Organisation météorologique mondiale

Nations Unies
Temps ● Climat ● Eau

L’eau et les catastrophes

Etre informé et préparé

 Nations Unies Organisation météorologique mondiale
Temps • Climat • Eau

L’eau et les catastrophes

Etre informé et préparé

Genève, Suisse
2004
 OMM-N° 971
©Organisation météorologique mondiale
ISBN 92-63-20971-5

NOTE : Les appellations employées dans cette publication et la présentation des données
qui y figurent n’impliquent de la part du Secrétariat de l’Organisation
météorologique mondiale aucune prise de position quant au statut juridique des
pays, territoires, villes ou zones, ou de leurs autorités, ni quant au tracé de leurs
frontières ou limites.

2
TABLE DES MATIÈRES
Page
Avant-propos . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4

Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6

Cyclones tropicaux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9

Ondes de tempêtes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11

Inondations . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 13

Glissements de terrain et coulées de boues . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 16

Avalanches . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18

Sécheresse . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21

L’eau et les accidents industriels . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 24

Risques sanitaires des catastrophes naturelles liées à l’eau . . . . . . . . . . . . . . . . . 26

Les effets du changement climatique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 28

La gestion des risques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 31

3
 AVANT-PROPOS Depuis quelques décennies, les habitants de la planète
sont en proie à une inquiétude croissante à propos des
phénomènes météorologiques extrêmes, qui semblent
augmenter de fréquence et d’intensité. Cyclones, ondes
de tempête, inondations, sécheresses, avalanches,
glissements de terrain ou coulées de boue – tous ces
dangers liés à l’eau représentent un risque majeur pour
les millions de personnes qui y sont exposées. De ce
point de vue, les populations défavorisées sont
doublement vulnérables puisque, pour elles, les
catastrophes naturelles peuvent rapidement se muer en
tragédies humaines. Aujourd’hui, il est généralement
admis qu’il faut impérativement réduire ce risque pour
atteindre les Objectifs de développement pour le
Millénaire et favoriser ainsi un développement durable.
Certes, nous ne sommes pas encore en mesure de
maîtriser les forces de la nature. Nous ne pouvons
empêcher un cyclone tropical de se former. Mais nous
sommes cependant capables d’endiguer cours d’eau et
marées et de construire des ouvrages suffisamment
résistants pour neutraliser en partie, voire en totalité, les
forces de la nature. Et comme les phénomènes naturels
ne sont pas près de cesser, il importe de faire face aux
problèmes qu’ils suscitent par le biais de mesures de
prévention, d’atténuation et de préparation appropriées.
La prévention est essentielle, qu’il s’agisse de
recenser les dangers naturels, d’évaluer les menaces
qu’ils font peser sur les personnes et les biens et
d’adopter des mesures susceptibles de les juguler ou de
prendre les bonnes décisions en matière
d’aménagement et d’affectation des sols. Ainsi,
l’élaboration de codes et de normes de construction
rigoureux pour les activités de développement menées
dans les zones sujettes aux catastrophes naturelles peut
grandement réduire la vulnérabilité, et donc le risque.
Les mesures de prévention sont des mesures
complexes, qui n’ont pas simplement trait aux
catastrophes elles-mêmes, mais qui reflètent aussi les
relations entre, d’une part, les objectifs de
développement et de protection de l’environnement et,
d’autre part, les intérêts sociaux et économiques.
Les mesures d’atténuation des effets des
catastrophes naturelles jouent aussi un rôle essentiel.

4
Organiser des campagnes de sensibilisation, apprendre
à la population à faire face aux catastrophes naturelles,
construire des digues et des barrages pour limiter les
conséquences des inondations sont autant de mesures
qui peuvent contribuer à réduire le coût humain et
financier de ces catastrophes. Toute planification de la
préparation aux catastrophes nécessite des prévisions
et des systèmes d’alerte précoce fondés sur la
surveillance scientifique des dangers météorologiques
et hydrologiques. La bonne entente et la coordination
des différents organismes chargés de donner l’alerte, de
diffuser les informations pertinentes et d’intervenir en
cas de catastrophes sont des facteurs essentiels. En fait,
le succès des moyens d’intervention en cas de
catastrophe dépend de la portée et de l’efficacité des
systèmes d’alerte précoce.
Toutes ces mesures doivent reposer sur une base de
connaissances solides et nous obligent à bien
comprendre comment et pourquoi les dangers naturels
se produisent et comment ils peuvent se transformer en
catastrophes. Nombre d’informations peuvent être tirées
de l’étude systématique des phénomènes
météorologiques et des observations relatives aux
cyclones, aux fortes tempêtes, aux crues, aux glissements
de terrain et aux coulées de boue ainsi qu’à leurs
répercussions sur les activités humaines. Savoir
comment des vents violents peuvent affecter la stabilité
d’un ouvrage, comment la construction d’une voie ferrée
sur un système de drainage naturel peut provoquer des
inondations ou encore comment l’urbanisation peut
modifier le débit des cours d’eau en aval sont des
éléments essentiels pour l’évaluation de la vulnérabilité.
Une information digne de foi est indissociable de la
prévention et est indispensable à son succès.
Ce principe est au cœur des activités liées à la
célébration de la Journée mondiale de l’eau. Lors de
cette manifestation annuelle, les organismes des
Nations Unies qui s’occupent de l’eau mettent l’accent
sur une question ayant trait à cette ressource et à son
influence sur le développement durable et contribuent
ainsi à la rendre sensible au grand public aux niveaux
local, national, régional et international. Les pays
participent à cet effort en publiant et diffusant des
documents et en organisant des conférences, des tables
rondes, des séminaires et des expositions portant sur la
conservation et la mise en valeur des ressources en eau
et sur la mise en œuvre des recommandations du Plan
d’application de Johannesburg.
Cette année, la Journée mondiale de l’eau a pour
thème «L’eau et les catastrophes». L’OMM a collaboré
avec le Secrétariat interinstitutions pour la mise en
œuvre de la Stratégie internationale de prévention des
catastrophes, l’Organisation mondiale de la santé, la
Swedish Water House et le Centre d’hydrogéologie de
l’Université de Neuchâtel, Suisse, à l’élaboration de la
présente brochure. Vous y trouverez des informations
scientifiques très importantes sur les crues, les
sécheresses, les ouragans et d’autres catastrophes
naturelles, leurs répercussions éventuelles et ce que la
société peut faire pour se donner les moyens d’y faire
face. L’émission d’alertes et l’exécution en temps
opportun de mesures garantissent la préparation aux
catastrophes, et la possibilité pour la société, la nation
et l’humanité tout entière de faire face aux
catastrophes liées à l’eau.
Pour réduire le risque de catastrophes liées à l’eau,
il faut avant tout être informé et préparé. L’information
doit se transmettre du niveau mondial au niveau local,
de la sphère traditionnelle au monde moderne, du
village à la salle du conseil d’administration, des
scientifiques aux décideurs. La présente brochure a été
conçue dans cette optique, et nous espérons que les
gouvernements et tous ceux qui s’intéressent à ces
questions la trouveront utile et instructive.
M. Jarraud
(Secrétaire général)
5
 INTRODUCTION
Chaque jour, les habitants du globe terrestre sont récentes sont d’origine météorologique ou climatique,
exposés à des centaines de dangers naturels liés à l’eau. leur fréquence ayant particulièrement augmenté ces
Un cyclone peut se former près de la Malaisie, pendant 10 dernières années. Les sécheresses et les famines
que les signes avant-coureurs d’une grave sécheresse se qu’elles provoquent ont représenté respectivement
manifestent dans la savane subsaharienne. Des 82 %, 48 % et 35 % de toutes les catastrophes naturelles
avalanches peuvent être sur le point de se déclencher qui se sont produites en Afrique, en Océanie et en
dans les Alpes, alors que des coulées de boue Amérique, alors que les inondations intervenaient pour
commencent à dévaler les collines du Venezuela. Et 69 % dans les catastrophes qu’a subies l’Asie (figure 2).
tous ces dangers sont des catastrophes en puissance De même, le nombre de décès imputables aux
pour ceux qui les ignorent ou ne s’y préparent pas. catastrophes hydrométéorologiques représentait 71 %
Les conséquences économiques des catastrophes de l’ensemble des morts recensées. Ces 30 dernières
naturelles, et notamment de celles qui sont liées à l’eau, années, si le nombre de victimes de catastrophes
ne cessent de prendre de l’ampleur depuis une naturelles a diminué pour se stabiliser à quelque
cinquantaine d’années (figure 1). Ainsi, d’après les 80 000 morts par an, le nombre des personnes touchées
données rassemblées par la Fédération internationale et les pertes économiques estimées n’ont cessé
des sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge – d’augmenter (figure 3).
qui tient un registre du type et du nombre de Les catastrophes naturelles privent les pays touchés
catastrophes signalées, du nombre de victimes et de de ressources qui pourraient être autrement consacrées
personnes sinistrées recensées et des dommages au développement économique et social. De plus, leurs
estimés par pays –, 89 % des catastrophes naturelles conséquences sont beaucoup plus graves et tragiques
dans les pays les moins avancés ou les pays en
80
Pertes économiques
157 milliards
de $ E.-U.
développement, dont les programmes de
70
(valeur 1999)
Pertes assurées
développement peuvent être retardés de plusieurs
(valeur 1999) décennies (figure 4).
Milliards de dollars

60
Evolution concernant
les pertes économiques Dans un rapport publié dernièrement, le Groupe
50 Evolution concernant
les pertes assurées
d’experts intergouvernemental sur l’évolution du
40 © Munich Re 2000 climat (GIEC) indique que les changements
30
climatiques et le réchauffement de la planète auront
pour effet d’augmenter la fréquence des catastrophes
20
naturelles. Mais il ne faut pas oublier qu’il y a toujours
10 eu des changements climatiques et que l’être humain a
0
élaboré un ensemble remarquable de stratégies pour y
1950 1955 1960 1965 1970 1975 1980 1985 1990 1995 survivre. L’histoire est pleine de ces aperçus fascinants
Figure 1 — Pertes économiques et pertes assurées : évolution
sur la façon dont nos ancêtres affrontaient des
(Munich Re Group, E&F/Geo) conditions météorologiques extrêmes – et les sociétés
traditionnelles ont encore aujourd’hui leurs propres
Figure 2 — Répartition
géographique des
2
24 sécheresses et inondations
EUROPE SEPTENTRIONALE
7 92
de ces 30 dernières années
EUROPE ORIENTALE (1973–2002)
3 70

13 113
EUROPE OCCIDENTALE NOTE : Sont prises en
AMÉRIQUE DU NORD
12 73 compte les catastrophes qui
EUROPE MÉRIDIONALE21 66 16
55 173 répondent aux critères
AFRIQUE 41
16 68 MOYEN-ORIENT
SEPTENTRIONALE EXTRÊME-ORIENT suivants du CRED :
25 100 CARAÏBES 10 décès recensés ou plus :
2 337
AMÉRIQUE CENTRALE
102 87
43 100 personnes touchées
MICRONÉSIE AFRIQUE OCCIDENTALE 250 7 9
ASIE CENTRALE
30 39 120 136 38 MELANÉSIE 1
recensées; appel à l’aide
ASIE DU SUD-EST
AFRIQUE CENTRALE AFRIQUE ORIENTALE POLYNÉSIE internationale et déclaration
35 240 de l’état d’urgence.
35 28
AMÉRIQUE DU SUD
AFRIQUE AUSTRALE
12 63 Données : EM-DAT, base de
AUSTRALIE ET données internationales sur
NOUVELLE-ZÉLANDE
les catastrophes, CRED,
Université de Louvain, 2003
Carte de base : Projection
Robinson, parallèles standards
38°N et 38°S, Bibliothèque
Perry-Casteñeda, Université
SÉCHERESSE INONDATIONS
du Texas, Austin

6
 Figure 3 — Trente ans de catastrophes “naturelles”
(Rapport sur les catastrophes dans le monde 2002, Fédération internationale des sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge)
répertoires de connaissances à ce sujet. Tout comme
maintenant, on faisait face aux catastrophes en
s’appuyant sur l’expérience acquise pour anticiper les
dangers potentiels et en faisant fond sur des mesures de
protection appropriées. On dispose cependant d’une
grande possibilité d’action lorsqu’il s’agit d’informer et
d’avertir les intéressés de ces dangers.
Les gouvernements, les organisations à caractère
public, les établissements d’enseignement, les
responsables locaux et de nombreux groupes à
vocation corporative ou commerciale commencent à se
rendre compte qu’une collectivité a tout intérêt à
réduire le coût des dangers naturels pour la santé, la
société, l’économie et l’environnement. Des personnes
convenablement informées à tous les stades du
processus de gestion des catastrophes – et en des
termes parfaitement intelligibles – seront moins
vulnérables et seront en outre plus aptes à participer
pleinement à l’exécution d’éventuelles mesures de
protection. Des alertes précoces qui avertissent
rapidement les populations exposées aux risques et qui
sont réellement suivies d’effet constituent des éléments
essentiels des stratégies de prévention des catastrophes
et des plans d’action à tous les niveaux. Dans le monde
entier, les Services météorologiques et hydrologiques
nationaux jouent à cet égard un rôle capital en
fournissant des informations d’une importance
extrême sur la vulnérabilité de nos sociétés aux
catastrophes liées à l’eau et en donnant précocement
l’alerte en cas de catastrophe imminente.
En matière de réduction des risques de
catastrophe et d’alerte précoce, on a pu observer
dernièrement le passage très encourageant d’une
conception fondée sur la surveillance et l’annonce des
dangers à une approche davantage axée sur les aspects
socio-économiques de la vulnérabilité. On peut
également se féliciter que la gestion des risques soit de
plus en plus souvent intégrée dans la planification
globale à long terme d’un développement durable.
C’est ainsi que, dans le programme Action 21 comme
dans la Déclaration ministérielle de La Haye de mars
2000, on a insisté sur la nécessité de gérer les risques
pour assurer une protection efficace contre les
inondations. En 2002, les participants au Sommet
mondial pour le développement durable ont également
souligné l’évolution de la lutte contre les inondations,
qui doit s’appuyer sur «une meilleure utilisation des
informations et projections climatologiques et
météorologiques, des systèmes d’alerte rapide, une
gestion efficace des terres et des ressources naturelles,
de bonnes pratiques agricoles et la conservation des
écosystèmes».
Un certain nombre d’initiatives louables ont aussi
permis au public d’en apprendre plus long sur la
réduction des risques liés aux catastrophes. On peut à
cet égard citer les rapports annuels sur les catastrophes
dans le monde publiés par la Fédération internationale
des sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge,
les rapports sur l’avenir de l’environnement mondial
publiés par le Programme des Nations Unies pour
7
 700 16 documentation spécialisés dans la prévention des
catastrophes aux fins d’une sécurité accrue des
600 14
communautés et d’un développement durable.

Pourcentage du PIB
Milliards de dollars

12 Les catastrophes liées à l’eau sont la conséquence

500
de l’interaction de phénomènes hydrométéorolo-
10
400 giques extrêmes et de la vulnérabilité des activités
8 économiques menées dans la zone d’influence de ces
300 phénomènes. Parfois, les phénomènes hydrométéoro-
6
logiques se combinent avec des particularités ou des
200
4 phénomènes géologiques pour engendrer des dangers
100
naturels complexes tels que les cyclones tropicaux
2
(ouragans, typhons, etc.) et les ondes de tempête
0 0 connexes, les crues, les glissements de terrain et les
Pays les plus riches Pays les plus pauvres coulées de boue, les avalanches et les sécheresses
Pertes en pourcentage (dues au manque d’eau). L’eau étant indispensable à
Pertes économiques du PIB l’existence de toute forme de vie sur terre, sa pollu-
Figure 4 — Pertes imputables aux catastrophes : total et pourcentage tion – qu’elle soit due au rejet direct ou indirect de
du PIB pour les pays les plus riches et les plus pauvres (1985-1999) substances toxiques dans les cours d’eau par suite de
(Source : Munich Re et J. Abramovitz, 2001) catastrophes technologiques ou pour toute autre
raison – constitue une grave menace pour la santé et
l’environnement (PNUE), le rapport sur les le bien-être.
catastrophes et le développement publié par le La plupart des dangers naturels liés à l’eau se
Programme des Nations Unies pour le développement manifestent dans des zones propices aux activités
(PNUD) ou encore l’ouvrage intitulé «Living with humaines et peuvent facilement se transformer en
Risk: A global review of disaster reduction activities» catastrophes s’ils ne sont pas pris en compte dans les
(S’accommoder du risque : un tour d’horizon mondial programmes de développement ou qu’on néglige de
des mesures d’atténuation des effets des catastrophes), prendre les mesures de prévention ou d’atténuation
publié dans le cadre de la Stratégie internationale de nécessaires. L’instauration d’une «culture de la
prévention des catastrophes. Des centres d’information sécurité» nécessite une participation active des
spécialisés tels que le Centre sud-africain de recherche collectivités locales, de sorte que l’information et
et de documentation (SARDC), le Centre régional l’expérience puissent être mises en commun par le biais
d’information sur les catastrophes (CRID) pour de tous les moyens modernes de communication,
l’Amérique latine, le Centre asiatique de prévention des d’enseignement et de formation professionnelle et que
catastrophes (ADRC) de Kõbe, Japon, et le Centre ces collectivités puissent être convenablement
asiatique de prévention des catastrophes de Bangkok, informées et préparées.
Thaïlande, jouent le rôle de centres régionaux de

8
CYCLONES TROPICAUX
Appelé ouragan, typhon ou «perturbation cyclonique
intense à développement vertical», le cyclone tropical
est la plus dévastatrice des catastrophes naturelles. Tous
les ans, des cyclones venant de la mer pénètrent sur les
terres et y causent des dégâts. Les vents violents et les
fortes pluies qui les caractérisent marquent leur
passage de destructions. En octobre 1998, l’ouragan
Mitch — un des pires de ces dernières années — a
frappé le Nicaragua, le Honduras et le Guatemala,
provoquant la perte de plus de 11000 vies humaines,
l’écroulement d’immeubles et la destruction de
récoltes, et laissant dans son sillage des inondations
d’une grande étendue (figure 1).
Le cyclone tropical est une dépression
barométrique qui se forme au-dessus d’eaux tropicales
ou subtropicales chaudes, pour devenir une énorme
masse de vents et d’orages, dont le diamètre peut
atteindre plusieurs centaines de kilomètres, qui se
déplace (figure 2). En surface, les vents peuvent
Figure 1 — L’ouragan Mitch, 26 octobre 1998
(NOAA)
Figure 2 — Anatomie d’un cyclone tropical dans l’hémisphère Nord
1. A haute altitude, l’air spirale vers l’extérieur dans le sens des aiguilles
d’une montre.
2. L’air affluant en surface est forcé de s’élever. Il monte en spiralant
dans le «mur de l’œil».
3. Les courants descendants de l’œil empêchent la formation de nuages
et la pluie. (USA Today)
atteindre 200 kilomètres à l’heure, alors que l’«œil», au
centre, ne dépassant généralement pas quelques
douzaines de kilomètres de diamètre, est relativement
calme.
Tous les ans, environ 80 cyclones se forment dans
certaines régions des tropiques. Leur appellation
générique dépend du lieu de formation : typhon dans
le Pacifique Ouest et la mer de Chine méridionale;
ouragan sur l’Atlantique Nord, aux Caraïbes, dans le
Golfe du Mexique, ainsi que sur le nord-est et le centre
de Pacifique; cyclone tropical sur l’océan Indien et dans
les régions méridionales du Pacifique Ouest.
On peut aussi leur donner des noms ou des codes
distinctifs courts, parfaitement adaptés à la
communication en situation d’urgence et aux avis
météorologiques. Sur la plupart des bassins océaniques,
ce sont des prénoms — par exemple, en 2003, sur
l’Atlantique, un gros ouragan a été baptisé Fabian.
Dans la baie du Bengale et sur la mer d’Oman, les
tempêtes sont identifiées par un indicateur
géographique suivi de leur date de formation; par
exemple, le troisième cyclone qui se formera en 2004
dans la baie du Bengale s’appellera BOB 0403.
Etre informé
Tous les cyclones tropicaux ne pénètrent pas
nécessairement sur les terres, mais quand c’est le cas, ils
causent des dégâts de gravité variable jusqu’à plusieurs
centaines de kilomètres des côtes. Les fortes pluies
peuvent durer plusieurs jours, entraînant souvent des
inondations ou des crues soudaines. Ils peuvent
provoquer une onde de tempête — un soulèvement des
eaux océaniques qui peut se superposer à la marée —
pouvant, lorsqu’elle se propage en amont d’un estuaire
fluvial, déclencher une inondation de grande ampleur
(voir «Ondes de tempête», page 11).
Comme Mitch, certains gros cyclones tropicaux
provoquent des catastrophes humanitaires à grande
échelle, entraînant morts et souffrances, la destruction
de biens, de graves interruptions des activités normales
et d’importantes récessions socio-économiques. Les
zones côtières bâties sont les plus vulnérables, alors que
les plus fortes pertes en vies humaines se produisent au
sein des populations des pays n’ayant pris que peu de
dispositions pour réduire les conséquences de ces
phénomènes.
Notre compréhension scientifique des cyclones a
progressé. Certes, nous ne sommes toujours pas
capables de les arrêter sur leur trajectoire, mais nous
pouvons alerter les populations menacées. Des
systèmes d’alerte coordonnés, mis en place sur toute la
planète, permettent un état de préparation d’un niveau
inhabituel, face à ce risque redoutable.
9

Groupe d'experts OMM/CESAP Comité CESAP/OMM
des cyclones tropicaux des typhons
CMRS Tokyo
CMRS New Delhi
4 9 (11%)
1
(5%) 30 (38%)
(1%)
8 (10%) 7 (9%)
Nadi Centre
CMRS Reunion
Comité des cyclones tropicaux
Comité des cyclones tropicaux dans le Pacifique Sud et le
dans le sud-ouest de l'océan Indien Sud-Est de l'océan Indien
relevant du CR I relevant du CR V
Un système d’alerte précoce efficace fournit une
information précise à laquelle on peut se fier, ce qui
suppose :
• des prévisions évoluées, précises et détaillées des
conditions dangereuses,
• un système rapide et fiable de diffusion des
prévisions, avis et alertes à toutes les parties
concernées,
• une réponse rapide et efficace des services publics
et des populations, aux alertes.
Les satellites, les radars météorologiques et les
ordinateurs permettent de raccourcir les délais
d’obtention des données de surveillance des cyclones
tropicaux, à l’échelle de la planète, dès leur naissance.
Pour que le message parvienne à destination, il faut
disposer d’un important système de diffusion.
L’Organisation météorologique mondiale a officiel-
lement désigné six centres — situés à Honolulu, à La
Réunion, à Miami, à Nadi (Fidji), à New Delhi et à Tokyo
— comme centres météorologiques régionaux
spécialisés (CMRS), assurant l’analyse, le suivi et la
prévision des cyclones tropicaux, (figure 3). Aux niveaux
mondial et régional, les activités sont coordonnées par
l’intermédiaire de la Veille météorologique mondiale et
du Programme concernant les cyclones tropicaux (PCT)
de l’OMM. Le PCT transmet des avis aux Services
météorologiques et hydrologiques nationaux (SMHN),
auxquels il incombe de donner l’alerte sur les cyclones
tropicaux et les phénomènes naturels liés à ceux-ci, sur le
territoire national et ses eaux côtières. Dans son
ensemble, le système est un exemple remarquable de
coopération mondiale.
Etre préparé
Mises à part la surveillance et l’alerte précoce,
beaucoup peut être fait pour éviter ou réduire les
dégâts des cyclones dans les zones exposées. La
10
Figure 3 — Les centres
Comité des ouragans
du CR IV
météorologiques
régionaux spécialisés de
l’OMM et leurs zones de
responsabilité
CMRS Miami
CMRS Hawaii
14 (17%)
EQUATEUR
CMRS
7 (9%)
A (B%) A représente le nombre de cyclones tropicaux
en moyenne annuelle, et B leur pourcentage
par rapport à la moyenne mondiale
Régions où se forment les cyclones tropicaux
prévention peut comprendre la détermination de
risques tels que les ondes de tempête, une évaluation
des menaces pour les vies et les biens, ainsi que des
mesures permettant de réduire les pertes de vies
humaines et les dommages matériels. Un aménagement
rationnel du territoire et des mesures, comme celles
visant à s’assurer que toutes les nouvelles habitations
sont à l’épreuve des ouragans, sont essentiels.
Des mesures de réduction des effets des cyclones
tropicaux, visant à limiter leurs conséquences, peuvent
aller de campagnes de sensibilisation des populations
sur la façon de faire face aux catastrophes, à la
construction de digues contre les inondations. Toutes
ces mesures sont importantes, car elles ne réduisent pas
seulement le coût des catastrophes pour la collectivité,
mais elles permettent également de sauver des vies.
En plus d’un bon système d’alerte précoce, il
convient d’établir un plan de préparation définissant la
protection des constructions et prévoyant des abris de
secours, des télécommunications sécurisées et fiables,
des procédures d’évacuation et de transport, des
mesures de sûreté et de sécurité, ainsi que la
coordination entre les divers organismes. Donner
l’alerte à temps, à une population avertie des dangers et
prête à réagir, représente une contribution effective au
système mondial de réduction des effets des
catastrophes cycloniques.
L’état de préparation à la période qui suit le
cyclone est tout aussi crucial. Il doit concerner les soins
médicaux, l’évacuation rapide des cadavres et des
carcasses d’animaux, les mesures de prévention contre
des épidémies telles que le choléra, la fourniture de
nourriture et d’eau potable salubre, la distribution de
matériaux de construction pour les réparations et la
fourniture de fourrage pour les bovins. Chaque année,
quelque part dans le monde, cette démarche complète
de prévention des catastrophes naturelles peut sauver et
sauve effectivement des vies, et épargne à des
populations la dévastation par des cyclones tropicaux.
Ondes de tempête
L’onde de tempête est un effet secondaire du cyclone
tropical — qui peut être aussi destructeur que celui-ci.
Si ce «mur d’eau» atteint les terres, il peut s’y déverser
avec une force immense et emporter tout sur son
passage. L’onde de tempête massive de 1970, qui a fait
quelque 300 000 morts, après avoir balayé les
marécages côtiers du Bangladesh, en est un des
exemples les plus spectaculaires jamais enregistrés.
L’onde de tempête se forme à l’arrivée d’un
cyclone tropical sur une plate-forme continentale. La
combinaison de forts vents de mer et de basses
pressions barométriques provoque une montée
soudaine des eaux — un dôme allongé gigantesque
d’une hauteur de deux à cinq mètres, s’étendant sur 60
à 80 kilomètres. Si le cyclone atteint la côte, les vents
forts font monter la mer et poussent cette masse d’eau
sur les terres, avec généralement un effet extrêmement
destructeur.
Le tsunami est une énorme vague se déplaçant
rapidement. Il est très différent de l’onde de tempête,
sauf quant à sa capacité destructrice. Produit par un
tremblement de terre, une éruption volcanique ou une
déformation du fond de l’océan, et se déplaçant à une
vitesse de plus de 1000 kilomètres à l’heure en haute
mer, il est si long qu’il est à peine visible. Quand il
atteint la ligne côtière, il heurte le fond de la mer et
rebondit à une hauteur fantastique. Ce phénomène
menace particulièrement les côtes du Pacifique.
Etre informé
Naturellement, le risque que présente l’onde de tempête
augmente avec sa hauteur, qui dépend de plusieurs
facteurs :
• l’intensité du système cyclonique — la montée des
eaux croît avec la force du vent,
• la vitesse du cyclone — la montée des eaux croît
avec sa vitesse d’arrivée sur la côte,
• son angle d’incidence sur la côte — si le cyclone
arrive perpendiculairement, les eaux montent plus,
Figure 1 — Une marée de tempête
(NOAA)
• le point et l’heure d’arrivée sur les terres,
• le rayon du vent maximum,
• le profil du fond de la mer — plus la pente est
douce, plus forte est la montée des eaux,
• la géographie locale — des caractéristiques telles
que les baies, les promontoires et les îles, peuvent
faire entonnoir et augmenter la montée des eaux.
L’onde de tempête est généralement couverte de
vagues soulevées par le cyclone, qui augmentent son
pouvoir destructeur. Elle se combine avec des marées
océaniques, les hauteurs s’ajoutant — si le cyclone
atteint la côte à marée haute, l’onde de tempête
surmontant à la marée peut produire un mur d’eau de
six mètres. Ces «marées de tempête» peuvent se
précipiter à l’intérieur des terres, causant des dégâts
immobiliers et coupant les voies d’évacuation (figure 1).
Dans les bassins portuaires confinés, les marées
de tempête, les vagues et les courants peuvent détruire
des navires, des marinas et des bateaux de plaisance.
L’élévation considérable du niveau de la mer peut
causer de graves inondations dans les zones côtières,
particulièrement catastrophiques si la population est
dense et que ces zones se trouvent à moins de trois
mètres au-dessus du niveau de la mer. Les populations
des zones situées sur une plate-forme continentale aux
flancs escarpés (figure 2, à gauche) seront moins
inondées, car ceux-ci jouent le rôle de digue sous-
marine. Mais les grandes déferlantes restent très
dangereuses.
Les courants créés par une marée de tempête,
combinés à l’action des vagues, peuvent provoquer une
forte érosion des plages et des routes côtières, pouvant
finir par détruire des constructions du littoral. En sapant
leurs fondations, ils les rendent encore plus vulnérables à
l’ouragan. Une montée des eaux peut également
produire un mascaret, qui remonte les fleuves en
provoquant des inondations jusqu’à 15 kilomètres en
amont. L’inondation des terres cultivées par des eaux
salées inflige des pertes irréparables à l’économie côtière
et met en danger la santé publique, par exemple en
contaminant l’eau potable.
Les ondes de tempête constituent un risque
naturel majeur dans beaucoup de régions côtières et
insulaires du monde. Les plus fortes occasionnent
régulièrement de terribles destructions dans le
Figure 2 — Comportement d’une onde de tempête, pour différents
angles des flancs de la plate-forme continentale
(NOAA)
11

De hautes ondes de tempêtes provoquent des inondations dans
des zones côtières étendues (onde simulée)
Pacifique, l’Atlantique, l’océan Indien, la baie d’Oman
et le golfe du Mexique. Mais elles sévissent aussi au-
dessus des tropiques : au cours des dernières décennies,
les terres basses du littoral de la mer du Nord ont été
périodiquement inondées par des marées de tempête.
A l’avenir, l’élévation du niveau de la mer résultant
du réchauffement planétaire, combiné à la subsidence
du sol le long de lignes côtières fragiles, pourra se
traduire par des ondes de tempête plus fortes et une
plus grande vulnérabilité à celles-ci. On peut aussi
craindre qu’une augmentation des températures de la
surface de la mer n’augmente le nombre de cyclones
tropicaux qui atteignent les côtes, et donc la fréquence
des ondes de tempête.
Etre préparé
L’évaluation des risques, le zonage, l’aménagement du
territoire et la programmation de l’aménagement des
terrains sont des tâches importantes pour la prévention
des ondes de tempête. Concernant ce risque, la réduction
des effets et la préparation comprennent une combinaison
de mesures, allant d’initiatives visant à protéger les
populations exposées, à l’alerte précoce sur l’imminence
de montées des eaux provoquées par des cyclones
12
tropicaux et aux plans d’évacuation des personnes vivant
dans des zones exposées, sur des terres basses du littoral.
La plupart des plans de réduction des effets des
ondes de tempête prévoient d’importants travaux. La
construction d’ouvrages longitudinaux de défense des
côtes, ainsi que celle de barrages et de digues de
protection permettent de réduire l’exposition des
populations. Les remblais côtiers sont d’une valeur
inestimable, et il convient de les concevoir en sorte de
résister à la hauteur et à la force des ondes de tempête, à
l’action combinée du vent et des vagues, et de ne pas
être dépassés par la montée des eaux. Dans les deltas
fluviaux, les projets de remblais côtiers doivent être
planifiés concurremment avec d’autres projets de
développement, par exemple de routes et de ports.
Une alerte précoce donnée en temps opportun et
l’information du public sur les plans d’évacuation sont
essentielles pour réduire les risques. D’évidence,
compte tenu de l’interdépendance de ces phénomènes,
l’alerte précoce sur les ondes de tempête est fortement
tributaire de celle concernant les cyclones (voir page
10, la présentation du système mondial complet).
Heureusement, un système de prévision des montées
d’eau, utilisant des modèles mathématiques des zones
côtières et incorporant des fonctions d’alerte précoce et
d’information du public, est déjà en place. Il a rendu de
grands services, comme en témoigne la réduction du
chiffre annuel de pertes de vies humaines, passé de
quelques milliers à quelques centaines.
A l’avenir, les spécialistes responsables des
systèmes d’alerte précoce devront relever un défi
majeur, à savoir réduire de nombre de fausses alertes
qui entraînent des évacuations inutiles dans les régions
les plus exposées. Les prévisions du lieu et de l’ampleur
des montées d’eau devront être établies de façon plus
précise. Mais de tels progrès requièrent des
investissements considérables dans des recherches
visant à améliorer les méthodes de prévision. En même
temps, il faut donc soutenir sans relâche les campagnes
de sensibilisation et d’éducation du public, qui sont des
éléments essentiels de l’état de préparation à ce
phénomène et de la réduction de ses effets.
Inondations
Au cours de la dernière décennie du XXe siècle, un
milliard et demi de personnes ont été affectées par des
inondations. Deux ans plus tard, en Europe, au cours
de l’été 2002, de larges couloirs territoriaux, allant du
Royaume-Uni jusqu’en Bulgarie et en Roumanie, ont
souffert de graves inondations. On constate que ce
risque naturel augmente — ce dont sont partiellement
responsables les changements climatiques, qui ont
provoqué de plus fortes précipitations dans certaines
régions de l’hémisphère Nord.
Mais l’augmentation du nombre de victimes des
inondations ne résulte pas seulement du changement
climatique. Comme de plus en plus de personnes
prennent le risque de s’installer dans des zones
inondables, une gestion attentive et complète de ces
régions s’impose, visant à protéger l’habitat humain et
le milieu naturel.
Etre informé
Les inondations se produisent quand les eaux pluviales
ou de la fonte des neiges s’accumulent plus vite que les
sols ne peuvent les absorber ou les fleuves les évacuer.
Elles peuvent prendre toutes sortes de formes, allant
des crues soudaines d’ampleur limitée, aux nappes
d’eau couvrant d’énormes surfaces; et elles peuvent être
provoquées par de gros orages, des tornades, des
cyclones tropicaux, El Niño (phénomène par lequel le
réchauffement des eaux dans une partie du Pacifique
entraîne un dérèglement des conditions
météorologiques dans une région très éloignée), les
moussons, des embâcles ou la fonte de la neige. Dans
les zones côtières, elles peuvent être
provoquées par les ondes de tempête
produites par des cyclones tropicaux, par
des tsunamis ou par le gonflement de Pluie
fleuves résultant de marées d’une hauteur
exceptionnelle. Les grands lacs peuvent
déborder quand les fleuves qui les
alimentent sont gorgés d’eaux de fonte. Les
ruptures de barrage peuvent occasionner Terre
des inondations catastrophiques. Une
démarche interdisciplinaire est donc
essentielle pour comprendre les
inondations, car elles peuvent résulter de
beaucoup de causes différentes.
Les inondations représentent certes une
menace pour les vies et les biens, mais elles
régénèrent aussi les terres humides,
renouvellent les réserves halieutiques et
réapprovisionnent les systèmes d’irrigation.
Les zones inondables présentent un
immense potentiel de développement : leur
proximité des fleuves garantit des sols riches,
un approvisionnement en eau abondant et un moyen de
transport. Dans les régions telles que la vallée du Nil, la
crue annuelle est bienvenue, car elle refertilise les
champs. Mais la construction d’habitations et la pratique
d’activités agricoles dans les zones inondables
augmentent les dommages causés par les crues.
L’extension croissante des établissements humains dans
ces zones retient l’attention des spécialistes de disciplines
diverses, des décideurs et du public. Les organismes de
secours et d’aide, qui assurent une surveillance des
inondations et s’attachent à en réduire les effets, suivent
également de près cette évolution.
Etre préparé
La prévision des inondations peut être délicate, selon le
type et la nature du phénomène qui les provoque. Par
exemple, des inondations soudaines très étendues sont
souvent provoquées par de fortes pluies tombant dans
une région située à l’intérieur d’une zone plus vaste
soumise à des précipitations plus légères — une
situation déroutante, rendant difficile la prévision du
lieu où l’inondation sera la plus forte. La prévision des
inondations liées à un cyclone tropical, causées par des
fortes pluies ou par des ondes de tempêtes risquant de
déferler à l’intérieur des terres, peut aussi être une
tâche complexe, car il faut préciser le lieu d’impact, le
stade d’évolution du phénomène responsable et les
caractéristiques physiques de la côte.
Pour faire des prévisions aussi précises que
possible, les Services hydrologiques nationaux (SHN)
et les Services météorologiques nationaux (SMN)
Ruissellement
Cours d'eau Mer
Mer
Pollution
Crues Eaux de ruissellement
et de crues
Sédiments
Figure 1 — Interactions entre les milieux terrestres et aquatiques
13
 Tableau 1 — Stratégies
et mesures applicables à Stratégie
la gestion des crues
Atténuer les inondations
Réduire la vulnérabilité
Atténuer les effets des inondations
Préserver les ressources
naturelles
établissent, sous l’égide de l’OMM, des prévisions de
crues reposant sur des «prévisions quantitatives des
précipitations» (PQP), qui sont devenues plus précises
ces dernières années, en particulier pour les quantités
de précipitations faibles et modérées; mais les
volumes abondants et les événements exceptionnels
restent difficiles à prévoir. La mise en place de
systèmes intégrant des capacités de prévision
météorologique et des événements hydriques ouvre la
voie à une démarche véritablement intégrée.
La prévision doit aussi être un effort de
coopération multidisciplinaire. Compte tenu des
nombreux problèmes inhérents aux inondations et de
la complexité des facteurs, les responsables de la
gestion de ces risques doivent œuvrer de concert avec
les météorologistes, les hydrologues, les urbanistes et
les autorités chargées de la défense civile en utilisant
les modèles intégrés. La détermination des incidences
socio-économiques des inondations implique un
Figure 2 — Inondations au Mozambique, mars 2000
Philip Wijmans, LWF/ACT Mozambique
14
Mesures
Barrages et réservoirs. Digues.
Dérivation des eaux de crues.
Gestion du bassin hydrographique.
Amélioration des chenaux.
Réglementation applicable aux
plaines inondables.
Politiques de développement et de reconversion. Conception
et emplacement des installations.
Codes d’habitation et de construction. Protection contre les
crues.
Prévision et alerte de crues
Information et éducation.
Préparation. Rétablissement.
Assurance contre les inondations.
Zonage et représentation des plaines inondables
suivi attentif des constructions et autres activités
conduites dans les lits de rivières et alentour. Il est
essentiel de disposer d’informations à jour et
précises, obtenues par tous les moyens —
observation en surface, télédétection, satellites et
modèles informatiques. Dans les pays en
développement, il convient donc de donner priorité à
un renforcement des capacités, leur permettant de
tirer parti des progrès dans ces domaines.
Dans beaucoup de pays, l’évaluation des risques
d’inondation et leur gestion se pratiquent depuis
plusieurs dizaines d’années. Mais aujourd’hui, ces
disciplines se transforment. Depuis peu, on s’oriente
vers une gestion intégrée des ressources en eau, qui
considère les inondations à la fois comme un risque et
une ressource.
Les SHN et les SMN collectent régulièrement les
données nécessaires à l’établissement de stratégies de
gestion des crues grâce à divers systèmes d’information
tels que la Veille météorologique mondiale (VMM) et le
Système mondial d’observation du cycle hydrologique
(WHYCOS). La démarche idéale vise un équilibre de la
conservation et du développement durable des
ressources, d’une part, et des aspirations socio-
économiques, d’autre part. Une bonne stratégie de
gestion des inondations doit contribuer de façon
durable au développement économique de tout le basin
fluvial, compte tenu des ressources en sol et en eau —
ce qui peut donner lieu à des incitations à quitter les
zones menacées d’inondations, en particulier en
l’absence des ressources nécessaires pour réaliser une
infrastructure de protection des personnes et des biens.
Généralement, la stratégie de gestion des
inondations la plus appropriée devra à la fois réduire
leur effet et renforcer la capacité d’y faire face. Parmi
les moyens pour réaliser cet objectif, figure la
construction de digues et de remblais, et un zonage
tenant compte du risque d’inondation. Il ne faut pas
oublier que les effets d’inondations résultant de mêmes
 Figure 3 — WHYCOS de l’OMM.
Schéma général du réseau de
Satellite météorologique
collecte et de distribution des
GRDC données

Autres centres

Centre
régional
Station Service
hydrologique hydrologique
WHYCOS national Service Réseau
météorologique national
FR

TIÈRE
ON SMT national
TIÈ
RE Utilisateurs INT Ligne

FRON
finals ERN spécialisée
ET
Station Service
hydrologique hydrologique
WHYCOS national

conditions météorologiques peuvent varier En matière de prévision, le déploiement de

considérablement avec le niveau de développement —
car le développement peut se traduire par une
altération de la capacité d’écoulement des fleuves et
augmentation du nombre de bâtiments. La gravité et la
fréquence des inondations peuvent donc augmenter de
façon significative dans certaines régions, lorsqu’elles
se développent. Il faut tenir compte de ces facteurs
dans les stratégies de gestion, qui doivent guider tous
les programmes généraux d’atténuation des effets des
catastrophes et tous les plans de gestion des risques.
Les changements climatiques sont un autre
élément dont il faut tenir compte dans les stratégies de
gestion des inondations. Les projections du Groupe
d’experts intergouvernemental sur l’évolution du
climat (GIEC) montrent que les changements
climatiques sont liés à l’augmentation du niveau des
précipitations et à l’élévation du niveau de la mer, qui
peuvent l’un et l’autre accroître les inondations.
moyens requis pour la gestion des inondations appelle
une démarche intégrée. Pour obtenir des résultats, il
faut des données issues d’un grand nombre de sources
— dans le cas présent, les collectivités locales et des
spécialistes de domaines variés. La prévision n’est pas
seulement tributaire des connaissances scientifiques,
mais aussi des connaissances locales, indigènes;
d’innovations dûment testées et vérifiées, mais
également de toute innovation prometteuse. Des
accords de coopération régionaux sont nécessaires,
quand des fleuves traversent des frontières nationales.
Enfin, quand une inondation atteint des
proportions catastrophiques, l’état de préparation joue
un rôle important. Plans d’évacuation, secours
d’urgence et reconstruction — tout doit être prêt. Bref,
les plans de prévention et d’atténuation des effets des
catastrophes doivent être aussi complets que tous les
autres aspects de la démarche.

15
 Glissements de terrain et coulées de boue
En décembre 1999, a eu lieu la pire catastrophe naturelle
de l’histoire du Venezuela. Après deux semaines de
pluies persistantes, la saturation du sol avait atteint un
niveau considérable — ce qui a déclenché de milliers de
glissements de terrain et de coulées de boue, qui ont
ravagé les pentes du mont Avila, dans l’Etat de Vargas,
emportant des villes, faisant un nombre de morts
estimé à 15 000 personnes et coûtant près de deux
milliards de dollars des Etats-Unis.
Il s’agit certes d’un exemple extrême. Les
glissements de terrain et les coulées de boue sont
néanmoins indéniablement des phénomènes très
dangereux, faisant, tous les ans, dans le monde, des
milliers de morts et de blessés, et provoquant des
dégâts se chiffrant en milliards de dollars. Un
glissement de terrain se produit quand de fortes pluies
ou une fonte de neige rapide déverse de grandes
quantités de terre, de roche, de sable ou de boue, qui
dévalent d’une montagne, de préférence nue ou
dévastée par un feu de forêt ou de broussailles. Ce
phénomène tend à aggraver les effets des inondations
qui peuvent résulter des conditions météorologiques
extrêmes qui l’ont causé. Il peut également être
déclenché par un tremblement de terre ou une
éruption volcanique, mais il est le plus souvent
imputable aux infiltrations d’eau.
Les coulées de boue ou de gros débris sont
essentiellement des glissements rapides de terrain
humides, qui se produisent quand des masses dissociées et
humides de débris ou de dépôts volcaniques deviennent
instables du fait d’une saturation résultant de pluies, de la
fonte de la neige ou de la glace, ou du débordement d’un
lac de cratère. Le résultat est un fleuve de boue qui s’écoule
ou une «boue liquide». Généralement, une coulée de boue
commence par un glissement de terrain superficiel, sur
une pente raide. Sa vitesse peut dépasser 50 kilomètres à
l’heure. En cours de route, elle peut se charger de grandes
quantités de sédiments, de blocs rocheux, d’arbres et
même de véhicules — des débris massifs qui frappent tout
sur son passage, avec une force considérable. Les coulées
de boue venant de nombreuses sources différentes peuvent
se mêler dans des lits de rivière, ce qui
augmente leur force destructrice. Quand elles
atteignent un terrain relativement horizontal,
la boue et les débris s’étalent sur de grandes
étendues, s’accumulant parfois en dépôts
épais qui peuvent faire de grands dégâts dans
les zones bâties.
Du fait de leurs densité et viscosité relativement fortes,
les flots de débris peuvent déplacer et même emporter
des objets aussi gros que des ponts ou des wagons de
chemin de fer. Ces phénomènes sont redoutables et les
zones menacées nécessitent des stratégies très efficaces
de gestion des risques.
La formulation de ces stratégies commence par
l’établissement de cartes des risques. Ce sont
essentiellement des cartes topographiques — indiquant
le niveau potentiel, dans une région, de risque de
glissements de terrain, d’inondations soudaines et de
coulées de débris ou de boue — fondées sur des
données sur la fréquence et l’intensité d’événements
effectifs. Les organismes d’aménagement et
d’urbanisme peuvent utiliser ces cartes pour établir de
nouvelles politiques d’utilisation des terres et définir des
procédures d’urgence dans les zones développées. En
phase de développement, il convient, pour guider la
construction, de mettre en œuvre un système de zonage
utilisant un code de couleurs, complété de cartes des
risques précisant les endroits à éviter, notamment les
fortes pentes, les cours d’eau, les lits de cours d’eau
asséchés inondables et les pieds de lits de torrents.
Les populations vivant dans des zones exposées
peuvent améliorer leur sécurité en comprenant le
potentiel de risque de leur région, en prenant des
mesures pour le réduire et en s’exerçant à exécuter les
procédures du plan de préparation. Elles peuvent
obtenir des informations sur les glissements et les
coulées de boue qui se sont produits dans la région,
auprès de personnes âgées qui y vivent, des agents des
services publics, des commissions géologiques
nationales et des ministères s’intéressant aux ressources
naturelles. Les glissements de terrain ont tendance à se
reproduire en certains lieux, notamment au pied de
fortes pentes et de couloirs d’écoulement, ainsi qu’au
flanc de collines aménagées où sont utilisés des
systèmes de dispersion d’égouts à épandage.
Avant d’acheter une maison dans une zone à haut
risque ou d’y construire, il importe de rechercher les
indices de mouvement de terrain — comme une

Etre informé
Les glissements de terrain et les coulées de
boue peuvent ensevelir, broyer ou emporter
des personnes, des objets ou des habitations.
Dommages causés par la chute de débris de deux immeubles dans le cône
d’alluvionnement du fleuve San Julian (la photo de droite est un gros plan
de l’immeuble figurant à l’arrière plan de la photo de gauche)

16
inclinaison des arbres dans le sens de la pente, une
résurgence d’eau et des failles dans le sol. Il faut être
attentif à la configuration des couloirs d’écoulement
des eaux de pluie sur les pentes voisines, en particulier
à la convergence des eaux de ruissellement.
Etre préparé
Les glissements de terrain et les coulées de boue se
produisent généralement sans signes avant-coureurs, et les
roches, sols et autres débris dévalent les pentes avec une
telle force, qu’ils peuvent tout dévaster sur leur passage. La
prévention, les mesures de réduction des effets de ces
catastrophes et la préparation doivent concerner tout le
monde, du niveau national au niveau individuel.
Les stratégies de réduction des effets des
glissements de terrain et des coulées de boue et de
débris peuvent comprendre la construction d’ouvrages
hydrauliques de régulation des écoulements, de
barrages de retenue des sédiments, ainsi que le
boisement, car les arbres fixent le sol et agissent comme
barrières pour stopper les écoulements. Parmi les
autres mesures, figurent la surveillance des variables
météorologiques, hydrologiques, hydrauliques et
sédimentaires, l’établissement de cartes de risques, la
mise en place de systèmes d’alerte et la définition de
procédures d’urgence.
Les plans d’évacuation sont essentiels pour les
collectivités et les personnes exposées. Les voies
d’évacuation doivent être bien étudiées, en définissant
les centres de secours et en fixant le rôle de chacun. Les
personnes concernées doivent toujours participer
activement à l’établissement de ces plans.
Comme il est peu probable que les glissements de
terrain et les coulées de boue affectent des zones
étendues, il est utile de faire participer à la planification
préalable à ces catastrophes, les collectivités voisines,
vivant à l’extérieur de la zone à risque. La presse locale
peut aussi prévoir une rubrique spéciale à l’intention
des collectivités, des villages ou des régions exposés,
donnant les renseignements nécessaires en cas
d’urgence, tels que les numéros de téléphone des centres
d’urgence locaux et des hôpitaux. Peuvent également y
figurer des comptes rendus sur les actions menées par
les administrations municipales et régionales pour
réduire le risque de glissements de terrain dans la
région et sur la situation en matière de règlements
locaux de zonage relatifs à l’utilisation des sols.
Les propriétaires peuvent planter des espèces
couvre-sol sur les pentes et construire des murs de
retenue dans les zones exposées aux coulées de boue.
Des tranchées peuvent être creusées ou des murs
déflecteurs construits, pour dévier la coulée autour des
bâtiments. Il peut être très utile de consulter une
entreprise compétente, spécialisée en génie
géotechnique, des structures ou civil, pour des avis et
conseils sur les questions relatives aux glissements de
terrain et aux mesures à prendre en la matière.
Lors de la traversée d’une zone à risque exposés
aux glissements de terrain et aux coulées de débris,
le voyageur ne doit pas oublier que dans ces régions,
il peut être très dangereux de prendre la route
pendant une forte tempête. Les talus bordant les
routes sont particulièrement exposés aux glissements
de terrain. Il est vital de surveiller avec vigilance
toute augmentation ou diminution soudaine du
débit des cours d’eau et canaux, et toute
transformation de leur eau, normalement claire, en
eau boueuse. Il faut être attentif à tout bruit
inhabituel pouvant indiquer le mouvement de
débris, tels que celui d’arbres qui se brisent ou du
heurt de blocs rocheux. Un ruissellement d’eau ou la
chute de débris ou de boue, peut annoncer de forts
glissements de terrain en amont.
Au départ d’un glissement de terrain, il faut éviter
de se trouver au sommet ou au pied de falaises ou de
remblais, ou sous une corniche rocheuse. Il importe de
se tenir à l’écart des rives, arbres, lignes et colonnes
d’alimentation, ainsi que d’éviter les fonds de vallée, et
leur préférer leurs flancs et les zones élevées, plus
sûres. A l’intérieur des habitations, il faut se réfugier
dans la partie la moins exposée du bâtiment et se
barricader sous un meuble solide tel qu’une table, un
banc ou un lit de camp. Le deuxième étage est le plus
sûr. Il est essentiel de tenir compte des bulletins
d’urgence diffusés à la radio ou à la télévision, car une
coulée de boue risque d’être suivie d’inondations, si les
fortes pluies persistent. Si la population a été évacuée,
elle doit être informée de la possibilité de son retour,
car le danger d’autres glissements peut subsister. Les
dégâts subis par les fondations des bâtiments, les
cheminées et les terrains avoisinants devront être
évalués. Les zones endommagées devront être
replantées le plus tôt possible, car l’érosion résultant
de la perte de la couverture végétale peut entraîner des
inondations soudaines.
Beaucoup peut être fait pour parer aux pires effets
des glissements de terrain et des coulées de boue, mais
comme pour toutes les stratégies de prévention, de
réduction des effets et de préparation, une démarche
exhaustive et coordonnée est essentielle.
17
 Les avalanches*
Par leur taille et leur vitesse, les avalanches comptent
parmi les catastrophes naturelles les plus terrifiantes.
Elles figurent en effet parmi les plus mortelles. En
Europe, au cours de l’hiver 1998/99 — un des plus
enneigés des 50 dernières années — une série
d’avalanches massives a frappé des villages et des
stations, dans toutes les régions de haute montagne,
faisant plus de 200 morts et ruinant beaucoup
d’économies locales. Mais, bien que spectaculaire et
très général, ce risque est responsable, au niveau
mondial, de moins de 500 morts par an. Il doit cette
place modeste dans le classement des calamités
naturelles en fonction de leur mortalité, au fait que la
plupart des avalanches se produisent dans des régions
éloignées inhabitées ou à habitat dispersé.
Une avalanche est une grande masse de neige et de
glace qui dévale les fortes pentes de montagnes ou de
collines, à des vitesses pouvant atteindre plusieurs
centaines de kilomètres à l’heure. C’est un des plus
grands risques auxquels sont exposées les personnes
qui vivent dans le régions montagneuses, y voyagent ou
y passent des vacances en hiver ou au printemps,
quand les chutes de neige sont les plus fortes. Une
saison marquée par des avalanches en nombre
inhabituel ou exceptionnellement destructrices, peut
avoir de lourdes conséquences socio-économiques.
Dans les zones montagneuses des pays en
développement, l’expansion de secteurs tels que les
activités de loisir, la construction, ainsi que
l’hébergement et les services destinés aux collectivités,
peut augmenter la vulnérabilité de ces régions aux
dégâts des avalanches.
Etre informé
240
D’une façon générale, on peut classer les
avalanches selon leur causes : des activités
de loisir et de sport ou causes naturelles.
Celles du premier type — les plus courantes 160
— sont déclenchées par des skieurs, des
randonneurs ou autres enthousiastes des
sports d’hiver, qui provoquent leur propre
ensevelissement ou celui d’autres
personnes. Ces accidents sont souvent
mortels : environ 50 % des personnes
ensevelies par une avalanche meurent si
elles ne sont pas secourues dans la demi-
heure. Chaque année, dans les zones
montagneuses des pays industrialisés,
jusqu’à 220 morts peuvent ainsi être imputées
aux activités de loisir et de sport (figure 1).
________
* Chapitre rédigé à l’aide de la contribution de M. Keith Gordon Kennedy du Centre suisse d’hydrogéologie de l’Université de Neuchâtel
et d’autres collègues de l’Office fédéral de l’environnement, des forêts et du paysage
18
Les avalanches d’origine naturelle résultent de
conditions météorologiques extrêmes. Par exemple, si
les chutes de neige sont exceptionnellement fortes, une
épaisse couche poudreuse se forme sur les pentes — ce
qui représente des conditions idéales d’avalanche. En
fait, il est assez courant que les avalanches imputables
aux activités de loisir et de sport se produisent dans ces
conditions, mais le facteur significatif est néanmoins
considéré comme météorologique.
Les avalanches peuvent également être classées
d’après l’état de leur neige. La plupart des spécialistes
s’accordent sur deux types principaux de neige —
poudreuse ou en plaques (figure 2, respectivement à
droite et à gauche). Une avalanche de neige poudreuse
se comporte comme si elle était formée de poudre ou
de sable à gros grains : une action sur une petite partie
suffit pour que le reste se précipite à une vitesse
pouvant atteindre 400 kilomètres à l’heure. D’après ces
spécialistes, les avalanches de neige en plaques sont
toutefois les plus dangereuses. Les plaques forment des
couches stratifiées, extrêmement denses, pouvant
atteindre plusieurs milliers de mètres carrés. Ces
avalanches partent soudainement et leur vitesse peut
atteindre 300 kilomètres à l’heure.
Le départ d’avalanches se produit le plus souvent au
cours ou après de fortes tempêtes de neige, lorsque celle-ci
est instable et relativement poudreuse. Le printemps est
particulièrement dangereux, en raison de dégels
prolongés. Quand la neige est prête à partir, l’avalanche
peut être déclenchée par l’un des quatre facteurs
principaux suivants : une pente raide, de 25 à 50 degrés;
un fort enneigement; une instabilité résultant de la
fragilité d’une couche; ou un impact, par exemple produit
par une personne qui marche ou saute sur la neige.
209
204
193
176
168 170
148
143 140
146
138
145
133
110
81
90
80
0
Figure 1 — Mortalité dues aux avalanches de 1985 à 2001.
(Commission internationale de secours alpin, 1992-2001.
Statistiques pour l’Europe et l’Amérique du Nord)

Figure 2 — Les deux principaux types d’avalanche
(Institut fédéral suisse de recherche sur la neige et les avalanches)
Etre préparé
Dans les régions exposées aux avalanches, la
prévention doit comprendre la détermination du type
de risque — risque lié aux activités de loisir et
touristiques ou risque naturel — et l’évaluation de la
menace que les avalanches représentent pour la vie et
les ressources. Concernant la réduction de leurs effets
potentiels, il est crucial d’éviter, par exemple, de
construire des habitations ou d’implanter des services
dans des couloirs d’avalanche. Les programmes de
renforcement des capacités et de sensibilisation des
collectivités, visant au partage des compétences et du
savoir-faire techniques existants, sont un pas vers la
réalisation de cet objectif. L’élaboration de stratégies de
planification urbaine et régionale, assorties de
tactiques réalistes et d’un bon rapport efficacité-coût,
de mise en application dans les zones exposées aux
avalanches, est également un moyen crucial de
réduction de leurs effets.
Dans ces régions, il faut augmenter la sécurité de
l’accès aux zones de sports d’hivers et autres activités
de loisir. Ici, de bons programmes d’information du
public peuvent contribuer à sensibiliser les visiteurs
aux dangers des avalanches. De tels programmes sont
déjà en place dans la plupart des régions de sports de
montagne. Concernant l’alerte précoce, les techniques
mises en œuvre deviennent de plus en plus
perfectionnées, avec l’interconnexion des stations
d’observation météorologique et les prévisions fondées
sur des données de réseau — ces méthodes permettant
de lier les prévisions de risque d’avalanche aux
configurations régionales de tempête, dans les zones où
les effets risquent d’être dangereux. Dans la plupart de
pays développés, des stations de radio et des sites
internet spécialisés diffusent régulièrement des avis
d’avalanche et invitent la population à suivre les
derniers avertissements des sites locaux. Les sites

ECHELLE NORMALISÉE DES RISQUES D’AVALANCHE ET INFORMATIONS CORRESPONDANTES

Niveau de risque Manteau neigeux Probabilité d’avalanche

(Couleur)

FAIBLE Généralement bien Déclenchement possible d’avalanches, seulement sous l’effet

(vert) adhérent et stable de surcharges élevées, sur quelques pentes très raides extrêmes.
Seules quelques petites avalanches naturelles (décollements)
sont possibles.

MODÉRÉ Modérément adhérent Déclenchement possible d’avalanches, sous l’effet de surcharges

(jaune) sur certaines pentes raides, élevées, en particulier sur les pentes raides signalées dans
autrement généralement le bulletin. Grosses avalanches non probables.
bien adhérent

CONSIDÉRABLE Modérément à faiblement Déclenchement possible, parfois même avec de faibles surcharges.
(ocre) adhérent sur beaucoup Le bulletin peut signaler beaucoup de pentes qui sont
de pentes raides particulièrement exposées. Dans certaines conditions, départ
d’avalanches naturelles d’ampleur moyenne et parfois grande.

ELEVÉ Faiblement adhérent Déclenchement probable d’avalanches, même avec de faibles

(orange) presque partout surcharges, sur beaucoup de pentes raides. Dans certaines
conditions, départ probable d’avalanches naturelles d’ampleur
moyenne et parfois grande.

EXTRÊME Généralement faiblement Nombreuses grosses avalanches naturelles probables, même

(rouge) adhérent et très instable sur terrain à pente modérée.

19

spécialisés émettent des alertes précisant le niveau de
danger, selon une échelle normalisée internationale
(voir tableau ci-dessus).
La préparation à ces catastrophes, comme la
facilité d’évacuation à grande échelle, est plus
problématique. Par exemple, beaucoup de pays sont
très réticents à prendre la décision de reloger des
collectivités — une solution drastique, mais dans
certains cas logique. Le grand défi est lié aux progrès
mondiaux en matière d’aménagement des terrains,
qui conduit à une augmentation des exigences en
matière de ressources dans les régions éloignées.
Transmettre le message, quant à l’importance de la
sensibilisation aux avalanches, aux pays en
développement, lorsqu’ils créent ou agrandissent des
20
villages, des villes et des voies de transport dans les
régions montagneuses, leur confère des avantages
socio-économiques cruciaux.
Il n’existe pas d’organisme international de
coordination du suivi ou de la prévision des
avalanches, mais certains organismes nationaux ont
perfectionné des compétences particulières dans les
régions montagneuses, notamment les Alpes, les Andes,
l’Himalaya, les Montagnes Rocheuses et l’Oural. Dans
certains pays exposés aux avalanches, de puissantes
associations œuvrent de concert pour protéger la
sécurité publique et pour réduire les coûts
économiques. De plus en plus, des réseaux de
spécialistes aident à établir les tendances et à partager
les résultats des recherches, afin de permettre à tous les
pays exposés aux avalanches d’être mieux informés,
d’améliorer leurs connaissances et de réduire les
risques dans ce domaine.
Dans beaucoup de régions, des sites internet
présentent des bulletins sur l’état de la neige et la
situation en matière d’avalanches. Beaucoup,
également, indiquent des liens vers des sites semblables
mis en place par des régions et des Etats. Les Etats-
Unis, le Canada et l’Europe disposent de centres alpins
interconnectés, coopérant avec les régions limitrophes
à une diffusion rapide de l’information sur les
situations critiques, auprès du public.
Sécheresse
Parmi les catastrophes naturelles liées à l’eau, la
sécheresse tient une place unique. Elle résulte en effet
du manque de cet élément et non de son excès. En
outre, elle dure relativement longtemps et non quelques
instants, comme une avalanche ou une crue soudaine.
Et elle peut sévir presque partout. Elle est souvent
considérée comme propre aux régions arides
d’Afrique, en particulier le Sahel, mais ces dernières
années elle a aussi frappé l’Inde et des parties de la
Chine, ainsi que le Moyen-Orient, l’Australie, des
régions de l’Amérique du Nord, le Mexique et l’Europe.
En fait, la sécheresse est une composante
périodique normale de tout climat, résultant d’une
diminution naturelle des précipitations à une certaine
époque. Lorsque les pluies deviennent relativement
faibles ou peu fréquentes, l’équilibre moyen entre les
précipitations et le processus d’évapotranspiration peut
être rompu, et une période de sécheresse peut
s’instaurer. Elle peut être très destructrice, en particulier
lorsqu’elle est accompagnée de températures élevées, de
vents forts et d’une faible humidité relative. Les cultures
peuvent être détruites et le bétail mourir, la soif et la
malnutrition prennent alors le relais, et le préjudice
humain, économique et environnemental augmente
rapidement. Comme il est maintenant
considéré que le changement climatique
entraîne une augmentation de l’intensité et
de la fréquence des sécheresses en Afrique
et en Asie, le problème nous touche de près.
Inévitablement, ce sont les terres
sèches — arides, semi-arides et
subhumides — avec leurs écologies fragiles
et leurs économies marginales, qui sont les
plus vulnérables. Recouvrant quelque 40 %
des terres émergées et hébergeant une forte
population et des espèces végétales et
animales uniques, ces terres sèches
représentent un enjeu considérable pour
l’avenir.
prise habituellement sur les 30 dernières années, et par
la durée de la période sèche. Un hydrologue, pour la
mesurer, examinera plutôt comment des précipitations
déficitaires se répartissent entre les réservoirs, les lacs
et l’eau souterraine, en mesurant l’écoulement fluvial
et les niveaux de l’eau. La sécheresse hydrologique est
généralement déphasée par rapport à la sécheresse
météorologique et agricole, car les déficits hydriques
sont plus longs à se manifester au niveau des lacs et des
cours d’eau. La sécheresse agricole, quant à elle, se
détermine selon une méthode composite, consistant
en un examen des taux d’humidité des plantes, suivi de
la détermination de facteurs, tels que le déficit de
précipitations ou le bas niveau des eaux souterraines.
Enfin, la sécheresse socio-économique est la situation
dans laquelle la demande d’un bien économique
excède l’offre, du fait d’un déficit hydrique d’origine
météorologique.
Quel que soit le système mesuré, la sécheresse est, à
son début, difficile à détecter. Qualifiée parfois de
«phénomène rampant», elle peut être à la fois générale et
latente, s’installant lentement mais régulièrement dans
toute une région, pour s’y attarder longtemps. Comme
elle est plutôt insidieuse que soudaine, les réponses ont

Etre informé
Pour prendre des mesures efficaces lors
d’une sécheresse, il est crucial de
déterminer quand elle a commencé, sa
Photo : D. Juntawonsup/PNUE/Select

gravité et le moment où il est probable

qu’elle se terminera. Il peut être utile
d’examiner comment elle affecte les
différents systèmes — météorologique,
hydrologique, agricole et socio-
économique.
Du point de vue météorologique, la
sécheresse se définit généralement par un
degré d’aridité, par rapport à une moyenne

21
 tendance à être tardives et non coordonnées
— on gère la crise et non le risque.
Comparées aux conséquences des autres
risques naturels, celles de la sécheresse,
qu’elles soient économiques, environne-
mentales ou sociales, sont les plus graves.
L’agriculture, les forêts et la pêche sont
fortement tributaires de l’eau — et toute
baisse de la production agricole ou des
élevages, ou toute augmentation des
infestations d’insectes, de l’érosion éolienne
ou des incendies de forêt, due à la sécheresse,
porte un coup à l’économie. Les détaillants
locaux auprès desquels se fournissent les
agriculteurs sont, eux aussi, touchés.
Le milieu naturel est très vulnérable à
la sécheresse. Elle affecte les plantes, les
animaux et leur habitat, ainsi que la qualité
de l’air et de l’eau; la biodiversité est
souvent atteinte. Elle peut produire une
dégradation et une érosion du sol, parfois
permanentes. Dans les écosystèmes Incidences économiques
sensibles à terre sèche, la combinaison
d’une sécheresse extrême et persistante et
d’une surexploitation par l’homme, telle
que le surpâturage et la déforestation, peut même
entraîner une désertification.
La sécheresse désorganise fortement les activités
normales de la société. Elle peut mettre en danger la
sécurité et la santé publiques, et compromettre la
qualité de vie, c’est également une cause notoire de
malnutrition et de famine dans beaucoup de parties de
l’Afrique, ainsi que dans d’autres pays. Elle peut être à
l’origine de conflits entre des utilisateurs d’eau. La
migration peut devenir un problème significatif, car les
populations fuient la sécheresse pour trouver des zones
disposant de plus de nourriture et d’eau, même dans
des pays limitrophes. Avec l’afflux en nombre de
personnes déplacées ou de réfugiés, de nouveaux
problèmes d’hébergement, sanitaires et de subsistance,
se posent. Autre difficulté : sous la pression du besoin
de terres agricoles, les populations peuvent se réfugier
dans des zones marginales moins productives où le sol
s’épuise plus facilement et où la vie est d’une façon
générale plus difficile. A l’avenir, les conséquences de la
sécheresse pour l’homme devraient donc être plus
lourdes que par le passé.
Des systèmes d’alerte précoce peuvent réduire les
conséquences d’une sécheresse en l’annonçant en
temps opportun. Les stations classiques d’observation
en surface des Services météorologiques nationaux, ne
sont certes qu’un maillon de la chaîne, mais elles
fournissent des données et des séries chronologiques
de référence essentielles, nécessaires pour améliorer la
surveillance du climat et du système hydrologique. Le
suivi de certains indicateurs, tels que le débit fluvial ou
l’humidité du sol, peut aider à établir des valeurs
d’indices de sécheresse — généralement des nombres
simples, beaucoup plus pratiques pour prendre des
22
Variabilité naturelle du climat
Températures élevées, forts vents,
Précipitations insuffisantes faible humidité relative,
météorologique
(quantité, intensité, période) ensoleillement accru, couverture
Sécheresse
nuageuse inférieure à la normale
Réduction de l'infiltration, de Augmentation de
l'écoulement, de la protection
profonde et de la recharge des l'évaporation et de la
nappes souterraines transpiration
Teneur insuffisante
en eau du sol
Sécheresse
agricole
Manque d'eau pour les plantes,
biomasse et rendement réduits
Durée
hydrologique
Sécheresse
Baisse de l'écoulement fluvial et
du débit entrant dans les réservoirs,
les lacs et les étangs; diminution des
zones humides et des habitats naturels
Impacts sociaux Effets sur l'environnement
Conséquences de la sécheresse
décisions que les données brutes. La surveillance de
l’humidité du sol, par exemple, peut être assurée à
partir de satellites de télédétection.
La surveillance des événements extrêmes ayant
une relation avec la sécheresse — tels qu’El Niño — est
assurée au titre de divers programmes de l’OMM,
tandis que quatre entités de surveillance — deux
centres en Afrique, un en Chine, ainsi que le Système
mondial d’information et d’alerte précoce — diffusent
des avis météorologiques et des résumés
climatologiques mensuels et trimestriels. Il existe
d’autres systèmes africains d’alerte précoce. Par
exemple, la Communauté pour le développement de
l’Afrique australe (SADC) surveille l’état des cultures et
des ressources alimentaires dans cette région et émet
des alertes lors des périodes de crise imminente. Ces
réseaux peuvent être la clef de voûte de la mise sur pied
de plans d’urgence coordonnés, à appliquer lorsque
survient une situation de sécheresse.
Etre préparé
L’objectif principal des plans de gestion de la sécheresse
est de réduire les souffrances humaines et de rétablir le
bien-être et la santé publics, par divers moyens.
Les politiques de résistance à la sécheresse,
conçues pour éviter les effets de cette situation, peuvent
comprendre le renforcement de l’approvisionnement
en eau, la mise en place de programmes de
conservation de l’eau et l’assurance des récoltes. Les
stratégies de base de gestion de l’eau doivent être
améliorées pour faire face aux sécheresses plus
fréquentes et plus graves, résultant du changement
climatique. Il convient de considérer l’irrigation
comme un moyen permettant de réduire les effets
nuisibles de la sécheresse, et non comme une garantie
de protection. En outre, beaucoup reste à faire pour
améliorer l’efficacité de l’utilisation de l’eau et de son
recyclage, dans les villes.
Les administrations peuvent utiliser des techniques
statistiques, pour analyser des données relatives à la
sécheresse, notamment pluviométriques, afin de
déterminer des configurations systématiques —
tendances, persistances ou cycles. Ce type d’information
peut ensuite servir à élaborer des systèmes d’utilisation
des terres et des pratiques de gestion, visant à réduire le
plus possible les conséquences de la sécheresse.
Enfin, des mesures d’atténuation des effets de la
sécheresse, des secours et des actions de
rétablissement réduiront le plus possible les
répercussions sur les systèmes de production et les
moyens de subsistance. Ces dispositions peuvent
aller d’une distribution d’urgence d’eau et de
fourrage, à l’octroi de crédits aux cultivateurs. Avec
la sécheresse, ce type de gestion de crise est
inévitable, mais une gestion appropriée du risque
doit permettre de s’en affranchir au maximum.
Même si l’on sait qu’il est impossible de prévoir la
sécheresse avec une précision extrême, on sait aussi
que, sur la planète, des millions de personnes ont
besoin de se préparer à des jours de soif.
23
 L’eau et les accidents industriels*
Utilisés comme produits finis ou dans le processus de
production, les produits chimiques constituent un
pilier de l’industrie, mais beaucoup sont très toxiques
et peuvent occasionner des problèmes de pollution
graves ou même catastrophiques s’ils atteignent les
cours d’eau ou les lacs, à la suite d’un accident ou du
fait d’un déversement permanent.
En 1986, un des accidents de pollution chimique les
plus spectaculaires qui aient été recensés, s’est produit
dans l’usine de la société pharmaceutique Sandoz, à
Bâle, en Suisse. L’incendie d’un entrepôt a entraîné le
déversement d’énormes quantités de ces matières, ainsi
que de résidus brûlés, dans le Rhin. Sur 1000 kilomètres
en aval, le fleuve était biologiquement mort et impropre
à la production d’eau potable. En 2000, lors d’un autre
incident notoire, un déversement accidentel massif de
cyanure provenant de l’usine de production d’or de
Baia Mare, en Roumanie, a atteint le Danube, contaminé
l’eau potable de 2,5 millions de personnes et exterminé
un nombre énorme de poissons.
Ces décharges accidentelles, qui peuvent déverser
des produits chimiques concentrés ou mélangés à l’eau,
peuvent être liées à la production ou être provoquées
par des catastrophes naturelles telles que des
inondations ou des tremblements de terre.
Etre informé
Les risques de pollution accidentelle de l’eau par une
installation industrielle dépendent des propriétés et des
Investigations à la suite de l’accident de Baia Mare, 2000
________
* Chapitre rédigé à l’aide de la contribution de l’Institut suédois de recherche sur l’environnement de Stockholm et l’appui financier de
l’Institut international de l’eau de Stockholm
24
quantités de produits chimiques entreposés et utilisés,
du processus de production mis en œuvre et du lieu.
Les entreprises industrielles doivent tenir un
registre des produits chimiques entreposés et utilisés
dans leurs installations et consigner diverses données
sur ces produits, qui sont classés selon leur toxicité
pour l’homme, leur nocivité pour le milieu naturel et la
menace éventuelle qu’ils représentent, par exemple
pour les organismes du milieu aquatique — sur lequel
leur effet peut également se mesurer en termes de
biodégradabilité, d’hydrosolubilité et de liposolubilité.
Combinées, ces propriétés se traduisent par des effets
différents — par exemple, des produits chimiques de
faible hydrosolubilité et de forte liposolubilité peuvent
être nuisibles pour les oiseaux aquatiques ou
s’accumuler avec le temps dans les organismes du
même milieu. Comme ce fut le cas à Bâle, la
combustion de produits chimiques ainsi accumulés
libère d’autres produits — des substances potentielles
dont il faut également tenir compte.
Les processus industriels qui utilisent de
nombreuses cuves de stockage et réacteurs de
production, ainsi que d’importants systèmes de
canalisations pressurisées, présentent des risques
majeurs. Leur construction doit respecter un certain
nombre de directives. Les canalisations, par exemple,
doivent être de dimensions correctes et résister aux
charges mécaniques, thermiques, chimiques et
biologiques. Si elles servent au transport de produits
explosifs, elles doivent être exemptes de charges
électrostatiques.
Eaux résiduaires non traitées, issues d’une usine chimique, à Linhe, Chine

Moutons broutant dans une zone irriguée par des eaux résiduaires
non traitées, Bionàr, Chine
Après traitement, les produits chimiques sont
déchargés, mêlés aux eaux usées, dans les fleuves, les
lacs ou la mer. La nocivité des effets d’une décharge
accidentelle dépend de la toxicité du produit pour
l’homme et pour le milieu aquatique, de sa quantité et
de la répartition initiale de la décharge dans l’eau. Dans
un lac, elle peut être bien localisée si elle est circonscrite
à temps; par contre, les cours d’eau, comme nous
l’avons vu, transportent rapidement les produits
chimiques, en altérant la qualité de l’eau très en aval du
point de décharge.
Etre préparé
Pour se prémunir contre ce type de pollution, il est
essentiel de disposer d’un cadre légal strict en matière de
sécurité. En Europe, depuis les années 70, les accidents
ont été une des principales raisons du renforcement de la
législation concernant les risques industriels. La
Directive dite «de Seveso», édictée en 1982 à la suite de
l’accident survenu en 1976 dans une usine de pesticides
et d’herbicides, située en Italie dans la ville de ce nom,
vise à prévenir les accidents majeurs faisant intervenir
des produits chimiques. Après l’accident catastrophique
de l’usine Union Carbide, à Bhopal, en Inde, en 1984, et
celui de Bâle, en 1986, la directive a été modifiée deux
fois, afin d’étendre son champ d’application au stockage
des substances dangereuses.
La Commission européenne a adopté une
proposition modifiée de la directive «Seveso II».
Maintenant tous les exploitants d’usines concernées par
cette directive doivent le notifier aux autorités, mettre
en place une politique de prévention des accidents
majeurs et un système de gestion de la sécurité, définir
des procédures d’urgences et établir un rapport de
sûreté. Il s’est avéré que les facteurs relatifs à la gestion
avaient eu un rôle significatif dans plus de 90 % des
accidents survenus en Union européenne depuis 1982.
Aux Etats-Unis, l’Environmental Protection
Agency a publié des règlements et des directives
concernant la prévention des accidents liés aux
produits chimiques, dans les installations utilisant des
substances très dangereuses. Quelle que soit leur taille,
les entreprises qui utilisent certaines substances
inflammables et toxiques, sont tenues d’élaborer un
programme de gestion des risques, visant à réduire le
risque chimique au niveau local, incluant une
évaluation du danger, un programme de prévention
définissant des mesures de sécurité et un programme
d’intervention en cas d’urgence. Ces documents visent
à aider les personnels locaux — pompiers, police et
secours d’urgence — en première ligne lorsque
survient un tel accident, à intervenir. Ils peuvent
également être utilisés comme moyen d’information du
public sur les risques chimiques encourus par la
population.
Au-delà du cadre légal, il convient que la police, les
pompiers, les services de transport, la défense civile, les
services sanitaires, les professionnels de
l’environnement et les médias participent à
l’établissement d’un plan de prévention. Le groupe doit
établir des procédures d’urgence et informer le grand
public. Le plan doit être revu au moins tous les ans et
préciser l’emplacement des usines, des zones de
stockage et des voies de transport, ainsi que les
procédures à appliquer sur les lieux et à l’extérieur; il
doit désigner les coordinateurs des situations
d’urgence, indiquer les procédures de notification en
cas d’urgence, l’endroit où trouver des informations sur
les produits chimiques toxiques, comment déterminer
les zones et la population probablement affectées; et
enfin décrire les équipements et installations locaux
d’urgence, les plans d’évacuation et les programmes de
formation en matière d’urgence.
Il faut également établir des plans d’application,
prévoyant entre autres la diffusion d’avis, précisant le
nom des produits chimiques, leur degré de nocivité, la
quantité libérée, en indiquant le moment et le lieu de
l’incident, tous les risques correspondants d’effet aigu
ou chronique sur la santé (avec des conseils quant aux
soins médicaux), les plans d’évacuation et les abris
désignés.
Compte tenu de la nature toxique et de l’effet
souvent persistant ou étendu d’un très grand nombre
de produits chimiques, il est impératif d’établir
soigneusement ces plans d’application; et, de même
que pour toutes les catastrophes naturelles liées à l’eau,
une bonne coordination des interventions est cruciale,
s’il y a des vies à sauver.
25
 Risques sanitaires des catastrophes naturelles liées à l’eau*
Les catastrophes naturelles deviennent trop souvent
des catastrophes sanitaires. Un cyclone peut, à lui seul,
tuer ou blesser des centaines, des milliers, voire des
centaines de milliers de personnes. Compte tenu du
nombre de catastrophes naturelles liées à l’eau qui se
produisent dans le monde chaque année, le bilan est
donc lourd. Pour se situer dans le contexte, il faut
savoir qu’au cours de la dernière décennie du
XXe siècle, le tiers de la population de la planète a été
affecté par des catastrophes naturelles — dans une très
grande majorité, des inondations ou des sécheresses.
Ce chiffre impressionnant ne comprend pas seulement
les victimes directes, mais également les survivants
dont la vie est brisée — handicapés, personnes
souffrant d’affections chroniques et nouveaux pauvres.
Etre informé
La meilleure façon de faire face aux risques naturels est
de créer une «culture sécurité», en renforçant la
capacité des populations vivant dans les zones
exposées. L’état de préparation est essentiel pour leur
permettre d’affronter l’inévitable lorsqu’il se produit —
que cette préparation consiste à construire un ouvrage
longitudinal de défense des côtes ou à concevoir un
plan d’évacuation. Mais, si les services sanitaires locaux
ne sont pas capables de faire face aux terribles
conséquences d’une catastrophe naturelle, les vies
inutilement perdues seront alors bien plus nombreuses.
C’est ici qu’intervient l’Organisation mondiale de
la santé. L’OMS supervise à l’échelle mondiale toutes
les questions relatives à la santé, liées aux catastrophes
naturelles. Dans l’objectif de réduire «les pertes de vie
évitables, le poids de la maladie et les infirmités dans
les situations d’urgence et lors des transitions faisant
suite aux crises», l’OMS définit actuellement une
politique intégrée en matière de santé, concernant la
préparation et les actions d’urgence, visant à aider les
services sanitaires nationaux à faire face
aux catastrophes et à se coordonner de
façon efficace avec les organisations de
secours. Présente de longue date dans
beaucoup de pays, possédant une forte
expérience de la façon de gérer les
catastrophes et ayant noué des liens solides
avec les milieux et les autorités nationaux,
l’OMS peut intervenir rapidement dans des
situations difficiles.
L’OMS coopère avec les systèmes
sanitaires locaux à la détermination des
principaux problèmes de santé et liés à la
malnutrition, dans une région, et elle
________
* Chapitre rédigé à l’aide de la contribution de l’Organisation mondiale de la santé
26
s’assure qu’ils sont traités correctement, en appliquant
une démarche intégrée concernant les soins de premier
secours. Elle contribue à renforcer les systèmes de
surveillance sanitaire et nutritionnelle, afin de suivre
les évolutions, de donner une alerte précoce en cas de
détérioration de la situation et de permettre aux
équipes sanitaires de prendre immédiatement les
mesures nécessaires pour sauver des vies; elle mène
une lutte contre les mauvais états de santé relevant de la
médecine préventive, en particulier les maladies
transmissibles et pouvant être prévenues par des
vaccins, et elle s’attache à ce que soient assurés des
soins préventifs et curatifs de base, de bonne qualité,
incluant l’administration des médicaments essentiels;
elle veille enfin à ce que les risques tels que le manque
d’eau salubre ou d’hygiène, soient réduits le plus
possible. Un élément important du travail de l’OMS est
de s’assurer que tous les enseignements tirés en
situation de crise sont exploités pour améliorer l’état de
préparation du secteur de la santé aux catastrophes
futures.
Etre préparé
Les catastrophes naturelles liées à l’eau peuvent affecter
fortement notre santé physique, mentale et
émotionnelle. Ceux qui échappent à la mort ou aux
blessures peuvent rester traumatisés par la perte de
parents, d’amis, ainsi que de leur logement et de leurs
biens, en particulier s’ils sont déjà marginalisés par la
pauvreté.
Le caractère dévastateur pour la santé, des quatre
principales catastrophes naturelles liées à l’eau —
inondations, cyclones, glissements de terrain et
sécheresse — saute aux yeux. Toutes peuvent détruire
les cultures et le bétail, créant les conditions d’une
éventuelle famine, et perturber ou mettre hors service
des prestations de base telles que la distribution d’eau.
Photo: SIPC
Mais chacune représente des défis très différents quant
aux traumatismes et aux risques à gérer ensuite.
La noyade est la principale cause des morts
résultant des inondations — qui peuvent aller des
inondations soudaines, aux inondations massives
provoquées par une rupture de barrage, aux crues
résultant de la fonte des neiges, ou aux ondes de
tempête côtières. Des équipes de recherche et de
sauvetage doivent intervenir, avec une assistance
médicale et des renforts pour l’évacuation. Une
information du public sur les risques liés aux
opérations de nettoyage, par exemple résultant de la
contamination des lieux d’activité industrielle inondés,
des réseaux d’égouts ou des déblais de minerais, et sur
les moyens de réduire l’exposition aux maladies
d’origine hydrique, est cruciale. Dans les pays
tropicaux, les zones inondées peuvent devenir des lieux
de reproduction de moustiques, contribuant à
augmenter le risque de malaria et de fièvre dengue.
Les cyclones tropicaux peuvent recouvrir une très
grande surface, leurs vents féroces provoquant des
morts et des blessures, lorsqu’ils détruisent des
bâtiments ou soufflent des débris mortels dans les airs.
Mais le plus grand danger résulte des événements qui
leurs sont liés tels que les ondes de tempête, les
glissements de terrain, ainsi que les inondations
côtières et fluviales. Des équipes de recherche et de
sauvetage, ainsi que de triage (chargées de soigner
d’abord les blessés les plus graves) sont alors
probablement nécessaires.
Souvent définis comme des événements
géologiques, les glissements de terrain et les coulées de
boue sont des effets secondaires de fortes tempêtes,
d’inondations, de tremblements de terre ou d’éruptions
volcaniques. Ils sont souvent mortels, faisant peu de
blessés, mais beaucoup de morts, par choc direct ou
suffocation. On en a vu ensevelir des villages entiers. La
présence d’équipes de recherche et de sauvetage et une
gestion efficace du grand nombre de blessés sont
nécessaires, et rapidement, car le plus souvent les
personnes piégées dans des immeubles effondrés
doivent être secourues dans les premières 24 ou
48 heures, pour survivre.
La sécheresse peut être la plus impitoyable des ces
catastrophes. Elle s’accompagne souvent du
déplacement massif de populations désespérées, à la
recherche de nourriture et d’eau. Du fait de sa durée, il
faut beaucoup plus de temps aux victimes pour se
remettre de ses effets. Si elle se produit avant les
moissons, en période de disette ou dans des régions
essentiellement agricoles, elle peut être encore plus
éprouvante. La malnutrition résultant du manque de
protéines pose un grave problème, de même que les
insuffisances de vitamines A, C, de certaines vitamines
B et de fer, qui sont la cause d’anémies et de maladies
telles que le scorbut, le béribéri et la pellagre. Le
choléra, la fièvre typhoïde, la diarrhée et d’autres
maladies infectieuses peuvent sévir. En situation de
sécheresse, le secours doit être axé sur une aide
alimentaire bien gérée, qui peut comprendre
l’alimentation intensive d’enfants souffrant d’une
carence alimentaire grave, ainsi que sur la fourniture
d’eau et le contrôle de sa qualité. Ayant subi un état de
tension prolongé, pour essayer simplement de survivre
dans des conditions horribles, beaucoup de personnes
seront déprimées et traumatisées, et donc plus
vulnérables.
Ce qui précède souligne une ironie cruelle et l’un
des plus forts défis à relever par les milieux concernés
par la santé, du monde entier : à savoir que beaucoup
des pays les plus pauvres, sont aussi les plus exposés
aux pires catastrophes naturelles. Le renforcement des
services de santé nationaux et locaux, en difficulté, peut
sembler une œuvre de taille, mais il est nécessaire pour
la participation de tous les pays, sur un pied d’égalité,
au développement durable.
27
 Les effets du changement climatique
Le changement climatique lance un défi monumental à
la faculté d’adaptation de l’homme. L’évolution du
climat mondial est la cause de certaines des situations
météorologiques extrêmes que nous subissons
actuellement — sécheresses en Afrique et en Asie,
pluies torrentielles et fortes neiges dans certaines
parties de l’hémisphère Nord. Notre compréhension de
cette tendance s’améliore chaque année, mais elle est
toujours loin d’être complète. Par contre, il est évident
que des réponses plus énergiques et mieux
coordonnées seront nécessaires dans les prochaines
décennies.
Le climat de la Terre — qui est peut-être en train
de changer — est une merveille d’équilibre faisant
intervenir un très grand nombre de processus et
d’interactions entre l’atmosphère, les océans, la surface
des terres émergées, les calottes glaciaires et la
biosphère (figure 1). Ce système est actionné par
l’énergie reçue du Soleil. Son bilan énergétique
s’équilibre naturellement, car la Terre réémet l’énergie
solaire dans l’espace. Mais, pas toute à la fois ! A cause
de l’effet de serre — un processus d’accumulation
temporaire d’une partie de cette énergie dans certains
gaz tels que le dioxyde de carbone, qui réchauffe la
planète et rend la vie possible. Aujourd’hui, le problème
est qu’au cours des 50 dernières années, le
défrichement et les émissions de l’industrie, des
véhicules à moteur et d’autres sources, ont surchargé
l’atmosphère de ces gaz à effet de serre, faisant
effectivement monter la température. Cette
perturbation de l’équilibre climatique naturel est à
l’origine de certains événements météorologiques
extrêmes.
Le système climatique
Variations du rayonnement
solaire incident
Nuages
Activité Rayonnement terrestre
volcanique
Nappe
glaciaire Interactions atmosphère-biosphère
Glacier
Biosphère
Lacs et cours d'eau
Interactions
sols-biosphère
Figure 1 — Le système climatique rassemble les processus et les interactions de l’atmosphère de la terre, des océans, des surfaces des terres
émergées, des nappes glaciaires, la faune et la flore, il est actionné par l’énergie reçue du Soleil qui est réémise dans l’espace
28
Pourtant, même un climat stable donne lieu à un
changement continuel des températures, des régimes
de vent, de la nébulosité et des précipitations. Les
inondations, les sécheresses, les tempêtes, les vagues de
chaleur, les coups de froid, ainsi que les événements qui
les accompagnent, comme les feux de broussailles, les
avalanches et les glissements de terrain, sont des
facettes naturelles de variabilité climatique. Ils peuvent
durer quelques minutes, comme les crues éclair, ou des
mois, comme les sécheresses, mais ils sont tous
potentiellement dangereux et ils peuvent avoir des
conséquences graves.
Etre informé
Compte tenu du coût pour l’homme et pour le milieu
naturel, des conséquences des inondations et de la
sécheresse, il importe de déterminer qu’elle sera
exactement l’augmentation de ces événements, alors
que le changement climatique commence à être
effectivement perceptible. Les administrations et
plusieurs grands organismes consignent déjà depuis
longtemps des statistiques relatives à la nature et aux
effets de ces événements, en particulier ceux à caractère
extrême qui deviennent des catastrophes.
Qu’indiquent les tendances, quant au type, au
nombre et aux effets des catastrophes naturelles ? A
noter, tout d’abord, que ces données ne sont pas
complètes. D’une façon générale, il n’est tenu compte
que des événements les plus dévastateurs. Ensuite, les
pertes sont difficiles à estimer, quand ce sont des
régions pauvres qui sont frappées de façon
Variations de la composition Atmosphère
de l'atmosphère et de la circulation
atmosphérique
Variations du cycle hydrologique :
précipitations, écoulement, évaporation
Précipitations/évaporation
Interactions
Echange de atmosphère-glace
Influences humaines chaleur
Tension du vent
Interactions terres émergées-atmosphère Glace des mers
Terres émergées
Couplage glace-océan
Changements se produisant Changements se produisant dans
,
à la surface des terres émergées : l'océan : circulation océanique,
orographie, utilisation des terres, niveau de la mer, biochimie Océan
végétation, écosystèmes
b) Indicateurs hydrologiques et indicateurs liés aux orages

O C É A N T E R R E S É M E R G É E S O C É A N
BASSE STRATOSPHÈRE * Augmentation de 20% de la vapeur d'eau depuis 1980 (de 18 km)

TROPOSPHÈRE Haute troposphère : *Aucune tendance mondiale notable depuis 1980;

Vapeur d'eau 15% d'augmentation dans les tropiques (10°N à 10°S)
Troposphère : *Augmentations dans de nombreuses régions
depuis environ 1960

? Hausse de 2% de la
* Hausse de 2% de la nébulosité totale au-dessus
des terres émergées durant le XXe siècle
nébulosité totale au-dessus
de l'océan depuis 1952

PRÈS DE LA SURFACE ❄❄
? Aucun changement systématique ❄ ❄ ❄ ? Aucun changement constant
de grande ampleur dans les tornades, ❄❄❄
❄❄ au XXe siècle dans la
* Baisse de 2 à 3% dans les orages, la grêle
fréquence/l'intensité des
les régions subtropicales Pluviosité sur les orages extratropicaux
* Hausse de 2 à 3% dans terres émergées au
les tropiques XXe siècle
**Hausse de 5 à 10% dans les précipitations aux
moyennes à hautes latitudes de l'hémisphère Nord
** Aucun changement généralisé dans depuis 1900, due pour la plus grande part aux
phénomènes météorologiques sévères ou extrêmes
la fréquence/l'intensité des orages
tropicaux durant le XXe siècle * Hausses importantes généralisées dans la
vapeur d'eau à la surface dans l'hémisphère
Nord, 1975-1995

*** Pratiquement certain (probabilité > 99%)

Probabilités :
** Très probable (probabilité _
> 90%, mais <
_ 99%)
* Probable (probabilité > 66%, mais < 90%)
? Probabilité moyenne (> 33%, mais <
_ 66%)
Figure 2 — Schéma des variations observées des indicateurs hydrologiques et des indicateurs liés aux orages
(GIEC, Changements climatiques 2001)

prédominante. Peu de vies et de biens y sont assurés, et,
parfois, comme dans les bidonvilles, les
administrations locales n’ont même pas de chiffres
précis de la population affectée.
Ceci dit, les données prouvent-elles que les
événements météorologiques et climatiques extrêmes
deviennent plus fréquents ou plus intenses ? Des
scientifiques du monde entier ont récemment attiré
l’attention sur ces questions dans le dernier rapport du
Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution
du climat (GIEC), créé en 1988 par l’OMM et le
Programme des Nations Unies pour l’environnement
(PNUE).
Dans ce rapport, le GIEC explique qu’alors qu’il
n’y a probablement pas eu, au XXe siècle, de
changement général de la fréquence et de l’intensité des
cyclones tropicaux, une augmentation des
précipitations entre les latitudes moyennes et élevées de
l’hémisphère Nord, pouvant atteindre 10 %, est très
probable, principalement du fait de situations
météorologiques extrêmes (Figure 2). Dans certaines
régions d’Afrique et d’Asie, l’intensité et la fréquence
des sécheresses ont augmenté ces dernières décennies.
Mais, en ce qui concerne les incidences sur les
populations et les économies, le GIEC remarque qu’il
faut tenir compte d’autres facteurs : l’accroissement de
la population, l’enrichissement, ainsi que l’évolution
démographique, de l’utilisation du sol et de la valeur
des divers biens. Ainsi, un plus grand nombre
d’événements météorologiques extrêmes peut
simplement signifier que plus de monde se trouvait sur
le passage des perturbations; et de plus lourdes pertes
économiques peuvent seulement traduire un
enrichissement.
Compte tenu de la tendance caractérisée vers les
situations météorologiques extrêmes, nous pouvons
prévoir des régimes futurs de temps, probables sur une
planète plus chaude, en nous fondant sur les principes

29
 fondamentaux régissant le comportement de
l’atmosphère et de l’océan, sur les facteurs qui
influencent le climat et sur des modèles informatiques
évolués du climat mondial. Il existe, bien sûr, un certain
nombre de causes naturelles de changement
climatique, notamment des variations de la quantité
d’énergie reçue du soleil, les éruptions volcaniques, les
impacts d’astéroïdes et les variations lentes de la
circulation et des températures des océans. Mais les
projections concernant les climats futurs doivent aussi
tenir compte d’estimations fiables des produits de
l’activité humaine — à savoir des niveaux futurs de
dioxyde de carbone et d’autres gaz à effet de serre,
compte tenu de la croissance démographique, des
choix relatifs aux sources d’énergie renouvelables, de la
modernisation de l’industrie et d’autres aspects.
Un schéma mondial d’évolution future, fondé sur
ces résultats, émerge. Une planète plus chaude signifie
une planète plus humide, la partie nord de
l’hémisphère boréal verra probablement davantage de
tempêtes et certaines zones continentales pourraient
connaître des étés plus chauds avec un plus grand
risque de sécheresse. Le niveau de la mer pourrait
s’élever, en partie alimenté par les eaux de fonte des
glaciers et des calottes polaires. De plus, des grandes
marées d’un niveau extrêmement élevé pourraient être
de plus en plus fréquentes. L’élévation du niveau de la
mer pourrait entraîner l’inondation des terres basses
du littoral et éroder les dunes de sable. Globalement, le
tableau n’est pas très encourageant, mais les problèmes
ne sont pas insurmontables.
Etre préparé
Depuis de longues années l’OMM et les Services
météorologiques et hydrologiques nationaux de ses
30
Etats membres mesurent des variables climatologiques,
consignent ces données dans des documents et les
partagent. Ces archives sont une étape importante vers
la connaissance de ce dont est capable le système
climatique, et contribuent aux efforts de prévision, de
planification et de réponse, soutenus partout dans le
monde. Utilisant ces connaissances et ce potentiel
technologique, qui se perfectionnent en permanence, et
en collaboration avec les administrations, les
organismes et les médias, l’OMS et ses membres ont
aidé à renforcer la résistance aux catastrophes
naturelles liées au climat et à sauver des vies qui
auraient autrement pu être perdues du fait de ces
catastrophes. Ce genre de données peut améliorer la
gestion et l’exploitation des ressources en eau et fonder
une réponse globale à la variabilité climatique,
s’articulant en stratégies mises en œuvre à tous les
échelons de la société — du ménage au gouvernement
— pour y faire face.
A ce propos, il convient de ne pas oublier que
certaines cultures ont élaboré des stratégies spécifiques
de réponse, au travers d’une longue expérience. Les
collectivités agricoles tributaires de la pluie, vivant dans
des régions tropicales semi-arides, ont déjà été
largement confrontées à des situations météorologiques
extrêmes. Ces populations ont accumulé au cours des
siècles des connaissances sur la façon de survivre aux
sécheresses et aux inondations. Dans la perspective
d’une augmentation probable des «surprises»
climatiques, il sera certainement fait appel à ce
vénérable capital de connaissances, pour relever de
nouveaux défis. De même, le dialogue entre les
météorologistes et les responsables de la gestion des
ressources devra progresser, à mesure que les
prévisions météorologiques continueront de
s’améliorer, de manière à garantir un partage des
connaissances pour le bien de tous.
La gestion des risques*
Nous vivons dans un monde de risque.
Périodiquement, nous devons affronter toutes sortes de
dangers qui peuvent avoir des effets plus ou moins
graves, selon notre vulnérabilité. A partir d’un certain
niveau de gravité, ces dangers peuvent devenir des
catastrophes — sauf si nous sommes capables de
réduire notre vulnérabilité. Tel est l’objet de la gestion
et de la réduction des risques. Ainsi, alors que les
cyclones, la sécheresse et les autres catastrophes
naturelles liées à l’eau peuvent présenter certains des
risques les plus élevés de notre époque, nous pouvons
faire beaucoup pour éviter leurs effets.
Prenez deux villages du littoral, situés côte à cote
dans une zone exposée aux cyclones tropicaux. Dans le
premier, les constructions sont à l’épreuve des ouragans
et la population est entraînée aux procédures
d’évacuation; l’autre est formé d’habitations
traditionnelles de bambou et il ne dispose, en matière
de procédures d’urgence, que de quelques numéros de
téléphones affichés au bureau de poste. Toutes choses
égales par ailleurs, il n’est pas difficile de savoir celui
qui courra le plus grand risque lors du prochain
cyclone tropical.
Réduire les risques inhérents aux catastrophes
naturelles liées à l’eau veut dire, d’une part, renforcer
notre capacité de surveillance — force, durée, moment
et lieu — et, d’autre part, évaluer et réduire notre
vulnérabilité à ces catastrophes.
A cet égard, la surveillance de ces phénomènes à
risque est cruciale. Par exemple, nous avons amélioré
notre compréhension des inondations, des sécheresses,
des glissements de terrain et des cyclones, grâce au
travail des Services météorologiques et hydrologiques
nationaux (SMHN). La disponibilité de données
hydrologiques en Afrique s’étant même dégradée au
cours de la dernière décennie, il est d’évidence
nécessaire d’entretenir des réseaux adéquats,
d’observation des phénomènes à risque liés à l’eau et à
la météorologie.
Mais pour réduire les risques, il est vraiment
essentiel de s’attaquer à notre vulnérabilité. Le contrôle
de la planification, la législation, l’aménagement du
territoire, la gestion de l’environnement, ainsi que des
instruments financiers tels que les assurances, sont des
étapes importantes vers la réalisation de cet objectif.
Toutes ces mesures doivent reposer sur une
compréhension des facteurs de vulnérabilité des
personnes et des actifs. Au cours des 30 dernières
années, on a enregistré une évolution considérable
dans ce sens. La vulnérabilité est maintenant
________
* Rédigé avec la contribution du Secrétariat de la SIPC
considérée sous tous ses aspects, comme reflétant les
conditions physiques, sociales, économiques et
environnementales, individuelles et collectives,
lesquelles évoluent en permanence, sous l’effet d’une
multitude d’influences — comportementales,
culturelles, socio-économiques et politiques — du
niveau individuel au niveau national.
Les organisations œuvrant à l’échelle mondiale à la
réduction des risques liés aux catastrophes
naturelles s’efforcent d’améliorer notre
compréhension de la vulnérabilité et des dits
risques, dans le cadre de la Stratégie internationale
pour la prévention des catastrophes (SIPC). La
SIPC a déterminé quatre grands types de
vulnérabilité :
• physique, liée essentiellement au lieu et au milieu
bâti;
• social, lié au niveau de prospérité des personnes,
des collectivités et de la société — incluant les
aspects relatifs à l’alphabétisation et à l’éducation,
à la paix et à la sécurité, à l’accès aux droits
fondamentaux de la personne, aux systèmes de
bonne gouvernance, à l’équité sociale, aux
structures de développement et de diffusion des
connaissances, aux coutumes et aux convictions
idéologiques, ainsi qu’aux systèmes
organisationnels collectifs globaux;
• économique — car les pauvres sont généralement
beaucoup plus exposés aux risques que les riches,
et ils tendent à perdre plus et à récupérer plus
lentement quand une catastrophe se produit. Les
liens entre l’éradication de la pauvreté, la capacité
de rétablissement après une catastrophe naturelle
et l’état de la base de ressources naturelles dont
elles dépendent, sont cruciaux;
• écologique — concernant des aspects très variés,
tels que l’appauvrissement et la dégradation des
ressources naturelles, la perte de résistance des
systèmes écologiques et la diminution de la
biodiversité, ainsi que le niveau d’exposition aux
polluants toxiques et dangereux.
Un autre facteur important de réduction des
risques liés aux catastrophes naturelles est le niveau de
prise de conscience de ces risques, qui dépend
largement de la quantité et de la qualité des
informations disponibles et de la façon dont les
personnes, les collectivités, les organismes et les
administrations les perçoivent. Les populations sont
plus vulnérables quand elles ne sont pas conscientes
des dangers.
31
 Le Programme des Nations Unies pour le
développement (PNUD) et la SIPC élaborent
actuellement un cadre collectif destiné à encourager et à
généraliser des pratiques appropriées et efficaces de
réduction des risques liés aux catastrophes naturelles.
C’est un point de départ — un ensemble de base de
principes et d’objectifs, pour comprendre, guider et
surveiller la réduction des risques liés aux catastrophes
naturelles — qui prépare un plan d’action pour la période
32
de 2005 à 2015, à présenter en 2005 à la deuxième
Conférence internationale sur la réduction des effets des
catastrophes (WCDR2) qui aura lieu à Kobe, au Japon.
Il est temps d’agir. Compte tenu du changement
climatique, nous pouvons être sûrs que les risques liés
à l’eau ne sont pas prêts de disparaître. Pour y faire
face, nous devrons de plus en plus faire appel à notre
capacité de réduction des risques liés aux catastrophes
naturelles.
 Ont aimablement fourni des photographies pour la couverture de cette brochure: Martin Harvey, Rolf Hogan, Les Molloy,
David Sheppard, et Jim Thorsell. Nous reproduisons également ici quatre photographies dont nous n’avons pas réussi à
trouver les auteurs. Nous estimons en effet que ces derniers auraient été disposés à apporter eux aussi leur contribution à
cette brochure.
www.applefields.com - www.borgeaud.ch

Stratégie internationale de prévention des catastrophes (SIPC)

Secrétariat interinstitutions pour la mise en œuvre de la Organisation météorologique mondiale
Stratégie internationale de prévention des catastrophes 7 bis, avenue de la Paix
Palais des Nations CH 1211 Genève 2, Suisse
8-14, avenue de la Paix, CH 1211 Genève, 10 - Suisse www.wmo.int
www.unisdr.org