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AO 90 PC 29
Jacques CHAUVIN
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m^ ^ji^^
Avril 1993
Ministère de la Culture
9042 007086
Rapport à la Mission du Patrimoine ethnologique
Programme de recherches « Savoir-faire et techniques »
Contrat AO 90 PC 29
avec la collaboration
de l'Institut de Calcéologie
Musée International de la Chaussure
Romans ( Drôme )
Illustration de couverture : Croquis exécuté vers 1950 par un clochard, vendeur aabulant de journaux
(« Le Voilà »), pour le cordonnier Angel Larapidie en échange d'un verre de vin. Fonds Àngel Larapidie,
collection AWK.
SIGLES ET ABREVIATIONS UTILISES
BN : Bibliothèque Nationale
CABOF : Chambre Artisanale des Bottiers Orthopédistes de France
CAP : Certificat d'Aptitude Professionnelle
CERC : Centre d'Etudes des Revenus et des Coûts
habitants du « pays », les indigènes, j'ai effectué l'ethnographie d'un objet a priori
cousu main, et ceux de la Vendée utilisant le montage cloué . Cette situation par
qui, depuis la disparition des artisans ruraux, a acquis un statut essentiellement urbain.
Les « discours d'excès » ont alors capté mon attention, discours de cordonniers
expérimentés pour qui : « Les jeunes ne veulent plus rien faire, on ne trouve plus
d'apprentis ! », discours d'aînés pour qui : « Le métier est fichu, bientôt il n'y aura plus
de cordonniers ! ». S'y ajoutaient des « petits riens » émaillant les témoignages, telle la
déclaration d'un artisan affirmant qu'une « malédiction pesait sur le métier »^. Comment
donner sens à ces observations sibyllines ?
en compte les façons dont les « gens qu'on décrit » se voient eux-mêmes. Praticien du
métier et ethnologue en situation d'observation participante, j'ai le privilège rare, quoi
que peu convoité, d'évoluer entre le monde des objets et celui des idées. Né en Poitou,
en 1952, dans une famille ouvrière, j'ai entrepris un cycle d'études universitaires en
sociologie grâce à des bourses de l'Etat J'ai effectué ensuite une formation
professionnelle sanctionnée par un diplôme de cordonnier-bottier, en position de
premier devant le fils d'un artisan. Ce fut un élément appréciable pour entrer dans la
communauté cordonnière, en 1979, tout en conservant une position d'intellectuel, de
résultat de ses travaux, il est une part de son observation. L'étude du sabaron avait
un métier, une origine sociale, j'enquêtais sur le terrain de mon histoire. Balayant les
réticences à poursuivre, j'ai eu l'intuition que cette proximité pouvait conduire à
l'essentiel de la culture cordonnière, dont les « petits riens », dans les discours,
constituent des traces.
cordonniers, dont la qualité d'écrivants est affirmée depuis plus de deux siècles ; ils
forment le second groupe d'ouvriers « lettrés » après les imprimeurs et les typographes.
universitaire et celle d'un cordonnier ne se recoupent pas. En butte aux supputations des
J'étais parmi les gens modestes, les «gens de peu» (Sansot 1991).
charge de ne pas le réduire à un usage trivial, un « couteau sans manche auquel on retire
la lame ».
ce « spectacle étrange, parce que différent de celui auquel il assisterait s 'il était resté chez
lui » (Condominas 1965 : 37). Blumenkranz met à jour dans Juifs et chrétiens dans le
monde occidental (1960: IX) un trait essentiel de cet « inconfort du terrain » (de la
Soudière 1988 : 94-105). Le risque de cécité de l'observateur résiderait, non pas dans le
fait d'appartenir, de près ou de loin, au groupe étudié, mais dans l'identification à la
partage ; inquiétude qui la fait réfléchir sur ses rapports avec ceux qui, tout simplement
majoritaires, l'entourent, avec ceux qui, hostilement, l'affrontent. Cette confrontation ne
s'opère pas seulement sur les données de l'actualité. Volontiers, elle replonge dans le
passé, avec le désir secret de trouver dans l'histoire la réponse aux problèmes du présent.
Les Juifs, pour avoir connu la condition de minorité depuis presque deux millénaires,
n'ont jamais cessé de procéder à cette confrontation. Appartenant à cette minorité, je
rédaction du texte s'y oblige -, doivent comprendre que l'ethnologue n'est pas le
des Autres, acceptés ou non dans leurs différences. A partir des discours et des
productions matérielles, l'ethnologue décrypte les valeurs et les met à plat A l'issue de
vous / », il dit en substance : « Comprenez ce qui vous arrive ! ». L'analyse culturelle est
(cordonnier /bottier versus savetier), division articulant l'ensemble des discours sur
« celui qui fait les chaussures » ? Mais tout métier se considère lui-même dans le regard
des autres - qu'il adhère à cette image ou qu'il s'en défende. Les surnoms, les façons de
dire, façons de faire affirment un même point de vue sur le cordonnier. Dans les
des statuts, une identité cordonnière péjorative s'est-elle, depuis longtemps, mise en
place ?
La crise contemporaine et la mutation du métier ont provoqué une
transformation de l'image du cordonnier. Aux dire des artisans, avec les machines, « le
petit cordonnier s'est relevé ». Quel peut être l'impact (ou le non-impact) de ce
renversement partiel d'image sur la population actuelle des cordonniers (emblèmes,
L'ENQUETE DE TERRAIN
Rien dans les questions qui guident l'enquête n'impose a priori le choix du
Poitou. Le fait que les premières chamoiseries en France furent établies à Poitiers sous
François I^^ n'implique pas une tradition plus fortement enracinée qu'ailleurs dans
l'activité de fabrication des cuirs et des chaussures (Kollmann et Valiere 1987 : 26).
Entre 1980 et 1990, décennie durant laquelle prend place notre ethnographie de terrain,
l'activité de cordonnerie s'exerce sur tout le territoire national. En revanche, du fait du
déclin de la fabrication manuelle, Paris regroupe les derniers bottiers fabricants des
Chaussure).
conduit à inscrire l'identité dans la culture du métier tout autant que dans celle de la
L'ECLATEMENT DU METIER
professionnelle.
La structuration du groupe
Guerre mondiale. Ils ont été formés à l'atelier « sur le tabouret » par des maîtres artisans
initiés aux techniques manuelles anciennes. Leur apprentissage s'est effectué avant 1955
Le savoir-faire manuel l'emporte sur le mécanique. Plus du tiers sont issus du milieu
synthétiques. Dans les années soixante, ils se sont déclarés hostiles à la pose des patins
caoutchouc sous les semelles cuir, tout comme ils le furent à l'apparition du caoutchouc
chaussure (la « tige ») et du dessous (la semelle), savoir fabriquer des souliers à la main
ou les ressemeler.
trente à quarante ans, ils sont nés après la guerre, dans les années cinquante. Ils ont
de cygne », l'enclume sur laquelle les cordonniers « traditionnels » martèlent, assis sur le
Le cordonnier « minutes »
Extrait de « Patin Talon » n'i, 1987, p. 2., Coll. Boceara
tabouret, l'outil serré entre les jambes, la semelle des chaussures qu'ils réparent. En
délaissant la «bigorne», les « jeunes » ont réduit l'ancien établi du cordonnier, ie
« veilloir », à l'état d'objet de musée, témoin du passé. Le « pied de fer » est fixé sur un
établi haut, ou sur un support cylindrique reposant sur le sol, pour éviter les vibrations.
botterie, même s'ils réalisent des travaux de réparation sur le dessus de la chaussure.
dans la maîtrise d'un savoir-faire spécifique au métier, ils tentent d'intégrer, sous la
pression de la clientèle, les méthodes rapides des « Talons minutes ». La structure des
dessous », un sens dessus, dessous. Ils ne se différencient pas des « jeunes » cordonniers
par l'âge mais par l'exercice et l'apprentissage du métier. Installés dans des stands
supermarchés et les hypermarchés, ils effectuent tout autant la taille des clés que la pose
rapide des patins et des talons, prestations réputées rentables. En revanche, ils négligent
période Tapie »), nombreux sont ceux qui ont tenté leur chance en répondant aux
annonces que publient les journaux : « Sans connaissance spéciale à saisir (...) "Le
Service Minute". Revenu mensuel 15 000 F. Assurons .formation, installation, étude du
marché » {86 Presse Service, n° 369, 3 décembre 1986). C'est l'époque où la société Kis
(aujourd'hui disparue), groupe leader spécialisée dans la fabrication et la vente de
machines pour « Services minutes » en clés, gravure, imprimerie, talons, photos, banalise
l'activité de cordonnerie en installant des machines pour la pose des patins et talons dans
1975cn982
1975 1982
CLASSES D'AGES
Effectifs i Effectifs *
Total
occupés
Effectifs
9300_
9t00_
8900_
8700_
8500_
3300_
8100_
7900_
7700_
7500_
7300
nouveaux artisans que les cordonniers nomment dédaigneusement les « bricoleurs, les
minutiers, les poseurs de patins, les afficheurs », effectuent des travaux de qualité
médiocre. Leur compétence est limitée et les faillites sont donc nombreuses. Dans
l'impossibilité d'honorer les échéances bancaires, il faut vendre ses biens, rechercher un
17 mai 1990 à l'âge de 45 ans. Dans son journal intime, il emploie le qualificatif « petit
cordonnier »^.
L'histoire récente
« minutiers » et les « jeunes » se regroupent dans une même tranche d'âge et sont des
cordonniers « debout », ils travaillent face aux machines. En revanche, le partage entre
jeunes et aînés s'est accentué à travers l'absence d'une génération d'artisans nés entre
1940 et 1949.
rajeunissement de la profession fait que la proportion des moins de 35 ans passe de 17%
à28%6.
Les artisans ruraux, fabricants de brodequins en petite série, utilisent ces machines bien
avant les réparateurs et les bottiers de luxe dans les villes. L'essor de la fabrication
de la cordonnerie. Vers 1955, les ingénieurs des Etablissements Eram, avec les progrès
de la chimie du pétrole, ont mis au point une chaussure à semelle plastique injectée qui
entraîne dans son sillage l'ensemble de l'industrie française . L'invention bouleverse les
maximum, à l'entretien et la réparation, perdent leur vigueur avec ces chaussures bon
clouer, ni coudre, et qui n'incorporent pas leurs savoir-faire traditionnels. Il faut réaliser
Le bottier en 1939
Le cordonnier réparateur
des assemblages collés à chaud. Les cordonniers méconnaissent les colles appropriées
aux différents matériaux plastiques : « Je mets une couche de colle Recta 1000. à la
suite une couche plastique (...) et parfois ça ne marche pas ! »°. La tendance est
d'opposer un refus aux clients qui veulent faire réparer ces chaussures, tout en
l'artisan : « Le métier de cordonnier c'est de la merde. Y'a plus de cuir, c'est tout
plastique et carton, tout se décolle ! »". La « génération absente » des années soixante est
constituée d'une part par les apprentis qui, à l'issue de leur formation, ne trouvent pas
d'emploi en cordonnerie et changent de métier, d'autre part par les fils de cordonnier
qui effectuent une formation dans une école professionnelle de la chaussure, par
cordonniers âgés ne parviennent pas à vendre leurs fonds de commerce. Les boutiques
hypermarchés en périphérie des villes, l'implantation dans les galeries marchandes des
sociétés industrielles de réparation des chaussures, font que l'on va oublier le chemin de
la boutique du cordonnier traditionnel^". Les « Talons minutes » réalisent rapidement
les travaux ordinaires et les plus rentables (talons, patins) alors que les cordonniers ont
la réputation d'être lents. Ainsi, en 1939 Poitiers regroupe soixante artisans, vers 1970 ils
sont neuf.
Plus qu'à une opposition entre jeunes et aînés, que renforce l'absence
d'une génération de médiateurs, c'est à une transformation radicale du métier qu'il est
confection manuelle des chaussures. Dans les années quatre-vingt, les cordonniers ne
France en 1925 {BIC n°148 1972: 1). En 1945, 96 000 entreprises se répartissent les
tickets de rationnement de cuir et de caoutchouc. En 1950, ils ne sont plus que 45 000
artisans {BIC n°166 1975:9). En 1971, l'INSEE dénombre 9864 entreprises qui
emploient 1299 salariés. En 1988, les chiffres varient entre 5000 et 8000 entreprises^ ^
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données du Répertoire Informatisé des Métiers (RIM), les bottiers, y compris les podo-
orthésistes agréés par la Sécurité Sociale, étaient 241 en 1979, 222 en 1983 et 164 en
Paris, n'excéderait pas une dizaine en 1990. Le personnel salarié, y compris le personnel
féminin employé à la réception et à la vente, peut se situer entre 50 et 100 personnes
comptabilise 21 entreprises. En province, les grandes métropoles sont dans une situation
analogue, avec une prédominance dans le sud. Le Minitel recense 3 bottiers à Bordeaux,
mutation à la fin de la Première Guerre mondiale. Après le conflit, l'Etat s'est engagé à
faire appareiller et chausser les nombreux mutilés aux frais de la nation. Des bottiers se
sont spécialisés, prenant le titre de bottier orthopédiste. Dès lors qu'un agrément sera
exigé à partir de 1953 par la Sécurité Sociale pour la confection des chaussures
s'apprend pas en six mois » est une phrase souvent répétée par les informateurs lors des
enquêtes de terrain.
Pour « être du métier », une seule formation est « valable » - aux dire des
La formation durait trois ans, les deux premières années étaient consacrées à la
chez Gigond, cordonnier à Champigny-le-Sec en 1909. Mon père a donné 100 Frs à
l'époque au patron, pour la première année. Je n'étais ni nourri, ni logé. Il n'y avait pas
de contrat écrit. Au bout de mes deux années d'apprentissage, je montais trois souliers
par jour en cousu main. Ensuite, je suis devenu compagnon payé aux pièces à monter
des chaussures : deux francs la paire » (Chauvin 1983 : 44).
anodins en apparence, mis à jour durant les enquêtes, prennent ainsi tout leur sens. A
« traditionnelle » du père, il travaille assis même si, chez son précédent patron, il était
debout^^. Au syndicat des cordonniers de la Vienne, lorsque le président prend sa
retraite, et abandonne ses responsabilités professionnelles, quelques-uns, parmi les
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cordonniers « traditionnels », suggèrent que son fils le remplace au syndicat tout comme
il lui succède dans l'entreprise^".
du secteur artisanal. 318 689 jeunes sont en apprentissage en 1966 et 160 645 en 1975
(Durand et Fremont 1979 : 35).
rester longtemps sans réponse. Beaucoup d'apprentis déclarent avoir « échoué dans la
cordonnerie un peu par hasard » ^ '. C'est un apprentissage « subi » plutôt que « choisi ».
« Je suis sorti de 3^ et 4^ technologie, j'pouvais passer un CAP mécanique et comme le
lycée oil j 'étais ils ont fait construire des nouveaux bâtiments pour les BA C pro, les CA P
de mécanique ils en faisaient plus maintenant. C'était plus que des BEP et j'étais pas
assez fort pour passer en BEP. (...) J'ai regardé dans le journal puis j'ai vu que ça
cherchait un apprenti cordonnier pas très loin de chez moL (...) J'ai téléphoné puis c'était
le p'tit cordonnier de Matha qui recherchait un apprenti pour le début de septembre. J'ai
fait une semaine d'essai puis après on a signé le contrat début octobre » (Jérémy, CFA
Joué-les-Tours, 1991).
protectionnistes. Une petite profession ne garantit que peu de débouchés : « Motiver les
jeunes ? Je ne sais pas car on en trouve pas et ilfaut reconnaître aussi qu'il en faut peu
car si chaque dépanement faisait deux apprentis par an en continu, la relève serait
largement assurée »^°.
La prolongation de la scolarité jusqu'à 16 ans a fixé sur les bancs de l'école
janvier 1956 a été mise en application le I^*^ janvier 1967 avec une période transitoire
s'échelonnant jusqu'à 1972. Les cordonniers « traditionnels » estiment que les lycées et
les collèges techniques peuvent recruter les élèves les plus doués alors que les
« déficients physiques et les arriérés mentaux » seront à la charge des artisans maîtres
plaignent du faible niveau des candidats, qui dévalorise le métier aux yeux du public et
n'assure pas la pérennité de la transmission des entreprises. « Le recrutement des
apprentis cordonniers se fait dans l'étage plus qu'inférieur de l'humanité » {Le moniteur
de la cordonnerie et de la chaussure, décembre 1959 : 10).
centre est précisé par le contrat La région Poitou-Charentes ne possède pas de CFA
avec une section cordonnerie pour accueillir les jeunes. Depuis 1975, ils sont dirigés vers
le CFA de Joué-les-Tours géré par la Chambre de Métiers d'Indre-et-Loire. Ceux de la
Vendée, et de la région des Pays-de-Loire, vont au CFA de Cholet géré par la Chambre
obtiennent leur diplôme. Notons que les artisans « traditionnels » n'ont pas de diplômes
à l'exception des plus jeunes, nés après 1932, qui possèdent parfois un CAP de
cordonnier-bottier. En 1982, les cordonniers étaient peu diplômés. 64% des artisans et
69% des ouvriers n'avaient aucun diplôme. La moyenne est de 61% en 1982 pour
l'ensemble de l'artisanat ^^
1135 apprentis sont reçus à l'EFAA, en 1963 ils sont 534 au CAP et à l'EFAA.
Actuellement, les chiffres sont bien plus modestes. Moins de 50% obtiennent leur
diplôme : 100 reçus en 1981, 129 en 1983, 122 en 1987, soit une augmentation de 22%.
quelques cordonniers ont appris leur métier dans un lycée professionneL Ils ont entre
quarante et cinquante et appartiennent à la « génération absente ». Cette situation a
(Indre-et-Loire), 1991
Cliché J. Chauvin
Coll. ARHC
vocation initiale est la formation des techniciens pour les besoins de l'industrie. Les
sections de cordonnerie réparation ont été créées en 1977 dans les Centres de Romans et
Cholet, premiers pôles de production des chaussures en France, dans une période de
prononcée contre l'ouverture des sections AFPIC : « // nous faut des gens qualifiés qui
FNSAMC, pratiquement seuls et isolés, ont pesé de tout leur poids pour la mise en place
fournies sur notre situation, on comprend mieux les raisons qui nous animent et
l'urgence d'une relève qui s'avère indispensable, si nous voulons que notre profession ne
lointain, nous avons oeuvré pour la formation de deux sections de formation accélérée
pour adultes par l'intermédiaire de l'A FPIC » (Pennors BIC n ° 1 1978 : 2-3).
Le secrétaire de la FNSAMC, Compagnon du Devoir, bien que prônant
une formation de haut niveau, cherche à convaincre les responsables professionnels sur
réunion, ont été unanimes pour avouer que le travail sorti de ce centre était bien, alors
artisanal, et les jeunes artisans formés, en grande part, à l'âge adulte, dans les lieux
Le divorce entre les deux modèles est grand, d'autant que la formation
Les plus dynamiques s'installent, créent ou rachètent une entreprise alors que les jeunes
La rupture des modèles va s'exacerber avec les stages de formation continue organisés à
partir de 1982. Les Fonds d'Assurance Formation (FAF) sont consécutifs à la loi du 16
juillet 1971 sur la formation continue aussi bien pour les chefs d'entreprise que pour les
salariés. Le Centre AFPIC de Cholet joue un rôle central en accueillant des stages
animés par des formateurs de l'AFPIC. Dans un premier temps, les artisans
« traditionnels » refusent d'y participer, interprétant comme une faiblesse, une atteinte à
leur intégrité d'hommes de métier, toute sollicitation à se perfectionner : « J'ai pas
besoin d'apprendre, je sais. C'est bon pour les jeunes ! ». Pour les cordonniers
« traditionnels », la formation continue et la formation professionnelle des adultes n'ont
pas raison d'être. C'est pendant le temps de jeunesse, en apprentissage à l'atelier « sur le
tas » qu'on apprend un métier, ce n'est pas à l'âge adulte ou dans une école. « Un métier
ne s'apprend pas en six mois » ou « // n'y a rien de mieux que chez un patron sérieux »
sont des phrases souvent répétées par les informateurs. Ne formant plus d'apprentis, ils
ont perdu leur fonction traditionnelle d'éducateur de la jeunesse. Pour les cordonniers
Kcolc dc Rééducation Professionnelle des Blessés de la <inevvc de Rouen
Atelier des Cordonniers (vae partielle)
«traditionnels », les «jeunes» formés à l'AFPIC sont entrés dans le métier à l'âge
existant, une mise en péril de la dualité entre un haut représentés par les cordonniers
« assis » et un bas représentés par les cordonniers « debout ». Qu'est-ce qu'une école
professionnelle pour un cordonnier « traditionnel » ? C'est un lieu où l'on forme des
Depuis le conflit de 1870, des écoles professionnelles ont été créées sur le
dans la mesure où chaque guerre fournit son contingent A Poitiers, VEcole des Jeunes
Sourds forment des cordonniers depuis 1 890. André Fraigneau y a appris son métier en
1947 tandis qu'André Bourgoin, Henri Primault ont été formés à VEcole professionnelle
des Paralysés de France à Saint-Clément-des-Levées (Maine-et-Loire)^ ^ Le cordonnier
de Gençay (Vienne) a appris son métier au Centre de Vesoul-Navennes en Haute-
Saône, géré par VAssociation pour la Formation Professionnelle des Adultes (AFPA),
Libération, au retour des prisonniers sans travail et des mutilés de guerre. Entre 1955 et
boutique, parfois dans des conditions précaires, ils parviennent à tirer un revenu que
s'est installé dans le centre de Poitiers en 1986 {Nouvelle République Vienne 2 octobre
s'est installé en 1987 à Chalandray, un bourg rural où il réside, il est toujours en activité.
Une monographie professionnelle établie à l'issue de la Première Guerre
« Les amputés unilatéraux (jambe ou cuisse), même les amputés bilatéraux (à condition
qu'il leur reste un moignon suffisamment long). Les mutilés atteints de raideur
articulaire (à condition qu'ils puissent rester assis aisément). Les trépanés, les sourds, les
professionnel. Ils opposent une stature debout, altière, à celle des «petits cordonniers »,
diminués par un handicap ayant bouleversé leur vie.
prédécesseurs les plus célèbres, le bottier anglais John Lobb, par exemple^ . La position
assise dans laquelle s'exerce la gestuelle du métier rejoint la position assise de l'artisan
de l'excellence, notable du métier, reconnu par ses pairs et par ses clients. La position
assise est en haut du métier. A cette image vieillie, désuète, s'oppose la réalité
entre haut et bas, entre position « assise » et « debout ». Cette dualité apparaît
également face aux organismes incarnant la profession, face aux fêtes corporatives, à
professionnelle.
LA PROFESSION
d'organisation spécifique pour les artisans des « Services minutes » qui exercent
Syndicat des réparateurs industriels de la chaussure n'a pas cherché à les accueillir, ni a
créer une section à leur intention.
Le syndicat professionnel
Les cordonniers « minutes » s'intègrent difficilement à la communauté
samedi, ils se tiennent à l'écart, isolés. Et, lorsqu'ils demandent, quelques années après
leur installation, à adhérer au syndicat, les cordonniers « assis » émettent des réserves.
Fonds d'Assurance Formation (FAF). Dans les années quatre-vingt, c'est au moment de
la fête corporative, la Saint-Crépin, que la famille professionnelle se donne à voir.
place un dimanche aux environs du 25 octobre, jour de fête du saint patron. Tous les
quatre ans, la Saint-Crépin a une dimension régionale. Des invitations sont expédiées
aux collègues de la région et, bien souvent, au président de la Fédération nationale. Une
Si une messe est toujours célébrée le matin en l'honneur des saint patrons
en Vendée, dans la Mayenne (les Pays-de-Loire), ce n'est plus le cas dans la Vienne,
même si le fait paraît généralisé au XIX^ siècle (Journal de Loudun 29 octobre 1874,
Echo de Civray 30 octobre 1884).
La fête inverse les usages que requiert le travail Lorsqu'une jeune femme,
déjouant les vieux, les hommes, leur signifiant implicitement leur état de «petit
cordonnier » : « Petit cordonnier, t'es bête - bête I Qu'est-ce que t'as donc dans la tête -
tête I Crois-tu que mon coeur s'achète - chète I Avec une paire de souliers ? ».
vient le temps de la remise des médailles. Après le repas, c'est le tirage de la bourriche.
23
la danse et les jeux de cartes. Le soir, une soupe à l'oignon rassemble les derniers
participants. Le lendemain, on achètera les journaux, on commentera le compte-rendu,
la photo du banquet ou des décorés. Et le cas échéant, les clients ne manqueront pas de
féliciter leur cordonnier^T
élément singulier d'un rite de passage qui, dans le groupe, pérennise l'agrégation du
jeune artisan à la communauté. La médaille est accompagnée de la remise d'un diplôme,
qu'à ceux dont la rumeur n'aura pas contesté la qualité professionnelle. C'est l'objet de
décoré. Lorsque des avis sont émis, bien souvent intervient la nature de la formation
de juin, une commission composée des « sages » de la FNCF - quatre ou cinq des plus
anciens, parmi les cordonniers « traditionnels », qui ont assisté à tous les congrès -
examine les dossiers. Passé le grade de « Compagnon », le cordonnier peut être proposé
au titre de « Chevalier », puis à l'issue de sa carrière, à celui « d'Officier », voire
avant la retraite, sont l'objet d'enjeux et de rivalités entre pairs au niveau national
Attribuer une médaille à l'un plutôt qu'à l'autre est diversement interprété et alimente
les « discussions de couloirs ». Même si l'on déclare n'avoir aucune estime pour les
signe l'appartenance au groupe et le hiérarchise selon un ordre qui lui est propre. La fête
conviés par leurs employeurs. Les industriels de la réparation n'y sont pas admis. En
1965, le gérant de la Cordonnerie Trouvé, installée à Poitiers, rue des Cordeliers depuis
la Saint-Crépin est célébrée partout en Allemagne et que « cette tradition ancienne, que
beaucoup de métiers artisanaux nous envient, doit être maintenue chez nous »^^. En
présentant la fête comme un élément du capital symbolique, en l'ancrant dans le temps
et l'espace, en légitimant ce qui doit se faire ici - les Deux-Sèvres ne fêtent plus la Saint-
Crépin - par ce qui se fait ailleurs, le président marque la valeur emblématique de la fête
et son rôle coercitif assurant la pérennité du groupe.
mis en scène à travers les discours, les commentaires rapportés à et par la presse locale.
Traversant l'opposition entre cordonniers « assis » et cordonniers
que bien souvent ils affichent au moyen de panonceaux publicitaires dans leurs
boutiques, les cordonniers « minutes » revendiquent la qualité de chefs d'entreprise
Chambre de Métiers lors de leur installation est une simple formalité qui ne les engage
Talons « Minute » - un document destiné aux futurs créateurs d'entreprise -, a été édité
en 1989, non par les Chambres de Métiers, mais par le Centre d'Etude de la
Commercialisation et de la Distribution de l'Assemblée Permanente des Chambres de
Commerce et d'Industrie.
comme les gardiens des valeurs anciennes de l'artisanat Un artisan cordonnier doit être
inscrit au Répertoire des Métiers et travailler de ses mains à l'atelier. S'il a plusieurs
boutiques, il « serait mieux à sa place au syndicat des industriels » {BIC n°174 1977 :
12). Les cordonniers « traditionnels » ne mettent jamais l'accent sur l'économie et la
Maître en son métier» (Pennors BIC n°5 1978: 4). Par la suite, la Fédération va
proposer que l'appellation « cordonnerie » ou « cordonnier » soit interdite aux
réparation.
qui ne sont pas Hés à l'apprentissage et l'exercice d'un métier particulier : taille de clés,
marquage des plaques d'immatriculation des voitures, gravure, affûtage. Ainsi rejetés,
les artisans des « Talons minutes » sont isolés à l'intérieur et à l'extérieur du groupe.
Cependant, dans les galeries marchandes des supermarchés et des hypermarchés, ils
exercent l'une des dernières activités où le manuel l'emporte sur le mécanique. Aux
vente. Les horlogers bijoutiers ne font plus la réparation des montres, les photographes
depuis les années soixante. Avec l'application du décret du l^'^ mars 1962, la notion
d'artisan ne désigne plus un état professionnel mais un titre. Les cordonniers
« traditionnels » se plaignent que la notion d'entreprise ait été substituée à celle d'artisan
lors du remplacement du Registre des Métiers par le Répertoire des Métiers. Alors que
pour être inscrit au Registre, il fallait effectuer une demande et prouver ses capacités
professionnelles, soit par des diplômes (EFAA, CAP, Brevet Professionnel, Brevet de
cinq années, le Répertoire affilie d'autorité toutes les entreprises de quelque métier
n'occupant pas plus de cinq salariés - dix ensuite - sans aucune obligation, pour les
Pour faire, il faut maîtriser la couture à la main au fil poissé, exercice technique
emblématique de la cordonnerie ancienne, dans lequel excellent les bottiers accomplis.
Lorsqu'un artisan âgé demande à un jeune : « A Poitiers, vous savez faire un fil poissé,
vous cousez encore au fil poissé ? »^^, il appréhende ainsi l'étendue de son savoir-faire.
Nos enquêtes vérifient que, dans les années cinquante, la confection d'un
fil poissé constitue le premier exercice auquel est initié un apprenti. Au début des
années quatre-vingt les épreuves d'examen comportent des travaux de « ressemelage cuir
cousu main au fil poissé », lors même que les maîtres d'apprentissage n'initient plus
leurs élèves, que les clients ne formulent plus semblable demande et que les machines à
coudre « Blake » et « Petits-points » sont en usage dans les ateliers, pour la réalisation
reprises, modifiés, après la Seconde Guerre mondiale. La délivrance des diplômes est
aux syndiqués : « Doit-on prévoir une épreuve main ? Doit-on accepter le travail
soudé ? », c'est-à-dire les assemblages collés, et non plus cousus, qui se généralisent dans
l'industrie et l'artisanat Mais la majorité des responsables syndicaux n'ont pas besoin
d'une consultation générale, ils souscrivent déjà à la déclaration de l'un d'entre eux lors
d'une réunion : « Nous ne discutons pas de botterie mais exclusivement de cordonniers
cordonnier » comportant une « épreuve de neuf ». Selon ses capacités, il serait ensuite
orienté vers les catégories supérieures : bottier au bout de quatre ans, orthopédiste après
cinq années d'apprentissage (fi/Cn''99 1964 : 20-21).
Apparaît ici ce qui constitue l'essentiel de la pensée des cordonniers
« traditionnels » pour les années quatre-vingt Le métier est hiérarchisé sous la direction
des responsables professionnels les plus qualifiés. Au bas de l'échelle est placé le
cordonnier réparateur (il répare les chaussures), puis le cordonnier (il répare et « monte
à la main » des chaussures en achetant des « tiges » manufacturées), le bottier (il prend
les mesures, fabrique les « tiges » et les chaussures pour pieds normaux), l'orthopédiste
(il prend les mesures, fabrique les moules, les formes, les « tiges » et les chaussures pour
pieds déformés).
Le cordonnier est donc celui qui sait réparer et fabriquer des souliers
neufs. La dévalorisation de l'état de réparateur va à I'encontre de la réalité du métier,
délégués, le président Pennors tente d'infléchir les mentalités : « D'après les statistiques
officielles, à part les centres et les collèges techniques, l'artisanat de la chaussure forme
des apprentis pour lesquels l'apprentissage du neuf est une obligation. (...) Ce que je
n'admets pas, c'est que l'on dise que la réparation n'est pas un métier et qu'il n'y a pas à
du Ministère pour faire classer le cordonnier réparateur dans les professions nécessitant
vente des chaussures en plastique à bas prix, alors que les bottiers ne font plus de
cordonniers perdent leur qualité de fabricant C'est l'un des sens de la phrase : « Le
métier est fichu, bientôt il n'y aura plus de cordonniers \ ». Pour les cordonniers
autorité entre pairs. La conquête de ce capital régit les représentations des membres du
groupe. Tout comme l'histoire des diplômes traduit une opposition forte entre le haut et
le bas dans le métier, l'évolution des syndicats, les changements dans les sigles, vérifient
le clivage et confortent l'idée qu'une violence symbolique accompagne la perte de
l'identité bottière.
mihtants dans des amicales et des petits syndicats professionnels, à se grouper pour
assurer la défense de leurs intérêts (Pennors I960 : 6).
de France (FPIC). Quelques mois plus tard, d'autres professions, dont celle des
mouvement L'apprentissage retient l'attention avec le vote des lois A.stier et Walter-
Paulin qui le réglementent
29
reprendre leur activité. A la Libération, des « tickets matière » sont exigés pour se
apparaît à travers les choix concernant les élus professionnels et les sigles syndicaux. Si
l'expression « artisans maîtres de la chaussure » succède à celle de « petite industrie de
la chaussure », c'est parce que le mouvement industriel est devenu puissant et s'est
structuré, et c'est parce que la notion d'artisanat ne recouvre plus celle de petite
A partir de 1953, dès lors qu'un agrément sera exigé par ia Sécurité Sociale
dirigée par Ernest Saint-Eve, est créée en liaison privilégiée avec le Syndicat National
représenter les bottiers. La Chambre Syndicale des Bottiers de Paris regroupe les
bottiers de haut luxe de la capitale, tandis que la Fédération Nationale des Bottiers de
remarque que dans notre Fédération, le mot bottier était avant celui de cordonnier. Je
30
violentes protestations fusent dans la salle, quelques-uns exigent qu'on ajoute le mot
bottier. Le président s'insurge leur déclarant qu'ils ne sont pas bottiers . La nouvelle
appellation est entérinée par un vote à main levée. L'adéquation entre cordonnier et
L'identité bottière au sein de la FNSAMC est une identité qui ne peut être
pérennisée en l'état dans la mesure où les bottiers ont quitté la Fédération, créant des
régie par un ordre ancien confirmé par les techniques et les statuts sociaux ? Comment
LE « CORDOUANIER » ET LE « SUEUR »
25 « sueurs » v Le métier est hiérarchisé entre les « cordouaniers » et les « sueurs » qui
s'occupent de fabrication des souliers, et les savetiers qui font de la réparation. La place
pour les ouvriers en chaussures. Le « sueur » est celui qui réalise les travaux de couture
pour assembler les différentes pièces constituant une chaussure. Le « sueur » figure dans
les cartulaires du XI^ et du XIl^ siècle sous le nom latin de sutores, du verbe sutor
coudre.
va se mettre en place avec les représentations des saints patrons, les deux groupes de
baudroyeurs, les peaussiers, les boursiers. L'on comprend ainsi que les outils des
tanneurs figurent sur les blasons des métiers de la chaussure.
Trancher /coudre, couper /assembler forme le couple d'oppositions qui
comprend les activités de découpe des cuirs et de couture des chaussures figurant la
fabrication. De la même façon, les Anciens établissaient une différence entre le «faiseur
Egyptian Shoeiakers of about 1450 B.C.
Reproduction of the fresco in the tomb of Rekh-ai-Re, now in Metropolitan Museun of Art, New York.
Picture of The Shoe Museun, Northampton (Great-Britain)
« souliers à oreillettes » en cuir s'attachant par des cordons, des lacets. Ainsi, malgré la
disparition du signe « sueur », l'idée d'assembler perdure avec le mot cordonnier.
LE CORDONNIER ET LE SAVETIER
corps spécial des savetiers au Moyen Age. A Poitiers, ils ont été érigés en corporation
jurée en 1557 et 1570 du consentement des cordonniers^. Le métier de savetier, inscrit
dans le Livre des Métiers d'Etienne Boileau, consiste à confectionner ou réparer les
souliers de second ordre, les souliers communs, ceux des gens du peuple. Une sentence
du Châtelet en date du 15 décembre 1621 confirme les savetiers dans le droit de « se dire
travail de réparations des chaussures « en cuirs vieux (...) soit en bottes, soit en souliers,
en escarpins et "pantoufles" » et leur défendent de faire des souliers neufs, à moins que
ces souliers « n'ayent une vieille pièce ou quartier de vieux cuir»^. Ils leur interdisent
l'emploi des cuirs neufs, ou cuirs gras et bien corroyés, sauf pour les chaussures de très
petite pointure. A l'inverse, les cordonniers n'ont pas le droit de faire le raccommodage
des vieux souliers, « l'adoubage » : « Condamné est par jugement et de son consentement
Heli Barbarin dit Peregori, paier et rendre dedans VII jours p. V à Jehan Lamet, X VI
bases techniques sont les mêmes. Les innombrables procès que les cordonniers intentent
aux savetiers, quand ceux-ci ne les accusent pas de faire de la réparation, témoignent de
298). En revanche, l'assujettissement des savetiers aux règlements des cordonniers est
patent En 1459, par exemple, l'obligation est faite aux savetiers parisiens, par sentence
du 4 mai, de recevoir à leur maîtrise les compagnons ayant fait apprentissage de
cordonnier.
Furetière précise, dans son Dictionnaire universel, imprimé en 1694, qu'un cordonnier
est un « ouvrier qui fait des chaussures en cuir, soit souliers, bottes ou pantoufles », la
péjoration qui accompagne la définition du savetier est explicite. Savetier est mentionné
avec un double sens, d'une part : « artisan qui racommode les vieilles chaussures,
souliers, bottes, pantoufles. Le corps des Savetiers est un des plus nombreux de la ville »,
d'autre part: «se dit aussi de tout autre Artisan qui travaille mal proprement,
grossièrement, qui salit, qui gaste la besoigne. Le Maçon dit à son apprentis. Tu ne seras
jamais que Savetier ».
Lorsque Garsault rédige son Art du cordonnier {MIS : 502), auquel auront
chacun suivant son attrait, la partie du métier qui lui convenait : de là sont émanées trois
branches de la même profession : les cordonniers pour hommes, ceux pour femmes, & les
revanche, les rédacteurs de V Encyclopédie, esprits éclairés, font figurer l'art mineur du
savetier à l'arrière-plan de la planche « Cordonnier et Bottier», sans autre commentaire
que : « un savetier sous son échoppe ». Dans la boutique du cordonnier, ils sont six,
maître et compagnons, on y prend la mesure du pied d'un client, dont les habits
planches, adossé à un bâtiment, à même la rue. Les cordonniers et les savetiers sont donc
En 1750, les savetiers sont parmi les classes les plus nombreuses du
commerce parisien et comptent, d'après Savary, 1300 maîtres alors que les cordonniers
comprennent 1820 maîtres. Au XVII^ et au XVI 11^ siècle, l'activité des savetiers n'est
pas marginale dans l'économie. Ils participent à un vaste mouvement de recyclage lié à
Tobsolescence vestimentaire : les maîtres font cadeau de leurs vieux habits à leurs
parisienne, le vol de vêtements est dix fois plus élevé que celui des aliments^. Les
fripiers retaillent et revendent des milliers d'habits. A Poitiers, les savetiers sont en
contact avec les fripiers qui pratiquent l'achat et la revente des vieux habits, des
chaussures, des vieux meubles, à l'exclusion de tous objets neufs^. Les savetiers, bien
34
plus que les cordonniers, sont économiquement liés aux couches laborieuses de la
société d'Ancien Régime.
vers le bas. Ils vendent à ceux qui portent des sabots, tout au moins au XVH^ et au
XVIII^ siècle, des souliers de cuir. Ils importent les signes de la possession parmi le
peuple. Savetier est métier de faussaire. Faire du neuf avec du vieux est création factice.
L'opposition entre les deux parties du métier est patente à travers les
les représentants des corporations, les cordonniers, pour n'être pas mêlés aux savetiers,
placent entre eux et ces derniers, une longue corbeille. Les savetiers s'en offensent,
pénétré d'un sentiment très vif des préséances : le noble est supérieur au roturier, le
dans les emblèmes relaie les divisions. Lorsque les cordonniers d'Aix-en-Provence se
séparent des savetiers, une transaction en date du 14 mars 1695 et homologuée par le
Crispinien qui est dans l'église des Pères Augustins, ensemble tous les ornemans d'icelle
demeureront ausdits cordonniers, sauf aux dits savetiers d'en prendre une et d'en faire le
service à leurs frais sous l'invocation de tel saint que bon leur semblera, dans quelque
autre église ». Les savetiers prennent alors l'habitude de se réunir dans le réfectoire des
Grands Carmes et, à la réunion du 10 mai 1699, ils décident d'accepter l'offre des
L'identification des cordonniers à saint Crépin et, par voie de conséquence, des savetiers
à saint Crépinien est attestée par ailleurs, à Liège, où, au XVIl^ siècle, on établissait une
hiérarchie entre les deux frères. Saint Crépin patronnait les cordonniers, Crépinien les
répandue en Europe entre le XIV^ et le XVIII^ siècle, Crépin est généralement plus âgé
et plus grand que Crépinien son diminutif Sculptures, retables d'églises, bannières de
vitrail en grisaille du XVI^ siècle.
L'auteur est un petit naître de la
Renaissance.
corporations, gravures représentent saint Crépin debout, tel un prêtre officiant à l'autel,
il découpe le cuir. Saint Crépinien est assis, il coud pour assembler le dessus et le dessous
d'une chaussure, tirant le fil, écartant les bras.
découpant le cuir avec son tranchet tandis que Crépinien, assis sur un escabeau, coud la
semelle d'un soulier (Réau 1958: 352-353). D'après diverses interprétations, la
répartition du travail entre les deux frères est aussi celle entre maître et compagnon. Le
être prouvés historiquement- née au Moyen Age et populaire dans toute l'Europe,
raconte la vie et la mort des deux cordonniers martyrs. Les deux frères, issus d'une noble
famille romaine, quittèrent Rome à l'époque des persécutions des chrétiens par
Dioclétien, à la fin du III^ siècle, et s'en allèrent vers la Gaule pour y convertir des
païens au christianisme. Ils s'installèrent à Soissons où ils apprirent le métier de
cordonnier, travaillant la nuit et prêchant le jour. Ils attiraient les pauvres à la foi
chrétienne en leur fabriquant gratuitement des souliers. Arrêtés dans leur atelier sur
l'ordre de l'empereur Maximien, les deux cordonniers furent livrés au préfet Rictovarius
qui leur fit subir toute la gamme des supplices traditionnels dans les Passions des
qu'au fait qu'ils aient appris le métier de cordonnier malgré leurs origines nobles''*.
Dans le Haut Moyen Age, le travail manuel est dans l'ensemble méprisé,
mais une ligne de partage s'établit entre catégories considérées et méprisées. « Une
dans le textile, savetiers au-dessous des cordonniers» (Le Goff 1991 : 106). Crépin et
années quatre-vingt par exemple, c'est parce que la légende raconte qu'il est le frère de
saint Crépin.
fabriquer ou réparer des chaussures. Les cordonniers et les savetiers sont « libres de se
donner sur enseigne comme faisant à lafois le neuf et le vieux »'^. En réquisitionnant
36
les artisans de la chaussure pour fabriquer des souliers militaires afin d'équiper les
armées - près de dix décrets sont rédigés à ce sujet -, la Convention nationale influe sur
deux métiers. Dans l'ensemble, les artisans demeurent installés dans une tradition
paralysante et des principes surannés. Les plus estimés se mettent au service des
nouveaux maîtres et les autres poursuivent leur labeur plus ou moins prospère. Le
développement industriel va, à la fois, aider et concurrencer les métiers en apportant des
matériaux, des outils, des machines nouvelles. A partir de 1820, une succession
LE BOTTIER ET LE CORDONNIER
Le mot cordonnier est employé tant par les industriels que les artisans. En
revanche, les industriels à même de fabriquer des chaussures confortables de qualité, à
la mesure du pied, abandonnent cette appellation pour celle de chausseur. C'est dans les
dénomination pour prendre celle de bottier, et la plus mortelle injure que vous puissiez
faire à votre tailleur ou à votre chapelier serait de les accuser de travailler comme des
cordonniers ou savetiers » (1856 : 6-7). Les bottiers vont former l'aristocratie du métier
d'Ancien Régime, il fabrique les chaussures communes pour les gens du peuple. C'est le
savetier pour les raccommoder, répondent, nous le croyons, à tous les besoins de la
consommation » (1856 : 22).
Au début du XX^ siècle, avant 1914, les cordonniers sont liés à l'économie
urbaine et villageoise. Le plus petit bourg compte au moins un cordonnier qui tire ses
revenus du neuf et de la réparation. Dans les familles les plus modestes, on a ses formes
chez son cordonnier de même que ses mesures chez l'artisan tailleur. Les cordonniers-
bottiers occupent une position intermédiaire entre les cordonniers et les bottiers
37
Spécialisés dans la mesure et le luxe. Ils achètent des tiges manufacturées et réalisent
l'assemblage du dessus et du dessous à la main. La Première Guerre mondiale, en
de savetier soit le plus ordinairement employé pour qualifier un mauvais ouvrier en tout
genre, il ne peut et ne doit servir ici que pour désigner l'homme dont les occupations
journalières et continuelles ne consistent qu'à raccommoder et remettre en meilleur état
toutes les vieilles chaussures. Presque tous les savetiers dans leur jeunesse ont exercé
l'état de cordonnier ; mais quelle que puisse avoir été la cause qui les a fait dégénérer, les
uns sont à demeure dans leur chambre, on en trouve beaucoup qui sont portiers ;
plusieurs, dans les jours de beau temps, descendent de leur cinquième pour travailler au
coin de la rue, sur le bord des allées, dans les angles des boutiques lorsqu 'on veut bien les
y souffrir, quelquefois sous des échoppes, le plus souvent encore en plein air. (...) Il existe
aussi des savetiers en boutique, dont tout le commerce consiste à rassembler tout ce
qu'ils peuvent trouver en vieilles bottes, vieux souliers et autres chaussures, de quelques
genre que ce puisse être, pour les revendre, après les avoir rapetassés, à tous ceux qui ne
Qu'il adhère à cette image ou qu'il s'en défende, tout métier se considère
lui-même dans le regard des autres. Au-delà de la dualité des pratiques et des statuts
anciens et contemporains, peut-on vérifier un point de vue sur le cordonnier à travers les
sobriquets, les expressions qui s'attachent aux noms du métier ?
1 Le Cordonnier
Carte postale
expédiée de Rochefort (Charente-Maritime)
le 23 juin 1905
Bausson éditeur, Nimes
Illustrateur : A. Orcel
Coll. J. Chauvin
Série
Le Cordonnier »
Photographie
Editeur : As de Coeur
Coll. J. Chauvin
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métiers traditionnels. C'est un personnage âgé, un vieil homme paisible, assis à son
établi, il répare des chaussures usagées. On achète une carte postale en vacances, au
cours d'une excursion dans l'intérieur d'un « pays », loin des trépidations de la plage et
de la ville. Le cordonnier personnifie le rythme lent d'un temps rural, son évocation est
qu'il se dresse I II fait des pets et des vesses I Qui à l'instar du tonnerre I Font trembler
toute la terre »'. Les cordonniers, de par ia position du corps au travail, assis, sur un
tabouret bas, ont la réputation d'être sujets aux maladies d'estomac, d'avoir une
mauvaise digestion (Juignet 1977 : 39). Leur vie sédentaire, leur attitude dans le travail
est dénoncée par des médecins et des hygiénistes au XIX^ siècle^. Cette image de
cordonnier facétieux semble correspondre, à l'époque, à une figure largement établie.
Lorsque Sensfelder le cordonnier nous livre ses réflexions, en 1856, il note qu'une
« chose assez curieuse c'est que chaque métier imprime aux artisans qui l'exerce un
caractère paniculier, une nature spéciale. Le boucher est généralement grave et plein de
son importance, le peintre en bâtiments est étourdi et bambocheur, le tailleur est sensuel,
l'épicier est stupide, le portier curieux et bavard, le cordonnier et le savetier, enfin, sont
gais, égrillards parfois, ayant toujours un refrain à la bouche » (Sensfelder 1856 : 270-
271).
Le « gnaf »
tl, 1938 t4). Van Gennep note ce sobriquet de commune à Agny dans le Nord : « Agny
lé niaff, pays des imbéciles » (1980 : 239).
(Gachignard 1983 : 149). Par ailleurs, «gnaf» se dit d'un étranger dont on n'entend pas
la langue. C'est un terme injurieux à l'adresse de celui qui est nomade, qui n'est pas du
« pays ».
et «gnaf gnaf » est le bruit que fait entendre le cochon en mangeant Dans le Nord,
« gnaffer » qualifie les aboiements étouffés du chien, les cris du chien blessé ou battu
(Wartburg FEW Vil : 1). En Anjou, dans un récit de la tradition , des chiens poursuivent
mais le mot désigne par ailleurs le sexe de la femme ou le pucelage. Divers dictionnaires
du XIX^ siècle, dont le Littré, mentionnent « le jeu de la Savate » dont Noguès offre une
description pour la Saintonge. Garçons et filles assis en rond, bien serrés les uns contre
les autres, font circuler sous leurs jambes une savate. Le « niaffe ou sabrou » au milieu
doit la saisir. On lui criait « niaffe, gare à ta forme ! ». Cela voulait dire : «prends garde
à ton arrière-face ! » (Noguès 1890 : 85). Mais la forme désigne aussi le moule en bois
jeunes gens et jeunes filles et favorise le contact erotique (Fabre et Lacroix 1973 : 123).
Le sens de garçon se vérifie pour l'allemand avec le mot « knahe » tandis que « knave »
signifie, en anglais, drôle, coquin, fripon, valet, et ignavas, en latin, paresseux, feignant
l'argot Si le mot ne reproduit pas les bruits qu'il désigne, la combinaison phonétique
« gn » - inhabituelle en français , lui confère une tonalité veule d'où il tire une forte
travers le sobriquet « Gnippe Cordonnier » employé dans une famille poitevine pour
désigner un cordonnier ambulant : « un petit vieux, sans âge, tout sale, assez déguenillé,
avec les cheveux longs et noirs, tout barbu, dans un visage inquiétant luisaient des yeux
de braise. Une hotte en osier sur le dos, il passait à peu près deux fois l'an pour
demander du travail»^. Sa seule évocation suffisait à calmer l'enfant
Le « sabourin »
sans que ce mot puisse être localisé par ailleurs sur le territoire national Le fait ne peut
surprendre puisque le « sabaron » {« sabarin, sabirin, savaron ») est une « sorte de
soulier tronqué en avant, de façon à laisser libres les orteils » porté par les paysans dans
les sabots de bois au XIX^ siècle (Gélin 1897 : 61). L'usage de l'objet et son existence
lexicale ne sont attestés que dans l'Ouest Le « sabourin », contrefait, un peu ivrogne, la
« Etranger de mauvaise mise qui parcourt les campagnes. Le sens donné à ce mot est
L'on aura dit d'abord "rabalous" pour désigner ces cordonniers, ces chaudronniers
ambulants, ces colporteurs... qui vendent, échangent, brocantent de menus objets et sont
haine des autres Compagnons envers lui est telle qu'ils ne manquaient jamais, le
rencontrant sur leur route, de lui crier « Passe au large, sale puant ! », l'accusant d'avoir
Compagnons qui ridiculisent son grand tablier, ses outils grossiers et sa poix puante
(Rancière 1983:91-92).
41
Le « bouîf »
XIX^ siècle. Il est cité dans les glossaires bien souvent comme équivalent populaire
francisé d'appellations locales. « Bouif» n'apparaît pas au XVII*^ siècle, il est absent du
Littré, imprimé à partir de 1859 et, quoique bien conservé au XX^ siècle dans les années
quatre-vingt, il tend aujourd'hui à disparaître, en raison de la péjoration qui
l'accompagne.
à l'administration, ils donnent au signe «bouif» le sens suivant: « Dans l'esprit d'un
public peu averti, le cordonnier est le bouif immortalisé par Tramel, c'est le petit savetier
crasseux pratiquant dans une échoppe le rapetassage des chaussures usagées »". Chacun
des termes de la caractérisation peut être noté.
Selon Le Petit Robert (1987 : 205), « bouif» serait un terme d'argot attesté
vers 1867, aphérèse de « ribouis », en usage vers 1880 avec le sens de vieux soulier,
soulier usagé d'une part et, d'autre part en 1854, de savetier. L'aphérèse est la chute d'un
phonème ou d'un groupe de phonèmes au début d'un mot « Pitaine » se dit pour
depuis nommé « bisègle », qui possède « une espèce de tête ronde par un bout et une
sorte de tranchant émoussé par l'autre » et sert à « polir l'encre noire » que l'artisan met
rapetassage, de vieux, de saleté. Pour le cordonnier Juignet, le « bouif» c'est celui qui
est bouffi, qui se bâfre. Bâfrer qui signifie manger gloutonnement, avec excès, dans un
premier sens voulait dire « bafouer, bruit des lèvres » et baffer, donner des baffes, des
gifles (Godeau 1993 : 91). Le radical « baf» exprime l'idée de bouche, d'où coup sur la
désigne celui qui se goinfre, ou le bruit que fait entendre le cochon en mangeant Le
cordonnier est marqué par la saleté, il ne peut s'en défaire, même les jours de fête de la
Saint-Crépin : « Parés de leurs habits du dimanche et des jours de gala, les cordonniers
méticuleuse, leurs mains ont conservé cette couleur noirâtre qui leur est propre, qui est
particulière aux gens de leur état. Madame la poix ne perd pas ses droits du premier
coup. Elle n'abandonne pas ainsi ses fervents adorateurs. » {Le Journal de Loudun, 29
octobre 1874). Les mains du cordonnier sont donc tachées par l'encre noire, les cires et
42
la poix qui, en Languedoc, est à l'origine du sobriquet « lo pegot », qu'on peut traduire à
peu près par « celui qui utilise la poix (la pegà) ». C'est le sens de l'espiègle « Lapègue
cordonnier » de notre carte postale du début du siècle.
pied, de bas comme en plusieurs cas le sub des Latins . Dans le Midi, l'on dit « sabar »
mouvement vers un bas social, à travers l'action de réparer, de remettre en état ce qui
est vieux, usé. C'est le savetier que l'on péjore ain.si, ce n'est pas l'artisan qui fabrique.
associent le « petit cordonnier » à des plantes et des bêtes par un lien de péjoration. Dans
manger la tête des choux fourragers : « Ils n'avaient pas les moyens de s'payer des vraies
asparges à la saison printanière. Y devaient s'contenter des pousses de choux fourragers
(...). Qués pauvres gars pouviont s'en régaler et même souvent gratis si une de leurs
pratiques les autorisait à aller en couper queques bouquets dans .son champs de choux »
(Descamps Centre- Presse 8 février 1982). Dans le sud de la Vienne, par ailleurs,
l'expression un « apéritif de cordonnier » emprunte la même logique et signifie « boire
En Saintonge, «feire lafeite des cordouniers », c'est faire des ricochets sur
l'eau avec des pierres plates (Doussinet 1975: 133) alors que, dans l'Aude, vers
Carcassonne, un informateur nomme «cordonnier» une araignée d'eau'" et qu'en
Poitou, cette appellation désigne un insecte, le gerris, une punaise adaptée à la vie à la
surface de l'eau. La particularité du gerris est de ne se déplacer qu'en ligne droite
43
(Meloche 1984: 41). Pour changer de direction, il doit modifier l'orientation de son
corps entre deux mouvements de propulsion.
Ici et là, le mot « cordonnier » est associé, d'une part, à l'araignée d'eau qui
ne sait avancer qu'en ligne droite et d'autre part au crabe qui ne marche que sur le
côté, : « Nos ancêtres éprouvaient une certaine répugnance à l'idée de manger du crabe
parce que, disaient-ils, c'était le poisson préféré des juifs, qui l'avaient fait exprès pour
leur usage et n'en mangeaient pas d'autre. De là vient que les vieux loups de mer
l'appellent "juif. Et, comme la tradition dit que les juifs étaient cordonniers, on lui
des poissons. »' . A ce récit, recueilli en Catalogne en 1918, la traductrice ajoute, par
ailleurs, ces commentaires : « Voici en effet, comment on justifie l'idée que les juifs sont
toujours cordonniers : "On croit que c'est le .seul métier oii les ouvriers et les jeunes ne
font rien d'autre que réparer des vieilles choses, sans en faire de nouvelles. On dit aussi
que seuls les peuples de tradition juive ont coutume de rapiécer ce qui s'est abîmé ou
cassé pour l'utiliser jusqu'au bout : dans les pays oii les gens n'ont pas cohabité avec des
juifs, on jette les vieux objets et on les remplace par des choses neuves". (Amades
Folklore, Costums 694). Les juifs resteraient donc attachés aux "vieilleries" : n'ont-ils
pas en effet refusé la nouvelle loi introduite par le Christ, restant fidèles à l'ancienne
religion ? On comprend donc que les juifs soient savetiers et que les crabes soient juifs :
comme ceux-ci, qui ont refusé d'aller de l'avant, ils marchent à reculons » '^.
Observateur de l'intérieur et praticien du métier, le cordonnier Sensfelder
évoquant, par là-même, Isaac Laquedem le Juif Errant (pp. 6-7), tout comme Sébillot
qui, dans Légendes et curiosités des métiers (1896 : 17), comparant les métiers, note la
savetiers est d'une richesse exceptionnelle ; il n'est probablement aucun corps d'état qui
n 'ait été désigné par autant de surnoms plaisants ou de périphrases comiques » ' ^.
Depuis qu'un récit de 1602, écrit par l'évêque allemand Paul d'Eitzen,
le texte s'est diffusé dans toute l'Europe grâce aux progrès de l'imprimerie. En
Angleterre, l'opuscule de Paul d'Eitzen y est transcrit dès 1612 et le sujet est traité vers
1620 dans une ballade reprise en 1769 sous le titre Le Juif Errant ou le cordonnier de
religieuses (Rouart 1988: 9). Elle a commencé à se répandre en Europe lors des
l'émancipation des Juifs décidée par l'Assemblée constituante en 1791 a donné une
impulsion nouvelle à cette légende populaire, qui parle à l'imagination des foules. Au
L L VRAI i: >^ R T R A 1 T ^
DU JUIF 'ERRANT,
Tel qu'on l'a vu passer à Amis , le (i Mars i Sof).
XIX^ siècle, l'imagerie populaire, sur laquelle figure bien souvent une échoppe de
savetier, a popularisé « La complainte du Juif Errant ».
Dans les récits d'origine, tout ce qui « cloche » est marqué négativement,
en utilisant les propriétés logiques du concret Le but des récits est une mise en ordre
symbolique. Le giris se déplace seulement en ligne droite, le crabe marche sur le côté. Ils
sont marqués symboliquement, ce sont des « aberrations taxinomiques ». Traiter les
catégories sociales comme des espèces naturelles, c'est éprouver la force des couples
façonnent la pensée symbolique. Le monde des cordonniers est régi par une cosmogonie
implicite dont ils vivent le sens, mais dont la cohérence peut leur échapper.
ancien, au XIX^ siècle, les savetiers, et plus près de nous, au XX^ siècle, les «petits
cordonniers ».
LE CORDONNIER DE LA MEMOIRE
aujourd'hui dans le regard des autres ? Nous avons sollicité des informateurs nés avant
propos du cordonnier de leur enfance, ou tout au moins qu'ils évoquent le souvenir qu'ils
conservent dans leur mémoire. Dans les réponses, de simples feuillets, expédiés par le
cadre d'un atelier d'écriture -, c'est une figure ancienne d'avant les « Talons minutes » et
les supermarchés qui apparaît La mémoire n'opère pas de distinction entre le bottier et
le cordonnier 'T
regarde travailler. La boutique est sombre, exiguë, sale, en désordre. Il en émane des
odeurs fortes, cuirs et poix mêlées, accentuées par l'idée que les chaussures usées sentent
mauvais. Immuable, le cordonnier est toujours assis à la même place. Il est affecté d'un
handicap, il est boiteux, borgne ou bossu. Sa parole force l'indifférence. Pendant qu'il
coud, taille le cuir - travaux sans bruits - on bavarde, on passe le temps. On commente le
journal, on échange des nouvelles. Des chaises attendent les badauds, le client qui
s'attarde. Les enfants demandent des chutes de cuir pour confectionner des lance-
pierres, les paysans de la poix pour guérir les crevasses aux mains, l'hiver. Dans un
rudimentaire fourneau, il brûle les rognures de cuir, les vieilles semelles des sabots et
galoches. Le cordonnier doit chauffer l'atelier par temps froid. La poix oblige à un local
45
bas social et culturel, comme le révèle une série d'événements qui animent une
communauté rurale en 1990 et 1991.
une place nouvellement élargie afin de faciliter l'accès des voitures au centre du bourg,
une pétition circule pour faire part de « la stupéfaction des Gencéens devant ce nom
s'emmêle les lacets. Pétition dans la commune. Le choix de baptiser une place "La
administrative et universitaire, Gençay fait figure de gros bourg rural Le collège, les
banques, les commerces, un supermarché, un cinéma, contribuent à son animation. A
ouvrière, Gençay est tourné vers l'agriculture et l'économie rurale. Les paysans, les
ruraux, se déplacent aux foires réputées au-delà du canton. Chaque année, en octobre,
lien avec VUnion pour la Culture Populaire en Poitou Charente Vendée (UPCP) qui a
pied de son château » est organisé à partir d'un thème. Les enfants et les jeunes du
Centre présentent une pièce de théâtre ou un conte musical, on réalise une exposition,
est assurée. On délivrera des conseils aux éleveurs pour accroître la valeur marchande
cuir, de deux mètres dix, figurant dans le Livre des records, sera exposée.
tuyaux de drainage agricole est confectionnée. Vaste bricolage à l'allure futuriste, elle
devient un emblème exposé ensuite à la vue des Gencéens dans la cour. C'est l'occasion
{Nouvelle République). Pour les organisateurs, l'édition 1990 sera un «festival qui
personnalités locales par une remise des « pieds d'or » de l'année, pastichant ainsi les
« césars » des spectacles cathodiques. Enfin, à travers une création théâtrale, les
animateurs décident de rendre un hommage au cordonnier de la commune, Marcel
boutique l'année suivante. 11 n'a pas l'étendue des savoirs du « petit cordonnier ».
Marcel Faugeroux est une figure locale. Affecté d'un handicap à une
est au choeur du bourg sur une petite place. « Marcel » rapetasse, assis sur sa chaise
basse, derrière son « veilloir ». Il raccommode pour des prix dérisoires, il est célibataire,
joviale, sont connues. Les enfants viennent le voir, après l'école, pour recoudre un
cartable ou emprunter un bout de cuir pour un lance-pierre. Entre les entassements de
République lui consacre un article au titre éloquent (« Avec Marcel Faugeroux, Gençay a
trouvé chaussure à son pied », 27 janvier 1982), tout en rapportant un fait divers, élevé
Gençay fait coulisser sa porte de garage (après en avoir avisé Marcel Faugeroux), il
Attendez" a répondu M. Henri Bernard, sans rire, "je vais pousser la porte et vous allez
le voir". ».
métaphore de la vie gencéenne, une farce qui, jouée par des enfants, construit une
opposition entre le monde des adultes et celui des enfants, entre le monde social des
notables et celui des « petites gens », entre les piétons et les automobilistes, entre la
voiture et la marche à pied. Le «petit cordonnier » est implicitement rangé du côté des
« petites gens », du côté des « petits enfants ». La place près de l'échoppe est, dans la
pièce de théâtre, dénommée « Place de la Grande Godasse ». Le parler des enfants est
l'utopie, miroirs du rêve et de l'imaginaire, qui ont sans le savoir le pouvoir de remettre
tout le monde en accord et en harmonie ». Et parachevant l'ensemble, sur le document
nom m 'a échappé I Qui faisait des souliers si jolis si légers I Que nos vies semblaient
humble, qui, inséré dans une communauté humaine, villageoise, symbolise la proximité,
des plaisirs simples : une partie de pêche, boire un verre au café avec des copains.
Pour que vive la mémoire du «petit cordonnier », l'on émet le voeu que la place où se
tenait son échoppe soit officiellement dénommée « Place de la Grande Godasse ». Le
maire, présent à la cérémonie, s'y engage devant les enfants. Le 7 septembre 1990, le
Conseil municipal accepte la proposition. Mais la place ne sera jamais inaugurée, la
pétition dans le bourg recueille quatre-vingt signatures, exacerbant ainsi une dualité
poitevine, qui puise ses racines dans la ruralité, et à laquelle les commerçants ou les
notables du bourg opposent une culture élitiste, urbaine. Le cordonnier est placé du côté
manière qu'un cordonnier est « petit ». C'est ce que tend à affirmer l'opposition à la
Le regard porté sur l'autre, par le haut et par le bas, sépare et hiérarchise
les cultures, construit un haut et un bas social. Ainsi, si des « gens de peu » existent, selon
l'expression créée par Pierre Sansot c'est parce qu'il y a des « gens de tout ». Qui sont
ces « gens de peu » à Gençay ? Le cordonnier, certes, mais il témoigne autant d'une
identité cordonnière péjorée que d'une culture de « gens de peu ». Où situer les enfants ?
des « gens de peu », les délégués d'une culture, ou leurs héritiers ? En conséquence, les
« gens de peu » peuvent-ils être isolés et étudiés en tant que groupe ? Partagent-ils des
autant que sa volonté à restaurer un débat sur le populaire. En revanche, son discours
est trop général pour l'ethnologue, quand bien même Sansot déclare appartenir aux
« gens de peu » et les connaître, car le but de l'observateur n'est pas l'identification. Pour
analyser les modes selon lesquels sont produites les catégorisations ethnt)culturelles, la
démarche analogique a un intérêt de connaissance car elle permet de révéler et
identifier des phénomènes enfouis dans les évidences partagées. Cependant, elle n'est
«ASSIS, DEBOUT»
cordonniers « minutes »). Cette dualité moderne est liée à la transformation du métier,
« traditionnels » sont les héritiers du savoir des artisans bottiers, qui constituaient
l'aristocratie du métier. La qualité cordonnière, c'est aux dire des « cordonniers assis »,
appris le métier par la formation professionnelle des adultes, à l'AFPIC, dans les lieux
mêmes du savoir industriel.
Tout comme l'histoire des diplômes traduit une opposition forte entre le
haut et le bas dans le métier, une résistance à l'assujettissement à un état de réparateur,
l'évolution des syndicats, les changements dans les sigles, vérifient le clivage entre
cordonniers « assis » et « debout », et confortent l'idée qu'une violence symbolique
entre pairs. La conquête de ce capital régit les représentations des membres du groupe.
La continuité historique d'un dualisme dans le métier permet d'éclairer la
dualité contemporaine entre cordonnier et bottier. A travers les techniques et les statuts
sociaux anciens, une division apparaît entre cordonnier et savetier et organise
51
l'ensemble des discours sur « celui qui fait les chaussures ». Les savetiers sont liés aux
couches laborieuses de la société d'Ancien Régime. Leur activité n'est pas marginale
manufactures réduit la demande des chaussures sur mesure. Après la Première Guerre
Qu'il adhère à cette image ou qu'il s'en défende, tout métier se considère
lui-même dans le regard des autres. Les sumoms, les expressions affirment un même
point de vue. Une identité cordonnière péjorative s'est depuis longtemps mise en place,
un point de vue ancien sur le cordonnier. Les sobriquets « gnaf, bouif, sabourin », à
travers un lien avec le langage du cochon, marquent l'artisan du sceau de l'infamie dans
remettre en état ce qui est vieux, usé. On comprend ainsi qu'un récit associe le nom du
savetier au crabe, que les juifs puissent être déclarés savetiers, et que l'imagerie
populaire au XIX^ siècle diffuse la complainte du Juif Errant sous les traits d'un
savetier. Se développe donc l'idée d'une classification dualiste séparant les artisans qui
réparent, ceux que l'on dénomme au XX^ siècle les « petits cordonniers ».
Une enquête récente montre que l'expression est partout présente dans les
récits rédigés par nos informateurs, nés avant la Seconde Guerre mondiale, lorsqu'ils
«petit » est affectif et diminutif, sans que l'on puisse séparer l'un de l'autre. Apparaît
constamment une figure d'homme diminué, affecté d'un handicap, contribuant à forger
une image « traditionnelle » de «petit cordonnier », telle qu'elle e.st encore colportée par
les cartes postales modernes. « L'affaire de la Grande Godasse » à Gençay marque les
liens de survivance entre la péjoration du « petit cordonnier » et l'objet mis en oeuvre.
et sa construction. Elle est formée d'un dessus (la « tige ») et d'un dessous (la semelle).
Le cuir est composé d'un dessus (la «fleur », surface externe de la peau de l'animal) et
d'un dessous (la « chair »). De la même façon, dans le temps long de l'histoire, le métier
réalise les travaux de couture pour assembler les différentes pièces constituant une
chaussure. Sur la longue durée, l'action de tracer un modèle, de couper le cuir peut
expliciter la hiérarchisation des valeurs et les postures de travail Si le patronage est mal
exécuté, le résultat sera mauvais, quelque soit ensuite le travail du couseur. L'action de
tracer et couper nécessite réflexion, création, l'opérateur est debout pour une aisance
gestuelle et pour « voir le travail », celle de coudre est une tâche d'exécution qui
s'effectue assis. D'autres métiers enferment cette dualité. Le métier de tailleur a
occasionné une même différenciation des postures au travail : assis /debout, le haut
associé à la station debout, le bas à la station assise .
marque le rang. A l'inverse, les tailleurs ambulants sont péjorés comme les savetiers, les
d'oppositions haut /bas limite toute comparaison entre métiers car la position
symbolique est contenue dans les emblèmes, dans l'objet mis en oeuvre. Rares sont les
métiers à s'attacher deux saints patrons dans le cours de l'histoire. Les cordonniers
coupant le cuir, l'autre « sueur » cousant les différentes pièces pour les assembler.
Lorsque les cordonniers et les savetiers se séparent, les cordonniers invoquent saint
Crépin, les savetiers saint Crépinien. Aujourd'hui, les cordonniers se sont attachés saint
oppositions fondamentales de l'ordre social. L'hypothèse que nous présentons ici est la
53
capacité du groupe des cordonniers à vivre depuis des siècles une représentation
dessus et le dessous, division perpétuée dans l'opposition séculaire entre les cordonniers
bottiers et les savetiers, division reproduite au XX® siècle, dans la décennie des années
quatre-vingt, par la fracture entre « cordonniers assis », maîtres des savoir-faire
manuels, et « cordonniers debout », maîtres des machines. En d'autres termes, « c'est la
cordonnier se transforme. Aux dire des artisans eux-mêmes - aînés et jeunes -, « le petit
cordonnier s'est relevé ». Quel peut être l'impact de ce renversement partiel d'image sur
la population actuelle des cordonniers ? « Etant debout, on est déjà moins dévalué, on
domine et heureusement ! », cette affirmation d'un « jeune » invite à saisir dans ses
gestuelle de travail
{« s'élever dans l'échelle sociale »), un état de culture (« élever des enfants »), de l'autre,
est sous la pression de la concurrence économique - ils s'approprient les travaux les plus
rapides et les plus rentables -, elle est cependant déterminée par le clivage symbolique
du métier, et constitue une résurgence de l'opposition séculaire entre le haut et le bas
métropoles régionales, les « jeunes » cordonniers, maîtres des machines, des techniques
modernes de collage, des coutures du dessus et du dessous de la chaussure, sont conduits
vers le haut du métier, rejetant ainsi vers le bas, au rang de savetier, les « poseurs de
confusion avec les « Talons minutes », si ce n'est par l'emprunt de la rapidité des
services, mais de développer une capacité à occuper l'espace libéré vers le haut
la pérennité d'un savoir-faire rare, celui de bottier. Les formations qualifiantes (brevet
techniques entre artisanat et industrie de luxe {Weston, par exemple), maîtrise des
techniques de collage des matériaux nouveaux de l'industrie, notamment sur les
chaussures de sport .
Cependant, l'opposition entre le haut et le bas peut être influencée par l'apport d'une
donnée nouvelle : l'émergence d'un apprentissage féminin dans un métier réputé
masculin. Depuis quelques années, on remarque la présence de jeunes filles dans les
Centre de Formation des Apprentis. En 1991, elles sont deux au CFA de Joué-les-Tours.
Leur professeur précise que : « les filles s'en sortent très, très bien dans l'apprentissage
de la cordonnerie parce que la finition est très importante et elles ont plus de goût que
les garçons dans l'ensemble. Elles finissent mieux que les garçons. Y a la p'tite touche
féminine, là, qui passe bien. Les filles qui ont été présentées au CA P ont toutes eu le
CAP. Depuis que je suis ici. y en a tous les ans et y a eu un échec. Beaucoup de garçons
qui sont dans la cordonnerie sont cordonniers parce qu'ils ont répondu à une annonce.
La plupart des filles n'y viennent pas par hasard. Elles ont la volonté d'être cordonnier
parce qu'il faut s'imposer »°. L'apprentissage féminin peut-il engager l'avenir en
parmi ses élèves, s'étonne à le voir occuper à si humble besogne : recoudre une sandale,
couper le cuir d'une lanière. Leroi-Gourhan possède une autre singularité, il est
ambidextre. Entre la main droite et la gauche, il ne choisit pas, il dessine au tableau avec
55
féminisation qu'il est en train de connaître va, encore une fois, raviver la scène première
de cette différence et d'un même mouvement, redistribuer les contenus de son identité.
56
AVANT-PROPOS
1. Lors même que les paysans y sont plus nombreux et qu'un mouvement manufacturier
se forme. Le Choletais-Vendée constitue actuellement la première région d'industrie de
la chaussure en France et en Europe (Chauvin, 1990a).
2. Chauvin, 1992, Le Sabaron et l'Escarpin. Chaussures et métiers Poitou-Vendée 1880-
1960 ; Mougon, Geste éditions, 192 p. (Geste éditions BP 05 79370 Mougon).
3. Les enquêtes orales ont été versées dans les collections de l'Association régionale des
Métiers de la Chaussure (ARMC). Sauf mentions contraires, je les ai réalisées
personnellement Phonogramme M. Juignet, 9 mars 1991.
4. Chauvin, 1990b, Apprentissages, les cordonniers et l'écriture. Transmission des savoirs
et identités ; Diplôme d'Etudes Approfondies en Anthropologie sociale et Ethnologie,
Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales, Toulouse, 130 p.
5. Gédé, 1992, « Cordonnier puis ethnologue » La Nouvelle République du Centre Ouest,
édition Vienne, 30 octobre ; « La petite semaine » samedi 26 décembre 1992, Radio
Forum, Poitiers ; « Autodidactes et fiers de l'être » avec Alain Afflelou, Paul-Loup
Sullitzer, le sociologue Smaïm Laacher, Emission « Français si vous parliez » d'André
Bercoif, France 3, mardi 16 mars 1993.
3. Chariot 1896:582.
4. Permanence et singularité de la différenciation confirmée par Jacques Rancière au
cours d'une discussion en 1990.
5. Bolssonade, 1900 : 305.
6. Les savetiers doivent employer, dans la même chaussure, deux parties de vieux cuirs
contre une de neuf, comme le précise le prévôt Hugues Aubriot par sentence du 21 mars
1376.
5. Durand, 1984 : 20. Lénine utiUse l'expression haut et bas dans les termes suivants :
« La révolution se produit lorsque ceux d'en haut ne peuvent plus et ceux d'en bas ne
veulent plus. ' et Viveret, 1977 : 17).
6. Bourdieu d'après Delanoé, 1985 : 223.
7. Se reporter à l'annexe : « Les cordonniers en marche ».
8. Phonogramme Souvray, CFA Joué-les-Tours, 1991.
9. L'accès aux formations quaUfiantes constitue un problème dans la mesure où le
Compagnonnage, sur lequel risque de reposer l'essentiel dé la transmission du savoir-
faire bottier à l'avenir, leur est interdit Le Compagnonnage est un univers masculin
« décalé » par rapport au social On exacerbe les valeurs de la virilité mais l'on refuse
l'entrée du Compagnonnage aux femmes alors que la généraUsation du travail féminin
est un fait de société. Aux dire des Compagnons, une solution réside dans la création
d'un Compagnonnage féminin séparé. Se reporter à l'annexe « Le Compagnonnage ».
10. Lecoeur, 1991 : 195 en introduction à une émission de France-Culture rapportant les
faits.
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60
l'Intendance militaire, des archives du CAP de cordonnier pour l'année 1954, les
factures classées par année et des doubles des correspondances entre l'artisan et ses
clients ou fournisseurs. Ces archives textuelles forment le récit d'une vie mêlant les
petits faits individuels au collectif du métier : un projet d'achat d'une petite fabrique,
l'embauche d'ouvriers, une demande d'agrément à la Sécurité Sociale, une lettre au
député-maire afin de solliciter un emploi pour la fille. Ces archives ont été versées dans
les coUections de l'ARMC.
Deux questionnaires ont accompagné les enquêtes. Ils ont été diffusés, l'un
dans le Bulletin d'Informations des Cadres {BIC) de la FNSAMC pour recueillir les
témoignages des cordonniers sur les modalités de formation (itinéraires d'apprentissage.
Compagnonnage), l'autre dans Aguiaine, la revue de la Société d'Etudes Folkloriques du
Centre-Ouest (SEFCO) pour dresser des portraits d'artisans tels qu'ils demeurent figés
dans la mémoire : « Racontez-nous le cordonnier de votre enfance ».
Enfin, s'ajoutant aux enquêtes de terrain que j'ai effectuées, j'ai rédigé un
camet d'atelier notant au quotidien des petits faits, en rapport avec la présence
d'apprentis, puis la visite d'un apprenti bottier allemand lors d'un échange entre
Chambre de Métiers.
62
des buUes accompagnées d'un léger pétiUement Pour couper les peaux, le bottier utiUse
un instrument « tiaditionnellement » attaché au métier, le tranchet Savoir-faire, c'est
savoir prévoir, le bottier veiUe au choix des cuirs pour le dessus afin qu'ils ne déchirent
pas au montage.
Le savoir-faire bottier mobiUse un ensemble de sens. Le toucher, c'est la
main, l'extiémité des doigts, la préhension avec le pouce pour apprécier le cuir, son
épaisseur, son grain, les irrégularités. La vue, c'est l'oeU décelant les défauts du cuir,
éprouvant le galbe d'une chaussure, la régularité d'une couture, la symétrie entre souher
droit et gauche. Le goût c'est l'acidité des fUs, de la poix lorsque la bouche est employée
comme outü pour maintenir le « ligneul » en tension afin qu'U ne s'emmêle pas. C'est la
« bouche servant de garde-manger » pour les semences de montage, les petites pointes.
L'odorat sert à distinguer le chrome ou le chêne d'un tannage mais c'est surtout l'odeur
de l'ateher, une atmosphère particuhère : le fauve des cuirs tannés à l'écorce, la poix
tiède, les fers à Usse sur la lampe à alcool, la cire chaude. Le savoir-faire bottier fait
appel à l'ouïe. C'est le crissement du cuir au montage, le bmit éteint du marteau sur une
semence qui ne rive pas.
Le savoir-faire est adaptatif. Cette situation a été particuhèrement mise en
évidence lors d'une première enquête auprès de René-Jean Alliaume. L'Art du Bottier
depuis plusieurs siècles se distingue par la maîtrise de la couture au fil poissé. En Poitou,
nos enquêtes vérifient que, avant les années soixante, la confection d'un fil poissé
constitue le premier exercice auquel est initié un apprenti cordonnier. En revanche, à
l'artisan ou au premier ouvrier est réservée la cuisson de la poix, mélange d'huUe et de
résine. Ainsi, la question suivante posée, vers 1980, par un aîné à l'adresse d'un jeune
cordonnier conserve tout son sens : * A Poitiers, vous savez faire un fil poissé, vous
cousez encore au fil poissé ? ». Pour être reconnu cordonnier par les anciens, l'on doit
maîtriser la couture main au fil poissé. Et tandis que l'usage des machines à coudre
« Blake » et « Petits-points » se développe dans les ateUers pour la réaUsation
d'assemblages cousus avec des fils synthétiques, les cordonniers « traditionnels » posent
cette même question aux « jeunes » cordonniers et imposent dans les épreuves de CAP
des tiavaux de ressemelage cuir en cousu main au fU poissé, lors même que les maîtres
d'apprentissage n'initient plus leurs élèves, et que les clients ne formulent plus semblable
demande. Ce divorce entre la réalité d'un métier et le discours des anciens cordonniers,
René-Jean AUiaume ne l'ignore pas mais il sait également que le fil poissé, le « ligneul »
de Un ou de chanvre, bien qu'imputiescible, peut se dessécher et se rompre avec les ans.
Un fil poissé est long à confectionner et, malgré les précautions d'usage, la poix peut
tacher les cuirs.
En 1949, alors qu'U est professeur dans une école professionneUe à Paris, il
va remplacer le fil poissé par un fil tergal tiessé, utiUsé dans l'industrie de la chaussure,
et les soies de porc ou de sangUer, à usage d'aiguiUes, par du fil à pêche, du fil nylon qu'U
enduit de poix pour qu'eUes adhèrent au fil tergal U entieprend cette aventure novatrice
lorsque l'un de ses anciens élèves, qui travaiUe chez un maîtie bottier à Dijon, lui
présente un fil nylon qu'un fabricant tente à l'époque de commerciaUser, sans grand
succès puisque l'opération cessera après 1953.
Curieusement René-Jean AUiaume, en perfectionnant l'invention, alUe
des matériaux modernes évoquant les loisirs possibles du bottier (le fil de pêche) avec
des matériaux issus de l'industrie (le fil tergal). Mais U conserve la traditionneUe poix de
l'artisan non sans la détourner de sa fonction initiale. EUe n'est plus remède contre la
putiéfaction des fils, de lin ou de chanvre, eUe devient mastic pour fixer le gUssant fil
nylon sur le fil tergal
Ce tiansfert de technologie prend place à l'école professionneUe et non
dans l'ateUer de l'artisan La transmission du savoir-faire bottier est effectuée par des
praticiens en ateUer, des professeurs souvent anciens praticiens dans les écoles, et des
experts tels René-Jean AUiaume. Puisque l'apprentissage artisanal est aujourd'hui
altemance entie formation à l'ateUer et formation dans un CFA, U convient d'accorder
une attention particuhère à la sélection des professeurs des écoles professionneUes afin
de favoriser l'innovation tout autant que la reconduction des savoirs. En outie, ü devient
prioritaire de développer un système d'émulation tel les Meuleurs Ouvriers de France,
TECHNICIEN
EN CHAUSSURE
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Je suis technicien en chaussure Mon métier est de chausser avec C'est après plusieurs années passées à
depuis 10 ans. Originaire du Langue¬ goût et talent : cas pathologique ou Paris comme chef d'atelier chez un
doc, j'ai fait mes premiers pas dans pied à la recherche d'un plaisir esthé¬ grand bottier que s'est présentée l'op¬
le Compagnonnage sous le ciel pro¬ tique et d'un bien-être. La réparation portunité de m'installer à mon compte.
vençal. A Marseille, j'ai travaillé au fait bien entendu partie de mes capa¬ J'ai rencontré, place Vendôme, un bot¬
contact de Compagnons ; grâce à eux cités : quel plaisir de faire revivre une tier qui souhaitait se retirer. Après plu¬
et aux cours du soir, j'ai appris là les paire de souliers qui sont de vieux sieurs entrevues il m'a proposé de
premières notions de mon métier : compagnons pour celui qui a par¬ reprendre son entreprise. Réflexion fai¬
rudiments d'orthopédie, de botterie couru quelques centaines de kilomè¬ te, l'occasion était vraiment trop belle. . .
et de réparation. Premier voyage, tres avec. Un savoir-faire qui met en me voilà donc parti pour une grande
première ville : Toulouse, la ville rose, 0uvre des matériaux naturels nobles aventure !
où j'ai découvert les techniques et vivants, tels le cuir, la peau et le Déjà les modèles commencent à se
modernes des résines et des mous¬ bois. bousculer dans ma tête et une collection
ses appliquées à l'orthopédie. L'accueil et la prise de mesure sont les s'ébauche. Aujourd'hui, je présente une
Cette année terminée je partais pour premiers contacts avec le client. Une quarantaine de modèles. Je travaille à
le Morbihan, à la découverte d'un étape qui demande une grande concen¬ la commande. Je dois m'adapter à la
vieil artisan qui m'apprit les premiers tration et pendant laquelle on doit demande des clients et faire preuve de
secrets de la botterie de luxe et l'art être attentif à une multitude d'infor¬ souplesse d'esprit.
difficile de la botte d'équitation. mations. II est un peu petit? II ne Diriger ma propre entreprise m'apporte
Ensuite, à Lyon, on m'a confié la demandera pas de haut talon, c'est un grand épanouissement professionnel
responsabilité d'une cordonnerie, presque sûr. A moi de comprendre et humain. II m'apparaît aujourd'hui
m'offrant ainsi mes premiers contacts qu'il a besoin de quelques centimè¬ évident que le Tour de France des Com¬
avec la clientèle. Le Tour de France tres en plus pour avoir confiance en pagnons du Devoir, avec les connais¬
des Compagnons du Devoir était vrai¬ lui. Discrétion, tact et psychologie sances et les valeurs que les Compa¬
ment pour moi une diversité d'expé¬ sont de rigueur à ce stade ! Le travail gnons m'y ont enseigné, a contribué à
riences professionnelles et humaines de la forme fait ensuite appel à un me faire parvenir où je suis aujourd'hui.
à laquelle je ne m'attendais pas. A sens du volume qui met en évidence Dans six mois, si tout va bien, je
Strasbourg,- ville chaleureuse et de l'aspect sculptural du métier. Le des¬ prendrai un jeune apprenti de la Maison
traditions, j'ai fait mon travail de sin et le patronage sont à la base de de Paris.
M
64
distinctes, des «formes de travers », pour les chaussures homme et femme, puis pour les
chaussures de fiUette et d'enfant U est cependant peu probable que les artisans n'aient
pas confectionné des « formes de travers » au cours des siècles précédents. Des formes,
pour pieds normaux, datant du Haut Moyen Age ont ainsi été découvertes. Il convient
donc de replacer dans le seul contexte de l'époque, la Dissertation sur la meilleure forme
des SouUers (1791) de Pierre Camper, qui s'est inspiré des tiavaux du napolitain Borelli
(1608-1679), également mentionné dans V Encyclopédie de Diderot et d'Alembert:
« C'est un ancien usage assujetti à une mode très-peu raisonnable, de faire les Souliers
sur la même forme, quoique nos deux pieds diffèrent beaucoup entre eux ».
La duahté d'un objet coupé en deux est aussi ceUe de chacune des parties
puisque une chaussure est composée d'un dessus (une « tige ») et d'un dessous (une
semeUe de marche). Au cours des siècles, l'évolution des procédés techniques réside
essentieUement dans le perfectionnement des procédés opératoires pour l'assemblage de
la tige avec la semeUe.
NOTES
1. Eoe par téléphone, AUiaume, 14.08.92 à laquelle s'ajoute une enquête enregistiée sur
bande magnétique.
2. Eoe, Berthier, Poitiers, 1992.
3. Eoe, Juignet par téléphone, 1992.
66
Que nos amis les Compagnons se rassurent, si nous nous intéressons, par
exemple, à VHistoire du Compagnonnage dans la cordonnerie à travers les âges, un
manuscrit de 1958 rédigé par André PeUppon, Poitevin-le-Vengeur-du-Devoir, notie
intention n'est pas d'attenter aux secrets, ni de dévoUer les rites, notre intérêt se porte
vers les genèses. Fermé sur les rites, le Compagnonnage est entièrement ouvert sur le
métier. Il n'y a pas de secret en matière de techniques et de transmission des savoir-faire.
Groupements secrets pendant des siècles, suspects à l'occupant comme
sociétés secrètes en 1940, les Compagnonnages sont aujourd'hui des associations à
statuts légalement déposés, enregistiées et déclarées d'utUité pubhque depuis 1941.
VAssociation ouvrière des Compagnons du Devoir du Tour de France accueiUe des
jeunes qui à l'issue de l'apprentissage désirent se perfectionner. La formation permet de
préparer les divers examens du métier : CAP, Brevet Professionnel (BP), Brevet de
Maîtrise (BM). Cependant, les Compagnons affirment qu'au-delà des diplômes, la
compétence et l'expérience sont la véritable sanction de l'enseignement Garants des
tiaditions du métier. Us considèrent la réparation comme une étape vers l'apprentissage
de la botterie. Une grande part de la conservation et de la tiansmission du savoir-faire
bottier passe par eux, même si tous les maîtres, qui accueiUent les jeunes, ne sont pas des
Compagnons.
Les jeunes sont appelés « stagiaires » la première année, puis deviennent
« aspirants » et ensuite « compagnons ». C'est alors qu'ils peuvent faire leur Tour de
France. Les Maisons permettent de trouver l'hébergement et la nourriture à des prix
accessibles. EUes sont placées sous l'autorité de la Mère ou de la Dame Hôtesse. Le soir,
un enseignement est dispensé par des Compagnons pratiquant joumeUement leur
métier. Chaque étape est l'occasion de découvrir des techniques nouveUes.
En Poitou et Charentes, des Maisons et des lieux d'accueil sont ouverts à
La Roche-sur-Yon (Vendée), Cerizay (Deux-Sèvres), La RocheUe (Charente-Maritime),
Poitiers (Vienne) au 22 rue des Trois Rois), et plus largement Tours, Angers, Bordeaux,
Nantes. A l'issue du Tour de France, les jeunes préparent leur chef-d'oeuvre pour
accéder à la maîtiise et devenir, s'ils persistent « compagnons-finis ». Sur le plan du rite,
l'état d'aspirant est sanctionné par « l'adoption », celui de compagnon par la
« réception », et celui de « compagnon-fini » par la « reconnaissance » (Bemard 1982 :
141). Depuis peu, les Compagnons du Devoir acceptent des jeunes en formation initiale
pour effectuer un apprentissage à partir de 16 ans. L'enseignement s'effectue pour
moitié dans l'entieprise et pour moitié dans une Maison des Compagnons équivalent à
un CFA. Le jeune est sous contiat et prépare le CAP. A l'issue de la formation, il peut
ensuite accomplir son Tour de France.
Les femmes ne sont pas admises dans les Compagnonnages. Définissant le
temps du Compagnonnage, comme un temps de l'itinérance et de la vie de garçon, la
Maison est un heu qui n'abrite que des hommes célibataires. Dans la Maison, le seul
personnage féminin est la « Mère ». Le mot « Mère » désigne à la fois, « le toit, la table et
une personne qui préside à tout » (Bemard 1982 : 140). Les Compagnons ne disent pas
« aUer à la maison » mais « aller chez la Mère ». Jean Bemard, dont le rôle fut fondateur
dans l'union des Compagnonnages en 1941, affirmait en 1977 que : « les femmes, pour
répondre à leur nature et à leur vocation, pour se préparer à la vie et la bâtir, ont
d'autres compétences et d'autres forces à rechercher que celles qu'on acquiert dans le
Compagnonnage. Le Compagnonnage prépare des hommes, tel celui qui écrivit dans
notre journal, au nom de ses camarades, qu'il "espérait franchir les étapes du Tour de
France et devenir un jour compagnon". Et il ajoutait "avec quelle sérénité créerions-
nous alors un foyer en compagnie de cet être tendre et plein d'intuition qu'est la femme".
Voilà la plus belle promesse que puisse faire le Compagnonnage aux jeunes filles, et ce
qu'il peut leur offrir de mieux. Le mariage n'est-il pas pour elles le plus vrai des
67
et des articles de maroquinerie. Des efforts pourraient donc être fait pour une mise en
valeur de la matière première cuir dont les connotations gagneraient à être mieux
exploitées par les cordonniers.
- En s'engageant dans la voie de la qualité, les cordonniers peuvent contribuer à la
valorisation de la filière cuir en France pour la production des cuirs supérieurs
nécessaires à l'artisanat et à la chaussure de luxe. La fabrication de cuirs
« traditionnels » de qualité ne repose plus que sur une seule entreprise en France et une
autre en Allemagne.
-La création d'un centre de documentation dépendant de l'Institut de Calcéologie
(Musée International de la Chaussure, Romans), ouvert aux techniciens de la chaussure,
modélistes, et artisans engagés dans des formations qualifiantes, contribuerait à la
circulation des hommes et des techniques entre artisanat et industrie. L'Institut serait
doter de moyens lui permettant de constituer une bibliothèque technique, inexistante à
ce jour, quelles que puissent être les richesses des uns et des autres. Il conviendrait
d'associer à cette initiative des chercheurs, des techniciens de la chaussure, des
collectionneurs afin de favoriser le regroupement ou la localisation des documents
dispersés ou peu accessibles.
- Un répertoire bibliographique inventoriant et localisant les sources documentaires
constituerait un outil efficace et d'un usage facile. Un lien serait à privilégier avec la
Bibliothèque Forney à Paris qui a vocation de diffuser la documentation technique
auprès des artisans des métiers d'art et des agents du patrimoine, par le prêt inter¬
bibliothèques.
- La création d'une section « bottier, artisans de l'élégance » au Musée International de
la Chaussure de Romans pourrait contribuer à valoriser le savoir-faire français à
l'étranger. Une exposition permanente pourrait être complétée par des expositions de
travaux réalisés par des bottiers de haut niveau et des MeiUeurs Ouvriers de France.
- A la suite du film « Le bottier » de Pascal Privet des actions plus modestes pourraient
contribuer à la collecte et la conservation des savoir-faire des cordonniers et des bottiers
par une pratique inter-active avec l'emploi de matériel vidéo (caméscope). Le centre de
documentation de l'Institut de Calcéologie conserverait les documents et en faciliterait
l'accès aux intéressés.
- Une action concertée entre le Ministère de l'Artisanat les syndicats professionnels, la
SEMA, la Mission du Patrimoine ethnologique, l'Institut de Calcéologie devrait être
engagée pour la publication et la diffusion de documents techniques rédigés par
exemple, par des MeiUeurs Ouvriers de France tel René-Jean Alliaume, et par des
spécialistes de la restauration des chaussures anciennes.
- Doit-on regretter l'absence d'épreuve en cordonnerie réparation aux concours des
Meilleurs Ouvriers de France ? Il pourrait être judicieux de créer une section
« patrimoine » ouverte aux cordonniers expérimentés par laquelle la réparation
consisterait en un remontage de chaussures anciennes en respectant les techniques en
vigueur à l'époque. On trouve des épreuves de remontage dans les travaux de maîtrise
des savetiers sous l'Ancien Régime. Le cordonnier devrait donc acquérir une
connaissance de l'histoire de la chaussure et des techniques.
- La création d'un Compagnonnage féminin contribuera, de fait plus que toutes autres
actions à la valorisation et la transformation du métier.
- Actuellement le métier de restaurateur des chaussures archéologiques, spéciahté rare,
est exercé en France par des femmes ayant effectué des études secondaires. Leur savoir
est reconnu par les bottiers parisiens avec lesquelles elles collaborent
70
ANNEXE V:
LA FORMATION PROFESSIONNELLE
I- CORDONNERIE
II- BOTTERIE
1. Formation initiale :
- COMPAGNONS DU DEVOIR 1 Place St-Gervais 75004 PARIS (Ile-de-France)
- COMPAGNONS DU DEVOIR 82 Rue de l'hôtel-de-ville 75004 PARIS
71
m- PODO-ORTHESIE:
L Lycées d'enseignement :
- LT LA GAUDINIERE 29 Rue Diane 44072 NANTES Cédex (Pays-de-Loire)
- LEP D'ALEMBERT 22 Sente-des-Dorées 75019 PARIS (Ile-de-France)
2. Formation en podo-orthésie pour handicapés physiques :
- CRIC 19 Place de la Croix-de-Pierre 31076 TOULOUSE Cédex (Midi-Pyrénées)
V- BREVET DE MAITRISE
VI CONCOURS
1. Concours des Meilleurs Ouvriers de France :
Groupe XII : Cuirs et peaux. Classe 1. Chaussures
-Secrétariat général du comité d'organisation des expositions du travail 10 Rue Saint-
Roch 75001 PARIS T. 42 60 68 09.
- Président honoraire du groupe XII, classe 1 : Sarkis Der Balian, 221 Rue Saint-Honoré
75001 PARIS
- Président groupe XII, classe 1 : Jean Morin 25 Allée des Chasseurs, Domaine de
Grand-Champ 78250 LE PECQ
2. Préparation au concours des MOF :
- René-Jean Alliaume, M.O.F., anime un cycle de formation de haut niveau à Paris pour
les candidats au titre de Meilleur Ouvrier de France. R.-J. Alliaume à Clisson (Loire-
Atiantique) T. 40 03 99 25.
3. Cordonniers bottiers, podo-orthésistes, lauréats au Concours du Meilleur Ouvrier
de France (promotion 1991) :
- René Schaeffer, section podo-orthésie. Cordonnier-bottier. Ancien président de la
région Alsace FNCF
- Philippe Atienza, section botterie homme. Compagnon cordonnier-bottier du Devoir
du Tour de France, ouvrier chez Lobb, Paris
4. Concours Un des Meilleurs Cordonniers de la FNCF :
Organisé tous les ans en juin à l'occasion des congrès de la FNCF
72
I- LES MUSEES
r. FRANCE:
-Musée International de la Chaussure, 2 Rue Sainte-Marie 26100 ROMANS-SUR-
ISERE
9 TCHECHOSLOVAQUIE:
- Obuvnické muzeum, GOTTWALDOV
10° CANADA :
- Bata Shoe Museum, TORONTO
11°. ETATS-UNIS:
- Lynn Historical Society, LYNN
- Worthington Historical Society, Museum Research Library, WORTHINGTON
Votre Nom :
Prénom :
Adresse (facultative) :
Date de nai.ssance :
aimait le regarder travailler, coudre les .semelles et surtout faire des lacets de cuir pour
les chaussures montantes ».
Auguste Gaud, Deux-Sèvres {Ma Grand'mère Toinon. Souvenirs d'un paysan, 1897 : 8) :
«Javarnay, mon village natal, est bâti presque à Ventrée du vallon, à un kilomètre
environ de la source de la Boutonne. Il se compose d'une centaine de maisons basses et
trapues, échelonnées sur le bord de la route départementale de Niort à Ruffec. et qui. les
volets clos, semblent dormir, à l'ombre des grands arbres qui les abritent.
79
Il y a une trentaine d'années, on y comptait à peine quatre cent habitants qui tous, à
l'exception d'un tisserand, d'un cordonnier et d'un tailleur qui exerçait en même temps la
profession de barbier et jouait du violon dans les noces, vivaient du produit de la terre et
passaient une partie de leur existence au milieu des champs ».
- I -
Refrain
- II -
Refrain
- Ill -
Programmation : G. Delacroix
Synthés : R. Romanelli
Batterie : J. Hammer
André Gaillard {Le siècle Trioulais 1880-1980 La Grande Misère. Cent ans de la vie
d'un 'village et d'une famille de paysans poitevins, 1978 : 122-123) :
« Le grand jour arriva enfin. Le père Gaillard avait pris sa journée pour accompagner
sa fille à qui il avait fait confectionner une paire de souliers de cuir par le cordonnier
Vaury.(...) Dès la Croix d'Oiseau. Victoire reprit ses sabots, bien décidée à ne chausser
ses souliers qu'une fois arrivée en ville ».
81
¿ (f?¿wii,r-^ ^j 7
83
A propos de Trombinard présenté comme une célébrité locale du Mellois fin XIX^
début XX^ siècle {Aguiaine, novembre-décembre 1972, pp. 377-378) :
« Dans son jeune âge il avait été simultanément cordonnier et sacristain, s'était marié,
avait divorcé, avait eu deux fils qui ont fait leur chemin honorablement. (...) sur le
trimard il cirait les chaussures dans les auberges qui logeaient à pied et à cheval ».
René Courtois {« "Autour de Gençay" d'après "Au coeur de la vie. Bulletin paroissial de
Gençay" » La boite à boutons n° 632, 15 mars 1989) :
« Si vous voyiez le cordonnier I 11 n'a ni bottes ni souliers. I Quand il tape sur la
semelle I ll est bien assis sur sa selle / Mais dehors il s'en va nu-pieds. I C'est son
métier ».
BIBLIOGRAPHIE
Les ouvrages réputés difficiles d'accès sont localisés en fin de référence bibliographique.
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TOUSSAINT-GAUTIER M. (18.54) : Dictionnaire des confréries et corporations d'arts
et métiers ; Paris.
TOUSSAINT-SAMAT M. (1990): Histoire technique et morale du vêtement; Paris,
Bordas, 470 p.
TREMBLAY G. (1981) : « La terminologie des outils du cordonnier au Québec » in :
DUPONT Les métiers du cuir ; pp. 209-244.
TROGER V. (1989): «^Les centres d'aprentissage de 1940 à 1960: le temps des
initiatives » Formation, n° 27-28, pp. 147-162.
TURGAN (1900): «Manufacture de chaussures F. Pinet à Paris» in: Les grandes
usines ; Paris, Pion, pp. 1-16. (CNAM Paris).
101
ZARCA B. (1987) : Les artisans, gens de métier, gens de parole ; Paris, L'Harmattan,
187 p
ZEMON DAVIS N. (1979) : Les cultures du peuple. Rituels, savoirs et résistances au
X VI^ siècle ; Paris, Montaigne, 444 p.
ZEYS L. (1914) : Les petites industries rurales et leur évolution ; Paris, Bloud et Gay,
288 p.
102
m- SOURCES MANUSCRITES
Les sources suffisamment décrites dans les notes ne sont pas détaillées ici. Tous ces
documents ainsi que les archives sonores, sauf mentions contraires, sont conservés dans
les collections de l'As.sociation régionale des Métiers de la Chaussure.
IV- FILMOGRAPHIE
Alêne, alêne : outil à main en forme de poinçon muni d'un manche et servant à percer
le cuir pour le passage du fil
Banc de verrage : Machine munie de rouleaux ou bandes abrasives pour verrer,
conformer la semelle des chaussures, les talons.
Bigorne col de cygne : enclume du cordonnier. Travail en position assise.
« Blake » : machine à coudre de part en part pour assembler la semelle de montage, la
tige et la semelle de marche.
Brocher : découper avec une cisaille ou une machine le contour de la semelle pour
enlever un surplus de matière.
Cambre : moule en bois servant à galber le cuir.
Chaussures de confection : chau.ssures fabriquées en manufacture par différenciation
avec les chaussures fabriquées par un artisan à la main.
Chair : parie du cuir correspondant à la face interne de la dépouiUe d'un animal
Opposé : fleur.
Collet : partie d'une peau tannée, d'un cuir, située à l'arrière de la tête sur le cou et les
épaules de l'animal
Contrefort : soutien de tige pour rigidifier et maintenir le talon du pied en place.
Coupeur : ouvrier qui, en usine débite, les peaus.series de cuir en morceaux pour la
confection des tiges.
Crêpe : caoutchouc naturel après épuration et traitement du latex.
Croupon : partie d'une peau tannée, d'un cuir, prélevée sur le dos et la croupe de
l'animal
Empeigne : partie avant de la tige d'une chaussure. Terme désignant également la tige
toute entière.
Fil poissé : ensemble de brins filés et tordus, de chanvre ou de lin, enduit de poix et
employé par les cordonniers pour coudre les chaussures à la main.
Fleur : partie de la peau portant les poils, dessus du cuir. Opposé : chair.
Forme : pièce de bois conforme au volume du pied et servant à la confection d'une
chaussure.
Poix : matière visqueuse composée de résine, d'huile et de goudron servant à enduire les
fils pour réaliser un fil poissé.
Première, première de montage : semelle intérieure d'une chau.ssure sur laquelle
repose le pied.
Presse à souder : Machine agissant par pression d'un coussin pour remplacer le
martelage à la main dans l'assemblage collé des semelles et patins.
Quartier : partie arrière et côtés d'une tige de chaussure.
Semelle première : synonyme de première de montage.
Soie : poil de sanglier ou de porc à usage d'aiguille pour les coutures au fil poissé.
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SIGLES ET ABREVIATIONS... p. 3
NOTES ET COMMENTAIRES... p. 56
ANNEXES: