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Distances, interactions et analyse spatiale de la ville : le cas

de montréal
Mathieu Charron, Richard Shearmur
Dans Revue d’Économie Régionale & Urbaine 2005/2 (avril), pages 163 à 192
Éditions Armand Colin
ISSN 0180-7307
DOI 10.3917/reru.052.0163
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Revue d'Economie Régionale et Urbaine n' 2 [2005]

DISTAIICES,INTERACTIONS ET ANALYSE SPATIALE DE LA


VILLE : LE CAS DE MONTRÉAL *

INTRAMETROPOLITAN DISTANCES AND INTERACTIONS :


MOIYTRÉAL'S EXAMPLE

par
Mathieu CHARRON
Doctorant
m athieu_charron@ucs.inn. ca

et
Richard SHEARMUR
Professeur
richard_shearmur@ucs.inrs.ca

INRS-Urbanisation, Culture et Société


3465 Durocher
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MO}ITRÉAL H2X 2C6 - CANADA

Mots-clés : Distance, interaction, Montréal, analyse spatiale.

Key-words : Distance, interaction, Montreal, spatial analysis.

Classification JEL : R4l.

i Première version septembre 2004, version corrigée féwier 2005.


Nous remercions Jacques LESSARD et Pierre TREMBLAY du Service de la modélisation des systèmes
de transport du Ministère des Transports du Québec pour nous avoir aimablement foumies certaines
données et plusieurs intéressants commentaires. Merci aussi à Philippe APPARICIO pour ses
commentaires constructifs.

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164 Distances, interactions et analyse spatiale de la ville : le cas de Montréal

Everything is related to everything else,


but near things are more related than distant things
TOBLER (1970)

Cette citation constitue ce qui est pour plusieurs géographes la < première
loi de la géographie >, lLl*. Mais cette loi, avec ce qu'elle suppose d'universalité,
pose certains problèmes. Doune parf elle suppose un ( toutes choses étant égales
par ailleurs > alors que toutes choses ne sont jamais égales par ailleurs: des
<perturbations externes ) peuvenl éloigrrer des choses fortement reliées. D'aute
part, elle implique de définir un près (near) er un éloigné (distant).

C'est à cette définition que nous nous intéressons ici. Le près et l'éloigné
seront étudiés à l'échelle métropolitaine et sous le concept de distance. La
distance est un concept majeur.en géographie, elle est le fondement de l'analyse
spatiale (GATRELL, 1983 ; LEVY et LUSSAULT, 2003). Tous les modèles de
géographie urbaine en dépendent explicitement ou implicitement: modèles
d'interaction, mesures d'accessibilité, modèles de localisation... La centralité de
la distance dans la discipline appelle une conceptualisation précise et adaptée.
Mais sa formulation, généralement laissée au ( sens commun ), n'est que trop
raxement explicitée. La représentation de la distance n'est pourtant pas unanime.
Qu'elle soit clairement formulée ou qu'elle soit sous-entendue, sa représentation
est toujours contextuelle. Cette caractéristique complique tout effort de
standardisation et fait en sorte que la distance demeure un concept ambigu
(I{URIOT et PERREUR, 1990).

La distance (le près et l'éloigné) est définie par son contexte: les
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motivations de l'acteur géographique, ses interprétations personnalisées, les
technologies auxquelles il a accès... Il n'y a pas une distance mais bien des
distances. S'impose alors au chercheur le choix de la mesure de la distance. Ce
choix et les résultats qui I'accompagnent dépendent évidemment des
caractéristiques de l'objet d'étude et de ses manifestations spatiales. Cet article
vise à démontrer que le choix de la mesure de la distance doit être fait en fonction
de la nature de I'objet d'étude.

En effet, la facilité nouvelle accordée à l'analyse de données numériques,


particulièrement par l'entremise des SIG, tend à banaliser l'utilisation de la
distance. Si la nature spatiale des phénomènes urbains est reconnue et étudiée
depuis longtemps, elle est aujourd'hui trop souvent reléguée au second plan,
derrière les fonctions automatisées offertes par les SIG. L'espace et la distance ne
sont pourtant pas des concepts absolus et peuvent êhe opérationnalisés de
différentes façons. Le choix de l'opérationnalisation est important, dans la mesure
où il engage les résultats de l'analyse spatiale.

* Les chiffres entre / / renvoient aux notes en fin d'article'

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Mathieu CHARRON, Richard SffiARMUR 165

Cet article est composé de deux parties. La première partie est un


inventaire des différentes manières de mesurer la distance. Après une brève
réflexion sur l'importance de la distance dans le phénomène urbain, nous
définissons, puis comparons, plusieurs manieres de la mesurer. Cette partie ne
prétend pas apporter des éléments nouveaux à la conceptualisation de la
distance,les différentes formulations qui y sont présentées sont déjà bien connues.
Elle en offre toutefois trne introduction et rappelle les principaux concepts qui
seront opérationnalisés par la suite.

La seconde partie confronte ces concepts aux observations de terrain.


Nous y analysons d'abord les difflérences distinguant quatre distances
< physiques > (distances mesurables par un mètre ou un chronomètre) mesurées
dans la région métopolitaine de Montréal. Ces différentes distances
< physiques >r sont à distinguer des distances < dointeraction r>, qui sont une
mesure de I'intensité d'un lien entre deux endroits. Le cceur de notre analyse
s'attarde à l'articulation des différences entre ces divers types de distance: son
originalité réside dans la comparaison entre les distances < physiques > et
< d'interaction >. En effe! bien que des comparaisons entre divers types de
distances physiques aient déjà été effectuées (LOVE et MORRIS, 1972 ;
APPARICIO et al., 2004), à notre connaissance, la relation entre les distances
< physiques >r et les interactions intra-métropolitaines reste peu explorée.

La question centrale à laquelle nous proposons une réponse est simple,


mais repose sur deux constats. Le premier constât est que l'intensité des
interactions entre lieux à Montréal diffère selon le motif de déplacement et le
mode de transport. Le deuxième est que la distance physique entre lieux à
Montréal difÊre selon la définition de la distance physique. En partant de
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I'hypothèse que, toutes choses étant égales par ailleurs, les interactions seront
plus intenses entre lietx plus rapprochées (TOBLE& 1970), notre étude
permetta de voir si certaines définitions de la distance physique sont plus à
même << d'expliquer > l'intensité de certains types interactions. Notre hypothèse
est qu'à chaque type d'interaction (par exemple: déplacements par auto, par
transport en commun, pour motif de magasinage, etc) correspond une distance
physique plus adéquate (par exemple : temps de déplacement à l'heure de pointe,
distance par le réseau de transpor! distance par le réseau routier, etc).

Mais avant d'entamer une exploration empirique de cette question dans le


contexte Montréalais, certains éléments de base concernant la mesure de la
distance et l'échelle intra-métropolitaine sont présentés.

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166 Distances, interactions et analyse spatiale de la ville : le cas de Montréal

-r-
Proximité urbaine et tyrannie de la distance

< La ville est, dans son principe même, une option spatiale, un acte
géographique. Il s'agit en effet de créer une situation, impliquant une société
dans son ensemble, dans laquelle la coprésence perrnet de tendre vers des
distances égales à zéro, vers un espace à zéro dimension, conçu sur le modèle
géoménique du point r (LEVY et LUSSAIJLT,2003, p. 988).

D'après cette définition, la distance est fondamentale à l'existence même


de la ville. Mais si sa raison d'être est I'abolition des distanceso cette demière
n'est évidemment qu'un idéal à atteindre. Les acteurs urbains ne peuvent se
superposer parfaitement et même dans le cas-limite d'une ville-gratte-ciel, la
distance ne peut être nulle... elle sera verticale. Autrement dit Ia ville est la
conséquence de l'éternel combat que liwent ses habitants à la distance. Elle se
rapproche de I'idéal ponctuel mais ne pouna jamais s'y résumer totalement.

C'est en cherchant à formaliser ce paradoxe que VANCE (1990) résume la


construction de I'espace urbain à trois processus indissociables : l'agglomération
(congregation), la séparation (segregation) et la connexion (connectivity).
Les << choses > urbaines soagglomèrent selon leurs complémentarités. Ces
complémentarités sont d'abord mises en valeurs par la promiscuité (croissance
urbaine). Mais comme les choses ne peuvent toutes être contiguës, elles sont
ensuite raccordées par la connectivité. Ces raccordements sont inévitablement
associés à des mises à distance d'éléments moins complémentaires et,
conséquemment, à la fragmentation de l'espace métropolitain. Ainsi la distance
définit la ville. Les organismes statistiques l'ont compris depuis longtemps et
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délimitent l'espace métropolitain à partir de I'intensité des liens domicile-travail
(Statistique Canada" 2001). Les résidences et les emplois ne pouvant se co-
localiser, ils sont spatialement séparés mais demeurent structurellement intégrés.

Les objets se positionnent donc dans l'espace urbain en fonction de leurs


complémentarités. La distance devient alors une contrainte obligée. Elle relie et
sépare les objets urbains. Elle permet de distinguer et de caractériser les differents
éléments de I'ensemble des lieux. En somme, la distance urbaine est une relation
(GATRELL, 1983). Ceci nous renvoie à la première moitié de la première loi de
la géographie mentionnée en entrée : tout est lié.

Mais la distanceJa relation-n'est pas fxe. Elle s'adapte constamment à de


nouvelles modalités : structures socio-économiques, représentations culturelles,
technologies d'information et de communication (TICs)... Ainsi la distance
urbaine a-t-elle évoluée, autant au plan conceptuel qu'au plan empirique. D'un
point de vue théorique, l'hégémonie de la distance absolue, formalisée par
Newton comme étant une réalité autonome, est aujourd'hui remise en question
par le paradigme de la relativité (MILLER et WENTZ, 2003). La distance, le près
èt l'éloigrré sont alors définis selon le besoin, ils varient selon le contexte. Cette
relativité est d'autant plus tranchée que la ville et ses points de vue sont toujours
plus diversifiés (KWAN et WEBER, 2003).

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Mathieu CHARRON, tuchard SI{EARMUR 167

La forme d'évolution des distances qui canalise le plus d'attention est


certainement celle associée aux progrès des TICs (Technologies d'Information et
de Communication). Il ne fait aucun doute que ces technologies (des carrioles à
intemet en passant par le téléphone et I'automobile) ont un impact majeur sur les
modalités spatiales de la structuration du phénomène urbain (BOAL, 1968 ;
FISHMAN, 2000). Développés dans le but de faciliter les échanges, les TICs sont
d'abord mises en valeur par les composantes urbaines les plus dépendantes les
unes des autres: emplois et résidences, commerces et clients, etc. Ce faisant, les
TICs laissent une empreinte persistante sur I'organisation des activités
métropolitaines. En effet, leurs infrastructures changent durablement ce que I'on
entend par < près >> et < loin >. En facilitant la connexion, les TICs redéfinissent
les critères de l'agglomération et compliquent sensiblement les struotures de
l'espace urbain. Ils décomposent les lieux, triant leurs éléments en regroupements
toujours plus spécialisés, et les insèrent à I'intériern d'un tissu d'une extrême
complexité.

Selon CASTELLS (1996), les distances spatiales absolues n'auraient plus


qu'une importance symbolique alors que les distances qui importent sont
aujourd'hui des flux. Ces flux peuvent rapprocher des lieux éloignés comme leur
absence peut séparer des lieux contigus. Ces mêmes flux organisent
l'implantation des infrastructures de transport. Apparaissent alors des corridors
d'échange << haute vitesse >>, corridors rapprochant les lieux les plus reliés,
renforçant du coup leur dépendance. Comme il est sous-entendu dans la première
loi, relation et distance constituent les deux revers d'une même médaille : plus la
distance diminue, plus la relation s'intensifie et vice versa. Ce processus
cumulatif peut toutefois être ralenti par l'inefficacité des infrastructures à réduire
la distance. De fait, les infrastructures ont une capacité limitée et une fois cette
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limite atteinte, le corridor est congestionné et la distance augmente. Cette
saturation encourage à son tour la réorganisation des flux métropolitains.
Infrastructures de transport, accessibilité, flux et congestion redéfinissent ainsi
constamment les distances intra-métropolitaines (figure 1, voir page suivante).

-II-
LES DISTAT\ICES : FORMULATIONS

Nous présentons ici les principales mesures de distance représentées dans


la littérature en géographie urbaine. Pour clarifier loexposé, elles seront classées
selon quatre types : la distance métrique, la distance topologique, la distance
pergue et la distance sociale. Cette classification estreprésentée au tableau L

2.1 La distance métrique

Après avoir longtemps considéré la distance métrique cornme une mesure


objective et absolue de la réalité, on admet aujourd'hui qu'elle est en fait une
forme de distance parmi d'autres, construite socialement, et qu'elle renvoie à une
représentation positiviste. La distance métique est une'distance mathématique.
Elle représente l'écart numérique ente deux (ou plusieurs) points localisés dans

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168 Distances, interactions et analyse spatiale de la ville : le cas de Montréal

un système de coordonnées. La distance métrique est représentée selon plusieurs


variantes mais elle est généralement forrnalisée selon l'équation de
MINKOWSKT /2/ :

D =lflx^- r^ff/' (1)

Figure I : La dynamique de la distance urbaine. Inspiré de GIULIANO (1995).

Infrastructures
de
transport

Accessibilité
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La distance métrique quantifie l'écart mathématique entre Ë points dans un
espace à z dimensions. Si fr est supériew à 2o la distance relie plus de deux
points. Elle représente alors une chaine de déplacements /3/. Si z est supérieur à
2, [a distance est multidimensionnelle. C'est le cas des distances qui considèrent
les déplacements verticaux et des distances calculées dans les analyses
factorielles. La valeur de I'exposantp indique la mesure selon laquelle la distance
est affectée par I'angle 0, formé entre les points et l'a:<e de référence du système
de coordonnée.

Cette équation se convertit sous la forme plus utilisée de la distance


euclidienne :

Du= (2)

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Mathieu CHARRON, Richard SHEARMUR 169

Tableau I : Classification des distances.

Univers Distance Définition Unité de Mesure


Distance minimale dans un svstème
EuclidienneE Longueur
de coordonnées.
Métrique Distance minimale dans un système
Rectilinéaire* de coordonnées composé de deux Longueur
seÊFnents perpendiculaires,
Chemin le plus court sur un réseau
Réticulaire* sans friction auûe que la longueur des Longueur
sesments-
l. Chemin le plus court sur un réseau
Cott dont les segments sont associés à Dollars, énergie, etc
différents cotts.
Topologique 2. Cotts de déplacement.
l. Chemin le plus court sur un réseau
Temps* dont les segments sont associés à Temps
différents temps.
2. Ternps de déplacement.
lntensité des relations. Déplacements, flux, etc
lnteraction
Individuel Perçue
Distance représenée hès, éloigné, etc
individuellement
Rapports de force,
Social Sociale Distance construite socialemenl
identités. etc

Note : Les distances dénotées par un astérisque < * >> sont celles que nous avons appelées < physiques >
dans notre texte. Elles ont été comparées à diverses distances d'interaction. La partie empirique de
notre article ne traite pas des distances cott, ni des distances pergues et sociales.

La distance entre les points i et/ est ici déterminée en fonction des valeurs
qu'ils affichent dans les dimensions x et y. L'équation de la distance euclidienne
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(2) est une variante de l'équation de MINKOWSKI (l) oi)m=2, k= 2 etp:2.
La distance euclidienne est la distance minimale ente deux points dans un espace
à deux dimensions. Autrement dit, dans l'espace géographiqueo il s'agit de la
distance à vol d'oiseau. Dans ce cas précis où p = 2, la distance n'est pas affectée
pæ 0 . Une seconde variante est fréquemment utilisée en géographie urbaine : la
distance rectilinéaire (ou distance de Manhattan) où m = 2, k : 2 et p = l. La
distance rectilinéaire relie deux points par deux droites perpendiculaires. Ainsi, si
le segment y est parallèle à l'axe de référence (e : 0) la distance réticulaire égale
la distance euclidienne. Si tel n'est pas le cas (e > 0'), la distance rectilinéaire est
supérieure à la distance euclidienne. Cette mesure touve sa justification lors de la
mesure de la distance sur un réseau orthogonal coûlme c'est le cas de la grille de
rue de l'île de Manhattan l4l.D'autres valeurs peuvent être athibuées àp mais
elles ne reposent sur aucune logique théorique (GATRELL, 1983).

Les distances métriques offrent plusieurs avantages. Elles reposent sur une
formalisation mathématique commode et de ce fait présentent des propriétés
géoméfiques comme la symétrie - selon laquelle la distance est la même à I'aller
comme au retour - ou I'inégalité triangulaire - qui garantit < une interdépendance
entre les distances qui permet une cohérence spatiale et la représentation
cartographique sur un plan > (IIURIOT et PERREUR, 1990, p. 200). Il est alors

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170 Distances, interactions et analyse spatiale de la ville : le cas de Montréal

possible, à I'instar de CLARK et al. (2003) ou de VANDERMISSEN e/ a/.


(2003), de rapporter les distances métriques à des valeurs d'angles ou à d'autres
objets métriques tels des arcs. De plus, la distanoe métrique entre deux points
prend une valeur (et une seule). Ce faisant, la distance méûique renvoie à la
< plaine homogène >r d'un espace idéal et of&e ainsi des assises solides à la
modélisation de l'espace réel dont les travaux de VON TTIIINEN,
CHRISTALLER et ALONSO ne sont que trois exemples. Ces mesures reposent
néanmoins sur des hypothèses qui ne s'appliquent pas à liespace réel: la
continuité, l'homogénéité et l'isotropie. Ces demières introduisent certaines
anomalies dans la distance métrique.

2.2. La distance topologique

Au lieu de s'appuyer sur un système de coordonnées, la distance


topologique repose sur un ensemble de lieux et sur les raccordements qui les
unissent. Ces relations peuvent être représentées par des distances-réseaq des
flux ou des temps. Loespace topologique intègre ainsi la notion de réseaq ses
discontinuités, son hétérogénéité et son anisotropie. Il est mieux adapté à la réalité
du phénomène urbain, défini davantage par les échanges qu'il soutient que par sa
superposition à un système de coordonnées arbitraire. En effet, les progrès des
TlCs valorisent davantage la connexion que la oontiguilé (CASTELLS, 1996). De
plus, les réseaux et les lieux évoluent ensemble; les variations de I'un impliquant
des adaptations de I'autre (GATRELL, 1983). Enfin, la représentation cognitive
que se font les acteurs urbains est topologique, elle implique la mémorisation de
points, de lignes et de surfaces (LYNCH, 1960)... elle n'est pas soumise aux
abstractions de l'espace métrique. Toutes ces raisons font que la distance
topologique est mieux adaptée que la distance métrique à I'analyse des relations
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qui constituent l'espace métropolitain (BATTY, 2003).

La distance topologique n'offre toutefois pas l'élégance mathématique de


la distance ménique. Ses valeurs varient dans le temps, I'espace et la direction.
En effet, les heures d'ouvertures, les heures de pointes (WEBER et KWAN,
2002),la synchronisation des activités (GOODCHILD et JANELLE, 1984) et la
forme urbaine (LEVINSON, 1998) imposent une incertitude sur la mesure de la
distancè.-De plus, la mesure de la distance topologique est associée à des cotts
(techniques et financiers) nettement supérieurs à ceux associés au calcul de la
distance métrique (PEETERS et THOMAS,2000 ; APPARICIO et al. 2004).
Enfin, les distances topologiques présentent une grande variabilité. Leurs valeurs
sont généralement des << plus courts chemins n ou des flux et des temps moyens.
Dans les faits, les déplacements sont généralement plus longs que le chemin le
plus court et les moyennes sont les valeurs centrales d'un ensemble très varié.

La distance topologique peut être représentée de différentes façons : toutes


ces représentations étant définies par la notion de réseau. La distance réticulaire
est la longueur du trajet le plus court effectué sur un réseau où seule la longueur
des segments est prise en compte. La mesure de la distance-coût, repose sur une
friction, autre que la seule longueur, accolée à chaque segment. Etant donné que
chaque segment n'impose pas le même coût, le chemin le moins coûteux n'est pas

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Mathieu CHARRON, Richard SHEARMUR l7l
nécessairement le plus court. Il en est de même pour la distance-temps, selon
laquelle la friction est le temps de déplacement. Ainsi certains points rapprochés
selon la distance réticulaire peuvent êffe éloignés selon la distance-temps (si les
segments qui les relient sont congestionnés, par exemple). Enfin le
rapprochement topologique n'est pas toujours associé à d'intenses interactions.
En effet, plusieurs facteurs peuvent faire en sorte que deux lieux bien raccordés
n'entretiennent que peu de relations spatiales (c'est ce qui défrni le ghetto). En
entretenant (ou non) association et complémentarité, les interactions rapprochent
(éloignent) des lieux éloignés (rapprochés). La distance d'interaction est ainsi
mesurée par les l'intensité des connexions (navettage, flux de capitaux...) entre
deux lieux.

2.3. La distance sociale et Ia distance perçue

Chaque individu évalue ses distanoes à sa façon (GOULD et WHITE,


1974).Il y a donc autant de distances qu'il y a d'acteurs et de relations. On est
alors loin des valeurs uniques proposées par les distances métriques. Aux biais
sensitifs (tels les illusions d'optique et d'autes processus cognitifs) se
superposent ici des biais affectifs (les préjugés, les souvenirs, les symboles...) et
des biais structurels (les TICs, le marché de I'emploi...). L'individualité de la
distance perçue en fait la mesure la plus adéquate à l'étude des comportements
spatiaux (GATRELL, 1983 ; BAILLY, 1990 ; HURIOT et PERREUR, 1990).
De nombreux travaux confirment en effet I'importance des caractéristiques
individuelles de position dans le marché de l'emploi (PRESTON et
MoLAFFERTY,1999\, de genre (IIANSON et PRATT, 1988 ; BLUMEN,1.994;
KWAN, 1999a), ou de mode de vie (LEVINSON, 1998 ; KWAN, 1999b ;
WEBER et KWAN, 2002) sur les comportements spatiaux.
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Mais malgré toutes les individualités, l'espace humain est un espace
construit socialement et les distances spatiales prennent une dimension sociale et
vice versa (PARK et BURGESS,1924; GOULD et WHITE, 1974 ; MASSEY,
1984 ; CASTELLS, 1996). Ceci fait en sorte que < la variété des représentations
)
individuelles [dissimule de nombreux] codes communs (BAILLY, 1990). On
pourrait donc affrmer que la distance perçue est une distance individuelle alors
que la distance sociale représente les régularités présentées par la superposition
de multiples distances perçues.

Malgré ses importantes régularités, la mesure de la distance perçue est


particulièrement délicate. Les efforts de modélisation de l'espace perçu n'ont
jamais su développer un programme de recherche cohérent. L'incommensurable
variabilité des réponses et la complexité du jeu des facteurs impliqués
embrouillent en effet tous les efforts de généralisation (GATRELL, 1983). Ces
derniers se limitent généralement à des échantillons particulièrement limités ou à
des acrobaties conceptuelles. Les distances perçues relèveraient ainsi davantage
du domaine du qualitatif, < les æuvres des poètes, des romanciers et de tous les
artistes qui projettent leur intériorité, expression de leur inconscient, dans la
nanation r (BAILLY, 1990,p.269).

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172 Distances, interactions et analyse spatiale de la ville : le cas de Montréal

-m-
LES DISTANCES : COMPARAISONS

Nous venons de le voir, la distance est un concept relatif : sa mesure peut


prendre plusieurs formes qui sont toutes plus ou moins bien adaptées aux
différents problèmes de la géographie urbaine. Dans cette section, nous
comparons certaines mesures de distance et nous évaluons leur pertinence à
l'évaluation de différents problèmes rnbains. Cette comparaison se fera selon
trois critères généraux: les propriétés mathématiques, les paramètres intégrés et
les cotts de production. Les éléments de cette section du texte sont syrthétisés au
Iab\eau2.

Tableau 2 : Caractéristiques des différenæs distances.

Distance Mesure Avantase(s) Inconvénient(s)


Euclidienne - élégance mathématique - ne represente aucun
Rectilinéaire - mesure peu dispendieuse phénomène urbain
directement*
Réticulaire - représente le réseau - mesure dispendieuse
Objective
Coût - représente la friction économioue - mesure disoendieuse
Temps - représente la friction temporelle - mesure dispendieuse
Interaction - représente l'intensité des relations - mesure dispendieuse
- représente les perceptions person- - mesure dispendieuse
Perçue
nalisées - aucune généralisation
oossible
Subjective
- représente les constructions - mesure dispendieuse
Sociale
sociales - incertitude concep-
tuelle
* la dislance rectilinéaire représente le réseau routier si celui-ci est une grille.
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3.1. Propriétésmathématiques

La distance métrique est mathématique par définition. Elle offre ainsi


l'intéressant avantage d'être manipulée avec plus de commodité. En plus de
présenter les propriétés géométriques mentionnées plus haut elle se prête à de
nombreux ajustements. Par exemple, une longue tradition de travaux cherche à
manipuler l'équation de MINKOWSKI (essentiellement en modifiant les valeurs
de 0 et de p) afin de rendre ses résultats plus conformes à la réalité topologique
(LOVE et MORRIS, 1972; PEETERS et THOMAS, 2002). De plus, la
représentation cartographique de la distance métrique et des lieux qu'elle met en
relation est aisée parce qu'elle relève d'un espace-plan et peut être représentée
graphiquement sans aucune déformation. Toutes les autres mesures de distance
n'offrent aucune propriété géométrique. La direction doit alors être intégrée dans
les calculs et la représentation cartographique des relations entre les lieux est
littéralement tordue.

La variabilité des valeurs de distance affecte les possibilités de


généralisation. En effet, s'il n'y a qu'une seule valeur de distance métrique et
réticulaire entre deux lieux, les autres mesures de distance présentent plusieurs

RERU 2005,II,pp. 163-192


Mathieu CHARRON, Richard SIIEARMUR 173

valeurs ente ces deux mêmes lieux. Si cette variation peut être interprétée sur la
base des statistiques descriptives, il n'en demeure pas moins qu'elle introduit un
flou autour d'une tendance centrale. Les distance d'interaction varient dans le
:
temps mais présentent néanmoins d'importantes régularités les navettes
domicile-travail se répètent quotidiennemen! les restaurants attirent davantage
aux heures de repas, etc. Les distances-temps, elles, présentent plus de variations.
Elles dépendent en effet des grands flux de population, de la congestion et de
I'offre de transport en commun qu'ils conditionnent. Les distances-temps sont
ainsi plus sensibles aux petites variations (aux accidents de la route, à la météo)
que ne le sont les flux qui les sous-tendent. Quant à la distance perçue, elle est
relative. Bien qu'elle soit modelée en partie par des phénomènes sociaux parfois
généralisables @AILLY, 1990), elle n'en demeure pas moins dépendante de
représentations personnalisées. Et conrme chaque individu est unique, chaque
distance perçue est spécifique.

3.2. Paramètresintégrés

L'hypothèse de la plaine homogène implicite à la distance métrique est


tèsréduchice. Plusieurs facteurs affectant la distance sont toutefois pris en
compte par d'autres mesures de distance. Nous en retenons cinq : le réseau, les
échanges, la congestion, la friction et la perception.

Le cadre bâti pose un obstacle évident aux déplacements dans l'espace


urbain. Ces derniers ne se font que ratement en ligrre droite, ils doivent s'ajuster
aux possibilités offertes par les infrastucûnes de transport, ils doivent s'ajuster
au réseau. Ce demier peut être numérisé et intégré dans un système d'information
géographique /5/. Il devient alors possible de déterminer la distance réticulaire,
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c'est-à-dire le chemin le plus court sur le réseau. La distance rectilinéaire peut se
comparer à la distance réticulaire dans le cas précis d'un réseau orthogonale. Elle
ne potura toutefois pas tenir compte des voies < diagonales >. La distance
dointeraction et la distance-temps intègrent indirectement les conhaintes du
réseau. En effet, l'intensité des éohanges dépend de la possibilité d'interaction
offerte par le réseau (mais n'exploitent toutefois pas toutes ses possibilités) alors
que le temps de déplacement est évidemment conélé à la distance réticulaire.
Quant à la distance perçue, elle repose en partie sur la connaissance qu'ont les
individus du réseau mais cette connaissance est imparfaite et biaisée par
l'expérience.

Étant donné que la distance est une relation entre deux lieux, l'intensité
des échanges (de population, de capitaux, de produits, etc.) entre ces demiers peut
être considérée comme une mesure de distance. Si ces interactions dépendent de
moins en moins de la distance métrique, elles reposent sur les possibilités offertes
par le réseau (et représentées par la distance réticulaire), aux inégalités de ce
demier (distance-temps) et à d'autres considérations socio-fconomiques (distance
perçue, structure économique).

Enfin, seule la distance pergue représente l'interprétation individuelle de la


distance. Cette dernière est toutefois influencée autant par la distance métrique
RERU 2005,II,pp. 163 -192
174 Distances, interactions et analyse spatiale de la ville : le cas de Montréal

(par le biais de la cartographie et de la vision), le réseau de transport (et sa nature


topologique), les interactions (ses relations avec l'expérience vécue) et le temps
de déplacement.

3.3. Coûts

Les calculs des différentes mesures de distance sont plus ou moins


dispendieux en temps comme en argent. Ils requièrent en effet l'acquisition de
données (existantes ou non), I'utilisation de logiciels et des manipulations
informatiques.

La mesure de la distance métrique est évidemment la moins dispendieuse.


Il suffrt en effet de connaître les coordonnées spatiales des objets d'étude et d'y
appliquer des équations relativement simples. La mesure de la distance réticulaire
implique beaucoup plus de ressources : un ordinateur assez puissant, une base de
données représentant un réseau de transport géoréférencé, un logiciel permettant
l'analyse de ce réseau, une expertise en progranrmation et en géomatique
(PEETERS et THOMAS,2000; APPARICIO et a1,2004). La distance-temps et la
distance d'interaction demandent quant à elles la production d'enquêtes d'une
envergure assez importante pour lui permethe de représenter les multiples sources
de variations (accidents de la route, constructiorl etc.). Une mesure représentative
de la distance perçue implique un échantillonnage encore plus large ce qui rend sa
mesure presque impossible.

-rv-
PRÉSENTATION DE L'ANALYSE EMPIRIQUE : DISTANCE
PHYSTQUES ET DTSTA|ICES D'TNTERACTTON À UONrnÉar,
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4.1, Présentationgénérale

L'analyse qui suit a pour but de faire ressortir les corrélations entre
distances d'interaction et distances physiques à Montréal. Cinq types
d'interactions sont analysées : i) les déplacements pour motif travail, ii)
déplacements pour motif de magasinage, iii) les déplacements en automobile, iv)
les déplacements en transport en cornmun (TEC) et v) les déplacements totaux.
Quatre mesures de distance physique sont retcnues : i) la distance euclidienne, ii)
la distance réticulaire (réseau routier), iii) le temps en automobile à l'heure de
pointe et iv) le temps en TEC.

Évidemment, I'intensité des flux entre lieux à Montréal diffère selon le


type dointeraction étudié; de même la distance physique mesurée selon ces quatre
méthodes diffère aussi. La question à laquelle nous nous attardons est la
suivante: certains types d'interaction sont-ils plus fortement corrélés avec
certaines mesures de distance physique ? Il serait logique de supposer, par
exemple, que les interactions par TEC soient plus intenses entre les lieux qui sont
proches (temps de transport moindre) par le biais du réseau TEC. C'est ce type de
relation que nous explorons ici.

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Mathieu CHARRON. Richard SHEARMUR 175

4.2. Données et méthodologie

Notre analyse repose sur des distances mesurées à I'aide de trois sources
de données : les fichiers géographiques de la région métropolitaine de Montréal
de 2001 (Statistique Canada), les mesures de temps (Ministère des Transports du
Québec) et l'enquête Origine-destination 1998 (plusieurs partenaires /6/). Elles
représentent les valeurs de distances séparant 93 secteurs municipaux (SM) /7/.
Ces zones ont été définies dans le cadre de I'Enquête Origine-destination 1998
dans le but d'obtenir un découpage spatial pertinent à l'analyse des déplacements
enregistrés dans l'enquête. Des 8 649 paires de SM disponibles, nous ne retenons
que celles dont la liaison en transport en commun est possible. Notre analyse
repose ainsi sur les 8 545 pàires retenues.

Pour chacune de ces paires, nous compaf,ons neufmesures de distances:


quatre distances < physiques ) et cinq distances d'interaction. Ces distances ont
été calculées à partir des zones d'analyse de transport QAT). Les distances
physiques associées à chaque paire de SM sont les moyennes des distances
associées à toutes les paires de ZAT correspondantes (voire I'annexe). La
distance euclidienne a été calculée à partir des centroides des ZAT. La distance
réticulaire a été obtenue grâce à une application développée à I'INRS-UCS à
l'aide de ATcGIS (APPARICIO et al., 2004). Selon cette procédure, les
centoïdes des ZAT sont calés > sur le réseau de transport numérisé et le chemin
<<

le plus court permis par ce réseau est calculé. Nous avons utilisé le réseau offert
par Statistique Canada.

Les distances-temps ont été calculées par le Ministère des Transports du


Québec à partir de simulations intégrant les informations de I'Enquête Origine-
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destination 1998, un réseau de transport plus complet que celui offert par
Statistique Canada /8/ et plusieurs mesures de validation /9/ (MTQ 2002). Deux
temps moyens sont ici utilisés : en automobile à l'heure de pointe matinale et en
transport en commun départ à 7:00. Les temps en automobile ont été calculés
dans EMME/2, un logiciel de simulation routière qui tient compte de
I'engorgement du réseau. Les temps en transport en commun ont été calculés par
le logiciel MADITUC, qui repose sur les horaires de la flotte de transport en
commun.

Quelques statistiques relatives à ces variables sont présentées au tableau 3.


Ces variables ont été calculées à partir de 8 545 paires de SM. Sans surprise, les
distances euclidiennes sont inférieures aux distances réticulaires et les temps en
automobile sont inférieurs à ceux en transport en commun'

RERU 2005,II,pp. 163 -192


176 Distances, interactions et analyse spatiale de la ville : le cas de Montréal

Fizure 2 : Réseau routier et centroides des secteurs municipaux.

* ffiÔÉonrridFr
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Tableau 3: Distances < physiques D entre les secteurs municipaux : statistiques
descriptives.

Variables Unité Minimum Maximum Movenne CV


Distances
Euclidienne Mètres 643 7l 894 24 ts2 0,52
Réticulaire Mètres | 271 87 097 29 982 0,50
Temps
Automobile Minutes 5 r03 4l 0.44
Iransport en commun Minutes 6 228 83 0.41

Note : CV - coefficient de variation.

Nous avons choisi de confronter nos mesures de distance physique aux


flux de personnes se déplaçant au sein de la RMR de Monhéal pour divers motifs
et modes de transport : l'ampleur de ces flux constitue donc notre mesure de
distance d'interaction. Concrètement, ces distances d'interaction représentent les
déplacements enregistrés lors de I'Enquête Origine-destination 1998. Notre
hypothèse de départ est, en accord avec la première loi, que la distance

RERU 2005,II,pp. 163-t92


Mathieu CHARRON, Richard SIIEARMUR 177

d'interactions reliant deux SM diminue avec la distance physique: mais nous


supposons aussi que cette loi ne s'applique pas nécessairement de la même façon
à chaque type d'interaction (chaque motif et mode de transport).

Les distanoes d'interaction posent cependant quelques difficultés, et des


corrélations simples entre distance physiques et distances d'interactions ne
seraient pas justifiées. En effe! I'ampleur des interactions est fortement tributaire
de la taille des origines et des destinations. Par exemple, on peut s'attendre à ce
queo à distance physique égale, les déplacements effectués entre un SM générant
I 000 déplacements et un aufe en attirant le même nombre soient plus importants
que les déplacements effectués entre deux SM qui en génèrenVattirent la moitié.
Afin de représenter toutes ces composantes de l'interaction, nous utiliserons trois
valeurs d' interaction.

- La première représente les interactions brutes telles que comptabilisées


dans I'enquête Origine-Destination ; ce sont les interactions observées, ou les flux
réels entre chaque SM.

- La seconde représente l'interaction attendue dans le cas où seules les


tailles des origines et des destinations influencent les déplaoements. Ces
interactions (ou flux) sont modélisées séparément pour chacun des cinq types. La
< taille >r d'un SM d'origine est mesurée par I'ensemble des déplacements qu'il
génère, quelle que soit la destination. La < taille >r d'un SM de destination est
mesurée par l'ensemble des déplacements qu'il attire, quelle que soit I'origine.
Pour une paire de SM donnée, l'interaction attendue n'est fonction que de ces
deux < tailles >.

Si la distance joue un rôle (si les interactions sont plus intenses entre les
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SM rapprochés) les interactions observées ente deux SM distants seront
inferieures aux interactions attendues. Les interactions attendues ne considèrent
donc que les effets de taille, sans tenir compte de la distance ou d'autres facteurs
qui pourraient influencer les interactions.

Si les interactions attendues sont fortement corrélées avec une mesure de


distance cela signifierait que les SM de grande taille sont rapprochés dans cet
univers spatial, et que les SM de petite taille sont plus éloignées. De telles
corrélations nous apporteraient des informations sur la forme urbaine.

- La troisième valeur d'interaction représente l'écart entre les interactions


observées et les interactions attendues ou autrement dit, les interactions qui ne
sont pas expliquées par la taille des SM. S'il y a forte corrélation entre ce résidu
et une mesure de distance, alors on poura dire que dans cet univers spatial la loi
de TOBLER s'applique : les flux sont plus intenses entre lieux plus proches.

ces trois types d,interaction sont calculés de la manière suivante. Les


interactions du premier type sont simplement les déplacements comptabilisés
dans l'enquête Origine-Destination. Les interactions du second type sont
calculées selon loéquation (3) :

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178 Distances, interactions et analyse spatiale de la ville : le cas de Montréal

g'aar/O
I.a = (3)

où I'interaction attendue (Io) ertf.e une origine o et une destination d est le


produit des déplacements générés par l'origine (g") par ceux attirés par la
destination (a7) divisé par les déplacements totaux @. Leurs valeurs sont donc
importantes lorsque le SM d'origine génèrent beaucoup de déplacements et que le
sM de destination en attire autânt. Elles ne sont pondérées que par la taille, la
distance physique séparant les deux SM n'a ici aucune importance.

Les interactions du troisième type représentent l'écaxt entre les interactions


observées et les interactions attendues. Ce sont des probabilités cumulées, elles
représentent l'importance des interactions observées entre deu SM en tenant
compte de leur taille (voir l'annexe). Elles sont dérivées de l'équation binomiale :

P(i.)=effi;,)t;)[' (r)) (4)

où la probabilité P d'obse*et io4 déplacements attendus entre une origine et une


destination dépend des déplacements générés par I'origine fu,o), des déplacement
attirés par la destination (a) et des déplacements totaux (D). cette probabilité
varie entre zéro, lorsque les interactions attendues n'ont aucune chance de se
produire (l'origine ne génère aucun déplacement et/ou la destination n'en attire
I
aucun), et lorsque les interactions attendues sont assurées de se produire
(l'origine etlou la destination concentrent l'ensemble les déplacements). Comme
nous nous intéressons à l'écart entre les interactions observées (type 1) et les
interactions attendues (type 2), nous utiliserons des probabilités cumulées. Ces
dernières représentent la probabilité d'observer les interactions attendues ou une
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quantité moindre. Autrement dit, elles représentent les interactions observées qui
ne peuvent être expliquées par la taille des origines et des destinations.
Une valeur de 1 signifie que l'interaction observée est nettement supérieure à
l'interaction attendue (les SM devraient être rapprochés) alors qu'une valeur de 0
signifie que l'interaction observée est nettement inférieure à l'interaction attendue
(les SM devraient être éloignés). Une valeur de 0,5 signifie que les interactions
observées sont égales aux interactions attendues.

Quelques statistiques descriptives relatives à ces distances d'interaction


sont affichées au tableau 4. On y remarque d'abord que les interactions
motorisées sont plus nombreuses alors que les interactions pour motif de
magasinage sont les moins nombreuses. Les valeurs moyennes observées et
attendues sont identiques cax nous présentons ici les moyennes pour l'ensemble
de la RMR. Comme en témoignent les valeurs maximales et les coefficients de
variation (CV), les valeurs observées sont toutefois beaucoup plus diversifiées
que les valeurs attendues. Ce constat illustre le fait que la taille des SM (qui
forme I'essentiel du calcul des valeurs attendues) n'explique qu'une certaine
proportion des interactions qui les unissent. Cependant, certains types
d'interaction dépendent davantage de la taille des origines et des destinations que
ne le font les autes, ce qui est le cas des interactions en transport en commun
dont les origines et les destinations sont particulièrement concentrées au centre de
RERU 2005,II,pp. 163-192
Mathieu CHARRON, Richard SI{EARMUR 179

l'agglomération. La majorité des déplacements en transport en commun se fait


donc ente les quelques origines qui génèrent beaucoup de déplacements de ce
type et les quelques destinations qui en attirent autant. A l'opposé, la grande
majorité des SM génèrent et attirent des déplacements en automobiles. Si la
distance physique n'avait aucun impact sur ces interactons, elles seraient
distribuées de façon relativement homogène pour chacune des paires de SM.

Tableau 4 : Distancæs d'interaction entre les secteurs municipaux : statistiques


descriptives.

Type de N Valeurs observées Valeurs attendues Valeurs résiduelles


Min Mu Moy cv Min Md Moy cv Min Mu Moy cv
Motif travail 60 361 0 710 3.47 0 305 7 2.03 l0 I.00 "44 0.E5
Motif de 32699 0 9E6 + 7,27 0 70 4 1,46 0,00 1,00 0,43 0,90
masasinase
En automobile 189 0 3850 22 4,51 0 298 22 I,l E 0,00 I,00 0,25 1,45
(mnducteut) 075
En mnsport 45 321 0 580 f, 4,85 0 606 J 3,9s 0,00 1,00 0,67 0,53
en
commun
Totaux 353 0 7799 4l s2r 0 649 4l I,3 r 0,00 1,00 0,20 1,74
579

Note : N = Nombre d'observations.

-v-
ANALYSE COMPARATIYE DES DISTANCES PHYSIQIIES DANS LE
CONTEXTE MONTRIÉALAIS

La comparaison des quatre distances physiques entre elles nous


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renseignera sur leurs affinités et leur permutabilité. Comme nous l'avons vu plus
haut, les coûts de calcul de ces différentes mesures sont variables. En comparant
leurs valeurs nous porurons ainsi évaluer l'importance de leurs différences et
estimer l'erreur associée aux mesures moins précises et moins coûteuses (comme
la distance euclidienne).

Les coefficients de corrélation entre les différentes mesures de distances


sont affichés au tableau 5. Ces demiers sont tous très élevés (toujours supérieurs à
0,727). La conélation entre les distances euclidienne et réticulaire (0,957) sigrrifie
que les coûts élevés des calculs de la distance réticulaire rapportent relativement
peu de précision supplémentaire, d'autant plus que la manipulation des
paramètes p et 0, qui noa pas fait l'objet d'une attention particulière dans notre
démarche, permet d'augmenter la corrélation entre ces distances (LOVE et
MORzuS, 1972; PEETERS et THOMAS, 2000). La distance réticulaire
s'apparente davantage à la distance euclidienne qu'aux distances-temps. La plus
gfande différence distingUe les temps en automobile de ceux en transport en
commun. Cette différence est imputable au fait que les infrastructures associées à
ces modes de transport difÊrent sensiblement et ce particulièrement à I'heure de
pointe matinale où les temps en automobile sont les plus longs alors que l'offre de
transport en commun est la plus efficace.

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180 Distances, interactions et analyse spatiale de la ville : le cas de Monûéal

Tableau 5 : Corrélations des distances physiques enhe les secteurs municipaux*

Distance Temps
euclidienne réticulaire automobile TEC
Distance euclidienne 1,000
Distance de magasinage 0,957 1,000
Temps automobile 0,810 0,847 1,000
Temps TEC 0.806 0.878 0.727 1.000
* tous les coefficients sont significatifs à99,99 Yo.

Ces résultats démontrent que si la distance réticulaire offre une meilleure


correspondance avec les distance-temps que ne le fait la distance euclidienne, le
gain de précision demeure faible. Il semble en effet que distances euclidienne et
réticulaire présentent des << près >r et des < loin > relativement comparables alors
que les temps (en automobile comme en transport en commun) réfèrent à d'autres
réalités spatiales (la congestion routière et le système de transport en commun).

-vr-
ANALYSE COMPARATM DES DISTANCES PHYSTQUES ET DES
DISTAI{CES D'INTERACTION DANS LE CONTEXTE MONTRÉALAIS

Nous venons de le voir, les différentes mesuxes de distance correspondent


à des réalités spatiales spécifiques. Dans cette section nous vérifions si certaines
mesures de distance physique sont plus déterminantes que d'autres dans
I'organisation spatiale des interactions (ici les déplacements de l'enquête Origine-
Destination). Ce faisant, nous évaluons si I'analyse de certains phénomènes
spatiaux (les types de déplacements étudiés ici) requiert l'utilisation d'une mesure
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de distance particulière.

Les valeurs du tableau 6 représentent les coefficients de corrélation entre


les mesures de distance physique et les interactions observées /10/. On y
remarque que, en accord avec la première loi de la géographie, les SM les plus
rapprochés sont aussi les plus reliés. En effet, les coefficients de corrélation sont
tous positifs et situés errtre 0,392 et 0,543. Ces valeurs indiquent toutefois que la
distance physique noest pas le seul facteur qui oriente les interactions intra-
métropolitaines. Si c'était le cas, tous les coefficients seraient de 1,000.

On y remarque aussi que les interactions en automobiles et pour le


magasinage s'harmonisent davantage au réseau routier (distance réticulaire) alors
que les interactions en transport en commun et pour le travail le font davantage
avec le système de transport public (temps en transport en commun). Les
interactions pour le travail n'offrent généralement que peu de choix pour les
navetteurs qui doivent se dfiger à peu près au même moment vers des pôles
d'emplois de grande attractivité. Ces pôles sont bien desservis par les
infrastructures de transport (d'où les fortes corrélations avec la distance
réticulaire et les temps en transport en commun) mais engendrent d'importants
embouteillages (d'où la faible corrélation avec les temps en automobile).

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Mathieu CHARRON, Richard SHEARMUR l8l
Tableau6 : Corrélations entre les distances physiques et d'interaction (valeurs
observées)*.

Déplacemenb
Distance Temps
euclidienne réticulaire automobile TEC
Travail 0,485 0,519 0,397 0,523
Magasinage 0,464 0,482 0,437 0,444
Automobile 0,466 0,483 0,478 0,456
TEC 0,464 0,514 0,392 0,543
Totaux 0.51 I 0-533 0,483 0.507

* Tous les coefficients sont significatifs à99,99 %o.

Les valeurs du tableau 7 représentent les coefficients de corrélation entre


les distances physiques et les interactions attendues. Le fait que ces valeurs soient
sigrrificatives s'explique parce que les SM qui génèrent et atthent le plus de
déplacements sont généralement bien racoordés par les infrastructures routières,
représentées par la distance réticulaire, mais surtout par I'offre de transport en
commun. Les plus faibles corrélations correspondent aux temps en automobile, et
ces corrélations sont bien plus faibles que oelles observées pour la distance
réticulaire (routes sans congestion): ceci signifie que si les SM de grande taille
sont bien raccordés par le réseau routier, ces raccordements souffrent de
congestion. À I'inverse, les plus fortes corrélations correspondent toutes au temps
en TEC : ceci souligne que le réseau TEC relie entre elles les plus gands SM (qui
sont situés vers le centre de la RMR), ceux entre lesquels on s'attend à des flux
plus importants. Enfin, les corrélations portant sur les interactions attendues
(tableau 7) sont toutes inférieures à celles portant sur les interactions réelles
(tableau 6). Une partie des interactions est donc expliquée par autre chose que la
taille des SM d'origine et de destination.
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Tableau 7 : Corrélations des distancss physiques d'interaction (valeurs attendues), entre
zones SM*

Déplacements
Distance TemPs
euclidienne réticulaire automobile TEC
Travail 0,178 0,219 0,074 0267
Magasinage 0,167 0,206 0,1 52 022r
Automobile 0,146 0,184 0,1 35 0,203
TEC 0,355 0,409 0,238 0,465
Totaux 0.229 0.280 0,183 ît326
* Tous les coefficients sont significatifs à99,99 %o.

L'analyse des résidus (tableau 8) nous permet de confirmer, en accord


avec la première loi et le modèle gravitaire, que l'intensité des interactions repose
en partie sur la distance séparant SM d'origine et de destination. Les valeurs du
tabieau 8 représentent les coefficients de corrélation entre les distances physiques
et les interactions résiduelles. Contrairement aux interactions observées et
attendues, les interactions résiduelles ne sont pas des fréquences mais des valeurs
binomiales (voir annexe). CeUe spécificité empêche toute comparaison absolue
des valeurs dutableau 8 aux valeurs des tableaux 6 et 7.
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182 Distances, interactions et analyse spatiale de la ville : le cas de Montréal

L'intensité de tous les types déplacements résiduels, à I'exception de ceux


effectués en transport en conrmun, a tendance à être la plus forte entre les sM qui
sont proches dans l'univers 'temps automobile'. sans surprise, cette corrélatiôn
est la plus forte pour les déplacements en automobile (dont l'intensité est
fortement conélée à tous les univers de distance). À I'opposé, les interactions en
transport en cornmun présentent des coefficients nettement moins significatifs,
voire négatifs dans un cas: l'intensité des interactions par voie de transport en
commun ne dépend donc pas de la proximité physique entre origines et
destinations, quel que soit l'univers de distance considéré. Elles dépendent
presque exclusivement de la taille des sM d'origine et de destination (tableau 7).
ceci pourrait s'expliquer par le fait que lohomogénéité des tarifs et la nature
intermodale des transport en TEC (l'attente hors véhicule) font que les coûts et le
temps des déplacements en TEC ne sont pas étroitement liés à la distance
parcourue /11/.

Dans le même sens, et contrairement aux résultats obtenus pour les


interactions observées (tableau 6), les intoractions résiduelles pour le travail sont
plus fortement corrélées au temps en automobile qu'à la distance réticulaire. ceci
peut s'interpréter de la façon suivante. Le réseau routier (distance réticulaire) relie
mieux les origines et destinations de taille importante - c'est-à-dire les couples
pour lesquels on prédit de forts flux (conélations assez fortes au tableau 7). par
contre, dès que I'on introduit la congestion (temps en automobile à l,heure de
pointe), le réseau relie indifféremment les lieux entre eux, quelle que soit leur
taille (conélations faibles au tableau 7). Ce résultat contaste avec celui obtenu
lorsque l'on observe les résidus - c'est-à-dire les flux de navetteurs qui ne sont
pas explicables par la taille des SM: dans ce cas le temps en automobile est
fortement corrélé à l'intensité de des flux. Autrement di! dans la mesure où ils
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travaillent et résident dans des SM de tailles comparables, les navetteurs évitent
les routes congestionnées et ont tendance à choisir un couple < lieu de résidence -
lieu de travail > qui est plus rapproché dans l'univers < temps en automobile >.
Cette interprétation s'applique également aux autres types d'interaction à
l'exception, décrite précédemment, des déplacements en transport en commun.
Ceci reflète le fait que la majorité des déplacements (autres que celles
spécifiquement en TEC) sont effectués en automobile.

Pour résumer cette section, alors que la distance réticulaire représente


mieux les interactions observées (quel qu'en soit le motif ou le mode) et que le
temps en transport en commun représente mieux les interactions attendues, c'est
le temps en automobile lors de la pointe du matin qui représente le mieux les
interactions résiduelles. A l'exception des interactions en transport en corrunun,
tous les types d'interaction s'y harmonisent le mieux. Quant aux interactions
résiduelles en transport en commun, elles ne semblent être pas corrélées du tout à
la distance physique, conséquence peut-être des politiques de tarification etlou
des éléments perturbateurs (attentes, changement de mode de hansport, parcours
à pied) qui brouillent la < loi > de TOBLER.

RERU 2005,II,pp. 163-192


Mathieu CHARRON, Richard SHEARMUR 183

Tableau 8 : Corrélations des distances physiques d'interaction (valeurs résiduelles)*.

Déplacements
Distance Temps
euclidienne réticulaire automobile TEC
Travail 0,351 0,334 0,380 0,307
Magasinage 0,229 0,244 02s2 0,186
Automobile 0,51I 0,513 0,590 0,506
TEC 0,018a 0,068 0,030a -1,030a
Totaux 0.515 0.521 0.591 0.509

* Saufindication contraire, tous les coefficients sont significatifs à99,99 o/o.

a : Non significatif à 99 %.

. YII_
CONCLUSIONS

7.1. Résultatsempiriques

De manière générale les flux de déplacement à Montéal ont tendance à


être plus importants entre lieux qui sont plus proches les uns des autres (tableau
6), quel que soit le motif ou le mode de ces déplacements. Cependant, les flux
pour motif travail (ainsi que ceux en transport en commun) sont fortement liés au
temps en TEC, et les flux porn motif de magasinage (ainsi que cerrx en
automobile) sont plus importants entre lieux qui sont proches par voie du réseau
routier. Autement diq il existe bien des liens plus étroits entre certains types de
flux et certains types de distance, et il est donc pertinent -lorsque l'on monte un
cadre d'analyse- de bien apparier ces deux dimensions. Il ne faut pas, cependang
exagérer ces différences. La corrélation entre flux et distance ne varie pas de
manière très importante selon le choix de distance, sauf en ce qui conceme le
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temps en automobile.

En effet, les flux pour motif travail sont plus fortement corrélés avec les
distances réticulaires (réseau routier et temps TEC) qu'avec le temps en
automobile à loheure de pointe. Or, oes déplacements se font- en général - à
l'heure de pointe, et il semblerait plus logique - pour chaque individu - de
chercher à minimiser le temps de transport plutôt que la distance. Ceci nous mène
à deux constats.

En premier lieu, le réseau de TEC relie bien les lieux entre lesquels
existent de forts flux pour motif travail : sans prétendre élucider de lien causal, il
semblerait que le réseau de TEC montréalais soit particulièrement bien adapté
aux flux pour motif travail.

En deuxième lieu, le choix du couple < lieu de résidence/lieu de travail >


(pour ceux qui se déplacent en voiture) se ferait plutôt sur la base de proximité
physique que de proximité en temps. Ce deuxième constat peut paraltre
inationnel, sauf si I'on admet que même si la congestion est prévisible de manière
statistiqueo elle reste très aléatoire d'un jour à l'autre (et même d'un moment à
I'autre). La décision < lieu de résidence/lieu de travail > se ferait donc plutôt sur
RERU 2005,11,pp. 163-192
184 Distances, interactions et analyse spatiale de la ville : le cas de Montréal

la base de distances connues et stables (distance réticulaire, temps en TEC) que


sur la base de distances aléatoires (temps automobile à l'heure de pointe). cette
interprétation est étayée par I'analyse des déplacements résiduels : à taille égale,
on a tendance à emprunter des voies moins congestionnées. Pour ces
déplacements, le choix se ferait de manière plus < rationnelle )
parce que le
temps de transport sur des voies non congestionnées est plus prévisible.

L'analyse des flux qui ressortent de déplacements ne se faisant pas


nécessairement aux heures de pointes, et qui ne vont pas nécessairement vers des
pôles d'emploi importants (magasinage et déplacements automobiles dans leur
ensemble) nous porte à des constats similaires. En effet, le conbaste entre le
pouvoir explicatif du temps automobile à l'heure de pointe et le pouvoir explicatif
de la distance réticulaire est moindre pour ce type de flux que pour les navettes.
Ceci s'expliquerait par le fait que ces flux sont faits de déplacements qui ne se
font pas nécessairement le long des voies congestionnées à l'heure de pointe.

Nos analyses ont montré que l'importance des interactions entre deux SM
est associée à la qualité de leur raccordement par les infrastructures de transport
(distance réticulaire et TBC) : cependant, le lien causal n'est pas établi. Le réseau
de TEC (et notamment le métro) s'est-il développé pour mieux desservir les SM
entre lesquels les flux étaient les plus importants, ou a-t-il généré ces flux ? Le
réseau routier répond-il à une demande préexistante, ou la crée-t-il ? Ces
questions vont bien au-delà de notre analyse. Cependant, notre analyse démontre
que l'intensité de ces interactions peut impliquer unè congestion du réseaq et que
les interactions les plus flexibles sont alors amenées à éviter cet engorgement et
se redistribuent sur des voies plus distantes topologiquement mais moins distantes
en termes de temps. Bien que nousi ne puissions pas l'analyser de la même
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manière (nous n'avons pas de mesure de distance topologique du réseau TEC), il
semblerait que les effets de congestion soient bien moindres en TEC : quelle que
soit la manière de mesurer la distance, ces flux sont principalement explicables
par l'effet de taille des SM. À la différence du réseau routier, ce résèau peut
s'adapter à l'affluence (trains plus longs, ffains et bus plus réguliers), une
caractéristique que minimiserait I'effet de congestion.

7.2. La pertinence de comparer les concepts et les mesures de distance

Au-delà des remarques et conclusions particulières liées à l'interprétation


des résultats empfiques, la reponse à notre question centrale (certaines
définitions de la distance physique sont-elles plus à même << d'expliquer >
l'intensité de certains types interactions ?) demeure ambiguë. Nous avons vu que
les différentes mesures de distance présentent chacune leurs avantages et leurs
inconvénients. Cependan! malgré les différences conceptuelles importantes qui
les séparent, elles sont très fortement corrélées entre elles. La faiblesse des écarts
entre les mesures de distance physique valide d'une certaine façon I'utilisation de
la distance euclidienne. En effet, cette mesure se compare relativement bien aux
autres mesures de distance utilisées dans notre analyse (tableau 5). Elle demeure
un choix acceptable dans le contexte où, faute de moyens, les autres mesures ne
peuvent être calculées. De plus, elle offre une altemative ( neutre > pour les

RERU 2005,II,pp. 163-192


Mathieu CHARRON, Richard SHEARMUR 185

projets s'intéressant à plusieurs phénomènes dont l'ambiguilé des rapports à


I'espace complique le choix de la mesure la plus pertinente.

Cependant, I'utilisation de mesures de distance mieux conceptualisées


s'avère utile dès lors que I'on s'attarde à des phénomènes spatiaux nuancés, qui
sont souvent de second ordre (c'est-à-dire qui ne sont pas observés directement,
mais qui sont plutôt des différences ou des taux de changement). Ce sont des
différences fines entre I'ampleur des corrélations selon le type de distance utilisé
qui ont fait ressortir des constats et des hypothèses portant sur le rôle de la
congestion et sur les processus de choix qui pourraient y être sous-jacents. Malgré
la robustesse de la distance euclidienne, et le fait qu'elle soit appropriée pour
I'analyse de structures spatiales au premier degré, I'utilisation de distances mieux
conceptualisées - et surtout la comparaison de résultats selon le concept de
distance utilisé - peut apporter de la finesse aux analyses spatiales, et permet aux
analyses spatiales d'aborder des objets de recherche plus fins.

Notre analyse ne démontre pas vraiment qu'à chaque type d'interaction on


devrait associer une définition particulière de la distance physique: la réponse à
notre question centrale est donc négative. Par contre, en nous servant d'une
panoplie de distances différentes pour mesurer des interactions différentes, et en
décortiquant ces interactions pour faire ressortir le rôle quejoue la définition de la
distance, des conclusions et des hypothèses intéressantes ont pu être établies. Il
)
n'y a peut-être pas de mesure de distance < appropriée pour I'analyse d'un
phénomène spatial: mais en termes méthodologiques, nous avons démontré la
pertinence de comparer des résultats émanant de définitions précises (et
contrastées) de la distance. C'est en analysant les différences - et non pas en
constatant l'évidence de leur ressemblance - que des effets spatiaux plus fins ont
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été mis à jour. Sans nier la grande pertinence des études spatiales exploratoires
qui utilisent des mesures de distance simples eVou uniques, nous suggérons
qu'une manière de mieux explorer les nuances du rapport à l'espace d'un
phénomène particulier est d'analyser et de comprendre ce rapport sous des
définitions différentes de I'espace.

- Annexe méthodologique -

l. Le calcul des distances


Les valeurs de distanses euclidiennes et réticulaires ont été calculées entre
toutes les paires des I 357 zones d'analyse de transport (ZAT).C'est à cette unité
spatiale que le Ministère de Transport du Québec nous a foumi les valeurs de
temps de déplacements. Nous avons par la suite agrégé les valeurs des | 357 zAT
aux 100 secteurs municipaux (SM) pour trois raisons. (l) Les | 841 449 valeurs
associées aux paires de ZAT impliquent des calculs très lourds et contraignent la
manipulation des données. (2)L'agrégation au niveau des SM donne des valeurs
non nulles pour les distances intra-zonales. (3) Les 353 579 déplacements
répertoriés dans I'enquête Origine-destination ne sont pas suffisamment
nombreux pour être bien représentés dans chacune de I 841 449 paires de ZAT.

RERU 200s,Il,pp. 163-192


186 Distances, interactions et analyse spatiale de la ville : le cas de Montréal

En effet, s'il y a en moyenne 0,2 déplacements entre chaque paire de ZAT, ily en
a plus de 35 entre chaque paire de SM.

L'agrégation des données s'est fait de la façon suivante. Chaque ZAT a été
associée à un SM. La distance attribuée à chaque paire de SM est donc la
moyenne des distances associées aux ZAT correspondant à ces SM. Si I'on se
réËre à la figure A.1, où sont représentées les centroides des ZAT et les SM, la
distance euclidienne entre les sM A et B est la moyenne des distances
euclidienne entre tous les triangles et tous les carrés. De même, la distance
euclidienne attribuée au SM B est la moyenne des distances euclidiennes entre
tous les carrés.

Figure A.l : ZAT et SM.


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2. Les interactions résiduelles

Selon le modèle gravitaire, l'interaction dépend de la distance mais aussi


de la taille des origines et des destinations. Prenons un exemple : les plus
importants déplacements pour motif travail devraient se faire entre une origine
comprenant un nombre important de résidents et une destination comprenant un
nombre important d'emplois. C'est pourquoi nous utilisons trois types
d'interaction : observée, attendue et résiduelle.

Afin de calculer les valeurs résiduelles, le plus simple aurait été de


soustraire I'observé de I'attendu. Mais cette méthode pose un problème. En effet,
un résidu de 5 déplacements n'a pas la même signification s'il représente la
différence entre 5 déplacements observés et l0 déplacements attendus que s'il
représente la différence entre 495 déplacements observés et 500 déplacements
RERU 2005,11,pp. t63-192
Mathieu CHARRON, Richard SHEARMUR 187

attendus. Les résidus de ce deuxième exemple sont moins significatifs que ceux
du premier. Pour pallier ce problème nous aurions pu diviser cette soushaction
par la valeur attendue afin de standardiser les valeurs. Mais nous aurions obtenu
une distribution asymétrique, les résidus négatifs auraient en effst été distribués
entre 0 et 1 alors que les résidus positifs l'auraient été entre I et l'infini. C'est
pour ces raisons que nous utilisons des probabilités binomiales cumulées.

Nous expliquerons le sens de la probabilité binomiale à l'aide de cet


exemple. Dans une ville habitée uniquement par des tavailleurs (au nombre de
I 000 000), la distance entre le lieu de travail et le lieu de résidence n'a aucune
importance et chaque travailleur ohoisi aléatoirement son emploi, quelle que soit
sa localisation. Comme il y a I 000 tavailleurs qui résident dans le secteur A et
que 5 000 emplois sont offerts dans le secteur B, on peut supposer que' en
moyenne, cinq résidents du secteur A travaillent au secteur B (1 000 5 000
* i
I 000 000). Mais quelle est la probabilité que l0 résidents de A tavaillent à B ?

Cette valeur peut être obtenue à l'aide de cette équation :

pg = ----!-- p(r - p)
xil(ni - xi)l

où, dans notre cas, ni estla valeur maximale de déplacements (1 000), xi est la
valeur observée de déplacements (10) etp est la probabilité qu'a chaque résident
de A de tavailler dans B (5 000 / 1 000 000 :0,005). Autrement dit, avec I 000
< essais >>, quelles sont les chances d'obtenir 10 << succès > (pairage A-B). La
o/0.
réponse est 0,018 ou autrement dit, les chances sont de 1,8

La probabilité cumulée représente ici la probabilité d'obtenir moins de l0


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déplacements. Dans ce cas, la probabilité binomiale cumulée est de 0,987.
Autrement dit, dans 98,7Yo de cas il y a 10 déplacements
ou moins. Les
probabilités binomiales cumulées pour 0 à 10 déplacements sont représentées au
lableau A.l. Nous y remarquons que les valeurs de déplacements les plus
probables sont 4 et 5. Ce sont les valeurs attendues lors d'un appariement
aléatoire. Plus la valeur binomiale cumulée se rapproche de 0, plus les
déplacements observés sont inférieurs aux déplacements attendus etvice versa.

Tableau A.l : Probabilités binomiales.

1 0,033 0,040
2 0,084 0,124
? 0,140 0,24
4 0,176 0,440
5 0,176 0,616
6 0,147 0,763
7 0,105 0,867
8 0,065 0,932
9 0,036 0,969
10 0,0't8 0,987

RERU 2005,II,pp. 163-192


188 Distances, interactions et analyse spatiale de la ville : le cas de Montréal

Pour résumer, lorsque la valeur binomiale associée à une paire de sM se


rapproche de 1., c'est que ces deux sM sont nettement plus reliés que ce à quoi on
se serait attendu lors d'un appariement aléatoire. comme ces valeurs sont
généralement inversement proportionnelles à la distance (tableau 8), les
sM les
plus rapprochés sont aussio en général, les plus reliés.

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nÉsuaÉ
Le concept de distance dpmeare nébulew malgré son omniprësence dans
l'analyse géographique. cet article s'intéresse à ce concept et aux conséquences de son
ambiguîté sur l'étude de l'espace urbain. Nous y présentons certaines des principales
formulations du concept de distance et discalons de leurs intérêts respectifs. Nous
étudions ensuite les aflinités et les diférences qui malquent quelques fornes de
distances(distance euclîdienne, distance réticulaire, distance-temps et distance
d'interaction) telles que mesurées dans la région métropolitaine de Montréal. Les
résuhats de notre analyse empirique de Montréal démontrent que (1) les écarts entre les
valeurs relatives des dffirentes mesures de distance sont minimes mais que (2) ces
écarts représentent néanmoîns des univers spatiawe distincts. Il apparaît, par exemple,
que les interactions observées sont plus intenses lorsque les distances < réseau >
(réticulaire et tevtps en ffansport en commun) sont plus courtes. Cependant, les
interactions résiduelles (orsque I'attractivité associée à la taille des origînes et des
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destinations est prise en considération) sont mieux exprimées par les tenps de
déplacement en automobile à I'heure de pointe matinale. De telles observations
confrment ainsi que les choix liés à Ia mesure de la distance ont un impact limité mais
concret sur l'analyse spatiale intra-urbaine, cor ces dffirentes mesures renvoient à
différents univers d' interactions.

SUMMARY
The concept of distance remains vagote despite its ubiquity in geographic
analysis. This paper irwestigates this concept and the consequences of its ambiguity on
the study of urban space. We present some of the principalfornulations of distance and
discass of their respective advantages. We then study the ffinities and differences
associated with some forms of distances (euclïdian dîstance, reticular distance, time
distance and interaction distance) as measared within Montréal's metropolitan area.
The results show that (1) while tlæ relotive dffirences between the various measures of
distance are small, (2) but that they represent pmticular spatial universe. At frst, it
appears that < network t distances (reticular and tronsit lime) direct observed
interactions. However, once the size effect of places is laken into qccoun4 outomobile
trsvel time qcpress more adequately residual interactions. These obsewations conJirm
that the choice ofdistance measure has a limited but concrete impact on urban spatial
analysis : eqch one refercing to a specific spatial universe.

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Mathieu CHARRON. Richard SHEARMUR l9l
NOTES

/l/ Cette dernière ne fait évidemment pas I'unanimité. Elle n'en demeure pas moins un intéressant point de
départ à I'interprétation des phénomènes géographiques. Voir un forum sur la question pour une
discussion plus approfondie (SLn 2004).

/2lL'espace de Mnkowski est cartésien, il ne se rapporte pas nécessairement à I'espace géogra.phique. Il


ne le fait que dans la mesure où les dimensions ()ç y, z) associées aux données se rapportent à l'espace
physique. Les distances terrestres sont plus justement représentées par un ellipsolde mais, à l'échelle de la
ville, les écarts entre ces distanc€s sont généralement minimes.

/3/ Bien qu'elle se limite souvent qu'à deux points (origine et destination), la distance intra-urbaine est
généralement bien plus complexe. Par exemple, le lien entre le lieu de travail et le lieu de résidence
signifie souvent une chalne de plusieun anets : garderie, épicerie, restauralt., . (KWAN, 1999b).

/4/ Comme pour toutes les distances métriques, le calcul de la distance rectilinéaire dépend du système de
coordonnées. Pour en arriver à des mesures vraisemblables, ce demier doit être cohérent avec le
quadrillage jugé pertinent. Par exemple, à Montréal, la trame de rue est quelque peu décalée par rapport
aux systèmes de coordonnées géographiques généralement utilis& (UTM, MTM, elc.).

/5/ Plusieurs caractéristiques du réseau peuvent être, ou non, prises en compte. Le sens de la circulation,
les feux de circulation, etc., peuvent, ou non, être numérisés.

I 6l www. cimtu.qc. ca/Enqo D/Index. asp

lTlI* dêcoupage géographique en 100 SM a été défini lors de I'enquête Origine-destination 1998. Nous
ne rctenons que les 93 SM qui sont inclus dans la région métropolitaine de Montréal de 2001 parce que le
réseau de transport que nous utilisons lors du calcul de la distance réticulaire se limite à cel espace.

/8/ Elle,s comprennent notamment les voies réservées et I'ofte de transport en commun.

i9l Enquêtes sur la durée dæ déplacements, programmes de relevés de temps de parcours par voihres
flottantes, etc.

/10/Plus précisémenq en accord avec le modèle gravitaire, les interactions sont comparées à l'invene de
© Armand Colin | Téléchargé le 10/10/2023 sur www.cairn.info (IP: 132.203.112.207)

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la distance.

/ll/Le temps d'un déplacement en TEC dépend autant, pour un individu donné, de la distance entre les
arrêts et les points d'origine et de destnation que de la distance séparant points de départ et d'anivée à
l'échelle métopolitiane. Une grande partie du réseau des TEC à Montréal est à tarifunique.

Liste des sigles utilisés

CV Coefficient de Variation
INRS-UCS Institut National de la Recherche Scientifique - Urbanisation,
Culture et Société
MADITUC Modèle d'Analyse Désagrégée des Itinéraires de Transport
Urbain Collectif
MTQ Ministère des Transports du Québec
RMR Région Métropolitaine de Recensement
SIG Systèmes d'Information Géographique
SM Secteurs Municipaux
TEC Transport En Commun
TIC Technologies d'Information et de Communication
ZAT Zones d'Analyse de Transport

RERU 2005,Il,pp. 163-192

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