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L'ANNÉE EN NEUROSCIENCES COGNITIVES 2009

Autisme : l'empathie-systématisation
(ES) Théorie
Simon Baron Cohen
Centre de recherche sur l'autisme, Département de psychiatrie, Université de Cambridge,
Cambridge, Royaume-Uni

La théorie de la cécité mentale des troubles du spectre autistique a réussi à expliquer les
difficultés sociales et de communication qui caractérisent ces troubles, mais ne peut pas
expliquer les caractéristiques non sociales (les intérêts étroits, le besoin d’identité et l’attention
aux détails). Une nouvelle théorie, la théorie empathique-systémique (ES), est résumée, selon
laquelle deux facteurs sont nécessaires pour expliquer les caractéristiques sociales et non
sociales de la maladie. Ceci est lié à d’autres théories cognitives telles que la théorie de la
cohérence centrale faible et la théorie du dysfonctionnement exécutif. La théorie ES est
également étendue à la théorie extrême du cerveau masculin comme moyen de comprendre le
sex-ratio biaisé dans l'autisme. Les prédictions étiologiques sont discutées, tout comme les
applications cliniques découlant de la théorie des ES.

Mots clés:autisme; Syndrome d'Asperger; empathie; systématiser

Introduction Cette théorie est ensuite examinée, arguant qu’elle est

L'autisme classique et le syndrome d'Asperger
partagent trois caractéristiques diagnostiques
fondamentales : (1) des difficultés dans le développement
social et (2) dans le développement de la communication,
ainsi que (3) des intérêts inhabituellement forts et étroits
et un comportement répétitif (APA 1994). Puisque la
communication est toujours sociale, il pourrait être plus
fructueux de considérer l’autisme et le syndrome
d’Asperger (SA) comme partageant des caractéristiques
dans deux grands domaines : les difficultés sociales et de
communication et les intérêts étroits/actions répétitives.
Le diagnostic de SA nécessite que l'enfant ait commencé à
parler à temps et qu'il ait un QI moyen ou supérieur. Ces
caractéristiques se manifestent différemment à différents
stades du développement. Cet article commence par
résumer la théorie de la « cécité mentale » développée
dans les années 1980 et 1990, qui constitue une
description remarquablement réussie des difficultés
sociales et de communication liées à l’autisme.
mieux intégrée par une théorie à deux facteurs plus
récente, la théorie de « l’empathie-systématisation » (ES).
En guise de contexte, il convient de rappeler pourquoi
nous avons besoin d’une théorie cognitive de l’autisme.
Les caractéristiques des troubles du spectre autistique
(ASC), dont l'autisme classique et l'AS sont les sous-
groupes les plus évidents, sont comportementales et
diverses. Selon la manière dont on les compte, on peut
identifier des dizaines, voire des centaines de
caractéristiques comportementales. Une théorie cognitive
tente de les réduire à un ou deux processus mentaux
sous-jacents. Il ne s’agit pas ici d’une théorie
neurobiologique, puisque les deux types de théorie sont
nécessaires si nous voulons comprendre comment un
fonctionnement neuronal ou une structure neuronale
atypique peut donner lieu à un comportement atypique.
En effet, le niveau cognitif médie les niveaux de
description neurobiologiques et comportementaux.
La théorie de la cécité mentale

Cette théorie suggérait que les enfants atteints de

Adresse de correspondance : Simon Baron-Cohen, Autism Research Centre,
Department of Psychiatry, Cambridge University, Douglas House, 18B
Trumpington Rd, Cambridge, CB2 8AH, Royaume-Uni. Tél : 44-1223746057.
sb205@cam.ac.uk
troubles du spectre autistique tardaient à développer
une théorie de l'esprit (ToM) : la capacité de se mettre
à la place de quelqu'un d'autre, de

L'Année des neurosciences cognitives 2009 : Ann. NY Acad. Sci. 1156 : 68-80 (2009). est
ce que je: 10.1111/j.1749-6632.2009.04467.x©C2009 Académie des sciences de New York.

68
Baron-Cohen : la théorie empathisante-systématisée de l'autisme 69

imaginez leurs pensées et leurs sentiments (Baron-Cohen

1995; Baron-Cohen, Leslie et Frith 1985). Lorsque nous lisons
dans les pensées ou mentalisons, non seulement nous
donnons un sens au comportement d'une autre personne
(Pourquoi sa tête a-t-elle pivoté sur son cou ? Pourquoi ses
yeux se sont-ils déplacés vers la gauche ?), mais nous
imaginons également tout un ensemble d'états mentaux (ils
ont vu quelque chose d'intéressant, ils savent quelque chose
ou veulent quelque chose), et nous pouvons prédire ce qu'ils
pourraient faire ensuite.
La théorie de la cécité mentale propose que les Figure 1.La vision mène au test de connaissance. On
enfants atteints d'autisme ou du syndrome d'Asperger dit à l'enfant que Sally regarde dans la boîte, tandis
soient retardés dans le développement de leur ToM, qu'Anne touche la boîte. Question du test : « Lequel sait
ce qu'il y a dans la boîte ? »
ce qui les laisse avec des degrés de cécité mentale. En
conséquence, ils trouvent le comportement des autres
déroutant et imprévisible, voire effrayant. La preuve
en est les difficultés qu’ils manifestent à chaque étape
du développement de la capacité de lire dans les
pensées :
Un enfant typique de 14 mois montreattention
conjointe (comme pointer ou suivre le regard d'une autre
personne), au cours duquel il ou elle regarde non
seulement le visage et les yeux d'une autre personne,
mais prête également attention à ce qui l'intéresse (Scaife
et Bruner 1975). Les enfants atteints d'autisme ou du
syndrome d'Asperger présentent une fréquence réduite
d'attention conjointe dès la petite enfance (Swettenham Figure 2.La version enfant de la lecture du
et al. 1998). L'enfant typique de 24 mois s'engage dans test de l'esprit dans les yeux.

faire semblant de jouer, utilisant leurs capacités de

lecture des pensées pour être capable de comprendre
que dans l'esprit de l'autre personne, ils font juste
semblant (Leslie 1987). Les enfants atteints d'autisme ou
du syndrome d'Asperger font moins semblant de jouer,
ou bien leurs simulations se limitent à des formats
davantage basés sur des règles (Baron-Cohen 1987).
L’enfant typique de 3 ans peut réussir le test de la vision
mène à la connaissance : comprendre que le simple fait
de toucher une boîte ne suffit pas pour savoir ce qu’elle
contient (Pratt et Bryant, 1990). Les enfants autistes ou
Asperger sont en retard dans ce domaine (Baron-Cohen &
Goodhart 1994). Voir la figure 1.
L'enfant typique de 4 ans réussit le test des
fausses croyances, reconnaissant quand
quelqu'un d'autre a une croyance erronée sur le
monde (Wimmer & Perner 1983). La plupart des
enfants autistes ou Asperger tardent à réussir
ce test (Baron-Cohen et al. 1985).
La tromperie est facilement comprise par
l'enfant typique de 4 ans (Sodian & Frith 1992). Les
enfants autistes ou Asperger ont tendance à
supposer que tout le monde dit la vérité et peuvent
être choqués par l’idée que d’autres personnes ne
disent pas ce qu’ils pensent (Baron-Cohen 1992,
2007a). L'enfant typique de 9 ans est capable de
comprendre ce qui pourrait blesser les sentiments
d'autrui et ce qu'il serait donc préférable de ne pas
dire. Les enfants Asperger ont un retard d'environ
3 ans dans cette compétence, malgré leur QI
normal (Baron-Cohen, O'Riordan, Jones et al. 1999).
L'enfant typique de 9 ans peut interpréter les
expressions d'une autre personne à partir de ses
yeux, pour comprendre ce qu'elle pourrait penser
ou ressentir (voir Fig. 2). Les enfants Asperger ont
tendance à trouver ces tests beaucoup plus
difficiles (Baron-Cohen, Wheelwright, Scahill, et al.
70
Figure 3.La version adulte de la lecture du
test de l'esprit dans les yeux.
2001), et il en va de même lorsque le test adulte
consistant à lire dans les yeux est utilisé (Fig. 3). Les
adultes autistes ou Asperger obtiennent des
résultats inférieurs à la moyenne à ce test avancé
de lecture mentale (Baron-Cohen, Wheelwright, Hill
et al. 2001).
Évaluation de la cécité mentale
Théorie
La théorie de la cécité mentale présente plusieurs
points forts. Premièrement, cela peut donner un sens
aux difficultés sociales et de communication liées à
l'autisme et au syndrome d'Asperger, y compris les
difficultés pragmatiques du langage (puisque, du
point de vue gricéen, la communication nécessite de
lire dans les pensées). Deuxièmement, les degrés de
cécité mentale sont universels et s’appliquent à tous
les individus du spectre autistique, dans la mesure où
lorsque des tests adaptés à l’âge et à l’âge mental sont
utilisés, des déficits sont constatés tout au long de la
vie et indépendamment du QI. Troisièmement, des
études de neuroimagerie fonctionnelle ont identifié
des zones clés du « cerveau social » (cortex préfrontal
médial, jonction pariétale temporale, cingulaire
antérieur, insula et amygdale) qui sont spécifiquement
activées lors des tâches de lecture de pensées dans le
cerveau typique et sont sous-actives chez les autistes.
cerveau (Baron-Cohen et al. 1999; Castelli, Frith,
Happe, et coll. 2002 ; Frith et Frith 2003 ;
Annales de l'Académie des sciences de New York
Happe et coll. 1996). De telles études de neuroimagerie
fournissent une confirmation biologique des différences
psychologiques rapportées. Quatrièmement, les retards
dans le développement des précurseurs de la lecture
dans les pensées (tels que l'attention conjointe et le jeu de
simulation) se sont révélés être de puissants prédicteurs
d'un diagnostic ultérieur d'autisme chez les nourrissons
(Baron-Cohen et al. 1996). Enfin, l'identification de la
cécité mentale dans l'autisme a conduit au
développement de nouvelles interventions visant à
faciliter la lecture dans les pensées, avec un certain succès
(Baron-Cohen 2007b ; Baron-Cohen, Golan, Wheelwright
et al. 2004 ; Golan et al. dans presse ; Golan, Baron-
Cohen, Hill et al. 2006 ; Hadwin, Baron-Cohen, Howlin et
al. 1997).
Il est également important d’identifier les lacunes de la
théorie de la cécité mentale. Premièrement, elle ne peut
pas rendre compte des caractéristiques non sociales de la
condition (telles que les intérêts étroits et l’excellente
attention portée aux détails). Deuxièmement, même si la
lecture des pensées est évidemment une composante de
l'empathie, la véritable empathie nécessite également
une réponse émotionnelle à l'état d'esprit d'une autre
personne (Davis 1994). De nombreuses personnes
autistes déclarent également qu'elles sont perplexes
quant à la façon de réagir aux émotions d'une autre
personne (Grandin 1996). Par exemple, ils peuvent voir
que quelqu'un pleure, en déduire qu'il est triste ou
bouleversé, mais ne pas savoir pourquoi ni comment le
réconforter. Troisièmement, une série de pathologies
cliniques présentent des formes de cécité mentale, telles
que la schizophrénie (Corcoran & Frith 1997), les troubles
de la personnalité narcissique et limite (Fonagy 1989) et,
dans certaines études, trouble des conduites chez les
enfants (Dodge 1993), il se peut donc que cela ne soit pas
spécifique à l'autisme et au syndrome d'Asperger.
Quatrièmement, certaines études n’ont pas réussi à
trouver la moindre preuve d’un déficit de ToM dans l’ASC,
bien que cela puisse être dû au fait que chez les individus
âgés et performants, les tâches doivent être
suffisamment subtiles et adaptées à l’âge pour éviter les «
effets de plancher ». Enfin, en tant que théorie, la théorie
de la cécité mentale se concentre sur ce que les
personnes atteintes de troubles du spectre autistique
trouvent difficiles et ignore leurs points forts.
Pour remédier à ces cinq lacunes, cette théorie a été
révisée de plusieurs manières : premièrement, une
Baron-Cohen : la théorie empathisante-systématisée de l'autisme
Un deuxième facteur a été proposé pour tenir compte des
domaines de force non sociaux. Deuxièmement, le
concept de ToM a été élargi pour inclure une dimension
de réactivité émotionnelle. Troisièmement, la théorie à
deux facteurs est proposée pour distinguer l'ASC des
autres conditions. Enfin, les deux traits clés ont été
dimensionnés afin de reconnaître comment l'autisme ne
se manifeste pas seulement par degrés, mais aussi
comment il s'intègre parfaitement dans la population
générale.
Cette dernière révision a été introduite
parce qu’aujourd’hui la notion de spectre
autistique n’est plus définie par une
séparation nette de la « normalité » (Wing
1997). La façon la plus claire de voir cette
distribution « normale » des traits
autistiques est d’examiner les résultats du
Quotient du Spectre Autistique (QA) (Baron-
Cohen, Hoekstra, Knickmeyer, et al. 2006 ;
Baron-Cohen, Wheelwright, Skinner, et al.
2006). al.2001). Il s'agit d'un instrument de
dépistage sous la forme d'un
questionnaire, soit rempli par un parent à
propos de son enfant, soit par auto-
évaluation (si l'adulte fonctionne bien). Il y
a 50 éléments au total et, lorsqu'ils sont
administrés à une large population, les
résultats ressemblent à une distribution
normale. L'AQ sépare nettement l'autisme
des groupes témoins, 93 % de la population
générale se situant dans la fourchette
moyenne de l'AQ,
L’empathie-systématisation
Théorie
Cette nouvelle théorie explique les difficultés sociales
et de communication dans l'autisme et le syndrome
d'Asperger par référence à des retards et des déficits
d'empathie, tout en expliquant les points forts par
référence à des compétences intactes, voire supérieures,
dans l'empathie.systématiser(Baron-Cohen 2002).
La plupart des gens considèrent la ToM comme la composante
cognitive de l'empathie dans la mesure où elle implique
simplement l'identification des états mentaux de quelqu'un d'autre
(ou du vôtre). L'identification des états mentaux est
71
parfois également appelé exigeant une attribution
(puisqu'il s'agit en fin de compte d'un postulat, les
états ne sont pas visibles en soi) ou exigeant une
reconnaissance (si l'état mental laisse des indices dans
les expressions faciales ou vocales ou posturales de
l'émotion, par exemple). Cependant, la ToM manque
le deuxième élément de l'empathie, l'élément de
réponse : avoir une réaction émotionnelle appropriée
aux pensées et aux sentiments d'une autre personne.
Ceci est mentionnéempathie affective(Davis, 1994).
Sur le Quotient d'Empathie (QE), un questionnaire
rempli soit par un adulte sur lui-même, soit par un
parent à propos de son enfant, l'empathie tant
cognitive qu'affective est évaluée. Sur cette échelle, les
personnes atteintes de troubles du spectre autistique
obtiennent des résultats inférieurs à ceux des groupes
de comparaison.
Selon la théorie empathique-systématisée (ES),
l’autisme et le syndrome d’Asperger s’expliquent
mieux non seulement par référence à l’empathie
(inférieure à la moyenne), mais également par
référence à un deuxième facteur psychologique
(systémique), qui est soit moyen, soit même
supérieur à la moyenne. C’est donc l’écart entre E
et S qui détermine si vous êtes susceptible de
développer un trouble du spectre autistique.
Pour comprendre cette théorie, nous devons
considérer ce deuxième facteur, le concept de
systématiser. La systématisation est la volonté d'analyser
ou de construire des systèmes. Il peut s'agir de n'importe
quel type de système. Ce qui définit un système, c'est qu'il
suit des règles, et lorsque nous systématisons, nous
essayons d'identifier les règles qui régissent le système,
afin de prédire comment ce système se comportera
(Baron-Cohen 2006). Voici quelques-uns des principaux
types de systèmes : les systèmes de collection (par
exemple, la distinction entre les types de pierres), les
systèmes mécaniques (par exemple, un magnétoscope),
les systèmes numériques (par exemple, un horaire de
train), les systèmes abstraits (par exemple, la syntaxe).
d'une langue), les systèmes naturels (par exemple, les
modèles de raz-de-marée), les systèmes sociaux (par
exemple, une hiérarchie de gestion),et les systèmes
moteurs (par exemple, rebondir sur un trampoline).
Dans tous ces cas, vous systématisez en notant des
régularités (ou structure) et des règles. Les règles ont
tendance à être dérivées en notant si p et q sont
72
associés de manière systématique (par exemple, si
p, alors q). La preuve d’une systématisation intacte,
voire inhabituellement forte, dans l’autisme et le
syndrome d’Asperger est que, dans une étude, ces
enfants ont obtenu des résultats supérieurs à ceux
attendus pour leur âge lors d’un test de physique
(Baron-Cohen, Wheelwright, Scahill, et al. 2001).
Les enfants Asperger âgés de 8 à 11 ans ont
obtenu des résultats supérieurs à ceux d'un
groupe témoin plus âgé (adolescents typiques).
Un deuxième élément de preuve provient d’études
utilisant le Quotient Systématisant (SQ). Plus votre
score est élevé, plus votre volonté de systématisation
est forte. Les personnes atteintes d'autisme de haut
niveau ou du syndrome d'Asperger obtiennent des
scores plus élevés au SQ que les personnes de la
population générale (Baron-Cohen, Richler, Bisarya et
al. 2003). Les tests de systématisation ci-dessus sont
conçus pour les enfants ou les adultes atteints du
syndrome d'Asperger, et non pour l'autisme classique.
Cependant, les enfants atteints d'autisme classique
obtiennent de meilleurs résultats que les témoins au
test de séquençage d'images, où les histoires peuvent
être séquencées en utilisant des concepts de causalité
physique (Baron-Cohen, Leslie et Frith 1986). Ils
obtiennent également des résultats supérieurs à la
moyenne à un test visant à comprendre le
fonctionnement d'un appareil photo Polaroid, même
s'ils ont des difficultés à comprendre les pensées et les
sentiments des gens (Baron-Cohen et al. 1985 ;
Perner, Frith, Leslie et al. 1989). .
Évaluation de la théorie ES
La théorie ES présente plusieurs points forts.
Premièrement, il s’agit d’une théorie à deux facteurs qui
peut expliquer l’ensemble des caractéristiques sociales et
non sociales des conditions du spectre autistique. Une
empathie inférieure à la moyenne est un moyen simple
d'expliquer les difficultés sociales et de communication,
tandis qu'une systématisation moyenne, voire supérieure
à la moyenne, est un moyen d'expliquer les intérêts
étroits, les comportements répétitifs et la résistance au
changement/le besoin d'identité. En effet, lorsque vous
systématisez, il est plus facile de tout garder constant et
de ne varier qu'une chose à la fois. De cette façon, vous
pouvez voir ce qui pourrait causer quoi, ce qui rend
Annales de l'Académie des sciences de New York
le monde prévisible. Deuxièmement, cette théorie peut
aider à caractériser le profil unique des pathologies du
spectre autistique. De nombreux groupes présentent des
difficultés d’empathie, mais on peut soutenir que seules
les personnes autistes présentent une dissociation entre
cela et leur pulsion systématisante intacte, voire
supérieure.
Troisièmement, cette théorie donne lieu à de nouvelles
interventions, utilisant notamment la forte
systématisation pour enseigner l'empathie, par exemple
en présentant les émotions dans un format adapté à
l'autisme (Baron-Cohen 2007b ; Golan et al. 2006). Le DVD
Télépathie(www.jkp.com/mindreading) présente des
acteurs posant des expressions faciales telles que les
personnes autistes peuvent apprendre elles-mêmes à
reconnaître les émotions via un ordinateur. Cela implique
d’adopter une approche assez artificielle consistant à
présenter les états mentaux (tels que les expressions
émotionnelles) comme s’ils étaient licites et
systématisables, même s’ils ne le sont pas (Golan et al.
2006). L'animation pour enfantsLes transporteurs(
www.thetransporters.com) greffe les expressions faciales
émotionnelles des acteurs humains sur des systèmes
mécaniques tels que les trains et les tramways qui se
déplacent de manière hautement prévisible, le long des
voies, de sorte que même les jeunes enfants autistes sont
attirés par les visages pendant qu'ils sont dessinés.
regarder les types de matériels qui sont intrinsèquement
gratifiants pour eux (Golan et al. sous presse). De telles
approches, qui ont été évaluées et démontrées comme
conduisant à des améliorations dans la reconnaissance
des émotions, adaptent l'information au style
d'apprentissage de l'apprenant afin qu'il puisse
commencer à la traiter.
Quatrièmement, la théorie des ES peut expliquer ce
qui est parfois considéré comme une incapacité à «
généraliser » dans les conditions du spectre autistique
(Plaisted, O'Riordan et Baron-Cohen 1998 ; Rimland 1964 ;
Wing 1997). Selon la théorie ES, c’est exactement ce à quoi
on s’attendrait si la personne essayait de comprendre
chaque système comme un système unique. Un bon
systématiseur est un séparateur, pas un lumper, car le
regroupement d'éléments peut conduire à des
différences clés manquantes qui vous permettent de
prédire comment ces deux éléments se comportent
différemment. L'exemple clinique typique est celui d'un
enseignant qui enseigne à un enfant autiste
Baron-Cohen : la théorie empathisante-systématisée de l'autisme
effectuer une tâche dans un contexte donné (par exemple,
prendre une douche à la maison), mais doit la réapprendre
dans un nouveau contexte (par exemple, prendre une douche
à l'école). Considérez cependant que si l'enfant traite la
situation comme un système, les caractéristiques uniques de
chacun (par exemple, comment la douche à la maison diffère
de la douche à l'école dans le détail de leurs fonctions de
contrôle de la température ou l'angle et la hauteur de la
pomme de douche) ) peuvent être plus marquants que leurs
caractéristiques communes (par exemple, le fait qu'ils
nécessitent tous deux d'entrer, d'ouvrir la douche, de
l'éteindre et de sortir).
Enfin, la théorie ES déstigmatise l’autisme et le SA, en les
reliant aux différences individuelles que nous observons dans
la population (entre et au sein des sexes), plutôt qu’à les
considérer comme catégoriquement distincts ou mystérieux.
Pendant de nombreuses décennies, le diagnostic de l’autisme
a été redouté par de nombreux parents, car il suggérait que
leur enfant était biologiquement distinct du reste de
l’humanité en raison de l’absence des mécanismes de base
nécessaires à l’engagement social et en suggérant que
l’autisme était une maladie du cerveau. La théorie ES se
concentre non seulement sur les domaines de difficulté
(empathie), mais également sur les domaines de force
(systématisation) de l'ASC, et considère l'ASC comme une
différence de style cognitif qui fait partie d'un continuum de
telles différences trouvées chez chacun. plutôt que comme
une maladie.
L’une des critiques formulées à l’encontre de la théorie des SE
est que les données probantes qui la sous-tendent sont encore
assez limitées. Cela reflète à quel point c’est nouveau, mais cela
fait des prédictions. Par exemple, il prédit que nous devrions nous
attendre à ce que les personnes autistes montrent une préférence
pour les mouvements prévisibles plutôt que imprévisibles, ou
qu’elles montrent une préférence pour les informations
structurées plutôt que non structurées. Nous devrions nous
attendre à des déficits non seulement dans la ToM, mais aussi
dans la réponse aux émotions des autres – un aspect de
l'empathie difficile à tester. L’IRMf peut permettre de tester cette
dernière prédiction.
Une deuxième critique est que la théorie ES ne
s’applique peut-être qu’aux individus de haut niveau
atteints d’autisme ou du syndrome d’Asperger. Si leurs
obsessions (pour l'informatique ou les mathématiques
par exemple) pouvaient être interprétées en termes
de forte systématisation (Baron-Cohen, Wheelwright,
Stone, et al. 1999), au début
73
À première vue, il n’est pas évident que cela
s’applique aux individus dont le fonctionnement
est faible. Cette critique peut cependant refléter
combien il est plus difficile de tester l’empathie et
la systématisation chez les personnes autistes de
faible fonctionnement. En fait, les premières
études ToM sur l'autisme testaient des personnes
autistes de fonctionnement moyen, car leur QI
était moyen faible, dans la gamme légère des
difficultés d'apprentissage. Mais l'empathie devrait
être testable même chez une personne ayant un
faible QI, par exemple en utilisant le suivi du
regard lors d'une tâche de perception
émotionnelle du visage, et la systématisation
devrait être testable chez une personne ayant un
faible QI en observant si elle peut détecter des
schémas répétitifs (structure) dans l'entrée. Les
paradigmes d'apparence préférentielle qui ont été
utilisés avec des nourrissons typiques pourraient
constituer un paradigme non verbal approprié
pour déterminer si un faible QI,
Laissant de côté les méthodes expérimentales, quand on
pense à un enfant autiste, bon nombre des comportements
classiques dont il fait preuve dans le cadre de son histoire
naturelle peuvent être considérés comme le reflet de sa forte
systématisation. Quelques exemples sont répertoriés dans le
tableau 1.
Relier la théorie ES
vers d'autres comptes
Comme la théorie de la cohérence centrale faible
(WCC) (Frith 1989), la théorie ES concerne un style
cognitif différent (Happe 1996). Comme cette théorie,
elle postule également une excellente attention aux
détails (dans la perception et la mémoire), puisque
lorsque vous systématisez, vous devez prêter
attention aux petits détails. En effet, chaque petit
détail d’un système peut avoir un rôle fonctionnel.
Une excellente attention aux détails dans l'autisme a
été démontrée à plusieurs reprises (Jolliffe et Baron-
Cohen 2001 ; Mottron, Burack, Iarocci et al. 2003 ;
O'Riordan, Plaisted, Driver et al. 2001 ; Shah et Frith
1983, 1993). La différence entre ces deux théories est
que, alors que la théorie du COE considère les
personnes atteintes du spectre autistique
74 Annales de l'Académie des sciences de New York

TABLEAU 1.Systématiser dans l'autisme classique (et/ou il existe pour comprendre un système.
syndrome d'Asperger, en italique) L'attention portée aux détails se produit pour
• Systématisation sensorielle des raisons positives : au service de la
◦ Tapoter des surfaces ou laisser couler du sable entre les compréhension ultime d'un système (aussi petit
doigts et spécifique que soit ce système).
◦ Insister sur les mêmes aliments chaque jour La théorie du WCC prédit que les personnes
• Systématisation motrice
atteintes d'autisme ou du syndrome d'Asperger
◦ Tourner en rond, ou se balancer d'avant en arrière
◦ Apprendre des modèles de tricot ou une technique de tennis seront à jamais perdues dans les détails et ne
• Systématisation de collection parviendront jamais à comprendre le système
◦ Ramasser des feuilles ou des autocollants de football dans son ensemble (puisque cela nécessiterait
◦ Faire des listes et des catalogues une vue d'ensemble globale), tandis que la
• Systématisation numérique
théorie ES prédit qu'au fil du temps, Une
◦ Obsessions avec les calendriers ou les horaires de train
◦ Résoudre des problèmes mathématiques personne peut acquérir une excellente
• Systématisation du mouvement compréhension d’un système dans son
◦ Regarder les machines à laver tourner en rond ensemble, si elle a la possibilité d’observer et de
◦ Analyser exactement quand un événement spécifique se produit dans un cycle répétitif contrôler toutes les variables de ce système.
• Systématisation spatiale L'existence de mathématiciens talentueux
◦ Obsessions des itinéraires
atteints d'AS, comme Richard Borcherds, est la
◦ Développer les techniques de dessin
• Systématisation environnementale preuve que ces individus peuvent intégrer les
◦ Insister pour que les briques jouets soient alignées dans un ordre détails dans une véritable compréhension du
invariant système (Baron-Cohen 2003). Opposer les
◦ Insister pour que rien ne soit déplacé de sa position habituelle dans la pièce
théories du WCC et de l'ES est en fait très
• Systématisation sociale
simple : selon le WCC, toute expérience
◦ Dire la première moitié d’une phrase ou d’une phrase et
attendre que l’autre personne la termine
impliquant l'apprentissage de la compréhension
◦ Insister pour jouer au même jeu chaque fois qu'un enfant vient jouer d'un système devrait donner lieu à des déficits.
• Systématisation naturelle Il convient de noter que la théorie du
◦ Demander encore et encore quel temps il fera dysfonctionnement exécutif (DE) (Ozonoff, Pennington et
aujourd'hui
Rogers 1991 ; Rumsey et Hamberger 1988 ; Russell 1997)
◦ Apprendre les noms latins de chaque plante et leurs conditions de
a encore plus de difficulté à expliquer les cas de bonne
croissance optimales
• Systématisation mécanique compréhension d'un système dans son ensemble, comme
◦ Apprendre à utiliser le magnétoscope le calcul calendaire, ou même pourquoi les soi-disant
◦ Réparer des vélos ou démonter des gadgets et les remonter obsessions de l'autisme et de la SA devraient se
• Systématisation vocale/auditive/verbale concentrer sur les systèmes. Ainsi, lorsque la personne
◦ Des sons en écho
autiste classique de faible fonctionnement secoue des
◦ Recueillir des mots et leur signification
milliers de fois un morceau de ficelle près de ses yeux,
• Systématiser les séquences d’actions
◦ Regarder la même vidéo encore et encore alors que la théorie ED voit cela comme une persévérance
◦ Analyser les techniques de danse résultant d'un dysfonctionnement neuronal qui
• Systématisation musicale permettrait normalement à l'individu de déplacer son
◦ Jouer une mélodie sur un instrument encore et encore attention, la théorie ES voit le même comportement
◦ Analyser la structure musicale d'une chanson
comme un signe que l’individu « comprend » la physique
du mouvement de cette corde. Il pourra par exemple le
faire bouger exactement de la même façon à chaque fois.
Si les conditions sont attirées par des informations détaillées Ou quand il émet une longue et rapide séquence de sons,
(parfois appelées traitement local) pour des raisons négatives il peut connaître exactement ce modèle acoustique et
(une prétendue incapacité à s'intégrer), la théorie ES tirer un certain plaisir de la confirmation que la séquence
considère cette même qualité (une excellente attention aux est la même à chaque fois. Beaucoup
détails) comme étant hautement utile :
Baron-Cohen : la théorie empathisante-systématisée de l'autisme
car un mathématicien pourrait ressentir un sentiment
ultime de plaisir à l'idée que le « nombre d'or » ((a +
b)/a = a/b) soit toujours égal à 1,61803399.. . .Ainsi,
l’enfant – même atteint d’autisme de faible
fonctionnement, qui produit à chaque fois le même
résultat avec son comportement répétitif – semble
tirer un certain plaisir émotionnel de la prévisibilité du
monde. C’est peut-être ce qui est cliniquement décrit
comme un « stimming » (Wing 1997). L’autisme a été
décrit à l’origine comme impliquant une « résistance
au changement » et un « besoin d’identité » (Kanner
1943), et nous voyons ici qu’une observation clinique
importante peut être la marque d’une forte
systématisation.
Pour revenir à la théorie de l'ED, une question
est de savoir s'il existe un dysfonctionnement
exécutif au sein de l'ASC. Autrement dit, la
théorie ES rend-elle la théorie ED redondante ?
Exprimée différemment, la théorie ES peut-elle
expliquer les résultats de la théorie ED de la
persévérance sur le test Wisconsin Card Sorting
ou une mauvaise planification sur le test de la
Tour de Londres (Ozonoff et al. 1991 ; Rumsey &
Hamberger 1988 ; Russell 1997) ? Une réponse à
cela est que les déficits sur des projets comme
le Wisconsin ou la Tour de Londres peuvent ne
pas refléter l'ED. Par exemple, les théories du
WCC et de l’ES pourraient expliquer le déficit de
la Tour de Londres par une trop grande
concentration sur les détails locaux, et la théorie
de l’ES pourrait expliquer le déficit du Wisconsin
par le désir de persister dans une stratégie
systématique. Selon cet argument, la
performance sur une tâche ED dépend de la
stratégie utilisée,
Il ressort cependant clairement des récits cliniques et
parentaux de l'ASC qu'il existe des difficultés quotidiennes de
planification et d'organisation. Chez certaines personnes
atteintes de SA, par exemple, leurs chambres sont totalement
en désordre et elles ne peuvent pas organiser leurs devoirs
pour qu'ils soient terminés à temps. Ce sont sûrement des
exemples simples et quotidiens de dysfonction érectile ?
Cependant, la personne atteinte de SA dont la chambre est en
désordre total mais qui en même temps progresse
(systématiquement) à travers les niveaux d'un jeu vidéo peut
faire précisément ce qu'une forte systématisation nécessite.
75
Cela implique évidemment : se concentrer sur un système
spécifique (le jeu informatique) et tenter de comprendre
ce système dans son intégralité, tout en ignorant les
informations superflues (la chambre en désordre). Les
comptes rendus cliniques rapportent généralement que si
un parent vient ranger la chambre en désordre de son
enfant, cela déclenche généralement une crise de colère,
car ce qui semblait être un désordre aléatoire pour un
observateur extérieur était en fait un modèle (ou un
système) complexe et prévisible pour la personne. avec
AS eux-mêmes. Au milieu du désordre, chaque élément
avait sa propre (bonne) place, et la personne atteinte de
SA peut généralement se souvenir de l'emplacement de
chaque élément dans le désordre apparent, de sorte que
le désordre est lui-même un système prévisible. Un
parent peut être une intrusion malvenue qui perturbe ce
système parfait.
De plus, les rapports cliniques des enfants atteints de
SA qui ne peuvent pas terminer une dissertation ou un
devoir à temps décrivent de réels problèmes, mais ceux-ci
ne reflètent pas nécessairement une dysfonction érectile.
Ces difficultés seraient également prédites par WCC (ne
pouvant pas voir l'intégralité de l'essai en raison d'une
plus grande concentration sur les détails locaux) ou ES (ne
voulant omettre aucune information au cas où elle serait
pertinente pour comprendre l'ensemble du système). Une
systématisation forte implique de traiter toutes les
informations comme potentiellement pertinentes, dans la
recherche de modèles répétitifs (si p, alors q). Un devoir
ou une dissertation d'examen qui semble contenir
beaucoup trop de détails (un problème fréquemment
signalé dans le travail des personnes atteintes de SA) peut
être le signe d'une manière de traiter tous les détails
comme pertinents (de ne pas pouvoir ignorer les
informations). et pourrait également provenir d'un déficit
de ToM (ne pas savoir juger ce que le lecteur a besoin de
savoir, sait déjà ou n'a pas besoin de savoir). Le fait est
que les déficits censés refléter une pure dysfonction
érectile peuvent refléter plusieurs sources possibles.
Extension de la théorie ES : le
Théorie extrême du cerveau masculin
La théorie ES a été étendue à la théorie de
l’autisme extrême du cerveau masculin (EMB)
(Baron-Cohen 2002). C'est parce qu'il y a
76
des différences nettes entre les sexes en termes d'empathie (les
femmes obtiennent de meilleurs résultats à de nombreux tests de
ce type) et de systématisation (les hommes obtiennent de
meilleurs résultats à ces tests), de sorte que l'autisme et le SA
peuvent être considérés comme un extrême du profil masculin
typique, un point de vue avancé pour la première fois par le
pédiatre Hans Asperger (Asperger 1944). Pour comprendre
comment cette théorie n’est effectivement qu’une extension de la
théorie ES, il faut comprendre que cette théorie postule deux
dimensions indépendantes (E pour empathie et S pour
systématisation) dans lesquelles des différences individuelles sont
observées dans la population. Lorsque vous les tracez, cinq « types
de cerveau » différents sont visibles :
• Type E(E>S) : individus dont l’empathie est
plus forte que leur systématisation
• Les types(S>E) : des individus dont la
systématisation est plus forte que leur empathie
• Tapez B(S = E) : individus dont l'empathie est aussi
bonne (ou aussi mauvaise) que leur systématisation
(B signifie équilibré »)
• Type E extrême(E - S) : individus dont
l'empathie est supérieure à la moyenne,
mais qui ont du mal à systématiser
• Extrême Type S(S - E) : individus dont la
systématisation est supérieure à la moyenne, mais
qui ont des difficultés en matière d'empathie
Ces « types de cerveau » sont définis au niveau
cognitif ou psychométrique, mais ils devraient être
en corrélation avec des différences structurelles et
fonctionnelles au niveau neuronal, ce qui devrait
être testé à l’avenir. Le modèle ES prédit que plus
de femmes ont un cerveau de type E et plus
d'hommes ont un cerveau de type S. Les personnes
atteintes de troubles du spectre autistique, si elles
sont à l'extrême du cerveau masculin, sont plus
susceptibles d'avoir un cerveau de type S. de type
extrême S. Si l’on donne aux personnes de la
population générale des mesures d’empathie et de
systématisation (l’EQ et le SQ), les résultats
correspondent assez bien à ce modèle. Plus
d'hommes (54 %) ont un cerveau de type S, plus de
femmes (44 %) ont un cerveau de type E et plus de
personnes atteintes d'autisme ou du syndrome
d'Asperger (65 %) ont une extrémité du cerveau
masculin (Goldenfeld, Baron- Cohen et
Wheelwright 2005).
Annales de l'Académie des sciences de New York
un puissant prédicteur du type de cerveau dans la
population générale, ce n'est pas le cas au sein de la
population ASC. Les hommes et les femmes atteints d'ASC
sont statistiquement plus susceptibles d'avoir un cerveau
de type extrême S. Les instruments capables de mesurer
les deux dimensions chez les individus dont le
fonctionnement est inférieur peuvent nous aider à
déterminer la taille minimale de l'écart entre E et S qui
provoque un individu. développer un ASC.
Outre les preuves du SQ et de l’EQ, il existe d’autres
preuves qui soutiennent la théorie de l’EMB. En ce qui
concerne les tests d'empathie, le test du faux pas,
dans lequel un enfant doit reconnaître quand
quelqu'un a dit quelque chose qui pourrait être
blessant, généralement les filles se développent plus
rapidement que les garçons, et les enfants atteints de
troubles du spectre autistique se développent encore
plus lentement que les garçons typiques (Baron-
Cohen, O'Riordan, Jones et al. 1999). Au test de lecture
de l'esprit dans les yeux, les femmes obtiennent en
moyenne des résultats plus élevés que les hommes, et
les personnes atteintes de troubles du spectre
autistique ont des résultats encore plus faibles que les
hommes typiques (Baron-Cohen, Jolliffe, Mortimore et
al. 1997). Concernant les tests de souci du détail, sur le
test des figures encastrées, qui nécessite de trouver
une forme cible le plus rapidement possible, en
moyenne les hommes sont plus rapides que les
femmes,
Récemment, la théorie de l'EMB a été étendue au niveau
de la neurologie, avec des découvertes intéressantes (Baron-
Cohen, Knickmeyer et al. 2005). Des régions du cerveau qui
sont en moyenne plus petites chez les hommes que chez les
femmes (comme le cingulaire antérieur, gyrus temporal
supérieur, cortex préfrontal et thalamus) sont encore plus
petits chez les personnes autistes que chez les hommes
typiques. En revanche, dans les régions du cerveau qui sont
en moyenne plus grandes chez les hommes que chez les
femmes (y compris l'amygdale, le cervelet, la taille/poids
global du cerveau et le périmètre crânien), ces régions ou
mesures sont encore plus grandes chez les personnes
autistes que chez les personnes autistes typiques. mâles. En
outre, le cerveau des hommes est, en moyenne, plus gros que
celui des femmes, et il a été constaté que les personnes
autistes ont un cerveau encore plus gros que celui des
hommes typiques. Toutes les études ne soutiennent pas ce
modèle, mais
Baron-Cohen : la théorie empathisante-systématisée de l'autisme
certains le font, et il sera important d’étudier ces modèles
plus en détail. Il sera également important d'aborder les
mécanismes neurobiologiques qui pourraient être à
l'origine de cette hypermasculinisation, l'un des candidats
étant la testostérone fœtale (Auyeung et al. 2009).
En résumé, la théorie de l’EMB est relativement nouvelle et
peut être importante pour comprendre pourquoi davantage
d’hommes que de femmes développent l’autisme ou le
syndrome d’Asperger. Comme pour tout programme
scientifique, cette théorie doit être testée par une recherche
systématique de preuves qui ne correspondent pas à la
théorie. La théorie EMB étend la théorie ES, qui a le pouvoir
d'expliquer non seulement les déficits sociaux et de
communication dans les conditions du spectre autistique,
mais aussi le profil cognitif inégal, les comportements
répétitifs, les îlots de capacité, les compétences savantes et
les intérêts étroits inhabituels qui en font partie. de la
neurologie atypique de ce sous-groupe dans la population.
Les recherches futures devraient également vérifier si, bien
que des déficits d'empathie soient observés dans de
nombreux groupes cliniques, le schéma particulier d'un faible
E en combinaison avec un S intact ou même élevé est
effectivement unique à l'ASC. Les groupes de contrôle
cliniques candidats pour tester cette hypothèse seraient le
trouble obsessionnel-compulsif (TOC) et la schizophrénie.
Dans le TOC, on observe un comportement rigide, mais cela
peut être davantage lié à l'anxiété qu'à l'amour des systèmes
en soi. Dans la schizophrénie, on observe des difficultés
d'empathie, mais il est peu probable que la pensée logique
requise pour une systématisation forte soit observée dans cet
état.
Implications de la théorie ES : l’esprit
autiste à la recherche de la « vérité »
La fonction de la systématisation est de prédire des
événements licites, y compris des changements licites ou
des modèles de données. La théorie ES peut expliquer la
préférence des personnes atteintes d'ASC pour des
systèmes qui évoluent de manière hautement légale ou
prévisible ; pourquoi ils deviennent handicapés lorsqu’ils
sont confrontés à des systèmes caractérisés par un
changement moins légal, et leur « besoin d’identité » ou «
résistance au changement ». Sivéritéest défini comme des
modèles légaux dans les données, alors, selon la théorie
ES, on pourrait voir les personnes atteintes d'ASC
77
aussi fortement motivés à découvrir la vérité. Nous
utilisons ici le termevéritéen tant que modèles ou
structures précis, fiables, cohérents ou légaux dans
les données. Si une roue tourne en rond, des schémas
cohérents et licites peuvent être détectés. Parfois, le
phénomène se produit avec une prévisibilité à 100 %
(l'anniversaire de cette personne tombe toujours le 4
avril), parfois avec une prévisibilité relativement
élevée (les jonquilles fleurissent généralement au
cours de la deuxième semaine de mars en Angleterre).
La systématisation est le moyen par lequel nous
identifions des modèles licites dans les données.
Lorsque nous systématisons, nous supposons
implicitement que le modèle de données entrant dans
nos sens révèle la vérité. L’argument est que le cerveau
autiste, étant hautement configuré pour systématiser, est
le détecteur ultime de modèles et de vérité (Baron-Cohen
2006). Chez un individu autiste de haut niveau, une telle
recherche de modèles peut révéler des vérités
scientifiques sur la nature de la réalité, puisque leur
systématisation peut aider l’individu à comprendre
comment les choses fonctionnent. Ce qui était auparavant
considéré comme une « obsession » peut être considéré
de manière plus positive comme un « intérêt fort et étroit
» pour un sujet qui, une fois exploité, peut conduire la
personne autiste ou SA à exceller dans un domaine très
spécifique.
Même si la systématisation peut délivrer des vérités
sous forme de lois, elle ne peut le faire que dans des
domaines qui sont finalement licites. L’une des raisons
pour lesquelles les personnes atteintes d’ASC (que l’on
suppose être des hypersystémiques) peuvent avoir
des difficultés à faire preuve d’empathie et être moins
intéressées par des sujets tels que la pure fiction, la
simulation ou la tromperie est que ceux-ci ne sont pas
et ne seront jamais orientés vers la vérité. Dans le
domaine des émotions, le comportement humain
n’est pas licite à 100 %. Différentes personnes peuvent
exprimer différemment la même émotion, ou une
émotion peut même n’avoir aucune expression
externe. En ce qui concerne le domaine des états
mentaux, comme Leslie l’a souligné, le domaine des
états mentaux fait des ravages dans les « relations de
vérité ». Cela est dû à l’opacité des états mentaux
comme la croyance ou la prétention (Leslie 1987). La
phrase « Mary croit que John a une liaison avec son
collègue » est vraie si Mary le croit,
78
Lorsque nous lisons dans nos pensées, nous devons
garder une trace de ce que nous croyons être vrai
(John n'a pas de liaison) tout en représentant la
croyance différente (peut-être fausse) de quelqu'un
d'autre, c'est-à-dire ce qu'il croit être vrai (Mary croit
qu'il est vrai). ). L’empathie est donc sans doute
impossible sans une telle capacité à jouer avec la
vérité, voire à la suspendre.
Vus en ces termes, il se peut que E et S ne soient
pas des dimensions véritablement indépendantes, et il
se peut que l’une des raisons pour lesquelles les
personnes atteintes d’ASC ont des difficultés avec
l’empathie soit qu’elle ne soit pas facilement
systématisée. Il se peut qu’il existe un certain degré de
compromis entre E et S, tel que plus l’un est meilleur
pour l’un, plus l’un est mauvais pour l’autre. De ce
point de vue, la seule dimension qui peut sous-tendre
l’ASC pourrait être la mesure dans laquelle on est
capable de gérer les degrés d’illégalité des
informations. Cela justifie des tests à l’avenir.
Conclusions
La théorie de la cécité mentale s'est révélée utile
comme explication cognitive des troubles du
spectre autistique, mais sa valeur se limite à
prendre en compte l'un des principaux groupes de
caractéristiques (difficultés sociales et de
communication) sans aborder l'autre grand groupe
de caractéristiques (comportements répétitifs,
intérêts étroits et attention locale aux détails). La
théorie de la cécité mentale néglige également les
difficultés de réactivité affective à l’état mental
d’autrui. Pour ces raisons, la théorie ES – en tant
que théorie à deux facteurs – semble mieux
adaptée pour expliquer l’ensemble des
caractéristiques caractérisant l’ASC. Cette théorie
semble également plus applicable que la théorie
de la cohérence centrale faible ou que celle du
dysfonctionnement exécutif, qui présentent des
lacunes en termes d’universalité ou de portée
explicative. Alors que les bases cérébrales de
l'empathie sont en train d'être dévoilées,
Remerciements
Des parties de cet article ont été publiées dans
(Baron-Cohen 2008a,b). L'auteur a été soutenu
Annales de l'Académie des sciences de New York
par le Medical Research Council UK et la
Nancy Lurie Marks Family Foundation
pendant la période de ce travail.
Les conflits d'intérêts
L'auteur ne déclare aucun conflit d'intérêts.
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