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CLT/CPD/DIA/2009/RP/134

Paris, Mars 2009


Original: English

« L'Utilisation pédagogique de l'Histoire générale de l'Afrique »

Réunion d'Experts

UNESCO Paris (Fontenoy, Salle XIII)


16 et 17 mars 2009

Note conceptuelle

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LA REDACTION DE L’HISTOIRE GENERALE DE L'AFRIQUE

Au lendemain de leurs indépendances, au début des années 1960, les pays africains avaient
exprimé le besoin de comprendre leur passé et de renforcer la connaissance de leur héritage
commun. Ils avaient alors fait appel à l’Histoire pour affirmer leurs identités culturelles et
raffermir leur aspiration à l’unité africaine. Pour ce faire, il était jugé nécessaire de combattre
certaines idées préconçues selon lesquelles les sociétés africaines ne pouvaient faire l’objet
d’une étude scientifique, faute notamment de sources et de documents écrits. Il était également
estimé nécessaire de remettre en question la lecture conventionnelle de l'histoire afin de
dresser un portrait précis du passé du continent africain, de sa diversité culturelle ainsi que de
son apport au progrès général de l’Humanité. C’est ainsi qu’à sa XVIème session (1964), la
Conférence générale de l'UNESCO a autorisé le Directeur Général à entreprendre l’élaboration
d’une Histoire générale de l’Afrique. Dans ce cadre, l’Histoire générale de l’Afrique fut écrite et
publiée en huit volumes avec une édition principale en anglais, en français et en arabe. De
même, douze études et documents traitant de questions et de thèmes particuliers ont été
publiés dans le cadre de ce travail colossal. Par ailleurs, une version abrégée de cet ouvrage a
été publiée en anglais, français, kiswahili, hausa et peul. Cette prodigieuse entreprise a
représenté trente-cinq années de coopération entre trois cent cinquante spécialistes de l’Afrique
et du monde entier.

Pour s’attaquer à cette tâche immense, complexe et ardue, vu la diversité des sources et
l’éparpillement des documents, l’UNESCO a procédé par étapes.

La première étape (1965 -1969) a été consacrée aux travaux de documentation et de


planification de l’ouvrage : plusieurs réunions ont été organisées, y compris les campagnes
conduites sur le terrain pour la collecte de la tradition orale, la création de centres régionaux de
documentation pour la tradition orale, de même que la collecte de manuscrits inédits en arabe
et en Ajami (langues africaines écrites avec l’alphabet arabe), inventaire des archives et
préparation d’un Guide des sources de l’histoire de l’Afrique à partir des archives et
bibliothèques d’Europe, publié depuis en neuf volumes.

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La seconde étape (1969 – 1971) a été consacrée à examiner et à préciser les questions
touchant à la rédaction et la publication de l’HGA: présentation de cette histoire couvrant trois
millions d’années en huit volumes, édition principale en anglais, en français et en arabe ainsi
que la traduction en langues africaines telles que le kiswahili, le hausa, le peul, le yoruba ou le
lingala.

L’étape suivante a été celle de la rédaction et de la publication. Elle a commencé par la


nomination d’un comité scientifique international de trente-neuf membres chargé d’assurer la
responsabilité intellectuelle et scientifique de l’ouvrage. Durant cette période, l’UNESCO a
organisé plusieurs réunions et colloques sur des questions liées à l’HGA et qui n’ont pas été
abordées par les chercheurs. Les travaux de ces réunions ont été publiés dans une série
intitulée « UNESCO – Etudes et documents : Histoire Générale de l’Afrique ». Parmi les douze
études et documents publiées dans cette série, on peut notamment citer celles consacrées à la
traite négrière transatlantique, les relations entre l’Afrique et le monde arabe, les relations de
l’Afrique avec l’océan indien, les jeunes et les femmes, l’Afrique depuis 1935, etc.

La principale ambition de ce projet a été d’offrir une vision culturellement pertinente de l’histoire
basée sur une approche interdisciplinaire, développant une histoire des idées et des
civilisations, des sociétés et des institutions. Pour ce faire, il a été décidé de recourir aux
sources africaines telles que la tradition orale, les formes d’art et la linguistique. Il a été
également décidé de considérer l’Afrique comme une entité historique et ce, afin d’éviter la
dichotomie trop souvent constatée, dans les ouvrages publiés jusqu’alors, entre l’Afrique au
nord du Sahara et l’Afrique au sud du Sahara. La proportion importante d'éminents
universitaires africains parmi les auteurs, les directeurs de volumes et les membres du comité
scientifique pour cette histoire met en avant ce changement de perspective.

Cependant, la HGA, achevée avec succès en 1999, reste à ce jour inaccessible au grand
public. En dépit de la publication d'une version abrégée en huit volumes et la traduction des
volumes de l’édition principale en plusieurs langues (y compris en chinois, italien, japonais,
coréen, espagnol et portugais), sa forme actuelle et son coût prohibitif empêchent une large
distribution. Bien que l’un des objectifs fixés au départ ait été de faire en sorte que cette HGA
serve de base à l’élaboration de manuels scolaires, de livres pour enfants, d’émissions
télévisées ou radiodiffusées, elle n’est pas encore suffisamment exploitée. Très peu de manuels
d'histoire ont réellement incorporé les aspirations du projet et l'enseignement de l'histoire en
Afrique continue d’être eurocentrique. Ces dernières années, la disposition émergeante des
concepteurs de curricula dans certains pays d’Afrique est celle de la « nationalisation » des

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programmes d'histoire, négligeant ainsi les racines communes des diverses cultures et
civilisations africaines ainsi que les interactions historiques entre celles-ci.

Sachant que l'enseignement de l'histoire contribue à former les identités des peuples et à
comprendre les liens sous-jacents à la diversité culturelle dans toutes les régions, il a été
décidé que l'objectif de la phase II de la HGA serait de favoriser un enseignement de l'histoire
fondé sur une perspective culturelle africaine dans l’enseignement primaire, secondaire et
supérieur en Afrique.

Dans cette perspective, la création de l'Union africaine (UA) offre une grande opportunité pour
la rénovation de l'enseignement de l'histoire sur tout le continent. Les Etats Membres de l'UA se
sont déjà exprimés en faveur de la rénovation de l'enseignement de l'histoire sur la base de
l’Histoire générale de l'Afrique. Par ailleurs, la deuxième décennie de l'Education pour l'Afrique
(2006-2015) et le plan d'action pour la décennie adoptés à Khartoum en 2006 représentent un
atout pour l’amélioration de la qualité de l'éducation à tous les niveaux.

LE LANCEMENT DE SON EXPLOITATION PEDAGOGIQUE

Des discussions importantes sur la conception de la deuxième phase avaient commencé avant
même la fin de la rédaction de l’Histoire générale de l’Afrique en 1999.

La première réunion dans ce sens remonte à 1986. Elle a été organisée par le Bureau de
l'UNESCO à Dakar (le Bureau Régional pour l’Education en Afrique, BREDA). Au cours de cette
réunion, il a été constaté que l'histoire africaine occupait à peine 25 % du temps consacré à
l’étude de l’histoire dans les écoles et que ce chiffre devrait augmenter. La réunion a également
souligné la nécessité d’utiliser le vocabulaire employé par les Africains eux-mêmes pour décrire
leurs situations sociales, culturelles et économiques. Les experts ont conclu que les
programmes d'étude de l'histoire dans les écoles étaient obsolètes et inadéquats, et ont
recommandé l'élaboration de nouveaux manuels à partir de l’Histoire générale de l’Afrique.
L'idée la plus fortement soutenue était celle de la rédaction de trois manuels d'histoire sur la
base de la version principale ou abrégée de l’Histoire générale de l’Afrique pour une
utilisation sur tout le continent.

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Les experts ont également recommandé que, dans un premier temps, les manuels
correspondent à l'enseignement de l'histoire:
- dans les dernières années de l'école primaire (accompagnant les enfants à observer les
traces de leur passé dans leur environnement)
- dans le premier cycle de l'école secondaire (proposant une vue chronologique de l'histoire du
continent, l'Egypte occupant une place importante)

- dans le dernier cycle de l'école secondaire (examinant en détail les thèmes particuliers et
inculquant un esprit d’analyse critique);

Une deuxième réunion organisée à Nairobi en mars 1989 sur les thèmes des manuels
d’enseignement et de l'enseignement de l'histoire dans les écoles africaines a approuvé les
recommandations de la réunion de Dakar. Elle a vivement recommandé que ces manuels
soient écrits dans une perspective africaine sans négliger les particularités nationales et sous-
régionales. Les experts ont mis l’accent sur le fait que ces manuels devraient démontrer les
contributions africaines au progrès général de l’humanité. Ces manuels devraient également
montrer les changements et évolutions politiques mais aussi sociaux, culturels et économiques
survenus au cours du temps. Enfin, les experts ont conclu que l'engagement politique des Etats
africains était crucial pour la mise en œuvre de ce projet.

Lors de sa réunion finale tenue à Tripoli, Libye en 1999, le Comité Scientifique International
pour l’Histoire générale de l’Afrique a examiné, entre autres, un Rapport sur l’utilisation des
volumes de l'Histoire générale de l'Afrique à des fins pédagogiques. Rédigé par le Professeur
Dramani Issifou, ce rapport soulève plusieurs questions importantes concernant les objectifs et
les méthodes de l'enseignement de l'histoire ainsi que l'utilisation de la HGA à des fins
pédagogiques. Il conclut que la HGA est exploitable comme source principale pour la rédaction
de nouveaux manuels d'histoire. Cependant, les auteurs de ces manuels devraient rechercher
dans les archives des documents de support et des illustrations appropriées. De plus, le rapport
recommande l’élaboration d’autres matériels didactiques tels que des bandes dessinées, des
CD-ROM et des cartes. Le Comité scientifique international a souscrit aux recommandations de
ce rapport ainsi qu’à celles des réunions de Dakar et de Nairobi.

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En conséquence, pour mieux cerner les problèmes de l’enseignement de l’Histoire en Afrique,
l’UNESCO a, par la suite, confié au Professeur Pierre Kipré une étude sur les programmes
d'histoire en vigueur dans les pays francophones d’Afrique, y compris Madagascar. Dans son
rapport intitulé « Inventaire critique des manuels d’histoire en usage en Afrique Noire
francophone (le cas de l’enseignement primaire et secondaire) », l’auteur propose une analyse
critique des manuels utilisés en Afrique francophone et à Madagascar. Il conclut qu'il y a, entre
les pays concernés, une grande disparité dans les contenus et la qualité des manuels d'histoire
et dans leur disponibilité. Il analyse les limites et les faiblesses « du programme minimal »
appliqué depuis les années 60 et note que les programmes d'histoire étaient en cours de
révision dans la plupart des pays étudiés. Selon lui, beaucoup de changements sont intervenus
dans les programmes d’histoire depuis la fin des années 1980 avec certains concepteurs de
programmes scolaires qui privilégient plutôt une perspective africaine de l'histoire, et d’autres
qui tendent vers une « nationalisation » des programmes.

MISE EN ŒUVRE DES RECOMMANDATIONS

Les démarches pour concrétiser les recommandations susmentionnées commence en


2005 avec la préparation d’une stratégie globale pour la diffusion, la mise à jour, la
traduction et l’exploitation pédagogique de l’Histoire générale de l’Afrique. En 2006 la
Délégation libyenne est consultée et un projet de document est soumis aux autorités
libyennes pour financement. Ces dernières mettent en place un groupe de travail pour
discuter le projet et formule des suggestions qui ont été intégrés dans le document. Un
projet d’Accord est préparé et soumis au gouvernement libyen. L’Accord sera finalisé et
signé à Tripoli en décembre 2007 à l’occasion de la visite officielle en Libye du
Directeur général de l’UNESCO.

Le nouveau projet intitulé « L’utilisation pédagogique de l’Histoire générale de


l’Afrique » élaboré par l’UNESCO pour le lancement de seconde phase vise les
objectifs suivants :

• Elaborer, pour les niveaux primaire et secondaire de l’ensemble des Etats membres de
l’UA, trois manuels communs d'histoire ainsi qu’un atlas historique et un CD-ROM sur la base
de l’Histoire générale de l'Afrique. Les états ou les sous-régions pourront traduire les manuels

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dans leurs langues nationales ou bien dans leurs langues d’enseignement et, si besoin est,
pourront les adapter aux circonstances locales sans changer la portée régionale du contenu.

• Améliorer la qualité de la formation des enseignants en tenant compte des derniers


développements réalisés en matière de recherche historique, de méthodologie et de méthodes
d'enseignement de l'histoire. Un guide pédagogique à l’intention des enseignants d’histoire sera
élaboré. De même, des principes directeurs destinés à renforcer la formation initiale ainsi que
continue des enseignants du primaire et du secondaire seront définis.

• Promouvoir l'utilisation de l’Histoire générale de l’Afrique dans l’enseignement supérieur


en Afrique, aucune adaptation n’étant nécessaire dans ce cas, la version abrégée pouvant être
utilisée pour le premier cycle universitaire et l'édition principale pour le deuxième cycle et les
cycles supérieurs. Ce qui importe, c’est de trouver les voies et moyens de rendre cet ouvrage
accessible aux universités africaines et d’élaborer une stratégie pour y incorporer les
découvertes historiques et archéologiques récentes, les progrès méthodologiques et les
développements politiques, économiques et sociaux importants qui se sont produits depuis sa
publication.

ORGANISATION D’UNE REUNION D'EXPERTS EN 2009

Afin de lancer la Phase II de l’Histoire générale de l’Afrique, l’UNESCO organisera, en étroite


collaboration avec l'Union Africaine, une réunion d’experts (historiens africains, Africanistes,
spécialistes en politiques éducatives, développeurs de curricula, formateurs d’enseignants) les
16 et 17 mars 2009 à son siège à Paris. Les participants auront ainsi l’occasion d'échanger
leurs expériences et points de vue concernant l’enseignement de l’histoire et auront également
à examiner le document de projet de cette phase II. Cette réunion étudiera en particulier les
questions suivantes :
- développement d’un programme commun pour les manuels d'histoire pour le continent
africain
- élaboration d’un guide pédagogique, d’un contenu pour la formation initiale et continue des
enseignants.
- promotion de l'utilisation de la HGA dans l’enseignement supérieur
- partenariats requis pour la promotion de ce projet en Afrique.

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Les conclusions et recommandations de cette réunion d’experts seront soumises au nouveau
Comité scientifique pour l’utilisation pédagogique de l’Histoire générale de l’Afrique, qui se
réunira du 18 au 20 mars 2009 et qui assurera la responsabilité intellectuelle et scientifique du
projet.

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