Vous êtes sur la page 1sur 21

LE RÔLE DES MOTIVATIONS ALTRUISTES ET DES NORMES

PERSONNELLES, SOCIALES ET MORALES DANS L’ENGAGEMENT DES


DONNEURS DE SANG

Laure Ambroise, Isabelle Prim-Allaz, Martine Séville

EMS Editions | « Décisions Marketing »


© EMS Editions | Téléchargé le 18/02/2023 sur www.cairn.info via Université Sidi Mohammed Ben Abdellah (IP: 196.200.146.5)

© EMS Editions | Téléchargé le 18/02/2023 sur www.cairn.info via Université Sidi Mohammed Ben Abdellah (IP: 196.200.146.5)
2020/4 N° 100 | pages 33 à 52
ISSN 0779-7389
DOI 10.7193/DM.100.33.52
Article disponible en ligne à l'adresse :
--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
https://www.cairn.info/revue-decisions-marketing-2020-4-page-33.htm
--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

Distribution électronique Cairn.info pour EMS Editions.


© EMS Editions. Tous droits réservés pour tous pays.

La reproduction ou représentation de cet article, notamment par photocopie, n'est autorisée que dans les
limites des conditions générales d'utilisation du site ou, le cas échéant, des conditions générales de la
licence souscrite par votre établissement. Toute autre reproduction ou représentation, en tout ou partie,
sous quelque forme et de quelque manière que ce soit, est interdite sauf accord préalable et écrit de
l'éditeur, en dehors des cas prévus par la législation en vigueur en France. Il est précisé que son stockage
dans une base de données est également interdit.

Powered by TCPDF (www.tcpdf.org)


Décisions Marketing n°100 Octobre-Décembre 2020, 33-52

Le rôle des motivations altruistes et des normes


personnelles, sociales et morales dans l’engagement
des donneurs de sang
Laure Ambroise, Isabelle Prim-Allaz et Martine Séville
Laboratoire Coactis (EA4161), Université Lumière Lyon 2
Résumé
Face aux besoins croissants de collecte de sang, maintenir les donneurs actifs mobilisés et les fidéliser constituent
des enjeux de santé publique. En France, en l’absence de rémunération du don de sang, les donneurs fidèles sont
des donneurs engagés acceptant de fournir des efforts conséquents pour maintenir leur statut de donneur. Nous
cherchons ici à identifier les facteurs motivationnels de leur engagement. Nous testons, pour cela, tout d’abord, la
permanence des motivations personnelles, sociales, morales et altruistes dans l’intention de redonner son sang, à
© EMS Editions | Téléchargé le 18/02/2023 sur www.cairn.info via Université Sidi Mohammed Ben Abdellah (IP: 196.200.146.5)

© EMS Editions | Téléchargé le 18/02/2023 sur www.cairn.info via Université Sidi Mohammed Ben Abdellah (IP: 196.200.146.5)
court, moyen et long terme, à travers un modèle inspiré de la théorie du comportement planifié, complété par le
concept d’altruisme. Cette étude quantitative montre que si, à court terme, l’intention de redonner est expliquée
par des normes sociales et des bénéfices attendus du don, à moyen et long terme, ce sont essentiellement les
motivations altruistes qui expliquent l’intention de redonner. Nous cherchons ensuite, à travers une étude quali-
tative, à comprendre comment ces motivations altruistes se combinent aux autres motivations chez les donneurs
réellement engagés. Nous montrons alors l’importance d’une norme morale liée à leur éducation et à l’altruisme
que les donneurs engagés internalisent en une habitude. Apparaissent ainsi les rôles clés du sentiment de respon-
sabilité et d’identité de donneur dans leur engagement.
Mots-clés : don de sang, engagement des donneurs, comportement pro-social, théorie du comportement planifié,
normes, altruisme.

Abstract
The role of altruistic motivations and personal, social and moral norms in the commitment of blood donors
Because of the ever-increasing needs of blood collection, keeping active donors engaged and retaining them is a
public health issue. In France, in the absence of payment for blood donation, loyal donors are committed donors
who agree to make substantial efforts to maintain their donor status. Thus, this research aims to identify the fac-
tors of their engagement. First, thanks to a model inspired by the theory of planned behavior supplemented by
the concept of altruism, we test the permanence of personal, social, moral and altruistic motivations toward the
intention of giving again one’s blood, in the short, medium and long term. This quantitative study shows that, in
the short term, the intention to give again is explained by both social norms and the expected benefits of giving;
in the medium and long term, only altruist motivations explains the intention to give again. Then, through a qua-
litative study, we understand how altruist motivations combine with other motivations for real committed donors.
We then show the importance of moral norms associated to education and altruism that committed donors inter-
nalize in a habit. The key roles of a sense of responsibility and the identity as a donor support their engagement.
Keywords: blood donation, blood donors’ commitment, prosocial behavior, theory of planned behavior, norms,
altruism.

Remerciements
Les auteurs remercient l’EFS Auvergne-Loire et le Pr Olivier GARRAUD pour leur aide dans l’accès au terrain.

Pour contacter les auteures : laure.ambroise@univ-lyon2.fr ; isabelle.prim-allaz@univ-lyon2.fr ;


martine.seville@univ-lyon2.fr

DOI : 10.7193/DM.100.33.52 – URL : http://dx.doi.org/10.7193/DM.100.33.52


Ambroise L., Prim-Allaz I. et Séville M. (2020), Le rôle des motivations altruistes et des normes personnelles,
sociales et morales dans l’engagement des donneurs de sang, Décisions Marketing, 100, 33-52.
34 – Décisions Marketing n°100 Octobre-Décembre 2020

L’Etablissement Français du Sang (EFS) motivations des donneurs de sang pourraient


rencontre de manière récurrente des dif- changer au cours du temps (Guiddi et al.,
ficultés à collecter suffisamment de sang 2015 ; Masser et al., 2008). Aussi, plusieurs
pour répondre aux besoins (Encadré 1). De questions sous-jacentes à notre question gé-
façon générale, la pérennité des systèmes nérale émergent. Comment expliquer que des
de collecte et de gestion du sang nécessite primo-donneurs reviennent donner à court
non seulement de recruter de nouveaux terme ? Comment expliquer que certains
donneurs, mais surtout de fidéliser les don- d’entre eux deviennent des donneurs fidèles
neurs actifs (Guedj, 2013 ; Maubisson et al., et réguliers, embrassant ainsi une véritable
2017). Comme le soulignent Garraud et al. carrière de donneurs de sang ?
(2016, p. 170), « la transfusion (…) ne peut
plus – pour assurer sa mission de service Dès lors, il s’agit dans cette recherche, en
public – ne dépendre que des candidatures premier lieu, d’identifier les facteurs motiva-
spontanées et aléatoires des volontaires ». tionnels qui influencent l’intention des don-
Maintenir la population de donneurs actifs neurs de sang de redonner et donc à inscrire
mobilisée et la fidéliser sont, de fait, des cette intention dans une perspective tempo-
objectifs fondamentaux pour les organismes relle à court, moyen et long terme. Nous sug-
© EMS Editions | Téléchargé le 18/02/2023 sur www.cairn.info via Université Sidi Mohammed Ben Abdellah (IP: 196.200.146.5)

© EMS Editions | Téléchargé le 18/02/2023 sur www.cairn.info via Université Sidi Mohammed Ben Abdellah (IP: 196.200.146.5)
de collecte de sang et un enjeu de santé pu- gérons pour cela un modèle qui comprend à
blique (Ringwald et al., 2010 ; Errea et al., la fois des facteurs motivationnels personnels
2014). En effet, avoir des donneurs engagés et sociaux relevant de la théorie du compor-
et fidèles permet de bénéficier d’une offre tement planifié d’Azjen (1991) et d’une moti-
stable de sang au cours du temps et d’éviter vation fondée sur l’altruisme. Le modèle est
les coûts élevés associés au recrutement de testé sur un échantillon de 138 donneurs via
nouveaux donneurs (Masser et al., 2008). une étude quantitative. Cette première étude
Or, si le don de sang peut être vu comme un permet d’analyser la permanence des motiva-
comportement pro-social, il est soumis à de tions sous-jacentes aux intentions de renou-
nombreuses contraintes (matérielles, médi- vellement de don. Pour mettre en perspective
cales…) et est particulièrement intrusif pour ces premiers résultats et explorer en profon-
le donneur (Masser et al., 2008 ; Pentecost deur comment les motivations altruistes
et al., 2017). Les motivations de ce compor- peuvent se combiner à d’autres motivations
tement pro-social spécifique et surtout de sa pour expliquer l’engagement et le compor-
répétition au cours du temps sont, en consé- tement des donneurs fidèles, nous avons, en
quence, complexes. En l’absence de rémuné- second lieu, conduit une étude qualitative
ration du don de sang en France, un donneur sur les lieux de collecte (en contexte) auprès
fidèle est un donneur engagé, c’est-à-dire de 19 donneurs réguliers. Nous avons ainsi
prêt à renouveler les efforts nécessaires pour choisi de mettre en place une méthode mixte
maintenir son statut de donneur de sang sans associant méthode quantitative puis qualita-
récompense financière. Cet article vise ainsi tive (Creswell et Clark, 2017), approche de
à mieux identifier et comprendre les facteurs plus en plus utilisée en santé (Pluye, 2012).
sous-jacents à son engagement. Il s’agit ici plus précisément d’une méthode
mixte de type « séquentiel explicatif » où
Si de nombreuses études se sont focalisées les données qualitatives viennent apporter
sur l’intention de donner son sang, peu de re- des explications aux résultats quantitatifs les
cherches se sont attachées à étudier précisé- plus prégnants (Creswell et Clark, 2017).
ment ce qui incite les donneurs à se muer de
primo-donneurs en donneurs engagés (Bagot Avant de présenter les résultats de cette mé-
et al., 2016) et à répéter leur comportement thode et de ces deux études, nous proposons
de don. Or, certains auteurs suggèrent que les (1) de revenir sur le cadre conceptuel mobi-
Marketing santé – 35

Encadré 1 : Le don du sang en France


Si le sang est une matière qu’il n’est toujours pas possible de créer artificiellement, il est pourtant indis-
pensable au traitement de nombreuses pathologies et aux soins apportés aux accidentés graves. De fait,
les besoins en sang ont augmenté durant les dernières décennies, en raison des avancées réalisées dans
les domaines médical et chirurgical, du vieillissement de la population et, plus généralement, du nombre
croissant d’actes médicaux nécessitant une transfusion (Guedj, 2013 ; Beerli-Palacio et Martin-Santana,
2009).
En France, l’Etablissement Français du Sang (EFS) a effectué près de 2,97 millions de prélèvements
de sang en 2018, retrouvant ainsi son niveau de 2015 après une baisse significative des prélèvements
en 2016 et 2017*. Afin de maintenir son niveau d’activité, l’EFS se voit contraint de multiplier les cam-
pagnes de communication et de sensibilisation, voire de lancer des appels d’urgence au don du sang,
comme cela a été le cas en avril 2018**. De fait, la pérennité du système français de collecte et de gestion
du sang reste très fragile (Garraud et al., 2016). Ce problème n’est, toutefois, pas propre à la France
(Pentecost et al., 2017).
Certains pays comme l’Allemagne ou les États-Unis ont choisi, pour encourager les donneurs à donner et
les fidéliser, de rémunérer le don du sang. En France, le don de sang et l’ensemble des actions de l’EFS
sont fondés sur des valeurs éthiques induisant quatre grands principes : l’anonymat (seul l’EFS connaît
l’identité du donneur et du receveur, ainsi que les données les concernant), le volontariat (le don de sang
© EMS Editions | Téléchargé le 18/02/2023 sur www.cairn.info via Université Sidi Mohammed Ben Abdellah (IP: 196.200.146.5)

© EMS Editions | Téléchargé le 18/02/2023 sur www.cairn.info via Université Sidi Mohammed Ben Abdellah (IP: 196.200.146.5)
est un acte librement accompli, sans aucune contrainte), le non-profit (le sang et les produits sanguins ne
peuvent être source de profit) et enfin, le bénévolat (le don de sang ne peut être rémunéré sous quelque
forme que ce soit).
Malgré un contexte compliqué, lors de son congrès annuel de 2016, l’EFS a réaffirmé sa volonté de ne
pas rémunérer le don de sang, et de se focaliser sur le principe de don gracieux (Garraud et al., 2016).
Se positionnant comme un acteur important de l’économie du partage, l’EFS compte sur la solidarité et
l’engagement des donneurs, guidés par la générosité et l’altruisme***.
* https://www.efs.sante.fr/les-publications-de-lefs
**http://www.leparisien.fr/societe/don-du-sang-les-stocks-au-plus-bas-appel-a-la-
mobilisation-03-04-2018-7644438.php
** https://dondesang.efs.sante.fr/le-don-de-sang-au-coeur-de-leconomie-du-partage

lisé pour comprendre l’intention de redon- lieux et horaires des collectes, trouver un
ner son sang, cadre inspiré de la théorie du créneau disponible pour participer à cette
comportement planifié et complété par les collecte, se rendre sur les lieux, attendre son
motivations altruistes, (2) de détailler la mé- tour… Le donneur doit donc se préparer à
thodologie utilisée dans les deux études, et l’acte de donner (Martín-Santana & Beerli-
(3) d’en discuter les résultats et les implica- Palacio, 2012). En ce sens, le don du sang
tions managériales. est un comportement délibéré et planifié.
Il est également intrusif pour le donneur :
Le don répété de sang : un (1) l’entretien médical préalable au don re-
comportement pro-social planifié pose sur des questions très personnelles voire
et raisonné d’un donneur engagé intimes ; (2) la peur de la piqûre et la vue
du sang sont souvent sources d’inquiétude,
Les fondements théoriques du voire des facteurs de renonciation à donner
comportement de don de sang : la son sang. Cette démarche suppose donc, de la
théorie du comportement planifié part du donneur, une véritable réflexion quant
Dans le cadre du don de sang, le donneur à son intention de donner (Martín-Santana &
doit s’adapter à des contraintes relativement Beerli-Palacio, 2012), et un arbitrage entre
fortes : se renseigner sur les dates, sur les les avantages qu’il en retire et les peurs qu’il
36 – Décisions Marketing n°100 Octobre-Décembre 2020

suscite en lui1. L’ensemble des caractéris- de réaliser le comportement, et à l’image de


tiques du don du sang en font donc un don soi (Pentecost et al., 2017 ; Saha et Chandra,
très spécifique. 2018) ; (3) des normes sociales, c’est-à-dire
des motivations extrinsèques, imposées par
Afin d’appréhender, sur un plan théorique,
l’extérieur. L’individu s’y plie afin d’éviter
les motivations sous-jacentes à ce type de
le jugement, la honte ou des conséquences
comportement, les travaux sur le don de
négatives de ne pas satisfaire à de telles
sang considèrent la théorie du comportement
exigences. Ces motivations traduisent les
planifié (désormais TPB pour Theory of
croyances qu’ont les individus de ce que les
Planned Behavior) comme l’un des modèles
autres (famille, amis, proches…) attendent
de référence (Giles et al., 2004 ; France et
d’eux en matière de comportement. La TPB
al., 2007 ; Masser et al., 2008 ; Lemmens et
propose ainsi une explication parcimonieuse
al., 2009 ; Ringwald et al., 2010 ; Bednall
de la manière dont les normes personnelles
et al., 2013 ; Chen, 2017 ; Saha et Chandra,
que la personne a à l’égard du comporte-
2018), voire comme « un modèle de la psy-
ment, et les normes sociales auxquelles cette
chologie de la santé » (McEachan et al.,
personne souhaite se soumettre, influencent
2016 ; Delépine-Farvacques et al., 2017). Si
© EMS Editions | Téléchargé le 18/02/2023 sur www.cairn.info via Université Sidi Mohammed Ben Abdellah (IP: 196.200.146.5)

© EMS Editions | Téléchargé le 18/02/2023 sur www.cairn.info via Université Sidi Mohammed Ben Abdellah (IP: 196.200.146.5)
cette intention de donner (Corbett, 2005).
ce modèle est parfois remis en cause dans
sa capacité à expliquer le passage à l’acte Ce modèle est doublement intéressant dans le
pour un premier don (Chiaroni et al., 2016 ; cadre de notre étude car (1) c’est un modèle
Boch et Giannelloni, 2019), il reste un cadre qui permet de comprendre le don de sang
théorique dominant en marketing de la santé « comme une décision des individus inscrits
(Bednall et al., 2013). Plus précisément, la dans leur contexte psychosocial » (Delépine-
théorie du comportement planifié suppose Farvacques et al., 2017, p. 39) et (2) il permet
que les gens anticipent et organisent leurs de mieux comprendre les facteurs ou freins,
comportements de façon à atteindre un but notamment psychologiques, à l’intention de
ou un résultat désiré (Azjen, 1991 ; Pentecost s’engager dans un comportement en particu-
et al., 2017). Selon Azjen (1991), ces com- lier (McEachan et al., 2016 ; Ringwal et al.,
portements volontaires sont expliqués avant 2010).
tout par l’intention de se comporter, elle-
même fondée sur trois types de motivations :
(1) des motivations liées aux attitudes vis-à-
Un véritable engagement dans un don
récurrent très spécifique
vis du comportement planifié (évaluations
favorables ou défavorables que l’individu fait De façon singulière, l’objectif de cette re-
du comportement en fonction des résultats at- cherche n’est pas d’expliquer ou de prédire
tendus dudit comportement) ; (2) le degré de classiquement l’intention de donner son sang,
contrôle comportemental perçu, c’est-à-dire mais bien d’appréhender l’intention de renou-
des motivations intrinsèques qui reposent veler et de s’engager durablement dans ce
sur l’aptitude et la volonté de l’individu de comportement. En l’occurrence, l’acte répété
prendre une décision. Ces normes plus per- de don de sang ne peut pas être le résultat
sonnelles sont en lien avec la personnalité de d’une succession d’opportunités qui se sont
l’individu et renvoient également au contrôle présentées, mais relève d’un véritable enga-
perçu de soi lors du don, à savoir le degré gement de la part du donneur. De façon gé-
de confiance dans ses propres possibilités nérale, l’engagement traduit la volonté d’un
individu de poursuivre une relation qu’il
1/  Pour une synthèse détaillée des motivations et considère d’une importance suffisante pour
des freins au don de sang, voir les méta-analyses
de Bednall et Bove (2011), Bednall et al. (2013) et engager les efforts nécessaires à la mainte-
McEachan et al. (2016). nir aussi longtemps que possible (Morgan
Marketing santé – 37

et Hunt, 1994 ; Allen et Meyer, 1990). Par ailleurs, Masser et al. (2008) et Bagot
Reprenant la définition de l’engagement de et al. (2016) suggèrent qu’il pourrait exister
Callero et Piliavin (1983), adaptée à notre des différences de comportement et de moti-
sujet, le donneur engagé est prêt à fournir des vations entre les novices (primo-donneurs)
efforts pour donner son sang, et pour cela à et les donneurs expérimentés (Bagot et al.,
faire preuve d’énergie et de résilience avant, 2016 ; Bigot, 2017). Il est donc nécessaire
pendant et après son don ; il est dévoué pour d’évaluer les principaux facteurs motivation-
la cause, persévère devant les difficultés, est nels qui poussent les personnes à maintenir
pleinement concentré sur son acte de don. leur intention de don dans le temps et à s’en-
gager sur le court, moyen et long terme. De
Certains travaux ont déjà appliqué le modèle fait, cette approche dynamique est au cœur
d’Ajzen à des comportements récurrents de la théorie de l’engagement. Ainsi, pour
de don du sang. Martín-Santana et Beerli- Morgan et Hunt (1994), la relation doit s’éta-
Palacio (2012) ont ainsi étudié l’intention blir, se développer et se renforcer pour être
de « revenir donner » en lien avec la qualité pérenne, et les ressorts sur lesquels s’assoie
perçue du processus de don et des facteurs cette dynamique peuvent évoluer au cours
© EMS Editions | Téléchargé le 18/02/2023 sur www.cairn.info via Université Sidi Mohammed Ben Abdellah (IP: 196.200.146.5)

© EMS Editions | Téléchargé le 18/02/2023 sur www.cairn.info via Université Sidi Mohammed Ben Abdellah (IP: 196.200.146.5)
inhibiteurs externes (lieux et temps de col- du temps. L’intérêt de notre proposition est
lecte) ou internes (la peur des aiguilles de la donc d’inscrire les facteurs motivationnels du
piqûre). Boenigk et al. (2011) ont discuté du don de sang dans une perspective temporelle.
rôle relatif de la satisfaction et de l’altruisme D’où notre seconde hypothèse :
dans la fidélité en matière de don de sang.
H2 : L’impact des facteurs motivationnels
D’autres études ont cherché à identifier des
sur l’intention de « redonner » son sang va-
pistes pour retenir les primo-donneurs (Bagot
rie selon le terme de cette intention (court,
et al., 2016) ou encore ce qui pourrait pousser moyen ou long terme).
des donneurs « déchus » – n’ayant pas donné
depuis 2 ans – à ré-initier leur don (Godin
Au-delà du comportement planifié,
et al., 2007). Il faut toutefois noter que, dans
une démarche pro-sociale fondée sur
ces modèles mobilisant la TBP, le compor- des motivations altruistes
tement récurrent du donneur en matière de
don est pris soit comme une variable antécé- Comme souligné par Pentecost et al. (2017,
dente – le comportement récurrent est donc p. 244), le don de sang est sans doute « le
un comportement passé – , soit comme une plus pur exemple » d’un comportement pro-
variable de contrôle – on crée des groupes de social, c’est-à-dire un comportement volon-
taire ayant pour but d’apporter de l’aide ou
donneurs selon le nombre de dons effectués
de la protection aux autres. Cette démarche
(Veldhuizen et al., 2011). Rares sont ceux qui
est très clairement considérée comme ayant
testent concrètement l’intention de redonner
un impact positif sur l’organisation des soins
comme variable dépendante.
et la société (Tirole, 2013). En cela, le don
En conséquence, dans la lignée de ces pre- de sang, parce qu’il contribue à l’efficacité
miers développements, nous formulons un des organisations de santé, peut être quali-
premier ensemble d’hypothèses : fié de comportement pro-social. Toutefois sa
nature est singulière. En effet, en France, en
H1 : L’intention de « redonner » son sang est l’absence de rémunération du don, des cher-
expliquée par (H1a) l’attitude à l’égard des cheurs ont montré que le don de sang est un
bénéfices attendus, (H1b) les normes person- don de soi pour la société, sans garantie d’un
nelles de contrôle perçu du comportement de bénéfice – hormis une collation après le don
don et (H1c) les normes sociales. lui-même – (Garraud et al., 2016). Les moti-
38 – Décisions Marketing n°100 Octobre-Décembre 2020

vations spécifiques de ce comportement ren- « motivations altruistes » des donneurs par-


voient à des sentiments tels que l’empathie, fois évoquées dans les travaux en santé sur le
la compassion ou encore le besoin de justice don de sang (Charles-Sire et al., 2012, p. 50).
sociale (Masser et al., 2008). En ce sens le Ce parti pris est en cohérence avec celui de
don de sang peut être motivé a priori par des Clavien (2011) ou de Le Gall-Ely (2013) qui
considérations altruistes. suggèrent qu’une orientation naturelle vers
autrui (altruisme) se décline en motivations.
Conceptuellement, l’altruisme est une dis-
position à s’intéresser et à se dévouer à au- Il paraît ainsi pertinent de positionner les
trui (Terestchenko, 2004), c’est un « don de motivations altruistes aux côtés des autres
soi en sens unique » (Clavien, 2018), sans variables du modèle de la TPB intrinsèque-
attente d’un bénéfice en retour, et renvoie à ment fondé sur les facteurs motivationnels du
des normes morales personnelles (Corbett, comportement (Teng et al., 2015). Azjen lui-
2005). En effet, l’altruisme est souvent pré- même (1991, p. 199) suggérait la possibilité
senté comme une composante de la morale d’enrichir sa théorie par d’autres variables :
qui définit plus généralement les opinions, « la théorie du comportement planifié est ce-
comportements, etc. qui relèvent du bien ou pendant ouverte à l’inclusion d’autres indi-
© EMS Editions | Téléchargé le 18/02/2023 sur www.cairn.info via Université Sidi Mohammed Ben Abdellah (IP: 196.200.146.5)

© EMS Editions | Téléchargé le 18/02/2023 sur www.cairn.info via Université Sidi Mohammed Ben Abdellah (IP: 196.200.146.5)
du mal, du juste ou de l’injuste. Plus préci- cateurs ». Dans le contexte du don de sang,
sément, il implique de faire quelque chose différents auteurs ont suivi cette voie en com-
de bon pour les autres mais sans en attendre plétant le modèle avec des variables telles que
aucun retour (Pentecost et al., 2017 ; Teng et le risque perçu ou la confiance dans l’orga-
al., 2015). Comme le rappellent Zouaghi et nisme de collecte (Chen, 2017), ou en affinant
al. (2015, p. 115), l’altruisme peut être appré- les antécédents de l’attitude et du contrôle de
hendé comme « une prédisposition durable, soi par des variables telles que l’expérience
[…] un trait de personnalité qui entretient passée (Lemmens et al., 2009). D’autres ont
des liens avec certains comportements pro- précisément intégré les motivations altruistes
sociaux » comme le don. Il est important de dans leur approche : Pentecost et al. (2017)
noter qu’il existe différentes acceptions de en les considérant de façon holiste à travers
l’altruisme renvoyant aussi bien aux intentions les motivations intrinsèques des donneurs
de l’individu altruiste qu’à son comportement. ou Ringwald et al. (2010) en modélisant les
Clavien (2011) postule, quant à lui, que « les normes morales comme antécédents de l’in-
êtres humains sont capables d’agir en fonc- tention de don. Pour notre part, nous consi-
tion de motivations dirigées vers le bien-être dérons que les motivations altruistes des
d’autrui » (Clavien, 2011, p. 137) ; cette der- donneurs de sang peuvent cohabiter avec des
nière conception sous-entendant l’existence motivations plus personnelles dans un même
de motivations altruistes. Lorsqu’il est envi- modèle. Cette proposition est en cohérence
sagé comme une prédisposition, l’altruisme avec la position de Terestchenko (2004) qui
est généralement vu comme un antécédent de soutient que si l’altruisme est une motivation
l’attitude ainsi que des normes personnelles « avant tout » pour le bien des autres, elle
(Teng et al., 2015) ou sociales de l’individu n’exclut pas d’autres motivations comme le
(Lemmens et al., 2009). Cependant, Teng contrôle ou l’image de soi. D’où l’hypothèse
et al. (2015) montrent que l’altruisme a plus suivante :
une influence directe sur l’intention de se H3 : Les motivations altruistes influencent
comporter qu’un effet indirect via l’attitude positivement l’intention de « redonner » son
ou les normes personnelles. Dès lors, ces sang.
conclusions nous conduisent à considérer
l’altruisme non pas au sens générique de trait De plus, les travaux de Guiddi et al. (2015)
de personnalité, mais plutôt sous l’angle de suggèrent que les motivations initialement
Marketing santé – 39

plus égoïstes en début de carrière du donneur Etude 1 : Rôle contrasté des normes
pourraient se transformer en motivations plus dans l’intention de donner son sang à
altruistes en fin de carrière, davantage reliées court, moyen et long terme
à un engagement civique. Dans la lignée des
arguments de l’hypothèse H2, nous propo- Cadrage de l’étude quantitative
sons donc de contraster l’effet des motiva- Cette première étude vise à tester, sur un
tions altruistes en examinant les différences échantillon de donneurs, un modèle qui in-
qui peuvent se produire selon l’horizon tem- tègre plusieurs leviers motivationnels comme
porel d’intention de réitérer le don à court, indiqué précédemment : les trois dimensions
moyen ou long terme. Nous postulons, dès proposées par Ajzen (l’attitude vis-à-vis des
lors, une dernière hypothèse : bénéfices attendus, les normes personnelles
de contrôle perçu du comportement et les
H4 : Les motivations altruistes influencent normes sociales) ainsi que des motivations
différemment l’intention de « redonner » son altruistes.
sang selon le terme de cette intention (court,
moyen ou long terme). Les échelles de mesure utilisées pour appré-
cier chaque construit sont issues de la litté-
© EMS Editions | Téléchargé le 18/02/2023 sur www.cairn.info via Université Sidi Mohammed Ben Abdellah (IP: 196.200.146.5)

© EMS Editions | Téléchargé le 18/02/2023 sur www.cairn.info via Université Sidi Mohammed Ben Abdellah (IP: 196.200.146.5)
Les prochains paragraphes présentent les rature et ont été validées dans des travaux
démarches méthodologiques qui ont permis antérieurs. Chaque item a été évalué sur une
de tester l’ensemble de ces hypothèses et échelle de Likert en 5 points.
d’approfondir la compréhension des résultats.
L’ attitude à l’égard du bénéfice attendu cor-
respond aux évaluations favorables ou défa-
Deux études des facteurs vorables des résultats que l’individu anticipe
motivationnels de l’engagement à de son comportement. En effet, Ajzen (1991,
donner son sang p. 189) souligne l’importance de considérer
les « croyances quant au comportement »
En France, le don de sang étant anonyme, il
(behavioral beliefs). Quatre items proposés
est très difficile d’avoir accès à des données
par Giles et Cairns (1995) ont ainsi permis
objectives de comportement. Aussi, nous
de mesurer cette dimension : « le don de sang
avons adopté une démarche méthodologique
est une façon pour moi de m’intégrer dans la
en deux temps : une première étude, quanti-
société », « je me dis que je peux moi aussi
tative, basée sur le modèle d’intention de se
en avoir besoin un jour », « j’ai besoin de me
comporter de la TBP complété par les moti-
sentir utile », et « cela me fait plaisir ».
vations altruistes, a permis de mesurer et de
comparer l’influence des différents facteurs Les normes personnelles de contrôle perçu
motivationnels sur l’intention de s’engager du comportement renvoient à la croyance
à court, moyen et long terme ; une seconde d’un individu sur sa volonté et sa capacité
étude, qualitative, réalisée sur des lieux de à adopter un comportement donné. Dans la
collecte, auprès de donneurs engagés a été lignée des travaux de Bednall et Bowe (2011)
réalisée. Elle a permis, dans une logique de et de Giles et al. (2004), cette dimension a
combinaison de type séquentiel explicatif été mesurée par deux items correspondant au
avec la première phase quantitative (Creswell degré de confiance qu’a l’individu dans ses
et Clark, 2017), de mettre en perspective, et possibilités de réaliser un don de sang, mais
« en contexte », les résultats de la première également à sa propre image de soi : « j’ai
étude et de comprendre plus précisément la confiance dans ma capacité physique à don-
nature de l’articulation entre les motivations ner mon sang » et « donner mon sang corres-
altruistes et les autres normes de comporte- pond bien à l’image que je veux donner de
ment. moi ».
40 – Décisions Marketing n°100 Octobre-Décembre 2020

Les normes sociales regroupent l’ensemble qu’il faut que j’en fasse profiter les autres »
des éléments liés à la conviction personnelle et « je considère que donner est un devoir ».
de ce que les individus pensent être leur devoir
Enfin, concernant l’intention de donner son
au regard de leur environnement. Autrement
sang, plusieurs horizons d’engagement à
dit, ces normes renvoient « à la pression
court, moyen et long terme (6 mois pour le
sociale perçue de devoir réaliser ou non un
court terme, 18 mois pour le moyen terme et
comportement » (Ajzen, 1991, p. 188). Ainsi, 5 ans pour le long terme) ont été retenus afin
elles traduisent les croyances qu’a l’individu de tester, pour un même répondant, la per-
de ce que les autres, notamment les personnes manence des facteurs explicatifs et nos hypo-
qui sont importantes à ses yeux, attendent de thèses H2 et H4. Ces échéances temporelles
lui en matière de comportement (Zouaghi permettent de tenir compte des spécificités du
et al., 2015), ici le don du sang. Reprenant don de sang (nombre de dons maximal par an
les travaux de Giles et al. (2004) et Giles et pour chaque donneur, contraintes et précau-
Cairns (1995), trois items permettent ainsi tions médicales potentielles, par exemple
de mesurer les normes sociales : « le don de pour les individus exclus temporairement du
sang est important pour ma famille », « mes don parce qu’ils ont récemment voyagé dans
© EMS Editions | Téléchargé le 18/02/2023 sur www.cairn.info via Université Sidi Mohammed Ben Abdellah (IP: 196.200.146.5)

© EMS Editions | Téléchargé le 18/02/2023 sur www.cairn.info via Université Sidi Mohammed Ben Abdellah (IP: 196.200.146.5)
amis me pressent de donner mon sang » et des pays qualifiés « à risque », ont récem-
« mes convictions religieuses m’incitent à ment subi une intervention chirurgicale, ou
donner mon sang ». ont vécu une grossesse, etc.) et ont été dis-
cutées et validées avec des responsables de
L’échelle de mesure des motivations altruistes l’EFS. Ainsi l’intention de don a été mesurée
reprend les trois items suggérés par Edwards par une échelle de probabilité (« Quelle est
et Zeichner (1985) : « donner son sang est la probabilité que vous donniez ou redonniez
important pour sauver des vies », « je me dis votre sang, d’ici 6 mois [18 mois ; 5 ans] ? » de
que j’ai de la chance d’être en bonne santé et « très improbable » à « tout à fait certain »).

Encadré 2 : Méthodologie de l’étude quantitative


La collecte de données a été réalisée à l’aide d’un questionnaire administré en face à face auprès d’un
échantillon de 138 donneurs recrutés « par opportunité ». L’échantillon est relativement représentatif de
la population des donneurs sur les critères de genre (56 % de femmes dans l’échantillon pour 52 % dans
la population de donneurs en France*) et d’âge avec une sur-représentation des donneurs jeunes dans
la population des donneurs (25 % des donneurs ont entre 20 et 29 ans). Concernant leur comportement
de don de sang, ces donneurs ont en moyenne donné 2,6 fois au cours des deux dernières années (cf.
en 2018, l’EFS comptabilise une moyenne de 1,85 dons par an), 17,3 % des donneurs ayant un nombre
moyen de dons supérieur à 4. Au-delà de ces critères, le profil des répondants est varié en termes de
catégorie socioprofessionnelle, de statut marital, de niveau d’étude et de lieu d’habitation (cf. Annexe 1).
Le modèle de recherche a été testé grâce à un modèle d’équations structurelles et une approche des
moindres carrés partiels (logiciel XLStat / module PLS-PM). Dans le cas présent, cette méthode a été
privilégiée, en particulier parce que les contraintes en termes de taille d’échantillon et de multi-normalité
des variables sont plus souples que dans d’autres approches (Hair et al., 2016). De plus, les variables
expliquées (intention de redonner à 6 mois, 18 mois et 5 ans) sont mono-item, ce qui légitime également
cette approche. Les résultats ont été validés par une procédure de bootstrap systématique (5 000 ré-
échantillonnages).
Le modèle obtenu est satisfaisant, présentant un GoF externe de 0,928 confirmant la qualité du modèle de
mesure, et un GoF interne de 0,856 validant la qualité structurelle du modèle. Les échelles retenues pré-
sentent des indicateurs de fiabilité acceptables et de validité discriminante satisfaisants pour l’ensemble
des construits (Annexe 2).
* http://fr.zone-secure.net/37246/1046088/#page=10
Marketing santé – 41

La méthodologie de collecte des données est don de sang ne joue pas de rôle significa-
présentée dans l’encadré 2. tif (H1a non validée). Les normes person-
nelles de contrôle perçu du comportement
Principaux résultats : les motivations altruistes jouent, quant à elles, un rôle significatif et
comme variables explicatives principales important dans l’intention de don à court et
De façon globale, les variables du modèle moyen terme (H1b partiellement validée).
permettent d’expliquer une part significative Les normes sociales ont, elles, une influence
de l’intention de don répété des répondants significative positive sur l’intention de don-
(32,6 % à 6 mois, 23,6 % à 18 mois et 16,4 % ner uniquement à court terme (H1c par-
à 5 ans – Annexe 2). Ce pouvoir explicatif tiellement validée). Enfin, les motivations
est conforme à ceux obtenus dans différentes altruistes apparaissent comme le principal
études réalisées, notamment dans le domaine antécédent de l’intention de don quelle que
de la santé (Armitage et Conner, 2001a) et un soit la perspective temporelle (H3 vali-
peu inférieur à ceux rapportés par Masser et dée). Il apparaît même que ce construit est
al. (2008). Il diminue logiquement avec l’ho- l’unique variable explicative significative de
rizon temporel. l’intention de don à 5 ans.
© EMS Editions | Téléchargé le 18/02/2023 sur www.cairn.info via Université Sidi Mohammed Ben Abdellah (IP: 196.200.146.5)

© EMS Editions | Téléchargé le 18/02/2023 sur www.cairn.info via Université Sidi Mohammed Ben Abdellah (IP: 196.200.146.5)
Concernant les facteurs explicatifs de l’in- Ces premiers résultats permettent de mettre
tention de donner son sang (Tableau 1 et en perspective les différents facteurs moti-
Figure 1 en Annexe 2), il apparaît que l’at- vationnels de l’intention de dons récurrents
titude vis-à-vis des bénéfices attendus du de sang chez les donneurs. Ils suggèrent que

Tableau 1 : Facteurs motivationnels de l’intention de redonner son sang à court, moyen et long terme

β standard. R²
Variables dépendantes T p value R p value
bootstrappé ajusté

Intention Don (6 mois)     0,295 0,326 0,000

Attitude bénéfice attendu 0,007 -0,510 0,611

Normes personnelles 0,303*** 3,690 0,000

Normes sociales 0,112* 1,662 0,099

Motivations altruistes 0,339*** 3,563 0,001

Intention Don (18 mois) 0,186 0,236 0,000

Attitude bénéfice attendu -0,108 -1,557 0,122

Normes personnelles 0,161* 1,761 0,081

Normes sociales 0,045 0,292 0,770

Motivations altruistes 0,388*** 4,002 0,000

Intention Don (5 ans) 0,102 0,164 0,013

Attitude bénéfice attendu -0,113 -1,433 0,154

Normes personnelles 0,110 1,128 0,262

Normes sociales 0,027 -0,243 0,808

Motivations altruistes 0,301*** 3,036 0,003      


42 – Décisions Marketing n°100 Octobre-Décembre 2020

les normes sociales ont une influence essen- Etude 2 : Effets combinés des
tiellement à court terme, les normes person- motivations altruistes et des
nelles plutôt à court et moyen terme, alors différentes normes sur l’engagement
que les motivations altruistes ont une portée des donneurs
déterminante sur l’engagement dans le don, Cadrage de l’étude qualitative
notamment sur le long terme. L’hypothèse
Dans cette seconde étude, nous avons choisi
H2 est donc validée : l’influence des moti-
d’aller interroger des donneurs réguliers sur
vations est bien significativement différente
des lieux de collecte variés (ruraux et ur-
selon l’horizon temporel (court, moyen ou
bains) comme nous l’avaient suggéré certains
long terme). En revanche, le pouvoir prédic- donneurs interrogés lors de l’étude quantita-
tif des motivations altruistes ne varie pas en tive. Il s’agissait pour nous de rendre compte
fonction des différents horizons temporels plus finement des expériences vécues et de
(les valeurs des coefficients standardisés sont mieux comprendre l’articulation entre les
similaires – H4 rejetée). motivations altruistes et les normes de com-
portement planifié dans l’intention de redon-
En synthèse, si le modèle inspiré du TPB
© EMS Editions | Téléchargé le 18/02/2023 sur www.cairn.info via Université Sidi Mohammed Ben Abdellah (IP: 196.200.146.5)

© EMS Editions | Téléchargé le 18/02/2023 sur www.cairn.info via Université Sidi Mohammed Ben Abdellah (IP: 196.200.146.5)
ner à court, moyen et long terme. Nous décri-
complété par les motivations altruistes per-
vons dans l’encadré 3 la méthode de collecte
met d’avoir un premier niveau de compré-
des données de cette étude qualitative.
hension de l’intention de redonner son sang,
il est essentiel d’étendre les investigations Principaux résultats : une mutation des
afin de mieux comprendre les motivations motivations au cours de la carrière des
et freins profonds de l’engagement derrière donneurs
ce don répété de sang, notamment de mieux Le profil type du donneur fidèle et engagé
comprendre les raisons de la permanence des que nous avons rencontré est bien résumé par
motivations altruistes et comment celles-ci un des répondants : « Je donne environ trois
se combinent aux normes personnelles ou fois par an et je donne depuis l’âge de 18 ans.
sociales dans l’engagement des donneurs au À l’époque, c’était mon papa qui s’occupait
cours de leur « carrière ». d’une association et qui nous a poussés, ses

Encadré 3 : Méthodologie de l’étude qualitative


En collaboration avec une agence régionale de l’EFS, les entretiens ont été réalisés directement sur trois
lieux de collecte de sang distincts (deux mobiles en communes rurale et semi-rurale et un fixe, en ville)
afin de considérer les comportements réels des donneurs. Dix-neuf donneurs actifs, dont l’âge moyen
est de 42 ans, 10 hommes et 9 femmes, ont ainsi été interrogés sur la base d’un guide semi-directif
administré en face à face. Les répondants étaient, entre autres, interrogés sur les raisons de leur venue ce
jour-là, sur leurs habitudes de don (don de sang et don en général) et celles de leur entourage, sur ce que
représente pour eux le don de sang en particulier et le don en général, sur leur regard sur les donneurs
de sang et les non-donneurs, sur leurs motivations/intentions à répéter leur don de sang sur la durée.
L’objectif global était d’interroger les personnes sur leur « carrière de donneurs » et sur leur engagement
dans le comportement de don depuis leur premier don. Parmi ces 19 répondants, 16 étaient des donneurs
très réguliers depuis plus de 18 mois (avec 3 dons au moins en moyenne par an) et 3 étaient des donneurs
irréguliers. Les entretiens ont été enregistrés, retranscrits et codés à l’aide du logiciel d’analyse des don-
nées textuelles NVivo sur la base d’une grille de codage, reposant à la fois sur des tree codes émergeant
du cadre conceptuel ayant servi à la première étude (statut de donneur, rôle des normes personnelles et
sociales inspirées du modèle TPB ainsi que de l’altruisme), mais aussi sur la base de free codes (iden-
tité, habitudes, nécessité de relativiser l’altruisme notamment, normes morales) qui ont émergé lors des
entretiens (Annexe 3).
Marketing santé – 43

enfants, à donner notre sang. Et après, j’ai • Altruisme et engagement civique des don-
toujours continué et puis bon c’est pour une neurs engagés
bonne cause ». Ainsi, on constate que donner son sang régu-
lièrement, voire très régulièrement, pour les
L’analyse approfondie des entretiens montre
donneurs rencontrés est devenu un comporte-
qu’il n’y a pas nécessairement beaucoup
ment « normal », une « évidence », un « acte
d’étapes différentes dans la « carrière » des
civique ». Ils sont tous motivés par la nécessi-
donneurs engagés rencontrés, puisque dès
té d’aider les autres, de partager « leur bonne
qu’ils ont pu le faire (dès leurs 18 ans le plus
santé » avec les malades. Peu importe que les
souvent), ils se sont engagés dans le don de
bénéficiaires de ce don restent anonymes :
sang, avec l’intention de le faire aussi long- ils ne recherchent d’ailleurs pas d’informa-
temps que possible. Il existerait ainsi une tion spécifique sur le devenir de leur sang.
forme de prédisposition à donner son sang La conviction que c’est un acte utile en soi
chez ces donneurs fidèles, que viennent am- leur suffit : « Je sais que cela sert, cela me
plifier différents leviers motivationnels à res- suffit ». Il s’agit avant tout d’être solidaires
ter un donneur fidèle évoqués ci-dessous. et d’aider la société dans une perspective al-
© EMS Editions | Téléchargé le 18/02/2023 sur www.cairn.info via Université Sidi Mohammed Ben Abdellah (IP: 196.200.146.5)

© EMS Editions | Téléchargé le 18/02/2023 sur www.cairn.info via Université Sidi Mohammed Ben Abdellah (IP: 196.200.146.5)
truiste qui, déplorent-ils, disparaît peu à peu :
• Rôle de l’éducation dans la transmission
«  Nous sommes dans une société tournée
de la norme sociale et apparition d’un sen-
vers elle-même, les gens sont de plus en plus
timent de responsabilité définissant une
individualistes et donner n’est plus naturel ».
norme morale
C’est donc bien des motivations altruistes qui
Pour les donneurs engagés, c’est parce qu’ils guident ces personnes. On remarque d’ail-
ont été « éduqués comme cela » que donner leurs que tous ces donneurs engagés donnent
leur sang est devenu une habitude : « Le don, aussi pour d’autres causes, dans cet esprit de
c’est quelque chose qu’on acquiert tout le solidarité avec les autres : « pour moi le don,
long de son éducation. » Donner son sang c’est une bonne chose, c’est de la citoyenne-
correspond très souvent à une norme sociale té, de la solidarité, du partage… je n’arrive
familiale chez le donneur engagé. C’est une pas à le voir autrement et donc tous les types
valeur familiale avant tout, qui se transmet de de don, je les vois de la même manière ». Ils
génération en génération, mais ils admettent sont ainsi pour la plupart d’entre eux « mul-
qu’elle peut et doit aussi se transmettre grâce ti-donneurs » ; ils donnent essentiellement
à l’école. En conséquence, la principale stra- de leur temps et plus rarement de l’argent.
tégie, selon eux, pour accroître le nombre de L’engagement est avant tout un engagement
donneurs fidèles est d’éduquer, dès le plus dans un comportement de type « donner » ou
jeune âge, les enfants via les familles et via vis-à-vis de la « cause du don de sang » plus
l’école, grâce aux témoignages de donneurs qu’un engagement au regard de l’organisme
engagés. Il s’agit ainsi de sensibiliser les en- collecteur de sang, très rarement cité chez les
fants, qui deviendront ainsi des adultes « res- donneurs, pourtant rencontrés sur des lieux
de collecte organisés par celui-ci.
ponsables eu égard à cette problématique
de don du sang », ce qui les incitera alors à On peut noter, en outre, en arrière-plan du
« choisir » de donner leur sang. On voit appa- comportement a priori altruiste et désinté-
raître ici un sentiment de responsabilité vis- ressé des donneurs, l’évocation de bénéfices
à-vis de la cause « don du sang » ou de la attendus plus ou moins tacites, sans horizon
société, qui relève plus d’une norme morale bien défini voire parfois quasi-mystiques.
(qui définit en général quel comportement est Certains donneurs engagés ont ainsi mis en
bien ou mal, injuste ou juste) et personnelle avant le fait qu’ils donnaient, certes pour la
que simplement sociale. société, mais qu’en plus ce n’était pas un don
44 – Décisions Marketing n°100 Octobre-Décembre 2020

qui leur « coûtait » financièrement ; d’autres donnent les moyens matériels de revenir ré-
ont évoqué un bénéfice attendu à très long gulièrement pour être en mesure de respecter
terme : « Un jour si j’en ai besoin, j’aimerais cette obligation et ne pas oublier. Ne pas res-
que l’on donne du sang pour moi ». Pour cer- pecter l’habitude de donner pour un donneur
tains, donner son sang peut être sacrificiel : engagé est ainsi perçu comme une véritable
« [Le don de sang], c’est un don de soi, pas « négligence » de sa part, qu’il faut éviter.
le don ultime mais presque. Quand on est ca- Ce ressenti fait écho à l’immense déception
pable de partager de son être, de son essence de certains donneurs rencontrés sur les lieux
[…]. Quand on est capable de partager au- de collecte, lorsque le médecin venait de leur
delà du matériel… son propre corps ». refuser le droit de donner. Enfin, certains
anciens donneurs, très engagés, mais n’étant
• Un comportement ancré dans des habi- désormais plus en capacité de donner leur
tudes voire dans des routines sang (pour une question d’âge notamment),
On observe également que « l’obligation sont devenus bénévoles de l’EFS. Ils sou-
morale de donner » fondée sur un sentiment tiennent toujours la cause au travers d’une
de responsabilité se transforme en « habi- nouvelle forme d’actions. Ce comportement
tudes » voire en « réflexes » tant elle est pro- représente, pour eux, une autre façon de don-
© EMS Editions | Téléchargé le 18/02/2023 sur www.cairn.info via Université Sidi Mohammed Ben Abdellah (IP: 196.200.146.5)

© EMS Editions | Téléchargé le 18/02/2023 sur www.cairn.info via Université Sidi Mohammed Ben Abdellah (IP: 196.200.146.5)
fondément ancrée dans le comportement des ner, de partager mais aussi de ne pas rompre
donneurs engagés. Certains donneurs consi- leur engagement.
dèrent même que c’est « inné », ancré en eux.
• Le don de sang, un choix néanmoins très
Pour autant, les donneurs engagés évoquent
personnel
la nécessité d’être rappelés par l’EFS pour
les dates de collecte ou pour les rendez-vous Si les propos des répondants mettent spon-
par simples SMS afin de leur permettre de tanément en avant l’influence des normes
continuer à donner régulièrement leur sang morales et sociales, la question du choix per-
et de ne pas interrompre leurs habitudes ; sonnel et des normes personnelles demeure,
point n’est besoin de faire à leur égard de la toutefois, sous-jacente. En effet, si les don-
publicité pour le don du sang déjà ancré dans neurs engagés ont le sentiment que le don de
leurs habitudes : « Je n’ai pas besoin qu’on sang est ancré en eux, ils défendent parado-
me fasse de la publicité pour donner mon xalement tous l’importance de respecter la
sang. De toute façon, j’ai été élevé là-de- liberté de chacun dans sa démarche de don et
dans, donc pour moi, c’est normal, naturel ». notamment chez les non-donneurs. Quand on
Ces donneurs fidèles, lorsqu’ils se déplacent leur demande comment expliquer le choix des
dans un établissement fixe2, prennent d’ail- personnes ne souhaitant pas donner, les don-
leurs pour la plupart rendez-vous d’une fois neurs engagés renvoient aux notions d’impli-
sur l’autre pour réitérer leur don dans un ho- cation et de conduite individuelle (« c’est leur
rizon souvent proche (3 mois par exemple) : choix »), cherchant ainsi à écarter en partie
«  Pour éviter la négligence, je prends ren- le poids de la norme sociale ou morale pour
dez-vous d’une fois sur l’autre. C’est-à-dire ces non-donneurs. Cela peut paraître d’autant
qu’aujourd’hui, j’ai un rendez-vous pour le plus paradoxal que ces normes guident leur
mois prochain. Et quand je viendrai le mois propre comportement : « Il faut que ce soit
prochain, je prendrai un rendez-vous pour le volontaire et qu’il y aille par lui-même, on
mois suivant ». Ils inscrivent ces rendez-vous n’a pas à le juger », ou encore « Je n’ai pas
dans leur agenda. En cela, la norme morale forcément une image négative des non-don-
se transforme en norme personnelle : ils se neurs, je pense que chacun a ses raisons
de ne pas donner… ». Il se joue, par consé-
2/  Par opposition aux collectes mobiles qui ne per- quent, derrière la notion de don de sang une
mettent pas la prise de rendez-vous. vraie problématique de posture individuelle,
Marketing santé – 45

de normes personnelles et de responsabilité 2009). De fait, donneurs potentiels et don-


vis-à-vis de la société : « C’est leur choix. neurs plus expérimentés ont besoin d’être ras-
S’ils ne sont pas assez responsables pour surés quant à leur capacité à donner leur sang
venir d’eux-mêmes, si la pub ne les incite pas (Ambroise et al., 2015) et confortés dans leur
à venir, on ne peut rien faire d’autre ». On image de soi (Bednall et Bowe, 2011 ; Saha
retrouve bien ici le caractère délibéré du don et Chandra, 2017). Toutefois, il est intéres-
évoqué dans la première étude. sant de noter que l’influence des normes per-
sonnelles quant au comportement de don de
sang s’estompe à long terme. L’effet légère-
Discussion, limites et voies de
ment supérieur à moyen terme par rapport au
recherche
court terme traduit sans doute, en partie, les
situations où certains répondants sont tempo-
Discussion et implications rairement empêchés de donner. Finalement,
managériales les résultats mettent en exergue un compor-
Cette recherche a permis de mettre en évi- tement a priori totalement désintéressé des
dence que l’intention et le comportement donneurs ayant l’intention de poursuivre
récurrent de don est une combinaison de leur don dans le temps : en effet, l’attitude
© EMS Editions | Téléchargé le 18/02/2023 sur www.cairn.info via Université Sidi Mohammed Ben Abdellah (IP: 196.200.146.5)

© EMS Editions | Téléchargé le 18/02/2023 sur www.cairn.info via Université Sidi Mohammed Ben Abdellah (IP: 196.200.146.5)
normes personnelles, sociales, morales et de des donneurs vis-à-vis des bénéfices atten-
motivations altruistes dont l’influence varie dus de leur comportement n’a aucun impact
selon les horizons de répétition du don. Le significatif vis-à-vis de l’intention de don
design de l’étude quantitative menée a per- quel que soit l’horizon temporel, alors que les
mis de démontrer l’intérêt d’utiliser le modèle motivations altruistes apparaissent comme le
TPB afin d’expliquer non pas uniquement principal antécédent des trois intentions de
l’intention de don, mais l’intention de com- redonner. Ainsi, comme l’avaient déjà noté
portements de don répétés dans différents Armitage et Conner (2001a), les bénéfices
horizons temporels. Les résultats obtenus potentiels directs et indirects perçus par les
montrent que les normes personnelles et donneurs ne renforcent pas leur intention de
sociales sont importantes dans l’intention don récurrent. En revanche, l’influence des
de redonner à court et moyen terme, mais motivations altruistes apparait déterminante
qu’elles s’estompent dans l’engagement à mais pour autant pas significativement diffé-
plus long terme du donneur. Ainsi, l’incita- rente selon la perspective temporelle. Ces ré-
tion de personnes proches (amis, famille…) sultats rejoignent ceux d’études précédentes
peut être un déclencheur de l’intention de (Beerli-Palacio et Martin-Santana, 2009 ; Le
redonner. En revanche, il apparaît que ces Gall-Ely, 2013) et confirment la permanence
encouragements ont uniquement un effet à des motivations altruistes dans l’engagement
court terme. Dès lors, les normes sociales dans le don du sang.
ne semblent pas forcément avoir d’incidence
sur l’intention de redonner son sang à moyen De façon plus précise, l’étude qualitative
et long terme. Les résultats montrent égale- montre qu’il peut exister, derrière l’altruisme
ment que la volonté et l’aptitude perçue quant associé au don de sang, des normes person-
à sa capacité réelle à donner son sang, les nelles et sociales plus tacites qui s’estompent
normes personnelles, sont primordiales pour derrière les habitudes du don ainsi qu’une
les donneurs. Ils rejoignent ainsi ceux obte- forme de bénéfices attendus à long terme.
nus dans des études précédentes qui insistent On peut également constater que, dans le
effectivement sur les freins au don de sang don régulier de sang, on retrouve une com-
et soulignent l’importance de la peur liée au binaison de facteurs internes du donneur (ici
prélèvement lui-même (Armitage et Conner, le sentiment de responsabilité, ou le souci
2001b ; Beerli-Palacio et Martin-Santana, de conformisme aux parents) et de facteurs
46 – Décisions Marketing n°100 Octobre-Décembre 2020

externes (e.g. parenté familiale) qui induisent « éducation au don » afin de développer chez
ou favorisent leurs motivations altruistes des leurs enfants une intention consciente et bien
donneurs réguliers ou leur altruisme « ordi- comprise d’aider, et d’adopter le cas échéant
naire ». un comportement de don de manière volon-
taire, autonome et désintéressée, disposi-
En effet, est apparue de façon saillante l’obli-
tions principales de l’altruisme « ordinaire »
gation morale, le devoir imposé par la société
(Clavien, 2018).
via la famille, et le sentiment de responsabi-
lité citoyenne. Cela confirme ici l’importance Par ailleurs, De Laslier et Van der Straeten
des normes morales dans le don de sang (2011, p. 10) relevaient que le donneur de
(Danic, 2003 ; Bigot, 2007) et dans la prédic- sang peut retirer des « bénéfices personnels
tion du comportement des donneurs expéri- de son don, via par exemple les remercie-
mentés ou le passé du donneur (Godin et al., ments exprimés par l’infirmier ou la carte
2007). On retrouve l’idée de Mauss et Weber de donneur de sang qu’il obtient ». Notre
(2012) selon laquelle le don n’est jamais com- travail rejoint en cela les travaux récents qui
plètement désintéressé mais le fruit d’une tra- proposent de distinguer deux formes d’al-
dition. Le donneur engagé dans le don serait truisme : l’altruisme holiste (dit altruisme
© EMS Editions | Téléchargé le 18/02/2023 sur www.cairn.info via Université Sidi Mohammed Ben Abdellah (IP: 196.200.146.5)

© EMS Editions | Téléchargé le 18/02/2023 sur www.cairn.info via Université Sidi Mohammed Ben Abdellah (IP: 196.200.146.5)
ainsi un digne représentant de sa famille qui « pur »), dirigé par la volonté de prendre soin
lui impose cette tradition, cette norme mo- des gens en général, et l’altruisme qui fait
rale. Cela conforte également l’idée que moti- « chaud au cœur » (dit altruisme « impur »)
vations altruistes et morales sont étroitement qui relève d’un bénéfice attendu plus person-
liées, les motivations altruistes étant « pos- nel de leur propre don, d’une image de soi et
siblement dirigées vers un idéal moral ou qui rejoint les notions de fierté ou de non né-
social », ce que Clavien nomme l’altruisme gligence évoquées précédemment. Ces deux
« ordinaire » (Clavien, 2018, p. 1). En consé- composantes doivent trouver leur place dans
quence, il faut inviter le donneur à perpétuer la communication de l’EFS.
cette tradition, ces normes partagées. Boch
et Giannelloni (2019) proposent, pour cela, la En outre, les deux études montrent, de façon
mise en place d’un système de parrainage. De prégnante, que les normes elles-mêmes évo-
façon générale, nos résultats suggèrent qu’il luent au fil du temps : le donneur engagé
faut en effet renforcer le sens donné par les tend à internaliser la norme sociale en une
individus au comportement de don de sang habitude de comportement assimilable à une
en passant par plusieurs leviers, parmi les- nouvelle norme morale et personnelle, pas-
quels la reconnaissance d’un acte de géné- sant de fait d’une norme extrinsèque qui lui
rosité, mais aussi l’idée de leur intégration donne l’impression d’être régulé, contraint, à
dans un principe de chaîne de solidarité (« je une motivation plus intrinsèque (Pentecost et
donne aujourd’hui pour que l’on me donne al., 2017). Il réaffirme alors sa conception du
– ou à mes proches – demain ») permettant don de sang comme un comportement ancré,
de jouer sur le sentiment de responsabilité presque « inné ». Les donneurs de sang très
ou l’idée de devoir moral, renforçant l’enga- engagés ont d’ailleurs une véritable « iden-
gement moral du donneur (Allen et Meyer, tité de donneurs » qui dépasse leurs seules
1990). Matérialiser cette chaîne de solidarité habitudes de don de sang : ils sont généra-
dans certaines communications de l’EFS, à lement multi-donneurs. Ne pas donner est
travers une ronde trans-générationnelle ou ressenti comme une honte ou une négligence.
avec un défilé mêlant les étapes de la vie On notera que cette identité de donneur n’est
des donneurs et/ou des receveurs irait dans en revanche pas forcément reliée à une iden-
ce sens. Dans tous les cas, les parents « don- tification ou à un engagement spécifique à
neurs » doivent être encouragés à donner une l’organisme de collecte de sang, l’EFS. Un
Marketing santé – 47

travail sur l’image institutionnelle de l’EFS de fournisseur (de sang) qu’il est forcément,
et l’attachement à la marque EFS doit ainsi et le statut de « consom’acteur » selon lequel
être conduit. Certains donneurs se disent en il pourrait être considéré. Une communi-
effet susceptibles de se mobiliser et s’investir cation interactive et personnalisée (Guedj,
pour une autre cause. Il semble donc impor- 2013) fondée sur une connaissance plus pré-
tant et urgent de mettre en place des pro- cise des identités et des motivations de ces
grammes renforçant l’engagement vis-à-vis donneurs engagés pourrait permettre d’être
de la cause notamment en développant des plus efficace dans cet objectif. Ainsi, Godin
outils, comme l’ont fait certains centres de et al. (2005) recommandent de communiquer
collecte, tels que l’organisation de remises sur la question de norme morale auprès des
des diplômes et de signes de reconnaissance donneurs déjà expérimentés plutôt qu’auprès
pour les donneurs de sang (Courbil et al., des non-donneurs. Par ailleurs, certains non-
2009). Il s’agit alors de développer la recon- donneurs considèreraient parfois les don-
naissance de ces donneurs et de valoriser neurs comme des « héros qui cherchent à se
particulièrement leur identité de donneur de faire bien voir » (Guedj, 2013, p. 126). Dès
sang afin d’augmenter leur engagement, par lors, il apparaît important de travailler sur
un sentiment d’appartenance (Allen et Meyer, l’identité du donneur de sang tout comme sur
© EMS Editions | Téléchargé le 18/02/2023 sur www.cairn.info via Université Sidi Mohammed Ben Abdellah (IP: 196.200.146.5)

© EMS Editions | Téléchargé le 18/02/2023 sur www.cairn.info via Université Sidi Mohammed Ben Abdellah (IP: 196.200.146.5)
1990). Cette reconnaissance pourrait tenir l’image que l’on communique des donneurs,
compte du degré d’engagement du donneur et qui peut être parfois contre-productive.
célébrer par exemple, le 10e, le 20e don, etc.
Des événements pourraient être organisés Limites de la recherche et conclusion
lors des collectes mobiles pour remettre ces
diplômes. Le directeur du centre pourrait être Au-delà d’une représentativité des échantil-
mobilisé à cet effet dans les lieux de collecte lons observés qui peut paraître discutable en
fixes. Ainsi, dans la lignée de Pentecost et al. raison notamment du caractère « opportu-
(2017), il nous semble qu’il ne suffit pas d’en- niste » de la sélection – avec l’accord de l’EFS
tretenir les habitudes de dons (par exemple – des lieux de collecte de sang où les don-
par des contacts fréquents par SMS dont neurs réguliers ont été rencontrés, d’autres
l’envoi et le rythme de l’envoi doivent être limites peuvent également restreindre la
soumis à l’approbation du donneur pour ne portée de cette recherche mais fournissent
pas devenir intrusifs… et contre-productifs), des voies futures de recherche intéressantes.
mais qu’il faut les animer et les valoriser. Nous aurions pu intégrer dans notre analyse,
et notamment dans le modèle TPB, le rôle de
Comme l’indiquent Masser et al. (2008, l’expérience passée ou les regrets anticipés de
p. 3), « devenir un donneur fidèle suppose ne pas donner comme certains auteurs le pro-
un changement de motivations et le dévelop- posent (e.g., Lemmens et al., 2009). Il nous
pement d’une identité de soi ». D’une part, semble toutefois, après notre étude qualitative,
ces conclusions doivent conduire les pouvoirs que l’expérience passée joue peu sur les com-
publics, notamment via l’école, à concevoir portements des donneurs engagés, puisque
et impulser des messages permettant de ces derniers sont quasiment automatiques. Il
convaincre ces enfants de cette responsabili- faudrait véritablement que le donneur engagé
té qu’ils auront dès leurs 18 ans. Par ailleurs, rencontre une grosse difficulté lors d’un don
l’EFS doit user de différentes pratiques de pour que cela remette en cause son engage-
marketing relationnel en fonction des diffé- ment. La rencontre de donneurs très engagés
rents segments de la population visée, comme nous amène d’ailleurs à penser qu’il existe
c’est le cas dans les domaines marchands. Il chez eux une forme de renforcement cognitif
faut sans doute notamment réfléchir au statut et affectif de leur comportement valorisant
particulier de donneur de sang, entre le statut positivement tout élément positif de contexte
48 – Décisions Marketing n°100 Octobre-Décembre 2020

du don (la collation, l’accueil…). Pour autant, Armitage C. J. et Conner M. (2001b), Social cogni-
l’expérience passée doit sans doute jouer sur tive determinants of blood donation, Journal of
applied social psychology, 31(7): 1431-1457.
les donneurs en début de carrière. Quant au
Bagot K. L., Murray A. L. et Masser B. M. (2016),
regret anticipé de ne pas donner, on a pu voir How can we improve retention of the first-time
dans l’étude qualitative, que celui-ci n’est pas donor? A systematic review of the current evi-
ponctuel mais structurel, ne pas donner est dence, Transfusion medicine reviews, (2): 81-91.
vécu comme une négligence difficile à sup- Bednall T. C. et Bove L. L. (2011), Donating blood: a
porter car étroitement liée à l’obligation mo- meta-analytic review of self-reported motivators
and deterrents, Transfusion medicine reviews,
rale de donner. 25(4): 317-334.
On peut par ailleurs se demander si la force Bednall T. C., Bove L. L., Cheetham, A. et Murray
A. L. (2013), A systematic review and meta-ana-
explicative des motivations altruistes ne lysis of antecedents of blood donation behavior
relève pas pour partie d’un biais de désira- and intentions, Social science & medicine, 96:
bilité sociale de nos répondants, biais que 86-94.
nous n’avons pas été en mesure de contrôler Bigot R. (2007), Les Francais et le don du sang,
ici. Afin d’approfondir les mécanismes sous- Paris, Etablissement Francais du Sang, 44.
© EMS Editions | Téléchargé le 18/02/2023 sur www.cairn.info via Université Sidi Mohammed Ben Abdellah (IP: 196.200.146.5)

© EMS Editions | Téléchargé le 18/02/2023 sur www.cairn.info via Université Sidi Mohammed Ben Abdellah (IP: 196.200.146.5)
jacents de l’altruisme affiché, il pourrait être Beerli-Palacio A. et Martin-Santana J.D. (2009),
Model explaining the predisposition to donate
intéressant de mobiliser l’approche des moti-
blood from the social marketing perspective,
vations fonctionnelles suggérée par Saha et International Journal of Nonprofit and Voluntary
Chandra (2018) dans le contexte du volon- Sector Marketing, 14: 205-214.
tariat. Ces auteurs étudient les différents Boch E. et Giannelloni J.-L. (2019), Don du sang :
types ou fonctions de volontariat utilisés par comprendre la logique des donneurs et la valeur
du don pour encourager le recrutement et la fidé-
les individus comme un moyen de répondre lisation des donneurs, Décisions Marketing, 96:
également à des objectifs personnels (avan- 35-51.
cement de carrière, protection de leur égo, Boenigk S., Leipnitz S. et Scherhag C. (2011), Al-
développement de capacités inexplorées et truistic values, satisfaction and loyalty among
augmentation de l’estime de soi…) au-delà first-time blood donors, International Journal
of Nonprofit and Voluntary Sector Marketing,
de la démarche altruiste. 16(4): 356-370.
Callero P. L. et Piliavin J. A. (1983), Developing a
Références Commitment to Blood Donation: The Impact
of One’s First Experience 1, Journal of Applied
Social Psychology, 13(1): 1-16.
Ajzen I. (1991), The theory of planned behavior,
Organizational behavior and human decision Chiaroni J., Chevé D., Berland-Benhaïm C. et Le
processes, 50(2): 179-211. Coz P. (2016), Le sang : donner et recevoir,
Paris, CNRS éditions.
Allen N. J. et Meyer J. P. (1990), The measure-
ment and antecedents of affective, continuance Chen L. (2017), Applying the extended theory of
planned behaviour to predict Chinese people’s
and normative commitment to the organization,
non-remunerated blood donation intention and
Journal of occupational psychology, 63(1): 1-18.
behaviour: The roles of perceived risk and trust
Ambroise L., Bérard C., Prim-Allaz I., Séville M. in blood collection agencies, Asian Journal of
et Garraud O. (2015), Proposition d’un modèle Social Psychology, 20(3-4): 221-231.
relationnel de l’intention de donner son sang : Clavien C. (2011), Chapitre 4. Trois sortes
les effets de l’empowerment psychologique et de d’altruisme et leur rapport à la morale, in A.
l’engagement, Journal de Gestion et d’Econo- Masala et J. Ravat (dir.), La morale humaine et
mie Médicales, 33(1): 23-44 les sciences, Editions Matériologiques, 137-164.
Armitage C. J. et Conner M. (2001a), Efficacy of Clavien C. (2018), « Altruisme », version acadé-
the theory of planned behaviour: a meta-analy- mique, in M. Kristanek (dir.), l’Encyclopédie
tic review, British Journal of Social Psychology, philosophique, URL : http://encyclo-philo.
40(4): 471-499. fr/11925-2/
Marketing santé – 49

Corbett J. B. (2005), Altruism, self-interest, and the self-efficacy, Health Education Research, 19:
reasonable person model of environmentally 380-391.
responsible behavior, Science Communication, Godin G., Conner M., Sheeran P., Bélanger-Gravel
26(4): 368-389. A. et Germain M. (2007), Determinants of repea-
Courbil R., Gras A., Cano A. M., Chenus F., Julien ted blood donation among new and experienced
H. et Garraud O. (2009), Guide d’organisation blood donors, Transfusion, 47(9): 1607-1615.
des cérémonies de remises des diplômes et des Guedj A. (2013), Le marketing « digital » : quelle
insignes de reconnaissance en faveur des don- place en collecte ?, Transfusion clinique et bio-
neurs de sang bénévoles, Transfusion clinique et logique, 20(2): 123-126.
biologique, 16(1): 30-38.
Guiddi P., Alfieri S., Marta E. et Saturni V. (2015),
Creswell J. W. et Clark V. L. P. (2017), Designing New donors, loyal donors, and regular donors:
and conducting mixed methods research, Sage which motivations sustain blood donation?,
publications. Transfusion and Apheresis Science, 52(3): 339-
Danic B. (2003), Comprendre le don : l’apport des 344.
sciences humaines à l’activité de prélèvement, Hair J. F. Jr. et Hult G. T. M. (2016), A primer on
Transfusion clinique et biologique, 10(3): 146- partial least squares structural. equation mode-
150. ling (PLS-SEM), Thousand Oaks: Sage.
Delépine-Farvacques S., Terrade F., Danic B. et Le- Le Gall-Ely M. (2013), Le don dans la recherche en
baudy J.-P. (2017), L’engagement dans le don de comportement du consommateur et marketing,
© EMS Editions | Téléchargé le 18/02/2023 sur www.cairn.info via Université Sidi Mohammed Ben Abdellah (IP: 196.200.146.5)

© EMS Editions | Téléchargé le 18/02/2023 sur www.cairn.info via Université Sidi Mohammed Ben Abdellah (IP: 196.200.146.5)
plasma : étude des déterminants chez des don- Recherche et Applications en Marketing, 28(4):
neurs réguliers en plasmaphérèse, Transfusion 47-71.
Clinique et Biologique, 24(2): 38-46.
Lemmens K.P.H., Abraham C., Ruiter R.A.C.,
De Laslier J.-F. et Van der Straeten K. (2011), La Veldhuizen I.J.T., Dehing C.J.G., Ros A.E.R. et
perception de la pauvreté et des inégalités. Schaalma H.P. (2009), Modelling antecedents of
Disponible à l’adresse : http://www.albacharia.ma blood donation motivation among non donors
/xmlui/bitstream/handle/123456789/31991/ of varying age and education, British Journal of
LaslierPauvreteExperimentale-2.pdf?sequence=1 Psychology, 100(1): 71-90.
(le 9 may 2020). Masser B. M., White K. M., Hyde M. K. et Terry,
Edwards P.W. et Zeichner A. (1985), Blood donor D. J. (2008), The psychology of blood donation:
development: Effects of personality, motivatio- current research and future directions, Transfu-
nal and situational variables, Personality and sion medicine reviews, 22(3): 215-233.
Individual Differences, 6(6): 743-751. Maubisson L., Ortais K. et Plichon V. (2017), Bien-
Errea M., Sirven N. et Rochereau T. (2014), Les dé- être et implication: quel apport à la compréhen-
terminants du don de sang en France. Une ana- sion du don de sang, Décisions Marketing, (87):
lyse sur données de l’enquête ESPS 2012 (No. 99-119.
DT61). McEachan R., Taylor N., Harrison R., Lawton R.,
France J. L., France C. R. et Himawan L. K. (2007), Gardner P. et Conner M. (2016), Meta-analysis
A path analysis of intention to redonate among of the reasoned action approach (RAA) to un-
experienced blood donors: an extension of the derstanding health behaviors, Annals of Beha-
theory of planned behavior, Transfusion, 47(6): vioral Medicine, 50(4): 592-612.
1006-1013. Martín-Santana J. D. et Beerli-Palacio A. (2012),
Garraud O., Danic B., Cartron J. P., Chiaroni J., Achieving donor repetition and motivation by
Clavier B., Cuneo B., ... et Moreau S. (2016), block leaders among current blood donors,
Volontariat et don de sang: compte rendu d’un Transfusion and Apheresis Science, 47(3), 337-
séminaire de l’Institut national de transfusion 343.
sanguine, Transfusion Clinique et Biologique, Mauss M. et Weber F. (2012), Essai sur le don :
23(3): 168-174. Forme et raison de l’échange dans les sociétés
Giles M. et Cairns E. (1995), Blood donation and archaïques, Introduction de Florence Weber,
Ajzen’s theory of planned behaviour: An exami- Presses universitaires de France.
nation of perceived behavioural control, British Morgan R. M. et Hunt S. D. (1994), The commit-
Journal of Social Psychology, (4): 173-188. ment-trust theory of relationship marketing,
Giles M., McClenahan C., Cairns E., et Mallet J. Journal of marketing, 58(3): 20-38.
(2004), An application of the theory of planned Pentecost R., Arli D. et Thiele S. (2017), It’s my
behaviour to blood donation: The importance of choice! Investigating barriers to pro-social.
50 – Décisions Marketing n°100 Octobre-Décembre 2020

blood donating behaviour, Marketing Intelli- Journal of Hospitality et Tourism Research,


gence et Planning, 35(2): 243-258. 39(3): 299-315.
Pluye P. (2012), Méthodes mixtes en santé mondiale, Terestchenko M. (2004), Égoïsme ou altruisme?,
in J. C. Suárez-Herrera et M. J. Blain (dir.), La Revue du MAUSS, (1): 312-333.
recherche en santé mondiale: Perspectives so-
cio-anthropologiques, Québec, Association fran- Tirole J. (2013), Rationalité, psychologie et écono-
cophone pour le savoir, 129-135. mie, Revue française d’économie, 28(2): 9-33.

Ringwald J., Zimmermann R. et Eckstein R. (2010), Veldhuizen I., Ferguson E., de Kort W., Donders R.
Keys to open the door for blood donors to return, et Atsma F. (2011), Exploring the dynamics of
Transfusion medicine reviews, 24(4): 295-304. the theory of planned behavior in the context of
blood donation: does donation experience make
Saha S. et Chandra B. (2018), Understanding the
underlying motives and intention among Indian a difference?, Transfusion, 51(11): 2425-2437.
blood donors towards voluntary blood donation: Zouaghi S., Chouk I. et Rieunier S. (2015), Favori-
A cross-sectional study, Transfusion Clinique et ser le don d’organes grâce à « l’intensité de la
Biologique, 25(2): 109-117. discussion » avec les proches : rôle de la supers-
Teng Y. M., Wu K. S. et Liu H. H. (2015), Integra- tition, du tabou de la mort et de variables de per-
ting altruism and the theory of planned behavior sonnalité, Recherche et Applications en Marke-
to predict patronage intention of a green hotel, ting, 30(3): 109-127.
© EMS Editions | Téléchargé le 18/02/2023 sur www.cairn.info via Université Sidi Mohammed Ben Abdellah (IP: 196.200.146.5)

© EMS Editions | Téléchargé le 18/02/2023 sur www.cairn.info via Université Sidi Mohammed Ben Abdellah (IP: 196.200.146.5)
Annexes
Annexe 1 : Présentation de l’échantillon – étude quantitative

Répartition par genre Répartition par statut marital


  Fréquence Pourcentage   Fréquence Pourcentage
Homme 57 41,3 Célibataire 70 50,7
Femme 77 55,8 Marié.e 55 39,9
Manquantes 4 2,9 Pacsé.e 10 7,2
Total 138 100,0 Divorcé.e 3 2,2
Total 138 100,0
Répartition par classe d’âge
  Fréquence Pourcentage Répartition par niveau d’études
18-24 ans 41 29,7   Fréquence Pourcentage
25 ans-34 ans 34 24,6 pas de diplôme 4 2,9
35 ans-44 ans 31 22,5 CAP/BEP 10 7,2

45 ans-60 ans 28 20,3 Bac 14 10,1

+ de 60 ans 3 2,2 BTS/DUT/DEUG 14 10,1

Manquantes 1 0,7 Licence (bac + 3) 23 16,7

Total 138 100,0 Master 73 52,9

Total 138 100,0


Marketing santé – 51

Répartition par CSP


  Fréquence Pourcentage Répartition par lieu d’habitation
Salarié agricole 1 0,7   Fréquence Pourcentage
Patron de l’industrie et 2 1,4 Ville 117 84,8
du commerce
Profession libérale et 25 18,1 Campagne 21 15,2
cadre supérieur
Cadre moyen 24 17,4 Total 138 100,0
Employé 31 22,5
Ouvrier 8 5,8 Répartition par secteur travail (santé / non santé)
Retraité 3 2,2   Fréquence Pourcentage
Etudiant 39 28,3 Non 121 87,7
Autre 3 2,2 Oui 15 10,9
© EMS Editions | Téléchargé le 18/02/2023 sur www.cairn.info via Université Sidi Mohammed Ben Abdellah (IP: 196.200.146.5)

© EMS Editions | Téléchargé le 18/02/2023 sur www.cairn.info via Université Sidi Mohammed Ben Abdellah (IP: 196.200.146.5)
Manquantes 2 1,4 Manquantes 2 1,4
Total 138 100,0 Total 138 100,0

Répartition par nombre de don au cours des deux dernières années

  Fréquence Pourcentage

0 fois 19 13,7

1 fois 41 29,5

2 à 3 fois 54 38,8

4 à 6 fois 19 13,7

+ de 6 fois 5 3,6

Total 138 100,0

Annexe 2 : Indicateurs de fiabilité et validité et résultats du test du modèle

Indicateurs de fiabilité et validité

Nb
Construits Rho 1 2 3 4
d’items

Attitude bénéfice attendu 4 0,745 (0,389)

Normes personnelles 2 0,713 0,261 (0,547)

Normes sociales 3 0,777 0,047 0,054 (0,237)

Altruisme 3 0,778 0,619 0,316 0,096 (0,540)


Rho = Rho de Joreskög
Toutes les corrélations sont significatives à p < 0,01. La variance moyenne extraite est présentée en diagonale (AVE)
52 – Décisions Marketing n°100 Octobre-Décembre 2020

Figure 1 : Schéma illustratif des résultats


© EMS Editions | Téléchargé le 18/02/2023 sur www.cairn.info via Université Sidi Mohammed Ben Abdellah (IP: 196.200.146.5)

© EMS Editions | Téléchargé le 18/02/2023 sur www.cairn.info via Université Sidi Mohammed Ben Abdellah (IP: 196.200.146.5)
Annexe 3 : Codes N’vivo sur 19 donneurs rencontrés sur trois lieux de collecte fixes

Vous aimerez peut-être aussi