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Union Africaine

Projet
« L’Utilisation pédagogique de l’Histoire générale de l’Afrique »
***

REVUE DES CONTENUS DE L’HISTOIRE GENERALE


DE L’AFRIQUE

Coordination Scientifique

Prof. DOULAYE KONATE


Président Association des historiens Africains (AHA)

RAPPORT DE SYNTHESE

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AVANT PROPOS
La synthèse générale des 8 rapports de la Revue des contenus de l’Histoire
Générale de l’Afrique (HGA) a été réalisée par Doulaye KONATE, coordinateur
scientifique de la dite Revue avec la collaboration de :

• Issiaka Mandé
• Faranirina Rajaonah
• Ibrahima THIOUB

Les auteurs des rapports de lecture des différents volumes dont la synthèse est
présentée ici sont :

 Augustin F.C. Holl et Innocent Pikirayi Volume1


 Felix Chami et Babacar Sall Volume2
 Idrissa BA et Penda Mbow Volume 3
 George Abungu et Alexis Adandé Volume 4
 Issa Saibou et Elisée Soumonni Volume 5
 Jerome Mumbanza et Samuel Salo Volume 6
 Olukoju Ayodeji et Faranirina Rajaonah Volume 7
 Lily Mafela et Bahru Zewde Volume 8

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La Revue des contenus de l’Histoire Générale de l’Afrique (H.G.A)

Contexte :

Dans le cadre de la mise en œuvre du Projet d’ « utilisation pédagogique de l’Histoire


Générale de l’Afrique », le Responsable dudit projet a approché le Président de l’Association des
Historiens Africains (A.H.A), une des associations partenaires au projet, pour envisager la
possibilité de mobiliser des collègues pour la réalisation d’une Revue des contenus des 8
volumes de l’Historie Générale de l’Afrique.
Cette tâche préconisée par le Comité Scientifique du Projet s’inscrit dans le cadre de la
préparation de la conférence régionale sur l’élaboration des contenus communs, et du matériel
pédagogique d’accompagnement pour l’enseignement primaire et secondaire en Afrique.
Des discussions qui se sont engagés autour de la réalisation de cette revue dans un délai
très court au regard de l’immensité de la tâche, ont conduit à l’adoption d’une formule de
contrats individuels qui ont été établis entre l’UNESCO et les différents lecteurs retenus par les
Responsables du Projet sur la base de propositions faites par le Président de l’A.H.A désigné
pour assurer la Coordination Scientifique de la dite Revue (cf. Termes de références)

Méthode :
L’identification des candidats lecteurs à proposer à l’UNESCO s’est avérée laborieuse
pour différentes raisons. D’abord, le délai imparti pour réaliser l’étude à dissuader plus d’un
d’autant que cette relecture leur demandait de surseoir à des activités prévues dans leur
agenda. Le choix des candidats a été d’autant plus compliqué qu’il devait obéir à un certain
nombre de critères souvent difficiles à croiser. Nous avons tenté en effet autant que possible,
d’allier les critères de compétence avec des considérations de représentation géographique,
linguistique et générationnelle. Le souci était de favoriser des « regards croisés » de
compétences diverses dans l’analyse des différents volumes.
Evidemment, pour les raisons précédemment évoquées, nous n’y sommes pas parvenus
dans tous les cas. Ainsi par exemple, on peut regretter l’absence de nos collègues d’Afrique du
Nord dans cette équipe de 16 lecteurs ainsi que celle de nos collègues lusophones et cela
malgré tous nos efforts.

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Les lecteurs ont été répartis en « binômes » par volume, suivant, leurs compétences,
chaque binôme devant produire un compte rendu commun pour le volume (liste des lecteurs en
avant propos) qui lui a été affecté.
Les différents « binômes » de lecteurs se sont organisés à leur guise et ont conduit le
travail en regard des termes de références. Leurs textes ont été adressés au Coordinateur qui y
faisait des observations, lesquelles pouvaient être prises en considération ou pas par le lecteur.
Les rapports finaux des différentes équipes ainsi élaborés ont été adressés au
Coordinateur en vue d’une synthèse générale. L’étude a duré de mi-mars au 19 mai 2010. C’est
le lieu de remercier ceux de nos collègues qui ont accepté de s’engager dans cette tâche ardue
et qui ont travaillé sous une pression certaine, dont certains rapports se ressentent. Tous ces
collègues ont accepté de travailler avant même d’avoir signé leur contrat avec l’UNESCO. La
plupart ont démarré cette relecture à partir de leurs propres volumes, ou de la consultation des
ouvrages dans les centres de documentation, c’est à dire bien avant de recevoir de l’UNESCO
l’exemplaire du volume qui leur était affecté. C’est dire l’intérêt des collègues pour cette
relecture et l’importance des sacrifices consentis.

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Préface de A.M. MBow

Plus qu’un simple exposé des motifs, la préface de A. M. MBow constitue un texte essentiel de
l’HGA d’autant qu’elle en définit les objectifs, les enjeux tout en précisant quelques uns des
principaux apports de l’ouvrage.

L’argumentation de A.M.MBow se développe autour d’un certain nombre de points qui


ressortent du constat qu’il fait de l’image qui est donnée de l’Afrique à travers le savoir
historique occidental. Il fait ensuite la genèse du Projet, précise les ambitions scientifiques qui le
fondent et appelle à la diffusion de l’œuvre, et à son l’utilisation à des fins pédagogiques.

1) Le déni d’Histoire

La traite négrière et la colonisation ont généré une image des africains et une certaine
conception de leur passé, de leur « être au monde » et de leur avenir. Malgré les écrits de
quelques auteurs - qualifiés de pionniers - dont L. Frobenius, M. Delafosse, Arturo Labriola,
MBow met l’accent sur l’héritage de la pensée Hégélienne de l’Histoire universelle dans
l’historiographie coloniale. Cette conception linéaire de l’Histoire de l’Humanité, en excluait en
effet les sociétés africaines. L’absence de documents écrits était l’alibi évoqué pour justifier
cette exclusion. Ce qui était accepté pour la Grèce Antique, à savoir l’exploitation de l’Odyssée
et de l’Iliade (œuvre orale par excellence) en tant que source d’Histoire, était refusé à l’Afrique
dont les traditions orales étaient méprisées.

De fait, l’Histoire de l’Afrique n’existait qu’à partir de la rencontre du continent avec l’Europe et
cette Histoire apparaissait alors comme un appendice de l’Histoire européenne.

Le refus de reconnaître aux africains la possibilité de « création de cultures originales » se posait


comme un défi que seul un renoncement aux préjugés et un renouvellement des méthodes
pouvaient permettre de lever.

2) L’image d’un continent éclaté

La perception dominante qu’on avait de l’Afrique était celle d’un continent fait de sous
ensembles juxtaposés. L’Afrique du Nord dite « blanche » et l’Afrique Subsaharienne dite
« noire » auraient vécu séparées à cause de l’obstacle infranchissable, qu’aurait représenté le
Sahara. L’Egypte ancienne et la Nubie auraient également évolué indépendamment du reste du
continent. L’Afrique n’était donc pas considérée comme une entité historique.

S’il est vrai que chacune des parties de l’Afrique a son originalité, il n’en demeure pas moins
qu’elles ont entretenu entre elles des relations d’échanges continus. Ainsi l’Afrique du Nord a
constitué un pont entre le monde méditerranéen et l’Afrique subsaharienne et quant aux
marges du Sahara, elles ont toujours été fluctuantes.

L’Egypte et la Nubie ont une Histoire imbriquée et partagent de nombreux éléments culturels

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avec l’Afrique subsaharienne.

 Les damnés de la terre

Les stéréotypes raciaux liés à la traite et à la domination coloniale ont faussé les bases mêmes
de l’historiographie africaine. L’usage par exemple de catégories discriminatoires établissant la
supériorité du blanc et « l’essentialisation du nègre » ont biaisé cette historiographie. De fait
l’Afrique avait à lutter contre un double asservissement « économique et psychologique ».

La hiérarchisation des races dont se faisait l’écho l’historiographie coloniale servait à justifier la
main mise coloniale et « la mission civilisatrice ».

Les changements intervenus après la seconde guerre mondiale notamment l’entrée sur la scène
internationale des états africains ont contribué à faire évoluer la situation.

Dans ce contexte « les africains eux mêmes ont ressenti profondément le besoin de rétablir sur
des bases solides l’historicité de leurs sociétés ». C’était l’un des principaux enjeux de l’Histoire
Générale de l’Afrique. L’innovation méthodologique que cela nécessitait a donné aux sources
africaines notamment la tradition orale (dont l’exploitation requiert un appareil critique
systématique) toute leur importance.

 Etapes de la conception et de la réalisation de l’Histoire Générale de l’Afrique

Le projet a cherché à poser les bases théoriques et méthodologiques d’une Histoire de l’Afrique
qui permette de comprendre « l’évolution des différents peuples dans leur spécificité socio
culturelle ». Sa mise en œuvre a comporté plusieurs étapes :

De 1965 à 1969, l’UNESCO a mis en œuvre un vaste programme de collections de traditions et


des manuscrits inédits, d’inventaire des archives qui a abouti à la publication d’un « guide des
sources de l’Histoire africaine » en 9 volumes.

De 1969 à 1971 se sont succédées des réunions de travail de groupes d’experts à Paris et Addis
Abeba pour l’élaboration de l’ouvrage : l’Anglais, le Français et l’Arabe ont été choisis comme
langues pour les premières publications avec des prévisions de traduction en Hawsa, Yoruba,
Peul et Lingala, pour ce qui est des langues africaines, l’Allemand, l’Espagnol, le Suédois, le
Portugais et le Russe pour ce qui est des langues européennes.

La troisième étape a été celle de la réalisation effective du projet rédactionnel sous la


responsabilité d’un comité scientifique de 32 membres composés pour les 2/3 d’africains et 1/3
de chercheurs d’autres régions.

L’approche choisie est fondamentalement interdisciplinaire et respectueuse des différences de


points de vue entre experts.

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Parmi les nombreuses questions que les contributions des auteurs de cette œuvre ont contribué
à éclairer, M. MBow cite : celle de l’unité historique de l’Afrique et les relations de celle-ci avec
les autres continents notamment avec les Amériques et les caraïbes, la résistance des esclaves
déportés en Amérique et leur participation aux différentes luttes de libération nationale, les
relations de l’Afrique avec l’Asie du Sud à travers l’Océan Indien et les « apports africains aux
autres civilisations dans le jeu des échanges mutuels ».

M. MBow termine sa préface en exprimant le souhait que l’Histoire Générale de l’Afrique soit
largement diffusée dans de nombreuses langues « et qu’elle serve de base à l’élaboration de
livres d’enfants, de manuels scolaires et d’émissions télévisées ou radio diffusées ».

Les africains (jeunes, écoliers, adultes) pourront ainsi avoir une meilleure connaissance du passé
de leur continent, « une plus juste compréhension de son patrimoine culturel et sa contribution
au progrès général de l’humanité ». En cela l’Histoire Générale de l’Afrique contribuerait « à
favoriser la coopération internationale, à renforcer la solidarité des peuples dans leur aspiration
à la justice, au progrès et à la paix ».

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Volume I.

Histoire Générale de l’Afrique


Méthodologie et Préhistoire de l’Afrique
Directeur de Volume : J. Ki-Zerbo

Avec 819 pages, le volume 1 contient 28 chapitres qui portent sur la méthodologie et les
approches régionales de la Préhistoire africaine depuis la Plio Pléistocène jusqu’à la fin du XVIe
siècle après J.C.
L’ouvrage comprend outre la Préface de A.M. MBOW, l’introduction et la conclusion, 28
chapitres. Comme pour tous les autres volumes on trouve à la fin la liste des membres de la
Commission Scientifique internationale pour l’Historie Générale de l’Afrique ainsi que les
biographies sommaires des différents contributeurs. Une bibliographie générale et un index.
Comme l’indique clairement le sous titre « Méthodologie et Préhistoire africaine »,
l’ouvrage est composé de deux parties distinctes se rapportant à deux thèmes majeurs qui se
chevauchent. On y distingue plusieurs sections.
La Section I (du Chapitre 1 à 6) traite de l’historiographie, ses tendances, et son
évolution.
La Section II (Chapitre 7 et 8) est consacrée aux traditions orales et leurs méthodologies.
La Section III (Chapitre 9 à 16) traite d’un large éventail de sujets qui vont des méthodes
archéologiques et des techniques de datation à la linguistique historique et la classification des
langues africaines, la géographie physique et humaine, la paléoclimatologie et l’ethnogenèse
des migrations.
Après la Préface de A.M. M’BOW évoqué antérieurement l’objectif et la portée générale
du projet sont résumés par B. A. Ogot. Il précise que le projet vise à produire un savoir de haut
niveau sur l’Histoire de l’Afrique, en tant qu’entité et à mettre l’accent sur les échanges et les
relations entre les différentes parties de l’Afrique.
Cette Histoire qui met en avant, les idées, les civilisations, les institutions et les sociétés
doit être écrite à partir de l’intérieur en tant que véritable contribution au patrimoine culturel

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mondial.
Dans son introduction générale au volume qui est aussi celle de la série des ouvrages, le
Professeur J. Ki-Zerbo affirme d’entrée de jeu que l’Afrique a une histoire, avant de rappeler les
objectifs du projet d’écriture d’une histoire générale de l’Afrique et les défis théoriques et
méthodologiques qui s’attachent à cette importante entreprise.
Selon le Professeur J. Ki-Zerbo, les difficultés spécifiques de l’Histoire africaine se lisent
au travers de l’observation des réalités physiques du continent. Le continent semble tourner le
dos au reste du monde et est faiblement relié au reste de l’Ancien Monde par le canal de Suez
et le Sinai. La configuration géographique du continent entrecoupé de déserts, de forêts et de
marais aggrave cet isolement. « La vastitude » du continent et la dispersion des populations
dans une nature à la fois généreuse (fruits, minerais) et cruelle (épidémies, endémies)
empêchaient d’avoir un niveau de concentration démographique nécessaire aux mutations
qualitatives majeures dans le domaine économique, social et politique. La traite négrière du XVe
au XXe siècle a contribué à priver l’Afrique d’un capital humain et de la stabilité nécessaires à la
créativité dans différents domaines. Reprenant le mot de F. Braudel selon lequel « la civilisation
est fille de nombre ». Le Professeur J. Ki-Zerbo considère que « l’isolement en Afrique a été un
facteur limitant de l’Afrique sur la piste de certains progrès ».
Ce point de vue est discuté par les auteurs de la Revue qui évoquent sur la base des
résultats de différentes recherches telles que la mise en évidence de sociétés complexes et
surtout de l’urbanisation en Afrique de l’Ouest à partir de 200 avant J.C., ou encore d’éléments
attestant la culture de la banane en Afrique Centrale (Sud Cameroun) en 500 avant notre ère.
Cela montre que la forêt équatoriale ne constituait pas un obstacle.
Les sources de l’histoire africaine regroupées en trois catégories (écrites archéologiques,
orales) sont ensuite analysées sans aucune mention dans cette introduction des hiéroglyphes
égyptiens qui constituent les premières sources écrites du continent.
L’introduction met l’accent sur l’importance des traditions orales, sources
authentiquement africaines pour l’étude de l’Histoire du continent. Les traditions orales en effet
présentent une vue de l’intérieur des processus historiques et leur exploitation en raison de leur
nature même pose des défis d’ordre méthodologique.

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La contribution d’autres disciplines à l’écriture de l’Histoire de l’Afrique telle que la
linguistique, l’anthropologie culturelle (à la condition qu’elle se libère de ses postures
évolutionnistes dans ses approches de l’Afrique) est amplement étayée par des exemples
probants.
Le Chapitre 15 p.p. 283 – 294 (éd. 2000) qui traite de l’interdisciplinarité et de son usage
dans le volume est le prolongement de la réflexion entreprise dans l’introduction. A partir du
rappel du domaine et des techniques d’investigation d’une série de disciplines (dont certaines
étaient longtemps dites auxiliaires de l’Histoire) l’idée de ce chapitre est de mettre à profit les
connaissances acquises sur différents aspects du passé pour une meilleure compréhension de
l’Histoire du continent.
Le débat sur l’historiographie et les sources.
Les trois premiers chapitres, écrits par J. D. FAGE, Boubou Hama et Ki-Zerbo passent en revue
les différents aspects de l’historiographie africaine, son développement, ses tendances
actuelles, sa contribution à l’Histoire générale, et la place de l’Histoire dans les sociétés
africaines
L’évolution de l’historiographie africaine (Chap.1 – J.D. Fage) fait apparaître les
différentes traditions historiographiques qui se sont succédées en Afrique et leurs
caractéristiques principales notamment dans les différentes sous régions (australe, occidentale,
centrale et orientale).
L’Afrique du Nord en tant qu’entité relevant du monde méditerranéen avait été
auparavant présentée à travers les sources grecques et romaines.
On distingue pour l’Afrique Subsaharienne, trois grandes périodes :
- La période avant le 15è siècle de notre ère est marquée par les écrits des auteurs arabes qui
ont des contacts sporadiques avec les sociétés de l’Afrique Subsaharienne, l’Ethiopie, la Côte
Orientale de l’Afrique et le Bilad Al Sudan (Pays des Noirs) à l’Ouest. Le développement du
commerce transsaharien, phénomène majeur, a favorisé durant tout le « Moyen Age », la
circulation des informations entre les deux rives du Sahara et dans l’ensemble du Dar-As-
Islam.
De nombreux auteurs arabes méditerranéens et du Proche Orient fournissent de

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précieuses informations sur différentes régions de l’Afrique Subsaharienne. Ces
témoignages directs ou de seconde main ont contribué malgré leurs insuffisances à faire
connaître l’Afrique. On peut considérer Ibn Khaldun (1332 – 1406) né en Ifriqiya. Comme le
premier historien africain à travers sa principale œuvre la Muqqadima.
Des chroniques locales en langue arabe ont été également écrites en Afrique de l’Ouest
et en Afrique de l’Est. Celles de Tombouctou, le Tarikh El Sudan et le Tarikh El Fetash, écrites
à partir du XVIe siècle sont des œuvres à caractère historique. La chronique de Kano, celle de
Kilwa sont essentiellement des transcriptions de traditions locales.
- A partir de 15è siècle les récits des marins et commerçants européens vont suppléer au
tarissement progressif des sources arabes. Ces sources européennes fournissent des
descriptions intéressantes sur la Côte Atlantique de l’Afrique Occidentale, du Congo, de
l’Angola, de la Vallée du Zambèze et les contrées voisines ainsi que l’Ethiopie.
- Au 18è siècle le savoir historique sur l’Afrique se construit essentiellement autour de la
question de la traite atlantique des esclaves. Ce commerce honteux a considérablement
porté atteinte au statut d’être humain des africains noirs.
Hegel affirme que l’Afrique est un continent anhistorique et il est suivi par beaucoup
d’autres (H. Trevor-Hoper…).
- L’expansion européenne en Afrique au XIXe siècle (conquête française de l’Algérie 1830,
occupation britannique de l’Egypte 1882) a entraîné la prédominance d’approches
colonialistes de l’Histoire africaine.
Fage analyse de façon approfondie l’influence des européens (voyageurs, historiens
coloniaux, anthropologues, linguistes) sur l’historiographie africaine. Il explique aussi
comment l’Afrique a été exclue de collection historique illustre telle que La Cambridge
History of the British Empire (1929 – 1959).
L’Historiographie coloniale se fondait essentiellement sur les poncifs Hégéliens selon
lesquels les africains n’ont aucune histoire et s’ils en avaient elle ne valait pas la peine d’être
étudiée.
L’extension du système scolaire européen en Afrique, les mouvements de modernisation
de l’islam et l’émergence du mouvement nationaliste ont été à la base d’approches

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historiques locales en Arabe, en Anglais et en Français.
- A partir des années 1960, l’historiographie africaine avait ses premiers historiens de métier
lesquels vont contribuer à remettre en cause l’historiographie coloniale largement
influencée par les théories Hégéliennes.

La Place de l’Histoire dans les sociétés africaines


Chap.2 – B. Hama – J. Ki-Zerbo
Ce chapitre débute par une affirmation très forte : « Les hommes sont des animaux
historiques ».
Selon les auteurs tous les aspects de la vie quotidienne relèvent de processus historiques
dont ils façonnent le cours
L’expérience particulière de chaque société façonne son histoire. Trois idées-force
annoncées en introduction du chapitre sont développées.
1) L’affirmation que la conception africaine du temps est mythique et sociale, 2) Les africains
sont bien conscients qu’ils sont les acteurs de leur histoire.
3) La conception africaine du temps est véritablement historique.
De nombreux exemples à travers l’Histoire africaine sont évoqués pour illustrer les
imbrications entre les moments mythique et social du temps historique.
La Revue du contenu de ce chapitre relève l’ « essentialisme » qu’il confère aux
« africains » en tant que catégorie.
Les tendances récentes des recherches historiques africaines et contribution à l’histoire en
général
La contribution de P. D. Curtin examine les changements qu’a connus l’écriture de
l’Histoire africaine de la période coloniale à la période post-coloniale. Cette évolution est
marquée par une tentative de déconstruction et de décolonisation de l’Histoire. Les
nationalistes africains ont contribué largement à cette remise en cause à travers notamment
l’élaboration d’une méthodologie de collecte des informations autres que celles fournies par les
archives. Dans ce cadre, une nouvelle impulsion a été donnée à la collecte et à l’exploitation des
traditions orales. L’enseignement de l’Histoire africaine à l’Ecole a aussi été une source de
motivation pour la recherche historique qui initia de nouvelles traditions.

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Les Chapitres 4 à 9 traitent des sources et techniques utilisées dans l’Histoire africaine.
Dans ce cadre, Théophile Obenga présente un aperçu général des sources et techniques
spécifiques à l’Histoire africaine (Chap.4). Ce Chapitre traite des sources supplémentaires utiles
à l’écriture de l’Histoire africaine en mettant l’accent sur les Sciences naturelles. L’auteur
montre par exemple le rôle des techniques de datation dans la compréhension des débuts de
l’Histoire de l’humanité en Afrique de l’Est, notamment au Kenya, dans la Vallée de l’Omo en
Ethiopie, les gorges d’Olduvay en Tanzanie, dont les découvertes font de l’Afrique le berceau de
l’humanité. Les méthodes telles que la palynologie (l’analyse des pollens de plantes) peuvent
permettre de reconstituer des environnements disparus, et informer sur des changements
climatiques… intervenus au cours des périodes reculées de la Préhistoire. La contribution met
surtout en lumière les apports de l’interdisciplinarité à la connaissance du passé africain.
Les Chapitres 5 – 6 à partir d’une évaluation des sources écrites antérieures au XVe siècle
(H. Djait) et celles produites après le XVe siècle (Hrbek) traitent des problèmes épistémologiques
qui s’attachent à leur utilisation. Cette évaluation adopte une approche régionale tout en
sériant les différentes catégories de sources.
Avant le XIVe siècle ces sources sont essentiellement les hiéroglyphes de l’Egypte
Antique, les sources grecques, carthaginoises, latines et celles écrites dans d’autres langues
européennes.
Au-delà du XVe siècle les sources deviennent plus nombreuses, plus complexes et
couvrent d’avantage de zones. Les africains écrivent eux-mêmes dans leurs propres langues
avec les caractères arabes. Aussi les sources européennes relayent progressivement les sources
arabes et se répandent au 18è siècle et 19è siècle à la suite de l’expansion européenne.
Les conséquences des disparités régionales dans la distribution de ces différences
sources sont discutées dans le texte.
La tradition orale fait l‘objet d’une analyse en profondeur quant à sa nature, ses
différentes formes, les cadres sociaux qui influencent sa production (Jan Vansina). La
méthodologie de collecte et d’évaluation des traditions orales est exposée et débattue,
notamment pour ce qui concerne les chronologies. La tradition orale, qui n’est pas qu’évocation
du passé, est analysée en tant qu’héritage vivant dont la complexité tient au fait que les

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traditions reflètent une certaine conception de l’humanité et de la place de celle-ci dans
l’univers. Cette vision du monde se retrouve dans différentes cosmogonies (bamanan – peulh…).
Les principaux vecteurs de la tradition orale que sont en Afrique de l’Ouest les artisans
regroupés en une caste sont décrits ainsi que la symbolique qui les entoure.
Le Chapitre 9 par Z. Iskander traite l’apport de l’archéologie à la reconstitution du passé,
au travers d’une présentation détaillée de l’archéométrie et de ses techniques, des méthodes
de datation et de conservation des matériaux.
Trois Chapitres sont consacrés à la relation entre la Linguistique et l’Histoire (Chap.10 – 12).
Dans le Chapitre 10, P. Diagne se concentre sur la relation mutuelle entre la Linguistique
et l’Histoire. Il explore et discute les différents types de classement des langues, les
reconstructions phonologiques et les relations ethno-culturelles. Il traite également de certaines
sciences auxiliaires de la linguistique comme l’analyse typologique et l’onomastique qui sont
importantes dans la cartographie de certains groupes de langues. Diagne montre également
l’importance de la linguistique pour la Science historique africaine.
D. Olderroge qui s’intéresse aux migrations et aux différenciations ethniques et
linguistiques, montre l’impact des différentes écoles de linguistique européennes sur l’étude
des langues africaines et sur l’écriture de l’Histoire africaine. L’Ecole allemande a par exemple
propagé la théorie des langues Hamitiques, selon laquelle les cultures africaines étaient
influencées par les peuples d’Asie.
Greenberg (Chapitre 12-1) traite de la classification des langues africaines. Son
classement qui révise les travaux antérieurs sur les groupes linguistiques de l’Afrique retient
quatre grandes familles : Langues Afro-Asiatiques, le Niger-Kordofanien, le Nilo-Saharien et le
Khoisan.
Dans le Chapitre 12, 2 Dalby met en garde contre le niveau de simplification de la
classification actuelle des langues africaines. Il identifie deux régions de plus grande affinité
linguistique contenant 80 % des langues africaines : Celle du Nord qui correspond à la famille
Afro-Asiatique de Greenberg et la région Sud qui correspond au Niger-Congo ou Niger-
Kordofanien.
Les Chapitres 13 à 17 présentent les cadres physiques, géographiques de l’étude du

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passé africain. Le Chapitre 13 de Diarra donne une vue diachronique de l’Afrique des temps
géologiques anciens à nos jours. Il traite de la caractérisation géologique, de l’influence des
climats anciens. Ce Chapitre couvre les environnements bioclimatiques et biogéographiques. Le
chapitre se termine par l’évocation les richesses minérales de l’Afrique.
Au Chapitre 14, Al Mabogunge examine à nouveau les ressources naturelles et réfute
tout déterminisme géographique. « Les peuples tout comme les individus ont été et
continueront d’être les architectes de leur propre fortune (page 346).
Au Chapitre 15, le Directeur du volume J. Ki-Zerbo examine les défis qui s’attachent à
l’interdisciplinarité dans la recherche historique en général et dans le volume 1 en particulier. Le
Chapitre présente la manière dont les différentes sources : archéologie, art rupestre, articles
importés, tradition orale, linguistique moyens mnémotechniques, Sciences naturelles mises à
contribution dans l’étude de l’Histoire africaine se complètent mutuellement.
Le Chapitre 16 I et 16 II présente le cadre chronologique des phases pluviales et
glaciaires de l’Afrique. Dans ce Chapitre les tendances générales du changement climatique au
cours du Pléistocène et des périodes de l’Holocène sont passées en revue.
Les Chapitres 17 et 18 sont consacrés aux premiers Hominidés / et aux études des
origines de l’homme.
Dans un chapitre double (17), Y. Coppens traite du contexte paléontologique général de
l’évolution humaine alors que L. Balout met l’accent sur la technologie lithique (outils en pierre).
Y. Coppens établit la généalogie des grands singes et les hominidés conduisant à l’émergence de
l’espèce Homo, faisant ainsi une esquisse de l’Histoire de la recherche en paléontologie
humaine. La mise en parallèle des principales découvertes en Afrique de l’Est et du Sud sur des
sites tels que Olduvay, la Vallée de l’OMO, la Vallée de l’AFAR fait de l’Afrique le berceau de
l’humanité.
Au Chapitre 18, R. Leakey examine les contextes, la chronologie et les caractéristiques
principales des restes fossiles qui ont permis de retracer l’Histoire des ancêtres de l’homme
moderne. Ils attestent tous du fait que l’Afrique est le berceau de l’humanité. Ces fossiles se
retrouvent pour la plupart en Afrique de l’Est (dans les zones lacustres, dans les zones des failles
de la Vallée du Rift, en Afrique Australe dans les brèches calcaires des grottes. L’homme

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moderne, l’Homo sapiens apparu il y a quelques 100-200.000 ans et qui a colonisé la planète
entière, est le seul représentant de l’espace Homo sur terre. Les présapiens sont classés en deux
lignées : Homo et Australopithecus qui utilisaient les outils en pierre. Les Chapitres 17 et 18 sont
accompagnés d’un glossaire de termes techniques, de tableaux, et de figures illustrant les
crânes et les mâchoires de différents types d’Australopithèques.
Les Chapitres 19 à 26 donnent un aperçu de la Préhistoire par région : Afrique de l’Est,
Afrique du Sud, Afrique Centrale, Afrique du Nord, Sahara, Afrique de l’Ouest, Vallée du Nil,
depuis les premiers temps du Plio-Pléistocène au début et au milieu de l’âge de la Pierre taillée
au dernier Age de la pierre taillée.
Ces présentations régionales font état du développement du comportement et de la
« culture » humaine tel qu’on peut le lire à travers les fossiles hominidés / hominien, les outils
de pierre taillée, les ossements humains et animaux.
Des huit synthèses régionales, il ressort un cadre chronologique général pour tout le
continent. Ces principales étapes sont l’Oldowayen dans l’Est, le Sud et certaines parties du
Nord, et l’Acheuléen pour les phases initiales et archaiques. Le ‘Middle Stone Age‘ ou
Paléothique moyen en Afrique du Nord et au Sahara caractérisés par une diversification
régionale. La fin de l’Age de la Pierre taillée, Paleolithique Terminal, Epipaléolithique ou
Mésololithique selon les zones mais présentant les mêmes caractéristiques générales. Ces
étapes sont marquées par une amélioration de la technologie lithium qui aboutit à la production
de pointes bifaces utilisés comme pointes de lance, ensuite l’invention de l’arc et de la flèche
(technologie mésolithique) et le matériel de broyage plus fréquent sur les sites de l’âge récent
de la pierre taillée. Cela suggère un traitement plus systématique des plantes et des minéraux
en vue de produire par exemple l’ocre rouge utilisé dans l’art rupestre.
Viennent ensuite trois synthèses thématiques traitant de l’art rupestre d’Afrique, de
l’émergence, du développement et de l’expansion de l’agriculture et de l’apparition de la
métallurgie. Au Chapitre 26 J. Ki-Zerbo traite de l’art préhistorique africain. Après avoir localisé
les principaux domaines de présence de l’art rupestre en Afrique (Sahara, une partie de
l’Afrique du Nord, Afrique Australe) il s’attache à analyser les difficultés de datation de ces
représentations gravées ou peintes sur les parois des grottes et abris sous roche. L’auteur

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examine ensuite le genre, les styles, les motifs et la symbolique de ces représentations qu’il
considère comme la version illustrée du premier livre de l’Histoire africaine. J. Ki-Zerbo fait en
outre la critique des différentes théories qui ne voient dans cet art rupestre que des influences
extérieures, même s’il ne nie pas la possibilité d’existence de telles influences. L’influence
égyptienne sur l’art subsaharien est également réfutée. Les origines de l’art saharien ainsi que
celui du Sud de l’Afrique sont analysées de façon très critique.
Au Chapitre 27 – R. Porteres et J. Barreau traitent de l’émergence, du développement et
de l’expansion des techniques agricoles. L’analyse s’appuie sur les travaux de N. I. Vavilov qui a
identifié 8 centres d’origines des plantes cultivées dont celui d’Ethiopie en Afrique. Sans
remettre en cause l’importance du Proche Orient (notamment le Croissant fertile) dans la
« Révolution du Néolithique », les auteurs montrent que d’autres régions du monde ont joué
un rôle important dans les efforts de l’humanité pour la domestication des animaux et la culture
des plantes. Ils illustrent ces changements en Afrique à travers une exploration des
environnements naturels des écosystèmes à partir desquels ils retracent les origines de
l’agriculture africaine.
Le Chapitre 28 de J. Vercoutter, qui se présente comme un complément du chapitre de
F. Debono sur la Préhistoire récente du Nil, traite de l’émergence des économies de production
à l’avènement de la métallurgie du fer. Son titre « invention et diffusion des métaux et
développement de systèmes sociaux jusqu’au Xe siècle avant notre ère » apparaît impropre au
regard du contenu. Ce Chapitre traite des modèles de l’évolution culturelle au Néolithique du
3ème millénaire avant J.C. à 500 respectivement dans la Basse et la Haute Egypte. L’avènement
de la métallurgie n’est traité que dans les deux dernières pages du chapitre et la plus grande
partie du continent est ignorée.
La chronologie des métaux précieux tels que l’or et l’argent et même le cuivre est
précisée pour l’espace du Nil (4ème millénaire avant J.C). Le bronze est entré en scène au 2ème
millénaire avec le fer (météoritique) à partir de 1580 B.C. La production du fer se serait
intensifiée pendant la période de Napata pour culminer à Méroé dans les derniers siècles du 1er
millénaire avant J.C. Pour l’auteur cette évolution a eu un impact considérable sur la diffusion
de la technologie du fer en Afrique Subsaharienne. Outre le caractère impropre du titre, la

17
plupart des hypothèses avancées dans ce chapitre sur la métallurgie du fer sont largement
obsolètes.
La conclusion de l’ouvrage du directeur du volume porte un titre tout à fait évocateur :
« De la nature brute à une humanité libérée ». On se rappelle que l’Introduction du volume
commençait par l’affirmation de l’existence d’une Histoire africaine. La conclusion du Directeur
du volume insiste sur le fait que l’Afrique est le berceau de l’humanité.
La création et la recréation de l’humanité qui a eu lieu en Afrique est encore à l’ordre du
jour : Il y a une centralité de l’Afrique qui a été perdue seulement au cours des 2000 dernières
années. Le mot de la fin de J. Ki-Zerbo « En d’autres termes, d’une certaine manière, la
préhistoire de l’Afrique n’est pas encore terminée » établit un sentiment de continuité de cette
Histoire africaine.

Analyse critique du contenu du volume D’une façon générale, les évaluateurs reconnaissent la
validité et l’intérêt des contenus de ce volume malgré l’ancienneté de la publication. Il est
cependant nécessaire d’envisager dans le cadre d’une révision de ces volumes une
restructuration de l’organisation des chapitres et l’actualisation de certaines connaissances.

La restructuration proposée pourrait consister en la définition de nouvelles sections plus


cohérentes regroupant des sujets connexes. Ainsi on pourrait créer les sections :
« Environnements de l’Afrique » consacrée à la géographie, à la géologie, aux climats anciens et
présents.
- Historiographie qui traiterait l’Histoire de la Recherche historique en mettant l’accent sur
les développements régionaux. Elle inclurait l’Histoire de la Recherche sur les primates et les
langues.
- Technologie : Cette section qu’on a distinguée en Archéologie pourrait intégrer aussi les arts
et prendre en compte le travail de la pierre, du bois, de la poterie, la métallurgie,
l’architecture.
- Aspects des cultures africaines : qui s’intéresserait aux modes de subsistance différents : les
cueilleurs, le pastoralisme, l’agriculture.
- Etudes Régionales de l’Histoire africaine :

18
La Revue soulève le débat déjà ancien sur l’usage du terme « Préhistoire » qui
« demeure largement euro centrique ».
Selon les évaluateurs, comme pour le reste de l’Histoire du monde, le volume souffre
d’un parti pris en termes de genre. Une nouvelle édition devrait faire plus de place aux
femmes.
Le Chapitre 9 du volume nécessite une refonte complète en termes de contenu,
l’Archéologie étant une discipline des Sciences Humaines qui ne saurait se réduire à
l’Archéométrie. Un chapitre distinct pourrait être consacré par exemple au Patrimoine
historique et archéologique africain.
La critique sur la « Race » et le type racial au regard de certains contextes comme celui
de l’Afrique du Sud mériterait une mise au point dans un chapitre nouveau. Il y a encore la
nécessité d’une plus grande compréhension des concepts de « race » et de langues.
Les relations entre anthropologie, linguistique et histoire mériteraient les plus longs
développements qui prendraient en compte des travaux tels que ceux de Christopher Ehret
(1982), Williamson Kay (1998).
Sur les origines de l’homme, l’édition révisée devrait faire connaître les sites ainsi que les
cartes des régions où ont été trouvés récemment les fossiles nouveaux. Des données
nouvelles issues de recherches récentes en Afrique du Sud (Malawi, Tanzanie, Kenya,
Ouganda, Ethiopie, Tchad) permettent d’améliorer notre compréhension de l’Afrique
comme berceau de l’humanité.
S’agissant des études régionales, il est nécessaire d’associer le Sahara avec l’Afrique du
Nord et la Vallée du Nil. Le Sahara, le Sahel et les régions de savane du Sud doivent
également être étudiées en rapport, d’autant que des résultats de recherche (sur la
domestication et l’agriculture récente) montrent que ces régions ont été en contact régulier.

Des recommandations pédagogiques Volume I :


- Les thèmes à retenir devront prendre en compte les questions de portée générale qui
concerne toute l’Afrique. En cela les manuels devront intégrer l’apport de l’Archéologie à la

19
compréhension du passé de l’Afrique.
1) Une présentation des hommes fossiles (Chapitre 18) donnera les origines
paléontologiques de l’homme jusqu’à l’émergence de l’homme moderne ;
2) Des données doivent être extraites du Chapitre 13 et mises à jour pour une introduction
à la géographie physique du continent et du Chapitre 16 de la paléoclimatologie de
l’Afrique ;
3) Les synthèses régionales devront être adaptées à travers une approche chronologique
cohérente. Des Chapitres pourraient être consacrés aux thèmes suivants :
- Débuts Culturels : Tradition de fabrication des tout premiers outils.
Les techniques de datation chronologique peuvent être expliquées dans des rubriques
colorées avec des diagrammes.
- Les Premiers Hommes modernes et les traditions régionales : Les chasseurs-cueilleurs
spécialisés.
- Les premiers agriculteurs et éleveurs de l’Afrique ancienne : Présenter des informations
actualisées sur l’apparition de l’agriculture et de l’élevage.
- Les premiers artistes et artisans de l’Afrique ancienne : Présenter à cet effet des
informations actualisées sur l’art rupestre d’Afrique et l’apparition de la métallurgie.
- L’Archéologie comme patrimoine culturel et ses rapports avec l’identité des peuples.

20
Volume II.

L’Histoire générale de l’Afrique: Afrique Ancienne

Directeur de volume : G. Mokhtar

Le Volume II de l’H.GA comporte 29 Chapitres et une introduction de 28 pages.


D’entrée de jeu les évaluateurs reconnaissent le professionnalisme, la compétence et la
conscience qui ont présidé à la rédaction du Volume. Tout en reconnaissant la solidité de
l’ensemble de l’ouvrage, ils montrent à différentes reprises les actualisations que
nécessiteraient l’utilisation pédagogique de certains chapitres.
Ce volume qui se situe dans le prolongement chronologique du premier volume couvre
la période allant de la fin du Paléolithique à l’avènement de l’Islam.
Ce volume donne un sens au concept d’Histoire ancienne de l’Afrique. Cependant, il ne
met pas fin au débat sur les cadres chronologiques de l’Histoire africaine. Il n’y a pas de repères
« ad quo et ad quem » de la période antique en Afrique prise dans sa globalité. La question est
abordée dans l’introduction… On relève que les auteurs des différents chapitres (les études
régionales en particulier) ont intégré dans l’Histoire ancienne de l’Afrique les cultures dites
néolithiques ou néolithisantes qui se sont développées à différents endroits avec ou sans cadre
étatique. La lecture de l’ouvrage laisse voir deux régions :
• Une première région constituée de la basse et moyenne Vallée du Nil et l’Afrique
Méditerranéenne. Ici l’abondance et la variété de la documentation (textes, découvertes
archéologiques) autorisent à parler d’Histoire des cultures et civilisations (égyptienne,
koushite, axoumite, carthaginoise, et lybique dans une moindre mesure). Les documents
sont aussi bien internes qu’externes (grecques, latines, hébraïques, assyriennes…).
• Une seconde région qui couvre la plus grande partie de l’Afrique et dont la connaissance des
modes de vie depuis la fin du Paléolithique repose essentiellement sur l’Archéologie. De ce
fait, on ne peut valablement parler pour cette région selon Babacar Sall que d’Etudes des
cultures et civilisations anciennes, l’Archéologie ne pouvant renseigner sur certains des
aspects essentiels de la vie dont la connaissance participe de l’usage du concept d’Histoire

21
(relations de propriété et de production, système de répartition des biens, économie
politique).
L’approche régionale est privilégiée dans l’étude de ces différentes cultures et
civilisations. Sur le plan de sa construction l’un des traits marquants du Volume II c’est la
faiblesse de l’articulation entre les différents chapitres. Dans la perspective de l’utilisation
pédagogique de l’ouvrage l’on pourrait réorganiser ces chapitres dans un souci de cohérence
d’ordre chronologique.
Le Chapitre I rédigé par Cheikh Anta Diop est intitulé : Origine des anciens Egyptiens ».
L’auteur cherche à donner plus de profondeur à l’Histoire des sociétés africaines en général et
négro africaines en particulier. La civilisation des pharaons est réintégrée dans son giron négro
africain. Le terme « origine » est problématique au plan historique, Babacar Sall lui préfère celui
de « provenance ». L’auteur étudie l’appartenance raciale des communautés qui étaient
devenues les anciens égyptiens, et le caractère négro-africain de la civilisation qu’ils avaient
créée. Il présente des arguments bien sériés : d’ordre paléoanthropologique, iconographique,
biologique (test de la mélanine), ostéologique, textuel et philologique. Il exploite aussi des
parallélismes fondés sur une approche ethno linguistique. Depuis quelques années des cercles
d’études poursuivent des recherches et tentent d’approfondir la perspective ouverte par les
travaux de C. Anta Diop à travers diverses publications (ANKH Revue d’Egyptologie, Paris,
Journal Of African Civilisation New Brunschwick Cahiers d’étude Caribéens Antilles Guyane).
Dans le Chapitre II « L’Egypte pharaonique », A. Abu Bakr fait une présentation de
l’évolution générale de l’Histoire du royaume de l’Egypte ancienne. Ce panorama qui fait
ressortir les faits saillants en donnant de bons repères de cette longue Histoire n’analyse pas
l’Histoire de la période dynastique, aspect incontournable dans l’étude de la civilisation du
royaume d’Egypte. Cette présentation des grandes périodes de l’Histoire du royaume d’Egypte
(pages 83–106) est à affiner en raison de la place centrale de l’Egypte dans l’Histoire de
l’Afrique.
Toutes les subdivisions doivent y être intégrées avec leurs caractéristiques propres. La
formation du royaume d’Egypte devrait partir de la constitution des premières entités ethno
claniques en intégrant toutes les phases depuis la période Pre-Dynastique et l’ancien empire –

22
2900 à 2200 (3ème – 6ème dynasties) jusqu’à la XXVIIe dynastie qui était perse et la XXIe dynastie
grecque (Cf. Michel Dessoudeix, Chronique de l’Egypte ancienne, 2008).
Le Chapitre III de J. Yoyotte traite de la société, de l’économie et de la culture de l’Egypte
ancienne. Si les cadres économiques de la relative stabilité du royaume sont assez bien
restituées l’analyse de la société est moins réussie. L’auteur omet par exemple de signaler le
caractère très inégalitaire de la société Egyptienne y compris devant la mort. Par contre
l’esclavage n’y a jamais été institutionnalisé.
Le Chapitre IV de Abd El Hamid Zayed porte sur les relations de l’Egypte avec le reste de
l’Afrique. Très informatif en faits historiques reconstitués, ce texte entretient une certaine
confusion. Il ne périodise pas correctement les relations entre la Basse Vallée du Nil et les autres
régions de l’Afrique avant l’émergence du royaume d’Egypte et ne précise pas les contacts et
relations historiquement attestées entre le royaume d’Egypte et certaines régions d’Afrique
(Exemple de l’Afrique de l’Ouest traité par ailleurs par B. Wai Andah, Chapitre XXIV).
Au Chapitre V sous le titre de « Legs de l’Egypte » Rashid El Nadoury analyse ce que
l’Egypte a transmis aux cultures et civilisations des temps post pharaoniques. Après les études
de M. Bernal, l’étude doit prendre en compte le contenu de Black Athéna : The Afro-Asiatic
roots of classical civilisations (1987).
Le VIe Chapitre : « L’Egypte à l’époque Hellénistique » traite de l’évolution du royaume
d’Egypte sous domination grecque à la fin du VIe siècle avant J.C.
Pour Babacar Sall, l’Egypte hellénistique « a été une rencontre et un dialogue de cultures
et de civilisations sur un bout de terre africaine ». L’écriture évolue. De jeunes égyptiens ont des
précepteurs grecs.
Cette particularité de l’époque hellénistique doit beaucoup selon Babacar Sall, aux longs
contacts entre grecs et négro-africains (Cf. centralité du noir Eurybate dans les textes
homériques) en Grèce d’abord et sur le sol africain (comptoirs de Naucratis, colonies de
Cyrenne et de Barké). Selon une tradition ancienne, des savants venaient acquérir la
connaissance élaborée en terre africaine (Obenga Th, l’Egypte, la Grèce et l’Ecole d’Alexandrie
Paris, l’Harmattan 2005).
Au Chapitre VII, S. Donadoui examine ce que fut l’évolution de l’Egypte en tant que

23
colonie romaine à partir de l’an 30 avant J.C. Cette domination se caractérise par une politique
délibérée d’étouffement de la civilisation égyptienne surtout à partir de 380 après J.C., laquelle
n’est pas évoquée par l’auteur. Parmi les faits à signaler on peut retenir l’incendie de la
bibliothèque d’Alexandrie, les assassinats de prêtres à Alexandrie et les fermetures de temples
en 391. La domination romaine en Egypte et en Afrique du Nord (avec des guerres de
résistances célèbres) doit être perçue du point de vue africain comme la première agression
culturelle à l’encontre de l’Afrique.
Les Chapitre 8, 9, 10 et 11 pourraient être regroupés dans un ensemble qui pourrait
s’intituler : Le couloir nilotique nubio-soudanais dans l’antiquité : identité et histoire. Ces
chapitres traitent des facteurs géographiques et environnementaux, du facteur humain et de
l’Histoire des Etats Nubio-soudanais : Kerma, Koush, Napata, et Méroé.
Le Chapitre 12 retrace le processus d’évangélisation précoce de la Nubie si l’Histoire de
la genèse et de l’évolution de ces états est bien retracée. L’auteur n’insiste pas sur l’utilisation
que faisait Rome de la foi chrétienne pour tenter de remodeler les dites sociétés. C’est ainsi que
sont crées les royaumes chrétiens dans la Moyenne Vallée du Nil.
Les Chapitres 13, 14, 15 et 16 traitent de l’Histoire du royaume d’Axoum. Cette entité a
eu une longévité exceptionnelle. Né durant l’antiquité, il a perduré jusqu’au début de l’époque
moderne avant d’être envahi par les Galla.
Le Chapitre 17 qui s’intitule les « Protoberbères » se fonde sur un postulat qui est celui
de l’assimilation entre Libuis (libyens) des textes grecs et berbères.
Le fondement historique de l’assimilation demeure fragile au regard de l’état actuel des
recherches. L’étude de la constitution du monde berbère pour être pertinente doit prendre en
compte les Mechtoides et le phénomène migratoire qui a conduit sur les côtes méridionales des
bassins méditerranéens plusieurs vagues de populations eurasiatiques (G. Camps et M. Fantav,
les Berbères : identités et Histoire, 1982).
Le Chapitre 18 écrit par B. H Warmington est consacré à Carthage. L’étude descriptive
est intéressante. Il reste que Carthage a évolué à la périphérie des dynamiques sociopolitiques
qui ont concerné l’Afrique dans l’antiquité.
Le Chapitre 19 double traite de la période romaine et post romaine en Afrique du Nord.

24
Pour la période romaine, A. Mahjoubi tente d’identifier les communautés humaines citées par
les textes gréco-latins (Gétudes, Garamantes). Leur identification aux berbères n’a pas de
fondements historiques solides. Le Chapitre présente une page d’histoire romaine qui n’insiste
pas sur les résistances à la politique romaine faite de surexploitation.
Au Chapitre 20, Pierre Salama aborde le Sahara pendant l’antiquité classique. Ce texte
d’érudition philologique ne donne pas au Sahara toute sa place dans l’Histoire de l’Afrique. Ainsi
l’auteur a donné l’avantage aux relations entre le Sahara et le monde gréco-romain. Le recours
aux seules sources gréco-romaines de l’avis même de nombre d’hellénistes ne suffit pas pour
faire l’Histoire du Sahara. La lecture de G. P. Murdock : « Africa, It’s peoples and their culture
History » 1959 aurait permis de centrer l’analyse de Salama dans l’antiquité.
Les Chapitres 21 à 29 sont consacrés aux études régionales. L’Histoire ancienne de
l’Afrique commence avec des communautés productrices de leur nourriture. Les chapitres
consacrés aux différentes régions et à des thèmes spécifiques transversaux explorent les
dynamiques à l’œuvre.
Le Chapitre 21 « Introduction de la fin de la Préhistoire de l’Afrique Subsaharienne » de
M. Ponanski soulève une série de problèmes qui seront débattus dans les chapitres suivants. M.
Ponanski insiste sur l’unité de l’Afrique malgré les contraintes géographiques qui caractérisent
certaines zones comme le Sahara qui n’a cependant jamais constitué une barrière aux relations
inter africaines.
Il rappelle également la continuité culturelle qui caractérise l’Afrique au-delà des
différences. Le changement est partout remarquable et aucune région n’a connu de stagnation.
Il s’érige en conséquence contre le concept de « continent noir » ou « cul de sac ». Si les idées
de M. Ponanski mettaient en cause nombre d’idées reçues sur l’Afrique au moment où il
écrivait, certaines d’autres sont controversées en regard des nouvelles découvertes. Le débat
porte sur l’avènement des nouvelles technologies comme celle du fer (le sort fait aux anciennes
technologies en différents endroits) l’Histoire du peuplement en rapport avec le mouvement
des peuples. Les relations entre migrations et « diffusion » des technologies nouvelles,
l’endogénéité des cultures et civilisations et la question des influences étrangères.

25
• La métallurgie du fer
Une des questions les plus débattues dans les chapitres consacrés aux études régionales
est celle de la métallurgie du fer (Chapitre 21 au Chapitre 29) en raison certainement de liens
qu’on établit entre la métallurgie du fer et le développement de l’agriculture et la formation des
sociétés complexes. De nombreuses découvertes faites en différentes régions ont permis un
renouvellement du paradigme qui privilégiait la « diffusion » de cette technique à partir de
différents centres (Egypte, Axoum, Méroé) ou Afrique du Nord durant les premiers siècles de
l’ère chrétien.
Aujourd’hui de nombreux résultats de fouilles attestent de l’invention indigène de la
métallurgie du fer à des dates qui remontent au 1er millénaire avant J.C., 400 avant J.C au
Nigéria, 200 avant J.C à Jenné Jeno (Mali), 400 avant J.C. dans les grands lacs.
Ces découvertes doivent permettre d’actualiser les informations relatives à l’âge du fer
des chapitres 27 sur l’Afrique Australe, chapitre 29 sur les sociétés de l’Afrique au Sud du Sahara
au début de l’âge du fer.
- L’apparition de la technologie du fer n’est pas synonyme de l’abandon de l’usage des objets
de pierre. Ponanski estimait que la tradition de l’âge de pierre c’était poursuivie dans
certaines régions de l’Afrique jusqu’à 1000 ans de notre ère. Cette utilisation tardive des
technologies antiques en Afrique n’a pas de lien avec une quelconque appartenance
ethnique selon Félix Chami.
- Les études régionales attestent de la précocité de la domestication des plantes dans le cadre
d’établissements humains plus ou moins étendus et relativement permanents. En Afrique de
l’Ouest par exemple dans des espaces compris entre le Mali, la Mauritanie et le Sénégal la
culture du riz remonterait au IVe millénaire. A ces activités étaient associés la chasse, la
pêche, le ramassage des mollusques.

• L’Histoire du peuplement :
Les migrations, phénomène marquant de l’Afrique sont analysées à travers les chapitres 22
et suivants ainsi que leurs conséquences supposées ou avérées. Une des migrations les plus

26
controversées quant à ses dates, itinéraires et conséquences est bien celle des Bantous.
Chami Félix réfute la thèse qui fait venir les locuteurs Bantous d’Afrique de l’Ouest pour
peupler le reste de l’Afrique Subsaharienne. Est aussi débattue la thèse de la domination des
« Bushmen » ou Khoisans en Afrique Orientale, Centrale et Australe telle qu’exposé par J.
Sutton au Chapitre 23 intitulé « l’Afrique de l’Est avant le septième siècle ».
L’hypothèse selon laquelle la Côte Swahili-antique était peuplée par des « Kushites »
développée par Sheriff A (Chapitre 12) est également sujette à caution.
Quand au peuplement de l’Ile de Madagascar (Chapitre 28) étudié par Vérin, les arguments
relatifs aux deux migrations (Asie du Sud-est et Afrique) reposent essentiellement sur des
études linguistiques.
Vérin défend l’existence à Madagascar du « génotype » africain antique et donc un mélange
ancien entre austronésiens et africains. Félix Chami émet des réserves quand au statut servile
attribué à ces africains par Vérin. Cette idée selon Chami relève d’un vieux préjugé colonial qui
fige les africains dans un rôle, celui de la servilité, même pour la période de l’antiquité.
Les études régionales ont intégré les dynamiques de l’évolution sociale de l’Afrique
ancienne. La Vallée du Nil apparaît comme le lieu d’épanouissement des cultures et civilisations
de l’Afrique ancienne.
Les recherches révèlent progressivement des espaces sans entités étatiques connus. C’est
par exemple le cas des recherches archéologiques sur Djenné Djéno, une cité dont les origines
remontent au 3ème siècle avant J.C. et dont l’épanouissement est lié à son environnement
proche propice mais aussi à des relations d’échanges avec des régions plus lointaines.

Recommandations pour une utilisation pédagogique du Volume II


1. D’une façon générale :
Il faudra, dans la perspective d’un usage du Volume II pour l’enseignement, commencer
par rappeler que, pour la période antique, l’Histoire de l’Afrique est dominée par celle de la
Vallée du Nil où se sont constituées des organisations sociopolitiques qui ont laissé les
témoignages les plus nombreux.
On évitera de singulariser l’Histoire africaine en établissant des comparaisons avec

27
l’Histoire de la période ancienne de l’Europe dominée par celle du Rivage septentrional des
bassins de la Méditerranée.
Il est proposé de n’enseigner sous le chapeau Préhistoire que le Paléolithique. Pour la
période suivante on parlera des cultures et civilisations anciennes de l’Afrique. Pour
l’enseignement des civilisations égypto Koushites relevant de l’ensemble précité, il est proposé
le découpage suivant :
1) Aspects de la civilisation et l’Egypte pharaonique :
Le Chapitre III de l’édition de 1980 (H.G.A) peut servir de base. Les trois points à retenir ici
seraient : les bases de l’évolution de l’Economie en Egypte, l’Administration de l’Egypte, l’Etude
des Sciences, Arts et Techniques. Un quatrième point pourrait porter sur la « Vie quotidienne en
Egypte ».
2) L’Egypte dans le Monde :
On traitera sous cette rubrique du legs de l’Egypte ancienne. On y ajoutera un point intitulé
« Relations du royaume d’Egypte avec certaines régions de l’Afrique nilotique et hors de la
Vallée » (cf. Chapitre 13).
2. En rapport avec les différents Chapitres :
Sur la base du Chapitre 1, l’Histoire des formations politiques créées par les Noirs
commence avec l’ancien royaume d’Egypte (on enseigne encore dans les écoles africaines que
le Ghana a été le plus ancien état noir connu) constitué à la fin du IVe millénaire avant J.C. Sur la
base des arguments développés par C. A. Diop on peut affirmer selon Babacar Sall que les
auteurs des civilisations africaines et du royaume d’Egypte étaient des noirs.
Il faudrait intégrer au Chapitre II l’analyse du processus qui a permis l’avènement du
royaume d’Egypte.
Le rôle de la violence est décrite dans les documents protohistoriques doit être mis en
exergue dans ce processus.
Le Chapitre 3 devra être associé avec les 4 et 5 sous le titre : L’Egypte ancienne dans le
temps et l’espace » qui traiterait les points suivants :
- L’Egypte : économie, société et vie quotidienne ;
- Les relations entre l’Egypte ancienne et certaines régions africaines ;

28
- L’impact de l’Egypte ancienne sur les civilisations post pharaoniques en Afrique noire.
La question des techniques en usage en Egypte est l’une des plus attrayantes pour le grand
public. L’étude de cette thématique permet de montrer la centralité de l’Afrique noire dans
l’élaboration des sciences et de leur diffusion (Chapitre 3).
Le Chapitre V qui traite l’Egypte à l’époque « hellénistique » devrait être exploité. On
insisterait sur le fait que cette période a connu un véritable dialogue de cultures entre
égyptiens, grecs. Les écrits grecs montrent l’image que les grecques se faisaient des africains,
notamment les éthiopiens.
- Le Chapitre VII (Egypte sous domination romaine) est à regrouper avec le Chapitre 19 (La
période romaine et post romaine en Afrique du Nord) sous la Rubrique « la première grande
agression culturelle. Au dialogue des cultures de l’époque hellénistique succédait à l’époque
romaine un véritable choc culturel.
Les Chapitres 8, 9, 10 et 11 offrent les éléments permettant d’étudier :
a) l’époque pré-Koushite marquée par une multitude d’entités politiques : Wawai, Irthet,
Sétou, Yam. Le royaume dit de Kerma (dans l’actuel Soudan) apparaît comme le fleuron
de la Nubie Pré Koushite ;
b) Le royaume de Koush qui a duré 24 siècles.
Des innovations majeures qui ont eu lieu au cours de la période méroïtique mériteraient
d’être enseignées. Il s’agit de l’élaboration d’un système d’écriture alphabétique : Le
Méroïtique, l’accession des femmes au pouvoir suprême, les célèbres candaces de Koush.
On pourra retenir du Chapitre 12 (sur l’évangélisation de la Nubie) dans une perspective
pédagogique, le rôle que l’Afrique a joué dans l’affirmation de la foi chrétienne. L’étude de la
christianisation de la Nubie peut servir également de transition pour l’étude du Royaume
d’Axoum acquis au christianisme au 4ème, 5ème après J.C.
Les Chapitre 13 à 16 consacrés à l’Histoire d’Axoum peuvent servir de fiches pédagogiques,
moyennant une simplification de l’analyse confuse par moments.
L’exploitation du Chapitre 17 (qui traite des berbères) devrait se faire prudente en raison de
la complexité des problèmes identitaires dans les pays dont la population a une composante
berbère.

29
Quant à l’Histoire de Carthage (Chapitre 18), Babacar Sall estime qu’elle ne devrait pas
occuper une grande place dans l’enseignement de l’Histoire de l’Afrique dans l’Antiquité.
Le texte du Chapitre 20 sur le Sahara, ne devrait servir dans une perspective pédagogique
que comme une simple entrée (introduction dans l’étude historique du Sahara).
A la suite de la relecture des Chapitres consacrés aux études régionales (Chapitre 21 à 29),
Félix Chami recommande la réécriture de la plupart d’entre eux au vu des nouvelles découvertes
(archéologiques notamment). Il insiste sur la nécessité d’expliquer aux étudiants africains les
changements de paradigmes intervenus et en cours dans l’approche de l’Histoire africaine ainsi
que les raisons de ces changements. L’Histoire africaine a été écrite par le passé avec très peu
de données disponibles et à partir de paradigmes influencés par les « préjugés racistes » qui ne
sont pas perçus par la plupart des historiens africains. Des historiens tels que C. A. Diop ont
remis en cause ces paradigmes erronés et en ont exigé le renouvellement pour l’écriture
l’Histoire africaine. L’enseignement doit exercer l’esprit critique des jeunes face aux
présentations qui ont été faites de l’Histoire africaine dans le passé et celles qui ont cours
maintenant.

30
Volume III :

L’Histoire Générale de l’Afrique: L’Afrique du VIIe au XIe siècle

M. El Fasi Directeur de Volume I Hrbek Co-directeur.

La Revue de ce Volume a été effectuée par Penda MBOW et Idrissa BA et les deux
lecteurs se réfèrent à l’édition UNESCO NF A 1990, 954 pages.
L’ouvrage qui comprend 28 chapitres est structuré autour de la naissance et de
l’expansion de l’Islam, son hégémonie sur le pourtour de la Méditerranée et sa force de
pénétration en Afrique Subsaharienne. On note beaucoup de chevauchements et de répétitions
au niveau des chapitres même si l’approche se veut chronologique et régionale.
Les quatre premiers Chapitres traitent de l’avènement de l’Islam et de l’essor de la
civilisation musulmane qui se matérialise par la création d’un grand Etat dans la région
Méditerranéenne à partir des conquêtes du VIIe et VIIIe siècle et l’épanouissement d’une
nouvelle culture à l’intérieur de cet ensemble. Cette civilisation musulmane qui, a son apogée,
fut en fait la synthèse de diverses traditions de peuples convertis à l’Islam a favorisé un nouvel
ordre social appuyé sur une créativité scientifique, artistique et technologique.
L’impact du monde islamique a été considérable sur les dynamiques sociales de
l’Afrique. Tout au long des siècles, l’islamisation et le commerce sont restés étroitement liés.
Aussi la co-présence du système social induit par l’Islam et des traditions africaines a favorisé
des interactions entre le monde musulman et les cultures africaines. Au-delà, de la question de
l’Islam et de son expansion, Hrbek redéfinit la géopolitique de l’époque en précisant la place
que l’Afrique y occupa. Il met en évidence l’’importance du commerce et le rôle joué par les
peuples d’origine africaine dans l’océan indien et dans le nouvel espace musulman.
Dans le Chapitre 2 « L’avènement de l’Islam et l’essor de l’Empire musulman, El Fasi et
Hrbek définissent la religion musulmane, (sa genèse et ses relations avec les autres confessions
Abrahamiques) reviennent sur la biographie du Prophète Muhammad. Y sont également
abordés le regard de l’Islam sur les non musulmans, la grandeur et la décadence du califat ainsi
que la prépondérance des Turcs à la fin du XIe siècle. La montée des forces nouvelles (Zirides,
Arabes, Seldjoukides) modifie la géopolitique. Les changements qui interviennent sont aussi

31
économiques, sociaux et spirituels, avec notamment le développement du souffisme…
Le Chapitre III traite en deux parties complémentaires l’Islamisation de l’Afrique du Nord
(M. El Fasi) et la diffusion de l’Islam en Afrique au Sud du Sahara (I.Hrbek).
Pour l’Afrique du Nord, l’auteur distingue l’Egypte (ancienne province byzantine où
s’affrontent différentes formes de christianisme) du Maghreb. La progression de l’Islam profite
des nombreuses querelles religieuses et de l’arrivée continuelle des Arabes de la Péninsule. Au
Maghreb cohabitaient le judaïsme, le christianisme et les religions traditionnelles. La conquête
Arabe s’y heurtait à la forte résistance des berbères. L’action désormais légendaire d’Ukba Ibn
Nafi constitue un tournant dans l’islamisation du Maghreb même si celle-ci progresse de façon
contrastée, le christianisme restant dominant dans le Sahili, les régions méridionales et le Mzab.
Les grandes étapes de l’islamisation de la région sont indiquées depuis la conversion de
nombreuses tribus berbères (défaite de Al Kahina en 703) jusqu’à l’achèvement de l’islamisation
de l’ensemble du Maghreb au 10è siècle. Cette évolution est marquée par des dissidences
(Kharidjites) et des hérésies (religion nouvelle chez les Barghawata).
En Afrique Sud-Saharienne, à l’exception de quelques terres de colonisation Arabe
(Soudan Oriental), le rôle d’envahisseurs arabes dans l’islamisation fut limité. L’islamisation du
Soudan Occidental s’est faite avant la conversion totale des populations du Maghreb. Selon Al
Zuhuri, le rôle des commerçants Ibadites installés à Tadmeka depuis le IXe siècle a été important
dans l’introduction de l’Islam. Ces Ibadites qui ont régné à Sijilmassa étaient présents dans
d’autres localités notamment le long de la route reliant la Lybie au bassin du Lac Tchad. Cet
islam des débuts restait superficiel et influencé par les survivances des religions berbères et
africaines.
Les commerçants furent les premiers à se convertir, cette activité étant étroitement liée
à l’Islam en Afrique. Ces convertis (Wankara, Dioulas, Diankankés) évoluaient en communautés
avec leurs quartiers spécifiques.
Les groupes dirigeants, notamment les chefs et leur proche entourage (Roi du Tekrour,
Chef Dya Kossoi à Gao / 1009/1010 et du Roi de Malal), vont suivre dans l’adoption de l’Islam.
Les Etats ont des intérêts à la fois internes et externes à entrer dans l’islam (notamment les
nécessités du commerce avec l’Afrique du Nord). La pratique musulmane des souverains est

32
parfois peu orthodoxe. Le changement viendra des Almoravides qui vont imposer un islam
orthodoxe au détriment des Kharidjites. Mais ce sont essentiellement les commerçants locaux
(Wankara, Dioula) qui par vagues vont contribuer à répandre l’Islam en Afrique Subsaharienne.
Au XVe siècle l’Islam se consolide dans de nombreuses régions du Soudan Occidental (Kano,
Katsina) grâce à l’influence du Prêcheur réformateur Al Maghîlî sur les chefs politiques. Au XVIe
siècle l’Islam est assez bien implanté dans le Soudan Occidental, de l’Atlantique au Lac Tchad. En
Nubie et au Soudan Nilotique, l’islamisation suivit un processus permanent lié à la proximité de
l’Egypte et à l’arrivée des nomades et des commerçants arabes.
Dans la corne de l’Afrique l’Islam pénétra l’Ethiopie à partir des Iles de Daklat et Zayla.
Au VIIIe – XIe siècle l’Islam gagna les bords du Golfe d’Aden sur la côte de l’Afrique Orientale et
les Iles des Comores. A Madagascar, l’Islam s’installa de manière contrastée.

L’Islam en tant que système social en Afrique depuis le VIIe siècle


Dramani Issouffi (Chapitre 4) analyse l’Islam comme religion et comme élément de
culture spirituelle et sociale faisant partie intégrante de la civilisation d’Afrique Noire. L’auteur
analyse les relations entre l’Islam, les peuples africains et leurs cultures. Il explique le succès de
l’Islam en Afrique par son dogme et sa dialectique qui participent d’une unité profonde et de la
diversité culturelle. Après avoir rappelé les obligations de l’Islam, il évoque quelques unes des
raisons qui ont facilité son adoption par les africains, dont la liberté d’adhésion (par un acte
individuel de foi) à la communauté (UMA).
L’Islam africain dans lequel domine le Malékisme est marqué par l’apparition et le
développement de courants mystiques notamment le souffisme. Les relations que l’Islam
entretient avec les cultures africaines ont connu une évolution contrastée. Après une période
de coexistence aisée (XIe siècle) durant laquelle l’Islam progresse en Afrique de façon
relativement pacifique, on voit apparaître des tensions sociales et culturelles après le XIe siècle.
Celles-ci sont alimentées par la pression des juristes musulmans dont certaines prescriptions se
heurtent aux résistances des cultures locales.
Les souverains africains ont profité des villes et de leur encadrement musulman pour
renforcer leur pouvoir et dans certaines régions l’adoption de l’écriture et des techniques

33
arabes s’est accompagnée d’une « arabisation » des élites dont les effets se ressentent
notamment dans les listes généalogiques. Pour la fin du XVIe siècle et le début du XVIIe siècle,
l’auteur relève une interruption du dialogue entre l’Islam et cultures africaines qui se traduisent
par réactions hostiles à l’Islam dont l’une des plus radicales a été celle de Soni Ali (1466 – 1492).
L’éclatement politique et la désintégration sociale qui suivent les règnes d’Askia Mohamed,
(1493 – 1528) et Askia Daoud (1549 – 1582) annoncent le déclin du Songhai. L’intégration
sociale à partir de l’Islam ne se produira que beaucoup plus tard au cours des XVIIIe et XIXe
siècles.
L’analyse critique de ces 4 premiers Chapitres portant essentiellement sur l’Islam et son
expansion en Afrique fait ressortir quelques insuffisances : le caractère trop superficiel du
Chapitre I qui embrasse une problématique trop vaste. L’absence de cartes et de documents
iconographiques constitue la plus grande faiblesse de lattice. Le Chapitre 2 traite d’avantage de
la genèse de l’Islam, de la biographie du Prophète, et du développement de la religion que de la
place de l’Afrique dans la société musulmane. Le choix opéré par le volume a été de structurer
l’Histoire de l’Afrique autour de l’importance de l’Islam. Le Chapitre 3 pour ce qui concerne
l’Egypte ne laisse pas voir le rôle des conquêtes (celles dirigées par Amr par exemple) ni les
causes de l’immigration Arabe. La complexité des processus d’islamisation en Afrique explique
sans doute que certaines régions aient été mieux étudiées que d’autres. Une meilleure
exploitation des sources arabes permettrait de mieux faire ressortir le rôle du commerce
transsaharien.
Les Chapitres 5 à 25 traitent des mouvements de population et plus largement de
l’Histoire du peuplement dans une perspective régionale. On peut relever que l’Histoire de
certains de ces mouvements déborde en amont et en aval le cadre chronologique que s’est fixé
le volume (ex : l’expansion des peuples bantouphones). Des études consacrées à des thèmes
spécifiques permettent d’éclairer ces mouvements de populations dans leurs mobiles et leurs
itinéraires (Chapitre 11 sur le rôle du Sahara et des sahariens dans les relations entre le Nord et
le Sud. Chapitre 14 sur le commerce et les routes du trafic en Afrique Occidentale). Le
découpage géographique adopté est tributaire de la géopolitique de l’époque considérée. Pour
les commodités de cet exposé nous allons quelques fois nous référer aux 5 grandes sous régions

34
de l’Afrique actuelle et la diaspora.

Les peuples du Soudan : Mouvements de populations


Dans le Chapitre 5 (F. de Meideros), le terme Soudan est utilisé pour l’Afrique Occidentale.
L’auteur analyse d’abord les sources qui permettent l’étude des mouvements et de la mise en
place des peuples de la zone soudanaise de l’Afrique. Il évoque les différentes hypothèses, les
modèles qui ressortent de l’analyse des sources quant à l’assimilation dans un espace ouvert.
Parmi ces hypothèses, il y a celle de la primauté culturelle de certains groupes d’origine
septentrionale ou orientale. La fameuse hypothèse hamitique qui distingue: hamites pasteurs
(fondateurs de royaumes) des Noirs agriculteurs et son corollaire le « diffusionnisme » prôné
par des auteurs comme M. Delafosse, Palmer…
La critique des sources Arabes a été faite sur cette question à maintes reprises. Le recours à la
tradition orale pour pallier l’insuffisance des sources Arabes a permis d’apporter quelques
correctifs à différentes affirmations.
Peut-on parler d’hégémonie du Nord dans les relations qu’il entretient avec le pays des Noirs ?
Il y a un phénomène ancien répond F. de Meideros qui consiste « à définir le pays des noirs à
partir du Nord » (page 147). L’ensemble des tribus berbères ainsi que leurs activités sont
étudiées et plus spécialement les touaregs, à cheval entre les Noirs et le monde saharien. Sur la
base de l’exploitation des sources écrites, orales, et archéologiques, l’auteur a tenté de définir
le terrain où se structurent et s’organisent les sociétés africaines.
La thèse hamitique et le diffusionnisme ne résistent pas à l’analyse. L’auteur réaffirme la
domination des Noirs dans le peuplement néolithique du Sahara qui ne laisse aucun doute sur
les origines de l’Empire du Ghana. L’émergence d’hégémonies soudanaises est la résultante
d’une évolution de sociétés complexes débouchant sur la création d’Etats organisés dès le 1er
millénaire : Kanem, Ghana, Hawsa ; Songhai, Tekrour. La prospérité des Etats soudanais reposait
sur la maitrise de moyens techniques (métallurgie du fer), l’usage du cheval et du chameau. Une
note du rapporteur du volume porte sur l’impact de la production du fer en Afrique
Subsaharienne.
Les relations entre le Nord et les pays du Sud ont été marquées par des luttes âpres pour le

35
contrôle des routes et du commerce. Les écrits d’Al-Bakri témoignent d’une valorisation de la
fonction royale) et d’une tolérance religieuse. Les rois se montrent habiles dans leurs
transactions avec les Arabes. L’un des événements majeurs favorisé par l’Islam de cette
évolution c’est le Mouvement almoravide au XIe siècle.
 Aventure Almoravide (I. Hrbek et J. Dévisse traite des Almoravides Chapitre 13).
L’article définit le mot almoravide comme étant une déformation de Al Murâbitun qui dérive de
la racine r-b t qui signifie « mener le djihad de la manière juste ». Les facteurs à la base de la
naissance du Mouvement, la vie et l’œuvre de son leader Abdallah Yassin y sont exposés. Le
déroulement des actions militaires, l’élargissement de l’empire par les successeurs de Yassin
sont rappelés. L’un des facteurs d’intégration des peuples du Soudan, ce sont les échanges
commerciaux à différentes échelles locale, régionale et internationale. A cet égard le commerce
transsaharien a joué un rôle essentiel comme facteur de brassage.
Au Chapitre 14 « Commerce et routes du trafic en Afrique Occidentale, J. Dévisse, un des
meilleurs spécialistes de cette période montre à travers les résultats de fouilles archéologiques
« l’existence d’une économie d’échanges locaux » et régionaux « sans qu’il soit besoin de penser
à des influences transsahariennes » et une maîtrise de la technologie.
L’auteur analyse le rôle des grandes villes « médiévales » en liaison avec le commerce local,
régional et transsaharien.
Le commerce transsaharien attesté depuis le VIIIe siècle atteint son apogée au 10è siècle.
Les produits d’échanges sont analysés par l’auteur quant à leur flux, fret, transformation et
quantité. La place de l’or dans ce commerce y est particulièrement analysée : production,
dénominations, monnayage, alois. Le contrôle des routes de ce commerce au Nord comme au
Sud a toujours été un enjeu à la base de nombreuses rivalités et convoitises.
L’étude portant sur les mouvements de populations au Soudan paraît limitée par l’état
de l’historiographie. Le bilan critique de l’ensemble des sources relatives aux migrations est
nécessaire pour réexaminer les différentes hypothèses. S’agissant des Almoravides, l’étude ne
prend pas en compte les informations fournies par les traditions orales (maures et soudanaises)
sur les origines et l’expansion almoravide. Depuis 1990, la recherche sur les origines et le déclin
de Ghana a connu quelques avancées. La thèse de la destruction violente de Koumby Saley par

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les Almoravides est très controversée avec une tendance à la réfutation de l’incendie de la ville
(cf. bibliographie, Rapport MBOW – BA).
Le Chapitre 6 de S. Lwanga – Lunyiigo et J. Vansina « Les peuples Bantuphones et leur
expansion » l’une des questions les plus débattues de l’Histoire africaine. L’espace bantuphone
tel que défini ici couvre le tiers méridional du continent africain, de la frontière camerouno-
nigériane à l’Ouest jusqu’au littoral frontalier Somalo-Kenyan à l’Est, et de là jusqu’aux environs
du Port Elisabeth au Sud (page 165). Il se caractérise par plusieurs parlers qui dérivent du proto
bantu dont le berceau se situerait soit dans la Région de la Bénoué Moyenne (Afrique de
l’Ouest) soit dans la Province du Shaba (actuelle R.D.C). La première hypothèse semble
privilégiée. L’expansion Bantu aurait ainsi commencé au Néolithique (entre -1000 ou même -
400) pour se poursuivre jusqu’aux environs de l’an 1000 avec des prolongements vers le Nord
qui vont durer jusqu’au XIXe siècle. L’étude du vocabulaire ancien de la langue Bantu renseigne
sur les modes de vie des Bantus (pratiques de la culture de l’igname, des céréales, de la chasse,
de la pêche…).
La question des origines et de l’expansion des bantu est abordée essentiellement dans
ce chapitre sur la base des hypothèses de linguistes. La faiblesse de la documentation
transparaît dans la pauvreté des renvois bibliographiques.
 Dans la Vallée du Nil
Dans un chapitre intitulé l’Egypte depuis la conquête Arabe jusqu’à la fin de l’Empire
Fatimide (Chapitre 7), T. Bianqui retrace les étapes de l’Histoire d’Egypte, de l’occupation
byzantine, au règne des Fatimides au 10è siècle. L’Egypte devint un bastion du monde Arabe à
partir des expéditions du Général Amr, conduites depuis le Fayoum. Babylone se substitua à
Alexandrie comme capitale. Le règne des Ummayades à Damas s’accompagnera de
changements dont l’Hégémonie de l’Arabe sur la Mer Rouge, l’apparition de nouveaux
itinéraires commerciaux et un développement culturel remarquable. L’arabe devint la langue de
culture chez les égyptiens et les chalcédoniens.
La présence des soldats yéménites dans les villes égyptiennes contribua à
« l’acculturation » des populations. Les révoltes du califat Abasside initiées par les chrétiens et
les Arabes des Kabila vont installer une période d’anarchie. L’autonomie de l’Egypte qui fut le

37
fait de forces centrifuges (Tulumides, Ikshidides et Kafur) prélude l’avènement des Mameluks.
L’Egypte impériale apparut et se développa au Xe siècle sous le règne des trois premiers imams
fatimides. L’auteur décrit avec maints détails l’évolution de la ville du Caire (fondée par
Djawhar) en tant que pôle d’attraction jusqu’à l’agonie du régime fatimide au XIe siècle. Au
total, ce Chapitre révèle les imbrications entre l’Histoire de l’Empire Musulman sous les
Ummayades, les Abassides et celle de l’Egypte.
Dans une perspective d’utilisation pédagogique de ce Chapitre il faudrait distinguer les
faits politiques des faits de culture (notamment le développement des techniques) qui
s’entremêlent. L’agriculture importante en Egypte a été très peu abordée dans ce Chapitre.
Pour le même espace S.J. Jakobielski traite de la Nubie chrétienne à l’apogée de sa civilisation
(Chapitre 8).
Comme cela a été illustré par le Volume II, l’Histoire de la Nubie est intimement liée à
celle de l’Egypte. L’auteur expose ici les facteurs qui fondent la prospérité de la Nubie (union
des royaumes de Nobadia et Makura, établissement de relations profitables avec l’Egypte à
travers le bakt, pacte de non agression) avant d’évoquer la prospérité de ses villes et le
développement artistique et artisanal qui les caractérise. Mais ce qui caractérise le plus cette
Nubie, c’est son christianisme de tendance monophysite (avec une liturgie plurilingue : grec,
copte, vieux nubien.
 Afrique du Nord
Les Chapitres 9, 10 et 12 traitent de l’évolution de l’Afrique du Nord de la conquête Arabe (7è
siècle) à la fin du règne des Fatimides au 11è siècle.
Le Chapitre 9 de H. Monés « La conquête de l’Afrique du Nord et la Résistance berbère » décrit
les grandes étapes de la conquête Arabe ainsi que celles de la Résistance des berbères à cette
conquête. Après deux mises au point qui concernent l’usage du terme Maghreb et la situation
des berbères à la veille de la conquête, l’auteur distingue les 4 grandes étapes de la conquête de
l’Afrique du Nord dont il rappelle les enjeux (outre l’islamisation, le rançonnage, la maîtrise et le
contrôle des routes commerciales). La première étape 663 – 670 a lieu sous la conduite de Ibn
Hudaydj Al Sakuni commandant en chef de l’armée Arabe. L’année 670 marque un tournant
avec la nomination de Ukba Ibn Nafi à la tête des forces Arabes, lequel étendit la conquête

38
jusqu’au Kawar, en passant par le Fezzan. En 675 le remplaçant de Ibn Nafi, Dînar Ibn Abû Al
Muhâdjir convaint Kusayla un chef berbère à se convertir avec les siens à l’Islam. Le retour de
Ukba Ibn Nafi en 683 va marquer de nouvelles conquêtes notamment celles de l’Aurès, du
Tafilalet et de la Côte Atlantique. La résistance berbère est incarnée d’abord par Kusayla qui
constitua un royaume berbère intégrant l’Aurès, le Sud Constantinois et la plus grande partie de
l’Ifrikiya en 687 – 690. La deuxième phase de la résistance berbère est symbolisée par une
femme surnommée Al Kahina qui infligea de sévères défaites aux troupes arabes notamment en
696. C’est à la suite de la mort de Al Kahina que les conquérants mettront en place
l’organisation administrative des territoires.
Au Chapitre 10 « L’indépendance du Maghreb » M. Talbi traite de la Révolte et de
l’indépendance du Maghreb. Ce mouvement a été suscité par les injustices subies par les
berbères musulmans sous les Ummayades. La révolte se fait sous le signe du Karidjisme qui
considérait le pouvoir Ummayade comme illégal. Les Karidjistes conquièrent pratiquement tout
le Maghreb Central et mirent en place différents royaumes ; royaumes des Barghawâta, de
Tlemci, de Bani Wassul (Sufrites) de Tripoli et Tahert (Ibadites). Au XVIIIe siècle c’est le Chiisme,
le courant opposé, qui s’impose au détriment des Karidjisme (avec le succès de Idrissides). En
800 l’Ifrîkiya obtint son indépendance de Harun Al Rashid et ainsi apparaît le royaume Aghlabide
(800 – 900).
Au chapitre 12 « L’avènement des Fatimides » I. Hrbek définit tout d’abord le Chiisme dont
relève les fatimides. Ses dogmes fondamentaux sont : l’attribution de l’imamat aux descendants
du Prophète et la thèse du retour du Mahdi. Le mouvement fatimide prend ses origines chez les
Ismaïliens (basés en Syrie) qui considèrent Ismaïl descendant du Prophète mort en 761 comme
étant le Mahdi. Les berbères Kutana aidèrent le Dai (missionnaire venu de Salamiyya en Syrie)
Abd Allâh Al Shi’i à vaincre les Aghlabides. Le pouvoir sera remis par la suite à l’imam « Ubayd
Allâh le fondateur du mouvement des fatimides. Le royaume Fatimide se transformera entre le
Xe et XIe siècle en un vaste empire s’entendant de l’Atlantique à la Syrie. S’agissant des
conquêtes arabes, différentes études ont montré comment la légende s’était saisie du
personnage d’UKba en lui attribuant des conquêtes qui n’étaient pas de son fait. Ainsi T. Lewicki
dans le même volume examine autrement le portée des conquêtes d’Ukba qui ne seraient pour

39
certaines que des expéditions de reconnaissance.
Le Chapitre 11 « Le Rôle du Sahara et des sahariens dans les relations entre le Nord et le
Sud » écrit par T. Lewicki est à mettre en rapport avec le Chapitre 9. L’auteur analyse le rôle que
le Sahara a joué dans les relations entre l’Afrique et le Soudan entre le VIIIe et le XIIe siècle.
Après avoir défini les contours du Sahara limité à l’Est par le Nil et à l’Ouest par l’Océan
Atlantique », il en décrit les habitants, comme des « peuples d’origine berbère métissés quelque
fois de sang noir africain ». Il distingue parmi ces berbères deux branches principales : les
Sanâdja et les Zanâte. Au Sud du Sahara Oriental, il situe des « peuples négroïdes » appartenant
à différents groupes tels les Zaghâwa, le Teda et les Dawa. Ce peuplement compte quelques
éléments Arabes disséminés.
L’auteur analyse à travers le détail des axes routiers, des itinéraires, des étapes, des
terminus le rôle important que les populations sahariennes ont joué dans les relations
transsahariennes. L’étude est fondée essentiellement sur les sources arabes. Si ce Chapitre (l’un
des plus long du Volume III) permet d’avoir une vue d’ensemble des principaux axes
commerciaux transsahariens, il ne permet pas de situer les nombreuses localités mentionnées.
Il ne comprend qu’une carte de protée générale.
Les approches de la parenté entre Sanadja et Touareg (Al Tawârik) par les auteurs des
Chapitres 9 et 11 divergent. H. Monès les identifie aux Tarka qui avec d’autres (Lamtuna,
Massûffe, Djuddala) constituent les plus importantes Kabila Sanadjiennes. T. Lewicki fait des
touaregs les descendants des Sanadja. L’auteur accrédite le propos d’Ibn Hawkal qui disait être
passé par Awdaghost en 951 ce qui a été démenti par Levtzion sur la base d’une étude
intertextuelle montrant que Hawkal n’est jamais allé au-delà de Sidjilmassa où il a recueilli des
informations sur le Sud. La description précise que les auteurs Arabes de Thaghâza font plus
penser à une mine qu’à une saline.
On peut regretter que la description du peuplement du Sahara s’appuie presque
exclusivement sur les sources Arabes. De fait les populations noires sont peu présentes dans
cette description à l’exception des Tubu de la partie Orientale du Sahara Oriental, une brève
allusion aux bafours assimilés par l’auteur à des blancs. Il faudrait prendre en compte
d’avantage les traditions maures et soudanaises relatives à ces différents groupes.

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Au Chapitre 15 D. Lange en collaboration avec B. W. Bakindo traitent de « La Région du
Lac Tchad en tant que carrefour). La région du Lac Tchad a été très tôt une zone d’accueil (avant
l’ère chrétienne) de populations nomades et sédentaires fuyant la désertification du Sahara
(dans les phases d’aridification dont celle du 3ème millénaire avant J.C et celle du XIe siècle la plus
documentée). Parmi ces populations on retient : les Zaghâwa, Tadji, (Djâdo) Teda Daza (Tubu),
Bede, Kuri, Kotoko, Kanuri, Sao (Sao) regroupés en différentes familles linguistiques.
La région connaît une maîtrise agricole et technologique attestée par de nombreux sites
(technique de fabrication du fer connue dès – 540 avant J.C.). Elle aussi connaîtra plusieurs
hégémonies politiques dont le Kanem (avec les dynasties Zaghâwa et Sêfuwa) qui entretient des
liens commerciaux durables (dont la vente des esclaves) avec les Etats musulmans d’Afrique du
Nord (Zirides, Hafsides). Les auteurs de ce Chapitre consacrent un passage aux Almoravides (en
dehors de leur sujet) qui diverge dans ses conclusions avec le texte écrit par Hrbek et J. Dévisse
(Chapitre 13) sur le sujet (pages 488).
Les Chapitres 16, 17, 18 qui se fondent essentiellement sur les résultats de la recherche
archéologique, les études linguistiques et les traditions orales tentent d’esquisser les schémas
d’évolution des sociétés de la zone guinéenne, en ces différentes composantes, depuis le
premier millénaire avant J. C., mais plus spécifiquement au courant du millénaire suivant. Le
millénaire qui ouvre l’ère chrétienne « qualifié de millénaire du silence » par T. Shaw (Volume I.
Chapitre 24) était peut être aussi celui au cours duquel un changement important était
intervenu dans les modes de vie.
Dans le Chapitre 16 « La zone guinéenne : Situation générale » T. Shaw présente les
traits caractéristiques de la région durant cette époque et les tendances générales dont les
déclinaisons locales seront traitées dans les Chapitres suivants. Toute l’étude est concentrée
autour « d’un changement fondamental » mais graduel qui intervient durant le premier
millénaire : c’est le passage d’une économie fondée sur la chasse, la cueillette et la pêche, à un
mode de vie dominée par l’agriculture et l’élevage.
Cette évolution est étudiée en Basse Guinée par B. W. Andah (Chapitre 17) et en Haute
Guinée (Chapitre 17) du point de vue de l’économie, de subsistance, de l’habitat du commerce
de la métallurgie du fer, des pouvoirs propitious. Dans chacune des parties la zone guinéenne,

41
l’étude s’appuie sur les groupes linguistiques, identifiés par la recherche.
Les évaluateurs se demandent si le chapitre 16 consacré selon l’auteur lui-même « au millier
d’années qui a précédé l’an mille en Afrique occidentale » avait sa place dans ce volume.
La définition de la zone guinéenne, malgré la carte qui figure à la page (491) reste incertaine. La
prise en compte des mégalithes et tumulus au cœur de la Sénégambie n’amène t-il pas l’auteur
à étendre excessivement la zone guinéenne ?
 La Corne de l’Afrique : Chapitre 20
Dans ce chapitre T.T MEKOURIA s’intéresse à l’évolution du royaume d’Axoum apparu
vers la fin du premier siècle et qui connaît un essor prodigieux sous le règne de EZANA au IVe
siècle.
Dans le chapitre 21 E. Cerruli s’intéresse aux relations entre l’Ethiopie et le monde
musulman (donc entre musulmans et chrétiens) de part et d’autre de la mer rouge. Les
musulmans se rendirent progressivement maitres de la mer rouge au détriment des éthiopiens
à la suite de nombreuses conquêtes au début de l’ère Ummayade, notamment l’occupation des
Iles Dahlak. Des commerçants musulmans s’installèrent à Enderde entrainant de nombreuses
conversions d’éthiopiens à l’Islam. Malgré le verrou que semblait constituer l’Etat Chrétien
d’Axoum, des sultanats musulmans se créèrent contraignant Axoum à s’étendre vers le Sud en
direction du plateau Ethiopien, transférant même sa capitale. Entre le XIIIe et le XIVe siècle, on
assistera à de nombreuses confrontations entre Axoum et les sultanats musulmans, dont la
plupart seront à l’avantage du Négus.
C. Erhet étudie au chapitre 22 l’évolution des sociétés à « l’intérieur de l’Afrique
orientale ». Il y distingue essentiellement deux grands groupes : les Kushites et les Bantu. Les
non bantu, tel les Khoisan sont l’objet d’une assimilation par les premiers. Les modes de vie et
les croyances religieuses des différents peuples sont décrits et l’auteur établit une sorte de
corrélation entre l’appartenance ethnique et le type de production alimentaire.
Dans l’étude consacrée à la corne de l’Afrique, il n’a été nulle part fait mention des
Falasha. Contrairement à ce qu’annonce le titre du chapitre 20, celui-ci a traité surtout de
l’expansion musulmane en Ethiopie.
Chapitre 21 : F.T MASAO et H.W Mutoro : « la côte d’Afrique orientale et les Comores ».

42
Les auteurs s’intéressent aux abords de la côte orientale de l’Afrique. Une bande de terre
délimitée au Nord par la Somalie et au Sud par le Mozambique. L’ancienneté et la continuité du
peuplement de cette zone sont attestées par l’archéologie qui le fait remonter jusqu’au 1er
millénaire de l’ère chrétienne. Les sources arabes, les récits chinois et les traditions orales
permettent de restituer les aspects ethnographiques importants de cette région telle la
répartition des principaux groupes : les barbares (Somali) au Nord, le pays des Zandj, et le pays
de Sofala au Sud.
 Afrique Centrale
Le chapitre 23 « l’Afrique Centrale au Nord du Zambèze » de D.W Philipson porte sur
une région peuplée presque exclusivement de populations bantu au début de la période
considérée. Cependant ces bantu dit du premier âge du fer ou encore « du complexe industriel
du premier âge du fer » se divise en deux courants, l’un oriental et l’autre occidental. Des
cultures archéologiques (fondées notamment sur l’étude des céramiques) permettent de
distinguer plusieurs groupes dans des aires géographiques définis. Le XIe siècle marque le début
d’une période de transition entre le premier âge et le deuxième âge du fer, changement lisible
dans les traditions de poteries et les modes de vie. La chasse recule au profit de la culture du
sorgho, de l’élevage et les relations commerciales utilisant les cauris et les cônes se développent
avec la côte orientale.
 Afrique Australe
Le chapitre 24 « l’Afrique méridionale au Sud du Zambèze » de N. Huffman traite
essentiellement de la culture Zimbabwe de l’âge du fer (il y’a de cela 1 millénaire) qui est le fait
des peuples bantou. L’espace étudié englobe le Sud-ouest du Matabélé Land, le centre Est du
Botswana et l’extrémité Nord du Transvaal. Les différentes communautés de cette région qui
pratiquaient une agriculture diversifiée, l’élevage, la chasse et la pêche sont étudiées à travers
leurs cultures matérielles notamment la céramique et l’habitat. Sous l’effet des échanges
externes, la culture Zimbabwe connait entre 1000 et 1075 une évolution marquée par le
renforcement du pouvoir central, la prospérité de Manpungwé, première capitale du royaume
du Zimbabwe.

43
 Madagascar
Dans le chapitre 25, intitulé « MADAGASCAR » B.Domenichini – RAMIARIMANANA à partir du
décryptage des sources orales et l’exploitation des résultats archéologiques et de la
linguistique, tente de restituer l’Histoire du peuplement de la grande île et l’évolution des
modes de vie dans la longue durée. Un certain nombre d’hypothèses ressortent de cette
analyse :
- L’Homme était présent à Madagascar aux moins dans les régions enquêtées à l’époque
longtemps avant +1000.
- Des populations de pêcheurs vivant probablement entre le VIIe et XVe siècle sur la Côte,
avaient une relation avec une zone de commerce arabo-persane. Elles auraient disparu au XVe
siècle.
- Les austronésiens ont certainement joué un rôle dans la navigation hauturière sur l’Océan
Indien (constructeurs, utilisateurs de radeaux, de pirogues à balanciers, et de grands bateaux).
Leur installation dans l’île par ces moyens remonte au 1er millénaire de notre ère et depuis cette
époque l’île est insérée dans un commerce interrégional fournissant des produits de cueillette
(bois d’œuvre, gomme, aromates, épices).
Y. Talib à partir d’une contribution de Faisal « la Diaspora africaine en Asie » chap.26 s’attache à
documenter la présence africaine en Asie à différentes époques. De la période préislamique au
IXe siècle (terme de l’étude), cette présence est marquée surtout par la servilité. Utilisés comme
esclaves dans l’Arabie préislamique (en provenance d’Afrique orientale), on les retrouve
mercenaires, assurant la protection des itinéraires caravaniers de la Mecque. Nombre
d’esclaves noirs font partie des premiers convertis à l’Islam dont le fameux Bilal B. Rabah.
« Au VIIe siècle et IXe siècle la demande d’esclaves s’accrut suite au développement de
l’agriculture dans la basse Vallée de l’Iraq et à l’expansion du commerce international dans
l’Océan Indien » (P. 759).
Le statut des africains dans la société musulmane est ensuite examiné. Ceux-ci sont utilisés dans
l’agriculture, le commerce, les armées, les Harem, comme domestiques et dans les lieux de
loisirs. Différentes révoltes de Zandj secouèrent l’Empire abasside entre 869 et 883. Outre leur

44
rôle économique, l’apport des africains au monde musulman a été important dans différents
domaines : culture, arts, littérature, exégèse…
Les chapitres 27 et 28 portent sur des thématiques transversales traitant de l’organisation de la
sédentarité et de la mobilité des populations en Afrique pour l’époque considérée (VIIe – VIe
siècle).
Le chapitre 27 de A. Bathily et C. Meillassoux « Relations entre les différentes régions de
l’Afrique » traite des mouvements de la population et de leurs conséquences. Les auteurs
soulignent d’entrée de jeu l’ancienneté et l’importance de la mobilité des populations
africaines. Les progrès réalisés dans les moyens de communication, l’extension du réseau
commercial, l’essor urbain sont des faits caractéristiques de la période étudiée. Ils passent en
revue les produits du commerce interregional. Les échanges et la mobilité des personnes
favorisent la diffusion des techniques. Ce pendant s’agissant de la métallurgie du fer, la thèse
d’une origine autochtone emportent la faveur des auteurs. La période étudiée est aussi
marquée par des transformations sociales importantes : accélération du processus de
différenciation sociale sous l’effet des progrès de la diffusion du travail, développement de la
lutte des classes à travers les révoltes dans différents états.
J. Dévisse / J. Vansina « l’Afrique du VIIe au XIe s : cinq siècles formateurs » chapitre 28.
Les auteurs étudient l’organisation sédentaire de l’espace en Afrique dans les différentes
régions. Cette organisation s’appuie sur des systèmes de production appropriée assurant la
nourriture des populations. En Afrique orientale, c’est la diffusion des races de bovins à bosse
en Afrique occidentale, les progrès de l’agriculture firent reculer la forêt dans les Vallées du
Niger et du Sénégal. On peut distinguer des zones caractéristiques comme le Sahel « domaine
de l’élevage » ou les Vallées « espaces d’organisation complexes ». Les auteurs s’intéressent
ensuite aux techniques dont aucune n’est « immobile » ; leur Histoire reste à faire en Afrique.
Les autres centres d’intérêt du chapitre sont le commerce (ses différentes formes) et l’étude des
religions, des idéologies et des arts en tant que représentations collectives. Le rôle des religions
africaines comme cadre structurant des pouvoirs politiques commence à être mieux connu.

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Propositions de thèmes et de sujets pour les contenus d’enseignement dans le primaire et le
secondaire.
La liste des sujets proposés pour être enseignés est longue, au regard de l’intérêt du volume. On
peut les regrouper en quelques thématiques.
- L’Islamisation en Afrique : Etapes du développement de l’Islam et de sa diffusion. Chap.3. Les
textes d’auteurs arabes pourraient ici servir de supports. Exemple : récit de l’expédition d’Oqba
Ibn Nafi dans le Sud du Maroc. Les textes d’Ibn Kaldun ou d’Ibn Batuta à propos du Mali relatifs
au fonctionnement d’un Islam de cour.
- Les résistances des peuples berbères. Chap.9
On commencera par la problématique des origines et structures sociales berbères. Chap. 9,
11,13.
- Les gestes des Empires fatimide et almoravide.
- Le rôle du Sahara dans les relations entre le Nord et le Sud. Chap.11. Dans l’imaginaire
collectif, le Sahara est perçu comme un obstacle entre l’Afrique du Nord et le Soudan. Une
étude du commerce transsaharien qui en présenterait les principaux axes, le rôle de ce
commerce dans la consolidation des pouvoirs étatiques et les enjeux autour du contrôle des
axes routiers serait utile.
- Les débuts de l’agriculture et la domestication des plantes dans différentes régions.
- L’art africain exemples : Ife, Igbo-Ukwu.
- Introduction à la religion africaine. Chap.28
- Le royaume d’Axum notamment sous le règne d’Ezana
- La culture de Zimbabwe
- La mise en place des populations à Madagascar
- Les africains en terre d’Islam

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VOLUME IV
L’Histoire Générale de l’Afrique: L’Afrique du XIIe au XVIe siècle
Directeur de volume : D.T. Niane

Le volume IV de l’H.G.A dirigé par D.T Niane couvre une période importante de l’histoire du
continent africain, celle qui va du XIIe au XVIe siècle. Il comporte 27 chapitres et une introduction
du directeur du volume qui présente de façon didactique le contenu. La question dominante de
ce volume est celle de la constitution, de l’épanouissement, et de l’effondrement des grands
ensembles politiques en Afrique dans les contextes socio-économiques et politiques divers.
Les contributions mettent en lumière le rôle des religions, comme cadre structurant des
systèmes politiques (dans le contexte des religions ancestrales) et/ou facteur de renforcement
ou non des institutions étatiques (exemple de l’islam au sein des aristocraties régnantes en
Afrique de l’ouest). Les relations commerciales intra et inter continentales qui ont joué un rôle
important dans les développements politiques, sociaux et culturels sont parallèlement étudiées
à travers, par exemple, la circulation des idées et des savoirs faire.
L’histoire du peuplement, la formation de groupes ethniques et leurs transformations
successives, les formes d’organisation sociales sont au cœur de l’analyse dans différents
contextes à travers l’étude des sources varies, notamment la linguistique historique et
l’archéologie. Les découvertes archéologiques récentes permettent aux auteurs de dissiper les
différents mythes relatifs aux auteurs et à l’origine des différentes cultures et civilisations telles
que celles matérialisées par les structures de pierres des cites côtières SWAHILI ou les ruines du
ZIMBABWE- mapungubwé à l’intérieur.
L’ensemble de ces questions est abordé dans le volume dans une perspective régionale :

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 AFRIQUE DU NORD :
En Afrique du Nord, cette période est marquée par un double mouvement de constitution
d’ensembles (à tendance unitaire, régionale) d’une part et de désagrégation du Maghreb en
entités multiples et autonomes sous l’effet de forces centrifuges. Le chapitre II rédigé par
OMAR SAIDI décrit l’évolution politique du Maghreb sous les Almohades tandis que TALBI, au
chapitre III, montre le rôle joué par les savants, médecins, historiens, jurisconsultes,
géographes... Ils ont non seulement contribué au développement du savoir (rôle souvent
méconnu du grand public) mais ont aussi joué un rôle important dans le transfert des
connaissances littéraires et scientifiques vers l’Europe. H. R. Idriss et I. Hrbek, dans les chapitres
IV et V, dépeignent les conditions qui ont provoqué la désintégration du Maghreb en trois
(Marinides, Wattassides, Hafsides) puis en une multitude d’entités politiques ainsi que la
composition de la société de l’époque et sa stratification. Le Machrek connaît durant la même
période un renouveau musulman sous les Ayyubides, notamment sous le règne des Mameluk
(XIIIe et XIVe siècle) qui lui a permis d’arrêter l’expansion des croisés chrétiens venus d’Europe.
Les chapitres traitant de l’Afrique du nord pourraient être enrichis par les résultats de travaux
récents, notamment ceux effectués sous l’égide de l’Institut des Etudes Africaines de
l’Université de Mohamed V à Rabat.
 Afrique de l’ouest :
L’Afrique de l’Ouest connaît l’émergence et l’épanouissement de grands ensembles politiques
étudiés dans les chapitres VI, VII et VIII rédigés respectueusement par D. T. Niane, Mme Ly Tall
M. et S. M. Cissoko. Les auteurs de ces chapitres font une utilisation optimale des sources
disponibles (écrites, orales, archéologiques) pour analyser les conditions d’émergence des
ensembles ouest africains et décrire leur mode d’organisation politique, sociale, leur
épanouissement et les circonstances de leur déclin. Il s’agit notamment du Mali (XIIe, XVIe
siècle), du Songhaï (VIIe, XVIe siècle) et des entités qui les ont précédées, le WAGADU (Ghana
des auteurs arabes) et le SOSSO de Soumangourou Kanté. Après la chute du WAGADU (Ghana),
sous les coups des almoravides au XIe siècle, l’espace du Soudan Occidental connaît des remous
politiques et socio-économiques. L’émergence royaume du SOSSO du roi forgeron
Soumangourou Kanté est remis en contexte comme celui de son “ « challenger“ Soundiata Keita

48
qui l’emportera lors de la célèbre bataille de Kirina en 1235 qui marqua la fondation de l’empire
du Mali. La sécurité et la paix (dont témoigne Ibn Battuta, qui visita l’empire au XIVe siècle) vont
caractériser la région durant de longs siècles. Le rayonnement du Mali au delà de l’Afrique doit
beaucoup à l’empereur Kanku Mussa qui entreprit un pèlerinage à la Mecque (1324) avec une
étape remarquée en Egypte. La générosité dont il fit preuve lors de cette escale est diversement
appréciée par les lettrés arabes et les détenteurs des traditions orales mandingues. A propos de
l’Empire Songhaï, le chapitre VIII de S. M. Cissoko fait état de la durée exceptionnelle de cette
entité dont les origines remontent au VIIe siècle, qui a connu trois dynasties du IXe au XVIe siècle.
Le petit royaume de Kukya longtemps tributaire du Mali s’affranchit de cette tutelle malienne et
à partir de sa capitale Gao exercera son hégémonie sur une grande partie du Soudan Occidental.
Sonni Ali Ber (1464-1492) qui fut le grand bâtisseur du Songhaï, fut remplacé après sa mort par
Askia Mohamed qui usurpa le pouvoir au successeur légitime. Askia Mohamed, musulman
convaincu et prosélyte instaura une nouvelle dynastie, celle des Askia qui se plaça sous la
bannière de l’Islam. Après son pèlerinage à la Mecque, Askia Mohamed revint avec le titre de
Calife du soudan. L’islam connut un développement important sous son règne à travers des
foyers culturels tels que Tombouctou, Djenné, Gao et des actions missionnaires à travers la
région. Le Songhaï fut victime au XVIe siècle de la volonté hégémonique du souverain Mérenide
du Maroc Al Mansour. La bataille de Tondibi (1591) marqua la fin du dernier grand empire
soudanais de cette époque.
Beaucoup de travaux archéologiques menés au cours de ces dernières décennies, notamment
dans le Delta intérieur du Niger viennent enrichir l’histoire de ces ensembles politiques. Il est
important de prendre en compte leurs résultats qui remettent en cause le paradigme colonial
qui expliquait l’émergence de la civilisation soudano-sahélienne par la seule stimulation du
commerce transsaharien et de l’islam introduit en Afrique de l’ouest. Si le commerce
transsaharien qui intégrait en effet cette partie du soudan au commerce mondial a eu un impact
certain sur l’évolution de cette région, renforçant même le commerce inter-régional
préexistant, il est important de retenir la « permanence de la recherche de la stabilité et de la
sécurité chez les « peuples » de la région.
Au nombre des ressources ayant servi au maintien de cette stabilité, (dont certaines perdurent

49
encore aujourd’hui) les évaluateurs mentionnent la charte de Kurukanfuga (édictée après la
bataille de Kirina par Soundiata et qui fixait les règles de la coexistence entre les différents clans
et les rapports entre peuples et dirigeants) et la « Sanankuya » (alliance à plaisanterie qui avec
d’autres participent à la régulation sociale au quotidien).
Des études ont également porté sur l’évolution de différents autres peuples de l’Ouest africain :
les royaumes de la boucle du Niger et du Bassin de Volta du XIIe au XVe siècle par M. Izard, les
« Hawsa et leurs voisins du Soudan Central » par M. Adamu chapitre 11 « les peuples côtiers de
la Casamance aux lagunes ivoiriennes par Y. Person, chapitre 12 et P. Kipré, chapitre 13.
Si Izard parait renseigné sur les questions relatives aux Mossi dits septentrionaux et ceux plus
méridionaux, il reste silencieux au sujet des autres communautés et même d’entités connus.
Des entités tels que le Gurma/ Gulmu ou le Bourgou / Baruwu qui figurent sur plusieurs cartes
ne font l’objet d’aucun développement. Si l’accès du chapitre 6 relatif aux Hawsa est facile, on
peut regretter de n’y trouver en dehors de la carte (P. 315) aucun élément illustratif des cités
évoquées.
Le chapitre 12 de Y. Person sur les côtes de l’Ouest africain nous fait connaître les premiers
peuplements de l’archipel du Cap Vert très lié à l’actuelle Guinée Bissau. Cette étude est
prolongée par le chapitre 13 de P. Kipré qui renseigne sur les lagunes de l’actuelle Côte d’Ivoire,
ainsi que le pays Akan jusqu’au Ghana Contemporain. Il ne dit rien par contre du pays Ga de la
Plaine dite d’Accra. Le texte de A.F.C. Rycler (chapitre XIV) qui traitre de la « Volta au
Cameroun » renseigne largement sur les cités Yorubas (actuel Nigéria méridional) et les auteurs
de la célèbre cité de Bénin et de ses bronzes (les Edo), les peuples du Delta et les Ibo auteurs
des productions artistiques d’Igbo-Ukwu. Le dernier paragraphe consacré aux Ijo et Ewé révèle
une difficulté de localisation de ces peuples. Des rectificatifs voire des compléments
d’informations sur la base des travaux récents sont nécessaires pour préciser la localisation de
ces peuples.
 La Vallée du Nil
L’Egypte est replacée dans le monde musulman entre le XIIIe siècle et le début du XVIe siècle
(chapitre XV). L’Egypte sous le règne des Mameluks (1250-1517) contrôlait la route des épices
et autres denréeset passant par la Mer Rouge en direction de la Méditerranée. Elle était aussi

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l’étape pour de nombreux pèlerins (notamment ceux de l’Afrique Occidentale et Centrale) allant
à la Mecque. En 1517, les Ottomans étendaient leur domination à l’Egypte faisant basculer à
nouveau son sort. La Nubie étudiée par L. Kropacek présente un cas de gestion pacifique des
relations inter religieuses sur la longue durée entre l’Etat Fatimide musulman d’Egypte et les
deux royaumes Chrétiens du Sud à travers le « Bakt » qui a perduré pendant six cent ans.
L’auteur évoque ensuite le processus de décadence des deux royaumes Chrétiens, nubiens, leur
conquête et l’arabisation des nubiens du XIIIe au XVe siècle.
 La Corne de l’Afrique
Le chapitre XV nous introduit à la géographie politique et humaine complexe de la Corne de
l’Afrique. T. Tamrat nous présente une région où se sont déployés des Etats chrétiens et
musulmans qui entretenaient des relations avec des communautés de religion traditionnelle
africaine. L’Empire éthiopien dirigé par un Souverain chrétien Yekuno Amlak (1270-1285) atteint
son apogée sous le règne Zera Yacob (1434-1468) avant de décliner à la fin du XVe siècle.
L’essor de la civilisation Swahili entre le XIIe et le XVIe siècle sur les côtes Orientales du continent
et dans les Iles archipels voisins est le thème du chapitre XVIII écrit par V.V. MATVELEV.
L’auteur restitue le processus historique qui a produit cette civilisation originale à partir d’un
substratum africain Bantu. Il fait ressortir la part des influences et des métissages avec les
apports arabes, persans indiens, ceux de l’Islam entre autres.
Cependant les évaluateurs trouvent discutable son opinion selon laquelle la communauté
Swahili ne serait pas alors homogène au plan ethnique et social. Les études disponibles à
l’époque de la redaction du chapitre faisaient déjà état d’une ancienneté de la civilisation
Swahili qui faisait remonter, ses origines plus loin qu’on ne l’avait estimé auparavant. Des sites
archéologiques dans l’archipel de Lamu sont antérieurs au Xe siècle et le site Urbain de Shanga
existait déjà au VIIIe siècle. Au XIIe siècle déjà la société Swahili était impliquée dans d’autres
activités que l’agriculture et la pêche et plusieurs cités-états le long de la Côte Orientale étaient
engagées dans le commerce régional et pratiquaient des arts et métiers dont la fabrication de
tissus, la construction navale et la navigation. Ces dernières activités sont des traditions
anciennes de la Côte Orientale. Il existe en effet plusieurs mots en Swahili pour désigner la
diversité des bateaux. Des préjugés faisaient penser que « les habitants de l’Afrique de l’Est ne

51
naviguaient pas à long cours dans l’Océan indien ».
Selon Matvelev, la « position géographique avantageuse » de la zone côtière de l’Afrique
Orientale rend possible la navigation sur l’Océan indien « et rend compte d’un véritable
commerce maritime dans cette partie du monde ». Parmi les produits d’échanges, sont cités le
fer produit sur place, l’or provenant du continent qui a joué un rôle important dans l’essor de la
civilisation Swahili. La poterie, de la vaisselle en verre, des perles, etaient importées de Chine,
d’Inde et du Moyen Orient. A différentes époques, les points d’ancrage de ce commerce ont été
évoqués par les auteurs arabes (Yakut au 8e siècle, Ibn Battuta au 14e siècle). Du XIIIe au XIVe
siècle, la cité de Kilwa était considérée comme le centre principal de contrôle de l’or provenant
du continent. L’Islam a été adopté pacifiquement en premier lieu par les couches dirigeantes de
la société, un Islam tolérant à l’endroit des cultes traditionnels. On retient de la lecture de ce
chapitre le caractère authentiquement africain de la civilisation Swahili. Les Swahili ont fait des
emprunts en dehors du continent et ont aussi enrichi d’autres cultures. Les portuguais
témoignent du rayonnement de cette civilisation, à leur arrivée sur les côtes. Cependant des
signes avant coureurs de la décadence des cités Etats sont décelés par les analystes et qui
précèdent l’arrivée des portuguais notamment la multiplication des conflits entre états et des
facteurs environnementaux comme la dégradation de la qualité de l’eau sur certains sites. Le
facteur déstabilisateur de l’ensemble de la région sera l’intrusion portuguaise et la violence
armée qui l’accompagne.
 La Région des Grands Lacs
Le Chapitre XIX et XX sont consacrés à l’Histoire du peuplement de cette région. C. Erhet
présente un tableau de la région « entre la Côte et les Grands Lacs » à travers une approche qui
privilégie la linguistique historique. Selon Erhet, les migrations anciennes d’agriculteurs de
langue bantou dans cette région dès le premier millénaire n’avaient pas permis d’occuper tout
l’espace, ceux-ci s’étant cantonnés dans les zones les mieux arrosées. On trouve dans une zone
située au Nord, des locuteurs de langues nilotiques et au Sud des locuteurs de langues « Sud
couchitiques ». On assiste donc à des phénomènes de métissage, d’assimilation, et à
l’émergence de structures sociales variées. D’autres groupes arrivèrent plus tard, comme les
Luo au XIVe siècle dans la région du Golfe de Kavirondo qu’ils vont contrôler totalement, ou les

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Kalenjim méridionaux dont la migration fut soudaine. L’interaction de ces nombreuses
populations entraina des métissages qui font qu’on ne peut distinguer un quelconque « groupe
ethnique pur ».
Au chapitre suivant Ogot s’intéresse à la problématique de la formation des Etats dans la zone
inter-lacustre pour la même période, ainsi qu’aux relations entre les divers groupes, leurs
positions respectives et leurs occupations. Les relations entre agriculteurs et sédentaires avec
tous les stéréotypes dont font l’objet ces différents groupes sont particulièrement analysés par
l’auteur. Ogot tente de démonter le mythe du complexe de supériorité/infériorité entretenu
entre ces groupes en montrant que la formation des premiers états dans la région est le fait des
agriculteurs longtemps avant l’arrivée des pasteurs. Et pendant des centaines d’années,
agriculteurs et pasteurs avaient vécu en harmonie à l’intérieur et à l’extérieur de la région. La
stratification s’est modifiée au XVe siècle donnant naissance à des classes sociales qui se sont
muées en situation extrême en « Castes ». L’auteur montre que les termes « pasteurs » et
« agriculteurs » loin de désigner des ethnies renvoient plutôt à des occupations.

 Afrique Australe
Le chapitre XXI de B.M. Fagan traite de l’Histoire des Bassins du Zambèze et du Limpopo
(+1100/+1500) sur la base des données archéologiques qui lui permettent de rouvrir le dossier
du Grand Zimbabwé. Comme le dit fort justement Fagan, ce site unique en Afrique « est célébré
à la fois pour son excellente architecture et pour les théories extravagantes qui ont entouré ses
origines » (page 532). Fagan restitue l’évolution qui a conduit à cette civilisation à travers une
succession de cultures archéologiques, l’éclairage des traditions et des rares textes. Ainsi ce
sont des cultures et sociétés de l’Age du Fer (à partir de 1000) qui sont présentées, ainsi que
leurs transformations économiques et sociales au cours des XIe et XIIe siècles, jusqu’aux origines
de la culture du Zimbabwé telles qu’elles apparaissent à travers les résultats archéologiques et
l’étude des plus anciens sites du Zambèze tels que Batoka, Kalomo, et Léopard kopje. Ce dernier
est considéré comme étant à l’origine de sociétés centralisées comme celle Mapungubwe qui se
sont épanouies à partir du XVe siècle.
Certains chercheurs comme Huffman voient dans les constructeurs de Mapungubwé les

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ancêtres du peuple Venda de l’actuelle République d’Afrique du Sud, d’autres dont Fagan voit le
Grand Zimbabwé comme étant l’œuvre des ancêtres des Shona.
 Afrique Equatoriale
Les chapitres XXII et XXIII rédigés par J. Vansina et L.D. Ngconco avec le concours du premier,
traitent de la partie équatoriale du continent. Les auteurs relèvent pour l’Afrique Equatoriale,
l’émergence précoce d’entités étatiques malgré la présence de la forêt dense. L’Histoire des
peuples au Sud du Limpopo a subi les contre coups négatifs de la politique raciste d’exclusion
des africains noirs.
 MADAGASCAR
F. Esoavelomandroso présente au chapitre XXIV Madagascar et les Îles avoisinantes du XIIe
siècle au XVIe siècle. Cette période est perçue comme celle de la formation du peuple malgache
qui au-delà de sa diversité ethnique possède une unité linguistique remarquable. L’Île connaît
des brassages entre ses différentes composantes et on voit émerger les principales entités
politiques. Durant cette période Madagascar et les Comores sont intégrés aux multiples circuits
commerciaux dont ceux animés par les Swahili avant les interventions directes des arabes. Les
investigations archéologiques récentes dont ceux de « African Archéologists Network » auquel
participent des chercheurs malgaches, devraient permettre d’enrichir les connaissances sur
Madagascar.
Recommandations pour une Exploitation Pédagogique du Volume IV
Une remarque préliminaire des évaluateurs du volume invite la structure ou le groupe en
charge de l’exploitation du volume à des fins pédagogiques à tenir compte de la mentalité des
jeunes actuels qui diffère beaucoup de celle de la jeunesse qu’avaient en vue les rédacteurs de
l’Histoire Générale de l’Afrique en 1986. Les besoins de la jeunesse d’aujourd’hui ont changé
même en termes de supports d’accès à la connaissance. Mais dans le même temps les
évaluateurs insistent sur la nécessité de respecter le choix du Comité Scientifique International
qui a privilégié « une vision holistique et fédéraliste des peuples africains plutôt que le
particularisme local et le fractionnement des faits… ».
- Le volume IV selon eux doit être considéré comme une « ressource book » dont chacun des
chapitres recèle des données importantes. Cependant certains ont besoin d’un toilettage

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sérieux, d’autres juste d’une actualisation.
- De façon plus précise, certains chapitres ont été signalés comme comportant des orientations
pédagogiques et ayant une valeur didactique avérée. Ce sont les chapitres VI, VII et VIII qui sont
respectivement de D. T. Niane, Madame Ly Tall, S. M. Cissoko.
Le chapitre XII de Y. Person et le chapitre XXVII de D.T. Niane, J. Dévisse sont essentiels et
pourraient de l’avis des évaluateurs servir de fondement à la redaction des manuels et du
matériel didactique. D’autres chapitres ont été recommandés en raison du fait qu’ils abordent
des thèmes qui présentent un intérêt éducatif, ce sont par exemple, le chapitre 15 de J.C.
Garcin sur l’Egypte dans le monde musulman (pour les questions de géopolitique et de
géostratégie qui y sont abordées).
Le Chapitre 16 de L. Kopracek sur la Nubie du XIIe au XIVe siècle (aspects relatifs à la gestion des
conflits), le chapitre XX de Ogot sur la région des Grands Lacs (intéressant par rapport au thème
de l’ethnicité). Aussi recommandent ils la prise en compte de thèmes qui sont autant d’idées
forces qui se dégagent de la lecture du volume tels que : la formation de l‘Etat et la
centralisation, l’art de la guerre et la conquête, la gouvernance, la paix et la résolution des
conflits, « le leadership », le développement religieux sur le continent, l’expansion de l’Islam en
Afrique, la tolérance religieuse, l’Afrique et le monde extérieur.
Quant à la démarche globale, les évaluateurs recommandent :
- La prise en compte des sites inscrits dans le patrimoine mondial, dans la formation de la
jeunesse (en cartes et dossiers pédagogiques).
- de lier ce projet d’écriture des manuels avec les initiatives de différents musées africains visant
l’exploitation de leurs collections à des fins éducatives.
- de faciliter l’articulation des produits de ce projet pédagogique avec les enseignements des
« Histoires nationales ».

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VOLUME V
Histoire Générale de l’Afrique: L’Afrique du XVIe au XVIIIe siècle
Directeur du volume : B.A Ogot

Le volume V de l’Histoire Générale de l’Afrique couvre une longue période de trois siècles (1500
et 1800). La pertinence de la borne chronologique interpelle sur la périodisation en histoire de
l’Afrique d’autant qu’elle semble eurocentrée et non motivée par les dynamiques internes des
sociétés africaines. On peut aussi rétorquer que les sources majoritairement exogènes pour la
période couverte, ont fortement influencé la perception et l’interprétation des tendances
d’évolution de l’Afrique.
Structure du volume
La structure du volume a été conçue à partir d’une approche thématique pour déboucher sur
une approche régionale. Les premiers chapitres (1 à 5) ont ainsi examiné des thèmes généraux
que l’on retrouvera, à des degrés divers, dans le reste du volume consacré aux études
régionales. Une telle méthodologie a l’avantage d’attirer l’attention sur les faits marquants de la
période dont les effets pourront être diversement appréciés à l’échelle locale ou régionale. Si
elle a été garante d’une certaine unité aux vingt-neuf chapitres constitutifs du volume, elle a été
également génératrice d’une impression de répétitions ou de redites d’un chapitre à l’autre,
d’un thème à l’autre.
Approche thématique
Dans le premier des cinq chapitres consacrés à un thème particulier, intitulé ‘La lutte pour le
commerce international et ses implications pour l’Afrique’, M. Malowist souligne les
implications, pour l’Afrique, de la nouvelle orientation du commerce international. Jusque vers
la fin du 15è siècle le rivage méditerranéen, l’Extrême-Orient et l’Orient constituaient les
directions principales du commerce international africain. La période du seizième au dix-
huitième siècle est celle d’un nouveau système géopolitique orienté vers l’Atlantique, avec son
dispositif commercial triangulaire reliant l’Europe, l’Afrique et les Amériques. Les conséquences
de l’ouverture et du développement du commerce atlantique dont la traite des esclaves devait
en constituer le moteur pendant près de quatre siècles, ont été tragiques pour l’Afrique à bien

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des égards.
J. E. Inikori (ch. 4) a examiné le rôle que la traite des esclaves a joué dans l’émergence d’un
ordre économique dans l’Atlantique. Il a d’abord souligné l’ampleur du trafic dont l’évaluation
quantitative a été fortement influencée, par la publication, en 1969, de l’ouvrage de l’historien
américain Philip Curtin, The Atlantic Slave Trade : A Census. Pour lui, en se basant sur le système
d’échanges inégaux qu’il a incarné et qui devait se poursuivre avec la conquête et
l’administration coloniales, le commerce transatlantique peut être perçu comme un des
facteurs fondamentaux dans le sous-développement de l’Afrique.
Dans le chapitre 5 du volume, J.E. Harris a présenté un tableau documenté de la diaspora
africaine dans l’Ancien et le Nouveau Monde. En spécialiste de la question, il a rappelé les
principales étapes de cette histoire, signalant au passage les personnalités marquantes de cette
diaspora comme une réfutation éloquente des thèses racistes de l’infériorité supposée des
noirs. Si la traite atlantique reste l’un des aspects majeurs de cette diaspora, l’auteur en a
montré les dimensions mondiales, soulignant au passage le caractère volontaire de certaines de
ces migrations. Son étude est d’un intérêt particulier pour appréhender les dynamiques des
cultures africaines dans les divers coins du continent américain.
La traite des esclaves n’est pas sans effet sur les mouvements traditionnels de population en
Afrique, si bien étudiés par Jan Vansina (ch.3), sans parler, bien entendu, de la dispersion des
Africains hors de leur continent. Il ne faut pas en effet perdre de vue que la violence, sous forme
de guerres organisées, de razzias et de kidnappings, est la forme principale et la méthode la plus
communément répandue d’approvisionnement en main-d’œuvre servile pour le Nouveau
Monde. L’insécurité et la violence associée à la quête de l’esclave ont provoqué à l’intérieur de
bon nombre de régions d’Afrique subsaharienne d’importants mouvements de population.
Marécages, montagnes et forêts ont ainsi servi de refuges aux populations en détresse. L’étude
de Vansina a toutefois un intérêt plus général. Après avoir noté la mobilité caractéristique des
différentes catégories de la population africaine, notamment des cultivateurs (en raison de la
pratique d’une culture itinérante) et des éleveurs, il a tenu à préciser que cette tendance n’est
pas forcément caractéristique de la période 1500-1800. Elle n’est pas non plus, caractéristique
d’une région.

58
La contribution de P. Diagne (ch.2) porte sur ‘les structures politiques, économiques et sociales
africaines durant la période considérée’. C’est une véritable gageure de pouvoir embrasser un
thème d’une telle envergure sans tomber dans le piège des généralités. Il lui était difficile
d’embrasser tout le continent tout en donnant des exemples précis pour étayer bon nombre de
ses assertions. Il a toutefois eu le mérite de souligner l’impact de l’islam et du christianisme sur
l’émergence de nouvelles structures même si presque rien n’a été dit sur les religions
traditionnelles et leurs relations conflictuelles avec ces deux nouvelles religions.
Dans les cinq chapitres qui viennent d’être passés en revue, la traite des esclaves est,
explicitement ou implicitement, un facteur historique dont la signification dans l’histoire de
l’Afrique pendant la période 1500-1800 n’a échappé à aucun de leurs auteurs.
Approche régionale
Une lecture attentive de la vingtaine de chapitres consacrés aux études régionales permet de se
faire une idée des dynamiques internes de transformation des sociétés africaines. Il y a souvent
des chevauchements, voire des confusions, entre les cadres géographiques et les catégories
ethniques utilisées dans l’approche thématique du volume.
Les considérations sur l’approche régionale impliquent, pour les raisons d’ordre pédagogique,
un certain réaménagement ou regroupement des chapitres au vu de leur contenu. Le
traitement de l’histoire de l’Afrique méditerranéenne (ch.6, 8 et 9), dans cette perspective,
mérite d’être revu pour faire mieux ressortir ses liens avec le reste du continent. Il serait
toutefois souhaitable, dans un objectif pédagogique, que le facteur ottoman soit présenté de
façon plus simple et plus accessible à l’ensemble des élèves et étudiants africains.
Les thèmes identifiés dans le présent volume sont illustratifs des liens entre les parties
septentrionale et méridionale du continent. Ils se retrouvent, à des degrés divers, dans les
autres chapitres du volume. L’étude de B. Barry (ch.10) est significative à cet égard. Après avoir
souligné que le destin de la Sénégambie était lié à la convergence…des influences du Soudan, du
Sahara et de la forêt’, il a noté que cette unité a été renforcée, à partir du 15e siècle par
l’influence du commerce atlantique dont le développement et les conséquences, examinés dans
l’approche thématique, sont ici illustrés par le cas de la Sénégambie. Les ‘mouvements
maraboutiques’ du dix-septième siècle et les ‘révolutions musulmanes’ du siècle suivant

59
apparaissent ainsi comme des formes de résistance à l’impact des traites négrières. Peut-être
serait-il intéressant de tenter une analyse comparative de ces révolutions musulmanes au-delà
de la seule Sénégambie.
La fin de l’Empire songhay (ch.11) aurait pu être étudiée dans le contexte de l’expansion
marocaine au Soudan occidental. Si l’auteur a fait une analyse pertinente des mobiles de
l’invasion marocaine, il a été par contre discret sur la signification de la bataille de Tondibi dans
le processus de formation des états au Soudan occidental. Au-delà de l’histoire politique, le
chapitre a pris en considération d’autres aspects significatifs du processus historique. C’est
notamment le cas des calamités naturelles et de l’environnement humain, de la production et
des échanges régionaux, du commerce transsaharien à l’heure de la traite atlantique, du
développement des influences culturelles et religieuses.
Le chapitre 12 (Du Niger à la Volta) est partiellement consacré aux royaumes bambara de Ségou
et du Kaarta déjà passé en revue dans le chapitre précédent. Voilà qui illustre la problématique
de l’approche régionale à laquelle il a été déjà fait allusion. Une définition, même
approximative, de la géopolitique du Songhaï permettrait d’éviter ces chevauchements que l’on
peut noter dans d’autres parties du volume. Le chapitre 12 gagnerait en cohésion si les
royaumes mossi en constituaient le seul objet. L’originalité des structures socio-politiques des
royaumes mossi offre un cadre approprié pour apprécier la nature et l’impact des rencontres et
relations entre l’islam et les religions traditionnelles africaines.
Pour des raisons écologiques et historiques, les Etats hausa (ch.16) auraient dû constituer la
suite logique des chapitres 11 et 12 brièvement examinés ci-dessus. Cela aurait permis de mieux
comprendre les rapports conflictuels du pays hausa avec ses voisins. Cela aurait également
offert une intéressante perspective comparative d’évolution historique du Soudan occidental et
central, qu’il s’agisse des structures de production et d’échanges, de la pénétration et du
développement de l’islam et de son impact sur les cultures traditionnelles et l’idéologie du
pouvoir étatique. Les pays hausa ont toujours été l’objet d’une curiosité intellectuelle certaine
comme en témoigne la Chronique de Kano.
Globalement, les chapitres 13 à 15 couvrent les zones forestières de la côte du Golfe de Guinée.
Au risque de se répéter, il faut rappeler ici la problématique de la définition et de l’identification

60
des zones géopolitiques. Cela est d’autant plus pertinent qu’il s’agit d’une région où l’impact du
commerce atlantique a été plus sensible, avec comme corollaire l’existence de sources
documentaires substantielles. Les cartes des trois chapitres sont illustratives de la difficulté à
déterminer des repères de frontière crédibles compte tenu de la complexité des mouvements
migratoires dans la région et des interactions ethniques qui en ont résulté.
Les chapitres 17 à 29 s’ouvrent sur le Kanem-Borno et s’achèvent par la synthèse
générale du volume dans laquelle B.A.Ogot fait ressortir les faits marquants et les principaux
thèmes abordés dans les différents chapitres. Au-delà de ses ressorts économiques, le
commerce des esclaves apparaît, à côté de celui de l’or et de l’ivoire, comme le baromètre de la
construction et de la déconstruction des Etats et des cités commerçantes. Toutefois,
l’évaluation de ce facteur et de son impact doit prendre en compte les spécificités et les
nuances régionales dont, entre autres, l’influence relative du christianisme et de l’islam.
E.M’Bokolo, dans le chapitre 18 sur la zone ‘des savanes du Cameroun au haut Nil’,
retrace les grands itinéraires migratoires et la structuration des sociétés qu’on y retrouve. La
grande difficulté réside dans le recours presque exclusif aux sources orales et aux données
archéologiques, ce qui donne l’impression de travaux inachevés, en attendant l’éclairage des
sources nouvelles. La première donnée qui émerge d’emblée est que l’histoire de la zone
considérée dans ce chapitre commence à être mieux connue à partir du XVIe siècle, voire plus
récemment.
On notera entre autres que la chasse et le travail du fer y sont valorisés. Le commerce se
fait dans des marchés périodiques où s’échangent et s’acquièrent des produits divers,
notamment des esclaves. L’on retiendra par ailleurs que c’est à cette époque que furent
introduites les cultures vivrières importées d’Amérique, à savoir le maïs, le manioc, les
arachides, les haricots et le tabac. A cette mutation agricole due au commerce atlantique,
s’ajoute le ralentissement des mouvements humains et donc la stabilisation démographique de
la zone.
Dans le chapitre 19, à l’opposé du chapitre précédent, le texte de J. Vansina bénéficie d’une
abondance ressource documentaire. Il en ressort qu’aux XVe et XVIe siècle, le Kongo établit son
hégémonie sur l’ensemble des territoires compris entre le plateau de Benguela et les plateaux

61
bateke d’une part et d’autre part de la mer au-delà du fleuve Kwango.
Pendant que se jouent les rivalités politiques et les intérêts économiques africains et portugais
tantôt solidaires tantôt concurrents, se déploient les nouvelles cultures importées d’Amérique
qui améliorent le niveau général de nutrition, mais aussi la variole qui s’installe de façon
récurrente. Un nouveau tournant de l’histoire s’opère à partir de 1641 : les Brésiliens font
irruption en Angola, en chassent les Hollandais et dominent désormais le commerce au-delà des
années 1730. La déliquescence du Kongo favorise l’autonomie de petites principautés
Le chapitre 20 consacré à la formation des Etats luba et lunda met en évidence un mode
d’organisation sociopolitique hiérarchisé chez les Luba avec au sommet le mulopwe, détenteur
du pouvoir royal. Chez les Lunda, le pouvoir est de type impérial et familial, reposant sur une
reproduction continuelle de la dévolution des charges sur les mêmes bases de filiation familiale.
L’empire lunda pratique la traite aussi bien pour ses propres nécessités de main d’œuvre
agricole ou pour le portage, que par souci d’échanger les esclaves contre les produits
manufacturés importés d’Angola.
Les chapitres 21 et 22 analysent la vie politique et économique des territoires au nord et
au sud du Zambèze. Il s’en dégage aussi la dynamique du commerce de l’or et de l’ivoire
pratiqué par les Portugais et les populations locales. Si les Européens ont quelque succès dans
l’exploitation aurifère, la perte du contrôle de l’ivoire au profit des Yao et des Bisa pousse les
Portugais vers le commerce des esclaves. Les colons créent des domaines, les prazos, qui se
répandent dans toute la région du bas Zambèze.
Les contributions relatives aux régions du Zambèze et à l’Afrique australe (ch.21 à 23)
illustrent l’ancienneté de la présence portugaise, l’ingérence des nouveaux venus dans les crises
politiques locales, les processus d’implantation de leur hégémonie sur le commerce et le
contrôle de la société politique. Ces chapitres et celui consacré à la côte orientale pourront
servir de sources à des cours sur ‘le facteur portugais’ dans l’histoire africaine du XVIe au XVIIIe
siècle.
Au chapitre 23, E. Haberland analyse : les heurs et les malheurs de l’empire chrétien
d’Ethiopie qui, face à la pression extérieure et aux problèmes internes, sut faire preuve de
résistance malgré la durée des crises (1529-1632) ; la conquête musulmane conduite par Ahmad

62
ibn Ibrahim al-Ghazi dans l’Amhara et le Tigré pour n’imposer finalement qu’une islamisation
éphémère ; la révocation de l’influence musulmane par les Oromo qui instaurent leur propre
autorité sans que celle-ci s’accompagne d’une influence culturelle notable ; et puis la poussée
des Somali entre 1500 et 1700 aboutissant à la diffusion de la culture arabo-musulmane et d’un
snobisme culturel fédérateur des groupes éparses qui les composent.
Le chapitre 25 consacré à la côte orientale de l’Afrique est à la fois une histoire de la
lutte à laquelle se livrent Portugais et Arabes pour le contrôle politique et économique des cités,
une histoire des moments de partenariats entre les deux rivaux et une histoire de l’urbanisation
et des activités économiques sur cette façade du continent africain. Les grandeurs et les
servitudes des cités commerçantes (Kilwa, Sofala, Malindi, Paté, Lamu, Mombassa…)
Les chapitres 26 et 27 traitent de la région des Grands Lacs et de ‘l’intérieur de l’Afrique
de l’Est’. Les auteurs qui se sont penchés sur les Grands Lacs en segmentent la dynamique dans
la période considérée par le volume V, en trois séquences. Entre 1500 et 1580, les nouveaux
Etats postérieurs à l’Empire Bachwezi cherchent à se consolider par d’habiles manœuvres
diplomatiques. Le fait marquant de cette période est le déclin du Bunyoro et l’émergence des
royaumes du Buganda et du Rwanda.
L’étude des peuples du Kenya et de la Tanzanie entre 1500 et 1800 souffre de la rareté
des sources écrites, d’où une inégale répartition de l’intérêt des historiens pour les groupes de
l’intérieur. Dans les deux chapitres, la famine émerge comme un thème d’intérêt historique du
fait de son impact sur les mouvements humains, sur les redéfinitions géopolitiques et sur le
mode de vie des populations.
Conclusion générale :
Du volume particulièrement dense et riche se dégagent des thèmes d’intérêt commun, à
des degrés divers, aux sociétés africaines pendant la période considérée. Ainsi en est-il de la
traite, de l’esclavage et des résistances qu’ils ont générées ; des conditions et des modes de
production ; de la santé ; de l’impact du christianisme et de l’islam sur l’évolution des structures
politiques et sociales. Ces thèmes devraient être pris en compte dans des programmes
d’enseignement dans une perspective panafricaine, avec le souci de mettre en exergue les
facteurs d’unité dans la diversité des cultures africaines. Dans la poursuite de cet objectif, les

63
outils pédagogiques devront intégrer les facilités audiovisuelles modernes.
La traite atlantique des esclaves, caractéristique de cette période de l’histoire africaine n’est pas
une innovation. Elle prolonge la vieille tradition d’exporter des esclaves vers les pays arabes,
mais avec une nouvelle direction et une dimension que chacun des contributeurs a, à sa
manière, mise en exergue. Dans une perspective pédagogique et dans l’éventualité d’une
édition simplifiée, on pourrait peut-être envisager une présentation du thème de la traite et de
l’esclavage sous une forme mettant en relief l’essentiel de ce qui mérite d’être retenu par les
étudiants. A ce propos, une approche comparative des conséquences des migrations
traditionnelles ou naturelles et celles induites par la quête des esclaves pour les marchés du
continent américain devrait faire l’objet de développements.
C’est peut-être le lieu de rappeler que l’UNESCO, à l’aube du troisième millénaire, avait conçu
un projet éducatif sur ce thème, projet connu sous le terme de ‘Briser le silence’ (‘Breaking the
silence’ en anglais), avec pour objectif l’enseignement d’une sorte de programme minimum
commun dans les écoles secondaires des trois continents impliqués dans la traite
transatlantique. Les actes de la conférence de Ouidah, publiés par l’UNESCO sous le titre de ‘La
chaîne et le lien’, ainsi que les documents produits dans le cadre du projet éducatif ‘Briser le
silence’ devraient pouvoir servir à l’élaboration d’une synthèse globale sur le sujet de la traite et
de l’esclavage. Cette orientation, stimulée par diverses initiatives de l’UNESCO qui informe
aujourd’hui bon nombre d’expositions et de réseaux de recherche dans divers pays d’Afrique,
d’Europe et d’Amérique. Les résultats de cette dynamique, sous forme de revues spécialisées,
d’ouvrages individuels ou collectifs et de documents audio-visuels constituent des outils
pédagogiques appropriés pour un enseignement pertinent de l’histoire de la traite et de
l’esclavage.
L’accent mis sur l’esclavage et les traites négrières à cause de la documentation abondante ou
de la conjoncture dans la recherche ne doit pas faire perdre de vue les autres thématiques très
importantes ou novatrices ?
Quid des maladies des hommes et aussi du bétail, parfois concomitantes à ces épisodes
désastreux ? Il est clair que le lien entre écologie et histoire du peuplement est une donnée
transversale dans l’historiographie africaine ; qu’en est-il des maladies comme facteur de

64
modification des structures sociales et politiques, comme source de modifications
démographiques ? Au fait, quelles sont les grandes maladies de cette époque ? Corrélativement,
comment les Africains se soignaient-ils tout juste avant l’introduction de la médecine
occidentale ? Ce sont là, incontestablement, des questions pertinentes qui méritent attention
dans les programmes de recherche et d’enseignement.

65
Volume VI

Histoire Générale de l’Afrique: L’Afrique au XIXe siècle jusque vers les années 1880
Directeur du volume : J.F.ADE. Ajayi

1. Présentation synthétique du volume

Le volume VI de l’HGA porte sur le XIXe siècle. Deux facteurs majeurs se dégagent
changeant radicalement la donne politique et économique pour l’ensemble du continent :
l’abolition de la traite par les puissances européennes, à leur tête la Grande Bretagne, et
l’instauration du commerce dit légitime. L’environnement international ainsi modifié par des
décisions unilatérales a sommé les acteurs africains, Etats et sociétés, à un difficile ajustement,
tout au long de ce court siècle qui démarre en 1815 et s’achève avec le démarrage de la
conquête coloniale, véritablement lancée en 1880. Sans minimiser l’impact indéniable de ces
facteurs externes, les auteurs du volume ont privilégié une perspective africaine en mettant en
avant les initiatives prises dans les différentes régions du continent pour s’accommoder à la
nouvelle donne introduite par l’économie et la politique à l’échelle globale. Ils ont ainsi montré
que les Etats africains bâtis sur les traites esclavagistes externes ne pouvaient pas du jour au
lendemain s’adapter à la nouvelle donne introduite par le commerce légitime, d’autant que la
demande américaine en «bois d’ebene» ne s’était pas non plus tarie. La réponse à cette
demande était désormais assurée par la traite clandestine impliquant Etats et seigneurs de
guerre de connivence avec les bateaux de la contrebande mais dans des conditions rendues plus
difficiles par la surveillance des mers par les marines européennes. Les traites esclavagistes ont
mis du temps à être éradiquées. Les difficultés à échapper à la marine britannique qui sillonne
et surveille l’Atlantique orientent les caravanes de traite en direction du monde arabe. Les
pistes transsahariennes et beaucoup de circuits du trafic esclavagiste internes au continent sont
ainsi restés hors d’atteinte de la lutte contre la traite. L’abolition de l’esclavage a connu les
mêmes avatars et difficultés d’application. Beaucoup d’économies locales en connexion avec le
marché mondial ont continué à faire largement usage des esclaves dans la production et le
transport des produits agricoles et de cueillette destinés au marché du commerce légitime
international.

66
Aucune région du continent, la partie subsaharienne particulièrement, n’a échappé aux
crises induites par ces mutations à l’échelle globale. Les sociétés ont réagi à ce nouveau
contexte qui a considérablement accru le niveau de violence dans les rapports économiques,
politiques et sociaux. Toutefois, les auteurs du volume le montrent suffisamment, les réponses
africaines à ces crises ont été fort variables. Un peu partout des révolutions surviennent, en
réponse à la crise interne des sociétés affectées par l’abolition de la traite et l’immixtion
européenne. Au final, le XIXe siècle reste fortement marqué par les crises et les révolutions qui
sont toutefois demeuré inefficaces à stopper la poussée impérialiste des puissances
européennes qui culmine avec la colonisation porteuse d’une modernité dépendante.
Les auteurs n’ont pas manqué de mettre en évidence le facteur religieux comme ressort
des stratégies d’adaptation au contexte du XIXe siècle. Dans les pays d’islam les révolutions ont
mobilisé au nom de cette foi contre les pouvoirs séculiers et mis en place des régimes
théocratiques. Dans la quête des solutions aux crises, le monde chrétien a cherché à mettre au
service de leur cause des interprétations innovantes du message de l’évangile dans les églises
locales (Ethiopianisme) comme dans les églises conventionnelles. Les religions des terroirs ont
également contribué à une interprétation active des mutations qui affectent le siècle. Ces
mouvements religieux qui ont cherché à faire sens des rapides et traumatiques évolutions n’ont
pas réussi à contrer durablement le projet impérialiste européen. La défaite consécutive à la
conquête ne les a pourtant pas éradiqués en tant que communautés de foi. Ils sont demeurés
vivaces dans le nouveau contexte colonial et y ont même servi comme instrument
d’accommodation avec les nouvelles autorités.
Le rêve d’une libre adhésion à la modernité occidentale portée par le mouvement
abolitionniste qui a cherché à se matérialiser dans la création de deux Etats peuplés d’anciens
esclaves, mais aussi par les Etats islamisés du Nord, sans oublier les autres régions comme la
Corne de l’Afrique n’a pas totalement abouti. Au final, le XIXe siècle s’achève avec la mainmise
des puissances impérialistes sur l’ensemble du continent, économiquement, puis politiquement.
Deux Etats, l’Ethiopie et le Libéria, ont réussi à préserver leur indépendance politique.
Ces éléments structurants analysés ont permis aux auteurs du volume d’inscrire le reste
du volume à faire l’état des lieux en Afrique au tout début du siècle avant de passer à des

67
études régionales portant sur l’Afrique australe, l’Afrique orientale et son hinterland, l’Afrique
des Grands Lacs, l’Afrique centrale avec le bassin du Congo et l’Angola, l’Egypte et le Soudan, la
corne de l’Afrique, l’Afrique du Nord et l’Afrique occidentale, Madagascar et les diasporas
africaines en Europe et en Amérique.
Le XIXe siècle voit s’achever la longue période de la traite Atlantique des esclaves. Le
volume met l’accent sur les conséquences démographiques de cette séquence historique et
analyse les phénomènes migratoires qui ont durablement affecté l’histoire du continent. Il
passe en revue les motivations économiques et les visées des puissances européennes en
compétition pour le contrôle des richesses du continent, les potentialités productives des
systèmes agricoles et les transformations des bases sociales, des institutions et mécanismes de
fonctionnement des régimes politiques.
L’impact de la nouvelle configuration de l’économie mondiale sur les différentes régions
du continent qui y sont intégrées de force ou de grès fait l’objet d’une analyse minutieuse.
Aucune région n’échappe à la poussée de l’économie capitaliste à la recherche des matières
premières. La maîtrise des positions stratégiques en vue d’accéder à ces ressources mettent en
compétition les nations européennes sur le sol africain. De façon précoce en Afrique du Nord et
plus tard dans le reste du continent, l’intervention européenne se traduit partout, en dépit de la
variété des situations et des réponses locales, par une forte mise en dépendance des économies
africaines. L’unique frein à l’expansion capitaliste demeure l’absence de ressources répondant à
la demande du marché mondial.
Autant que faire se peut, les sociétés et Etats africains prennent des initiatives pour tenter de
maîtriser ces facteurs externes ou de les mettre à leurs avantages dans les luttes internes pour
le contrôle du pouvoir. Les stratégies couvrent un large spectre allant de la politique
d’ouverture et de réformes économiques pour le développement d’un capitalisme national ou
le rejet radical mais vain du cours nouveau de l’expansion capitaliste. Entre les deux, de
multiples variantes d’accommodation, largement informées par les contextes locaux, sont
élaborées en réponse aux sollicitations des Etats et compagnies européennes.
2. L’Afrique australe (chapitres 5, 6 et 7)
Au seuil du XIXe siècle, l’Afrique du Sud connut des transformations économiques, sociales et

68
politiques d’une ampleur sans précédent. Une combinaison de multiples facteurs locaux est à
l’origine des changements révolutionnaires survenus dans cette région. L’adoption en pays
Nguni du maïs d’origine américaine introduit par les Portugais à partir du Mozambique a permis,
dans les conditions climatiques favorables, d’accroire considérablement la production
alimentaire. Il s’ensuivit corrélativement une forte croissance démographique. La région avait
été au début du siècle confrontée à un cycle de sécheresses à l’origine de famines qui avaient
affecté la population. La nouvelle donne agricole et ses conséquences démographiques se sont
traduites par des changements de très grande portée historique dans le domaine politique,
économique et social.
A travers ce qui est connu comme le Mfecane (le temps des troubles), les chefferies
locales ont été militairement réduites et réunies en un puissant Etat Zulu sous la direction de
Chaka qui a consolidé et parachevé les réformes militaires entamées par ses prédécesseurs.
L’une des innovations majeures portait sur l’armement des troupes avec le passage des armes
de jet aux armes de contact avec l’usage du bouclier fait de peau de bœuf. Une profonde
recomposition sociale s’opère par intégration des vaincus dans les structures des classes d’âge
de l’initiation traditionnelle transformées en unités militaires soumises à une discipline de fer.
La tactique de guerre avait connu une réforme tout aussi radicale, avec la technique de la tête
de buffle enveloppant et étouffant l’adversaire.
L’origine locale de ces innovations a été mise en évidence pour faire échec à
l’interprétation qui les faisait venir de l’influence européenne. Ces réformes, qui ont conduit à
l’unification de l’espace politique et à l’intégration de groupes de populations, aussi divers que
nombreux, dans la nation Zulu, se sont opérées avec un niveau élevé de violence sous la
direction de souverains autoritaires voire despotiques. Toutefois, les réformes militaires ont eu
un effet bénéfique sur l’artisanat local affecté à la production à grande échelle des armes :
lances, couteaux et boucliers. L’esprit de la virilité guerrière issu de cette expérience historique
est demeuré une des composantes majeures de la culture Zulu.
C’est également dans ce contexte qu’émergent de nouveaux ensembles étatiques et
ethniques : les Sotho, les Swazi, les Zulu, les Ndebele, etc., aujourd’hui encore conscients de leur
identité. L’état de guerre généralisé par le Mfecane installe une grande insécurité avec le pillage

69
du bétail et la destruction de l’agriculture, remettant en cause les bases de la croissance
démographique entamée au tout début du siècle. La misère et le dénuement laissent dans
l’errance de nombreuses populations. Les conséquences de cette séquence historique touchent
des régions lointaines et affectent toute l’Afrique australe et touchent même certaines régions
de l’Afrique orientale.
La situation s’est considérablement complexifiée avec l’entrée en jeu de deux forces
étrangères aux intérêts contradictoires. Les Boers, paysans hollandais expulsés d’Europe pour
hérésie religieuse et arrivés dans la région depuis le XVIIe siècle, sont pris en tenaille entre
l’effervescence révolutionnaire des sociétés africaines et les visées des Britanniques intéressées
par l’exploitation des régions minières. Ils répondirent par une migration massive en direction
du Nord connue sous le nom de Grand Trek. Les Boers développent une farouche opposition
aux Etats africains expansionnistes. Leur mouvement, fondé sur l’idéologie religieuse du peuple
élu, s’est heurté à l’opposition des peuples africains de la région contre qui des luttes d’une rare
violence sont engagées. Il a développé contre les peuples africains une haine raciale qui servit
de ferment à l’idéologie de l’Apartheid.
Les troubles qui affectent la région dans cette première moitié du XIXe siècle participe à
rendre négligeable sa contribution au commerce mondial. L’extrême focalisation du volume sur
la révolution zulu et ses aspects militaires et politiques s’est faite aux dépens de l’évocation des
autres peuples de la partie Nord-Ouest de l’Afrique du Sud sérieusement affecté par la
spoliation de leurs terres par les colons Boers.
3. L’Afrique orientale et son hinterland (chapitres 8, 9, 10 et 11).
Le volume porte son attention les réseaux marchands qui animent le commerce d’exportation
qui se développe liant la côte orientale de l’Afrique à son hinterland qui s’enfonce loin à
l’intérieur du continent jusqu’au bassin du Congo. Les réseaux marchands asiatiques (Arabes
du Sultanat d’Oman et Indiens) y côtoient les Européens (Britanniques, Français, Allemands et
Portugais), tous les deux sont connectés au commerce africain qui draine les produits de
l’intérieur vers la côte. Les Arabes ont réussi tout de même à pénétrer l’hinterland. Ils sont
protégés par les pouvoirs africains et dans certaines circonstances favorables se constituent
leurs propres territoires politiques. Ils sont actifs en direction du Malawi, de la Zambie, du Sud-

70
Est du Congo, de la région des Grands Lacs, du pays des Masaï.
Les acteurs africains comprenaient les Swahili qui partaient de la côte comme leurs
homologues arabes pour se connecter avec les intermédiaires de l’hinterland en charge de la
capture des captifs et de la collecte de l’ivoire, les deux produits qui dominent ce commerce.
L’impuissance de la marine britannique à éradiquer ce flux de traite esclavagiste permet
d’approvisionner le marché brésilien à partir des ports mozambicains. Une partie des esclaves
acheminée sur les ports de Kilwa et de Zanzibar est expédiée aux plantations des îles de Pemba
et Zanzibar ou vers l’Asie. Le commerce de l’ivoire est contrôlé par les Indiens qui le revendent
aux Américains et aux Européens.
Le contexte s’est révélé favorable à une coalition de la classe montante des marchands
et celle des guerriers qui forgent de nouveaux Etats relativement déliés des déterminants
traditionnels du pouvoir et qui ont fait face à l’impérialisme conquérant de la fin du siècle. Ces
projets politiques inscrits au cœur d’une économie de prédation désorganisent les sociétés
soumises aux pillages produisant des milliers de marginaux et déclassés, principalement dans
le Kasaï et le centre de la cuvette. En revanche, les sociétés intégrées aux réseaux marchands
se sont associées aux entreprises esclavagistes marchandes des Arabes et des Swahilis. Elles
passent du statut de victimes à celles d’agents actifs de la chasse aux esclaves et de la collecte
de l’ivoire. Le meilleur exemple de cette reconversion ce sont les Batetela de Ngongo Lutete
qui ont été associés aux aventures des Arabes et des Swahili, vers le Kasaï et en aval de
Kisangani.
Ce contexte de violence combiné aux sécheresses a eu des conséquences désastreuses
sur les conditions de vie des populations. L’endémicité de certaines maladies, les épidémies et
les famines récurrentes, les guerres de capture et la traite des esclaves ont affecté
négativement la démographie régionale.
Soulignons que l’introduction des nouvelles plantes américaines (le maïs et le manioc)
sur les bords du lac Victoria a contribué à augmenter la production au XIX è siècle pour
répondre aux besoins des royaumes et peuples environnants. Tel a certainement été le cas
ailleurs, mais les auteurs ne le signalent pas. On devrait ajouter l’apport des Arabes qui ont
développé les plantations de riz dans leurs possessions et dans leurs places fortes. Ils ont ainsi

71
assuré l’alimentation de leurs caravanes et de leurs villes naissantes. Ils ont introduit aussi les
nouvelles habitudes alimentaires comme chez les Batetela dont l’aliment principal est devenu
le riz. La région de Kindu est toujours réputée jusqu’à ce jour pour la culture du riz.
Dans le sillage du commerce, le Swahili s’est imposé comme lingua franca et avec lui,
l’islam a pénétré la région. La prégnance de la culture Swahili dans la région témoigne de
l’importance des transformations portées par le monde marchand au XIXe siècle. De même
l’architecture arabe a pénétré la région. L’étude des mutations culturelles du XIXe siècle reste
l’un des points faibles de ce chapitre : le système d’instruction arabe et l’expansion régionale
de la culture Swahili.
4. Le bassin du Congo et l’Angola (chapitre 12)
L’immensité de la région sous revue a contraint à des choix qui ont exclu de l’étude certains
espaces comme les territoires des Etats contemporains du Gabon, de la Centrafrique et du
Tchad. L’importance de ces espaces dans la dynamique régionale est pourtant incontestable et
sous ce rapport, il mérite d’être pris en compte.
Partant du déséquilibre démographique entre différentes zones de la région, l’étude
montre l’impact différentiel de la traite sur les mouvements de populations. Les plantes
introduites par le commerce atlantique ne sont certainement pas étrangères à la densité
observée dans les savanes de l’Ubangi et de l’Uele au Nord du Congo, les régions
montagneuses à l’Est du Congo et les savanes du Sud du Congo et de l’Angola. L’activité de
production y est assure par la main d’œuvre servile qui, du fait de la surveillance accrue des
mers, ne pouvait plus s’exporter sur les Amériques. Les déséquilibres démographiques
s’expliquent aussi par d’importants mouvements migratoires notés chez les Fangs, les Ngbaka,
les Ngbandi et les Azande. La forte poussée de populations arabes y est aussi pour quelque
chose. Le monde marchand a été l’agent actif des changements historiques survenus dans la
région. Ils se sont constitués en réseaux contrôlant différents espaces fort différenciés.
L’espace soudano-nilotique qui se prolonge jusqu’en mer Rouge exerce une activité de
prédation dans le bassin du Congo, le pays Azande et Mangbetu. Les opérations de razzias y
sont conduites par les mercenaires africains au service des Egyptiens, musulmans ou Coptes,
mais aussi des Européens. Les conséquences culturelles majeures sont lisibles dans les langues

72
véhiculaires qui s’y imposent : l’arabe du Soudan au Tchad et le sango dans la boucle de
l’Ubangi.
L’espace Swahili s’est étendu dans le bassin de l’Uele et de l’Aruwimi, du territoire de
Bumba (Equateur) jusqu’au Kasaï oriental, en passant par le centre de la cuvette. La zone
commerciale du fleuve sous le contrôle des Africains constitue un autre espace qui draine les
produits du bassin du Congo vers la côte occidentale. L’ivoire, le caoutchouc, les noix de coco,
la cire de l’huile de palme sont les principaux produits commercialisés par cet espace. Deux
facteurs sont la clé du dynamisme marchand de la région : l’abondance de l’ivoire accumulé
comme trophée de chasse depuis des siècles et de la capacité des riverains de transporter les
marchandises grâce à la plus puissante flotte du continent qui parcourait des milliers de
kilomètres sur le fleuve et sur les affluents. Les factoreries des Européens, Anglais, Français,
Hollandais, Portugais, sillonnant la basse vallée du Congo étaient les partenaires de ce
commerce. Dans cet espace, le commerce a entrainé un dynamisme linguistique remarquable
avec l’émergence ou l’affirmation de langues véhiculaires comme le kituba ou kikongo dans le
Kwango-Kwilu, le futur lingala. Les transformations économiques ont un impact social certain
avec les commerçants enrichis qui s’imposent dans la vie politique.
L’espace luso-africain se déploie du Loanda au Kasaï et au Katanga jusque chez les Lunda de
Kazembe. Les Africains y organisent un commerce caravanier sous haute protection en
rapport avec les Portugais qui contrôlent directement les produits des plantations et certains
produits du commerce venant des régions sous leur domination. Une intense activité
prédatrice alimentée par la circulation des armes y développent une chasse à l’éléphant mais
aussi à l’homme. Les captifs sont largement mis à contribution pour assurer le transport des
produits de l’intérieur vers les côtes et vice versa. Ailleurs dans le bassin de l’Ogoué s’est
constitué un réseau marchand qui livre des produits dont l’ivoire aux factoreries françaises du
Gabon. Le transport se fait par pirogue en dépit de quelques passages du cours d’eau
encombrés par les rochers.
Il est important de noter que la dynamique économique n’a pas entrainé un développement
des infrastructures. Il est à l’origine du déclin de l’artisanat local. Il a induit des
transformations culturelles majeures véhiculées par les langues du commerce. A côté du

73
monde marchand, l’évangélisation qui avait déjà une tradition ancienne dans la région
continue de s’étendre animée par les Spiritains français, dans la seconde moitié du XIXe siècle
du Gabon au Congo. A la fin du siècle, ils sont concurrencés dans la conquête des âmes par les
missionnaires protestants installés à l’embouchure du fleuve.
5. L’Egypte et le Soudan (Chapitres 13 et 14)
L’Egypte a développé une politique de modernisation relativement précoce comparée au
reste du continent. Muhammad Ali et ses successeurs ont fait preuve d’esprit novateur pour
fonder l’Etat moderne égyptien. Ils ont brisé la domination turque et étendu la souveraineté
égyptienne en Asie, en Afrique, jusqu’au Soudan et en Ethiopie. L’ouverture de l’Egypte à
l’influence européenne leur a fourni les moyens techniques et militaires pour réaliser leurs
ambitions. Les dépenses exigées par une telle entreprise ont débouché sur une impasse malgré
la volonté des dirigeants du pays de préserver son indépendance. Pour faire face aux difficultés,
l’Egypte a exercé une pression croissante sur le Soudan dont les populations ont été largement
pressurées par les impôts et le travail, en particulier celui de la main d’œuvre servile. A ces
difficultés se sont ajoutées celles résultant des réformes agraires qui ont provoqué un
mécontentement grandissant parmi les populations déshéritées dont les esclaves soudanais
massivement utilisés dans les durs travaux de modernisation : chemins de fer, canaux
d’irrigation, etc.
La modernisation a touché également le domaine culturel avec le développement d’un
système éducatif avec son réseau de grandes écoles, au Caire, à Alexandrie, etc. Toutefois, elle a
été largement handicapée par le recours aux experts étrangers bien placés dans les centres de
décision de l’armée et de l’administration.
Si la position géostratégique de l’Egypte lui a permis d’obtenir le financement nécessaire
au percement du canal de Suez en 1853, l’endettement qui s’ensuivit lui a fait perdre la
souveraineté sur cet outil stratégique désormais sous le contrôle des puissances créancières. Le
canal devient une zone internationale. L’influence étrangère a surtout été celle des Anglais qui
mettent sous tutelle le pays et se donne ainsi les moyens d’un contrôle efficace leur ouvrant la
voie à la conquête de l’espace du Caire au Cap.
La conquête du Soudan par l’Egypte dépendant toujours juridiquement de la Turquie

74
répondait bien entendu aux visées de Muhammad Ali d’avoir un empire africain, mais les motifs
sont plus économiques que politiques. Muhammad Ali voulait disposer des esclaves pour ses
armées et ses grands travaux agricoles et infrastructurels en Egypte. Il a incorporé des milliers
de Soudanais capturés dans son armée. La politique fiscale est à l’origine de la révolte du Nord
Soudan islamisé. Dans le Sud, la conquête a été réalisée à la fois par l’Etat et par les particuliers,
les commerçants de tout bord et leurs milices. Ainsi les populations non islamisées ont connu de
nombreuses guerres d’esclavage menées par les Turcs, les Egyptiens, les Arabes, les Ansars ou
Dongolawi du Nord Soudan. Ces hommes construisaient des places fortes, les Zeriba, bases des
opérations militaires qui rapportaient aussi bien des esclaves que de l’ivoire. Les populations
qui ont opposé la résistance la plus farouche furent les Shilluk, les Bari et Azande.
Les Al-Djallaba ou les commerçants du Nord Soudan qui s’étaient infiltrés dans le Sud ont
contribué à étendre l’arabe et l’islamisation du Sud Soudan, en développant le mépris envers les
autochtones de la région qui leur ont opposé une farouche résistance dans la région du Bahr el-
Ghazal et du Darfour. L’instabilité consécutive à la politique égyptienne a provoqué
d’importantes vagues migratoires venues du Darfour, du Kordofan et du Haut-Nil sur l’Afrique
centrale.
6. L’Ethiopie et la Somalie (chapitre 15)
L’empire chrétien d’Ethiopie commence le XIX è siècle dans un état de dislocation totale,
consécutive à l’invasion des Galla ou Oromo. Trois royaumes plus ou moins importants, le Tigré,
l’Amhara et le Shoa se partagent l’espace avec une multitude de petites entités. Tous ces Etats
cherchent des alliances avec les pays d’Europe - France, Angleterre et l’Italie - pour avoir des
armes et s’imposer comme l’unique maître de l’empire. A cette crise politique s’ajoutent des
difficultés économiques considérables.
C’est en 1853, sous le règne de Dajazmach Kassa Heyku qu’est entreprise la
reconstruction politique du pays. Sous le nom Téwodros II, il devint empereur en 1855. Il
entreprit une vigoureuse politique de modernisation de son armée pour faire face à la menace
égyptienne soutenue par les Anglais. Ces derniers l’attaquèrent en 1867 et sans occuper le pays,
ils le détruisirent. Le Kassa de Tigré, sorti victorieux des conflits de succession, est nommé
empereur sous le nom de Joannes IV, en 1872. Il vainquit les Egyptiens à deux reprises assurant

75
définitivement l’indépendance du pays. Il reforma l’Eglise orthodoxe, poussa les musulmans à se
convertir au christianisme, chassa les chrétiens catholiques malgré leurs connaissances
techniques indispensables à la construction du pays.
La Somalie pour sa part est le théâtre d’un émiettement politique dispersant le pouvoir
entre des chefs musulmans de faible envergure. Les maigres produits commerciaux locaux se
dirigent vers le sultanat d’Oman. Des sécheresses récurrentes à l’origine de famines rurales ont
largement éprouvé la population.
7. Le Maghreb au XIXe siècle (chapitres 17, 18, 19)
Le Maghreb encore sous domination ottomane est largement convoité par les
puissances européennes motivées par deux facteurs étroitement liés : la proximité des pays
méditerranéens comme marchés et l’ouverture des routes rendues dangereuses par les
pirates de mer musulmans. Après avoir vaincu les pirates, ils s‘imposent dans le commerce,
grâce à leur puissance économique et surtout financière.
A partir de 1815, l’économie de la région est soumise à une forte influence des agents du
commerce international qui poussent à son ouverture et à sa réforme. L’endettement
croissant des Etats consolident la mainmise des Européens fortement installés dans les villes
côtières où ils dominent le monde des affaires. Les hommes d’affaires étrangers réussissent à
briser les monopoles et à s’emparer des droits et des privilèges divers, au détriment des Etats.
Le monde rural sur qui repose la satisfaction des créances publiques deviennent plus
vulnérables aux catastrophes naturelles.
Les reformes les plus inadaptées ont eu lieu surtout en Tunisie. Les dépenses exagérées
ont poussé le pouvoir à augmenter les impôts, puis à recourir aux emprunts. Les impôts ont
provoqué des révoltes tandis que les emprunts ont rendu l’Etat insolvable. D’où la
Commission financière internationale en 1869 pour contrôler toutes les finances et garantir le
remboursement des dettes. On peut donc dire que la mise sous tutelle économique a précédé
la colonisation qui intervient dans les années 1881. Le point positif de cette réforme concerne
la construction des écoles et la formation de certains cadres à l’étranger pour servir de base à
la modernisation.
La Libye a connu un sort légèrement différent pour deux raisons : la pauvreté relative et

76
la domination directe par la Turquie à partir des années 1835. D’où une certaine poursuite des
activités économiques anciennes qui englobent les échanges transsahariens : un peu d’or, les
plumes d’autruche, les cuirs (peaux de chèvres) et un peu d’ivoire, sans oublier les esclaves.
L’Algérie pour sa part connaît une situation particulière à cause de l’occupation coloniale
précoce, dès 1830. Les Français qui se rendent maîtres du pays vont s’imposer dans le
domaine politique et économique. Une grande partie du territoire va se soulever, paralysant
le déroulement des échanges.
L’autre article montre que le Maroc qui évolue en dehors de l’empire Ottoman
ressemble sur plusieurs points, aux autres pays de la région. La pression européenne pousse
les sultans à introduire des réformes, alors que l’organisation politico- administrative est
basée sur la loi islamique. Ces reformes vont poser le problème fiscal qui marque cette
période historique. Les ressources financières sont inférieures aux besoins réels du pays. Ainsi,
en 1859, le Maroc s’ouvre au commerce international et tombe sous la loi des endettements.
Comme dans les autres pays, l’Egypte et la Tunisie, le Maroc apportent des reformes de
son enseignement et de son armée. L’université de Fès qui forme les administrateurs se
charge aussi de former les ingénieurs. D’autres jeunes sont envoyés en formation à l’étranger.
Ajoutons que malgré les efforts pour la modernisation de son armée, le Maroc ne peut tenir
tête ni à la France, ni à l’Espagne qui triomphent de lui respectivement en 1844 et 1866.
Les tentatives de modernisation ont partout entraîné une crise croissance de la dette
publique, rendant les Etats insolvables. Ils finissent par tomber, les uns après les autres, sous
la domination économique puis politique des puissances coloniales européennes.
8. Le Sahara au XIXe siècle (chapitre 20)
Le chapitre est focalisé sur les occupations coloniales et les mutations géopolitiques qui
s’opèrent dans cet immense espace qu’est le Sahara. L’une des conséquences majeures de
cette présence coloniale porte atteinte au commerce esclavagiste transsaharien dont les
routes s’étaient réorientées en direction du Maroc avec l’occupation française de l’Algérie.
Avec la conquête de Tombouctou en 1894, le coup fatal est donné à ce trafic qui a drainé plus
de 200.000 esclaves sur le Maroc. La route Kano-Tripoli par où transitent les plumes autruche,
les peaux et les esclaves, elle reste active jusqu’en 1900. La sécurité assurée par la confrérie

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de la Sanussiya sur la voie Wadai-Benghazi permet d’y faire transiter plus longuement encore
les mêmes produits avec plus de 500.000 esclaves dirigés vers l’Egypte entre 1840-1885. Cette
importante population servile capturée dans les raids des tribus nomades est employée à la
garde des troupeaux, à l’agriculture (Hoggar), à l’artisanat et à la production du sel dans le
Sahara (Aïr). Les guerres religieuses et économiques du XIXe siècle ont également alimenté ce
trafic. Les armées marocaine et égyptienne y ont recruté de forts contingents.
Ces relations de part et d’autre des rives du Sahara ont donné l’occasion aux tribus
nomades de diffuser les traditions mystiques des confréries soufies et l’usage du droit
islamique dans l’exercice du commerce et de la politique.
9. Les révolutions islamiques du XIXe siècle en Afrique de l’Ouest (chapitres 21, 22 et 23)
Le chapitre montre qu’au XIXe siècle, l’Afrique de l’Ouest est le théâtre d’importantes
révolutions islamiques avec pour objectifs affichés le retour à l’orthodoxie islamique dans
l’organisation sociale et le façonnage des mentalités. Les grandes figures des Jihad furent
Shaykh ‘Uthman dan Fodio, Seku Ahmadu et Al-Hadj ‘Umar. Elles ont offert des perspectives de
sortie des impasses issues des politiques conduites par les Etats séculiers et des vieilles
théocraties sclérosées par l’exercice du pouvoir. Les jihad ont eu des conséquences immenses
sur l’ensemble des sociétés ouest-africaines: institution de pouvoirs théocratiques dynastiques,
développement de systèmes esclavagistes autochtones, émergence d’une nouvelle élite
intellectuelle, implantation durable des deux confréries rivales : la Kadiriyya et la Tidjaniyya, etc.

Illustrations
Il y a nécessité d’un enrichissement des illustrations en qualité et en quantité quand on
s’adresse à un jeune public contemporain éduqué dans un monde d’images. Les illustrations des
différents chapitres sont trop concentrées sur les personnages de premier plan et illustrent très
peu les scènes de vie, l’architecture et les images représentatives de la vie quotidienne, les
éléments technologiques et de l’environnement résidentiel. La cartographie est globalement
bien faite. L’usage de la photographie doit être plus systématique. Il faudra également penser à
alléger les cartes pour obtenir plus de clarté et gagner en lisibilité. Pour les ouvrage destinés aux
écoles élémentaires et secondaires, il sera important de fournir des textes sources aux élèves en
vue de les familiariser avec le matériel de construction de l’histoire et alimenter leur propre

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réflexion et éveiller leur imagination constructive.

Les propositions des matières à retenir pour les écoles primaires et secondaires africaines
Pour le volume VI et en suivant la logique des commentaires, les matières suivantes peuvent
être retenues :
1) Les chapitres généraux : l’abolition de la traite négrière.
La traite est une question importante dont les élèves doivent connaître le début et la fin. Il
faut aussi comprendre le comportement des Blancs et des Noirs qui participent à ce chapitre
douloureux de notre histoire.
2) L’Afrique australe : la culture des Nguni et des Zulu.
Il est question d’insister sur l’initiation suivant les classes d’âge comme une grande école
de la vie qui est devenue au XIXe siècle un instrument d’intégration nationale et une grande
école militaire. Les nouvelles techniques de combat prouvent que l’Afrique avait ses strateges
militaires.
3) L’Afrique australe : Les républiques Boers au XIXe siècle.
La communauté minoritaire des Boers qui se fait remarquer par sa politique de
développement séparé (Apartheid) forge toutes ses armes dès cette époque. Le complexe de
supériorité raciale et technologique, l’instinct naturel de défense ainsi que la cupidité qui les
poussent à tout prendre aux Africains, sont autant de facteurs qui expliquent leur
comportement. Ces facteurs primordiaux pour leur existence paraissent plus forts que les
principes moraux et religieux dont ils prétendent être les porteurs depuis l’Europe.
4) La côte et l’hinterland de l’Afrique orientale : La culture swahili
Cette culture qui est un mélange d’éléments asiatiques et africains montre le dynamisme
des cultures africaines face à l’apport étranger et leur capacité d’emprunt et d’innovation. Cette
nouvelle culture a ensuite intégré les cultures africaines de l’intérieur. Elle semble aujourd’hui
être un modèle instructif en termes d’intégration régionale.
5) L’Afrique centrale (le bassin du Congo et l’Angola) : le bassin du Congo, carrefour
commercial.
De par sa position, le Congo apparaît déjà au milieu du XIXe siècle comme un véritable

79
carrefour commercial et objet des luttes entre les puissances européennes. Les fondements du
futur statut international du bassin conventionnel du Congo datent de cette époque de la
conquête économique.
6) La vallée du Nil : La renaissance égyptienne sous Mohamad Ali et Ismail.
La première puissance africaine de l’histoire moderne du XIXe siècle, mérite un traitement
spécifique pour montrer les difficultés d’une politique de modernisation dans le contexte
d’expansion impérialiste.
7) La corne de l’Afrique : La restauration de l’empire d’Ethiopie sous Tewodros II et Joannes
IV.
Ce royaume chrétien de l’Afrique de l’Est a connu une existence difficile depuis
l’avènement de l’Islam. Alors qu’il était sur le point de sombrer, deux de ces vaillants fils l’ont
ressuscité au milieu du XIXe siècle. Il est le symbole de l’indépendance africaine.
8) Le Maghreb : les tentatives de modernisation du Maghreb au XIX è siècle.
Vaste berceau de civilisations islamiques, le Maghreb offre un exemple des méfaits du
capitalisme en expansion et de la difficile lutte des sociétés africaines pour la préservation de
leur indépendance.
9) L’Afrique de l’Ouest : les révolutions islamiques en Afrique occidentale.
Confrontées aux défis de s’ajuster à un contexte mondial de grandes mutations, les
sociétés ouest-africaines ont su mobiliser les héritages islamiques pour faire face aux défis de
l’impérialisme conquérant.
10) Les grandes personnalités : Les grandes figures historiques de l’Afrique au XIXe siècle.
On pourra parler aussi bien des bâtisseurs des Etas que des résistants aux premières
tentatives de colonisation.
11) Les agents extérieurs de l’évolution culturelle : Les missions chrétiennes en Afrique au
XIXe siècle.
12) La place de l’Afrique dans le monde : Les relations internationales du l’Afrique au XIXe
siècle.
Les chefs africains ont essayé d’établir les relations bilatérales avec les grandes puissances,
souvent pour avoir de l’assistance militaire ou technique. C’est dans ce cadre que les consuls

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ont résidé dans leurs Etats.
13) Les produits d’importation et d’exportation : Le commerce international de l’Afrique au
XIXe siècle.
14) L’état de nos sociétés : Les sociétés africaines au XIXe siècle.
15) La Grande île de Madagascar : Madagascar au XIXe siècle, diplomatie et organisation
sociale.
16) Le sort des Africains vivant hors du continent : la diaspora africaine au XIXe siècle.

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Volume VII
L’Histoire Générale de l’Afrique: L’Afrique sous domination coloniale, 1880-1935
A. Adu Boahen, dir.

I Structure et grandes lignes du volume

Consacré à l’Afrique sous domination coloniale, le volume VII de l’HGA étudie certes les
politiques des acteurs des impérialismes européens, mais privilégie les réactions des sociétés
africaines face aux bouleversements induits par les conquêtes dans les dernières décennies du
e
XIX siècle et face à l’emprise exercée par des étrangers jusqu’à l’annexion de l’Éthiopie par
l’Italie fasciste en 1935. Il ne s’agit donc pas d’une histoire des Européens en Afrique, mais bien
d’une histoire des Africains en Afrique et en dehors de l’Afrique, une histoire qui s’inscrit dans
un contexte international, marqué durant cette période par l’expansion européenne, la
Première Guerre mondiale et le renforcement des connexions entre l’Afrique et l’Amérique du
Nord, contribuant à l’émergence du panafricanisme.

L’ouvrage, de trente chapitres, est construit suivant un plan chronologique et, dans la
mesure du possible, selon une approche par grands ensembles régionaux qui permet de se
départir de la perspective européenne d’une histoire des colonies. Évidemment, cela n’a pu se
faire pour les quelques chapitres portant spécifiquement sur les méthodes de domination. Il
faut également souligner le souci constant d’éviter une vue homogénéisante, ne serait-ce qu’en
raison de la diversité des nations ou des groupes sociaux peuplant une même région, des
différences entre les enjeux économiques (par exemple, les cultures de rente ou les
exploitations minières), entre les politiques des puissances exerçant la tutelle. De même, la
présence de colons européens et, sur le plan religieux, la force de l’islam, l’enracinement du
christianisme ou la vigueur des religions traditionnelles figurent parmi les multiples facteurs
invitant à des analyses nuancées. Aussi, de façon générale, le volume rend bien compte de la
complexité des phénomènes, même si les auteurs n’ont pu exploiter certaines sources non
encore accessibles au moment de la rédaction.

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Le volume peut être subdivisé en trois grandes parties, bien équilibrées. Chaque partie
commence par un chapitre introductif, synthétique, donnant une vue d’ensemble sur le thème
qui va être développé.
La première partie (du chapitre 2 au chapitre 11) qui couvre la période 1880-1914, celle de
la défense de la souveraineté, traite « des initiatives et résistances » des sociétés africaines
confrontées aux conséquences des tractations diplomatiques qui leur échappaient totalement
(Conférence de Berlin), aux attaques armées des Européens, puis à la mise en place de la
colonisation. Les réactions à la conquête ont varié entre résistances armées et stratégies
d’alliance et non de collaboration. D’ailleurs, il importe de dépasser la dichotomie simplificatrice
résistant/collaborateur. Alors que les puissances coloniales pensaient avoir achevé la
« pacification », les Africains n’en continuèrent pas moins à manifester leur désir de retrouver
leur souveraineté. Les résistances qui ont revêtu différentes formes et ont concerné toutes les
sociétés, avec ou sans État, témoignent également d’un travail des sociétés sur elles-mêmes. Il
ne faut donc pas y voir seulement des réactions à des agressions venant de l’extérieur ; actrices
à part entière, les sociétés africaines ont aussi conscience de prendre des initiatives en tenant
compte des sollicitations de leur temps, de leurs besoins propres, des contextes spécifiques à
chacune d’entre elles. Quoi qu’il en soit, à la veille de la Première Guerre mondiale, les
puissances européennes ont établi leur domination sur la presque totalité du continent ; elles
réussissent également à intervenir dans la vie économique des deux seuls États indépendants
du Libéria et de l’Éthiopie.
La deuxième partie de l’ouvrage (du chapitre 12 au chapitre 21) s’ouvre sur les impacts de la
Grande Guerre, avec le recrutement militaire, les pertes sur les fronts, les difficultés
économiques dues à la rupture des relations commerciales avec les métropoles. Suit une
analyse des politiques coloniales dont la diversité tient aux différences de méthodes et de
stratégies des puissances impériales mais aussi aux ressources des territoires et à l’implication
des sociétés africaines dans l’administration ou l’économie, à leur ouverture ou leurs réticences
face à « la mission civilisatrice ». L’ouvrage ne manque pas de rappeler que, malgré des
différences entre l’administration directe et l’administration indirecte des « politiques
indigènes », une même idée a guidé les colonisateurs : celle d’une supériorité des Occidentaux.

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Une attention particulière est accordée aux économies coloniales qui font l’objet de quatre
chapitres ainsi qu’aux mutations démographiques et sociales liées à la colonisation, examinées
dans deux chapitres. En situation coloniale, dans le contexte d’un étroit contrôle social, les
religions et les arts sont apparus comme des espaces de relative liberté, offrant la possibilité
d’exprimer le refus de la domination étrangère. Deux chapitres sont consacrés à la vie culturelle
dans cette perspective africaine.
La dernière partie (du chapitre 22 au chapitre 29) traite de « politique et nationalisme
africain » ou plutôt des réactions nationalistes ou anticolonialistes des sociétés dans l’Afrique
de l’entre-deux-guerres. Les Africains s’adaptent au système mis en place par les pouvoirs
coloniaux, par la protestation ou par la résistance. La prise de conscience d’une profonde
inégalité a entretenu un sentiment de frustration qui a touché les auxiliaires des
administrations, anciennes élites de chefs ou nouvelles élites urbaines instruites dans les écoles
coloniales. Les intellectuels reprirent les discours officiels sur la politique d’assimilation ou
d’association pour étayer leur contestation. Ils utilisèrent beaucoup la presse, agirent au sein de
partis, d’organisations de jeunesse. Le nationalisme s’est aussi exprimé dans la religion, avec la
fondation d’églises indépendantes des missions et le développement de mouvements
millénaristes ou du mahdisme et du panislamisme. Les problèmes économiques alimentèrent le
mécontentement dans les milieux des travailleurs et le monde rural. Les tensions furent
particulièrement vives dans les régions où les colons étaient bien représentés. Ces réactions
sont analysées dans le cadre des grands ensembles régionaux définis dans la première partie
pour l’analyse des résistances aux conquêtes. Après un chapitre consacré à l’intervention
croissante des Européens au Libéria et en Éthiopie qui finit par perdre son indépendance
(l’année 1935 est un tournant dans l’histoire de l’Afrique), le volume rappelle de quelle manière
le contexte international a tout de même joué en faveur des nationalistes africains. Ceux-ci
profitèrent de la SDN et du soutien de diverses associations en Europe et aux Etats-Unis, grâce
en particulier aux connexions établies par la diaspora d’intellectuels ayant effectué des études à
l’étranger, objet de l’avant - dernier chapitre de l’ouvrage.
La conclusion générale, rédigée par Adu Boahen, pose la question de l’impact du
colonialisme sur l’Afrique et de sa signification dans l’histoire du continent. L’auteur souligne la

84
complexité du phénomène, rappelle la nécessité d’une approche qui prenne en compte la
diversité des situations et la capacité de résilience des cultures africaines en particulier dans les
campagnes, malgré les répercussions indéniables de la domination étrangère dans le domaine
de l’économie et ses conséquences sur l’évolution politique du continent. Il conclut ainsi : « Bien
que le colonialisme ait été sans aucun doute un simple chapitre d’une longue histoire, un
épisode ou un interlude dans les expériences multiples et diverses des peuples d’Afrique… il a
marqué une nette coupure dans l’histoire de l’Afrique » et dans le développement ultérieur du
continent.
II Contenu résumé des chapitres autres que les chapitres introductifs
On pourrait reprendre comme titre de la première partie, celui de l’introduction générale, rédigée
tout comme la conclusion par Adu Boahen, « L’Afrique face au défi colonial ».

(Chapitres 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11)

Le chapitre 2 qui présente les différentes théories sur le développement d’un nouvel
impérialisme à partir des années 1880 oppose aux théories centrées sur des perspectives
européennes (rôle primordial du capitalisme monopoliste, influence de l’évolutionnisme social,
exacerbation des nationalismes européens), « la théorie de la dimension africaine » qui accorde
une attention particulière aux forces de désintégration à l’œuvre dans les sociétés africaines
pour expliquer leurs défaites.
Après une réflexion générale de Terence Ranger sur les « initiatives et les résistances
africaines face au partage et à la conquête », une série de chapitres aborde la question dans des
ensembles régionaux, en commençant par l’Afrique du Nord-Est.
En Egypte, la dépendance croissante vis-à-vis de l’Europe suscita la révolution dirigée par
Ahmad Urabi. Mais les Anglais profitèrent des divisions entre Urabistes pour occuper le pays. De
jeunes intellectuels constituèrent le Parti Nationaliste, alors que d’autres choisirent la stratégie
de l’alliance. Au Soudan, les Mahdistes mobilisés dans un djihad furent également défaits par
Anglais aidés par leurs alliés égyptiens, tandis que la France, l’Italie et la Grande-Bretagne se
partagèrent le territoire des Somalis qui ne formaient pas une seule entité politique. Un
mouvement de renaissance islamique se déclencha cependant en opposition à la domination
d’infidèles. Le chapitre est illustré par des photographies de leaders politiques et d’une carte

85
générale.
En Afrique du Nord, malgré la relative homogénéité culturelle, la situation est complexe en
raison de la diversité des nations, celle des périodes de la conquête, celle des modes
d’administration et de l’antériorité de la domination ottomane. Les réactions sont à examiner à
différents niveaux : celui des États organisés, celui des confréries Sufi et celui de la djema’a. La
conquête par les Européens s’est faite en cinq étapes. On peut distinguer deux grandes phases
dans la résistance au Maghreb : de 1880 à 1912 et de 1921 to 1935. Mais les Africains furent
aussi défaits en raison de facteurs internes et externes. Dans les illustrations figurent des cartes
des principales régions et des campagnes des Européens ainsi que des photographies de leaders
des résistances et une sur la guerre du Rif.
L’organisation socio-politique des États africains ainsi que les relations que les Européens
entretenaient avec eux figurent parmi les facteurs déterminants dans les réactions des sociétés
de l’Afrique Occidentale à l’intrusion des Européens (Français, Britanniques et Allemands). Les
Africains optèrent pour l’une des trois solutions : confrontation militaire, alliance ou soumission.
L’accent est mis sur les réactions dans les territoires conquis par la France (Sénégambie,
l’Empire Toucouleur, l’empire de Samori, le Dahomey et le pays Baulé) et les territoires passés
sous la domination britannique (empire Ashanti, Sud et Nord du Nigeria). Suit une analyse des
résistances à l’oppression exercée par l’administration coloniale, marquées par des révoltes
(Mamadou Lamine, la révolte contre l’impôt de la case en Sierra Leone), des migrations, des
mouvements religieux chrétiens ou musulmans, la formation d’associations par des élites. Deux
cartes (les États et populations ; la progression européenne en Afrique de l’Ouest) ainsi que des
reproductions photographiques de leaders de la résistance et un aspect de la répression
illustrent le chapitre.
Le chapitre dédié à l’Afrique Orientale traite successivement du Kenya, du Tanganyika et
de l’Ouganda. Alors que les Nandi du Kenya offrent l’exemple d’une longue résistance aux
Anglais, l’attitude des Gikuyu a varié entre alliance et affrontement armé. Au Tanganyika, les
Allemands profitèrent de rivalités entre certains groupes, mais se heurtèrent à la vigueur des
réactions de la part des Hehe et de populations de la côte, dirigées par Abushiri. Mwanga, roi du
Buganda recourut d’abord à la diplomatie avant de finir capturé au terme d’une guérilla. Les

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gouvernements coloniaux confisquèrent les meilleures terres, confinèrent les Africains dans des
réserves, avec une plus forte pression des colons au Kenya. Les contraintes coloniales
suscitèrent révoltes, résistance passive, revalorisation des croyances africaines, nouvelles
expressions du christianisme au Kenya. Au Tanganyika, ce fut à partir de 1905 le mouvement
Maji-Maji. Outre une carte, les illustrations comprennent trois photographies (construction du
chemin de fer, le résistant chef Abushiri et les souverains Mwanga du Buganda et Kabarega du
Bunyoro).
En Afrique Centrale (République Démocratique du Congo, Zambie, Malawi, Angola et
Mozambique), les conflits internes n’ont pas empêché les réactions de contestation, parmi
lesquelles on peut distinguer les résistances ayant un caractère local et les insurrections
d’envergure, avec le projet de renverser le système colonial, mais confrontées à différents
problèmes. Le fait que des groupes ont choisi de coopérer avec les Européens a également
contribué à l’échec de la résistance. Une carte des populations et des états ainsi que les
photographies de Bemba recevant les Européens, de leaders de la résistance illustrent le
chapitre.
Les réactions des sociétés de l’Afrique méridionale face aux Européens ont varié selon
leurs intérêts et leur capacité à résister ou non. De petits royaumes (Tswana et Swazi) misèrent
sur une entente avec la Grande-Bretagne. D’abord victorieux, les Zulu durent s’incliner devant
les Anglais, alors que Lobengula, souverain des Ndebele, essaya la diplomatie avec Cecil Rhodes
qui joua sur les termes du traité pour s’imposer. L’annexion de leurs territoires suscita chez les
Ndebele et les Shona un mouvement de résistance, le chimurenga, qui prit fin après la capture
de ses leaders : des prêtres et des prophètes. Dans l’Afrique du Sud-Ouest, la révolte des Herero
fut réprimée par des massacres. Les illustrations comprennent une carte des peuples et entités
politiques, le champ de bataille victorieuse des Zoulous à Isandhlwana (1879), et de souverains.
La chronologie en ce qui concerne Madagascar dans cette première partie diffère de
celle des autres régions. Elle va jusqu’en 1939. Une première expédition (1883-1885) de la
France contre le royaume de Madagascar se termina par la signature en 1885 d’un traité qui
inaugura une décennie de malentendus. Mais une seconde expédition (1894-1895) se termina
par l’annexion de l’île, affaiblie par de multiples difficultés. Cependant dès la reddition de la

87
reine Ranavalona III, des soulèvements éclatèrent sur les marges de l’Imerina. Les Français
eurent également à faire face aux résistances dans d’autres régions. Les Malgaches réagirent
ensuite à la domination coloniale par la résistance passive, des jacqueries, des formes modernes
de nationalisme à partir des années 1910. Le refus opposé par la France à la revendication de la
naturalisation en masse marqua un tournant en 1929, avec la naissance d’un mouvement
national. Le chapitre comporte trois cartes et des photographies (Ranavalona III et le Premier
ministre, Rainilaiarivony)
Convoités aussi par les Européens, L’Éthiopie et le Libéria réussirent à préserver leur
indépendance mais dans des conditions d’autant plus difficiles que les sociétés y étaient
traversées par de profondes divisions, entre Africains autochtones et Américo-Libériens au
Libéria, ou fortement hiérarchisée comme en Éthiopie, avec une organisation pyramidale
dominée par l’empereur. Le Libéria assista impuissant aux grignotages successifs de son
territoire par l’Angleterre et la France. Les divergences sur l’interprétation du traité de Wuchale
furent à l’origine d’une guerre entre l’Italie et l’Éthiopie qui se termina par la victoire de celle-ci
à Adowa. Mais, sollicités ou s’imposant comme intermédiaires pour accéder à la modernité, les
Européens intervinrent tout de même dans la vie économique et sociale de l’Éthiopie de
Menelik II, comme ils le firent de façon plus marquée au Libéria. Le chapitre est abondamment
illustré. Des cartes du Libéria et des photographies de dirigeants politiques et un dessin de la
bataille d’Adowa accompagnent le texte.
La seconde partie analyse l’exercice de la domination coloniale et ses conséquences dans
différents domaines : économique, social, culturel. Il inclut les chapitres consacrés à l’économie
coloniale (14, 15, 16, 17), à la démographie et aux sociétés (18, 19) ainsi qu’à la religion et aux
arts (20, 21).
Un chapitre introductif rappelle les liens étroits entre les colonies et la métropole d’une
part, le reste du monde d’autre part sur le plan économique. On peut distinguer quatre phases
principales dans ce processus : 1880-1910 (conquête et nouvelles relations de production), vers
1900-1920 (capital et coercition), 1920-1930 (participation de l’Afrique à l’économie coloniale)
et 1930-1938 (dépendance et dépression). Il importe aussi de tenir compte de la diversité des
situations en fonction des ressources, de l’implantation de colons européens, de la capacité de

88
résilience des Africains face à diverses pressions, des contextes de guerre et de la Grande
dépression. L’économie coloniale se caractérise par une interdépendance entre les secteurs
moderne et traditionnel.
L’économie coloniale dans l’Afrique subsaharienne est ensuite analysée en fonction des
puissances impériales. Un chapitre étudie les anciennes colonies françaises, belges et
portugaises, en soulignant la grande diversité des situations, ainsi en fonction des ressources
(minières ou agricoles), du type d’économie (économie de traite ou compagnies à monopole).
Mais de façon générale, on note la faible diversification de l’économie et le poids des
contraintes sur les colonisés fournissant la main-d’œuvre mais ne pouvant adhérer facilement à
des partis et syndicats. Une quinzaine de tableaux statistiques et une carte représentant les
ressources des colonies françaises, belges et portugaises illustrent le chapitre.
Sources de matières premières pour la métropole, les anciennes colonies britanniques
représentaient aussi des marchés pour ses industries. Cependant, les territoires se sont
distingués chacun par une certaine spécificité : l’Afrique du Sud où les richesses minières ont
joué un rôle primordial dans les mutations socio-économiques, l’Afrique Occidentale restée à
l’abri d’importantes spoliations foncières à la différence du Kenya, de la Rhodésie du Sud ou de
l’Afrique du Sud. Si la modernisation, limitée, d’une économie extravertie n’a pas beaucoup
amélioré la situation des colonisés, elle a en revanche profité aux grandes entreprises
britanniques. Trois cartes, dont une des ressources minières et une autre des chemins de fer, un
tableau statistique des exportations minières et des photographies de travailleurs africains
accompagnent le texte.
Le dernier ensemble défini pour l’étude de l’économie coloniale est l’Afrique du Nord,
avec une distinction entre les colonies selon les régions (Maroc, Algérie et Tunisie, d’une part,
Libye, Égypte et Soudan de l’autre) et selon les puissances impériales. À la différence des
territoires sous domination française et italienne, on n’a pas de forts noyaux de peuplement
européen en Égypte sous domination britannique qui présente aussi la particularité d’être une
zone de libre-échange et de connaître une relative prospérité. Ailleurs, dans territoires, où
l’accent a été mis sur l’exploitation des minerais, où les investissements dans les infrastructures
sont restés limités, la Grande dépression a provoqué une grave détérioration de la situation des

89
colonisés. Des cartes de chacun des territoires, des tableaux statistiques et des photographies du
barrage d’Assouan et de Djazira illustrent le chapitre.
Les répercussions sociales de la domination coloniale sont analysées sous l’angle des
aspects démographiques et de l’apparition de nouvelles structures sociales. Si les guerres, la
famine, les épidémies et le travail forcé, en particulier dans les colonies qui furent des réservoirs
de main-d’œuvre, ont épuisé les populations, le développement des communications et les
infrastructures sanitaires des missions ou des gouvernements ont eu un impact positif.
L’accroissement démographique s’est accompagné de mouvements de population, notamment
vers les villes. L’urbanisation, l’instruction, le christianisme, l’économie coloniale figurent parmi
les causes de mutations, avec l’abolition de l’esclavage, une plus grande mobilité sociale,
l’émergence de nouvelles élites ou encore la création de différentes associations. Cependant, il
importe de tenir compte des dynamiques propres aux sociétés africaines, de ne pas s’en tenir à
une opposition tradition/modernité. Tout comme, il faut prendre en compte la diversité des
processus à travers le continent, en fonction des politiques coloniales, de la présence de colons
européens, des réactions des Africains aux forces du changement. Les illustrations portent sur
une ville, une école, la sociabilité de nouvelles élites mais exclusivement dans les colonies
britanniques.
La vie culturelle pendant la période coloniale est traitée dans deux chapitres : sur la
religion et sur les arts. L’opposition à la domination coloniale a trouvé aussi son expression dans
la religion. Certaines révoltes ont été placées sous le signe d’une revalorisation des croyances
traditionnelles et, alors que les États nés du djihad s’étaient effondrés, on assista à une
renaissance de l’islam (mahdisme et confréries). Si des Africains convertis se conformèrent aux
règles des missionnaires, d’autres s’insurgèrent contre leur tutelle. Ils créèrent des églises
indépendantes qui furent des espaces de contestation politique et d’accommodement avec les
traditions africaines. Des illustrations diverses représentant des prophètes, une mosquée et des
danseurs au cours d’un rite d’initiation complètent l’exposé.
La partie consacrée à la musique, étroitement liée à l’éloquence, insiste sur la musique
des cultes de possession chez les Shona. Si les professionnels des arts du spectacle furent
victimes de mesures contre les rites païens, l’administration et les missionnaires encouragèrent

90
des représentations théâtrales qu’ils contrôlaient de près. Enfin, pour ce qui est des littératures,
le chapitre privilégie les débats sur les usages de l’arabe classique ou moderne et des langues
des puissances coloniales au sujet desquels les avis des intellectuels africains étaient partagés.
Les exemples sont pris en Égypte et au Soudan Occidental. Ce chapitre ne comporte aucune
illustration.
La dernière partie examine la politique africaine et le nationalisme africain dans les
grands ensembles régionaux

Dans l’Afrique du Nord-Est, alors qu’en Égypte et dans la partie méridionale du Soudan,
le nationalisme a eu un caractère essentiellement laïque, au nord Soudan et en Somalie, il a été
d’inspiration à la fois laïque et religieuse. Avec l’appui du roi Fu’ad Ier, la Grande-Bretagne
freina le succès du Wafd, organisé par une classe émergente d’intellectuels et de propriétaires
égyptiens pour donner un caractère légal à sa présence en Égypte. Le pouvoir colonial réprima
les manifestations de la Ligue du drapeau, association de jeunes intellectuels soudanais, dont le
slogan était « L’unité de la vallée du Nil », de même qu’il brisa au Darfour une révolte sous la
bannière du mahdisme. Les répressions n’empêchèrent pas cependant d’autres réactions,
comme la résistance passive ou des discussions dans des clubs. Trois photographies (le leader du
Wafd, collège de Khartoum, manifestation en faveur de Fu-ad) illustrent le chapitre. Du
nationalisme qui s’est exprimé de différentes façons en Afrique du Nord, le chapitre souligne un
certain nombre de point remarquables dont l’éveil du syndicalisme en Tunisie et en Algérie, le
développement d’une presse nationaliste et la guerre du Rif au Maroc. Les difficultés
économiques ont L’importance de la colonisation en Algérie a posé un problème particulier
pour des jeunes partagés entre l’identité française et le nationalisme algérien. Au Maroc, l’islam
mobilisa également des opposants. Une carte du Maghreb et du Sahara, ainsi que des
photographies sur la guerre du Rif et un portrait de Bourguiba accompagnent le texte.

La Grande Guerre, avec ses contraintes et la découverte des faiblesses des Européens, a
joué un rôle fondamental dans le développement d’un sentiment anticolonial en Afrique
Occidentale. Il en est de même de la Grande dépression. Cependant, des problèmes de
leadership et de méthodes se sont posés aux partis, syndicats et mouvements de jeunesse qui

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se sont créés à l’échelle de la région. Une carte et des photos de personnalités politiques
illustrent le chapitre.

En Afrique Orientale, le nationalisme s’exprima dans des mouvements millénaristes,


dans des églises dissidentes et surtout dans des associations de jeunes élites instruites à
caractère local, dont l’une (celle des Kikuyu) eut pourtant une ambition transethnique. La
répression ne marqua pas la fin des revendications. Une carte de localisation et des
photographies de leaders politique illustrent le texte.

La série de chapitre sur le nationalisme à l’échelle régionale se termine sur l’Afrique


centrale et méridionale. La ségrégation raciale en Afrique du Sud a été un puissant moteur de la
contestation d’abord au sein d’églises indépendantes et, de plus en plus à partir des années
1930, dans le cadre de partis dont l’ANC pour l’élite instruite et de syndicats pour les ouvriers.
Au Congo Belge, l’anticolonialisme s’exprima par la résistance passive ou les grèves, ainsi que
dans le cadre de mouvements millénaristes. Outre des phénomènes comparables, on relève en
Angola l’importance de la presse nationaliste et des ligues affiliées au panafricanisme. Si
l’opposition intellectuelle fut moins structurée au Mozambique, en revanche, les travailleurs se
mobilisèrent dans d’importantes grèves. Les illustrations consistent en deux cartes de
localisation et un portrait d’un chef d’une église indépendante.

Un parallèle peut être établi entre le Libéria et l’Éthiopie où l’auteur parle d’un « esprit
colonial » des groupes dominants, un des facteurs qui, associé aux difficultés économiques
favorisa l’intervention des puissances occidentales et la surveillance par la SDN. Les USA
s’imposèrent au Libéria qui réussit à préserver son indépendance contrairement à l’Éthiopie qui
passa sous domination italienne. Deux cartes et des portraits de dirigeants politiques illustrent le
chapitre.

Le chapitre 29 analyse les relations entre l’Afrique et le Nouveau Monde sous différents
angles : le mouvement de Marcus Garvey, l’évangélisation de l’Afrique par des Africains-
Américains, le rôle en Afrique des étudiants africains formés aux USA, le panafricanisme et
l’héritage culturel africain en Amérique latine et aux Caraïbes. Une carte de l’implantation

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d’Afro-Brésiliens en Afrique Occidentale, des portraits de leaders politiques, des photographies
en rapport aux relations entre l’Afrique et le Brésil accompagnent le texte.

III Remarques d’ordre général sur le contenu du volume dans la perspective de


manuels

Sur les textes De façon générale, l’ouvrage fournit une abondante documentation
malgré quelques problèmes liés à la date de rédaction des textes. Le directeur du volume fait
remarquer que les auteurs n’ont pu consulter les documents qui n’étaient pas accessibles en
raison de la réglementation des archives. Par ailleurs, il est nécessaire de mettre à jour les
thèmes et débats avec le renouvellement de la bibliographie et de l’historiographie. Il a été
impossible aux rédacteurs du rapport de faire ce travail. Un certain nombre de points
pourraient être développés. Le sport est effectivement quelque chose d’important, ne serait-ce
que parce qu’il touche les jeunes (d’ailleurs peu présents dans l’ouvrage sauf à propos du
Kenya), parce que les clubs sont des lieux de discussion et donc éventuellement de
contestation. De même les mouvements de jeunesse (boy scouts, YMCA, éclaireurs) méritent
plus d’attention car ce sont des questions qui peuvent intéresser des élèves. On peut aussi
penser à la rareté de la présence des femmes, or depuis des travaux ont été faits dans ce
domaine. La question de la scolarisation devrait être traitée plus amplement qu’elle ne l’est.
Quelques insuffisances ont été notées, comme l’absence des colonies allemandes et portugaises
en Afrique Occidentale (chap 6). Par ailleurs, le rapport attire l’attention sur le cas des îles qui
font partie de l’UA (Madagascar, Comores, Maurice) qu’il aurait fallu considérer comme un
ensemble régional. Ni Maurice, ni les Comores ne sont traitées. On peut subsidiairement poser
la question des Seychelles et de la Réunion. Pour ce qui concerne Madagascar, le choix d’une
autre chronologie a fait que certains évènements ont été occultés. Pour la périodisation, si 1935
est un tournant, on pourrait aller jusqu’à la fin de la Seconde Guerre mondiale, car celle-ci se
caractérise par un renforcement du système déjà en place.

Sur les illustrations en vue de manu : Elles sont trop centrées sur des grands hommes. Il faut
chercher d’autres illustrations pour montrer les cadres de vie : villes, villages etc., les
monuments comme églises, écoles, les sanctuaires traditionnels, les représentations de

93
résidences administratives. On peut penser à des illustrations pour les concessions agricoles et
minières, pour des villages avec leur architecture spécifique. Il serait intéressant d’avoir des
plans de villes pour montrer l’urbanisme occidental et les « quartiers indigènes », la ségrégation
spatiale mais aussi pour donner des exemples de villes où la ségrégation est sociale plus que
raciale, distinguer ainsi des villes préexistantes à la conquête, des villes qui sont créations
coloniales. Des illustrations devraient représenter le commun des gens de différents milieux,
avec femmes, hommes, enfants, etc. On doit pouvoir trouver facilement des illustrations dans
des archives ou dans des ouvrages. Chaque illustration devrait être accompagnée d’un bref
commentaire.

Le volume contient un grand nombre de cartes, mais il faudrait des cartes plus simples
pour les manuels : cartes de localisation, cartes des peuples, des langues, des territoires
coloniaux, etc.

On peut également garder des citations tout à fait expressives et qui parleront à des
élèves.

IV Recommandations pour le contenu de manuels du primaire et du secondaire

Il aurait été utile de se faire une idée des programmes dans les classes primaires et
secondaires pour une réelle efficacité du travail, de savoir au fond quels genres d’ouvrages et
combien de manuels l’UNESCO envisage d’éditer. Un pour le premier cycle du secondaire et un
pour le second ? Et pour quel niveau du primaire ? Un ouvrage pour des enseignants ou pour
des élèves ? Les réponses devraient venir des sessions de travail à Tripoli, sans oublier les
recommandations précédentes.
Il nous manque le regard des enseignants du primaire, des collèges et des lycées qui eux
connaissent les publics auxquels s’adresser. Il faudrait associer à l’entreprise les collègues du
primaire et du secondaire, se faire une idée de la place de l’histoire de l’Afrique et de l’histoire
nationale dans les programmes. Ceci étant, il faudrait avoir une approche par grands ensembles
régionaux, à l’intérieur desquels on peut parler plus spécifiquement des pays.
Le rapport relève dans chaque chapitre ce qui a semblé le plus important.

94
Le rapport attire l’attention sur l’intérêt qu’il y aurait à s’inspirer des travaux de nos collègues
du Nigeria dans leur publication Tarikh. On peut en ce qui concerne cette période se référer à
Tarikh vol 4, n 3 « European Conquest ant African Resistance », vol 3, n 3 « Indirect Rule in
British Africa », vol 5, n 3 « Protest against Colonial Rule in West Africa », vol 3, n 4
« Independence Movements in Africa 1», vol 4, n1 « Independence Movements in Africa 2 »,
vol 5, n 4 « The African Diaspora ».
En passant successivement en revue les chapitres, voici les thèmes susceptibles d’être retenus
Chapitre 2 Partage Européen et conquête de l’Afrique
Parler de la Conférence de Berlin ; simplifier partie sur les théories de l’impérialisme, insister sur
nationalismes européens et les divisions, les difficultés en Afrique ; un tableau chronologique
des conquêtes est nécessaire.
Chapitre 3 : Introduction générale à initiatives et résistances
Il faut quelque chose de moins complexe, tout en évoquant les différents points de vue ;
reprendre la citation du chef nama Hendrik Wittboi sur une vision unitaire de l’Afrique
Chapitre 4 : Initiatives et résistances en Afrique du Nord-Est
Retenir les thèmes suivants : Révolution urabiste, le Mahdisme, la partition de la Somalie ;
insister sur les enjeux autour du canal de Suez
Chapitre 5 : Initiatives et résistances en Afrique du Nord et Sahara
Les affrontements militaires et échanges diplomatiques avant 1880 ; les résistances au
colonialisme de 1880 à 1930 ; les facteurs intérieurs et extérieurs ayant causé l’échec des
résistances ; étudier rôle des leaders, des groupes religieux
Chapitre 6 : Initiatives et résistances en Afrique Occidentale
Les résistances à l’invasion européenne ; résistance à la domination coloniale ; l’échec
des résistances ; les élèves doivent se faire une idée autant de l’unité que de la diversité des
expériences des communautés africaines ; biographies de leaders de la résistance ; chronologie
des principaux évènements.
Chapitre 7 : Initiatives et résistances en Afrique orientale
Parler des Maji-Maji, de la révolte d’Abushiri ; Insister sur la question des terres dans les Hautes
terres du Kenya ; résistance dans la région des Grands Lacs. Il faut carte des territoires

95
coloniaux.
Chapitre 8 : Initiatives et résistances en Afrique centrale
La lutte des états pour maintenir leur souveraineté ; les premières résistances à caractère local ;
les insurrections anticoloniales avant 1918. Il faudrait une chronologie pour guider les élèves,
mettre l’accent sur la diversité des réactions des Africains face à l’invasion, donner des
biographies de figures de résistants.
Chapitre 9 : Initiatives et résistances en Afrique méridionale
Ajouter quelque chose sur la révolte de Bambatha ; retenir le chimurenga ; parler de la
constitution des deux Rhodésie et des richesses minières ; le démantèlement de l’empire zulu ;
Républiques Boers, les origines des enclaves du Swaziland et Lesotho.
Chapitre 10 : Initiatives et résistances à Madagascar (1880-1939)
Distinguer Royaume de Madagascar des autres royaumes ; simplifier la question des
Menalamba ; avoir même chronologie que pour autres ensembles régionaux, donc deux
chapitres mais inclure au moins les autres îles membres de l’UA.
Chapitre 11 : Éthiopie et Libéria (1880-1914) : la survie de deux États africains
Libéria et empiètements des Européens ; la victoire d’Adowa et son retentissement en Afrique.
Chapitre 12 : La Première Guerre mondiale et ses conséquences
Contribution de l’Afrique à la Guerre (en homme, en ressources etc.) ; conséquences de la
guerre sur le plan économique et social ; impact socio-politique, en particulier le rôle des soldats
démobilisés. Un tableau chronologique des évènements.
Chapitre 13 : Méthodes et institutions de la domination européenne
Diversité des politiques indigènes en tenant compte des spécificités des sociétés africaines ; les
gouvernements coloniaux ; les moyens de contrôle des administrations
Chapitre 14 : L’économie coloniale
La conquête et la perte de l’autonomie dans le domaine économique ; le développement des
cultures de rentes ; la politique foncière ; l’impact de la Grande dépression sur les sociétés.
Éviter un trop grand nombre de tableaux statistiques.
Chapitre 15 : L’économie coloniale dans les anciennes colonies françaises, belges et
portugaises

96
Distinguer entre colonies d’agriculture et d’extraction minière ; politique foncière, de la main-
d’œuvre, fiscale et commerciale ; les entreprises étrangères et africaines ; limiter les tableaux
statistiques pour des élèves.
Chapitre 16 : L’économie coloniale : les anciennes colonies britanniques
Comme pour le précédent chapitre
Chapitre 17 : L’économie coloniale : Afrique du Nord
Comme pour les précédents chapitres, mais parler de la diversité régionale, en fonction de la
présence de colons, de minerais, de l’impact des programmes d’irrigation.
Chapitre 18 : Les répercussions sociales de la domination coloniale : aspects démographiques
Discussion sur impacts de la traite en Afrique et aux Amériques, au Moyen Orient ; tendances de
la démographie avant et après l’abolition de la traite ; impact de la politique coloniale en
matière de santé.
Chapitre 19 : Les répercussions sociales de la domination coloniale : les nouvelles structures
sociales
Émergence de nouvelles élites économiques et intellectuelles ; conséquences de l’urbanisation
sur vie associative et sur identité ; formation des syndicats ; voir les spécificités régionales tout
en notant les grandes tendances en Afrique.
Chapitre 20 : La religion en Afrique pendant l’époque coloniale
L’univers religieux des Africains ; importance des églises dissidentes ; compléter les approches
régionales
Chapitre 21 : Les arts en Afrique à l’époque de la domination coloniale
Le texte privilégie l’Afrique de l’Ouest, sauf pour la musique shona ; penser à d’autres régions ;
développer les arts plastiques avec le support d’illustrations ; ajouter poèmes et chants
contestant le pouvoir colonial.
Chapitre 22 : La politique africaine et le nationalisme africain
Synthèse de différents faits étudiés dans les chapitres suivants
Chapitre 23 : Politique et nationalisme en Afrique du Nord-est
Garder le plan distinguant les différentes régions ; le Wafd et la révolution de 1919 ;
l’implantation de la Grande Bretagne en Égypte et au Soudan ; La ligue du drapeau du Soudan ;

97
idée de l’Unité de la vallée du Nil ; renaissance du mahdisme au Soudan ; le rôle des jeunes
intellectuels.
Chapitre 24 : Politique et nationalisme au Maghreb et au Sahara
Guerre et résistance passive au Maghreb ; réformisme musulman ; action des syndicats ; l’élite
et la presse nationaliste ; impact de la Grande guerre et de la crise sur les mouvements
anticoloniaux.
Chapitre 25 : Politique et nationalisme en Afrique occidentale
Inclure les colonies portugaises ; impact de la Grande guerre et de la crise sur le développement
du nationalisme ; développement des syndicats, des partis, des associations d’étudiants et de la
presse ; les mouvements qui s’étendent à toute l’Afrique de l’Ouest.
Chapitre 26 : Politique et nationalisme en Afrique orientale
Insister sur le rôle des associations des jeunes ; parler de millénarismes mais aller vite sur les
nouvelles églises mieux représentées en Afrique du Sud
Chapitre 27 : Politique et nationalisme en Afrique centrale et méridionale
Pour l’Afrique du Sud : ANC et églises africaines ; pour Congo Belge : les grèves dans les régions
minières ; dans les colonies portugaises : la résistance au travail forcé et le rôle des
intellectuels ; simplifier les cartes.
Chapitre 28 : Éthiopie et Libéria : deux États africains indépendants à l’ère coloniale
Pour le Libéria : intervention des puissances occidentales et de la SDN, implantation de
Firestone ; pour l’Éthiopie : intervention de la SDN, modernisation et conservatisme, l’agression
italienne.
Chapitre 29 : L’Afrique et le Nouveau Monde
Mouvements de retour à l’Afrique (Marcus Garvey) ; mouvements panafricains ; les
organisations de toutes sortes qui font le lien entre l’Afrique et les Amériques ; la diaspora
africaine. Il faudrait illustrations sur les congrès panafricains et les leaders de la diaspora en
Europe et aux Amériques.

98
Volume VIII

L’Histoire Générale de l’Afrique: L’Afrique depuis 1935


Directeur de volume : A.A. Mazrui, Codirecteur : C. Wondji

Chapitre 1 : Introduction
Cet ouvrage couvre la période de 1935 (invasion de l’Ethiopie par l’Italie) à nos jours ; cette
période est aussi celle de l’intégration active de toutes les régions de l’Afrique au système
monde avec ce que cela implique comme mutations, adaptations et prise de conscience.
Les nouvelles identités et aspirations ont favorisé l’émergence d’une volonté d’intégration
économique et l’expression du panafricanisme largement discuté. Une des volontés de l’écriture
dans le présent volume est la reconnaissance du poids des femmes dans l’histoire et une remise
en cause de la vision classique de l’histoire dont les objets portent sur le politique et le militaire,
les événements et des époques. C’est plutôt la perspective de l’histoire problème privilégiant
l’analyse des faits, de leurs conséquences socio-culturelles et économiques.
SECTION I : L'AFRIQUE DANS LA DÉCENNIE DE CONFLITS MONDIAUX 1935-1945
Chapitre 2 : La corne de l'Afrique et l'Afrique septentrionale
Chapitre 3 : L'Afrique tropicale et l'Afrique équatoriale sous la domination française, espagnole
et portugaise
Chapitre 4 : L'Afrique sous domination britannique et belge
L’analyse porte sur la Corne de l’Afrique, l’Afrique du Nord et les deux crises majeures que ces
régions ont connu (la Grande Dépression et la seconde Guerre mondiale) et leur corollaire, les
défis économiques et politiques. Les économies reposent essentiellement sur des industries
extractives très sensibles aux cours mondiaux des matières premières.
Au niveau social, ces régions amorcent la transition démographique et connaissent une
explosion de leur population dès 1930 ainsi que de forts courants migratoires. Au niveau
politique, ces régions sont traversées par de forts courants nationalistes avec comme
conséquences des crises avec les puissances coloniales et des revendications d’indépendance.
Les métropoles coloniales ont eu des réactions différentes du fait de leur mode de
gouvernement des territoires. Le Portugal, très ségrégationniste a renforcé les servitudes
(travail forcé, impôts…), attisé les tensions raciales durant les périodes de crises économiques

99
par l’installation des portugais pauvres dans les colonies. La France a également opéré, sous
Vichy, un durcissement des conditions de vie des populations qui seront largement mobilisées
par la suite pour participer aux campagnes de libération de la métropole. Le régime tantôt
répressif, tantôt méfiant sera dirigé contre les communautés religieuses notamment les
confréries musulmanes. Les avancées syndicales entraînent des luttes sur les exploitations
économiques lesquelles sont relayées dans l’opinion par la presse. Aussi la Conférence de
Brazzaville apparaît en porte à faux avec le contexte, dans le sens que celle ci visait à préserver
lempira. La Belgique avec une politique paternaliste n’a pas eu de perspectives d’extension des
droits politiques aux Africains contrairement à la Grande Bretagne qui, après la guerre s’est
fixée pour objectif de déléguer aux africains la représentation politique, sauf dans les cas de la
Rhodésie et de l’Afrique du Sud.

SECTION II : LA LUTTE POUR LA SOUVERAINETÉ POLITIQUE, DE 1945 AUX INDEPENDANCES


Chapitre 5 : Cherchez d'abord le royaume politique...
Chapitre 6 : L'Afrique septentrionale et la corne de l'Afrique
Chapitre 7 : L'Afrique occidentale
Chapitre 8 : L'Afrique équatoriale de l'Ouest
Chapitre 9 : L’Afrique orientale
Chapitre 10 : L’Afrique australe
Cette section s’ouvre avec un chapitre consacré aux concepts politiques, philosophiques et
religieux des luttes de libération. Les organisations politiques d’entre les deux guerres étaient
composées de l’élite africaine urbanisée regroupée dans les syndicats et les associations.
L’agitation anti-coloniale s’est peu à peu étendue au milieu rural et à la diaspora très active dans
la propagation du discours panafricain.
Les chapitres 6 à 10 abordent selon une approche régionale, l’histoire des colonies, puis celle
des Etats africains de 1935 au milieu des années 80. Il y a un caractère répétitif des informations
développées à travers ces chapitres. De manière globale, on note un activisme des populations
africaines avec une amplification des grèves, de la lutte politique en Afrique du nord surtout
après la débâcle française en Indochine. En Algérie, la lutte armée est engagée à cause de

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l’intransigeance de la France, des enjeux pétroliers, géo-stratégiques et économiques
immenses. Cette guerre de libération et les conflits entre l’Egypte, la Libye et les puissances
coloniales suscitent le soutien de l’URSS, des organisations musulmanes et arabe (Frères
musulmans) et des pays non-alignés Au Soudan, c’est le conflit Nord-Sud attisé par les
Britanniques qui prend le dessus. Le voisin éthiopien, lui se libère de la domination italienne
pour passer sous administration britannique et absorber l’Erythrée. Alors que la Somalie sous
l’impulsion de l’intelligentsia tente une improbable union qui connaitra des soubresauts. De
manière générale, la situation dans les colonies britanniques d’Afrique est marquée par la
montée du nationalisme, le rôle des syndicats, le leadership affirmé de l’élite instruite et un
engagement panafricaniste très fort. Cette situation contraste avec celle des Francophones
plutôt engagés dans des stratégies fédéralistes. Les colonies belges sous la direction d’une
bourgeoisie naissante est moins encline à la contestation alors que les colonies portugaises sont
soumises, au lendemain de la guerre, à une répression malgré la mobilisation de la population.
En Afrique australe, les politiques de ségrégation en Afrique du Sud et au Rhodésie tranchent
d’avec la situation qui prévaut dans les autres colonies.

SECTION III : LE SOUS-DÉVELOPPEMENT ET LA LUTTE POUR L'INDÉPENDANCE ÉCONOMIQUE


Chapitre 11 : Les changements économiques en Afrique dans le contexte mondial (1935-
1980)
Chapitre I2 : L'agriculture et le développement rural
Chapitre 13 : Le développement industriel et la croissance urbaine
Chapitre 14 : Stratégies comparées de la décolonisation économique

L’intégration de l’Afrique dans le système capitaliste international se renforce avec les formes
nouvelles d’impérialisme, une diversification des relations multilatérales et l’attrait de nouveaux
partenariats autres que les relations avec les anciennes métropoles coloniales. L’Afrique post-
indépendance n’a pas défini une stratégie uniforme visant une décolonisation économique. Elle
est sans stratégie cohérente de développement avec des économies concentrées sur des
paramètres économiques néo-classiques.

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Les rares politiques d’industrialisation (faites de peu ou pas d’industrie produisant des produits
finis et de consommation locale) n’enrayent pas la structure extravertie de l’économie. Cette
extraversion tient surtout au fait que les entreprises agricoles et minières sont financées et
gérées par les étrangers et une main d’œuvre locale utilisée dans la production de matières
premières destinées à l’exportation et des structures commerciales désavantageuses pour le
continent. Au niveau social, c’est la montée en flèche du prolétariat que les syndicats canalisent
plus ou moins et l’afflux incontrôlé vers les villes où la pauvreté explose. Bref, « le capitalisme
est venu en Afrique sans l’éthique protestante du travail et de la frugalité ».

SECTION IV ÉVOLUTION SOCIOPOLITIQUE DEPUIS LES INDÉPENDANCES


Chapitre 15 : Construction de la nation et évolution des structures politiques
Chapitre l6 : Construction de la nation et évolution des valeurs politiques
Cette section cherche à trouver des réponses à la question fondamentale de la nation. Que
renferme t-elle ? Quelle est l’attitude des populations dans le jeu des constructions identitaires
notamment face au legs de la colonisation ? Qu’est-ce qui participe à la construction des états
modernes ? Bref, sont scrutés dans ces chapitres les marqueurs identitaires, les symboles des
états africains ainsi que leurs avatars tout comme leurs tentatives d’intégration. On arrive à
l’analyse des ingrédients du nationalisme avec leur corollaire, l’idéologie de l’état nation, la
religion, l’ethnicité, le territoire, et la race/civilisation. Cette production du politique ne fait pas
l’impasse sur les constructions idéologiques (socialisme africain, nassérisme, Ujamaa…) ou
l’adaptation de formules politiques connues et pensées ailleurs.
SECTION V CHANGEMENTS SOCIOCULTURELS DEPUIS 1935
Chapitre 17 : Religion et évolution sociale
Chapitre 18 : Langue et évolution sociale
Chapitre 19 : Le développement de la littérature moderne
Chapitre 20 : Les arts et la société depuis 1935
Chapitre 21 : Tendances de la philosophie et de la science en Afrique
Chapitre 22 : Education et changement social
Cette section qui fait la synthèse de chaque thème se veut informative. Le chapitre 20 le plus

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développé avec une approche très érudite campe assez bien la situation. Ce qui est assez bien
mis en lumière, c’est le caractère non prosélyte des religions traditionnelles africaines
contrairement aux religions monothéistes parce qu’elles sont une composante de la vie
africaine même si elles perdent du terrain au profit des religions révélées à cause de la
dimension sociale de ces dernières (surtout dans les villes). L’acculturation liée aux modes
d’éducation en vigueur axés sur le modèle Occidental accélère leur disparition. L’éducation
s’appuyant sur les trois modèles : indigène, Islamique et Afro-Chrétien est supplantée par
l’école moderne dans les années 1930 avec des enseignements en langues européennes plutôt
qu’en Arabe ou en d’autres langues africaines. Ce qui pose le problème de développement des
langues africaines, étant donné que l’élite avait un avantage à utiliser la langue du colonisateur
laquelle transcende les frontières ethniques. Malgré le danger des politiques coloniales
d’assimilation, les langues africaines doivent leur survie à la rupture en douceur d’avec le passé.
Elles enrichissent la littérature mondiale par les emprunts qu’elles autorisent et assurent
l’épanouissement de la littérature africaine. Cette dernière sait mettre en valeur les savoirs
locaux et autres expertises qui sont au fond des connaissances sociale plutôt qu’individuelles.
Elles sont sous-tendues par la philosophie en Afrique que l’on peut diviser en trois catégories :
- Culturelle, enracinée dans les traditions indigènes ;
- Idéologique, « conçue pour régir l’action politique et définir les objectifs » ;
- Critique, plus académique que politique, plus rationaliste que nationaliste.
SECTION VI LE PANAFRICANISME : LIBÉRATION ET INTÉGRATION DEPUIS 1935
Chapitre 23 : L'Afrique et la diaspora noire
Chapitre 24 : Le panafricanisme et l'intégration régionale
Chapitre 25 : Panafricanisme et libération
Cette section met l’accent sur l’activisme déployé par la première Diaspora noire pour rétablir
des liens avec le continent africain (congrès panafricain, études sur l’Afrique, festival…). Sa
démarche qui se situe largement au-delà de la quête identitaire, promeut le panafricanisme et
soutient les mouvements de libération. La perception des choses par cette première Diaspora
est différente de celle de la nouvelle Diaspora consécutive aux mouvements migratoires
récents. L’installation de cette dernière résulte de l’oppression économique et politique exercée

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dans les colonies (en particulier celles de l’Afrique du Nord et les colonies Belges) ou liée à
séjours d’études. Cette migration des professionnels hautement qualifiés, des réfugiés
économiques et politiques ne confine pas à l’Europe et à l’Amérique du Nord seulement mais
elle est surtout diffuse sur le continent. La section se termine sur les conditions ayant présidé à
la naissance de l’OUA et surtout du contenu de sa Charte et des principes qu’il défend.
SECTION VII L'AFRIQUE INDÉPENDANTE DANS LES AFFAIRES MONDIALES
Chapitre 26 : L’Afrique et les pays capitalistes
Chapitre 27 : L’Afrique et les pays socialistes
Chapitre 28 : L’Afrique et les régions en développement
Chapitre 29 : L'Afrique et l'Organisation des Nations Unies
Chapitre 30 : L'horizon 2000
Postface : Chronologie de l’actualité de l'Afrique des années 90
Cette section examine le soutien soviétique et chinois aux pays africains soutendu par des
considérations idéologiques et stratégiques. Ce soutien, côté soviétique s’est fait notamment à
travers l’Internationale communiste, le Komintern et par l’intermédiaire des étudiants africains
radicaux dans les universités occidentales. L’appui matériel et diplomatique Soviétique au
mouvement anticolonial est allé grandissant, à travers les accords de coopération post-
indépendance, surtout dans l’enseignement. La solidarité idéologique, la rivalité avec l’URSS et
les intérêts personnels ont été à la base des relations avec la Chine très engagée dans le soutien
aux mouvements de guerilla.
Le mouvement des Non- Alignés regroupant principalement les pays du ”Tiers Monde” se révéla
un espace de coopération très actif dans la décolonisation du continent et sur les questions de
racisme. Les relations entre l’Afrique et le Monde Arabe se fondent sur le fait que le continent
abrite la plus grande partie du monde arabe. Cette solidarité active s’est manifestée au cours de
l’embargo contre le Portugal, la Rhodésie et l’Afrique du Sud. Les états Latino- Américains et
Caribéens (la plupart des pays Caribéens possédant des majorités noires) cultivent les liens avec
les Etats africains à travers le Panafricanisme et la négritude mais avec souvent des positions
ambiguës dans la défense des intérêts de l’Afrique.
Les relations de partenariat avec les Nations unies sont tour à tour analysées ainsi :

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- Les Nations unies comme « impérialistes bienveillantes »
- Les Nations Unies comme « alliées de la libération »
- Les Nations Unies comme « partenaires au développement »
La gestation de l’ouvrage ayant pris énormément de retard, un chapitre de mise à jour
notamment au niveau de l’historiographie s’est imposé ; l’artifice du tableau chronologique
permet de faire le lien avec des événements contemporains à la publication.
Analyse Critique et suggestions
Ce volume, dernier de la série, souffre d’être daté au moment même de sa sortie à fortiori de
nos jours. Des problèmes d’édition ont en partie joué mais également la méthodologie utilisée
dans certains chapitres pose des problèmes. Aussi, sa révision devrait couvrir plus que les
évènements mais également les thèmes émergents et les méthodes, par exemple, les questions
de genres, c’est-à-dire, l’histoire du genre plutôt que seulement l’histoire des femmes, les
minorités.
La plupart des chapitres manquent de matériel d’illustration, particulièrement les photos et les
cartes si utiles à l’enseignement.
L’analyse critique qui a été faite de ce volume par les évaluateurs est très fournie. Des
suggestions ont été faites pour la mise à jour de nombreux chapitres.
L’adaptation pédagogique de plusieurs chapitres relève d’un vrai défi du fait de leur caractère
polémique ou tendancieux pour l’historiographie actuelle.
Des suggestions à caractère pédagogique ont été faites par les évaluateurs au niveau de chacun
des chapitres du volume.

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OBSERVATIONS du Coordinateur
La synthèse générale des rapports de relecture de l’H.G.A appelle quelques remarques relatives
à l’œuvre elle-même et à la perspective de son utilisation pédagogique. Il est important de
rappeler quelques unes des caractéristiques principales de l’Histoire Générale de l’Afrique
identifiables à travers tous les rapports. L’approche adoptée pour l’élaboration de l’Histoire
Générale de l’Afrique est d’abord régionale. Les dynamiques de formation des entités régionales
(dont la plupart recoupe les sous régions actuelles) sont mises en lumière dans la perspective
d’une Histoire continentale. L’Histoire du continent s’inscrit elle même dans l’Histoire mondiale
depuis ses origines et ensuite par le biais des Diasporas à la suite des différentes traites des
esclaves, notamment la traite atlantique.
Cette démarche globale devrait être prise en considération dans l’Utilisation Pédagogique de
l’œuvre. L’utilisation optimale de toutes les sources notamment africaines fait appel à
l’interdisciplinarité seule susceptible de permettre la restitution d’une Histoire globale et d’en
faciliter la compréhension.
Un certain nombre d’idées forces traversent l’ensemble de l’œuvre :
- La centralité de l’Afrique d’abord : en tant que berceau de l’humanité et du fait de sa situation
et de ses relations d’échanges continus avec les autres régions du monde.
- L’unité culturelle des civilisations africaines, au delà de la diversité des situations (illustrant
des développements locaux) expressions de la créativité des africains.
- La continuité de l’Histoire africaine au-delà des ruptures induites par la traite atlantique des
esclaves et la colonisation. Cette continuité est due aussi et surtout à la capacité des africains à
résister, à produire et à se régénérer même dans des situations extrêmes.
Parmi les thèmes transversaux dont le traitement permet d’étayer ces thèses, des questions
telles que celles relatives aux techniques (invention et diffusion) à la circulation des savoirs,
l’Histoire du peuplement, la formation continue des communautés ethno-culturelles, la
formation des Etats, ont été abordées pour chacune des régions. La thématique de l’Etat est si
prégnante que les espaces n’ayant pas connu d’états « centralisés» sont quelques fois oubliés,
ou moins bien couvertes.
Un des problèmes qui ressort de la lecture des rapports est celui de la chronologie, ou plus

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exactement de la périodisation de l’Histoire africaine. Il s’agit de l’un des problèmes récurrents
de la recherche historique africaine.
La question de la pertinence des repères chronologiques utilisés au regard des dynamiques
internes africaines reste posée.
Dans la perspective de l’utilisation pédagogique de l’Histoire Générale de l’Afrique, le débat
devra porter sur les périodes ou les séquences historiques à retenir et le type de chronologie qui
serait enseigné. Une autre question que l’on croyait résolue, celle relative à la « race »,
mériterait de l’avis de certains évaluateurs, une mise au point quant au concept lui-même et ses
relations avec les cultures et les langues.
Il y’a enfin la question de la réception de l’œuvre par les jeunes à qui sont destinés les contenus
d’enseignement. Il ne serait pas inutile pour répondre à cette question de partir de la préface de
A.M. MBow qui fixait les objectifs de l’Histoire Générale de l’Afrique. On pourrait alors
s’interroger sur l’adéquation de ces objectifs avec les besoins de formation des jeunes
d’aujourd’hui en tenant compte de l’état du monde et des grandes tendances qu’on peut y
observer.

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