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Réunion d'Experts
Note conceptuelle
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LA REDACTION DE L’HISTOIRE GENERALE DE L'AFRIQUE
Au lendemain de leurs indépendances, au début des années 1960, les pays africains avaient
exprimé le besoin de comprendre leur passé et de renforcer la connaissance de leur héritage
commun. Ils avaient alors fait appel à l’Histoire pour affirmer leurs identités culturelles et
raffermir leur aspiration à l’unité africaine. Pour ce faire, il était jugé nécessaire de combattre
certaines idées préconçues selon lesquelles les sociétés africaines ne pouvaient faire l’objet
d’une étude scientifique, faute notamment de sources et de documents écrits. Il était également
estimé nécessaire de remettre en question la lecture conventionnelle de l'histoire afin de
dresser un portrait précis du passé du continent africain, de sa diversité culturelle ainsi que de
son apport au progrès général de l’Humanité. C’est ainsi qu’à sa XVIème session (1964), la
Conférence générale de l'UNESCO a autorisé le Directeur Général à entreprendre l’élaboration
d’une Histoire générale de l’Afrique. Dans ce cadre, l’Histoire générale de l’Afrique fut écrite et
publiée en huit volumes avec une édition principale en anglais, en français et en arabe. De
même, douze études et documents traitant de questions et de thèmes particuliers ont été
publiés dans le cadre de ce travail colossal. Par ailleurs, une version abrégée de cet ouvrage a
été publiée en anglais, français, kiswahili, hausa et peul. Cette prodigieuse entreprise a
représenté trente-cinq années de coopération entre trois cent cinquante spécialistes de l’Afrique
et du monde entier.
Pour s’attaquer à cette tâche immense, complexe et ardue, vu la diversité des sources et
l’éparpillement des documents, l’UNESCO a procédé par étapes.
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La seconde étape (1969 – 1971) a été consacrée à examiner et à préciser les questions
touchant à la rédaction et la publication de l’HGA: présentation de cette histoire couvrant trois
millions d’années en huit volumes, édition principale en anglais, en français et en arabe ainsi
que la traduction en langues africaines telles que le kiswahili, le hausa, le peul, le yoruba ou le
lingala.
La principale ambition de ce projet a été d’offrir une vision culturellement pertinente de l’histoire
basée sur une approche interdisciplinaire, développant une histoire des idées et des
civilisations, des sociétés et des institutions. Pour ce faire, il a été décidé de recourir aux
sources africaines telles que la tradition orale, les formes d’art et la linguistique. Il a été
également décidé de considérer l’Afrique comme une entité historique et ce, afin d’éviter la
dichotomie trop souvent constatée, dans les ouvrages publiés jusqu’alors, entre l’Afrique au
nord du Sahara et l’Afrique au sud du Sahara. La proportion importante d'éminents
universitaires africains parmi les auteurs, les directeurs de volumes et les membres du comité
scientifique pour cette histoire met en avant ce changement de perspective.
Cependant, la HGA, achevée avec succès en 1999, reste à ce jour inaccessible au grand
public. En dépit de la publication d'une version abrégée en huit volumes et la traduction des
volumes de l’édition principale en plusieurs langues (y compris en chinois, italien, japonais,
coréen, espagnol et portugais), sa forme actuelle et son coût prohibitif empêchent une large
distribution. Bien que l’un des objectifs fixés au départ ait été de faire en sorte que cette HGA
serve de base à l’élaboration de manuels scolaires, de livres pour enfants, d’émissions
télévisées ou radiodiffusées, elle n’est pas encore suffisamment exploitée. Très peu de manuels
d'histoire ont réellement incorporé les aspirations du projet et l'enseignement de l'histoire en
Afrique continue d’être eurocentrique. Ces dernières années, la disposition émergeante des
concepteurs de curricula dans certains pays d’Afrique est celle de la « nationalisation » des
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programmes d'histoire, négligeant ainsi les racines communes des diverses cultures et
civilisations africaines ainsi que les interactions historiques entre celles-ci.
Sachant que l'enseignement de l'histoire contribue à former les identités des peuples et à
comprendre les liens sous-jacents à la diversité culturelle dans toutes les régions, il a été
décidé que l'objectif de la phase II de la HGA serait de favoriser un enseignement de l'histoire
fondé sur une perspective culturelle africaine dans l’enseignement primaire, secondaire et
supérieur en Afrique.
Dans cette perspective, la création de l'Union africaine (UA) offre une grande opportunité pour
la rénovation de l'enseignement de l'histoire sur tout le continent. Les Etats Membres de l'UA se
sont déjà exprimés en faveur de la rénovation de l'enseignement de l'histoire sur la base de
l’Histoire générale de l'Afrique. Par ailleurs, la deuxième décennie de l'Education pour l'Afrique
(2006-2015) et le plan d'action pour la décennie adoptés à Khartoum en 2006 représentent un
atout pour l’amélioration de la qualité de l'éducation à tous les niveaux.
Des discussions importantes sur la conception de la deuxième phase avaient commencé avant
même la fin de la rédaction de l’Histoire générale de l’Afrique en 1999.
La première réunion dans ce sens remonte à 1986. Elle a été organisée par le Bureau de
l'UNESCO à Dakar (le Bureau Régional pour l’Education en Afrique, BREDA). Au cours de cette
réunion, il a été constaté que l'histoire africaine occupait à peine 25 % du temps consacré à
l’étude de l’histoire dans les écoles et que ce chiffre devrait augmenter. La réunion a également
souligné la nécessité d’utiliser le vocabulaire employé par les Africains eux-mêmes pour décrire
leurs situations sociales, culturelles et économiques. Les experts ont conclu que les
programmes d'étude de l'histoire dans les écoles étaient obsolètes et inadéquats, et ont
recommandé l'élaboration de nouveaux manuels à partir de l’Histoire générale de l’Afrique.
L'idée la plus fortement soutenue était celle de la rédaction de trois manuels d'histoire sur la
base de la version principale ou abrégée de l’Histoire générale de l’Afrique pour une
utilisation sur tout le continent.
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Les experts ont également recommandé que, dans un premier temps, les manuels
correspondent à l'enseignement de l'histoire:
- dans les dernières années de l'école primaire (accompagnant les enfants à observer les
traces de leur passé dans leur environnement)
- dans le premier cycle de l'école secondaire (proposant une vue chronologique de l'histoire du
continent, l'Egypte occupant une place importante)
- dans le dernier cycle de l'école secondaire (examinant en détail les thèmes particuliers et
inculquant un esprit d’analyse critique);
Une deuxième réunion organisée à Nairobi en mars 1989 sur les thèmes des manuels
d’enseignement et de l'enseignement de l'histoire dans les écoles africaines a approuvé les
recommandations de la réunion de Dakar. Elle a vivement recommandé que ces manuels
soient écrits dans une perspective africaine sans négliger les particularités nationales et sous-
régionales. Les experts ont mis l’accent sur le fait que ces manuels devraient démontrer les
contributions africaines au progrès général de l’humanité. Ces manuels devraient également
montrer les changements et évolutions politiques mais aussi sociaux, culturels et économiques
survenus au cours du temps. Enfin, les experts ont conclu que l'engagement politique des Etats
africains était crucial pour la mise en œuvre de ce projet.
Lors de sa réunion finale tenue à Tripoli, Libye en 1999, le Comité Scientifique International
pour l’Histoire générale de l’Afrique a examiné, entre autres, un Rapport sur l’utilisation des
volumes de l'Histoire générale de l'Afrique à des fins pédagogiques. Rédigé par le Professeur
Dramani Issifou, ce rapport soulève plusieurs questions importantes concernant les objectifs et
les méthodes de l'enseignement de l'histoire ainsi que l'utilisation de la HGA à des fins
pédagogiques. Il conclut que la HGA est exploitable comme source principale pour la rédaction
de nouveaux manuels d'histoire. Cependant, les auteurs de ces manuels devraient rechercher
dans les archives des documents de support et des illustrations appropriées. De plus, le rapport
recommande l’élaboration d’autres matériels didactiques tels que des bandes dessinées, des
CD-ROM et des cartes. Le Comité scientifique international a souscrit aux recommandations de
ce rapport ainsi qu’à celles des réunions de Dakar et de Nairobi.
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En conséquence, pour mieux cerner les problèmes de l’enseignement de l’Histoire en Afrique,
l’UNESCO a, par la suite, confié au Professeur Pierre Kipré une étude sur les programmes
d'histoire en vigueur dans les pays francophones d’Afrique, y compris Madagascar. Dans son
rapport intitulé « Inventaire critique des manuels d’histoire en usage en Afrique Noire
francophone (le cas de l’enseignement primaire et secondaire) », l’auteur propose une analyse
critique des manuels utilisés en Afrique francophone et à Madagascar. Il conclut qu'il y a, entre
les pays concernés, une grande disparité dans les contenus et la qualité des manuels d'histoire
et dans leur disponibilité. Il analyse les limites et les faiblesses « du programme minimal »
appliqué depuis les années 60 et note que les programmes d'histoire étaient en cours de
révision dans la plupart des pays étudiés. Selon lui, beaucoup de changements sont intervenus
dans les programmes d’histoire depuis la fin des années 1980 avec certains concepteurs de
programmes scolaires qui privilégient plutôt une perspective africaine de l'histoire, et d’autres
qui tendent vers une « nationalisation » des programmes.
• Elaborer, pour les niveaux primaire et secondaire de l’ensemble des Etats membres de
l’UA, trois manuels communs d'histoire ainsi qu’un atlas historique et un CD-ROM sur la base
de l’Histoire générale de l'Afrique. Les états ou les sous-régions pourront traduire les manuels
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dans leurs langues nationales ou bien dans leurs langues d’enseignement et, si besoin est,
pourront les adapter aux circonstances locales sans changer la portée régionale du contenu.
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Les conclusions et recommandations de cette réunion d’experts seront soumises au nouveau
Comité scientifique pour l’utilisation pédagogique de l’Histoire générale de l’Afrique, qui se
réunira du 18 au 20 mars 2009 et qui assurera la responsabilité intellectuelle et scientifique du
projet.