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ROYAUME DU MAROC

*-*-*-*-*
HAUT COMMISSARIAT AU PLAN
*-*-*-*-*-*-*-*
INSTITUT NATIONAL
DE STATISTIQUE ET D’ECONOMIE APPLIQUEE

Projet de Fin d’Etudes


*****

Le vieillissement de la population et l’épargne des


ménages : Quelle relation dans le cas du Maroc ?

Préparé par : M. EL ISSAOUY Oualid


M. SAKHI Ayoub

Sous la direction de : Mme Fatima BAKASS (INSEA)


M. Hassan HEMAMOU (DEPF)

Soutenu publiquement comme exigence partielle en vue de l’obtention du

Diplôme d’Ingénieur d’Etat


Filière : Statistique-Démographie

Devant le jury composé de :

▪ Mme Fatima BAKASS (INSEA)


▪ M. En-Nacer ELKADIRI (INSEA)
▪ M. Hassan HEMAMOU (DEPF)

Juin 2019/ PFE N° 99


I
Résumé

Le Maroc connait depuis plusieurs années une tendance soutenue et irréversible du


vieillissement de sa population et ce constat continuera à s’observer dans les décennies à
venir. Si la population âgée de plus de 60 ans constitue 9,4% selon le RGPH de 2014 contre
8% dix ans plutôt, ce taux est estimé à 23% à l’horizon 2050.

Dans ce travail, nous avons essayé de mettre en évidence le lien entre l’épargne des
ménages et le vieillissement de la population en nous basant sur les théories existantes
principalement celle du cycle de vie développée par Modigliani et Brumberg en 1954. Celle-ci
stipule que le taux d’épargne moyen des ménages dépend avant tout des variables
démographiques, notamment l’âge. Au début de son existence, l’individu est jeune et
emprunte pour financer sa vie courante. Ensuite il trouve un travail et consacre une grande
partie de ses revenus à se constituer une épargne pour rembourser les sommes empruntées
puis préparer sa chute de revenus au moment de sa cessation d’activité, période pendant
laquelle il désépargnera pour maintenir son niveau de vie.

Pour tester cette hypothèse, nous avons utilisé deux approches économétriques.
La première est la modélisation dynamique ARDL fondée sur les données annuelles sur une
série de variables économiques et démographiques (taux d’épargne des ménages, croissance
économique, taux d’inflation, part des personnes âgées, espérance de vie à la naissance,
rapport de dépendance,...) au cours de la de 1980 à 2017. L’estimation montre l’impact
négatif du rapport de dépendance des personnes âgées sur le taux d’épargne des ménages
comme stipule la théorie de cycle de vie.
La deuxième approche est une approche individuelle où sont utilisées les données de l’Enquête
Nationale sur la Consommation et les Dépenses des Ménages (ENCDM) 2013-2014 et dont
l’objectif est d’identifier les déterminants de la capacité d’épargne des ménages telle qu’elle est
perçue par les ménages eux-mêmes. Alors que le modèle qui utilise l’âge du chef du ménage
n’est pas significatif, celui qui recourt à la part des personnes âgées dans le ménage s’est
révélé significatif. D’autres variables ont été identifiées comme significativement liées à la
capacité d’épargner comme le sexe du chef de ménage, la taille du ménage ou encore les
dépenses annuelles. Ainsi, les ménages gérés par des hommes, de moindre taille et ceux qui
dépensent le plus sont enclins à déclarer qu’ils se voient en capacité de se constituer une
épargne comparativement aux ménages dont le chef est une femme, qui sont élargis ou qui ont
des dépenses annuelles plus faibles.

Mots clés : Théorie du Cycle de vie, Epargne des ménages, Désépargne, Personnes
âgées, Vieillissement démographique, Rapport de dépendance, Modélisation ARDL,
AutoRegressive Distributed Lag, Modèle autorégressif à retards échelonnés ou distribués,
Régression logistique, Enquête Nationale sur la consommation et dépenses des ménages,
Maroc

II
DÉDICACE AYOUB

A mes parents, SAKHI Mohammed et BOUCHOUATTA Aicha :


Je ne pourrais jamais exprimer le respect que j’ai pour vous. Vos prières, vos
encouragements et votre soutien m’ont toujours été d’un grand secours. Puisse
Dieu, le tout puissant vous préserver du mal, vous combler de santé, de
bonheur et vous procurer une longue vie.

Je dédie ce travail, à mon frère Youssef, ma sœur Fatima Zahra et à


Lamyae, ainsi qu’à mes amis pour leur aide, leur temps, leurs encouragements,
leur assistance et soutien.

Ce travail est également dédié à toute personne ayant contribué de près


ou de loin à son élaboration, à savoir mes professeurs et le personnel de la
direction des études et des prévisions financières(DEPF).

III
DÉDICACE OUALID

Je dédie ce travail :
A mes parents, qui m’ont toujours soutenu, comme preuve de respect, de
gratitude et de reconnaissance. Je vous remercie énormément pour votre
soutien permanent, vos sacrifices et votre confiance en moi.

A mes frères et mes soeurs Yassine, Ayoub, Fatimzahra et Hiba ainsi


qu’à mes chers amis Ayoub, Rafik, Anasse, Zakaria et Hamza pour leur
soutien, le temps qu’ils me consacrent et leur amour, vous serez toujours dans
mon cœur.

A tous les professeurs de l’Institut National de Statistique et d’Economie


Appliquée pour tous les enseignements qu’ils m’ont apporté tout au long de ma
scolarité.

IV
REMERCIEMENTS

Nous tenons à remercier Mme Fatima BAKASS pour son encadrement,


sa disponibilité dont elle a fait preuve à notre égard, ses remarques pertinentes
et ses encouragements.

Nous remercions également M. Hassan HEMAMOU d’avoir accepté


notre candidature de stage et aussi pour son aide et conseils pendant la période
de stage.

Notre gratitude s’adresse également à M. En-Nacer ELKADIRI qui nous


a fait l’honneur d’accepter de juger notre travail.

Nos gratitudes à notre corps professoral et notre respect pour l’Institut


National de Statistique et d’Economie Appliquée (INSEA) qui nous a garanti
des compétences distingués.

Nous tenons à remercier également toutes les personnes qui ont, de près
ou de loin, participé de différentes façons à la réussite de notre modeste travail
qui est le reflet de notre formation à l’INSEA.

V
TABLE DES MATIÈRES

Résumé II

Dédicace Ayoub III

Dédicace Oualid IV

Remerciements V

Table des matières IX

Tables des figures XII

Liste des abréviations XIII

Introduction générale 1

1 Épargne et vieillissement de la population : une revue de littérature 3

1 Épargne : concepts, mesures et approches . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4

1.1 Définition du concept  épargne  et motifs . . . . . . . . . . . . . . . . 4

1.2 Mesures, formes et sources d’épargne . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6

1.2.1 Mesures et indicateurs de l’épargne . . . . . . . . . . . . . . . 6

VI
TABLE DES MATIÈRES

1.2.2 Formes de l’épargne . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6

1.2.3 Les sources de l’épargne . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7

1.3 Les approches théoriques de l’épargne . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8

1.3.1 L’analyse classique ou néoclassique : . . . . . . . . . . . . . . . 8

1.3.2 L’épargne chez Keynes : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8

1.3.3 L’épargne selon la théorie de cycle de vie / revenu permanent : 9

2 Le Vieillissement démographique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 10

2.1 Définitions . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 10

2.2 Mesures du vieillissement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11

2.2.1 La part des personnes âgées . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11

2.2.2 Le rapport de dépendance . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11

2.2.3 Indice de vieillissement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12

2.3 Les facteurs du vieillissement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12

3 La relation entre l’épargne et vieillissement de la population . . . . . . . . . . . 17

2 Données et méthodologie de l’étude 18

1 Modélisation macro-économétrique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18

1.1 les sources de données utilisées . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 19

1.2 Variables retenues . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 19

1.2.1 Variable dépendante . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 19

1.2.2 Variables indépendantes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 19

1.3 Méthodes statistiques adoptées . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21

1.3.1 Présentation du modèle ARDL . . . . . . . . . . . . . . . . . 22

1.3.2 Stationnarité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23

1.3.3 Concept de cointégration . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 26

2 Modélisation micro-économétrique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 28

VII
TABLE DES MATIÈRES

2.1 Description de la base de données . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 28

2.1.1 Présentation de l’enquête . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 28

2.1.2 Échantillonnage de l’ENCDM . . . . . . . . . . . . . . . . . . 29

2.1.3 Objectifs de l’ENCDM . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 29

2.1.4 Description générale du questionnaire de l’ENCDM . . . . . . 30

2.1.5 Approche méthodologique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 31

2.2 Variables retenues . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 31

2.2.1 Variable dépendante . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 31

2.2.2 Variables explicatives retenues . . . . . . . . . . . . . . . . . . 31

2.3 Méthodes statistiques adoptées . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 32

2.3.1 Test de Khi deux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 33

2.3.2 Régression logistique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 33

3 Épargne des ménages et vieillissement de la population : niveaux et tendances


récentes 37

1 Structure et évolution de l’épargne des ménages . . . . . . . . . . . . . . . . . . 37

1.1 Comparaison internationale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 38

1.2 Evolution et structure de l’épargne nationale . . . . . . . . . . . . . . . 39

1.3 Evolution de l’épargne financière et non financière des ménages . . . . . 42

2 Tendances récentes et perspectives du vieillissement démographique . . . . . . . 43

2.1 Vieillissement démographique dans le monde . . . . . . . . . . . . . . . 43

2.2 Vieillissement démographique au Maroc . . . . . . . . . . . . . . . . . . 46

4 Analyse de l’impact du vieillissement sur l’épargne 52

1 Approche macro-économétrique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 52

1.1 Présentation des variables . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 52

1.2 Stationnarité des séries . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 54

VIII
TABLE DES MATIÈRES

1.3 Corrélation entre les variables . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 55

1.4 Test de cointégration de Pesaran et al. (2001) . . . . . . . . . . . . . . . 56

1.4.1 Décalage optimal et estimation du modèle ARDL . . . . . . . . 56

1.4.2 Test de cointégration aux bornes . . . . . . . . . . . . . . . . . 58

1.5 Test de causalité : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 58

1.6 Tests de validation du modèle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 60

1.6.1 Test autocorrélation : Test de Breusch-Godfrey . . . . . . . . . 60

1.6.2 Test d’hétéroscédasticité : Test d’ARCH . . . . . . . . . . . . 61

1.6.3 Test de normalité : Test de Jarque-Bera . . . . . . . . . . . . . 61

1.6.4 Test de stabilité : Test de Cusum . . . . . . . . . . . . . . . . 62

1.7 Coefficients de Long terme et dynamique de court terme . . . . . . . . . 63

1.7.1 Coefficients de court terme (CT) . . . . . . . . . . . . . . . . . 63

1.7.2 Coefficients de Long terme (LT) . . . . . . . . . . . . . . . . . . 64

2 Approche micro-économétrique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 66

2.1 Épargne des ménages et caractéristiques sociodémographiques . . . . . 66

2.1.1 Épargne des ménages et niveau social . . . . . . . . . . . . . . 66

2.1.2 Épargne des ménage et taille du ménage . . . . . . . . . . . . . 67

2.1.3 Épargne des ménages et état matrimonial du chef du ménage . 67

2.1.4 Epargne des ménages et sexe du chef du ménage . . . . . . . . 68

2.2 Analyse du comportement d’épargne chez les ménages . . . . . . . . . . . 69

Conclusion générale 76

Références bibliographiques 77

A Les sorties relatives à la stationnarité des variables 81

B Les sorties relatives à la régression logistique 86

IX
TABLE DES FIGURES

1.1 modèle de base du cycle de vie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9

1.2 Les phases de la transition démographique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 13

1.3 Transition démographique en Suède, 1750-2000 . . . . . . . . . . . . . . . . . . 14

1.4 Transition démographique en France et en Angleterre-Pays de Galles, 1750-2000 15

1.5 Transitions démographiques dans quelques pays de l’Asie, 1950-2000 . . . . . . 15

1.6 Transitions démographiques dans quelques pays de l’Asie, 1950-2000 . . . . . . 16

1.7 Transitions démographiques dans quelques pays de la Région MENA, 1950-2000 16

2.1 Implémentation du test ADF . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 25

2.2 Graphe illustrant la non cointégration de Xt et Zt . . . . . . . . . . . . . . . . . 26

2.3 Graphe illustrant la cointégration de Xt et Yt . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 26

3.1 Taux d’épargne des ménages (%), dans quelques pays du Monde, année 2017 . . 38

3.2 Evolution du RNBD et de l’ENB en millions de DH (base 2007), Maroc, 1980-


2015 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 39

3.3 Evolution du RNBD et de l’ENB en millions de DH (prix courants), Maroc,


1980-2015 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 40

3.4 Evolution de la structure de l’épargne en termes absolus (en millions de DH, prix
courants), Maroc, 1998-2017 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 40

X
TABLE DES FIGURES

3.5 Evolution de la structure (%) de l’épargne en termes (en millions de DH, prix
courants), Maroc, 1998-2017 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 41

3.6 Structure (%) de l’ENB (en millions de DH, prix courants) par type d’institution,
Maroc, 2007-2017 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 42

3.7 Evolution de l’épargne financière et non financière des ménages . . . . . . . . . . 42

3.8 Evolution des effectifs de la population âgée de 60 ans et plus, Monde, 1950-2100 43

3.9 Evolution de la part (%) des personnes âgées de 60 ans et +, Monde, 1950-2100 44

3.10 Part des personnes âgées, Grandes Régions du Monde, 2017 . . . . . . . . . . . 45

3.11 Évolution de la pyramide des âges du Monde, 1950-2100 . . . . . . . . . . . . . 45

3.12 Evolution des taux bruts de natalité (TBN), de mortalité (TBM ) et


d’accroissement naturel (TA), Maroc, 1960-2010, en ‰ . . . . . . . . . . . . . . 46

3.13 Evolution des taux bruts de natalité (TBN), de mortalité (TBM ) et


d’accroissement naturel (TA), Maroc, 1960-2010, en ‰ . . . . . . . . . . . . . . 47

3.14 Evolution de l’indice synthétique de fécondité (ISF) par milieu de résidence . . . 47

3.15 Structure (%) de la population du Maroc par grands groupes d’âges, 1960-2050 . 48

3.16 Evolution de la structure par sexe (%) de la population âgée, Maroc, 2014-2050 49

3.17 Structure par milieu de résidence (%) de la population âgée, Maroc, 1960-2050 . 49

3.18 Évolution du ratio de dépendance des âgées (%), Maroc, 1960-2050 . . . . . . . 50

3.19 Évolution de l’indice de vieillissement, Maroc (%), 1960-2050 . . . . . . . . . . . 50

3.20 Évolution de la pyramide des âges du MAROC : 1960-2050 . . . . . . . . . . . . 51

4.1 Variables utilisées . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 53

4.2 Statistique descriptives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 53

4.3 Représentation graphique des variables . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 54

4.4 Résumé du test de stationnarité ADF . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 54

4.5 Matrice de corrélation entre les variables . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 55

4.6 Modèle ARDL (1, 4, 2) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 57

4.7 Schwarz Criteria (top 20 models) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 57

XI
TABLE DES FIGURES

4.8 Résultats du test de cointégration de Pesaran et al. (2001) . . . . . . . . . . . . 58

4.9 Décalage optimal du VAR . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 59

4.10 Résumé du test de causalité au sens de Toda-Yamamoto . . . . . . . . . . . . . 59

4.11 Corrélogramme du résidu . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 60

4.12 Test de Breusch-Godfrey . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 61

4.13 Test d’ARCH . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 61

4.14 Test de Jarque-Bera . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 62

4.15 Test de Cusum . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 63

4.16 Résultats d’estimation des coefficients de CT . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 64

4.17 Résultats d’estimation des coefficients de LT . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 65

4.18 Part des ménages ayant déclaré être en capacité d’épargner selon le niveau
socioéconomique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 66

4.19 Part des ménages ayant déclaré être en capacité d’épargner selon la taille des
ménages . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 67

4.20 Part des ménages ayant déclaré être en capacité d’épargner selon l’état
matrimonial du chef du ménage . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 68

4.21 Part des ménages ayant déclaré être en capacité d’épargner selon sexe du chef
du ménage . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 68

4.22 Variables dans l’équation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 70

XII
LISTE DES ABRÉVIATIONS

ADF : Augmented Dicky-fuller

ARDL : Auto Regressive Distribution Lag

CERED : Centre d’Etudes et de Recherches Démographiques

ENCDM : Enquête Nationale sur la Consommation et les Dépenses des Ménages

HCP : Haut Commissariat au Plan

INED : Institut national d’études démographiques

INSEE : Institut national de la statistique et des études économiques

MCO : Moindre Carré Ordinaire

MENA : Middle East and North Afrique

ODD : Objectifs de Développement Durable

ONU : Organisation des Nations-Unies

PEL : Plans d’Epargne Logement

PIB : Produit intérieur brute

VECM : Vector Error Correction Model

XIII
INTRODUCTION GÉNÉRALE

La question du lien entre l’épargne et le vieillissement démographique ne date pas


d’aujourd’hui. Les pays développés, qui ont dans leur majorité amorcé leur transition
démographique dès le milieu du 18ème siècle, ont déjà connu et continueront à connaı̂tre le
vieillissement de leur population qui se caractérise par la hausse du ratio de dépendance, une
baisse de la fécondité et l’allongement de l’espérance de vie.

L’Europe par exemple est confrontée à un vieillissement généralisé. Ainsi, l’effectif des
personnes âgées a plus que doublé au cours des cinquante dernières années, et leur poids
relatif au sein de la population totale, qui était de 8 % en 1960, a dépassé les 18 % en 2013.
Les tendances démographiques actuelles vont dans le sens d’un renforcement de ce
phénomène. La population européenne connaı̂tra une croissance lente passant de 507 millions
d’habitants en 2013 à 526 millions en 2035. Mais à compter de cette date, la part de la
population âgée de 65 ans et plus devrait passer de 18% à 28%.

A l’instar de certains pays en voie de développement, la structure démographique du


Maroc a amorcé un changement notable depuis les années 1960. Ainsi, la part des personnes
âgées de plus de 60 ans passera à 23% dans la population totale en 2050 alors qu’elle était de
12,3% en 2015 contre 7,1% en 1960, et une espérance de vie qui est aujourd’hui de quelque 75
ans et qui atteindra plus de 80 ans alors qu’elle n’était que de 47 ans au début des années
1960.

Ces changements peuvent avoir des conséquences importantes à plusieurs niveaux :

— Niveau économique : conséquence sur le marché du travail, sur la consommation et


l’épargne des ménages ...
— Niveau sociale : effets sur le financement des retraites qui repose sur le principe de

1
TABLE DES FIGURES

solidarité entre les générations, et sur Les dépenses de santé.

Il est indéniable que l’épargne est capitale pour la croissance économique et pour les
différents agents : elle permet ainsi de financer une partie des dépenses de l’Etat, d’appuyer
les investissements pour les entreprises et d’enrichir les ménages à court, moyen et long terme.

Les travaux qui visent en particulier l’identification de l’impact du vieillissement


démographique sur l’épargne s’articulent fondamentalement sur la théorie de cycle de vie, qui
a été développée par Ando et Modigliani en 1960. Ces auteurs ont essayé de modéliser les
cycles d’épargne et de désépargne d’un individu au long de sa vie et se sont intéressés à
vérifier sa validité empirique.

Dans notre travail, nous cherchons à déterminer l’effet du vieillissement démographique


sur l’épargne des ménages au Maroc, en adoptant deux approches statistique. La première
approche est macro économétrique où nous allons essayer de déterminer l’impact
macroéconomique du changement démographique sur l’épargne. A travers la deuxième
approche, de type micro-économétrique, nous allons essayer de modéliser le comportement
d’épargne des ménages en fonction du cycle de vie ou tout autre facteur jugé intéressant
identifié dans la littérature.

En somme, nous essayerons de répondre aux questions suivantes :

— Quel est l’impact du changement démographique au Maroc sur l’épargne des


ménages ?
— Est-ce que l’hypothèse de la théorie de cycle de vie est acceptée ou rejetée dans notre
cas ?
— Quelles sont les autres caractéristiques qui affectent le comportement d’épargne des
ménages ?
Le rapport de l’étude est organisé sur quatre chapitres :

Le premier offre une revue littérature portant sur des travaux sur le sujet. Elle comporte,
une présentation des définitions des concepts clés sur le vieillissement de la population et
l’épargne des ménages ainsi que les relations qui peuvent les relier.
Le deuxième chapitre est consacré à une présentation des différentes sources des données utilisées
et leurs traitements. Nous allons également préciser les variables explicatives et dépendantes
retenues ainsi que les approches et les modèles statistiques adoptées.
Une analyse de la situation actuelle et les tendances les plus récentes concernant l’épargne et le
vieillissement de la population en se basant sur les données de l’HCP et la DEPF sera l’objet
du troisième chapitre. Le quatrième et le dernier exposera les analyses des résultats obtenus
dans le cadre des deux approches adoptées.

2
CHAPITRE 1

ÉPARGNE ET VIEILLISSEMENT DE
LA POPULATION : UNE REVUE DE
LITTÉRATURE

Les perspectives démographiques dans les pays industrialisés comme dans une grande
partie des pays en voie de développement sont synonymes de vieillissement démographique,
comme conséquence de la forte baisse de la fécondité et de la mortalité. L’Organisation des
Nations-Unies (ONU) parle même de phénomène planétaire 1 puisque la quasi-totalité des
pays verront une augmentation de leur population des personnes âgées.

L’ONU (2019) atteste  qu’en 2017 environ 962 millions de personnes sont âgées de 60
ans et plus, ce qui représente 13% de la population mondiale. Ce taux augmente d’environ 3%
par an et d’ici à 2050, tous les continents sauf l’Afrique auront plus d’un quart de leur
population âgées de 60 ans et plus. On estime que le nombre de personnes âgées de 80 ans
devrait passer de 137 millions en 2017 à 425 millions en 2050 et devrait atteindre 909
millions d’ici l’année 2100. Deux tiers de la population mondiale âgée de 60 ans et plus vit
dans des régions en développement et leur nombre augmente plus rapidement que la
proportion de personnes âgées dans les pays développés. 2 .

Le Maroc n’est pas épargné : la population âgée de plus de 60 ans était de 7,2% en
1. https ://www.un.org/fr/sections/issues-depth/ageing/index.html
2. https ://www.un.org/fr/sections/issues-depth/ageing/index.html

3
CHAPITRE 1. ÉPARGNE ET VIEILLISSEMENT DE LA POPULATION : UNE REVUE DE LITTÉRATURE

1960, est aujourd’hui de 10,5% et passera à 23,2% en 2050.

Les conséquences de ce bouleversement démographique sont multiples autant sur le


plan économique que sur le plan social et sanitaire : caisses de retraite, protection sociale,
épargne, marché du travail... sont autant d’aspects qui peuvent être influencés.

Ce qui nous intéresse ici c’est la conséquence du vieillissement de la population sur


l’épargne individuelle et nationale. Dans beaucoup de pays, le vieillissement des pays semble
en effet aller de pair avec des taux d’épargne moins élevés comme on relève également un taux
d’épargne plus faible chez les retraités (Galiana et al. 2017).

Mais avant d’aborder cette question, nous allons d’abord clarifier quelques concepts clés
et préciser les indicateurs et les approches relatifs à notre problématique.

1 Épargne : concepts, mesures et approches

L’épargne, notion économique importante, est une composante essentielle de la


comptabilité nationale.

1.1 Définition du concept  épargne  et motifs

L’épargne correspond à la partie du revenu disponible des agents économiques, qui


n’est pas consacrée à une consommation immédiate. Elle est donc considérée comme une
consommation différée dans le temps.

Épargne = Revenu disponible – Consommation finale

Pour les ménages, l’épargne est cette partie de leur revenu qu’ils ne dépensent pas en
consommation. Ils vont en général le placer pour en retirer des revenus. Très souvent, cette
épargne est faite en prévision d’un investissement futur (l’acquisition d’un appartement ou
d’une maison), ou de l’achat d’un bien de consommation durable coûteux (automobile. . . ).

Pour les entreprises, l’épargne brute est la partie des bénéfices après impôts qui n’est
pas distribuée aux actionnaires. Cette épargne permet l’autofinancement des investissements
et de l’amortissement (Rivoire, 1981).

L’épargne brute des administrations publiques correspond à la différence entre les

4
CHAPITRE 1. ÉPARGNE ET VIEILLISSEMENT DE LA POPULATION : UNE REVUE DE LITTÉRATURE

recettes courantes et les dépenses courantes (excepté l’amortissement).

Dans la comptabilité nationale marocaine, l’épargne nationale brute représente la


partie du Revenu national brut disponible non affectée à la consommation finale 3 . Le revenu
national brut disponible est le revenu global de la nation correspondant au PIB corrigé par
rapport à la partie nette versée ou reçue de l’extérieur sous forme de revenus (salaires et
revenus de la propriété et de l’entreprise) et de transferts courants.

Les motifs rationnels derrière l’action d’épargne, selon une combinaison réalisée par
Van Raaij (2014, p. 89) sur la base des travaux sur l’épargne de Keynes (1935) et Katona
(1975) sont :

—  le motif de transaction : l’épargne pour répondre à un objectif, épargner pour une


dépense future importante telle qu’une maison, une voiture ou un voyage ;

— le motif de précaution 1 : l’épargne tampon, l’incertitude quant à l’avenir et la


couverture contre une perte de revenu futur inattendue ou de larges dépenses ;

— le motif de précaution 2 : épargner pour distribuer le revenu au fil du temps, afin


d’assurer un niveau constant de consommation. C’est particulièrement pertinent
pour les personnes à revenu variable, comme les entrepreneurs ;

— le motif d’avenir : l’épargne pour la vieillesse, la retraite, dans le cadre d’un plan de
retraite ;

— le motif du legs : épargner pour les enfants et les petits-enfants ;

— le motif de spéculation : épargner pour accroı̂tre sa richesse, par exemple en


investissant dans le logement ou dans des actions .
Dans le même registre, Sturm (1983, p. 162-163) distingue 3 grands motifs qui ne
s’excluent pas mutuellement :
—  l’épargne-retraite, c’est-à-dire la formation d’actifs qui permettront de financer la
consommation après le départ à la retraite, lorsque le revenu courant de l’activité
deviendra nul (ou négligeable).

— l’épargne de précaution : en raison des aléas que comporte l’avenir, le ménage peut
souhaiter constituer une réserve d’actifs pour faire face à des situations d’urgence,
telles que chômage, maladie, etc. ;

— l’épargne de solidarité : c’est-à-dire la formation d’actifs qui seront laissés en héritage


la génération suivante. 
3. https ://www.hcp.ma/glossary/Comptes − nationaux − Base − 1998 gi2096.html?l = E#lE

5
CHAPITRE 1. ÉPARGNE ET VIEILLISSEMENT DE LA POPULATION : UNE REVUE DE LITTÉRATURE

1.2 Mesures, formes et sources d’épargne

1.2.1 Mesures et indicateurs de l’épargne

Si on veut mesurer la capacité d’épargner, on distingue ces différents taux d’épargne


selon sa forme :

— Le taux d’épargne est le rapport entre l’épargne des ménages et leur revenu
disponible brut.

— Le taux d’épargne financière est la part du revenu disponible brut investie


dans des actifs financiers. Ces actifs peuvent être des livrets, des plans d’épargne, ou
encore des produits financiers tels que les actions, les obligations ou l’assurance-vie.

— Le taux d’investissement en logement est la part du revenu disponible brut des


ménages consacrée à l’acquisition d’un bien immobilier.

1.2.2 Formes de l’épargne

Généralement il existe deux grandes formes d’épargne, On distingue l’épargne


financière de l’épargne non financière :

• L’épargne financière : c’est l’ensemble des placements d’épargne effectués dans des
produits bancaires et/ou financiers. On peut distinguer plusieurs grands produits d’épargne :

— L’épargne liquide : c’est l’épargne qui va rester disponible sous forme liquide,
c’est-à-dire Livret A, Livret de Développement Durable, ainsi que la plupart des
livrets d’épargne.

— L’épargne des placements financiers : on retrouve les investissements dans les


valeurs mobilières, comprenant les Sociétés d’investissement à Capital Variable, les
Fonds Commun de Placements, les obligations, les actions, les warrants, etc.

— L’assurance vie : en effet, c’est un produit d’épargne comme un autre puisque


l’argent est déposé, n’est pas utilisé en dépense de consommation finale.

— Les plans d’épargne : comme les Plans d’Epargne Logement (PEL) ou les plans
d’épargne retraite.
• L’épargne non financière : L’épargne non financière est l’épargne stockée ou
investie dans des investissements immobiliers Elle comprend les achats de logements, maisons
individuelles pour les ménages, et les achats de biens de production pour les entreprises
individuelles. Les achats effectués sont ici considérés comme des investissements et non des

6
CHAPITRE 1. ÉPARGNE ET VIEILLISSEMENT DE LA POPULATION : UNE REVUE DE LITTÉRATURE

consommations.

1.2.3 Les sources de l’épargne

On distingue plusieurs sources de l’épargne à savoir les ménages, les entreprises et les
administrations publiques.

— L’épargne des ménages : Les ménages disposent d’un revenu appelé revenu
disponible. Ils peuvent soit le dépenser pour consommer et acheter des biens et des
services pour satisfaire leurs besoins, soit l’épargner. L’épargne des ménages se
définit donc comme la partie du revenu disponible qui n’est pas consommée. Ainsi,
• L’épargne sert, tout d’abord, à acheter des logements pour les ménages ordinaires
et des biens d’équipement pour les entrepreneurs individuels.
• L’épargne sert ensuite, à acheter des titres financiers (actions, obligations . . . ) ou
à être placés dans des livrets et des comptes d’épargne qui rapportent des intérêts.
• L’épargne enfin, thésaurisée c’est-à-dire conservée sous forme de monnaie en
pièces, en billets et en compte courant bancaire. (Hachemi et Yahia ,2017)

— L’épargne des entreprises :


L’épargne brute des entreprises correspond à leur capacité d’autofinancement,
c’est-à-dire la part de leur bénéfice net après impôt à laquelle s’ajoute
l’amortissement (Sommes mises de côté pour reconstituer le capital technique).
(Yve et Garnier, 1997)

Epargne brute des entreprises = autofinancement = amortissement+


bénéfices non distribués

A la différence de l’ensemble des ménages, les entreprises ont un besoin de


financement puisque l’épargne qu’elles dégagent est insuffisante pour couvrir leurs
dépenses d’investissement, c’est pour cela qu’elles empruntent la capacité de
financement placée par les ménages dans le système financier. (Hachemi et Yahia
,2017)

— L’épargne des administrations publiques ou épargne publique :


il s’agit de l’épargne constituée par l’Etat, c’est-à-dire le gouvernement et les entités
décentralisées. Elle est essentiellement constituée de l’épargne budgétaire qui résulte
de tout surplus de recettes publiques sur la consommation publique ; laquelle se définit
comme les dépenses gouvernementales courantes auxquelles s’ajoutent les dépenses
d’investissements en équipement militaire (Malcolm G, 1990).
L’épargne nationale (ou épargne domestique ou encore épargne intérieure) est la somme de
ces trois composantes :

Epargne nationale = Epargne des ménages + Epargne des Entreprises+

7
CHAPITRE 1. ÉPARGNE ET VIEILLISSEMENT DE LA POPULATION : UNE REVUE DE LITTÉRATURE

Epargne publique

L’épargne des ménages et des entreprises composent l’épargne privée.

Epargne nationale = Epargne privée + Epargne publique

Lorsque l’épargne domestique est insuffisante pour assurer les investissements


nécessaires, on fait appel à l’endettement externe, on parle alors d’épargne extérieure. Ceci
entraı̂ne un déficit du compte courant de la balance des paiements.

1.3 Les approches théoriques de l’épargne

1.3.1 L’analyse classique ou néoclassique :

Pour les économistes classiques et néoclassiques, le niveau d’épargne est déterminé par
le taux d’intérêt. En effet, dans le cadre de cette théorie, l’agent économique cherche à
maximiser son utilité et lorsqu’il est amené à faire un arbitrage entre consommation et
épargne, il va considérer ce que lui rapportera l’épargne. Autrement dit il va considérer le
taux d’intérêt.

Lorsque celui-ci est élevé, l’agent économique sera incité à épargner puisque épargner
lui permettra d’acquérir plus de revenus dans le futur. A l’inverse, lorsque le taux d’intérêt est
faible, l’agent économique a tendance à ne pas épargner, car l’épargne ne lui rapportera que peu
de revenus dans le futur. Pour les auteurs néoclassiques l’épargne a un caractère prioritaire, en
ce sens qu’elle est déterminée avant que les dépenses de consommation courante soient arrêtées.

1.3.2 L’épargne chez Keynes :

Selon cette approche, le niveau de l’épargne n’est pas déterminé par le taux d’intérêt
mais par le niveau de revenu de l’agent économique. Celui-ci consomme d’abord et affecte le
reste de son revenu à l’épargne.

Il ressort de cette théorie que l’épargne a un caractère résiduel en ce sens que ce sont les
besoins de consommation qui sont déterminés en premier lieu et le reste, pour autant qu’il en
soit possible, est affecté suivant différentes modalités à l’épargne. (Mansesa, 2010)

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CHAPITRE 1. ÉPARGNE ET VIEILLISSEMENT DE LA POPULATION : UNE REVUE DE LITTÉRATURE

1.3.3 L’épargne selon la théorie de cycle de vie / revenu permanent :

La première introduite par Modigliani et Brumberg (1954), cette théorie a essayé


d’expliquer de façon simple les cycles d’épargne et de désépargner d’un individu au cours de
son existence

Figure 1.1 – modèle de base du cycle de vie

Source :cité par Antoine Dedry

L’hypothèse de base de cette théorie illustrée par le graphique ci-dessus est que le
niveau de consommation des individus reste stable dans le temps, et que durant la vie active
le revenu ne cesse de croı̂tre, puis décroı̂t très fortement au moment de la retraite.
Trois périodes se distinguent, et à chacune correspond un comportement différent. Au début
de son existence, l’individu est jeune et emprunte pour financer sa vie courante. Ensuite il
trouve un travail et consacre une grande partie de ses revenus à se constituer une épargne
pour rembourser les sommes empruntées puis préparer sa chute de revenus au moment de sa
cessation d’activité, période pendant laquelle il désépargnera pour maintenir son niveau de
vie.

La deuxième théorie introduite par Friedman (1957), retient l’hypothèse d’une durée
de vie infiniment longue. Dans cette perspective, il introduit la notion de revenu permanent,
défini comme le revenu constant au cours du temps qui donne au ménage le même revenu
actualisé que ses revenus futurs. De façon similaire, Friedman définit la consommation
permanente, comme  la valeur des services qu’on prévoit de consommer pendant la période
considérée , et montre alors que la consommation permanente (et donc l’épargne) est
proportionnelle au revenu permanent. Friedman n’exclut cependant pas que le ménage puisse
planifier sa consommation sur un horizon plus bref (de trois à cinq ans par exemple), en
réajustant progressivement sa consommation pour tenir compte de modifications jugées
durables du revenu. Mais, à la différence du comportement de cycle vital, le ménage ne liquide

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CHAPITRE 1. ÉPARGNE ET VIEILLISSEMENT DE LA POPULATION : UNE REVUE DE LITTÉRATURE

pas son patrimoine pour assurer sa consommation à partir d’un certain âge (Antonin,2009).

2 Le Vieillissement démographique

Selon l’Organisation des Nations-Unies (ONU)  Le vieillissement de la population est


un phénomène planétaire : quasi tous les pays du monde doivent faire face à une augmentation
de leur population de personnes âgées. Le vieillissement de la population est en train de devenir
l’une des plus importantes transformations sociales du XXIème siècle, avec des répercussions
dans presque tous les secteurs de la société, notamment dans le monde du travail, sur les marchés
financiers, vis-à-vis de la demande de biens et services, tels que le logement, les transports ou
encore la protection sociale. Le vieillissement de la population influence aussi profondément les
structures familiales et les liens intergénérationnels. . 4

La déclaration de l’ONU montre toute l’importance de ce phénomène et ces impacts


notamment sur le plan économique.

En effet, selon l’ONU (2015), on estime, dans le monde, 901 millions de personnes
âgées de 60 ans ou plus en 2015, soit une augmentation de 48% par rapport aux 607 millions
estimés en 2000 (ONU, 2015). En 2030, ce nombre devrait augmenter de 56%, pour atteindre
1,4 milliards, et d’ici 2050, la population mondiale des personnes âgées devrait plus que
doubler par rapport à 2015, atteignant près de 2,1 milliards. Par ailleurs, deux tiers de cette
population vit dans des régions en développement et leur nombre augmente plus rapidement
que dans les pays développés.

Nous allons nous atteler dans cette partie à cerner le vieillissement démographique.

2.1 Définitions

Le vieillissement démographique est une conséquence de la transition démographique.


Il indique en effet l’augmentation de la proportion de personnes âgées dans une population, en
raison principalement de la diminution de la fécondité et de la mortalité.

Le vieillissement peut être l’effet d’une augmentation du nombre de personnes âgées


(vieillissement par le sommet de la pyramide), conséquence d’une baisse de la mortalité et
de l’allongement de la durée de vie moyenne, mais peut-être dû aussi à un déficit de jeunes
(vieillissement par la base), à la suite d’une baisse de la natalité. Dans ce cas, il peut donc y
avoir vieillissement même si le nombre de personnes âgées n’augmente pas. Jusqu’à présent, il
4. https ://www.un.org/fr/sections/issues-depth/ageing/index.html

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CHAPITRE 1. ÉPARGNE ET VIEILLISSEMENT DE LA POPULATION : UNE REVUE DE LITTÉRATURE

a surtout touché les pays du Nord, dont la fécondité et la mortalité ont beaucoup baissé, mais
il commence à toucher les pays du Sud et devrait être l’un des grands changements sociaux de
l’humanité au cours du 21ème siècle 5 (INED, 2019).

2.2 Mesures du vieillissement

2.2.1 La part des personnes âgées

Si on veut mesurer quantitativement le degré de vieillissement, il devient nécessaire de


préciser qui sont les personnes ”âgées”. Il n’existe naturellement pas de définition unique de
ce groupe, la borne inférieure d’âge dépendant du domaine d’étude. Lorsqu’on cherche par
exemple à apprécier les effets du vieillissement sur les régimes de retraite, on retient une
limite proche de l’âge moyen à la cessation d’activité, les plus souvent 60 ou 65 ans. Au
contraire, si l’objet de l’étude est la dépendance, on retiendra 75, 80 ou 85 ans. Le degré de
vieillissement d’une population unique donnée est couramment mesuré par la proportion, en
son sein, des personnes dont l’âge excède une valeur donnée. (Calot et Sardon, 2000)

2.2.2 Le rapport de dépendance

C’est le rapport entre les individus d’âge inactif généralement défini par les classes
d’âge 0-19 ans  et  65 ans et plus  et les individus d’âge actif, de 20 à 64 ans.

Ce ratio peut être décomposé pour tenir compte des deux périodes d’inactivité, la
jeunesse et la vieillesse.

On obtient alors un indice de jeunesse (inactifs jeunes / population d’âge actif), et un


indice de vieillesse (inactifs âgés / population d’âge actif).

Les pays à forte fécondité ont d’ordinaire les rapports les plus élevés de dépendance en
fonction de l’âge, en raison de la forte proportion d’enfants que renferment leurs populations.
(HCP)

Le rapport de dépendance s’exprime de la manière suivante :

P (0 − 14) + P (65et+)
Id = ∗K
P (15 − 64)
5. https ://www.ined.fr/fr/lexique/vieillissement-demographique/

11
CHAPITRE 1. ÉPARGNE ET VIEILLISSEMENT DE LA POPULATION : UNE REVUE DE LITTÉRATURE

avec :
— P 0-14 désigne la population âgée de moins de 15 ans ;
— P 15-64 les personnes dont l’âge est compris entre 15 et 64 ans ;
— P 65 et+ les personnes de 65 ans et plus
— et k=100.
L’indice de jeunesse est exprimé par :

P (o − 14)
Ij = ( ∗K
P 15 − 65)
Et l’indice de vieillesse par :

P (65et+)
Iv = ∗k
P (15 − 65)

2.2.3 Indice de vieillissement

C’est le rapport de la population des 65 ans et plus sur celle des moins de 20 ans. Un
indice autour de 100 indique que les 65 ans et plus et les moins de 20 ans sont présents dans à
peu près les mêmes proportions sur le territoire ; plus l’indice est faible plus le rapport est
favorable aux jeunes, plus il est élevé plus il est favorable aux personnes âgées.

P (65et+)
I= ∗K
P (o − 14)

2.3 Les facteurs du vieillissement

Les variations des trois facteurs de la dynamique démographique, à savoir la fécondité,


la mortalité et les migrations internationales, déterminent l’évolution du vieillissement.
Chacun de ces trois facteurs, au moment même où il enregistre une variation, entraı̂ne
immédiatement un effet sur le vieillissement :

— une baisse de natalité ou une baisse de mortalité aux âges avancés provoquent
aussitôt une accentuation du vieillissement.

— une baisse de mortalité aux jeunes âges, une hausse de natalité ou une hausse du
solde migratoire provoquent un recul du vieillissement.

Pourtant, les migrations internationales ne jouent qu’un rôle mineur dans l’évolution de la
composition par âge de la population, comparé à ceux de la fécondité ou de la mortalité. C’est
la baisse à long terme de la fécondité, de la mortalité ou des deux simultanément qui
provoque la progression du vieillissement. (Calot et Sardon, 1999)

12
CHAPITRE 1. ÉPARGNE ET VIEILLISSEMENT DE LA POPULATION : UNE REVUE DE LITTÉRATURE

L’évolution de l’espérance de vie est un facteur direct du vieillissement. En effet, vu les


progrès réalisés en matière de santé et l’amélioration des conditions de vie, les personnes âgées
vivent plus longtemps ce qui entraine l’augmentation de la proportion de cette population
dans la population totale.

Ces changements démographiques sont formalisés dans le cadre de la théorie de la


transition démographique, considérée est l’une des révolutions les plus marquantes de
l’humanité. Elle désigne au sens large et classique  le passage, à l’occasion d’un processus de
 modernisation  globale, et au bout d’un certain délai, d’un régime traditionnel ď

 équilibre  à mortalité et fécondité fortes à un régime moderne d’ équilibre  à mortalité

et à fécondité bassesle passage, à l’occasion d’un processus de  modernisation  globale, et


au bout d’un certain délai, d’un régime traditionnel ď  équilibre  à mortalité et fécondité
fortes à un régime moderne d’ équilibre  à mortalité et à fécondité basses  (Chesnais,
1986, p. 1060).

C’est Landry (1934) et Notestein (1953) qui ont été les premiers à théoriser ce
phénomène qui occupe une place importante dans le changement démographique (Piché et
Poirié, 1990), suivant les phases indiquées dans la (figure 1.2).

Ainsi, durant le processus de transition, alors qu’au démarrage, natalité et mortalité


sont situées à des niveaux très élevés mais proches (phase de pré-transition), c’est la mortalité
qui baisse dans un premier temps pendant que la natalité est toujours élevée (phase 1 de la
transition) ce qui engendre une croissance démographique importante. Au cours de la phase 2,
la natalité amorce sa baisse comme une sorte d’ajustement au fléchissement de la mortalité.
Les deux phénomènes continueront leur baisse simultanée avant d’atteindre des plateaux très
bas (phase post-transition). C’est la fin du processus.

Figure 1.2 – Les phases de la transition démographique

Source : Avdeev, 2006

13
CHAPITRE 1. ÉPARGNE ET VIEILLISSEMENT DE LA POPULATION : UNE REVUE DE LITTÉRATURE

Les phases dont ainsi dénommées (figure 3) :


— la prétransition correspondant au régime démographique traditionnel ;
— la transition démographique (phases 1 et 2) ;
— la post-transition correspondant au régime moderne.
La théorie de la transition démographique repose sur l’hypothèse que tous les pays du
monde connaitront leur transition. Il est à noter cependant que si ce phénomène est en effet
en train de se généraliser, les démarrages, délais, et rythmes d’évolution se distinguent selon
les grandes Régions et les pays du monde.

Cosio-Zaval (2011) atteste que ces transitions démographiques se sont dans un premier
temps produites dans les pays européens, puis dans les pays majoritairement peuplés par des
Européens (comme l’Australie, Nouvelle-Zélande, Etats-Unis et Canada). On estime ainsi que
le processus s’y est achevé au début des années 1970 alors que le démarrage a été amorcé plus
ou moins vers le milieu du 18ème siècle (figures 4, 5 6 et 7). Ce qui en fait des évolutions
longues et lentes.

Dans les pays en voie de développement (Asie, Afrique, Amérique latine), les
transitions démographiques ont également commencé vers le milieu du 20ème siècle plus ou
moins tardivement, et elles y sont encore en cours et sont caractérisées par des évolutions
courtes et rapides. Le processus est donc pluriel et revêt plusieurs formes selon les pays :

— La période de démarrage et de la fin du processus


— La durée de la période de transition (rythmes d’évolution)
— Le principe d’antériorité n’a pas toujours été respecté même dans les pays
industrialisés
— Les migrations internationales sont loin d’avoir un rôle neutre dans la définition des
profils de transition démographique
— ...

Figure 1.3 – Transition démographique en Suède, 1750-2000

Source :Avdeev, 2006


Légende : en bleu le taux brut de natalité et en rouge le taux brut de mortalité

14
CHAPITRE 1. ÉPARGNE ET VIEILLISSEMENT DE LA POPULATION : UNE REVUE DE LITTÉRATURE

Figure 1.4 – Transition démographique en France et en Angleterre-Pays de Galles, 1750-2000

Source : Avdeev, 2006

Figure 1.5 – Transitions démographiques dans quelques pays de l’Asie, 1950-2000

Source : Avdeev, 2006

15
CHAPITRE 1. ÉPARGNE ET VIEILLISSEMENT DE LA POPULATION : UNE REVUE DE LITTÉRATURE

Figure 1.6 – Transitions démographiques dans quelques pays de l’Asie, 1950-2000

Source : Tabutin et Schoumaker, 2005

Figure 1.7 – Transitions démographiques dans quelques pays de la Région MENA, 1950-2000

Source : Tabutin et Schoumaker, 2005

16
CHAPITRE 1. ÉPARGNE ET VIEILLISSEMENT DE LA POPULATION : UNE REVUE DE LITTÉRATURE

3 La relation entre l’épargne et vieillissement de la


population

L’importance d’étudier la relation entre l’épargne et le vieillissement de la population


réside d’une part, dans les perspectives de la structure démographique qui est le vieillissement
de la population et son impact sur l’épargne, qui est d’une autre part une variable
économique primordiale pour le financement d’une économie et sa croissance, reconnue par
l’ensemble de la théorie économique.

Cette relation était bien abordée dans la théorie de cycle de vie développée à partir de
l’article fondateur de (Brumberg et Modigliani, 1954), qui postule que le comportement de
consommation et d’épargne d’un individu dépend de son âge ou de sa position au sein du
cycle de vie, cette théorie tend à démontrer qu’un ménage emprunte lorsqu’il est jeune,
épargne durant sa vie active et désépargne à la retraite.

Les études empiriques cherchant à vérifier le lien entre les phénomènes démographiques
et l’épargne ont abouti à des résultats différents. L’hypothèse de cycle de vie n’est pas
toujours acceptée. En effet les changements démographiques auxquels fait face l’économie
marocaine présentent deux effets contradictoires, le premier ayant trait à la hausse de la part
de personnes âgées à tendance à limiter l’épargne, le second lié à l’allongement de la durée de
vie stimule cette même épargne (Lroumari,2013). Ainsi selon le travail de BOUTILLIER,
PANSARD et SEJOURNE (2001), portant sur les conséquences du vieillissement
démographique sur l’épargne des ménages en France, la répartition par âge de la population
s’avère être un des déterminants du taux d’épargne des ménages français. A long terme, ce
dernier est positivement relié à la part occupée par les individus de la classe d’âge 40-59 ans.
C’est au sein de cette période que l’effort d’épargne des ménages est le plus important, Le
poids relatif des individus de 75 ans et plus influence négativement le taux d’épargne. Ce
dernier résultat implique une désépargne qui n’a rien de contre-intuitive à cet âge de la vie.

La structure par âge n’est pas le seul facteur déterminant de l’épargne. En effet,
Abdelkhalek Touhami(2012) analyse le comportement d’épargne des ménages en fonction de
la zone de résidence mais aussi en fonction d’un certain nombre de caractéristiques
individuelles telles que le nombre d’enfants dans la famille, le nombre d’inactifs, le type de
logement, etc. Selon cet étude le comportement d’épargne repose sur des facteurs différents à
savoir la taille de ménage qui affecte négativement son épargne de même que le nombre
d’inactifs au sein du ménage. Parallèlement, le revenu agit positivement sur l’épargne ainsi
l’alphabétisation et l’interaction entre le genre et le revenu qui influencent significativement
l’épargne des ménages.

17
CHAPITRE 2

DONNÉES ET MÉTHODOLOGIE DE
L’ÉTUDE

Dans ce travail, nous cherchons à déterminer l’effet du vieillissement de la population sur


l’épargne des ménages. De manière générale, nous essayons de répondre aux questions suivantes :
— Quel est l’impact du changement démographique au Maroc sur l’épargne des
ménages ?
— Est-ce que l’hypothèse de la théorie de cycle de vie est acceptée ou rejetée dans notre
cas ?
— Quelles sont les autres caractéristiques qui affectent le comportement d’épargne des
ménages ?
Pour ce faire, nous adoptons deux approches, l’une macro-économique, l’autre
micro-économique que nous présentons dans la suite de ce chapitre.

1 Modélisation macro-économétrique

L’étude des conséquences macro-économiques du vieillissement démographique sur


l’épargne des ménages repose sur les séries temporelles d’un certain nombre de variables que
nous explicitons ci-après.

18
CHAPITRE 2. DONNÉES ET MÉTHODOLOGIE DE L’ÉTUDE

1.1 les sources de données utilisées

Les données utilisées dans ce travail sont des séries temporelles annuelles couvrant la
période 1980-2017. Le choix de la période repose sur le fait que nous voulons répondre à notre
question de recherche sur la base de données les plus récentes mais qui soit aussi assez suffisant
pour une étude économétrique.
Les données collectées pour créer une base de données de travail proviennent de différentes
sources principalement les publications de la Direction de la Statistique (HCP) et le site officiel
de la Banque Mondiale.

1.2 Variables retenues

1.2.1 Variable dépendante

Notre variable d’intérêt est l’épargne globale des ménages, pour cela nous utilisons le
taux d’épargne brute des ménages. Les données sur cette variable proviennent des comptes
nationaux publiés par le HCP. Cependant, elles ne sont pas disponibles sur une longue période,
les données de la comptabilité nationale en ce qui concerne l’épargne des ménages ne couvrent
que la période 1998-2017. En revanche, nous disposons de l’épargne nationale brute pour toute
la période de référence. Pour remédier à ce problème, nous avons essayé d’estimer les valeurs
manquantes, c.-à-d. pour la période de 1980 à 1997. Nous avons ainsi constaté que la part de
l’épargne brute des ménages parmi l’épargne brute nationale n’a pas connu des fluctuations
importantes au cours de la période pour laquelle les données sont disponibles. De ce fait, on a
émis l’hypothèse que cette tendance restera constante aussi pour la période 1980-1997.

1.2.2 Variables indépendantes

Afin de mesurer l’effet net du vieillissement démographique sur le taux d’épargne des
ménages, nous retenons en plus d’indicateurs démographiques, une série de variables
économiques.

Variables démographiques :

Selon l’hypothèse du cycle de vie, la structure par âge de la population a un grand


intérêt pour expliquer le comportement d’épargne. En se basant sur cette théorie, les
individus devraient avoir une épargne négative quand ils sont jeunes avec un revenu très
faible, une épargne positive durant leurs années de productivité et une fois de plus négative
lorsqu’ils sont vieux et retraités.

Modigliani (1970) et Leff (1968) ont testé cette hypothèse et trouvé comme d’autres

19
CHAPITRE 2. DONNÉES ET MÉTHODOLOGIE DE L’ÉTUDE

auteurs après eux, que la consommation par âge de la population joue un rôle très important
dans la constitution de l’épargne. Une croissance rapide de la population accroit la proportion
des jeunes ce qui peut affecter de manière négative l’épargne (cité par Diagne, 2001).

Dans la plupart des études empiriques qui ont testé cette relation, les résultats
viennent confirmer l’hypothèse de cycle de vie, mais ce n’est pas toujours le cas.
Cependant le vieillissement de la population ne se limite pas à une hausse des ratios de
dépendance mais s’accompagne par un allongement de la durée de vie des individus
(Lourmari, 2013). En effet l’espérance de vie devrait avoir un effet positif parce que plus
l’espérance de vie s’allonge plus l’individu est tenu d’accumuler du patrimoine afin de financer
la consommation après la retraite.

Nous retenons à présent :

— le rapport de dépendance de vieillesse ;


— l’espérance de vie :
— la part des personnes âgées dans la population totale.

Variables économiques :

Nous retenons pour notre modélisation macroéconomique, les variables suivantes :

• Taux d’accroissement du PIB : nous pouvons définir le taux d’accroissement du PIB


comme la différence en logarithme entre le PIB en une année t et le PIB en une année t-1 du
même trimestre. Cette variable sera utilisée comme proxy de la distribution des revenus. En
se basant sur l’hypothèse keynésienne du revenu, il existe une relation positive entre le revenu
et l’épargne. Différentes théories ont été élaborées par certains auteurs. Ainsi Keynes,
Friedman et Modigliani ont montré que le revenu a un effet de très grande importance sur le
comportement des agents économiques. Une augmentation du revenu peut ainsi contribuer à
des taux d’épargne élevés. L’importance de cet effet semble être une fonction décroissante du
niveau de revenu et pourrait même devenir négatif pour des pays riches où les opportunités
d’investissement et la croissance sont relativement faibles.
Ainsi Tobin (1967) aussi bien que Bosworth (1993), ont développé l’idée selon laquelle, si les
salariés anticipent des revenus futurs, ils emprunteront afin d’améliorer leur condition de vie
par une consommation présente plus élevée.
Néanmoins, l’idée d’une forte corrélation entre épargne et revenu par habitant persiste
toujours.

• Taux d’inflation et taux d’intérêt réel : le lien entre taux d’intérêt et inflation est très
fort. Une baisse des taux d’intérêt favorise une hausse de l’inflation alors qu’une hausse des

20
CHAPITRE 2. DONNÉES ET MÉTHODOLOGIE DE L’ÉTUDE

taux d’intérêt est un moyen pour lutter contre une inflation excessive. Les deux éléments sont
reliés par la notion de croissance économique et ont une forte influence sur le pouvoir d’achat
des ménages. Donc nous allons retenir le taux d’inflation approché par le taux de croissance de
l’indice des prix à la consommation et qui est un bon proxy du taux d’intérêt.
— Inflation : l’INSEE définit l’inflation comme la perte de pouvoir d’achat de la
monnaie, exprimée par une augmentation générale et durable des prix. L’inflation
est un proxy variable pour mesurer l’instabilité macro-économique, elle devrait agir
positivement sur l’épargne des ménages. En effet pour conserver la valeur réelle de
leur patrimoine financier, les agents sont contraints à épargner plus. Mais d’un
autre côté, l’anticipation de l’inflation par les agents économiques, peut les conduire
à acheter dès maintenant ce qu’ils paieront plus cher plus tard.
— Taux d’intérêt réel : selon la banque mondiale, Le taux d’intérêt réel correspond
au coût de l’emprunt ou encore au rendement des placements dans un pays pour une
année. Par opposition au taux d’intérêt nominal, le taux d’intérêt réel tient compte de
l’inflation et des primes de risques. Pour les économistes classiques et néoclassiques, le
niveau d’épargne est déterminé par le taux d’intérêt. En fait l’effet du taux d’intérêt
sur l’épargne reste ambigu. En effet, lorsque le taux d’intérêt réel augmente, il se
crée une combinaison d’effet de substitution et d’effet revenu. Un taux d’intérêt élevé
signifie que le ménage réduit la consommation présente dont le prix est relativement
plus élevé par rapport à la consommation future ce qui augmente l’épargne (effet de
substitution) .Cependant, il peut aussi permettre à l’individu d’anticiper des revenus
futurs plus élevés, ce qui réduit l’épargne présente (effet revenu). Ainsi la réponse
du taux d’épargne à l’augmentation du taux d’intérêt réel est positive si l’effet de
substitution excède l’effet revenu et elle est négative dans le cas contraire (Boureima,
2003).

1.3 Méthodes statistiques adoptées

Etant donné la nature des données (séries chronologiques), nous choisissons la méthode
d’estimation ARDL 1 introduite par Pesaran, Shin et Smith (2001). Ce choix se justifie par
plusieurs raisons, En effet il existe plusieurs méthodes économétriques pour tester les relations de
long terme entre les séries temporelles Les plus utilisées sont la procédure en deux étapes d’Engle
et Granger (1987), l’approche de Johansen (1988) et la méthode de Johansen et Juseluis (1990)
(Anago, 2011). Cependant la mise en œuvre de ces méthodes exige une condition nécessaire est
que les séries soient toutes intégrées d’ordre 1. Or, dans la plupart des séries macroéconomiques
cette condition n’est pas vérifiée. Pour faire face à cette insuffisance, nous faisons appel au
modèle ARDL qui permet de tester l’existence d’une relation de cointégration sans avoir la
contrainte que toutes les variables soient intégrées du même ordre, contrairement aux autres
méthodes.
1. Auto Regressive Distribution Lag

21
CHAPITRE 2. DONNÉES ET MÉTHODOLOGIE DE L’ÉTUDE

1.3.1 Présentation du modèle ARDL

Dans un modèle dynamique, une variable dépendante Yt peut être expliquée à la fois
par :

— Ses propres valeurs décalées. Un tel modèle dynamique est appelé  modèle
autorégressif  (AR) et peut s’écrire :
p
X
Y t = a0 + ai Yt−i + t (1)
i=1

Avec ε ∼ iid(0,σ) : terme d’erreur.

— Des valeurs présentes des variables indépendantes (Xt) et leurs valeurs décalées dans
le temps (Xt−i ). Il s’agit ici des  modèles à retards échelonnés  (DL) qui ont la
forme :
q
X
Yt = β + bj Xt−j + zt (2)
j=0

— Ses propres valeurs décalées, des valeurs présentes des variables indépendantes (Xt )
et leurs valeurs décalées dans le temps (Xt−i ).
Ces types des modèles combinent les caractéristiques de deux modèles précédents et
sont appelés  modèles autorégressifs à retards échelonnés ou distribués , en
anglais  ARDL model . Ci-dessous leurs formes :
p
X q
X
Yt = ρ + ai Yt−i + bj Xt−j + et (3)
i=1 j=0

L’on notera que  b0  traduit l’effet à court terme devXt sur Yt . Pour calculer l’effet à long
terme de Xt surYt (soit ” y ” ), partant de la relation de long terme ou d’équilibre suivante :
P
b
0
Yt = K + γXt + µ , l onf era : γ = Pj
(1 − aj )

Les modèles ARDL, qui héritent les caractéristiques des modèles AR et DL, souffrent
de certains problèmes économétriques qui compliquent leur estimation par les Moindres Carrés
Ordinaires (MCO) : colinéarité entre variables explicatives (modèle DL), autocorrélation des
erreurs (modèle AR), etc. L’on recourt généralement à des techniques d’estimation robustes.
Comme pour tout modèle dynamique, nous nous servirons des critères d’information (Akaike-
AIC, Shwarz-SIC et Hannan-Quin) pour déterminer les décalages optimaux (p,q) du modèle
ARDL.

22
CHAPITRE 2. DONNÉES ET MÉTHODOLOGIE DE L’ÉTUDE

1.3.2 Stationnarité

Stationnarité stricte :

Lorsque les lois de (Xt1 , Xt2 , ..., Xtn ) ne sont pas affectées par translation dans le temps, on
dit que le processus X est strictement stationnaire :

`(Xt1 , Xt2 , ..., Xtn ) = `(Xt1 + k, Xt2 + k, ..., Xtn + k).

Lorsque X est strictement stationnaire, toutes les observations ont la même loi :

`(Xt ) = `(Xt + k).

On peut ignorer cette hypothèse et se concentrer sur les deux premiers moments. Dans ce cas,
on parle de processus stationnaire au sens large.

Stationnarité au sens large :

Le processusX = (Xt )t ∈ Z est stationnaire si :


— l’espérance est stable au cours du temps :

E(X1 ) = E(X2 ) = . . . = E(Xt ) = m.

— la variance est stable au cours du temps :

V (X1 ) = V (X2 ) = . . . = V (Xt ) = σ 2 .

— les covariances sont stables au cours du temps :


Cov(X1 , X1+k ) = Cov(X2 , X2+k ) = . . . = Cov(Xt−k , Xt ) = . . . = Cov(Xt , Xt+k ) =
. . . = γk
Les covariances ne dépendent que du délai k entre les variables considérées, et pas de la
date t à laquelle elles sont évaluées. La plupart des séries économiques sont non stationnaires,
c’est-à-dire que le processus qui les décrit ne vérifie pas au moins une des conditions de la
définition d’un processus stationnaire. Ceci nous conduit à définir deux types de non
stationnarité selon que c’est plutôt la condition portant sur le moment d’ordre 1 qui n’est pas
vérifiée (non stationnarité déterministe) ou les conditions portant sur les moments du second
ordre qui ne sont pas vérifiées (non stationnarité stochastique).

23
CHAPITRE 2. DONNÉES ET MÉTHODOLOGIE DE L’ÉTUDE

Le processus TS :

— On dit que le processus Xt est caractérisé par une non stationnarité déterministe,
ou encore que le processus Xt est TS (Trend stationary) s’il peut s’écrire :
Xt = f (t) + Zt

— Où f (t) est une fonction déterministe qui dépend du temps, par exemple
f (t) = a + bt (cas le plus couramment retenu) etZt est un processus stationnaire.

— Ainsi, ce processus est rendu stationnaire en lui enlevant sa tendance


déterministe :Xt − f (t) = Zt stationnaire.

Le processus DS :

On dit que le processus Xt est caractérisé par une non stationnarité stochastique, ou encore
que le processus Xt est DS (Difference stationnary) si le processus différencié une fois (1 − B)Xt
est stationnaire. On parle aussi de processus intégré d’ordre 1 et on dit que Xt est I(1).
De manière générale, on dit que le processus Xt est un processus intégré d’ordre d, avec d le
degré d’intégration, si le processus différencié d fois (1 − B)dXt est stationnaire. On dit queXt
est I(d).

Tests de racine unitaire : les tests de Dickey-Fuller :

Ces tests permettent à la fois de détecter la non stationnarité et de déterminer sa nature :


DS ou TS, c’est donc la méthode pertinente pour la stationnarisation.
Les tests utilisés afin de détecter la stationnarité sont assez diverses, nous avons opté pour ce
test : Augmented Dicky-fuller (ADF). Pour construire le test, on se base sur les trois modèles
ci-dessous :

— xt = φ1 xt−1 + t : Modèle autorégressif d’ordre 1.

— xt = φ1 xt−1 + β + t : Modèle autorégressif avec constante.

— xt = φ1 xt−1 + bt + c + t : Modèle autorégressif avec tendance.

L’hypothèse H0 du test est : φ1 = 1(le modèle admet une racine unitaire)


Si H0 est retenue dans l’un de ces trois modèles, le processus est alors non
stationnaire.

24
CHAPITRE 2. DONNÉES ET MÉTHODOLOGIE DE L’ÉTUDE

Or, L’estimation de ces modèles suppose que les erreurs ne sont pas corrélées entre
elles. Cependant, cette hypothèse est très forte et on ne la rencontre pas souvent en
pratique. Pour tenir compte du cas contraire, on ajoute dans chacun des modèles
les retards de la différence première de la série. On obtient trois nouveaux modèles :

— ∆xt = ∆φ1 xt−1 + 

— ∆xt = ∆φ1 xt−1 + c + 

— ∆xt = ∆φ1 xt−1 + c + bt + 

Les tests de racine unitaire conduits à partir de ces trois modèles sont appelés test de
Dickey Fuller Augmenté, ils se déroulent de manière similaire aux tests DF simples.
Figure 2.1 – Implémentation du test ADF

Source : Boubonnais R., Econométrie : 9ème édition

25
CHAPITRE 2. DONNÉES ET MÉTHODOLOGIE DE L’ÉTUDE

1.3.3 Concept de cointégration

On dit qu’une série est intégrée d’ordre d (notée I(d)) s’il convient de la différencier d
fois afin de la stationnariser.
Deux séries sont cointégrées si les deux conditions suivantes sont vérifiées :

— Elles sont intégrées du même ordre d ;

— Une combinaison linéaire de ces séries permet de ramener à une série d’ordre
d’intégration inférieur (d-b) tel que d > b > 0.

Figure 2.2 – Graphe illustrant la non cointégration de Xt et Zt

Figure 2.3 – Graphe illustrant la cointégration de Xt et Yt

source :Boubonnais-Econométrie, 9ème édition.

Dans la première figure, les deux séries ne sont pas cointégrées : Elles ont une tendance
d’évolution constante sur une première période mais divergente en une deuxième.
Dans le deuxième cas elles le sont : elles ont une évolution constante sur toute la période.

26
CHAPITRE 2. DONNÉES ET MÉTHODOLOGIE DE L’ÉTUDE

Ecrire un modèle ARDL comme ci-dessus (relation 5) suppose l’existence d’une


relation de cointégration entre les variables qui conditionne même l’estimation des coefficients
de court et long terme de ces variables. La littérature économétrique fournit plusieurs tests de
cointégration dont celui de Engel et Granger (1987), celui de Johansen (1988, 1991) et
Johansen et Juselius (1990), et celui de Pesaran et al. (1996), Pesaran et Shin (1995) et
Pesaran et al. (2001).

Le test de cointégration de Engle et Granger (1991) n’est valide que pour deux
variables intégrées de même ordre (soit ordre d’intégration = 1), il est ainsi moins efficace
pour des cas multivariés. Bien que le test de Johansen pallie à ce souci, fondé sur une
modélisation vectorielle autorégressive à correction d’erreur (VECM), il exige aussi que toutes
les variables soient intégrées de même ordre, ce qui n’est pas toujours le cas en pratique.
Lorsqu’on dispose de plusieurs variables intégrées d’ordres différents (I(0), I(1)), l’on peut
recourir au test de cointégration de Pesaran et al. (2001) appelé  test de cointégration aux
bornes  ou  bounds test to cointegration .

Si l’on recourt au test de cointégration de Pesaran pour vérifier l’existence d’une


relation de cointégration entre les variables dans un modèle ARDL, l’on dira que l’on recourt
à l’approche  ARDL approach to cointegrating  ou le test de cointégration par les retards
échelonnés. Il y a deux étapes à suivre pour appliquer le test de cointégration de Pesaran :

— Détermination du décalage optimal avant tout (AIC, SIC) ;


— Recourir au test de Fisher pour vérifier les hypothèses ( relation 5) :

H0 : b1 = ... = b4 = 0 : Existence d’une relation de cointégration


H1 : b1 = ... = b4 6= 0 : Absence d’une relation de cointégration

La procédure du test est telle que l’on devra comparer les valeurs de Fisher obtenues
aux valeurs critiques (bornes) simulées pour plusieurs cas et différents seuils par Pesaran et al.
L’on notera des valeurs critiques que la borne supérieure (2ème ensemble) reprend les valeurs
pour lesquelles les variables sont intégrées d’ordre 1 I(1) et la borne inférieure (1er ensemble)
concernent les variables I(0).
Ainsi :

— Si Fisher >borne supérieure : Cointégration existe


— Si Fisher<borne inférieure : Cointégration n’existe pas
— Si borne inférieure<Fisher <borne supérieure : Pas de conclusion

Grâce à la procédure de Pesaran et al. (2001), un modèle à correction d’erreur peut


aider à confirmer l’existence ou non de la cointégration entre variables.

27
CHAPITRE 2. DONNÉES ET MÉTHODOLOGIE DE L’ÉTUDE

Mais avant de procéder l’estimation, on doit :

— Déterminer le degré d’intégration des variables (test de stationnarité) : test de Dickey-


Fuller Augmenté/ADF.
— Tester l’éventuelle existence d’une relation de cointégration entre variables : test de
cointégration de Pesaran et al. (2001) ou test de cointégration aux bornes ;
— Tester la causalité entre les variables sous étude : test de causalité au sens de Granger,
test de causalité au sens de Toda et Yamamoto. Par ailleurs, précisons que le modèle
ARDL n’est pas applicable pour des variables intégrées d’ordre > à 1.
Par ailleurs, précisons que le modèle ARDL n’est pas applicable pour des variables intégrées
d’ordre > à 1.

Les résultats des tests et la modélisation ARDL fera l’objet du chapitre 4.

2 Modélisation micro-économétrique

L’analyse de l’impact du vieillissement de la population sur l’épargne des ménages en


termes micro-économiques consistent à utiliser des données individuelles collectées lors des
enquêtes auprès des ménages.

Dans la littérature, il existe peu de travaux qui traitent des déterminants de l’épargne
des ménages vu l’absence des données individuelles. Au Maroc, le HCP mène, depuis 2007 et
ce de manière trimestrielle et permanente, une enquête de conjoncture auprès de quelque 3000
ménages et qui vise notamment à mesurer la capacité, les opportunités et l’intention
d’épargner. Toutefois, nous n’avons pas eu accès à ces données.

Dans le cadre de ce travail, nous utilisons les données tirées de l’Enquête Nationale sur
la Consommation et les Dépenses des Ménages (ENCDM) 2013-2014. En plus des
caractéristiques sur le ménage, il y a une question sur la capacité d’épargner.

2.1 Description de la base de données

2.1.1 Présentation de l’enquête

Le HCP réalise des enquêtes périodiques sur la consommation et les dépenses des
ménages. Ces enquêtes permettent de suivre les niveaux et les conditions de vie de la
population marocaine. L’enquête de 2013/2014 est la cinquième investigation nationale du
genre. Elle vise à collecter les données intégrées qui se rapportent aux dépenses, aux quantités

28
CHAPITRE 2. DONNÉES ET MÉTHODOLOGIE DE L’ÉTUDE

consommées et aux conditions de vie de la population. L’ENCDM fournit des données de base
sur le niveau de vie des ménages, les disparités entre les différentes couches sociales et Régions
du pays et les tendances de la demande des ménages.

2.1.2 Échantillonnage de l’ENCDM

Le plan de sondage de l’enquête s’inscrit dans le cadre de l’ échantillon maı̂tre ,


actualisé suite à la réalisation du Recensement général de la population et de l’habitat de
2004.
Ce plan obéit aux principes d’un sondage stratifié à trois degrés. L’échantillon sélectionné
pour cette enquête comporte 15 970 ménages, soit une fraction de sondage de 1/450.

L’objectif étant de fournir une photographie des dépenses de consommation des


ménages résidant au Maroc, toutes les catégories socio-économiques et les régions sont
représentées dans l’échantillon. L’échantillonnage s’est donc fait dans le temps et dans
l’espace. Pour que cela soit possible, les ménages de l’échantillon ont été également répartis
sur l’ensemble de l’année. Cette répartition dans le temps de l’échantillon exige qu’à chaque
moment, les ménages choisis représentent les diverses catégories et régions du pays.

L’observation effectuée auprès de chaque ménage ne porte pas sur une année entière.
Il faut donc assurer une répartition uniforme des ménages de l’échantillon tout au long de
l’année, afin de prendre en compte des variations amples de certaines consommations annuelles,
avec la saison (fruits, légumes,), l’influence des échéances de certaines dépenses périodiques
(loyer, électricité, eau, frais de scolarité, . . . ) ou encore les dépenses à caractère socioreligieux
(Ramadan, Aı̈d al Adha. . . ). Cette uniformité est nécessaire pour permettre une estimation
correcte des dépenses annuelles, autant que pour saisir l’ampleur de ces variations dans le
courant de l’année (HCP ,2016).

2.1.3 Objectifs de l’ENCDM

L’enquête sur les dépenses des ménages est sans contre dit une enquête à sujets multiples
et vise à collecter des données suffisamment détaillées sur les dépenses et la consommation
alimentaire des ménages en vue :
— D’analyser le niveau et les tendances des dépenses des ménages selon les différentes
fonctions de consommation et les principales caractéristiques socio-économiques et
spatiales des chefs de ménages ;

— D’alimenter les données de la nouvelle année de base 2014 de la Comptabilité


Nationale et la matrice sociale ;

— De mettre à jour le panier de référence de l’Indice des Prix à la Consommation ;

29
CHAPITRE 2. DONNÉES ET MÉTHODOLOGIE DE L’ÉTUDE

— D’actualiser les indicateurs liés aux inégalités et à la pauvreté sous ses différentes
formes ;

— D’actualiser les études sur les aspects nutritionnels et anthropométriques ;

— D’alimenter l’information nationale pour la recherche économique et sociale.

2.1.4 Description générale du questionnaire de l’ENCDM

Le questionnaire de l’enquête est articulé autour de 16 principaux modules qui


permettent de recueillir des données relatives aux individus (caractéristiques démographiques,
scolarité, santé, emploi etc. . . ) ainsi que des données relatives aux ménages (habitat, énergie,
équipements etc. . . ) :

— Caractéristiques sociodémographiques des membres du ménage ;

— Conditions de logements ;

— L’énergie ;

— L’éducation ;

— L’activité économique ;

— La santé ;

— La fertilité ;

— Etude sur les membres du ménage de moins de 5 ans ;

— Transport ;

— Bénéficier des services publics ;

— Les transferts ;

— Les crédits ;

— Les effets sur la situation socio-économique du ménage ;

— Représentation et perception de la pauvreté ;

— Sources de financement du ménage ;

30
CHAPITRE 2. DONNÉES ET MÉTHODOLOGIE DE L’ÉTUDE

— Condition de réalisation de l’enquête.

2.1.5 Approche méthodologique

Dans le cadre du module  sources de financement  , chaque ménage est questionné


dans une question à choix multiples sur sa capacité à :

— Exercer une activité économique

— Avoir un revenu suffisant

— ...

— Vivre convenablement sans faire appel au travail des enfants

— Epargner

C’est cette dernière et unique question sur l’épargne qui sera utilisée ici comme variable
dépendante.

Soulignons que dans l’approche microéconomique, l’unité statistique est le ménage.

2.2 Variables retenues

2.2.1 Variable dépendante

La variable à expliquer Y est binaire telle que :

— Y= 1 si le ménage est capable d’épargner


— Y=0 sinon

2.2.2 Variables explicatives retenues

Notre objectif est de mesurer l’impact net du vieillissement démographique sur la


capacité du ménage d’épargner. Pour cela, et en plus de la variable qui mesure cet aspect,
nous incluons d’autres variables de contrôle qui peuvent avoir un impact sur l’épargne comme
l’activité économique ou le sexe.

31
CHAPITRE 2. DONNÉES ET MÉTHODOLOGIE DE L’ÉTUDE

— Vieillissement démographique : pour la modélisation, nous avons retenu la


variable  part des personnes âgées dans le ménage  comme variable explicative.
C’est notre variable d’intérêt, d’après l’hypothèse de cycle de vie dans laquelle la
structure par âge des individus est un facteur important affectant le comportement
d’épargne des ménages. Selon cette théorie, il existe trois classes d’âges principales,
la première est composée des jeunes avec un revenu faible d’où une épargne
négative, dans la deuxième classe, on aura une épargne élevée pour les individus
dans leurs années de productivité et la troisième classe est composée des personnes
âgées et retraitées dont on attend une épargne négative.

— Milieu de résidence : cette variable est binaire et indique si le ménage réside en


milieu urbain (1) ou rural (0)

— Taille du ménage : cette variable indique le nombre d’individus composant le


ménage et peut affecter négativement son épargne. En effet, plus la taille du
ménage augmente plus les dépenses du chef du ménage augmentent, ce qui diminue
la probabilité qu’un ménage épargne.

— Alphabétisation : cette variable indique si le chef du ménage sait lire et écrire.


Dans un travail de recherche, Abdelkhalek (2012) a montré que cette variable n’a
aucun effet sur l’épargne des ménages. Nous l’avons retenu à toute fin utile afin de
tester si cette variable peut influencer la capacité d’épargne de ménages en présence
ou non des personnes âgées.

— Niveau social : cette variable est la réponse de la question 3 du module 14 du


questionnaire de notre enquête, où le chef du ménage enquêté doit classifier son
ménage dans une classe sociale : ménage. Elle permet de classer le ménage selon
qu’il  très riche ,  relativement riche ,  niveau social moyen ,  relativement
pauvre  ou  très pauvre . Nous faisons l’hypothèse que le niveau social d’un
ménage est un facteur déterminant dans sa décision d’épargner, étant donné le
niveau de vie dépend étroitement des revenus.

— Dépense annuelle des ménages : c’est la somme de toutes les dépenses


effectuées par un ménage au cours de l’année : elle cumule ainsi les dépenses
alimentaires, d’éducation, de santé, d’habillement, d’habitation, d’équipement, de
transport, d’enseignement et les achats d’autres biens et services. Bien évidement la
relation entre les dépenses et l’épargne des ménages est négative, en effet plus un
ménage consomme, plus sa probabilité d’épargne diminuer.

2.3 Méthodes statistiques adoptées

La nature binaire de la variable à expliqué et la présence de variables qualitatives et


quantitatives impliquent l’utilisation d’un modèle logistique binaire. Mais avant de présenter
le modèle, étudions d’abord l’indépendance des variables explicatives retenues.

32
CHAPITRE 2. DONNÉES ET MÉTHODOLOGIE DE L’ÉTUDE

2.3.1 Test de Khi deux

Ce test est intéressant lorsque nous nous intéressons aux relations entre deux variables
nominales ou qualitatives (pour plus de deux variables, il est nécessaire de recourir à une
méthode plus complexe, l’analyse loglinéaire).

Le test de Khi-deux permet de tester l’hypothèse suivante :

ni. ∗n.j
H0 : nij = n
ni. ∗n.j
H1 : nij 6= n

Pour ce faire on utilise la statistique suivante :


m X
n
X (nij − eij )2
U=
eij
i=1 j=1
avec :

— nij : l’effectif des observations appartenant à la classe Ai et à la classe Bi .


Pn
— ni. = j=1 nij :l’effectif des observations appartenant à la classe Ai .
P
— n.j = i=1 mnij : l’effectif des observations appartenant à la classe Bi .
P Pn
— n = i=1 mni. = j=1 n.j : l’effectif total.
Tel que :

U ∼ X 2 de dimension mn-1-(m-1)-(n-1)

2
On rejette l’hypothèse H0 si U > X0,05;mn−1−(m−1)−(n−1)
2
On accepte l’hypothèse H1 si U < X0,05;mn−1−(m−1)−(n−1)

2.3.2 Régression logistique

La régression logistique permet de prévoir la présence ou l’absence d’une


caractéristique ou d’un résultat en fonction d’une variable ou d’un groupe de variables, dites
prédicteurs. Cette technique est utilisée pour des études ayant pour but de vérifier si des
variables indépendantes peuvent prédire une variable dépendante dichotomique.

33
CHAPITRE 2. DONNÉES ET MÉTHODOLOGIE DE L’ÉTUDE

Par ailleurs, les coefficients de la régression logistique peuvent servir à estimer des odds
ratios pour chacune des variables indépendantes d’un modèle.

On parle de régression logistique simple quand-il s’agit d’une seule variable


indépendante, mais généralement, les modèles de régression logistique comprennent plus d’une
variable indépendante : Il s’agit dans ce cas de la régression logistique multiple.

Spécification du modèle

Les équations du modèle La régression logistique sert à modéliser la relation entre


des prédicteurs catégoriels ou continus X = (X1 ; X2 ; :::; Xk ) et une variable réponse binaire Y
(qui prend les valeurs : 0 en cas de non occurrence de l’évènement et 1 s’il y a occurrence.).
On note π la probabilité d’observer l’événement Y = 1 (vs. 0). L’Objectif est de modéliser :

π(x) = p(Y = 1|X1 , X2 , . . . , Xk )

Le modèle linéaire
π(x) = β0 + β1 X1 + ... + βk Xk (1)
ne convient pas lorsque l’une des variable indépendantes Xi est continue (on peut avoir des
valeurs négatives ou supérieures à 1). On cherche alors une transformation f (x) assurant que
la probabilité (que l’on va noter p)varie entre 0 et 1. On applique la fonction logistique :

eπ(x)
p = f (x) =
1 + eπ(x)
On introduit alors la transformation Logit qui peut s’exprimer comme une fonction linéaire des
paramètres du modèle à k prédicteurs :
p
logit(p) = ln( )
1−p

L’équation (1) devient alors :


p
π(x) = logit(p) = ln( ) = β0 + β1 X1 + .... + βk Xk
1−p

D’où l’équation de la probabilité prédite :

eβ0 +β1 X1+....+βk Xk


p(Y = 1|X1 , X2 , . . . , Xk ) =
1 + eβ0 +β1 X1+....+βk Xk

La méthode de modélisation

34
CHAPITRE 2. DONNÉES ET MÉTHODOLOGIE DE L’ÉTUDE

La régression logistique peut s’effectuer de diverses façons. Les méthodes utilisées sont : la
méthode entrée, la méthode ascendante conditionnelle, la méthode ascendante rapport de
vraisemblance, la méthode ascendante Wald, la méthode descendante conditionnelle, la
méthode descendante rapport de vraisemblance et la méthode descendante Wald.

Significativité des prédicteurs :

On utilise le test de Wald déterminer l’apport de chaque prédicteur à l’amélioration du


modèle, Ce test a le même rôle que le test-t dans la régression linéaire .
La statistique de Wald s’écrit comme suit :

βˆj
Wj =
c βˆj )
SE(
c βˆj ) : c’est la valeur lue sur la diagonale principale de la matrice de variance-covariance
SE(
des coefficients estimé.

Mesure de la qualité de la modélisation

Test de Hosmer & Lemeshow

Ce test évalue la présence de différences significatives entre les valeurs observées et les
valeurs prédites pour chaque sujet. Nous cherchons évidemment à ce qu’il ne soit pas
significatif. Par contre, il est très sensible à la taille de l’échantillon. De plus, il ne peut pas
être calculé lorsque le modèle ne comprend qu’un prédicteur dichotomique.

En effet, il est une statistique de qualité d’ajustement calculée à partir de la table de


contingence (g × 2)(où g représente le nombre de groupes) des effectifs observés et théoriques,
Cette statistique est comparée à une distribution du chi-deux à g-2 degrés de liberté Ce test
consiste à tester l’hypothèse nulle H0 qui suppose que le modèle est compatible avec les données.
Statistique du test :
g
2
X (oj − Nj π¯j )2
χHL =
Nj ∗ π¯j (1 − π¯j )
j=1

Avec :
Nj :est le nombre d’observation du j-ième groupe.
Oj :est le nombre de réponses du j-ième groupe.
π¯j : est la moyenne des probabilités prévues dans le j-ième groupe.
On ne rejette pas H0 si la p-value est supérieure au risque usuel de 5% et on conclut que le

35
CHAPITRE 2. DONNÉES ET MÉTHODOLOGIE DE L’ÉTUDE

modèle est compatible avec les données.

Test de khi-deux ou Test LRT (Likelihood ratio test)

L’hypothèse de test :

H0 : β1 = β2 = ... = βp = 0 Vs H1 : il existe βj 6= 0

Donc ce test consiste à comparer le modèle complet avec le modèle constitué


uniquement de la constante.
La statistique du test :

Λ =-2 [log(L(Modéle simplifié))-Log(L(Modéle complet)]

On rejette H0 au risque α si :
Λ ≥ χ21−α [k] où k : nombres de paramètres dans le modèle .

Les valeurs des pseudoR2 :

R2 de Cox & Snell

Il est calculé à partir de la formule suivante :


l(cte) 2/n
R2 = 1 − [ ]
l(cte, X)
On voit que le R2 de Cox & Snell est basé sur la log-vraisemblance du modèle comparée
(L(Cste, X)) avec celle d’un modèle constant (L(Cste)).
Il n’atteint jamais le maximum théorique de 1 (il ne peut pas dépasser le R2 max) et varie en
fonction de la taille de l’échantillon.
Avec M axR2 = 1 − [l(cte)]2/n

R2 de Nagelkerke

Le R2 de Nagelkerke est une modification du R2 de Nagelkerke pour obtenir une valeur


2
théorique plus près de 1. Il est présenté par le quotient RRmax
2 qui prend des valeurs dans
l’intervalle [0; 1].
2 R2
Radj = 2
Rmax

36
CHAPITRE 3

ÉPARGNE DES MÉNAGES ET


VIEILLISSEMENT DE LA
POPULATION : NIVEAUX ET
TENDANCES RÉCENTES

Ce chapitre est consacré à l’étude de la situation actuelle et des tendances les plus
récentes concernant l’épargne des ménages d’un côté et du vieillissement démographique de
l’autre. Nous privilégions une analyse comparative avec d’autres pays. Les données utilisées
sont celles publiées dans les études, rapports et sites spécialisées, principalement par le HCP
et la DEFP.

1 Structure et évolution de l’épargne des ménages

Analysons d’abord le taux d’épargne des ménages qui représente, rappelons-le, la part
(%) de l’épargne des ménages (EM) dans le Revenu National Brut Disponible (RNBD).

37
CHAPITRE 3. ÉPARGNE DES MÉNAGES ET VIEILLISSEMENT DE LA POPULATION : NIVEAUX ET TENDANCES
RÉCENTES

1.1 Comparaison internationale

L’analyse comparative des taux d’épargne des ménages (TEM) au sein d’un certain
nombre de pays du Nord et du Sud (figure 3.1) montre que les taux présentent de fortes
disparités et ne dépendent pas du niveau du développement du pays.

Figure 3.1 – Taux d’épargne des ménages (%), dans quelques pays du Monde, année 2017

Source : Elaboré par nos soins, Données DEPF, 2018

Ainsi, la Suède vient en première position avec un taux de 18,7%, suivie de l’Allemagne
(17%), de la France (14,6%), de la Belgique (13,9%). Le Maroc - très proche d’ailleurs du
niveau des Pays-Bas (12,7%) - et la Tunisie occupent une place intermédiaire élevée avec
respectivement 12,5% et 10,9%.

Le TEM au Maroc est ainsi plus élevé en comparaison avec les pays concurrents comme
la Tunisie (10,9%), l’Italie (10,4%), l’Espagne (8,2%) et l’Afrique du Sud (1,3%) et même du
Royaume-Uni.

Pour mieux apprécier l’évolution de l’épargne des ménages, il faut la placer par rapport
aux autres indicateurs macroéconomiques.

38
CHAPITRE 3. ÉPARGNE DES MÉNAGES ET VIEILLISSEMENT DE LA POPULATION : NIVEAUX ET TENDANCES
RÉCENTES

1.2 Evolution et structure de l’épargne nationale

Les données sur l’Epargne Nationale Brute (ENB), calculée sur la base des prix de
2007, montrent (figure 3.2) que depuis 1980, le RNBD a connu une augmentation soutenue et
irréversible, passant de 87,65 milliards de DH à 1039,81 milliards de DH en 2015, soit une
croissance globale de près de 11% au cours de cette période. Pendant ce temps, l’épargne
nationale a augmenté de 20,66 milliards de DH à 278,12 milliards de DH. Et bien que sa
croissance soit globalement un peu plus élevée (12,5%), cet indicateur a fait l’objet de
fluctuations assez importantes. Ce qui pose la question de savoir si l’hypothèse du cycle de vie
et ses diverses vérifications empiriques, selon lesquelles l’épargne suit la croissance du revenu,
se reproduisent au Maroc.

La croissance du RNBD a été plus rapide que celle de l’épargne nationale. L’écart
creusé par la consommation est devenu ainsi de plus en plus large comme on le voit sur le
graphique. Ce qui laisse supposer que l’augmentation du revenu de 1% ne sera pas suivie de
celle de l’épargne dans les mêmes proportions.

Figure 3.2 – Evolution du RNBD et de l’ENB en millions de DH (base 2007), Maroc, 1980-2015

Source : Elaboré par nos soins, données www.hcp.ma

Par ailleurs, selon une publication du Ministère de l’Economie et des Finances (2014), en
2012, l’épargne nationale brute a enregistré une baisse notable et s’est établie à 216 milliards
de dirham (MMDH) contre 228 MMDH en 2011, soit une baisse de 6% en 2012 après avoir
reculé de 4% en 2011.Sa part dans le PIB a baissé de 2,5 points pour se situer à 25,3% en 2012
contre 27,9% en 2011.

39
CHAPITRE 3. ÉPARGNE DES MÉNAGES ET VIEILLISSEMENT DE LA POPULATION : NIVEAUX ET TENDANCES
RÉCENTES

Figure 3.3 – Evolution du RNBD et de l’ENB en millions de DH (prix courants), Maroc,


1980-2015

Source : Elaboré par nos soins, données www.hcp.ma

Cette diminution est attribuable, en partie, à la baisse de l’épargne extérieure qui


s’établit en 2012 à 35,5 MMDH contre 40,6 MMDH en 2011, en baisse de 12,9% après un
recul de 0,2% en lien, notamment avec le repli des transferts des marocains résidents à
l’étranger. Les transferts de ces derniers ont baissé de 3,8% pour se situer à 56,3 MMDH après
avoir augmenté de 7,8% en 2011 à 58 ,6 MMDH.

Figure 3.4 – Evolution de la structure de l’épargne en termes absolus (en millions de DH, prix
courants), Maroc, 1998-2017

Source : Elaboré par nos soins, Données DEFP, 2018

En conséquence, l’épargne extérieure, qui représentait 5,3% du PIB en 2010 et 5,1% en


2011, est passée à 4,3% en 2012, ramenant sa part an niveau de l’épargne nationale à 16 ,9%
en 2012 contre 18,1% en 2011 et 17,5% en 2010.

40
CHAPITRE 3. ÉPARGNE DES MÉNAGES ET VIEILLISSEMENT DE LA POPULATION : NIVEAUX ET TENDANCES
RÉCENTES

De même, l’épargne intérieure a été contractée en enregistrant une baisse de 4,8% pour
se situer en 183,3 MMDH, soit le même niveau qu’en 2011, ramenant sa part dans le PIB à
21,1% en 2012 au lieu 22,8% en 2011. La détérioration de l’épargne intérieure est imputable
au recul de l’épargne publique, représentée par le solde ordinaire de Trésor, qui a enregistré
un solde de -20 MMDH après -7,6 MMDH en 2011, quant à l’épargne privée, elle a enregistré
une baisse de 12,1% après un recul de 4,6% en 2011, ramenant ainsi sa part dans le PIB de
22,8% en 2011 à 21,1% en 2012.

En somme, la baisse très marquée des différentes composantes de l’épargne nationale a


ramené son niveau global en dessous du niveau d’investissement, soit un besoin de
financement de l’économie de 10% du PIB en 2012 contre 8,1% en 2011, confirmant la
tendance du déséquilibre.

Figure 3.5 – Evolution de la structure (%) de l’épargne en termes (en millions de DH, prix
courants), Maroc, 1998-2017

Source : Elaboré par nos soins, Données DEFP, 2018

Au sein de l’économie domestique, plusieurs catégories d’agents particpent à la


constitution de l’épargne nationale brute : les ménages, les sociétés financières, les sociétés
non financières et les adminstrations publiques.

Le graphique ci-dessous présente la répartition de l’épargne par secteur institutionnel,


montre que les sociétés non financières et les ménages participent le plus à la constitution de
l’épargne nationale dont les parts respectives dans le total de l’épargne brute sont passées de
10,6% et 8,7% en moyenne entre 2007 et 2011 à 14,1% et 10,1% en moyenne entre 2012 et 2017
suivies par les administrations publiques et les sociétés financières.

41
CHAPITRE 3. ÉPARGNE DES MÉNAGES ET VIEILLISSEMENT DE LA POPULATION : NIVEAUX ET TENDANCES
RÉCENTES

Figure 3.6 – Structure (%) de l’ENB (en millions de DH, prix courants) par type d’institution,
Maroc, 2007-2017

Source : Elaboré par nos soins, Données DEFP

1.3 Evolution de l’épargne financière et non financière des ménages

Le graphique ci-dessous présente l’évolution de l’épargne financière et non financière


des ménages au Maroc entre 1998 et 2017.

Selon ce graphique on constate que l’investissement immobilier est le placement préféré


chez les ménages marocains : entre 2006 et 2015, 12 à 14% de leurs revenus disponibles brute
sont consacrés à l’achat d’un logement.

La baisse du taux d’épargne des ménages est imputable au recul de leur taux d’épargne
financière, rapport de leur capacité au revenu disponible brut (RDB), qui s’est situé à 0,5% en
2016 après 2% en 2016 et 1,1% en moyenne entre 2011 et 2015. [DEPF,2018]

Figure 3.7 – Evolution de l’épargne financière et non financière des ménages

Source : DEPF

42
CHAPITRE 3. ÉPARGNE DES MÉNAGES ET VIEILLISSEMENT DE LA POPULATION : NIVEAUX ET TENDANCES
RÉCENTES

2 Tendances récentes et perspectives du vieillissement


démographique

2.1 Vieillissement démographique dans le monde

La population mondiale vieillit : les personnes âgées sont de plus en plus nombreuses et
constituent une part croissante de la population dans presque tous les pays, ce qui a des
conséquences sur pratiquement tous les secteurs de la société, y compris les marchés du travail
et les marchés financiers, la demande de biens et de services tels que le logement, transports
et protection sociale, ainsi que les structures familiales et les liens intergénérationnels.

Se préparer aux mutations économiques et sociales liées au vieillissement de la


population est donc essentiel pour tenir l’engagement du Programme de développement
durable à l’horizon 2030 mis en place par les Nations-Unies en 2015 (Nations-Unies, 2015).
Les personnes âgées étant considérées généralement parmi les populations les plus vulnérables
comme les enfants et les femmes, les tendances du vieillissement de la population sont
particulièrement pertinentes pour les objectifs de développement durable (ODD) liés à
l’élimination de la pauvreté, à la promotion de la santé, à l’égalité des sexes, à l’emploi et aux
établissements humains durables, ainsi qu’à la réduction des inégalités dans et entre les pays.

L’effectif de la population âgée au niveau mondial ne cesse d’augmenter, selon les


dernières perspectives démographiques réalisées par les Nations-Unies en 2017 (figure 3.8). Il
est passé ainsi de 200 millions d’individus en 1950 à 906 millions en 2015 et montera à 1,73
milliards en 2040 puis à 2,55 milliards en 2070 avant d’attendre quelque 3,32 milliards à
l’horizon 2100.

Figure 3.8 – Evolution des effectifs de la population âgée de 60 ans et plus, Monde, 1950-2100

Source : Elaboré par nos soins, données Nations-Unies, 2017

43
CHAPITRE 3. ÉPARGNE DES MÉNAGES ET VIEILLISSEMENT DE LA POPULATION : NIVEAUX ET TENDANCES
RÉCENTES

Cette tendance à la hausse caractérise également le poids que les personnes âgées
représentent au sein de la population totale (figure 3.9) : 8% en 1950, 12,3% en 2015 puis
24,1% en 2070 et 28,2% en 2100.

Figure 3.9 – Evolution de la part (%) des personnes âgées de 60 ans et +, Monde, 1950-2100

Source : Elaboré par nos soins, données Nations-Unies, 2017

Toutefois, on peut noter des différences cruciales entre les grandes Régions du Monde
(figure 3.10). Ainsi, en 2017, c’est dans les pays développés que le poids des personnes âgées
est beaucoup plus élevé : 25% en Europe et 22% en Amérique du Nord. A la même date, cette
catégorie de la population ne représente que 12% en Amérique Latine et en Asie et seulement
5% en Afrique.

44
CHAPITRE 3. ÉPARGNE DES MÉNAGES ET VIEILLISSEMENT DE LA POPULATION : NIVEAUX ET TENDANCES
RÉCENTES

Figure 3.10 – Part des personnes âgées, Grandes Régions du Monde, 2017

Source : Nations-Unies, 2017

Ce bouleversement démographique que connait la population mondiale peut être


analysé également à travers la pyramide des âges du Monde. Le graphique (figure 3.11)
montre que la forme de la pyramide a connu et connaitra des changements profonds durant la
période 1950-2100. D’une forme à base large ou de parasol en 1950, caractérisant une
population très jeune, la tendance est vers un étirement vers le haut, créant ainsi une
pyramide en forme de pagode, ce qui confirme une population de plus en plus âgée.

Figure 3.11 – Évolution de la pyramide des âges du Monde, 1950-2100

Source : www.populationpyramid.net

45
CHAPITRE 3. ÉPARGNE DES MÉNAGES ET VIEILLISSEMENT DE LA POPULATION : NIVEAUX ET TENDANCES
RÉCENTES

2.2 Vieillissement démographique au Maroc

En presque soixante ans, le Maroc a connu des mutations assez conséquentes sur le
plan démographique. La population a triplé entre 1960 et 2019, passant de 11,6 millions à 35,6
millions. Elle sera, d’après les projections du HCP de 43,56 millions en 2050. Le Maroc a connu
sa transition démographique atteignant aujourd’hui la fin de la troisième phase de ce processus
(figure 3.12). Le TBN est passé de 52,5‰ en 1960 à 18,8‰ en 2010. Quant au TBM, il a baissé
de 10,7‰ à 5,6‰ . La croissance démographique a décéléré puisque le TA a connu une baisse
importante passant de 2,74% à 1,32% durant la même période de référence.

Figure 3.12 – Evolution des taux bruts de natalité (TBN), de mortalité (TBM ) et
d’accroissement naturel (TA), Maroc, 1960-2010, en ‰

Source : Elaboré par nos soins, données www.hcp.ma

Un autre indicateur de cette transition démographique est l’espérance de vie à la


naissance. Là encore, nous constatons un changement important comme le montre le
graphique (figure 3.13) . Si vers le début des années 1950, un marocain espérait vivre 45,7 ans
en moyenne à la naissance, aujourd’hui, cette espérance est de 76 ans et atteindra 89 ans à
l’horizon 2100.

L’amélioration dans la survie bénéficie autant aux hommes qu’aux femmes avec un
léger avantage au profit de ces dernières.

Du côté de la fécondité, le deuxième facteur de la transition, nous relevons une baisse


notable du nombre d’enfants par femme (figure 3.14). Alors que vers le début des années
1960, une femme mettait au monde 7,2 enfants en moyenne, au début des années 2010, ce
nombre a régressé pour atteindre le niveau du remplacement (2,2). La baisse, si elle a marqué
les deux milieux de résidence, est plus spectaculaire en milieu urbain (de 7,8 à 1,8
enfants/femme durant la même période) qu’en milieu rural (6,9 à 2,6).

46
CHAPITRE 3. ÉPARGNE DES MÉNAGES ET VIEILLISSEMENT DE LA POPULATION : NIVEAUX ET TENDANCES
RÉCENTES

Figure 3.13 – Evolution des taux bruts de natalité (TBN), de mortalité (TBM ) et
d’accroissement naturel (TA), Maroc, 1960-2010, en ‰

Source : Elaboré par nos soins, données Nations-Unies, 2017

Figure 3.14 – Evolution de l’indice synthétique de fécondité (ISF) par milieu de résidence

Source : Elaboré par nos soins, données www.hcp.ma

En conséquence, des changements profonds ont caractérisé la structure de la


population par âge.

Comme le montre le graphique 13, la tranche des personnes âgées de plus de 60 ans

47
CHAPITRE 3. ÉPARGNE DES MÉNAGES ET VIEILLISSEMENT DE LA POPULATION : NIVEAUX ET TENDANCES
RÉCENTES

passe de 7,2% de la population totale en 1960 à près de 11% actuellement et à 23,2% en 2050.
En même temps, la population active, celle âgée entre 15 et 59 ans, passerait de 48,4% de la
population totale à 58,9%.

Figure 3.15 – Structure (%) de la population du Maroc par grands groupes d’âges, 1960-2050

Source : Elaboré par nos soins, données www.hcp.ma

L’analyse de la tendance passée et future de la structure par sexe relative la population


âgée au Maroc (figue 3.16) indique que les femmes et les hommes avaient pratiquement le
même poids au cours des années récentes. Cependant au fil du temps, les femmes seront plus
nombreuses que leurs homologues masculins avec un poids de presque 54% en 2050, un poids
similaire à celui qu’elles avaient dans les années 1960. Ceci sera dû à l’espérance de vie à la
naissance légèrement plus avantageuse pour les femmes.

En revanche, la structure par milieu de résidence (figure 3.17) montre que les personnes
âgées seront de plus concentrées dans les villes où elles représenteront à l’horizon 2050 plus
des trois quarts. Et bien qu’en 2019, le poids des personnes âgées soit de 64,1% en milieu
urbain, il faut noter qu’en 1960, ce sont les zones rurales qui abritaient le plus de personnes de
plus de 60 ans avec un pourcentage de 76,5%. La situation va donc vers un inversement total.

48
CHAPITRE 3. ÉPARGNE DES MÉNAGES ET VIEILLISSEMENT DE LA POPULATION : NIVEAUX ET TENDANCES
RÉCENTES

Figure 3.16 – Evolution de la structure par sexe (%) de la population âgée, Maroc, 2014-2050

Source : Elaboré par nos soins, données www.hcp.ma

Figure 3.17 – Structure par milieu de résidence (%) de la population âgée, Maroc, 1960-2050

Source : Elaboré par nos soins, données www.hcp.ma

Le ratio de dépendance des personées âgées, qui mesure le rapport entre le nombre de
personnes âgées de 60 ans et plus, qui normalement désépargnent, et le nombre de personnes
en âge de travailler (15-59 ans révolus), passe de 14,8% en 1960 à 17,3% en 2019 puis à 39,3%
en 2050, selon les prévisions des différentes caisses de retraites (figure 3.18). Ce qui signifie que
si 100 actifs prenaient en charge globalement 15 personnes âgées en 1960, aujourd’hui ils ont
en charge 17 et cet effectif s’élèvera à près de 25 personnes âgées en 2030 et à 39 en 2050.

49
CHAPITRE 3. ÉPARGNE DES MÉNAGES ET VIEILLISSEMENT DE LA POPULATION : NIVEAUX ET TENDANCES
RÉCENTES

Figure 3.18 – Évolution du ratio de dépendance des âgées (%), Maroc, 1960-2050

Source : Elaboré par nos soins, données www.hcp.ma

L’indice de vieillissement, qui nous donne une vision claire sur le vieillissement car il
compare l’évolution de la population âgée à celle jeune, n’a pas cessé d’augmenter en passant
de 16,14 à 129,3 durant la période entre 1960-2050, comme montre le graphique (figure 3.19).

Figure 3.19 – Évolution de l’indice de vieillissement, Maroc (%), 1960-2050

Source : Elaboré par nos soins, données www.hcp.ma

En conséquence, nous remarquons un changement également dans la pyramide des âges


durant la période 1960-2050, caractérisé par une base plus large (forte natalité) en 1960 avant
que l’étirement vers le haut ne s’enclenche.

50
CHAPITRE 3. ÉPARGNE DES MÉNAGES ET VIEILLISSEMENT DE LA POPULATION : NIVEAUX ET TENDANCES
RÉCENTES

Figure 3.20 – Évolution de la pyramide des âges du MAROC : 1960-2050

Source : Elaboré par nos soins, données www.hcp.ma

Les bouleversements démographiques, passés, en cours et projetés au Maroc, vont


probablement affecter l’environnement macro-économique et financier dans les décennies à
venir. Nous tenterons dans le chapitre suivant de mesurer l’impact du vieillissement
démographique sur l’épargne des ménages selon deux approches.

51
CHAPITRE 4

ANALYSE DE L’IMPACT DU
VIEILLISSEMENT SUR L’ÉPARGNE

Nous présentons dans ce chapitre les résultats des analyses d’impact du vieillissement
démographique sur l’épargne des ménages selon deux approches : macro et micro.

1 Approche macro-économétrique

Rappelons que dans la modélisation fondée sur les variables macroéconomiques, les
variables sont des séries temporelles.

Toute l’analyse macro est réalisée avec le logiciel Eviews.

1.1 Présentation des variables

Le tableau ci-dessous décrit les variables explicatives et la variable dépendante ainsi


que l’effet attendu. Ainsi, le  rapport de dépendance , noté RD, qui est notre variable
indépendante clé décrivant le niveau du vieillissement démographique au niveau national,
devrait influencer de manière négative la variable à expliquer, à savoir le taux d’épargne des
ménages, notée ici TEM.

52
CHAPITRE 4. ANALYSE DE L’IMPACT DU VIEILLISSEMENT SUR L’ÉPARGNE

Figure 4.1 – Variables utilisées

Source : élaboré par nos soins

Selon le tableau (figure 4.2), le TEM varie autour d’une moyenne de 9,85%, avec un
minimum de 7,39% et un maximum de 15,54%. Le graphique 1 indique qu’après une tendance
assez linéaire au cours des années 1980 et 1990, le TEM a connu une brusque augmentation
entre 2000 et 2001, en passant de 7,5% à 15,54% avant de se stabiliser durant les années
suivantes autour de la moyenne. Ceci peut s’expliquer par le fait que le revenu disponible d’un
ménage utilisé dans le calcul du taux d’épargne comprend les revenus d’activité, ainsi que les
revenus du patrimoine, les transferts en provenance d’autres ménages et les prestations
sociales.

Or, en 2001, les transferts ont enregistré un niveau record (36,86 milliards de dirhams)
avec une appréciation de plus de 60% par rapport à l’année 2000, sous le double effet de
la dévaluation (5%) résultant de la révision du panier de devises servant de référence à la
détermination du taux de change, d’une part, et de l’effet du passage à l’euro, d’autre part
(SEFRIOUI,2005).

Figure 4.2 – Statistique descriptives

Source : élaboré par nos soins

53
CHAPITRE 4. ANALYSE DE L’IMPACT DU VIEILLISSEMENT SUR L’ÉPARGNE

Figure 4.3 – Représentation graphique des variables

Source : élaboré par nos soins

1.2 Stationnarité des séries

Avant de procéder à la modélisation du taux d’épargne en fonction des variables


explicatives retenues, il est nécessaire d’aborder la question de la stationnarité des séries
temporelles utilisées. Pour ce faire, nous utilisons le test de Dickey-Fuller Augmenté (ADF).
(Voir annexe A)

Figure 4.4 – Résumé du test de stationnarité ADF

Source : élaboré par nos soins

54
CHAPITRE 4. ANALYSE DE L’IMPACT DU VIEILLISSEMENT SUR L’ÉPARGNE

— ∗ : zivot-andrew unit root test 1

— ∗ ∗ : significative à 10%, mais on accepte 5% car la statistique calculée n’est pas


largement supérieure à -2.951125.

Nous remarquons que les séries TEM, TAP, INF et E0 sont intégrées d’ordre 0
(stationnaires), alors que la série RD est intégrées d’ordre 1 (stationnaire après la première
différence). Les séries sont ainsi intégrées à des ordres différents, ce qui rend inefficace le test
de cointégration de Engle et Granger (cas multivarié) et celui de Johansen, et rend opportun
le test de cointégration aux bornes (Pesaran, 2001).

1.3 Corrélation entre les variables

Dans les modèles DL et ARDL, la multicolinéarité est un problème qui survient


lorsque certaines variables de prévision du modèle mesurent le même phénomène.

Une multicolinéarité prononcée s’avère problématique, car elle peut augmenter la


variance des coefficients de régression et les rendre instables et difficiles à interpréter.

La multicolinéarité n’a aucune incidence sur l’adéquation de l’ajustement, ni sur la


qualité de la prévision. Cependant, les coefficients individuels associés à chaque variable
explicative ne peuvent pas être interprétés de façon fiable 2 .

Figure 4.5 – Matrice de corrélation entre les variables

Source : élaboré par nos soins

Nous relevons d’après le tableau (figure 4.5) que :

— la corrélation entre le rapport de dépendance démographique et l’espérance de vie à


la naissance est positive et très élevée car les deux variables représentent le même
phénomène (vieillissement démographique) ; la corrélation entre le rapport de
1. [Zivot et Andrews [1992] proposent un test de racine unitaire avec une rupture endogène.
L’hypothèse nulle suppose que la série présente une racine unitaire mais sans aucune rupture.] (Bassil,
2012).
2. http ://larmarange.github.io/analyse-R/multicolinearite.html

55
CHAPITRE 4. ANALYSE DE L’IMPACT DU VIEILLISSEMENT SUR L’ÉPARGNE

dépendance démographique et l’inflation est négative et aussi très élevée. Ce


résultat était trouvé aussi par plusieurs chercheurs comme Katagari, Konishi &
Ueda (KKU) de l’Université Waseda au Japon, KKU estiment que l’impact du
vieillissement sur le taux d’inflation dans le cas du Japon a été de -0.6% par année
au cours des 40 dernières années.

L’introduction des deux variables INF et E0 dans l’estimation peut causer des problèmes
de mulicollinéarité, donc nous allons les éliminer.

1.4 Test de cointégration de Pesaran et al. (2001)

Nous avons signalé que le test de cointégration aux bornes de pesaran et al. (2001)
était adapté pour nos séries. Aussi, rappelons qu’il y a deux étapes à suivre pour appliquer le
test de cointégration de Pesaran :

— Déterminer le décalage optimal avant tout (AIC, SIC) ;

— Recourir au test de Fisher pour tester la cointégration entre séries.

1.4.1 Décalage optimal et estimation du modèle ARDL

Nous allons nous servir du critère d’information de Schwarz (SIC) pour sélectionner le
modèle ARDL optimal, celui qui offre des résultats statistiquement significatifs avec les moins
des paramètres.

Ci-dessous, nous présentons les résultats d’estimation du modèle ARDL optimal


retenu. Le modèle ARDL (1, 4, 2) estimé est ainsi :

— globalement bon et explique 83% la dynamique du TEM, de 1981 à 2017 ;


— le plus optimal parmi les 19 autres présentés, car il offre la plus petite valeur du SIC.

56
CHAPITRE 4. ANALYSE DE L’IMPACT DU VIEILLISSEMENT SUR L’ÉPARGNE

Figure 4.6 – Modèle ARDL (1, 4, 2)

Source : élaboré par nos soins

Figure 4.7 – Schwarz Criteria (top 20 models)

Source : élaboré par nos soins

57
CHAPITRE 4. ANALYSE DE L’IMPACT DU VIEILLISSEMENT SUR L’ÉPARGNE

1.4.2 Test de cointégration aux bornes

Le test de cointégration de Pesaran et al.(2001) exige que le modèle ARDL soit estimé
au préalable. La statistique du test calculée, soit la valeur F de Fisher, sera comparée aux
valeurs critiques (qui forment des bornes) comme suit :

— Si Fisher >borne supérieure : Cointégration existe

— Si Fisher <borne inférieure : Cointégration n’existe pas

— Si borne inférieure<Fisher <borne supérieure : Pas de conclusion

Figure 4.8 – Résultats du test de cointégration de Pesaran et al. (2001)

Source : élaboré par nos soins

Les résultats du test de cointégration aux bornes confirment l’existence d’une relation
de cointégration entre les séries sous étude (15,14 est > à 4,85), ce qui donne la possibilité
d’estimer les effets de long terme de TAP et RD sur TEM.

1.5 Test de causalité :

Dans cette partie, nous allons tenter de déterminer les relations de causalité qui
existent entre nos variables explicatives et le taux d’épargne des ménages.

Lorsque les variables non stationnaires ne sont pas cointégrées ou sont intégrées à des
ordres différents, le test de causalité de Granger traditionnel devient inefficace. Dans ce cas, l’on
recourt au test de causalité au sens de Toda-Yamamoto (1995) qui est basé sur la statistique
 W  de Wald, celle-ci est distribuée suivant un khi-deux. L’hypothèse nulle stipule l’absence

de causalité entre variables (probabilité > 5%).

58
CHAPITRE 4. ANALYSE DE L’IMPACT DU VIEILLISSEMENT SUR L’ÉPARGNE

Figure 4.9 – Décalage optimal du VAR

Source : élaboré par nos soins

Nous relevons que :

— Le décalage optimal du var selon SC est : k=3


— L’ordre d’intégration maximale des séries sous études est : dmax=1

Figure 4.10 – Résumé du test de causalité au sens de Toda-Yamamoto

Source : élaboré par nos soins

D’après les résultats du tableau ci-dessous, les deux variables causent effectivement le taux
d’épargne des ménages au niveau de significativité de 10%.

59
CHAPITRE 4. ANALYSE DE L’IMPACT DU VIEILLISSEMENT SUR L’ÉPARGNE

1.6 Tests de validation du modèle

D’après la figure ci-dessus, toutes les composantes se trouvent dans l’intervalle de


confiance, soit donc toutes significativement nulles. Le résidu est donc un bruit blanc.
Assurons-nous avec les tests statistiques.

Figure 4.11 – Corrélogramme du résidu

Source : élaboré par nos soins

1.6.1 Test autocorrélation : Test de Breusch-Godfrey

Ce test repose sur les hypothèses :

— H0 :Les autocorrélations sont nulles


versus
— H1 : Il y a au moins une autocorrélation non nulle.

Le test est basé sur les statistiques de Fisher ou du multiplicateur de Lagrange LM.

60
CHAPITRE 4. ANALYSE DE L’IMPACT DU VIEILLISSEMENT SUR L’ÉPARGNE

Figure 4.12 – Test de Breusch-Godfrey

Source : élaboré par nos soins

Comme l’indique le tableau, la p-value associée à la statistique de Fisher est supérieure


à 5%. Donc nous pouvons accepter l’hypothèse d’absence d’auto corrélation des erreurs.

1.6.2 Test d’hétéroscédasticité : Test d’ARCH

Les hypothèses du test sont :


— H0 : homoscédasticité
vs
— H1 : hétéroscédasticité.

Figure 4.13 – Test d’ARCH

Source : élaboré par nos soins

Il ressort que la probabilité associée à la statistique TR² est supérieure au seuil de 5%. Alors
on accepte l’hypothèse d’homoscédasticité.

1.6.3 Test de normalité : Test de Jarque-Bera

Les hypothèses du test sont :


— H0 : les erreurs suivent une loi Normale
vs
— H1 : les erreurs ne suivent pas une loi Normale

61
CHAPITRE 4. ANALYSE DE L’IMPACT DU VIEILLISSEMENT SUR L’ÉPARGNE

Figure 4.14 – Test de Jarque-Bera

Source : élaboré par nos soins

D’abord la moyenne des résidus est quasi-nulle (Mean=1.21e-16). Les résidus sont donc
centrés.

La p-value associée à la statistique de Jarque-Bera est supérieure à 5%. Nous acceptons


donc l’hypothèse nulle de la normalité des résidus.

Les résidus du modèle sont donc des bruits blancs gaussiens.

1.6.4 Test de stabilité : Test de Cusum

Afin de s’assurer de la stabilité des coefficients, on fait appel au test de CusumSquared.


Ce test est un test graphique de détection des points d’instabilité. Si la courbe du test sort
des deux bandes rouges cela indique l’existence d’un point d’instabilité.

Comme l’illustre le graphe ci-dessous, notre modèle ne possède aucun point


d’instabilité structurelle des coefficients.

Notre modèle est ainsi validé sur le plan statistique

62
CHAPITRE 4. ANALYSE DE L’IMPACT DU VIEILLISSEMENT SUR L’ÉPARGNE

Figure 4.15 – Test de Cusum

Source : élaboré par nos soins

1.7 Coefficients de Long terme et dynamique de court terme

1.7.1 Coefficients de court terme (CT)

Le tableau ci-dessous nous montre que le coefficient d’ajustement ou force de rappel est
statistiquement significatif, il est négatif et est compris entre zéro et un en valeur absolue, ce
qui garantit un mécanisme de correction d’erreur, et donc l’existence d’une relation de long
terme (cointégration) entre variables.

63
CHAPITRE 4. ANALYSE DE L’IMPACT DU VIEILLISSEMENT SUR L’ÉPARGNE

Figure 4.16 – Résultats d’estimation des coefficients de CT

Source : élaboré par nos soins

Aussi, pouvons-nous conclure que :

— Le rapport de dépendance exerce un effet négatif sur le taux d’épargne des ménages
à court terme. Cet effet s’inverse plutôt dans le temps : Le rapport de dépendance
d’il y a un an impact positivement le taux d’épargne des ménages, ce qui confirme,
empiriquement dans le cas du Maroc, l’hypothèse de cycle de vie.

— Le taux d’accroissement du PIB exerce un effet négatif sur le taux d’épargne des
ménages à court terme mais s’inversent plutôt dans le temps : Le taux d’accroissement
du PIB d’il y a un, deux ou trois ans impact positivement le taux d’épargne des
ménages, ce qui confirme qu’une augmentation du revenu peut ainsi contribuer à des
taux d’épargne des ménages élevés.

1.7.2 Coefficients de Long terme (LT)

Le tableau ci-dessous nous fournit les coefficients ou élasticités de long terme estimées.

64
CHAPITRE 4. ANALYSE DE L’IMPACT DU VIEILLISSEMENT SUR L’ÉPARGNE

Figure 4.17 – Résultats d’estimation des coefficients de LT

Source : élaboré par nos soins

— l’effet du rapport de dépendance sur le taux d’épargne des ménages reste négatif à
long terme.

— Le signe du coefficient du taux d’accroissement du PIB est négatif (-0,92) ce qui


peut être expliqué par le fait que la croissance économique au Maroc est un facteur
d’élévation de la consommation ce qui implique une désincitation à l’épargne.

A la lumière de nos résultats, axés sur la modalisation de toutes les combinaisons


possibles des variables disponibles, et après la correction des problèmes relatifs aux données et
à l’estimation, nous pouvons conclure à un impact négatif du vieillissement démographique
sur le taux d’épargne des ménages au Maroc et donc la confirmation de la théorie de cycle de
vie en utilisant les séries temporelles de 1980 à 2017.
Ainsi, le vieillissement démographique qui s’est amorcé au Maroc aura des conséquences
importantes sur l’épargne des ménages et partant sur la croissance économique et les systèmes
de retraite dans les décennies à venir, à tel point qu’il est dès aujourd’hui temps de prendre
les mesures nécessaire soit au niveau :

— Des politiques publiques en favorisant des mécanismes d’incitation fiscale permanents,


et création des opportunités pour l’épargnant dans des produits d’épargne nationaux
et internationaux.
— Des dispositifs institutionnels qui souffrent de certains problèmes comme :
• L’absence d’un cadre juridique et d’incitations fiscales concernant les plans
d’épargne organisés tels que les plans d’épargne entreprise pour les salariés (PEE),
les plans d’épargne actions (PEA), ou les plans d’épargne logement (PEL).
• L’absence d’un régime de retraite obligatoire pour les indépendants.
• La faible contribution des marocains résidant à l’étranger (MRE) à cause du
manque de produits concurrentiels avec ceux trouvés dans leur pays de résidence.

— Des épargnants marocains qui sont orientés vers les produits sécurisés et liquides et
l’immobilier.

65
CHAPITRE 4. ANALYSE DE L’IMPACT DU VIEILLISSEMENT SUR L’ÉPARGNE

2 Approche micro-économétrique

Cette partie est consacrée à la présentation des résultats de l’approche


micro-économétrique. Tout d’abord, nous allons commencer par une analyse bivariée entre la
variable dépendante  capacité d’épargne des ménages  et les variables explicatives. Puis,
nous en présenterons une analyse explicative par un modèle de régression logistique binaire.

2.1 Épargne des ménages et caractéristiques sociodémographiques

Rappelons ici que la variable  épargne des ménages  est une variable binaire indiquant
si le ménage estime qu’il est en capacité d’épargner ou non.

2.1.1 Épargne des ménages et niveau social

Selon le tableau suivant, nous observons que la capacité d’épargne des ménages est liée
au niveau de vie des ménages : le pourcentage varie de 63,1% chez les ménages ayant un
niveau social aisé ou relativement riche à 30,1% parmi les ménages avec un niveau social
moyen puis à 12,6% pour les ménages pauvres ou relativement pauvres avec 12,6%.

En nous basant sur le test de khi-deux, nous remarquons que la p-value égale à 0,000 ce
qui est inférieur à 0,05. Nous rejetons donc l’hypothèse nulle et nous en déduisons qu’il existe
une relation significative entre la capacité d’épargner et le niveau social des ménages.

Figure 4.18 – Part des ménages ayant déclaré être en capacité d’épargner selon le niveau
socioéconomique

Source : élaboré par nos soins, ENCDM 2013/2014

66
CHAPITRE 4. ANALYSE DE L’IMPACT DU VIEILLISSEMENT SUR L’ÉPARGNE

2.1.2 Épargne des ménage et taille du ménage

D’après l’analyse du tableau ci-dessous, nous observons que les ménages qui sont le
plus à même d’épargner sont ceux qui sont de petite taille (moins de trois individus) avec un
pourcentage de 25,4%, suivis par les ménages qui ont une taille moyenne (entre trois et sept
individus) avec un pourcentage de 22,8%. Le niveau le plus faible est observé chez les ménages
de taille élargie (supérieure ou égal à 8) avec 20,5%.

Le test de khi-deux montre qu’il existe une association entre l’épargne et la taille du
ménage.

Figure 4.19 – Part des ménages ayant déclaré être en capacité d’épargner selon la taille des
ménages

Source : élaboré par nos soins, ENCDM 2013/2014

2.1.3 Épargne des ménages et état matrimonial du chef du ménage

Il s’avère que les ménages dont les chefs sont mariés sont relativement plus en capacité
d’épargner (23,7%) que les des ménages dont le chef est non marié (20,9%).

Puisque la p-value est égale à 0,001, ce qui inférieur à 0,05, nous rejetons l’hypothèse
nulle du test de khi-deux et nous acceptons que la capacité d’épargne et l’état matrimonial ne
sont pas indépendants.

67
CHAPITRE 4. ANALYSE DE L’IMPACT DU VIEILLISSEMENT SUR L’ÉPARGNE

Figure 4.20 – Part des ménages ayant déclaré être en capacité d’épargner selon l’état
matrimonial du chef du ménage

Source : élaboré par nos soins, ENCDM 2013/2014

2.1.4 Epargne des ménages et sexe du chef du ménage

Le tableau ci-dessous montre que les ménages gérés par des femmes ont une probabilité
d’être capables d’épargner moins élevés que parmi les ménages dont le chef est un homme :
18,9% contre 24,1%.

De plus, et selon la p-value du test de khi-deux, nous constatons que l’hypothèse nulle
qui affirme que l’épargne et le sexe du chef du ménage sont indépendant est rejetée. Il y a donc
une association entre ces deux derniers.

Figure 4.21 – Part des ménages ayant déclaré être en capacité d’épargner selon sexe du chef
du ménage

Source : élaboré par nos soins, ENCDM 2013/2014

68
CHAPITRE 4. ANALYSE DE L’IMPACT DU VIEILLISSEMENT SUR L’ÉPARGNE

2.2 Analyse du comportement d’épargne chez les ménages

Après l’analyse bivariée entre notre variable d’intérêt et les variables explicatives, nous
allons effectuer une modélisation par régression logistique binaire, sous le logiciel STATA.

Comme nous l’avons expliqué dans la partie théorique, le principe de la régression


logistique est d’expliquer la probabilité qu’une variable binaire prend 0 et 1 avec un ensemble
des caractéristiques quantitatives et qualitatives. Ici, nous cherchons à expliquer la variable
 capacité d’épargne des  ménages. Donc, le modèle va chercher à prédire la probabilité

qu’un ménage soit capable d’épargner.

Tout d’abord, nous procèderons par une méthode de sélection automatique des
variables de type  descendant  qui nous permet d’éliminer une à une les variables non
significatives. Le principe de cette méthode de régression logistique par rapport à la méthode
du  rapport de vraisemblance pas à pas descendant  est de commencer par le modèle
complet pour ensuite éliminer à chaque étape la variable la moins significative, à condition
que son niveau de signification soit inférieur à 10%.

Dans un premier lieu nous avons intégré la variable  âge du chef du ménage  comme
variable explicative principale pour vérifier la validité de l’hypothèse de la théorie de cycle de
vie. Sachant que cette variable a trois modalités, la première relative à la classe d’âge moins
de 25 ans, la deuxième est la classe d’âge 25-60 ans et la dernière associée à la classe d’âge
plus de 60 ans.

Après la correction des problèmes relatifs aux données et l’estimation du modèle de


régression binaire d’épargne des ménages sur les autres variables indépendantes, nous avons
obtenu les résultats suivants :

Source : élaboré par nos soins, ENCDM 2013/2014

69
CHAPITRE 4. ANALYSE DE L’IMPACT DU VIEILLISSEMENT SUR L’ÉPARGNE

Il s’avère ainsi que l’âge n’est pas statistiquement significatif puisqu’il a été éliminé de
la régression par la modélisation statistique. Même si, comme l’indique l’annexe B, ce modèle
a une bonne capacité prédictive de 78% et la courbe de ROC possède un AUC de près de 0,7.

Ce qui veut dire que l’âge du chef du ménage n’a aucun impact sur l’épargne des
ménages.

Nous allons tester un autre modèle, avec la part des personnes âgées dans le ménage
comme mesure du vieillissement démographique.

Après l’estimation du nouveau modèle, nous avons obtenu les résultats suivants :

Figure 4.22 – Variables dans l’équation

Source : élaboré par nos soins, ENCDM 2013/2014

Ce premier tableau montre les différentes variables qui vont être incluses dans le
modèle. Nous constatons que trois sont éliminées à savoir l’âge du chef du ménage, le milieu
de résidence et la variable qui indique si le chef est alphabétisé.

Ce tableau est utilisé aussi pour s’assurer que le nouveau modèle (où nous avons inclus
les variables explicatives) permet d’expliquer la variable d’intérêt plus que le modèle nul (avec
la constant seulement), à travers le test de khi-deux qui permet de voir s’il y’a une différence
significative entre le modèle complet et le model nul.

La p-value est de 0,000 <0,05, ce qui nous permet de constater que le modèle avec les
variables explicatives permet de prédire la variable d’intérêt.

70
CHAPITRE 4. ANALYSE DE L’IMPACT DU VIEILLISSEMENT SUR L’ÉPARGNE

Le tableau nous donne également des informations sur les coefficients estimés de ces
variables ainsi que leur écart-type, les statistiques de Wald, les p-values associées et les
intervalles de confiances. Dans le cas de la régression logistique, les valeurs des coefficients
estimés des variables explicatives ne sont pas interprétables, ce qui nous intéresse dans ce cas
ce sont leur signe. Ces derniers indiquent si la variable affecte à la hausse ou à la baisse la
probabilité qu’un ménage puisse épargne.

Source : élaboré par nos soins, ENCDM 2013/2014

Le tableau ci-dessus nous donne les rapports de côte ou les  Odds Ratio , notés OR.
L’interprétation de ces derniers dépend de la nature de la variable indépendante associée. Un
OR supérieur à 1 indique une augmentation des chances d’être positif, tandis qu’un OR
inférieur à 1 diminue les probabilités d’être positif. En effet pour une variable explicative
quantitative les OR s’interprètent de la manière suivante : l’augmentation de la variable
quantitative d’une unité, permet aux ménages d’avoir OR=exp(β) plus (ou moins) de chances
d’être épargnants. Dans le cas d’une variable explicative qualitative, il faut tout d’abord
définir la modalité de référence et les OR seront alors définis en opposition à cette modalité de
référence. Ce choix de situation de référence est très important pour l’interprétation, dans
notre cas nous avons essayé de choisir la modalité la plus fréquente.

D’après les résultats obtenus ci-dessus, nous remarquons que les ménages très riches ou
relativement riches ont 2,8 plus de capacité d’épargner que les ménages qui ont un niveau
social moyen. Alors que les ménages qui ont un niveau social relativement pauvre et les très
pauvres ont une capacité inférieure d’être épargnants.

L’OR relatif à la part des personnes âgées au sein du ménage vaut 1,2 qui est supérieur
à 1. La probabilité pour qu’un ménage épargne augmente alors avec l’augmentation de la part
des personnes âgées.

71
CHAPITRE 4. ANALYSE DE L’IMPACT DU VIEILLISSEMENT SUR L’ÉPARGNE

Nous constatons également que la taille du ménage est liée négativement à la capacité
d’épargne des ménages. En effet l’OR associé à cette variable vaut 0,83, ce qui est inférieur à
1 et indique que la probabilité d’épargne des ménages diminue avec l’augmentation leur taille.

Pour l’état matrimonial du chef du ménage, nous observons que l’OR associé la
modalité  non marié  vaut1,21 qui est supérieur à 1. Les ménages qui ont un chef
célibataire non mariée ont plus une chance d’épargner 20% supérieur à celle des ménages avec
un chef marié.

En ce qui concerne le nombre d’inactifs au sein du ménage, nous constatons que l’OR
associé est inférieur à 1, alors la probabilité d’épargne des ménages diminue avec l’augmentation
du nombre des inactifs au sein du ménage. En revanche, les dépenses annuelles des ménages
ont un OR supérieur à 1. Ceci implique que la probabilité d’épargne des ménages augmente
avec l’augmentation de leurs dépenses annuelles.

Source : élaboré par nos soins, ENCDM 2013/2014

Pour évaluer la qualité de l’ajustement de notre modèle, nous faisons recours au


pourcentage de bonnes prédictions, qui se définit comme le rapport entre le nombre de bonnes
prédictions et la taille de l’échantillon.

72
CHAPITRE 4. ANALYSE DE L’IMPACT DU VIEILLISSEMENT SUR L’ÉPARGNE

Or, un ménage est classé épargnant si sa probabilité d’être épargnant à travers ce


modèle est supérieur à 0,5 et bien classé s’il est considéré épargnant par le modèle sachant
qu’il l’est effectivement, sinon il est classé non épargnant. Et s’il est effectivement non
épargnant alors il est bien classé aussi.

Notre modèle permet de classer correctement jusqu’à 63,5% des ménages épargnants
et 78,8% des ménage qui n’épargnent pas. Ainsi globalement 78,1% des ménages ont pu être
classés correctement. Ce qui nous permet de constater qu’il a une bonne capacité prédictive.

Source : élaboré par nos soins, ENCDM 2013/2014

Dans le tableau ci-dessus, le test de Hosmer-lemeshow qui nous permet de tester


l’hypothèse nulle selon laquelle  le modèle permet d’ajuster suffisamment les données ,
indique que la p-value vaut 0,3876> 0,05. De ce fait, nous acceptons l’hypothèse nulle qui
affirme l’adéquation du modèle.

Source : élaboré par nos soins, ENCDM 2013/2014

Ce constat est corroboré par la courbe de ROC ci-dessous. En effet, nous pouvons avancer
que la qualité de discrimination du modèle est acceptable, étant donné que la courbure est
éloignée significativement de la première bissectrice. La valeur de l’AUC (Area Under Curve),
pour une mesure plus exacte, est de 0,6982, très proche à 0,7, indique une discrimination
acceptable du modèle.

73
CHAPITRE 4. ANALYSE DE L’IMPACT DU VIEILLISSEMENT SUR L’ÉPARGNE

Source : élaboré par nos soins, ENCDM 2013/2014

En résumé pour la régression logistique, nous pouvons avancer que d’après les données
dont nous disposons, il n’ya pas de relation statistique significative entre la capacité à
épargner des ménages et le milieu de résidence. De même, la variable  niveau d’instruction
du chef du ménage  n’introduit aucune différence entre les ménages, c’est-à-dire que le fait
qu’un chef du ménage sache lire et écrire ou non n’influence pas la capacité d’épargner chez
les ménages.

Cependant et conformément aux résultats attendus, le nombre d’inactifs au sein du


ménage présente une relation négative avec notre variable dépendante. Autrement dit, plus le
nombre d’inactifs au sein du ménage augmente plus la probabilité qu’un ménage déclare être
capable d’épargner diminue, ce qui peut s’expliquer par des revenus plus faibles face à une
consommation plus élevée. La taille du ménage est également significative : nous remarquons
que les ménages de petite taille ont 1,2 fois plus de chance d’être en capacité d’épargner que
les ménages de taille moyenne alors que les ménages d’une grande taille présente 19% moins
de chance d’épargner.

La part des personnes âgées est aussi significative et présente une association
statistique positive avec la variable d’intérêt : il est plus probable d’être en capacité
d’épargner lorsque le poids des personnes âgées au sein du ménage augmente.

L’état matrimonial du chef du ménage affecte aussi la capacité d’épargne des ménages :
le fait que le chef du ménage est non marié augmente les chances d’épargne chez les ménages.

74
CHAPITRE 4. ANALYSE DE L’IMPACT DU VIEILLISSEMENT SUR L’ÉPARGNE

Le sexe du chef du ménage est aussi un facteur déterminant de l’épargne des ménages
puisque nous observons que lorsque le chef du ménage est une femme, le pouvoir d’épargner
diminue de 32,8% par rapport aux ménages dont les chefs sont des hommes.

En guise de conclusion de ce chapitre, il s’avère que :

— L’approche macroéconomique va dans le sens d’une relation négative entre l’épargne


des ménages et le vieillissement démographique
— L’approche microéconomique indique que le vieillissement démographique mesuré par
le groupe d’âge du chef de ménage n’a pas d’impact sur la capacité d’épargner du
ménage. En revanche, si on considère la part des personnes âgées dans le ménage, la
relation significative et elle est positive.
Ces résultats contradictoires peuvent s’expliquer par au moins deux facteurs :
— Le type d’approche : l’approche macro mesure un comportement agrégé alors que
l’approche micro mesure un comportement individuel (ménage) ;
— Les indicateurs du vieillissement et de l’épargne considérés : l’approche
macroéconomique considère l’épargne réelle alors que l’approche microéconomique
utilise un indicateur de perception (capacité d’épargne).

75
CONCLUSION GÉNÉRALE

L’objectif de notre travail était de déterminer l’impact du vieillissement de la


population en termes macro économétrique sur l’épargne des ménages pour vérifier si
l’hypothèse du modèle de cycle de vie est acceptée ou rejetée.

La théorie du cycle de vie est en effet le seul outil qui va nous aider à analyser le lien
entre le vieillissement de la population et l’épargne. L’approche théorique de ce modèle
consiste à relier les tendances démographiques et le comportement d’épargne des agents ayant
pour objectif de maintenir constant le niveau de leur consommation tout au long de la durée
de vie.

Pour répondre à cette problématique, nous avons eu recours à deux méthodologies. La


première est une estimation macro-économétrique en utilisant des séries temporelles couvrant
la période 1980-2017 sur des variables économiques et démographiques. Nous avons essayé de
tester également le vieillissement sur le comportement d’épargne des ménages par une
approche individuelle où le ménage constitue l’unité statistique d’analyse. En l’absence d’une
variable sur le comportement effectif concernant l’épargne des ménages, nous avons retenu la
variable  capacité d’épargne . Cette deuxième modélisation micro-économétrique est fondée
sur les données de l’Enquête Nationale sur la Consommation et les Dépenses des Ménages
2013/2014.

Tout d’abord, nous avons commencé par définir les différents concepts et les notions et
présenter quelques travaux qui existent dans la littérature et qui portent sur la relation entre
les changements démographiques et l’épargne.

Ensuite, nous avons présenté les sources des données et les méthodologies adoptées
pour notre travail ainsi les variables susceptibles d’avoir un effet sur l’épargne des ménages.

76
CHAPITRE 4. ANALYSE DE L’IMPACT DU VIEILLISSEMENT SUR L’ÉPARGNE

Nous avons proposé un modèle ARDL pour déterminer l’effet du vieillissement de la


population représenté par le rapport de dépendance sur le taux d’épargne des ménages et un
modèle logistique binaire afin d’étudier les déterminants microéconomiques de l’épargne des
ménages au Maroc.

A partir de l’analyse des résultats des deux modèles adoptés, la remarque qui s’impose
concerne l’hypothèse de la théorie de cycle de vie. En effet le premier modèle vient confirmer
cette hypothèse alors que le deuxième l’a rejeté.

Au niveau macroéconomique, plus le poids des personnes âgées augmente et plus le


taux d’épargne des ménages diminue. Dans le comportement individuel, plus un ménage
comprend des personnes âgées et plus il perçoit la possibilité de se constituer une épargne.

Ce constat peut être expliqué par le fait qu’au niveau du modèle micro-économétrique
nous avons utilisé comme variable dépendante la capacité à épargner telle qu’elle est déclarée
par le ménage. Or, il peut y avoir une différence entre avoir le sentiment d’être capable
d’épargner et la réalisation effective de l’épargne.

Si le ménage parvient à épargner effectivement, cela poussera à considérer qu’au


Maroc, les personnes âgées ont tendance à épargner plus :

— soit parce qu’elles ont plus de revenu par rapport aux générations plus jeunes ;
rappelons que les taux de chômage au Maroc sont plus élevés chez les jeunes (les ¾
des personnes en chômage au Maroc sont des jeunes de moins de 35 ans) ;
— soit elles sont peu réceptives aux sollicitations de la société de consommation ;
— ou bien parce qu’elles anticipent sur les difficultés économiques et sociales de leurs
descendants ou encore que l’augmentation de l’espérance de vie les pousse à anticiper
une durée vie encore longue et une incertitude quant sur l’avenir. L’enquête sur les
personnes âgées (HCP, 2006) a montré que pour la planification de l’avenir, le moyen
le plus récurrent reste l’épargne avec 49,6%, suivi par le fait de compter sur les
enfants avec 46,0%. Sinon, on peut penser que dans ce type de ménage, il y a peut-
être tendance à être plus optimiste que les autres.

77
BIBLIOGRAPHIE

[1] Avdeev, A., 2006, Cours  Espaces démographiques européens  – IDUP Université Paris-1
 Panthéon-Sorbonne 

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[23] https ://www.ined.fr/fr/lexique/vieillissement-demographique/
[24] https ://www.lafinancepourtous.com/

79
WEBOGRAPHIE

80
ANNEXE A

LES SORTIES RELATIVES À LA


STATIONNARITÉ DES VARIABLES

Rapport de dépendance RD

Source : Elaboré par nos soins

81
ANNEXE A. LES SORTIES RELATIVES À LA STATIONNARITÉ DES VARIABLES

Source : Elaboré par nos soins

Taux d’épargne des ménages TEM

Source : Elaboré par nos soins

la première différence de la variable RD

Source : Elaboré par nos soins

82
ANNEXE A. LES SORTIES RELATIVES À LA STATIONNARITÉ DES VARIABLES

Source : Elaboré par nos soins

Espérance de vie

Source : Elaboré par nos soins

Taux d’accroissement du PIB(TAP)

83
ANNEXE A. LES SORTIES RELATIVES À LA STATIONNARITÉ DES VARIABLES

Source : Elaboré par nos soins

Taux d’inflation

84
ANNEXE A. LES SORTIES RELATIVES À LA STATIONNARITÉ DES VARIABLES

Source : Elaboré par nos soins

85
ANNEXE B

LES SORTIES RELATIVES À LA


RÉGRESSION LOGISTIQUE

Matrice de confusion

Source : Elaboré par nos soins

86
ANNEXE B. LES SORTIES RELATIVES À LA RÉGRESSION LOGISTIQUE

Test de Hosmer-lemeshow

Source : Elaboré par nos soins

La courbe de ROC

Source : Elaboré par nos soins

Source : Elaboré par nos soins

87

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