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CULTURE ESPAGNOLE

ÉVALUATION
Evaluation continue certificative. Pas d’examen en juin. Tous les tra- - un compte-rendu articulé de l’activité elle-même (10-20 lignes)
vaux ont lieu pendant le quadrimestre. En outre 10 % de la note finale : résumé de l’activité, contexte ou justification de la relation
est attribué à la participation en classe. avec la culture espagnole, analyse : qu’est-elle la valeur cultu-
relle de cette activité ?
3 activités prise de contact avec la culture espagnole. Ça peut être - un glossaire contenant le vocabulaire et les expressions spéci-
trois fois le même. La présentation de l’activité est la suivante : fiques au domaine de l’activité
- la fiche technique de l’activité (référence complète : titre, au- Un examen de contenu en classe le 20 avril durant l’heure de cours.
teur, date…)
I. GÉOGRAPHIE ET DÉMOGRAPHIE
1. DONNÉES GÉOGRAPHIQUES B. RELIEF : LES CHAÎNES DE MONTAGNE

A. GÉNÉRALITÉS
L’Espagne s’étend sur 505 000 kms² au sud-ouest de l’Europe. Elle
occupe la plus grande partie de la péninsule Ibérique, qu’elle partage
avec le Portugal. Elle partage ses frontières avec la France, le Portu-
gal et le Maroc au Sud.

Elle est bordée par la mer Méditerranée à l’Est, la mer Cantabrique


au Nord et l’Océan Atlantique à l’Ouest. Elle est séparée de l’Afrique
de seulement 14 kms au détroit de Gibraltar.

L’Espagne possède également l’archipel des Baléares, à l’est de ses


côtes méditerranéennes, ainsi que l’archipel des Canaries dans
l’Atlantique, au large des côtes du Maroc. Sur la côte méditerra-
néenne, elle possède deux territoires enclavés au Maroc : Ceuta et
Melilla.

L’Espagne appartient au monde méditerranéen de par son histoire,


sa culture et son milieu physique.
Outre les Pyrénées, l’autre massif principal de l’Espagne est la Sierra Les autres massifs montagneux sont :
Nevada (Grenade). La plus grande partie de l’Espagne est occupée
par les plateaux de la Meseta au centre, bordés par des chaînes de - Au Nord :
montagnes. o Macizo Galaico
o Cordillera Cantábrica (Monts Cantabriques) ;
Le point culminant de l’Espagne continentale est le mont Mulhacén o Pyrénées : ( point culminant : Pic d’Aneto 3.404 m) ;
(3.478m) dans la Sierra Nevada. o Picos de Europa (2.648 m) ;
o Cordillera Ibérica (Monts ibériques) (poin culminant : Mont
Moncayo 2.313 m)
o Sierra de Gredos (2.592 m) – Sistema Central
- Au centre :
o Somosierra (Nord de Madrid)
o Sierra del Guadarrama (Nord de Madrid)
o Serranía de Cuenca
o Montes de Toledo (La Mancha)
- Au sud :
o Sierra Morena (Nord de l’Andalousie)

Le point culminant de l’Espagne est le Teide (3.718m), un ancien vol-


can dans les îles Canaries.
C. HYDROLOGIE régions sont menacées en été par les incendies, les feux de forêt, et
en automne par les crues, les inondations. Ce sont les régions les
Les principaux fleuves qui coulent en Espagne sont : plus chaudes et les plus ensoleillées (avec les Canaries).
- Le Tage (1006 Km) => variation climatique importante entre les différentes régions.
- L’Ebre (928 Km)
- Le Douro (850 Km) E. BIOGÉOGRAPHIE
- Le Guadiana (744 Km)
- Le Guadalquivir (657 Km) 14 parcs nationaux où la nature est protégée :

Le littoral : - Parque Nacional de Aigüestortes i Estany de Sant Maurici, Ca-


talogne
- Costa Brava (Cataluña) - Parque Nacional del Archipiélago de Cabrera, Baléares
- Golfe de Valence - Parque Nacional de Cabañeros, Castille-La Manche
- Costa Blanca (Alicante, Benidorm) - Parque Nacional de la Caldera de Taburiente, La Palma, Ca-
- Costa del Sol (Málaga, Marbella) naries
- Golfe de Cadix - Parque Nacional de Doñana, Andalousie
- Golfe de Gascogne (Golfo de Vizcaya) - Parque Nacional Garajonay, île de La Gomera, Canaries
- Parque Nacional de las Islas Atlánticas de Galicia, Galice
D. LE CLIMAT - Parque Nacional Ordesa y Monte Perdido, Aragon
- Parque Nacional Picos de Europa, Asturies, Castille et León,
Au nord : climat océanique (pays basque espagnol, Cantabrie, Astu-
Cantabrie
ries, Galice). Ce sont les provinces qui reçoivent le plus de précipita-
- Parque Nacional Sierra Nevada, Andalousie
tions en un an (Galice entre 1800 et 2000 mm/an)
- Parque Nacional de las Tablas de Daimiel, Castille-La Manche
Au centre : climat - Parque Nacional del Teide, île de Tenerife, Canaries
semi-continental - Parque Nacional Timanfaya, île de Lanzarote, Canaries
(région de Madrid,
Castille-La
Manche). Ce sont
les régions les plus
froides (avec les
Pyrénées)

A l’est et au sud :
climat méditerra-
néen, voire aride
par endroits. Ces
2. GÉOGRAPHIE DES TRANSPORTS

A. LE TRANSPORT FERROVIAIRE DE VOYAGEURS


La péninsule est desservie par les trains de haute vitesse type TGV
appelés AVE (Alta Velocidad Espanola). La première ligne reliait Ma-
drid à Séville et fut inaugurée en 1992 à l’occasion de l’exposition
universelle de Séville.

En 1992 a lieu l’ouverture de la première ligne à grande vi-


tesse (AVE), entre Madrid et Séville. Avec le double objec-
tif de relier les aires urbaines du pays entre elles et avec
l’Europe, les différents gouvernements ont effectué le pari
de la grande vitesse ferroviaire. Nourrissant peu d’espoir
de redresser une situation du fret difficile car extrêmement
marginale sur le marché du transport de marchandises,
les dirigeants politiques se focalisent sur le transport à
grande vitesse de voyageurs. L’équivalent de la SNCB est RENFE (Red Nacional de Ferrocariles
Españoles). Elle concurrence l’avion car les distances en Espagne
Ainsi, alors que le choix de création de la première ligne à sont très longues. Le train pollue moins et est plus rapide (il ne faut
grande vitesse aurait dû se porter sur la liaison Madrid- pas s’enregistrer). C’est donc une option très populaire, bien qu’elle
Barcelone, puis sur une liaison avec la frontière française, ne soit pas bon marché.
c’est Madrid-Séville qui a pourtant été choisie. Cette déci-
sion s’explique par le fait que la capitale de l’Andalousie
accueillait en 1992 l’exposition universelle.

Cette ligne, même contestée au départ, s’est avérée être


un succès pour la RENFE, (Red Nacional de Ferrocarriles
Españoles). Elle est devenue très rapidement rentable. En
quinze ans, (1992 - 2007), la RENFE y a transporté 81
millions de clients. La ponctualité des trains a été de
l’ordre de 99,6%. Avec l’élévation de la vitesse commer-
ciale de 250 à 300 km/h, l’ensemble du trajet Madrid-
Séville ne dure plus que 2h15. Ainsi, dans sa concurrence
avec l’avion, l’AVE capte plus de 80% des parts de mar-
ché, contre 20% pour l’aérien.
B. LE TRANSPORT MARITIME
Les principaux ports maritimes sont Bilbao, Tarragone et Algésiras.
Cette dernière est la porte de l’Afrique : des ferries la relient à Tanger
au Maroc.

D. LE TRANSPORT ROUTIER
Le réseau d’autoroutes espagnol est divisé entre

- autoroutes (autopistas) à concession et à péage


- voies express (autovías) gratuites et entretenues par l'État.

Le gouvernement espagnol entend rendre gratuites les autoroutes à


l’échéance de leurs concessions. Cette mesure permettra de partici-
C. LE TRANSPORT AÉRIEN per à l’amélioration la sécurité routière et au désengorgement du ré-
seau routier national. En 2021, 500 km ont été rendus gratuits.
Les 5 aéroports les plus fréquentés en 2019 sont : Seules 18 % des autoroutes sont payantes (3.307 kilomètres).
- Madrid Barajas (61 millions de passagers) Le réseau des autoroutes rayonne à partir de Madrid. Les autres
- Barcelone (53 millions de passagers) voies importantes empruntent le littoral et les vallées fluviales.
- Palma de Majorque (29 millions de passagers)
- Málaga-Costa del Sol (19 millions de passagers) Il y a également les Carreteras nacionales et comarcales qui relient
- Alicante (15 millions de passagers) les provinces et les villages.

L’Espagne étant une destination touristique très importante, les aéro-


ports les importants sont évidemment ceux des régions touristiques
Ces « Communautés autonomes » sont reconnues par la Constitution
espagnole de 1978. Celle-ci prévoit que les statuts sont la norme ins-
titutionnelle fondamentale de chaque Communauté et que l'État les
reconnaît et les protège comme partie intégrante de son ordre juri-
dique :

« La Constitution est fondée sur l'unité indissoluble de la


nation espagnole, patrie commune et indivisible de tous
les Espagnols. Elle reconnaît et garantit le droit à l'auto-
nomie des nationalités et des régions qui la composent et
la solidarité entre elles. »

L'organisation des institutions autonomes est fondée sur une assem-


blée législative élue au suffrage universel, conformément à un sys-
tème de représentation proportionnelle

Les compétences non exclusives de l'État peuvent être assumées par


les Communautés autonomes. Certaines communautés autonomes
possèdent de puissants particularismes linguistiques, culturels et
économiques (c’est le cas notamment de la Catalogne et du Pays
3. ORGANISATION POLITIQUE
Basque) qui les poussent vers toujours plus d’autonomie. La question
A. LES COMMUNAUTÉS AUTONOMES (CC.AA.) de l’unité de l’Espagne en tant que nation se trouve ainsi posée.

L’Espagne est divisée en 17 communautés autonomes. Ce sont des Si une Communauté autonome ne remplit pas les obligations que la
Etats fédérés, avec une autonomie politique, le droit de gérer leur Constitution et la loi lui imposent ou si elle agit d'une façon qui nuit
propre budget et gravement à l'intérêt général de l'Espagne, le gouvernement, après
l’enseignement, mais une mise en demeure au président de la Communauté autonome et
dépendent de l’état avec l'accord de la majorité absolue du Sénat, peut prendre les me-
pour plusieurs af- sures nécessaires pour obliger cette Communauté à l'exécution for-
faires. les compé- cée de ses obligations ou pour protéger l'intérêt général mentionné.
tences cédées par
Les Communautés autonomes jouissent de l'autonomie financière
l'État central peuvent
pour le développement et la mise en œuvre de leurs compétences,
varier et que les
conformément aux principes de coordination avec les finances de
termes « indépen-
l'État et de solidarité entre tous les Espagnols. Elles peuvent agir
dance » et « fédéral »
comme déléguées ou collaboratrices de l'État pour le recouvrement,
sont très discutés en
la gestion et la liquidation des ressources fiscales de celui-ci. Les
Espagne.
ressources des communautés autonomes sont constituées par :
- les impôts cédés totalement ou partiellement par l'État
- leurs propres impôts,
- des opérations de crédit : l’émission d’emprunts publics

Afin de corriger les déséquilibres économiques entre les territoires et


de rendre effectif le principe de solidarité, un fonds de compensation
est constitué pour financer des dépenses d'investissement, le cas
échéant, ces ressources sont distribuées par les Cortès générales
entre les communautés autonomes et les provinces.

- La Communauté Autonome la plus vaste est la Castille-et-


León.
- La Communauté Autonome la moins étendue est celle des Ba-
léares.
- La Communauté Autonome la plus peuplée est l'Andalousie
alors que c'est La Rioja qui compte le moins d'habitants.
- Richesse par habitant : Pays basque, Navarre et Communauté
de Madrid ;
- En ce qui concerne le PIB, en 2020, Madrid est première et La
Rioja dernière.

Plusieurs communautés autonomes ont leur propre langue co- 4. DÉMOGRAPHIE ET DENSITÉ DE POPULATION
officielle (catalan, galicien, valencien et basque). On peut tout faire
dans les deux langues dans ces espace- là. Contrairement à la Bel- A. POPULATION
gique, les Espagnols ne doivent pas apprendre les langues des
autres communautés (si ce n’est le castillan…).

B. LES PROVINCES
Certaines communautés sont divisées en province (50). Il y a égale-
ment deux villes autonomes : Ceuta et Melilla.
L’évolution démographique tend à la croissance, cependant on cons- Pyramide large chez les personnes âgées, surtout chez les femmes,
tate une diminution en 2021 (tendance globale suite au COVID). alors que la base de la pyramide est moins grande, de manière assez
Cette décroissance est aussi liée au fait qu’il y a moins d’immigration marquée. Ce vieillissement de la population n'est pas sans poser de
en raison de la crise économique. problèmes, tant en matière d'emplois que de redistribution sociale
avec, notamment, la question du paiement des retraites.
El INE = instituto nacional de statistica.
Jusque dans les années 70’, l’excédent des naissances sur les décès
était d’environ 10% chaque année. Le pays n ́a pas été meurtri par
les deux guerres mondiales mais a été pendant longtemps touchée
par l’émigration, jusque dans les années 1970-1980. El INE a enre-
gistré pour la première fois, à partir de 2012, une diminution de sa
population comme conséquence de la crise qui frappe l'Espagne de-
puis 2008.

Il y a 47 millions d’habitants, avec un peu plus de femmes que


d’hommes (tendance globale).

B. PYRAMIDE DE LA POPULATION

L’espérance de vie commence à diminuer. C’est une tendance géné-


rale, mais c’est en Espagne que cette différence est la plus marquée
(en Europe).
La plupart des gens vivent en villes. Seuls 13% du territoire sont habi-
tés. La raison est culturelle : les Espagnols apprécient la vie en com-
munauté et préfèrent vivre tous ensembles.

Avant 1980, l'Espagne de l'intérieur se dépeuplait au profit des péri-


phéries atlantiques et méditerranéennes. Le peuplement se concen-
trait alors essentiellement sur quatre aires principales : la Catalogne,
le Pays basque, Valence et Madrid). Mais, depuis le début des an-
nées 1980, ce schéma tend à disparaître au profit des capitales des
différentes communautés autonomes et des grandes aires métropoli-
taines avec, notamment, une multiplication des cités satellites autour
des grandes villes ; tandis que le centre du pays est peu peuplé

Ce phénomène n’est pas seulement démographique mais aussi poli-


tique et a donné naissance aux concepts d’España llena et vacia. Les
zones très peu peuplées n’ont pas accès aux mêmes services et ne
La rapide sécularisation de la société espagnole au sortir de plusieurs jouissent pas d’une bonne représentation politique. La région de Cas-
décennies de dictature franquiste, la libéralisation des mœurs et de la tilla y León est particulièrement vide. Aux dernières élections de cette
législation (légalisation du divorce depuis 1981, légalisation partielle région, le parti España vaciada a eu un succès assez important.
de l'avortement en 1985, totale en 2010, légalisation du mariage ho-
mosexuel en 2005...) ont largement contribué à modifier les struc- D. TAUX DE FÉCONDITÉ
tures traditionnelles de la famille espagnole :

- multiplication des familles monoparentales ou sans enfant,


- recul de l'âge du mariage, augmentation des divorces
- augmentation de la vie en couple hors mariage.

C. DENSITÉ
5. L’ESPAGNE, TERRE DÉMIGRATION, TERRE
D’IMMIGRATION

A. L’IMMIGRATION ESPAGNOLE EN BELGIQUE

Il est le plus bas d’Europe


avec une moyenne de 1,24
enfant par femme. Les
jeunes ont des jobs pré-
caires ce qui rend leur indé-
pendance difficile. Ils restent
généralement avec leurs
parents ou en collocation =>
difficile de fonder une famille
dans ces conditions. Le fait
d’avoir des enfants tard ré-
duit aussi le nombre
d’enfants. De même, la di-
L’arrivée des Espagnols en Belgique s’est faite en deux phases :
minution de l’immigration
joue un rôle. - La première phase (1945-1956) est caractérisée par l’arrivée
des premiers travailleurs espagnols dans les mines belges. La
L'Espagne doit 80 % de
majorité de ces immigrés ont quitté leur pays pour des raisons
l'augmentation de sa popula-
politiques, pour fuir le régime dictatorial du général Franco. A
tion à son solde migratoire
l’époque, la Belgique a besoin de main-d’œuvre dans ses
(cf. infra).
mines. Les immigrés espagnols se sont tout d’abord installés
dans les régions minières de Liège, du Hainaut et du Lim-
bourg.
- La deuxième phase (1957- 1965), encouragée par le gouver-
nement espagnol, acculé par une crise économique, est mar-
quée par l’arrivée des premiers immigrés assistés. Les immi- espagnol. En 2018, le pays accueillait 38% des migrants qui traver-
grés assistés sont des travailleurs recrutés en Espagne selon saient la mer Méditerranée
les modalités définies par la convention de migration entre les
deux pays. Un total de 7.273 immigrés est ainsi arrivé en Bel- A noter la différence entre un immigrant et un expat. Cette différence
gique. A Bruxelles, dans les années 60, les espagnols vien- est d’ordre sociologique. L’expat est payé par sa boite et reçoit géné-
nent s’installer à Saint-Gilles, qui est alors devenu le lieu de ralement des avantages de celle-ci.
prédilection pour les nouveaux arrivants. Pour moitié origi- El salto de la valla est un grand mur entre l’Espagne et le Maroc pour
naires des Asturies et d’Andalousie, les immigrés espagnols empêcher le passage des migrants. Le thème de la migration est très
se concentrent autour de la gare du Midi. Dans ce quartier, ils polémique parmi les Espagnols, d’une part pour l’aspect probléma-
ouvrent d’épiceries, des restaurants et des bars espagnols ce tique du point de vue des droits humains, et d’autre part, on a vu
qui leur permet de se réunir entre compatriotes. En 1970, les émerger en réaction une extrême droite dure.
immigrés espagnols sont au plus fort de leur présence, avec
67.500 personnes, les positionnant comme troisième groupe C. LA CRISE DE 2008 ET LE SOLDE MIGRATOIRE
d’étrangers du pays.

B. L’IMMIGRATION EN ESPAGNE
Pendant plusieurs années, la tendance
s’est inversée et l’Espagne est deve-
nue un pays d’accueil pour les immi-
grants. Cependant, la crise écono-
mique de 2008 et l’augmentation du
chômage ces dernières années ont eu
un effet dissuasif sur les candidats à
l’émigration.

L’immigration clandestine africaine


passe par le détroit de Gibraltar, par les enclaves espagnoles de
Ceuta et Melilla ou encore par les Canaries. Le nombre de clandes-
tins est en forte diminution ces dernières années grâce au renforce-
ment des moyens de contrôle aux frontières et à la collaboration avec
le Maroc, l'Algérie ou le Mali. Après la fermeture de la filière italienne,
les nouvelles routes de l'immigration vers Europe passent par l'Es-
pagne. Les groupes de migrants sont de plus en plus nombreux à L'Espagne est devenue dans les années 2000 un pays d'immigration.
arriver en traversant le détroit de Gibraltar à bord d'embarcations de Elle a accueilli 310 000 migrants en 2008. Cependant, avec l'irruption
fortune et sont souvent sauvés par les gardes côtes espagnols. Tout de la crise économique de 2008, le mouvement d'immigration ralentit,
au long de l'année 2017, 22 000 migrants avaient débarqué sur le sol et s'inverse même, une partie des immigrés désormais sans travail
retournant dans leur pays d'origine. Cette main d’œuvre avait accom- D. L’ÉMIGRATION DES JEUNES
pagné l'essor du secteur du bâtiment puis subi de plein fouet l'écla-
tement de la bulle immobilière. Les Equatoriens, les Colombiens, les La crise économique qui a duré une décennie avait mis la moitié des
Roumains et les Marocains ont été les plus nombreux à partir. jeunes au chômage. Avec la crise de 2008, beaucoup de jeunes Es-
pagnols sont devenus des émigrants eux-mêmes, et sont partis cher-
Le solde migratoire, qui est la différence entre immigrés et émigrants, cher du travail à l’étranger, faute de pouvoir en trouver en Espagne,
a commencé à être négatif à partir de 2010 : l’Espagne bascule de (principalement des jeunes avec un niveau d'instruction élevé)
l’immigration à l’émigration. La tendance est allée en augmentant les
années suivantes. C’est pourquoi, le pays a subi en 2012 sa première Actuellement, près de deux millions et demi d’Espagnols vivent à
baisse de population depuis 1971. Le solde migratoire et le solde na- l’étranger, dont plus de 900.000 ayant émigré depuis le début de la
turel négatif (différence entre naissances et décès), expliquent que, crise. Certains sont partis à contrecœur, parce qu’ils n’avaient pas
entre 2013 et 2014, l’Espagne a perdu plus de 300 000 habitants. d'opportunités en rapport avec leurs études. Le gouvernement espa-
gnol fait de grands pas en avant afin de mettre en place un plan de
Au premier semestre 2014, la population étrangère compte encore retour pour les émigrés souhaitant rentrer dans leur pays natal.
près de 4,5 millions d'immigrés en situation régulière, soit plus de 12 L’objectif est de les aider dans leurs démarches et faciliter le retour
% de la population, ce qui en fait le pays d'immigration le plus impor- des talents qui étaient partis.
tant de l'Union européenne. En 2015 et 2016, la population s’est sta-
bilisée, et sa croissance reste aujourd’hui proche de 0. Parmi les barrières au retour le plus souvent évoquées par ces émi-
grés, on retrouve des obstacles bureaucratiques et logistiques. Ils
Les six premiers mois de 2014, 42.700 espagnols ont quitté le pays. déplorent un manque d'information de la part des autorités, et une
Les principaux pays de destination étaient, dans l’ordre, le Royaume difficulté dans les procédures administratives. Ces personnes ont par
Uni, la France, l’Allemagne et les États-Unis. exemple pu acquérir des diplômes à l'étranger qu’elles ont du mal à
faire valoir en Espagne. Elles ont du mal à toucher le chômage ou
En 2015, après des efforts d’austérité difficiles pour les populations
des aides au logement lorsqu’elles reviennent dans le pays, pendant
les plus fragiles, la croissance économique est toutefois revenue, à
qu’elles sont en recherche d’emploi.
+3,2%, et 600 000 emplois ont été créés.
E. QUESTIONS
La Burbuja imobiliera => nombreuses constructions immobilière au
début des années 2000. Sensation que tous pouvaient acheter une
maison avec le soutien de la banque. Ces maisons n’ont pas pu être
vendues. Il y a des villes fantômes abandonnées au milieu de nulle
part. De nos ours, tendance à les détruire et à construire des espaces
naturels.
II. BRÈVE HISTOIRE DE L’ESPAGNE
L’Espagne est un espace multiculturel. Peuplé par de nombreuses 1. PRÉHISTOIRE
civilisations différentes qui ont apporté leurs propres caractéristiques.
L'Espagne est peuplée dès le paléolithique inférieur, ainsi que l'attes-
tent divers restes de culture troglodyte caractéristiques de l'époque
du Neandertal. Le paléolithique supérieur est marqué par deux impor-
tantes cultures : celles d'Altamira et du Levant espagnol.

Les peuples autochtones du néolithique sont les Ibères et les Tartes-


sos. Pendant l’âge des métaux (du IIIe au Ier millénaire ACN), les
progrès techniques (sparterie, céramique, agriculture, cuivre, bronze
et sans doute même fer) se succèdent. Les témoins les plus remar-
quables sont les bustes de la Dame d'Elche et la Dame de Baza.

2. ANTIQUITÉ

A. LES PHÉNICIENS ET LES GRECS (ÀPD FIN DU IIE MILLÉNAIRE ACN)


Dès la fin du IIe millénaire avant J.-C., l'Andalousie entre dans le cir-
cuit commercial méditerranéen : Phéniciens, puis Grecs viennent y
chercher l'argent, le plomb, le cuivre et surtout l'étain, rare en Orient
et nécessaire à l'industrie du bronze. Ils implantent des comptoirs sur
les côtes.

Les Phéniciens et les Carthaginois s'installent surtout au sud : Gadir


(Cadix), Sexi (Almuñécar), Carteia (Algésiras), Malaca (Málaga), Ab-
dèra (Adra). Mais ils remontent vers le nord, à Lucentum (Alicante),
près du cap Artémision, et à Ebusus (Ibiza, aux Baléares, vers 652 les dernières luttes sont marquées par des résistances farouches :
avant J.-C.). guerre de Numance où les habitants celtibères préfèrent se suicider
quand ils n’arrivent plus à stopper les Romains.
Les Grecs en sens inverse, fondent leurs comptoirs au nord-est (Em-
porion, Rhodê), puis à l'est (Hemeroskopeion, Artémision) et pous-
sent vers le sud ; ils parviennent même, exceptionnellement, à Tar-
tessos. Mais l'expansion des Grecs est brisée par une coalition de
Carthaginois et d'Étrusques (535 avant J.-C.).

Parallèlement à la civilisation côtière, des mouvements de peuples se


produisent à l'intérieur, sous la forme d'une lente infiltration celte à
partir de la Gaule. De la fusion entre Celtes et Ibères est issu le fond
commun « celtibère » de la population ibérique. Ce mélange de cul-
ture fonde les bases de la civilisation autochtone ibérique.

C. L’ESPAGNE ROMAINE
L'importance politique de l'Espagne dans le domaine romain apparaît
dès le premier siècle de la conquête et se prolonge à travers l'empire
Jusqu'en 27 ACN, la Péninsule forme deux provinces, l'Espagne Cité-
rieure au nord-est, l'Espagne Ultérieure au sud et à l'ouest. Puis
l’espace est re-divisé et le nord est conquis et trois autres provinces
sont créées : la Lusitanie, la Bétique et la Tarraconaise.
B. LES CARTHAGINOIS
La paix romaine règne quatre siècles sur la province d’Hispania
Carthage, pour compenser les pertes subies lors de la première jusqu’au début du Ve s. PCN.
guerre punique contre Rome (264-241 ACN), entreprend la conquête
- Une soixantaine d'exploitations minières importantes sont en
de l'Espagne où ils construisent alors la forteresse de Carthago nova
service (fer, plomb, cuivre, zinc, étain, mercure).
(Carthagène). Les Carthaginois prennent Sagonte, alliée de Rome,
- Plusieurs villes dépassent 100 000 habitants (Emerita Augus-
ce qui déclenche la deuxième guerre punique, dès 219 ACN. Pen-
ta, Tarraco, Hispalis, Corduba, c'est-à-dire Mérida, Tarragone,
dant que les Carthaginois combattent en Italie, Rome conquiert l'Es-
Séville, Cordoue).
pagne, et finalement toutes les possessions carthaginoises (Scipion
- Le niveau culturel du pays est à la hauteur de son niveau éco-
l’Africain). Rome met 64 ans à imposer sa domination aux indigènes ;
nomique. Sénèque notamment est originaire de cette province.
- Le christianisme fait son apparition dès le IIe s. D. ESPAGNE WISIGOTHIQUE
En 409, les « Barbares » pénètrent en Espagne : le flux et le reflux
des envahisseurs vont la ravager jusqu'à la fin du Ve s. Parmi ces
peuples: les Vandales, les Alains et les Suèves, mais ce sont les Wi-
sigoths qui s’imposent. Ils règnent pendant deux siècles et établissent
leur capitale à Tolède. Deux rois se démarquent :

- Léovigild (573-586), monarque absolu, réforme l'administra-


tion, réorganise la cour et unifie le pays.
- Reccared (587) qui se convertit au christianisme et sous le
règne duquel l'Église catholique acquière une autorité très
puissante. Les rois sont alors choisis lors de Conciles

Le dynamisme de l'Église espagnole se traduit par une activité théo-


logique et intellectuelle qui tranche avec le reste de l'Occident : en
témoigne surtout l'œuvre encyclopédique de saint Isidore de Séville
(vers 560-636) : Les étymologies. Il parlait de tout et tente de synthé-
Aqueduc de Ségovie tiser tous les savoirs de l’époque.

Théâtre de Merida

Le théâtre de Merida est toujours utilisé de nos jours pour un festival


de théâtre classique.
3. LE MOYEN AGE B. AL-ANDALUS : LE RAYONNEMENT DE CORDOUE (929-1031)

A. UNE CONQUÊTE MUSULMANE ÉCLAIR La dynastie omeyyade de Damas fonde un émirat indépendant, qui
sera plus tard le Califat de Cordoue.
L'Espagne wisigothique s'effondre d'un seul coup en 711 : quelques
milliers d'arabo-berbères islamisés, franchissent le détroit, qui prend Les Omeyyades font régner une brillante civilisation sur leurs terri-
alors le nom de Djabal Tariq – plus tard Gibraltar – et écrasent le roi toires, et principalement sur Al Andalus qui devient un des plus
Rodrigue près de Cadix à la bataille du río Guadalete (19-26 juillet grands centres culturels du monde. Le califat se caractérise par la
711). Deux ans plus tard, toute la Péninsule est soumise et transfor- richesse agricole des plaines irriguées et la prospérité urbaine fondée
mée en émirat : Al Andalus. sur le tissage, la céramique, les cuirs de Cordoue, les armes de To-
lède, le tout favorisé par les échanges méditerranéens entre pays
L'expansion musulmane se prolonge au nord des Pyrénées, où elle islamiques.
ne rencontre pas le milieu favorable trouvé en Espagne. Le coup d'ar-
rêt le plus célèbre est donné en 732 à Poitiers, par Charles Martel.

Deux contrées espagnoles ont toutefois échappé aux « Maures » du


fait de leur isolement et de leur situation périphérique : le Nord-Ouest
(Asturies et León) et le Nord au pied des Pyrénées (Pays Basque) du
fait de leur situation géographique montagneuse. C'est de ces re-
fuges que part la Reconquista, la Reconquête. Dès l’invasion de
l’Espagne, ce mouvement de résistance se met en place et perdurera
jusqu’en 1492.
La grande mosquée de Cordoue, commencée dès 785, est non seu- D. LA RECONQUÊTE
lement un centre religieux mais aussi un grand foyer intellectuel et
artistique. Les plus grandes réalisations architecturales de l’époque
sont essentiellement les mosquées et les palais.

L'expansion des États chrétiens du Nord commence, bien modeste-


ment, dès le début du VIIIe s depuis le royaume des Asturies.

Si une forte proportion d'Espagnols embrassent la loi islamique (on L'Espagne chrétienne se répartit entre les royaumes de León (au sud
les appellera les renégats) et si d'autres émigrent vers le Nord, la ma- duquel apparaît un comté de Portugal), de Castille (royaume en
jorité d'entre eux conservent la foi chrétienne, leurs églises et leur 1035), de Navarre, d'Aragon (royaume en 1035) et le comté de Bar-
clergé, sans être pour autant persécutés mais étaient soumis à un celone, uni à l'Aragon par mariage à partir de 1137.
impôt (ce qui explique une partie des conversions).
Exploitant la faiblesse des royaumes de taifas, Alphonse VI de Cas-
tille s'empare de Tolède en 1085 et en fait sa capitale ; il met le siège
C. LES ROYAUMES DE TAÏFA (1031-1266)
devant Saragosse et, pour souligner sa volonté de fondre en un seul
En 1031 le calife est détrôné et l'Espagne musulmane se fragmente peuple musulmans et chrétiens, se proclame emperador de las dos
en une vingtaine de royaumes indépendants, les royaumes de taifas. religiones.
Ceux-ci se font souvent la guerre. Cette division territoriale est à
l’origine de la Reconquista puisqu’elle a permis aux chrétiens de pé- Les Almoravides au XIe siècle puis les Almohades au XIIe arrivent en
nétrer plus facilement. Espagne et remportent plusieurs victoires contre les chrétiens, ce qui
freine leur avancée. Cette situation ne dure pas et au XIIIe l’Islam est
refoulé au Sud de la Péninsule.
Le dernier bastion est le petit royaume de Grenade, qui survit jus- A cette époque, le royaume le plus important est la Castille. Le ma-
qu'en 1492, date, qui achève la Reconquête. Ce sont les rois catho- riage d’Isabelle de Castille et de Ferdinand d’Aragon permet une uni-
liques qui conquièrent la ville alors aux mains de Boabdil. té politique en Espagne. Le pouvoir royal s'impose en même temps
que l'ordre se trouve rétabli par les Rois Catholiques. La noblesse est
soumise ; les ordres militaires sont pris en main.

L'Inquisition est réorganisée pour lutter contre les hérétiques (1478)


et ses premières victimes sont les Juifs, forcés de se convertir ou de
s’exiler en 1492 tandis que le même choix est imposé aux Musul-
mans à partir de 1502 (d’où leur nom de rois « catholiques », caracté-
risés par leur intolérance envers les autres religions).

Les municipalités espagnoles sont contrôlées en Castille par des cor-


regidores, en Aragon par des cancelleros désignés par les souve-
rains. L'unité nationale est ainsi préparée. C’est le moment de l'affer-
missement de la monarchie espagnole

Cette période est également celle de la « découverte du Nouveau


Monde » (expression chargée sémantiquement…). Christophe Co-
Francisco PRADILLA Y ORTIZ, La capitulation de Grenade (1882) lomb, au service d’Isabelle, a abordé dans l'île de Guanahaní (San
4. LES TEMPS MODERNES Salvador), ouvrant l'ère coloniale. La reine organise le commerce
avec les nouvelles possessions d'outre-Atlantique et crée à Séville,
A. L’UNITÉ SOUS LES ROIS CATHOLIQUES dès 1503, la Casa de contratación, organisme centralisateur des af-
faires coloniales.
C HARLES I (= C HARLES Q UINT )
Lorsque meurt Ferdinand d'Aragon, en janvier 1516, son petit-fils
Charles de Habsbourg, est proclamé roi de Castille et d'Aragon le 14
mars 1516 (sous le nom de Charles Ier), conjointement avec sa
mère, Jeanne la Folle, qui portera le titre de reine de Castille, sans en
exercer les prérogatives, jusqu'à son décès, en 1555.

Il était également empereur du Saint Empire romain Germanique ce


qui ne facilite pas son adoption par les Castillans, qui craignent de le
voir sacrifier leurs intérêts à ceux de l'Empire.

C'est durant le règne de Charles Quint que se constitue l'empire es-


pagnol des « Indes », autrement dit un vaste domaine colonial en
Amérique centrale et du Sud qui procure à Charles Quint d'immenses
richesses en métaux précieux

Des controverses se développent alors autour des méthodes et du


principe même de la colonisation, notamment entre Bartolomé de Las
Casas, un dominicain qui la dénonce, et Juan Ginés de Sepúlveda,
théologien qui réfute les théories humanistes de Las Casas (contro-
verse de Valladolid,
B. L’ESPAGNE DES HABSBOURG 1550).

A cause de l’échec de
Charles Quint contre
l'avancée turque et la
Réforme, il finit par ab-
diquer en faveur de son
fils Philippe.

P HILIPPE II
Philippe II, déjà souve-
rain des Pays-Bas et
de Sicile, reçoit de son
père les couronnes de
Castille et d'Aragon,
ainsi que celle des Indes. Il installe sa cour et son gouvernement à C. TURBULENCE ET DÉCLIN (XVIIE S.)
Madrid (1561), petite ville promue alors capitale, au nord-ouest de
laquelle il fait édifier le monumental palais de l'Escurial (1563-1584), Dans le domaine artistique, le XVIIe est un Siècle d'or comme en té-
l'un des symboles de son règne. moignent notamment la littérature avec Cervantès, Lope de Vega,
Calderón de la Barca ou Góngora et le rayonnement de la peinture
Son règne marque l'apogée politique de l'Espagne mais subit de espagnole de Diego de Silva Velázquez, qui peint les Ménines vers
nombreuses guerres. Philippe II tente d'imposer son hégémonie en 1656, José de Ribera, de Francisco de Zurbarán et de Bartolomé
Europe en faisant de l'Espagne le principal héraut du catholicisme, Esteban Murillo.
objectif auquel se mêlent néanmoins des motivations autres que reli-
gieuses, comme : Parallèlement, la monarchie est très affaiblie. Les trois monarques qui
succèdent à Philippe II – son fils Philippe III (roi de 1598 à 1621), Phi-
- la lutte contre l'islam et le danger turc lippe IV (1621-1665) et Charles II (1665-1700) – sont loin d'avoir les
- Le contrôle de l'empire colonial portugais qualités de leurs glorieux ancêtres.
- La guerre et la perte des Pays-Bas
- La défaite de l'Invincible armada face à l’Angleterre - Effacement de l’Espagne au plan international (perte des terri-
- La fin de l'hégémonie espagnole toires français, portugais et hollandais)
- Crise économique qui mène à la misère : à cause des guerres
Cette ambitieuse politique extérieure se solde par des dépenses con- et de la contraction du commerce avec Amérique + crise dé-
sidérables que la couronne de Castille, malgré l'afflux des métaux mographique : guerres, émigration, peste, expulsion des mo-
précieux d'Amérique, ne parvient à couvrir qu'au prix d'un accroisse- risques...
ment des impôts, de l'endettement et d'une crise financière qui tend à
devenir structurelle dans les dernières années du règne (situation de Charles II mort sans successeur, c’est un Bourbon, Philippe V, petit-
banqueroute en 1596) fils du roi de France Louis XIV, qui succède aux Habsbourg. La dy-
nastie Bour-
bon est tou-
jours sur le
trône espagnol
de nos jours.
D. LE SIÈCLE DES LUMIÈRES D ES PROGRÈS DANS L ’ UNIFICATION DU PAYS
L'Espagne du XVIIIe s. ne reste pas à l'écart des grandes transforma- Après la guerre de la Succession d'Espagne (1701-1713) les Bour-
tions que connaît alors une partie du continent européen. Cette adap- bons – tout en restant prudents vis-à-vis de certains particularismes
tation concerne l'ensemble de la société, tant sur le plan économique régionaux – se font désigner comme « rois d'Espagne » => apparition
que dans la vie politique ou même dans le domaine artistique. du concept de nation espagnole. Cette unification est renforcée par
une monnaie unique et l’emploi de la langue castillane.
L' AVÈNEMENT DES B OURBONS ET LE REDRESSEMENT POLITIQUE
Néanmoins, cette guerre a également entrainé des pertes territo-
Philippe V (de 1700 à 1746), Ferdinand VI (1746-1759) et Charles III riales : Gibraltar, Minorque et les territoires italiens ; ainsi que la perte
(1759-1788) –, à défaut d'être de brillantes personnalités (les deux des droits à la couronne de France.
premiers sont dépressifs et atteints de troubles psychiques) - incar-
nent ce renouveau et sont capables d'appeler à leurs côtés des L E RECENTRAGE DE LA POLITIQUE ÉTRANGÈRE
hommes dotés du sens de l'État.
Philippe V oriente sa politique étrangère autour de trois objectifs :

- réviser le traité d'Utrecht en contraignant les Anglais à restituer


Gibraltar (sans succès puisque de nos jours, Gibraltar appar-
tient toujours au Royaume Uni);
- défendre les intérêts espagnols dans la péninsule italienne en
y créant des États satellites ;
- protéger et développer l'empire colonial.

U N RENOUVEAU ÉCONOMIQUE
Grâce :

- Au regain démographique, qui s’explique par le recul des


grandes épidémies, la croissance économique et une activité
guerrière moins intense qu'au cours des siècles précédents.
Madrid, Barcelone, Séville et Cadix deviennent des grandes
villes
- A la reprise de l'activité économique : les productions agricoles
augmentent et les cultures se diversifient
5. EPOQUE CONTEMPORAINE

A. FIN DU XVIIIE – DÉBUT DU XIXE SIÈCLE

Plusieurs évènements ruinent le pays et le coupent de ses colonies. Francisco DE GOYA, El dos de mayo1 de 1808 en Madrid

- Défaite de la flotte franco-espagnole à Trafalgar (1805) contre Les conséquences (outre les désastres de la guerre) marquent une
les Anglais : une grande partie de la flotte espagnole disparaît césure importante dans l’histoire de l’Espagne :
dans cette opération, privant ainsi l’Espagne de son principal
atout pour assurer et protéger ses échanges avec l'Amérique. - Rupture vis-à-vis de l'Empire colonial : Amputée de sa puis-
- Invasion de l'Espagne par Napoléon : profitant de la faiblesse sance navale, affaiblie par les troubles politiques et l'invasion
politique, Napoléon s'empare de la couronne espagnole, qu'il française, l'Espagne se retrouve en position de faiblesse sur le
confie à l'un de ses frères, Joseph Bonaparte, jusque-là roi de continent américain. Plusieurs soulèvements indépendantistes
Naples. ont alors lieu sur fond de guerres civiles. Perte de l'Argentine,
- Guerre d'Indépendance (1808-1814) : à Madrid, le 2 mai 1808, l’Amérique centrale et le Venezuela.
exaspéré par la présence française, le peuple se révolte, mar- - Rupture politique : fossé entre les partisans d'un retour à l'An-
quant le début du soulèvement populaire et de la guerre cien Régime et ceux qui souhaitent profiter de ce conflit pour
d'Indépendance. La guérilla, la détermination de l'armée re- moderniser et libéraliser l'Espagne. Cette division se maintien-
belle espagnole, ainsi que l'aide britannique finissent par avoir dra jusqu’à la guerre civile.
raison de l'armée française. En mai 1813, les Français éva-
cuent Madrid, en 1814 l’armistice est signée.

1 Le Dos de Mayo est également le nom d’une place à Madrid


B. L’ESPAGNE ENTRE LIBÉRALISME ET TRADITIONALISME (1814-1923) Sur le plan économique, à l'Espagne en voie d'industrialisation – celle
des régions de la périphérie – s'oppose une Espagne rurale, ar-
chaïque, celle des grandes propriétés du Centre et du Sud.

Sur le plan social, en l'absence de classes moyennes nombreuses


capables de jouer un rôle d'équilibre, se font face l'Espagne de l'an-
cienne aristocratie, de la noblesse et de la haute bourgeoisie et une
Espagne pauvre, prolétarisée et marginalisée politiquement.

Sur le plan religieux s'opposent une Espagne très anticléricale et une


Espagne très attachée à un catholicisme monolithique.

Enfin, privé des richesses de l'empire colonial (Perte de cuba, Puerto


Rico, Philippines), l'État espagnol s'appauvrit et s'endette.

C. DÉBUT DU XXE SIÈCLE


Pendant plus d'un siècle, l'histoire politique de l'Espagne est dominée
par une succession de crises et de pronunciamientos, bref par une
forte instabilité politique et institutionnelle qui traduit la partition poli-
tique du pays entre une Espagne nostalgique de l'Ancien Régime et
une Espagne gagnée au libéralisme politique. Il n’y a plus de stabilité
monarchique.

- Ere des pronunciamientos (1814 -1875) : soulèvements mili-


taires libéraux (près de 40)
- Guerres Carlistes : entre les partisans du modèle absolutiste,
qui se reconnaissent dans le roi Charles V, aux libéraux, qui
défendent en la personne de la reine Marie-Christine (les
«christiniens ») le modèle d'une monarchie laïque et centrali-
satrice.
- Tentative de révolution et première république
- Restauration des Bourbons : adoption dès 1876 d'une Consti-
tution posant les bases théoriques d'une monarchie parlemen-
taire vue comme une « parodie » à cause du système du bi- D ICTATURE DE P RIMO DE R IVERA (1923-1930)
partisme et de l'alternance programmée (le « turno político ») Cette première dictature marque la fin du régime constitutionnel, mis
en place en 1876, et la disparition de la monarchie parlementaire.
Primo de Rivera supprime le Parlement, instaure la censure et place
les institutions sous la tutelle de l'armée. Il se fixe pour objectifs de
régénérer la société espagnole et de moderniser l'économie, via une
planification très technocratique, l'interventionnisme de l'État (poli-
tique de grands travaux) et un nationalisme poussé.

L A S ECONDE R ÉPUBLIQUE (1931-1936)


Elle est d’abord dirigée par la gauche modérée. Suite à une victoire
électorale de la droite, le gouvernement prend une orientation plus
conservatrice, ce qui pousse à une tentation croissante de coup
d'État. La flambée révolutionnaire de 1934 (révolte des Asturies) et la
répression militaire sanglante qu'elle entraîne radicalisent l'opposition
entre les forces populaires et l'armée.

Les élections législatives de février 1936 consacrent la victoire des


forces de gauche rassemblées, mais rapidement débordés sur leur
droite et sur leur gauche, les modérés ne peuvent gouverner. La
flambée de violence et le cycle des représailles entre groupes extré-
mistes, l'assassinat, le 13 juillet, du monarchiste José Calvo Sotelo
débouchent sur un nouveau pronunciamiento, le 18 juillet qui dé- Le général Franco a mené, selon lui, « non une guerre mais une croi-
clenche la Guerre Civile espagnole. sade » contre la « Contre-Espagne rouge ». Sa propagande n'a ces-
sé de motiver les soldats nationalistes en les présentant comme « les
L A GUERRE CIVILE (1936-1939) croisés du Christ et de l'Espagne » engagés dans « la guerre de l'es-
poir chrétien et espagnol contre le matérialisme marxiste ».
La guerre civile oppose les Républicains (les rouges) aux Nationa-
listes. Ces derniers bénéficient du soutien précoce, constant et qua- D. LA DICTATURE DE FRANCO (1939-1975)
siment gratuit de l'Allemagne nazie et de l'Italie mussolinienne. Les
démocraties n'ont aidé qu'avec parcimonie les Républicains. Ceux-ci La dictature se déroule en 4 grandes étapes :
étaient aussi tributaires de l'aide soviétique, payée avec l'or de la
1. Autarcie et éradication du passé révolutionnaire et républicain
Banque d'Espagne et qui cesse en novembre 1938, lors du départ
(1945-1950) : l’Espagne est marginalisée sur la scène internatio-
des Brigades internationales.
nale à cause de son soutien aux Nazis
Au terme de trois années de luttes acharnées les forces nationalistes, 2. Tentative de rupture de l’isolement (1950-
aux ordres du général Francisco Franco, l'emportent. Cet affronte- 1955). L’Espagne profite du déclenchement
ment des deux Espagnes se solde par la séparation de la société en de la guerre froide, pour intégrer progressi-
deux camps : celui des franquistes d’une part et celui des vaincus de vement le camp occidental. Sur le plan inté-
l’autre, condamnés aux exécutions sommaires, à la répression, à rieur, cette normalisation se traduit par une
l'exil et au silence. timide libéralisation. En 1955, l'Espagne est
admise à l'ONU.
3. Le « franquisme modernisateur » (1956-1975), sorte de dictature E. LA TRANSITION DÉMOCRATIQUE (1975-1982)
technocratique qui confère au régime une nouvelle forme de légi-
timité, basée sur la recherche de l'efficacité économique. L'Es- Après la mort de Franco en 1975, commence la Transition espagnole
pagne enregistre une croissance économique et une modernisa- vers la démocratie :
tion particulièrement rapides au cours des années 1960. Politi-
- Couronnement de Juan Carlos I
quement, cette modernisation ne se reflète que sur quelques ti-
- Adolfo Suárez, premier président démocratique
mides reformes comme la suppression de la censure et la désigna-
- Rédaction de Constitution de 1978
tion du prince Juan Carlos comme successeur
4. Les dernières années de la dictature montrent l’usure du pouvoir,
qui se traduit par un essor de l'opposition politique et une montée
de la contestation des milieux ouvriers, étudiants, autonomistes et
même des classes moyennes.
III. L’ESPAGNOL DANS LE MONDE
1. DONNÉES STATISTIQUES Depuis 1871, l’Académie de Madrid a suscité la création d’académies
outre-mer afin que les ex-colonies devenues indépendantes travail-
La langue espagnole est l’un des héritages les plus universels trans- lent à leur norme nationale et collaborent à un dictionnaire commun.
mis par l’Espagne. Elle est aujourd’hui la langue officielle de 21 pays Les résultats concrets ont vu le jour dès 1951 lorsque, à la demande
et la langue maternelle de 493 millions de personnes, la deuxième du du Mexique, ces 22 académies « sœurs » -dont une aussi aux États-
monde après le chinois. Elle est la quatrième langue la plus étudiée Unis- se sont regroupées en association internationale et publié en
dans le monde, avec plus de 24 millions d’apprenants en 2021 (après 2001 une première édition conjointe du dictionnaire, qui contenait 93
l’anglais, le français et le chinois.) 000 mots. (Voir leur site : https://www.asale.org/)
Elle affiche une vigueur et un dynamisme évident: le nombre de per- Treize ans plus tard, la 23e édition va plus loin, en introduisant
sonnes qui parlent espagnol ne cesse d’augmenter. Selon les prévi- quelques 19 000 americanismos.
sions, en 2030 les hispanophones représenteront 7,5% de la popula-
tion mondiale, derrière les anglophones mais loin devant les russo- En 2013, a été fondée l’Academia Ecuatoguineana de la Lengua Es-
phones (2,2%), les francophones (1,4%) et les germanophones pañola (AEGLE) pour faire face à la pression de la “francophonie”,
(1,2%). En 2060, les États-Unis seront le deuxième plus grand pays bien que la langue majoritaire de la Guinée équatoriale reste l'espa-
hispanophone du monde, après le Mexique. 27,5 % de la population gnol (langue officielle), maîtrisé par 87 % de la population. C’est le
américaine sera d'origine hispanique. seul pays hispanophone d’Afrique.

Langue officielle des Nations Unies, la FAO, l’UNESCO, et d’autres L’exemple des académies d’hispanophones montre qu’il est possible
institutions internationales d’élaborer un académisme efficace, dynamique, collaboratif, capable
de créer d’une norme panhispanique (l’espagnol international) tout en
Le tourisme et le commerce sont des exemples d’actifs économiques cultivant des normes nationales clairement définies et surtout respec-
pour lesquels la langue espagnole revêt une importance majeure. tées. Un autre succès de l’Academie espagnole est d’avoir su impli-
L’espagnol est un élément-clé du secteur culturel et des industries de quer dans son financement une demi-douzaine de grandes entre-
la culture : littérature, théâtre, cinéma, musique, médias et édition prises mécènes qui, convaincues du potentiel économique de
(4ème rang mondial). l’espagnol, l’aident dans ses projets et activités.

2. LES INSTITUTIONS LINGUISTIQUES B. EL INSTITUTO CERVANTES


L’Instituto Cervantes est une institution culturelle publique espagnole,
A. REAL ACADEMIA ESPANOLA (RAE)
qui a pour mission de promouvoir l’espagnol et les langues co-
Avec le premier roi Bourbon, les Espagnols se sont dotés en 1714 officielles de l’Espagne, ainsi que de diffuser la culture des pays his-
d’une académie, à l’instar de l’Académie française, dont la mission panophones. Créé en 1991, il est aujourd’hui présent dans plus de 88
est de veiller sur la langue espagnole, ses formes et son évolution. villes de 45 pays. Il publie un annuaire sur l’état de santé de la langue
L’Académie a enchaîné, sur trois siècles, 23 éditions de son diction- espagnole dans le monde (nombre de locuteurs, etc.).
naire et une douzaine de grammaires.
L’Institut Cervantes organise les cours pour l’obtention du DELE (di-
plôme d’espagnol langue étrangère), un diplôme officiel certifiant un
degré de compétence et de maîtrise de la langue. Il est reconnu dans
le monde entier.

Outre sa mission d'enseignement, l’Instituto Cervantes s’occupe de la


diffusion de la culture hispanique. Il se propose comme un lieu
d’échanges et de rencontres aux spécialistes de différents domaines.
Des chercheurs et écrivains participent à des débats, discussions et
séminaires. Son agenda culturel offre diverses activités liées au
théâtre, la danse, la musique, la littérature, l’art, l’architecture, etc.

C. LA FUNDÉU (FUNDACION DEL ESPANOL URGENTE)


C’est une institution qui vise à améliorer l’utilisation de la langue dans
les médias, les réseaux sociaux et la vie quotidienne (Ex : comment
écrire COVID-19 ?). Elle a été créée en 2005 grâce à la collaboration
entre la Agencia Efe (la principale agence de presse en langue espa-
gnole), la banque BBVA, et la Real Academia Española. Son site web
est une page de référence pour répondre efficacement aux doutes
linguistiques.

3. L’ESPAGNOL EN AMÉRIQUE

A. AMÉRIQUE DU SUD
Les premiers pays du monde en nombre d’hispanophones sont : le Il y a beaucoup de théories sur la division dialectale de l’Espagnol en
Mexique, la Colombie, le Pérou et le Venezuela. A cette liste il faut Amérique latine. Certaines zones sont très grandes et partagent les
rajouter les hispanophones des Philippines, du Sahara Occidental et mêmes traits dialectaux. Par ex :
de Guinée Equatoriale. Il faut se rappeler que les États-Unis sont le - Par exemple la prononciation du C et du Z => [s] dans toute
4e pays en nombre d’hispanophones, après le Mexique et la Colom- l’Amérique latine a des raisons historiques : les colons espa-
bie et l’Espagne gnols provenaient surtout d’Andalousie et des Canaries, où
l’on n’opère pas la distinction entre s et c.
- Ex : en Argentine, le -ll se prononce [ʒ]. Les –s sont aspirés.
- Ex : Venezuela on prononce les –g aspirés
B. USA En 2013, l'espagnol est devenu la deuxième langue du pays, avec
37,5 millions de locuteurs (le français est parlé par environ 2 millions
En 2020, il y avait quelques 62 millions de personnes d’origine hispa- d'habitants et l'allemand par un million de personnes).
nique aux USA.
En 2015, les Latinos constituaient 17% de la population, une situation
dénoncée par le président Donald Trump traduisant aussi l’inquiétude
face à ce que certains appellent déjà la latinisation des Etats-Unis.

En 2060, les Hispaniques devraient représenter 27 % de la popula-


tion américaine.

La communauté hispanique acquiert une importance croissante éga-


lement en politique au point que les candidats à la présidence
s’adressent à elle, lors de leurs campagnes présidentielles, dans leur
langue. (cf. discours de Barack Obama).

Le « vote latino » n’est plus sous-estimé et l’intérêt qu’y portent les


candidats à la présidence du pays montre bien le parcours condui-
sant « de l’immigré au citoyen », notamment dans le cas des Mexi-
cains, qui constituent les deux tiers des Latinos aux États-Unis.

Il existe quatre pôles hispaniques : La plus connue est Alexandria Ocasio-Cortez qui a beaucoup critiqué
Trump et est très populaire. Ce sont surtout les démocrates qui orien-
1. La Californie : un tiers des 35 millions d’habitants sont tent leur politique vers les latinos.
d’origine hispanique. La moitié des enfants scolarisés parlera
espagnol dans quelques années. L’histoire hispanique de la
région est mise en évidence par l’existence de plus de 400 to-
ponymes espagnols.
2. L’Arizona, le Nouveau Mexique et le Texas : régions fronta-
lières ayant appartenu au Mexique jusqu’à la guerre de 1848
contre les Etats-Unis. Mais ce ne sont pas seulement des Chi-
canos qui y vivent (descendants de Mexicains), mais aussi des
Latinos venus d’Amérique centrale.
3. New York : avec un noyau d’immigration portoricaine
4. La Floride : avec une immigration cubaine d'environ 2 millions
d'Hispaniques. La plupart sont des exilés politiques qui ont
quitté le pays pour échapper au régime communiste de Fidel
Castro. 70% de la population parle espagnol.
C. PHÉNOMÈNE DU SPANGLISH.
Aujourd’hui, cette grande communauté linguistique continue à faire
évoluer sa langue, malgré la domination de l’anglais. Les emprunts
sont nombreux, au point qu’une langue hybride est apparue, le span-
glish, mélange d’espagnol et d’anglais très populaire dans le sud des
Etats-Unis. Les locuteurs mélangent les deux langues de façon natu-
relle (= code switching), et généralement maîtrisent parfaitement les
deux langues individuellement. On la retrouve un peu partout dans la
culture et la vie de tous les jours.

D. MUSIQUE
La musique sud-américaine est un instrument de premier ordre dans
la dynamique de “latinisation” des Etats-Unis. Les représentants ac-
tuels les plus connus sont : Maluma, Luis Fonsi, Shakira et Camilla
Cabello.

E. PHÉNOMÈNE DES TELENOVELAS.


Les telenovelas sont de séries TV de centaines d’épisodes qui rè-
gnent en maître sur la télévision latino-américaine et qui servent de
vecteur de l’expansion de la langue en dehors des frontières. Elles
montrent le plus souvent des histoires d’amour, de famille, de trahi-
son entre familles. Très compliquées, elles ne finissent jamais.

4. L’ESPAGNOL À L’ÈRE D’INTERNET


L’espagnol est la troisième langue la plus utilisée par les internautes
(7,8%).
IV. LES BASES LEXICALES DE L’ESPAGNOL
1. FORMATION DU CASTILLAN B. ESPAGNOL OU CASTILLAN ?

A. LE LATIN ET LA ROMANISATION Bien que les mots « espagnol » et « castillan » soient synonymes, il
est préférable de réserver le terme castillan pour parler du dialecte
Tout comme le français et l’italien, l’espagnol est une langue indo- roman né au royaume de Castille durant le Moyen Âge. En Espagne,
européenne d’origine latine. Les Romains ont apporté avec eux leur on utilise le mot « castillan » quand on fait allusion à la «langue
langue, le latin, en conquérant la péninsule ibérique durant les deux commune de l'État» par rapport aux autres langues co-officielles dans
derniers siècles avant J.C. L’Espagne s’appelle alors l’Hispanie. les territoires autonomes, comme le catalan, le galicien ou l'euskera
Cette base latine apportée par les Romains s’est imposée comme un (basque). Autrement dit, l’espagnol est la langue commune à tous les
superstrat linguistique aux différentes langues autochtones préexis- hispanophones du monde, quelles que soient les variantes que l’on
tantes (ibères, celtes) et s’est enrichie au fil des siècles sous puisse rencontrer en fonction des endroits où cette langue a évolué.
l’influence des différents peuples (Wisigoths, Arabes) ou pays en con- On dira donc « espagnol » lorsque l’on veut désigner la langue parlée
tact avec l’Espagne. par les Espagnols et les Latinos-Américains, et castillan pour dési-
La conséquence de la romanisation réalisée par les Romains à cette gner la langue officielle de l’Etat.
époque est la latinisation de l'Ibérie. Les Romains imposent leurs Le mot « espagnol », provient du provençal espaignol et du latin mé-
coutumes, leurs lois, leur art et leur langue. Le latin devient la langue diéval Hispaniolus.
de l'administration.
C. LA FORMATION DU CASTILLAN
Lorsque l’empire romain se divise en 395, entre l’empire d’Occident
dont la capitale est à Ravenne d’une part et l’empire d’Orient dont la Le castillan est le dialecte roman péninsulaire apparu vers le Xe
capitale se trouve à Constantinople, de l’autre, les provinces perdent siècle. Le mot est un dérivé de la région d’origine, « Castille» entre La
les contacts entre elles et leur langue évolue indépendamment pour Rioja et Burgos, qui
donner naissance à 10 langues différentes, les langues romanes : signifie « terre de châ-
portugais, galicien, castillan, catalan, provençal, français, italien, teaux »
sarde, roumain et romanche (langue nationale suisse).
Au Xe siècle, cette aire
Les gens parlent les langues nationales, mais le latin classique reste linguistique demeurait
encore la langue de la culture, de la science, ou de la philosophie, et encore limitée. Le cas-
les grands intellectuels écrivent leurs œuvres en latin : Bacon, Des- tillan n'était pas plus
cartes, Leibniz, Spinoza, ou Newton. important que le ga-
laïco-portugais, le na-
Le latin restera aussi la langue de la liturgie chrétienne jusqu'au XXe
varro-aragonais ou le
siècle.
catalan, mais il connaî-
tra une grande diffusion
dès le XIIe et XIIIe siècles en Les particularités régionales disparaissent progressivement dans la
raison de la prépondérance langue de l'administration. La syntaxe et le vocabulaire s’enrichissent
de la Castille dans l’effort de par les emprunts au latin et à l’arabe et par les traductions faites à
la Reconquête et de son ex- Tolède, dans une École de Traducteurs qui brasse les meilleurs es-
pansion territoriale. prits de l’époque. Alphonse X avait créé cette école dans la « ville
des trois cultures » où ces cultures se mélangeaient en paix. Il a vou-
Les premières traces écrites lu traduire les œuvres d’une langue à l’autre pour pouvoir partager les
de cette langue se trouvent connaissances.
dans les « gloses », les anno-
tations marginales des textes
latins. L'intention du moine qui
les écrivait était probablement
d'éclaircir le sens de certains
passages du texte original,
conscient du fait que ses lec-
teurs ne maîtrisaient plus le
latin.
Codex Emilianense, avec
les gloses en marge droite,
XIe s.

Une autre manifestation du proto-castillan se trouve dans certains


poèmes de la poésie andalouse médiévale, écrits en arabe ou hé-
braïque, appelés le muwashshah, qui ont été découverts en 1948. La
dernière strophe du poème -appelée kharja (jarcha, en espagnol),
étaient généralement empruntée à la langue romane parlée, et cons-
titue la plus ancienne trace écrite du parler ibérique médiéval, en ca-
Les traductions faites à l’École de traducteurs de Tolède ont été un
ractères arabes ou hébraïques.
élément fondamental pour ouvrir l’espagnol à de nouvelles formes
D. LA CONSOLIDATION GRAMMATICALE DE L’ESPAGNOL AU XIIIE S. d’expression. Les travaux de ce groupe d'érudits chrétiens, juifs et
musulmans ont permis de sauver de l'oubli des œuvres fondamen-
Sous les auspices du roi Alphonse X (1221-1284), des progrès ont tales de la culture grecque antique et de les transmettre à l'Europe
été réalisés dans la mise en place d'un espagnol standard, parlé et médiévale. Ses travaux -couvrant la géographie, l’astronomie, la car-
écrit, prêt à devenir une langue de culture, et pour la première fois tographie, la philosophie, la théologie, la médecine, l’arithmétique,
une langue littéraire. l’astrologie, la botanique, et les versions de la Bible hébraïque et de
la Vulgate- sont à l'origine de la renaissance scientifique et philoso-
phique des écoles de Chartres et, plus tard, de la Sorbonne. La prose
castillane s’ouvre à de nouveaux domaines, notamment la prose his- jour. Il s’agit de la première grammaire d'une langue vernaculaire im-
torique et la jurisprudence, qui étaient jusque-là écrites en latin. Les primée en Europe, à une époque où le castillan n'était pas encore
chroniques de la première Histoire de l’Espagne et de l’Histoire Uni- considéré comme une « langue de culture ». L'auteur, Antonio de
verselle voient le jour. Nebrija, pensait que les
élèves pourraient mieux
En reconnaissance de la contribution de ce roi, dit « le Sage », dans étudier le latin s'il existait
le domaine des sciences, l’astronome Giovanni Riccioli, nomma, en des règles établies, stan-
1651, un cratère de la lune en l’honneur du roi de Castille : le cratère dardisées, pour leur langue
Alphonsus. natale, le castillan. L'ou-
vrage est divisé en cinq
livres : « Orthographe », «
Prosodie », « Étymologie »,
« Syntaxe » et « Introduc-
tions à la langue castillane
pour les étrangers souhai-
tant l'apprendre »

F. L’ÉCLAT DE L'ESPAGNOL DANS L’EUROPE DE CHARLES V


La projection internationale de l’espagnol commence avec l'arrivée de
Charles V à la couronne de l'empire. Au XVIe siècle, l’Espagne était
une grande puissance militaire et économique et l'espagnol allait de-
venir une langue d’influence et en pleine expansion. De plus, la con-
quête des nouvelles terres de l'autre côté de l'Atlantique avait fait de
l'espagnol la langue de tout un continent.
E. L’ESPAGNOL AU XVE SIÈCLE La première langue de Carlos Ier, né à Gand, était le flamand. Il pra-
tiquait aussi le français. En fait, à cette époque, la diplomatie euro-
Dès le XIVe siècle, le Royaume de Castille domine la péninsule sur le
péenne parlait latin ou français, mais pas l'espagnol. Les nobles es-
plan politique. Le castillan, devenu la langue des documents juri-
pagnols avaient demandé à Carlos, devenu roi d’Espagne,
diques, de l’administration et de la diplomatie, connaît son apogée
d’apprendre la langue afin d’être respecté. C’est donc en 1536 que le
lors du mariage d’Isabelle de Castille et de Ferdinand d’Aragon. Les
roi prononça pour la première fois un discours en espagnol au lieu du
Rois Catholiques parachèvent la Reconquista en 1492 en reprenant
latin, en présence des délégués du roi de France, du Pape et de
la ville de Grenade, dernière enclave musulmane. L’hispanisation de
membres du corps diplomatie européen.
l'Andalousie s'est produite de manière progressive.
C'est également à cette époque que le nom de la langue a commen-
La même année, l’explorateur Christophe Colomb découvre
cé à être discuté. Certains ont proposé la dénomination du castillan,
l’Amérique, et la première grammaire de la langue castillane voit le
en tant qu’originaire de la Castille, d’autres donnaient leur préférence non seulement un trait d’union entre l’Antiquité et son temps, mais
au mot « espagnol » parce qu’il était parlé par la majorité de également une synthèse générale des connaissances du début du
l’Espagne. XVIIe siècle espagnol..

Pendant cette période, les ouvrages destinés à normaliser la langue Covarrubias sera victime des idées de son temps : il croira, comme
sont abondants et abordent les règles du langage poétique, de l'or- beaucoup d’autres, à une langue première qui aurait été parlée à
thographe, du vocabulaire et les ouvrages didactiques d'apprentis- l’origine du monde; l’hébreu serait cette langue-mère universelle. Ce
sage. dictionnaire nous intéresse en ce qu’il est le reflet de la langue espa-
gnole du Siècle d’Or en Castille, indispensable pour la compréhen-
- La première Orthographe de l’espagnol est publiée en 1517, sion des grands auteurs espagnols. L’ouvrage servira d’inspiration à
par le Sévillan Antonio de Nebrija, le même auteur de la d’autres grammairiens français de l’époque.
Grammaire.
- La première Grammaire de l'espagnol pour étrangers a été G. LE SIÈCLE D’OR
publiée à Louvain en 1555.
Le Siècle d'Or des arts en Espagne est la période écoulée entre le
En 1556, Philippe II devient roi d’Espagne. Il fait appliquer une poli- milieu du XVIe et le milieu du XVIIe siècle, quand la peinture atteint
tique d’affirmation de l’espagnol, d’abord en Amérique, où il fallait sa splendeur, et la littérature développe des genres romanesques
dorénavant évangéliser les indigènes en castillan, et non plus dans spécifiques, en prise directe avec la réalité socio-politique d’un pays
leurs langues et, ensuite, en Espagne même. En 1567 il publie un qui, en parallèle, voyait s’éloigner sa gloire passée et dont la puis-
édit qui a pour but d’interdire de parler et d'écrire en arabe endéans sance politique est en déclin.
les trois ans, que la communauté des Moriscos s'habillent comme
les castillans, et que leurs femmes soient à visage découvert. A cette époque, l’apport des auteurs espagnols à la littérature univer-
selle sont considérables :
En 1611 paraît le premier dictionnaire
espagnol (Tesoro de la lengua,) écrit 1. Naissance d’un nouveau genre littéraire, le roman picaresque
(de l'espagnol pícaro, « misérable », « futé ») dont le person-
par Sébastian de Covarrubias, dont la
nage principal est un pauvre aventurier qui survit en faisant
première édition est tirée à mille exem-
des tours pendables. Le premier de ce genre est le Lazarillo
plaires.
de Tormes.
Le but principal de Covarrubias a été de 2. Cervantes enterre le roman de chevalerie, et son Don Qui-
composer un dictionnaire étymologique chotte, publié en 1615, inaugure le roman contemporain,
qui prendrait le relais des Etymologies de 3. Lope de Vega donne sa forme définitive au genre de la Come-
Saint Isidore de Séville. L’étude des dia barroque.
mots, de leur origine, fournira l’occasion
Au cours de ce siècle, l’espagnol connait l'une des périodes les plus
de recueillir l’héritage du passé et de le
grandes de l’accroissement de son vocabulaire.
transmettre aux générations à venir.
Dans cette perspective, son livre sera
H. LA CRÉATION DE L’ACADÉMIE DE LA LANGUE (RAE) AU XVIIIE S.
Les Espagnols se sont dotés d’une académie en 1714 pour imiter
l’Académie française créée par Richelieu en 1635. A cette époque, la
langue espagnole, surtout l'écrit, n’était pas unifiée. En premier lieu,
l'Académie a fixé la prononciation des mots et défini une forme
unique pour les mots dérivés du latin. Le deuxième problème était
celui de l'orthographe. Le système graphique ne correspondait pas
toujours à la prononciation.

La priorité de l’Académie a été de corriger l'orthographe, d'organiser


la grammaire et de compiler un grand dictionnaire. Entre 1726 et
1739, l’Académie publie le Dictionnaire des autorités, le premier vrai
Dictionnaire de la langue castillane.

L’Académie a entrepris une réforme majeure et a décidé :

- de supprimer la cédille et fixer l'utilisation de c et z,


- de définir l’emploi de b et v en fonction de l'étymologie,
- de supprimer la distinction entre -ss- et -s- et donner la préfé-
rence à la lettre -s-,
- de remplacer les ph, th et ch des mots grecs par f, t et c / qu
(pharmacia, théologia, cherubin > farmacia, teología, querubín)
- de supprimer dans l'édition du Dictionnaire de 1779, la lettre h
des mots, comme theatro, rhetorica et mechanica,
- en 1815, de réserver la lettre X pour le couple consonantique
(KS), comme dans le mot "examen", et la lettre j (jota) pour les
autres (ejemplo, Quijote, prójimo).

En 90 ans de réformes (entre 1726 et 1815), les grammairiens


avaient dépouillé l'écriture de ballasts étymologiques et l'avaient ren-
due plus simple et plus pratique. Ces réformes ont permis de simpli-
fier l’orthographe devançant ainsi le français, l’anglais ou l’allemand.
Enfin, en 1815, le plus gros de l'orthographe actuelle a été fixée.

L’Académie espagnole a enchaîné, sur trois siècles, 23 éditions de


son dictionnaire et une douzaine de grammaires, réformant au pas-
sage l’orthographe et la conjugaison. Depuis 1871, l’Académie de
Madrid a suscité la création d’académies outre-mer afin que les ex- B. L’HÉRITAGE GREC
colonies devenues indépendantes travaillent à leur norme nationale
et collaborent à un dictionnaire commun. À la demande du Mexique, A travers le latin, nombreux sont les hellénismes (c’est-à dire, les
ces 22 académies « sœurs » se sont regroupées en association in- mots d’origine grecque) qui passent à l’espagnol.
ternationale dès 1951. Elles ont accouché en 2001 d’une première
Vie domestique : ancla, cesta, cuchara, cuerda, espada, lámpara, lin-
édition conjointe du dictionnaire, la 22e, puis elles ont publié une terna, sábana, saco (ancre, panier, cuillère, corde, épée, lampe, lan-
nouvelle grammaire. Treize ans plus tard (2014), la 23e édition va terne, drap de lit, sac)
plus loin, en introduisant plus de 19 000 américanismes.
Construction : bodega, cal, cámara, mármol, piedra, plaza, torre, yeso
Par ailleurs, début 2019, des spécialistes espagnols et israéliens ont (cave, chaux, chambre, marbre, pierre, place, tour, plâtre)
validé la création d’une académie en Israël consacrée au ladino, la Noms botaniques : caña, cereza, espárrago, rábano, regaliz, tallo
langue des Juifs séfarades expulsés d’Espagne en 1492, une langue (canne, rotin, cerise, asperge, radis, réglisse, tige)
en voie de disparition, dérivée du vieux castillan. Un accord qui doit
encore être validé par les autorités israéliennes Noms d'animaux : concha, esponja, ostra, perdiz, pulpo (coquillage,
éponge, huître, perdrix, poulpe)
2. BASES LEXICALES Relatifs à l'être humain : huérfano, lágrima, pena, talento (orphelin,
larme, chagrin, talent)
A. LE LATIN
Vocabulaire ecclésiastique : ángel, apóstol, asceta, abismo, bautismo,
Partant du latin, la plupart des mots ont subi une évolution phoné- Biblia, blasfemar, canónigo, cátedra, católico, cementerio, cisma, clé-
tique au cours de l'histoire, c'est pourquoi il est parfois difficile de re- rigo, coro, diablo, ermita, himno, iglesia, limosna, mártir, misterio, mo-
connaître son origine latine, par exemple le mot « hijo » < filium. Nous naguillo, monasterio, palabra, Papa, paraíso, parroquia, Pascua, pa-
triarca, profeta, salmo (ange, apôtre, ascète, abysse, baptême, bible,
appelons ces mots « patrimoniaux » ou populaires, et ils constituent blasphème, chanoine, chaise, catholique, cimetière, schisme, ecclé-
la base lexicale de l’espagnol, soit 70% du lexique. siastique, chœur, diable, chapelle, hymne, église, aumône, martyr,
mystère, enfant de cœur, monastère, parole, pape, paradis, paroisse,
Les « cultismes » sont des mots qui ont subi une évolution phoné- Pâques, patriarche, prophète, psaume)
tique légère : filial (amor filial). La plupart de ces mots et leurs dérivés
sont maintenant couramment utilisés : filial, afiliar, afiliación, his- Vocabulaire scientifique :
panófilo. Ils proviennent d'emprunts du latin tout au long de l'histoire, s. XIII : alabastro, pergamino, teología, música, aire, aritmética, astro-
et sont entrés dans la langue via le latin classique, juridique, ou ec- nomía, átomo (albâtre, parchemin, théologie, musique, air, arithmé-
clésiastique. Ils constituent environ 20% du vocabulaire moderne. tique, astronomie, atome)

Toponymes : Pompaellone (Pampelune), César Augusta (Saragosse), s. XV : arteria, cardiaco, cólico (artère, cardiaque, colique)

Anthroponymes : Carmen (vers ou chant), Ignacio (feu), Victor (ga- s. XVII : cráneo, disentería, epidemia, esqueleto, síntoma, tráquea,
gnant), Valentín (en bonne santé), Lorenzo (couronné de laurier), meteoro (crâne, dysenterie, épidémie, squelette, symptôme, trachée,
Faustino (bon). météore)
s. XVIII : asfixia, hemorragia, miope, bibliografía, homónimo, sinfonía, L ES GERMANISMES
sistema, periferia, simetría (asphyxie, hémorragie, myopie, bibliogra-
phie, homonyme, symphonie, système, périphérie, symétrie) Les traces linguistiques laissées par les Wisigoths dans la langue
s. XIX-XX : anemia, anestesia, neumonía, psiquiatría, quirófano, castillane sont très réduites, puisqu’ils n'ont jamais été très nom-
quiste, raquitismo, autógrafo, biografía, fonética, taquígrafo, asteroide, breux. Ils finirent par adopter la langue des vaincus, le latin.
cosmos, cráter, arcaico, arqueología, programa. (anémie, anesthésie,
pneumonie, psychiatrie, chirurgie, kyste, rachitisme, autographe, bio- Guerre : guerra
graphie, phonétique, sténographe, astéroïde, cosmos, cratère, ar-
chaïque, archéologie, programme) Vie quotidienne : toldo (tente), sala (salle), banco(banc), jabón (sa-
von), toalla (serviette), fieltro (feutre), estofa (étoffe), atavío (parure),
Noms masculins en -a : el profeta, el asceta, el planeta, el cometa marta (marte), tejón (blaireau), albergue (refuge ou auberge), anca
(prophète, ascète, planète, comète) (croupe), ardido (courageux), bastión (bastion), brida (bride), burgo
(quartier), dardo (dard), despojar (piller), guisar (préparer), esgrimir
(brandir), ganar (gagner), guardar (surveiller), pago (paiement), talar
C. INFLUENCES GERMANIQUES
(détruire, couper),

R APPEL HISTORIQUE Mots à préparer : antorcha (torche), arenque (hareng), aspa (pale),
ataviar (parer), bandera (drapeau), bandido (bandit), barón (baron),
Les Wisigoths sont un peuple « barbare » de la famille des Goths batalla (bataille), botín (butin), brebaje (breuvage), campeador,
originaires de la Scandinavie. Ils ont dominé la péninsule Ibérique campeón (champion), capellán (chapelain), chimenea (cheminée), co-
pendant trois siècles, de 420 jusqu'à 711, date de la conquête par les fia (coiffe), danzar (danser), espía (espion), espuela (éperon), estaca
Berbères et les Arabes. (piquet), estandarte (étendard), estribo (étrier), faisán (faisan), falda
(jupe), fieltro (feutre), fraile (moine), galardón (récompense), galopar
Dans les premiers siècles de notre ère, ils commencent une longue (galoper), ganso (oie), gris (gris), guiar (guider), heraldo (messager),
homenaje (hommage), jabón (savon), maestre (maître), marca
migration qui va les conduire jusqu’à la péninsule Ibérique. A la de- (marque), parra (feuille de vigne), robar (voler), ropa (vêtement), sa-
mande de Rome, les Wisigoths se rendent en Espagne où ils com- cristán (sacristain), yelmo (casque).
battent et repoussent d’autres peuples germaniques, les Vandales et
les Suèves. D'abord associés à l'Empire Romain, ils ont réussi à éta- D. INFLUENCE DE LA LANGUE ARABE
blir un royaume indépendant après la chute de l'Empire d'Occident.
Ce sont eux qui ont réalisé l'unification politique, religieuse et juri- R APPEL HISTORIQUE
dique de la péninsule.
C’est au début du VIIIe siècle que la péninsule ibérique tombe aux
En 711, deux candidats se disputent la couronne royale. L’un d’eux mains des Arabes. Les musulmans désignèrent le territoire conquis
prend contact avec les garnisons musulmanes du Maghreb : sept comme l'Al-Andalus. La ville de Cordoue (Qurtuba en arabe) devient
milles Berbères franchissent le détroit de Gibraltar et débarquent en la capitale.
Espagne mettant fin à la dynastie wisigothe. En sept ans, l'ensemble
Dès l’an 756, Al-Andalus est transformée en émirat indépendant et,
de la péninsule est conquise. Quelques années plus tard, les Wisi-
dans le contexte d’un monde musulman de plus en plus divisé, en
goths, réfugiés dans les montagnes des Asturies, reprennent l'offen-
Califat en 929. Cordoue acquiert le statut de véritable métropole cul-
sive. C'est le prélude de la Reconquête, qui durera plusieurs siècles.
turelle, célèbre jusqu’au Moyen Orient pour son milieu intellectuel
brillant. Le califat de Cordoue constitue le creuset d’une pensée Vers la fin du XIIIe siècle, de cette Espagne musulmane ne reste plus
arabe médiévale qui connaîtra une longue postérité. que le petit royaume de Grenade, qui subsistera encore jusqu’en
1492.
Al-Andalus parvient à se constituer en centre économique et culturel
majeur, porteur d’une civilisation originale marquée par la rencontre Contrairement aux Goths, l'arabisation culturelle a transformé la carte
de l’Orient musulman et de l’Occident chrétien. Elle joue un rôle es- dialectale de l'Espagne. L'arabe était la langue dominante du sud de
sentiel dans la transmission de la pensée classique, de la philosophie la péninsule du VIIIe au XIIIe siècle. A travers l'Espagne, ont été dé-
et de la science de la Grèce antique à l’Europe chrétienne. La vie veloppés et introduits en Europe :
intellectuelle est intense. Les œuvres de Platon, d'Aristote, d'Euclide,
d'Hippocrate et d'Archimède ont été traduites en arabe, qui ont en- - les noms de l’algèbre, la trigonométrie, le système numérique
suite été versées dans le latin et puis dans les différentes langues arabe,
romanes d'Europe. - les noms de nouvelles industries : laine, soie, coton, cuir,
- les noms de nouvelles fleurs, fruits et légumes (lys, lauriers
roses, giroflées, abricots)

L ES APPORTS MORPHOSYNTAXIQUES
Le préfixe "-al" : La majorité des arabismes (70%) commencent par le
préfixe "al-", qui n’est autre chose que la trace de l'article arabe "al-"
invariable en genre et en nombre, ce qui a été interprété par les locu-
teurs du castillan comme faisant partie intégrante du mot:

almohada, alcoba, alcalde , (oreiller, alcôve, maire), etc. (Voir le Dic-


tionnaire des arabismes sur Moodle).

La plupart des arabismes en espagnol datent de l’époque du califat


(Xe siècle).

La terminaison / -i / est passée en espagnol en tant que partie inté-


grante d'adjectifs d'origine arabe, notamment sous la forme d'un suf-
fixe de gentilés (nom des habitants d’un lieu) :

alfonsí, andalusí, ceutí, israelí, irakí, iraní, marbellí, yemení, suní, chií,

Le nombre de mots polysyllabes, des mots aigus et de ceux qui ter-


minent par -r / -s a augmenté.

Alcantarilla (égoût, caniveau), alcachofa (artichaut), alicates (pinces),


almohada (oreiller)
L ES ARABISMES (= APPORTS LEXICAUX ) Maison : adobe, alacena, andamio, aldaba, aldea, barrio, arrabal, al-
calde, alguacil, albornoz, gabán, albañil, alberca, tabique, azotea,
Toponymes : azulejo, zaguán, alfombra, alcoba, almohada, jarra, alcantarilla, almi-
rez, rincón, sofá, taza
Commençant par A- ou Al- : Albarracín (< Al Banū Razin); Andalucía
ou Andalousie (< Ash-sharquía); Algarve ( < al gharb : ouest ou occi- Habillement : babuchas, albornoz, alhaja
dent); Algeciras ou Algésiras (< Al Jazeera : île verte); Almadén ; Al-
Science : el álgebra, el alambique, la alquimia, el alcohol, algoritmo,
calá (el castillo), Alcántara (el puente), Algeciras (la isla), Almonte,
cifra, álcali, cénit, cero, auge, elixir, jarabe, , alcanfor, almanaque, al-
Calatayud (castillo de Ayud), Alpujarras (tierras altas)
quitrán, acimut,
Commençant par beni- (le fils de) : Benicarlo ; Benicassim; Benissa ;
Animaux : alacrán, jabalí, garra, jauría
Benidoleig ; Benidorm ; Benitachell ; Benalmádena ;
Commerce : aduana, ahorro, arancel, alquiler, tarifa, almacén, bazar,
Commençant pour Guad- (rivière) : Guadalajara (< Wādī al-Hijārah;
(río de piedras) ; Guadalquivir (< al-wādĩ al-kabir : «la grande ri- Outils : alfiler, alicates, laúd, tambor
vière»); Guadarrama

Autres : Badajoz (< Batalyaws); Gibraltar ( < Yabal Tāriq: "montagne E XPRESSION GRAMMATICALE
de Tariq"); Jaén (< Jayyan); Lisboa ou Lisbonne ( < al-'Ishbūnah);
Madrid (< al-Magrīt); Medina (ciudad): Almedina, Medina del campo, Ojalá (= si dios quiere, inchalla) => pourvu que
Medinaceli (ciudad de Selim), Trafalgar ( < Taraf-al-ghar). Sevilla < ár.
sibiliya < isbiliya < isbaliy < lat. hispalis L E DÉCLIN DES ARABISMES
Anthroponymes, introduisant le prefixe "ibn", castillanisé en Ben- (le Jusqu'au XIe siècle, les arabismes ont été introduits sans entrave,
fils de) : Avengazar, Benavides, , Benigómez, Almodóvar, Almudena, mais à partir du XVe siècle, la perte de prestige de la langue arabe
Azucena, Fátima.
s'accentue et, en 1515, les Tolédans sont censurés parce qu'ils utili-
Vocabulaire de : sent « trop » d’arabismes. La période de la Renaissance marque leur
déclin. De nombreux termes arabes sont remplacés au fil du temps
Guerre : alcazaba, alférez, albarda, alcalde, alcázar alcazaba alfanje,
alférez, almenas adarga, alforjas, almirante, asesino, jinete, rehén,
par d'autres mots latins considérés comme plus prestigieux.
atalaya, hazaña, sarraceno, tambor, zaga,
Dans certains cas, le castillan a conservé les deux mots, sorte de
Agriculture: : azucena, alhelíes, albahaca, alcohol alfalfa alcachofas doublets linguistiques pour désigner une même réalité. Voici
alubias arroz, atún, albaricoque, acequia, aceituna, aceite, acelga, al- quelques exemples, en considérant que le premier mot est d'origine
falfa, algarroba, alubia, azafrán, azúcar, almíbar, azafrán, albóndiga, arabe, le second d'origine latine :
arrayán, altramuz, amapola, jazmín, azahar, nenúfar, algodón, be-
renjena, café, zanahoria, alubia, bellota, naranja, limón, sandía, • albéitar --> veterinario (lat.)
• alfageme --> barbero (derivado del preexistente “barba”)
Techniques d’arrosage : acequia, alberca, aljibe, noria, albufera, alco-
• alfayate --> sastre (occitano)
ba, (voir Arabismos en agricultura y jardinería)
• alarife --> arquitecto (griego a través del latín)
Métiers : alfarero, taza, jarra, alarife (arquitecto), albañil, almuédano, • aceituna et oliva («olive»);
alcalde, alguacil, albacea, almirante • aceite et óleo («huile»);
• alacrán et escorpión («scorpion»);
• jaqueca et migraña («migraine»); Rome et Jérusalem, l’un des lieux de pèlerinage les plus importants
• alcancía et hucha («tirelire»). du monde chrétien durant le Moyen Âge.
• alfarero et ceramista (« potier »)
• alacrán et escorpión
• alacena (armario empotrado con estantes) L ES GALLICISMES
• aljibe et cisterna («citerne »)
D’autres facteurs expliquent la présence du français médiéval en es-
• alfombra et tapiz («tapis»)
pagnol, comme :
Mots à préparer : ajedrez, alborozo, Alcachofa, alcahuete, alcohol, al-
fil, álgebra, algodón, algoritmo, alicates, almanaque, almohada, al-
- L’arrivée des courtisans et des nobles français en raison de ma-
muédano, Alpargata alquimia, añil, ataúd, azafata, azar, Azúcar, azul, riages « politiques » et liaisons dynastiques et aussi comme con-
Azulejo, cenit, cero, cifra, gandul, Hazaña, Jinete, joroba, marfil, séquence de l’appel à la lutte contre l’envahisseur musulman, con-
melena, sidérée comme un devoir de tout chrétien au Moyen Âge
- L’influence des troubadours provençaux et de la poésie épique au
E. PRÉSENCE DU FRANÇAIS cours du XIIe et XIIIe siècles dans la littérature espagnole.
- Le remplacement de l'écriture wisigothique par la carolingienne
H ISTORIQUE suite à l’arrivée des moines de Cluny en 1205, qui vont occuper les
La présence des mots d’origine française en espagnol est très an- principales abbayes espagnoles.
cienne. Ils commencent à pénétrer à partir du IXe siècle, lorsque le Termes militaires : mástil, batalla, aliar, blandir, dardo, estandarte, fle-
cha, galopar, maestre, malla, pabellón, amarrar, cable, quilla (mât, ba-
nord-ouest de la péninsule était une « marque » hispanique sous taille, allier, brandir, dard, bannière, flèche, galoper, maître, maille,
Charlemagne, une sorte de territoire tampon qui servait de protection pavillon, amarrer, câble, quille)
à son royaume et empêchait le passage des musulmans. Termes religieux : capellán, deán, fraile, hereje, hostal, preste,
chantre, monje. (aumônier, doyen, frère, hérétique, auberge, prêtre,
A partir du XIIe siècle, la route de Saint Jacques de Compostelle, si- chantre, moine)
tuée en Galice, enrichit l’espagnol de mots français apportés par des Termes de la société médiévale : duque, garzón, doncel, doncella, li-
Francs, des Provençaux et des Bourguignons. Le pèlerinage est né naje, dama, paje, galán (duc, garçon, donzelle, lignée, dame, page,
galant)
de la légende de Loisirs : danzar, vergel, ruiseñor, trovador, estuche, cascabel, flauta
la découverte (danser, verger, rossignol, troubadour, étui, clochette, flûte
vers l'an 800 du Maison: cofre, cordel, jaula, joya, antorcha, chimenea, mecha, jardín,
sépulcre de Saint patio, (coffre, ficelle, cage, bijou, torche, cheminée, mèche, jardin, pa-
Jacques, l'un des tio)
Nourriture : vinagre, faisán, brebaje, arenque, jamón, (vinaigre, faisan,
douze apôtres et breuvage, hareng, jambon)
l’évangélisateur Divers : desmayar, enojar, jornada, jornal, mensaje, cordel, correo,
de l'Espagne. forjar, maleta, pinza, avestruz, burdel, desastre, embajada, jamba
Son culte connaît (s’évanouir, mettre en colère, journée, salaire, message, corde, cour-
rapidement un rier, forger, valise, pinces, autruche, bordel, désastre, ambassade,
jambage)
grand succès et Suffixe -age : homenaje, lenguaje, linaje, mensaje, peaje, salvaje
devient, avec (hommage, langage, lignée, message, péage, sauvage)
Par la suite, l’arrivée des mots français a été constante . Au XVIIIe 16. Ancestral, del francés antiguo ancestre. Acad., 1927.
siècle, par exemple, toute l’Europe suivait la mode de la cour de Ver- 17. Ancestro, del francés antiguo ancestre. Acad., 1989.
18. Anélido ‘clase de gusanos’, del francés annélide. Acad., 1884.
sailles, les auteurs français étaient les plus lus et admirés, et 19. Anís, del francés anis y este del griego ἄννησον. En español desde
l’introduction de nouveaux gallicismes a été bien tolérée : el s. XV.
20. Aplique, del francés applique. Acad., 1927.
ambigú, croqueta, pantalón, corsé, buró, secreter, sofá, control, trous- 21. Arandela, del francés rondelle. En español desde principio del s.
seau, soiré, bibelot, carnet (carné), chalet (chalé), dossier XVI.
22. Arbotante, del francés arc-boutant. En español desde 1504.
L’arrivé des Bourbons français sur le trône de l’Espagne au début du 23. Argot, del francés argot. Acad., 1927.
XVIIIe siècle, et l’usage accepté internationalement d’utiliser le fran- 24. Arlequín, del italiano arlecchino y este del francés antiguo Helequin,
çais comme langue de la diplomatie, le commerce et la science fait nombre de un diablo. En español desde el s. XVII (Lope).
25. Arribista, del francés arriviste. Acad., 1970.
augmenter le nombre de gallicismes jusqu’au XXe siècle, lorsque
26. Art déco ‘estilo artístico’, voz francesa cruda registrada por la
cette influence commence à diminuer à la faveur des emprunts faits à Academia muy recientemente en la edición digital del DRAE y que
la culture anglo-saxone. Voici d’autres exemples de gallicismes plus aparecerá en su próxima edición impresa (23.ª).
récents : 27. Artillería, del francés artillerie. En español desde el s. XV.
28. Art nouveau ‘movimiento artístico’, voz francesa cruda registrada
1. Acaparar, del francés accaparer. Es un galicismo relativamente re- por la Academia muy recientemente en la edición digital del DRAE y
ciente, pues lo registró por primera vez la Academia en 1899. que aparecerá en su próxima edición impresa (23.ª).
2. Aclimatar, del francés acclimater. Academia, 1822. 29. Asamblea, del francés assemblée. Acad., 1770.
3. Acoquinar, del francés acoquiner. Documentado en español desde 30. Astrofísica, del francés astrophysique, derivado del griego ἄστρον
1605. ‘astro’ y el francés physique‘física’. Acad., 1936.
4. Acrotera ‘pedestal o remate en los frontones de los edificios’, del 31. Aterrizaje, del francés atterrissage. Acad., 1925.
francés acrotère. Acad., 1726. 32. Atrapar, del francés attraper, derivado de trappe ‘trampa’. Acad.,
5. Adosar, del francés adosser. Acad., 1914. 1726.
6. Aeroplano, del francés aéroplane. Acad., 1914. 33. Autobús, del francés autobus, de auto y omnibus. Acad., 1927.
7. Aerosol, del francés aérosol. Acad., 1970. 34. Autoestop o autostop, del francés autostop, de auto ‘auto’ y el inglés
8. Aerostática, del francés aérostatique y este de aérostat ‘aeróstato’. stop ‘parada’. Curiosamente, la Academia registró primero la adap-
Acad., 1884. tación gráfica autoestop (1989) que la grafía etimológica auto-
9. Aerostato, del francés aérostat y este del griego ἀήρ, ἀέρος ‘aire’ y stop(1992).
στατός ‘parado’, ‘en equilibrio’. La Academia registró este galicismo
en 1899 con tilde: aeróstato, hasta 1983. L ES HISPANISMES EN FRANÇAIS
10. Afiche ‘cartel’, del francés affiche. Acad., 1989.
11. Alemán, del francés allemand. Academia, 1770; sin acento (aleman) De la même manière que nous trouvons des gallicismes en espagnol,
hasta 1884. nous pouvons découvrir des hispanismes en français. Une partie de
12. Alevín, del francés alevin y este del latín ALLEVĀRE ‘criar’. Acad.,
1970. ces vocables ont été adoptés durant les XVIe et XVIIe siècles:
13. Alternativa, del francés alternative. En español desde el siglo XV.
14. Amateur, voz francesa cruda muy usada durante buena parte del La mode des hispanismes, qui est venue dans ces années (1620-
siglo XX (Acad., 1927), pero que hoy ya casi no se usa, por prefe- 1630) en France, est la dernière grande vague d’emprunts de la
rirse aficionado. langue française à l'étranger, avant les anglicismes de la fin du XVIIIe
15. Amotinar, del francés mutiner. En español desde principio del s. siècle.
XVII.
grandiose, bravoure, matamore (matamoros), fanfaron, fanfaronnade,
hâbler (tenir des discours où abondent l’exagération, l’emphase, la
vantardise), compliment, camarade, alcôve (alcoba), sieste, pícaro,
duègne (femme âgée chargée de surveiller une jeune fille de la no-
blesse espagnole ), mantille, guitare, castagnette, chaconne, passa-
caille et sarabande; créole, métis, nègre, mulâtre, embargo, caravelle,
patio
D’autres hispanismes plus récents sont :

Sombrero, brasero, bolero, tapas, paella, chorizo, margarita, mojito,


rumba, salsa, ceviche, siesta, chorizo, (jambon) serrano, gazpacho,
limonada, paella, plancha, sangria, xérès, aficionado, macho, una pa-
sionaria, fiesta, borrico, cordillera, embargo, hacienda, junta, cacha-
lote, guerrilla, mosquito, mirador, matador, toreador, conquistador,

F. LES AMÉRICANISMES
Avec la découverte du Nouveau Monde, l’espagnol entre en contact
avec des différentes langues indigènes, -plus d’une centaine dans le
continent à l’arrivée des Espagnols-. De nouveaux mots en prove-
nance des langues aujourd'hui disparues, telles que l'Arawak et le
Caraïbe, vont grossir le vocabulaire espagnol et ensuite l’européen
de la flore et de la faune. Les mots amérindiens s’invitent dans le cas-
tillan pour désigner des produits et des animaux inconnus jusqu’alors
en Europe car spécifiques au Nouveau Monde. Les langues de
l’Europe se sont nourries de ces termes indigènes, on les appelle les
américanismes. Le premier de ces mots à entrer dans le dictionnaire
espagnol est le mot canoa (canoë), du Taino. D’autres ont suivi
comme cacao, qui apparait pour la première fois en 1525 au
Mexique, ou maíz (maïs) en 1528. Les Espagnols ont appelé piña
l’ananas, par analogie avec la pomme de pin.

Aguacate, cacahuete, cacique, caiman, calabaza, caníbal, colibrí,


condor, chocolate, hamaca, huracán, iguana, jaguar, patata, pimiento,
piragua, puma, tabaco, tomate
Ces emprunts sont également passés en français De nos jours, la langue qui exerce la domination absolue dans le
monde est l'anglais. Sa présence s'étend à tous les domaines :

Monde du cinéma et de la télévision : casting, reality show, spoiler ...


Sports : sprint, corner, basket ...
Mode : top model, fashion, cool ...
Affaires : business, lobby, marketing, dumping, stock ...
Informatique : píxel, web, interfaz, chip, blog...

Pour tenter de contrecarrer le poids de l'anglais, l'espagnol a aussi


ses "contre-pouvoirs", comme par exemple, l'Institut Cervantes, le
Fundéu ou l'Académie espagnole (RAE), des institutions qui préconi-
sent le bon usage de l'espagnol et l’emploi des termes propres à
l’espagnol chaque fois que possible. Mais très souvent, ces institu-
tions acceptent le nouveau mot. En fait, l’emprunt d’un mot à l’autre
langue est parfois la solution la plus raisonnable.

Américanismes. Termes des langues amérindiennes qui entrent dans T RAITEMENT DES MOTS ÉTRANGERS
l’espagnol depuis la découverte du nveau monde. Nomment des réa-
Toutes les langues ont été enrichies au cours de leur histoire par des
lités qui n’existaient pas jusque là (nourriture, animaux, etc.).
contributions lexicales de différentes langues. Les extranjerismos ne
G. L’INFLUENCE DE L’ANGLAIS sont donc pas à rejeter en eux-mêmes. Cependant, il est important
que leur incorporation réponde autant que possible aux nouveaux
L ES ANGLICISMES besoins d'expression et, avant tout, que cela se fasse de manière
ordonnée et unitaire, en les adaptant au maximum aux caractéris-
L’espagnol est une langue qui tire son origine du latin, mais il a éga- tiques graphiques et morphologiques de l'espagnol.
lement incorporé dans son vocabulaire un grand nombre de mots
d’autres langues. Les Espagnols utilisent actuellement des mots De nombreux extranjerismos inclus dans la dernière édition du dic-
arabes (aceite, almohada, alcalde - huile, oreiller, maire ...), français tionnaire (2001) sont aujourd'hui d'usage courant en espagnol d'Amé-
(chalet, amateur, chef), italiens (balcón, pizza, novela (roman), des rique ou en Espagne. Dans son traitement, les critères suivants ont
langues indigènes américaines (patata, tiburón, chocolate – pomme été appliqués :
de terre, requin, chocolat ...) et d’autres langues, telles que le catalan,
1. Extranjerismos (barbarismes) inutiles. Ce sont ceux pour lesquels
l’allemand, le grec ou même le japonais (kimono, kárate). Tous ces
il existe des équivalents espagnols, de sorte que l’utilisation de la
mots font partie de l'histoire de la langue, et ils y sont arrivés parce
voix étrangère est censurée. Exemples: abstract (en espagnol, re-
qu'ils faisaient référence à une réalité nouvelle (comme la pomme de
sumen -résumé, extrait), back-up (en espagnol, copia de seguri-
terre ou la pizza), soit par un effet de mode ou par une économie de
dad, sauvegarde), consulting (en espagnol, consultoría).
langage. On les appelle les néologismes.
2. Extranjerismos nécessaires ou généralisés. Sont ceux pour les-
quels il n’existe pas ou n’est pas facile à trouver des termes équi-
valents en espagnol ou dont l’emploi est bien enraciné et répandu. L ES DERNIERS ANGLICISMES DANS LE DRAE
Deux critères sont appliqués, selon les cas :
- Maintien de l'orthographe et de la prononciation d'origine. bal- Mots anglais qui ont subi une légère adaptation phonétique (accent) :
cómic, champú, túnel, bumerán (boomerang), magacín (magazine)
let, blues, jazz ou software. Dans ce cas, il est obligatoire de
D’autres fois, le mot anglais est « hispanisé » : escáner (scanner),
les écrire en italique ou entre guillemets pour indiquer leur or- eslógan (slogan), iceberg, trust, jersey, cederrón
thographe non espagnole. Mots qui ont subi une adaptation orthographique pour l’adapter à la
- Adaptation de l'orthographe et de la prononciation d'origine. prononciation espagnole : zoom (zum), shoot (chute), check
láser, fútbol, güiski, friki... Ainsi, pour le gallicisme « quiche » (chequeo) o crack (crac).
l’utilisation de cette même orthographe est proposée en espa-
Environ 80% des mots empruntés prennent le genre masculin. Ces
gnol, mais avec la prononciation à la française. Par contre, le
mots posent parfois des interrogations et créent une certaine confu-
mot « croissant » est adapté et on l’écrit cruasán.
sion en ce qui concerne la formation du pluriel.
Dans le dictionnaire de la Real Academia online, on voit si le mot doit
Sport : aeróbic, córner, fútbol, penalti
être écrit en italique ou pas. Habillement: biquini, panti, short
Informatique: chip, CD-ROM, hardware, interfaz, píxel, web, blog
Biomédecine : chequeo, epidural, lifting
Transports : Gasoil, raíl o vagón, aerolínea, single, chárter, overbook-
ing, catamarán, yate
Autres : digitalizar, presurizar, pauperizar, nominar, esnifar, güisqui,
whisky, cómic, champú, túnel, footing
V. LES AUTRES LANGUES
1. INTRODUCTION : LA SITUATION LINGUISTIQUE EN - Du sud:
ESPAGNE o Andaluz (en Andalousie)
o Extremeño (en Extrémadure)
Plusieurs langues vernaculaires sont parlées en Espagne. L'espagnol o Murciano (en Murcie)
ou le castillan, la langue officielle dans tout le pays, est la langue pré- o Canario (aux Canaries)
dominante dans pratiquement toutes les communautés autonomes
d'Espagne. Six des dix-sept communautés autonomes espagnoles
disposent, en plus du castillan, d'autres langues comme langues co-
officielles.

L'existence de deux langues sur un même territoire ne signifie pas


que les deux langues coexistent dans un état de bilinguisme harmo-
nieux. La prépondérance et le prestige de l'espagnol sur les autres
sont tels que, à des degrés divers, en Catalogne, au Pays basque ou
en Galice, les langues vernaculaires sont considérées comme des
langues minoritaires qui doivent être institutionnellement soutenues
avec diverses stratégies, à travers différents plans d'aménagement
linguistique et normalisation.

A l'exception du basque, langue isolée, toutes les langues vernacu-


laires actuellement parlées en Espagne appartiennent au groupe des
langues romanes.

2. LES VARIÉTÉS DE L’ESPAGNOL


L’Espagnol est une langue pluri centrique, c’est-à-dire qu’il y a plu-
Ces variétés découlent de l'assimilation différente de la langue dans
sieurs centres de standardisation. La norme n’est pas faite seulement
les différents territoires, au fur et à mesure que la Castille incorpore
à Madrid mais aussi en Amérique du Sud et ailleurs dans le monde.
de nouveaux territoires pendant la Reconquête. On parle de dialectes
« synchroniques ».
A. EN ESPAGNE
On compte aussi deux dialectes historiques (minoritaires) :
L ES DIFFÉRENTS DIALECTES
- Navarro-aragonés (au Nord d’Aragon) (en extinction)
Les dialectes principaux (non reconnus comme langues officielles)
- Asturleonés (en Asturies et Léon, et quelques régions limi-
sont ceux :
trophes)
- Du centre et nord (en mauve)
L E CONCEPT DE DIALECTE PAR RAPPORT À CELUI DE LANGUE En 1492, les Rois catholiques, après la chute de Grenade, suivant
l'exemple des autres nations européennes, décident d'expulser les
Les dialectes sont les variantes ou modalités régionales ou territo- Juifs qui refuseraient la conversion au catholicisme afin d’arriver à
riales d'une langue. En d'autres termes, un dialecte est la manière l’unité religieuse après d’avoir réussi l’unité territoriale.
particulière dont une langue est parlée sur un territoire donné.
Près de 200 000 Juifs espagnols s'exilent principalement en Turquie,
Il n'existe pas de critères universellement acceptés pour distinguer dans les Balkans, en Asie Mineure, en Afrique du Nord ; mais aussi
les langues des dialectes, bien qu'il existe plusieurs paramètres qui aux Pays-Bas, en Grèce, en Bulgarie, en Yougoslavie, en Égypte, au
donnent parfois des résultats contradictoires. Les dialectes sont des Liban et en Syrie (=> diaspora très large). En outre, il existe d'impor-
dialectes, plutôt que des langues, parce que : tantes communautés en France, aux États-Unis et en Israël. Dans ce
nouvel exode, les Juifs emportèrent leurs biens, leur culture, leur reli-
- ils ne sont pas (ou ne sont pas reconnues comme) des
gion et leur langue, une variété de l'espagnol tel qu’il était parlé au
langues littéraires.
XVe siècle, une langue de fusion qui reprend des arabismes maro-
- les locuteurs n'ont pas d'état ou de nation propre, ou ne sont
cains, des turquismes, bref des emprunts recueillis dans les pays-
pas suffisamment nombreux.
hôtes. Il comprend 4% d'emprunts à l'hébreu, 15% au turc, 20% au
- ils manquent de prestige ou de reconnaissance, et ne sont pas
français, etc., le tout sur un substrat espagnol du XVe siècle.
utilisés dans des contextes d'importance ou de pertinence so-
ciale. Par conséquent, du point de vue phonétique, le judéo-espagnol ac-
- il n'y a pas assez de différences grammaticales avec une autre tuel doit être similaire au castillan parlé au XVe siècle, lorsque
langue dominante. l’espagnol n'avait pas encore subi l'assourdissement de certains sons
- les différences sont exclusivement phonétiques ou liées au vo- et que les phonèmes /θ/ (correspondant aux syllabes ce- et -ci-) et /x/
cabulaire. (la lettre «j») n’existaient pas. D’autant plus, dans le judéo-espagnol,
on retrouve encore la distinction médiévale entre la prononciation de
Outre ces paramètres, il existe également un paramètre purement
« b » et « v » disparue aujourd’hui en espagnol (mais toujours pré-
politique ou circonstanciel :
sente en français).
- ils ne bénéficient pas du soutien institutionnel d'une Académie,
On y trouve aussi de nombreux « vulgarismes », qui furent condam-
d'un gouvernement national ou régional, ou de lois.
nés plus tard par l’Académie:
B. EN DEHORS DE L’ESPAGNE agora (ahora) – 'maintenant'
prove (pobre) - 'pauvre'
L E JUDÉO - ESPAGNOL , LA LANGUE DES S ÉFARADES guevo (huevo) – 'oeuf'
guerfano (huérfano) - 'orphelin'
Le mot Sefarad provient de la langue hébraïque médiévale, et dé-
signe la péninsule Ibérique. Les Sépharades ne parlaient pas l'hébreu et d’autres « archaïsmes » (= termes qui n’existent plus en espagnol
mais une sorte de castillan qu'ils appelaient le judéo-espagnol ou le « mais qui ont été conservés dans cette langue fossile) : merkar, trokar,
ladino ». mansevez (acheter, échanger, jeunesse).
Les Juifs de cette époque écrivaient le castillan non pas en alphabet espagnol publié par l’Autorité nationale du ladino pendant trente-sept
latin, mais en « aljamía » (de l’arabe classique a'ǧamiyyah), c'est-à- ans, a cessé de paraître pour des raisons financières
dire avec des lettres de l'alphabet hébreu, tout comme les Arabes
écrivaient la langue romane avec l'alphabet arabe (« alifato »). En juin 2015, le parlement espagnol a voté une loi proposant l’accès
à la nationalité espagnole aux descendants des Séfarades expulsés
au XV e siècle pour « réparer une erreur historique ». En décembre
2017, 4 300 personnes de 60 états différents avaient bénéficié de
cette naturalisation

L’ ESPAGNOL D ’A MÉRIQUE
Avec la découverte du Nouveau Monde, le castillan se propage au-
La musique séfarade, nous permet de voyager dans le temps et delà des frontières de la péninsule. L'espagnol parlé en Amérique du
d’imaginer comment les Castillans parlaient au XVe siècle : Sud, de par la conquête, la colonisation et l'évangélisation des nou-
veaux territoires, présente une grande variété phonétique et lexicale.
VIDEO: nani nani http://www.youtube.com/watch?v=JV0oYTyejRk Introduit à partir du XVIe siècle avant la fixation de la langue, il con-
serve encore certains vestiges du passé sociaux-linguistique des
VIDEO Hija Mia
premiers colons.
http://www.youtube.com/watch?v=XAPzqAAvcTc&feature=related
En fait, la plupart des colons venaient d'Andalousie et les groupes
VIDEO " Morena me llaman"
d'immigrants venus des différentes régions d'Espagne se sont retrou-
https://www.youtube.com/watch?v=6YgjBh9wHHg&list=RD8mlUDkXL
vés à Séville pour leur voyage. Séville devint le principal port espa-
cPY&index=4
gnol pour les voyages avec le Nouveau Monde, car il était le seul
ayant le droit de commercer avec les Amériques.

Sur le chemin menant au nouveau continent, les bateaux faisaient


halte aux îles Canaries, ce qui suggère que les gens ont commencé à
utiliser les caractéristiques de ces régions, dont la capitale linguis-
tique était Séville, et dont la norme différait légèrement du castillan
parlé plus au Nord, notamment à Valladolid et Madrid. En effet, au
XVIe siècle, les Espagnols de la Cour ont estimé que les Andalous
parlaient mal du fait qu’ils s'étaient mêlés aux Maures et que, par
Pedri = perdi / el hijo se prononce [iʃo] / le v est prononcé [v] conséquent, leur langue était à moitié arabisée.

Le ladino serait aujourd’hui en voie d’extinction avec 300 000 locu- Cette plus grande proportion de colons andalous, qui s'installèrent
teurs en Israël et 200 000 dans les autres pays. En janvier 2017, le principalement dans les Caraïbes et dans la zone antillaise au cours
semestriel Aki Yerushalayim, principal écrit contemporain en judéo- des premières années de la conquête, aurait conféré à l'espagnol
américain des caractéristiques particulières, qui se manifestent sur- A partir du XIXe siècle, l’espagnol américain a été influencé par les
tout dans l'aspect phonétique. langues d'autres minorités d’émigrants européens, et depuis, il tourne
dans l'orbite culturelle des États-Unis et de l’anglais. Ce contact est à
Au début, les conquistadors et les colons ont encouragé l’utilisation l’origine du transfert continu des anglicismes vers l’espagnol de
des langues dites « générales », c’est-à-dire des langues qui, en rai- l’Amérique latine et du phénomène du « spanglish », une forme mé-
son de leur nombre élevé de locuteurs et de leur extension, étaient tissée d’anglais, qui envahit maintenant les séries et la musique de la
les plus utilisées par différents peuples, tels que le nahuatl au minorité latine des États-Unis.
Mexique ou le quechua dans le Pérou.
Quelques caractéristiques :
En Amérique, un grand nombre de colonisateurs se sont ainsi india-
nisés et ont appris les langues autochtones. - Phonétiques: seseo (/s/ au lieu de c, z)
- Morphosyntaxiques: voseo (utilisation du pronom vos au lieu
Les hommes d’église les ont suivis. La question de comment ap- de tú)
prendre la religion catholique aux indiens était posée. L'influence de - Lexicales :
l'Église a été très importante, en particulier par l'intermédiaire des (notes ces mots sont issus de divers pays d’Amérique Latine)
franciscains et des jésuites, qui ont réalisé un travail intense d'évan-
gélisation et d'éducation par la construction d'écoles et d'églises sur
tout le continent. En Espagne, les dirigeants voulaient que les Indiens
parlent l'espagnol, mais les missionnaires pensaient qu’il était impos-
sible d’apprendre les dogmes de la foi, complexes, en espagnol. Il
était préférable, pour garantir la réussite de la tâche, d’apprendre les
langues autochtones et, ce faisant, d'étudier aussi leurs alphabets et
d'écrire leurs grammaires. Souvent, les religieux devenaient gouver-
neurs des provinces parce qu'ils parlaient la langue de la région. Pour
communiquer avec les Indiens, il était donc plus facile d'apprendre la
langue locale. Mais tant d’enthousiasme pour les Indiens était un in-
convénient pour la diffusion de la langue espagnole. On peut affirmer
que la conservation des langues autochtones est due à la politique
religieuse de l'Église en matière d'évangélisation. Ainsi, elle se sont
conservées et ont continué à être utilisées. En 1560, le roi Philippe II
accepta même la création de chaises de langues générales in-
diennes.

Pendant le règne de Carlos II (1665-1700), des voix à la Cour


s’étaient exprimées en faveur d’une utilisation plus intensive de l'es-
pagnol en Amérique, et considéraient que la politique linguistique de
l’Eglise mettait un frein à l’expansion souhaitée de l’espagnol.
3. LES AUTRES LANGUES CO-OFFICIELLES DE L’ÉTAT almeja palourde, brincar sauter,
cachalote cachalot, caramelo caramel,
mejillón moule, despejar dégager,
ostra huître, mermelada confiture,
bambú bambou, buzo plongeur, acantilado
biombo paravent, falaise,
carambola chance/hasard/carambole, carabela caravelle,
barullo vacarme/boucan/cohue, chubasco averse,
bicho bestiole, vigía vigile/surveillant,
enfadarse se fâcher,

B. LE BASQUE / EUSKÈRA
La langue basque n'a aucun lien avec les langues indo-européennes,
elle n'a donc aucune racine latine, grecque ou germanique, c’est une
langue à part. Elle est la seule langue de la péninsule Ibérique à avoir
survécu à la langue latine (grâce à sa situation géographique proté-
gée). Concernant son origine, différentes hypothèses ont été émises
Le castillan ou l’espagnol est la « langue officielle de l’État », dans le
(langue balkanique ? africaine ?) mais sans certitudes.
royaume d’Espagne. Quatre langues ont aussi un statut officiel dans
leurs communautés autonomes respectives : le catalan, le valencien, Le basque est une langue transpyrénéenne, c’est-à-dire qu’elle est
le basque et le galicien. parlée des deux côtés des Pyrénées, en France et en Espagne.
L’Euskera batua ou « langue basque unifiée », une variété standard
Le catalan et le valencien sont des variantes dialectales d’une même
qui tente d'unifier les sept dialectes existants, est parlée par environ
langue mais, pour des raisons politiques, cette même langue
700 000 personnes, environ 1/4 de la population du Pays basque et
s’appelle tantôt catalan tantôt valencien selon la communauté où elle
de la Navarre.
se parle.
Pour certains linguistes, l’influence du basque sur le castillan a été la
A. LE GALICIEN suppression du « f » initial en castillan. Par exemple, le mot latin «fa-
Le galego est une langue romane issue de la langue médiévale dite rina» est devenu harina en castillan; le verbe «fabulare» est passé à
galaïque-portugaise qui a donné naissance au galicien et au portu- hablar («parler»); le verbe «facere» est devenu «hacer»; le nom «fi-
gais. Jusqu’au XIIIe siècle, le galego et le portugais formaient une lium» est devenu hijo. La consonne initiale latine [f] s'est donc modi-
seule et même langue. C’est vers 1500 que des différences ont fiée en [h] aspiré, avant de disparaître dans la prononciation. Le por-
commencé à apparaître et que le galicien s’est distingué du portu- tugais ou l’italien, pour leur part, à l'instar du français, n'ont pas connu
gais, qui est aujourd’hui une langue parlée au Brésil par plus de 200 cette influence puisque les mêmes mots sont farinha (farine), fazer
millions de personnes. Cette langue parlée en Galice aurait à l’heure (faire) et filho (fils).
actuelle 3,1 millions de locuteurs. Aquelarre - sabbat (réunion de sorcières)
Chabola(s) - taudis, bidonville, cabane
On trouve également des emprunts du Galicien en Espagnol. Chistera - chapeau haut-de-forme
Pizarra - ardoise, tableau noir obstacle au sentiment d’appartenance nationale. Le retour de la dé-
Sapo - crapaud mocratie après la mort du dictateur et la nouvelle Constitution démo-
Socarrar - roussir, brûler légèrement
Zamarra - pelisse, veste fourrée, peau de mouton
cratique de 1978 permit la création de 17 communautés autonomes,
la restauration de la Generalitat et le retour du catalan comme langue
C. LE CATALAN ET LE VALENCIEN officielle dans cette Communauté.

Le catalan est une langue à part entière, comme le français, ou


H ISTORIQUE
l’italien. Il est aujourd’hui parlé par plus de 10 millions de locuteurs.
C’est une langue romane dérivée du latin. Jusqu’au Moyen-âge, le Le catalan est aussi une langue transpyrénéenne : côté français, elle
catalan et l’occitan formaient une seule et même langue : les aléas est parlée dans le Roussillon, en Cerdagne et en Andorre ; côté es-
historiques ont fait que, progressivement, cette langue s’est scindée. pagnol, elle est parlée en Catalogne, dans le Pays Valencien et dans
En 1934, les intellectuels catalans ont reconnu le catalan comme les Baléares, mais avec d’importantes variations dialectales. La
langue distincte de l’occitan. grande majorité des catalans parle l’espagnol, qui pour beaucoup
d’entre eux, est leur langue maternelle. En Catalogne, 30 % des jour-
Au XVIIIe siècle, avec l’arrivée de la dynastie française des Bourbon, naux vendus sont publiés en catalan, et la chaîne de télévision offi-
la région a été progressivement soumise à une castillanisation (il était cielle, TV3, émet ses programmes en catalan, fidèle à des objectifs
interdit de parler le catalan), bien qu’il ait continué à servir de langue politiques nationalistes, voire indépendantistes.
véhiculaire dans la vie quotidienne, surtout dans les classes popu-
laires. L E PAYS VALENCIEN
Au XIXe siècle, l’expansion industrielle de la Catalogne permet à sa Le valencien est le catalan parlé dans la Communauté Valencienne,
bourgeoisie de revendiquer une autonomie politique, appuyée par un qui regroupe les villes de Castellón, Valencia et Alicante.
épanouissement artistique et linguistique : c’est la Renaixença, un
mouvement culturel où le catalan retrouve son statut et sera revendi- Le gouvernement de la Generalitat de Valencia soutient, depuis long-
qué comme langue officielle. temps, que la variante dialectale parlée au Pays valencien n'est pas
du catalan. C'est ainsi que « le valencien » est reconnu comme
La République espagnole rétablit en 1931 la Generalitat de Catalu- langue co-officielle avec l’espagnol depuis 1983. Cette mesure de «
nya, un organe politique régional, avec des compétences considé- sécession linguistique » a été décidée par les partis politiques de la
rables, bref une certaine autonomie politique. Le catalan redevient région. D’autres considèrent plutôt que c’est une variété de la langue
une langue officielle et la Generalitat s’attèle à la normalisation et à la catalane. De même, les habitants des Baléares préfèrent appeler leur
restauration de l’usage du catalan dans l’enseignement, les médias et langue le majorquín, qui est proche du catalan.
la littérature lorsque la guerre civile éclate en 1936.
L ES CATALANISMOS EN ESPAGNOL
La victoire du général Franco (1939) met fin à cette courte période
d’autonomie accordée : la dictature du général étouffe toute forme Bien que le dictionnaire du RAE ne reconnaisse pas la signification
d’opposition et interdit l’usage officiel du catalan jusqu’en 1975, de « prêt de la langue catalane », il existe, selon certains auteurs,
l’année de sa mort. Comme d’autres langues régionales, le catalan a environ 700 catalanismes plus ou moins courants en castillan.
été réprimé considérant que le fait de garder sa propre identité faisait
Navigation : buque, bajel, bergantín, galera, nao, viaje, aferrar, em- D. LA QUESTION DE LA « NORMALISATION LINGUISTIQUE »
palmar, calafatear, amainar, encallar, zozobrar, al socaire, timonel,
maestre, contramaestre, muelle. Le castillan a exercé depuis des siècles une forte concurrence à ces
Pêche et animaux marins: palangre, calamar, anguila, jurel, rape
langues particulières au point de les éclipser presque totalement
Géographie : tramontana, viento maestral, amainar, golfo
Commerce : bala (fardo de mercancía), mercería, mercader, oferta, a dans la vie publique. C'est pourquoi les Catalans et les Basques, par
granel, balance, peaje, pujar, cotejar, lonja, avería (daño en la mer- exemple, parlent de « normalisation » au sujet du catalan et du
cancía), basque. Mais en Espagne, la « normalisation » revêt un sens diffé-
rent du français. Ainsi, la « normalisation » renvoie à un processus de
La prospérité artisanale catalane jusqu’au XVIe siècle et industrielle standardisation, et réfère au rétablissement d'une situation dans son
du XIXe, a favorisé l'entrée en castillan d'autres mots : état antérieur, ce qui signifie que l'on veut rendre aussi normal
Métiers : obrador, faena.
l'usage du catalan que celui du castillan. La normalisation correspond
Textile: falda, faja, sastre, calceta, cortapisa ‘guarnición de tela’, bro- en fait à un programme politique : il s'agit de faire exercer par la «
cado, guante, quijote ‘pieza del arnés’; delantal langue propre » les mêmes fonctions que celles jusque-là occupées
Métaux et orfèvrerie: molde, crisol, buril, esmalte; par la langue officielle de l'État espagnol.
Architecture: capitel, escayola, nivel o formalete;
Arts graphiques: imprenta, cartel; Pour remplir les postes de fonctionnaires, les gouvernements auto-
Transport: carreta, volquete o carruaje. nomes sont autorisés à prévoir des examens pour vérifier la connais-
Nature : bosque, follaje, palmera, boj, trébol, clavel, escarola, coliflor,
caracol.
sance de leur langue co-officielle.
Nourriture: convite, paella, confite, chuleta, ensaimada, butifarra, anís,
Maison: barraca, escabel, frazada, picaporte, reloj, retrete.
Gens de mauvaise condition: bandolero, forajido, esquirol, panoli.
Dans cette section, nous pourrions inclure le mot forastero, qui avait à
l’origine un sens péjoratif semblable au mot charnego (catalanisme du
XXe siècle pour dire « immigré »).
Autres: pantalla, cordel, dosel, burdel, clavel, naipe, cohete, peseta,
betún
VI. SYMBOLES DE L’ESPAGNE
1. LE DRAPEAU ET L’HYMNE NATIONAL

A. L’ÉVOLUTION ICONOGRAPHIQUE DU DRAPEAU ESPAGNOL

Quand Charles Quint, le petit-fils des rois catholiques, est sacré em-
pereur de l'empire romain germanique à Aix-la-Chapelle le 23 octobre
1527, les symboles de l'Espagne sont alors intégrés au bouclier im-
périal, qui regroupe d'autres vastes territoires : l’Autriche,
l’Allemagne, les Pays-Bas, La Flandre, le Luxembourg, la Bourgogne,
etc. Le Blason de l’empereur est composé de l’aigle bicéphale des
Augsbourg, la couronne impériale, le collier de la Toison d’Or, la croix
de Bourgogne, et les deux colonnes d’Hercule, entourées du phylac-
tère « Plus Ultra » (au-delà) en allusion au Nouveau Monde améri-
cain.

Le pavillon (= pour les bateaux) de l'Es-


C’est à l'époque des Rois catholiques, à la fin du 15e siècle, que pagne remonte à la fin du XVIIIe siècle,
prend forme le blason du royaume d'Espagne. Il est formé par l’aigle, lorsque le Roi ordonna en 1785 son em-
symbole de l’évangéliste Saint Jean, des symboles de Castille, Léon, ploi pour différencier les navires de la
Aragon (barres jaunes et rouges), Navarre, Grenade et du Royaume marine d'Espagne de ceux de la France.
des Deux-Siciles. Le tout flanqué du joug et des flèches, symboles du Il a été adopté comme drapeau officiel
roi Ferdinand d’Aragon et de la reine Isabelle de Castille respective- de la nation en 1843.
ment.
C'est un drapeau bicolore, rouge et or, la bande centrale et de double Peu après l’instauration de la monarchie parlementaire du nouveau
largeur, avec le blason national. Les couleurs sont liées à celles des roi Juan Carlos I (1977), le blason franquiste est remplacé par la ver-
plus anciens royaumes espagnols : Castille et Léon. sion actuelle, qui intègre la couronne surmontée de la croix chré-
tienne.
Lors de la première république (1873-1874), le drapeau espagnol va
subir une modification en étant dépourvu de la couronne royale (il est Dans ses quartiers, les emblèmes des royaumes historiques de l'Es-
parfois encore affiché par les familles républicaines, antiroyalistes). pagne : Castille, Leon, Navarre et Aragon. Le royaume de Grenade
est représenté par la grenade stylisée en bas. De chaque côté, les
colonnes d'Hercule représentent les deux promontoires, Gibraltar et
Ceuta, qui encadrent le détroit
de Gibraltar. Un ruban autour
des deux colonnes porte la de-
vise impériale "Plus Ultra" (plus
loin, au-delà), en allusion aux
anciennes possessions espa-
Un nouveau changement sera effectué lors de la seconde république gnoles en Amérique. Au centre,
(1931-1939), lorsque la bande rouge si- trois fleurs de lys de la dynastie
tuée dans la partie inférieure devient vio- des Bourbons.
lette, la couleur qu’arboraient les dra-
peaux des Castillans (comuneros) qui
avaient combattu contre Charles Quint au
XVIe siècle, pour souligner leur opposition
à la monarchie

En 1945, le régime du général Franco adopte à nouveau le drapeau


traditionnel, rouge et or, orné des armoiries des Rois catholiques, les
colonnes sur l’eau, et de la devise « Una, grande, Libre », pour se
référer à la patrie.
La possibilité d'y ajouter des paroles a été régulièrement mise sur le
tapis. Il a même été question de faire perdre à la Marcha son statut
d'hymne. Ainsi en 1870, le gouvernement libéral de l’époque lance un
concours pour composer un nouvel hymne qui colle davantage à
l’image progressiste que veut s’octroyer le pays. Sans succès, beau-
coup de propositions étaient librement inspirées de la Marseillaise.
Depuis, d’autres essais n’ont jamais abouti.

Lire : https://www.la-croix.com/Monde/Europe/Lhymne-national-
espagnol-restera-sans-paroles-2018-02-26-1200916560

2. PERSONNAGES UNIVERSELS
DE L’IMAGINAIRE ESPAGNOL

B. L’HYMNE NATIONAL
A l’origine, l’hymne national espagnol était une marche militaire inter-
prétée par l'infanterie de Grenade, la troupe qui précédait le mo-
narque dans les défilés. Cette mélodie fut déclarée « Marcha de Ho-
nor » par le Roi en 1770. Pour cette raison, l’hymne espagnol n’a pas
de paroles. Cette Marcha Granadera a été l'un des symboles de l'uni- Toro de Osborne : était une bodega de vin, une marque de liqueurs
té espagnole lors de la guerre de l’Indépendance contre les troupes qui avait ce taureau comme symbole. On les retrouvait sur tout le ter-
de Napoléon au début du XIXe siècle. ritoire Espagne comme panneaux publicitaires.

En 1815, la marcha, désormais dite « royale » devient l'unique thème Cheval de Numancia : retrouvé dans un site archéologique. Numan-
sonore en toutes circonstances lors des cérémonies d'hommage aux cia est une ville ibère qui a été assiégée 7 ans. Les habitants ont pré-
rois. Elle a été l'hymne officiel de la nation jusqu’en 1931 (avec féré se suicider plutôt que de se rendre.
l’avènement de la République). Las Meninas : un des tableaux les plus célèbres de Velazques. La
petite fille et son éventail. Elle a été réinterprétée par Picasso.
QUE POUR VOIR EN UN JOUR FLÉTRIR TANT DE LAURIERS ?
A. PERSONNAGES HISTORIQUES
MON BRAS QU’AVEC RESPECT TOUT L ’ESPAGNE ADMIRE ,
L E C ID , EL VALOR Y EL HONOR , (XII E SIÈCLE ) MON BRAS , QUI TANT DE FOIS A SAUVÉ CET EMPIRE ,
Le Cid, figure historique espagnole, est un noble castillan, Rodrigue TANT DE FOIS AFFERMI LE TRÔNE DE SON ROI ,
Diaz de Vivar. Il est banni de la cour de Burgos, et mène une exis- TRAHIT DONC MA QUERELLE , ET NE FAIT RIEN POUR MOI ?
tence de mercenaire et reprend des terres aux Musulmans, dont Va- Ô CRUEL SOUVENIR DE MA GLOIRE PASSÉE !
lence. Ces derniers le surnomment Sidi (seigneur). Il incarne l'esprit
ŒUVRE DE TANT DE JOURS EN UN JOUR EFFACÉE !
de la Reconquête.
NOUVELLE DIGNITÉ FATALE À MON BONHEUR !
Vers 1142, un jongleur castillan compose à la gloire du héros un PRÉCIPICE ÉLEVÉ D ’OÙ TOMBE MON HONNEUR !
poème dans un style qui rappelle les plus vieilles chansons de geste FAUT-IL DE VOTRE ÉCLAT VOIR TRIOMPHER LE COMTE ,
françaises. C'est un chef-d'œuvre. Son originalité ne réside pas seu-
ET MOURIR SANS VENGEANCE , OU VIVRE DANS LA HONTE ?
lement dans les qualités littéraires, sa ferveur et la netteté de son ex-
pression, l'ouvrage est aussi remarquable parce qu’il est la première COMTE, SOIS DE MON PRINCE À PRÉSENT GOUVERNEUR ;
chanson de geste de la poésie épique espagnole. CE HAUT RANG N ’ADMET POINT UN HOMME SANS HONNEUR ;
ET TON JALOUX ORGUEIL PAR CET AFFRONT INSIGNE
L’histoire est divisée en trois chapitres : l'exil (avec les adieux du Cid
MALGRÉ LE CHOIX DU ROI , M’EN A SU RENDRE INDIGNE .
à sa famille) ; les noces des filles (avec la prise de Valence et la visite
de la famille), et l'affront de Corpes (les filles battues et répudiées par ET TOI , DE MES EXPLOITS GLORIEUX INSTRUMENT ,
leurs époux, princes de la cour de León, qui seront condamnés par la MAIS D’UN CORPS TOUT DE GLACE INUTILE ORNEMENT ,
Cour de justice). En guise d’épilogue, le remariage des filles dans des FER, JADIS TANT À CRAINDRE , ET QUI , DANS CETTE OFFENSE ,
familles royales.
M’AS SERVI DE PARADE , ET NON PAS DE DÉFENSE ,
Au XVIIe siècle, Pierre Corneille, un grand auteur de théâtre français, VA, QUITTE DÉSORMAIS LE DERNIERS DES HUMAINS ,
célèbre surtout pour ses tragédies, s’empare de la figure du Cid pour PASSE, POUR ME VENGER , EN DE MEILLEURS MAINS . »
en faire sa meilleure tragi-comédie. On reproche à Corneille de
n’avoir rien inventé, et d’avoir copié un auteur espagnol, Guillén de Œuvres Inspirées par Rodrigo Díaz de Vivar :
Castro. Quoi qu’il en soit, cette pièce lui apportera la gloire et fait
- El Cantar de mio Cid, chanson de geste castillane retranscrite
connaître le personnage au-delà des frontières de l’Espagne.
au XIIIe siècle par Per Abad ;
Le monologue de Don Diègue est l’un des passages les plus célèbres - Las Mocedades del Cid, de Guillèn de Castro ;
de la littérature française : - Le Cid (1636), tragicomédie en vers de Corneille ;
- Le Cid (1865), opéra de Peter Cornelius;
- Le Cid (1885), opéra français de Jules Massenet ;
Ô RAGE ! Ô DÉSESPOIR ! Ô VIEILLESSE ENNEMIE !
- Le Cid (1961), film américain d'Anthony Mann avec Charlton
N’AI-JE DONC TANT VÉCU QUE POUR CETTE INFAMIE ? Heston et Sophia Loren
ET NE SUIS -JE BLANCHI DANS LES TRAVAUX GUERRIERS
Christophe Colomb naît à Gênes en 1451. Le port italien accueille de
très nombreux navires sillonnant la Méditerranée. Très bon marin,
passionné de géographie et habile en affaires, il s’installe à Lisbonne
en 1477, où il rejoint son frère cadet Bartolomeo, qui tient une bou-
tique de cartographie. Sa jeunesse n'est connue qu'à travers de très
minces témoignages. Encore aujourd'hui, de nombreux chercheurs
en tirent argument pour échafauder des hypothèses plus ou moins
farfelues sur son lieu de naissance et ses origines. Christophe Co-
lomb reçoit de son beau-père des cartes et des documents en grand
nombre. Il en fait bon usage et lit aussi le Livre des Merveilles de
Marco Polo et l'Imago Mundi, un célèbre ouvrage de géographie du
C HRISTOPHE C OLOMB (1451 - 1506), LA DÉCOUVERTE , L ’ AVENTURE , cardinal Pierre d'Ailly. Sur la foi de ses lectures, Christophe Colomb
projette de gagner l'Asie des épices, en voguant vers l'Ouest (le Po-
A la fin du Moyen Âge, la chrétienté occidentale est assiégée par les nant). Il estime qu'il suffirait d'une quinzaine de jours de navigation
Turcs. Tandis que les Portugais s'échinent à contourner l'Afrique afin pour gagner la Chine, que l'on appelle alors «Cathay», à partir des
d'atteindre l'océan Indien et l'Asie des épices, un navigateur génois îles Canaries.
conçoit le projet insensé d'atteindre l'Asie d'une traite, à travers la
«mer Océane» (l'océan Atlantique) Son projet paraît fou à la plupart des experts de son temps. Ces der-
niers savent que la Terre est ronde, et ils connaissent même son
Figure emblématique de l’époque des Grandes Découvertes, Chris- rayon. Ils sont convaincus que les marins mourront d'épuisement
tophe Colomb est sans doute le plus connu des grands navigateurs avant d'atteindre leur but. Ils ont raison car, en l'absence d'un Nou-
et aventuriers de cette fin du XVe siècle. Son objectif, pourtant jugé veau Monde, il eût été impossible à un navire de l'époque de traver-
peu raisonnable par ses con- ser d'une traite l'Océan Atlantique et l'Océan Pacifique réunis.
temporains, s’inscrit dans un
contexte favorable à Christophe Colomb, entêté, habile et convaincant, rallie les rois d'Es-
l’organisation de grandes expé- pagne à son idée. Ces derniers, Ferdinand d'Aragon et Isabelle de
ditions maritimes. Le projet de Castille, viennent de conquérir Grenade, mettant fin à huit siècles de
Colomb change le cours de présence musulmane dans la péninsule. Ils portent maintenant leurs
l’histoire : la découverte de regards vers le grand large et accueillent avec bienveillance le projet.
Nouveau-Monde apporte la ri- La reine, en particulier, se montre enthousiaste. Par les Capitulations
chesse pour l’Espagne qui entre de Santa Fé, elle lui accorde le titre d'Amiral. Il concerne toutes les
au XVIe siècle dans son âge terres et les îles à découvrir, donnant au navigateur le droit d'y exer-
d’or. Elle fait surtout basculer le cer la justice et d'y percevoir l'impôt au nom des Rois. Fort du soutien
centre de gravité de l’Europe de royal, le navigateur peut monter son expédition : trois modestes cara-
la Mer Méditerranée à l’Océan velles et 90 marins.
Atlantique.
Le 12 octobre de 1492, Colomb arrive au Nouveau Monde.
En Espagne et en Europe, on a immédiatement pris conscience de Las Casas. De ce moment date le début de la colonisation du Nou-
l'importance de l'événement et de ses conséquences potentielles. À veau Monde.
Rome, le pape Alexandre VI Borgia, d'origine espagnole, prend acte
de ce succès. Il attribue à Ferdinand et Isabelle le qualificatif de Rois Lorsqu’il meurt à Valladolid en 1506, après avoir fait quatre vogayes
Catholiques et il publie la bulle «Inter Caetera» qui répartit entre Por- aux « Indes », ce n’est ni dans la pauvreté, ni dans l’indifférence gé-
tugais et Espagnols les futures découvertes. Cette bulle est complé- nérale. Cependant, la gloire des découvertes lui échappe : c’est le
tée l'année suivante par le traité de Tordesillas, qui divise le monde florentin Amerigo Vespucci, qui aura la gloire de donner son nom au
en deux dès 1494: à l'ouest se trouve la chasse gardée des Espa- Nouveau Monde
gnols, à l'est celle des Portugais.
L ES CONQUISTADORES , L ’ ESPRIT DE CONQUÊTE ET L ’ AMBITION
Fort de son triomphe, Christophe Colomb retraverse l'océan pour le
Peu de temps après avoir découvert de nouvelles terres, les expédi-
compte de « los Reyes Católicos». Cette fois, il n'a aucun mal à réu-
tions se multiplièrent avec à bord des navires, des hommes prêts à
nir les fonds et les équipages. Pour cette deuxième expédition, Co-
tout pour conquérir un Nouveau Monde : les Conquistadores.
lomb quitte Cadix avec 17 navires et 1.200 marins.
Ils furent nombreux à partir d'Espagne vers ce que l'on appelait à
En Espagne, on ne se fait pas faute de médire de Christophe Colomb
l'époque "Les Indes". Mais l'Amérique est un vaste continent, ce qui a
auprès de la reine Isabelle. Celle-ci interdit en vain la réduction en
permis à d'autres conquistadores de s'illustrer. Le but de tous ces
esclavage des Indiens et envoie un enquêteur officiel à Hispaniola.
conquistadores étaient de conquérir des terres, obtenir des titres de
Inquiet pour son avenir, l'Amiral retourne en Espagne en 1496 et
noblesses en récompense, mais aussi découvrir des trésors comme
gagne le pardon de la reine.
le mythique Eldorado.
Christophe Colomb met sur pied un troisième voyage en mai 1498. Il
La découverte par Christophe Colomb fonde l'Amérique Latine en
découvre l'île de Trinidad et repère l'embouchure d'un puissant
tant que futur ensemble culturel. À cette époque, l'objectif reste le
fleuve, l'Orénoque. Il ne comprend pas encore qu'il est face à un im-
commerce avec les Indes : l'Espagne et le Portugal sont alors les
mense continent. Il persiste à voir dans ces littoraux la porte de la
deux puissances maritimes capables de relever le défi.
Chine ou des Indes.
Afin d'éviter que les deux royaumes chrétiens ne s'entredéchirent
En 1500, Christophe et Bartolomeo
dans cette quête, le pape profite de l'existence de deux routes vers
Colomb sont mis aux fers et renvoyés
les Indes pour les répartir entre les deux pays : la route de l'est pour
en Espagne. Quand l'illustre naviga-
les Portugais, la route de l'ouest pour les Espagnols. C'est le traité de
teur se présente enchaîné devant les
Tordesillas. À cette époque, l'Amérique précolombienne est dominée
Rois Catholiques, à Grenade, ces der-
par deux empires : l'empire aztèque au Mexique actuel, et l'empire
niers, émus, le font libérer et rappellent
inca centré sur l'actuel Pérou.
son remplaçant. Un nouveau gouver-
neur général prend la mer début 1502
avec 30 navires et 2500 colons, parmi
lesquels le dominicain Bartolomé de
D ON Q UICHOTTE , L ’ IDÉALISME ET LA FOLIE

Hernan Cortes conquiert l’empire aztèque autour de 1520. Francisco


Pizarro conquiert l’empire inca peu après.

En quelques décennies, les Espagnols ont ainsi constitué un vaste


empire colonial. Les deux pôles économiques de l'empire correspon-
dent aux deux anciens centres précolombiens : cela forme deux nou- Don quichotte par Gustave doré / Monument à Cervantes, Plaza de
velles Vice-Royautés, la Nouvelle-Espagne et le Pérou. España, Madrid
Les maladies apportées par les Européens déciment rapidement la (note : le gouvernement a offert une copie de cette statue à la Bel-
population indienne. Pour obtenir de la main-d'œuvre dans les planta- gique, elle se trouve près de la Grand Place).
tions ou dans les mines, les colons commencent à amener des es-
claves noirs d'Afrique. Comme ce sont les Portugais qui ont hérité de L’Ingénieux Hidalgo Don Quichotte de la Manche est un roman écrit
l'Afrique au traité de Tordesillas, la traite des esclaves est beaucoup par Miguel de Cervantes et publié à Madrid en deux parties, la pre-
plus massive au Brésil que dans l'Amérique espagnole. Elle prendra mière en 1605 , la seconde en 1615
toute son ampleur au XVIIIe siècle
Parce qu'il a lu trop de romans de chevalerie, don Quichotte a perdu
B. PERSONNAGES LITTÉRAIRES la raison : il est persuadé que le monde est peuplé de chevaliers er-
rants et d'enchanteurs maléfiques. Comme dans ses livres préférés, il
La Celestina est un roman espagnol très célèbre mais qui n’a pas veut rendre la justice et combattre pour l'honneur de sa dame. Ac-
passé les frontières. Il raconte l’histoire d’une marieuse et son nom compagné de Sancho Pança, son fidèle écuyer, il part sur les routes
est passé dans la langue courante pour désigner les femmes qui ar- d'Espagne. Et voici notre héros qui affronte des moulins à vent, qui
rangent les couples. prend des auberges pour des châteaux et des paysannes pour de
belles princesses !
Avec son roman, Cervantès a réussi à faire d'un vieux fou à l'imagi-
nation débordante et de son valet plein de bon sens un couple my-
thique ; de leurs aventures rocambolesques, il a su tirer une œuvre Don Quichotte est l’un des livres les plus lus au monde. Grand suc-
d'une prodigieuse modernité, qui continue d'amuser et de ravir le lec- cès dès sa première édition, il a aussi fait l’objet de plusieurs suites
teur, quatre siècles plus tard. Le livre est une parodie des mœurs ainsi que d’une comédie musicale et de plusieurs adaptations théâ-
médiévales et de l'idéal chevaleresque, et une critique des structures trales et cinématographiques.
sociales d'une société espagnole rigide et vécue comme absurde. Don Quichotte s'est évadé de la réalité sous l'emprise de ses lectures
Don Quichotte est un jalon important de l'histoire littéraire et les inter- chevaleresques et décide de rompre la monotonie de la vie villa-
prétations qu'on en donne sont multiples : pur comique, satire sociale, geoise pour courir l'aventure, prenant Amadis de Gaule pour modèle,
analyse politique. Il est considéré comme l'un des romans les plus jusque dans ses amours impossibles avec l'inaccessible Dulcinée.
importants de la littérature mondiale et comme le premier roman mo- Transposant le quotidien en objet d'aventures, nécessairement bur-
derne. Le personnage, généreux et idéaliste, se pose en redresseur lesques puisque fantasmées, il décide de « vivre son rêve » coûte
de torts. que coûte et de revenir à cet âge d'or où la vertu était récompensée
ainsi que le courage et l'honneur chevaleresque, non encore ravalé
aux simagrées de cour. Or le personnage acquiert avec son écuyer
Sancho une telle épaisseur humaine dans son « ingéniosité » ou sa
vision irréelle mais point sotte des choses, qu'il contraint le lecteur à
le suivre, à l'excuser, à le plaindre lorsqu'il échoue, à s'en amuser
sans se moquer, car moralement il a raison
En 1968, la comédie musicale améri-
caine Man of La Mancha (1965) était
créée à la Monnaie de Bruxelles dans
la traduction de Jacques Brel.

Dans cette comédie musicale Cer-


vantès, le manuscrit de son roman
Don Quichotte sous le bras, se re-
trouve dans les geôles de l’Inquisition
et interprète l’histoire du chevalier
pour ses codétenus : «Rêver un im-
possible rêve... Suivre l’étoile... ». Se
déroulent alors les scènes où Alonso Quijano, Don Quichotte, défie
"l'abominable monde" en combattant les moulins à vent, en mélan-
geant en permanence rêve et réalité, faisant d'une petite auberge un
château, d'une prostituée une gente dame...
D ON J UAN , LE SÉDUCTEUR , LE RÉVOLTÉ Tenorio ne tient jamais ses promesses. Don Juan met la question de
l’honneur en péril, il entraine les femmes à se déshonorer, il ne res-
Don Juan est un personnage de fiction né au XVIIe siècle sous la pecte aucune loi. Et le style de Tirso fait de Don Juan une tempête,
plume de Tirso de Molina (1580-1648), dramaturge espagnol, et pu- un feu ardent qui mêle les éléments, sème le désordre et détruit tout.
blié en 1630. Aujourd'hui, le Burlador de Sevilla est devenu un mythe
universel qui, avec Don Quichotte, constitue l'essence de l'espagnol Le Mort est l’élément central et l’histoire prend son sens à la fin. Il est
dans le monde entier. le représentant de la Loi, celui qui déclare Don Juan coupable. En
troublant la paix des morts, il provoque le Mort, représenté sous la
Tirso de Molina, auteur du premier Don Juan entre dans l’ordre de la forme d’une statue. Celle-ci invite Don Juan à un « repas funèbre »
Merci et devient moine, puis prédicateur. Il est également auteur dans un lieu sacré (église, caveau) mais on ne peut pas manger avec
d’œuvres nombreuses (400 pièces) dont certaines lui valent des con- les morts sans être mort soi-même : les morts et les vivants ne se
damnations ponctuelles et des réprimandes pour leur caractère hardi. mêlent pas. Le dernier instant se passe autour de la symbolique de la
main demandée et donnée, puis Don Juan est entrainé en Enfer.
Pour comprendre son « Abuseur de Séville », le premier des Don
Juan, on ne perdra jamais de vue que Tirso est chrétien, qu’il connaît Don Juan est devenu au fil des
aussi très bien l’Antiquité, et qu’il est au fait des questions religieuses années un personnage mythique.
de son temps. Au Siècle d’Or, un débat se fait autour d’une question Le mythe a été repris dans de
théologique : « Comment s’accordent l’infinie miséricorde de Dieu et nombreuses œuvres littéraires,
la vocation pécheresse des hommes ? », et de nombreux livres pa- musicales, picturales ou cinéma-
raissent sur la question. Tirso participe au débat par deux pièces, El tographiques. Molière adapte le
Condenado por desconfiado et El Burlador de Sevilla, qui démontrent texte en 1665, Da Ponte en tire
la nécessité de croire en Dieu. un livret que Mozart met en mu-
sique, (c'est l'opéra Don Giovan-
Don Juan Tenorio, jeune débauché de Séville, écervelé et insolent,
ni), Goldoni, Prosper Mérimée,
remet toujours à plus tard son repentir. Lorsqu’il se rend compte qu’il
Pouchkine, Byron, Dumas, Bau-
est grand temps de le faire, il est trop tard : il a mis à l’épreuve la mi-
delaire, Ghelderode, Montherlant
séricorde divine, non par le doute, mais par trop de désinvolture et de
et d’autres auteurs, musiciens,
confiance. Don Juan Tenorio affronte le Dieu des Chrétiens et il sera
metteurs en scène et cinéastes,
châtié et envoyé en Enfer. Juan Tenorio aime par dessus tout possé-
furent fascinés par ce personnage
der les femmes et les abandonner ensuite. Le personnage a des mo-
habile et d'envergure qui défie la
dèles bien réels dans les jeunes aristocrates du temps, qui se con-
morale, l'ordre public et Dieu.
duisent souvent ainsi. Le personnage de Tenorio est un jeune noble
arrogant, irresponsable, courageux comme ses pairs aristocrates, Le personnage évolue légèrement
mais aussi insolent envers ses aînés et le Roi. Il y a chez lui une di- avec les époques. Mais la trame
mension de transgression qui n’échappe pas au spectateur. La pièce de fond demeure : séduction des
présente ses diverses conquêtes, au terme desquelles il donne sa femmes, rejet des règles sociales et morales, défi à l'autorité et à
main à toutes celles qui veulent bien croire à son engagement. Or Dieu et châtiment exemplaire.
1 — Le séducteur - 1836 : Don Juan de Maraña ou la chute d'un ange, pièce de
Alexandre Dumas ;
C’est la première facette du personnage, à laquelle on le réduit par- - 1844 : Don Juan Tenorio, pièce de théâtre de José Zorrilla y
fois. Il semble que ce qui l’intéresse soit la conquête pour la con- Moral ;;
quête. Mais Don Juan apparaît aussi comme un esthète. La séduc- - 1851 : Le Château des désertes, roman de George Sand;
tion telle qu’il la pratique est une fuite en avant : en renouvelant sans - 1861 : Don Juan aux enfers, poème de Charles Baudelaire
cesse une expérience identique, il tente d’échapper au temps qui dans Les Fleurs du Mal ;
passe. Il apparaît insatiable, voire mégalomane. Il envisage la séduc- - 1903 : Man and Superman, pièce de George Bernard Shaw ;
tion comme un combat. Ses armes sont diverses : la flatterie, l’appel - 1914 : Les trois Don Juan, roman de Guillaume Apollinaire ;
à la pitié, la promesse de mariage, l’enlèvement. - 1921 : La Dernière Nuit de don Juan, pièce d'Edmond Rostand
2 — Le révolté - 1955 : Don Juan, pièce de théâtre de Michel de Ghelderode ;
- 1991 : La Nuit de Valognes, pièce de Éric-Emmanuel Schmitt ;
Don Juan paraît rejeter les règles de la vie sociale : il refuse la fa- - 1996 : L'ambigu, pièce de théâtre de Roland Topor ;
mille, ridiculise le mariage. Il affirme sa liberté et ne veut obéir qu’à - 2004 : Don Juan (raconté par lui-même), roman de Peter
son désir et à la nature. Il semble par ailleurs ne pas tenir compte des Handke;
classes sociales.
C ARMEN , LA PASSION , LA SENSUALITÉ
3 — Le libertin

Don Juan apparaît comme un matérialiste et un rationaliste. Cepen-


dant Don Juan n’est peut-être pas athée ; il a engagé un combat
contre Dieu parce que ce dernier représente une limite à sa liberté et
à sa volonté de puissance et défie Dieu en permanence.

Finalement on ne sait quoi penser de Don Juan. Il apparaît vil, mé-


chant, mauvais, hypocrite. Et dans le même temps il n’est pas dénué,
dans son défi, son refus et sa quête, d’une certaine grandeur.

D’autres versions sont :

- 1730 : Don Juan, pièce de Carlo Goldoni ;


- 1821 : Don Juan10 , poème de Lord Byron ;
- 1830 : L'Élixir de longue vie, œuvre d'Honoré de Balzac ;
- 1830 : Le Convive de pierre, œuvre de Alexandre Pouchkine ;
- 1832 : Namouna, œuvre de Alfred de Musset dans laquelle il Carmen est un opéra Georges Bizet (1838 1875), d'après la nouvelle
présente sa conception de Don Juan ; homonyme, de Prosper Mérimée.
- 1834 : Les Âmes du purgatoire, œuvre de Prosper Mérimée ;
Ports de tête de côté appuyés comme dans le flamenco, danse les Le goût de l’orientalisme et la colonisation du XIXe siècle entraînent
mains sur les hanches, avec le buste gonflé comme un taureau qui une ouverture géographique inconnue jusqu'alors. En France, cette
charge, cambrés exagérés, bassin poussé en avant comme le toréa- ouverture aboutit à un intérêt dans ce qui n'est pas français, ce qu'on
dor, haut du buste très tenu et ports de bras modifiés par les casta- qualifie d'exotique. C'est la curiosité et le goût pour le différent qui y
gnettes ou l'éventail, Carmen représente le cliché de la femme espa- joue un rôle, le désir de s'évader, de partir en aventure. L'exotisme,
gnole à l’époque du Romantisme. dans le domaine de la littérature, s'est répandu au XIXe siècle avec
Baudelaire, Chateaubriand, Pierre Loti, Mérimée, Jules Verne. Les
Bizet n'est jamais allé en Espagne, mais il en était fasciné. Il écrivit textes exotiques par excellence sont les rapports de voyages comme
Don Quichotte pour le Bolchoï de Moscou, et Carmen, en 1875, la : Les Mille et une nuits, ou Robinson Crusoe.
cinquième et dernière de ses espagnolades, la seule qui soit passée
à la postérité. Elle contient tous les clichés de l'Espagne : éventails, Pour certains, c'est l'Espagne du Sud qui représente l'exotisme. Son
toréador, châles, barbier, bohémiens, places encombrées de mé- personnage central, Carmen, incarne le mythe de la femme fatale, un
gères volubiles avec un clin d’œil à Cervantès. thème existant déjà dans les sources bibliques, comme les histoires
de Lilith ou de Salomé. Le portrait psychologique de la femme fatale
Le personnage de Carmen de Bizet est plus « édulcoré », civilisé que est celui d’une femme perverse qui, consciente de son pouvoir sur les
dans la nouvelle de Mérimée. Alors que l’héroïne de Mérimée se pré- hommes, utilise les attributs et les charmes pour les manipuler.
sente comme une voleuse, intrigante, criminelle au comportement
totalement amoral, cruel et cynique, la Carmen de l’opéra, moins ou-
trancière dans les méfaits qu’elle peut produire, se veut plus sage et
ne commet plus de graves délits.

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