influe nécessairement sur leurs décisions. A ce titre,
l’organisation en tant que système ouvert :

- reçoit de l’environnement des intrants ou inputs, à savoir des ressources humaines,


financières, matérielles (équipements, matières premières, produits semi finis,
produits finis, consommables) et immatérielles (informations, technologies) ;
- transforme ces ressources en extrants ou outputs sous la forme des
produits/services ;
- met ces extrants ou outputs sur le marché, c.à.d. à la disposition des
consommateurs ;
- tient compte de la rétroaction des consommateurs de ses produits/services et des
réactions des autres parties prenantes (concurrents, pouvoirs publics, ONG,…) pour
modifier tout ou partie de ses intrants, de son processus de transformation et/ou de
sa gamme des produits/services.

A cet effet, on peut distinguer deux types d’environnements : l’environnement spécifique


et l’environnement général.

L’environnement spécifique de l’organisation est constitué des « parties prenantes » qui


ne sont rien d’autre que les organisations, les groupes et les personnes qui sont
directement intéressées par l’activité de l’entreprise, qui interviennent directement dans
cette activité et qui conditionnent directement la réalisation de ses objectifs (survie,
profit, croissance et autonomie). Les parties prenantes les plus importantes pour
l’entreprise sont les actionnaires, les employés, les syndicats, les consommateurs
(clients et usagers), les organisations de défense des consommateurs, les fournisseurs,
les banques et les institutions de financement, les concurrents et les pouvoirs publics à
tous les niveaux (pouvoir exécutif, pouvoir législatif, pouvoir judiciaire et administration
publique).

Quant { l’environnement général de l’entreprise, il peut se définir comme le contexte


général dans lequel évolue l’entreprise. A ce titre, il influence le comportement des
managers et influe sur leur prise de décision. Il se subdivise en plusieurs composantes :

- l’environnement économique qui est constituée de la conjoncture économique et


des structures productives du pays d’accueil de l’entreprise et de celles des autres
pays qui ont un impact sur son activité : taux de croissance du PIB, taux d’inflation,
niveau des revenus, niveau de l’emploi, taux de chômage, taux d’intérêt, taux de

Voir point 1.6.2. du chapitre 1.


34
29

change, taux d’endettement, niveau de la consommation, niveau de l’épargne,


diversification et complexification de l’économie, hauteur et équilibre du budget de
l’Etat, pression fiscale, balances extérieures, coûts des facteurs,… ;

- l’environnement technologique qui est constitué des caractéristiques


technologiques du pays d’accueil de l’entreprise : état de la technologie et du
progrès des sciences, qualité de la R&D, niveau général de l’enseignement supérieur
et universitaire, taux d’utilisation des NTIC,… ;

- l’environnement politico-juridique qui est constitué des caractéristiques politiques


et juridiques du pays d’accueil de l’entreprise : stabilité des institutions,
indépendance de la justice, sécurité juridique et judiciaire, respect des droits de
l’homme, tolérance vis-à-vis de la corruption, organisations dont le pays est
membre, accords internationaux dont le pays est partie, lois et règlements en
vigueur, contexte géopolitique général,… ;

- l’environnement socioculturel qui est constitué des caractéristiques sociales,


culturelles et démographiques qui ont un impact sur le marché du travail et sur la
demande des biens et services : taux de mariage, taux des divorces, taux des familles
monoparentales, modèle de vie familiale, taux de natalité, taux de mortalité, taux de
morbidité, taux d’urbanisation, pyramide des âges, diversité culturelle, question du
genre, degré de laïcisation ou de sécularisation de la société, valeurs religieuses et
philosophiques dominantes, principales orientations de l’enseignement et des
institutions sociales,… ;

- l’environnement naturel qui fait référence { la place de la protection de la nature


dans le pays d’accueil de l’entreprise { travers le niveau de la conservation de la
nature, le respect de l’environnement, les érosions, les mouvements écologiques,….

2.6. Le management et les objectifs

Comme nous l’avons défini ci-haut, le management consiste à atteindre des objectifs
préalablement définis en utilisant les ressources disponibles (humaines, financières,
matérielles et immatérielles). Ainsi donc, manquer d’objectifs ou ne pas avoir des
objectifs clairs, rend très difficile, voire impossible, le processus managérial et donc la
tâche du manager. En effet, un effort mental ou physique ne peut être utilisé
intelligemment que s’il est dirigé vers un but ou un objectif.

C’est ainsi que, comme on le verra lors de l’analyse des fonctions managériales, le
processus managérial doit toujours commencer par la fixation des objectifs. Ceci parait
si évident que l’on ne voit généralement même pas l’utilité de le dire.
30

Cependant, on constate malheureusement que, très souvent, les objectifs sont


escamotés, oubliés ou ignorés. En effet, il n’est pas rare de constater que les détails d’une
opération immédiate ont tellement occupé le temps d’un manager que celui-ci a fini par
oublier l’objectif assigné { cette opération : c’est le cas notamment du manager qui est
trop collé à une procédure à respecter impérativement. Il est donc important, pour tout
manager, de se remémorer périodiquement les objectifs lui assignés ou qu’il s’est
assignés, et de se demander de façon récurrente si effectivement ses actions concourent
à la réalisation des dits objectifs.

En fait, l’objectif est au manager ce que la boussole est au navigateur : autant la boussole
permet au navigateur de fixer son cap, autant l’objectif doit guider l’action du manager
et lui donner un sens.

L’importance des objectifs apparaît de façon encore plus impérieuse quand l’entreprise
opère dans un environnement dynamique (changeant ou turbulent). Ainsi, certains
objectifs peuvent rester constants, tandis que d’autres pourront ou devront changer. Ce
dernier cas de figure s’impose notamment quand :

- l’entreprise croît et augmente le champ de ses opérations par l’ajout d’une


nouvelle ligne de produits, l’adoption d’un nouveau canal de distribution ou
l’extension de son marché ;
- l’entreprise décide de se recentrer sur ses opérations traditionnelles et de se
débarrasser de certaines de ses activités ;
- les conditions de la concurrence changent ;
- les dispositions légales changent.

2.7. Les types d’objectifs

Les objectifs peuvent être subdivisés en deux catégories : les objectifs fondamentaux et
les objectifs subsidiaires.

2.7.1. Les objectifs fondamentaux

Les objectifs fondamentaux sont des états désirés pour eux-mêmes. Une entreprise peut
avoir un ou plusieurs objectifs fondamentaux. Dans ce dernier cas, il s’établira une
hiérarchie en fonction de sa situation particulière, c.à.d. en fonction de ce qui est
reconnu comme prioritaire.

Les objectifs fondamentaux sont de deux types :

- les objectifs { caractère économique que l’on retrouve dans toutes les organisations à
but lucratif (et de plus dans les autres aussi) et selon des dosages différents : la
survie, le profit et la croissance, auxquels on ajoute parfois l’autonomie (en
approvisionnement) ;
31

- les objectifs à caractère socio-psychologique qui découlent directement des valeurs


intériorisées par les propriétaires ou les managers, à savoir les valeurs religieuses,
morales ou philosophiques35.
Les objectifs fondamentaux à caractère socio-psychologiques peuvent, dans certains cas,
avoir la prééminence sur les objectifs fondamentaux à caractère économique, même
celui du profit. C’est le cas notamment d’une entreprise qui a été créée pour exploiter les
capacités techniques ou les talents de son propriétaire, d’une entreprise qui veut { tout
prix garder son caractère familial et qui refuse donc de vendre ou de faire entrer
d’autres actionnaires dans le capital social, d’un créateur de mode qui refuse de
travailler pour un autre et de gagner plus d’argent ou de faire faire { moindre coût son
travail par une autre.

Si ces d’objectifs { caractère socio-psychologique que nous venons de voir, peuvent être
considérés sans équivoque comme relevant d’objectifs fondamentaux, il n’en va pas
toujours de même pour toute une série d’autres cas qui peuvent être considérés comme
des objectifs subsidiaires, c.{.d. des objectifs dont le but est d’aider { la réalisation des
objectifs fondamentaux. Ainsi en est-il d’une entreprise poursuivant des objectifs
sociaux en faveur de son personnel au-delà des exigences légales : elle peut le faire, soit
parce que les managers considèrent que c’est l{ un objectif fondamental découlant des
valeurs profondément intériorisées par eux, soit, ce qui est le plus souvent le cas, parce
que les décideurs estiment que, ce faisant, ils réaliseront plus facilement un objectif
économique.

2.7.2. Les objectifs subsidiaires

Les objectifs subsidiaires sont des objectifs intermédiaires, c.à.d. des objectifs
permettant de réaliser les objectifs fondamentaux. Ils sont de trois ordres
généralement : les objectifs relatifs aux marchés, les objectifs relatifs aux ressources et
les objectifs relatifs aux relations avec l’environnement.

Les objectifs relatifs aux marchés se déclinent en termes de maintien, d’expansion ou de


modification des marchés. Ils se définissent concrètement en termes de part de marché,
d’acceptation du produit par le client, de fidélité { la marque,…

Les objectifs relatifs aux ressources se déclinent en termes de maintien, d’amélioration,


d’accroissement ou de diversification des ressources. Ils concernent quatre types de
ressources de l’entreprise qui sont interdépendantes (ce qui implique que leurs objectifs
doivent aussi être concordants), à savoir :

- les ressources humaines : ces objectifs sont définis plus qualificativement que
quantitativement et se rapportent à la motivation, aux attitudes, au moral, au
développement, { la formation,… du personnel ;

35
Voir points 2.4 et 2.5. du chapitre 2 respectivement sur la philosophie du
management et sur la responsabilité sociale de l’entreprise.
32

- les ressources financières : ces objectifs sont spécifiés en termes de profit, de ratios
de structure financière, de dividendes, de maximisation de la richesse à long terme
des actionnaires actuels, de partage de la valeur ajoutée dans l’entreprise,… ;
- les ressources physiques : ces objectifs concernent les immobilisations (terrains,
usines, bâtiments, équipements et outillages) et le réalisable (consommables,
matières premières, produits semi-finis et produits finis) ;
- les ressources immatérielles : ces objectifs concernent notamment la R&D, la
technologie, les processus, les connaissances et les informations.

Les objectifs relatifs aux relations avec l’environnement se définissent en termes de


maintien ou d’amélioration des dites relations. En effet, pour atteindre ses objectifs,
l’entreprise dépend : (i) de l’état des structures environnantes (économiques,
technologiques, politiques et socioculturelles) ; (ii) de ses relations avec les parties
prenantes (actionnaires, employés, clients, fournisseurs, banquiers, pouvoirs publics,
communauté en général…). La réalisation de ses objectifs dépend donc des relations
qu’elle établit avec son environnement tant interne qu’externe. D’où, la nécessité, pour
elle, de se fixer des objectifs subsidiaires concernant chacune des composantes de son
environnement, objectifs qui seront fonction de l’importance qu’elle leur attache
(pondération) pour la réalisation de ses objectifs.

2.8. La hiérarchie des objectifs

Pour appel, le but d’un objectif subsidiaire est de servir de moyen pour la réalisation
d’un objectif fondamental. Il y a donc une chaîne des fins et des moyens qui devient de
plus en plus complexe au fur et { mesure qu’on entre dans les détails, comme le montre
le schéma n° 1 qui fait apparaitre une hiérarchie à quatre niveaux :

- les objectifs (b) et (c) aident { réaliser l’objectif (a) ;


- les objectifs (d) et (e), (e) et (f) aident à réaliser respectivement les objectifs (b) et
(c) ;
- les objectifs (g) et (h), (h) et (i), (i) et (j) aident à réaliser respectivement les objectifs
(d), (e) et (f).

Schéma n° 1 : Relations entre les objectifs ou chaîne des fins et des moyens

(k)
(g) RACHAT
(d) NOUVEAU CHAINE DISTR (l)
(b) PART MARCHE CIRCUIT DISTR
(h) ACHAT
(a) ROI A L.T. 12% (e) NOUVELLE BREVET (m)
18% (c) ROI A C.T. LIGNE PROD. (i) CENTRE
12% (f) BAISSE PROFIT (n)
COUT UNIT 5% (j) AMELIOR.
REL. HUM. (o)
33

Ainsi les objectifs (g), (h), (i) et (j) sont des objectifs subsidiaires pour les objectifs (d),
(e) et (f), qui sont à leur tour des objectifs subsidiaires pour les objectifs (b) et (c), qui
sont { leur tour des objectifs subsidiaires pour l’objectif (a).

Comme on le voit, les objectifs fondamentaux doivent être éclatés de façon à permettre à
chaque membre de l’organisation de connaitre l’objectif spécifique qui lui est assigné et
donc de savoir concrètement quel est son apport { la réalisation de l’objectif général de
l’organisation.

Soulignons que cette hiérarchie d’objectifs que nous venons de décrire { l’intérieur
d’une même entreprise, est aussi valable pour des entreprises dépendant d’une autre
entreprise dans une relation maison-mère/filiales : les objectifs fondamentaux des
entreprises dépendantes (filiales) ne sont que des moyens (objectifs subsidiaires) pour
l’entreprise principale (maison-mère). Ainsi, l’objectif (a) peut, { son tour, n’être qu’un
objectif subsidiaire dans le cas où l’entreprise serait la filiale d’un groupe. C’est ce qui
explique qu’une entreprise pourra vendre { perte ou acheter { des prix surfaits si tel est
l’intérêt du groupe auquel elle appartient. C’est la pratique dite « des prix de transfert »
qui est utilisée par bon nombre d’entreprises malgré son caractère illégal.

2.9. Les objectifs et les hommes

Dans la fixation et la mise en œuvre des objectifs, il faut tenir compte des hommes. En
effet la formulation des objectifs peut donner lieu à plusieurs interprétations qui vont se
répercuter au niveau de la mise en œuvre ou comporter, { première vue, des
contradictions qui ne vont pas faciliter le travail des membres de l’organisation.

Si nous prenons le cas d’une entreprise dont l’objectif global serait ainsi libellé : « Les
grands objectifs de l’entreprise sont de trois ordres : offrir aux clients des produits de
haute qualité à des prix raisonnables, procurer aux employés un travail attrayant et leur
assurant une sécurité d’emploi, et procurer aux actionnaires un bénéfice suffisant ».
Cette formulation suscite inévitablement des questions telles que :

- que signifient exactement les termes « produits de haute qualité », « prix


raisonnables », « emploi attrayant »,… ?
- peut-on à la fois offrir aux actionnaires un revenu suffisant, vendre à des prix
raisonnables et garantir la sécurité d’emploi ?

Ces objectifs sont donc trop globaux, voire contradictoires. D’où la nécessité de les fixer
en termes mesurables et immédiatement compréhensibles par tous les agents concernés
pour qu’ils puissent être réalisés avec un maximum d’efficacité.

En effet, du fait qu’ils sont mis en œuvre par les agents de l’entreprise, les objectifs
doivent être traduits en un langage tenant compte du travail quotidien de chacun d’entre
34

eux. Ainsi, quand on dit { un ouvrier que l’objectif de l’entreprise est d’atteindre un R.O.I.
de 15% à court terme, il ne sait toujours pas ce qui est attendu de lui. Par contre, les
choses deviendront plus claires pour lui quand on lui dira qu’il doit augmenter sa
productivité de 5% en faisant passer sa production horaire de 100 à 105 pièces p.ex.

Comme dit plus haut, il est donc indispensable de détailler les objectifs de l’entreprise
jusqu’au niveau le plus bas pour que tout un chacun puisse savoir exactement ce qui est
attendu de lui, du Directeur Général { l’ouvrier, en passant par les directeurs et les
contremaîtres. Les objectifs, à tous les niveaux, devront donc être exprimés en unités
mesurables, de façon non équivoque et compréhensible pour chacun.

Par ailleurs, les employés ont aussi leurs propres objectifs qu’ils veulent atteindre en
contrepartie de leurs prestations au profit de l’entreprise. Il arrive donc très souvent
que les objectifs de l’entreprise ne soient pas identiques { ceux des employés. Le rôle du
manager sera alors de découvrir l’objectif fondamental de l’employé et de montrer
comment la réalisation de cet objectif est possible à travers sa contribution à la
réalisation de l’objectif général de l’entreprise. C’est donc un mariage de raison entre
l’agent et l’entreprise, et une des tâches du manager est justement de mettre en évidence
les raisons de ce mariage36.

Etant un élément fondamental dans le processus du management, mieux, le point de


départ de celui-ci ou un pré-requis pour la détermination des différentes étapes à
entreprendre en vue d’une action, les objectifs doivent donc être clairement définis et
compris par tous les membres de l’organisation.

Chapitre 12 sur la motivation.


36
35

CHAPTRE 3 : LE PROCESSUS DU MANAGEMENT

Comme souligné dans le chapitre 1, le management est un processus, un ensemble de


fonctions ou d’activités de base reliées entre elles et qui constituent un processus
particulier, le processus de management. Ce processus a comme finalité la réalisation
des objectifs. Nous allons maintenant entrer un peu plus en détail de ce processus et en
étudier les déterminants.

3.1. Les fonctions de base du management

3.1.1. Les fonctions et activités de l’entreprise

Donner les fonctions de base du management équivaut en fait à répondre aux questions
suivantes :

- que fait le manager pour atteindre les objectifs lui assignés { travers l’utilisation des
ressources disponibles ?
- que fait le manager et qui le distingue de ceux qui ne le sont pas ?
- qu’y a-t-il de commun entre le directeur général d’une entreprise multinationale, le
directeur de production d’une PME, le gérant d’un hôtel, le directeur d’un collège, le
commandant d’une garnison militaire ou le curé d’une paroisse ?

Comme nous l’avons déj{ évoqué dans le chapitre 1, c’est Henri Fayol qui, le premier, a
énoncé les fonctions managériales37. Il a ainsi classé les activités de l’entreprise en six
groupes de fonctions correspondant { un certain nombre d’activités, comme l’indique le
tableau ci-après.

Tableau n° 1 : Fonctions et activités de l’entreprise


FONCTIONS ACTIVITES
Administrative = Prévoir, organiser, commander, coordonner et contrôler
Direction
Technique Produire, transformer
Commerciale Acheter, vendre
Financière Rechercher et gérer les capitaux
Comptable Calculer le prix de revient, faire les inventaires et établir les bilans
Sécurité Assurer la sécurité du personnel et des biens

37
Fayol H., op. cit.
36

Source : Bussenault C. et Pretet M., Economie et Gestion de l’Entreprise, 3 ème édition,


Librairie Vuibert, Paris, 2002, p. 29

Pour Fayol, le management correspond à la fonction administrative ou direction et il le


définit comme un ensemble de cinq fonctions, à savoir prévoir, organiser, commander,
coordonner et contrôler. Il précise que : (i) le management est différent des cinq autres
fonctions de l’entreprise (production, achat/distribution, finances, comptabilité et
sécurité) ; (ii) le management est une fonction universelle, car commune à toutes les
activités humaines, de l’administration d’un Etat { la tenue d’une maison.

A cet effet, il définit ses quatorze principes du management ci-après : la division du


travail, l’autorité, la discipline, l’unité de commandement, l’unité de direction, la
subordination des intérêts individuels { l’intérêt général, la rémunération, la
centralisation, la hiérarchie, l’ordre, l’équité, la stabilité du personnel, l’initiative et
l’union du personnel.

3.1.2. Les fonctions managériales

Nous allons à présent examiner les cinq fonctions de base du manager telles que définies
par Fayol, à savoir « Prévoir », « Organiser », « Commander », « Coordonner » et
« Contrôler » (P – O – C – C – C). Toutefois, il faut spécifier que la plupart des auteurs ne
considèrent pas la Coordination comme une fonction managériale de base38, de même
que l’on a depuis lors remplacé la dénomination Commandement par celle de Direction :
d’où, la séquence P – O – C – C - C est remplacée par la séquence P – O – D - C.

a. La planification

La première fonction de base d’un manager consiste { définir les objectifs { atteindre et
à déterminer les mesures pour ce faire. Cette fonction englobe donc la définition des
objectifs, l’élaboration d’une ou de plusieurs stratégies pour les atteindre et le
développement d’un ensemble de plans pour coordonner les activités.

b. L’organisation

Une fois que ceci est fait, l’étape suivante est celle de l’organisation qui consiste à :

- déterminer les tâches { accomplir pour mettre en œuvre les différents plans ;
- distribuer ces tâches ou les parties de ces tâches entre les membres de
l’organisation ;
- déléguer l’autorité { chaque membre de l’organisation pour lui permettre de
s’acquitter de sa tâche ;
38
Voir chapitre 4 sur la coordination.
37

- regrouper les tâches pour déterminer les relations entre les différents membres de
l’organisation { travers des structures.

c. La direction

Il ne suffit pas d’attribuer des tâches { tous les membres de l’organisation : le manager
doit aussi s’assurer que ces derniers s’acquittent chacun convenablement des tâches
leur assignées en adoptant un certain nombre de mesures spécifiques. Celles-ci doivent
donc être susceptibles de les pousser à orienter leurs efforts pour les amener à faire ce
que l’on attend d’eux et { atteindre ainsi les objectifs leur assignés avec enthousiasme.
Elles dépendront donc des caractéristiques des membres du groupe, de l’activité {
réaliser et du jugement du manager : il s’agit de l’utilisation de la communication, des
techniques de la motivation et des implications de la notion de leadership, lesquels
constituent la fonction Direction.

d. Le contrôle

Le management est un processus mental de prise des décisions. Ainsi, rien ne garantit
que ce qui a été prévu, sera effectivement réalisé. D’où, le manager doit suivre ce qui est
fait pour s’assurer que le travail du groupe progresse de façon satisfaisante vers les
objectifs prédéterminés. Ce suivi lui permet d’être vite au courant des impondérables,
des mécompréhensions et d’autres problèmes inattendus qui peuvent surgir, afin qu’il
puisse prendre rapidement les mesures correctives qui s’imposent.

Ainsi, la performance réalisée doit être évaluée en comparaison avec un standard ou une
référence. Autrement dit, le manager doit contrôler, ce qui implique les sous-fonctions
ci-après :

- déterminer les normes ou les références à respecter par les membres de


l’organisation ;
- mesurer les résultats obtenus par les membres de l’organisation ;
- comparer les résultats atteints aux normes ou références ;
- procéder à la correction des écarts éventuels.

3.1.3. Le processus managérial

Ces quatre fonctions de base (planification, organisation, direction et contrôle)


constituent le processus du management : ce sont les moyens par lesquels le manager
remplit sa mission et qui le distinguent de celui qui ne l’est pas.

En pratique, ces quatre fonctions de base sont en interaction constante et doivent se


mener de façon concurrente (et non exclusive) à cause de leur interdépendance : le fait
38

de s’occuper d’une fonction donnée (ex. l’organisation) n’implique pas que l’on ne puisse
plus s’occuper de la précédente (la planification).

Il faut noter, par ailleurs, que les quatre fonctions managériales ne sont pas exécutées en
suivant la séquence P – O – D - C. Cependant, lors de la constitution d’une nouvelle
entreprise, l’ordre des fonctions sera très probablement celui indiqué, tandis que pour
une affaire déj{ constituée, un manager peut p.ex. s’adonner d’abord aux activités de
contrôle, ensuite diriger et enfin planifier.

Toutefois, en considérant une période de temps assez longue, on constate que certaines
fonctions managériales précèdent d’autres et que plus d’accent est mis sur certaines que
sur d’autres. Ainsi, un management efficace implique qu’au préalable les activités en vue
d’atteindre les objectifs fixés aient été attribuées aux différents membres en fonction de
la contribution attendue de chacun d’entre eux. De la même façon, le contrôle ne peut se
faire dans le vide : il faut qu’il y ait quelque chose à contrôler.

3.1.4. L’importance des différentes fonctions managériales

Comme spécifié au point 3.1., tout manager, { quelque niveau qu’il opère, remplit les
quatre fonctions managériales.

Cependant, on constate que les activités de planification et d’organisation sont


relativement plus importantes au sommet de la hiérarchie des managers, tandis que les
activités de direction et de contrôle ont une importance relativement plus grande au
niveau hiérarchique le plus bas comme le montre le schéma ci-dessous.

Figure n° 1 : Importance des fonctions managériales


selon le niveau hiérarchique

PLANIFICATION
ORGANISATION
DIRECTION
CONTROLE
Niveau hiérarchique
Bas Elevé
Dans le premier cas (fonctions de planification et d’organisation), le manager visualise et
formule ce qui doit être fait et comment il doit y parvenir : ce sont des tâches avant
exécution ou tâches pré-exécutives qui demandent beaucoup de créativité et une vision
large des choses.

Dans le second cas par contre (fonctions de direction et de contrôle), on a à faire des
fonctions qui impliquent des activités quasi physiques de mise en œuvre et d’évaluation
des décisions précédentes en utilisant les ressources nécessaires (en commençant par
les efforts des autres membres de l’organisation). Ici, on est donc dans des tâches de
pleine exécution ou tâches exécutives qui demandent une vision limitée et détaillée des
choses et impliquent une certaine routine.
39

Mais au fur et { mesure que les tâches s’exécutent physiquement, des modifications dans
des tâches pré-exécutives peuvent être nécessaires. En d’autres termes, la planification
et l’organisation ne prennent pas fin quand commencent la direction et le contrôle. On a
donc affaire à un processus sans fin, à un phénomène récurrent de feed-back.

A partir de tâches définies par Henri FAYOL, nous pouvons affiner notre définition du
management pour dire que ce dernier est un processus spécifique qui consiste à
planifier, { organiser, { diriger et { contrôler dans le but d’atteindre des objectifs
prédéterminés, en utilisant les ressources disponibles en hommes, en capital, en
équipements et en connaissances.

3.2. Les compétences des managers

Pour pouvoir s’acquitter convenablement de ces quatre fonctions, le manager doit


maîtriser un « savoir », un « savoir-faire » et un « savoir-être » suffisants au regard des
problèmes qu’il est censé résoudre. C’est ce que Robert L. Katz39 a résumé en trois
compétences génériques, à savoir les compétences conceptuelles, les compétences
interpersonnelles et les compétences techniques, compétences auxquelles d’autres
chercheurs ont ajouté les compétences politiques.

3.2.1. Les compétences conceptuelles ou le savoir

Le manager doit être capable d’analyser et de comprendre des situations complexes


pour pouvoir leur trouver des solutions qui s’imposent à travers les décisions
adéquates.

Ces compétences sont très importantes au niveau hiérarchique le plus élevé, car c’est {
ce niveau que l’on rencontre les problèmes les plus complexes, problèmes dont la
solution exige une vision globale ou stratégique.

Ces compétences conceptuelles relèvent du« savoir », c.{.d. qu’elles sont normalement
acquises à travers des enseignements théoriques.

3.2.2. Les compétences techniques ou le savoir-faire

Le manager doit être capable aussi de maîtriser et d’utiliser des outils, des techniques et
des procédures propres au domaine spécifique qui est le sien afin d’exécuter des tâches
très précises dans le but de résoudre les problèmes identifiés. Autrement dit, il doit être
capable d’appliquer un savoir spécialisé et faire preuve d’expertise dans son domaine.

Ces compétences sont très importantes pour les cadres subalternes (comptables,
financiers, juristes, informaticiens, chimistes, ingénieurs,…).

Katz R, Skills of An Effective Administrator, in Harvard Business Review, vol. 52,


39

September-October 1974, pp. 901-902.


40

Elles nécessitent un grand « savoir-faire », c.à.d. des compétences techniques acquises


par la formation pratique et amplifiées par l’expérience.

3.2.3. Les compétences interpersonnelles ou le savoir-être

Le manager doit aussi être capable de travailler en équipe, c.{.d. avec d’autres personnes
de façon à susciter leur confiance et leur enthousiasme.

Ceci implique de sa part la capacité de comprendre ses subalternes, de les guider et de


les motiver en tant qu’individus et en tant que membres d’une équipe. Ces compétences
sont très importantes à tous les niveaux hiérarchiques.

Ces compétences interpersonnelles impliquent un grand « savoir être », c.à.d. une


sensibilité aux problèmes des autres ou une sensibilité humaine.

3.2.4. Les compétences politiques ou l’entregent

Le manager doit enfin être capable d’améliorer sa position dans l’entreprise, d’asseoir et
de renforcer son pouvoir, ainsi que d’établir les contacts nécessaires avec les différentes
composantes pertinentes de son environnement dont dépend l’avenir de son
organisation (principaux animateurs de son environnement spécifique et de son
environnement général).

3.3. La philosophie du management

Au point 1.7.5., nous avons parlé de l’apport de la philosophie au management en


spécifiant qu’elle étudie la nature des choses, notamment l’éthique et les valeurs. Nous
avons ainsi défini l’éthique comme étant « l’établissement des normes devant
s’appliquer { la conduite des hommes », en ajoutant qu’« elle porte ainsi sur la raison
d’être des organisations ».

L’éthique se situe donc au niveau de la morale et comprend un ensemble de règles,


d’obligations et de valeurs fondées sur ce qui est considéré comme bien (à faire) et
comme mal ({ ne pas faire). Cette notion est proche d’une autre, celle de la déontologie
qui est la morale propre à une profession, c.à.d. un ensemble de devoirs et de droits
propres { l’exercice d’une profession donnée (déontologie médicale, des pharmaciens,
des affaires, des avocats, des magistrats,…).

Ainsi, bien que le management soit un processus universel, les conditions de son
application seront déterminées par les valeurs intériorisées par le manager. En effet, les
valeurs qui animent les managers sont au cœur du processus managérial eu égard { leur
importance quant à la manière dont ce processus sera conduit, le management pouvant
41

être utilisé à des fins constructives (ou socialement utiles), comme aussi à des fins de
destruction (ou socialement nuisibles).

L’ensemble de ces valeurs intériorisées par le manager peut être désigné par le terme
« philosophie du management ». Celle-ci peut être définie comme la conception qu’un
manager a des éléments qui l’entourent (hommes, choses, phénomènes surnaturels)
ainsi que la pondération qu’il leur accorde en tant qu’univers d’application du
management.

Cette conception et cette pondération sont donc importantes dans la mesure où elles
influencent de façon importante les choix du manager quant aux solutions qu’il apporte
aux problèmes qui se posent à lui dans sa pratique quotidienne du management.
Prenons le cas d’un manager qui veut rendre un produit compétitif : il peut envisager
plusieurs possibilités allant de la réduction de la marge bénéficiaire (qui induit la
réduction des dividendes et peut-être de sa propre rémunération) à la réduction des
effectifs (qui induit la perte d’emploi et donc de revenu pour certains agents).

Comme on le voit, la philosophie du management est un élément tout aussi important


que la connaissance ou la maîtrise des principes du management.

3.4. La responsabilité sociale de l’entreprise

La notion de philosophie du management nous amène à la celle de la responsabilité


sociale de l’entreprise qui lui est très proche.

La notion de responsabilité sociale ou sociétale de l’entreprise (R.S.E.) est apparue au à


la fin des années 1950 et a été amplifiée par le « Club de Rome » (1968). En effet, ce
groupe (qui réunissait des personnalités internationales issues du monde universitaire,
politique, des affaires et de la société civile) a posé les bases du mouvement de la remise
en cause du modèle de la « consommation de masse », aboutissement de la logique
essentiellement technicienne de l’entreprise qui considère le profit comme valeur
ultime.

La notion de R.S.E. s’oppose ainsi { la vision classique ou purement économique de


l’entreprise qui considère que la seule responsabilité de l’entreprise est de « maximiser
le profit » (Milton Friedman). Au contraire, la notion de la R.S.E. complète la vision
purement économique de l’entreprise en lui ajoutant une dimension sociale. Cette vision
économico-sociale de l’entreprise, va donc au-delà de la recherche du seul profit et
inclut la recherche et l’amélioration du bien-être de toutes les parties concernées par
l’activité de l’entreprise que nous avons déj{ désignées sous l’appellation de « parties
prenantes »40 ou « stockhelders » en anglais.

La notion de R.S.E. implique donc que l’entreprise s’impose volontairement l’obligation


de poursuivre des objectifs servant réellement les intérêts de tous ceux qui sont

40 Voir point 2.5. du chapitre 2.


42

intéressés par son activité, et ce, au-delà des obligations lui imposées par la loi
(obligations sociales). Il s’agit donc d’une obligation morale ou éthique que l’entreprise
s’impose volontairement et qui implique, pour elle, la distinction entre le bien et le mal,
entre ce qui est approprié et ce qui ne l’est pas, entre ce qui est juste et ce qui ne l’est
pas, étant entendu que ce qui est légal n’est pas forcément moral ou éthique. Ainsi
précisée, la notion de la R.S.E. relève donc des objectifs sociaux fondamentaux41.

C’est ainsi que l’on retrouve de plus en plus d’entreprises qui se dotent d’un code
d’éthique ou de déontologie, c.{.d. d’un répertoire de valeurs fondamentales et des
règles { respecter par l’ensemble de son personnel. Ces codes vont concerner des
domaines tels que :

- le respect de la communauté dans laquelle l’entreprise opère { travers notamment


la prise en compte de ses intérêts, l’adoption d’une politique des prix justes, le
respect d’une qualité des produits ne mettant pas en danger la santé des
consommateurs ;
- le traitement équitable de son personnel par l’intégration de ses besoins dans les
plans de l’entreprise ;
- le respect de l’environnement et des ressources naturelles ;
- le refus du recours à la fraude et à la corruption ;
- le refus d’investir dans des pays où les dirigeants ne respectent pas les droits de
l’homme pour ne pas leur donner les moyens de la répression { travers le paiement
des impôts et taxes ;
- les actions caritatives.

Cependant, et à y regarder de près, cette notion de R.S.E. ne répond pas seulement à un


impératif moral ou éthique : elle correspond aussi, comme nous l’avons dit en
distinguant les objectifs fondamentaux des objectifs subsidiaires, { l’intérêt bien compris
de l’entreprise elle-même dans la mesure où :

- elle lui permet de mieux s’intégrer dans la société où elle opère et de bénéficier
d’une meilleure image dans l’opinion, laquelle image va, de ce fait, la récompenser
en donnant une préférence à ses produits/services ;
- elle lui permet d’améliorer la qualité de son environnement et donc la qualité de
vie de ses agents, ce qui supprime un motif non négligeable d’absentéisme du fait
d’une meilleure santé des dits agents et constitue un moyen très efficace de
s’attacher la fidélité des meilleurs éléments ;
- elle lui permet d’améliorer les conditions de travail et de rémunérations de ses
agents sans contrainte, et donc d’améliorer leur motivation et de s’attacher les
meilleurs éléments ;

41
Voir point 2.7.1. du chapitre 2 sur les objectifs fondamentaux.
43

- elle lui permet d’éliminer certaines causes de la baisse du cours de ses actions en
bourse, dans la mesure où elle subira moins d’attaques publiques et sera donc
considérée comme moins risquée ;
- elle lui permet de s’attaquer librement et { froid aux problèmes qui se posent
plutôt qu’{ subir des solutions imposées dans un environnement dont elle ne
contrôle plus les paramètres.

3.5. La culture et le projet d’entreprise

Comme nous le verrons plus loin42, le mode de gouvernance a évolué, passant


successivement de l’imposition { la transaction et de la transaction { l’animation. Cette
évolution est due tout simplement au fait qu’une place de plus en plus grande a été faite
aux facteurs psychologiques et sociologiques, en considération du rôle éminent que joue
l’homme pour permettre { l’entreprise d’être plus performante (plus d’efficacité et plus
d’efficience).

D’où la nécessite, pour l’entreprise, de mobiliser l’ensemble de son personnel { travers


notamment sa culture et son projet. En effet, chaque entreprise est une microsociété
avec son système des valeurs, son mode de gouvernance, ses règles de jeu, sa structure,
ses forces, ses faiblesses,… : bref, chaque entreprise a sa propre culture.

La culture d’entreprise peut se définir comme l’ensemble des valeurs, des signes et des
symboles partagés par ses membres, et qui assurent ainsi son unité. C’est donc
l’ensemble des postulats de base que l’entreprise a inventés, développés, découverts et
utilisés pour résoudre avec succès les problèmes d’intégration interne et d’adaptation
externe qui se sont posés à elle et qui peuvent, par conséquent, être enseignés à ses
membres comme étant la bonne façon de percevoir et de résoudre lesdits problèmes.
De façon fortement ramassée, la culture d’entreprise peut se définir comme « l’esprit
maison ».

Notons que cette culture peut aussi être négative quand elle met en avant des valeurs
négatives, auquel cas l’entreprise sera totalement inefficace et inefficiente, et peut même
carrément disparaitre si elle évolue dans un environnement de concurrence.

Une forte culture d’entreprise a comme rôle de créer un fort sentiment d’appartenance {
l’entreprise et donc de créer une forte cohésion du personnel autour des objectifs et des
usages communs. Elle facilite ainsi la décentralisation et la responsabilisation du
personnel.

Par contre, une forte culture d’entreprise peut aussi entrainer des lourdeurs
handicapantes et constituer un frein insurmontable à tout changement quand des
modifications deviennent indispensables.

La culture d’entreprise se manifeste notamment { travers :

42
Points 9.3.3. et 9.3.7. du chapitre 9.
44

- le langage écrit et oral qui met en évidence la nature des relations entre membres
du personnel : c’est le cas notamment du vouvoiement ou du tutoiement et de
l’utilisation du prénom ;
- les pratiques de recrutement et de sélection : la définition du profil et des critères
de sélection constituent un filtre qui ne fait passer que des candidats ayant des
valeurs compatibles avec celles de l’entreprise et qui favorise ainsi l’intégration des
nouveaux venus ;
- les diverses règlementations : les statuts, le code d’éthique ou de déontologie, la
charte de la qualité ou le règlement intérieur, sont autant des moyens qui posent
les grands principes moraux régissant l’entreprise, précisent ce qui est encouragé,
admis ou interdit ;
- l’histoire de l’entreprise : son fondateur (origines sociales, rêves, challenges,
principes fondamentaux,…), ses anecdotes, ses challenges, ses grands hommes, ses
grandes dates, son environnement,… ;
- son métier : son savoir-faire et son expertise tels que perçus par l’extérieur ;
- ses signes : ses symboles et ses logos.

Comme on le voit, la notion de philosophie de management (qui est propre à chaque


manager) et la notion de responsabilité sociale de l’entreprise (qui est propre { chaque
Direction Générale) débouchent sur la notion de culture d’entreprise (qui est propre {
chaque entreprise c.à.d. à ses managers, à sa Direction Générale et à ses employés).
45

CHAPITRE 4 : LA COORDINATION

Comme nous l’avons vu43, Henri FAYOL a identifié cinq fonctions managériales, à savoir
la Planification, l’Organisation, le Commandement, la Coordination et le Contrôle.

Dans le chapitre précédent, nous avons défini quatre des cinq fonctions managériales de
Fayol, sauf la Coordination qui est la tâche qui consiste à mettre ensemble les efforts des
membres d’un groupe ou d’une organisation en vue de réaliser le mieux possible
l’objectif qui a été défini et qui leur a été assigné.

Au vu de cette définition, la plupart des auteurs n’ont pas retenu la Coordination comme
fonction à part entière, c.à.d. comme une fonction de base du management, dans la
mesure où ils considèrent que l’organisation des efforts pour atteindre un objectif
déterminé, se fait { l’occasion des quatre fonctions de base que sont la Planification,
l’Organisation, la Direction et le Contrôle. Autrement dit, la mise en œuvre rationnelle et
efficace de ces quatre fonctions de base du management, implique nécessairement la
coordination, laquelle est donc inhérente { chacune d’elles.

Etant donné l’importance, les caractéristiques et les difficultés de la coordination dans le


processus de management, nous allons nous y pencher un peu plus en détail dans ce
chapitre.

4.1. Le concept de la Coordination

4.1.1. L’importance de la Coordination

Si un objectif a été défini et qu’il doit être atteint en utilisant les efforts des membres
d’un groupe, il s’en suit logiquement que ces efforts doivent être harmonisés de façon {
ce que chaque membre du groupe puisse contribuer le mieux possible à la réalisation
dudit objectif dans les meilleures conditions.

Point 3.1.1. et 3.1.2 du chapitre 3.


43
46

Dans une entreprise, chaque membre du personnel est en contact et en relation avec les
autres membres, et c’est par la coordination que le manager essaie de faire en sorte que
la contribution d’un chacun soit maximale { l’occasion de ces contacts et de ces relations.

La coordination au sein d’une organisation s’impose pour aplanir les conflits et pour
éviter les redondances dans les actions devant contribuer à la réalisation des objectifs,
conflits et redondance qui apparaissent généralement entre membres d’un groupe.

Bien plus, chaque effort doit être orienté vers un but et contribuer à la réalisation du
résultat escompté : il doit aider les autres membres du groupe à réaliser leur part du
travail afin d’accomplir la tâche dévolue { l’ensemble du groupe. Autrement dit, toutes
les actions menées par les membres du groupe doivent contribuer à la réalisation de
l’objectif commun assigné au groupe.

Dans un groupe donné, la coordination permet d’atteindre des résultats supérieurs à la


somme des efforts fournis individuellement par chaque membre du groupe. Autrement
dit, 1+1=2 sans coordination et 1+1>2 avec coordination. De fait, la coordination permet
à chaque membre du groupe de devenir beaucoup plus important, c.à.d. de devenir un
rouage indispensable à la mécanique du groupe, mais un rouage qui perd de son utilité
quand ses efforts ne sont pas coordonnés avec ceux des autres membres du groupe.

C’est ainsi que l’on peut dire que la coordination est l’essence même du travail du
manager et qu’elle donne forme aux efforts déployés par lui.

4.1.2. La définition de la Coordination

On peut dès lors définir la coordination comme la synchronisation des efforts afin de
déboucher sur des actions harmonieuses et unifiées permettant de réaliser un objectif
donné. Cette définition implique donc quatre notions essentielles dans le chef du
manager :

- la notion de quantité, c.à.d. le caractère suffisant des efforts ;


- la notion de qualité, c.à.d. le niveau des efforts ;
- la notion de temps, c.à.d. la synchronisation des efforts ;
- la notion de but, c.{.d. l’orientation des efforts.

Ces quatre notions sont essentielles et inséparables, car la coordination ne conduira pas
au succès escompté si :

- les efforts sont bien synchronisés et bien dirigés, mais insuffisants


quantitativement ;
- les efforts sont bien synchronisés et bien dirigés, mais d’un niveau qualitativement
bas ;
- les efforts sont parfaitement synchronisés et suffisants quantitativement et
qualitativement, mais mal dirigés ;
47

- les efforts sont suffisants quantitativement et qualitativement et bien dirigés, mais


mal synchronisés.

4.2. Les caractéristiques de la Coordination

La Coordination est essentiellement dynamique, dans la mesure où la modification de


certains efforts nécessite des ajustements adéquats au niveau des autres efforts de façon
{ maintenir l’unité désirée. Etant donné que les entreprises sont des systèmes ouverts,
les situations ne sont jamais figées et les efforts doivent se modifier en permanence : le
coordonnateur doit donc régulièrement renforcer certains efforts, en affaiblir d’autres et
souvent en créer de nouveaux par élimination de ceux qui deviennent inadaptés. Un bon
coordonnateur est donc celui qui sait s’adapter { des modifications de situations. A cet
effet, on peut se référer, { titre illustratif, au comportement qu’adopte le directeur
sportif d’une équipe cycliste dont le leader est fatigué ou le coach d’une équipe de
football dont l’attaquant vedette est { la peine.

La Coordination est un concept globalisant dans la mesure où elle implique une vue
d’ensemble de la façon dont le manager doit atteindre les objectifs. Elle permet au
manager de visualiser correctement le travail de chacun de ses subordonnés, c.à.d. de
savoir à tout moment ce que fait chaque membre du groupe et sa contribution réelle à
l’objectif global assigné au groupe (qui fait quoi et pourquoi).

La Coordination peut intéresser les efforts d’un individu agissant seul, d’un ensemble
d’individus agissant au sein d’un groupe, de plusieurs groupes au sein d’une entreprise
ou d’un holding, ou encore de plusieurs entités.

4.2.1. La coordination des efforts d’un individu

C’est certainement le cas le moins intéressant du point de vue du manager. Cependant, la


capacité d’un individu { s’acquitter convenablement d’un certain nombre de tâches lui
assignées, c.{.d. sa capacité { coordonner l’ensemble de ses efforts, a un impact sur sa
contribution { l’objectif assigné { son groupe. C’est le cas p.ex. d’un cycliste faisant la
course contre la montre pendant une étape du Tour de France, ou d’un artisan
fabriquant seul un mobilier à livrer à une date donnée.

4.2.2. La coordination des efforts de plusieurs individus

Alors que dans le cas précédent, il s’agissait de coordonner les efforts d’un individu vers
un objectif dont la réalisation ne dépend que de lui seul, dans ce cas-ci, il s’agit de
coordonner les efforts de plusieurs individus qui travaillent en équipe pour réaliser un
objectif. On peut ici citer le cas d’une équipe de coureurs par relais, d’une équipe de
coureurs cyclistes, d’une équipe de football, d’une équipe d’ouvriers travaillant { la
chaine au sein d’un atelier ou dans un groupe semi-autonome44.

44 Voir point 12.5.6. du chapitre 12.


48

4.2.3. La coordination des efforts de plusieurs groupes

Il s’agit ici de coordonner non plus les efforts des membres d’un seul groupe, mais les
efforts de plusieurs groupes qui ont des objectifs partiels différents et qui disposent
donc d’une certaine autonomie. On peut citer le cas du superviseur d’une chaine de
montage automobile qui doit coordonner le travail de plusieurs ateliers (moteurs,
soudage des carrosseries, montage des accessoires intérieurs, montage des
pneumatiques,…). On peut aussi citer le cas du Président d’un holding ou d’une
multinationale qui doit coordonner les activités de plusieurs filiales.

4.2.4. La coordination des efforts de plusieurs entités

L’entreprise doit également coordonner ses efforts avec ceux de certains acteurs
pertinents composant son environnement tant interne qu’externe, { savoir :

- les parties prenantes qui lui apportent les ressources ou intrants dont elle a besoin
(sociétés de placement du personnel, fournisseurs, sous-traitants, actionnaires,
banquiers, bourses, sociétés pourvoyeuses d’informations et des technologies,…) ;
- les parties prenantes dont les actions l’affectent directement ou qui sont directement
affectées par ses actions (employés, syndicats, clients, concurrents, administrations
publiques, organisations de la société civile,…).

Par conséquent, la coordination, dans ses applications les plus larges, doit tenir compte
des efforts et des influences de l’environnement sur le processus managérial de
l’entreprise, étant entendu que toute action de celle-ci entraîne normalement une
réaction de certaines de ces composantes (notamment de ses concurrents) et vice-versa.

4.3. Les moyens pour assurer la Coordination

4.3.1. Les difficultés de la Coordination

L’intégration des efforts n’est pas un phénomène découlant de la nature de l’homme au


travail, au contraire, dans la mesure où les forces centrifuges tendent { l’emporter sur
les forces centripètes. Ceci est dû à un certain nombre de raisons, notamment celles
relatives { la spécialisation et aux critères d’appréciation.

a. La spécialisation

Dans le cadre de la spécialisation, chaque manager tend { exagérer l’importance de son


travail et donc à sous-estimer celui des autres. Il y a donc une tendance pour chaque
manager { travailler en vase clos, ce qui ne facilite pas la coordination, alors que c’est
elle seule qui peut synchroniser et harmoniser les efforts des managers spécialisés.

b. Les critères d’appréciation

Chaque manager est d’abord intéressé par l’accomplissement de l’objectif et du travail


qui ont été assignés à sa propre unité. Il évite donc de « se mêler de ce qui ne le regarde
49

pas », c.à.d. des domaines ou « plates-bandes » des autres. Il sait en effet que sa cotation
sera faite en fonction des performances de sa propre unité et il n’a donc pas intérêt {
s’occuper de ce qui se passe dans les autres unités.

4.3.2. Les moyens de la Coordination

Il se pose donc la question de savoir quels moyens utiliser pour obtenir la coordination.

Il faut noter dès le départ que la coordination ne se commande pas : c’est un sous-
produit, un résultat de la façon dont les actions sont définies et conduites.

Dans les TPE et les petites entreprises, la personnalité du manager joue un rôle
déterminant dans l’obtention de la coordination recherchée : sa connaissance profonde
de chaque situation et les contacts qu’il peut facilement avoir avec chacun de ses
collaborateurs, contribuent à harmoniser et à synchroniser les efforts et, de ce fait,
rendent superflues toutes directives en matière de coordination.

Par contre, quand l’entreprise ou l’organisation augmente en taille, la coordination ne


peut plus se baser sur la proximité obligée du manager avec ses collaborateurs. D’où la
nécessité de prendre des mesures particulières pour créer la coordination voulue.

Comme nous allons le voir ci-dessous, la coordination sera fortement facilitée par les
relations humaines, quelle que soit la taille de l’entreprise ou de l’organisation. En effet,
les relations humaines permettent d’éviter les inerties, les conflits, les
mécompréhensions et les complexes.

a. Les relations humaines

Pour H. Minzberg45 la coordination des différentes tâches est assurée à travers deux
premiers mécanismes relevant des relations humaines :

- l’ajustement mutuel : coordination du travail par simples communications


informelles ;
- la supervision directe : coordination du travail à travers une personne investie de la
responsabilité du travail d’une ou de plusieurs autres personnes (ex. un chef
d’atelier).

b. La standardisation

H. Minzberg identifie aussi quatre autres mécanismes qui permettent d’assurer la


coordination et qui relèvent de la standardisation :

45
Minzberg H., op. cit.
50

- la standardisation des procédés : coordination à travers la spécification ou la


programmation du contenu du travail (normes du travail qui spécifient comment le
travail doit être fait) ;
- la standardisation des résultats : coordination à travers la spécification des résultats
{ atteindre, c.{.d. que l’on spécifie les objectifs à atteindre sans donner des
instructions sur la méthode à suivre pour les atteindre ;
- la standardisation des qualifications : coordination du travail à travers la
spécification de la formation de celui qui exécute le travail, c.à.d. en le dotant d’une
qualification et d’un savoir donnés ;
- la standardisation des normes : coordination à travers le système des croyances, des
valeurs, des traditions et des comportements que partagent les membres de
l’organisation, autrement dit la coordination par le biais de la culture de
l’entreprise46.

c. La connaissance et l’acceptation de l’objectif

La connaissance et l’acceptation de l’objectif constituent un autre moyen d’assurer une


bonne coordination. En effet, on a constaté qu’une mauvaise coordination est souvent
imputable au fait que chaque membre du groupe, soit est guidé par sa propre conception
ou sa propre compréhension de l’objectif assigné au groupe, soit n’est pas convaincu du
bien-fondé de l’objectif assigné au groupe au point de ne ni l’approuver, ni de contribuer
{ sa réalisation. En conséquence, il faut s’assurer que tous les membres du groupe
connaissent et acceptent l’objectif assigné au groupe.

L’acceptation de l’objectif commun sera { son tour facilitée si chaque membre du groupe
a pu participer aux différentes étapes qui ont abouti à sa définition. En effet, il a été
prouvé que quand la personne qui doit atteindre un objectif a participé au processus
ayant conduit à sa définition, elle en ressentira la réalisation comme quelque chose de
personnel ou comme un défi personnel à relever.

d. Les échanges des idées et des suggestions

Pour assurer une bonne coordination, il y a aussi les échanges des idées et de
suggestions au sein du groupe, et ce, { l’occasion des réunions formelles ou informelles.
En effet, ces échanges permettent à chaque membre de connaître le point de vue de
l’autre, de devenir familier avec ce qui se fait dans les autres unités, de connaître les
difficultés auxquelles les autres membres du groupe doivent faire face, de développer
une communauté d’intérêts entre membres du groupe et donc de gagner chaque
membre { ce qui se fait ainsi qu’{ la façon de le faire. Cette compréhension mutuelle

46
Point 4.5. du chapitre 4.
51

permet à son tour à chaque membre du groupe de trouver les voies et moyens pour
satisfaire ses buts personnels en même temps que les objectifs communs au groupe.
4.4. La Coordination et le processus du management

En principe, la coordination doit résulter d’une bonne exécution des quatre tâches ou
fonctions de base du processus managérial. En effet, si le travail managérial de
planification, d’organisation, de direction et de contrôle est réalisé correctement, et si un
intérêt suffisant est accordé aux interrelations qui doivent exister entre ces quatre
fonctions, le résultat devrait être un travail de groupe bien harmonisé et bien
synchronisé, c.à.d. bien coordonné.

4.4.1. La Planification et la Coordination

Pour toute entreprise ou organisation, les plans doivent être liés entre eux et s’articuler
harmonieusement si l’on veut atteindre le résultat escompté.

Prenons le cas d’une entreprise qui planifie une campagne promotionnelle intensive.
Pour atteindre les objectifs assignée à cette campagne, elle doit coordonner les efforts
d’un certain nombre de ses directions ou services afin que :

- l’effort promotionnel { déployer soit proportionnel aux objectifs de vente qu’elle


veut atteindre ;
- le service achat puisse constituer des stocks suffisants d’intrants pour pouvoir faire
face { l’augmentation prévisible des ventes ;
- l’usine puisse prévoir les hommes et apprêter les machines capables de produire le
surcroit des biens dont on aura besoin ;
- le service du personnel puisse prévoir des éventuelles actions de formation pour le
personnel de vente ;
- le service financier puisse prévoir et disponibiliser les liquidités nécessaires au
financement de toutes les actions impliquées par cette action promotionnelle.

De même, les plans { court, moyen et long termes doivent s’intégrer et s’articuler
harmonieusement en fonction des objectifs et éviter des contradictions. C’est le cas d’un
plan pluriannuel (plan quinquennal ou loi de programmation) : il faut qu’il y ait
cohérence entre les différents budgets annuels et le plan pluriannuel, les premiers
devant être des tranches annuelles devant concourir à réaliser le second.

4.4.2. L’Organisation et la Coordination

Des quatre fonctions managériales de base, c’est la fonction Organisation qui,


naturellement, évoque le plus la notion de Coordination.

En effet, au point 2.1. du chapitre 2, nous avons dit que la fonction Organisation
consistait, entre autres, { distribuer les parties de la tâche dévolue { l’organisation entre
ses différents membres et à regrouper les tâches pour déterminer les relations entre les
52

différents membres de l’organisation { travers des structures. Ces deux tâches dévolues
à la fonction Organisation impliquent nécessairement Coordination.

4.4.3. La Direction et la Coordination.

En utilisant, avec des intensités variées, les différents moyens qui aident à commander
et à motiver, le manager pose des actes de coordination.

En effet, nous avons dit précédemment qu’une connaissance des objectifs du groupe et
leur acceptation par les membres du groupe, permettent une bonne coordination. Or,
s’assurer que tous les membres du groupe comprennent de la même façon les objectifs
leur assignés et qu’ils sont familiarisés avec ce qui se fait dans les autres unités de
l’entreprise, constitue un travail de relations humaines et de communication qui fait
partie de la fonction Direction.

De même, quand l’entreprise envisage, par exemple, une augmentation des salaires
comme condition ou moyen pour mieux motiver son personnel, elle doit aussi tenir
compte de l’impact de cette augmentation sur l’équilibre financier de l’entreprise, au
moins à court terme. Ceci peut induire, soit une modification des objectifs de l’entreprise
en termes de production (augmenter la production pour réduire le coût fixe moyen et
donc le coût de revient du produit), soit une compensation de l’augmentation des
charges d’exploitation par une augmentation de la productivité du travail (acquérir des
machines produisant plus et avec moins de main-d’œuvre). Comme on le voit, ici aussi la
nécessité de la coordination s’impose.

4.4.4. Le Contrôle et la Coordination.

Le Contrôle a un impact direct sur la Coordination dans la mesure où les évaluations


fréquentes du travail accompli, appellent des mesures correctives qui impliquent
nécessairement un autre agencement des efforts en vue de réaliser les objectifs assignés
au groupe.

De plus, les différents types et actions de contrôle doivent s’harmoniser et ne peuvent


être entrepris en ordre dispersé, car certains servent de point de départ { d’autres. Ainsi,
le travail de l’audit externe doit s’appuyer sur celui de l’audit interne qui doit donc
naturellement le précéder.

4.5. Les types de coordinations.

Avant de clore ce chapitre sur la coordination, il faut souligner que celle-ci peut être
verticale ou horizontale, interne ou externe.

4.5.1. La coordination verticale et la coordination horizontale

La coordination est verticale quand elle consiste à mettre ensemble des degrés
différents d’une organisation liés par une relation hiérarchique (p.ex. le contremaître,
son assistant et les ouvriers). Dans ce cas, la coordination est facilitée par cette relation
53

hiérarchique du fait que les animateurs de ces différents degrés hiérarchiques, sont
directement liés par l’objectif commun { atteindre et surtout par une relation d’autorité.
La qualité de cette coordination dépend essentiellement de celui qui chapeaute
l’ensemble de ces degrés.

La coordination est horizontale quand elle consiste à harmoniser les efforts réalisés à un
même niveau hiérarchique par des personnes jouissant d’une certaine autonomie et
donc d’une indépendance relative (p.ex. les responsables des départements ou des
directions de la production, des ventes, des finances, des ressources humaines au sein
d’une entreprise). C’est d’ailleurs le sens le plus courant de l’utilisation de ce terme. Ici,
la coordination n’est pas facile { obtenir et doit donc faire l’objet des mesures
particulières de la part du manager.

4.5.2. La coordination interne et la coordination externe

La coordination est interne quand elle concerne différents groupes au sein d’une
entreprise ou d’une organisation (coordination verticale et coordination horizontale).

La coordination est externe quand il faut harmoniser les actions de l’entreprise avec son
environnement externe, c.{.d. avec des entités totalement indépendantes d’elle
(concurrents, clients, fournisseurs, banquiers, communautés d’implantation, pouvoirs
publics, ONG, opinion publique,…).

On voit que la coordination externe nécessite de la part du manager encore plus


d’efforts, notamment en termes d’informations { recueillir et de relations publiques (en
vue d’influencer les responsables des composantes de cet environnement dans un sens
favorable { l’entreprise).
54

CHAPITRE 5 : LA PRISE DE DECISION EN MANAGEMENT

Pour rappel, la mise en œuvre du processus du management implique de la part du


manager la prise continuelle de décisions, le manager étant avant tout un décideur.
Ainsi, le processus du management est inexistant sans prise de décision. C’est pourquoi,
nous allons terminer cette première partie par l’étude plus détaillée du processus de
prise de décision.

La décision est un choix, une sélection entre deux ou plusieurs alternatives possibles.
Elle est l’aboutissement d’un processus dont la qualité détermine celle de la décision. A
son tour, la qualité de la décision s’apprécie { ses résultats (c.{.d. { sa capacité {
permettre à l’organisation d’atteindre ses objectifs), mais aussi { ses conséquences tant
directes qu’indirectes.

Or, les résultats d’une décision ne peuvent être totalement connus. Par conséquent, une
décision peut déboucher sur des résultats qui sont contraires à ceux désirés, car ne
permettant pas d’atteindre l’objectif ou de s’en rapprocher. Tout comme, elle peut
entrainer des conséquences totalement non désirées.

5.1. Les types de problèmes et de décisions en management

Les managers sont appelés à prendre des décisions dans beaucoup de domaines,
domaines dont voici une liste illustrative selon que l’on considère les fonctions
managériales, les tâches traditionnelles ou le niveau hiérarchique.
55

5.1.1. Les types selon les fonctions managériales

a. La planification

- détermination des objectifs à court, moyen et long termes ;


- élaboration des stratégies pour les atteindre.

b. L’organisation

- nombre de subordonnés directs (éventail de management, de contrôle ou de


subordination) ;
- degré de centralisation et de décentralisation ;
- définition des tâches et des postes ;
- structure organisationnelle.

c. La direction

- techniques de motivation ;
- style de leadership ;
- techniques d’amélioration de la productivité.
d. Le contrôle

- activités à contrôler ;
- méthodes de contrôle ;
- système d’information.

5.1.2. Les types selon les tâches au sein de l’entreprise

a. La production

- volume de la production ;
- capacité installée de l’usine ;
- localisation de l’usine ;
- méthodes de production (technologie) ;
- équipements et outillage ;
- importance des stocks ;
- montants et type de R & D ;
- type, périodicité et importance du contrôle de qualité.

b. Le marketing

- choix des marchés ;


56

- localisation des points de vente ;


- conditionnement des produits ;
- marques déposées ;
- canaux de distribution ;
- politique de prix ;
- types et budget de la publicité ;
- actions de promotion ;
- recherche marketing.

c. Les finances

- investissements à faire ;
- structure du financement à moyen et à long termes ;
- dividende à payer ;
- détermination du fonds de roulement optimal ;
- détermination du montant optimal de la trésorerie.

d. Les ressources humaines

- techniques de sélection ;
- importance et types d’actions de formation ;
- analyse et évaluation du travail ;
- politique salariale ;
- relations avec les syndicats ;
- techniques de lutte contre l’abstinence et le retard ;
- plan de pension ;
- critères de promotion.

5.1.3. Les types selon le niveau hiérarchique

a. Les décisions stratégiques

Ce sont les décisions qui : (i) relèvent de la Direction Générale ; (ii) intéressent
l’ensemble de l’entreprise ou du groupe ainsi que les divisions opérationnelles
(produits, marchés géographiques, clientèles) ; (iii) portent sur les produits, les
marchés, les objectifs de développement et les orientations fondamentales de
l’entreprise (expansion, diversification,…).

b. Les décisions administratives

Ce sont des décisions qui relèvent du niveau intermédiaire et qui portent sur la
structure de l’entreprise ainsi que sur l’acquisition des ressources (rapports
57

hiérarchiques, organisation du travail, réseau de communication et


d’information, approvisionnements,…).

c. Les décisions opérationnelles

Ce sont des décisions qui sont prises au niveau de l’exécution (décisions


courantes) et qui ont comme but de maximiser le profit de l’entreprise
(programmes de production, niveau des stocks, fixation des prix et des tarifs,
publicité et promotion des ventes,…).

5.2. Les erreurs courantes dans la prise de décision

Lors du processus de prise de décision, les managers commettent un certain nombre


d’erreurs dont les plus courantes sont celles-ci47 :

- l’excès de confiance : quand ils surévaluent leurs connaissances ou leurs jugements ;


- la gratification immédiate : quand ils donnent priorité aux options ayant un impact
visible à court terme au détriment de celles qui ont un impact de plus long terme
(p.ex. réduire drastiquement le budget de la publicité ou de la R&D pour améliorer
les résultats de l’entreprise { court terme) ;
- l’encrage mental : quand ils ont tendance à prendre la décision sur base des
premières informations reçues et à ne pas réajuster leur jugement, même après avoir
reçu ultérieurement d’autres informations plus pertinentes ;
- la perception sélective : quand ils sélectionnent et interprètent les informations en
fonction de leur conception de départ, c.à.d. avec un biais, un « prisme déformant »
ou des « œillères » ;
- la confirmation d’hypothèses : quand ils ne recherchent que les informations
confortant les choix déj{ faits { leur niveau (informations qu’ils acceptent sans
analyse approfondie), et, qu’a contrario, ils tentent de discréditer ou d’ignorer toutes
les informations contredisant ces choix (en se montrant très sceptiques envers de
telles informations) ;
- le biais de disponibilité : quand ils ont tendance à ne se souvenir que des évènements
les plus récents et les plus frais en mémoire au détriment de ceux qui sont plus
reculés, avec comme conséquence une estimation inexacte des probabilités ;
- le bais de représentativité : quand ils se basent sur la ressemblance entre deux
évènements pour déterminer la probabilité de survenance d’un autre évènement,
c.à.d. quand ils ont tendance à déceler des similarités ou des analogies entre deux
situations pourtant différentes ;
- l’illusion des séries : quand ils tentent de donner un sens à des évènements qui ne
sont en réalité que le fruit du hasard ;

Robbins S.P., Decide & Conquier, Upper Saddle River, New Jersey, Printice Hall,
47

2004.
58

- les coûts irrécupérables : quand ils prennent des décisions pour chercher à corriger à
tout prix des erreurs commises par le passé, c.à.d. pour tenter de récupérer à tout
prix l’argent, le temps ou l’énergie dépensés par le passé ;
- le biais de l’auto-complaisance : quand ils ont tendance à attribuer
systématiquement tous les succès à leur savoir-faire et tous les échecs à des facteurs
extérieurs.

5.3. Quelques principes importants dans la prise de décision

En dehors du fait qu’il faut prendre conscience de ces erreurs pour pouvoir les corriger
(ce qui implique que les managers puissent demander à leurs subalternes ou à leurs
supérieurs de les aider à les identifier), le meilleur moyen de les éviter, est de respecter
un certain nombre de principes importants lors de la prise de décision.

Nous donnons ci-dessous huit principes qui permettent de remédier aux erreurs ci-
dessus listées et sur lesquels nous aurons { revenir dans la suite de l’ouvrage :

5.3.1. Veiller { l’utilité de la décision

Toute décision doit déboucher sur une contribution visant l’accomplissement du ou des
objectifs fixés. Il faut donc toujours avoir en mémoire l’objectif fixé, car il en va de
l’utilité de la décision.

5.3.2. Veiller { l’applicabilité de la décision

La prise de décision est un processus mental différent de la mise en œuvre, mais le


décideur doit toujours avoir { l’esprit que la décision devra être traduite dans les faits.
D’où, la nécessité de veiller { l’applicabilité des décisions à prendre.

5.3.3. Ne pas chercher à plaire à tout le monde

Comme nous l’avons déj{ dit48 et que nous aurons l’occasion de le redire49, la décision
consiste généralement en une résolution de conflits : c’est donc un compromis dans un
conflit qui oppose les faits aux opinions, la connaissance aux habitudes, la générosité à
l’égoïsme, la tradition { la nouveauté, le décideur aux exécutants et { ceux qui doivent
subir la décision. De ce fait, elle ne peut pas plaire à tout le monde : le plus important est
donc de pouvoir l’expliquer { toutes les parties prenantes pour obtenir le maximum de
soutien possible de la part de ceux qui doivent la mettre en œuvre ou le minimum
d’opposition possible de la part de ceux qui doivent en subir les conséquences
négatives.

5.3.4. Tenir compte des facteurs les plus importants

48
Voir point 4.1.1. du chapitre 4.
49
Voir point 5.4. du chapitre 5 sur le processus de prise de décision.
59

Deux managers confrontés à un même problème, prendront rarement la même


décision : le tout dépend des facteurs considérés comme importants au moment de la
prise de la décision, de la pondération donnée à chacun des facteurs et de ce qui sera fait
des facteurs sacrifiés.

5.3.5. Veiller à être à la fois complet et prompt

Le décideur doit prendre le temps de la réflexion pour considérer toutes les alternatives
possibles. Cependant, la décision doit être suffisamment prompte pour ne pas devoir
subir les conséquences négatives d’une décision trop tardive, pour ne pas entrainer une
perte d’autorité ou induire que d’autres personnes n’assument la responsabilité de la
prise de la décision. Il y a donc un équilibre à maintenir entre « la précipitation
inconsidérée » et « l’atermoiement funeste ».

5.3.6. Encourager la participation des subalternes

Comme nous l’avons déj{ dit, la participation { la prise de la décision par ceux qui
doivent l’appliquer, est un élément très important pour avoir une efficacité accrue, dans
la mesure où les exécutants se sentent personnellement impliqués et engagés : c’est leur
décision et, par conséquent, ils mettront un point d’honneur { ce que son application soit
correcte. C’est le principe de la participation qui est un des moyens les plus efficaces de
la motivation, comme nous le verrons dans la quatrième partie.

5.3.7. Tenir compte des effets indirects de la décision

Toute décision concernant une partie de l’organisation, aura généralement des


répercussions (souvent non souhaitées) sur ses autres parties, dans la mesure où toute
organisation est un corps social, un système, dont les différentes parties sont en relation,
mieux, en interaction. La décision doit donc tenir compte de son impact, non seulement
sur la partie directement concernée, mais aussi sur les autres parties.

5.3.8. Prévoir toujours un mécanisme de contrôle de la décision

La décision doit toujours prévoir et comporter un mécanisme de feedback (rétroaction)


et de contrôle pour pouvoir la rectifier, le cas échéant (changement important de
l’environnement ou absence de résultat), afin de ne pas persister dans l’erreur.

5.4. Le processus de prise de décision

Venons-en maintenant { l’examen du processus de prise de décision. Ce processus


comprend huit principales étapes comme le montre le schéma n° 2 ci-après.

Schéma n° 3 : Etapes du processus de prise de décision

Identification Identification Pondération Développement Analyse Sélection d’une Mise en


du des critères de des critères des différentes des option = prise œuvre de
problème décision de décision options différentes de décision la
options décision

Evaluation de
la décision
60

Source : Adapté de Terry G. & Franklin S., Les principes du management, Tendances
Nouvelles, Economica, 8ème édition, 1985, p. 417 ; et de Robbins S. & al., Management.
L’essentiel des concepts et pratiques, Ed. Nouveaux Horizons, 7ème Edition, Paris, 2011, p.83.

5.4.1. L’identification du problème

Tout processus de décision commence par l’identification d’un problème, c.{.d.


l’identification de la divergence ou de l’écart entre un état des choses existant ou
prévisionnel et un état des choses souhaité. Cet état souhaité peut être le résultat à
assigner { une unité de l’organisation, un objectif déj{ assigné { l’organisation, une
performance passée de l’organisation, un standard ou une norme.

A titre d’illustration, prenons le cas d’une entreprise dont le véhicule affecté au


Directeur Général vient de faire un accident et doit être remplacé.

5.4.2. L’identification des critères de décision

Il s’agit de déterminer les facteurs que le manager considère comme importants dans la
prise de la décision et qui vont donc guider son choix final.

A titre d’illustration, le Service Achat de l’entreprise peut retenir les critères ci-après
pour le choix d’un véhicule : le prix d’achat, la consommation, le coût d’entretien, le
confort intérieur, la fréquence des pannes et les performances.

5.4.3. La pondération des critères

Tous les critères n’ont pas la même importance : il faut donc les classer par ordre de
priorité en leur donnant un facteur de pondération. On peut, par exemple, donner la
pondération 10 au critère le plus important et la pondération 1 au critère le moins
important, les autres critères étant évalués par rapport à ce critère le plus important.
Ainsi, si on attribue une pondération 5 { un critère donné, cela veut dire qu’il est moitié
moins important que le critère prioritaire qui aura la pondération 10.

Le poids de chaque critère peut aussi être exprimé en valeur relative (pourcentage), de
sorte que la somme des poids de tous les critères soit égale à 1. Ce qui nous donne : ∑
p(i) = 1 où i représente le critère et p(i) le poids associé à ce critère. Ainsi, le total
obtenu par chaque action à évaluer correspondra à la moyenne arithmétique pondérée
des points obtenus pour l’ensemble des critères de décision retenus.
61

Pour revenir { l’exemple du choix d’un véhicule, on peut donner les pondérations ci-
après : 10 pour le prix d’achat, 8 pour la consommation, 6 pour le coût d’entretien, 5
pour la fréquence des pannes, 3 pour le confort intérieur et 1 pour les performances.

5.4.4. Le développement des différentes options

Il s’agit de faire l’inventaire des différentes solutions possibles pour résoudre le


problème identifié { la première étape. Ceci dépendra notamment de l’information
disponible et des produits/services disponibles sur le marché.

Dans notre exemple, le Service Achat a retenu 8 modèles possibles au regard notamment
de l’offre disponible sur le marché (voir tableau n° 2).
5.4.5. L’analyse des différentes options

A ce stade, il s’agit d’évaluer les différentes options retenues en fonction de leurs forces
et de leurs faiblesses en leur donnant une note qui peut aussi varier entre 10 (note
maximum au regard du critère) et 1 p.ex. (note minimum).

Cette notation peut être très objective pour certains critères et plus subjective pour
d’autres. Ainsi, les critères prix d’achat, consommation, coût d’entretien et fréquence des
pannes seront plus objectifs que les critères confort intérieur et performances.

5.4.6. La sélection d’une option ou la prise de la décision

Il s’agit de sélectionner, de toutes les options identifiées, celle qui conjugue le plus de
forces et le moins de faiblesses.

En utilisant la technique de notation pondérée, le choix devrait se porter sur l’option qui
a le score pondéré le plus élevé, soit la « KIA ix35 ». Mais on constate aussi que la
« Hyundai Vera Cruz » obtient une note pondérée très proche : par conséquent les deux
options peuvent être considérées comme valables. Ainsi, il peut arriver que la décision
consiste à choisir non pas une seule option, mais deux ou plusieurs options comparables
et donc tout aussi valables.

5.4.7. La mise en œuvre de la décision

Il faut communiquer la décision prise à ceux qui sont concernés par son exécution afin
de permettre sa mise en œuvre effective. Ceci n’est pas toujours chose aisée. Il est ainsi
établi que la mise en œuvre effective sera facilitée si les concernés ont activement
participé aux différentes étapes du processus décisionnel comme dit plus haut.

5.4.8. L’évaluation de la décision

Le processus décisionnel étant un processus mental, il faut s’assurer que la décision


prise a effectivement contribué à résoudre le problème au vu de ses conséquences
réelles.
62

Dans notre cas, on va suivre le comportement réel du véhicule qui a été acheté. Ainsi, s’il
répond aux attentes, une décision similaire pourra être prise en cas de problème
similaire { résoudre. Dans le cas contraire, il n’y a aucune chance que l’achat puisse se
répéter et le véhicule pourra même être revendu avant son terme normal
d’amortissement.

Tableau n° 2 : Mode d’évaluation de 8 modèles de véhicules

Modèles Critères, coefficient de pondération, notes et notes pondérées


Prix Consom- Coût d’ Fréquence Confort Perfor- Total
d’achat mation entretien de pannes intérieur mances
(10) (8) (6) (5) (3) (1)
Toyota 8 80 8 64 9 54 8 40 4 12 4 4 254
Prado
Nissan 5 50 4 32 6 36 9 45 8 24 10 10 197
Patrol
VW 5 50 6 48 6 36 10 50 8 24 8 8 216
Touareg
Hyundai 10 100 10 80 9 54 7 35 6 18 4 4 291
VeraCruz
Kia 10 100 10 80 10 60 8 40 6 18 4 4 302
ix 35
Range 4 40 4 32 5 30 10 50 10 30 10 10 192
Rover
Audi 4 40 6 48 5 30 9 45 10 30 9 9 202
Quatro
Ford 5 50 6 48 6 36 9 45 8 24 9 9 212
Navigator
5.5. Les approches et les perspectives de la prise de la décision

Ces approches et perspectives sont l’œuvre d’Herbert Simon, économiste et sociologue


américain, qui est l’initiateur de la théorie de la décision50. Il est également connu pour
avoir décrit le processus décisionnel sous le nom de modèle IMC. Cette abréviation
correspond aux trois phases de ce processus, à savoir Intelligence ou Compréhension
(identification du problème, délimitation du problème et définition des facteurs à
prendre en considération), Modelisation ou Modélisation (identification, formalisation et
évaluation des différentes solutions envisageables) et Choice ou Choix (hiérarchisation
des solutions et sélection de celle qui parait la plus optimale)
Selon H. Simon, le processus de la prise de décision doit nécessairement être rationnel
pour permettre { l’organisation d’être efficace, c.{.d. d’atteindre ses objectifs. A cet effet,
il distingue deux types de modèles de rationalités.
5.5.1. Le modèle rationnel ou le modèle de la rationalité absolue

Simon H., Administration et processus de décision, Economica, Paris, 1984.


50
63

Idéalement, la prise de la décision doit être totalement rationnelle, c.à.d. basée sur des
choix cohérents, logiques, objectifs et maximisant leur utilité par rapport { l’objectif {
atteindre. Ceci suppose les hypothèses ci-après :

- le décideur dispose d’une information complète ;


- le décideur délimite correctement le problème et poursuit des objectifs clairs et
concis ;
- le décideur ne retient, à chacune des étapes du processus décisionnel, que l’option la
plus adaptée { l’objectif { atteindre ;
- les décisions sont prises dans l’unique intérêt de l’entreprise.

L’information étant complète, le décideur doit donc agir rationnellement, c.{.d. en toute
connaissance de cause. Par conséquent, les conséquences de ses décisions sont d’ores et
déj{ connues, l’avenir étant aussi certain que le présent.

5.5.2. Le modèle de la rationalité limitée

Cependant, force est de constater que le modèle de la rationalité absolue relève d’une
construction abstraite au regard de ses hypothèses. C’est ainsi que H. Simon a voulu
étudier les conditions réelles de la prise de la décision en tant que processus à travers
des études empiriques. Ces études lui ont permis de mettre en évidence le fait que les
hypothèses du modèle rationnel se heurtent souvent aux réalités du terrain : le manager
doit donc intégrer ces dernières et agir le plus rationnellement possible.

D’où, la notion de rationalité limitée qui implique que le manager cherche à prendre des
décisions rationnelles dans les limites de sa capacité { gérer l’information disponible ou
en tenant compte d’autres facteurs dont il va être fait état ci-dessous. On est donc loin de
la théorie économique néo-classique selon laquelle les décisions de l’individu, en tant
que homo oeconomicus, sont totalement rationnelles pour lui permettre de maximiser
ses gains, de minimiser ses coûts ou d’optimiser son comportement général
(transparence du marché et concurrence parfaite).

Le modèle de la rationalité limitée (en lieu et place du modèle de la rationalité absolue)


s’explique par les cinq facteurs et éléments ci-après.

a. Le choix entre solution satisfaisante et solution optimale

L’expérience montre que le manager s’arrête généralement au premier choix qu’il juge
satisfaisant étant donné qu’il est dans l’incapacité :

- soit d’obtenir toutes les informations dont il a besoin ;


- soit d’analyser toutes les informations disponibles sur toutes les options possibles
faute de moyens de les appréhender, faute de temps nécessaire au regard de ses
autres activités ou du fait de l’urgence des problèmes { résoudre ;
64

- soit d’être totalement objectif du fait qu’il a ses propres intérêts { défendre, son
propre pouvoir { conserver ou { renforcer et qu’il est donc aussi partie prenante des
conflits au sein de l’organisation.

Le manager s’arrête donc { la première solution satisfaisante, même s’il est parfaitement
conscient que cette solution n’est pas optimale. Ainsi, la notion de « solution optimale »
cède la place à la notion de « solution satisfaisante ».

b. La multiplicité des acteurs

Cette rationalité limitée est aussi imputable au fait que, contrairement au modèle de la
rationalité absolue, la décision n’est pas le fait d’un seul acteur, mais de multiples autres
acteurs internes ou externes (parties prenantes) ayant chacun des statuts et des intérêts
différents.

D’où, toute grande décision relève d’un processus de négociation et d’une recherche de
compromis. Ceci renforce donc la réalité d’une rationalité limitée, la décision ne pouvant
faire l’économie d’une multi-rationalité (rationalité des multiples acteurs ou somme des
rationalités partielles des différents acteurs), multi-rationalité qui remplace la
rationalité d’un seul acteur de la décision.

c. La non objectivité de l’information

Cette rationalité limitée est aussi renforcée par la non objectivité de l’information, du
fait qu’il a été observé que ce sont les acteurs qui décident de l’information.

En effet, l’information étant le véhicule du pouvoir, les acteurs vont la produire, la


transformer ou la retenir en fonction de la décision qu’ils veulent prendre. D’où,
l’information n’est plus un élément objectif de communication pour fonder la décision,
mais plutôt une variable affectée par le déroulement du processus de décision.

d. L’escalade d’engagement

Cette rationalité limitée est également due au phénomène dit « d’escalade


d’engagement ».

On parle d’escalade d’engagement quand un engagement est poursuivi ou renforcé


malgré des informations négatives sur sa pertinence ou des résultats non satisfaisants.
Ceci s’explique par le fait qu’il est parfois difficile d’admettre que la décision initiale
n’était pas la bonne au regard des enjeux, notamment des enjeux économiques et
financiers (budgets déjà dépensés, usines déj{ construites, emplois { sacrifier,…) : on
préfère alors assumer le choix initial malgré ses inconvénients, car on estime, à tort ou à
raison, que les conséquences de l’abandon du choix initial seront encore plus
65

coûteuses51. Tel est le cas par exemple de la filière nucléaire pour la production de
l’électricité.

e. L’absorption de l’incertitude

Au niveau des organisations, cette rationalité limitée conduit au concept d’absorption de


l’incertitude. Ce concept se réfère au fait que l’incertitude (consécutive à la complexité
des situations et { la multiplicité des rationalités) paralyse l’action, et pour éviter une
telle situation, l’organisation va se chercher des repères en sélectionnant une
information limitée, cohérente et orientée qui lui permet ainsi d’agir. De ce fait, elle va
structurer son environnement par :

- des schémas de classification dans lesquels elle va insérer toutes les situations ;
- la spécialisation des canaux de communication pour ne donner à chacun que
l’information strictement nécessaire ;
- un vocabulaire réduit et sélectif désignant et qualifiant les objectifs.

5.6. Les types de problèmes et de décisions

Les problèmes peuvent être classés en deux types : les problèmes structurés et les
problèmes non structurés. A ces deux types de problèmes, correspondent deux types de
décisions : les décisions programmées et les décisions non programmées.

5.6.1. Les problèmes structurés et les décisions programmées

Les problèmes structurés sont des problèmes connus, familiers, simples et faciles à
cerner. Par exemple : un consommateur non satisfait d’un produit fabriqué ou vendu par
l’entreprise, un fournisseur qui n’a pas livré dans les délais.

Pour résoudre ce type de problème, on va recourir à des décisions programmées, c.à.d. à


des décisions routinières et répétitives basées sur des méthodes standard à suivre,
découlant des règles et des modèles d’action inspirées des décisions antérieures. Les
décisions programmées n’impliquent donc pas la nécessité de parcourir toutes les huit
étapes du processus décisionnel du fait que l’information est considérée comme
suffisante et les conséquences comme certaines. Autrement dit, ce sont des décisions
« par précédent », c.à.d. basées sur des solutions déjà appliquées avec succès par le
passé. Selon H. Simon, ces décisions peuvent donc être informatisées.

Ainsi, le recours à une décision programmée implique que le manager doit se contenter
d’appliquer une politique, de suivre une procédure et de se conformer { une règle :

51
C’est la même notion que celle des coûts irrécupérables abordée au point 4.2. du
chapitre 4.
66

 Une politique est une règle de décision : elle fixe le cadre et l’orientation de l’action {
entreprendre pour résoudre un problème. Exemple: « Pour tout achat, il faut utiliser
au mieux les ressources financières de l’entreprise en maximisant le rapport
Qualité/Prix ».

 Une procédure est un affinement d’une politique : elle comprend une série d’étapes
ou d’opérations séquentielles (c.{.d. devant s’opérer dans un ordre chronologique
donné) liées entre elles et qui doivent être scrupuleusement suivies pour la mise en
œuvre d’une politique destinée { résoudre un problème identifié ou à atteindre un
objectif défini. Ainsi par exemple :

- les procédures d’embauche indiquent la façon dont les différentes phases doivent
être menées (recrutement, présélection, tests, interviews, sélection) ainsi que
leur séquence de réalisation ;
- les procédures de dépenses publiques indiquent les différentes phases et leur
ordre de succession (engagement, liquidation, ordonnancement et paiement).

 Une règle est une indication précise de ce que le manager peut faire ou ne pas faire
dans une situation donnée.

5.6.2. Les problèmes non structurés et les décisions non programmées

Ce sont des problèmes nouveaux ou inhabituels pour lesquels les informations


disponibles sont incomplètes, difficiles { obtenir et/ou { interpréter. A titre d’exemple,
on peut citer les décisions consistant à entrer sur un nouveau marché, à acquérir un
concurrent ou à fusionner avec lui, à investir dans une nouvelle technologie, à vendre
une activité non rentable ou { restructurer l’entreprise. Comme on le voit, il s’agit là des
cas pour lesquels l’entreprise ne peut prendre une décision « par précédent » étant
donné que le problème posé est à chaque fois différent et donc spécifique.

Pour résoudre ce type de problème, on va recourir à des décisions non programmées,


c.{.d. { des décisions spécifiques du fait que l’information disponible est considérée
comme insuffisante et que les conséquences se placent donc sur le plan du probable et
non du certain.

Ces types des décisions ne peuvent être informatisés : elles restent le propre de
l’homme, car le facteur humain est prépondérant dans le processus de la décision. Ils
requièrent donc beaucoup de créativité de la part du décideur, c.à.d. la capacité de
développer des idées nouvelles, originales et inédites à même de résoudre le problème
posé.

Il va de soi que toutes les personnes disposent d’un potentiel de créativité, mais dans
des proportions différentes. Ainsi la créativité dépend essentiellement de trois
éléments :
67

- L’expertise : il s’agit des capacités, des connaissances et des compétences dans un


domaine précis.
- L’ingéniosité : il s’agit d’un certain nombre de traits de la personnalité permettant de
sortir des chemins battus, tels que l’intelligence, l’indépendance, la confiance en soi,
la prise des risques, le contrôle intérieur, la persévérance face aux frustrations, la
capacité de faire des analogies et d’établir des associations.
- La motivation intrinsèque : c’est la mesure dans laquelle une personne accepte
d’investir son expertise et son ingéniosité pour résoudre un problème donné. Elle
dépend notamment de l’intérêt que ce problème suscite en elle, de la satisfaction que
sa résolution lui procure et du défi qu’il représente pour elle. C’est ainsi que les
créatifs sont des personnes qui aiment excessivement leur travail au point d’en être
obsédées.

5.6.3. Le niveau hiérarchique et les types des problèmes

Plus on est haut dans la hiérarchie de l’entreprise :

- plus on est confronté à des problèmes non structurés, complexes et uniques,


problèmes qui sont parfois posés par les niveaux hiérarchiques plus bas ;
- plus on doit par conséquent déléguer les problèmes routiniers aux niveaux
hiérarchiques plus bas pour se concentrer plus sur ces problèmes non structurés.

C’est la raison pour laquelle les entreprises dépensent des sommes parfois colossales
pour s’attacher les services des managers compétents, c.{.d. des managers créatifs, dotés
du jugement nécessaire pour prendre les décisions non programmées à même
d’apporter les solutions indiquées { des problèmes non structurés.

A contrario, plus on est bas dans la hiérarchie de l’entreprise :

- plus on a affaire à des problèmes simples, familiers, fréquents ;


- plus donc on recourt à des solutions programmées, c.à.d. à des solutions basées sur
des politiques, des procédures et des règles préétablies.

Ceci ne veut nullement dire que les niveaux hiérarchiques les plus élevés ne devraient
être confrontés qu’{ des problèmes non structurés ou que les niveaux hiérarchiques les
plus bas ne devraient avoir affaire qu’{ des problèmes structurés : c’est une question de
fréquence comme le montre le schéma n° 3 ci-dessous

Schéma n° 4 : Niveau hiérarchique, type de problèmes et type de décisions

Mal structuré Haut


68

Type de problème P.S. = D.P. P.N.S. = D.N.P. Niveau hiérarchique

Bien structuré Bas

Légende : P.S. = problèmes structurés ; P.N.S. = problèmes non structurés ; D.P. =


décisions programmées ; D.N.P. = décisions non programmées.

Source : Adapté de Robbins S. & al, op.cit., p.96.

5.6.4. Le niveau hiérarchique et le niveau d’incertitude

La question du niveau hiérarchique est aussi liée à celle du niveau de risque inhérent à
chaque situation impliquant une décision à prendre. Ainsi, on peut classer les décisions
en trois catégories selon ce critère, à savoir :

- la certitude : c’est le contexte idéal pour le manager, car il connaît { l’avance le


résultat de chaque option possible, ce qui lui permet donc de ne choisir que l’option
qui correspond au résultat désiré ;
- le risque : c’est le contexte dans lequel le manager ne peut qu’estimer la probabilité
liée à chacune des options possibles (sur base notamment des données historiques),
ce qui lui permet de choisir l’option dont la probabilité se rapproche le plus du
résultat désiré ;
- l’incertitude : c’est le contexte dans lequel le manager ne peut estimer, pour chacune
des options en présence, ni le résultat, ni la probabilité, ce qui implique que le
processus décisionnel sera influencé par l’information disponible et par l’orientation
psychologique du manager.

Il apparaît dès lors que :

- plus le contexte est caractérisé par l’incertitude (décisions non programmées et


impliquant des conséquences très graves), plus la décision va relever des niveaux
hiérarchiques les plus élevés ;
- plus le contexte est caractérisé par la certitude (décisions routinières programmées
et à conséquences limitées), plus la décision va revenir aux niveaux hiérarchiques
les plus bas.

5.7. Les décisions collectives ou de groupe

Nous allons examiner maintenant un type de décision dont l’importance est capitale au
regard de ses conséquences : les décisions collectives ou de groupe.

En effet, de par leur nature, beaucoup de décisions au sein des organisations sont prises
collectivement ou en groupe, notamment celles qui peuvent remettre en cause la survie
même de l’organisation ou celles dont l’impact ne se fera sentir qu’{ long terme. Ces
69

décisions sont ainsi prises au sein des structures internes appelés comités, commissions,
groupes de travail ou équipes de projets. C’est ainsi qu’une bonne partie de l’activité des
managers se passe en réunions au sein de ces structures dans lesquelles sont examinées
une ou plusieurs des huit étapes du processus décisionnel.

5.7.1. Les avantages des décisions collectives

Si l’on recourt aux décisions collectives, c’est parce qu’elles comportent un certain
nombre d’avantages indéniables, notamment :

a. Plus de précision

En effet, une décision de groupe bénéficie des informations qu’apportent tous ses
membres. D’où, une information plus complète, car il y a toujours plus d’idées dans la
tête de deux ou plusieurs personnes que dans la tête d’une seule personne.

b. Plus de créativité

En effet, une décision de groupe bénéficie des expériences forcément plus variées de
tous ses membres, d’où un enrichissement du processus de prise de décision, surtout si
les membres du groupe viennent d’horizons très différents.

c. Plus de motivation

En effet, une décision collective a comme conséquence une plus grande implication des
membres de l’organisation, du fait que la décision est prise de façon plus démocratique
(participation).

d. Plus d’approbation

En effet, une décision collective est plus facilement acceptable, car ceux qui la prennent
sont aussi ceux-l{ même qui auront { la mettre en œuvre.

5.7.2. Les inconvénients

Cependant, les décisions collectives comportent aussi un certain nombre


d’inconvénients, notamment :

a. L’allongement des délais de prise de la décision

En effet, il faut du temps pour réunir tous les membres du groupe et pour arriver à une
solution (soit par consensus, soit à la majorité). Ainsi, une décision collective se
caractérise par moins de rapidité et de rendement qu’une décision individuelle.
70

b. L’inégalité des membres du groupe

En effet, les membres du groupe sont rarement égaux : il y a toujours un déséquilibre au


profit de ceux qui sont les mieux placés au sein du groupe en termes de niveau
hiérarchique, d’expérience, de maîtrise des outils de décision, de facilité d’expression ou
d’influence sur les autres.

c. Le phénomène de la « pensée de groupe »

En effet, on observe souvent une tendance, dans le chef de certains membres du groupe,
{ ne pas vouloir aller { l’encontre de la pensée dominante, « pensée du groupe » ou
« pensée unique ». Ils donnent alors l’impression de se conformer { cette pensée et
s’interdisent donc de révéler des opinions et des idées divergentes, alternatives ou
impopulaires, quand bien même les dites opinions et idées pourraient améliorer la
décision.

d. Le problème de communication

En effet, certains membres du groupe éprouvent des problèmes réels de communication,


particulièrement du fait de la non maîtrise ou de la barrière de la langue. Dans ce cas, il
se pose le problème de leur participation effective au processus de prise de décision,
leur présence étant parfois plus symbolique que réelle.

5.7.3. Les moyens d’améliorer l’efficacité des décisions collectives

Pour améliorer l’efficacité des décisions collectives, nous retenons cinq moyens. Le
premier moyen est en rapport avec la taille du groupe, tandis que les quatre autres sont
des techniques particulières qui stimulent la créativité en contrant la pensée du groupe
(ou pensée unique) et l’autocensure qui tuent justement la créativité.

a. La taille du groupe

Plus la taille du groupe est grande, plus vraisemblablement le groupe sera hétérogène,
plus il va demander des efforts de coordination et du temps pour permettre à chaque
membre de s’exprimer.

Ainsi, les expériences ont montré que la taille du groupe doit varier entre 5 et 15
membres, mieux entre 5 et 7. On notera que le chiffre est toujours impair pour éviter
tout blocage lors de la prise de la décision en cas de vote.

b. Le brainstorming
71

Le brainstorming (terme anglais composé du mot « brain », cerveau, et du mot anglais


venant du verbe « to storm », secouer) peut être traduit en français par « tempête du
cerveau » ou encore « remue-méninges » (terme que certains auteurs ont vainement
tenté d’imposer au détriment de son équivalent anglais). C’est une technique qui permet
à un groupe de générer des idées créatives et novatrices pour résoudre un problème
donné, en donnant libre cours { l’imagination de ses membres.

Cette technique se base essentiellement sur les associations que les membres du groupe
peuvent établir pour trouver la solution qui convient le mieux à une situation donnée,
chacun pouvant rebondir sur les idées des autres pour faire ses propositions. Pour ce
faire, elle se fonde sur les principales règles ci-après :

- l’élimination des freins et barrières { caractère psychologique et social en


développant une atmosphère de confiance et de jeu, voire de fantaisie, parmi les
membres du groupe ;
- l’élimination de la censure et de l’autocensure ;
- la recherche de la quantité et non de la qualité des idées ;
- l’enregistrement et la valorisation de toutes les idées, quelles qu’elles soient et d’où
qu’elles viennent ;
- la séparation de la phase de la recherche des idées de celle de la critique des idées.

c. Le groupe nominal

La particularité de cette technique est que les membres du groupe travaillent ensemble,
mais chacun réfléchit individuellement. Plus précisément, les membres du groupe sont
physiquement présents, mais agissent individuellement { partir d’une réflexion écrite,
selon la procédure ci-après :

- l’animateur du groupe pose une question ;


- chaque membre du groupe rédige sa réponse au problème posé ou, le cas échéant,
liste les points nécessitant éclaircissements ;
- toutes les réponses (questions d’éclaircissement et solutions) sont consignées et
présentées aux membres du groupe ;
- après les clarifications nécessaires, un vote est organisé sur chaque idée émise, ce
qui permet de voir le degré d’acceptation et le niveau d’adhésion { chaque idée ;
- les idées qui ont reçu le plus de votes sont retenues.

Cette technique a deux principaux avantages :

- la réduction du temps de discussion et donc la rapidité dans la prise de la décision ;


- la limitation des occasions et des temps de parole, ce qui la rend particulièrement
adaptée aux situations conflictuelles et aux groupes de grande taille.

Cependant, elle a deux inconvénients majeurs :


72

- l’absence de discussion qui peut amener une personne { changer d’avis sur une
question donnée ;
- la perte de la richesse inhérente aux communications verbales.

d. Les réunions électroniques

C’est une technique où l’on combine le groupe nominal et l’ordinateur : c’est la technique
du groupe nominal dans laquelle les membres s’expriment non pas par écrit, mais à
l’aide d’un ordinateur selon la procédure ci-après :

- les membres du groupe prennent place dans une salle équipée d’ordinateurs
individuels ;
- l’animateur pose une question précise ;
- les membres tapent leurs réponses dans un programme mis à leur disposition ;
- les commentaires individuels et les votes collectifs sont affichés sur un écran de
façon anonyme.

Les avantages de cette technique sont les suivants :

- l’anonymat : l’ordinateur élimine toute possibilité d’identification (par l’écriture, par


l’ordre de remise des copies,…) et chaque membre peut donc envoyer librement son
message et émettre ses idées sans crainte d’une quelconque sanction ;
- la rapidité : il n’y a ni bavardage, ni digression, ni interruption, d’où un gain réel en
termes de temps.

Les inconvénients de cette technique sont les mêmes que ceux du groupe nominal et
auxquels il faut ajouter un troisième inconvénient : la perte de motivation due à
l’absence de système de récompense ou de reconnaissance pour les auteurs des
meilleures idées, du fait de l’anonymat.

e. La vidéoconférence

C’est une variante des réunions électroniques : elle place face-à-face des personnes
géographiquement éloignées. Elle comporte trois avantages particuliers, à savoir :

- l’amélioration du feed-back ;
- l’élimination des voyages et donc des risques liés aux voyages ;
- une économie en temps et en argent.

5.8. Les bases et techniques de prise de décision.

Nous allons clore ce chapitre en passant en revue les principales bases et techniques de
prise de décisions dont certaines ont déjà été mentionnés ci-dessus.
73

L’intuition, les faits, l’expérience et l’autorité constituent les bases sur lesquelles se
fonde le décideur pour arriver à une décision. Ceci est vrai tant en ce qui concerne les
fins (buts et objectifs) que les moyens. Ces bases sont généralement subjectives.

Par ailleurs, il y a des techniques quantitatives de prise de décisions dont l’application,


pour la plupart, remontent à la IIème Guerre Mondiale52. Il s’agit notamment de la
recherche opérationnelle qui est au confluent des mathématiques appliquées, de la
gestion, du génie industriel et de la probabilité statistique. Ces techniques ne sont utiles
que dans la détermination de certains types de décisions, plus spécialement des
décisions relatives aux moyens, qui sont aussi généralement des décisions
programmées53. Ces techniques sont assez impersonnelles et d’application quasi
mécanique.

En résumé, l’intuition, les faits, l’expérience et l’autorité peuvent être utilisés tant pour
résoudre les problèmes de finalité (buts et objectifs) que les problèmes des moyens,
tandis que les techniques quantitatives de prise de décision concernent plus
particulièrement les décisions routinières ou les décisions relatives aux moyens.

L’utilisation de l’une et/ou l’autre de ces bases et techniques dépend { la fois du


manager (tendances naturelles, jugement et niveau de connaissances) et de
l’environnement tant interne qu’externe de l’entreprise (urgence du problème,
ressources disponibles,…)

5.8.1. L’intuition

L’intuition peut se définir comme la compréhension immédiate d’un problème et de sa


solution sans recourir au raisonnement. Ici, les suggestions, les influences subies, les
préférences personnelles et l’arrière-fond psychoculturel du manager, jouent un très
grand rôle : la subjectivité du décideur est donc l’élément moteur. Ainsi, le passé,
l’éducation, la culture, la formation,… du manager jouent sur lui de façon inconsciente la
plupart du temps.

L’intuition comprend les cinq éléments ci-après :

- le cognitif du manager (ses compétences, ses connaissances et ses pratiques) ;


- l’expérience du manager ;
- l’affect du manager (ses sentiments et ses émotions) ;
- le subconscient du manager ;
- les valeurs ou l’éthique du manager.

52
Voir point 1.5. du chapitre 1 sur l’Ecole Quantitative.
53
Voir ci-dessus point 5.6.1. du chapitre 4.
74

On voit donc que l’intuition doit être considérée comme une base très valable de prise de
décision, car fondée sur certains éléments objectifs, à savoir le cognitif du manager et
son expérience54.

L’intuition comme base de prise de décision comporte les avantages suivants :

- la décision peut être prise endéans un laps de temps relativement court ;


- elle constitue un moyen satisfaisant pour des problèmes à conséquences limitées,
c.à.d. pour des problèmes dont les conséquences ne rentabilisent pas une recherche
prolongée des solutions (en parcourant toutes les huit étapes du processus de
décision).

Par contre l’intuition comme base de prise de décision comporte deux inconvénients
majeurs :

- le manager habitué à prendre ses décisions sur cette base aura tendance à ignorer, à
minimiser ou à négliger toutes les autres bases de prise de décision ;
- elle conduit généralement à des catastrophes quand elle est utilisée pour des
problèmes { conséquences non négligeables ou quand l’environnement est
caractérisé par sa turbulence.

5.8.2. L’expérience

Bien que faisant partie de l’intuition, l’expérience mérite d’être traitée de façon
spécifique à cause de son importance et de son occurrence comme base de décision.

En effet, face { un problème donné, on commence toujours par se demander s’il ne s’est
pas déj{ posé par le passé et si oui, comment il a alors été résolu. L’apport essentiel de
l’expérience dans la prise de décision, est de développer la capacité de distinguer et de
généraliser à partir des situations passées.

Les décisions basées sur l’expérience utilisent les connaissances pratiques. Il y a donc là
un élément « déjà vérifié » dans l’expérience, ce qui implique que la décision emporte
assez facilement l’adhésion des autres55.

Cependant, il y a un élément temps qu’il faut toujours considérer : la décision basée sur
l’expérience peut être en fait basée sur des événements ou un environnement
totalement dépassés. Il faut donc tenir compte de cet élément temps pour amender la
décision par un processus mental d’actualisation.

De plus, l’expérience du décideur peut être fort limitée et par conséquent, sa décision
sera alors basée sur une expérience tout aussi limitée. D’où des risques accrus d’erreur.

54
Voir ci-dessous au point 5.8.2.
55
Voir point 4.6.1. du chapitre 4 sur les décisions programmées qui sont des décisions
« par précédent ».
75

Enfin, il faut lutter contre la tendance qui consiste { surestimer l’expérience, car, ce
faisant, on maintient la tradition et le statu quo, on reste tourné vers le passé, on
empêche ainsi tout progrès et toute amélioration (aujourd’hui = hier, demain =
aujourd’hui).

5.8.3. Les faits

Quand les faits sont utilisés comme base de prise de décision, on considère que celle-ci
est fondée sur des éléments solides.

Cependant, les faits adéquats pour fonder à 100% une décision, ne sont pas toujours
disponibles ou nécessitent pour leur acquisition, soit d’engager des coûts élevés, soit
d’affronter des nombreuses difficultés, soit d’y consacrer beaucoup de temps.

En conséquence, le manager est souvent forcé de prendre des décisions sans pouvoir
disposer d’autant de faits qu’il aurait souhaité avoir. Il doit donc se contenter des
données dont il dispose, tout en appréciant leurs lacunes et les incertitudes y
associées56.

De plus, pour permettre la prise de décision, les faits doivent être classés, interprétés et
examinés soigneusement pour n’en garder que les éléments essentiels et pondérés en
fonction de chaque situation particulière57. Ceci implique donc nécessairement un
élément de subjectivité de la part du décideur et demande donc une certaine habilité qui
est autre chose qu’une simple collecte des données.

5.8.4. L’autorité

Beaucoup de décisions sont prises sur la base de l’autorité. C’est le cas de toutes les
décisions qui sont prises par le manager essentiellement pour se conformer aux
instructions qui s’imposent { lui, car fondées, soit sur des règles de décisions préétablies
(les statuts, les codes, le règlement intérieur, les politiques et les procédures de
l’entreprise ainsi que les lois et les règlements), soit sur la volonté des propriétaires.

Ces décisions comportent les avantages suivants :

- elles sont généralement vite acceptés ;


- elles ont une base moins subjective, dans la mesure où elles ne dépendent pas du
jugement du décideur ;
- elles impliquent une certaine permanence.

Cependant, elles comportent les inconvénients ci-après :

56
Voir ci-dessus point 4.5.2. du chapitre 4 sur la rationalité limitée.
57
Voir ci-dessous point 13.3.1 du chapitre 13 sur le problème du filtrage de
l’information.
76

- elles peuvent être basées sur des règles de décision qui n’ont pas été actualisées au
regard d’un environnement qui a totalement changé ;
- elles peuvent être basées sur la volonté des personnes qui sont trop éloignées du
théâtre des opérations et qui ignorent donc les réalités du terrain.

5.8.5. La recherche opérationnelle (R.O.)

Elle a pour objet de fournir au manager des bases rationnelles à la prise de décisions
dans divers domaines de gestion, habituellement dans un but de contrôle ou
d’optimisation (maximisation du profit, minimisation des coûts, amélioration de
l’efficacité,…). A cet effet, elle recourt à des méthodes de modélisation des problèmes
analysés et { des techniques d’optimisation des résultats, tels que les modèles de gestion
des stocks, la programmation linéaire ou la théorie des jeux.

a. Les modèles de gestion des stocks

Ils permettent de déterminer l’instant de passation de la commande ainsi que la quantité


à commander pour satisfaire aux exigences de la production tout en minimisant les
coûts totaux. Ainsi, la recherche opérationnelle permet d’aider le manager, d’une part, {
organiser l’approvisionnement de façon à pouvoir satisfaire les exigences des
utilisateurs (en quantité et en délai), et, d’autre part, { minimiser l’ensemble des coûts
(les coûts de commande, d’acquisition, de transport, de conservation et de distribution,
ainsi que les charges financières). Pour atteindre ce double objectif, la recherche
opérationnelle permet d’apporter la réponse aux deux questions suivantes : combien
commander (quantités économiques) et quand commander (délai)58.

b. La programmation linéaire

C’est une méthode de modélisation des problèmes d’allocation des ressources dans
lesquels les relations entre ressources et activités { entreprendre ainsi qu’entre ces
dernières et la performance recherchée, est représentée par des fonctions du premier
degré. Le résultat de la modélisation du problème par cette méthode est un programme
linéaire.

L’objectif poursuivi dans la résolution d’un programme linéaire est de déterminer les
différents niveaux d’activité { réaliser, eu égard aux ressources disponibles, de manière
à optimiser une fonction économique de profit ou de coût, selon le cas.

Ainsi, plusieurs types de problèmes peuvent être modélisés sous la forme d’un
programme linéaire, et ce, dans divers domaines de la gestion, notamment ceux de la
gestion commerciale, financière, de la production, du personnel ou des transports.

58
Voir la méthode des quantités économiques (MQE) au Point 16.3.3. du chapitre 16.
77

A titre d’illustration, prenons le cas d’une entreprise ayant 2 usines de production des
pièces détachées, l’une située au point A et l’autre au point B. Chaque usine dispose de 5
lignes de production sur lesquelles 82 produits ou parties de produits sont fabriqués. A
partir de ces 2 usines de production des pièces détachées, les 82 produits ou parties des
produits sont embarqués vers 15 usines de montage disséminées à travers le pays. Le
problème est de déterminer, pour avoir un coût total minimum, quels produits ou
parties de produits faut-il produire sur quelle ligne de production et dans quelle usine.
Etant donné qu’une partie des coûts est constituée des coûts de transport de l’usine de
production vers l’usine de montage et vers les clients, on peut en arriver { décider de
situer une ligne de produits à un endroit où les conditions de production ne sont pas
des plus économiques (coût de l’énergie, coût de la main-d’œuvre, conditions
climatiques trop rigoureuses,…), mais qui a l’avantage de se situer près de l’usine de
montage et/ou des clients.

c. La théorie des jeux

Elle représente un ensemble d’outils analytiques développés pour faciliter la


compréhension des situations d’interaction entre décideurs rationnels en situation de
concurrence.

Les académies militaires ont constitué les premiers terrains d’application la théorie des
jeux avec les jeux de guerre au cours desquels on simule des batailles.

Ces jeux de guerre ont été ensuite adaptés aux entreprises quand le problème consiste à
mettre face { face des concurrents, puisqu’ils sont réellement en situation de « guerre
économique ».

d. Les modèles des files d’attente

Ils aident le manager { organiser le système d’attente de manière { minimiser à la fois le


temps d’attente des clients et les coûts de gestion de ce système.

e. La probabilité statistique

La théorie des probabilités peut être utilisée pour le calcul rationnel des conséquences
d’une décision donnée. En d’autres termes, il est possible de calculer mathématiquement
la vraisemblance de certains événements, et d’estimer les gains ainsi que les pertes qui
résulteront des différentes alternatives en se basant sur des données statistiques
adéquates décrivant le comportement d’un phénomène donné.

A titre illustratif, prenons le cas d’une entreprise fabriquant deux types de montres-
bracelets utilisant deux procédés, le procédé A et le procédé B. Sur bases des
78

informations statistiques accumulées, le manager connaît, pour chaque type de montre-


bracelet, et donc pour chaque procédé (A et B), le nombre de rejets en cours de
fabrication et le moment où ces rejets interviennent. Si l’entreprise veut fabriquer un
troisième type de montre-bracelet utilisant le procédé C, synthèse des procédés A et B, le
manager pourra déterminer le nombre de rejets à attendre raisonnablement lors de la
fabrication de ce troisième type de montre-bracelet et décidera s’il faut ou non le
fabriquer.
79

DEUXIEME PARTIE : LA FONCTION PLANIFICATION

Nous avons défini le management comme un processus particulier qui consiste à


atteindre des objectifs préalablement définis en utilisant les ressources disponibles
(ressources humaines, financières, matérielles et immatérielles)59. Ainsi donc, la
définition des objectifs est la première étape du processus managérial.

Cette première étape du processus managérial fait partie de la fonction Planification qui
englobe ainsi la définition des objectifs, l’élaboration d’une ou de plusieurs stratégies
pour les atteindre et le développement d’un ensemble de plans pour coordonner les
activités.

Dans cette partie, nous allons nous pencher, tour à tour, sur la définition de ce concept et
des concepts connexes (écart de planification, objectifs, plans, programmes, budgets), le
processus de la planification et les différents types de plans.

CHAPITRE 6 : LES CONCEPTS ET LE PROCESSUS DE LA PLANIFICATION

Dans ce chapitre, nous allons nous pencher un peu plus en détail sur le concept de
planification, la notion d’écart de planification, les avantages et les inconvénients de la
planification, les différentes étapes du processus de planification, les différents types de
planifications et de plans, certains aspects complémentaires relatifs aux objectifs et
l’organisation de la planification.

6.1. La planification

6.1.1. La définition

Point 2.1. du chapitre 2.


59
80

Planifier, c’est organiser selon un ensemble de dispositions adoptées pour l’exécution


d’un projet ou un plan, c’est concevoir un futur désiré et définir les moyens pour
l’atteindre. Il y a donc l{ une option volontariste quant { la définition de l’objectif et au
choix des moyens afin d’atteindre cet objectif.

De l{, nous pouvons définir la planification comme un processus par lequel l’entreprise
analyse son environnement, apprécie ses possibilités (forces et faiblesses), définit ses
objectifs, affecte ses ressources (humaines, financières, techniques, matérielles et
immatérielles) pour les atteindre et intègre les données du futur.
Plus précisément, nous pouvons définir la planification comme un processus
volontariste :
- de définition des objectifs ;
- d’élaboration des stratégies, c.{.d. de détermination des moyens nécessaires pour
atteindre ces objectifs ;
- de détermination des étapes pour acquérir ces moyens ;
- de définition des étapes pour réaliser ces objectifs, c.{.d. d’élaboration d’un ensemble
de plans détaillés pour atteindre les objectifs définis avec les moyens disponibles.

6.1.2. La planification comme processus


Ainsi, la planification est un processus qui aboutit { l’élaboration d’un plan, le plan étant
un engagement formel pour la mise en œuvre d’actions spécifiques. Elle concerne ainsi
tant les fins (les objectifs = ce qu’il faut faire) que les moyens (les stratégies = comment il
faut faire).
La planification est un processus récurrent dans la mesure où elle implique une mise à
jour permanente du cycle de formulation des objectifs, de définition des stratégies et
d’élaboration des plans en fonction de la performance réalisée et/ou de l’évolution de
l’environnement.
C’est ainsi que, dans la planification, le plus important, ce n’est pas le plan (qui peut être
revu quand les données changent), mais plutôt le processus lui-même qui implique une
attitude dynamique envers l’environnement.
Dans le processus de planification, on retrouve donc notamment les notions ci-après :

- la notion d’événements futurs : la planification n’est pas la prise des décisions


futures, mais la prise des décisions présentes dont les effets ne porteront qu’{ terme,
c.à.d. dans le futur ;
- la notion d’articulation : il y a articulation d’une série d’actions et de décisions afin
d’atteindre un résultat donné ;
- la notion de continuité : la planification est un processus impliquant qu’elle est une
activité récurrente, c.{.d. qu’elle est { refaire dès que l’environnement change et/ou
que les résultats ne sont pas au rendez-vous.
81

6.1.3. La planification comme état d’esprit


La planification est aussi un état d’esprit, une réflexion permanente sur l’évolution de
l’entreprise par le manager, c.{.d. sur ce qu’il veut faire de l’entreprise et sur la façon de
le faire. C’est en cela que la planification diffère de la prévision. En effet, la prévision (qui
consiste { estimer l’état d’une variable dans un futur déterminé) sert seulement de base
à la planification (qui consiste à décider ce que l’on veut qu’une variable soit dans le
futur et qui relève donc du volontarisme). Elle constitue donc un moyen d’action qui
donne { l’entreprise la possibilité d’agir sur son futur et de le maîtriser.
La planification, en tant qu’état d’esprit, ne va pas de soi, car elle se heurte notamment
au fait que les cadres sont submergés par les problèmes du quotidien : la forte pression
du présent peut donc influer négativement sur le temps qu’ils devraient consacrer { la
réflexion sur le devenir de leur entreprise60.

6.1.4. La planification comme instrument de cohérence

La planification concerne tous les aspects de l’entreprise (production, marketing,


ressources humaines, R&D, finances,) et des horizons temporels différents (long, moyen,
court et très court termes) : elle donne donc lieu à un réseau de plans reliés entre eux.

Ce faisant, la planification n’est pas la sommation d’un certain nombre de plans, mais un
ensemble articulé et coordonné de plans susceptibles de permettre { l’organisation,
prise comme un tout, d’atteindre son objectif général. C’est ainsi que la planification est
aussi un instrument de cohérence entre les composantes de l’entreprise (divisions,
services et personnes) et les échéances (long, moyen, court et très court termes).

6.1.5. La planification comme instrument universel

La planification est aussi un instrument universel, dans la mesure où elle concerne tout
manager, même si elle est informelle dans le chef de certains d’entre eux. En effet, on
peut avoir deux types de planification :
- La planification informelle qui se caractérise par le fait que rien n’est écrit, les
objectifs et les stratégies n’étant connus que de quelques initiés. C’est le cas
notamment dans la quasi-totalité des TPE et dans bon nombre de PME où tous les
pouvoirs sont concentrés entre les mains du propriétaire-manager qui seul détient
tous les secrets de son entreprise. Ici, on peut parler de planification générique sans

60
Voir point 5.5.2. du chapitre 5 sur la rationalité limitée.
82

continuité. La planification informelle a une utilité très limitée, comme nous le


verrons plus loin.

- La planification formelle qui se caractérise par le fait que les objectifs et les stratégies
sont écrits et diffusés auprès de tous les membres de l’organisation, plus
spécifiquement auprès des cadres de direction. C’est le cas dans bon nombre de PME
et surtout dans les très grandes entreprises. Pour avoir tout son sens, la planification
doit donc être formelle. Ainsi, quand nous parlons de planification, nous nous
référons explicitement à la planification formelle.

6.2. L’écart de planification

6.2.1. La définition

Avant d’aller plus en avant, arrêtons-nous sur une notion importante, celle de l’écart de
planification. L’importance de cette notion découle notamment de ce que nous avons
souligné plus haut, à savoir que : (i) la planification est un processus volontariste qui
commence par la définition des objectifs ; (ii) la planification est différente de la
prévision, la seconde servant de base à la première.
De fait, la planification est un processus qui, quelle que soit la situation considérée,
implique toujours une triple démarche :

- l’analyse de la situation présente pour pouvoir répondre { la question suivante : « Où


sommes-nous ? » ;
- l’établissement des prévisions sur la situation future pour pouvoir répondre { la
question suivante : « Où allons-nous ? » ;
- le choix { réaliser dans le cadre d’une stratégie volontariste pour pouvoir répondre {
la question suivante : « Où voulons-nous aller ? ».

Cette triple démarche permet de déterminer « l’écart de planification » ou « planning


gap » en anglais, comme le montre le graphique n° 1 ci-dessous. Ainsi, l’écart de
planification est l’écart entre l’état actuel ou prévisionnel et l’état recherché. Autrement
dit, c’est la différence entre deux états : (i) l’état dans lequel l’organisation se trouve
maintenant ou qui sera le sien dans un futur donné si des actions particulières ne sont
pas menées (« où allons-nous ») ; (ii) l’état que l’on souhaite voir se réaliser (« où
voulons-nous aller »).
83

Graphique n° 1 : Processus de planification et définition de l’écart de planification

70 C

D
60

50 B
Ventes

A = Où sommes-nous ?
40 A B = Où allons-nous ?
30 C = Où voulons-nous aller ?

20 D=B-C = Ecart de planification

0
2005 2010 2015 2020 Années

L’écart de planification peut concerner les ventes, la part de marché, le bénéfice, les taux
de rebuts, les délais de livraison, le taux d’absentéisme, …

6.2.2. La nécessité du diagnostic

Pour déterminer cet écart de planification, il faut donc passer par la phase du diagnostic
qui, malheureusement, est souvent négligée, soit du fait de l’urgence des problèmes {
résoudre, soit du fait que l’on veut souvent directement passer { l’action avec son
intuition comme seule base de réflexion.

Une fois défini cet écart, il faut en rechercher les véritables causes. En effet, il ne faut pas
s’arrêter aux manifestations extérieures d’un phénomène, mais plutôt aller au fond des
choses en privilégiant une démarche d’ensemble qui analyse le phénomène dans sa
globalité du fait de l’interdépendance des problèmes. Cette analyse globale n’est pas
chose aisée, car elle implique l’étude de nombreuses variables en interrelation et la prise
en compte de leur évolution dans le temps. Il y a donc l{ un accroissement de l’élément
incertitude qui est d’ailleurs la caractéristique même de la planification.

L’étape du diagnostic est donc capitale, car c’est d’elle que découle la recherche des
solutions alternatives (stratégies) qui doivent mener à la réduction de l’écart de
planification.

6.3. Les avantages et les inconvénients de la planification


84

La planification comporte un certain nombre d’avantages, dont nous retenons cinq, et un


inconvénient principal.

6.3.1. Les avantages

a. L’adaptation de l’entreprise { l’environnement

La planification permet { l’entreprise de s’adapter { son environnement et de pouvoir


évoluer. En effet, l’entreprise évolue dans un environnement caractérisé par un
changement permanent. Sans planification, elle court le risque de stagner et de se
momifier (aujourd’hui = hier et demain = aujourd’hui), voire de régresser, et donc de
mettre en péril sa survie. La planification lui permet donc de s’adapter {
l’environnement et d’évoluer tant quantitativement (croissance des ventes) que
qualitativement (qualité des produits, des équipements, des technologies, des méthodes,
…).

b. La coordination des efforts

La planification permet { l’entreprise de coordonner les efforts de ses différents services


et de ses membres. En effet, elle permet d’unifier les efforts des différents services et des
membres de l’organisation en montrant { chacun la direction { suivre (son objectif
particulier). Elle permet ainsi d’accroitre la motivation de chaque service et de chaque
membre en lui montrant quelle est sa contribution { la réussite de l’organisation, c.{.d.
comment ses efforts vont contribuer { atteindre l’objectif global de l’organisation.

c. L’élimination des activités redondantes et superflues

Du fait qu’elle facilite la coordination, elle permet également d’éliminer les activités
redondantes (on répertorie chaque activité confiée { une composante de l’organisation)
et superflues (on ne retient que les activités qui contribuent effectivement à la
réalisation de l’objectif confié { l’organisation).

d. La réduction de l’incertitude
Elle permet de réduire l’incertitude, sans pour autant l’éliminer, dans la mesure où elle
permet d’anticiper les changements, d’évaluer les conséquences de ces changements et
donc de formuler des réponses adaptées.

e. La fixation des repères pour le contrôle

Elle facilite le contrôle, dans la mesure où elle fixe les objectifs ou les normes à partir
desquels un contrôle efficace peut se faire.

6.3.2. L’inconvénient
85

Le principal inconvénient de la planification est qu’elle peut être source de rigidité, dans
la mesure où elle peut agir comme un corset pour l’entreprise et donc devenir inadaptée
en cas d’importants changements enregistrés dans l’environnement.

Pour écarter ce risque de rigidité, le manager doit faire preuve de souplesse et de


flexibilité pour adapter et amender le plan initial en fonction de l’évolution de
l’environnement et/ou des résultats enregistrés. Il doit ainsi éviter de poursuivre { tout
prix le chemin tracé alors que le paysage a totalement changé et/ou que les résultats ne
sont pas probants. Il doit ainsi être { l’affût des contraintes/menaces de l’environnement
pour les contourner, mieux, pour les transformer en opportunités.

6.4. Le processus de planification


Pour une entreprise, le processus de planification comprend six grandes phases, comme
le montre le schéma n° 4 ci-dessous : (i) le choix du ou des secteurs d’activité ; (ii) la
formulation d’un plan stratégique (plan { long terme) ; (iii) l’élaboration des
programmes d’actions ou plans de mise en œuvre (plans { moyen terme) ; (iv)
l’établissement des plans { court terme ; (v) l’établissement des budgets ; (vi) la révision
du plan général.
Schéma n° 5 : Processus de planification

Mission de
l’entreprise

Système des
valeurs des
managers

Analyse de la Secteur Plan Progr Plan Budget Evaluation


d’activité Strat. MT CT Révision
demande

Analyse de
l’offre

Analyse de la
concurrence

Recherche des
effets
de synergie

6.4.1. Le choix du secteur d’activité

Le choix du secteur d’activité d’une entreprise est la détermination de son champ


d’activité, c.{.d. la détermination de ses produits/marchés. Elle permet ainsi {
86

l’entreprise de centrer ses efforts sur un ou quelques domaines précis (ex. : le petit
matériel électronique pour grand public).

Ce choix se fait en combinant les six éléments ci-dessous : la mission de l’entreprise, le


système des valeurs des managers, l’analyse de la demande, l’analyse de l’offre, l’analyse
de la concurrence et la recherche des effets de synergie.

a. La mission de l’entreprise

On peut définir la mission d’une organisation comme son objectif fondamental


prioritaire, sa raison d’être, le pourquoi de son activité, ou encore la tâche qu’elle se
donne avec le sentiment du devoir.

Ainsi, une entreprise peut se donner comme mission de contribuer à défendre un


modèle politico-culturel (cas de certaines radios de l’Ouest { l’époque de la Guerre
Froide ou des pays en quête de démocratie), élever le niveau de formation d’une
population (certaines institutions de formation), promouvoir l’économie d’un pays
(certaines banques), réduire les souffrances ou les décès dus à une maladie donnée (cas
d’une fondation luttant contre les maladies cardio-vasculaires), faciliter la connexion
avec les personnes proches (cas des réseaux sociaux).

La mission est définie par les propriétaires qui tracent ainsi le cadre { l’intérieur duquel
pourront être utilisés les capitaux qu’ils mettent { la disposition de l’entreprise. Ainsi,
quand un manager n’est plus d’accord avec la mission assignée { l’entreprise qu’il dirige,
il doit soit amener les propriétaires à modifier cette mission dans le sens souhaité par
lui, soit démissionner en cas d’échec de sa part.

b. Le système des valeurs des managers

Nous avons déj{ insisté sur l’importance des valeurs intériorisées par les managers dans
la conduite du processus managérial à travers les notions de « philosophie du
management » et de « responsabilité sociale de l’entreprise »61.

Ainsi donc, même si la mission de l’entreprise est définie par ses propriétaires, ce sont
les managers qui, de par leurs attributions et fonctions, sont appelés à donner corps à
cette mission. Par conséquent, les valeurs dont ils sont porteurs, auront un impact
important sur la façon dont ils vont utiliser les capitaux mis à la disposition de
l’entreprise par les propriétaires, notamment sur le choix du ou des secteurs dans
lesquels l’entreprise va effectivement déployer ses activités pour remplir sa mission.

Points 2.4. et 2.5. du chapitre 2.


61
87

c. L’analyse de la demande

L’entreprise doit choisir le ou les secteurs dont le niveau de la demande est à même de
lui garantir une activité suffisante au regard de ses objectifs. Pour ce faire, elle doit
considérer les deux éléments ci-après :

- le potentiel de croissance des différents secteurs : toutes autres choses étant égales
par ailleurs, l’entreprise s’interdira d’entrer dans des secteurs en déclin ou en
stagnation, pour choisir les secteurs en croissance, mieux, ceux dont le taux de
croissance est supérieur { celui du PIB du pays d’accueil ;
- le pouvoir d’achat des clients des différents secteurs : l’attractivité d’un secteur n’est
pas seulement tributaire de sa demande, mais aussi du pouvoir d’achat de ses clients
dont dépendra notamment la hauteur de sa marge unitaire et donc sa rentabilité.

d. L’analyse de l’offre

L’entreprise n’a pas intérêt { entrer dans un ou des secteurs où l’offre est pléthorique.
Pour ce faire, elle devra prendre en considération les éléments ci-après :

- L’offre totale disponible ou la capacité totale installée qui est égale { la somme des
capacités installées de toutes les entreprises opérant dans le secteur, offre totale qui
doit être comparée à la demande exprimée.
- Le risque d’augmentation de cette offre totale en intégrant les investissements
projetés mais non encore réalisés.
- L’offre indirecte : l’entreprise ne doit pas seulement se contenter d’estimer l’offre du
secteur visé, mais aussi intégrer l’offre des autres secteurs qui exploitent les mêmes
segments de marché que le secteur visé. Ainsi, le transport du fret peut se faire par
voie navigable, par rail, par route ou par voie aérienne, de même que le transport des
passagers sur moyennes distances peut se faire par avion, par TGV, par trains
ordinaires, par covoiturage, par cars ou par voie navigable (ferry).
- La prise en considération de l’innovation technologique pour apprécier les risques
qui s’en suivraient pour l’entreprise.

e. L’analyse de la concurrence

L’entreprise n’a pas intérêt { entrer dans un ou des secteurs où les conditions de la
concurrence lui sont défavorables. Elle doit donc considérer les éléments ci-après :

- la taille, la force et l’agressivité des concurrents ;


- les conditions d’entrée dans l’industrie et son organisation ;
- les contraintes légales, administratives et autres ;
- la comparaison des coûts de l’entreprise avec ceux de ses concurrents ;
- la comparaison des atouts de l’entreprise (compétences distinctives, effort de R&D,
accès aux intrants spécifiques, accès aux matières premières, ressources humaines,
88

financières et matérielles) par rapport à ceux de ses concurrents dans les différents
secteurs.

Pour pouvoir connaitre ces éléments, l’entreprise doit procéder { l’analyse de


l’environnement pour en dégager les principales tendances.

Pour cela, elle peut utiliser la méthode dite de « veille concurrentielle », méthode qui
consiste { recueillir des informations sur les concurrents afin d’anticiper leurs actions au
lieu de se contenter d’y répondre après coup, l’anticipation étant plus efficace que la
réaction du fait que « l’attaque est la meilleure défense ». Il s’agit donc, pour l’entreprise,
de savoir ce que sont ses concurrents, ce qu’ils font et comment leurs actions peuvent
l’affecter. Pour cela, elle doit recueillir et analyser les informations les concernant et qui
sont souvent accessibles au grand public telles que les campagnes publicitaires, le
matériel promotionnel, les communiqués, les rapports remis aux services publics, les
offres d’emplois, les articles de presse, les informations diffusées sur les sites internet
(dont ceux des concurrents eux-mêmes), les études sectorielles, les bases des données
du secteur ou des organisations professionnelles, les annuaires professionnels, les
revues spécialisées, les revues professionnelles, les salons et expositions ou les produits
des concurrents.

Pour atteindre un meilleur résultat, l’entreprise peut même sous-traiter cette tâche de
veille concurrentielle à des consultants extérieurs.

Il convient de souligner que la veille concurrentielle n’est pas { confondre avec


l’espionnage industriel, celui-ci étant une activité illégale consistant, soit à voler des
documents appartenant à des concurrents, soit à violer leurs secrets commerciaux.

f. La recherche des effets de synergie

L’entreprise a intérêt { entrer dans des secteurs qui peuvent avoir des effets de synergie
avec ses activités actuelles, de telle façon que les anciennes et les nouvelles activités
puissent exercer des effets de complémentarité les unes sur les autres. La synergie
implique donc que l’effet combiné de deux activités est supérieur { la somme des effets
associés à chacune des activités prises séparément (1 + 1 = 2 sans synergie et 1+1>2
avec synergie). Autrement dit, la recherche des effets de synergie implique que les
activités anciennes soient renforcées par les activités nouvelles, et vice versa. A titre
d’exemple :

- un transporteur aérien, qui ajoute une activité d’hôtelier { son activité de transport,
va provoquer une synergie commerciale entre ses deux activités ;
- un exploitant de minerai de fer qui devient sidérurgiste, un éleveur de porcs qui
devient fabriquant de charcuterie ou un fabricant d’automobiles qui rachète un
concurrent (et donc de nouvelles marques), vont tous bénéficier d’une synergie de
89

coûts par intégration verticale ou par étalement de certains coûts sur une production
plus grande (coûts de structure, de R&D et d’approvisionnement).

Il faut cependant veiller { ce qu’il n’y ait pas de synergie négative suite { une
incompatibilité des efforts. C’est ainsi qu’une entreprise produisant un produit haut de
gamme et qui décide de développer parallèlement une ligne de produits bon marché,
risque en fait d’adopter une stratégie maladroite et donc de provoquer une synergie
négative pour deux raisons contraires :

- La possibilité pour la nouvelle ligne de bénéficier de l’image de l’ancienne ligne, ce


qui peut être inadapté au marché visé. Tel serait le cas d’une entreprise automobile
fabriquant des voitures haut de gamme (et donc { coût d’entretien élevé) qui rachète
une entreprise fabriquant des voitures bas de gamme (et donc à faible coût
d’entretien) : si elle commercialise les voitures bas de gamme sous le même marque
que les voitures haut de gamme, l’image de marque de celles-ci va réagir
négativement sur la clientèle traditionnelle des voitures bas de gamme qui va
redouter une hausse du coût d’entretien et peut-être s’en détourner.

- La possibilité pour la nouvelle ligne de porter préjudice à la ligne de prestige au


point d’en détourner certains clients traditionnels heurtés par le fait qu’une marque
de prestige puisse ainsi perdre un de ses signifiants sociaux les plus importants à
leurs yeux, à savoir un prix élevé, lequel prix confère le prestige social lié sa
possession.

Pour éviter cette synergie négative, les entreprises concernées peuvent, soit garder les
anciennes marques pour commercialiser chaque type de produits sous sa marque
spécifique (cas de deux produits anciens), soit recourir à des sous-marques par
lesquelles elles vont commercialiser les nouveaux produits bas de gamme (cas d’un
produit ancien et d’un produit nouveau).

6.4.2. La planification stratégique


La planification stratégique couvre un horizon de long terme (plus de 5 ans) et s’élabore
au niveau de la Direction Générale. Elle couvre trois niveaux comme le montre le schéma
n° 5 ci-dessous :
- le niveau de l’entreprise ou du groupe : c’est la stratégie d’entreprise (corporate
strategy) ;
- le niveau des divisions opérationnelles : c’est la stratégie opérationnelle,
concurrentielle ou de division (business strategy ou competitive strategy) qui
concerne les divisions de l’entreprise (les produits, les zones géographiques, les
clientèles ou les marchés) ;
- le niveau des fonctions : c’est la stratégie fonctionnelle (functional strategy).
90

Concernant ce troisième niveau, il faut noter que certains auteurs le placent plutôt dans
la programmation à moyen terme (voir schéma n° 4). Quant à nous, nous estimons que
ces deux conceptions sont tout aussi valables du fait à la fois de la similitude et de la
différence entre ces trois types de planifications :

- similitude : dès lors que la stratégie est élaborée au niveau de la Direction Générale
dont font partie aussi les directeurs fonctionnels, on peut soutenir que la
planification fonctionnelle fait partie de la planification stratégique ;
- différence : dès lors que la planification au niveau de l’entreprise et des divisions est
qualitative et ne donne que les grandes lignes des actions { mener, alors qu’elle est
beaucoup plus précise au niveau des directions fonctionnelles considérées par
ailleurs comme des ressources à la disposition des divisions, on peut aussi soutenir
que la planification fonctionnelle ne fait pas partie de la planification stratégique.

Schéma n° 6 : Les trois niveaux de la planification stratégique

Stratégie de
Groupe
l’entreprise

Stratégie
Division A Division B Division C
opérationnelle

Stratégie Production R.H Marketing Finances


R&D
fonctionnelle

La planification stratégique est le processus qui aboutit à la définition du plan


stratégique. Ce dernier comprend les objectifs, les ressources pour les atteindre et le
processus pour acquérir et utiliser lesdites ressources.

Cette définition du plan stratégique se fait { partir d’une analyse sur les opportunités
des couples produit/marché, des ressources dont dispose l’entreprise ainsi que de ses
avantages compétitifs, de son potentiel de croissance et des synergies actuelles ou à
créer. Ainsi, le processus de planification stratégique (dont découle le plan stratégique),
est la résultante de l’interaction entre les objectifs de l’entreprise, les ressources de
l’entreprise (forces et faiblesses) et les opportunités/menaces de l’environnement (les
menaces englobant aussi les contraintes), comme le montre le schéma n° 6.

Schéma n° 7 : Déterminants du plan stratégique

Légende :
A A=Ressources de l’entreprise =
Forces et faiblesses
B=Opportunités et menaces/
D
B contraintes de l’environnement

C C= Objectifs de l’entreprise
D = Plan stratégique
91

Cette interaction est telle que toute modification d’une des trois composantes, entraîne
nécessairement modification de l’ensemble. C’est ainsi que :

- une découverte de l’entreprise dans le cadre de son effort de R & D, peut entraîner
modification de ses objectifs et lui créer de nouvelles opportunités ;
- une modification de l’environnement juridique (lois anti-pollution, fiscalité, …) peut
entraîner modification des ressources de l’entreprise pour l’acquisition
d’équipements adaptés et donc également la modification de ses objectifs ;
- une modification volontariste des objectifs de l’entreprise, doit entraîner
nécessairement une modification de ses ressources et même parfois pourra
provoquer une modification de l’environnement.

6.4.3. La programmation à moyen terme ou la planification fonctionnelle

Comme nous l’avons dit, la programmation { moyen terme concerne les directions
fonctionnelles (marketing, finances, production, personnel, R&D, …).

C’est le processus d’établissement des plans détaillés et coordonnés portant sur


l’ensemble des activités de l’entreprise, plans qui permettent ainsi d’utiliser les
ressources disponibles en vue d’atteindre les objectifs définis dans le cadre de la
stratégie adoptée.

La programmation à moyen terme couvre généralement une période de cinq ans, comme
la stratégie. Comme déjà dit plus haut, elle est plus précise que la planification
stratégique qui est plus qualitative et qui ne donne que les grandes lignes de l’action {
mener.

6.4.4. La planification à court terme.

La planification à court terme traite de façon encore plus détaillée les différentes phases
décrites dans le programme. Ainsi, si le directeur des ventes a planifié un cycle de
formation de ses vendeurs, la planification à court terme doit spécifier la nature précise
de la formation { dispenser, l’identité des formateurs et des personnes { former, les
dates, les lieux, le contenu de la formation, …

6.4.5. Les budgets.

La planification à court terme est complétée par les budgets qui sont la traduction
chiffrée, particulièrement en termes monétaires, des décisions prises au niveau de la
planification.

C’est ainsi que dans toute entreprise bien organisée, toutes les recettes et toutes les
dépenses doivent être budgétisées : on aura ainsi, d’un côté, un budget des recettes, et,
92

de l’autre côté, différents budgets des dépenses concernant la production, les


rémunérations, les ventes, la formation ou l’investissement (achat d’équipements, de
véhicules, de machines ou de bâtiments).

6.4.6. L’évaluation et la révision des étapes de la planification

A chaque étape de la planification, on doit voir si toutes les conditions sont réunies pour
faire effectivement ce qui doit être fait et donc effectuer un test pour voir si :

- les étapes s’enchaînent logiquement ;


- les ressources mises en œuvre sont suffisantes pour atteindre l’objectif ;
- la façon de les utiliser est celle qui convient à la situation.

Par ailleurs, il faut prévoir une phase d’évaluation pour faire le point sur les résultats
déj{ obtenus après la mise en œuvre du plan et une phase de révision éventuelle des
plans au cas où des éléments non prévus le nécessitent ou les objectifs ne sont pas
atteints. Cette phase d’évaluation-révision est essentielle pour l’amélioration du
processus de planification qui est un processus itératif d’allers-retours constants entre
les fins et les moyens, un processus d’essais et erreurs.

Le processus de planification a mis en exergue six concepts importants : les objectifs, les
stratégies, les plans, les politiques, les programmes et les budgets. Nous allons ci-
dessous examiner de façon plus détaillée l’ensemble de ces concepts, sauf celui des
stratégies qui sera abordé dans le chapitre suivant, compte tenu de son importance et de
sa complexité.

6.5. Les objectifs

Dans ce point, nous allons aborder certains autres aspects relatifs aux objectifs afin de
compléter ce que nous avons dit dans la première partie62.

Pour rappel, les objectifs sont des résultats attendus et qui, de ce fait, orientent les
décisions des managers et servent de critère pour mesurer leurs performances.

6.5.1. Les objectifs déclarés et les objectifs réels.

Quand nous parlons d’objectifs, il faut considérer les objectifs réels et non les objectifs
déclarés. En effet, dans une entreprise, on a généralement deux types d’objectifs qu’il
convient de distinguer :

62
Voir points 1.4. à 1.8. du chapitre 1.
93

- Les objectifs déclarés : ce sont les objectifs qui figurent dans les principaux
documents publiés par l’entreprise (charte, statuts, rapports annuels, annonces
destinées au public, …). Ils sont souvent contradictoires et vagues, car ils doivent
tenir compte des attentes des différentes parties prenantes. En fait, ils sont plus
destinés { gérer les relations publiques de l’entreprise qu’{ guider son action.
- Les objectifs réels : ce sont ceux qui guident effectivement l’action de l’entreprise et
que cette dernière cherche réellement à atteindre. En général, ils ne sont pas portés à
la connaissance du grand public, souvent même pas des cadres moyens et
subalternes : ils ne sont connus que des grands responsables de l’entreprise (cadres
supérieurs et de direction). Pour les connaitre, il faut donc procéder par déduction
en observant et en analysant les décisions prises et les actions menées par la haute
hiérarchie de l’entreprise.

6.5.2. L’équilibre entre l’ensemble des objectifs.

Etant donné qu’une entreprise, une division opérationnelle, une direction fonctionnelle,
un service et même un individu ont rarement un seul objectif, mais plusieurs, il faut
généralement se contenter d’un niveau minimum de réalisation de ceux qui sont jugés
indispensables ou prioritaires.

Ainsi, le manager ne doit pas accorder une attention trop importante à un seul objectif
spécifique, sinon il y a risque de porter préjudice à la bonne réalisation des autres
objectifs. A titre d’exemple, le responsable de la production doit trouver un équilibre
entre les délais, la qualité et les coûts de production : s’il privilégie les délais, il devra
peut-être recourir aux heures supplémentaires qui entraînent des coûts plus élevés et
éventuellement une baisse de la qualité, tandis que s’il veut trop minimiser les coûts, la
qualité risque de s’en ressentir.

6.5.3. Les méthodes de détermination des objectifs.

Pour déterminer les objectifs, l’entreprise peut utiliser deux méthodes : la méthode
traditionnelle et la méthode de gestion ou de direction par les objectifs (GPO ou DPO en
sigle).

Dans la méthode traditionnelle, ce sont les dirigeants qui définissent les objectifs après
analyse des différents éléments pertinents de l’environnement tant interne qu’externe
de l’entreprise, ensuite ils les communiquent aux autres membres de l’entreprise, et
enfin ils s’en servent pour s’assurer que chaque employé a fait ce que l’on attend de lui.

Les partisans de cette méthode traditionnelle partent du principe que ce sont les
dirigeants qui, grâce { leur vision d’ensemble et aux informations auxquelles ils peuvent
seuls accéder, connaissent mieux ce qu’il faut faire.

Cette méthode découle de la planification dite « descendante » : c’est la planification qui


se fait sous l’entière responsabilité des cadres supérieurs, sans impliquer les cadres
94

intermédiaires et les cadres subalternes. Dans cette démarche de planification, les


cadres supérieurs sont aidés par un service de planification composé de spécialistes et
dont le rôle se limite { la préparation (récolte de l’information nécessaire), { la rédaction
et à la mise en forme des plans. Une fois que les plans sont élaborés par les cadres
supérieurs pour l’ensemble de l’entreprise, ils sont transmis aux niveaux hiérarchiques
inférieurs afin de les adapter et de les compléter en fonction de leurs besoins
spécifiques.

Ce type de planification produit des documents de très grande qualité, mais de peu
d’utilité pour l’action.

Quant à la méthode de gestion ou de direction par les objectifs, nous allons la développer
au point 9.3.7. du chapitre 9.

6.5.4. La fixation et suivi des objectifs.

Il convient de noter que, pour être utile, un objectif doit être fixé en spécifiant les quatre
composantes ci-après :

- un attribut ou une dimension spécifique (ex. rentabilité, croissance, emploi, rotation


du personnel) ;
- une échelle de mesure (ex. taux de rentabilité du capital, marge bénéficiaire, bénéfice
net, …) ;
- une norme ou un seuil (ex. un taux de rentabilité du capital de 20 %) ;
- un horizon temporel (ex. 5 ans).

Cependant, la fixation d’un objectif ne suffit pas : elle doit être complétée par un suivi
pour former un processus. Ainsi, le processus de fixation et de suivi des objectifs devrait
comprendre les étapes suivantes pour une meilleure efficacité :

- commencer d’abord par se remettre { l’esprit la mission de l’entreprise dans le but


de s’assurer que les objectifs { définir sont compatibles avec cette mission et
contribuent effectivement à sa réalisation ;
- évaluer les ressources disponibles dans le but de s’assurer que les objectifs seront
réalistes, même s’ils doivent nécessairement être ambitieux ;
- déterminer les objectifs { assigner { l’entreprise en tant qu’entité, objectifs qui
doivent prendre en compte les opportunités et les menaces/contraintes de son
environnement tant interne qu’externe ;
- déterminer les objectifs individuels à assigner à chaque employé et les résultats
attendus de lui, afin de permettre { chaque membre de l’organisation d’apporter sa
contribution { la réalisation de l’objectif d’ensemble ;
- rédiger les objectifs, ce qui constitue une preuve de l’importance que l’on accorde {
cette activité ;
95

- communiquer les objectifs écrits { tous les concernés dans le but de s’assurer que
chaque employé sait exactement ce qui est attendu de lui ;
- mettre en place les mécanismes de feed-back ou de rétroaction afin de pouvoir suivre
la mise en œuvre des objectifs et évaluer ainsi les progrès réalisés ;
- attribuer des récompenses, en cas d’objectifs atteints, afin de motiver et
d’encourager les employés { atteindre les objectifs leur assignés.

6.6. Les plans

Pour rappel, les plans sont des documents décrivant comment les objectifs seront
atteints et qui, { ce titre, contiennent l’allocation des ressources, les budgets et
l’agencement des tâches { réaliser. Ainsi, le plan est un document qui comprend :

- les objectifs à atteindre ;


- les ressources nécessaires pour atteindre ces objectifs ;
- la séquence de différentes opérations pour l’acquisition de ces ressources ;
- la séquence des différentes opérations pour l’utilisation de ces ressources.

6.6.1. Les types de plans.

On peut utiliser quatre critères pour donner une typologie des plans.

a. Selon la portée

Ce premier critère permet de distinguer :

- les plans stratégiques : ils concernent l’ensemble de l’entreprise (le groupe, les
divisions opérationnelles et les directions fonctionnelles), fixent des objectifs
globaux et positionnent l’entreprise par rapport { son environnement externe ;
- les plans tactiques ou opérationnels : ils exposent en détail comment atteindre les
objectifs globaux et concernent donc les cadres intermédiaires ou moyens.

b. Selon la durée

Ce deuxième critère permet de distinguer :

- les plans à long terme : ce sont des plans couvrant une période de plus de cinq ans,
mais on considère de plus en plus que le long terme commence à trois ans pour tenir
compte de l’accroissement de l’incertitude de l’environnement ;
- les plans à moyen terme : ce sont des plans couvrant une période de un à trois ans ;
96

- les plans à court terme : ce sont des plans de moins d’un an.

c. Selon la spécificité

Ce troisième critère permet de distinguer :

- Les plans directionnels : ce sont des plans dont les objectifs sont flexibles et exprimés
en termes généraux (ex. faire baisser les tensions au sein de l’entreprise pour
atteindre un climat apaisé). Leur principal avantage est la flexibilité qu’ils
permettent, d’où une plus grande adaptabilité { l’évolution de l’environnement. Leur
principal inconvénient est le manque de précision qui les caractérise, laissant ainsi la
porte ouverte à des interprétations qui peuvent être sources de contreperformances.
- Les plans spécifiques : ce sont des plans qui énoncent des objectifs concis et précis
(tel qu’atteindre un taux de rentabilité des capitaux de 20 % dans 5 ans), c.à.d. qui
comprennent les quatre composantes énumérées au point 6.5.4. (attribut, échelle de
mesure, norme et horizon temporel). Ils ont comme avantage, la clarté qui exclut tout
risque d’ambiguïté ou de malentendu, tandis que leur inconvénient majeur est le
manque de souplesse en cas de changements importants dans l’environnement de
l’entreprise.

Compte tenu des avantages et inconvénients respectifs de ces deux types de plans, le
manager est appelé à faire un savant dosage entre la flexibilité qu’autorisent les plans
directionnels et la précision que procurent les plans spécifiques.

d. Selon la fréquence

Ce quatrième critère permet de distinguer :

- les plans ponctuels : ils sont conçus pour des situations peu fréquentes, uniques,
dont la probabilité de reproduction est très faible pour l’entreprise ;
- les plans permanents : ils sont conçus pour des situations fréquentes, récurrentes, de
type régulier.

6.6.2. Le cas particulier du Business Plan

A titre d’illustration, nous allons aborder le cas particulier du Business Plan (qui se
traduit en français par Plan d’Affaires, Plan de Développement, Plan d’Entreprise ou Plan
d’Action), compte tenu de sa très grande importance. En effet, c’est le premier plan dont
doit se doter toute nouvelle entreprise ou toute entreprise candidate à une nouvelle
activité et qui veut accroitre ses chances de succès, dans la mesure où il précise sa vision,
ses objectifs, ses stratégies ainsi que son modèle de démarrage et de développement.
C’est ainsi qu’il est exigé par les apporteurs des capitaux (actionnaires et prêteurs)
chaque fois que l’on veut lancer une activité nouvelle (création d’une entreprise ou
97

projet nouveau) : c’est donc un document destiné { les convaincre pour les amener {
apporter leur concours financier.

Le Business Plan poursuit ainsi un double objectif :

- permettre { une entreprise ou au promoteur d’une entreprise d’obtenir un


financement auprès d’une banque, d’une institution financière ou d’un investisseur ;
- organiser les actions à entreprendre et préciser comment l’on va procéder, ce qui
constitue en fait l’argumentaire susceptible de convaincre ces apporteurs des
capitaux en démontrant que l’on sait exactement ce que l’on va faire.

L’élaboration d’un Business Plan comporte normalement les dix actions ci-dessous :

a. La description du point de départ et de l’intention de l’organisation

Il s’agit de fournir l’historique de l’entreprise, décrire le produit/service qui sera offert


au marché (en mettant en évidence son caractère unique), expliquer le mode de
commercialisation et ce dont on a besoin pour cette commercialisation.

b. L’identification des objectifs et des moyens pour les atteindre

Il s’agit d’identifier l’intention de l’entreprise { travers ses objectifs { court, moyen et {


long termes. De plus, il faut aussi spécifier comment on va atteindre les dits objectifs et à
quelles échéances. Ces objectifs sont de deux types :

- les objectifs génériques qui sont, pour une nouvelle entreprise, la création, la survie
et la rentabilité ;
- les objectifs spécifiques qui concernent les ventes, la part de marché, la qualité des
produits/services, la responsabilité sociétale.

c. L’analyse du marché

Il s’agit de faire l’analyse SWOT63 pour déterminer le marché cible (segment), identifier
les concurrents et décrire les tendances globales. Ceci est important pour convaincre les
destinataires du plan que l’entreprise sait exactement ce qu’elle fait et qu’elle a la
maîtrise de son environnement, particulièrement de ses concurrents.

d. La description de l’étape du développement du produit/service

Si l’entreprise veut lancer un produit/service nouveau nécessitant une étape de R&D, il


faut déterminer le temps nécessaire à la phase du développement, évaluer le coût du

63
Voir point 7.1.2. du chapitre 7 suivant.
98

développement, identifier les difficultés éventuelles, décrire le processus de fabrication


du produit/service et les moyens d’y faire face, décrire toutes les autres étapes avant le
passage à la production.

e. La description du processus de commercialisation du produit/service

Il s’agit, d’abord, de spécifier les avantages éventuels du produit de l’entreprise par


rapport à ceux des concurrents, et ensuite de décrire la stratégie de commercialisation
que l’entreprise compte utiliser, { savoir les politiques de distribution, de prix et de
promotion/publicité ainsi que les avantages éventuels à octroyer aux clients (dont le
service après-vente).
f. L’élaboration du plan financier

Il s’agit de déterminer le coût de démarrage du projet, de spécifier le mix financier


(rapport entre fonds propres et emprunts) et d’élaborer les états financiers
prévisionnels sur une période de trois { cinq ans (cash flow, comptes d’exploitation et
bilans prévisionnels).

g. La présentation générale de l’organisation de l’entreprise

Il s’agit de présenter l’organigramme de l’entreprise, ses dirigeants (formation,


expérience, rémunération, …) ainsi que les personnes ressources (administrateurs,
avocats, auditeurs, commissaires aux comptes,…). Il faudra aussi donner un certain
nombre d’éléments sur le personnel (barème salarial, avantages sociaux, autres
éléments de la motivation du personnel ou son mode d’évaluation).

h. La spécification de la forme de la société

Il s’agit de spécifier la forme de la société et de donner la liste de ses principaux


actionnaires ou associés.

i. L’identification des risques et aléas majeurs

Il s’agit, d’une part, d’identifier les risques (relatifs notamment aux ventes, aux
fournisseurs, au recrutement d’une main-d’œuvre qualifiée, { la qualité des produits, …),
et, d’autre part, de spécifier les mesures { prendre pour y faire face.

j. L’élaboration du Business Plan

Il s’agit de la phase d’élaboration du Business Plan à partir des éléments recueillis dans
les neuf phases ci-dessus. Le document élaboré comprendra les parties ci-après :
99

- la page de garde qui contient le nom et l’adresse de la société, son logo, les personnes
à contacter et leurs références (téléphones et adresses courriel), la date du Business
Plan ;
- la table des matières ;
- la présentation sommaire des principaux dirigeants ;
- le Business Plan proprement : présentation des différentes informations recueillies
dans les phases précédentes ;
- la conclusion : synthèses des points abordés dans le point précédent ;
- les annexes, graphiques, tableaux, illustrations et photos.

6.6.3. Les politiques et les procédures

Nous avons vu précédemment64 que les problèmes peuvent être classés en deux types,
les problèmes structurés et les problèmes non structurés, et qu’{ ces deux types de
problèmes correspondent deux types de décisions, les décisions programmées et les
décisions non programmées.

Nous revenons ici sur les décisions programmées que nous allons examiner sous l’angle
de la planification, c.à.d. comme faisant partie du processus de planification.

Pour rappel, les décisions programmées impliquent que l’entreprise puisse formuler des
politiques, des procédures et des règles, lesquelles permettent d’assurer une certaine
permanence dans la prise de décision et donc une certaine homogénéité entre les
décisions.

Les politiques sont des règles de décisions, des guides de réflexion et d’actions, des
garde-fous, des frontières placées autour de ce qui peut être décidé ou fait. Elles donnent
les indications sur la façon dont les objectifs peuvent être atteints et empêchent que les
décisions soient prises ni trop vite (escamotage de certaines des huit phases du
processus de prise de décision), ni sur des bases différentes à chaque fois (fondements
différents pour des problèmes comparables). Exemple : la politique de la société X est de
croître par acquisition.

Ainsi, une politique est un plan qui, cependant, a deux spécificités : d’une part, il est
permanent, et, d’autre part, il constitue un objectif subsidiaire. Par exemple, si l’objectif
d’une entreprise est de diminuer de 20% le taux d’absentéisme en un an, la politique
pour atteindre cet objectif peut consister en l’amélioration des conditions du travail :
comme on le voit, cette amélioration est à la fois une politique (règle de décision et guide
d’action) et un objectif subsidiaire (moyen pour diminuer le taux d’absentéisme).

Quant à la procédure, elle est un affinement de la politique et elle peut se définir comme
un ensemble d’opérations séquentielles, c.{.d. exprimées dans un ordre chronologique
donné, qui a pour but de permettre la réalisation d’une tâche donnée. Ainsi par exemple,

64
Point 4.6. du chapitre 4.
100

les procédures d’embauche des agents indiquent la façon dont les opérations doivent
être menées ainsi que leur séquence de réalisation. Lorsque la procédure est formalisée,
elle est appelée « procédure standard ».

Dans le domaine financier par exemple, les politiques et les procédures peuvent porter
sur la nature des crédits à demander, les dividendes, les engagements des dépenses, la
structure du passif, les méthodes d’élaboration des budgets, les dépenses ou la tenue de
la caisse.

A l’instar de ce quia été dit concernant les objectifs, les politiques et les procédures ne
sont pas immuables, bien qu’ayant un caractère permanent assez prononcé : il faut donc
prévoir la procédure de leur révision.

6.6.4. Les programmes d’actions

Comme cela vient d’être dit, pour résoudre un problème structuré, c.{.d. un problème de
type régulier et routinier, l’entreprise va recourir { une décision programmée, c.{.d. une
décision basée sur des politiques et des procédures préétablies. Mais, dès qu’il s’agit de
résoudre un problème non structuré, c.à.d. un problème spécifique et différent de ceux
que l’entreprise rencontre habituellement, elle va recourir { une décision non
programmée en élaborant un programme d’actions spécifique qui fixe les étapes
nécessaires { la mise en œuvre de la décision en question et le temps nécessaire pour
chacune de ces étapes. Tel est le cas du lancement d’un nouveau produit, de l’acquisition
d’une société ou de l’ouverture d’un nouvel atelier.

a. L’élaboration des programmes

L’élaboration d’un programme d’action passe par plusieurs phases, { savoir :

- la division en étapes intermédiaires de l’action d’ensemble nécessaire { la réalisation


de l’objectif : chaque étape comprend la description de son objet, de sa nature et du
niveau de réalisation recherché ;
- l’affectation d’un responsable { chaque étape ;
- l’évaluation et l’acquisition des ressources indispensables pour la réalisation de
chaque étape ;
- l’estimation du temps nécessaire { la réalisation de chaque étape, en déterminant la
date du début de chaque étape et sa durée ;
- la fixation des dates précises pour chaque étape : elle se fait { partir de l’estimation
précédente et de la séquence des opérations.

L’établissement d’un programme d’actions est un processus itératif d’adaptation entre


les moyens dont dispose l’entreprise et les contraintes de temps auxquelles elle est
soumise.

Il existe deux types de plans qui, par leur nature même, sont des programmes d’actions :
101

- le projet : c’est un programme dont l’exécution est limitée dans le temps et qui peut
soit se suffire à lui-même, c.{.d. dont l’objectif est totalement indépendant du reste
de l’organisation (cas du projet Apollo pour l’exploration de la lune), soit faire partie
d’un plan plus global (cas du projet de construction d’une nouvelle usine ou d’un
nouveau bâtiment) ;
- l’ordonnancement : c’est un programme qui : (i) définit les différentes étapes
nécessaires { la réalisation d’une tâche, l’ordre de succession des différentes sous-
tâches et la durée de ces sous-tâches ; (ii) permet de suivre les délais de réalisation
des différentes sous-tâches pour s’assurer qu’ils seront respectés ; (iii) permet de
prendre les mesures correctives adéquates pour pouvoir respecter les dits délais65.

b. Programmes et évolution de l’environnement.

Par ailleurs, il faut souligner qu’un programme, { l’instar de toute activité de


planification, est soumis aux aléas du futur, c.à.d. aux incertitudes qui pèsent sur tout
environnement en mutation.

Afin de faire face { ces risques et d’en tenir compte lors de l’élaboration des
programmes, trois méthodes sont généralement envisagées. D’ores et déj{, nous devons
retenir que, compte tenu de leurs avantages et inconvénients respectifs, un bon dosage
de ces trois méthodes est recommandé pour mieux coller { l’évolution de
l’environnement, dosage qui est laissé { l’appréciation du manager.

 Les programmes dits de contingence

La première méthode consiste à élaborer des programmes dits de contingence. La


programmation de contingence s’inspire de la méthode dite des scénarii, méthode qui
consiste { imaginer, d’une part, plusieurs évolutions possibles d’une certaine situation,
et, d’autre part, les répercussions que ces évolutions peuvent avoir sur la réalisation de
l’objectif final. Dans la programmation par contingence, on élabore donc { l’avance un
certain nombre de programmes correspondant { un ensemble d’hypothèses sur
l’évolution de l’environnement.

Cependant, cette programmation de contingence a des limites :

- la planification devient vite fastidieuse du fait du nombre important des situations


envisagées ;
- le coût associé à ce type de planification augmente donc fortement ;
- on ne peut d’emblée envisager toutes les situations possibles auxquelles l’entreprise
se verra confrontée.

Dès lors, plusieurs auteurs pensent que ces trois limites diminuent l’intérêt de cette
démarche, mais nous sommes d’avis que celle-ci garde tout son intérêt, dès lors qu’on se

65
Voir point 13.2. du chapitre 13.
102

limite aux cas les plus probables et qu’on exclut les cas intermédiaires dont les
conséquences ne sont pas sensiblement différentes de celles des cas extrêmes.

 La révision permanente des programmes

La seconde méthode consiste à réviser de manière permanente les programmes en


fonction des nouvelles informations sur l’environnement et de l’état d’avancement ou
des résultats de l’exécution du programme. Ici, il s’agit non seulement de s’adapter aux
modifications de l’environnement, mais aussi et surtout d’anticiper les évolutions
probables de l’environnement.

Cette méthode se heurte malheureusement à la résistance au changement des personnes


responsables de la mise en œuvre du programme.

 La programmation à très court terme

La troisième méthode consiste à limiter la programmation à très court terme pour


diminuer ainsi les risques d’erreurs ou de modifications imprévisibles de
l’environnement.

Mais la limitation de cette méthode découle du fait que l’intérêt d’un plan est justement
de pouvoir considérer une situation dans son ensemble en tablant sur un horizon
temporel relativement long et de préparer de ce fait l’articulation des actions au sein de
cette situation. Or, la programmation à très court terme ne peut le faire dans la plupart
des cas.

6.7. Les budgets

Après avoir établi les programmes d’action, il faut enfin les évaluer financièrement, c.{.d.
les traduire en termes monétaires.

6.7.1. La définition

On peut trouver plusieurs définitions du budget, mais nous allons retenir celle qui met
l’accent sur l’aspect managérial et qui découle en fait du processus de planification que
nous avons examiné dans ce chapitre.

Ainsi, un budget peut se définir comme la traduction en termes quantitatifs


(généralement monétaires) et pour une période donnée (généralement une année), des
objectifs, des politiques et des programmes d’actions élaborés dans le cadre d’un plan
couvrant toutes les phases d’une opération.

Quand on parle de budget, on se réfère généralement au budget financier qui comprend


non seulement l’ensemble des prévisions des coûts et des revenus, mais aussi parfois
des informations sur les relations entre coûts, volumes et profits. Tout comme, il peut
aussi comprendre des indications sur son évolution en fonction des données nouvelles
sur l’environnement.
103

6.7.2. La rigidité du budget

Comme déj{ souligné, l’existence de toute forme de plan, peut être préjudiciable { la
souplesse de l’entreprise si celle-ci tend à adhérer de manière trop rigide au plan.

Il est donc nécessaire d’utiliser certaines méthodes pour tenir compte, dans le budget,
des modifications éventuelles de l’environnement. A cet effet, on peut utiliser les trois
méthodes ci-après :

- La méthode des budgets de contingence : elle consiste à identifier un certain nombre


de scénarii et { faire correspondre un budget { chacun d’eux.
- La méthode des budgets additionnels : elle consiste à reprendre la procédure
budgétaire chaque fois que l’on constate une évolution significative de
l’environnement, le budget subséquent pouvant être totalement différent du
précédent.
- La méthode des budgets variables : elle permet de connaître, en fonction de
l’évolution de certaines variables, l’ensemble de nouvelles données chiffrées. Cette
méthode est largement facilitée aujourd’hui par les logiciels informatiques. Prenons
le cas d’une entreprise qui enregistre une chute de ses ventes : on aura ainsi une
répercussion immédiate de cette chute sur une partie des coûts, les coûts variables,
qui vont normalement baisser, modifiant ainsi le budget initial, et, en différenciant de
manière précise les éléments variables des éléments fixes, une rapide adaptation
peut se faire.

6.7.3. Quelques règles ou principes d’élaboration des budgets

L’élaboration d’un budget n’est pas chose aisée. Pour la faciliter, il faut respecter un
certain nombre de principes dont deux sont particulièrement importants :

- la participation : il faut s’assurer de la participation des différentes parties


impliquées dans la mise en œuvre du budget en articulant son processus
d’élaboration autour d’une série d’allers-retours entre supérieurs et subalternes, afin
d’éviter le développement de réactions négatives au moment de la mise en œuvre du
budget ;
- la non extrapolation des budgets : il ne faut jamais extrapoler le budget de l’année en
cours pour en faire celui de l’année suivante, car, ce faisant, on ne tient nullement
compte de l’évolution de l’environnement, on est essentiellement tourné vers le
passé et on enlève donc au processus de planification son caractère volontariste de
réduction de l’écart de planification.

6.8. L’organisation de la planification

Nous allons terminer ce chapitre en examinant les structures chargées de l’élaboration


des plans et le cadre dans lequel se déroule la planification.
104

6.8.1. La Direction Générale

Pour les entreprises de petite taille avec une faible complexité organisationnelle, le rôle
du dirigeant couvre aussi l’élaboration et le suivi des plans.

Mais quand la taille de l’entreprise augmente et que les activités se multiplient, le


dirigeant ne peut plus appréhender seul l’ensemble des problèmes : il doit par
conséquent diviser les tâches, déléguer son autorité en créant des unités de support,
c.à.d. des services fonctionnels et des unités de coordination. Il tend donc à devenir un
véritable coordonnateur dont les préoccupations sont plus tournées vers le long terme,
tandis qu’il confie les détails des opérations { des collaborateurs. Il devrait donc
consacrer de plus en plus de son temps à la planification qui devrait devenir plus globale
et être formulée sous forme de plans ponctuels et conjoncturels.

Dans la réalité cependant, on constate malheureusement que les dirigeants se


consacrent moins à des tâches de planification qu’ils ne devraient le faire, et ce, pour
deux raisons principales :

- les problèmes de court terme, c.{.d. ceux qui se posent { l’entreprise au jour le jour,
leur prennent beaucoup de temps ;
- les caractéristiques psychologiques de certains dirigeants les poussent plus à
s’orienter vers l’action que vers la conception.

Comme nous l’avons dit, quand l’organisation croît et devient plus complexe, le dirigeant
doit déléguer une partie de son pouvoir, y compris en matière de planification.
Cependant, cette délégation est d’autant plus difficile { réaliser qu’elle touche { un
domaine majeur et donc de très grande importance. Il y a donc là une contradiction
permanente qui nécessite de la part du dirigeant un numéro d’équilibrisme constant qui
peut ainsi se résumer : déléguer (à ses subalternes et aux unités de support) sans perdre
le contrôle.

6.8.2. Les services fonctionnels et d’état-major

Les services fonctionnels et d’état-major ont pour rôle d’aider le dirigeant dans sa tâche
et non de le remplacer : ce sont des simples multiplicateurs de sa réflexion et de son
action.

Dans le cas d’espèce, les services fonctionnels et d’état-major n’élaborent pas les plans,
tâche réservée uniquement au manager à travers la levée des options qui donnent
l’orientation générale aux différents plans. Leur rôle consiste plutôt à :

- faciliter la tâche du manager (qui doit lui-même faire l’effort de réflexion et lever les
options) en préparant pour lui le travail de planification à travers la récolte de
l’information, son analyse et la réalisation des études préliminaires permettant de
lever les options fondamentales des plans à élaborer ;
105

- apporter leur expertise au manager afin de l’éclairer dans sa prise de décision


(présentation des différentes alternatives possibles et leurs conséquences
respectives) ;
- mettre en forme les plans sur base des directives très précises émanant du manager.

Ce faisant, il n’en reste pas moins vrai que les services fonctionnels et d’état-major ont
un réel pouvoir en matière de planification, pouvoir que leur confèrent leur grande
maîtrise des dossiers techniques et leur grande expertise en techniques de planification.
D’où, possibilité de conflit avec les responsables des services opérationnels. En effet, les
fonctionnels sont en général moins âgés, mieux formés, plus théoriques et usent d’un
langage technique pas toujours très compréhensible des opérationnels. Pour s’assurer
donc que les conseils et recommandations des fonctionnels seront suivis, il faudra
notamment : (i) faire en sorte que le niveau hiérarchique des fonctionnels soit
suffisamment élevé pour qu’ils puissent être considérés comme des interlocuteurs
valables par les opérationnels ; (ii) obliger les opérationnels à recourir aux fonctionnels
dans des cas bien précis.

6.8.3. Les formes d’organisation de la planification

Le manager doit organiser la planification, c.{.d. répartir les tâches, définir l’autorité et
fixer les objectifs de chacun, y compris les opérationnels, dans le cadre de l’élaboration
et de la mise en œuvre des plans.

A cet effet, plusieurs facteurs influent sur le mode d’organisation de la planification,


notamment :

- le style de direction : s’il est de type démocratique, l’organisation sera plus


décentralisée, mais s’il est de type autocratique, l’organisation sera plus centralisée ;
- la taille de l’entreprise et sa structure : plus l’entreprise est grande et sa structure
complexe, plus l’organisation sera décentralisée, mais plus l’entreprise est petite et
sa structure simple, plus l’organisation sera centralisée ;
- la technologie : plus la technologie est complexe, plus l’horizon de la planification
aura tendance { être long, mais plus la technologie est simple, plus l’horizon de la
planification aura tendance à être court ;
- l’environnement général : si l’environnement est incertain, le système de
planification sera généralement simple et fondé sur plusieurs scénarii, tandis qu’un
environnement plus stable impliquera un plan unique détaillé.

On peut ainsi avoir cinq formes de planification :

- pas d’organisation formelle : l’élaboration des plans est l’affaire du seul responsable
de l’entreprise ou, au contraire, l’affaire de tous ;
- le service de planification se trouve dans un département fonctionnel dominant (les
finances p.ex.) ;
106

- les services de planification se trouvent dans tous les départements (fonctionnels et


opérationnels), la coordination étant assurée au niveau de la Direction Générale ;
- le service de planification se trouve au niveau de la Direction Générale, les
départements opérationnels et fonctionnels se limitant à communiquer les
informations leur demandées ;
- les services de planification se trouvent à la fois au niveau de la Direction Générale et
de chaque département opérationnel et fonctionnel.

Ainsi donc, les services de planification peuvent être localisés, soit au niveau de toute
l’entreprise, soit dans un ou plusieurs départements opérationnels ou fonctionnels, soit
dans un service d’état-major, soit dans une combinaison des deux derniers cas.

Il faut noter que dans les entreprises très décentralisées, où les produits et les
problèmes de chaque unité sont très différents, il n’est pas indiqué que la planification
soit confiée { un service centralisé de planification, c.{.d. qu’elle soit menée { l’extérieur
de chacune des unités. Il est plus indiqué, dans ce cas, que chaque entité soit responsable
de l’élaboration de ses plans compte tenu de la diversité des situations. Mais même dans
ce cas, un minimum de coordination au niveau central s’avère indispensable.

Pour assurer une meilleure coordination, permettre une bonne compréhension des
conditions particulières de chaque entité de l’entreprise et éviter que le service de
planification ne soit déconnecté des réalités des départements opérationnels ou
fonctionnels, un comité du plan peut être institué. Ce comité, composé d’un certain
nombre de cadres (opérationnels, fonctionnels et du service du plan), aura la
responsabilité de la planification. Ce travail de groupe facilite ainsi, entre autres,
l’acceptation du plan par les différentes entités composant l’entreprise et qui doivent le
mettre en œuvre. Cependant, ce type de comité comporte un inconvénient majeur : la
lenteur inhérente aux travaux faits au sein de ce type d’organisation.

Ainsi donc, le service de planification peut se résumer en un seul individu, tout comme il
peut en comprendre plusieurs dizaines.
107

CHAPITRE 7 : LA PLANIFICATION STRATEGIQUE

Dans le chapitre précédent, nous avons examiné en détail les notions d’objectifs, de
plans, de politiques, de programmes et des budgets (Points 6.4 à 6.7.), en précisant que
la notion de stratégie allait être abordée dans ce septième chapitre compte tenu de son
importance et de sa complexité.

7.1. Le processus du management stratégique.

Nous allons commencer par la notion de management stratégique, car c’est le


management stratégique qui permet l’élaboration des stratégies.

Il peut se définir comme l’ensemble des activités qui permettent de développer les
stratégies d’une organisation donnée, la stratégie étant constituée des objectifs de
l’entreprise et de l’ensemble des plans définissant comment elle envisage atteindre ses
objectifs en partant de ses ressources, dont font partie ses avantages compétitifs.
Comme le montre le schéma n° 7 ci-dessous, le management stratégique comporte six
étapes que nous allons passer en revue.

Schéma n° 8 : Processus du management stratégique

Analyse externe
- Opportunités
- Menaces

Identification
de la mission, Analyse
Formulation Mise en Evaluation
des objectifs SWOT des stratégies œuvre des et
et des stratégies stratégies Révision
en cours

Analyse interne
108

Source : Adapté de David F., Strategic Management. Concepts and cases, 11ème édition,
Pearson, Prentice Hall, New Jersey, 2007, p. 15, et de Robbins S. & al., op.cit. p. 20.

7.1.1. L’identification de la mission, des objectifs et des stratégies actuels de


l’entreprise

La connaissance de la mission d’une entreprise66 ainsi que de ses objectifs et stratégies


actuels, est très importante, car ces trois éléments ne sont pas immuables et peuvent
donc donner lieu { des changements en fonction de l’évolution de l’environnement. Ces
éventuels changements auront nécessairement un impact automatique sur les stratégies
futures de l’entreprise.

7.1.2. L’analyse SWOT

La deuxième étape est l’analyse SWOT (S comme Strengths ou Forces, W comme


Weaknesses ou Faiblesses, O comme Opportunities ou Opportunités et T comme Threats
ou Menaces). Elle est la résultante de deux analyses :

a. L’analyse externe

Elle consiste { analyser l’environnement externe spécifique et général de l’entreprise sur


tous les plans (concurrence, législation, main-d’œuvre, technologie, ….), afin de pouvoir
en dégager :

- les opportunités, c.{.d. les tendances et aspects positifs de l’environnement que


l’entreprise peut exploiter ;
- les menaces ou contraintes, c.à.d. les tendances et aspects négatifs de
l’environnement contre lesquels l’entreprise doit se prémunir ou qu’elle doit
contourner.

b. L’analyse interne

Elle consiste { analyser les ressources spécifiques de l’entreprise, c.{.d. les ressources
humaines, financières, matérielles et immatérielles (dont son savoir et son savoir-faire)
dont dispose l’entreprise ou qu’elle peut facilement acquérir pour mettre au point,

66
Voir Point 6.4.1. du chapitre 6.
109

fabriquer et livrer ses produits/services sur ses marchés. Cette analyse interne permet
de dégager :

- les forces de l’entreprise, c.{.d. toutes les activités qu’elle fait bien et toutes les
ressources dont elle dispose ;
- les faiblesses de l’entreprise, c.{.d. toutes les activités qu’elle ne fait pas bien et
toutes les ressources qui lui maquent et dont elle a besoin.

7.1.3. La formulation des stratégies

L’analyse SWOT permet de formuler des stratégies appropriées pour permettre {


l’entreprise d’atteindre ses objectifs. Ces stratégies ne seront efficaces que si, comme dit
plus haut, elles permettent { l’entreprise :

- d’exploiter ses forces et les opportunités lui offertes par son environnement ;
- de se prémunir contre les menaces venant de son environnement et de corriger ses
différentes faiblesses identifiées.

7.1.4. La mise en œuvre des stratégies

L’étape de la mise en œuvre des stratégies est tout aussi importante que son élaboration,
car si elle n’est pas menée correctement, les stratégies ne permettront pas { l’entreprise
d’atteindre ses objectifs.

Comme nous l’avons déj{ souligné { plusieurs reprises, cette étape de mise en œuvre des
stratégies sera facilitée si tous ceux qui en sont chargés, ont effectivement participé à
toutes les étapes de leur élaboration.

7.1.5. L’évaluation des résultats

Comme tout processus de planification, le processus du management stratégique est un


processus récurrent, un processus d’essais et erreurs, un processus itératif d’allers-
retours constants entre les fins et les moyens.

D’où, cette phase d’évaluation-révision qui concerne, d’une part, chacune des quatre
phases du processus stratégique (analyse externe, analyse interne, formulation des
stratégies et mise en œuvre des stratégies), et, d’autre part, le processus dans sa totalité
à partir des résultats atteints.

Cette phase d’évaluation-révision est nécessaire non seulement pour voir si les
stratégies ont permis d’atteindre les objectifs, mais aussi pour tenir compte d’une
éventuelle modification de l’environnement susceptible d’impliquer une réévaluation de
tout ou partie du processus stratégique.

7.2. Les limites de la planification stratégique


110

Les limites de la planification stratégique tiennent aux difficultés liées { l’appréhension


de l’environnement et { certains types d’erreurs spécifiques.

7.2.1. L’appréhension de l’environnement

L’environnement de l’entreprise est en évolution permanente, évolution qui n’est pas


toujours facile d’appréhender. A cet effet, on peut avoir affaire { deux types
d’environnements :

- l’environnement prévisible, auquel cas l’entreprise est capable de maîtriser ou de


prévoir les tendances du marché et de la technologie (cas des entreprises situées
dans le secteur agro-alimentaire, chimique, du verre ou de l’automobile) ;
- l’environnement peu prévisible ou turbulent, auquel cas l’entreprise n’est pas
capable de prévoir les grandes tendances du fait que le marché et la technologie sont
caractérisés par des changements très fréquents, voire par des ruptures (cas des
entreprises situées dans le secteur des NTIC).

Ainsi, la planification stratégique ne sera facile que dans le premier cas, tandis que dans
le second cas, elle exigera { la fois une volonté d’anticiper les changements et une
capacité à se remettre en cause.

7.2.2. Les erreurs spécifiques à la planification stratégique

Henry Minzberg67 a identifie trois types d’erreurs spécifiques { la planification


stratégique :

a. L’erreur de la prédétermination

La planification repose sur l’hypothèse d’une prévision précise de l’environnement. Ceci


n’est possible que dans le cas où, soit l’environnement est stable, soit l’entreprise arrive
{ imposer ses propres plans { l’environnement (auquel cas on parle de « planification
créatrice »). Or, la stabilité de l’environnement et la planification créatrice sont des
phénomènes de moins en moins fréquents du fait, d’une part, de la survenance de
nombreux phénomènes de rupture (crises de l’énergie, crises financières
internationales, déréglementations des économies, révolutions technologiques, ...), et,
d’autre part, du nombre sans cesse croissant des concurrents développant stratégies et
contre-stratégies.

b. L’erreur du détachement

La planification repose également sur l’hypothèse du détachement entre la gestion


stratégique et la gestion tactique ou opérationnelle. Or, si la pensée précède l’action, elle
n’en subit pas moins l’influence de celle-ci.

67
Minzberg H., Grandeur et décadence de la planification stratégique, Dunod, Paris, 1994.
111

c. L’erreur de la formalisation

L’excès de formalisation tue l’intuition. Or, pour être efficace, l’entreprise doit coupler
analyse et intuition dans le processus de planification. De même, les organisations ne
sont pas toutes les mêmes, mais diffèrent les unes des autres, ce qui implique qu‘à
chaque type d’organisation, correspond un type donné de planification qui tient compte
de ses caractéristiques propres et de celles de son environnement spécifique.

Ceci dit, nous allons maintenant passer en revue les deux premiers niveaux de
stratégies68 (stratégie d’entreprise et stratégie de division) et les différents types de
stratégies associés à chacun de ces niveaux. Quant au troisième niveau (la stratégie
fonctionnelle ou la planification fonctionnelle), il sera examiné au chapitre suivant.

7.3. La stratégie d’entreprise ou corporate strategy

Le premier niveau de la stratégie est la stratégie qui concerne l’ensemble de l’entreprise


ou corporate strategy en anglais. Elle se situe au sommet de l’entreprise ou du groupe.

Elle découle de la planification stratégique qui est une démarche qualitative consistant à
faire une analyse approfondie de l’entreprise (forces et faiblesses) et de son
environnement (opportunités et contraintes) pour déterminer les grands axes de
développement de ses activités.

Elle définit donc, { partir des domaines d’activités actuels de l’entreprise, ses domaines
d’activité futurs ainsi que le développement futur de ses activités. Elle se base
essentiellement sur la mission et les objectifs de l’entreprise.

Si nous prenons le cas de la Banque Internationale de Crédit (B.I.C First Bank) qui s’est
donnée comme mission d’ « accompagner les entreprises et les particuliers dans le
développement de leurs projets et de leurs investissements »69, sa stratégie peut
consister à implanter des succursales dans toutes les localités du pays enregistrant une
forte activité économique (p.ex. les zones minières en cas de boom minier).

Une fois définie, la stratégie d’entreprise doit être complétée par la définition d’une
orientation à donner aux activités à développer par le choix entre trois orientations
principales, à savoir la croissance, la stabilité et le renouvellement.

7.3.1. Les stratégies de croissance

Elles consistent { accroître les ventes de l’entreprise (chiffre d’affaires) par


l’augmentantion du nombre de marchés à desservir et/ou des produits à proposer, soit à
travers les activités actuelles de l’entreprise, soit { travers des activités nouvelles {
développer. Elles ont comme conséquence logique un accroissement de la part de

68
Voir point 9.4.2. du chapitre 9.
69 B.I.C First Bank, Agenda 2013.
112

marché, et se soldent normalement (ce qui n’est pas toujours le cas) par une création
d’emplois. Ces stratégies de croissance peuvent prendre quatre formes particulières.

a. La croissance par concentration

Ici, l’entreprise reste dans son domaine principal actuel, mais augmente la quantité des
produits offerts et/ou le nombre des marchés desservis.

b. La croissance par intégration verticale


Ici, l’entreprise peut procéder de trois manières :

- l’intégration en amont : contrôler ses entrées en devenant son propre fournisseur ;


- l’intégration en aval : contrôler ses sorties en devenant son propre distributeur
(vente en gros, en demi-gros, en détail) ;
- l’intégration verticale totale par intégration en amont et en aval.
c. La croissance par intégration horizontale.
Ici, l’entreprise croît par le rachat partiel (prise de participation majoritaire ou
minoritaire) ou total de ses concurrents.
d. La croissance par diversification.

Elle peut prendre deux formes :


- la diversification interne ou congénérique avec des activités ayant un lien entre elles
(ex. : ajouter la fabrication des tôles et des articles sanitaires à la fabrication du
ciment) ;
- la diversification externe ou conglomérale avec des activités n’ayant aucun lien entre
elles (ex. : ajouter la téléphonie aux activités des BTP).

e. La typologie d’Igor Ansoff

Concernant ces stratégies de croissance, il y a lieu de mentionner aussi la typologie


d’Igor Ansoff qui distingue quatre grandes stratégies pour le choix du vecteur de
croissance, stratégies qui se déterminent essentiellement en termes de produits et des
marchés (tableau n° 3) :

- la stratégie de pénétration : augmentation du chiffre d’affaires en vendant le même


produit sur le même marché, c.à.d. par accroissement de la part de marché ;
- la stratégie d’extension : augmentation du chiffre d’affaires par extension des
marchés, c.à.d. en vendant le même produit sur un marché nouveau ;
- la stratégie d’innovation : augmentation du chiffre d’affaires par commercialisation
d’un produit nouveau auprès d’une clientèle déj{ acquise { un produit ancien de
l’entreprise ;
- la stratégie de diversification : augmentation du chiffre d’affaires par
commercialisation des produits nouveaux sur des marchés nouveaux.
113

Tableau n° 3 : Matrice de croissance d’I. Ansoff

PRODUITS
ACTUELS NOUVEAUX
MARCHES

ACTUELS PENETRATION EXTENSION

NOUVEAUX INNOVATION DIVERSIFICATION

Source : Adapté de Mayrhofer U., Management Stratégique, Editions Lexifac


Gestion, 2007, p. 84.

7.3.2. Les stratégies de stabilité

Elles consistent à maintenir le statu quo en préservant les activités existantes de


l’entreprise avec les mêmes produits-marchés et la même part de marché.

Ce type de stratégie est surtout adoptée en période d’instabilité économique,


l’entreprise prenant l’option de ni croître, ni décliner en attendant la stabilisation de la
situation.

7.3.3. Les stratégies de renouvellement.

A travers ces stratégies, l’entreprise cherche { faire face { une perte de performances.
Elles ont comme objectif principal de réduire les coûts comme moyen de regagner les
performances perdues. Elles peuvent prendre deux formes :

a. Les stratégies de retrait

L’entreprise se retire carrément de certains secteurs ou abandonne simplement certains


produits-marchés, car elle est convaincue, soit qu’elle ne peut plus rétablir ses
performances { cause d’un environnement interne et externe trop défavorable, soit
qu’elle ne peut rétablir ses performances qu’au prix d’efforts trop coûteux.

b. Les stratégies de restructuration

Ces stratégies impliquent des mesures drastiques pour réduire les coûts, notamment par
la réduction des effectifs qui sont généralement considérés comme une simple variable
d’ajustement.

L’entreprise va adopter ce type de stratégie si elle estime, d’une part, qu’il n’est pas
possible ou qu’il n’est pas souhaitable de se retirer de certains secteurs ou d’abandonner
certains produits-marchés, et, d’autre part que les performances peuvent être rétablies
moyennant un coût acceptable.
114

7.4. La stratégie de division ou business strategy

Le deuxième niveau de la stratégie est celui des grandes divisions de l’entreprise


(produits, marchés, clientèles ou zones géographiques) : c’est la stratégie de division ou
stratégie opérationnelle (business strategy ou operational strategy en anglais). Elle
concerne ainsi les grandes entreprises qui sont souvent des entreprises
multidivisionnelles.

Cette stratégie découle de la planification opérationnelle qui vise l’efficacité des


ressources de l’entreprise par leur affectation la plus efficiente.

On l’appelle aussi stratégie concurrentielle ou stratégie compétitive (competitive


strategy en anglais), car elle définit comment l’entreprise positionne chacune de ses
activités (la division ou le business) par rapport à ses concurrents et met en exergue son
avantage compétitif par rapport à ses concurrents. La définition de cet avantage
compétitif permet { l’entreprise de se distinguer, de se différencier par rapport { ses
concurrents par ses compétences-clé, c.à.d. par sa capacité à faire quelque chose que les
concurrents ne savent pas faire ou ne savent pas faire mieux qu’elle.

Cependant, il ne suffit pas de définir un avantage compétitif : il faut aussi être capable de
le maintenir, c.à.d. de le défendre et de le renouveler face aux concurrents qui
développent des contre-stratégies et face à un environnement externe qui est en
constante évolution (crises économiques, innovations technologiques, évolutions
démographiques et sociologiques, ….).

Michael Porter70 a défini trois stratégies possibles qui peuvent être adoptées à ce
deuxième niveau.

a. La stratégie de domination par les coûts

Dans cette stratégie, l’entreprise veut se positionner comme le fabricant ou le


distributeur le moins cher de son secteur, tout en offrant un produit/service de la même
qualité que celui de ses concurrents, d’une qualité comparable { la leur ou d’une qualité
acceptable.

Pour y arriver, l’entreprise va consentir un très grand effort pour comprimer ses coûts
en misant notamment sur une organisation efficiente qui passe par des économies
d’échelle, l’innovation technologique, une main-d’œuvre bon marché et/ou à très forte
productivité ou un accès privilégié aux matières premières.

b. La stratégie de différentiation

Porter M., Competitive strategy : technic for analysing industries and competition, New
70

York, Free Press, 1980 ; Porter M., Competitive advantage : creating and sustaining
superior performance, New York, Free Press, 1985.
115

Dans cette stratégie, l’entreprise cherche { distinguer, aux yeux des consommateurs, ses
produits/services par rapport à ceux de ses concurrents.

Pour ce faire, elle pourra miser notamment sur une qualité de premier ordre (cas des
grandes marques automobiles), un service irréprochable (cas des grandes chaînes
hôtelières), un design innovant (cas des fabricants d’ordinateurs) ou une très grande
image de marque (cas des grandes marques de parfums). Cette stratégie de
différentiation est utilisée quand le produit ou le service ont atteint le stade de la
maturité (forte concurrence, qualité et prix comparables). Elle permet alors à
l’entreprise de soustraire son produit/service à la concurrence en lui donnant un plus
qui fait de lui un produit/service considéré comme nouveau ou différent par les
consommateurs, ce qui lui permet de pouvoir augmenter son prix de vente sans
incidence négative sur sa demande.

Pour que cette stratégie puisse être couronnée de succès, il faut que la caractéristique ou
l’attribut qui seront choisis pour établir la différentiation, puissent être suffisamment
convaincants aux yeux des consommateurs pour justifier un différentiel de prix de vente
supérieur au coût de la différentiation.

Pour rechercher les meilleures stratégies de différentiation, l’entreprise peut utiliser la


technique du benchmarking ou étude comparative. Le benchmarking est une technique
qui consiste à rechercher systématiquement les meilleures pratiques utilisées par
d’autres entreprises (concurrentes ou non, particulièrement les leaders dans leurs
secteurs) pour améliorer ses propres performances, dans le but de copier ou d’adapter
lesdites pratiques.

c. La stratégie de focalisation

Dans cette stratégie, l’entreprise veut réduire la pression de la concurrence en


choisissant un segment de marché très réduit (ou niche) sur lequel elle va appliquer la
stratégie de domination par les coûts et/ou de différentiation : c’est donc une stratégie
de spécialisation, contrairement aux deux précédentes qui misent sur un segment de
marché très large.

Le succès de cette stratégie est conditionné notamment par la taille du segment du


marché ou de la niche : elle doit être à la fois suffisamment petite pour permettre à
l’entreprise d’échapper effectivement { la pression des ses concurrents, et suffisamment
grande pour rentabiliser l’ensemble des coûts qu’elle va engager pour la mise au point
d’un produit ou d’un service très spécifique.
116

CHAPITRE 8 : LA PLANIFICATION FONCTIONNELLE

Après avoir examiné la planification stratégique au niveau de la Direction Générale et au


niveau des divisions opérationnelles dans le chapitre précédent, ce chapitre va être
consacré à la planification au niveau des principales fonctions de l’entreprise, { savoir le
marketing, les finances, la production, la recherche et développement (R & D) et les
ressources humaines (RH).

Avant d’en arriver { la planification fonctionnelle, nous voulons rappeler qu’en matière
de stratégie, il y a deux conceptions. D’une part, celle qui considère que la planification
stratégique concerne les trois niveaux de l’entreprise (le groupe, les divisions et les
fonctions). D’autre part, celle qui considère que la planification stratégique ne concerne
que les deux premiers niveaux de l’entreprise (le groupe et les divisions), le troisième
niveau relevant de la planification fonctionnelle. Comme nous l’avons déj{ souligné ci-
haut71, les deux conceptions sont, à nos yeux, défendables. C’est ainsi que nous allons
utiliser l’une et l’autre dans ce chapitre.

8.1. De la planification stratégique à la planification fonctionnelle

La formulation de la stratégie ayant donné un guide général d’action, elle doit être
complétée et déboucher sur des plans d’action qui constituent un lien entre ce guide
général et les opérations courantes.

Pour ce faire, l’objectif général doit être subdivisé en sous-objectifs de façon à montrer
comment les objectifs élémentaires assignés aux différentes composantes de

Point 6.4.2., Chapitre 6.


71
117

l’organisation, concourent { la réalisation de cet objectif général. Cette décomposition


est nécessaire, car elle permet { chaque niveau de l’organisation (directions, services,
ateliers, individus, …) d’apprécier sa contribution { la réalisation de l’objectif assigné {
l’ensemble auquel il appartient, ce qui constitue pour lui un élément de motivation.
Ainsi, si l’objectif général de l’entreprise est d’accroître le profit de 12 % dans 5 ans,
l’objectif assigné { la direction commerciale peut être d’augmenter de 20% les ventes,
objectif qu’il faut dès lors désagréger pour déterminer des sous-objectifs du genre :
« augmenter les ventes de 25% dans la région Nord », « augmenter les ventes de 15%
dans la région Sud », « augmenter les ventes de 30% dans le secteur A de la région
Nord », « augmenter les ventes de 13 % pour le vendeur X du secteur A de la région
Nord ».

L’entreprise va ainsi élaborer des plans d’action { moyen terme qui couvrent la totalité
de l’activité de l’entreprise. On aura ainsi des plans de production, de vente, de
financement, d’acquisition des ressources humaines et autres nécessaires { la mise en
œuvre de la stratégie.

8.2. Le plan marketing

Le plan marketing est influencé par deux éléments :

- le choix des activités de l’entreprise, notamment le choix des produits-marchés,


choix qui se situe au niveau stratégique et donc le plus élevé ;
- l’ensemble des décisions relatives aux autres fonctions de l’entreprise (production,
finances, R & D, RH).

Le plan marketing se décompose généralement en deux étapes : d’une part, la sélection


des marchés spécifiques, et, d’autre part, la recherche du « marketing mix » ou dosage
des différentes variables marketing en fonction des marchés sélectionnés.

La phase de sélection des marchés doit mener à la définition du type de clientèle et à sa


localisation, c.à.d. au choix du ou des segments spécifiques du marché à desservir. Ainsi,
segmenter un marché consiste à rechercher, dans un marché global, un ou plusieurs
sous-marchés présentant des caractéristiques communes, appelés segments, et qui
seront pris comme cibles. Les critères de segmentation peuvent être géographiques
(régions, sous-régions, pays), sociodémographiques (sexe, âge, revenu, profession, …) ou
psychologiques (opinion, style de vie,…). Selon le nombre de segments retenus par
l’entreprise, on pourra parler, soit d’une stratégie marketing indifférenciée (pas de
segmentation avec un même produit pour tous), soit d’une stratégie marketing
différenciée (plusieurs segments avec un produit spécifique par segment), soit d’une
stratégie marketing concentrée (un seul segment avec un seul produit spécifique).

Quant à la phase du « marketing mix », elle doit répondre à un certain nombre de


questions relatives aux 4 P : P comme Product (Produit), P comme Place (Place ou
118

Distribution), P comme Publicity/Promotion (Publicité/Promotion), et P comme Price


(Prix). Voici un échantillon des questions auxquelles le manager doit répondre
concernant les 4 P :

- concernant les produits : faut-il en supprimer, en développer de nouveaux, les


commercialiser sous une marque spécifique ou une sous-marque, tabler sur le haut
de gamme ou le produit grand public ?
- concernant la promotion/publicité : faut-il recourir { une publicité intensive, s’en
tenir { une publicité d’entretien ou opter pour une publicité subliminale ? quel type
d’action promotionnelle faut-il mener ?
- concernant les prix : faut-il casser les prix, les fixer en fonction du prix de revient ou
de la demande, opter pour un prix d’écrémage, opter pour un prix de pénétration,
suivre le leader, suivre les autres entreprises du secteur ?
- concernant les réseaux de distribution : faut-il passer par la chaîne traditionnelle
(grossistes - semi-grossistes – détaillants) ou développer son propre réseau, rester
sur des modes traditionnels ou passer à des formes nouvelles (distributeurs
automatiques, vente par correspondance, vente électronique,…) ?

Pour répondre { toutes ces questions, il faut tenir compte d’un certain nombre de
facteurs tels que les coûts, la demande, la concurrence, les ressources financières et
humaines de l’entreprise ou le stade de vie du produit.
Concernant ce dernier facteur, on notera qu’un produit passe par plusieurs stades ou
phases de vie (graphique n° 1) et que l’on peut établir, pour chacune de ces phases, à un
ordre de priorité dans les variables du marketing mix (voir tableau n° 5).

Graphique n° 2 : Phases de vie d’un produit

0 = Phase de conception/mise au point


Q
I = Phase d’introduction/démarrage
III IV
II = Phase de croissance/ expansion

II III = Phase de maturité

I IV = Phase de déclin

0 t

Ainsi, un produit, { l’instar d’un être vivant, passe par les cinq phases ci-après :

- La phase de la conception et de la mise au point (phase 0).


- La phase de l’introduction, du démarrage ou du lancement (phase 1) : le produit est
placé dans le circuit de distribution et les ventes démarrent lentement. L’entreprise
peut opter soit pour une stratégie d’écrémage (prix élevés) pour profiter de la
nouveauté du produit et amortir ainsi plus rapidement les frais de conception/mise
119

au point du produit, soit pour une stratégie de pénétration (prix bas) dans le cas où
des prix élevés seraient incompatibles avec l’objectif de pénétration du marché.
- La phase de la croissance ou de l’expansion (phase 2) : les ventes connaissent une
très forte progression, du fait de l’utilisation des moyens de la publicité/promotion
pour faire connaitre le produit aux consommateurs.
- La phase de la maturité (phase 3) : les ventes continuent de croitre, mais à un rythme
moins élevé du fait du très fort accroissement du nombre des concurrents et de la
saturation relative du marché (demande de remplacement pour les biens durables).
- La phase du déclin (phase 4) : les ventes commencent { baisser du fait de l’entrée sur
le marché des produits nouveaux ou améliorés ayant un meilleur rapport
Qualité/Prix. Le produit est alors, soit retiré du marché, soit relancé (p.ex. par re-
segmentation).

Concernant le cycle de vie du produit, il convient de noter les précisions ci-après :

- il ne faut pas confondre cycle de vie du produit et cycle de vie de la marque ou de la


branche ;
- la courbe de vie d’un produit n’est pas la même pour toutes les entreprises qui le
fabriquent, chaque entreprise pouvant façonner la sienne en fonction des
caractéristiques de la concurrence et de son produit ou des perspectives du secteur ;
- la courbe de vie d’un produit fabriqué par une entreprise ne sera pas la même pour
tous les marchés et pays desservis par ladite entreprise ;
- à chaque phase du cycle de vie du produit correspond une stratégie spécifique ou un
ordre de priorité des variables marketing, c.à.d. un mix particulier, comme le montre
le tableau 3 ci-dessous.

Tableau n° 4 : Ordre des priorités des variables du marketing-mix

Ordre des priorités des variables du


Phase de vie Caractéristique de marketing-mix
du produit l’entreprise Publicité / Distribu- Produi
Prix
Promotion tion t
Introduction/
Elle est le leader 4 3 2 1
Démarrage
Expansion/
Elle est suiveuse 4 3 1 2
Croissance
Maturité Elle se différencie 2 1 3 4
Déclin Elle reste la
1 2 3 4
dernière

8.3. Le plan financier

Le plan financier porte sur deux aspects :


120

- les politiques de gestion de l’actif à moyen et long termes, c.à.d. les politiques
d’investissement (immobilisé) et de gestion de l’actif circulant (stocks, créances
d’exploitation et disponibles) ;
- les politiques de gestion du passif, c.à.d. les politiques relatives à la structure du
passif, aux différents types d’endettements (court, moyen et long termes), aux
dividendes, aux réserves, …

Nous allons survoler certaines de ces politiques à titre illustratif.

8.3.1. Les politiques d’investissement

Après définition des besoins de l’entreprise en investissements sur base du plan


stratégique, le manager doit décider des investissements à réaliser en fonction
notamment d’un taux de rentabilité minimum que tout investissement doit atteindre
pour être accepté. Ainsi, devant plusieurs alternatives d’investissements, il faut faire une
analyse comparative en utilisant différentes méthodes d’évaluation des projets telles
que la valeur actuelle nette (VAN), le taux interne de rentabilité (TIR), l’indice de
profitabilité (IP) ou la méthode du surplus économique.

Le problème des politiques d’investissement peut également être appréhendé sous


l’angle du choix entre l’achat, la location et la location-vente ou leasing.

8.3.2. Les politiques de gestion de l’actif circulant

Quand une entreprise dépense de l’argent pour constituer des stocks d’intrants
(consommables, matières premières, produits semi-finis et produits finis), cet argent
n’est plus disponible pour d’autres usages. D’où la nécessité de disposer des politiques
imposant un montant optimal de stocks ou fixant un taux optimal de rotation des
stocks72. Ces politiques doivent tenir compte de plusieurs paramètres, notamment du
coût de gestion des stocks (loyer, salaire, assurance, manutention), du coût de l’argent
(taux d’intérêt pour les fonds empruntés ou coût d’opportunité pour les fonds propres),
du coût des commandes urgentes et des délais de livraison.

Le problème est comparable en ce qui concerne les effets à recevoir ou les crédits aux
clients en général : quand une entreprise fait du crédit à ses clients, elle se prive de
moyens qu’elle aurait pu affecter { d’autres usages. De plus, tout crédit, quelle que soit la
qualité du créancier, comporte toujours un risque de non récupération (totale ou
partielle) et/ou de dépréciation des actifs financiers (dévaluation de la monnaie du
crédit, augmentation du prix d’achat auprès des fournisseurs, …). A ce sujet, l’entreprise
peut recourir à deux politiques possibles : soit fixer une limite quant au montant
maximum d’effets { recevoir ou plus généralement de créances (montant limite de crédit
à octroyer aux clients), soit déterminer le taux de rotation pour ses effets à recevoir afin

72
Taux de rotation des stocks = nombre de fois que le stock se reconstitue en une
année = quantités totales utilisées annuellement / quantité moyenne achetée en une
fois.
121

de limiter l’immobilisation de ses capitaux et le risque de perte sur les créances { la


clientèle (fixation d’un ratio maximum créances / chiffre d’affaires { ne pas dépasser).

8.3.3. Les politiques de dividende


Les politiques de dividende consistent { décider de l’affectation du bénéfice net : elles
concernent donc à la fois la distribution des dividendes et la rétention des bénéfices.
En ce qui concerne la distribution des dividendes, elle peut se faire soit en numéraire,
soit en actions nouvelles.
Quant { l’aspect rétention des bénéfices, l’entreprise peut opter pour l’une des deux
politiques ci-après parmi d’autres :
- mise en réserve d’une partie du profit distribuable { des fins d’investissement ;
- mise en réserve d’une partie du profit redistribuable pendant les années prospères
pour assurer une distribution régulière du dividende dans le futur ou pour prévenir
les conséquences des pertes importantes futures éventuelles.

8.3.4. Les politiques de la structure des capitaux


La combinaison des différentes sources de fonds utilisés par l’entreprise constitue sa
structure financière. Il s’agit de la répartition entre :
- les fonds propres ou le non exigible (capital + réserves) et les fonds empruntés (à
court, moyen et long termes) ;
- les capitaux permanents (fonds propres + emprunts à moyen et long termes) et les
capitaux non permanents (emprunts à court terme).
La politique relative à la structure des capitaux de l’entreprisse ne peut être décidée
qu’après prise en considération de certains paramètres significatifs, notamment la
nature des actifs { financer, la situation du marché bancaire et financier (l’offre et la
demande) et la stabilité des gains. Ainsi, les règles suivantes doivent être respectées :
- le financement des activités saisonnières se fera { l’aide d’emprunts { court terme ;
- le financement des immobilisations devra se faire { l’aide de capitaux permanents
pour éviter de mettre l’entreprise à la merci de ses créanciers (banques) ;
- le fonds de roulement73 doit rester positif pour assurer la stabilité financière de
l’entreprise.

73
Le fonds de roulement est la part des ressources de l’entreprise qui est disponible
de façon permanente et qui peut donc être mobilisée à tout moment : FDR =
capitaux permanents (capitaux propres + dettes à MT et LT) – immobilisations =
actif circulant (stocks + clients + disponible) – dettes à CT (dettes d’exploitation +
dettes financières à CT). Cette notion est différente de celle des besoins en fonds de
roulement : BFR = stocks + créances clients – dettes d’exploitation. Et la différence
entre les deux donne la trésorerie = FDR – BFR = disponible – dettes financières à
CT.
122

8.4. Le plan de production

8.4.1. La politique d’intégration

Ici, la question est de savoir jusqu’où, en amont (production) et en aval (distribution),


l’entreprise va contrôler ses activités, c.{.d. ce que va être son degré d’intégration
verticale.

Ceci dépendra des éléments tels que les facteurs de réussite dans l’industrie, les
ressources de l’entreprise ou l’aversion de ses dirigeants contre le risque.

L’intégration comporte plusieurs avantages, dont deux principalement :

- elle permet une meilleure coordination des activités dans la mesure où l’ajustement
aux besoins se fait rapidement du fait de l’élimination des délais (ce sont les
départements de la même entreprise et donc soumis aux instructions des mêmes
dirigeants) ;
- le coût d’acquisition des différents composants d’un produit est moins élevé, du
moins en théorie, { cause de l’élimination des marges bénéficiaires aux différents
stades de l’élaboration du produit.

Cependant, l’intégration n’est pas { conseiller notamment quand :

- l’encadrement est insuffisamment préparé ou carrément incompétent pour prendre


en charge les activités au-del{ de l’activité traditionnelle de l’entreprise (problème
de la maîtrise des différents métiers impliqués en amont et en aval de l’activité
traditionnelle de l’entreprise) ;
- l’importance des investissements est telle que les besoins de l’entreprise ne sont pas
suffisants pour atteindre le seuil de rentabilité.

8.4.2. La politique de production

Ici, la question est de savoir si on doit fabriquer en série, à la commande ou en


combinant les deux (fabriquer tout ou partie des composants/ensembles qui ne seront
montés qu’en cas de commande).

Il va de soi que le système de production sera totalement différent selon la politique qui
sera adoptée.

8.4.3. La politique de capacité

Elle concerne les pointes de production, car la plupart des activités commerciales et
industrielles suivent des variations cycliques structurelles (ventes saisonnières et
disponibilité des matières premières) ou subissent des fluctuations conjoncturelles
(crise économique, évolution de la mode, …). Il en résulte donc une demande qui n’est
pas uniforme dans le temps et qui évolue en dents de scie.
123

En conséquence, le manager doit choisir, en gros, entre deux politiques extrêmes : la


politique qui consiste à produire en suivant les variations de la demande, et la politique
qui consiste à produire des quantités uniformes de façon à ce que toute la demande soit
satisfaite au bout de la période considérée. La première alternative nécessite une
capacité installée très grande et permet un niveau de stock très faible. Dans la deuxième
alternative, par contre, on peut se contenter d’une capacité installée fort limitée, ce qui
implique des stocks importants en période de faible demande. Bien entendu, entre ces
deux extrêmes, il y a de nombreuses variantes, notamment l’utilisation des sous-
traitants, des heures supplémentaires ou d’un personnel intérimaire en période de
pointe.

8.4.4. La politique de gestion des stocks

Il y a plusieurs alternatives à ce sujet :

- soit avoir un stock important pour faire face à une demande prévisionnelle non
certaine ;
- soit ne procéder à des achats pour le stock que quand une commande ferme est
reçue ;
- soit avoir un stock minimum en permanence, stock qui permet de lancer une
production ou de faire face à une demande urgente pendant un temps suffisamment
long pour pouvoir procéder à une commande ou à une nouvelle fabrication.

Le choix le l’une de ces alternatives implique au préalable qu’une réponse ait été donnée
aux deux questions suivantes : quand commander (détermination du point de
réapprovisionnement) et combien commander (détermination des « quantités
économiques »).

La réponse à ces deux questions permet de déterminer les quantités à commander ou à


fabriquer, ainsi que le moment où cela doit être fait. Pour cela, l’entreprise tiendra
compte de nombreux facteurs tels que le coût de stockage, le coût des commandes
urgentes, le coût de réglage des machines ou les ristournes sur commandes importantes.
Nous reviendrons ultérieurement sur cette question.74

Il faut noter que le stock peut, dans certains cas, être un élément important sur le plan
financier. Ainsi, si une entreprise prévoit à terme une augmentation des coûts des
matières premières, elle peut être amenée à constituer des stocks pour réaliser des
profits ultérieurs (spéculation).

8.5. Le plan des RH

8.5.1. La politique d’embauche

74 Point 16.3.3. du chapitre 16 sur la méthode des quantités économiques.


124

Elle est très dépendante de la stratégie de développement de l’entreprise et a pour


mission essentielle de faire une adéquation entre les besoins tant quantitatifs que
qualitatifs de l’entreprise en ressources humaines et les ressources humaines
disponibles. Ainsi, une politique de recrutement intensive de jeunes en période de
croissance, peut se révéler catastrophique en cas de récession ou poser à terme des
problèmes de promotion si le développement de l’entreprise plafonne.

La politique de recrutement va également comprendre des indications sur les modalités


de recrutement, telles que les procédures de détection (« chasseurs de têtes », petites
annonces, …) ou de sélection (test, entretien, période d’essai,…).

8.5.2. La politique de promotion


La politique de promotion est liée à la politique de recrutement et à la politique de
formation. On peut ainsi opter pour deux politiques possibles :
- la politique de promotion par transfert inter-service, auquel cas l’entreprise doit
procéder à la formation de « généralistes » (c.{.d. privilégier l’acquisition d’une
expérience diversifiée, le développement de l’aptitude au changement et une
meilleure connaissance de l’entreprise), formation qui implique cependant un coût
élevé de mise en œuvre (notamment en frais de mutation) ;
- la politique de promotion intra-service, auquel cas l’entreprise va procéder { la
formation de « spécialistes », formation qui implique cependant une vision limitée
des problèmes de l’entreprise et donc une difficulté certaine { adopter une vision
systémique de l’entreprise.

8.5.3. La politique de formation

La politique de formation doit prendre en considération et intégrer à la fois les besoins


de développement/croissance de l’entreprise en tant qu’entité (en fonction de son plan
stratégique de développement) et les besoins de développement de ses employés.

8.5.4. La politique des salaires

Elle doit prendre en considération les aspirations des employés et être suffisamment
attrayante pour les garder au sein de l’entreprise. Ce faisant, l’entreprise doit en même
temps veiller à sauvegarder ses équilibres financiers, car les salaires payés sont aussi
des charges.

Ainsi, on tiendra compte, d’après des dosages propres { chaque entreprise, des salaires
pratiqués par la concurrence ou par les entreprises localisées dans la même région, des
qualifications exigées, de l’ancienneté, de la responsabilité, de la performance, du niveau
hiérarchique et de l’éventail des salaires recherché75.

75
C’est l’écart entre le salaire le plus élevé et le salaire le plus bas dans l’organisation.
125

En plus du salaire (ou rémunération directe) généralement payé en fin de mois ou de


semaine, il faut aussi intégrer d’autres compléments de salaires généralement payés en
fin d’année tels que le 13e, 14e voire le 15° mois, les primes, les bonus,…

Il faut enfin ajouter que la politique salariale doit aussi prendre en considération les
avantages sociaux (ou rémunération indirecte) qui constituent autant de compensations.
Nous pouvons citer la durée de vacances, les congés parentaux, les horaires variables,
les conditions générales du travail, la cantine, la restauration, les assurances, les
pensions complémentaires, les soins de santé ou les aménagements pour études. Ces
éléments, dont certains sont non financiers, peuvent être, dans certaines circonstances,
préférées par le personnel à une augmentation salariale.

8.6. Le plan de R & D

L’effort de R & D suit généralement trois étapes principales :

- l’étape de la recherche fondamentale qui a pour objet de mieux comprendre un


phénomène sans en connaitre, ni en rechercher les applications immédiates ;
- l’étape de la recherche appliquée où l’on détermine les principales utilisations
possibles des résultats de l’étape précédente et où les premiers tests et évaluations
sont menés ;
- l’étape de l’application où l’on procède aux dernières évaluations et modifications du
produit, et où l’on prépare sa fabrication ainsi que sa distribution sur une grande
échelle.

Il est évident que toutes les entreprises ne suivent pas l’ensemble de ces phases : celles
qui font de la R & D ne commencent généralement que par la seconde étape, la première
étant l’apanage des universités et des centres (généralement publics) spécialisés dans la
recherche fondamentale.

En matière de R & D, chaque entreprise doit donc avoir des guides ou des politiques,
lesquelles se rapportent essentiellement aux problèmes de leadership et de budget.

8.6.1. Les politiques de leadership en matière de R & D

Il y a deux types de politiques possibles : d’une part, être chef de file ou leader, et,
d’autre part, être suiveur ou imitateur.

La première politique exige des ressources dont peu d’entreprises disposent. C’est
pourquoi elles optent généralement pour la seconde politique.

La politique d’imitation comporte les avantages suivants : (i) elle est moins coûteuse et
plus sûre, car les frais de recherche de base sont inexistants pour l’entreprise suiveuse ;
(ii) l’expérience des autres permet d’éviter les erreurs et les contretemps inhérents au
développement de toute innovation. Mais, elle a aussi des inconvénients, notamment le
fait que dans la plupart des cas, l’entreprise qui a la primeur de la découverte, fait
breveter cette dernière (mais aussi parfois un ensemble de produits dérivés de l’idée de
126

base) pour se protéger des contrefaçons, et peut même refuser de céder ses brevets aux
concurrents.

Cependant, entre l’imitation et l’innovation, il y a une troisième politique qui est la plus
usitée et qui consiste à se procurer la recherche chez les autres à travers :

- l’utilisation des brevets des autres entreprises moyennant paiement des redevances
ou royalties ;
- la commande d’une recherche spécifique auprès d’un centre de recherche ;
- la constitution d’un groupement d’intérêt économique (G.I.E.) réunissant deux ou
plusieurs entreprises pour une recherche en commun.

8.6.2. Les politiques de détermination du budget de R & D

C’est en fait l’importance du budget de la R & D qui détermine en grande partie


l’intensité de l’effort de R &D et donc l’importance des découvertes. A cet effet, il y a
plusieurs politiques possibles, à savoir :

- déterminer le budget en fonction du bénéfice prévisionnel ;


- prendre un montant comparable à celui de la concurrence ou de la moyenne du
secteur ;
- prendre un pourcentage constant du chiffre d’affaires ou l’augmenter en tenant
compte du taux de croissance désiré ;
- laisser aux chercheurs le soin de déterminer leurs besoins dans la limite des
possibilités financières fixées par l’entreprise.

En tout état de cause, il faut toujours éviter le saupoudrage, car la R&D ne peut donner
des résultats intéressants que si l’on atteint une certaine masse critique. Par conséquent,
une entreprise dont les ressources financières sont très limitées, a intérêt à concentrer
son effort de R&D sur un ou quelques domaines qu’elle peut convenablement financer,
au lieu de se disperser.
127

TROISIEME PARTIE : LA FONCTION ORGANISATION

Dans la II° partie, nous avons défini la fonction Planification comme un processus
volontariste de définition des objectifs et d’élaboration des stratégies pour atteindre ces
objectifs.

Pour mettre en œuvre ces stratégies, il faut définir les tâches nécessaires { leur
réalisation, les répartir entre les différentes composantes de l’organisation et établir les
liens entre ces composantes. Autrement dit, il faut procéder à la définition des tâches, à
leur répartition et à leur structuration : tel est le contenu de la fonction Organisation.

La fonction Organisation a donc comme objet l’étude des tâches unitaires regroupées en
travaux individuels et la répartition ou la subdivision des principales opérations de
l’entreprise en grands départements. Ainsi cette fonction consiste { :

- concevoir les tâches individuelles ;


- agencer ces tâches entre elles ;
128

- regrouper les hommes autour de ces tâches ;


- établir les liaisons nécessaires pour orienter l’ensemble dans le sens des objectifs
fixés et à atteindre.

C’est ainsi que cette partie abordera tour { tour les éléments à prendre en compte dans
la structuration d’une organisation efficace, les principes d’élaboration d’une
organisation efficace et les différents types de structures organisationnelles.

CHAPITRE 9 : LES ELEMENTS DE STRUCTURATION D’UNE ORGANISATION

Avant d’aborder les éléments de la structuration d’une organisation efficace, voyons


d’abord quelles sont les composantes de la structure d’une organisation.

9.1. Les composantes d’une structure

Comme nous l’avons vu précédemment (point 1.6.2. du chapitre 1), l’un des auteurs
emblématiques de l’analyse systémique est Henry Minzberg76. Il a notamment défini la
structure à travers les deux concepts de la division du travail et de la coordination.

9.1.1. La division du travail et la coordination

Pour H. Minzberg, toute activité organisée de l’homme doit répondre { deux exigences
contradictoires : (i) la division du travail (entre les différentes tâches à accomplir) ; (ii)
la coordination (de ces tâches pour la réalisation du travail). A partir de ces deux
exigences, il a défini la structure d’une organisation comme l’ensemble des moyens
utilisés pour, d’abord, diviser le travail en tâches distinctes, et, ensuite, assurer
l’indispensable coordination entre ces tâches.

Concernant la division du travail en différentes tâches, il identifie cinq éléments de base


de l’organisation, { savoir :

76
Minzberg H., op. cit.
129

- le sommet stratégique : c’est l’ensemble des personnes chargées de superviser les


activités de l’entreprise, de gérer ses relations avec l’environnement et de
développer sa stratégie (la Direction Générale et les services d’état-major) ;
- le centre opérationnel : c’est l’ensemble des personnes dont le travail est
directement lié à la production des biens et services (les ateliers c.à.d. les
contremaîtres et les ouvriers) ;
- la ligne hiérarchique : c’est l’ensemble des personnes ayant pour rôle de relier le
sommet stratégique au centre opérationnel par des relations d’autorité, c.{.d. la
courroie de transmission entre le sommet stratégique et le centre opérationnel
(managers à tous les niveaux assurant la supervision de leurs subordonnés sur base
des directives reçues) ;
- la technostructure : contrairement à Galbraith pour qui la technostructure est
synonyme de managers professionnels, il s‘agit ici de l’ensemble des spécialistes
chargés d’analyser, de planifier et de contrôler le travail et qui ne sont investis
d’aucune autorité formelle (tels que les spécialistes des bureaux des méthodes et de
l’ordonnancement, les analystes financiers, les consultants ou les conseillers) ;
- les unités fonctionnelles logistiques : c’est l’ensemble des unités spécialisées qui ne
concourent pas directement à la production et qui ont une fonction de support
(approvisionnement, maintenance, finances, comptabilité, RH, relations publiques,
service social).

Concernant la coordination des différentes tâches, H. Mintzberg estime qu’elle est


assurée à travers six mécanismes que nous avons déjà examinés dans le chapitre relatif
à la coordination77, à savoir les relations humaines (l’ajustement mutuel et la
supervision directe) et la standardisation (des procédés, des résultats, des qualifications
et des normes).

9.1.2. Les fonctions et les organes

En fait, ces cinq éléments de base de l’organisation définis par H. Minzberg, ne


concernent qu’un seul aspect de la structure des organisations, { savoir l’aspect
« organes » ou les acteurs. Ainsi :

- le sommet stratégique et la ligne hiérarchique correspondent aux organes de


direction ;
- le centre opérationnel correspond aux organes opérationnels ou d’exploitation ;
- les unités fonctionnelles correspondent aux organes fonctionnels ;
- la technostructure correspond aux organes d’Etat Major.

Par conséquent, ces cinq éléments de base qui correspondent aux quatre organes ci-
dessus identifiés, ne suffisent pas pour faire une structure : ils doivent être complétés

77
Point 4.3.2. du chapitre 4.
130

par l’aspect « fonctions », c.à.d. ce que font les différents acteurs. Ainsi, on peut
distinguer les quatre fonctions ci-après qui s’inspirent de la typologie des six fonctions
et activités d’H. Fayol78.

- Les fonctions de direction (fonction administrative ou de direction pour H. Fayol) : ce


sont les activités dont le rôle est d’administrer l’entreprise (choix des objectifs, des
stratégies et des politiques), soit les cinq fonctions managériales définies par H.
Fayol (planification, organisation, commandement, coordination et contrôle). Ces
fonctions sont { la fois très délicates et de la plus haute importance, car c’est d’elles
que dépend la capacité de l’entreprise { réaliser sa mission et { atteindre ses
objectifs. Elles incarnent l’appropriation et l’exercice du pouvoir au sein de
l’entreprise. C’est ce qui explique que, contrairement aux autres fonctions ci-dessous,
elles ne peuvent être sous-traitées.
- Les fonctions de production (fonction technique pour H. Fayol) : ce sont les activités
nécessaires { la création des biens et services que l’entreprise a prévu de mettre sur
le marché.
- Les fonctions de distribution (fonction commerciale pour H. Fayol) : ce sont les
activités destinées { mettre les biens et services produits par l’entreprise à la
disposition des clients.
- Les fonctions logistiques ou auxiliaires (résumé des fonctions financière, comptable
et de sécurité d’H. Fayol) : ce sont les activités destinées à mettre à la disposition de
l’entreprise (c.{.d. de la fonction production et de la fonction distribution) tous les
moyens nécessaires.

Le schéma ci-dessous donne une représentation de l’ensemble de ces éléments, organes


et fonctions.

Schémas n° 9 : Marchés, fonctions et organes de l’entreprise

MARCHE AMONT OU ENTREPRISE MARCHE AVAL OU


FOURNISSEURS CLIENTS
- Capital
- Technologie Processus de - Biens
- Informations Transformation - Services
- Equipements
- Intrants
- Main-d’œuvre
FONCTIONS DE DIRECTION

ORGANES DE DIRECTION + ORGANES D’ETAT MAJOR


(SOMMET STRATEGIQUE + LIGNES HIERARCHIQUES +TECHNOSTRUCTURE)

78
Voir Point 3.1.1. du chapitre 3 et Tableau n° 1.
131

FONCTIONS LOGISTIQUES FONCTIONS PRODUCTION FONCTIONS DISTRIBUTION

ORGANES FONCTIONNELS ORGANES OPERATIONNELS/ ORGANES OPËRATIONNELS/


(UNITES FONCTIONNELLES PRODUCTION (CENTRE DISTRIBUTION
LOGISTIQUES) OPERATIONNEL) (CENTRE OPERATIONNEL)
Source : l’auteur.

9.2. Les critères de structuration d’une organisation efficace

La structure d’une organisation ne peut être figée : elle doit évoluer pour tenir compte
des évolutions de son environnement, qu’elles soient économiques, technologiques ou
sociétales.

A cet effet, cinq critères doivent être pris en compte pour déterminer une structure ou
procéder { sa modification en vue d’un résultat meilleur. Comme on va le voir, les deux
premiers de ces critères (spécialisation et coordination) sont ceux qui ont été retenus
par H. Minzberg.

9.2.1. La spécialisation

La spécialisation consiste à procéder à la division du travail en tâches séparées, au


découpage d’une tâche en un ensemble de sous-tâches ou d’étapes dont chacune est
réalisée par une seule personne.

La spécialisation est retenue comme critère de structuration du travail, car on part du


constat et du principe selon lesquels :

- plus une tâche est étroite et limitée, plus vite l’individu pourra s’y adapter, plus vite
et mieux il pourra l’accomplir ;
- toutes les personnes n’ayant pas les mêmes capacités, la spécialisation permet {
l’entreprise de faire une affectation optimale de ses agents en confiant { chacun la
tâche qui correspond le mieux à ses capacités et éviter ainsi { l’entreprise des pertes
(par affectation d’un agent, soit { une tâche supérieure { ses capacités, soit { une
tâche inférieure à ses capacités).

Ainsi, la spécialisation est source d’efficacité et d’efficience du fait qu’elle permet une
augmentation des rendements.

Cependant, si on ne s’en tient qu’{ ce seul critère de spécialisation, on en arriverait { un


morcellement des tâches individuelles tel que la coordination en deviendrait malaisée,
voire impossible. En effet, la spécialisation a des limites en termes d’augmentation des
132

rendements { cause, d’une part, des coûts de coordination qu’elle induit (voir le critère
de l’éventail de contrôle au point 9.2.5. ci-dessous), et, d’autre part, des problèmes
sociaux et économiques qu’elle engendre tant au niveau des employés qu’{ celui de
l’employeur (monotonie, fatigue mentale, stress, absentéisme, rotation du personnel,
baisse de la qualité des produits, …).

C’est ainsi que le deuxième critère est celui de la coordination qui a donné lieu { une
démarche inverse { travers le recours { l’élargissement des tâches, { l’enrichissement
des tâches et aux groupes semi-autonomes79.

9.2.2. La coordination

Pour des raisons de coordination, il s’avère donc nécessaire d’articuler entre elles les
tâches parcellaires en mettant en place des mécanismes de collaboration, pour atteindre
un objectif d’ensemble, sinon l’information se transmettra très difficilement en temps
voulu, ce qui effacera d’emblée les avantages dus { l’hyperspécialisation.

Ainsi, le découpage selon le critère de spécialisation, devra tenir compte de l’impératif


de la minimisation de la circulation de l’information. D’où, la nécessité de recourir { la
départementalisation, c.{.d. au regroupement d’un ensemble d’activités spécialisées,
mais apparentées, en une entité ou un département placé sous la direction d’un seul
responsable, dans le but d’en permettre la coordination.

A cet effet, on peut avoir plusieurs types de départementalisation :

- la départementalisation par fonctions : c’est le regroupement des employés et des


activités selon le travail effectué et les fonctions réalisées (production, marketing,
finances, ressources humaines, comptabilité, R & D, …) ;
- la départementalisation par produits : c’est le regroupement des employés et des
activités selon les principales gammes des produits/services fabriquées par
l’entreprise, chaque gamme des produits/services se trouvant sous l’autorité d’un
manager responsable de tous ses aspects (départements lubrifiants, carburants,
plastiques, …) ;
- la départementalisation par clients : c’est le regroupement des employés et des
activités selon les besoins et les problèmes des clients (grossistes, détaillants,
entreprises, services publics, …) ;
- la départementalisation par zones géographiques : c’est regroupement des employés
et des activités selon les zones géographiques couvertes ou les territoires desservis
en prenant comme critères soit les grands ensembles régionaux (Amérique du Nord,
Amérique Latine, Europe Occidentale, Europe Centrale et de l’Est, Afrique du Nord et
Moyen Orient, Afrique Sub-saharienne, Asie du Sud Est,…), soit les pays (Etats-Unis,
France, RDC,…), soit en les subdivisions administratives { l’intérieur d’un même pays

79
Voir points 12.5.3. à 12.5.5. du chapitre 12.
133

(Etat d’Oregon, Ville de New York, Département de l’Oise, Ville de Paris, Province du
Nord Kivu, Ville de Kinshasa,…) ;
- la départementalisation par processus : c’est le regroupement des employés et des
activités en fonction du flux du travail ou de la clientèle (cas des administrations
publiques structurées en départements « information », « traitement des dossiers »,
« paiement des prestations », …).

Cependant et comme nous le verrons plus loin, la plupart des entreprises font un mix de
deux ou plusieurs de ces types de départementalisations avec des équipes transversales
qui assurent la coordination à travers les frontières des départements traditionnels.

9.2.3. La nécessité d’un flux de travail régulier.

On évitera de concevoir une structure de travail telle qu’une personne devrait attendre
très longtemps (p.ex. une journée) pour pouvoir travailler sur l’aspect de la tâche qui est
le sien, du fait par exemple d’une trop grande spécialisation. En effet, la répartition des
tâches doit être faite de façon à ce que chaque employé puisse être occupé pendant tout
le temps qu’il passe sur son lieu de travail (une journée de travail de 8 heures), le cas
contraire entraînant nécessairement une sous-utilisation des ressources humaines et
donc des coûts inutiles pour l’entreprise.

Cependant, certains travaux demandent une technologie particulière à laquelle seul un


spécialiste formé à cette seule technologie peut prétendre : dans ce cas, il n’ya pas de
marge de manœuvre pour la détermination des tâches individuelles.

9.2.4. L’autorité

L’autorité n’est pas synonyme de pouvoir. En effet, l’autorité est l’aptitude d’une
personne { faire observer les ordres qu’elle donne (c.{.d. { se faire obéir), tandis que le
pouvoir est son aptitude { influencer les décisions prises par le détenteur de l’autorité
suprême au sein d’une organisation. Il y a donc un lien entre ces deux notions comme
nous allons le voir ci-dessous.

Dans cette section, nous allons examiner l’impact de l’autorité dans la structuration
d’une organisation, ainsi que trois autres notions qui lui sont connexes, { savoir la
responsabilité, le pouvoir et l’unité de commandement.

a. L’autorité et la responsabilité

En rapport avec son origine, on a deux formes dominantes d’autorité dans les
entreprises :

- L’autorité d’origine charismatique qui repose sur la personnalité du leader, c.à.d.


d’une seule personne. C’est le cas généralement du fondateur d’une entreprise qui en
134

a assuré toutes les étapes de la croissance et qui la dirige sans partage. Ce type
d’organisation est par essence instable, car la succession pose généralement
problème, dans la mesure où l’organisation tend à disparaitre ou, à tout le moins,
connait de très grandes difficultés avec la disparition de celui qui a incarné cette
autorité.
- L’autorité d’origine bureautique qui est fondée sur des bases juridiques formalisées
(statuts, règlement intérieur) et qui correspond au cas le plus courant et le plus
efficace dans les organisations.

Ainsi, l’autorité est le droit inhérent { une position hiérarchique de donner des ordres et
de les voir être exécutés : elle est donc liée à la place occupée dans la hiérarchie d’une
organisation et non aux caractéristiques personnelles de celui qui occupe le poste. Par
conséquent, dès qu’une personne libère un poste (volontairement ou sous contrainte),
elle perd automatiquement son autorité qui, du coup, revient à son remplaçant. Cela
reste vrai même dans le cas de l’autorité d’origine charismatique, car le leader perdra
ipso facto son autorité dès qu’il aura cédé sa place { un autre (retraite, maladie, éviction)
comme cela se voit souvent dans les organisations à caractère politique : c’est ce qui
explique la très grande réticence souvent constatée dans le chef de certains leaders à
céder leur place même si l’organisation devait en pâtir.

Du fait qu’elle confère le droit de donner des ordres et de les voir exécutés, l’autorité
induit automatiquement la notion de chaîne hiérarchique, c.à.d. de ligne continue reliant
les échelons les plus élevés de l’organisation aux échelons les plus bas, et définissant les
rapports de subordination.

Quant à la responsabilité, elle est l’obligation d’exécuter une ou plusieurs tâches et d’être
comptable des résultats liés à leur exécution.

Par conséquent, l’autorité doit aller de pair avec la responsabilité, et donc, toute
délégation de l’autorité doit être accompagnée d’un transfert proportionnel de
responsabilités, sinon la voie est ouverte { toutes sortes d’abus. Ainsi, la structure doit
pouvoir respecter cet équilibre entre l’autorité et la responsabilité.

b. L’autorité hiérarchique et l’autorité fonctionnelle

On distingue généralement deux types d’autorités :

- L’autorité hiérarchique ou autorité en ligne : c’est l’autorité qui permet { une


personne, un supérieur, de diriger le travail d’un autre, le subalterne.
- L’autorité fonctionnelle ou autorité en staff : c’est l’autorité qui est exercée à certains
postes par des personnes dont le rôle est de décharger, d’assister ou de conseiller le
détenteur d’une autorité hiérarchique. Ce type d’autorité se retrouve dans toutes les
organisations qui croissent et qui se complexifient. De ce fait, les chefs hiérarchiques
135

n’ont plus le temps, l’expertise et les ressources nécessaires pour réaliser toutes les
tâches leur dévolues, ce qui les pousse à instaurer une autorité fonctionnelle qui a
comme but d’être un multiplicateur de leur réflexion et de leur action. Il faut
souligner que le chef d’une entité exerçant une autorité fonctionnelle, a une autorité
hiérarchique sur les personnes qui sont sous ses ordres (responsable des RH,
responsable du service de planification, directeur du cabinet du directeur général,
…).

La structure doit donc être conçue de façon { ce que l’autorité fonctionnelle ne puisse
empiéter sur l’autorité hiérarchique et remettre en cause le principe de l’unité de
commandement.

c. L’autorité et l’unité de commandement.

L’unité de commandement s’impose dans toute relation hiérarchique, c.{.d. que chaque
agent ne peut recevoir des ordres que d’un seul chef { qui il doit rendre compte et { qui
il doit se référer en cas de besoin. Dans le cas contraire, il se posera forcément des
problèmes en termes de compatibilité entre différentes instructions (parfois
contradictoires) à exécuter et des priorités à établir. Ainsi, la structure doit être conçue
de façon à respecter cette unité de commandement.

Cependant, à trop coller sur ce principe d’unité de commandement, on risque de tomber


dans une rigidité préjudiciable { la performance de l’organisation, surtout quand on sait
qu’il y a une nette différence entre l’autorité et le pouvoir, et que cette différence
implique certains comportements qui doivent déroger à ce principe.

d. L’autorité et le pouvoir.

Comme nous l’avons souligné au début de ce point 9.2.4., l’autorité est le droit formel de
donner des ordres et de les voir exécutés, droit lié et inhérent à une position
hiérarchique, tandis que le pouvoir est la capacité d’une personne { influencer une
décision.

Le pouvoir vient en fait de l’influence qu’une personne exerce sur le chef de


l’organisation, lequel est investi de l’autorité suprême et qui est donc le centre de la
décision. Ainsi, le pouvoir qu’exerce une personne peut provenir de trois sources :

- La première source du pouvoir est la position hiérarchique (processus vertical) : plus


une personne est élevée dans la hiérarchie, plus elle a de l’autorité et plus donc elle a
du pouvoir du fait qu’elle se rapproche du centre de décision. C’est le cas des
membres de la Direction Générale dans une entreprise dans la mesure où : (i) ils
participent statutairement à la prise de certaines décisions (par vote ou
consensus) du fait de leur position hiérarchique ; (ii) ils peuvent bloquer ou retarder
136

la mise en œuvre de certaines décisions importantes du fait de leurs attributions


spécifiques.

- La deuxième source du pouvoir est la proximité avec le chef de l’organisation


(processus horizontal) : plus une personne est proche du chef de l’organisation, plus
elle peut exercer sur lui une influence déterminante. C’est le cas des collaborateurs
immédiats des grands responsables de l’entreprise (tels que les secrétaires ou les
assistants à travers le filtrage des rendez-vous, le contrôle et le filtrage de
l’information transmise au chef, …), de leurs parents, de leurs amis et de leurs
collègues.

- La troisième source du pouvoir est la compétence : plus une personne a des


compétences dont le chef de l’organisation a besoin (surtout quand ces compétences
sont rares), plus elle peut exercer de l’influence sur lui.

Dès lors, on peut distinguer cinq types de pouvoirs selon leur origine :

- le pouvoir hiérarchique : il est fondé sur la position occupée dans la hiérarchie de


l’organisation ;
- le pouvoir de référence : il est fondé sur l’identification, l’appui ou la protection d’une
personne possédant les ressources ou les caractéristiques personnelles nécessaires
(liens de parenté, d’amitié ou de travail, partage des mêmes convictions politiques,
religieuses, philosophiques ou morales) ;
- le pouvoir d’expertise : il est fondé sur l’expertise, le talent, le savoir ou le savoir-
faire ;
- le pouvoir de récompense : il est fondé sur la capacité d’apporter ce que les autres
attendent ;
- le pouvoir de coercition : il est fondé sur la peur.

Il apparait ainsi que la détention et la conservation du pouvoir constituent un impératif


majeur pour tout manager. Pour ce faire, il peut recourir à quatre moyens, à savoir :

- établir un réseau d’influence : il s’agit d’établir des relations avec ceux qui ont
également un pouvoir (en vertu du principe selon lequel « Qui se ressemblent
s’assemblent »), notamment en se faisant remarquer d’eux (par la mise en évidence
de ses compétences et de son potentiel) ;
- développer des alliances : il s’agit d’intégrer un ou plusieurs groupes pour tirer profit
de leurs énergies, de créer des coalitions pour influencer certains évènements ou
certaines décisions (en vertu du principe selon lequel « L’union fait la force ») ;
- contrôler les informations les plus importantes : il s’agit de se positionner ou de
s’organiser de façon { accéder aux informations considérées comme importantes ;
137

- accumuler de l’ancienneté : il s’agit d’accumuler de l’expérience et des informations


dans un domaine donné, ce qui confère un avantage par rapport { ceux qui n’en ont
pas.

9.2.5. L’éventail de contrôle


L’éventail de contrôle, de subordination ou de management est le nombre d’employés
qu’un manager peut diriger directement et de façon efficace. Si les limites inhérentes à
l’éventail de contrôle n’existaient pas, il n’y aurait donc pas nécessité d’avoir une
structure, étant donné qu’un seul homme pourrait diriger une entreprise non organisée.
Pour fixer l’éventail de contrôle, on doit donc tenir compte d’un certain nombre de
variables. Ainsi, l’éventail de contrôle sera d’autant plus large que :

- le niveau de formation des employés est élevé, car ceux-ci auront besoin de moins de
directives de la part du chef ;
- l’expérience des employés est grande, du fait que ceux-ci savent déj{ ce qu’il faut
faire ;
- la similitude des tâches est grande, ce qui implique que les mêmes directives sont
valables pour un grand nombre de subalternes ;
- la complexité des tâches est faible, ce qui implique de la part du chef moins de temps
à consacrer à la préparation, à la supervision et au contrôle de ses subalternes ;
- la proximité physique avec les employés est grande, ce qui permet au chef d’avoir
des contacts directs avec ses subalternes pour leur donner les directives nécessaires
et assurer leur contrôle80 ;
- le degré d’application des procédures standardisées est élevé, ce qui réduit le besoin
pour les subalternes de se référer au chef81 ;
- la culture d’entreprise est forte, car celle-ci constitue un ensemble de valeurs, de
principes, de traditions et de pratiques communes aux membres d’une organisation
et qui guident leur comportement au point de nécessiter très peu de directives de la
part du chef82 ;
- le système d’information est adapté, ce qui permet à chaque employé de recevoir les
directives dont il a besoin { travers un canal adapté sans nécessiter la présence d’un
chef ;
- le style de direction est décentralisé, du fait que cela donne plus d’autonomie aux
subalternes qui ont donc besoin de moins de directives et de surveillance.

80
Voir point 4.3.2. du chapitre 4 au sujet de la supervision directe comme moyen
d’assurer la coordination.
81
Ibidem au sujet de la standardisation des procédures comme moyen d’obtenir la
coordination.
82
Ibidem au sujet de la standardisation des normes comme moyen d’obtenir la
coordination.
138

9.3. La centralisation et la décentralisation

La prise en considération de ces cinq critères va déterminer le degré de centralisation et


de décentralisation de l’entreprise.

9.3.1. La centralisation

La centralisation est la mesure dans laquelle les décisions sont prises à des niveaux
élevés de la hiérarchie. Elle se réfère donc { un système qui est fondé sur l’obéissance
des subalternes et dans lequel c’est un nombre très limité de personnes qui détiennent
le pouvoir de décision : ces personnes recueillent d’abord toute l’information requise et
ensuite décident seules de ce qui doit être fait par les subalternes.

C’est le cas de l’O.S.T. dans laquelle tout le pouvoir est entre les mains de l’ingénieur qui
conçoit le travail et donne des directives strictes aux ouvriers quant à la façon dont le
travail doit être exécuté. C’est aussi le cas du paternalisme dans lequel le manager ou le
propriétaire, { l’instar d’un père vis-à-vis de ses enfants, est seul à savoir ce qui est bon
pour ses employés qu’il traite en conséquence avec bienveillance et condescendance.
On parlera de centralisation absolue si un dirigeant est investi d’une autorité absolue.
Dans ce cas, il y a absence totale de dirigeants subalternes et donc absence totale de
toute structure organisationnelle. Etant donné que tel ne peut être le cas pour une
organisation qui se veut efficace, on peut dire que toutes les organisations sont
caractérisées par une certaine dose de décentralisation.

A cet effet, il faut souligner que la centralisation comporte deux principaux


inconvénients :
- la non-responsabilisation du personnel subalterne ;
- une moindre qualité des décisions, dans la mesure où un nombre limité des
personnes ne peut ni contrôler, ni analyser toutes les informations nécessaires à la
prise d’une bonne décision.

9.3.2. La formalisation

Avant d’aborder la décentralisation, il convient de nous pencher sur un concept qui va


souvent de pair avec celui de la centralisation, à savoir le concept de la formalisation83.

La formalisation est la mesure dans laquelle le travail est standardisé au sein d’une
organisation et le comportement de ses membres est déterminé par des règles et des
procédures formelles. Autrement dit, c’est le degré de précision dans la définition des
fonctions et des tâches, et dans la façon de les exécuter.

Voir point 11.3. du chapitre 11 sur la typologie des structures organisationnelles


83

génériques.
139

Ainsi, une organisation très formalisée est une organisation qui va utiliser des
descriptions des postes strictes et beaucoup de règles et des procédures explicites. Par
conséquent, les employés ont très peu de marge de manœuvre et d’initiative concernant
l’objet de leur travail et la façon de le faire. Ce sont donc des organisations de type
bureaucratique.

Par contre, les organisations très peu formalisées donnent beaucoup plus de latitude et
d’initiative, particulièrement par rapport à la définition des objectifs et aux moyens de
les atteindre.

En termes d’avantages, on peut dire que la formalisation en comporte deux : elle permet
une meilleure cohérence des décisions au sein de l’organisation et elle facilite le
contrôle.

Par contre, la formalisation a un principal inconvénient : elle est à la base de beaucoup


de rigidités et peut donc être source de contreperformances, particulièrement dans un
environnement en perpétuel changement.

Compte tenu des avantages et inconvénients de la formalisation, il convient d’adopter les


deux principes ci-après :

- il faut donner plus de marge aux agents pour leur permettre de prendre les décisions
qu’ils jugent appropriées en fonction de la situation vécue ;
- il faut fixer certaines règles minimales que tous les agents doivent respecter et qui
constituent ainsi des limites et des guides pour l’action { mener.

9.3.3. La décentralisation

La décentralisation est la mesure dans laquelle les niveaux inférieurs de l’organisation


contribuent à la prise de la décision, y sont impliqués ou en sont carrément chargés : elle
va donc de pair avec la notion de participation.

Il faut cependant noter qu’il est impossible dans une organisation d’effectuer une
décentralisation totale, car le dirigeant qui déléguerait tout son pouvoir à ses
subalternes, perdrait ipso facto son statut de dirigeant ainsi que son poste, et il s’en
suivrait la disparition même de l’organisation.

Ainsi, certains types de décisions ne seront jamais déléguées quel que soit le degré de
décentralisation adopté, tandis que d’autres se prêtent plus volontiers { la délégation.
Par conséquent, on peut dire que toutes les organisations sont caractérisées par une
certaine dose de centralisation.
140

Il faut noter aussi que la tendance est historiquement à moins de centralisation et à plus
de décentralisation. C’est ainsi que les organisations traditionnelles étaient
généralement structurées sous forme pyramidale, tous les pouvoirs et toute l’autorité
étant concentrés au sommet. Aujourd’hui, les organisations deviennent de plus en plus
complexes et évoluent dans un environnement en changement permanent, ce qui
implique la nécessité de plus de décentralisation pour, d’une part, permettre { ceux qui
sont directement concernés par un problème de prendre la décision sans tenir compte
de leur niveau hiérarchique, et, d’autre part, permettre { l’organisation de réagir
rapidement à toute modification significative de son environnement.

Par conséquent, il faut adopter un dosage savant entre centralisation et décentralisation,


l’essentiel étant de permettre une meilleure gestion des situations dans le but de
pouvoir atteindre les objectifs de l’organisation. Dans ce domaine, il faut faire du cas par
cas et ne jamais transposer automatiquement dans une organisation une recette qui
aurait bien fonctionné dans une autre organisation.

9.3.4. La décentralisation et la délégation de l’autorité

Toute décentralisation va de pair avec la délégation de l’autorité. Comme nous venons


de le voir, la délégation s’impose par la nécessité de rendre l’organisation possible, dans
la mesure où il existe une limite au nombre de personnes qu’un dirigeant peut
superviser directement de façon efficace : c’est ce que nous avons appelé éventail de
contrôle, de subordination ou de management. Dès que cette limite est atteinte, il est
impérieux de déléguer l’autorité { des subalternes qui, eux, prendront les décisions {
l’intérieur de leur champ de compétence et, de ce fait, jouiront d’une certaine marge
discrétionnaire. Il est un fait qu’un supérieur ne peut déléguer que l’autorité qu’il
détient.

Le processus de délégation de l’autorité comporte la définition des résultats escomptés,


la distribution des tâches, la délégation de l’autorité pour permettre d’accomplir lesdites
tâches et enfin l’identification des personnes responsables de leur réalisation, c.{.d.
celles { qui l’autorité sera déléguée.

Ce faisant, les délégations d’autorité peuvent être particulières ou générales, verbales ou


écrites. Si la délégation d’autorité est imprécise, il y a risque que celui à qui on délègue
l’autorité ne puisse comprendre la nature des tâches { accomplir ou les résultats
attendus de lui. C’est pourquoi, il convient de recourir { des délégations précises et
écrites, ce qui permet aussi à celui qui délègue, de discerner les conflits et les
chevauchements éventuels avec d’autres postes, et ainsi de définir exactement les
responsabilités de ses subalternes.

C’est pourquoi, s’il arrive { un cadre d’avoir une délégation d’autorité qui n’est pas
claire, il est de son intérêt d’établir au plus tôt une description de ses tâches telle que lui-
141

même l’a comprise, de la faire approuver par son supérieur et de la faire connaître { ses
collègues de même niveau, c.à.d. ceux avec qui il sera appelé à collaborer.

Il faut enfin noter que la délégation d’autorité n’est pas définitive : elle peut être retirée à
tout moment par le détenteur originel. Ainsi, une réorganisation ou une restructuration
de l’entreprise comporte immanquablement des retraits et de nouvelles délégations de
l’autorité.

9.3.5. Les attitudes des supérieures face à la délégation

Les carences au niveau de la délégation constituent une des causes importantes des
échecs en management et elles sont attribuables, dans une large mesure, à certaines
attitudes des supérieurs.

En effet, si la définition des objectifs et des responsabilités, l’établissement d’un bon


organigramme et la connaissance des principes de délégation, peuvent aider à rendre les
délégations plus efficaces, certains comportements et attitudes des supérieurs doivent
en faciliter le succès, notamment ceux-ci :

Pour éviter que les supérieurs fassent obstruction à la délégation des pouvoirs, ils
doivent :

- Etre réceptif : ils doivent respecter les idées des autres et accepter que les décisions
de leurs subalternes ne soient pas exactement les mêmes que celles qu’ils auraient
eux-mêmes prises.
- Laisser agir les autres : ils doivent savoir abandonner à leurs subalternes le droit de
prendre les décisions et ne pas vouloir leur reprendre implicitement l’autorité qu’ils
leur ont déléguée.
- Accepter le droit { l’erreur : ils doivent tolérer qu’un subalterne, { l’instar de tout un
chacun (dont eux-mêmes), puisse commettre des erreurs dont le coût doit être
débité au poste des investissements en perfectionnement. Cependant, ce principe
n’est pas synonyme de laxisme ou de tolérance des erreurs graves pouvant mettre en
danger la survie de l’entreprise ou remettre en cause les fondements de la confiance
qu’ils doivent avoir envers leurs subalternes.
- Faire confiance aux subalternes : la délégation de l’autorité ne peut se concevoir que
si les supérieurs ont un minimum de confiance dans la capacité décisionnelle de
leurs subalternes, c.{.d. dans leur capacité { utiliser { bon escient l’autorité leur
déléguée.
- Etablir et utiliser des contrôles généraux : la délégation doit impliquer
nécessairement un contrôle pour en garantir les résultats. Cependant, ce contrôle ne
doit pas être trop tatillon : il doit plutôt porter plus sur les objectifs assignés aux
subalternes que sur les moyens, afin de servir de point de repère tant pour le
supérieur que pour ses subalternes.

9.3.6. Le tableau de délégation des pouvoirs


142

Il a été constaté que beaucoup de conflits, de frictions et d’erreurs étaient souvent dus {
un manque de clarification des rôles individuels.

C’est pourquoi, on recourt généralement au tableau de délégation des pouvoirs pour


préciser les délégations d’autorité au sein d’une organisation. Dans ce tableau, le
problème des limites budgétaires occupe une grande place, car la délégation de
l’autorité va généralement de pair avec le droit d’engager les ressources financières de
l’organisation. Mais y figurent également d’autres éléments tels que ceux relatifs aux
politiques et aux programmes.

Même si le tableau de délégation des pouvoirs ne constitue pas un outil magique, il


demeure néanmoins d’une très grande utilité. Mais cette utilité est conditionnée par :

- sa connaissance par tous les membres de l’organisation ;


- son usage par tous les membres de l’organisation ;
- sa mise à jour chaque fois que se produira une modification importante au niveau de
la structure organisationnelle ou de la délégation d’autorité.

9.3.7. Les modes et les modèles de la décentralisation

La décentralisation peut se concrétiser selon cinq modes et modèles principaux, à savoir


la gestion par les objectifs (GPO), la cogestion, l’autogestion, le modèle japonais et le
modèle occidental.

a. La gestion par les objectifs (GPO)

La gestion par les objectifs (GPO), appelé aussi management par les objectifs (MPO),
direction par les objectifs (DPO) ou management by objectives (M.B.O.) en anglais, est un
processus de décentralisation impliquant le chef et ses subalternes, et qui consiste à :

- fixer ensemble les objectifs qui seront assignés aux subalternes, les stratégies (voies
et moyens) pour atteindre ces objectifs et les critères pour mesurer les résultats par
rapport à ces objectifs ;
- contrôler ensemble les résultats atteints par rapport aux objectifs, analyser les
causes des éventuelles contreperformances et reprendre le cycle de la GPO.

Ainsi, la GPO comporte trois avantages principaux :

- elle suscite la mobilisation et la responsabilisation des subalternes à travers leur


participation, avec comme conséquence un encouragement à la recherche de la
qualité totale et { l’excellence ;
- elle facilite la communication interne, améliore le climat social et consolide les liens
entre le chef et ses subalternes ;
143

- elle permet de mieux établir le lien très étroit qui devrait exister entre la
planification et le contrôle, dans la mesure où elle permet au contrôle de disposer
des repères nécessaires pour mesurer la performance et à la planification de
disposer de la bonne information (rétroaction) pour apporter les éventuelles
corrections nécessaires.

Les résultats de la GPO seront encore améliorés si :

- le chef a de très bons éléments comme subalternes à travers un bon système de


recrutement et/ou de formation ;
- le chef apporte le meilleur soutien à ses subalternes en cas de difficultés rencontrées
dans l’exécution de leurs tâches ;
- une politique de motivation (salaire, carrière...) adéquate est mise en place pour
récompenser ceux qui atteignent effectivement les objectifs leur assignés.

Il faut cependant souligner que le problème de la DPO se situe essentiellement au niveau


de la définition des objectifs, ces derniers devant obéir aux caractéristiques ci-après :

- être coordonnés entre eux et être compatibles ;


- respecter la continuité dans le temps ;
- porter sur les aspects majeurs de l’activité ;
- être à la fois ambitieux et réalistes.

b. La cogestion

C’est le mode qui est basé sur le consensus social, c.{.d. sur un dialogue permanent entre
les partenaires sociaux : il repose ainsi sur la participation des salariés à travers leur
présence dans les organes de gouvernance, notamment le Conseil d’Administration.

C’est le cas de l’Allemagne où la cogestion a été adoptée en 1951 comme mode de


gouvernance pour toutes les entreprises de plus de 2.000 employés. C’est ainsi qu’elle
est très présente dans les secteurs de sidérurgie et des mines, secteurs où les
entreprises sont naturellement de grande taille. On a cependant constaté que ce mode
de gouvernance est en perte de vitesse dans ce pays.

Dans ce mode, les entreprises ont deux organes de gouvernance : le Conseil de


Surveillance (qui est l’équivalent du Conseil d’Administration) et le Directoire (qui est
chargé de la gestion courante et qui est donc l’équivalent de la Direction Générale). Si le
Conseil de Surveillance est présidé par un représentant des actionnaires, il n’en reste
pas moins vrai qu’il compte en son sein une représentation significative des employés,
ce qui permet à ces derniers :
144

- d’accéder plus facilement { l’information relative { la gestion de l’entreprise, et donc


de suivre l’évolution de ses indicateurs de performance ;
- d’avoir une influence sur la stratégie de l’entreprise, et donc de réduire la marge de
manœuvre du Président du Directoire, lequel est nommé par les actionnaires ;
- de renforcer le sentiment d’appartenance { l’entreprise, et donc de faciliter leur
adhésion aux objectifs de l’entreprise et de stabiliser le système.

c. L’autogestion

Ce modèle repose essentiellement sur le principe de la souveraineté du personnel, des


membres ou des usagers de la structure autogérée.

L’entreprise autogérée comprend trois organes ou conseils : le Conseil Ouvrier


(l’équivalant de l’Assemblée Générale), le Conseil de Surveillance (l’équivalant du
Conseil d’Administration) et le Conseil de Direction (l’équivalant de la Direction
Générale). C’est ce système qui est en vigueur dans les coopératives.

L’autogestion a été le modèle de gestion le plus répandu dans l’ex-Yougoslavie.


Actuellement, elle est de plus en plus présente en France sous la forme de R.E.S. (Rachats
des Entreprises par les Salariés) : ce sont des entreprises rachetées par leurs ouvriers
après une mise en liquidation et organisées sous la forme des coopératives.

d. Le modèle japonais

Ce modèle repose sur le respect des valeurs nationales et de la culture d’entreprise. C’est
un mélange de paternalisme et de cogestion du fait qu’il repose sur les quatre principes
suivants :

- le pacte moral passé entre l’entreprise et ses employés : l’entreprise attend de ses
employés qu’ils y passent toute leur carrière et les salariés attendent que l’entreprise
gère leur carrière (sécurité de l’emploi et avantages divers) ;
- le mythe du « Père Fondateur » de l’entreprise, les employés étant considérés par
l’employeur et se considérant eux-mêmes comme ses « enfants » et donc comme les
« héritiers » de l’entreprise : d’où un très fort sentiment d’appartenance ;
- l’importance de la notion du groupe : les intérêts des individus doivent s’effacer
devant ceux du groupe et donc de l’entreprise ;
- la décision collective : tous les participants donnent leurs avis et la décision est prise
de façon consensuelle.

C’est ce modèle de management qui a permis aux grands groupes japonais de prendre le
leadership mondial dans beaucoup de secteurs (automobile, électronique, robotique, …)
jusqu’au début des années 1990. Cependant, ce modèle semble aussi être en perte de
vitesse.
145

e. Le modèle occidental

Ce modèle a deux principales variantes : le « Modèle de l’Excellence » et le « Modèle du


Troisième Type ».

Le « Modèle de l’Excellence » est l’œuvre de Thomas Peters et Robert Waterman84. Ces


deux auteurs ont analysé les entreprises américaines les plus performantes et ont conclu
que leur réussite était imputable au fait qu’elles avaient pu :

- développer l’action ;
- écouter le client ;
- favoriser l’autonomie et l’esprit innovateur ;
- associer la productivité à la motivation du personnel ;
- se mobiliser autour d’une valeur-clé ;
- s’en tenir { ce qu’elles savaient faire le mieux ;
- préserver une structure simple et légère ;
- allier souplesse et rigueur.

S’inspirant des recherches de Thomas Peters et de Robert Waterman, Gorges Archier et


Hervé Sérieyx85 ont mis au point le « Modèle du Troisième Type ». Ils ont analysé le
fonctionnement des entreprises modernes dites « Entreprises du Troisième Type » et
ont conclu que ces dernières mettent en œuvre les principes ci-après :

 l’ouverture vers l’extérieur et une grande flexibilité ;


 la recherche de la qualité totale (zéro faute, zéro délai, zéro panne, zéro stock et zéro
papier) ;
 la mobilisation de l’entreprise autour d’un projet d’entreprise ;
 le maillage de l’entreprise en amont et en aval, toutes les entreprises impliquées
devant se concerter pour une stratégie commune.

Il faut souligner que, si ce type de management a permis d’améliorer les performances


des entreprises, il génère cependant le mal-être et l’anxiété ou job stress au niveau des
salariés, plus particulièrement des cadres.

f. Le mode ou le modèle idéal de décentralisation

En matière de décentralisation, il n’y a pas de mode ou de modèle idéal et universel,


mais des modes ou des modèles qui conviennent mieux que d’autres dans un contexte

84
Peters T. et Waterman R., Le prix de l’excellence, Inter-Editions, 1984 ; Dunod, 1999
(réédition).
85
Archier G. et Sérieyx H., L’entreprise du troisième type, Seuil, Paris, 1983.
146

donné. En effet, pour être efficace, le mode ou le modèle de décentralisation à adopter


doit être adapté à la personnalité du manager, aux attentes et aux caractéristiques des
subalternes, { la mission ainsi qu’{ la culture de l’entreprise, et aux caractéristiques de
l’environnement (économique, technologique, politique, social et culturel).

CHAPITRE 10 : LES PRINCIPES D’ELABORATION D’UNE ORGANISATION EFFICACE

Même si, comme nous l’avons déj{ souligné { plusieurs reprises, il n’existe pas de
solutions idéales d’application universelle dans le domaine du management, tout étant
fonction de la situation de chaque entreprise, il existe tout de même un certain nombre
de principes dont le respect garantit l’efficacité de l’organisation.

Ces principes découlent de l’observation d’un certain nombre d’erreurs qui sont
généralement commises dans ce domaine et par lesquelles nous allons commencer ce
chapitre.

10.1. Les erreurs courantes d’organisation

La liste ci-dessous n’est pas exhaustive, mais ne reprend que les principales erreurs
généralement rencontrées à savoir :
147

 L’inadaptation de la structure aux exigences de l’environnement externe et de la


planification, d’où inflexibilité organisationnelle.

 Le manque de délégation de l’autorité, d’où saturation aux niveaux hiérarchiques


les plus élevés.

 Le manque de définition claire des attributions, d’où frictions, intrigues et


inefficacité.

 L’excès de délégation du pouvoir, d’où émiettement de l’autorité et insuffisance


de l’autorité au niveau des échelons intermédiaires.

 L’absence de parallélisme entre l’autorité et la responsabilité, d’où inefficacité


totale en cas d’autorité sans responsabilité ou de responsabilité sans autorité.

 La mauvaise utilisation des services d’état-major (conseillers, attachés,


consultants, … appelés pour leur expertise), d’où mise en péril du principe de
l’unité de commandement suite { la tendance pour les membres des services
d’état-major à exercer une autorité hiérarchique qui ne leur est pas reconnue.

 Le problème de la subordination multiple ou de la rupture de l’unité de


commandement dû { un excès de délégation de l’autorité fonctionnelle. Ceci
arrive quand chaque responsable opérationnel est obligé de passer par des
spécialistes dès qu’un problème particulier se pose, spécialistes dont la vision des
choses ne cadre pas forcément avec celle du chef hiérarchique du responsable
opérationnel qui, cependant, a le dernier mot quant à sa promotion et à sa
rémunération. D’où, frustration et inefficacité surtout pour les cadres subalternes
et intermédiaires86.

 Le problème de la sur-organisation qui consiste :

- soit { établir de trop nombreux niveaux hiérarchiques ou { s’entourer


d’adjoints hiérarchiques dont on pourrait volontiers se passer, d’où des coûts
trop élevés en termes d’encadrement et une mauvaise circulation de
l’information suite { des éventails de management trop étroits ;
- soit { multiplier les services d’état-major, d’où des risques de frictions avec
les responsables des départements opérationnels.

Pour remédier à toutes ces erreurs courantes, on appliquera donc un certain nombre de
principes qui eux-mêmes doivent prendre en considération un certain nombre de
facteurs contingents.

86
Voir le point 11.3.2. sur les structures matricielles ou croisées.
148

10.2. Quelques grands principes d’organisation

Ces principes résument, précisent et complètent les cinq critères de l’élaboration d’une
structure organisationnelle efficace que nous avons examinés au point 9.2. du chapitre
précédent. La liste qui suit n’est pas exhaustive, mais elle reprend les plus importants de
ces principes.

10.2.1. Le principe de l’organisation en fonction de la stratégie

Les objectifs découlant d’une bonne planification constituent les éléments essentiels de
la mise sur pied d’une organisation solide, dans la mesure où la structure adoptée devra
être celle qui convient le mieux pour atteindre les dits objectifs.

C’est Alfred Chandler87 qui a établi un lien entre stratégie et structure en démontrant
que les stratégies précédaient et entraînaient les changements des structures
organisationnelles, stratégies qui elles-mêmes étaient tributaires d’un environnement
marqué par un changement permanent. Pour arriver à cette conclusion, il a analysé
l’évolution de quatre très grands groupes américains et il a observé un changement
fondamental dans l’organisation de ces groupes, { savoir le passage d’une structure
centralisée et fonctionnelle à une structure décentralisée et multidivionnelle.

Il en découle donc que la structure adoptée { un moment donné de l’histoire de


l’entreprise (notamment { sa création), ne restera pas inchangée si les objectifs de
l’entreprise, et donc ses stratégies, venaient { changer fondamentalement.

Cependant, il faut souligner que si on se rend compte que le personnel de l’entreprise ne


peut s’adapter { la structure considérée comme idéale et qu’il ne peut ou ne doit être
changé, il faudra alors modifier la structure en tenant compte des aptitudes, attitudes et
limites dudit personnel. Néanmoins, cette démarche ne peut être inversée, c.{.d. qu’on
ne concevra pas une structure en fonction des hommes, mais bien en fonction des
objectifs, quitte { l’adapter par la suite aux hommes dont on dispose.

L’un des avantages de se référer { la planification pour concevoir la structure, est que
cela aide à définir les besoins futurs de l’entreprise en personnel et donc { concevoir des
programmes conséquents de formation et/ou de recrutement.

10.2.2. Le principe de la flexibilité organisationnelle

Plus les structures organisationnelles seront flexibles, plus l’organisation sera en mesure
de remplir son rôle. Ce principe veut dire que, l’organisation étant un corps social vivant,
ses structures ne doivent pas être figées, au contraire, sinon elles vont constituer en
définitive un carcan ou un corset qui ne permettra pas au dit corps d’évoluer
convenablement eu égard aux nombreux aléas de l’environnement. La structure doit
donc être conçue avec souplesse de façon à lui garantir une certaine marge de

Chandler A., Stratégies et structures de l’entreprise, Tendances Actuelles, 1972.


87
149

malléabilité ou de respiration. Dans le cas contraire, on tombe dans l’inflexibilité


organisationnelle.

L’inflexibilité organisationnelle peut se définir comme l’inadaptation de la structure


organisationnelle à un environnement interne et externe changeant (modification de la
taille de l’entreprise, de la gamme des produits, du cycle de vie des produits, de la
demande, de l’offre, de la concurrence, des techniques de production, des relations avec
les employés et les syndicats, des réglementations fiscales et autres, ou amélioration des
connaissances en matière d’organisations et des hommes).

On perlera aussi d’inflexibilité organisationnelle lorsque l’on ne prend pas en compte les
dysfonctionnements constatés, tels qu’un éventail de contrôle trop large, un trop grand
nombre de paliers hiérarchiques, un système de communication inadéquat, une
mauvaise coordination entre les départements, un contrôle inadéquat ou un conflit
entre les chefs hiérarchiques et les spécialistes.

Ainsi, pour remédier { l’inflexibilité organisationnelle, on recourt { deux moyens :

- la stratégie (comme nous l’avons vu au point précédent avec le principe de


l’organisation en fonction de la stratégie), stratégie qui permet aux structures de
coller aux changements enregistrés dans l’environnement ;
- l’audit organisationnel qui permet de mettre { jour les problèmes et les
dysfonctionnements organisationnels auxquels il faut apporter solution.

10.2.3. Le principe de la clarification des rôles

Les conflits dans les organisations sont souvent dus { l’incompréhension par ses
membres de leurs propres tâches et de celles des autres membres. Il y a donc un besoin
de compréhension de l’organisation par ses membres { travers notamment la présence
des organigrammes, une description précise des tâches d’un chacun ou job description,
une définition des relations d’autorité et des réseaux d’information, ainsi que la
détermination des objectifs de chacun pour donner un sens à ses activités.

Il nous faut insister particulièrement sur l’organigramme comme moyen de clarification


des rôles. L’organigramme est un schéma qui montre les liens de dépendance entre les
différentes entités composant l’organisation (départements, directions, services,…),
spécifie le rôle de chaque agent et établit le réseau d’autorité pour la prise des décisions.
Sans organigramme, la porte est ouverte aux intrigues, à la multiplication des initiatives
qui vont se neutraliser,… bref { l’inefficacité organisationnelle. Ainsi, l’organigramme
aura parfois comme effet d’indiquer les incohérences et donc les corrections { apporter
pour permettre une meilleure prise de décisions.

Cependant, un organigramme n’est pas un outil magique pour résoudre tous les
problèmes de l’organisation dans la mesure où notamment :
150

- il se limite aux seules relations d’autorité formelles et laisse de côté les relations
informelles qui ont pourtant leur importance ;
- il n’indique pas le poids réel de chaque membre dans la structure, alors qu’il est bien
connu que les responsables situés { un même niveau hiérarchique n’ont
généralement pas la même importance et donc pas le même pouvoir.

10.2.4. Le principe de la délégation en fonction des résultats escomptés

Dans la mesure où l’autorité a pour objet de donner au gestionnaire un outil lui


permettant d’atteindre les objectifs lui assignés, l’autorité déléguée devra être suffisante
pour permettre de réaliser les résultats escomptés.

10.2.5. Le principe de la délégation fonctionnelle

Plus un poste possède une définition claire des résultats escomptés, des activités qui
doivent être entreprises, de l’autorité qui lui est déléguée au sein de l’organisation ainsi
que des relations d’information et d’autorité qu’il doit entretenir avec les autres postes,
plus les individus responsables pourront contribuer de façon efficace à la réalisation des
objectifs de l’entreprise.

Ce principe est à la fois un principe de départementalisation et un principe de


délégation. Il signifie qu’avant de déléguer l’autorité au responsable d’un département
ou d’un poste, il convient au préalable de situer ce département ou ce poste par rapport
{ l’ensemble de l’entreprise, c.{.d. de montrer les relations de ce département ou de ce
poste avec le reste de l’entreprise. Ce sont donc ces relations ou cette place qui
déterminent le rôle du département ou du poste dans la réalisation de l’objectif général
de l’entreprise, et donc spécifient les conditions d’une délégation fructueuse de
l’autorité, c.{.d. déterminent l’importance de l’autorité nécessaire { la réalisation de
l’objectif assigné ({ ce département ou { ce poste). C’est donc un prolongement du
principe précédent qui veut que la délégation d’autorité soit au préalable précédée de la
définition des résultats escomptés.

10.2.6. Le principe des échelons

Plus le partage de l’autorité entre le poste le plus élevé au sein de l’entreprise et les
postes subalternes sera clair, plus la prise de décision et la communication seront
efficaces.

Ce principe veut dire que les subalternes doivent savoir qui leur délègue l’autorité, c.{.d.
qui est leur supérieur hiérarchique et { qui ils doivent donc s’en remettre pour des
questions qui ne relèvent pas de leur compétence. Ce principe est très important pour
sauvegarder l’unité de commandement.

10.2.7. Le principe du niveau d’autorité


151

L’utilité et l’efficacité de la délégation d’autorité exigent que les décisions relevant de


l’autorité des individus, soient prises par ces derniers et non portées { l’attention des
paliers supérieurs de l’organisation. En d’autres termes, les dirigeants doivent prendre
toutes les décisions qui entrent dans le cadre de l’autorité qui leur a été déléguée et ne
s’en référer aux échelons supérieurs que pour les décisions qui ressortent de ce cadre.

Ce principe découle des principes des échelons et de la délégation fonctionnelle. Ainsi


donc, une fois que la « délégation vers le bas » a été faite par le supérieur (processus
normal), il est impérieux d’éviter que la « délégation vers le haut » ne soit faite par les
subalternes (processus anormal).

10.2.8. Le principe de l’unité de commandement

Plus les relations d’autorité d’un subalterne au sein de l’entreprise se limitent { un seul
supérieur, moins il y aura des possibilités de conflit au niveau des directives reçues, et
plus le subalterne se sentira responsable de la réalisation des résultats.

10.2.9. Le principe de la responsabilité absolue

Les subalternes ont la responsabilité absolue de leur rendement devant leurs supérieurs
une fois qu’ils ont accepté une tâche et l’autorité de l’exécuter, tandis que les supérieurs
ne peuvent échapper à leurs responsabilités en ce qui concerne les activités de leurs
subalternes, car ce sont eux qui ont délégué l’autorité et les tâches. Ce principe a une
double implication :

- le subalterne { qui une parcelle d’autorité a été confiée, doit se montrer { la hauteur
de sa tâche, rendre compte à son supérieur et donc être responsable vis-à-vis de ce
dernier ;
- le supérieur qui a délégué une parcelle de son autorité doit, quant à lui, assumer
deux obligations : (i) bien choisir le subalterne à qui il peut confier une tâche et
l’autorité subséquente, car « un bon chef est (notamment) celui qui sait choisir ses
collaborateurs » ; (ii) contrôler l’usage qui est fait de l’autorité déléguée { ses
subalternes, car « la confiance n’exclut pas le contrôle ».

10.2.10. Le principe de l’équivalence entre l’autorité et la responsabilité

La responsabilité de poser des actes ne doit être ni plus grande, ni plus limitée que celle
qu’implique l’autorité déléguée.

Ce principe découle du fait que l’autorité est le droit de donner des ordres et de les voir
exécutés, tandis que la responsabilité constitue l’obligation d’utiliser { bon escient
l’autorité dévolue et d’en rendre compte.

10.2.11. Le principe de la division du travail


152

Une structure organisationnelle doit pouvoir faciliter la contribution des individus à la


réalisation des objectifs de l’entreprise : c’est la condition de son efficacité.

Par ailleurs, une structure organisationnelle sera plus efficace si elle reflète une
classification des tâches nécessaires à la réalisation des objectifs et facilite leur
coordination tout en assurant que les rôles sont conçus en fonction des aptitudes et des
motivations des individus appelés à les remplir.

10.2.12. Le principe de l’éventail de management

Comme nous l’avons déj{ dit { plusieurs reprises, le nombre des personnes qu’un
manager peut diriger directement et de façon efficace, est forcément limité. De plus, ce
nombre sera fonction notamment du type de poste occupé, de la formation des
subalternes et de l’impact de ces variables sur les exigences d’une gestion efficace.

CHAPITRE 11 : LES STRUCTURES ORGANISATIONNELLES

Dans ce chapitre, nous allons passer en revue les différents types de structures que l’on
rencontre actuellement, structures qui découlent des éléments et des principes de
structuration que nous venons d’examiner aux chapitres 9 et 10 ci-dessus. Pour ce faire,
nous allons commencer par donner la typologie de ces structures.

11.1. La typologie des structures organisationnelles génériques


153

Il existe deux principaux types de structures organisationnelles génériques dont


découlent les différentes structures que l’on trouve dans les organisations : les
structures mécanistes ou bureaucratiques et les structures organiques.

11.1.1. Les structures mécanistes ou bureaucratiques

Elles sont caractérisées par un niveau élevé de spécialisation, de formalisation et de


centralisation, et plus précisément par :

- des relations hiérarchiques strictes basées sur le principe de la chaîne hiérarchique,


une ligne d’autorité stricte et un contrôle de chaque agent par un supérieur ;
- une autorité de décision très centralisée ;
- des tâches stables et explicites ;
- de nombreuses règles et règlementations ;
- une communication formalisée et verticale ;
- une structure plus étendue avec de nombreux paliers hiérarchiques.

11.1.2. Les structures organiques

Elles sont caractérisées par un niveau faible de spécialisation, de formalisation et de


centralisation. Elles sont évolutives, souples, lâches et avec un niveau de réactivité très
élevé en cas de besoin (changement significatif de l’environnement interne et/ou
externe). Plus précisément, elles se caractérisent par :

- une forte collaboration verticale et horizontale avec un travail divisé en mode


réseau ;
- une autorité de décision très décentralisée ;
- des tâches flexibles et constamment redéfinies ;
- peu de règles et de règlementations (du fait que l’on a affaire { des professionnels
très compétents, formés { l’appréhension et { la solution de différents types de
problèmes de gestion) ;
- une communication informelle et latérale ;
- une structure plus plate avec peu de paliers hiérarchiques.

11.1.3. Les facteurs de choix

Pour choisir entre ces deux types de structure, trois facteurs principaux vont être
considérés, à savoir :

- la taille de l’organisation : plus la taille d’une organisation est grande, plus elle a
tendance à être mécaniste, car il a été constaté que les grandes organisations (plus
154

de 2.000 agents) se caractérisaient généralement par plus de spécialisation, de


différenciation horizontale et verticale, de règles et procédures que les organisations
de petite taille ;
- la technologie : plus la technologie utilisée implique une activité répétitive, plus la
structure a tendance à être mécaniste, tandis que plus la technologie est non
routinière, plus la structure a tendance à être organique ;
- l’environnement : plus l’environnement est stable, plus la structure sera mécaniste,
tandis que plus l’environnement est dynamique et incertain (intensification de la
concurrence, accélération de l’innovation, raccourcissement des délais de livraison,
accroissement des exigences de qualité,…), plus la structure sera organique.
Ainsi, on trouve sept principales structures organisationnelles réparties en structures
classiques ou traditionnelles et en structures contemporaines.
11.2. Les structures classiques ou traditionnelles

Comme dit plus haut, elles relèvent plus de la logique mécaniste. Elles sont au nombre
de trois : les structures simples, les structures par fonctions et les structures par
divisions.

11.2.1. Les structures simples

Elles sont caractérisées par une faible départementalisation, de larges éventails de


subordination, une forte centralisation et un faible degré de formalisation : c’est le cas
des TPE, des petites organisations et des organisations qui sont à leur début.

Elles ont les quatre avantages ci-après : (i) rapidité dans la prise de décision ; (ii)
flexibilité ; (iii) faibles coûts d’encadrement ; (iv) responsabilités claires.
Par contre, ces structures ont un certain nombre d’inconvénients pour les grandes
organisations ou pour les organisations en croissance, à savoir :

- la surcharge de l’information au sommet de la hiérarchie du fait de la forte


centralisation de l’autorité et de l’absence des règles pour gérer les différentes
opérations (faible degré de formalisation) ;
- la lenteur dans la prise des décisions du fait que tous les choix ne dépendent que
d’une seule personne ;
- l’accroissement du risque du fait que tout dépend d’une seule personne qui est au
centre de l’information et de la décision, mais qui n’est nullement { l’abri d’un
problème pouvant la rendre indisponible ou affecter ses capacités managériales
(problème de santé, absence, empêchement ou mauvais jugement).

Par conséquent, quand les organisations croissent, elles doivent adopter une structure
organisationnelle plus spécialisée (postes et départements plus spécialisés) et plus
formalisée (avec des règles formelles). Il s’agit de la structure fonctionnelle
155

(spécialisation par fonctions) ou de la structure divisionnelle (spécialisation par


divisions produits, clientèles, marchés ou zones géographiques).

11.2.2. Les structures par fonctions ou structures fonctionnelles

Ce sont des structures dans lesquelles les activités similaires et liées sont regroupées :
l’entreprise est ainsi structurée autour de ses grandes fonctions traditionnelles, { savoir
la production, les achats, la R&D, le marketing, la vente, les finances ou la comptabilité.

Dans ces structures, on prend comme principal critère la spécialisation, c.à.d. que
l’entreprise est structurée par spécialités. Cependant, le critère de coordination est
également présent dans la mesure où on a affaire à de grands départements. En effet, un
département ne sera créé que quand un problème particulier se pose et que l’on estime
nécessaire de s’adjoindre un nombre suffisant de spécialistes dans un domaine donné
pour résoudre ledit problème.

Schéma n° 10 : Structure par fonctions

Directeur
Général

Directeur Directeur Directeur Directeur Directeur


Usine Financier Marketing RH R&D

Ce type de structure comporte un certain nombre d’avantages, notamment :

- l’expertise et la spécialisation : l’entreprise est structurée selon les grandes


disciplines de la gestion correspondant à des types précis de problèmes à résoudre
en utilisant des techniques propres, ce qui permet de réaliser des économies
d’échelle et d’éviter la duplication des personnes et des équipements ;
- le regroupement des collaborateurs effectuant des tâches similaires et parlant le
même langage, ce qui permet une efficacité plus grande.

Mais { l’inverse, la structure fonctionnelle pose un problème de coordination entre


départements spécialisés, ce qui se traduit par les principaux inconvénients ci-après :

- la possibilité, pour chaque fonction spécialisées, de poursuivre objectifs sans


considération des objectifs de l’organisation dans sa totalité ;
- l’isolement des spécialistes fonctionnels par rapport { leurs collègues des autres
fonctions ;
156

- un style volontiers autoritaire par concentration de l’autorité au niveau de la


Direction Générale comme moyen d’assurer la coordination entre départements
spécialisés ;
- la saturation des tâches au niveau de la Direction Générale ;
- l’accroissement des effectifs de la Direction Générale (multiplication des adjoints au
Directeur Général et des services d’état-major autour du Directeur Général) pour
faire face à cette saturation des tâches, ce qui accroît encore la centralisation ;
- un problème de motivation pour les chefs des départements spécialisés qui, du fait
d’une centralisation accrue, seront ravalés au rang de simples exécutants

En résumé, la structure fonctionnelle répond bien { l’objectif de spécialisation, mais


pose des problèmes de coordination88 et de motivation pour les responsables des
départements spécialisés.

11.2.3. Les structures par divisions, divisionnelles ou opérationnelles

Ce type de structure essaie de remédier aux inconvénients de la structure fonctionnelle,


à savoir le manque de coordination et de motivation.

C’est une structure composée d’unités ou divisions autonomes qui peuvent être des
produits, des marchés, des clients ou des zones géographiques (voir schéma n° 10).

Ainsi, chaque division est dirigée par un chef ou un directeur qui est responsable de
l’ensemble des stratégies et des politiques la concernant (production, marketing,
finances, RH, R&D, …) { l’instar du Directeur Général d’une entreprise dont les
attributions sont cependant limitées à sa seule division (un produit, un marché, une
clientèle ou une zone géographique).

La coordination et le contrôle de l’ensemble des divisions se font au niveau de la


Direction Générale ou d’un siège central qui déterminent le niveau d’autonomie {
accorder à chaque division. Ainsi, la Direction Générale ou le siège central peuvent, par
exemple, s’occuper de la formulation des stratégies pour l’ensemble de l’entreprise, de la
détermination des objectifs généraux, du choix et de la création des nouveaux produits
ainsi que du contrôle des stratégies et des objectifs, tandis que les divisions peuvent
s’occuper de la mise en œuvre des stratégies, y compris le développement des nouveaux
produits.

Schéma n° 11 : Structure divisionnelle

Directeur
Général

88
Voir point 9.1. du chapitre 9 où nous nous sommes référé à H. Minzberg qui
considère la spécialisation et la coordination comme les deux exigences d’une
structure efficace.

Division Division Division


Lubrifiants Carburants Plastiques
157

Cette structure comporte un certain nombre d’avantages dont trois principalement :

- la motivation, dans la mesure où les chefs ou les directeurs des divisions sont
responsables de tous les aspects de leurs divisions une fois que les objectifs à
atteindre ont été clairement fixés dans le cadre des stratégies et des politiques
générales de toute l’entreprise ;
- la coordination, dans la mesure où tous les aspects concernant une division sont sous
la responsabilité d’une seule personne ;
- l’orientation vers le résultat, dans la mesure où le chef ou le directeur d’une division
est libre de choisir les moyens { mettre en œuvre pour atteindre les objectifs
assignés à sa division.

Revenons sur l’avantage de la motivation pour souligner qu’il peut encore être accru si
l’on transforme les divisions en « centres de profit », c.à.d. si on assigne à chaque
division un objectif de profit à atteindre. Il faut cependant noter que cet objectif de profit
ne prendra en compte que les éléments des charges et des produits pour lesquels le chef
ou le directeur de la division a effectivement l’autonomie de la décision. Ainsi, si le chef
ou le directeur d’un produit n’est responsable que du prix du vente de son produit, des
moyens de promotion-publicité et de sa force de vente (embauche et rémunération),
mais pas des caractéristiques du produit, de l’approvisionnement en intrants, des coûts
de fabrication et des autres variables, l’objectif de profit assigné { son centre devra se
définir { partir de ces seuls trois éléments qu’il contrôle : son rôle sera alors de
maximiser son profit ou d’atteindre un profit plancher en trouvant la meilleure
combinaison possible entre ces trois éléments que sont le prix de vente, la promotion-
publicité et le coût de sa force de vente.
158

Cependant, cette structure divisionnelle comporte un inconvénient majeur : c’est son


coût du fait de la duplication des activités et des ressources. En effet, dans une telle
structure, on aura autant de spécialistes dans les différents domaines (marketing,
finances, production …) qu’il y a des divisions, alors qu’un seul spécialiste par domaine
suffirait dans une structure fonctionnelle.

11.3. Les structures contemporaines

Les structures traditionnelles, essentiellement mécanistes, ne sont pas toujours


adaptées { l’environnement d’aujourd’hui qui est de plus en plus complexe et
dynamique, et qui exige de ce fait une plus grande flexibilité et une plus grande capacité
d’innovation. D’où, le recours { des nouvelles formes de structures qui sont plutôt
organiques : la structure par équipe, la structure matricielle, la structure par projet et
l’entreprise étendue.

11.3.1. Les structures par équipes

Ce sont des structures composées essentiellement par des équipes de travail, équipes
qui se caractérisent notamment par :

- l’absence de lignes hiérarchiques uniques et prédéfinies ;


- la liberté accordée aux membres de s’organiser comme ils l’entendent et de la
meilleure façon, l’essentiel étant d’atteindre les objectifs assignés { leur groupe.

Dans la réalité des grandes entreprises, cette structure par équipes coexiste
généralement avec la structure fonctionnelle et/ou avec la structure divisionnelle, dans
le but de combiner l’indéniable efficacité bureaucratique avec la nécessaire flexibilité
organique.

Il faut cependant souligner que l’efficacité de la structure par équipes est conditionnée
notamment par le fait que tous les membres de l’équipe doivent : (i) être formés à
travailler ensemble ; (ii) être formés à travailler de façon transversale ; (iii) avoir une
rémunération collective adéquate.

11.3.2. Les structures matricielles ou croisées

a. Les caractéristiques

Elles consistent à combiner la structure fonctionnelle et la structure divisionnelle afin de


remédier à leurs inconvénients respectifs (schéma n° 11).

Pour que cette structure matricielle ou croisée soit viable, elle doit être placée sous la
responsabilité des chefs des divisions, c.à.d. que la structure divisionnelle doit
l’emporter sur la structure fonctionnelle, celle-ci n’étant en fait réintroduite que pour
pouvoir remédier au problème du coût d’expertise posé par la structure par
divisionnelle.
159

Il apparait donc que les responsables fonctionnels ne sont que de simples « ressources
techniques » à la disposition des chefs des divisions quand ceux-ci en ont besoin. Ainsi, si
le chef du produit A constate que ledit produit pose des problèmes de
commercialisation, il pourra s’adresser au chef du département marketing pour
demander qu’une étude lui soit faite. Si l’entreprise est organisée en centres de profit, ce
service sera facturé par le département marketing au chef du produit A. Ainsi, chaque
département fonctionnel peut également être organisé en centre de profit. On peut
même aller jusqu’{ autoriser les chefs des divisions { s’adresser { l’extérieur de
l’entreprise pour obtenir l’un ou l’autre service s’ils pensent trouver mieux en termes de
rapport Qualitét/Coût qu’en s’adressant aux départements fonctionnels. On introduit
alors une dimension de concurrence dont le but est de pousser les départements
fonctionnels à améliorer leurs services, à les rendre plus efficients et à baisser leurs prix
de facturation interne. Cependant, les départements fonctionnels, quoi que transformés
en centres de profits, se voient généralement assigner un objectif de strict équilibre
financier qui leur interdit un profit sur les chefs des divisions pour ne pas obliger ceux-ci
à fixer trop haut leurs prix de vente.

Comme on le voit, les collaborateurs sont soumis, dans la structure matricielle ou


croisée, à une double chaîne hiérarchique : la chaîne fonctionnelle relevant de leur
spécialisation et la chaîne divisionnelle relevant de leur affectation. Autrement dit, ils
sont soumis { l’autorité de deux supérieurs : le responsable du département fonctionnel
auquel ils appartiennent et le chef de la division à laquelle ils sont affectés. Ainsi :

- le chef du produit dirige directement les collaborateurs qui lui ont été affectés pour
atteindre les objectifs assignés à son produit ;
- les mêmes collaborateurs dépendent du chef fonctionnel pour la gestion de leurs
carrières (affectation, évaluation, promotion, salaire,…) étant donné qu’{ la fin de
leur affectation à un chef de division, ils vont réintégrer leur département
fonctionnel d’origine d’où ils pourront être affectés à un autre chef de division par le
responsable fonctionnel selon les problèmes qui peuvent se poser ici ou là.

b. Les avantages

Les avantages d’une structure matricielle, par rapport { la structure fonctionnelle et { la


structure divisionnelle sont de deux ordres :

- il ya d’abord les avantages combinés de la structure fonctionnelle et de la structure


divisionnelle, { savoir l’expertise, la coordination et la motivation ;
- il y a ensuite l’élimination de leurs inconvénients respectifs, { savoir la réalisation
d’importantes économies du fait de l’utilisation des mêmes spécialistes pour des
divisions différents.

c. Les Inconvénients
160

Cependant, cette structure comporte également deux inconvénients majeurs : le


problème de la double dépendance, et celui de l’opposition entre les opérationnels
(chefs des divisions) et les fonctionnels (directeurs des départements fonctionnels).

Schéma n° 12 : La structure matricielle

Directeur
Général
Département Département Département
Marketing Finances R&D

Division Equipe Equipe Equipe


Lubrifiants Marketing 1 Finances 1 R&D1

Division Equipe Equipe Equipe


Carburants Marketing 2 Finances 2 R&D2

Division Equipe Equipe Equipe


Plastiques Marketing 3 Finances 3 R&D3

 Le problème de la double dépendance hiérarchique

En effet, et comme nous l’avons déj{ dit, il n’y a pas d’un côté les chefs des divisions et
leurs collaborateurs, et de l’autre côté les chefs des départements fonctionnels et leurs
collaborateurs : ce sont les mêmes collaborateurs qui dépendent à la fois des
responsables fonctionnels et des chefs des divisions. Ainsi, tel agent appartenant au
service marketing est rattaché à tel chef de produit. Cette situation de double
dépendance est souvent source de conflit et de lutte de pouvoir entre le chef du
département fonctionnel dont dépend hiérarchiquement le collaborateur, et le chef de la
division auprès duquel le collaborateur est momentanément détaché.
161

 L’opposition entre chefs des divisions et directeurs fonctionnels

Cette situation de conflit et de lutte de pouvoir est souvent exacerbée par le fait que
généralement tout oppose les chefs des divisions et les directeurs fonctionnels. En effet,
l’écart est très grand en termes de statut entre les chefs des divisions et les directeurs
des départements fonctionnels, dans la mesure où ces derniers sont généralement des
personnes dont l’expérience, la compétence, la formation, le statut, la rémunération et
l’autorité positionnelle sont très élevés, ce qui n’est pas le cas pour les chefs des
divisions qui de plus seront généralement moins anciens dans l’entreprise et plus
jeunes. Or, on va demander aux chefs des divisions d’utiliser ces directeurs fonctionnels
comme ressources à leur disposition malgré ce déséquilibre en leur défaveur.

d. Les remèdes à ces inconvénients

Pour remédier à ces deux inconvénients majeurs, il est indispensable que les mesures
suivantes soient prises :

- les directeurs fonctionnels doivent été préparés psychologiquement pour les amener
{ comprendre et { accepter ce type de fonctionnement, sinon ils s’opposeront aux
chefs des divisions, soit de façon explicite (refus de porter en temps voulu
l’assistance demandée), soit de façon implicite, voire inconsciente (rétention de
l’information, car on ignore l’existence du chef de produit) ;
- les chefs des divisions doivent été choisis notamment en fonction d’un certain profil
psychologique de façon { ce qu’ils soient capables de compenser leur manque
« d’autorité positionnelle » par une influence suffisante afin de pouvoir exercer leur
responsabilité au niveau des stratégies et des politiques intéressant leurs divisions ;
- les deux responsables doivent se rencontrer régulièrement afin de coordonner les
ordres à donner aux collaborateurs soumis à leur double dépendance hiérarchique et
de mettre à plat tout conflit dès qu’il apparait dans le but de le résoudre au lieu de
faire semblant de l’ignorer.

Il faut noter que la structure matricielle peut aussi être appliquée à des projets lorsque
des collaborateurs y sont momentanément affectés. Ainsi, ce qui vient d’être dit
concernant les divisions, s’applique aussi, mutatis mutandis, aux projets.

11.3.3. Les structures transversales

C’est un type d’organisation mettant ensemble des personnes appartenant { des services
hiérarchiquement distincts en vue de rechercher un avantage concurrentiel (coût,
qualité, délai, innovation, service, réactivité,…). Il s’agit en fait de mettre en place des
structures décloisonnées et d’améliorer la coordination dans le but de tirer profit du
développement fulgurant des nouvelles technologies et des compétences des
travailleurs. On peut ainsi distinguer deux types de structures transversales :
162

a. L’ingénierie concourante

Elle consiste à faire travailler ensemble des acteurs (fonctions et services) qui,
généralement, travaillent de façon séparée et séquentielle. Cette démarche est souvent
utilisée quand il s’agit de développer un projet nouveau qui prend beaucoup de temps.
Ainsi, les spécialistes d’horizons différents (bureau d’études, bureau des méthodes,
approvisionnements, usine, marketing, ressources humaines et finances) travaillent
ensemble pour arrêter toutes les caractéristiques du projet (spécifications de l’usine, du
processus de fabrication et du produit, importance des investissements et leur mode de
financement, personnel, coût du produit, date de démarrage de l’usine ou du lancement
du produit,…).

L’ingénierie concourante comporte au moins les trois avantages ci-après :

- elle permet de gagner du temps du fait que les différentes phases du travail se
chevauchent ;
- elle limite les risques d’erreurs du fait de la participation de tous les spécialistes {
toutes les phases du projet ;
- elle permet d’appréhender immédiatement l’impact d’une décision concernant un
aspect du projet sur les autres aspects du projet et donc sur l’ensemble du projet, du
fait que les différents spécialistes ne travaillent pas en vase clos.

b. Les structures par projet

 Les caractéristiques

Un projet comporte les caractéristiques ci-après :

- il est centré sur un objectif nouveau tel que la conception d’un produit, la
construction d’un immeuble ou le rachat d’une entreprise ;
- il est unique (caractère non répétitif) ;
- il est limité dans le temps (caractère ponctuel) ;
- il est pluridisciplinaire.

Ainsi, la structure d’un projet ne sera pas la même pour tous les projets : elle dépendra
notamment du degré d’autonomie qui sera accordée au coordonnateur.

Dans la plupart des organisations, les projets constituent une exception, auquel cas les
collaborateurs peuvent être détachés ou non de leurs structures d’origine.

Cependant, il y a des entreprises où les projets constituent la règle (un bureau d’études
p.ex.), auquel cas les collaborateurs sont en permanence affectés { des projets et n’ont
163

donc pas un département fonctionnel d’origine dans lequel ils seront réintégrés { l’issue
d’un projet comme c’est le cas avec la structure matricielle. Ainsi, dès qu’un projet se
termine, ils sont, soit affectés { un autre projet si ce sont des employés de l’entreprise
avec un CDI, soit remerciés si ce sont des employés de l’entreprise avec un CDD ou des
consultants.

Dans ce type de structure organisationnelle, le rôle du manager va consister


essentiellement à agir comme facilitateur ou coach en éliminant tous les obstacles
organisationnels rencontrés par ses collaborateurs et en mettant à leur disposition
toutes les ressources nécessaires { l’accomplissement des tâches leur assignées.

 Les avantages

Cette structure a deux avantages principaux, à savoir :

- la flexibilité, car elle s’adapte { tout changement dans l’environnement afin d’y
apporter une réponse rapide ;
- l’absence d’un département d’origine (et donc de rattachement) et de toute structure
hiérarchique rigide pouvant constituer un frein à une rapide prise de décision.

 Les inconvénients

Cependant, elle comporte aussi deux principaux inconvénients, à savoir :

- la difficulté d’affecter l’homme qu’il faut { la place qu’il faut, c.{.d.la personne qui
saura effectivement trouver la solution qui convient à la situation qui pose
problème ;
- les problèmes inhérents { l’incessant renouvellement des affectations, notamment la
nécessaire définition des tâches { chaque nouvelle affectation, l’inadaptation {
certains groupes (incompatibilité d’humeur) ou l’attachement { certains groupes
(nécessité de quitter un groupe où l’on s’était intégré).

11.3.4. L’entreprise étendue ou boundaryless organization

C’est une organisation déstructurée visant plus de flexibilité. Autrement dit, c’est une
organisation dont les frontières internes et externes ne sont pas définies ou délimitées89.

Les frontières internes comprennent deux éléments, à savoir :

89
Gebhardt J., The boundaryless organization, in Sloan Management Review, Winter
1996, pp. 117-119; Ashkenas R., Ulrich D., Jick T. et Kerr S., The boundaryless
organization: breaking the chains of organizational structure, San Fransisco, Jossey-
Bass,1997.
164

- les frontières internes horizontales qui sont liées à la spécialisation et donc à la


départementalisation ;
- les frontières internes verticales qui sont liées aux différents niveaux hiérarchiques.

Quant aux frontières externes, ce sont celles qui séparent l’organisation avec les parties
prenantes ou son environnement externe, particulièrement les clients et les
fournisseurs.

Pour éliminer ces deux types de frontières, l’organisation peut choisir entre deux formes
d’organisations, à savoir :

a. L’organisation virtuelle.

C’est une organisation composée d’un petit noyau de collaborateurs permanents qui
travaillent avec de très nombreux experts extérieurs indépendants (ou consultants)
recrutés temporairement en fonction des projets. Ici, les activités sous-traitées sont
essentiellement des services (R&D, publicité,…).

Le recours à ces experts extérieurs indépendants comporte deux principaux avantages


pour l’entreprise :

- il lui permet de tirer profit d’un réseau de compétences qui ont une très bonne
connaissance des marchés locaux parfois géographiquement très éloignés de
l’entreprise (cas de la publicité) ;
- il lui permet d’éliminer la lourdeur administrative et la complexité organisationnelle
liées { la gestion d’un grand nombre de collaborateurs permanents.

b. L’organisation en réseau ou organisation modulaire

C’est une organisation qui s’appuie { la fois sur ses propres collaborateurs et sur un très
grand réseau de fournisseurs travaillant en sous-traitance. Ici, les activités sous-traitées
sont soit des services, soit des activités industrielles, et on parlera d’organisation
modulaire dans ce dernier cas.

Le principal avantage de cette structure est qu’elle permet { l’entreprise de se


concentrer sur ce qu’elle sait faire le mieux, en sous-traitant les autres activités à des
entreprises spécialisées. Ainsi, un équipementier (téléphones, pièces automobiles,…)
peut se limiter à faire de la R&D et à sous-traiter la fabrication de ses produits, voire
certains aspects particuliers de son activité de R&D.
165

QUATRIEME PARTIE : LA FONCTION DIRECTION

Il ne suffit pas de confier des tâches précises aux membres de l’organisation, encore
faut-il s’assurer qu’ils vont, chacun en ce qui le concerne, effectivement s’acquitter de
leurs tâches pour atteindre les objectifs fixés : c’est l’objet de la fonction Direction.

En effet, la fonction Direction consiste { comprendre ce qui pousse l’homme au travail {


agir dans le sens souhaité, et à introduire dans les rôles et les relations
interpersonnelles, des systèmes d’incitations afin qu’il puisse trouver une satisfaction
certaine { travers la réalisation des objectifs de l’entreprise. Autrement dit, elle consiste
{ intégrer les objectifs de l’homme au travail { ceux de l’entreprise dans laquelle il
preste.

C’est pourquoi, au lieu de parler de la fonction « Commandement », comme l’avait fait


Henri Fayol, il a été préféré la dénomination « Direction » qui comporte ainsi deux
aspects ou phases :
- une première phase ascendante qui consiste à comprendre les besoins, les difficultés
et les problèmes de l’homme au travail : c’est l’aspect « écoute » qui consiste à
« comprendre pour faire faire » ;
- une deuxième phase descendante qui consiste { faire exécuter une tâche { l’homme
au travail en lui donnant les raisons nécessaires pour cela, c.à.d. en lui indiquant les
objectifs { atteindre, en le motivant, en l’inspirant, en lui communiquant les
directives et les décisions { travers un système adéquat d’information : c’est l’aspect
« orientation » qui consiste à « faire faire ».
En résumé, la fonction Direction, consiste d’abord { écouter (comprendre pour faire
faire) et ensuite { orienter (faire faire). L’écoute et l’orientation des subalternes
impliquent l’utilisation de la motivation, de la communication et du leadership qui
constituent ainsi les aspects importants d’un système de direction et qui vont être
examinés dans cette partie.
166

CHAPITRE 12 : LA MOTIVATION

Un manager efficace est notamment celui qui sait orienter les efforts de ses subalternes
dans le sens souhaité pour la réalisation des objectifs de l’organisation. Pour ce faire, il
doit chercher à les pousser à agir dans le sens souhaité, c.à.d. à les motiver en mettant en
œuvre les pratiques managériales qui correspondent { leurs attentes et à leurs besoins.
Dans ce chapitre, nous allons passer en revue le processus de motivation, les différentes
théories de la motivation, les principes de la motivation et les techniques de motivation.
12.1. La définition et le processus de la motivation

12.1.1. La définition

Nous savons que toute activité de l’homme, y compris le travail, est orientée vers un but.
Cependant, les buts individuels ne sont pas toujours faciles à définir, encore moins à
découvrir, alors que cela constitue justement une des principales tâches du manager qui
veut obtenir de ses subalternes qu’ils accomplissent les tâches leur assignées.
La motivation peut être définie comme l’ensemble des éléments qui poussent une
personne { faire ce que l’on attend d’elle. Plus précisément, la motivation
professionnelle est la volonté d’un employé { fournir l’effort attendu de lui pour
atteindre les objectifs de l’organisation { laquelle il appartient, volonté qui est
déterminée par la capacité dudit effort { l’aider { satisfaire ses propres besoins.

Il faut souligner que la motivation n’est pas une donnée ou un trait de caractère dont
certaines personnes seraient dotées et d’autres pas. Elle est au contraire une variable
dans la mesure où elle résulte de l’interaction entre une personne et la situation du
moment. Autrement dit, la motivation d’une personne varie en fonction de la situation
qu’elle vit { un moment donné. En conséquence, le niveau de motivation dépend, d’une
part, d’une personne { l’autre, et, d’autre part, du moment considéré.

12.1.2. Le processus

De ce qui vient d’être dit, il ressort que le processus de la motivation fait intervenir trois
éléments :

- un besoin non satisfait ressenti par l’employé, besoin qui créée en lui une situation
de tension qu’il cherche { réduire : ainsi, plus le besoin ressenti est intense, plus la
motivation a des chances d’être forte ;
- un objectif que l’organisation veut atteindre en utilisant les efforts de l’employé et en
offrant à ce dernier une contrepartie : ainsi, plus les objectifs de l’organisation sont
167

clairs et compris par les employés, plus la motivation de ces derniers a la chance
d’être forte ;
- un effort que l’employé va fournir pour permettre { l’organisation d’atteindre son
objectif s’il se rend compte qu’en fournissant cet effort, il pourra effectivement
satisfaire son besoin et donc réduire sa tension : ainsi, plus l’organisation est capable
de satisfaire le besoin ressenti par l’employé et donc de réduire sa tension, plus la
motivation de ce dernier sera forte.

Une personne motivée est donc une personne qui est en état de tension et à qui
l’organisation propose un effort { réaliser en contrepartie duquel elle lui donnera les
moyens de réduire cette tension par la satisfaction des besoins ressentis.

Pour mieux comprendre le processus de motivation, nous allons passer en revue les
principales théories de la motivation qui peuvent être subdivisées en deux catégories :
les théories classiques et les théories contemporaines.

12.2. Les théories classiques de la motivation

Ces théories qui, pour la plupart, datent des années 1950, ont comme point commun le
fait qu’elles établissent toutes une espèce de hiérarchie des besoins.

Elles ont comme principal inconvénient le fait qu’elles n’ont pas été validées par des
études empiriques.

Elles sont néanmoins utiles { connaitre du fait que, d’une part, elles servent de base aux
théories contemporaines, et, d’autre part, elles inspirent encore aujourd’hui très
largement beaucoup de managers.

12.2.1. La théorie de la pyramide des besoins

C’est parmi les théories de la motivation les plus connues et qui est l’œuvre du
psychologue américain Abraham Maslow90. Pour ce dernier, les besoins humains sont au
nombre de cinq :
- les besoins physiologiques : ce sont les besoins fondamentaux de survie et qui sont
relatifs { l’alimentation (eau, nourriture), aux soins de santé, { l’abri (contre le froid,
la chaleur, les intempéries), { l’habillement, au sommeil et { la satisfaction sexuelle ;
- les besoins de sécurité : ce sont les besoins de se mettre { l’abri des dangers
physiques et de la crainte de ne plus pouvoir satisfaire les besoins physiologiques ;
- les besoins sociaux d’affiliation, d’acceptation ou d’appartenance : ce sont les besoins
d’affection, d’amitié, d’acceptation par les autres et d’intégration au sein d’un ou
plusieurs groupes, besoins découlant du fait que l’homme un être social ;

90
Maslow A., op. cit.
168

- les besoins d’estime : ce sont les besoins d’estime interne (estime et respect de soi-
même par l’indépendance et la réussite) et d’estime externe (estime et respect des
autres par le statut social, la considération, le prestige et l’attention dont on est
l’objet) ;
- les besoins d’autoréalisation : ce sont les besoins de développement personnel et de
réalisation de soi par l’utilisation de tout son potentiel.

Graphique n° 3 : Pyramide des besoins de Maslow

5. Besoins
d’autoréalisation

4. Besoins d’estime

3. Besoins sociaux
d’affiliation
2. Besoins de sécurité

1. Besoins physiologiques

Source : Terry G. & Franklin S., Les principes du management, 8 ème édition, Tendances
Actuelles, Economica, 1985, p. 352.

A partir de cette échelle des besoins de l’homme, A. Maslow tire deux conclusions :

- un individu ne songera à satisfaire les besoins supérieurs que si les besoins


inférieurs sont totalement ou en grande partie satisfaits ;
- dès qu’un groupe de besoins est satisfait, il cesse d’être une source de motivation, ce
qui oblige à passer au groupe suivant pour continuer à motiver l’individu.
Par conséquent, pour motiver une personne, il faut d’abord la situer sur cette échelle des
besoins et satisfaire le groupe de besoins qui correspond à sa situation particulière.

La hiérarchisation des besoins d’A. Maslow n’a été validée par aucune étude empirique
et a été l’objet de beaucoup de critiques, notamment les trois suivantes :

- les besoins dits fondamentaux ne sont pas immuables, mais varient d’une personne {
l’autre, d’une époque { l’autre, d’un lieu { l’autre (cas de l’habillement, de la
nourriture ou du logement) ;
- des recherches ont démontré que même l’ouvrier le plus modeste a aussi des besoins
d’estime et d’autoréalisation, même si l’idée que l’on se fait du statut social et de la
fierté du devoir accompli variera d’une personne à une autre ;
169

- certains besoins se chevauchent sur cette échelle et sont parfois difficiles à classer
(cas du besoin relatif aux vacances).
Cependant, il n’en reste pas moins vrai que cette théorie a connu beaucoup de succès et
a été à la base des théories de motivation beaucoup plus élaborées.

12.2.2. La théorie X et la théorie Y

En observant le comportement des managers, Douglas McGregor91 a conclu que ces


derniers sont répartis en deux catégories qui correspondent à deux profils différents
décrivant ainsi deux types de préjugés :

a. La théorie X

Les partisans de la Théorie X ont une vision négative de l’homme et considèrent que
ce dernier :

- déteste naturellement le travail et fait tout pour l’éviter ;


- doit par conséquent être contraint ou menacé de représailles pour qu’il atteigne les
objectifs lui assignés ;
- n’aime pas les responsabilités et préfère être surveillé de près ;
- place la sécurité en tête de ses préoccupations et n’a aucune ambition.

Du point de vue de la motivation, les partisans de la Théorie X supposent donc que ce


sont les besoins les plus bas de l’échelle de Maslow (besoins physiologiques et de
sécurité) qui dominent chez l’homme, lequel n’obéit donc qu’{ la « carotte » ou au
« bâton ».

Sur le plan de l’organisation, les partisans de la Théorie X ont un style de direction


centré sur le supérieur et sont donc partisans d’une forte centralisation.

b. La théorie Y

Les partisans de la Théorie Y ont une vision positive de l’homme et considèrent que :

- le travail représente pour l’homme une activité aussi innée ou naturelle que le jeu
ou le repos ;
- l’employé est capable de se gérer et de s’auto-discipliner s’il se sent concerné par
les objectifs de l’entreprise ;
- l’individu moyen peut assumer, voire rechercher, les responsabilités ;
- la capacité de prendre de bonnes décisions n’est pas seulement l’apanage des
managers, mais on la retrouve également chez l’individu moyen.

91
McGregor D., op. cit.
170

Ainsi, du point de vue de la motivation, les partisans de la Théorie Y supposent que


les besoins les plus élevés dans l’échelle de Maslow (besoins d’estime et
d’autoréalisation) sont prédominants chez l’homme au travail.

Sur le plan de l’organisation, les partisans de la Théorie Y ont un style de direction


centré sur les subalternes et sont donc partisans d’une forte décentralisation.

Pour sa part, McGregor estime que les hypothèses de la Théorie Y sont plus valables
que celles de la Théorie X. Par conséquent, il conclut que pour mieux motiver
l’homme au travail, il faut le faire participer { la prise de la décision, lui confier un
travail stimulant, lui donner des responsabilités et améliorer les relations au sein du
groupe dans lequel il travaille.

12.2.3. La théorie des deux facteurs

Elle est l’œuvre de Frederick Herzberg92 qui part du principe que l’attitude d’un employé
vis-à-vis de son travail peut être déterminante pour sa réussite ou pour son échec.

C’est ainsi qu’il a réalisé une grande enquête dans laquelle il a demandé aux employés de
décrire les situations dans lesquelles ils se sentaient très satisfaits et très insatisfaits de
leur travail. Ceci lui a permis de dégager deux types de facteurs :

- Il y a d’abord les facteurs extrinsèques, d’hygiène ou de maintenance qui sont liés


essentiellement aux besoins physiologiques et de sécurité (besoins les plus bas dans
l’échelle de Maslow). Ces facteurs extrinsèques se réfèrent à tout ce qui touche au
travail et à son environnement : la surveillance, la politique du travail, les relations
avec les supérieurs, les relations avec les collègues, les relations avec les subalternes,
les conditions du travail, les salaires et la sécurité. En cas de non-satisfaction de ces
besoins, ces facteurs extrinsèques (d’hygiène ou de maintenance) augmentent
l’insatisfaction du travailleur et donc sa démotivation.
- Il y a ensuite les facteurs intrinsèques ou moteurs qui sont liés essentiellement aux
besoins d’estime et d’autoréalisation (les besoins les plus élevés dans l’échelle de
Maslow). Ces facteurs intrinsèques se réfèrent au contenu même du travail, à savoir
l’accomplissement, la reconnaissance, la responsabilité, la promotion et le
développement personnel. En cas de satisfaction de ces besoins, ces facteurs
intrinsèques ou moteurs augmentent la satisfaction du travailleur et donc sa
motivation.

Pour Herzberg, la satisfaction n’est donc pas le contraire de l’insatisfaction. Par


conséquent, quand on élimine les facteurs d’insatisfaction, on n’augmente pas pour
autant la satisfaction et donc la motivation. Il suggère donc d’opposer « satisfaction » à
« absence de satisfaction » et « insatisfaction » à « absence d’insatisfaction ».

92
Herzberg F., op.cit.
171

Ainsi, pour augmenter la motivation, il faut augmenter la satisfaction en jouant sur les
facteurs intrinsèques ou moteurs, tandis que pour diminuer la démotivation, il faut
diminuer l’insatisfaction en jouant sur les facteurs extrinsèques ou d’hygiène. Il en
conclut donc que les méthodes d’organisation du travail doivent apporter satisfaction {
ces deux types de besoins et donc être de nature à :

- réduire l’insatisfaction du travailleur en améliorant l’environnement du travail, les


conditions du travail et la rémunération du travail ;
- augmenter la satisfaction du travailleur en faisant la démarche inverse à celle de
Taylor qui a consisté à appauvrir le travail (par la rationalisation et la simplification),
c.à.d. en densifiant le contenu du travail en recourant aux techniques de
restructuration du travail93.

Cette théorie a été l’objet de deux principales critiques portant respectivement sur : (i)
la méthode utilisée pour recueillir les informations ; (ii) la non prise en considération
des variables situationnelles.

Malgré ces critiques, cette théorie a connu un grand succès, car elle est à la base
notamment de la restructuration du travail (élargissement des tâches, enrichissement
des tâches et groupes semi-autonomes)94.

12.2.4. La théorie des trois besoins essentiels

D’après cette théorie mise au point par David Mc Clelland 95, il existe trois besoins
essentiels qui servent de moteurs { l’activité professionnelle, { savoir :

- Le besoin d’accomplissement ou de réussite : c’est le désir de se surpasser, d’aller au-


del{ des normes fixées et de se battre pour réussir. Autrement dit, c’est le désir de
travailler mieux et plus efficacement. Ce besoin est plus prégnant chez les individus
entreprenants qui se différencient par leur désir de mieux faire, qui acceptent
d’assumer totalement la responsabilité de leurs actes (et non de se défoncer sur les
autres ou sur la malchance pour expliquer leurs échecs) et qui aiment se fixer des
objectifs raisonnablement exigeants (et non des objectifs trop faciles ou trop
difficiles à atteindre).

- Le besoin de pouvoir : c’est le désir d’imposer aux autres un comportement qu’ils


n’auraient pas adopté si cela ne dépendait que d’eux, d’avoir un impact et d’exercer

93
Voir points 12.5.3. à 12.5.6. ci-dessous.
94
Ibidem.
95
Mc Clelland D., The Achieving Society, The Free Press, 1961.
172

une influence sur les autres, d’assumer la direction des évènements. Ceux chez qui
ce besoin est le plus important, préfèrent des emplois concurrentiels et prestigieux.

- Le besoin d’affiliation : c’est le désir d’établir des relations interpersonnelles


amicales et intenses, d’être aimé et accepté. Ceux chez qui ce besoin est le plus
important, préfèrent le travail en équipe plutôt que la compétition.

12.3. Les théories contemporaines de la motivation

Ces théories ont en commun le fait qu’elles ont toutes été validées par des études sur le
terrain.

12.3.1. La théorie des buts

Cette théorie englobe un certain nombre de recherches qui établissent que :

- la fixation des buts spécifiques et précis accroît la performance ;


- les buts difficiles, s’ils sont acceptés, impliquent des performances plus élevées que
les buts perçus comme faciles à atteindre.

Il en découle donc les trois notions importantes de la théorie que sont la spécificité, la
participation et le feed-back :

- la spécificité : un but spécifique et ambitieux constitue une très grande force de


motivation et donc produit des résultats qui sont en moyenne plus élevés que ceux
des buts libellés en termes généraux96 ;
- la participation : la participation à la fixation des buts, constitue, en règle générale,
une très bonne source de motivation pour les employés (sauf quand il apparait
qu’un groupe préfère clairement des buts fixés de façon directive), dans la mesure
où les employés se sentent plus concernés par cet engagement pris par eux,
engagement dont la pression augmente encore plus quand le but a été fixé devant
des tiers ;
- le feed-back ou rétroaction : la performance des employés augmente quand ceux-ci
reçoivent un feed-back leur permettant de connaitre le niveau de leur progression
vers le but final, dans la mesure où la connaissance de l’écart entre ce qui a déj{ été
fait et ce qui reste à faire, constitue un élément important de motivation, surtout si
le feed-back est autogéré par l’employé lui-même plutôt que si l’évaluation vient du
chef.

12.3.2. Le modèle des caractéristiques de l’emploi

96
Voir point 12.1.2. ci-dessus.
173

D’après ce modèle mis au point par Richard Hackman et Greg Oldham97, la structuration
du travail a un impact sur la motivation de l’employé.

La structuration du travail ou job design est la façon dont les tâches au sein d’une
organisation, s’articulent pour former un emploi dans le cadre d’un poste.

D’après ce modèle, tout emploi est défini par cinq caractéristiques principales, { savoir :
- la variété des compétences : c’est le degré de diversité du travail qui permet ou non {
l’employé d’exploiter ou d’utiliser pleinement la multitude de ses compétences et
talents ;
- l’identité de la tâche : c’est l’obligation d’accomplir une tâche complète et définie ;
- l’importance de la tâche : c’est l’impact de la tâche sur la vie privée et professionnelle
des autres ;
- l’autonomie : c’est le degré de liberté et d’initiative laissé { l’employé dans
l’organisation de son temps de travail et dans le choix de ses méthodes de travail ;
- le feed-back : c’est la possibilité pour l’employé d’avoir une information de retour sur
l’efficacité de son travail.

Sur base de ces cinq caractéristiques, le modèle stipule que :

- plus un travail implique variété des compétences, identité de la tâche et importance


de la tâche, plus il va susciter de l’intérêt pour l’agent et plus il va constituer un
facteur de motivation ;
- plus un travail implique autonomie professionnelle, plus il va induire un sentiment
de responsabilité de l’employé par rapport au résultat obtenu et plus il va donc
constituer un facteur de motivation ;
- plus un travail permet le feed-back, plus il va permettre { l’agent de mesurer son
efficacité et plus il va constituer donc un facteur de motivation.

Cependant, le modèle ajoute aussi qu’il faut tenir compte des caractéristiques
personnelles des employés, lesquelles caractéristiques expliquent que :

- la motivation sera plus importante chez les employés qui ont un besoin très élevé
d’accomplissement de soi (estime de soi et autoréalisation) que chez les employés
dont ce besoin est faible ;
- la technique d’enrichissement des tâches a provoqué une augmentation de la
performance ou de la satisfaction chez certains employés et non chez d’autres ;
- l’on suggère certaines structurations du travail pour influer sur ces cinq
caractéristiques telles que la création des canaux de feed-back, l’enrichissement des
tâches, l’élargissement des tâches ou les groupes semi-autonomes.

97
Hackman R. et Oldham G., Motivation through the design of work : Test of a theory, in
Organizational Behavior and Human Performance, n° 16.
174

12.3.3. La théorie de l’équité

D’après cette théorie qui a été mise au point par John S. Adams 98, chaque individu établit
subjectivement un ratio entre sa rétribution et sa contribution, puis compare ce ratio
avec celui d’un référent pertinent.

La rétribution pour l’individu est ce qu’il gagne (en termes de salaire, d’avantages
sociaux, de statut social ou de reconnaissance), tandis que sa contribution est ce qu’il
investit (ce qu’il apporte en termes d’efforts fournis, de responsabilités assumées, et
d’expérience, de formation et de compétence exigées).

Quant au référent du travailleur, variable essentielle dans cette théorie, il peut


appartenir à trois catégories appelées « Autrui », « Soi » et « Système » :

- le référent « Autrui » est constitué des autres personnes, en particulier les collègues
occupant un emploi similaire dans la même entreprise, mais aussi des employés
d’autres entreprises, des amis ou des voisins (dont la rétribution peut être connue
par le travailleur à travers notamment le bouche-à-oreille, les journaux, les
magazines ou les conventions collectives) ;
- le référent « Soi » est le travailleur lui-même par rapport notamment à des emplois
antérieurs, à une période antérieure ou à ses obligations familiales ;
- le référent « Système » est constitué de la politique salariale de l’entreprise et de sa
gestion (p.ex. les barèmes salariaux, la tension salariale, les avantages sociaux,…).
Ainsi, si l’individu constate une inégalité ou une iniquité en comparant son ratio à celui
du référent, il se crée en lui une tension qui le pousse à se battre pour atteindre une
situation qu’il considère comme juste et équitable. En cas de tension, trois possibilités
s’offrent { lui :
- corriger lui-même sa rétribution et/ou sa contribution qualitativement ou
quantitativement ;
- amener son employeur à corriger sa rétribution ;
- quitter l’entreprise.

Ainsi, s’il juge que son ratio est :

- pratiquement égal { celui du référent, il se sent en situation d’équité ;


- inférieur à celui du référent, il a un sentiment d’iniquité du fait d’être sous-payé et
cherche à corriger cette iniquité, soit en baissant sa contribution (baisse de la

98
Adams J., Towards an Understanding of Inequity, in Journal of Abnormal and Social
Psychology, n° 63, Novembre 1963, pp. 422-436.
175

quantité et/ou de la qualité s’il est payé au temps), soit en augmentant sa rétribution
(accroissement de la quantité s’il est payé { la pièce) ;
- supérieur { celui du référent, il a le sentiment d’être favorisé du fait d’être surpayé et
cherche à corriger cette situation, soit en augmentant sa contribution (augmentation
de la quantité et/ou de la qualité s’il est payé au temps), soit en baissant sa
rétribution (baisse de la quantité produite s’il est payé { la pièce).

Cette théorie établit donc que le niveau de la motivation est fortement influencé par le
niveau de la rétribution, plus particulièrement par le niveau du salaire, qu’il soit absolu
ou relatif.

Les critiques sur ce modèle sont essentiellement au nombre de deux :

- le mode de définition des contributions et des rétributions par l’employé ;


- le mode d’évolution dans le temps des facteurs pris en compte.
Le grand avantage de cette théorie est qu’elle a été validée par de nombreuses études
empiriques et son application a effectivement permis d’accroître la motivation des
travailleurs.
12.3.4. La théorie des attentes ou de l’expectation

Elle a été mise au point par Victor Vroom99. A ce jour, elle apparait comme la théorie la
plus exhaustive en matière de motivation.

D’après cette théorie, la motivation d’un employé dépend de deux éléments :

- la rétribution qu’il attend de son travail ;


- la mesure de l’intérêt que cette rétribution suscite en lui au regard de ses propres
objectifs.

Cette théorie s’articule en quatre étapes sous forme de questions :

- Première question : Quelles rétributions l’employé associe-t-il à son travail ? Ces


rétribution peuvent être, soit positives (salaire, sécurité, amitié, autoréalisation,
bonnes relations de travail,…), soit négatives (fatigue, ennui, frustration, anxiété,
stress, risque de perte d’emploi,…). Il faut souligner que l’important n’est pas la
réalité de la rétribution, mais la perception subjective qu’en a l’employé. Ainsi, plus
l’employé associe { son travail une rétribution positive, plus il a des chances d’être
motivé par son travail.

99
Vroom V., Work and motivation, Wiley, New York, 1964.
176

- Deuxième question : Que représentent ces rétributions en termes d’attrait ou


d’intérêt pour l’employé ? Cet attrait et cet intérêt sont jugés par l’employé en
rapport avec ses propres besoins. Par conséquent, plus la rétribution attendue de
son travail peut l’aider { satisfaire ses besoins, plus l’employé pourra être motivé.
Ainsi, si l’employé trouve les rétributions : (i) positives, il fera tout pour les obtenir ;
(ii) négatives, il fera tout pour les éviter ; (iii) neutres, il n’aura aucune attitude
particulière.

- Troisième question : Quel comportement l’employé doit-il adopter pour obtenir cette
rétribution ? Même si l’employé juge positive la rétribution qu’il attend de son
travail, cette rétribution ne le motivera pas aussi longtemps qu’il ne sait pas ce que
cela implique pour lui comme effort pour le réaliser. Ainsi, plus son supérieur pourra
lui indiquer clairement comment il devra faire son travail et lui préciser les critères
qui seront utilisés pour apprécier son efficacité, plus l’employé pourra être motivé.

- Quatrième question : Quelles sont les chances que l’employé s’accorde pour pouvoir
faire le travail qui lui est demandé ? En effet, la rétribution attendue du travail, même
si elle est positive, ne pourra motiver l’employé que si ce dernier se croit être en
mesure de faire le travail qui est attendu de lui. Ainsi, plus l’employé est outillé pour
faire le travail attendu de lui, plus il pourra être motivé.

On peut donc ainsi résumer cette théorie en disant que la motivation d’un employé sera
d’autant plus élevée que :

- il perçoit positivement la rétribution de son travail ;


- cette rétribution lui permet de satisfaire ses besoins ;
- le supérieur lui indique clairement ce qu’il doit faire professionnellement pour
obtenir cette rétribution ;
- il est convaincu de disposer des capacités nécessaires pour faire ce qui est
attendu de lui afin d’obtenir cette rétribution.

12.3.5. Une synthèse des théories de la motivation

On peut ainsi faire la synthèse des différentes théories contemporaines de motivation :


l’employé fournira d’autant plus d’effort qu’il perçoit l’existence d’un lien solide entre
son effort (ce qui lui est demandé) et ses objectifs (les besoins qu’il peut satisfaire). Ce
rapport s’établit en trois temps { travers l’existence d’un lien solide entre :

- l’effort (qu’il peut fournir) et la performance (qu’il peut atteindre) ;


- sa performance et sa rétribution ;
- sa rétribution et ses objectifs.
177

Cependant, pour que ce lien puisse fonctionner correctement, il est nécessaire qu’un
certain nombre de facteurs interviennent comme le montre le schéma 13 ci-dessous :

- pour que les efforts se traduisent réellement en performance, il faut, d’une part, que
l’employé puisse avoir les capacités requises pour atteindre la performance attendue
de lui, et, d’autre part, que le système d’évaluation lui paraisse équitable ;
- pour que le lien soit fort entre la performance et la rétribution (cercle vertueux), il
faut que l’employé soit convaincu que sa rétribution dépend réellement du niveau de
sa performance (et non d’autres critères tels que l’ancienneté ou les relations avec
son supérieur) ;
- pour que le lien soit fort entre la rétribution et les objectifs, il faut que cette
rétribution lui permette de satisfaire ses besoins dominants qui correspondent à ses
objectifs.

Cependant, le schéma fait intervenir deux autres relations :

- Il y a d’abord la possibilité d’un lien direct entre l’effort individuel et les objectifs
personnels, lien qui concerne les employés ayant un besoin d’accomplissement très
élevé. Pour ces derniers, la motivation n’est conditionnée ni par l’appréciation de
leurs performances, ni par la rétribution qui s’en suit, mais par un besoin
d’accomplissement qui correspond { leurs objectifs personnels. Autrement dit, ce qui
les intéresse d’abord, c’est la responsabilité, le feed-back de leurs actions et la prise
d’un risque raisonnable.

- Il y a ensuite la case « complexité de la tâche » qui peut s’intercaler entre l’effort


individuel et la performance pour certains employés. Ceci découle du modèle des
caractéristiques de l’emploi de Hackman et Oldham100 qui stipule que les
caractéristiques de la tâche (c.à.d. la structure du travail) exercent une double
influence sur la motivation : (i) les emplois qui stimulent par eux-mêmes les
employés (emplois { fort potentiel motivationnel) sont susceptibles d’augmenter la
performance ; (ii) les tâches très complexes sont très motivantes et donc renforcent
le lien entre l’effort et la performance du fait qu’elles impliquent autonomie et feed-
back.

100
Point 12.3.2. ci-dessus.
178

Schéma n° 13 : Modèle intégré de la motivation

Besoin
d’accomplissement
élevé
Rapport équité
Ra/Ca = Rb/Cb

Critères d’évaluation
Aptitudes des performances

Effort Individuel Complexité de Performance Rétributions de Objectifs


la tâche individuelle l’entreprise personnels

Système Renforcement Besoins dominants


objectif
d’évaluation
des
performances

Les objectifs
régissant le
comportement

Légende : Ra = rétribution de l’employé a ; Ca = contribution de l’employé b ; Rb


= rétribution du référent b ; Cb = contribution du référent b.

Source : Robbins S. & al., op. cit., p. 328.

12.4. Quelques principes de motivation

De l’ensemble de ces théories, nous pouvons tirer un certain nombre de principes de


motivation d’où découleront un certain nombre de techniques de motivation.

12.4.1. L’importance des différences et des situations individuelles

Les employés sont différents et il est donc indispensable de tenir compte de leurs
différences individuelles (en termes de besoins, de comportements, de personnalité, de
culture,…) dans le processus de motivation. De même, les situations doivent aussi être
179

prises en compte, car un individu ne réagira pas de la même façon selon


l’environnement dans lequel il va se trouver.

12.4.2. L’adaptation de l’emploi { l’employé

Tous les employés n’ont pas les mêmes capacités. Il faut donc adapter l’emploi { chaque
employé pour ne pas défavoriser et donc démotiver les employés qui ne disposent pas
des capacités nécessaires { la réalisation d’un travail donné.

12.4.3. La concentration sur les objectifs

Il faut s’assurer que les employés sont concentrés sur la réalisation de leurs objectifs et
qu’ils ont les moyens de mesurer leurs performances { travers un feed back adéquat.

12.4.4. La nécessité de fixer des objectifs ambitieux et réalisables

Il est nécessaire de fixer des objectifs qui soient à la fois ambitieux (pour pousser
l’employé { utiliser au maximum son potentiel et accroitre ainsi la performance globale
de l’organisation) et réalisables (pour ne pas démotiver les employés convaincus qu’ils
ne pourront de toute façon pas atteindre les objectifs leur assignés puisqu’irréalisables).

12.4.5. La liaison entre les rétributions et la performance

Les rétributions (notamment les augmentations des salaires, les primes et les
promotions) doivent être liées à la performance.

12.4.6. L’individualisation des rétributions

Etant donné que les employés ont des besoins différents, ce qui motive certains ne
motive donc pas forcément d’autres. Par conséquent, il faut individualiser les
rétributions (salaire, promotion, autonomie, participation,…) tout en veillant { ce qu’un
sentiment d’iniquité ne puisse voir le jour parmi les employés (principe suivant).

12.4.7. L’équité du système

Il faut s’assurer que les employés trouvent équitable le système des rétributions
(équivalence entre les contributions et les rétributions), notamment en tenant compte
d’un certain nombre de critères pour fixer les rémunérations (l’effort fourni, le risque
encouru, la responsabilité assumée, le rendement atteint ou le niveau requis de
formation et d’expérience).

12.5. Quelques techniques de motivation


180

Comme dit plus haut, sur base des différentes théories de motivation et des principes
qui en découlent, il a été dégagé un certain nombre d’incitants pratiques qui peuvent
être utilisés pour motiver l’homme au travail.

12.5.1. L’argent

L’argent est un facteur de motivation puissant, qu’il prenne la forme de salaire ou


d’avantages sociaux parfois convertibles en argent (achat optionnel d’actions, prime
d’assurance payée par l’employeur, congés payés, cantine, repas, logement, carburant,
transport ou véhicule de service). En effet, les individus travaillent d’abord pour gagner
de l’argent qui, du fait de son pouvoir libératoire quasi illimité, permet de satisfaire bon
nombre de besoins ressentis par l’homme, y compris les besoins d’autoréalisation.

12.5.2. La participation

Comme nous l’avons déj{ dit { plusieurs reprises, quand un employé est consulté sur
une décision qui le touche, il est généralement plus motivé et il donnera alors le meilleur
de lui-même pour exécuter ce qui aura été décidé { l’issue cette consultation, dans la
mesure où il se considère comme co-auteur de la décision. Ceci est particulièrement vrai
en ce qui concerne la fixation des objectifs.

12.5.3. L’élargissement des tâches

L’élargissement des tâches est une expansion horizontale du travail qui consiste {
regrouper, sur un même poste de travail, un plus grand nombre de tâches parcellaires
de simple exécution antérieurement réparties sur deux ou plusieurs postes de travail.

Son objectif est d’augmenter la durée du cycle du travail sur un poste afin de diversifier
les tâches de simple exécution et d’éliminer ainsi la monotonie consécutive { la
répétition des mêmes opérations de très courte durée (O.S.T.).

12.5.4. La rotation des postes et des tâches

La rotation des postes et des tâches consiste { faire passer le travailleur d’un poste { un
autre, tout en le cantonnant dans des tâches de simple exécution. Elle peut être ou non
combinée avec l’élargissement des tâches.

Elle a également pour objet d’éliminer la monotonie consécutive { l’exécution des


mêmes tâches à travers la diversification de celles-ci.

12.5.5. L’enrichissement des tâches


181

L’enrichissement des tâches est une expansion verticale du travail par adjonction des
tâches impliquant une activité résolutoire et donc plus de responsabilités. Il consiste
donc à complexifier un poste de travail en lui donnant un contenu plus qualifié et plus
responsable, à rendre le travail plus important et plus significatif en le densifiant, c.à.d. à
confier au travailleur des tâches de natures différentes, intégrant aux composantes de
simple exécution, des dimensions faisant intervenir les facultés naturelles d’initiative, de
choix et de décision. Il peut ainsi consister :

- soit à confier aux travailleurs les tâches de réglage, de dépannage et de réparation


des machines ;
- soit à donner aux travailleurs plus de latitude tant dans le choix des méthodes, de la
séquence, du rythme et des horaires de travail que dans le contrôle des intrants et
de la qualité du travail (acceptation ou rejet) ;
- soit { intéresser les travailleurs { l’analyse et au changement des aspects physiques
de leur environnement de travail (aménagement des bureaux et des ateliers, niveau
de la température dans les lieux de travail, éclairage, propreté, niveau de bruit, …).

Toutes les recherches et analyses semblent montrer l’importance de l’enrichissement


des tâches dans les ateliers. En effet, beaucoup d’entreprises, dans les pays
industrialisés, ont mis sur pied des programmes d’enrichissement des tâches au terme
desquels elles ont pu accroitre leur productivité, réduire le taux d’absentéisme et de
rotation de leur personnel et améliorer le moral de leurs employés.

12.5.6. L’autonomisation

L’autonomisation est le fait de donner aux travailleurs ou, mieux, { un groupe de


travailleurs, la possibilité de décider par eux-mêmes d’un certain nombre d’éléments
concernant leur travail. L’entreprise est dès lors composée d’un certain nombre de
groupes semi-autonomes disposant d’une très large autonomie organisationnelle et
parfois financière. C’est ainsi qu’elle peut prendre plusieurs formes, telles que :

- l’organisation du travail (répartition des tâches entre les membres du groupe,


horaires de travail, objectifs du groupe,…) ;
- la gestion du budget du groupe ;
- la gestion des clients ;
- le choix des méthodes de formation ;
- la gestion des stocks ;
- la planification de la production, des achats, des ressources humaines, de la sécurité ;
- la participation au développement des nouveaux produits (en collaboration avec la
R&D et le marketing).
182

Elle a donc comme conséquence et objectif de réduire les frustrations et d’accroitre la


motivation.

Cependant, l’autonomisation n’est pas chose aisée. Pour en faciliter la réussite, il est
recommandé de la faire de façon graduelle en passant par trois étapes :

- la première étape est la participation, c.à.d. la mise en place des processus


décisionnels participatifs pour mieux exploiter les capacités des travailleurs ;
- la deuxième étape est la délégation de certaines tâches ou fonctions ;
- la troisième étape est la restructuration du travail pour laisser plus de liberté et
d’autonomie aux travailleurs.
Il faut signaler que l’élargissement des tâches, la rotation des postes, l’enrichissement
des tâches et les groupes semi-autonomes, font partie de ce qu’on appelle
la « restructuration des tâches ».

12.5.7. Le renforcement positif ou la modification du comportement

Cette technique postule qu’il est possible de motiver l’homme au travail en créant un
environnement de travail propice et en vantant son rendement. En outre, elle soutient
que les sanctions négatives produisent toujours des résultats négatifs : elle met donc
l’accent sur le côté positif des actions des travailleurs tout en minimisant les aspects
négatifs.

Cette technique ne consiste pas seulement à vanter la performance des travailleurs, mais
de plus, elle part d’une analyse de la situation du travail pour identifier les causes du
comportement des travailleurs ainsi que les difficultés et les obstacles au rendement, et
initie ensuite les changements susceptibles d’éliminer ces difficultés et obstacles pour
induire la performance.

Par ailleurs, elle prévoit, avec la participation des travailleurs, d’élaborer des objectifs
précis, des mécanismes de rétroaction rapide et périodique, et elle récompense les
améliorations de rendement par la reconnaissance et la louange.

On peut citer les deux variantes ci-après de cette technique, à savoir :

- Le « stakhanovisme »101 qui est une technique de motivation utilisée en U.R.S.S. et


dans les pays socialistes dans les années 1930 à 1950. Elle avait comme objectif de
pousser les ouvriers à augmenter leurs rendements et était basée essentiellement
sur l’émulation des travailleurs, ceux-ci poursuivant principalement des distinctions
honorifiques du genre « Héros du Travail Soviétique ».

101
Du nom d’un mineur russe, Alekseï Stakhanov, qui aurait produit, en 1935, 102 T
de charbon en une journée de 6 heures, soit plus de 14 fois la norme qui était de 7 T.
183

- La pratique de la désignation régulière d’un employé qui s’est distingué au cours


d’une période (« employé de la semaine », « employé du mois » ou « employé de
l’année »). Cette pratique est notamment utilisée par les grands hôtels ou les grands
magasins pour les employés qui sont en contact direct avec les clients
(réceptionnistes, serveurs, garçons de chambre, vendeurs,…).

Cette technique du renforcement positif ne fait pas l’unanimité, mais beaucoup


d’entreprises l’ont appliquée avec succès. Cependant, si l’on veut l’appliquer avec succès,
il faut retenir que le point le plus important est qu’elle doit mettre l’accent sur les
principes même de la gestion, { savoir l’élimination des obstacles au rendement, la
planification, le contrôle par le truchement de la rétroaction, les communications,
l’encouragement { la participation et l’amélioration de l’environnement.
184

CHAPITRE 13 : LA COMMUNICATION

La communication est un élément essentiel dans les deux phases d’Ecoute et


d’Orientation de la fonction Direction. En fait, la communication est le moyen par lequel
les activités d’une organisation sont unifiées : elle a ainsi pour objet de contribuer à
effectuer des changements ou à orienter les efforts dans le sens souhaité.

C’est ainsi qu’une bonne communication contribuera efficacement { faire fonctionner


harmonieusement tous les rouages de l’entreprise et { développer le sentiment
d’appartenance { l’entreprise. Par contre, une mauvaise communication aura
immanquablement comme conséquences des malentendus et des dysfonctionnements
relationnels : c’est ainsi qu’une rupture de communication est souvent { l’origine des
conflits de travail. D’où la nécessité, pour tout manager, de développer ses compétences
en matière de communication.

13.1. Le processus de communication

La communication peut se définir comme la transmission d’un message ou d’une


information d’une personne, l’émetteur, { une autre personne, le récepteur.

Cette transmission se présente sous la forme d’un flux ou d’un processus circulaire qui
comprend les huit éléments ci-après :

Schéma n° 14 : Processus de communication

Message Message Message Message


Emetteur Codage Canal Décodage Récepteur

Feed-back

Message

Source : Adapté de CENECO, DIXECO du Management, 3ème édition, Editions ESKA, 2000, p.
40 ; de Collins S. & al., op.cit., p. 392 ; et de Terry G. & Franklin S., op. cit. p. 417.

13.1.1. L’émetteur
185

C’est la personne qui détient une idée ou une information et qui souhaite la transmettre
à une autre personne : c’est la source du message.

13.1.2. Le codage

C’est la conversion de la pensée de l’émetteur en message sous la forme des symboles


que le récepteur peut comprendre. Ces symboles sont constitués d’un ensemble de
signaux choisis par l’émetteur pour transmettre son idée ou l’information (la langue, le
vocabulaire, les dessins,…). La qualité du codage est fonction de quatre éléments :

- la compétence de l’émetteur, c.{.d. sa capacité d’écriture, d’élocution, de lecture et de


raisonnement ;
- l’attitude de l’émetteur, notamment ses préjugés sur le récepteur ;
- le savoir de l’émetteur, c.{.d. ses connaissances sur le sujet du message (une
connaissance insuffisante, et même parfois excessive, peut faire en sorte que le
récepteur ne puisse pas comprendre ou comprenne mal) ;
- le système socioculturel de l’émetteur, c.{.d. sa place dans la société (statut social) et
sa culture (valeurs et convictions).

13.1.3. Le message

C’est l’ensemble des informations dotées d’un sens et qui sont échangées entre
l’émetteur et le récepteur (message écrit, discours, peinture, dessin, gestuelle,
expression du visage,…). Le message est donc constitué de l’information et du code.

13.1.4. Le canal

C’est la voie ou le moyen matériel utilisés pour la transmission du message de l’émetteur


au récepteur. A cet effet, on peut distinguer :

a. Les canaux formels et les canaux informels

- les canaux formels sont les canaux mis en place par l’entreprise, calqués sur la
structure hiérarchique et adaptés à la transmission des messages relatifs à
l’activité professionnelle ;
- les canaux informels sont les canaux mis en place par les membres de
l’organisation eux-mêmes et adaptés aux messages d’ordre personnel et
relationnel, mais aussi parfois d’ordre professionnel (quand p.ex. les canaux
formels ne jouent pas leur rôle).

b. Les canaux directs et les canaux indirects


186

- les canaux directs sont des canaux qui permettent { l’émetteur et au récepteur
d’échanger sans intermédiaire (cas de la conversation ou des signes) ;
- les canaux indirects sont des moyens techniques qui permettent de surmonter les
barrières du temps ou de l’espace entre l’émetteur et le récepteur (lettre,
enregistreur, téléphone ou ordinateur).

13.1.5. Les parasites

C’est l’ensemble des phénomènes volontaires ou non, susceptibles de parasiter le


canal et de perturber le décodage tels que les bruits, les grésillements, les limites de la
fréquence, les limites de l’intensité, les fadings (en radio), les fritures (sur les lignes
téléphoniques), les interférences, les pannes ou les piratages.

13.1.6. Le récepteur

C’est la personne { qui le message est destiné, c.{.d. la personne qui reçoit le message.

13.1.7. Le décodage

C’est le processus de traduction, par le récepteur, du message émanant de l’émetteur et


qui est la condition pour qu’il puisse comprendre le dit message. C’est donc le processus
qui permet au récepteur de comprendre et d’interpréter le message venant de
l’émetteur. Par conséquent, il suppose que le récepteur puisse avoir les mêmes
référentiels que le récepteur (langue, vocabulaire, signes, codes,…).

Cette étape est conditionnée par les mêmes facteurs que la phase du codage
(compétences, attitudes, savoir et système socioculturel), mais cette fois-ci dans le chef
du récepteur.

13.1.8. Le feed-back

C’est la rétroaction qui constitue l’étape finale du processus de communication. C’est le


moyen par lequel l’émetteur peut connaitre l’efficacité ou l’inefficacité de son message,
vérifier ainsi si le message a été transmis tel qu’il le souhaitait et s’il est parvenu à se
faire comprendre, et, le cas échéant, corriger son message.

13.2. Les types de communications

13.2.1. Les critères d’analyse


187

On peut distinguer plusieurs types de communications selon différents critères


d’analyse retenus, tels que :

a. La structure émettrice

Selon ce critère, on a : (i) les communications hiérarchiques descendantes ou


ascendantes ; (ii) les communications fonctionnelles (spécialistes ou conseil).

b. Le degré d’institutionnalisation

Selon ce critère on a : (i) les communications formelles (canaux formels) ; (ii) les
communications informelles (canaux informels).

c. Les modes de transmission

Selon ce critère, on a : (i) les communications verticales descendantes ou ascendantes


(relations hiérarchiques) ; (ii) les communications latérales (relations non
hiérarchiques).

d. Les destinataires

Selon ce critère, on a : (i) les communications interpersonnelles (d’une personne {


l’autre) ; (ii) les communications de masse (d’une personne { un groupe de personnes) ;
(iii) les communications institutionnelles (communications de l’entreprise avec des
structures de son environnement externe).

e. Les méthodes utilisées

Selon ce critère, on a : (i) les communications écrites ; (ii) les communications verbales ;
(iii) les communications par signaux non verbaux.

Compte tenu de leur importance particulière, voyons un peu plus en détail les
communications selon les différentes méthodes utilisées.

13.2.2. Les communications écrites

La communication écrite est la transmission du message par des mots ou des symboles
graphiques (discours écrit, mémos, lettres, courriels, publications internes, panneaux
d’information, valves, web sites, texto, blogs,…).

Elle comporte un certain nombre d’avantages, { savoir :

- elle laisse des traces vérifiables et durables ;


188

- elle permet une conservation longue et donc d’être consultée autant de fois que de
besoin (cas des messages longs, complexes ou avec effets à long terme) ;
- elle implique plus de soin, d’attention et de clarté de la part de l’émetteur.

Par contre, elle comporte deux inconvénients majeurs : (i) la lenteur ; (ii) l’absence d’un
feed-back immédiat.

13.2.3. Les communications verbales

La communication verbale est la transmission du message oralement (communication


non écrite, entretien direct, entretien téléphonique, skype,…).

Ses avantages et inconvénients sont respectivement les inconvénients et les avantages


de la communication écrite.

13.2.4. Les communications par signaux non verbaux

La communication par signaux non verbaux est la communication qui se fait


essentiellement par le langage corporel et l’intonation.

Le langage corporel comprend l’expression du visage, les gestes ou tout mouvement du


corps. Il peut communiquer ou traduire des émotions ou des attitudes telles que
l’agressivité, l’amabilité, la peur, la confiance, la timidité, l’assurance, l’arrogance,
l’humilité, la joie, la colère, l’approbation ou la désapprobation.

Quant { l’intonation, c’est l’accentuation vocale de certains mots ou de certaines


expressions, avec comme effet de donner une signification particulière et précise à un
message.

Il faut souligner que tout message verbal comporte immanquablement un message non
verbal et que c’est cette composante non verbale qui produit l’impact le plus important.
En effet, l’important n’est pas ce que l’on dit, mais la façon dont on le dit. C’est ainsi que
s’il n’y a pas adéquation entre les paroles prononcées et les mouvements du corps ou
l’intonation, ce sont ces derniers éléments qui vont constituer le message que retiendra
le récepteur.

13.3. Les problèmes et les obstacles majeurs à une communication efficace

On dira qu’une communication est inefficace si le message décodé par le récepteur est
différent de celui que l’émetteur a voulu envoyer. Dans ce cas, on enregistre deux types
d’effets possibles en comparant le message émis et le massage reçu :
189

- l’effet de rejet si une partie du message correctement émis par l’émetteur, n’a pas été
reçue par le destinataire ;
- l’effet de halo si une partie du message reçu par le destinataire, n’a pas été émise par
l’émetteur.

Etant donné les causes qui sont { leur base, il est quasi impossible d’éliminer totalement
ces deux effets de rejet et de halo. De ce fait, l’amélioration de la qualité de la
communication ne peut consister qu’{ maximiser la partie du message correctement
émise et reçue, et à minimiser les deux effets de rejet et de halo.

En effet, une communication inefficace est imputable à des erreurs de codage et de


décodage, conséquence, elles-mêmes, d’un certain nombre d’obstacles et d’erreurs (liés
{ l’homme, { la sémantique ou { l’organisation) ci-dessus résumés en douze points et qui
ne peuvent être totalement éliminés comme cela va apparaitre clairement.

13.3.1. Le filtrage de l’information

Le filtrage de l’information est la manipulation délibérée de l’information dans le but de


lui assurer un accueil volontairement biaisé par le récepteur. Il est ainsi imputable à un
certain nombre de raisons, notamment :

a. La peur

Les subalternes sont des sources inestimables d’information pour leurs supérieurs, mais
ils doivent faire un choix de ce qu’ils peuvent communiquer à leurs supérieurs. Ceci
entraine souvent une sélection inadéquate, des vérités partielles ou des omissions pures
et simples du fait que les subalternes redoutent les réactions de certains de leurs
supérieurs qui n’aiment recevoir que des informations rassurantes et pas des
informations dérangeantes. Ainsi, certains supérieurs en arrivent à adopter, parfois
inconsciemment, des attitudes tendant à rendre responsable celui qui leur apporte une
information désagréable au point de le traiter dès lors de la même façon que l’auteur de
ladite information.

b. Les intérêts personnels des subalternes

En faisant la synthèse { l’attention de leurs supérieurs, les subalternes ont aussi


tendance à tenir compte de leurs propres intérêts personnels afin d’orienter les
décisions des supérieurs en leur faveur ou d’éviter que ces décisions ne leur soient
défavorables.

c. La capacité de synthèse des subalternes

Comme dit plus haut, les subalternes reçoivent beaucoup d’informations qu’ils sont
chargés de transmettre à leurs supérieurs, mais après en avoir fait la synthèse, dans le
190

but notamment d’éviter aux supérieurs une surcharge d’informations. Cette synthèse
dépendra donc aussi de leur capacité à percevoir et à rendre ce qui est important.

d. Le niveau d’attention et la capacité de concentration du récepteur

Le filtrage de l’information est aussi imputable au récepteur : il sera ainsi fonction de


son niveau d’attention, c.{.d. de sa tendance ou non { négliger de lire les informations
qui lui sont destinées (bulletins d’information, rapports et comptes rendus de réunions)
et de sa capacité de concentration (au moment où il lit cette information ou au moment
où l’émetteur lui fait une communication verbale).

e. Le nombre des échelons hiérarchiques dans l’organisation

Plus le nombre d’échelons hiérarchiques est élevé dans l’organisation, plus il y a des
occasions de faire le filtrage. En effet, { chaque transmission de l’information d’un
échelon à un autre, on augmente les possibilités des effets de rejet et de halo.

f. Le canal de transmission utilisé

Certains canaux, plus que d’autres, réduisent les intermédiaires et donc les occasions de
filtrage. C’est le cas des courriels, lettres et notes quand ils sont copiés directement {
plusieurs personnes.

g. La culture d’entreprise

La culture d’entreprise peut encourager ou décourager le filtrage { travers le type de


comportement encouragé, au regard notamment du phénomène de la peur ou de la
sauvegarde de l’intérêt général et de la défense des intérêts personnels (conflit
d’intérêts).

13.3.2. La mémorisation insuffisante

Il a en effet été constaté que 30 % de l’information contenue dans les communications


verbales étaient perdus à chaque transmission, tandis que les employés ne mémorisent
que 50 % de l’information qui leur est communiquée verbalement.

13.3.3. La méfiance envers le communicateur

Certains supérieurs sont connus pour leurs fréquents changements et leurs contrordres
dus à des jugements hâtifs, à des termes mal choisis ou tout simplement à de mauvaises
décisions. Leurs subordonnés en arrivent ainsi { remettre { plus tard l’application du
contenu de leurs communications ou { agir en tenant compte d’un revirement éventuel
de leur part.
13.3.4. L’évaluation prématurée
191

Les gens ont généralement l’habitude de s’en tenir aux premiers propos d’une
communication, { croire qu’ils ont compris la totalité du message sur cette base au lieu
de rester attentifs et réceptifs jusqu’{ la fin de la communication. Ils ont alors tendance {
faire des objections et à formuler des réponses soit ouvertement, soit intérieurement
avant que la communication ne soit entièrement terminée.

13.3.5. Les omissions volontaires et involontaires

Parfois, on oublie de transmettre les messages essentiels, soit par volonté de dissimuler,
soit par paresse en remettant à plus tard ce qui peut être fait immédiatement, soit
encore du fait que l’on suppose que tout le monde sait.

13.3.6. La perception sélective

Lors de l’étape du décodage, le récepteur ne perçoit pas tel quel le message qui lui est
transmis par l’émetteur, mais l’interprète à travers le prisme de sa subjectivité, c.à.d. en
fonction de ses caractéristiques personnelles (besoins, motivations, expériences,
capacités, préjugés ou croyances).

13.3.7. Les émotions négatives

C’est l’humeur négative du récepteur au moment de la réception du message (colère,


tristesse, stress, déprime,…) et qui a un impact négatif sur son interprétation dudit
message. Ainsi, des fortes émotions ont tendance { biaiser l’efficacité du message et {
affecter la lucidité du récepteur.

13.3.8. La sémantique

Ici, on se réfère au contenu et à la structure du message qui peuvent être caractérisés


par :

a. Un vocabulaire inadapté

En effet, les mots n’ont pas la même signification d’une personne { l’autre : cette
signification dépend des caractéristiques de chaque individu, notamment de son âge, de
son éducation, de sa formation, de sa culture, de son origine, de son expérience ou de sa
position hiérarchique. Ainsi, la signification que leur donne l’émetteur n’est pas
forcément celle que leur donne le récepteur. Ainsi donc, l’usage d’une langue commune
n’implique pas l’usage d’un langage commun.

b. Le manque de clarté et de cohérence du message

Certains messages sont vagues, obscurs, incohérents, faits avec des mots maladroits,
répétitifs, ou comportent des explications insuffisantes. D’où, un manque de clarté et de
précision.
192

c. Une mauvaise structuration des idées

Il arrive que les idées ne s’enchaînent pas de façon logique en suivant les étapes d’un
syllogisme. D’où difficulté pour le récepteur d’établir une relation de cause { effet.

13.3.9. L’inadéquation des signaux non verbaux

Dans une communication verbale, on peut enregistrer deux faits susceptibles de


constituer des obstacles à la communication :

- l’émetteur utilise une intonation de la voix trop élevée, au point que le récepteur se
sent en position d’accusé, se met sur la défensive et ne prête plus attention au
message, son seul souci étant de se défendre ;
- l’émetteur a des mouvements désordonnés du corps, au point que le récepteur a du
mal { les interpréter du fait qu’ils manquent d’harmonie et véhiculent des
significations contradictoires.

13.3.10. La lenteur administrative

C’est un ensemble de freins { la communication imputable { un excès de bureaucratie


(règles trop strictes { appliquer, nombreux échelons { respecter,…).

13.3.11. L’inefficacité de l’organisation formelle

Dans une organisation, l’information peut circuler de bas en haut (subalterne –


supérieur), de haut en bas (supérieur – subalterne) ou horizontalement (entre agents de
même niveau hiérarchique) par le truchement de la structure formelle. Mais il arrive
parfois qu’une information ne puisse pas convenir au processus formel de transmission
(canal formel), d’où la nécessité d’utiliser l’organisation informelle (canal informel) pour
obtenir ou transmettre une information adéquate et nécessaire à la coordination des
activités de l’organisation.

13.3.12. La surcharge de l’information

Une organisation est un système social et tout système social développe, en son sein et à
sa périphérie, un volume très important des données qui sont, soit reçues, soit
transmises par les membres du système.

Etant donné que toute personne a une capacité forcément limitée de traitement de
l’information, on parlera de surcharge de l’information pour qualifier une situation
caractérisée par une quantité d’informations destinées au récepteur, mais qui dépasse
sa capacité de traitement. Il peut s’agir de courriels (notamment après une période
d’absence pour cause de congé, de vacances, de mission, d’étude ou de maladie),
193

d’appels téléphoniques, de télécopies, de lettres, de notes, de publications


professionnelles, de conférences,….

Devant une telle situation, le récepteur est tenté d’utiliser un certain nombre de
pratiques inappropriées qui ont comme conséquences la perte de l’information et de son
efficacité. Il s’agit notamment :

- de la codification : elle consiste à développer des normes de sélection de


l’information pour ne retenir que ce qui est particulièrement important ou pertinent
et donc { négliger une partie de l’information en omettant de la traiter (refus d’en
prendre connaissance ou tout simplement d’y prêter attention) ;
- du traitement inadéquat de l’information : il consiste soit à retarder le traitement de
l’information de façon permanente, soit { filtrer une partie de l’information en
fonction de son habileté à la capter ou en fonction de ses propres normes de
sélection.

13.4. Les stratégies d’amélioration de l’efficacité de la communication

Pour améliorer l’efficacité de la communication, on peut recourir aux sept stratégies ci-
après :

13.4.1. L’utilisation du feed-back

Beaucoup de problèmes de communication sont dus à des malentendus qui peuvent être
éliminés par le truchement du feed-back verbal ou non verbal (voir dernière étape du
processus de communication). Pour ce faire, on peut :

- poser des questions au récepteur pour s’assurer qu’il a bien compris le message ;
- demander au récepteur de reformuler le message à sa façon ;
- être attentif aux réactions de ses interlocuteurs dans le cas d’une communication
verbale (regards, signes corporels, inattention,…).

13.4.2. La simplification du langage

Il faut utiliser des termes que le récepteur peut aisément comprendre en se mettant au
niveau de son langage (choix du vocabulaire et structure du message). Il faudra
notamment éviter d’utiliser un jargon ésotérique propre { une profession ou à un cercle
dans des messages destinés à des personnes qui ne font pas partie de cette profession ou
de ce cercle (tel que le jargon propre aux médecins, aux économistes, aux juristes, aux
ingénieurs,… quand on s’adresse { une presse non spécialisée).

13.4.3. L’écoute active

L’écoute active est une attitude attentive et réceptive au message qu’on entend afin d’en
capter toute la substance et tout le sens sans jugement ni interprétation prématurée.
C’est donc le fait de faire l’effort pour comprendre tout le sens d’un message en évitant,
194

pendant que l’on écoute, soit de porter un jugement sur-le-champ, soit de réfléchir à la
réponse que l’on va donner.

Ceci découle du fait qu’il y a une très grande différence entre « entendre », qui est une
attitude passive, et « écouter », qui est une attitude active. Ainsi, écouter est plus fatigant
qu’entendre et peut même être plus fatigant que parler : il demande donc plus de
concentration.

L’écoute active est facilitée quand on ressent de l’empathie envers l’émetteur, c.à.d.
quand on se met à la place de ce dernier. A cet effet, plusieurs attitudes et moyens
peuvent être adoptés pour développer l’écoute active et témoigner de son empathie
envers l’émetteur :

- rechercher le regard de l’orateur : cela permet, d’une part, de focaliser son attention
sur le message et de réduire la probabilité de se laisser distraire, et, d’autre part, de
ne pas montrer son désintérêt pour l’orateur et de l’encourager ;
- avoir des signaux non verbaux approbateurs : il s’agit de faire des hochements de
tête approbateurs et d’avoir une expression adéquate du visage pour montrer {
l’orateur que l’on est attentif { ce qu’il dit ;
- éviter des actes et gestes susceptibles de distraire l’orateur ou de montrer son ennui
(grimacer, regarder sa montre, feuilleter un document, triturer son stylo, dessiner,
téléphoner ou parler au voisin) ;
- poser des questions : cela permet, d’une part, de montrer { l’orateur qu’on l’a bien
compris, et, d’autre part, de clarifier les idées et de vérifier sa compréhension du
message (feed-back) ;
- reformuler { sa manière les propos de l’orateur : comme pour l’attitude précédente,
c’est un moyen de vérifier sa compréhension du message (feed-back) ;
- éviter d’interrompre l’orateur : il s’agit de laisser l’orateur terminer son
raisonnement avant de réagir et de ne pas lui donner l’impression de deviner où il
veut en venir ;
- éviter de parler en même temps que l’orateur, car il est impossible d’écouter et de
parler en même temps.

13.4.4. La gestion de ses émotions négatives

Il faut savoir ressentir ses émotions négatives et s’abstenir de communiquer tant que
l’on n’a pas recouvré son calme, car les émotions ont un effet perturbateur sur la
communication tant du point de vue de l’émission (on s’exprime très souvent de façon
peu claire sur la forme et de façon inadéquate sur le fonds) que du point de vue de la
réception (on risque de mal interpréter le message reçu). Au besoin, le manager doit
195

sensibiliser ses subalternes { l’aider { s’abstenir de communiquer avant d’avoir


recouvré sa sérénité102.

13.4.5. La recherche de l’harmonie entre signaux verbaux et non verbaux

Etant donné que, dans le processus de communication verbale, la gestuelle et


l’intonation (signaux non verbaux) sont plus importantes que les mots prononcés
(signaux verbaux), il faut faire en sorte que les deux puissent s’harmoniser.

13.4.6. L’encouragement { des communications horizontales

Quand on parle de communication, on a tendance à privilégier les relations verticales


(supérieur-subalternes ou subalternes-supérieur). Cependant, il faut encourager les
canaux de communication entre employés non liés par des relations hiérarchiques, c.à.d.
entre employés appartenant à des directions ou des services différents, afin de créer des
communications directes et ainsi éviter la longueur des filières formelles de
communication, lesquelles sont autant d’occasions de filtrage de l’information.

Mais, pour que ce processus de communication horizontale puisse fonctionner


convenablement, il faut que :

- tous les supérieurs puissent encourager ces relations horizontales ;


- les subalternes puissent s’abstenir de prendre des décisions et des engagements qui
ne relèvent pas de leur compétence ou de leur autorité ;
- les subalternes puissent tenir leurs supérieurs informés de leurs activités
interdépartementales.

Il faut cependant souligner le fait que ces communications horizontales ne sont pas
toujours faciles dans la mesure où la départementalisation favorise l’intolérance, l’esprit
de rivalité, bref ce que l’on pourrait appeler « les loyautés des cliques » ou « l’esprit de
clocher » qui poussent certains supérieurs à considérer la partie de la structures sous
leur autorité (et donc aussi les subalternes qui en font partie) comme un bien privé
personnel.

13.4.7. La mise en place de canaux spécialisés

Un des moyens adéquats de faire face { la surcharge de l’information est de mettre en


place des canaux spécialisés { l’intérieur de la structure organisationnelle de
l’entreprise, { travers la décentralisation de l’autorité, le regroupement et l’éclatement
des activités, la mise sur pied des systèmes d’information conçus pour servir { des fins
spécifiques (RH, R&D, marketing, finances, approvisionnements ou production).

Ainsi donc, l’un des aspects les plus importants de la gestion des organisations consiste {
élaborer des réseaux de communication et { s’assurer que l’information pertinente est
bien transmise aux personnes concernées et au moment opportun.

102
Voir point 14.4.4. du chapitre 14 sur l’intelligence émotionnelle.
196

13.8. L’encouragement des agents { la communication

Il faut favoriser les communications au sein des équipes (entre subalternes et


supérieurs, ainsi qu’entre les agents eux-mêmes) à travers notamment :

- la formation des agents à la communication ;


- la mise en place des groupes d’expression et de progrès avec organisation des
réunions périodiques pour les échanges ;
- la prise en compte des idées émises par les agents et leur valorisation (boîtes à
suggestions) ;
- l’évolution du style de commandement en passant d’une autorité centrée sur le
supérieur vers une autorité de régulation centrée sur les subalternes ;
- l’encouragement des communications ascendantes (des subalternes vers le
supérieur) ;
- la diffusion de l’information (notes circulaires, revues de la presse spécifique, bilan
social, boîtes { suggestions, affichage, journal d’entreprise,…) ;
- l’utilisation des moyens technologiques modernes : films sur l’entreprise et NTIC
(intranet, extranet, internet, vidéoconférence, messagerie électronique,…).

13.5. Les compétences du manager en matière de négociation

Dans le cadre de la communication, le manager doit pouvoir développer un certain


nombre de compétences qui conditionnent son efficacité. Il s’agit notamment de l’écoute
active, du feed-back, de l’autonomisation/responsabilisation et des compétences en
négociation. Etant donné que les trois premières compétences ont déjà été abordées et
que nous allons revenir plus tard sur la problématique du feed- back103, nous nous
limitons à développer le point sur les compétences en négociation.

13.5.1. La définition et l’importance

La négociation est le processus par lequel deux ou plusieurs parties ayant des vues
opposées sur un sujet donné, tentent d’aboutir { un accord.

Les compétences en matière de négociation sont importantes dans la mesure où les


managers passent une bonne partie de leur temps à négocier sur les conventions
collectives, les salaires, les conflits de travail, les prix ou les conditions commerciales.

13.5.2. Les types de stratégies de négociation

On peut distinguer deux types de stratégies de négociation, la négociation distributive et


la négociation intégrative.

103
Voir point 15.2.5. du chapitre 15 sur la préparation et l’organisation du feed back.
197

a. La négociation distributive

C’est une négociation { sommes nulles dans laquelle tout gain d’une partie, se traduit
par une perte pour l’autre (les autres) partie(s). Il s’agit donc de déterminer la part du
gâteau qui reviendra { chaque partie, gateau que l’on suppose ne pouvoir être agrandi.
C’est le cas notamment de la négociation sur les prix (recette pour l’un et dépense pour
l’autre) ou sur les salaires (gain pour l’un et charge pour l’autre).

Dans une négociation distributive où les parties sont dans une logique de divergence
d’intérêts, chaque partie définit sa zone d’aspiration qui est délimitée par deux types
d’objectifs : son objectif souhaitable ou cible et son objectif minimal ou point de
résistance. Ainsi, si les zones d’aspiration des différentes parties se chevauchent, elles
vont délimiter un espace dit « zone de négociation » ou « zone d’accord », et chaque
partie sortira gagnante de la négociation. Par contre, si cette zone d’accord est
inexistante, soit qu’il y aura accord et une partie en sortira nécessairement perdante,
soit qu’il n’y aura pas accord entre les parties.

Schéma 15 : Illustration de la négociation distributive

Légende :
Zone d’aspiration de la 1 : objectif souhaitable de la partie A
Partie A 2 : objectif minimum ou point de
Zone 3 résistance de la partie B
1
d’accord 3 : objectif minimum ou point de
résistance de la partie A
Zone d’aspiration de la
4 : objectif souhaitable de la partie B
Partie B
2 4 2 à 3 : zone d’accord ou de négociation

Source : Adapté de Robbins S. & al., op. cit., p. 419.


Ainsi, dans une négociation distributive, chaque partie cherche que l’autre puisse
accepter son objectif souhaitable ou qu’elle s’en approche le plus possible. Pour ce faire,
elle va déployer trois tactiques possibles :

- soutenir que son objectif est honnête et non celui de la partie adverse ;
- persuader la partie adverse qu’elle n’a aucune chance d’atteindre son objectif
souhaitable et qu’elle a donc intérêt { trouver un compromis ;
- tenter d’émouvoir la partie adverse pour qu’elle accepte un accord favorable { ses
intérêts par générosité.

b. La négociation intégrative
198

C’est la négociation dans laquelle il existe une possibilité d’accord qui ne lèse aucune des
parties et qui est donc susceptible de satisfaire entièrement toutes les parties : chaque
partie en sort, quelle que soit l’issue, avec le sentiment d’avoir emporté une victoire. Tel
est le cas d’une négociation qui porterait sur les garanties pour un prêt : les deux parties
peuvent facilement arriver { se mettre d’accord sur une garantie que l’emprunteur peut
trouver et que le prêteur peut accepter. C’est ainsi qu’une négociation intégrative est
toujours préférable à une négociation distributive.

C’est pourquoi, le manager doit toujours tout faire pour essayer de transformer une
négociation a priori distributive en une négociation intégrative. Prenons le cas de la
négociation sur les salaires, qui est un cas patent de négociation distributive : elle peut
cependant être transformée en une négociation intégrative si la Direction Générale
accepte les exigences des travailleurs et si, en contrepartie, ceux-ci acceptent une
augmentation de leurs objectifs de productivité ou de leur temps de travail pour
compenser le surplus du salaire qui pose problème à la Direction Générale.

Cependant, la négociation intégrative suppose une communication honnête des


informations entre les parties, une confiance réciproque et le désir de maintenir une
certaine flexibilité. Dans le cas contraire, on tombe dans une négociation distributive.

13.5.3. Les stratégies pour améliorer les compétences de négociation

On peut retenir cinq stratégies possibles pour améliorer les compétences en négociation
du manager :

- avoir une très bonne connaissance de son ou de ses interlocuteurs : il faut réunir un
maximum de renseignements sur son ou ses interlocuteurs (leurs intérêts, leurs
objectifs, leurs mandants, leurs points forts, leurs points faibles, leurs stratégies,…)
pour mieux comprendre leurs comportements, prévoir leurs réactions et pouvoir
ainsi identifier les solutions acceptables par eux ;
- se concentrer sur l’objet du problème et ne pas attaquer son interlocuteur, car ce
sont ses idées ou sa position qu’il faut attaquer et non sa personne ;
- ne pas accorder beaucoup d’importance aux offres initiales qui sont souvent
excessives ou utopiques, et qui sont destinées juste à lancer la discussion ;
- privilégier, autant que possible, les solutions mutuellement avantageuses en créant
les conditions d’une négociation intégrative : instaurer un climat de confiance,
écouter l’autre, poser des questions, ne pas se tenir sur la défensive, éviter les mots
ou les formules susceptibles de fâcher ;
- demander l’aide d’un tiers, en cas de besoin : il s’agira, soit d’un conciliateur ou
médiateur qui a pour tâche d’aider les parties { trouver une solution par elles-
mêmes, soit d’un arbitre qui a pour tâche d’écouter les parties et de leur dicter la
solution.
199

13.6. Les NTIC et l’amélioration de l’efficacité de la communication

Les nouvelles technologies de l’information et de la communication (NTIC) ont


fortement contribué { l’amélioration de l’efficacité de la communication tout en posant
de nouveaux problèmes.

En effet, elles ont eu un impact décisif sur les méthodes de communication dans la
mesure où :

- elles améliorent le suivi des performances en facilitant le feed-back ;


- elles permettent d’être mieux renseignés et donc d’accélérer la prise de la décision ;
- elles favorisent la collaboration et l’échange/partage des informations ;
- elles permettent { chaque membre de l’organisation d’être accessible en
permanence, dimanche et jours fériés compris.

Elles ont connu quatre développements majeurs qui ont eu un impact sur la
communication managériale, à savoir :

13.6.1. Les réseaux informatiques

L’établissement des réseaux informatiques consiste { relier les ordinateurs d’une


organisation à travers une plate-forme matérielle et logicielle compatible, permettant
ainsi aux membres de l’organisation de communiquer entre eux et d’accéder {
différentes informations où qu’ils soient (au bureau, { la maison, en déplacement, même
{ l’étranger).

Il s’agit des courriels, des messageries instantanées, des boîtes vocales, des
télécopies/fax, de l’échange des données informatisées, de l’intranet (réseau interne aux
membres de l’organisation), de l’extranet (réseau commun aux membres accrédités de
l’organisation et { certains partenaires de l’organisation, tels que des clients, des
fournisseurs, des distributeurs, des concessionnaires) et du Skype.

13.6.2. Les technologies sans fil

Les technologies sans fil se font sans connexion physique, c.à.d. à travers des émetteurs à
micro-ondes, des satellites, des antennes radio ou des faisceaux infrarouges. Elles ont
permis l’utilisation des téléphones mobiles, des ordinateurs portables, des tablettes, des
bippers,… qui permettent d’envoyer et de recevoir des messages en dehors du bureau et
partout dans le monde.

13.6.3. Les bases des données

Notre société est devenue une société d’information avec la prolifération des sources
d’information et le développement des NTIC. Il s’est dès lors posé le problème du
200

stockage et du traitement de cette information au regard de son abondance. D’où,


l’apparition des bases des données externes qui ont plusieurs avantages, { savoir la
rapidité, l’étendue du champ, l’interactivité et la complexité. On peut distinguer deux
types de bases des données externes, à savoir les bases des données accessibles en ligne
(sur contrat ou abonnement) et les bases des données autonomes (sur CD-ROM).

13.6.4. Le management du savoir ou la gestion des connaissances

La mise en place des bases des données ne suffit pas, encore faut-il savoir comment
utiliser les informations qu’elles contiennent de la façon la plus efficace possible, c.à.d.
pour permettre { l’entreprise d’atteindre ses objectifs.

En effet, le savoir est devenu un enjeu décisif de la compétitivité, d’où la nécessité


d’ordonner les connaissances accumulées dans les bases des données en fonction des
besoins de l’entreprise et de les diffuser auprès des membres de l’organisation qui
doivent les utiliser.

C’est cette nécessité qui a été { l’origine de la naissance d’une nouvelle fonction au sein
de l’entreprise, { savoir le « management du savoir » ou « gestion des connaissances »
(knowledge management en anglais).

En plus des informations accumulées dans les bases des données, les membres de
l’organisation aussi accumulent énormément de connaissances dans l’exercice ou en
dehors de l’exercice de leurs fonctions (formations, séminaires, expositions, lectures,
internet,…).

Ainsi, nous pouvons définir le management du savoir (gestion des connaissances ou


knowledge management) comme un ensemble de processus qui ont pour but une
meilleure exploitation des connaissances accumulées tant par l’organisation que par ses
membres, et qui mettent en œuvre le développement d’une culture permanente
d’apprentissage dans laquelle les membres de l’organisation accumulent des savoirs et
les partagent avec leurs collègues. Autrement dit, c’est le mécanisme qui permet {
l’organisation de faire profiter tous ses membres des connaissances accumulées par elle-
même et par chacun de ses membres à travers une démarche en trois étapes :

- accumulation du savoir ;
- traitement et gestion du savoir ;
- communication du savoir à tous à travers les NTIC.

13.7. Le système d’information


201

Les NTIC nous amènent tout naturellement { nous pencher sur le système d’information
au sein de l’entreprise, d’autant plus que nous venons déjà de voir que ce système est
très important dans les informations que vont s’échanger les membres de l’organisation.

13.7.1. La définition et l’enjeu d’un système d’information

Un système d’information est un ensemble organisé des ressources (procédures,


logiciels, données, matériel et personnel) qui permet { une organisation d’acquérir, de
stocker, de traiter et de communiquer des informations de toute nature sous diverses
formes (données chiffrées, graphiques, figures, textes, images, sons, dessins,…).

Comme tout système, il a une finalité et doit donc avoir une certaine cohérence. De
même, il comporte différents niveaux : individuel, collectif, organisationnel et inter-
organisationnel.

Un système d’information peut ainsi constituer, soit un avantage compétitif décisif


(quand il fournit une information bonne et suffisante), soit une menace pour la survie de
l’entreprise (quand il fournit une information mauvaise et/ou insuffisante). C’est la
raison pour laquelle les entreprises développent de plus en plus une nouvelle fonction
de renseignement ou de veille qui a pour objet de saisir toute information interne ou
externe, technique, financière ou commerciale susceptible de permettre { l’entreprise
d’élaborer ou de modifier sa stratégie, en exploitant toutes sortes de sources (banques
de données, brevets, rapports économiques et financiers, notes des commerciaux,…). La
maîtrise de l’information est devenue donc un enjeu stratégique majeur pour
l’entreprise { tel point que l’on désigne en son sein, et ce, au niveau le plus élevé de la
Direction Générale, des personnes chargées de la veille et du système d’information.

13.7.2. Les fonctions d’un système d’information.

Un bon système d’information est sensé remplir quatre fonctions, { savoir l’acquisition,
le stockage, le traitement et la communication des informations.

a. L’acquisition des informations

L’information peut provenir, soit de l’entreprise, soit de son environnement. On peut


ainsi avoir :

- des informations internes : ce sont celles qui sont émises et produites par différents
services de l’entreprise (bilans, documents, rapports, notes,…) ;
- des informations externes : ce sont celles qui proviennent de l’environnement direct
de l’entreprise (clients, fournisseurs, banques,…) et de son environnement lointain
(concurrents, centres de recherche, investisseurs, bourses, administrations,…).
202

b. Le stockage des informations

Il s’agit de conserver les informations provenant de ces différentes sources, ce qui


suppose les deux opérations ci-après :

- la saisie des informations : c’est leur enregistrement sur un support en vue de leur
traitement, enregistrement qui peut être manuel ou automatique, direct ou différé
(utilisation d’un support intermédiaire) ;
- la mise en fichier : un fichier est un ensemble d’articles de même nature issus, soit
d’un traitement, soit en attente d’être traités, l’ensemble des fichiers pouvant être
intégrés en un seul fichier commun ou base des données.

c. Le traitement des informations

Il s’agit de procéder { une suite d’opérations (reproduction, calcul arithmétique ou


logique, classement) permettant de transformer les données de base en résultats. Ce
traitement des informations peut se faire :

- soit en temps réel, c.à.d. que les informations sont traitées une à une au fur et à
mesure qu’elles sont générées : il s’agit d’un traitement unitaire avec un temps de
réponse très court (cas de la comptabilité informatisée) ;
- soit de façon différée c.{.d. que les informations sont d’abord accumulées pendant
une période donnée, puis traitées en une seule fois : il s’agit d’un traitement par lots
avec un temps de réponse assez long (cas de la paie ou de la comptabilité manuelle).

d. La communication des informations

Il s’agit de la diffusion de l’information. Elle implique des choix qui doivent être faits à
différents échelons de responsabilité. Il s’agit notamment :

- des problèmes stratégiques qui concernent les informations susceptibles d’être


diffusées et leurs destinataires : ces problèmes relèvent tout naturellement de la
Direction Générale ;
- des problèmes techniques qui concernent les moyens à utiliser pour la diffusion des
informations traitées : leur solution relève du responsable du système de
l’information, lequel responsable puisera dans différentes possibilités qu’offrent
aujourd’hui les NTIC.

13.7.3. Les qualités d’un bon système d’information

L’information sert { la prise des décisions. D’où, le système d’information { mettre en


place doit tenir compte de la nature des décisions à prendre (décisions stratégiques,
203

tactiques et opérationnelles). Plus généralement, un bon système d’information doit


pouvoir répondre aux neuf qualités ci-après :

- fiabilité : l’information doit être exacte, complète et objective, d’où la nécessité de


son contrôle, notamment le contrôle de vraisemblance ;
- actualité : l’information doit être constamment mise { jour pour qu’elle puisse garder
son intérêt, car elle est une denrée périssable dans la plupart des cas ;
- utilité : l’information doit être adaptée aux besoins de son utilisateur ou de son
destinataire ;
- intelligibilité : l’information doit être comprise par son utilisateur ou son
destinataire, elle doit donc être adaptée à son langage du point de vue tant de la
forme que du fonds ;
- précision : le système d’information doit pouvoir fonctionner avec une marge
d’erreur la plus faible possible ;
- rapidité : l’information doit être fournie dans les délais par rapport aux besoins de
son destinataire ou de son utilisateur ;
- régularité : le système d’information doit être { même de donner les informations en
respectant la périodicité nécessaire au bon fonctionnement des services (sur une
base quotidienne, hebdomadaire, mensuelle, trimestrielle, semestrielle ou annuelle
selon les cas) ;
- sécurité : le système d’information ne doit pas perdre ou biaiser l’information, de
même qu’il doit respecter les niveaux de confidentialité définis ;
- protection : le système d’information doit disposer des verrous de sécurité
nécessaires contre toutes sortes d’agressions (vols, incendies, dégâts des eaux,
attaques informatiques,…)

13.7.4. Le système d’information optimal

De ce qui précède, nous pouvons dire que le système d’information sera optimal si les
conditions ci-après sont remplies :

- standardisation des procédures de saisie et de traitement de l’information primaire,


ce qui permet : (i) de réduire les délais et les coûts de production de l’information ;
(ii) d’assurer la fiabilité et la régularité du système ;
- traitement de l’information au niveau le plus proche possible de l’exécution ;
- transmission à la hiérarchie des seules informations importantes, anormales ou
exceptionnelles ;
- capacité d’élaborer un tableau de bord périodique { mettre { la disposition de tous
les utilisateurs, y compris la hiérarchie ;
- capacité de trier et de condenser les informations, ce qui permet de ne pas
submerger les centres de décision.
204

CHAPITRE 14 : LE LEADERSHIP

En s’acquittant de leurs fonctions de Planification, d’Organisation, de Direction et de


Contrôle, les dirigeants obtiennent des résultats certains. Mais ceux-ci seront largement
inférieurs si les dirigeants n’y ajoutent pas un élément additionnel, { savoir un
leadership efficace.

Le leadership implique nécessairement la présence des suiveurs : c’est le fait que des
personnes consentent à être influencées par une autre personne qui fera de cette
dernière un leader. Or, les individus ont tendance à suivre ceux en qui ils voient un
moyen de satisfaire leurs propres désirs et besoins. D’où, les leaders peuvent non
seulement réagir aux facteurs de motivation, mais également les susciter ou même les
atténuer. Ainsi donc, leadership et motivation sont deux notions étroitement liées.

Par conséquent, les managers doivent tout mettre en œuvre pour apparaitre comme des
leaders, c.à.d. comme des personnes capables de provoquer des évènements, de fédérer
des énergies, de susciter la mobilisation et de créer une atmosphère de confiance.

14.1. Le leadership et le leader

14.1.1. La définition et l’importance du leadership

Le leadership est l’habilité { inspirer ses subalternes, c.{.d. { les entrainer { consacrer
toutes leurs aptitudes { la réalisation des objectifs de l’organisation. Il consiste donc {
influencer les membres d’une organisation pour qu’ils puissent consacrer tous leurs
efforts { la réalisation des objectifs de l’organisation, et ce, avec zèle et confiance.
205

Le leadership implique donc influence du leader sur les suiveurs : le leader agit de façon
à aider, mieux, à inspirer les autres à atteindre les objectifs leur assignés en utilisant au
maximum les capacités de chacun.

Comme nous le verrons plus loin, cette habilité { inspirer les subalternes n’est pas
déterminée par la satisfaction de leurs besoins personnels, comme c’est le cas avec la
motivation. En fait, tout leader possède des qualités de séduction et de charme qui
suscitent la loyauté, la dévotion et une forte volonté d’épouser ses désirs. C’est en fait le
phénomène par lequel les gens accordent leur appui à leur « champion ». C’est la raison
pour laquelle un vrai leader, même défait ou disparu, ne sera jamais ni lâché ni renié par
ses disciples.

La nécessité de développer l’art du leadership est dictée, soit par le manque de


motivation, soit encore par la présence des dirigeants incompétents. Tous ces éléments
font que l’homme au travail n’agira pas toujours avec le niveau de zèle et de confiance
jugé suffisant.

3.1.2. Les relations entre un leader et un manager

Comme on le voit, il existe à la fois une différence et un lien entre un manager et un


leader dans la mesure où :

- Un manager est un décideur : il exerce des fonctions managériales (de planification,


d’organisation, de direction et de contrôle) du fait qu’il a été nommé { un poste de
responsabilité qui lui confère une autorité légitime. Celle-ci lui confère un pouvoir
réel de récompense (positive ou négative) qui lui permet d’influer efficacement sur le
comportement de ses subalternes, c.à.d. de les motiver.
- Un leader est celui qui sait entraîner et influencer les autres : il peut le faire soit dans
le cadre d’une autorité formelle qui lui a été conférée, soit en dehors du cadre défini
par une autorité formelle. Par conséquent, le leader peut être un manager investi
d’une autorité formelle ou tout simplement une personne qui émerge par elle-même
du groupe auquel elle appartient.

Ainsi, l’idéal est que tout manager (celui qui a été choisi pour s’acquitter des fonctions
managériales de planification, d’organisation, de direction et de contrôle) soit aussi un
leader (celui qui est capable d’influencer les autres et d’être suivi par eux).

De ce qui précède, nous pouvons définir le leader comme une personne qui, d’une part,
dispose d’une autorité formelle de manager, et, d’autre part, se montre capable
d’influencer les membres de son organisation afin de mobiliser leurs énergies pour la
réalisation de l’objectif assigné { l’organisation.
206

D’où les deux questions fondamentales qui consistent à savoir : (i) ce qui fait l’efficacité
d’un leader ; (ii) s’il existe un style de leadership qui soit le meilleur.

Pour nous permettre de répondre { ces deux questions, nous allons d’abord passer en
revue les différentes théories de leadership en distinguant les théories classiques de
leadership, les théories contingentes de leadership et les approches dites pragmatiques
de leadership.

14.2. Les théories classiques de leadership

14.2.1. Les théories et les approches des traits de personnalité ou de


caractère

Ces théories ou ces approches sont apparues dans les années 1930, suscitant l’intérêt
d’un très grand nombre de chercheurs dont les travaux ont fait l’objet d’un bon résumé
de Ralph M. Stogdill104.
Ces théories ont consisté à identifier les traits de caractère que possèdent les leaders et
que n’ont pas les non-leaders, à savoir :
- le dynamisme : fort degré d’implication, désir d’autoréalisation ou
d’accomplissement, ambition, énergie, initiative, sens du travail ;
- l’assurance : confiance en soi pour pouvoir convaincre les autres de la justesse de ses
objectifs et décisions ;
- la propension à diriger : désir de diriger les autres, d’avoir une influence sur les
autres et d’exercer des responsabilités ;
- l’honnêteté et l’intégrité : capacité de nouer des relations de confiance avec les
suiveurs en se montrant honnête et intègre, et en conformant ses actes à ses paroles ;
- l’extraversion : énergie, vitalité, enthousiasme, sociabilité, adaptabilité, ouverture
aux autres ;
- l’intelligence : capacité de collecter, de synthétiser et d’interpréter des grandes
quantités d’informations et capacité de partager leur vision des choses, d’aplanir les
difficultés et de prendre de bonnes décisions ;
- la compétence professionnelle : capacité à comprendre les problèmes techniques
pour pouvoir prendre les bonnes décisions et en comprendre les conséquences.

Si cette approche a permis d’identifier ces sept traits qui sont souvent associés { la
notion de leadership, elle n’a pas permis pour autant d’identifier les traits permettant de
différencier à coup sûr les leaders de ceux qui ne le sont pas, ni les leaders efficaces des
leaders inefficaces. En effet, force est de constater que tous les leaders ne possèdent pas
tous ces traits, tandis que beaucoup de personnes qui ne sont pas pour autant des
leaders, peuvent posséder la plupart de ces traits, sinon tous. En fait, ces traits ne font

104
Stogdill R., Personal Factors Associated With Leadership. A Survey of the Literature, in
Journal of Psychology, 25, 1948, pp. 335-371.
207

pas automatiquement d’une personne un leader, mais ils lui donnent juste plus de
chances de devenir un leader efficace.

Si certaines études ont effectivement indiqué des corrélations significatives entre


certains de ces sept traits et l’efficacité au leadership, lesdites corrélations n’en sont pas
pour autant convaincantes, dans la mesure où la plupart de ces soi-disant traits de
caractère n’étaient en fait que des modèles de comportement que l’on peut retrouver
chez un leader dans une situation donnée.

C’est pourquoi, il s’est avéré plus utile d’orienter les recherches vers l’étude des
comportements de leaders afin d’établir un lien entre certains comportements et la
capacité au leadership.

14.2.2. Les théories comportementales du leadership

Ces théories sont parties de l’idée suivante : s’il est possible d’étudier et d’identifier les
comportements des personnes cataloguées comme des leaders efficaces, on devrait donc
pouvoir former les managers à être des leaders efficaces et à améliorer leur efficacité
dans le leadership en leur demandant tout simplement de s’inspirer de ces
comportements. A cet effet, nous pouvons retenir cinq de ces théories
comportementales.
a. La théorie des styles de leadership

Kurt Lewin et ses collègues de l’Université d’Iowa105, ont identifié trois types de
comportements ou de styles de leadership :

- Le leader autocratique : il a tendance à centraliser l’autorité, { imposer ses méthodes


de travail, à prendre seul les décisions et à limiter la participation de ses subalternes.

- Le leader démocratique : il a tendance à impliquer ses subalternes dans le processus


décisionnel, à déléguer son autorité, à encourager la consultation dans la définition
des méthodes de travail et des objectifs, { motiver ses subalternes en s’appuyant sur
leurs réactions. A son tour, leader démocratique se subdivise en deux catégories :

- le leader démocratique consultatif : il écoute d’abord ses subalternes (leurs


opinions, leurs inquiétudes, leurs besoins,…) et ensuite prend seul la décision
finale ;
- le leader démocratique participatif : il fait participer ses subalternes à la prise
de la décision.

105
Lewin K. op. cit. ; Lewin K. et Lipitt R., An experimental approach of the study of
autocraty and democraty : a preliminary note, in Sociometry, 1, 1938, pp. 292-300.
208

- Le leader non interventionniste ou « laisser-faire » : il laisse à ses subalternes la


liberté de prendre des décisions et d’organiser leur travail, en leur fournissant les
éléments nécessaires à la prise de la décision et en répondant à leurs questions.

Sur base des études empiriques qui ont été menées, il s’est avéré que : (i) le style non
interventionniste était moins efficace que les deux autres ; (ii) le style démocratique est
meilleur que le style autocratique, car il implique une amélioration de la qualité du
travail et de la satisfaction des subalternes.

b. La classification des styles de direction

Robert Tannenbaum et Warren Schmidt106 ont essayé de répondre à la question de


savoir si les managers devaient dès lors adopter le style démocratique.

Pour cela, ils ont mis au point une échelle continue de comportements des leaders qui va
du leader autocratique (centré sur lui-même) au leader démocratique (centré sur
l’employé) et qui donne une classification en sept paliers (schéma n° 16) :

Schéma n°16 : Classification des styles de direction par Tannenbaum et


Schmidt

Style centré sur le supérieur Style centré sur le subalterne

Autocratique Démocratique Non interventionniste

Consultatif Participatif

Autorité du supérieur Liberté du subalterne

Style 1 Style 2 Style 3 Style 4 Style 5 Style 6 Style 7

Source : Adapté de CENECO, op. cit., p. 250 ; de Laurin P., Le management. Textes et cas,
McGrall Hill, Montréal, 1973, p. 566 ; de Robbins S. & al., op. cit., p. 352 ; et de Terry G. &
Franklin S., op. cit., p. 399.
Les différents styles ont la signification ci-après :

Tannenbaum R. et Schmidt W., How to choose a leadership pattern, in Harvard


106

Business Review, 36, March-April 1958, pp. 95-101.


209

- style 1 : le supérieur prend les décisions et les annonce (O.S.T., paternalisme) ;


- style 2 : le supérieur « vend » ses décisions ;
- style 3 : le supérieur présente ses idées et demande à chacun son avis ;
- style 4 : le supérieur présente une décision conditionnelle qu’il se déclare prêt {
changer si des arguments valables lui sont avancés ;
- style 5 : le supérieur présente le problème, obtient des suggestions et prend sa
décision ;
- style 6 : le supérieur définit les limites et demande au groupe de prendre une
décision { l’intérieur de ces limites (GPO, cogestion et cercles de qualité) ;
- style 7 : le supérieur laisse le groupe libre de choisir tant que certaines contraintes et
règles sont respectées (autogestion).

Pour savoir quel comportement adopter sur cette échelle continue, Tannenbaum et
Schmidt conseillent aux managers de prendre en considération les trois éléments ci-
après :

- leurs propres désirs, c.à.d. le style avec lequel ils se sentent le plus { l’aise ;
- les attentes des subalternes, tel que le désir d’assumer ou non des responsabilités ;
- la situation du moment (contraintes).

Ils sont ainsi arrivés { la conclusion que les managers doivent s’orienter vers un style
plus centré sur les employés comme moyen d’améliorer la motivation et le moral des
employés, la qualité des décisions, le travail d’équipe et la progression.

c. La théorie de la structuration et de la considération

Les chercheurs de l’Université d’Etat d’Ohio107 ont défini deux grandes catégories de
dimensions susceptibles de rendre compte de la plupart des comportements des leaders
tels que décrits par les employés, à savoir la structuration et la considération :

- La structuration : c’est la dimension qui mesure la volonté d’un leader de définir son
rôle et celui de ses subalternes en vue d’atteindre un objectif. Ainsi, un leader avec un
comportement élevé de structuration, confiera des tâches très précises à ses
subalternes (organisation du travail), attendra d’eux un niveau de performance
donné et le respect des délais (objectif). Ce concept de structuration est assez proche
de celui de la formalisation108.

107
Kerre S. et Schriesheim C.A., Psychometric properties of the Ohio State leadership scales,
in Psychological Bulletin, 81, 1974, pp. 756-765; Schriesheim C.A. et
Schriesheimtogdill R.S., Differences in factor structure accross three versions of the Ohio
State leadership, in Personnel Psychology, 28, 1975, pp. 189-206.
108
Voir point 9.3.2. du chapitre 9.
210

- La considération : c’est la dimension qui mesure la volonté d’un leader d’entretenir


des relations de travail caractérisées par une confiance réciproque et par le respect
des subalternes (leurs idées et leurs sentiments). Ainsi, un leader avec un
comportement élevé de considération, aidera les subalternes à résoudre leurs
problèmes personnels, se montrera amical, accessible et attentif (à leur confort, à
leur bien-être, à leur statut et à leur satisfaction).

Les recherches empiriques menées pour tester cette théorie, ont dégagé les résultats ci-
après :

- un leader montrant un degré élevé de structuration et un degré élevé de


considération, qualifié de « high-high », obtient souvent des performances et une
satisfaction plus élevée de la part de ses subalternes qu’un leader faiblement évalué
sur l’une et/ou l’autre de ces deux dimensions ;
- parfois, un comportement de forte structuration a comme conséquence un
accroissement du ressentiment, de l’absentéisme et des démissions ainsi qu’une
baisse de la satisfaction professionnelle pour les employés affectés à des tâches
routinières ;
- parfois également, une considération trop élevée peut avoir une influence sur
l’appréciation des performances du leader par sa propre hiérarchie.

d. La théorie de l’orientation vers l’employé et de l’orientation vers la


production

Les chercheurs de l’Université de Michigan visent le même objectif que leurs collègues
de l’Université d’Etat d’Ohio, { savoir identifier les caractéristiques comportementales
liées { l’efficacité des leaders. Ils ont ainsi identifié deux dimensions proches de la
structuration et de la considération, { savoir l’orientation vers l’employé et l’orientation
vers la production109 :

- le leader orienté vers l’employé est celui qui met l’accent sur les relations
interpersonnelles, accorde un intérêt particulier aux besoins de ses employés et
accepte les différences individuelles ;
- le leader orienté vers la production est celui qui privilégie l’aspect technique ou
productif du travail et ne se préoccupe que de la réalisation des tâches assignées au
groupe dont les membres sont considérés comme de simples vecteurs de cette
réalisation.

109
Khan R. et Katz D., Leadership practices in relation to productivity and morale, in
Cartwrightet D. et Zander A. (Dir.), Group dynamics : research and theory, 2ème édition,
Elmsford, New York, Paterson, 1960.
211

Les recherches empiriques ont montré que les leaders orientés vers l’employé
obtiennent une productivité et une satisfaction plus élevées des subalternes que les
leaders orientés vers la productivité.

e. La grille de management
Robert Blake et Jane Mouton110 ont fait une représentation en deux dimensions des
styles de leadership inspirés, d’une part, de la théorie de la structuration et de la
considération (Université d’Etat d’Ohio), et, d’autre part, de la théorie de l’orientation
vers l’employé et de l’orientation vers la production (Université de Michigan).

Ils ont ainsi formalisé une analyse des forces internes du dirigeant autour de deux
variables, { savoir le degré d’intérêt porté { la production (abscisse) et le degré d’intérêt
porté aux hommes (ordonné). Comme chaque axe comprend 9 valeurs possibles, ils ont
ainsi déterminé 81 styles de leadership possibles différents dont ils ont tiré 5 positions-
types constitués des 4 extrémités et du centre de la grille, positions-types qui sont
autant de repères extrêmes déterminant 5 zones d’évolution possibles :

- la position I. 1.1. caractérise le leader « laisser-faire » : (i) il n’accorde de l’intérêt ni {


la production ni aux hommes, et ne s’identifie pas { l’organisation ; (ii) il se contente
de faire un effort minimum et suffisant permettant d’obtenir l’exécution du travail
par ses subalternes dans le but de conserver sa place dans l’organisation ;

- la position II. 9.1. caractérise le leader « autocratique » : (i) il manifeste beaucoup


d’intérêt { la production en recherchant l’efficacité maximum par la mise en place
des conditions de travail conçues pour que l’élément humain interfère le moins
possible ; (ii) il manifeste peu d’intérêt pour les hommes, mais fait tout pour éviter
les conflits en consentant des conditions de travail minimum à ses subalternes ;

- la position III. 5.5. caractérise le leader de « compromis » : (i) il recherche des


résultats satisfaisants par un équilibre entre les impératifs de la production et le
maintien du moral des employés ainsi que de leur satisfaction ; (ii) ce faisant, il
n’arrive pas { exploiter totalement le potentiel de ses subalternes et celui de
l’entreprise ;

- la position IV. 1.9. caractérise le leader « social » : (i) il porte une grande attention
aux besoins des employés avec, par conséquent, un bon climat organisationnel et un
bon rythme de travail ; (ii) il cherche d’abord { être aimé par ses subalternes, même
si cela doit se faire au détriment de la production ;

- la position V. 9.9. caractérise le leader « intégrateur » : (i) il cherche à obtenir le


maximum de résultats sur le plan économique (production) et sur le plan social

110
Blake R. et Mouton J., Group dynamics : key to decision making, Houston, Gulf
Publishing Cy, 1961.
212

(satisfaction des subalternes) ; (ii) pour ce faire, il fait appel à la participation et à la


créativité de ses subalternes afin de susciter dans leur chef un sentiment de
responsabilité, de confiance et de respect.

Ces cinq positions déterminent donc un style plus ou moins autoritaire ou un style plus
ou moins participatif dans la mesure où, si le dirigeant porte plus d’intérêt { la
production qu’aux hommes, il aura tendance { avoir un style plus autoritaire, tandis que
l’inverse conduira { un style plus participatif. Ainsi, la zone d’évolution souhaitable est
celle qui commence au pont III.5.5. pour tendre vers le point V.9.9.

La grille managériale de Blake et Mouton n’évalue pas les résultats des 81 différents
styles : elle se limite à identifier les facteurs dominants de chaque style et à donner une
vision conceptuelle des différents styles.

14.3. Les théories de contingence du leadership

Les théories comportementales n’ont pas pu établir de façon formelle un lien direct
entre les schémas comportementaux et les performances des leaders, comme elles en
avaient l’ambition, du fait des résultats irréguliers enregistrés sur le terrain et qui
s’expliquent par les particularités de chaque situation. D’où, la nécessité d’intégrer les
facteurs situationnels ou de contingence pour mieux comprendre le phénomène.

Les théories de contingence partent du principe qu’un style n’est pas bon ou mauvais en
soi : son efficacité est fonction de son adéquation à une situation donnée. Autrement dit,
un style peut convenir à une situation et pas à une autre.

Ainsi, ces théories ont conclu que le leadership était, dans une large mesure, une
fonction de la situation dans laquelle émerge et fonctionne le leader, c.à.d. que ce sont les
situations particulières qui donnent naissance aux leaders (Adolphe Hitler dans
l’Allemagne brisée des années 1930, Franklin Roosevelt dans l’Amérique de la grande
dépression ou Mao Tsé Toung dans la Chine de l’après-guerre).

Tableau n° 6 : Grille management de Blake et Mouton

IV V
9
1.9 9.9
8

7
Intérêt pour les hommes

III.
4
5.5
3

1
213

I II
1.1 9.1
1 2 3 4 5 6 7 8 9
Intérêt pour la production

Source : Adapté de Bussenault C. et Pretet M., op. cit., p. 168 ; de CENECO, op. cit. p.
251 ; et de Terry G. & Franklin S., op. cit., p. 390.

C’est pourquoi, ces théories, dont nous retenons trois, se sont attelées { identifier les
éléments pertinents qui font partie de cette situation, c.à.d. les variables situationnelles
ou de contingence.

3.3.1. La théorie du leadership contingent

Fred Fiedler et ses collaborateurs de l’Université de l’Illinois ont intégré l’approche des
traits de caractères et l’approche situationnelle111. Ils ont dès lors proposé une théorie
de contingence du leadership d’après laquelle la capacité d’un manager { exercer une
influence sur les membres de son groupe, dépend de l’adéquation de son style ou de son
orientation avec trois éléments situationnels que sont la qualité de ses relations avec les
membres du groupe, la structuration de la tâche et le pouvoir réel lié à sa position
hiérarchique. En d’autres termes, cette théorie stipule que l’on devient leader non
seulement en vertu de ses attributs personnels, mais aussi en vertu de l’adéquation
entre ses attributs personnels et une situation donnée. Pour arriver à cette conclusion,
Fiedler a articulé son modèle en trois étapes principales :

a. Première étape : la détermination du style du manager.

Pour Fiedler, le style du manager est inné et immuable et sa détermination représente


un facteur-clé de son succès. Pour ce faire, il va utiliser le questionnaire du
« Collaborateur le Moins Apprécié » (C.M.A.), questionnaire basé sur 16 oppositions
d’adjectifs telles que plaisant-déplaisant, ouvert-méfiant, amical-hostile, efficace-
inefficace,…. Il va donc demander au manager dont on veut déterminer le style, de se
souvenir du collaborateur avec lequel il a le moins apprécié de travailler dans toute sa
carrière et de lui attribuer une note allant de 1 { 8 sur chacune des paires d’adjectifs du
questionnaire. Ainsi, si le manager trace un portrait globalement positif de ce
collaborateur (score C.M.A. élevé), Fiedler va diagnostiquer un style orienté vers les

Fiedler F., Leader attitudes and group effectiveness, Urbana, IL, University of Illinois
111

Press, 1958; Fiedler F., A theory of leadership effectiveness, Mc Graw Hill, New York,
1967.
214

relations humaines, et dans le cas contraire (score C.M.A. bas), il va diagnostiquer un


style orienté vers la tâche.

b. Deuxième étape : l’identification des facteurs situationnels

Pour cela, Fiedler identifie trois facteurs situationnels ou facteurs de contingence :

- les relations personnelles entre le manager et les membres du groupe (confiance et


respect témoignés par les membres du groupe envers le manager) qui peuvent être
bonnes ou mauvaises ;
- la structuration de la tâche (tâches très structurées ou peu structurées, décisions très
programmées ou peu programmées) qui peut être forte ou lâche ;
- le pouvoir lié à la position hiérarchique du manager (son influence sur le
recrutement, le licenciement, la discipline, la promotion ou l’augmentation du salaire
des membres du groupe) qui peut être élevé ou faible.

c. Troisième étape : l’évaluation de la situation

En associant ces trois variables situationnelles ou de contingence, on a huit possibilités


qui peuvent se présenter au manager (très favorable à très défavorable).

Tableau n° 7 : Différentes catégories du modèle de Fiedler

L Catégorie I II III IV V VI VII VIII


L Relations Mau Mau
Mau-
é Manager/ Bonn Bonn Mau- - -
Bonnes Bonnes vaise
g es es vaises vais vais
Subalt. s
e es es
n Structuration Fort Lâch Lâch
Forte Forte Lâche Lâche Lâche
d des tâches e e e
e Pouvoir lié au Faib Elev Faibl
Elevé Faible Elevé Faible Elevé
L poste le é e
é Maîtrise de la Très élevée
g situation Très faible
e Styles de
direction à T T T R R R R T
n
privilégier
d
e : T = style axé sur les tâches, R = style axé sur les relations humaines.
215

Source : Schermerhon J., MNG. Le management en action, 3ème édition, Pearson, Quebec,
2013, p. 238.

Pour Fiedler, plus les relations interpersonnelles sont bonnes, plus la structuration de la
tâche est forte et plus le pouvoir hiérarchique est élevé, plus aussi l’influence du
manager sera importante. Ainsi, l’enquête qu’il a menée sur 1.200 groupes différents, a
fait apparaitre que :

- les leaders orientés vers la tâche ou leaders fonctionnels, réussissent mieux soit en
situations très favorables, soit en situations très défavorables (catégories I, II, III, VII
et VIII) ;
- les leaders orientés vers les relations humaines ou leaders affectifs, réussissent
mieux en situations moyennement favorables (catégories IV, V et VI).

Etant donné que l’orientation comportementale du manager est considérée comme une
donnée (elle est innée et immuable, par conséquent le manager est incapable de la
modifier), Fiedler conclut qu’en cas d’inefficacité d’un manager par rapport { un groupe,
deux seules solutions sont envisageables :

- soit adapter le manager au groupe en choisissant un nouveau manager dont le style


(orientation) est plus adapté à la situation et au groupe ;
- soit adapter la situation au manager en agissant sur les variables situationnelles ou
de contingence pour avoir une adéquation entre ces variables et l’orientation
comportementale du manager, c.à.d. créer un environnement organisationnel dans
lequel le leader pourra être efficace, soit en améliorant les relations managers-
membres du groupe, soit en restructurant les tâches, soit en augmentant l’emprise
réelle du manager sur les membres du groupe (par accroissement de son pouvoir
réel sur la gestion de leurs carrières).

Les principales études menées pour mesurer la validité générale du modèle de Fiedler
ont donné des conclusions positives. Cependant, l’application pratique de son modèle
pose encore deux principaux problèmes :

- la logique sous-jacente au questionnaire C.M.A. n’est pas facile { maîtriser, ce qui


explique notamment que les scores enregistrés manquent de stabilité ;
- la complexité des variables de contingence rend délicat leur manipulation, ce qui
rend très difficile l’évaluation précise de la qualité des relations humaines, du niveau
de structuration des tâches et de l’importance du pouvoir hiérarchique du manager.

14.3.2. Le modèle du leadership situationnel


216

Ce modèle, mis au point par Ken Blanchard et Paul Hersey112, montre comment un
leader doit adapter son style aux besoins de ses subalternes en tenant compte de leur
niveau de maturité ou d’autonomie.

Ces auteurs ont voulu développer un modèle de contingence centré sur les subalternes,
car ce sont eux qui acceptent ou refusent le leader et c’est leur activité qui conditionne
l’efficacité du leader.

Pour ce faire, ils partent de l’hypothèse que tout employé peut-être qualifié en fonction
d’une variable, la maturité ou l’autonomie, qui comprend deux composantes : la
compétence et l’engagement du subalterne vis-à-vis de sa tâche. De là, ils définissent
quatre comportements possibles par rapport à cette variable à double composante :
compétent et engagé, compétent et désengagé, incompétent et engagé, incompétent et
désengagé.

D’où, le comportement le plus efficace { adopter par le manager doit dépendre du niveau
de compétence et du degré de motivation du subalterne. Ainsi :

- pour un subalterne compétent et engagé, le manager a peu de choses à faire et il va


donc opter pour un style peu directif et peu encourageant qui consiste à « déléguer »
le plus possible au subalterne : c’est le style de délégation ;
- pour un subalterne compétent et désengagé, le manager doit opter pour un style plus
orienté vers les relations humaines, c.à.d. pour un style peu directif et très
encourageant qui consiste à « épauler » le subalterne : c’est le style de participation ;
- pour un subalterne incompétent et engagé, le manager doit opter pour un style plus
orienté vers la tâche, c.à.d. pour un style très directif et peu encourageant qui
consiste à « entrainer » le subalterne : c’est le style de persuasion ;
- pour un subalterne incompétent et désengagé, le manager doit opter pour un style à
la fois orienté vers la tâche (pour compenser ses lacunes) et orienté vers les relations
humaines (pour accroitre sa motivation), c.à.d. pour un style très directif et très
encourageant qui consiste à « diriger » le subalterne : c’est le style de direction.

Autrement dit, le comportement ou le style du manager doit partir du diagnostic établi


et avoir comme seul objectif de corriger la ou les lacunes constatées en termes
d’incompétence et/ou de désengagement.

Ce modèle, qui est très intuitif, a été intégré dans des programmes de formation des plus
grandes entreprises américaines et européennes. Cependant, les recherches visant à le

112
Blanchard K. et Hersey P., Life-cycle Theory of Leadership, in Training and
Development Journal, n° 23, 1967, pp. 26-34 ; Blanchard K. et Hersey P., Management
of Organizational Behaviour : Utilizing Human Ressources, New Jersey, Pretince Hall,
1969.
217

valider ont abouti à des résultats mitigés à cause notamment de certaines ambiguïtés et
incohérences du modèle ou d’erreurs méthodologiques

14.3.3. La théorie de l’objectif-trajectoire

La théorie de l’objectif-trajectoire ou théorie du chemin critique, path-goal theory en


anglais, est l’œuvre de Robert House113.

En partant de l’idée de base qu’un leader efficace est celui qui éclaire le chemin de ses
subalternes afin de leur permettre d’accomplir leurs objectifs en éliminant tout obstacle
et tout piège, la théorie stipule qu’il revient au leader d’aider ses subalternes { atteindre
leurs objectifs en leur donnant les instructions nécessaires et en leur accordant le
soutien nécessaire. Il a ainsi identifié quatre comportements possibles :

- le leader directif : il dit { ses subalternes ce qu’il attend d’eux, répartit les tâches et
donne des directives spécifiques pour leur accomplissement ;
- le leader bienveillant : il adopte une attitude amicale envers ses subalternes et se
préoccupe de leurs besoins ;
- le leader participatif : il consulte ses subalternes et se préoccupe de leurs avis et
suggestions avant de prendre une décision ;
- le leader d’accomplissement ou achievement oriented en anglais : il fixe des objectifs
ambitieux et s’attend { voir ses subalternes donner le meilleur d’eux.

Contrairement { Fiedler (théorie du leadership contingent) et { l’instar d’Hersey et de


Blanchard (théorie du leadership situationnel), House part du principe que les leaders
sont flexibles, c.{.d. qu’un même leader peut adopter l’un ou l’autre style, voire plusieurs
styles à la fois, en fonction des situations.

De plus, il définit deux types de variables situationnelles ou de contingence susceptibles


de moduler la relation entre le comportement du leader et les résultats :

- les variables environnementales sur lesquelles le subalterne n’a aucun contrôle telles
que la structure des tâches, l’organisation formelle de l’autorité ou la configuration
du groupe : elles déterminent le type de leadership permettant d’optimiser les
résultats des subalternes ;
- les variables de contingence individuelles qui déterminent la façon dont les
subalternes interprètent les facteurs de l’environnement et le comportement du
leader.

113
House R., Path Goal Theory of Leadership : Lessons, Legacy and a Reformulated Theory, in
Leadership Quartely, 7 (3), 1996, pp. 323-352 (version revisée de celle de 1971).
218

La théorie spécifie que le comportement du leader sera inefficace s’il est redondant avec
les facteurs environnementaux (p. ex. expliquer à un subalterne une tâche très
structurée) ou s’il n’est pas cohérent avec des caractéristiques des subalternes. Ainsi :

- le leadership directif conduit à plus de satisfaction quand la tâche est ambiguë ou


stressante (besoin d’être éclairé par le chef sur ce qu’il faut faire) plutôt que quand la
tâche est bien structurée ;
- le leadership directif conduit à plus de satisfaction quand un groupe connait des
situations de tension et de conflit (besoin d’avoir quelqu’un qui prend la situation en
main) ;
- le leadership directif conduit à plus de satisfaction quand les subalternes considèrent
qu’ils n’ont pas le contrôle de ce qui leur arrive et que les variables
environnementales ont un impact décisif ;
- le leadership bienveillant conduit à plus de satisfaction quand la tâche est bien
structurée ou quand les relations formelles d’autorité sont claires (besoin seulement
d’être soutenu) ;
- le leadership participatif conduit à plus de satisfaction quand les subalternes
considèrent qu’ils ont le contrôle de ce qui leur arrive et que les variables
environnementales ont un impact marginal ;
- le leadership d’accomplissement conduit { plus de satisfaction quand les subalternes
se considèrent comme très compétents et très expérimentés, tandis que le leadership
directif est encombrant dans un tel cas.

Schéma n° 17 : Illustration de la théorie de l’objectif-trajectoire

Facteurs de contingence de l’environnement


- structure des tâches
- organisation formelle de l’autorité
- comportement du leader

Style du leader Résultats


- directif - performance
- bienveillant - satisfaction
- participatif
- orienté vers l’accomplissement

Facteurs de contingence des subalternes


- maitrise
- expérience
- compétence estimée
219

Source : Robbins S., op. cit. p. 364.

Les recherches visant à valider cette théorie ont donné des résultats globalement
positifs, malgré quelques expériences négatives.

14.4. Les approches pragmatiques du leadership

14.4.1. Les leaders transactionnels et les leaders transformationnels

Toutes les théories étudiées jusque-là concernent en fait le leader transactionnel, c.à.d.
celui qui oriente et stimule ses subalternes pour les pousser à atteindre les objectifs en
clarifiant les rôles et les tâches leur assignés.

Par contre, le leader transformationnel incite ses subalternes à transcender leurs


intérêts personnels pour le bien de l’entreprise et { atteindre des résultats
exceptionnels114. De ce fait, il possède la capacité d’exercer sur eux une influence
durable et profonde. Plus particulièrement :

- il prête attention aux préoccupations et aux besoins de développement de ses


subalternes ;
- il modifie leur manière d’aborder les problèmes en les aidant { poser un regard neuf
sur leurs difficultés antérieures ;
- il est capable de les motiver, de les galvaniser pour les amener { redoubler d’efforts
afin d’atteindre les objectifs du groupe.

Ainsi, le leadership transformationnel permet d’obtenir un niveau d’effort et de


performance des subalternes beaucoup plus élevé que le leadership transactionnel.

Ouvrons une parenthèse pour souligner la différence entre le leader transformationnel


et le leader charismatique (voir infra) : le second attend que les subalternes puissent
adopter sa vision du monde, alors que le premier veut les pousser à mettre en doute les
valeurs établies, y compris les siennes.

Les études empiriques ont montré la validité de cette théorie et donc la supériorité du
leadership transformationnel sur le leadership transactionnel en termes de baisse du

114
Conger J., Inspiring others : the language of leadership, in Academy of Management
Executive, vol. 5, 1991, pp. 31-45 ; McGregor J., Leadership, New York, Harper & Row,
1978 ; Bass B., Leadership and performance beyond expectations, New York, The Free
Press, 1985.
220

taux de rotation du personnel (turn over en anglais), d’augmentation de la productivité


et d’amélioration de la satisfaction des subalternes.

14.4.2. Les leaders charismatiques ou visionnaires

D’après cette théorie, les subalternes, face à certains comportements, attribuent au


leader des compétences extraordinaires ou héroïques, lequel exerce sur eux un
rayonnement extraordinaire.

Les études consacrées { ce sujet ont essayé d’identifier les comportements qui
différencient les leaders non charismatiques des leaders charismatiques que l’on trouve
tant dans le monde politique (Mahatma Gandhi, Mao Tse Toung, Winston Churchill,
Charles De Gaulle, John Kennedy, Martin Luther King ou Nelson Mandela) que dans le
monde des affaires (Bill Gates de Microsoft, Steve Jobs d’Apple, Richard Branson de
Virgin ou Carlos Ghosn de Renault-Nissan).

A ce sujet, l’analyse la plus complète est celle de Jay Conger et Rabindra Kanungo de
l’Université McGill qui ont retenu les sept caractéristiques ci-après que possèdent ces
leaders charismatiques115.

- l’assurance : ils ont une confiance absolue en leurs jugements et en leurs


compétences ;
- la vision : ils ont un objectif idéal qui promet un avenir meilleur que le statu quo ;
- la capacité à formuler une vision : ils sont capables d’exposer leur vision de façon
claire et compréhensible par tous leurs subalternes ;
- la conviction : ils donnent l’impression de beaucoup s’investir et d’être prêts {
prendre des risques personnels énormes, à dépenser beaucoup d’argent et { se
sacrifier pour la concrétisation de leur vision ;
- un comportement non conformiste : ils adoptent un comportement perçu comme
original, insolite et parfois contraire aux normes établies ;
- un vecteur du changement : ils apparaissent comme des acteurs d’un changement
radical plutôt que comme des gestionnaires du statu quo ;
- une sensibilité environnementale : ils sont capables d’évaluer avec précision les
contraintes de l’environnement et les ressources nécessaires { la réalisation de leur
vision.

Il faut noter que le leadership charismatique n’est pas nécessaire quand il s’agit tout
simplement d’obtenir une augmentation de la performance des subalternes. Il le devient
quand les tâches des subalternes intègrent une composante idéologique ou quand
l’environnement comporte des éléments impliquant stress et incertitude. C’est ce qui

115
Conger J. et Kanungo R. (Eds), Charismatic Leadership in Organizations, Thousand
Oaks, CA, Sage Publications, 1998.
221

explique que les leaders charismatiques apparaissent surtout en politique, en religion,


en temps de guerre ou quand une entreprise traverse une grave crise ou doit prendre un
tournant décisif.

Dans le monde des affaires, les différentes études menées pour savoir comment les
leaders charismatiques influencent leurs subalternes, ont identifié quatre étapes :

- Phase 1 : le leader expose une vision séduisante traçant un lien entre la situation
actuelle et un avenir meilleur. Cette phase fait naître un sentiment de communauté
entre le leader et ses subalternes.
- Phase 2 : le leader dévoile ses ambitions et fait part de sa conviction que ses
subalternes ont beaucoup de chance de réussir la mise en œuvre de cette vision.
Cette phase permet aux subalternes de se sentir valorisés et de devenir plus sûrs
d’eux.
- Phase 3 : le leader véhicule un nouvel ensemble de valeurs et s’impose comme
exemple à suivre par ses paroles, ses actes et son comportement.
- Phase 4 : le leader ne recule devant aucun sacrifice et adopte une attitude non
conformiste qui traduit son courage et sa détermination.

Beaucoup d’études empiriques ont démontré la validité de cette théorie en établissant


une corrélation entre le leadership charismatique et l’augmentation de la performance
et de la satisfaction des subalternes : le charisme du leader incite effectivement les
subalternes { redoubler d’efforts, tandis que l’affection et le respect témoignés envers le
leader, augmentent la satisfaction des subalternes.

Une question reste posée : le leadership charismatique est-il une caractéristique innée
ou une caractéristique que l’on peut apprendre ou acquérir ? Le débat reste ouvert.

14.4.3. Le leadership d’équipe

La structure par équipe prend de plus en plus de l’importance dans les entreprises. D’où,
la nécessité d’un leadership d’équipe qui est très différent de celui d’un agent de
maîtrise ou contremaître. En effet, un contremaître se limite à donner des instructions à
ses subalternes et { les contrôler, tandis qu’un chef d’équipe a un rôle d’animation qui
consiste { partager l’information et ses connaissances, { faire confiance { ses subalternes
et { déléguer l’autorité.

Ainsi, le chef d’équipe efficace doit pouvoir se concentrer sur deux priorités, à savoir
gérer les frontières extérieures de l’équipe et accompagner l’activité de l’équipe. Ceci
implique les quatre tâches ci-après :

- gérer les relations avec les entités extérieures au groupe, essentiellement la


Direction Générale, les autres équipes, les clients et les fournisseurs : il représente
222

l’équipe auprès de ces entités, se fait expliquer leurs attentes par rapport { l’équipe,
recherche les ressources nécessaires au travail de son équipe, recherche les
informations et les partage avec les membres de son équipe ;
- résoudre les problèmes et les difficultés que rencontre l’équipe dès leur apparition ;
- gérer les inévitables conflits entre les membres de l’équipe ;
- animer son équipe c.à.d. clarifier les objectifs et les rôles de chacun, transmettre ses
connaissances, stimuler ses collaborateurs et éliminer les obstacles au rendement.

14.4.4. L’intelligence émotionnelle et le leadership

Des études récentes montrent que l’intelligence émotionnelle (IE) est un élément
favorisant de façon déterminante l’émergence du leadership et qu’elle est même plus
importante que l’intelligence, les compétences professionnelles, la formation, l’esprit
d’analyse et la vision dans l’émergence du leadership116.

L’intelligence émotionnelle est l’ensemble des facultés, d’aptitudes et de compétences


qui ont un impact sur la façon de répondre aux besoins et aux expressions de
l’environnement, c’est la capacité { percevoir et { gérer des informations émotionnelles,
à comprendre ses propres émotions et celles des autres.

L’intelligence émotionnelle se compose de cinq dimensions :

- la conscience de soi ou self awareness : capacité à avoir conscience de ses propres


sentiments (états d’âme, émotions, motivations,…) et de leurs effets sur les autres ;
- la maîtrise de soi ou self management : capacité à maîtriser, à canaliser et à gérer ses
émotions et ses impulsions ;
- la motivation ou self motivation : capacité à persévérer après un échec sans que cela
ne soit lié { l’argent ou { tout autre intérêt personnel ;
- l’empathie ou empathy : capacité à ressentir ce que ressentent les autres, à
s’identifier affectivement aux autres en fonction de leurs émotions et réactions ;
- la sociabilité ou social skills : aptitude à nouer des liens avec autrui, à établir des
relations sociales et { trouver des terrains d’entente pour construire de bonnes
relations.

Ces cinq composantes sont donc déterminantes pour qu’un individu puisse s’imposer
comme référence et donc comme leader.

14.4.5. La confiance et le leadership

Goleman D., L’intelligence émotionnelle, Robert Laffont, Paris, 1997.


116
223

La confiance est une notion essentielle pour un leadership efficace et elle prend de plus
en plus de l’importance dans les entreprises modernes. En effet, il sera difficile de suivre
quelqu’un l{ où il y a un danger ou un quelconque risque, si l’on n’a pas confiance en lui.

La confiance est indissociable de la crédibilité dont l’ingrédient principal est l’honnêteté.


Or, toutes les études montrent que l’honnêteté est la caractéristique principale des
leaders qui suscitent l’admiration de leurs subalternes ou suiveurs.

a. La définition et les éléments constitutifs de la confiance

La confiance peut se définir comme le sentiment de fiabilité envers l’intégrité, le


caractère et l’aptitude d’une personne. Ainsi, quand on a confiance en une personne, on
exclut qu’elle puisse faire preuve d’opportunisme dans ses paroles, ses actes et ses
décisions, l’opportunisme étant l’attitude qui consiste { agir selon les circonstances et
ses intérêts en faisant peu de cas des principes.

Par définition, la confiance implique donc le risque d’une déception et l’acceptation d’un
tel risque potentiel, dans la mesure où l’on espère que la personne ne trompera, ni ne
décevra, sans en avoir une certitude absolue.

La confiance se construit avec le temps, elle suppose la connaissance de l’autre et


l’existence d’un degré d’intimité avec lui : on ne peut pas faire confiance en une
personne que l’on ne connait pas suffisamment par soi-même (confiance directe) ou par
le truchement d’une personne en qui on a confiance (confiance indirecte).

b. Les dimensions de la confiance

Il y a cinq dimensions qui sous-tendent le concept de confiance, à savoir :

- L’intégrité : c’est l’honnêteté, la conscience morale et la sincérité. C’est la dimension


la plus cruciale sans laquelle les autres dimensions perdent toute signification.
- La compétence : c’est l’ensemble qui est constitué des connaissances (savoir), des
qualités techniques (savoir faire) et des qualités interpersonnelles (savoir être). Pour
inspirer confiance, il faut que les subalternes soient convaincus que le leader possède
les compétences nécessaires pour accomplir ce qu’il promet117.
- La cohérence : c’est la fiabilité, la prévisibilité et le sens du jugement du leader. Les
subalternes ne feront pas confiance au leader s’ils perçoivent une contradiction entre
ses paroles et ses actes, entre ses différentes paroles, entre ses différents actes.

117
Voir point 3.2. du chapitre 3 sur les quatre compétences du manager.
224

- La loyauté : c’est le désir de protéger l’autre et de ne pas lui faire perdre la face.
- L’ouverture : c’est le désir de partager idées et informations, de dire la vérité.

c. Les types de confiances

On peut identifier trois types de confiance :

- La confiance d’expérience : c’est la confiance fondée sur la prévisibilité du


comportement de l’autre suite { une longue période d’interaction et de connaissance
mutuelle (on sait { quoi s’attendre avec telle personne). Ainsi, la très bonne
connaissance que l’on a de l’autre, permet de prédire { coup sûr son comportement,
ses réactions, ses attitudes.

- La confiance de dissuasion : c’est la confiance qui est fondée sur la crainte des
représailles en cas de violation, du fait que l’on redoute les conséquences liées { un
manquement { ses obligations. En fait, il s’agit d’une dissuasion { la malhonnêteté :
on part du principe que la personne en qui l’on fait confiance n’a aucun intérêt {
trahir ladite confiance, car elle a plus à gagner en restant digne de la confiance placée
en elle et qu’elle a plus { perdre en ne s’en montrant pas digne. Ce type concerne
surtout la confiance qu’un subalterne veut ou doit inspirer à son supérieur ou à une
personne qui est en relation avec une autre dont on veut garder la confiance (tel que
l’ami d’un ami). C’est ainsi que la dissuasion ne fonctionnera que si les trois
conditions ci-après sont réunies : (i) les parties sont sûres qu’un contrôle sera
effectivement fait ; (ii) les parties sont sûres que le contrôle sera suivi d’effet avec
une application effective de la sanction en cas de défaut constaté { l’issue du
contrôle ; (iii) les parties sont sûres que les inconvénients de la sanction sont plus
importantes que les avantages que le fautif pourrait retirer d’une violation de la
confiance.

- La confiance d’identification : c’est la confiance basée sur un lien affectif et


émotionnel entre les parties. Ainsi, on agit dans l’intérêt de l’autre et on se met { sa
place. C’est donc une confiance basée sur l’empathie. Tel est le cas notamment d’un
mariage réussi ou d’une amitié sincère : chacun s’identifie { l’autre, ressent les
mêmes choses et réagit de la même façon. C’est ce type de confiance qui est l’idéal,
même dans les entreprises.

d. Les stratégies pour construire la confiance

Pour construire la confiance, on peut recourir aux moyens ci-après :

- jouer la transparence, c.à.d. dire la vérité, y compris quand les nouvelles sont
mauvaises ou quand on s’est mal comporté (selon le dicton « faute avouée est à
moitié pardonnée ») ;
225

- agir de façon équitable ;


- exprimer ses sentiments comme moyen de se dévoiler et de ne pas paraitre distant ;
- être cohérent ;
- tenir ses promesses ;
- protéger les confidences ;
- afficher sa propre assurance par la démonstration de ses aptitudes techniques et
professionnelles pour susciter admiration et respect.

14.4.6. La culture nationale et le leadership

Comme on l’a vu, le style de leadership doit s’adapter aux situations pour être efficace.

A ce sujet, même si aucune des théories examinées n’en a fait explicitement mention, la
culture nationale constitue un facteur situationnel de premier ordre pour déterminer le
style du leadership à adopter. Elle est donc une variable de contingence supplémentaire
à prendre en considération.

Ainsi, de nombreuses études ont mis en évidence des différences culturelles notables
dont nous donnons quelques-unes :

- les asiatiques ont une préférence pour des leaders qui prennent des décisions, qui
sont des communicants efficaces et qui sont capables de soutenir leurs subalternes ;
- les subalternes coréens préfèrent un leader paternaliste ;
- les leaders arabes ne doivent pas faire preuve d’amabilité et de générosité envers
leurs subalternes, sinon ils sont accusés de faiblesse ;
- au Japon, les leaders doivent faire preuve d’humilité et de discrétion ;
- dans les pays scandinaves (Norvège, Suède, Danemark et Finlande) et aux Pays-Bas,
le fait de citer un employé en exemple, a comme conséquence de le mettre dans
l’embarras plutôt que de le motiver ;
- dans les pays latins (France, Espagne, Portugal, Italie), du Moyen Orient et de
l’Extrême Orient (Japon, Chine, Corée), la position formelle d’autorité est
importante : le leader doit être puissant, voire craint, ce qui équivaut à une forte
centralisation de l’autorité et { un style autocratique (grande distance hiérarchique),
alors que c’est l’inverse dans les pays scandinaves (faible distance hiérarchique).

Il apparait dès lors évident que les leaders ne sont pas totalement libres du choix du
style à adopter : ils doivent respecter les normes culturelles de leurs subalternes, c.à.d.
de leurs attentes.

Cependant, il n’en reste pas moins vrai que certaines dimensions du leadership sont
universelles ou transculturelles, comme nous l’avons vu en ce qui concerne le leadership
transformationnel (vision, anticipation, encouragement aux efforts, confiance,
dynamisme, attitude positive et pro-activité). Ceci est d’autant plus vrai que les attentes
des subalternes ne sont pas figées. En effet, le besoin par exemple d’avoir des directives
226

très précises, peut être le résultat d’un formatage dû { la collaboration pendant trop
longtemps avec un supérieur hiérarchique autoritaire, tandis qu’au contact avec d’autres
styles de direction, cette attente peut évoluer vers la recherche de plus d’autonomie. De
même, une élévation générale du niveau d’instruction au sein d’une société
(particulièrement chez les femmes), quels que soient les cultures et les pays, entraîne
généralement une modification des attentes des subalternes vers un style plus
participatif.

14.4.7. Le leadership face à des circonstances exceptionnelles

Il y a certaines circonstances exceptionnelles qui limitent le choix du leader quant à son


style et qui lui imposent de fait un style autocratique pour des raisons d’efficacité. Nous
en retenons les deux ci-après :

- le degré de confidentialité des informations nécessaires { la solution d’un problème :


plus les informations relatives à un problème ont un caractère confidentiel, voire
explosif, moins le leader peut les partager avec ses collaborateurs (même les plus
proches), et plus donc il devra opter pour un style autocratique ;
- le degré d’urgence de la décision { prendre : plus la décision à prendre est urgente,
moins le leader aura le temps de consulter ses collaborateurs, et plus donc il devra
opter pour un style autocratique.
227

CINQUIEME PARTIE : LA FONCTION CONTROLE

Comme vu dans la première partie, le processus managérial est un processus récurrent :


le manager doit donc { chaque fois s’interroger sur l’efficacité des choix et des décisions
qu’il prend dans l’accomplissement des tâches de planification, d’organisation et de
direction pour éventuellement les remettre en cause. Par conséquent, il doit
régulièrement ou périodiquement contrôler les résultats de ses décisions et les
comparer aux objectifs qu’il s’était fixé. En d’autres termes, il doit procéder au contrôle
régulier ou périodique des résultats de ses décisions, contrôle qui constitue la cinquième
fonction de base du processus managérial et qui fait l’objet de la dernière partie de cet
ouvrage.

Cette dernière partie abordera successivement les deux points ci-après : le processus de
contrôle et le contrôle par nature des tâches.

CHAPITRE 15 : LE PROCESSUS DE CONTROLE

Dans ce chapitre, nous allons nous pencher tour à tour sur les différentes étapes du
processus de contrôle, les principaux types des contrôles et un certain nombre de
principes à appliquer pour assurer un contrôle efficace.

15.1. Quelques généralités sur le processus de contrôle

15.1.1. La définition du contrôle


228

Le contrôle est la fonction managériale qui consiste à : (i) faire le suivi des activités afin
de garantir leur conformité aux objectifs ; (ii) procéder à la correction de tout écart
éventuel entre l’objectif et les réalisations.

Comme on le verra plus loin, le processus du contrôle implique quatre phases : (i) la
définition de l’objectif ; (ii) l’évaluation des performances ; (iii) la détermination des
causes d’un éventuel écart ; (iv) la correction d’un éventuel écart pour atteindre
l’objectif.

15.1.2. L’importance du contrôle

Etant donné que le contrôle consiste { s’assurer que les objectifs ont été atteints et {
déceler les causes d’un éventuel écart par rapport aux prévisions, son importance
apparait dans trois domaines particuliers :

a. La planification

La définition des objectifs est le point de départ de la planification du fait qu’ils montrent
la direction { suivre par chaque membre de l’organisation. Par conséquent, tout
manager efficace doit s’assurer, { travers le feed-back ou rétroaction, que chacun
effectue les tâches lui assignées et atteint effectivement ses objectifs.

b. La responsabilisation

Nous avons vu l’importance de la responsabilisation des subalternes dans la réussite du


processus managérial. Cependant, beaucoup de managers hésitent à sauter le pas pour
une responsabilisation effective de leurs subalternes de peur d’être tenus pour
responsables des erreurs éventuelles de ces derniers. Or, un système d’information
efficace donne un feed-back sur les performances des subalternes, permet de tirer la
sonnette d’alarme { temps et réduit donc la probabilité de persistance dans l’erreur.

c. La protection du lieu du travail.

Aujourd’hui, les entreprises sont exposées { de très nombreux risques (risques naturels
et terroristes, pirateries et intrusions informatiques, crises sectorielles ou
conjoncturelles, vols, non-respect des procédures, défaillances dans les
approvisionnements,…). Or, un bon système de contrôle permet de détecter ces risques
{ temps, d’en réduire la probabilité d’occurrence et les conséquences, et donc de mieux
protéger l’entreprise.

15.1.3. Le processus de contrôle


229

Comme nous venions de le dire, le processus de contrôle comprend quatre étapes


essentielles, dont seules les trois dernières relèvent spécifiquement de la fonction
Contrôle. Il s’adit de :

- la définition d’un objectif ou d’une norme (standard) qui servira de référence pour
apprécier le résultat : c’est ce que le manager fait dans la fonction Planification à
travers la définition des objectifs et de la marge de variation acceptable ;
- la comparaison entre le résultat observé et l’objectif ou la norme pour connaître
l’amplitude de l’écart éventuel ;
- la détermination des causes réelles de l’éventuel écart dont dépendra l’efficacité de
la dernière étape ;
- l’action corrective éventuelle qui visera, soit { combler l’écart constaté entre le
résultat et l’objectif, soit { modifier l’objectif initial.

Concernant cette quatrième étape, trois possibilités s’offrent ainsi au manager en cas de
constatation d’un écart entre le résultat et l’objectif ou la norme :

- soit l’écart est très faible ou acceptable (c.{.d. situé { l’intérieur de la marge de
variation acceptable), auquel cas aucune action corrective n’est entreprise ;
- soit l’écart n’est pas acceptable (il est au-delà de la marge de variation acceptable) en
même temps que l’objectif reste acceptable (objectif jugé réaliste), auquel cas on
prend les mesures correctives pour rétablir la situation ;
- soit l’écart n’est pas acceptable (écart positif ou écart négatif dépassant la marge de
variation acceptable) alors que l’objectif n’est plus considéré comme acceptable
(objectif jugé irréaliste), auquel cas on réajuste l’objectif { la baisse (s’il est trop
élevé) ou au contraire { la hausse (s’il est trop bas).

Le processus de contrôle fait donc intervenir deux éléments principaux, la perception et


la réaction. Cette séquence perception-réaction qui résume les trois dernières phases
principales du contrôle, se trouve donc dans les différents types de contrôles que nous
allons examiner ci-dessous.
Mais avant de le faire, attardons-nous quelque peu sur l’aspect perception ou mesure
des performances.

15.1.4. La mesure des performances

Pour mesurer les performances, on peut utiliser ou exploiter quatre méthodes


différentes. Eu égard à leurs avantages et inconvénients respectifs, il est recommandé de
les combiner afin de disposer de l’information la plus complète possible.

a. L’observation personnelle
230

C’est l’information recueillie directement par le manager et qui n’a pas été filtrée par une
tierce personne (notamment un de ses collaborateurs). Pour cela, le manager peut
utiliser la technique dite du « management baladeur » ou « management by walking
around » en anglais.

Le management baladeur est une technique d’observation personnelle impliquant que le


manager descende sur le lieu du travail, parle directement avec les employés et constate
par lui-même l’évolution du travail sur le terrain.

Il comporte les trois avantages ci-après :

- il permet au manager de capter l’information sans le filtrage d’un tiers et donc dans
sa globalité ;
- il permet aux subalternes d’être directement entendus et donc de s’exprimer sur
leurs conditions de travail et les difficultés rencontrées ;
- il oblige les subalternes à être sur leurs gardes « ne connaissant ni le jour ni l’heure »
de la visite du manager et les incite donc { s’acquitter convenablement de leurs
tâches.

Cependant, il comporte aussi deux inconvénients :

- il prend beaucoup de temps, particulièrement quand le lieu de travail du manager est


éloigné de celui où travaillent les subalternes dont il doit contrôler les
performances ;
- il peut apparaitre comme importun pour certains subalternes, la surveillance du
manager pouvant être considérée comme un signe de méfiance.

b. Les rapports statistiques

Ce sont des données chiffrées, des graphiques, des histogrammes,… dont l’élaboration
est largement facilitée aujourd’hui par l’outil informatique.

Ils ont l’avantage de la concision et de la facilité de classement, tandis qu’ils ont


l’inconvénient de ne pas donner une indication sur les causes.

c. Les comptes rendus écrits

En plus des avantages liés aux rapports statistiques, ils ont l’avantage supplémentaire
d’être plus exhaustifs du fait qu’ils donnent des commentaires qui peuvent permettre au
manager de mieux comprendre les causes de la situation.
231

d. Les comptes rendus oraux

Ce sont les conférences, les réunions, les conversations et les communications


téléphoniques.

Ils ont l’avantage de permettre un feed-back immédiat et comme inconvénient de ne pas


laisser de traces durables pour une consultation ultérieure.

15.2. Les types de contrôles

Voyons maintenant les différents types de contrôles en prenant comme critère le


moment où ils s’effectuent par rapport au processus de transformation. Ainsi, un
contrôle peut se faire en amont de l’activité/processus, pendant l’activité/processus ou
après l’activité/processus. Etant donné les nombreuses dénominations que leur
assignent les différents auteurs, nous préférons donc qualifier les trois types de
contrôles par rapport au processus.

Schéma n° 18 : Types de contrôles par rapport au processus de production

Intrants de travail Processus Extrants de travail

Contrôle en Contrôle Contrôle


amont en cours en aval
Anticiper Corriger les Corriger les
les problèmes problèmes à problèmes a
mesure qu’ils posteriori
apparaissent

Source : Adapté de Robbins S., op. cit., p. 439 ; et de Schermerhorn J. op. cit., p. 139.

15.2.1. Le contrôle en amont du processus ou sur les intrants de travail

Selon les auteurs et/ou les circonstances, ce contrôle est appelé contrôle préventif,
préliminaire, proactif ou anticipé : il se situe donc en amont de l’activité de
l’entreprise et il est statique.

Il est destiné à anticiper les problèmes et porte sur les intrants de travail ou inputs. Il
consiste ainsi { s’assurer, avant le lancement du processus (de transformation ou autre)
que : (i) les objectifs sont clairs ; (ii) les orientations appropriées ont été données ; (iii)
les ressources sont suffisantes en qualité et en quantité.
232

Il consiste donc à répondre à la question suivante : Que faut-il faire avant de lancer le
processus afin de s’assurer de son bon déroulement et que l’objectif sera atteint ? Il
permet par conséquent d’anticiper les problèmes et d’entreprendre des actions
correctives éventuelles avant le lancement du processus, au lieu d’attendre la
survenance des problèmes pour pouvoir intervenir.

Ce type de contrôle sera donc mis en œuvre dans les quatre cas ci-après :
- Le contrôle de la planification : il s’agit du contrôle qui porte sur les différents
aspects de la planification (élaboration des stratégies, des plans, des programmes et
des budgets) avant la mise en œuvre des différents plans, afin de s’assurer que la
démarche planificatrice est logique, cohérente et exhaustive.

- Le contrôle des ressources financières : il s’agit du contrôle budgétaire qui consiste,


avant toute dépense, { s’assurer qu’elle est prévue au budget et qu’elle est couverte
par des crédits suffisants, et, dans le cas contraire, de prendre les mesures qui
conviennent (ne pas faire la dépense, ne la faire qu’en partie, la faire en totalité en
cherchant des ressources complémentaires, la faire en totalité en réalisant des
économies compensatoires sur d’autres postes, la faire en totalité sans réaliser des
économies compensatoires sur d’autres postes).

- Le contrôle des équipements : il s’agit du contrôle sur la fiabilité des équipements


(machines, installations, outillages) avant le lancement du processus. C’est le cas
notamment de la maintenance des avions avec les programmes de détection des
dégâts dans leurs structures dans le but de prévenir tout crash. C’est le cas aussi des
entreprises travaillant en continu avant de lancer un lot important de production
(cas des entreprises manufacturières ayant des coûts de démarrage importants
comme les cimenteries) ou de lancer une campagne (cas des entreprises agro-
industrielles à production saisonnière).

- Le contrôle des intrants : il s’agit du contrôle de la qualité des intrants


(consommables, matières premières, produits semi-finis et produits finis) avant le
lancement du processus ou avant de les intégrer dans le processus.

C’est donc un contrôle très intéressant du fait qu’il permet de prévenir les problèmes en
intervenant en amont de l’activité ou du processus, c.{.d. avant le début des opérations
afin d’anticiper sur les problèmes susceptibles de se poser.

15.2.2. Le contrôle en cours de processus.

Selon les auteurs et/ou les situations, ce contrôle est dénommé contrôle continu, de
suivi, a priori ou « tout ou rien ».
233

Ce contrôle porte sur les activités en cours de réalisation, c.à.d. sur le processus lui-
même : il s’effectue donc pendant le déroulement de l’activité, ce qui explique qu’il est
dynamique. Il consiste donc à répondre à la question suivante : Que faut-il faire pour
améliorer le processus en cours afin de garantir que le résultat final sera conforme au
résultat attendu ?

Il a ainsi pour but de s’assurer que toutes les activités se déroulent convenablement, ce
qui permet de prévoir { l’avance résultats (avant que la tâche ne soit terminée) et de
prendre les mesures correctives éventuelles nécessaires au fur et à mesure que les
problèmes apparaissent. Ce faisant, le but ultime est d’arriver { un résultat final
conforme { l’objectif.

Etant donné que ce contrôle est intégré { l’activité, il peut prendre notamment les quatre
formes ci-après :

- La surveillance directe des travailleurs pendant qu’ils sont en train de travailler, avec
en particulier la technique du management baladeur : il permet ainsi au responsable
de contrôler le travail du subalterne en cours d’exécution et d’intervenir sur le
champ pour corriger les éventuelles anomalies constatées avant qu’elles ne
deviennent trop graves.

- Le contrôle automatisé qui est intégré au processus de transformation et qui signale


lui-même toute anomalie de façon { permettre au travailleur d’engager lui-même
une action corrective immédiate. On peut citer le cas du signalement des fautes
d’orthographe et de syntaxe dans les travaux de saisie des textes sur ordinateur ou le
cas d’un processus de production doté d’un système qui détecte les défauts de
fabrication et les signale instantanément aux travailleurs.

- Le contrôle a priori ou contrôle « tout ou rien » : il est pratiqué sur des produits dont
la qualité doit être testée aux différents stades de la fabrication de façon { ce qu’ils
ne puissent passer au stade suivant que s’ils ont satisfait { un test au stade
précédent. Pour ces types de produits, une tâche ou une opération ne peuvent donc
être considérées comme accomplies que si elles ont été contrôlées et si une action
corrective a été mise en œuvre en cas de nécessité. Ce contrôle sera ainsi utilisé pour
des opérations ou des tâches de production pour lesquelles : (i) aucun écart ne peut
être toléré sur le plan de la qualité (cas des composants ou des sous-ensembles ayant
un impact décisif sur la sécurité du produit, cas des produits de très grand luxe) ; (ii)
le coût d’un rebut est sans commune mesure avec le coût du contrôle.

- Le contrôle intermédiaire des objectifs : il consiste à prédire régulièrement les


résultats par rapport { l’objectif final au fur et { mesure que l’opération (ou le
processus) se déroule, et à initier l’action corrective avant que l’opération (ou le
processus) ne soit entièrement terminée de façon à ce que le résultat final soit
234

conforme { l’objectif. Ceci suppose donc des prévisions fréquentes et précises faisant
appel { l’information disponible la plus récente. C’est le cas de l’ordonnancement qui
est une technique de gestion du temps de réalisation d’un projet complexe 118 : quand
on constate un retard dans l’exécution d’une des tâches par rapport au délai prévu,
on essaie d’y remédier immédiatement par des mesures correctives adéquates
(heures supplémentaires, effectifs supplémentaires, ressources supplémentaires ou
recours à un sous-traitant).
Comme le contrôle en amont, le contrôle en cours de processus est très intéressant du
fait qu’il permet d’initier { temps l’action corrective afin d’assurer la conformité du
résultat final { l’objectif défini.

Cependant, il nécessite une information rigoureuse qu’il n’est pas toujours facile
d’obtenir. D’où, l’utilisation du troisième type de contrôle.

15.2.3. Le contrôle en aval du processus ou sur les extrants de travail

Ce contrôle est dénommé contrôle rétroactif, postérieur ou a posteriori : il s’effectue


après que l’activité soit terminée et il porte sur les extrants du travail ou les outputs
(produits/services) dans le but de corriger des éventuels problèmes après coup. Ce
contrôle consiste donc à répondre aux deux questions suivantes : (i) Avons-nous atteint
l’objectif ? (ii) Sinon, pourquoi et que faudra-t-il faire pour y arriver { l’avenir ?
Dans ce type de contrôle, le résultat est comparé au standard une fois que toutes les
tâches sont accomplies et que le produit est donc arrivé au stade final. On n’essaie donc
plus d’influer sur le déroulement de l’opération en cours, mais tout simplement d’utiliser
les résultats de l’expérience passée pour essayer d’améliorer le déroulement des
activités futures.

C’est le contrôle qui est le plus répandu dans les entreprises et il est indiqué notamment
dans les trois cas ci-après :
- Cas où l’on a affaire { des produits fabriqués en très grandes quantités, c.à.d. à une
production de masse : c’est le cas le plus fréquent dans la production industrielle.
Ainsi donc, du fait de la rapidité des cadences, le contrôle en cours de processus n’est
pas économiquement rentable et on va plutôt procéder à un contrôle a posteriori
(généralement par échantillonnage).

- Cas où les résultats de l’action entreprise ne peuvent être connus qu’après une
période relativement longue : c’est le cas notamment de la stratégie comme nous le
verrons plus loin119.

118
Voir point 16.2. du chapitre suivant.
119
Voir point 16.6. du chapitre suivant.
235

- Cas où il faut établir des bilans ou des rapports (financiers ou sociaux) qui sont
toujours élaborés bien après la fin de l’activité sur base des données relatives { une
période passée120. Cependant, il faut souligner que ces cas tendent de plus en plus à
faire partie du contrôle en cours de processus du fait de l’évolution de
l’informatisation qui permet aujourd’hui de faire des bilans quasiment en temps
réels ou { périodicité très rapprochée (bilans trimestriels) et d’amorcer des actions
correctives avant la fin de la période (généralement la fin de l’année).

Même si ce type de contrôle a un inconvénient majeur, { savoir qu’il faut attendre que
« le mal soit fait » pour avoir connaissance du problème et chercher { le corriger, il n’en
reste pas moins vrai qu’il comporte des avantages certains :

- il est le seul possible dans la plupart des cas de production de masse, ce qui en fait le
contrôle le plus répandu dans l’industrie de transformation ;
- il donne au manager de précieuses informations sur l’efficacité de ses stratégies :
plus l’écart est faible entre les réalisations et les objectifs, plus efficaces
vraisemblablement sont les stratégies et vice versa ;
- il permet d’augmenter la motivation des employés par le feed-back, étant donné
qu’ils aiment connaitre leurs performances par rapport aux objectifs leur assignés.

15.2.4. Les relations entre les différents types de contrôle


Le contrôle en aval est très souvent associé au contrôle en amont et au contrôle en cours
de processus. En effet, lorsque l’on procède à ces deux derniers contrôles, on constatera
parfois, voire souvent, que l’objectif poursuivi n’a pas été atteint. Dans ce cas, l’action va
être menée jusqu'{ son terme et le contrôle portera par la suite sur l’ensemble du
processus pour en tirer les conclusions pour l’avenir.
Ainsi donc, on commence par le contrôle en amont et le contrôle en cours de processus,
et on termine par le contrôle en aval pour la même opération ou série d’opérations. Tel
est le cas notamment des contrôles ci-après :
- Le contrôle de la fiabilité du matériel : rien ne garantit que le matériel contrôlé ne
tombera pas en panne pendant le processus de fabrication, auquel cas on cherchera à
connaître les causes de la défaillance et à en tirer toutes les conséquences
(modification du système de maintenance, remise en cause de la conception du
matériel, changement de fournisseur ou renouvellement du matériel).

- L’ordonnancement : rien ne garantit que les mesures correctives permettront


effectivement de rattraper le retard enregistré, auquel cas le manager ne pourra que
tirer les conséquences de ce retard pour la planification des prochaines opérations
(modification des prévisions ou des ressources à allouer).

120
Voir point 16.3.1. du chapitre suivant.
236

- Le contrôle budgétaire : il arrivera parfois que l’on puisse quand même effectuer des
dépenses non prévues au budget ou dont l’ampleur dépasse ce qui avait été prévu au
budget, auquel cas on se bornera { constater, { la fin de l’exercice ou de l’opération,
l’écart entre les résultats atteints en fin de parcours et l’objectif que l’on s’était fixé
au départ, le but étant d’en tenir compte dans les prévisions budgétaires futures
pour une opération similaire.

15.2.5. La préparation et l’organisation des séances de feed-back

Nous venons de voir que le contrôle rétroactif ou a posteriori, qui est le type de contrôle
le plus répandu dans l’industrie de transformation, est basé sur la rétroaction ou le feed-
back.

Pour permettre { ce contrôle d’atteindre ses objectifs, il est impérieux que le manager
puisse développer ses compétences en matière de feed-back lors des séances consacrées
aux problèmes de performance. Pour ce faire, il est recommandé au manager les actions
et attitudes ci-après lors de la préparation et de la mise en œuvre de ces séances de feed-
back :

- planifier et préparer les séances de feed-back en identifiant les problèmes qu’on


souhaite aborder, en préparant des exemples concrets pour illustrer ces problèmes
et en réservant à ces séances le temps nécessaire dans son agenda ;
- s’assurer que le subalterne comprend très bien les objectifs des séances de feed-back,
{ savoir la clarification de ses objectifs, l’identification des obstacles { son rendement
et la réévaluation des stratégies (notamment pour éliminer ces obstacles) de façon à
lui permettre d’atteindre effectivement ses objectifs ;
- faire preuve d’équité en exploitant des données concrètes, en mettant à la
disposition du subalterne les éléments qui ont permis de l’évaluer et en laissant le
subalterne s’exprimer ;
- mettre le subalterne { l’aise en faisant preuve d’empathie, en faisant en sorte qu’il se
sente soutenu quels que soient les reproches à lui faire (sans bien entendu tomber
dans la complaisance), en créant une atmosphère propice à la compréhension, en
éliminant le stress, en garantissant la confidentialité de certains faits justificatifs
dont il pourra faire état ;
- pratiquer l’écoute attentive, ce qui permet au manager de découvrir des réalités et
des choses qu’il ne connaissait pas ;
- se concentrer sur des faits et des comportements spécifiques, le feed-back devant
être précis et non global pour pouvoir amener le subalterne à résoudre effectivement
ses problèmes ;
- réserver le feed-back négatif aux seuls comportements et faits que le subalterne peut
maîtriser, qui sont sous son contrôle et qu’il est donc en mesure de corriger ;
237

- émettre des commentaires et des remarques objectifs et centrés sur le travail en se


focalisant sur l’activité, en décrivant ce qui a été fait et ce qui n’a pas été fait, et donc
en ne s’attaquant jamais { l’individu mais plutôt { son comportement ;
- élaborer un plan d’action concret { l’issue de la séance de feed-back afin de permettre
au subalterne de se corriger, d’éliminer les obstacles qu’il a rencontrés et qui ont été
identifiés, et d’atteindre ses objectifs (les mêmes objectifs ou des objectifs modifiés).

15.3. Les principes d’organisation d’un contrôle efficace

Le contrôle ne peut s’opérer n’importe comment : cinq principes au moins devraient


être respectés pour en faciliter l’exécution et en assurer l’efficacité.

15.3.1. La participation
Comme souligné plus haut, le contrôle est un processus récurrent : il donne donc lieu à
des remises en cause permanentes qui ne sont pas toujours du goût des travailleurs.
D’où, on enregistre de leur part un certain nombre de comportements non souhaités tels
que :
- Privilégier les tâches les plus faciles { réaliser et/ou celles qui ont le plus d’impact
visible.
- Utiliser les ressources destinées { d’autres fins pour améliorer leurs résultats.
- Provoquer la connivence avec les contrôleurs pour éviter certains types de contrôles
ou en falsifier carrément les résultats.
- Privilégier le court terme avec des conséquences néfastes { long terme. C’est ainsi
que dans l’ex-URSS, le système de contrôle poussait les responsables des usines à
satisfaire à des standards de production très élevés (afin de respecter les prévisions
des plans quinquennaux arrêtés au niveau le plus haut) au détriment
malheureusement des entretiens préventifs et des réparations pourtant nécessaires.
Après un certain temps, on constatait que le volume de la production accusait une
baisse sensible à cause de nombreuses pannes, mais entretemps, le responsable de
l’usine avait déj{ été récompensé de ses bons résultats { court terme par une
promotion avant que les ennuis ne commencent.
- Faire pression sur les standards de contrôle. Ainsi a-t-on observé que certains
travailleurs rémunérés { la pièce avaient tendance { ne pas donner le meilleur d’eux-
mêmes en termes de rendement pour éviter qu’on ne réduise leur taux de
rémunération à la pièce. Ainsi, les groupes, les équipes et les ateliers ont tendance
alors à arrêter leurs propres standards, et ce, par un processus informel (cas des
mineurs).

Pour éviter ces réactions négatives, on recourt généralement à la participation,


particulièrement en ce qui concerne la fixation des objectifs et le choix des méthodes de
contrôle. Ce faisant, les travailleurs accepteront plus volontiers le réalisme des objectifs
lors des contrôles ultérieurs et la pertinence des observations { l’issue de ces contrôles
(cas de la GPO).
238

15.3.2. Le regroupement des tâches

Un autre principe consiste { regrouper les tâches de façon { avoir au sein d’un même
service ou département, un ensemble cohérent d’opérations concourant { la réalisation
d’une phase complète d’un travail { faire. Ceci permet de limiter le nombre de contrôles
(problèmes de coût et de temps) par allègement et/ou élimination des contrôles
intermédiaires.

15.3.3. Le regroupement des services homogènes

Dans le même ordre d’idées, le principe du regroupement des tâches indépendantes


permet d’alléger aussi les contrôles intermédiaires.

Tel est le cas d’une organisation structurée par produits qui regroupe l’ensemble des
opérations permettant la réalisation de chaque produit au sein d’une même entité : le
contrôle peut alors se limiter au résultat de chaque division produit, au lieu de
s’appliquer { des opérations ou { des étapes intermédiaires telles que la production, le
marketing ou les finances. Ainsi, la proximité organisationnelle remplacera très
avantageusement toute forme de contrôle sur les étapes intermédiaires, dans la mesure
où elle facilitera la communication et la coordination nécessaires au guidage de
l’ensemble des efforts des unités vers un même objectif, et permettra par conséquent
une sorte d’autocontrôle.

Il en sera de même pour une organisation par zones géographiques, par marchés ou par
clients, bref pour toute organisation ayant une structure divisionnelle ou opérationnelle.

15.3.4. La comparabilité des services

Si un contrôle fait apparaitre une déviation défavorable par rapport aux objectifs ou aux
standards, cette déviation peut être due, soit à la responsabilité des membres de
l’organisation, soit { un environnement sur lequel ces derniers n’ont aucune prise.
L’identification de la cause de la déviation est donc très importante pour déterminer
avec exactitude le type et le niveau de l’action corrective { initier.

Pour ce faire, il faut comparer les résultats de deux ou plusieurs unités ayant les mêmes
caractéristiques et la même nature, c.à.d. ayant eu à faire face à des circonstances
externes identiques, ayant été soumises au même environnement.

15.3.5. Un système d’information adapté

Pour tout service de contrôle, un système d’information performant est un élément


décisif pour garantir son efficacité. A cet effet, un système d’information doit obéir {
certaines exigences pour être réellement performant, et donc être capable de :
239

- fournir les éléments permettant de suivre le déroulement opérations ;


- indiquer les écarts inhabituels ;
- donner aux responsables des indications précises quant à la cause de ces écarts
inhabituels afin de les aider { apporter les corrections qui s’imposent.
Il faut aussi insister sur le fait que toute information provenant du système de contrôle
doit être elle-même contrôlée. Ceci implique que l’on doit s’assurer, d’une part, qu’elle
est fiable, nécessaire et suffisante, et, d’autre part, qu’elle a été bien comprise par les
destinataires.

CHAPITRE 16 : LE CONTROLE PAR NATURE DES TACHES

Dans ce dernier chapitre, nous allons nous intéresser à la nature des différentes tâches à
contrôler, ce qui va impliquer à chaque fois des techniques de contrôle spécifiques.
240

Ainsi, nous allons tour à tour aborder le contrôle des opérations répétitives, le contrôle
des projets, le contrôle des ressources et le contrôle des stratégies.
16.1. Le contrôle des opérations répétitives

Les opérations répétitives se rencontrent dans la production de masse impliquant un


processus de transformation des intrants en produits ou services. Il y a donc similarité
des opérations, d’où mise en place des procédures, des programmes et des politiques
pour faciliter le contrôle et en minimiser tant le coût de mise en œuvre que le risque
d’erreur. Ainsi, dès que l’on observe une déviation entre l’objectif et le résultat, on
mettra en œuvre une action corrective selon une procédure préétablie.

Il faut cependant souligner deux choses :


- les politiques de contrôle ne sont pas immuables, d’où la nécessité d’en faire un suivi
périodique et une évaluation régulière pour en tester l’efficacité ;
- il n’est pas recommandé d’avoir des politiques préétablies pour toutes les opérations
répétitives, d’où la nécessité d’avoir aussi des contrôles par exception.

16.1.1. Le suivi et l’évaluation des politiques de contrôle

Si les politiques de contrôle sont inadaptées, elles peuvent mener à des erreurs
entrainant une mauvaise utilisation des ressources : il faut donc continuellement évaluer
leur utilité et leur qualité.
Pour cela, le meilleur moyen est de procéder à une évaluation comparative et
dynamique de leurs résultats : on va donc s’interroger sur le fait de savoir si les effets
annexes { une politique de contrôle ont tendance { s’améliorer ou au contraire { se
détériorer.
Prenons le cas du contrôle de productivité dans un atelier. Si on constate que le coût de
la mise en œuvre de l’action corrective, a fortement augmenté, et que cela est dû {
l’acquisition d’une machine plus performante, il va de soi qu’une modification de la
politique de contrôle s’impose, en l’occurrence par une adaptation { la hausse du
nombre de pièces défectueuses déclenchant l’action corrective.

16.1.2. Le contrôle par politique et par exception


Comme dit plus haut, il n’est pas économique d’avoir des politiques de contrôle couvrant
toutes les situations que l’entreprise peut rencontrer : seules donc les situations les plus
fréquentes seront concernées par des politiques préétablies dans la mesure où le coût
d’élaboration et de suivi de ces politiques devient vite prohibitif. Dans ce cas, la solution
consiste { recourir aux responsables dès qu’un problème non prévu dans la politique de
contrôle apparait, en utilisant donc la procédure de contrôle dit par exception, c.à.d. le
contrôle fait directement par le responsable.

De même, le contrôle par exception ne peut, lui non plus, être généralisé à cause de son
coût élevé, car c’est un contrôle qui n’est adapté qu’{ une situation donnée.
241

Il faut donc essayer de déterminer la part du contrôle par exception dans l’ensemble du
contrôle des opérations répétitives en utilisant deux approches possibles :

a. L’approche du point mort

Il s’agit de déterminer { partir de quelle fréquence d’opérations de même nature, il


devient souhaitable de remplacer un responsable-contrôleur par un ensemble de
politiques de contrôles. Cette méthode repose sur les deux constatations ci-après :

- un responsable peut assumer une multitude de fonctions : d’où, la partie fixe du coût
associé { son activité de contrôle, est d’un niveau plus bas que le coût d’élaboration
des programmes et procédures associés à une politique de contrôle;
- par contre, le coût variable du contrôle par le responsable a toujours tendance à être
supérieur au coût de la mise en œuvre des politiques préétablies, dans la mesure où
le recours au contrôle par responsable entraîne des délais d’opérationnalisation plus
longs et, par conséquent, les coûts associés au temps et aux erreurs sont également
plus élevés.
A partir de ces deux constatations, on détermine, par un calcul de point mort, à partir de
quelle fréquence d’opérations similaires il faut faire appel { des politiques pour alléger
le travail des responsables gestionnaires-contrôleurs, comme le montre le graphique n°
2 ci-dessous.
Graphique n° 4 : Approche du point mort pour le contrôle des opérations
répétitives

Coût

coût total contrôle par un responsable

coût total contrôle par une politique

coût fixe contrôle par une politique

coût fixe contrôle par un responsable

0 A Degré de similitude des opérations


b. L’approche de l’optimisation

Dans cette approche, il s’agit de déterminer le pourcentage optimum des contrôles par
exception comme le montre le graphique n° 4 où l’on a, d’un côté, le coût d’un
responsable-contrôleur associé aux différentes quantités de contrôles par exception, et,
de l’autre côté, le coût de mise en œuvre d’une politique de contrôle

Coût
Coût
Coût total
Coût total
242

Graphique n° 5 : Approche de l’optimisation pour le contrôle des opérations


répétitives

Ces deux types de coûts évoluent en sens inverse, comme le montre le graphique n° 3
ci-dessus :

- concernant les politiques de contrôle, on constate qu’au fur et { mesure qu’on


les étend à toutes les opérations, leurs coûts augmentent du fait de la
complexité grandissante du système { mettre en place, c.{.d. qu’il y a de plus
en plus de situations qui se présentent et pour lesquelles il faut prévoir une
politique particulière : ce type de contrôle a donc un coût marginal croissant ;
- parallèlement, le coût associé au contrôle par un responsable a tendance à
décroitre du fait de la diminution de la prestation ou du nombre des cas à
contrôler.

Le choix se fera donc en choisissant un mix des deux types de contrôle qui minimise
le coût total de contrôle (sommation des deux types de coûts), soit le point A.

Il faut cependant souligner qu’il n’est pas toujours aisé d’établir la forme exacte de la
fonction de coût de mise en œuvre d’une politique de contrôle et qu’il faudra par
conséquent recourir soit { l’approximation, soit { l’expérience.

16.2. Le contrôle des projets et des ouvrages complexes

16.2.1. Les projets et les ouvrages complexes

Un projet est un ensemble d’activités temporaires et ponctuelles non répétitives et


comprenant un début et une fin bien définis. Sa taille ou son ampleur peuvent varier
allant de l’organisation de la cérémonie commémorant le centenaire de la création d’une
entreprise au lancement d’un nouveau modèle d’avion.
243

Dans les entreprises, le projet concerne surtout : (i) la construction d’un ouvrage unique
(immeuble, bâtiment, barrage, route, pont,…) ou d’un équipement spécifique (turbine,
fusée, sous-marin, navette spatiale, prototype, …) ; (ii) la réalisation d’une opération
particulière (lancement d’un nouveau produit, acquisition d’une entreprise, réparation
d’un gros équipement,…).

Les projets complexes exigent des compétences particulières et s’accommodent mal aux
procédures standardisées et répétitives propres aux activités couramment réalisées au
sein des entreprises.

Pour gérer un projet, on va constituer une équipe dirigée par un coordonnateur, lequel
rend compte de l’avancement du projet au responsable hiérarchique du projet. Cette
équipe est temporaire, ce qui implique qu’{ la fin du projet, ses membres regagnent
leurs services d’origine, sont affectés { d’autres projets ou quittent l’entreprise (cas d’un
contrat à durée déterminée ou d’un contrat de consultance).

Dans un projet, trois paramètres importants doivent être pris en considération : le


temps d’exécution du projet, son coût et les ressources nécessaires. En fait, c’est le temps
qui est le paramètre le plus important, car il a un impact certain, voire décisif, sur le coût
final du projet et sur les ressources nécessaires à sa réalisation : ainsi, un retard trop
important peut transformer un projet très rentable en un véritable gouffre financier.
D’où, il faut tout mettre en œuvre pour réduire le temps d’exécution des projets
(planification) et pour ne pas dépasser les délais prévus (contrôle). Pour ce faire, il faut :

- diviser le projet en tâches intermédiaires ;


- définir l’ordre des tâches pour déterminer celles qui doivent être réalisées avant les
autres et celles qui peuvent se réaliser parallèlement ou concomitamment ;
- affecter un responsable à chacune des tâches ;
- établir la liste des ressources nécessaires et leur temps d’acquisition ;
- évaluer le temps nécessaire pour l’accomplissement de chaque tâche ;
- mettre en place un système de suivi et de contrôle du temps de réalisation des
différentes tâches pour s’assurer que le projet se terminera dans les délais.

Pour suivre et contrôler l’état d’avancement du projet, on utilise généralement deux


outils, à savoir le diagramme de Gantt (ainsi que le diagramme de charge qui en est la
version modifiée) et la méthode PERT TEMPS.

16.2.2. Le diagramme de Gantt

Le diagramme de Gantt permet de visualiser l’état d’avancement des tâches d’un projet
classées dans l’ordre chronologique par rapport aux prévisions : elle permet donc de
vérifier si une tâche est dans les délais, en avance ou en retard. Dans ce dernier cas, le
responsable doit prendre les mesures correctives adéquates pour s’assurer que
l’ensemble du projet pourra se terminer dans les délais.
244

Le tableau n° 7 ci-dessous en est une illustration avec comme exemple le cas de la


construction d’une villa répartie en 8 activités (cases noires = prévisions et cases grises
= réalisations).

Tableau n° 7 : Diagramme de Gantt

ACTIVITES DUREE (SEMAINES)


1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12
Faires les plans

Construire la
fondation
Elever les murs

Poser la charpente

Couvrir a toiture

Poser les portes et les


fenêtres
Installer l’électricité
et la plomberie
Crépir et peindre les
murs

16.2.3. Le diagramme de charge

Le diagramme de charge est une version modifiée du diagramme de Gantt : il donne la


liste des personnes ou des ressources en lieu et place des activités ou tâches, et permet
ainsi au manager de planifier et de contrôler la répartition de la charge du travail. Plus
concrètement, il permet :

- de savoir qui est disponible et quand, et donc à qui on peut confier une tâche
supplémentaire ;
- d’accepter des tâches supplémentaires (au besoin en établissant des ordres de
priorités entre les différentes tâches) ou de ne plus en accepter ;
- de prendre éventuellement les mesures adéquates en cas d’acceptation de tâches
supplémentaires (heures supplémentaires, augmentation des effectifs, recours à des
sous-traitants,…).

Le tableau n° 8 ci-dessous illustre, pour un semestre, le degré d’occupation des six


experts qui composent un bureau d’études.
245

Tableau n° 8 : Diagramme de charge

NOMS PERIODE
JAN FEV MARS AVR MAI JUIN
Eyenga
Kabasele
Kabwe
Matondo
Molisho
Paluku

16.2.4. La méthode PERT TEMPS ou CPM

a. L’utilité de la méthode PERT

Le diagramme de Gantt et le diagramme de charge sont des méthodes visuelles qui sont
utiles quand les activités sont peu nombreuses. Cependant, elles deviennent inadaptées
dans le cas des projets très complexes nécessitant la coordination de nombreux services
avec des centaines ou des milliers d’activités dont certaines doivent se dérouler dans un
ordre précis et d’autres peuvent se chevaucher (tel que le lancement d’un produit
nouveau ou la construction d’un nouveau paquebot).

Il faut alors utiliser des techniques d’optimisation du type PERT qui est l’abréviation de
Planning Evaluation and Research Task devenue Planning Evaluation and Review Technic
(qui peut se traduire par technique d’établissement et de mise { jour des programmes).
Cette méthode a été mise au point aux Etats-Unis dans les années 1950 et a été
appliquée en 1958 pour coordonner les milliers de sous-traitants, fournisseurs et
agences (plus de 9.000) qui ont dû travailler ensemble sur le projet de construction des
missiles balistiques nucléaires miniaturisés Polaris : elle a permis de ramener le délai
d’exécution de ce programme de 7 { 4 ans. Autre exemple : elle a permis de construire
en 2 ans seulement un paquebot aussi gigantesque que le Queen Mary 2.

A cet effet, on distingue le PERT TIME ou PERT TEMPS (qui permet de minimiser le
temps de réalisation d’un projet) et le PERT COST (qui permet de minimiser le coût
d’exécution d’un projet). Ici, c’est le PERT TEMPS que nous allons examiner.

La méthode PERT TEMPS se présente donc sous la forme d’un organigramme décrivant
les activités ou tâches successives et simultanées nécessaires { la réalisation d’un projet
et précisant la durée de chacune de ces activités/tâches. C’est donc une technique { la
fois de prévision, de contrôle et de gestion du temps de réalisation d’un projet, car elle
permet de déterminer le temps d’exécution d’un projet, de suivre son état d’avancement
et de prendre, le cas échéant, les mesures correctives nécessaires pour assurer le respect
des délais.

b. Les étapes de la méthode PERT TEMPS


246

La méthode PERT TEMPS comprend les six activités ci-après :

- La décomposition du projet en un certain nombre d’activités ou de tâches principales


à accomplir, chaque tâche commençant et se terminant par une étape.

- L’établissement de l’ordre chronologique dans lequel les différentes tâches doivent


apparaitre, en spécifiant les tâches qui doivent être exécutées avant les autres
(tâches successives) et les tâches qui peuvent être exécutées de façon concurrente
(tâches simultanées ou concomitantes).

- L’élaboration du « réseau PERT » par la détermination de l’enchaînement des


différentes tâches. Les tâches sont représentées par des flèches (lignes pleines pour
les tâches réelles et lignes pointillées pour les tâches fictives) montrant le sens de la
progression et elles sont identifiées par une lettre (A, B, C, D, E, F, G et H dans notre
exemple) suivie d’un chiffre qui correspond { la durée de la tâche (voir le point
suivant). Chaque tâche se termine par une étape qui est représentée par un cercle
comportant trois parties : la partie du dessus mentionne le numéro de l’étape, tandis
que les deux parties du dessous mentionnent deux dates, à savoir la « date au plus
tôt » (date à laquelle la tâche pourra être terminée au plus tôt en tenant compte de
l’exécution des tâches précédentes) et la « date au plus tard » (date à laquelle la tâche
doit nécessairement se terminer sous peine de retarder l’ensemble du projet).

- L’estimation du temps nécessaire { l’accomplissement de chaque tâche ou activité :


c’est ce temps qui sera inscrit sur le graphe par un nombre accompagnant chaque
flèche et qui servira pour déterminer les deux dates inscrites dans les différentes
étapes (date au plus tôt et date au plus tard). Cette estimation se fera par l’utilisation
d’une moyenne pondérée ainsi calculée :

dpro = où :

dpro = durée probable


dopt = durée optimiste (conditions idéales)
dvrai = durée vraisemblable (conditions normales)
dpes = durée pessimiste (pires conditions)

- La détermination du « chemin critique » ou « critical path » en anglais, c.à.d. de la


succession des tâches les plus longues à réaliser, chemin dont la durée détermine
automatiquement la durée totale de l’ensemble du projet. La méthode PERT TEMPS
s’appelle aussi Méthode du Chemin Critique ou Critical Path Method en anglais
(CPM). Pour déterminer ce chemin critique, on va d’abord calculer la « marge totale »
de chaque tâche qui est égale à la différence entre la date au plus tard et la date au
plus tôt : si cette marge totale est égale à zéro, la tâche est alors qualifiée de « tâche
critique ». Ainsi, le chemin critique est constitué par l’ensemble des tâches critiques :
247

il est donc le chemin sur lequel aucune tâche ne peut connaitre un quelconque retard
sous peine de retarder l’ensemble du projet.

- Le suivi des tâches situées sur le chemin critique (et dont tout retard entraînerait
automatiquement un retard dans la réalisation de l’ensemble du projet) afin de
pouvoir en respecter le délai prévisionnel de réalisation, en prenant, le cas échéant,
les mesures correctives adéquates (heures supplémentaires, augmentation des
effectifs, renforcement ou réaffectation des ressources matérielles et/ou financières
ou recours à la sous-traitance).

c. Le chemin critique

La détermination du chemin critique est donc très importante pour deux raisons au
moins :

- elle permet de déterminer de façon prévisionnelle la durée d’un projet, ce qui est de
la plus grande importance quand l’entreprise doit p.ex. répondre { un appel d’offre,
auquel cas elle devra néanmoins ajouter à la durée du chemin critique, une marge
tenant compte des inévitables impondérables ;
- elle permet de suivre de très près les différentes tâches qui se trouvent sur ce
chemin de façon { pouvoir apporter les correctifs voulus dès que l’on constate le
débordement d’une tâche par rapport au temps prévu dans le diagramme.

Quant aux autres chemins, ils appellent moins d’attention, car ils dégagent une « marge
libre » positive (différence entre la durée du chemin critique et la durée du chemin
considéré) qui laisse une certaine latitude : un retard dans les tâches situées sur ces
chemins, n’a aucune conséquence sur le temps de réalisation de l’ensemble du projet.

Il faut noter qu’il est possible qu’un projet puisse avoir, non pas un seul chemin critique,
mais deux ou plusieurs chemins critiques parallèles.

Par ailleurs, on parlera de « chemin sous-critique » pour désigner un chemin dont la


durée est proche de la durée du chemin critique, c.à.d. de la durée du projet. Ainsi donc,
le chemin critique peut changer en cours d’exécution du projet, notamment en cas
d’écart très faible entre la durée du chemin critique et celle d’un chemin sous- critique,
ou en cas de retard excédant la marge libre sur un chemin non critique.
Le schéma ci-dessous donne une illustration de la méthode PERT TEMPS concernant le
projet de construction d’un bâtiment qui comporte 8 tâches qui vont de la réalisation
des plans à finition (A à H).
248

Schéma n° 19 : Illustration de la méthode PERT TEMPS

Source : fr.wikipedia.org/wiki/PERT.

Ainsi, en partant de la première tâche A à la dernière tâche H, nous avons trois


possibilités de chemins ou de suites de tâches et d’étapes :

- le chemin n° 1 : A – B – C - H, soit 160 jours


- le chemin n° 2 : A – B – F – G - H, soit 220 jours
- le chemin n° 3 : A – D – E - H, soit 60 jours.

On constate que le chemin le plus long est le chemin n° 2 qui comporte 220 jours et qui
est donc le chemin critique.

Par contre, les deux autres chemins dégagent une marge libre de 60 et 160 jours
respectivement pour le chemin n° 2 et pour le chemin n° 3 : compte tenu de l’importance
de ces marges libres, ces deux chemins ne peuvent être qualifiés de chemins sous-
critiques. Cette marge libre fait qu’un retard sur un de ces deux chemins non critiques
n’entraînera nullement un allongement du projet et ne nécessitera donc aucune action
corrective particulière, sauf si ce retard dépasse la marge libre.

16.3. Le contrôle des ressources

16.3.1. Le contrôle des ressources financières ou contrôle financier

Ce contrôle est le plus répandu et le plus facile { mettre en œuvre étant donné se nature
quantitative. Nous allons examiner ses deux aspects les plus importants, à savoir le
contrôle budgétaire et l’analyse des ratios comptables et financiers.

a. Le contrôle budgétaire

La budgétisation est la formulation des plans en termes numériques ou quantitatifs


(généralement monétaires) pour une période donnée (généralement une année).
249

Les budgets servent { coordonner la planification et permettent que l’autorité soit


déléguée sans perte de contrôle : du fait que les plans sont traduits en unités monétaires,
ils permettent au manager de savoir clairement les sommes dépensées, par qui, quand,
où, et pourquoi. Ceci lui permet donc de déléguer plus facilement l’autorité de la mise en
œuvre du plan. On peut identifier plusieurs types de budgets :

 Les budgets des revenus et des dépenses

Ces budgets sont de loin les plus utilisés et ils traduisent, en termes monétaires, les
plans des revenus et des dépenses d’exploitation.

Dans le budget des revenus, le budget des ventes, qui représente l’expression formelle
détaillée des prévisions des ventes, constitue la source principale des revenus d’une
entreprise : c’est ce budget qui lui permet de faire face aux dépenses d’exploitation et de
réaliser le bénéfice attendu, même si l’on doit également budgétiser les autres types de
revenus tels que les revenus locatifs ou les revenus de la vente des actifs amortis. Notons
que pour une entreprise qui fait de la R&D ou qui pratique la franchise, les redevances
payées par les licenciés ou les franchisés font partie du budget des ventes.

Quant au budget des dépenses d’exploitation, ils doivent suivre la classification des
dépenses qui apparait dans le plan comptable de l’entreprise (matières et fournitures,
transports, autres services, charges et pertes diverses, charges du personnel, impôts et
taxes, frais financiers, dotation aux amortissements, …).

 Les budgets d’immobilisation

Ils définissent les dépenses d’investissement en usines, machines, équipements,


inventaires et autres. Ils peuvent porter sur le court, le moyen ou le long termes.

Comme ces dépenses exigent souvent un délai de récupération assez long, elles font
partie généralement de la planification à long terme.

 Les budgets de caisse ou de trésorerie

Ils représentent simplement une prévision des entrées et des sorties pour évaluer la
situation réelle de la trésorerie de l’entreprise. Leur contrôle est de la plus grande
importance, raison pour laquelle les grandes entreprises ont une Direction de la
Trésorerie. De fait, l’importance de ce contrôle tient aux deux raisons ci-après :

- les valeurs disponibles (caisse et banques) doivent être gérées de façon à permettre à
l’entreprise de faire face { toutes ses obligations au fur et { mesure de leurs
échéances (achat des biens immobilisés, paiement des salaires, des fournisseurs, des
impôts et taxes, des cotisations sociales, des amendes, du service de la dette…), quitte
à contracter un emprunt (généralement bancaire) en cas de besoin ;
250

- l’entreprise ne doit garder par devers elle qu’une très faible encaisse non utilisée,
tout excédent de trésorerie devant être placé pour pouvoir encaisser des revenus
sous la forme d’intérêts créditeurs (aussi faibles soient-ils) ou sous une autre forme
(achat des valeurs mobilières ou placement en matières premières).

 Les budgets physiques

L’élaboration des budgets financiers doit être précédée par celle des budgets physiques
qui s’expriment en termes de temps, d’espace, de matières ou de production (heures-
travail, heures-machine, m2 utilisés, unités de matières ou unités produites).

b. L’analyse des ratios comptables et financiers

Ces ratios, dont le tableau n° 8 donne une illustration, sont calculés à partir des données
comptables tirées du compte d’exploitation générale et du bilan.

Tableau n° 9 : Principaux ratios comptables et financiers


Catégorie Ratio Formule Signification
Liquidité Liquidité globale Actif circulant Passif Tester la capacité de l’entreprise { faire
exigible face à ses engagements
Liquidité réduite Actif circ. – Stocks Tester la liquidité de l’entreprise quand
Passif exigible les stocks tournent lentement ou se
vendent mal
Liquidité Disponible Mesurer la capacité de l’entreprise {
immédiate Passif exig. à CT faire face à ses engagements grâce à ses
liquidités disponibles
Levier Dette sur Actif Endettement total Voir l’importance de l’endettement de
financier Actif total l’entreprise
Exigible à MT et Dettes MT + LT Voir l’importance de l’endettement dans
LT sur Non Fonds Propres les capitaux permanents
Exigible
Couverture des Bénéfice brut Evaluer la capacité de l’entreprise {
intérêts Frais Financiers couvrir le remboursement des intérêts
Activité Rotation des Ventes Evaluer l’efficience de l’exploitation des
stocks Stock Moyen stocks
Rotation de l’actif Ventes Evaluer l’efficacité de l’exploitation de
Actif Total l’ensemble de l’actif
Rentabilité Marge bénéficiaire Bénéfice Net Mesurer la capacité de l’entreprise {
Ventes générer un profit
Rentabilité Bénéfice Net Mesurer l’efficience de l’actif
économique Actif
Rentabilité Bénéfice Net Mesurer la performance des capitaux
financière Fonds Propres propres
Retour sur Bénéfice Net Evaluer l’efficience des fonds investis
investissement Fonds Investis dans un projet ou dans un produit
(ROI)

Source : Elaboré à partir de David F., op. cit., pp. 144-145 ; de Robbins S., op. cit., p. 444 ; et
de Terry G. & Franklin S., op. cit., p. 530.
251

16.3.2. Le tableau de bord multisectoriel ou balanced scorecard

Le balanced scorecard est un tableau de bord multisectoriel qui permet une approche
multidimensionnelle de la mesure de la performance : c’est donc un moyen qui permet
d’évaluer cette performance au-delà des seuls aspects comptables et financiers.

Cette démarche intègre quatre aspects considérés comme importants pour mesurer
cette performance, { savoir l’aspect financier, l’aspect clients, l’aspect processus internes
et l’aspect ressources (ressources humaines et ressources informationnelles). Ainsi, les
managers doivent définir des objectifs précis concernant chacun de ces quatre aspects et
évaluer ensuite si les objectifs ont été atteints.

Cependant, on constate que, même dans les organisations où ce tableau de bord a été
adopté, la tendance des managers est de mettre l’accent sur un seul aspect, celui qui leur
parait le plus déterminant pour la réussite de leurs stratégies.

16.3.3. Le contrôle des stocks

Pour tenir compte des périodes de surproduction ou de sous-production, faire face à la


demande en période de pointe, réaliser des économies d’échelle et éviter des ruptures
de stock, les entreprises doivent constituer des stocks de consommables, de matières
premières, d’en-cours, de produits semi-finis et des produits finis.

Mais étant donné que tout stock a un coût (taux d’intérêt sur les emprunts, coût
d’opportunité, coût de gestion, avaries, vols, pertes, primes d’assurance, …), il faut
réduire autant que faire se peut le coût des stocks, et donc le volume des stocks, en
mettant en œuvre le principe suivant : ne conserver que les quantités jugées suffisantes
pour atteindre les objectifs fixés. Pour ce faire, on peut utiliser plusieurs méthodes dont
les deux ci-après :

a. La méthode des quantités économiques (MQE)

La quantité d’articles { commander en une fois ou quantité économique de


réapprovisionnement, est déterminée de façon à minimiser le total de deux types de
coûts pour une période donnée (généralement une année) :

 Le coût d’acquisition (A)

Il correspond au coût de chaque lancement ou commande, c.{.d. { l’ensemble des coûts


fixes techniques et administratifs liés à chaque lancement ou commande : ce coût n’est
pas proportionnel à la quantité commandée et il est le même à chaque commande ou
lancement (p.ex. frais d’ouverture d’un CREDOC). Pour une période donnée, il est donc le
produit du coût unitaire par lancement (L) par le nombre de commandes ou de
252

lancements pour la période considérée (D/Q) (c.à.d. demande totale de la période D


divisée par la quantité { commander en une seule fois Q). D’où, A = L x

 Le coût de possession (P)

Il correspond au coût du stock moyen détenu : il est donc proportionnel à la quantité


lancée ou commandée. Il est le produit du stock moyen (Q/2) par le coût unitaire de
possession du produit (t) (c.à.d. coût des capitaux investis dans le stock + coût des
infrastructures d’accueil) par la valeur unitaire du produit (u). D’où, P = x t x u

C’est la formule de Wilson qui permet de calculer la quantité économique de


réapprovisionnement en partant du principe que pour minimiser la somme de ces 2
types de coûts, il faut qu’ils soient égaux, soit A=P ou L x = x t x u.

D’où, la quantité économique Q =√

b. La méthode du juste-à-temps (JAT)

Cette méthode a été mise au point au Japon et elle a permis aux entreprises japonaises
d’améliorer très sensiblement leur productivité. Elle consiste { faire en sorte que les
intrants n’arrivent dans les installations de l’entreprise ou sur le poste de travail qu’au
moment voulu, c.à.d. au moment de leur utilisation dans le processus de production.

Cette méthode comporte un très grand avantage : elle permet d’améliorer très fortement
la rentabilité de l’entreprise ({ travers la réduction drastique du coût des
approvisionnements et une utilisation plus économique des espaces disponibles).

Par contre, elle n’est pas exempte de risque : du fait que l’entreprise travaille { flux
tendus, elle court le risque d’une rupture de stock en cas de survenance d’un évènement
non prévu (soit au niveau du fournisseur, soit au niveau de la chaîne logistique).

16.3.4. Le contrôle des ressources humaines

Ce contrôle porte essentiellement sur ce qu’il convient d’appeler « la perte de la valeur ».


A cet effet, on utilisera un ensemble de paramètres sociaux (ratios ou chiffres absolus)
permettant de juger du climat social dans l’entreprise tels que :

- le taux d’absentéisme ;
- le taux de démission ;
- le taux de rotation du personnel ou turn over en anglais ;
- le taux des arrêts de travail pour cause d’accidents ;
- le taux d’arrêts de travail pour cause de grèves ;
253

- le taux d’accident ;
- le ratio du salaire par rapport { la moyenne de l’industrie ou de la région ;
- le nombre jours d’arrêt de travail pour conflits sociaux.

Ce contrôle consiste non pas à porter un jugement sur un événement ponctuel, mais
plutôt à faire des comparaisons dans le temps (évolution des paramètres sociaux) et
l’espace (comparaisons avec les entreprises concurrentes, du même secteur ou de la
même zone géographique), afin de voir si la qualité de la ressource humaine utilisée par
l’entreprise, a tendance { s’améliorer ou au contraire { se détériorer.

Cependant, ce contrôle ne renseigne que sur l’évolution des paramètres sociaux sans en
donner les causes pour une action corrective éventuelle. D’où la nécessité de le
compléter par la recherche des causes d’une éventuelle détérioration de la ressource
humaine de l’entreprise, afin de pouvoir prendre les mesures correctives adéquates.

16.3.5. Le contrôle de l’information

L’information est une ressource d’une importance capitale, car c’est { travers elle que les
managers peuvent suivre et contrôler les différentes activités de leurs organisations.

Les managers doivent donc disposer et mettre en place un « Système d’Information de


Gestion » (S.I.G.) ou « Management Information System » (M.I.S.) en anglais : c’est un
système qui fournit aux managers des informations en quantité, en qualité et en temps.
Il faut noter que ce système peut être manuel, mais idéalement il doit être informatisé.

La notion de système implique les notions d’ordre, d’agencement et de finalité. Ceci


implique que le système doit être capable de collecter les informations, de les traiter et
de les canaliser vers les bonnes personnes et au bon moment.

Mais l’information doit être contrôlée, car une information erronée conduira à des
décisions inadéquates. De même, elle doit être protégée, car il est de plus en plus
fréquent d’assister { des tentatives d’en violer ou d’en saboter le contenu. Par
conséquent, les managers doivent mettre en place des contrôles et des sécurités pour
protéger leurs informations et leurs ordinateurs contre les risques d’attaque de virus et
de piratage (système de cryptage et de pare-feu).

C’est dans ce cadre du contrôle de l’information que l’on constate une tendance de plus
en plus poussée des employeurs à vouloir contrôler les ordinateurs et autres
équipements utilisés par leurs employés pendant les heures de travail, et même parfois
en dehors de celles-ci. Cette tendance a été accélérée par le fort développement des
NTIC et elle prend plusieurs formes : surveillance et lecture des courriels, des fichiers
informatiques, des textos, des blogs et des sites sociaux, écoute des communications
utilisant un téléphone de service, surveillance et suivi des déplacements effectués avec
les véhicules de service, interdiction d’utiliser au sein de l’entreprise des téléphones
portables munis d’une caméras ou d’un appareil photo.
254

Les employeurs justifient cette intrusion dans la vie privée de leurs employés comme
moyen de :

- s’assurer que les secrets de l’entreprise ne sont pas divulgués et transmis aux
concurrents volontairement ou involontairement ;
- limiter le temps que les employés consacrent à des activités non professionnelles
pendant les heures de travail, car ils ont été embauchés pour travailler au profit de
l’entreprise et non pour s’adonner { des activités d’ordre privé ;
- réduire les coûts liés { l’utilisation des téléphones et des voitures de fonction { des
fins personnelles.

A cet effet, il faut noter que les législations varient d’un pays { l’autre et donc limitent
plus ou moins ce type de contrôle des employeurs sur leurs employés.

16.3.6. Le contrôle pour vols ou détournements

Le vol ou le détournement peut se définir comme l’appropriation non autorisée par un


employé ou un tiers d’un bien appartenant { l’entreprise pour un usage privé. Il peut
prendre plusieurs formes telles que le vol d’argent, la surfacturation, la sous-facturation,
la falsification des notes de frais, le sabotage d’un équipement en vue de l’acquérir { vil
prix après son déclassement ou le détournement des équipements.

Le contrôle relatif à ce phénomène est donc très important, car les vols et les
détournements sont de plus en plus importants : encore une fois, ils sont accentués par
le développement des NTIC au point qu’ils peuvent parfois mettre en péril la survie des
entreprises. A cet effet, on peut se référer aux études menées aux Etats-Unis au début
des années 2000 : elles font apparaitre que 85 % des vols et détournements dans les
entreprises sont l’œuvre de leurs propres employés et qu’ils occasionnent des pertes
estimées en moyenne annuelle à 4.500 $ par employé.

Pour pouvoir réduire l’ampleur de es vols et détournements, il faut d’abord en connaitre


les causes qui peuvent être de plusieurs ordres, notamment :

- le laxisme des contrôles qui peut constituer un facteur incitatif et favorisant ;


- l’impunité généralisée devant ce type de délit ;
- le sentiment d’iniquité salariale de la part de tout ou partie du personnel ;
- les conséquences des pressions financières et des difficultés financières, surtout
quand le niveau de rémunération est très bas.

Le tableau n° 9 ci-dessous donne quelques mesures de contrôle qui peuvent dissuader


ou réduire les vols et détournements.
255

Tableau n° 10 : Mesures de contrôle contre les vols et détournements

Contrôle préventif Contrôle continu Contrôle rétroactif


Approfondir les enquêtes Communiquer aux Informer les employés de
de moralité avant employés les coûts et les tout cas de vol dans
embauche. conséquences dus aux vols. l’entreprise.
Elaborer, avec la Informer les employés sur Solliciter les services des
participation des employés, leur efficacité dans la enquêteurs professionnels
un règlement intérieur prévention des vols. en cas de vol.
définissant le vol et les
sanctions y liées.
Former les employés au Installer un système de Sanctionner les coupables
respect du règlement vidéosurveillance partout avec la plus grande
intérieur. où c’est possible et justifié. sévérité.
Confier la sécurité interne Installer un dispositif de Evaluer et redéfinir les
de l’entreprise { des verrouillage sur les mesures de sécurité et de
professionnels. ordinateurs, les téléphones contrôle.
et les messageries.
Etre { l’écoute des Ouvrir une ligne Evaluer la culture de
employés pour détecter téléphonique spéciale l’entreprise et les relations
leurs problèmes et essayer permettant de signaler les managers-subalternes.
de les résoudre. vols ou tentatives de vols.
Source : Adapté de Robbins S., op. cit., p. 451.

16.4. Le contrôle des stratégies

Ce contrôle est à la fois le plus complexe et le moins développé, alors qu’il est d’une
importance capitale.

Pour rappel, la stratégie est l’ensemble articulé des objectifs à atteindre, des ressources
pour les atteindre et des plans pour obtenir et utiliser ces ressources.

Etant donné l’aspect prospectif de la stratégie, le temps qui doit s’écouler entre le
moment de sa formulation et le moment où elle commence à porter ses fruits, le
caractère aléatoire de l’environnement et sa nature dynamique, il faut donc mettre au
point un système adapté de contrôle de la stratégie.

A cet effet, on peut distinguer trois types de contrôles concernant la stratégie : le


contrôle de l’élaboration de la stratégie, le contrôle des hypothèses et de l’évolution de
l’environnement, et le contrôle a posteriori de la stratégie.
256

16.4.1. Le contrôle de l’élaboration de la stratégie

Ce contrôle est un contrôle en amont c.à.d. sur la manière dont la stratégie a été
élaborée121. On vérifie ainsi si la démarche suivie pour l’élaboration de la stratégie a été
logique, si les étapes ont été bien suivies, si rien n’a été oublié, bref on vérifie la qualité
de l’élaboration et de la mise en œuvre de la stratégie.

16.4.2. Le contrôle des hypothèses et de l’évolution de l’environnement

C’est un contrôle continu ou de suivi qui est essentiellement dynamique et qui


correspond donc mieux à la nature même de la stratégie. Il consiste à vérifier
périodiquement ou dès que l’on constate une modification importante de
l’environnement :

- si les hypothèses relatives { l’environnement interne (moyens nécessaires à la mise


en œuvre de la stratégie, niveau des salaires, productivité,…) doivent être modifiées ;
- si les prévisions faites sur l’évolution de l’environnement externe (concurrence, coût
des intrants, taux de croissance du P.I.B., taux d’inflation, taux de change de la
monnaie nationale, taux de chômage, consommation des ménages, évolution
démographique, situation sociopolitique,…) doivent être réévaluées.

Ainsi, toute modification dans les hypothèses de base ou toute réévaluation des
prévisions sur l’évolution de l’environnement, doivent automatiquement donner lieu {
une révision de la stratégie.

16.4.3. Le contrôle a posteriori de la stratégie

C’est un contrôle en aval qui porte sur les résultats et qui consiste donc { savoir si ceux-
ci sont conformes aux objectifs stratégiques. Ce type de contrôle n’a donc qu’un intérêt
limité.

En effet, la stratégie ne portant ses fruits qu’après une longue période au cours de
laquelle de nombreux événements extérieurs ont pu se produire avec des répercussions
positives ou négatives sur son déroulement, il devient donc difficile de dire si c’est grâce
{ la stratégie que les objectifs ont été atteints ou si c’est { cause de l’inadéquation de la
stratégie qu’ils n’ont pas été atteints.

Par conséquent, ce type de contrôle doit être complété par les deux premiers, à savoir le
contrôle de l’élaboration de la stratégie et le contrôle des hypothèses de base et de la
prévision sur l’évolution de l’environnement.

121
Voir point 15.2.1. du chapitre précédent sur le contrôle en amont.
257

BIBLIOGRAPHIE DE BASE

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3ème édition, Librairie Vuibert, Paris, 2002.

2. CAVAGNOL André, CAVAGNOL Bérenger et ROULLE Pascal, L’Essentiel des


Auteurs Clés en Management, Gualino, Lextenso Editions, 2013.

3. CENECO, DIXECO du Management, 3ème édition, Editions ESKA, 2000.

4. CHANDLER D. Alfred, Stratégies et Structures de l’Entreprise, Editions Nouveaux


Horizons, 1972.

5. GRANDGUILLOT Béatrice et Francis, L’Essentiel du Contrôle de Gestion, 2ème


édition, Editions Galino, Paris, 2007.

6. MAYRHOFER Ulrike, Management Stratégique, Editions Lexifac Gestion, 2007.

7. MINTZBERG Henry, Le management. Voyage au Centre des organisations, 2ème


édition, Editions d’Organisation, Paris, 2004.

8. PELLETIER Arnaud et CUENOT Patrick, Intelligence Economique, Mode d’Emploi,


Editions Person France, 2013.

9. PLANE Jean-Michel, Théorie des organisations, 4ème édition, Dunod, Paris, 2013.

10. ROBBINS Stephen, DECENZO David, COULTER Mary et RULLING Charles-


Clemens, Management. L’Essentiel des Concepts et Pratiques, 7ème édition, Editions
Nouveaux Horizons, 2011.

11. SCHERMERHORN R. John, Le Management en Action, 3ème édition, Editions


Pearson, Québec, 2013.

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