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« Déclin urbain » et Shrinking Cities : une évaluation

critique des approches de la décroissance urbaine


Sylvie Fol, Emmanuèle C. Cunningham-Sabot
Dans Annales de géographie 2010/4 (n° 674), pages 359 à 383
Éditions Armand Colin
ISSN 0003-4010
ISBN 9782200926298
DOI 10.3917/ag.674.0359
© Armand Colin | Téléchargé le 24/10/2023 sur www.cairn.info (IP: 105.71.133.3)

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« Déclin urbain » et Shrinking Cities :
une évaluation critique des approches de la
décroissance urbaine1
Urban Decline and Shrinking Cities: a critical
assessment of approaches to urban regression

Sylvie Fol
Université Paris-I – Panthéon – Sorbonne, CRIA – UMR Géographie-Cités

Emmanuèle Cunningham-Sabot
Université de Rennes-II – UMR ESO

Résumé Le déclin des villes n’est pas un phénomène récent. De nombreux travaux ont
analysé les causes et les manifestations de ce processus, inséparable de l’histoire
des villes. Si, jusqu’aux années soixante-dix, le déclin urbain était l’apanage quasi
exclusif des pays développés, depuis les années quatre-vingt-dix, le nombre de
villes en déclin atteint à l’échelle mondiale plus du quart des villes de plus de
100 000 habitants, témoignant d’un modèle internationalisé de Shrinking Cities.
Alors que les processus de déclin urbain ont pris à la fois une ampleur croissante
et de nouvelles formes, inscrivant ce phénomène dans une dynamique de plus en
plus globale, leur étude peut être l’occasion d’un changement de paradigme par
rapport aux analyses traditionnelles de la croissance et du changement urbain.
Tandis que le contexte contemporain de mondialisation s’accompagne d’une
accentuation et d’un renouvellement des formes de désindustrialisation et de
suburbanisation, comme d’un profond changement démographique dans les pays
développés, la croissance urbaine n’a plus rien d’acquis tandis que le déclin
urbain, loin d’être une exception ou une aberration, peut être analysé comme un
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phénomène potentiellement global.
Abstract Urban shrinkage as such is not a new phenomenon. It has been documented by an
extensive literature analysing the social and economic issues that have led to flight
of population, resulting in the worse cases in the eventual abandonment of blocks
of housing and neighbourhoods. À number of studies have also been dedicated to
the analysis of the cycles of urban changes : suburbanization, decline of central
cities and regeneration. Up to the 1970s, urban decline was an almost exclusive
feature of developing countries, whereas today the number of cities in decline
is reaching more than a quarter of the overall number of cities of over 100 000
inhabitants worldwide. While the contemporary globalization processes have
been accompanied by new forms of de-industrialization and suburbanization,
the period has also been one of profound demographic change in the developed
countries, characterized by falls in fertility rates and the ageing of populations. This
transformation obviously has repercussions on the development of cities. In this
situation, it may be that urban growth should in no way be assumed, while urban
decline, rather than being an exception or an aberration, could be analysed as a

1 La recherche donnant lieu à cet article a bénéficié du soutien de l’Agence nationale pour la recherche
(ANR Jeune chercheur « Shrinking Cities » JCJC06_146013, coordonnée par E. Cunningham-Sabot).

Ann. Géo., n◦ 674, 2010, pages 359-383,  Armand Colin


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potentially global phenomenon. It is therefore worthwhile envisaging decline and


urban shrinkage as durable, structural components of urban development. While
urban decline is on the increase, placing the phenomenon in an increasingly global
perspective, it seems opportune to review the paradigm behind the established
views of urban growth and change.

Mots-clés Shrinking Cities, déclin urbain, désindustrialisation, globalisation, politiques


urbaines
Key-words Shrinking Cities, Urban Decline, Deindustrialization, Globalization, Urban
Policies

Introduction

La campagne électorale pour les élections municipales de 2008 a mis sous la


lumière médiatique un phénomène peu discuté en France : le déclin des villes.
Différents articles de presse (Les Échos, 12 février 2008) ont évoqué les difficultés
de villes devant faire face à la fois à des mutations économiques et à une perte
de population. Alors que les analyses du déclin étaient en France cantonnées
jusque-là surtout aux espaces ruraux et aux régions industrielles en crise, ces
analyses électorales témoignent de l’émergence dans notre pays d’un enjeu qui
occupe et anime depuis déjà plusieurs années la scène politique et les débats
académiques dans d’autres pays.
Le déclin des villes n’est pas un phénomène récent. De nombreux travaux
en ont analysé les causes et les manifestations, en particulier aux États-Unis,
où le développement et la décroissance des villes et des centres urbains est,
depuis l’École de Chicago, considéré comme un processus naturel selon lequel
les transformations urbaines résultent d’un cycle de vie débouchant sur un
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inéluctable déclin (Lang, 2000). Ce phénomène, inséparable de l’histoire des
villes (Beauregard, 2003) a été mis en relation avec différents processus explicatifs.
Certains auteurs montrent les liens entre le déclin des villes et la suburbanisation
(Fishman, 1987 ; Jackson, 1986 ; Downs, 1999) tandis que des travaux analysent
l’impact de la désindustrialisation sur la perte de poids et la régression de certains
centres urbains, en particulier au sein de la Rust Belt ou dans les anciennes
régions industrielles d’Europe (Bradbury et al., 1982 ; Friedrichs, 1993).
Jusqu’aux années soixante-dix et 80, le déclin urbain était l’apanage quasi
exclusif des pays développés, qui accueillaient environ 70 % des villes en décrois-
sance, particulièrement concentrées aux États-Unis, au Royaume Uni et en
Allemagne. Dès les années quatre-vingt-dix, le nombre de villes en déclin explose,
atteignant à l’échelle mondiale plus du quart des villes de plus de 100 000 habi-
tants (Rienits, 2006). Les pays en voie de développement ne sont pas épargnés,
et même leurs très grandes villes sont parfois atteintes. En effet, parmi les 414
plus grandes agglomérations mondiales (comptant plus d’un million d’habitants)
recensées par les Nations Unies, 30 ont perdu des habitants entre 2000 et 2005.
Certaines se situent au Mexique (Puebla), à Cuba (La Havane), en Uruguay
Articles « Déclin urbain » et Shrinking Cities • 361

(Montevideo) et en Corée du Sud (Seoul et Pussan), témoignant d’un modèle


internationalisé de « contraction urbaine » (Audirac, 2007). Dans ce contexte,
un intérêt renouvelé pour les villes en déclin émerge et mérite d’être interrogé.
L’analyse des villes en déclin s’inscrit dans un questionnement plus large
sur l’évolution et le destin des villes. Comme l’indiquent Turok et Mykhnenko
(2007), certains auteurs concluent que les évolutions de la société post-industrielle
condamnent les villes au déclin en les mettant en compétition avec des espaces plus
attractifs aux yeux des investisseurs, comme les Edge Cities (Garreau, 1991). Il en
résulterait une généralisation des situations de crise urbaine et de désaffection pour
les centres urbains (Cheshire, 1995). À l’inverse, des travaux récents s’intéressent
à la résurgence des villes (voir le n◦ spécial de Urban Studies en 2006, en
particulier l’introduction de Paul Cheshire), soulignant leur rôle moteur dans
les économies locales et régionales et leur capacité à attirer et concentrer les
« talents », l’innovation et la créativité (Florida, 2005). Entre désurbanisation,
contre-urbanisation ou « réurbanisation », les débats mettant en jeu le déclin et
questionnant le devenir des villes sont animés (Champion, 2001 ; Buzar et al.,
2007). De fait, les analyses prédisant le déclin des villes ou au contraire glorifiant
leur croissance eurent périodiquement leur heure de gloire (Cunningham-Sabot,
Fijalkow et Fol, 2007). Comme le montre R. Beauregard (2003) les discours et
les représentations du déclin urbain ont une fonction sociale et politique, tandis
que le déclin, tout comme la croissance urbaine, peuvent être analysés comme des
notions socialement construites dont les usages politiques sont en permanence
renouvelés (Wilson et Woulters, 2003).
Aujourd’hui, ce regain d’intérêt pour les processus de déclin urbain est-il une
résurgence de thèses « déclinistes », ou s’agit-il d’un processus lié à de nouveaux
facteurs, méritant analyse, afin d’en saisir les enjeux et répercussions en termes
de politiques urbaines ? Alors que les processus de déclin urbain ont pris à la
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fois une ampleur croissante et de nouvelles formes, inscrivant ce phénomène
dans une dynamique de plus en plus globale, leur étude peut être l’occasion
d’un changement de paradigme par rapport aux analyses traditionnelles de la
croissance et du changement urbain (Audirac, 2007). Tandis que le contexte
contemporain de mondialisation (Amin et Thrift, 1994 ; Scott et Storper, 2003)
s’accompagne d’une accentuation comme d’un renouvellement des formes de
désindustrialisation et de suburbanisation, il correspond aussi à une période de
profond changement démographique dans les pays développés, caractérisé par
une chute de la fécondité et un vieillissement des populations (Sardon, 2004).
Cette transformation, qualifiée de « seconde transition démographique » (Van
de Kaa, 1987) n’est pas sans effets sur le développement des villes. Dans ces
conditions, la croissance urbaine n’aurait plus rien d’acquis tandis que le déclin
urbain, loin d’être une exception ou une aberration, peut être analysé comme un
phénomène global (Oswalt, 2006). Alors que les acteurs urbains ont toujours été
convaincus de la nécessité de la croissance (Logan et Molotch, 1987), le déclin
n’a été conçu jusque-là que comme une parenthèse, la plus courte possible, dans
une évolution où la reprise serait nécessairement au rendez-vous (Bontje, 2004).
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Il est nécessaire aujourd’hui de revoir ce postulat et d’envisager le déclin comme


une composante structurelle et durable du développement urbain.
Les travaux de plus en plus nombreux consacrés récemment aux processus
de déclin urbain en donnent des définitions variables. Selon les cas, sont mis
en avant des indicateurs démographiques (perte de population), économiques
(pertes d’emplois) et sociaux (développement de la pauvreté urbaine) sans que
le lien, souvent implicite, entre ces différentes dimensions soit facile à établir.
De même, les termes utilisés pour évoquer ce processus diffèrent d’un pays
à l’autre. Dans l’histoire urbaine américaine, il est analysé en termes d’urban
decline (Beauregard, 2003). Les approches américaines mettent souvent en avant
la dimension économique du déclin en étudiant les effets de la désindustrialisation
sur le devenir des villes. Elles s’intéressent aussi à l’impact de la suburbanisation
sur la paupérisation des villes-centres et lient étalement urbain, déclin des villes
et accentuation des processus de ségrégation socio-spatiale (Squires et Kubrin,
2005). La littérature américaine utilise par ailleurs le vocable de « Shrinking
Cities » (Weaver, 1977 ; Breckenfeld, 1978 ; Rybczynski et Linneman, 1999)
renvoyant à l’image du rétrécissement pour décrire le phénomène. En Allemagne,
le terme de « Schrumpfende Städte », introduit par Häussermann et Siebel dans
un article publié en 1988 (Florentin et al., 2009), mobilise aussi la métaphore
du rétrécissement. Si ces appellations retiennent l’attention par leur caractère
imagé, elles n’en sont pas moins trompeuses puisque dans de nombreux cas, les
villes supposées « rétrécir » ne perdent pas de superficie et appartiennent à des
agglomérations urbaines qui au contraire s’étendent et s’étalent (Oswalt, 2006 ;
European Commission, 2007). Elles renvoient de plus à une acception du déclin
centrée sur les dimensions morphologique et démographique qui paraît à notre
sens réductrice, même si ces dernières représentent un pan important des écrits sur
ce thème. En France, certains travaux utilisent l’expression « rétraction urbaine »,
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mettant aussi l’accent sur les manifestations physique et démographique du déclin
urbain (Ducom et Yokohari, 2006). De notre point de vue, les dimensions
démographique, économique, sociale et urbaine du déclin sont indissociables,
bien que le degré d’importance et la relation que ces différentes composantes
entretiennent entre elles soient variables selon les contextes. De même, les facteurs
du déclin peuvent varier localement, même si le processus de mondialisation est
à l’origine de l’extension sans précédent du phénomène.
Dans cet article, nous utiliserons les termes de déclin urbain et de « Shrinking
Cities », même s’ils ne sont pas entièrement satisfaisants. Nous privilégierons
l’expression « Shrinking Cities » en tant que métaphore, cherchant à déterminer
si elle ne constitue que le nouvel « emballage » d’un phénomène classique de
l’histoire urbaine ou si l’on se trouve plutôt en présence d’un processus au moins
en partie nouveau, dans ses fondements, ses manifestations et ses enjeux. Ainsi,
cet article tente de comprendre les différentes formes prises par le déclin urbain
à l’échelle mondiale et synthétise les différentes approches, relevant de cadres
théoriques distincts et parfois complémentaires. Il s’agira également d’analyser
Articles « Déclin urbain » et Shrinking Cities • 363

ce regain d’intérêt récent dans la recherche urbaine internationale2 . Différentes


questions seront abordées :
– comment le déclin urbain a-t-il été traité et expliqué dans la littérature ?
– comment l’intérêt pour les Shrinking Cities s’est-il construit et/ou renou-
velé ?
– peut-on faire l’hypothèse que le phénomène des Shrinking Cities nécessite
aujourd’hui une nouvelle approche ?
– comment des facteurs globaux s’articulent-ils avec des facteurs locaux pour
produire des configurations de Shrinking Cities qui diffèrent d’un pays à l’autre ?
Dans un premier temps, une revue de la littérature sur le déclin urbain
mettra en avant les différentes interprétations théoriques. Nous analyserons
ensuite ses liens plus récents avec les processus de globalisation. Puis nous
examinerons les manifestations contemporaines du déclin urbain et la diversité
des Shrinking Cities dans les différents contextes locaux où elles se développent.
Enfin, nous évoquerons brièvement en conclusion les implications du phénomène
des Shrinking Cities en termes de politiques urbaines.

1 Les interprétations du déclin urbain :


évolutions linéaires et cycles urbains3

La littérature sur le déclin urbain est abondante. Elle nourrit des analyses qui
prennent souvent le déclin des villes comme prétexte à une démonstration
philosophique plus large ou comme justification de politiques urbaines spécifiques.
En ce sens, nous suivrons l’analyse de Beauregard dans son ouvrage Voices of
Decline (2003) lorsqu’il émet l’hypothèse selon laquelle le discours sur le déclin
a une fonction idéologique qui consiste à donner forme à une idée cohérente du
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destin de la ville du XXe siècle et à donner de bonnes raisons d’agir sur celle-ci.
Ainsi, le discours sur le déclin peut constituer « un guide pratique d’action »
lié aux stratégies des acteurs qui le produisent ou en font usage (Beauregard,
2003). Mais les analyses du déclin urbain présentent une certaine ambivalence :
alors qu’elles appellent des stratégies urbaines volontaristes, elles sont souvent
marquées par un discours fataliste, qui voit dans le déclin des villes un processus

2 Deux groupes de recherche internationaux ont été créés récemment pour analyser le phénomène des
« Shrinking Cities ». En Allemagne, le groupe « Shrinking Cities » s’est structuré autour d’un projet
financé par le Kulturstifung des Bundes. Animé par le cabinet d’architecture de Philip Oswalt, ce projet a
analysé quatre agglomérations urbaines en déclin. Le projet mené par le « Shrinking Cities International
Research Network » fait partie des programmes de recherche du Center for Global Metropolitan Studies
de l’Université de Californie à Berkeley. Ce réseau de recherche international inclut une quarantaine
de chercheurs originaires d’une douzaine de pays. Les auteurs du présent article en sont membres et
s’appuient ici largement sur les travaux collectifs du réseau.
3 Cette section se fonde en partie sur un travail collectif sur les approches du déclin urbain réalisé par
les deux auteurs et Yankel Fijalkow dans le cadre de l’Atelier « Action publique locale et dynamiques
sociales » du GIS Socio-Économie de l’Habitat (Cunningham-Sabot, Fijalkow et Fol, 2007).
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inéluctable, que ce dernier résulte d’une évolution linéaire ou d’un mouvement


cyclique.

1.1 Prophéties de déclin urbain ?


Le déclin des villes existe depuis que les villes existent. Étudié sur un temps très
long, ce déclin urbain a été associé à celui des civilisations (Spengler, 1931).
Lewis Mumford (1961) avance que sociétés et villes passent par différents
stades qu’il désigne par des néologismes grecs : la ville, d’Eopolis devient Polis
puis grossit en Metropolis, entame son déclin en devenant Parasitopolis, puis
Pathopolis, éventuellement Tyrannopolis et finit en Necropolis, « ville de la
mort », « cimetière final » de chaque civilisation. Ces interprétations du déclin
des villes empruntent une vision linéaire de l’évolution urbaine selon laquelle
toute ville est destinée à croître, stagner puis décliner, voire disparaître. Cette
vision est liée chez Mumford à une critique des formes urbaines contemporaines
et en particulier, de la mégalopole dont il dénonce l’encombrement et le chaos.
Dans une perspective anti-urbaine assez marquée, Mumford (1970) met en avant
les maux physiques et sociaux des villes les conduisant au déclin. À la même
époque, Gutkind, dans « Le crépuscule des villes » (1966), prédit un déclin urbain
lié surtout au développement de la mobilité et de la civilisation technicienne.
Comme le montre Beauregard (2003), la thématique du déclin est ainsi souvent
imprégnée d’une idéologie anti-urbaine qui, aux États-Unis comme en Europe,
est liée à une critique des nuisances physiques (congestion, développement des
taudis...) mais aussi sociales (poids des couches sociales populaires et des minorités
ethniques, sentiment d’insécurité...) de la vie urbaine.
Dans les années quatre-vingt, dans le champ des études urbaines, une série
de travaux dégagent un modèle d’évolution des villes. À la suite de Hall et Hay
(1980) pointant la régularité des stades de développement urbain en Europe, Van
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den Berg et al. (1982) développent l’hypothèse selon laquelle le développement
urbain des métropoles suivrait trois stades successifs : l’urbanisation, la suburba-
nisation, la désurbanisation. Au premier stade, la ville centre croît plus vite que
sa périphérie et les activités s’y concentrent ; au second stade, la suburbanisation
entraîne une croissance plus rapide de la périphérie et une déconcentration des
activités et des résidences, tandis que l’aire métropolitaine poursuit son extension.
Au dernier stade, la désurbanisation survient quand les activités et résidences
se dispersent au-delà des limites de l’aire métropolitaine, conduisant au déclin
de l’ensemble de l’agglomération urbaine. Cette théorie de l’évolution urbaine
inclut une phase de « réurbanisation » où le cœur de l’agglomération regagne
des habitants en valeur absolue ou relative mais, pendant cette phase, l’aire
métropolitaine dans son ensemble continue de perdre des habitants. Pour tester
leur modèle, les auteurs se fondent sur une analyse empirique et comparative des
évolutions dans 189 villes de 14 pays européens. Ils concluent à la validité de
leur modèle dans lequel le déclin est un processus inévitable, lié aux stratégies
des agents économiques visant à maximiser leur satisfaction, selon l’explication
Articles « Déclin urbain » et Shrinking Cities • 365

économique néo-classique. En 1989, Cheshire et Hay ont aussi cherché à modé-


liser les évolutions urbaines de 229 villes en Europe de l’Ouest, en travaillant sur
la base d’indicateurs de population et d’emploi. Ils montrent qu’une évolution
de même nature est à l’œuvre dans la plupart des villes de leur échantillon, la
déconcentration des activités puis le déclin prenant, dans la plupart des cas, la
suite d’une période de croissance et de concentration urbaine. Ils sont cepen-
dant plus prudents que leurs prédécesseurs et envisagent un renversement de la
tendance dominante à la déconcentration, le déclin n’étant pas nécessairement
« un processus qui continuera inévitablement ». Plus fataliste, le point de vue de
Pascal (1987) défend l’idée d’une évolution urbaine gouvernée par l’entropie. Les
changements technologiques déterminant à la fois les mutations économiques et
les interactions sociales, il en déduit une tendance inéluctable à la désagrégation
des systèmes urbains. La concentration urbaine nécessaire aux premières phases
du développement technologique et économique a laissé place à une inévitable
dissolution des villes, les systèmes urbains tendant à la « régularité spatiale » et
convergeant vers « l’uniformité ».
Les travaux prédisant le déclin inéluctable des villes au terme d’un processus
de déconcentration puis de désurbanisation ont été par la suite largement
contestés et leurs résultats très nuancés. L’un de leurs auteurs, Paul Cheshire,
actualise son analyse en 1995 et montre que les évolutions mises en évidence
dans la période précédente ne sont plus du tout aussi homogènes : il constate,
avec les recensements de 1990, une rupture dans la tendance précédente à la
déconcentration urbaine et un degré significatif de « réurbanisation » dans une
partie des pays d’Europe du Nord, près de la moitié des villes centres regagnant
de la population dans les années quatre-vingt. Il n’en déduit pourtant pas un
renversement de tendance mais conclue à une plus grande variété des modèles
d’évolution des villes.
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Dans une perspective semblable à celle des analyses prédisant le déclin des
villes, le contexte nord-américain de suburbanisation a donné naissance à des
interprétations liant développement des banlieues et déclin urbain.

1.2 Déclin urbain et suburbanisation aux États-Unis


Le développement de la banlieue s’est engagé, aux États-Unis, à la fin du
XIXe siècle. De nombreux auteurs voient l’origine de son peuplement dans le
souhait des couches supérieures d’échapper aux nuisances créées par la croissance
urbaine, comme à la promiscuité sociale due a l’arrivée massive d’immigrants
s’installant dans les centres-villes (Jackson, 1985 ; Fishman, 1987). Analysant le
lien entre déclin urbain et suburbanisation aux États-Unis, Beauregard (2003)
indique que les Américains ont de longue date dévalorisé leurs villes, les consi-
dérant comme des sources de problèmes et non d’opportunités. Dès la fin du
XIXe siècle, le débat s’engage à propos des maux de la ville industrielle, prenant
sa source dans l’idéologie anti-urbaine très prégnante aux États-Unis. À partir
du milieu des années cinquante, la croissance des banlieues et le déclin urbain
sont de plus en plus liés et opposés dans les analyses de l’évolution des villes. Le
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discours sur l’étalement urbain, urban sprawl, se développe, associé à l’idée d’un
développement chaotique et à la désintégration métropolitaine.
Pour Jackson (1985) et Downs (1999), les politiques publiques ont eu éga-
lement un rôle non négligeable dans le développement de la banlieue comme
espace réservé aux couches moyennes blanches. Dès les années trente, une poli-
tique fédérale très incitative en faveur de la maison individuelle propose des prêts
et garanties d’emprunt par l’intermédiaire de la Federal Housing Administration,
ou des déductions fiscales aux accédants à la propriété. Ces avantages, accordés
préférentiellement pour des acquisitions dans des secteurs où les valeurs foncières
sont élevées ou en hausse, excluent, de fait, les quartiers centraux et ceux où
une relative mixité ethnique est le signe d’une dégradation prévisible du marché
foncier. De même, l’investissement fédéral massif en infrastructures routières
est réputé avoir favorisé le processus de suburbanisation (Jackson, 1985). Pour
Smith et al. (2001), plus que les mouvements de population, les investissements
et les mouvements de capitaux expliquent les destins respectifs des centres et
des banlieues : le retrait de l’investissement dans les centres et son transfert vers
les banlieues est à l’origine du déclin des premiers et du développement des
secondes.
Le processus de suburbanisation exacerbe les problèmes urbains et accélère le
déclin des villes centres : il laisse les centres avec peu de ressources fiscales, une plus
grande dépendance économique et sociale et des dépenses publiques croissantes.
Pour Beauregard (2006), il s’agit d’un mode d’urbanisation « parasite » qui
s’effectue aux dépens de la vitalité et du développement des villes-centres.
Parmi les analyses du déclin urbain, une interprétation plus récente émerge,
inspirée des travaux cherchant à expliquer ou prédire les formes de développement
des villes. Elle s’appuie sur l’hypothèse formulée par les démographes de « seconde
transition démographique ».
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1.3 La « seconde transition démographique » et ses effets
sur les espaces urbains
Selon cette hypothèse, les sociétés industrielles connaissent actuellement des
changements démographiques décisifs et comparables, dans leurs effets, à ceux
de la première transition démographique intervenue au XIXe siècle. La baisse de
la fécondité conjuguée à l’augmentation de l’espérance de vie, conduit à une
transformation radicale de la structure des ménages et de la population (Van
de Kaa, 1987). Le vieillissement de la population, l’augmentation du nombre
de ménages, la diminution de leur taille, comme leur instabilité grandissante,
auraient des répercussions sur le plan spatial (Champion, 2001 ; Ogden et Hall,
2000 ; Buzar et al., 2005). S’appuyant sur cette hypothèse, différents travaux
en Allemagne (Buzar et al., 2007 ; Steinführer et Haase, 2007) ont tenté de
mesurer les effets de ces changements démographiques sur l’évolution des villes,
en particulier en Allemagne de l’Est et au-delà, en Europe de l’Est. Ils montrent
deux tendances a priori contradictoires.
Articles « Déclin urbain » et Shrinking Cities • 367

En premier lieu, la chute brutale de fécondité dans ces pays, décrite comme
un « choc démographique » (Steinführer et Haase, 2007), entraîne un déclin
rapide des villes, lié à une diminution drastique des soldes naturels. Cependant,
les causes de la baisse de fécondité font débat : certains l’attribuent à la seconde
transition démographique, d’autres y voient davantage les symptômes de la crise
post-socialiste et de la déstabilisation profonde qu’elle a provoquée. De plus,
le poids du seul facteur démographique dans le déclin des villes est difficile à
isoler, les travaux mettant également en avant le rôle conjoint des migrations et
des processus de suburbanisation (Nuissl et Rink, 2005 ; Kabisch et al., 2006 ;
Steinführer et Haase, 2007).
Une seconde tendance formulée dans les études des effets de la seconde
transition démographique va dans un sens opposé au déclin urbain. En effet,
l’augmentation de la part des petits ménages et ceux d’une seule personne,
la fécondité plus tardive allant de pair avec l’augmentation du taux d’activité
féminine, l’augmentation du nombre de couples bi-actifs et plus longtemps sans
enfants, auraient un impact sur la « réurbanisation » des centres-villes, qui se
repeupleraient grâce à des jeunes ménages attirés par les équipements culturels et
l’activité de la ville-centre (Ogden et Hall, 2000 ; Buzar et al., 2007 ; Steinführer
et Haase, 2007).
Quel que soit le type d’impact attribué aux évolutions démographiques, il est
frappant de constater l’importance de ce facteur dans le débat allemand (Kabisch
et al., 2006). Certains auteurs en font un élément central de l’évolution des
villes contemporaines, mettant en avant, dans le cas des évolutions post-socialistes
en Allemagne de l’Est, le « recouvrement des processus démographiques et
urbains » (Steinführer et Haase, 2007). Ils font ainsi écho à une série de
travaux qui s’intéressent à la relation entre les tendances démographiques et
les transformations des espaces urbains (Champion, 2001 ; Ogden et Hall, 2000 ;
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Buzar et al., 2005).
Par ailleurs, les analyses des effets spatiaux de la seconde transition démogra-
phique hésitent entre une vision linéaire de l’évolution des villes, selon laquelle
la baisse de la fécondité et le vieillissement de la population conduiraient au
déclin des villes, et une vision plus cyclique dans laquelle le déclin serait suivi
par une phase de « réurbanisation ». Ces interprétations en termes de cycles sont
particulièrement prégnantes dans les explications de déclin urbain.

1.4 Déclin et cycles de vie des villes


Le déclin urbain est dans de nombreux travaux associé à des analyses en termes
de cycle de vie. À l’échelle des quartiers urbains, cette approche fut initialement
développée par l’École de Chicago. Déjà présente dans les travaux de Park,
Burgess et Wirth, l’idée selon laquelle les quartiers urbains apparaissent, se
développent puis déclinent et disparaissent, est théorisée par Hoyt (1939). Dans
son étude sur « la structure et la croissance des quartiers résidentiels des villes
américaines », il montre que les quartiers subissent une évolution inévitable vers
le déclin, liée à la dévalorisation immobilière entraînée par l’arrivée de populations
368 • Sylvie Fol, Emmanuèle Cunningham-Sabot ANNALES DE GÉOGRAPHIE, N◦ 674 • 2010

moins aisées. Comme l’indique Metzger (2000), les théories du cycle de vie des
quartiers, développées dans la lignée des travaux de Hoyt, ont une composante
raciale marquée puisque le déclin est lié à l’installation de minorités ethniques.
Selon Metzger, ces théories ont joué le rôle de prophéties auto-réalisatrices,
décourageant l’investissement dans les quartiers en cours de paupérisation pour
déboucher sur des situations d’« abandon planifié ».
Cette conception des cycles de vie urbains fait écho à la théorie des cycles en
économie. Celle-ci repose sur la thèse de l’économiste russe Kondratieff (1922),
qui, en étudiant l’évolution des prix de gros et de détail sur longue période,
montre que ces prix suivent des vagues de croissance et de récession. Chaque
cycle possède une durée moyenne d’une cinquantaine d’années et comporte
une première phase de croissance soutenue, se traduisant par une hausse des
prix, puis une phase de croissance ralentie caractérisée par la baisse des prix.
Schumpeter (1939) reprend et popularise la thèse de Kondratieff tout en la
prolongeant par une réflexion sur le rôle de l’innovation. Pour lui, les rythmes
économiques dépendent des rythmes technologiques : les phases de croissance
soutenue sont liées à la création de « grappes d’innovation » et à leur diffusion,
tandis que les phases de croissance ralentie s’expliquent par l’épuisement des effets
dynamiques de ces innovations. L’évolution du capitalisme serait ainsi marquée
par un processus de « destruction créatrice », rythmé par l’apparition de nouvelles
technologies puis leur diffusion jusqu’à disparition de leurs effets en termes de
croissance : au début du cycle, les innovations engendrent croissance et emplois ;
s’ensuit une phase de stagnation, puis la diffusion des innovations technologiques
devient destructrice des emplois et facteur de chômage. P. Hall (1988) intègre
dans une problématique spatiale ce processus de « destruction créatrice », et
montre que ces théories a priori a-spatiales ne sont pas sans générer des effets
spatiaux. En effet, selon la théorie du cycle de vie des produits, chaque produit se
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développe selon les mêmes séquences qui font se succéder développement initial,
croissance, maturité, déclin et obsolescence (Friedrichs, 1993). Ainsi, tout au
long de la vie du produit, après une phase de développement, les conditions de
production se standardisent et le produit peut ensuite être fabriqué n’importe
où. La compétition qui en résulte amène les entreprises à baisser leurs coûts de
production par la délocalisation, changer le produit ou innover dans le processus
de production. L’évolution des régions et des agglomérations urbaines suivrait
donc des cycles de développement incluant des périodes de croissance rapide
suivies par des périodes de croissance plus lentes ou de déclin. Chaque vague
de développement régional et urbain serait déterminée par le cycle de vie des
industries qu’elle accueille (Booth, 1987). Cette théorie a été utilisée pour
expliquer le déclin des villes industrielles comme Detroit ou Pittsburgh, faisant
l’hypothèse que les industries à l’origine de la richesse de ces villes étaient dans
la dernière phase de leur cycle (Friedrichs 1993). Ainsi, selon les interprétations
« cycliques » du déclin urbain, les villes passent par des stades de déclin et de
régénération liés à la position économique relative de la ville dans un marché plus
large. À certains stades, le nombre d’emplois diminue, initiant un processus de
Articles « Déclin urbain » et Shrinking Cities • 369

migration sélective vers d’autres territoires. Le déclin démographique est donc


lié au déclin économique.
Le déclin urbain a fait l’objet d’analyses et d’interprétations très variées qui
lui ont attribué des causes diverses : une évolution inéluctable des villes vers la
déconcentration, des stratégies résidentielles des ménages quittant les centres
pour les espaces banlieusards, des transformations démographiques, ou encore
l’influence des cycles économiques et des cycles d’innovation technologique. Ces
explications sont parfois concurrentes, souvent complémentaires, mais rarement
articulées. Prises isolément, il semble pourtant qu’aucune d’entre elles ne permette
de saisir le caractère multidimensionnel du phénomène et sa diffusion à des espaces
extrêmement divers. C’est pourquoi nous proposons ici d’avancer une hypothèse
interprétative moins partielle et sans doute moins tranchée, celle des Shrinking
Cities en tant que phénomène global.

2 Les Shrinking Cities comme phénomène global ?

Les modèles décrivant les étapes du développement urbain, qu’ils soient linéaires
ou cycliques, furent conçus dans le contexte d’un mode de développement écono-
mique particulier, le mode d’industrialisation fordiste. Ces modèles s’avèrent net-
tement moins pertinents dans le contexte actuel de développement économique
et urbain, dans lequel les villes doivent dépasser une phase de restructuration
économique intense (Bontje, 2004). Dès lors, si le déclin urbain a pu être inter-
prété comme le stade ultime de l’évolution des villes ou comme une étape dans
un processus de transformation cyclique, l’hypothèse selon laquelle les Shrinking
Cities seraient l’une des manifestations spatiales du processus de mondialisation
peut aujourd’hui être envisagée. En effet, ce processus, accompagnant la mise en
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place d’un « nouveau régime d’accumulation » (Aglietta et Boyer, 2006), revêt
une ampleur qui dépasse (ou englobe) l’explication cyclique, puisque l’ensemble
du système de production est restructuré, entraînant des effets spatiaux parti-
culièrement marqués (Peck et Tickell, 1992). Dans une économie globalisée,
le phénomène de déclin urbain peut potentiellement concerner l’ensemble des
régions du monde et c’est en ce sens qu’on peut le qualifier de phénomène global
(Cunningham-Sabot, Fol, 2009). Et même si à un instant donné, le déclin de
certaines agglomérations va de pair avec la croissance de villes situées dans une
autre partie du monde, il n’est pas exclu que ces dernières soient touchées par
une décroissance à une échéance relativement proche.

2.1 Globalisation et déclin des villes


Selon Harvey (2000), le spatial fix (que l’on pourrait traduire par « la solution
spatiale ») des entreprises à la crise de leurs profits consistant en la délocalisation
de leurs unités de production, qui peut expliquer en grande partie la multiplication
des situations de déclin urbain dans le monde, ainsi que la rapidité de progression
370 • Sylvie Fol, Emmanuèle Cunningham-Sabot ANNALES DE GÉOGRAPHIE, N◦ 674 • 2010

du phénomène. En effet, la circulation et la volatilité du capital et des investis-


sements étrangers, pour lesquels les villes sont désormais en compétition, n’ont
jamais été aussi rapides et importantes. Pour Amin et Thrift (1994), les entre-
prises déplacent désormais des parties du processus de production d’un espace
à un autre et en particulier en direction des pays à bas salaire. Dans ce nouveau
régime d’accumulation flexible, les entreprises devenant footlose, certains espaces
urbains sont délaissés par leurs établissements industriels, tandis que se développe
un nouveau modèle de ville post-industrielle, dont la base économique est de
plus en plus tournée vers les activités de services. Cependant, dans de nombreux
territoires dominés traditionnellement par l’industrie, les gains d’emplois dans le
secteur tertiaire ne suffisent pas à compenser les pertes d’emplois industriels. Le
processus de globalisation induit le développement d’un petit nombre de « villes
globales » (Sassen, 1987 ; Amin et Thrift, 1994 ; Dicken, 2003), accumulant les
activités financières et les services de haut niveau, les réseaux d’information et de
communication. L’investissement privé se concentre dans les régions et les villes
qui possèdent à la fois des infrastructures de qualité et une haute densité de capital
humain et de réseaux constitués entre les acteurs économiques (Lang, 2005).
En particulier, les villes capitales et les grandes régions métropolitaines peuvent
tirer des avantages comparatifs de la concentration d’institutions politiques, éco-
nomiques et culturelles (Amin et Thrift, 1994). À l’opposé, la globalisation
est aussi à l’origine du déclin de nombreuses villes industrielles qui n’ont pas
su trouver leur place dans l’internationalisation de la compétition économique.
Selon Scott et Storper (2003), les inégalités croissent entre les villes intégrées aux
réseaux globaux et celles qui n’arrivent pas à s’inscrire dans ce réseau et dans le
processus de globalisation. Le développement de l’innovation et d’une économie
de la connaissance est un des facteurs de développement urbain, lié à des effets
d’agglomération déterminants. Certains espaces deviennent attractifs pour les
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investissements et pour les salariés les plus qualifiés, d’autres subissant des pertes
de leur base économique, de leurs emplois et par conséquent de leur population.
Les villes dont le développement était fondé sur la mono-industrie ou sur la
concentration d’activités d’un même secteur ont été particulièrement atteintes par
ces évolutions (Friedrichs, 1993 ; Bontje, 2004 ; Lang, 2005). Dans un contexte
de compétition s’exerçant à une échelle de plus en plus large, certaines villes
sortent manifestement perdantes. Si les anciennes villes industrielles d’Europe
et d’Amérique du Nord ont été les premières touchées par ces recompositions,
ces dernières se manifestent aujourd’hui dans des régions et dans des secteurs de
développement beaucoup plus récent. Ainsi, tandis que les villes de la Western
Pacific Rim connaissent pour la plupart un développement industriel très rapide
(Lo & Marcotullio, 2000), certains territoires urbains des pays émergents sont
touchés par le déclin après une période de croissance intense, leurs avantages
comparatifs ayant évolué défavorablement dans le cadre de la division interna-
tionale du travail (Audirac, 2008 ; Moraes, 2008). Aujourd’hui, peu de régions
du monde peuvent être considérées comme protégées à long terme des risques
Articles « Déclin urbain » et Shrinking Cities • 371

économiques, sociaux et démographiques liés à la restructuration permanente


d’un mode de production globalisé.
La notion de réseaux et la participation des villes à ces réseaux globaux sont
aussi cruciales dans l’explication du déclin urbain. Pour Castells (2000, 2002),
la mondialisation se caractérise par l’intégration croissante des économies et des
espaces, tandis que le passage de « l’ère industrielle » à l’« ère informationnelle »
actuelle conduit à la création d’une « société en réseau » (the network society). À
l’espace traditionnel des lieux (space of places) vient s’ajouter l’espace des flux
(space of flows). La fragmentation du travail induite par la société informationnelle,
de même que les écarts spatiaux et sociaux d’accès aux réseaux, influent sur le
développement des villes, certaines d’entre elles pouvant se trouver temporaire-
ment ou structurellement coupées de cet espace des flux, c’est-à-dire dans des
trous noirs ou black holes, espaces laissés pour compte de la mondialisation. Ce
concept de « trous noirs » semble pertinent pour explorer le déclin urbain, et ce,
à toutes les échelles du maillage spatial.
Le processus de globalisation a produit à la fois une accentuation et un
élargissement du phénomène de déclin. Les recompositions économiques se
combinent avec la nouvelle donne démographique pour induire des changements
dans les formes de développement urbain (Champion, 2001). Ces tendances de
différents ordres se cumulent en effet pour donner naissance à un phénomène
de global shrinkage, caractérisé par son émergence ou sa diffusion dans toutes les
régions du monde.

3 Facteurs globaux, effets locaux

Les processus de déclin prennent aujourd’hui des formes exacerbées et de grande


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ampleur, tout en se manifestant dans des régions qui n’avaient pas ou peu connu
ce phénomène jusque-là. Cependant, les formes qu’il prend sont variables selon
les pays : l’articulation dans chaque territoire de facteurs globaux et d’effets locaux
donne naissance à des configurations locales spécifiques.

3.1 Désindustrialisation, suburbanisation et déclin des villes


Si la désindustrialisation a marqué de manière parfois brutale le destin de régions
entières, comme le Nord et la Lorraine en France, le Midwest aux États-Unis, le
Nord de la Grande-Bretagne, la région de la Ruhr en Allemagne, dans certains
pays, les villes en ont subi les effets de manière accentuée. À partir des années
soixante-dix, de nombreuses villes aux États-Unis et en Europe ont connu
une profonde crise de leur secteur industriel (Di Gaetano, Lawless, 1999).
Nombre d’entre elles ont cumulé une perte de leurs emplois et une migration
de leurs populations, en particulier des plus qualifiées. Ainsi, aux États-Unis,
les villes dont le développement économique reposait sur l’activité portuaire ou
l’industrie manufacturière ont été spécialement atteintes. Parmi les 26 grandes
villes américaines qui ont perdu régulièrement de la population entre 1950
372 • Sylvie Fol, Emmanuèle Cunningham-Sabot ANNALES DE GÉOGRAPHIE, N◦ 674 • 2010

et 1990, 22 sont situées dans le nord-est du pays (Beauregard, 2001). Alors


que l’emploi industriel a diminué globalement de 1,4 % entre 1969 et 1996, il
a chuté de 33 % dans la Rust Belt (Kahn, 1999). Cependant, le mouvement
de suburbanisation de l’emploi et des résidences a joué un grand rôle dans le
déclin des villes. Certaines villes ayant perdu emplois et habitants ont connu
dans le même temps une croissance importante de leurs banlieues. L’absence
d’investissement dans des centres urbains dévalorisés (Downs, 1997), de même
que des politiques publiques tendant à favoriser la croissance suburbaine (Jackson,
1985) ont contribué à accentuer le déclin des villes. Ainsi, alors que Saint-Louis,
Cleveland ou Detroit ont perdu environ la moitié de leur population entre 1950
et 1990, leur agglomération urbaine s’est étendue et a gagné de la population
(Staszak, 1999 ; Rappaport, 2003). De même, la ville de Philadelphie a perdu
environ un demi-million d’habitants entre 1950 et 1990, tandis que son aire
métropolitaine en gagnait un million (Rybczinski et Linneman, 1999). Ainsi,
le déclin comme la croissance résultent d’une combinaison complexe entre des
facteurs nationaux, régionaux, métropolitains et locaux (Rappaport, 2003).
En Europe, le processus de déclin des villes s’est répandu rapidement.
Entre 1996 et 2001, un tiers des villes de l’Union européenne a perdu des
habitants (European Commission, 2007). Selon Turok et Mykhnenko, (2007), à
la fin des années quatre-vingt-dix, l’Europe comportait plus de villes en déclin que
de villes en croissance démographique. Le déclin est particulièrement prégnant
dans les pays d’Europe de l’Est, en particulier en Roumanie, Bulgarie, dans les
États Baltes et, de manière plus hétérogène selon les villes, en Hongrie, Pologne
et République Tchèque (European Commission, 2007). Parmi les villes en déclin
recensées par Turok et Mykhnenko (2007), l’écrasante majorité sont situées
en Russie, Ukraine, Pologne, Roumanie et Allemagne de l’Est. En Europe de
l’Ouest, les situations sont plus contrastées avec des différences interrégionales
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marquées, notamment en Grande-Bretagne, en Allemagne et même en France
(Cunningham-Sabot, Fol, 2003, 2007). L’Europe du Sud est aussi caractérisée
par de fortes disparités, par exemple entre des villes espagnoles et portugaises
à la croissance vive et des villes italiennes stagnantes ou déclinantes (European
Commission, 2007 ; Turok et Mykhnenko, 2007).
En Europe, le déclin urbain s’est manifesté de façon accrue dans les anciennes
régions industrielles de Grande-Bretagne, de France ou d’Allemagne. Les villes
minières, celles de l’industrie sidérurgique et textile du Nord de l’Angleterre
et de l’Écosse offrent des exemples notoires des difficultés d’adaptation aux
conséquences de la désindustrialisation (Dale, 2002 ; Bontje, 2004). Pour Hall
(1993), la globalisation, s’accompagnant d’une nouvelle division du travail et
d’une spécialisation des régions, a conduit à des vagues de désindustrialisation
dans les villes d’Europe, alors qu’en parallèle, quelques villes globales ont
progressivement concentré les fonctions de commande et de contrôle. Les cas
de Glasgow en Écosse ou de Saint-Étienne en France sont révélateurs de la
combinaison de différents facteurs de déclin. Les restructurations économiques
post-fordistes se sont conjuguées avec le départ vers la périphérie des ménages
Articles « Déclin urbain » et Shrinking Cities • 373

les plus aisés pour provoquer une paupérisation et un déclin de la ville-centre


(Sabot, 1999 ; Roth, 2008).

3.2 Petites villes en déclin


Le processus de global shrinkage affecte en particulier les villes qui ne parviennent
pas ou plus à se « connecter » aux réseaux du capitalisme global contemporain
(Audirac, 2007). C’est le cas, en Europe4 , des petites villes, nombreuses à
connaître une stagnation ou un déclin démographique (European Commission,
2007). Ces villes, peu dotées dans les domaines de la recherche, de l’enseignement
et de l’emploi qualifié et parfois mal desservies par les infrastructures de transport,
ne peuvent faire face à la concurrence des grandes villes. En position périphérique
par rapport aux métropoles, elles ont du mal à attirer les investisseurs (Lang,
2005). En outre, les effets des restructurations post-fordistes sont beaucoup
plus dévastateurs dans les petites villes, quand la mono-industrie a engendré une
dépendance forte du système urbain à l’égard d’un seul secteur économique,
voire d’une grande entreprise. La capacité d’adaptation de ces villes est d’autant
plus réduite qu’elles bénéficient rarement des infrastructures d’éducation et
de recherche leur permettant une reconversion rapide dans d’autres secteurs
d’activités et le marché de l’emploi y est trop réduit pour absorber la population
active devenue sans emploi à la suite de restructurations économiques (Lang,
2005).
Turok et Mykhnenko (2007) soulignent que les petites villes ont connu une
« contraction » au cours de la dernière décennie, alors que leur croissance avait
été soutenue dans la période précédente. Ils en déduisent un processus actuel de
concentration de la croissance urbaine. En France, parmi les 112 aires urbaines
en déclin5 , seules 8 d’entre elles sont des agglomérations de plus de 150 000
habitants. Le déclin démographique, affectant près du tiers des aires urbaines
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françaises, concerne donc surtout les petites villes (Julien, 2000 ; Bessy-Pietri,
2000). Situées dans la partie centrale du pays, loin des côtes et des frontières
(qui connaissent à l’inverse les plus fortes croissances démographiques françaises
dans la dernière période), ces petites villes sont toutes isolées des principales
infrastructures de transports et des réseaux urbains (Cunningham-Sabot et Fol,
2007). Laissées pour compte des processus de globalisation, ces petites villes
sont situées trop loin des métropoles pour devenir des acteurs du système urbain.
Les tendances générales à la concentration et à la compétition entre villes les
condamnent au déclin en termes de population et d’activités (Pumain, 1999)
et à une position périphérique par rapport aux opportunités de développement
économique (Cheshire et Hay, 1989).

4 Ce n’est pas le cas aux États-Unis, où les petites villes sont, au contraire, celles connaissant la plus forte
croissance dans la dernière période. De même, en Europe, il faut distinguer le cas de la Grande-Bretagne,
où les petites villes connaissent également la croissance la plus forte de toutes les agglomérations
urbaines (Office of the Deputy Prime Minister, 2006).
5 Rappelons que la France compte 361 aires urbaines définies par l’INSEE.
374 • Sylvie Fol, Emmanuèle Cunningham-Sabot ANNALES DE GÉOGRAPHIE, N◦ 674 • 2010

3.3 Effets conjugués des transformations post-socialistes et post-fordistes


en Europe de l’Est
En Europe de l’Est, les effets conjugués de la désindustrialisation, de la subur-
banisation, de la recomposition post-soviétique et du facteur démographique
ont produit un modèle de déclin inconnu jusque-là (Oswalt, 2006). Ainsi, aux
hypothèses d’une transition se traduisant par un simple ajustement aux processus
de modernisation post-fordiste, se sont substituées des analyses mettant l’accent
sur « la simultanéité, l’interdépendance et le recouvrement » entre différentes
transformations, donnant un caractère « unique » à l’évolution de l’Europe de
l’Est et de ses villes (Steinführer et Haase, 2007 ; Boren et Gentile, 2007). En
Allemagne de l’Est, au début des années quatre-vingt-dix, les transformations
économiques liées à la chute du régime socialiste et au processus de réunifi-
cation se sont opérées de manière très rapide. La privatisation des entreprises
s’est accompagnée d’une modernisation à marche forcée, se traduisant par une
chute drastique du secteur industriel et de ses emplois. Les transformations post-
fordistes, effectuées de manière assez graduelle dans les villes de l’Ouest, se sont
imposées dans les villes de l’Est comme une « thérapie de choc » (Bontje, 2004).
L’Allemagne de l’Est, devenue pour certains auteurs une région industrielle péri-
phérique dépendante de l’Allemagne de l’Ouest (Prigge, 2006) a aujourd’hui la
plus faible part d’emplois industriels de l’Europe alors que le taux de chômage est
deux fois plus élevé qu’en Allemagne de l’Ouest (Glock et Häußermann, 2004).
Entre 1989 et 1995, 70 à 90 % des emplois industriels ont disparu en Allemagne
de l’Est et la population active avec un emploi est passée entre 1989 et 2001
d’environ 8,6 à 6,1 millions (Nuissl et Rink, 2005). Trop périphériques par
rapport aux grands centres de décision européens pour être attractives aux yeux
des investisseurs, les villes de l’Est furent alors l’objet d’une émigration massive,
notamment de la part des salariés jeunes et qualifiés (en particulier les femmes)
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partant chercher fortune dans les villes de l’Ouest. Entre 1991 et 1999, environ
1,7 million d’habitants d’Allemagne de l’Est ont émigré (Glock et Häußermann,
2004). Même les villes les mieux dotées en équipements culturels et intellectuels,
comme Berlin, Dresde et Leipzig, ont eu du mal à retenir leurs jeunes cadres
et à attirer les nouveaux investissements (Schmidt, 2006). De fait, les villes les
plus dynamiques peinent à concentrer suffisamment de main-d’œuvre qualifiée
pour atteindre la masse critique permettant de garder les compétences et de
favoriser l’innovation locale (Matthiesen, 2006). Par ailleurs, l’augmentation du
chômage et les transformations du système de protection sociale ont conduit
à un « sentiment d’insécurité » auquel certains auteurs attribuent la baisse des
taux de fécondité de 60 % entre 1989 et 1994 (Glock et Häußermann, 2004).
La transition post-socialiste a donc déstabilisé la structure économique, démogra-
phique et spatiale des villes, conduisant à de nouvelles formes de déclin urbain et
de ségrégation résidentielle (Buzar et al., 2007).
Aujourd’hui, les villes d’Europe de l’Est sont soumises aux mêmes transfor-
mations structurelles que leurs homologues de l’Ouest : elles doivent faire face
à la désindustrialisation, à des phénomènes de polarisation socio-spatiale ainsi
Articles « Déclin urbain » et Shrinking Cities • 375

qu’à des processus d’étalement urbain similaires (Steinführer et Haase, 2007). Si


le poids du facteur démographique est particulièrement mis en avant dans les
analyses du déclin urbain en Europe de l’Est, c’est un élément explicatif qui peut
encore moins être ignoré à l’examen des villes japonaises.

3.4 Le cas du Japon : le poids du facteur démographique


Au Japon, société urbaine aux villes dynamiques, la question des Shrinking Cities
est avant tout liée à la démographie. La population a en effet atteint un pic et
après une période de stagnation, sa diminution apparaît comme inéluctable. La
baisse de la fécondité est à l’origine de ce déclin qu’une très faible immigration ne
peut compenser, comme en Allemagne (Flüchter, 2006). Si cette évolution a déjà
des conséquences sérieuses dans les régions rurales périphériques, les villes n’ont
commencé à être affectées que récemment et de manière très hétérogène. En
effet, la plupart des grandes villes continuent à connaître une croissance soutenue
et les processus de déclin se concentrent plutôt dans les villes périphériques et
de petite taille. C’est le cas des villes industrielles (Fujii, 2006), des petites villes
minières mais aussi des villes nouvelles de la périphérie et des banlieues lointaines
des grandes métropoles. Ces dernières, mal desservies par les infrastructures
de transport, sont atteintes par le vieillissement de ménages venus s’installer
en nombre dans les années soixante-dix (Flüchter, 2006 ; Fujii, 2006). Le
Japon serait ainsi caractérisé par l’émergence d’un nouveau type d’urbanisation,
incluant à la fois le reflux de la population vers les centres et l’apparition de
processus de rétraction urbaine en lointaine périphérie, dans des villes de banlieue
à la population vieillissante et aux équipements devenus inadaptés (Ducom et
Yokohari, 2006 ; Buhnik, 2010).

3.5 Des processus de déclin « émergents » ?


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Aujourd’hui, la dichotomie entre des pays développés connaissant le déclin
et des pays en voie de développement caractérisés par une croissance urbaine
continue n’est plus pertinente. Certaines régions urbaines des pays du Sud ne
sont plus épargnées par le déclin. Si la désindustrialisation est un phénomène qui
s’est, par le passé, concentré dans les pays développés, il existe aujourd’hui des
« recompositions technologiques globales » liées à une division internationale du
travail aujourd’hui généralisée. Ces recompositions affectent autant les vieilles
régions industrielles que celles qui se sont développées plus récemment. La
diffusion des politiques néo-libérales et la disparition progressive du Welfare
State sont en partie à l’origine de cette globalisation des processus de crise et de
déclin urbain (Audirac, 2007).
L’une des manifestations du phénomène des Shrinking Cities en tant que
phénomène global est son apparition dans des pays jusque-là connus pour leur
croissance urbaine soutenue. En effet, l’accentuation de la division internationale
du travail est à l’origine de mouvements de capitaux et de recompositions
spatiales de la production qui se généralisent. De plus, l’accélération des cycles
d’innovation (Dalum et al., 2005) renforce le caractère volatile de l’investissement
376 • Sylvie Fol, Emmanuèle Cunningham-Sabot ANNALES DE GÉOGRAPHIE, N◦ 674 • 2010

et engendre une fragilité structurelle de certains espaces urbains. Ainsi, les villes
minières subissent des restructurations de plus en plus rapides (Dale, 2002).
Par exemple en Corée du Sud, les transformations structurelles de l’industrie
se sont réalisées sur une période extraordinairement courte et les processus
de croissance et de déclin se sont déroulés de manière très rapide. Le retrait
des investissements des compagnies minières a laissé des villes dans un état de
quasi-abandon (Dong-Sun, 2005). De même, en Australie, l’internationalisation
des marchés des minéraux a joué un rôle crucial dans la croissance, puis le
déclin brutal des grandes villes minières de l’intérieur du pays, comme Newcastle
et Wollongong (Martinez-Fernandez et Wu, 2007). Au Mexique, la « Silicon
Valley » qui s’est développée entre 1995 et 2000 dans la banlieue de Guadalajara a
connu un processus de restructuration industrielle accéléré lié à la relocalisation des
industries électroniques américaines vers la Chine (Audirac, 2008). En Chine, les
inégalités régionales de développement se creusent et tandis que les grandes villes
connaissent une croissance exponentielle liée au développement de l’industrie
ou des services, de nombreuses petites villes, victimes d’une « économie de
transition », se vident de leurs habitants (Wu et al., 2008).

Conclusion

Le déclin des villes est manifestement un objet de recherche fécond ou du


moins prisé, si l’on mesure l’intérêt qu’il suscite par l’abondance de la littérature
étrangère qui lui est consacrée. L’analyse de cette littérature a montré que le déclin
urbain a fait l’objet d’interprétations multiples. Pour certains, il est l’aboutissement
d’un processus inéluctable d’évolution des villes, mû par l’entropie ou par les
préférences des agents économiques. Pour d’autres, il résulte du processus de
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suburbanisation qui parasite le développement des centres urbains. Certains
travaux mettent en avant le facteur démographique, insistant sur le rôle de
la « seconde transition démographique », tandis qu’une partie de la littérature
privilégie une approche économique, liant le déclin à une analyse en termes de
cycles d’innovation.
De notre point de vue, le déclin urbain tel qu’il se manifeste actuellement
(dans ses dimensions multiples, qu’elles soient démographiques, économiques,
sociales ou urbaines) ne peut être dissocié du processus de globalisation qui d’une
part, déplace les investissements d’un territoire à un autre de manière accélérée
et d’autre part délaisse les espaces situés à l’écart des réseaux d’information et de
communication. Le contexte contemporain de globalisation étend désormais les
processus de déclin à des régions du monde jusque-là caractérisées par la croissance
urbaine et, de plus, accentue et accélère les effets de ces processus. Pourtant,
le déclin ne se traduit pas de manière uniforme dans les territoires urbains : la
combinaison de facteurs jouant à différentes échelles, comme la résilience des
territoires locaux, produit des configurations locales particulières dont nous avons
tenté de dresser une première typologie, encore très incomplète et provisoire.
Articles « Déclin urbain » et Shrinking Cities • 377

De même, certains effets de ce déclin peuvent être plus ou moins atténués ou


accentués en fonction des politiques (urbaines, sociales et économiques) menées
localement.
Si la compréhension du déclin comme phénomène global mérite qu’on s’y
arrête, la question des usages politiques et sociaux de cette notion reste aussi
à creuser. À l’instar de Wilson et Woulters (2003) montrant que la rhétorique
de la croissance est utilisée par les acteurs locaux dans les villes en crise pour
« se réinventer et réinventer leurs villes », il nous semble que les variations du
discours sur le déclin sont un indicateur intéressant des enjeux économiques,
sociaux et politiques tels qu’ils sont définis, dans une période et un contexte
donnés, par les acteurs des politiques urbaines. Les chercheurs participent aussi
à la construction de ce discours, dans un dialogue plus ou moins structuré avec
les acteurs politiques. L’émergence de la question des Schrumpfende Städte en
Allemagne est révélatrice du processus de construction d’une notion devenue en
même temps une catégorie de l’action publique. En effet, les travaux sur le déclin
des villes ne se développent que dans les années 2000, une bonne dizaine d’années
après la réunification, durant lesquelles les chutes vertigineuses de population des
villes d’Allemagne de l’Est sont restées peu commentées. C’est à la suite d’un
rapport officiel mettant en avant l’énorme taux de vacances de logements de ces
villes que les études et recherches se multiplient (Glock et Häußermann, 2004).
La perspective d’une dévalorisation forte et continue du marché immobilier est
probablement à l’origine de la mise en avant d’un problème qui était jusque-là
resté largement tabou (Florentin, 2008).
De fait, dans la sphère des politiques locales, la question des Shrinking
Cities n’est véritablement analysée et commentée que dans quelques pays, l’Alle-
magne étant probablement en tête. Même au Japon, où le poids des évolutions
démographiques a déjà un impact important sur certaines villes, les politiques
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urbaines n’ont guère pris en compte cette nouvelle dimension de l’évolution
des villes (Flüchter, 2006 ; Ducom et Yokohari, 2006). En France, la théma-
tique du déclin reste pour l’essentiel appliquée au monde rural (et dans une
moindre mesure, aux régions industrielles) et liée à des politiques spécifiques de
revitalisation.
Pourtant, la recherche sur les Shrinking Cities peut être à l’origine de réflexions
intéressantes dans le cadre de la mise en place de politiques de développement
urbain durable. En Allemagne, la recherche sur la Schrumpfung met ainsi en avant
l’opportunité d’un changement de paradigme par rapport aux visions classiques
des politiques urbaines centrées sur la croissance urbaine. Les Schrumpfende
Städte offrent un « nouveau potentiel » (Oswalt, 2006) et les politiques urbaines
peuvent s’en saisir pour développer de nouveaux objectifs en « traitant le
déclin non seulement comme une menace mais aussi comme une chance pour
reconstruire les espaces urbains » (Kabisch et al., 2006). Le déclin urbain serait
donc ainsi à la base d’une réflexion sur les conditions de mise en œuvre d’une
378 • Sylvie Fol, Emmanuèle Cunningham-Sabot ANNALES DE GÉOGRAPHIE, N◦ 674 • 2010

ville durable dont la croissance ne serait plus le principal objectif, remettant ainsi
en cause le paradigme actuel centré sur la croissance.

Institut de géographie
191, rue Saint-Jacques
75 005 Paris
sfol@univ-paris1.fr

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© Armand Colin | Téléchargé le 24/10/2023 sur www.cairn.info (IP: 105.71.133.3)

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