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AU NOM DE QUOI ?

LES REVENDICATIONS DE LÉGITIMITÉ,


EXPRESSIONS DE MUTATIONS SOCIALES ET POLITIQUES

Hélène Hatzfeld

Érès | « Vie sociale »

2014/4 n° 8 | pages 25 à 36
ISSN 0042-5605
ISBN 9782749246352
DOI 10.3917/vsoc.144.0025
Article disponible en ligne à l'adresse :
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https://www.cairn.info/revue-vie-sociale-2014-4-page-25.htm
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Au nom de quoi ?
Les revendications de légitimité,
expressions de mutations
sociales et politiques

Hélène Hatzfeld
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a uJourd’hui, il est fréquemment question de légitimité dans la vie


quotidienne : dans des réunions rassemblant des élus et des habi-
tants ou des professionnels et des usagers, mais aussi de manière très
large dans la presse et sur internet. qu’il s’agisse de questions éthiques,
telles que la procréation médicale assistée, ou les oGm, d’opinions et de
choix politiques – notamment ceux qui peuvent avoir un effet encore
mal connu –, de personnes publiques, sportifs, écrivains ou chanteurs
s’exprimant dans les médias, ou encore d’actions menées par des gens
ordinaires pour revendiquer leur droit (à résider en france, à travailler
ou étudier…), les revendications de légitimité fleurissent. Curieuse-
ment, la légitimité qui a été pendant des siècles l’apanage des puis-
sants, des chefs – rois, guerriers, prophètes… –, après s’être étendue à
l’exercice des professions, est entrée dans les expressions courantes,
sans qu’on la remarque. Cette multiplication et cette diversification de
la légitimité sont révélatrices des mutations sociales et politiques
profondes que nous traversons et transforment les conditions d’exercice
des droits dans la Cité.

hélène hatzfeld est docteur d’état en science politique, agrégée de lettres classiques. Elle
est membre du Laboratoire architecture ville urbanisme environnement (LavuE).

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II TOUS LÉGITIMES ?
Chacun peut s’en rendre compte facilement : les débats autour de la
légitimité sont de plus en plus fréquents, qu’il s’agisse d’en revendiquer
ou d’en contester une. pas une réunion publique sans que des membres
d’associations reprochent aux élus ou aux experts, venus présenter une
enquête ou un projet, leur manque de légitimité, et que les élus rétor-
quent que telle ou telle association n’a pas de légitimité à s’exprimer
au nom des habitants ou des usagers, parce qu’elle n’est pas représen-
tative ou parce qu’eux seuls, élus, ont la capacité de dire l’intérêt géné-
ral. plus largement, c’est la demande de justifications de décision ou de
prise de position qui devient de plus en plus fréquente : « au nom de
quoi… faites-vous, dites-vous, pensez-vous… ceci ? » Ces constats
que chacun peut faire dans sa vie professionnelle ou citoyenne sont
mesurables.

prenons pour preuves des documents écrits, la presse quotidienne 1.


Grâce à la numérisation des anciens numéros du Monde ou de Libéra-
tion, il est possible de savoir si le terme « légitimité » a connu une
augmentation significative d’emploi. Le résultat est éloquent : il a plus
que doublé dans Le Monde en vingt ans (de 1987 à 2007), passant de
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254 à 549 par an, soit d’un emploi deux jours sur trois à un emploi tous
26 les jours. Et il continue de rester à un niveau élevé. il est aussi possible
de voir la grande diversité des sujets auxquels le terme de légitimité est
accolé. si les faits internationaux sont de loin les plus concernés, la légi-
timité est également invoquée à propos d’individus (qui ne sont pas
seulement des hommes politiques mais aussi des personnalités des
médias, artistes, journalistes, dirigeants d’entreprise…), de questions
éthiques (suicide assisté, mariage pour tous…), de culture (critiques de
films ou de livres…), d’économie, d’histoire ; apparaissent encore le
sport ou des objets de consommation. on pourrait voir dans cette bana-
lisation une perte de sens et la regretter, voire la dénoncer (mais au nom
de quoi ?). prenons donc le parti inverse et demandons-nous de quoi
cette extension et cette diversification de la légitimité sont le signe. La
question que posent toutes ces références si diverses à la légitimité n’est
pas : est-ce un « bon » emploi ? mais, qu’apporte le fait de recourir à la
notion de légitimité ? que permet-il de dire sur la situation concernée et
plus largement sur les représentations de la société, ses valeurs, ses
hiérarchisations ? que nous apprennent ces revendications ou dénéga-
tions de légitimité sur la façon dont notre société produit ce qui peut
être considéré comme légitime : aux yeux de qui ? au nom de quoi ? par
quels processus ? que nous disent ces « légitimités ordinaires », des
transformations des rapports aux pouvoirs, aux normes, au politique ?

1. hélène hatzfeld, Les légitimités ordinaires. Au nom de quoi devrions-nous nous taire ?,
paris, L’harmattan-adels, 2013.

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Au nom de quoi ? Les revendications de légitimité, expressions de mutations sociales…

II LA LÉGITIMITÉ : AU-DELÀ DE LA LOI


si la légitimité a bien un rapport à la loi par son étymologie, ce rapport
est particulier. d’abord parce qu’il existe différentes sortes de loi.

Le sens le plus courant de loi désigne un ensemble de dispositions


législatives et réglementaires élaborées par un groupe d’hommes
mandaté à cet effet. Ces lois peuvent être formalisées par un texte écrit
ou par une tradition orale – la Grande-Bretagne n’a pas de constitution
écrite et elle est en partie régie par un droit coutumier. Ces lois, établies
par les hommes, visent à fixer un cadre de règlement aux conflits au
sein de la société. appliquer ces lois, c’est agir dans la légalité. il existe
un autre type de lois auquel nous nous référons fréquemment : les lois
fondées sur le « bon droit », la raison, ou certains codes de conduite
propres à des groupes sociaux. Ce sont ces lois qui définissent, selon
les pays et les époques, les enfants « légitimes », la « légitime défense »
ou les « revendications légitimes » des travailleurs… plus générale-
ment, les normes sociales et culturelles sont un élément constitutif de
légitimité parce qu’elles sont source d’un accord 2. Ces lois ont la parti-
cularité d’être reconnues au sein d’un groupe, restreint ou large.
Comme les précédentes, elles sont donc établies par les hommes, mais
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ne revêtent pas le même degré de formalisme ; elles sont plus incons-
cientes, plus enfouies dans les structures sociales. si elles sont parfois 27
formalisées dans des lois écrites, elles sont toujours l’objet de diffé-
rends sur leurs fondements. Enfin, aux lois humaines ont souvent été
opposées les « lois divines ». Celles-ci sont supposées transcender le
caractère imparfait, souvent empreint de partialité, voire franchement
injuste et oppresseur, des lois fabriquées par les hommes. alors que la
légalité renvoie seulement aux lois humaines, la légitimité renvoie aussi
aux lois transcendantes, à des valeurs, à une éthique.

mais la différence entre légalité et légitimité ne tient pas seulement


à la différence entre types de lois. C’est le rapport à la loi, notamment
dans le cas des lois civiles, qui change. « par rapport aux règles qui
sont effectivement obéies, selon paul Bastid, il semble que la légiti-
mité les déborde. […] La légitimité se réclame d’une idée morale supé-
rieure au droit établi 3. » La légitimité met une distance entre le fait
concerné et le jugement porté : si une entreprise peut se réclamer de la
loi pour justifier la présence de traces d’oGm dans des semences, c’est
sur le plan éthique que ses adversaires contestent son action. Cette prise
de distance qui caractérise la légitimité a été définie de différentes
manières. raymond polin l’exprime par l’idée d’« au-delà » : « de

2. Jean-marc Coicaud, Légitimité et politique. Contribution à l’étude du droit et de la


responsabilité politique, paris, puf, 1997.
3. paul Bastid, « L’idée de légitimité », Annales de philosophie politique, n° 7, 1967, p. 3.

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quelque façon qu’on l’approche, la légitimité se développe toujours


au-delà des faits, au-delà des relations humaines simplement physiques,
dans la présence d’une valeur 4. » on peut ainsi conclure que ce qui
importe dans la légitimité, c’est ce jeu entre les diverses sortes de lois,
la possibilité d’invoquer différents principes, justifications, valeurs…
au nom desquels une position est prise.

II UN DROIT À…
Lorsqu’une légitimité est revendiquée (ou déniée), elle est souvent
associée à l’idée d’un « droit à… » : droit à exister (pour une personne
ou une pratique), à faire quelque chose ou d’une certaine manière…
Ces « droits de la pratique », pointés par Christoph Eberhard 5, ouvrent
le champ des légitimités par l’articulation qu’ils proposent entre deux
ordres, celui des droits et celui des pratiques, entre deux dimensions,
une construction collective et des comportements individuels. Le fait
de définir empiriquement la légitimité par un « droit à… » supposé
partagé par d’autres personnes lui donne d’emblée une dimension
concrète, tout en la reliant à l’univers juridique. Le droit n’est alors pas
entendu comme ensemble de règles existant dans un pays mais comme
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production traduisant l’état d’une société. L’argumentation en termes
28 de droits enlève aussi à la revendication de l’individu son caractère
subjectif et unique, et la fait entrer dans un groupe potentiel d’indivi-
dus semblables, qui sert de référent dont on peut se réclamer : les
usagers, les parents d’élèves, les professionnels diplômés… Ce groupe,
en effet, n’apporte pas simplement l’image du nombre mais également
celle d’une relation. ainsi, Jean-marc Coicaud montre que le droit,
parce qu’il « détermine ce qui revient à chaque individu », « crée une
relation de coexistence », « une coordination des actions entre indivi-
dus », « contribue à créer un réseau de sociabilité ». il peut donc
conclure que « la question de la légitimité est à la confluence du lien
social 6 ». Le fait que la revendication de légitimité s’exprime souvent
comme un « droit à… » ne traduit pas seulement l’extension des droits
dans une infinité de domaines, mais lui confère une signification
sociale : la légitimité exprimée en termes de « droits à… » produit de
la société.

4. raymond polin, « analyse philosophique de l’idée de légitimité », Annales de philoso-


phie politique, n° 7, 1967, p. 23.
5. mise en débat du droit et de la gouvernance dans une perspective interculturelle.
dialogue entre Christoph Eberhard, anthropologue du droit, et pierre Calame, directeur
de la fondation Charles Léopold mayer. www.institut-gouvernance.org/fr/analyse/fiche-
analyse-60.html
6. Jean-marc Coicaud, op. cit., p. 14.

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Au nom de quoi ? Les revendications de légitimité, expressions de mutations sociales…

II DE LA RECONNAISSANCE À LA LÉGITIMITÉ
de nombreux travailleurs sociaux, interrogés sur leur sentiment de
légitimité personnelle 7, répondent : « je ne suis pas reconnu » (sous-
entendu par ma hiérarchie). L’absence de reconnaissance, dans leurs
propos, se marque par le fait que leurs propositions ne sont pas acceptées,
leurs rapports ne sont pas lus, la spécificité et la qualité de leur travail ne
sont pas perçues par leur hiérarchie. de même, lorsque les inspecteurs et
contrôleurs du travail se plaignent de perdre leur légitimité, ils donnent
comme preuve « nous n’avons aucune reconnaissance 8 ». mais la recon-
naissance et la légitimité sont-elles identiques ? axel honneth voit dans
la reconnaissance le fondement des sociétés contemporaines parce
qu’elle permet la « réalisation de soi ». Elle est, selon lui, un élément
essentiel de la conquête d’autonomie des individus contre tout ce qui s’y
oppose : injustices, mépris, transformation des sujets en objets… L’inté-
rêt porté par honneth à la reconnaissance relève d’abord d’une « philo-
sophie sociale » : partant du présupposé que « nous devons d’abord nous
fonder sur les représentations que nous nous faisons d’une vie réussie
dans le cadre de la communauté 9 », elle vise à « mettre au jour les critères
éthiques d’une vie accomplie ou plus humaine ». mais honneth situe
aussi sa réflexion dans une philosophie de l’histoire, comme contribution
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critique à hegel, marx, sartre notamment ; il fait ainsi de la « lutte pour
la reconnaissance » le complément de la « lutte des classes » et, fonda- 29
mentalement, le moteur de la transformation des sociétés modernes.
Cette dimension politique des « luttes pour la reconnaissance » est parti-
culièrement développée par nancy fraser qui y voit un changement de
paradigme : en tant que principe de justice, la reconnaissance s’est substi-
tuée à la redistribution (des biens, des pouvoirs…) et s’est étendue à un
cadre transnational 10. mais les comportements par lesquels honneth
concrétise la reconnaissance, définis comme « trois types de relations à
soi 11 », inscrivent la reconnaissance dans le champ des rapports interper-
sonnels : l’amour qui lie la personne à un cercle restreint, le respect par
lequel elle est reconnue comme un sujet universel, porteur de droits et de
devoirs, et l’estime sociale qui lui permet d’avoir un rapport positif à ses
qualités particulières, à ses capacités concrètes ou à certaines valeurs
dérivant de son identité culturelle. il apparaît ainsi que si la demande

7. hélène hatzfeld, Construire de nouvelles légitimités en travail social, paris, dunod,


1998.
8. Libération, 2 septembre 2005.
9. axel honneth, La lutte pour la reconnaissance, paris, Gallimard, coll. « folio Essais »,
2013, p. 110.
10. nancy fraser, Qu’est-ce que la justice sociale ? Reconnaissance et redistribution, paris,
La découverte, 2005.
11. axel honneth, « sans la reconnaissance, l’individu ne peut se penser en sujet de sa
propre vie », Philosophie magazine, n° 5, novembre 2006.

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croissante de reconnaissance et la diffusion de l’emploi du terme de légi-


timité désignent des faits similaires, les termes se distinguent cependant
par le point de vue dont ils relèvent et les objets auxquels ils s’appli-
quent : la notion de reconnaissance mobilise des approches psycholo-
giques, philosophiques et éthiques et est centrée sur l’individu, alors que
l’emploi de « légitimité » exclut largement les analyses psychologiques
et tend à situer l’individu dans un ensemble plus vaste, d’ordre sociétal
et politique.

pour rendre compte de la diversité des revendications de légitimité


actuelles et mettre en évidence ce qui distingue la légitimité de la recon-
naissance, il est ainsi possible de définir la légitimité comme le droit
qu’on reconnaît à quelqu’un (ou à un groupe) de dire ou faire quelque
chose au nom de… C’est cet « au nom de… » conflictuel qui confère
à la légitimité sa spécificité et sa portée politique. pour en rendre
compte, intéressons-nous de plus près aux revendications actuelles de
légitimité et aux mutations qu’elles révèlent.

Les revendications actuelles de légitimité révèlent de profondes


mutations dans les conceptions et les pratiques sociales. Elles se situent
ainsi à la convergence de deux processus : l’exigence croissante de
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chaque individu à être reconnu comme membre à part entière de la
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société ; la perte de sens des référents traditionnels du pouvoir tels que
le sacré, la représentation ou la généralité garante d’impartialité.

II DE LA LÉGITIMITÉ DU POUVOIR À LA LÉGITIMITÉ DES ACTES


ET DES PAROLES

alors que la notion de légitimité concerne à l’origine les formes de


domination, elle se déplace vers les actes et expressions des hommes.
La relation entre légitimité et pouvoir procède historiquement de l’af-
firmation des états en occident et de l’élaboration des modalités de
l’exercice de la souveraineté, en leur apportant des fondements théo-
riques et des justifications juridiques. La légitimité, qu’il s’agisse de
royauté ou de démocratie, indique les principes au nom desquels une
domination est établie et une soumission imposée. Le philosophe alle-
mand max Weber 12 a ainsi, au début du xxe siècle, défini trois fonde-
ments de légitimité : le charisme (pour le leader ou le prophète), la
tradition et, pour les états modernes, la combinaison de la légalité et de
la rationalité, dont la bureaucratie est l’expression. pierre Bourdieu a
donné à cette relation entre pouvoir et légitimité son expression la plus

12. max Weber, Économie et société, I. Les catégories de la sociologie, paris, plon, 1971,
plon-pocket, 1995 (chapitre 3) et Le savant et le politique, plon, 1959 (1re éd. 1919)
(conférence : « Le métier et la vocation d’homme politique »).

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Au nom de quoi ? Les revendications de légitimité, expressions de mutations sociales…

forte : « Est légitime une institution ou une action ou un usage qui est
dominant et méconnu comme tel, c’est-à-dire tacitement reconnu
comme légitime 13. » Cette domination, même si elle peut être exercée
par des individus, est l’expression d’une classe sociale (la bourgeoi-
sie) que Bourdieu appelle le plus souvent « dominante ». Les dominés,
dans cette conception, reconnaissent tacitement cette domination parce
qu’ils la méconnaissent comme telle, autrement dit parce qu’ils intério-
risent les intérêts et justifications de la classe dominante. Les revendi-
cations de légitimité s’inscrivent dès lors dans « la lutte pour le
monopole de la représentation légitime du monde social ».

Les revendications de légitimité actuelle, par leur extension, ouvrent


une nouvelle perspective. Ce sont les actes et les paroles des hommes
qui sont en jeu. Ce déplacement est significatif. L’acte et la parole sont
en effet, selon hannah arendt, ce par quoi l’homme se manifeste,
révèle qui il est, en tant qu’être humain semblable aux autres et dans sa
singularité : « C’est par le verbe et l’acte que nous nous insérons dans
le monde humain 14. »

Les actes et les paroles, en tant qu’expressions des hommes, trou-


vent aussi leur signification comme révélateurs de la capacité créative
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des êtres humains, ce que hans Joas appelle l’« agir créatif 15 ». En
faisant de l’action le principe moteur des individus et de la société, il 31
met l’accent sur ce qu’elle produit, sous différentes formes : l’« expres-
sion » est l’une des métaphores de la créativité. Elle est expression à la
fois d’un être humain, doté d’un corps et pas seulement d’une raison,
et d’un rapport au monde. L’expression est pouvoir de transformation.

Contrairement à la logique discriminante et surplombante du


pouvoir, les actes et les paroles peuvent fonder une équivalence des
légitimités. poser la question « au nom de quoi… ? », c’est mettre sur
le même plan toutes les décisions, actions ou opinions en sommant
leurs auteurs de se justifier. Cette égalisation des positions a une consé-
quence importante, comme le montre Jacques rancière : « La phrase
égalitaire n’est pas rien. une phrase a la puissance qu’on lui donne.
Cette puissance est d’abord de créer un lieu où l’égalité peut se récla-
mer d’elle-même : il y a quelque part de l’égalité ; cela est dit, cela est
écrit. donc, cela doit pouvoir se vérifier 16. » L’affirmation de l’exis-
tence d’une pluralité de légitimités est une des formes de la profonde
exigence d’égalité qui traverse la société.

13. pierre Bourdieu, « Ce que parler veut dire », Questions de sociologie, paris, éditions
de minuit, 1984.
14. hannah arendt, Condition de l’homme moderne, paris, Calmann-Lévy, 1983 (1re éd.
1961), p. 232.
15. hans Joas, La créativité de l’agir, paris, éditions du Cerf, 1999.
16. Jacques rancière, Aux bords du politique, paris, La fabrique éditions, 1998, p. 65.

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II DES LÉGITIMITÉS TOUJOURS EN COURS DE LÉGITIMATION


La légitimité est souvent considérée comme un état propre à certains
individus, conféré par une origine sociale, des diplômes, un don parti-
culier, une élection… mais ce modèle d’une légitimité durable, fourni
par les analyses du pouvoir 17, révèle ses failles. L’idée qu’il y aurait
un temps pour la légitimation – requérant une durée et la mise en œuvre
de certains préalables –, puis une légitimité relativement durable, ne
correspond guère aux réalités observées : les individus et organisations
en situation de pouvoir, les institutions apparemment les mieux assises,
les professions les mieux établies sont aussi, en grand nombre, « en
quête de légitimité », manifestent l’incapacité de donner un sens
continu à une légitimité historiquement acquise. non seulement le
processus de légitimation qui semblait garantir la durée et la solidité
d’une légitimité s’est dissous, mais la légitimité est elle-même de plus
en plus un parcours d’épreuves renouvelées, elle se diffracte en une
multiplicité de preuves à apporter en fonction d’une diversité d’acteurs
et de situations.

II DE NOUVEAUX FONDEMENTS DE LÉGITIMITÉ


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32 de nouveaux fondements de légitimité émergent. ils ne relèvent ni
de principes ou de valeurs, ni de procédures (telle que la délibération
ou la représentation), mais d’échanges en situation, d’interactions qui
modifient la donne de chaque acteur, comme c’est le cas lorsque
plusieurs acteurs sont confrontés à la résolution de problèmes qui
échappent à la maîtrise de chacun d’entre eux isolément. La circulation
d’idées ou d’œuvres entre internautes qui, en les modifiant, créent un
nouveau produit – article d’encyclopédie ou performance artistique –
est un exemple de ce processus dans lequel chacun peut gagner une
légitimité. La légitimité se distingue de la notoriété individuelle (qui
peut être acquise par ailleurs) par le principe, lui-même objet de débats,
sur lequel elle repose : une connaissance ou une œuvre peuvent acqué-
rir une valeur sociale en étant produites par une interaction ou une
succession d’interventions exercées selon certaines normes. Ce sont
ces processus que recouvrent les pratiques de plus en plus valorisées de
« coproduction de connaissances » ou de « partage des savoirs 18 ».

17. Jacques Lagroye, « La légitimation », dans madeleine Grawitz, Jean Leca, Traité de
science politique, t. 1, paris, puf, 1985.
18. Le sujet dans la Cité, n° 4, « partager les savoirs. Construire la démocratie »,
http://www.lesujetdanslacite.com

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Au nom de quoi ? Les revendications de légitimité, expressions de mutations sociales…

II UNE TRANSFORMATION DES SYSTÈMES DE RÉFÉRENCE


L’extension des revendications de légitimité est l’expression d’une
transformation des systèmes de références.

II L’État providence : le référent perdu

Le principal système de références qui a perdu de sa consistance


est celui de l’état comme garant de façons de penser et d’agir : les
métiers, les organismes de service public, les politiques publiques en
portent la marque. L’état a perdu une part de sa centralité et de son rôle
d’employeur au profit des collectivités locales, mais aussi des entre-
prises, des universités (maintenant « autonomes »), d’une diversité
d’organismes privés. L’état a perdu sa prérogative de décideur
univoque : il partage ses prérogatives avec d’autres acteurs et, dans
certains domaines, substitue au pouvoir régalien le partenariat de déci-
sion et de financement, la gouvernance, les directives européennes.
L’état a réduit sa force de « providence », en proie aux difficultés à
financer la protection sociale et à répondre à de nouveaux besoins
sociaux tels que l’exclusion ou le vieillissement démographique. Enfin,
la place de l’état est moins lisible, au point de susciter des controverses
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successives sur ce qui la caractérise 19.
33
Le sentiment de perte de légitimité de certains métiers est ainsi un
symptôme non seulement de la transformation de l’action publique
mais de rapports au monde, comme le montrent les métiers du travail
social, les bibliothécaires et les agriculteurs, mais aussi de nombreux
métiers en lien avec l’action publique 20.

Les métiers du social et en particulier les assistants sociaux ont, dès


la fin des années 1980, exprimé le sentiment d’un déficit de légitimité,
ausculté par de multiples études. « mise en doute de la légitimité »,
selon michel Chauvière 21, « crise de légitimité » pour Jacques ion et

19. voir les débats sur l’état animateur dans les années 1990 (Jacques donzelot, philippe
Estèbe, L’usage des quartiers, paris, L’harmattan, 2004) et actuellement sur « le retour de
l’état », renaud Epstein, Gouverner à distance. La rénovation urbaine, démolition-recon-
struction de l’appareil d’État, thèse de sciences sociales, sous la direction de patrice duran,
2008 ; pierre dardot et Christian Laval, La nouvelle raison du monde. Essai sur la société
néolibérale, paris, La découverte, 2009.
20. thomas Le Bianic, antoine vion (sous la direction de), Action publique et légitimités
professionnelles, paris, LGdJ, 2008. L’introduction générale de patrice duran et thomas Le
Bianic montre les relations qui existent entre les transformations de l’action publique et
celles des pratiques professionnelles. Cf. aussi John Clarke, Janet newman, The Manage-
rial State: Power, Politics and Ideology in the Remaking of Social Welfare, Londres, sage,
1997.
21. michel Chauvière, « travail social : le choc des légitimités », Le Monde diplomatique,
n° 370, janvier 1985.

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Hélène Hatzfeld

Jean-Paul Tricart 22, le problème est suffisamment grave pour que l’As-
sociation nationale des assistantes sociales s’interroge dans un congrès
en 1992 : « Quelle légitimité pour quel travail social ? » À la fin des
années 1990, le « désarroi 23 » concernait plus particulièrement les
assistants sociaux travaillant dans les conseils généraux ou les munici-
palités ainsi que les éducateurs, et moins les assistants sociaux d’entre-
prise et les conseillers en économie sociale et familiale. Cette différence
tenait pour une large part à la différence des systèmes de référence :
alors que les assistants sociaux de secteurs dépendaient de l’État avant
la décentralisation de 1982 et inscrivaient leur action dans le référen-
tiel de l’État providence, ceux travaillant en entreprise ou avec une
orientation économique n’attendaient pas de l’État les mêmes garanties
ni les mêmes normes.

Ces mutations de la fin du xxe siècle révèlent le consensus devenu


invisible sur lequel les métiers du social s’étaient développés après la
Deuxième Guerre mondiale et l’imaginaire sur lequel il se fondait.
Imaginaire non seulement d’une relation d’aide sociale remplaçant
l’ancienne assistance, mais également d’une répartition des rôles (entre
État, assemblées élues, associations…), d’une hiérarchie des valeurs
dans laquelle le social, sous l’égide de l’État, régule et tient à distance
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l’économique − les logiques du marché − et le politique – les logiques
34 des élus locaux 24.

II Une diversification des normes de la vie quotidienne

Plus largement, les systèmes de référence structurant la vie quoti-


dienne se sont diversifiés. Le principe de l’égalité abstraite des indivi-
dus, garante de l’impartialité dans le modèle républicain français, est
ainsi battu en brèche par la conception de l’équité, qui conduit à des
mesures de compensation des inégalités réelles. Les systèmes de réfé-
rence ont aussi perdu de leur évidence. Qu’il s’agisse de références
identitaires : celle de la famille – elle survit, « recomposée » ; celle du
territoire − qui stigmatise les jeunes des cités alors que la mobilité valo-
rise ceux qui peuvent en faire une ressource ; celle du groupe social
– qu’est-ce qui lie la diversité des individus lorsque l’appartenance à
une classe sociale n’est plus une façon de se définir ? Qu’il s’agisse de
références de statut et de conception : la frontière privé/public est
poreuse ; les contrats à durée indéterminée se découpent en durées

22. Jacques Ion, Jean-Paul Tricart (1984), Les travailleurs sociaux, Paris, La Découverte,
1992.
23. Hélène Hatzfeld, Construire de nouvelles légitimités en travail social, Paris, Dunod,
1998.
24. Cf. Youcef Boudjémaï (sous la direction de), Quel devenir pour le travail social ?
Nouvelles questions, nouvelles légitimités, Paris, L’Harmattan, université Lille 1, 2013.

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Au nom de quoi ? Les revendications de légitimité, expressions de mutations sociales…

déterminées. qu’il s’agisse encore de références fondant les modes


d’action, avec la valorisation de la concurrence, de l’incertitude, de la
responsabilité des individus face aux risques.

II UN CHANGEMENT DE PARADIGME SCIENTIFIQUE


mais le recours amplifié à la notion de légitimité a également une
signification plus profonde. il est un des signes d’un changement de
paradigme scientifique : ces revendications de légitimités tous azimuts
contribuent à révéler la déconstruction de « modèles, concepts,
connaissances, hypothèses et valeurs » qui formaient « un ensemble
cohérent 25 », et l’élaboration d’autres outils.

on peut essayer de synthétiser ainsi le changement de posture, d’ou-


tillage conceptuel et méthodologique, de présupposés, de valeurs par
lesquels s’effectue la tentative de comprendre un monde qui change. Le
concept-clé n’est plus celui du pouvoir comme domination/opposition
mais celui de la part qu’on prend à…, donc de la négociation, du
partage, de la participation. Ce changement s’articule à un ensemble
d’autres qui caractérisent les modes de compréhension du monde
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actuel. C’est moins la position qui fait sens que le mouvement, l’action,
l’interaction ou la confrontation de possibles différents. Cette valorisa- 35
tion des potentialités s’accompagne de celle de la pluralité et d’un
présupposé d’égalité : à un mode binaire d’interprétation (dont les
oppositions structurantes capitalisme/socialisme, classe ouvrière/bour-
geoisie furent emblématiques) se substitue un mode pluriel (en termes
d’individus, de communautés…), à un mode hiérarchique et exclusif
(aux deux sens du terme), un mode égalitaire et divers.

Le deuxième trait repérable de ce changement de paradigme réside


dans le rapport à la norme. La multitude des revendications de légiti-
mité n’exprime pas simplement l’exigence d’un droit à édicter des
normes concrètes dans la vie quotidienne (sur les façons de se compor-
ter dans les espaces publics, d’élever ses enfants, de faire travailler
autrui…) mais c’est le droit même d’édicter une norme qui est posé.
C’est aussi en cela que le succès de la notion de légitimité a un sens
politique. il pose la question : qui a le droit d’empêcher, d’autoriser,
de valoriser ? Et au nom de quoi a-t-il ce droit ? (ou ne l’a-t-il pas ?).

L’extension de la légitimité hors des champs institutionnels du


pouvoir et des compétences, dans les actions et expressions de la vie
quotidienne, prolonge, sur un nouveau mode, les transformations du

25. selon la définition de thomas s. Kuhn, dans Structure of Scientific Revolutions,


Chicago, the university of Chicago press, 1962.

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Hélène Hatzfeld

rapport au politique qui ont particulièrement marqué les années 1970 26.
En proclamant « l’environnement, c’est de la politique », les écolo-
gistes ont élargi le politique à un ensemble de domaines : le rapport de
l’homme et de la nature, la préservation des ressources, le mode de
développement, la société de consommation ; ils ont ainsi rendu
possibles d’autres logiques. La bataille menée par le mouvement de
libération des femmes pour démontrer que des problèmes personnels,
privés, tels l’avortement ou le viol, peuvent être politiques, a aussi
ouvert la voie à un changement de regard et à un ressourcement du
politique : du pouvoir, des institutions, vers les individus considérés
dans la globalité de leur vie et de leurs relations. L’extension des reven-
dications de légitimité au tournant du xxe siècle poursuit cette désins-
titutionnalisation du politique, qui s’est manifestée de multiples
façons 27. Elle en approfondit également la signification.

Les revendications de légitimité expriment la diversité des principes


au nom desquels il est possible de vivre ensemble, mais aussi le conflit
politique fondamental qu’elle recèle : qu’est-ce qui fonde le droit à édic-
ter des normes ? Elles révèlent leur capacité à former des espaces publics
d’expression, d’échange et de critique, dans les failles et les marges des
lieux institués de la représentation et de la concertation. En interpellant
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les fondements reconnus de légitimité, le pouvoir, le statut, la compé-
36 tence, elles contribuent à refonder les raisons de vivre dans la Cité.

26. hélène hatzfeld, Faire de la politique autrement. Les expériences inachevées des
années 1970, presses universitaires de rennes, adels, 2005.
27. « sauf donc à réduire le politique à une simple modalité de gestion publique, ou à un
mode d’exercice du pouvoir, et donc à oublier qu’il est aussi surface d’expression des
contradictions sociales et lieu de projection du rapport du monde social à lui-même, on
peut se demander si le politique n’est pas de plus en plus en dehors des cadres institués de
la scène politique. » marion Carrel, Catherine neveu, Jacques ion (sous la direction de),
Les intermittences de la démocratie. Formes d’action et visibilités dans la ville, paris,
L’harmattan, 2009, p. 11. Cf. également Curapp, La politique ailleurs, paris, puf, 1998 et
Lionel arnaud, Christine Guionnet, Les frontières du politique. Enquête sur les processus
de politisation et de dépolitisation, presses universitaires de rennes, res publica, 2005.

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