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L’ÉCOUTE CLIENT : QU’EN PENSENT LES INTÉRESSÉS ?

Béatrice Siadou-Martin, Naouel Makaoui, Smaïl Benzidia, Omar Bentahar

EMS Editions | « Question(s) de management »

2016/3 n° 14 | pages 53 à 62
ISSN 2262-7030
DOI 10.3917/qdm.163.0053
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https://www.cairn.info/revue-questions-de-management-2016-3-page-53.htm
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L’écoute client : qu’en pensent les intéressés ?
Listening to the customer: what those concerned think?

Béatrice SIADOU-MARTIN, Naouel MAKAOUI, Smaïl BENZIDIA et Omar BENTAHAR

Résumé n n Summary

Confrontées à une concurrence accrue et à des consom- Faced with increased competition and volatile consumers,
mateurs volatiles, les entreprises se doivent s’ancrer dans companies should be grounded in a market oriented ap-
une démarche d’orientation-marché, dont l’écoute client proach, including customer focus as a pillar. This research
constitue un pilier. Cette recherche porte sur la percep- focuses on consumer perception concerning customer lis-
tion des consommateurs à l’égard des dispositifs d’écoute tening devices practiced by companies. The consumers’
client que pratiquent les entreprises. Les motivations des motivations giving their opinions and perceptions of the
consommateurs à donner leur avis et leurs perceptions main listening devices are studied. Moreover, the adequa-
des principaux dispositifs d’écoute sont étudiées. De plus, cy between the nature of the message to communicate to
l’adéquation entre la nature du message à communiquer the companies and the client listening devices is examined
aux entreprises et les dispositifs d’écoute client est exami- using the scenario method. The results showed that the
née à l’aide de la méthode des scénarios. Les résultats ont choice of devices mobilized by customers depends on the
montré que le choix de dispositifs mobilisés par les clients situation and the devices seem complementary. Finally,
dépend de la situation et les dispositifs apparaissent com- managerial implications and the perspectives of research
plémentaires. Finalement, les implications managériales et are exposed.
les voies de recherche sont exposées.
n Keywords: listening to the customer, customers’ per-
n Mots-clefs : écoute client, perception des consomma- ception, listening devices, information technology.
teurs, dispositifs d’écoute, technologie de l’information.
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L’ÉCOUTE CLIENT : QU’EN PENSENT LES INTÉRESSÉS ?

INTRODUCTION  passionnés,… C’est par cette écoute de la voix


du client, dans toutes ses formes, que nous
Ecouter le client, recueillir ses avis ou les voies pouvons répondre au plus près des attentes »2.
d’amélioration qu’il suggère au niveau du pro- De plus, les bénéfices de ces démarches sont
duit, du service ou de l’organisation, comprendre soulignées : une enquête BVA auprès des pro-
les motivations du consommateur… forment fessionnels de la relation client menée en 2011
une étape essentielle de la démarche marke- conclue que l’écoute client a un impact sur le
ting. C’est d’ailleurs un élément incontournable chiffre d’affaires de l’entreprise pour 81 % des
de l’ADN marketing. A l’image de nombreux au- sondés3. Au-delà de ces exemples particuliers,
teurs, Graham (1993) affirme que les organisa- et de manière macroscopique, le Baromètre
tions « atteignent leurs objectifs en découvrant Annuel Market Research News/Callson4 réalisé
et en restant en contact avec les besoins et les à l’aide d’une étude auprès d’un échantillon de
attentes de leurs clients afin de les satisfaire 301 décideurs (directeurs ou responsables mar-
à travers la réalisation d’un produit adapté ». keting, directeurs ou responsables des études
Cette vision rejoint les propos de Levitt qui, dès de marché) avec le soutien d’ESOMAR France
1960, dénonce la myopie des entreprises qui et le Syntec Etudes Marketing et Opinion dévoile
cherchent davantage à améliorer et vendre leurs deux principaux enseignements. D’une part, les
produits qu’à s’intéresser aux consommateurs entreprises continuent en 2015 à consacrer des
et à satisfaire leurs besoins. L’écoute client se sommes importantes, environ 213,5 millions,
trouve au cœur de l’orientation marché car la pour leurs études / consumer insight, budget
connaissance du marché (et son corollaire l’intel- relativement stable par rapport à l’année 2014,
ligence marketing) apparaît comme une source et ce, malgré la crise économique. D’autre part,
d’information fondamentale qui impactera la les thèmes et les moyens d’écoute apparaissent
stratégie et qui constitue un préalable à toute diversifiés. D’après ce baromètre, les thèmes
opérationnalisation marketing. les plus sollicités dans ces études concernent
Si la littérature a établi l’impérative nécessité l’offre/l’innovation ; la satisfaction/la fidélité ; les
pour les entreprises de développer une orienta- usages et attitudes ; la qualité de service. Quant
tion-marché (et par là-même une écoute client), aux dispositifs d’écoute, à côté des protocoles
l’observation des pratiques managériales per- d’enquête quantitatifs traditionnels, une place
met d’identifier les dispositifs effectivement mis importante est accordée aux études qualitatives
en œuvre et d’apprécier les écarts entre théorie et aux outils mobilisant les nouvelles technolo-
et pratique. Ainsi, il semble que nombre d’entre- gies (étude qualitative on line, étude des com-
prises aient des défaillances dans leur écoute munautés…). Par exemple, 59 % des entre-
client : à titre d’illustration, une étude du cabi- prises interrogées ont l’intention d’avoir recours
net Human Consulting Group (HCG) a mis en à des analyses de verbatim collectés sur le net.
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évidence grâce à une enquête mystère auprès Malgré les évolutions importantes dans le do-
de 200 entreprises que 48 % des entreprises maine de l’écoute client, les recherches aca-
étudiées ne répondent pas aux courriers de démiques qui traitent de cette problématique
réclamations qu’elles reçoivent et 19 % d’entre demeurent, à notre connaissance, peu nom-
elles ont un service consommateurs/clients breuses. L’objectif de cette recherche est d’étu-
injoignables1. Pourtant, les entreprises mani- dier les perceptions des consommateurs face à
festent un intérêt particulier pour l’écoute client. cette pratique d’entreprise (l’écoute client). Plus
L’enseigne de bricolage, Leroy Merlin, a même précisément et de manière exploratoire, cette
créé un poste de responsable « Voix du client » recherche vise à répondre aux trois questions
qui définit son rôle comme « manager la culture suivantes : Quelles sont les motivations des
client dans l’entreprise au travers des différents consommateurs lorsqu’ils partagent leurs avis
dispositifs d’écoute et d’analyse des remon- avec une entreprise ? Quelle image a le consom-
tées. Nous nous appuyons pour ce faire sur les
réclamations, mais également les suggestions 2 http://www.actimag-relation-client.com/fr/temoi-
produits, la co-construction, les échanges entre gnage/gestion-voix-client-leroy-merlin
3 http://www.lenouveleconomiste.fr/lesdossiers/
1 http://www.actionco.fr/Action-Commerciale/ lecoute-client-14531/
Article/RELATION-CLIENT-IL-EST-TEMPS-DE-CHAN- 4 http://www.marketresearchnews.fr/media/pdf/Ba-
GER-30973-1.htm#UHjX1ASXweh2thrj.99 rometre-MRnews-Callson-2015VL.pdf

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mateur des différents dispositifs d’écoute de semble « des activités qui visent à développer
l’entreprise ? Le consommateur emprunte-t-il la compréhension des besoins actuels et futurs
des dispositifs d’écoute client différent selon des clients, ainsi que des facteurs qui les af-
la nature du message qu’il a envie de délivrer à fectent » (Kohli et Jaworski, 1990, p. 3), la dif-
l’entreprise ? fusion d’informations désigne « le partage des
La présente recherche s’articule de la manière informations entre les différents départements
suivante. La première partie permet de dresser de l’entreprise » (p. 3), et la réaction aux infor-
le cadre conceptuel de la recherche construit mations l’ensemble correspond aux « actions
sur l’orientation-marché et l’écoute-client. La menées en réponse à l’information produite et
deuxième partie rend compte des choix métho- partagée  » (p. 6). L’orientation marché ne peut
dologiques mis en œuvre pour conduire une se réduire à une simple collecte des préférences
étude quantitative auprès d’un échantillon de mais induit une intelligence marketing au sens
consommateurs français. Les résultats sont pré- large (connaissance du marché, des besoins
sentés dans une troisième partie. La discussion actuels et futurs des clients). Préférant se foca-
souligne les apports et enseignements de cette liser sur les acteurs plutôt que sur les activités,
recherche. Les implications managériales et les Narver et Slater (1990) affirment l’objectif de
voies futures de recherche sont finalement dis- créer une valeur ajoutée pour le consommateur.
cutées. Ils distinguent trois composantes : l’orientation
consommateur, l’orientation concurrence et
1. Cadre conceptuel la coordination interfonctionnelle et affirment
Cette première partie s’articule en deux points. l’orientation marché comme une représentation
Premièrement, le constat de la nécessaire construite par l’organisation des acteurs clés
orientation-marché de l’entreprise est dressé de son environnement. La conciliation de ces
et la question de l’écoute active est posée. deux approches permet de concevoir l’orienta-
Deuxièmement, les outils traditionnels et les tion marché comme un état d’esprit et des dis-
dispositifs plus émergents sont présentés. positifs managériaux qui poussent l’ensemble
de l’entreprise en tenir compte et à satisfaire
1.1. La nécessaire orientation-marché de le marché. Plus précisément, Gotteland (2002)
l’entreprise propose que la culture organisationnelle de
l’orientation marché telle que définie par Narver
Depuis les années 90, les recherches ont mon- et Slater (1990) a pour conséquence le dévelop-
tré que cette orientation marché permettait pement de composantes comportementales
d’améliorer l’innovation produit, de renforcer la (orientation consommateur, orientation concur-
relation avec les consommateurs dans un souci rents et orientation technologie) qui, à leur tour,
d’amélioration continue de la qualité et, in fine, incitent à la mise en œuvre de comportements
d’augmenter la performance commerciale (Kohli organisationnels (production d’informations, dif-
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et Jaworski, 1990 ; Narver et Slater, 1990). Deux fusion des informations et réactions à ces infor-
conceptions de l’orientation marché émergent mations) proposés par Kohli et Jaworski (1990).
dans la littérature. D’une part, l’approche cultu-
relle conçoit l’orientation marché comme « la 1.2. Les dispositifs de l’écoute client
culture organisationnelle qui induit, de manière
efficace et efficiente, les comportements néces- L’objectif de cet article n’est pas d’établir une re-
saires pour proposer une valeur supérieure aux vue de la littérature des travaux relatifs aux dis-
clients et, par conséquent, une performance positifs d’écoute du consommateur (car les as-
supérieure continue pour l’entreprise » (Narver pects méthodologiques n’ont ici que peu d’inté-
et Slater, 1990, p. 21) alors que l’approche com- rêts par rapport à la question de recherche) mais
portementale y voit la « production par l’organi- plus modestement d’apporter des éléments de
sation d’informations sur les besoins actuels et compréhension par rapport aux motivations des
futurs des consommateurs, la diffusion de ces consommateurs à donner leur avis, leurs per-
informations dans les différents départements ceptions des principaux dispositifs d’écoute et
de l’organisation et la réaction de l’organisation de proposer des pistes d’adéquation entre mes-
à ces informations » (Kohli et Jaworski, 1990, sages et nature du dispositif employé. L’écoute
p. 6). Plus précisément, ces auteurs indiquent client étant protéiforme, cette partie a pour
que la production d’informations concerne l’en- objectif de discuter les trois principales carac-

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L’ÉCOUTE CLIENT : QU’EN PENSENT LES INTÉRESSÉS ?

téristiques des dispositifs d’écoute : leur carac- et culturelles influencent le comportement de


tère (écoute active versus passive), le contenu réclamations. S’intéresser aux motivations des
(positif ou négatif) du message et l’interactivité consommateurs à s’engager dans des comporte-
proposée. ments de « partager de leurs avis avec l’entre-
En effet, en cas d’écoute active, l’entreprise sol- prise » apparaît comme une piste intéressante :
licite le consommateur pour recueillir son avis : l’hypothèse d’une motivation intrinsèque peut
par exemple, les tables rondes, les entretiens se- être posée pour les consommateurs fortement
mi-directifs ou les enquêtes quantitatives… sont impliqués alors que les consommateurs peu im-
des dispositifs d’écoute active. En revanche, pliqués trouveront une motivation extrinsèque à
l’écoute passive permet à l’entreprise d’avoir ce comportement.
connaissance de l’avis des consommateurs sans Le deuxième critère qui permet de classifier
l’avoir sollicité préalablement. Pour illustrer ce les différents dispositifs d’écoute client est
point, des dispositifs tels que l’analyse des récla- l’interactivité possible, la liberté d’expression
mations, la veille sur Internet ou au sein de clubs du consommateur. Ainsi, un des moyens les
de clients ou de communautés en ligne peuvent plus utilisés par les entreprises est le ques-
être mentionnés. Le caractère actif ou passif de tionnaire ou sondage. Pourtant, la littérature en
l’écoute permet de distinguer les propos spon- marketing souligne les biais à la construction du
tanés du consommateur de ceux suscités par questionnaire, à l’échantillonnage et au mode
les entreprises. Bien que Viot (2010) souligne d’administration. Les modes d’administration
les potentialités de « ces nouveaux carrefours (courrier, téléphone, et plus récemment mail ou
d’audience que constituent les communautés SMS) peuvent apparaître aux yeux des consom-
virtuelles, les réseaux sociaux, les forums, les mateurs inutiles et intrusifs. Le consommateur
blogs et certains wikis » (p. 77), le digital n’a pas n’est pas prêt à recevoir et à répondre à de si
remis en cause cette dichotomie écoute active nombreuses sollicitations qui demandent une
/ écoute passive mais a renouvelé les points participation cognitive, conscient que finalement
de contact et les modalités d’échange entre son avis ne changera pas nécessairement l’offre.
consommateurs et entreprises. De manière ac- De plus, les questions fermées peuvent ne pas
tive, les techniques d’enquête ont été appliquées correspondre et frustrer certains consomma-
au numérique (enquête par mail, panel online…). teurs dans leur besoin d’expression.
En revanche, l’écoute passive a exploré de nou- Confrontés à une nécessité d’écouter le client
velles techniques : analyse de contenu des mes- et aux limites des enquêtes traditionnelles, les
sages entrants, de blogs, de communautés en entreprises ont développé de nouveaux dis-
ligne ou le contenu des réseaux sociaux propres positifs d’écoute. Sans prétendre à l’exhaus-
aux entreprises (Viot, 2007). tivité, ces outils sont cités. Les techniques de
Dans le modèle EVL (Exit, Voice, Loyalty) déve- consumer insight peuvent être citées : elles
loppé par Hirschman (1970), trois options sont of- consistent à avoir une compréhension approfon-
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fertes au consommateur lorsqu’il évalue une ex- die du consommateur en prenant davantage en
périence de consommation insatisfaisante : soit il compte les usages et pratiques de consomma-
se retire de la relation, soit il s’exprime auprès de tion. Par ailleurs, les nouvelles technologies ont
l’entreprise ou auprès de tiers, soit il reste en rela- permis le développement des outils netnogra-
tion commerciale avec l’entreprise. Contrairement phiques (Kozinet, 2002).
aux apparences, lorsqu’un consommateur choisit De manière plus marginale, des méthodes telles
le comportement « voice » (l’entreprise se trouve que la rencontre de convivialité sont apparues.
alors en situation d’écoute passive), il offre une Elles ont pour objectif d’humaniser les relations
opportunité à l’entreprise d’une part, d’amélio- avec l’entreprise, de faciliter le contact avec les
rer le service proposé et d’autre part, de réparer employés et de produire des échanges « na-
les torts subis. La littérature en marketing de la turels » tels qu’ils pourraient avoir lieu entre
récupération de service montre qu’une forte insa- connaissances (voire amis). Ainsi, le personnel
tisfaction se traduire par une réclamation rapide, de l’entreprise fait preuve d’empathie et entre
spécialement lorsque le problème considéré est concrètement dans les préoccupations des
sévère, facilement attribuable au fabricant ou au consommateurs. Par exemple, une entreprise
détaillant ou si la probabilité de succès est rela- de transport public organise des petits-déjeu-
tivement élevée (Folkes, 1984 ; Richins, 1983). ners qui sont l’occasion d’échanges avec les
Néanmoins, des caractéristiques individuelles usagers pour étudier leur satisfaction.

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Si des études portent l’efficacité de ces dispo- formelle, dialogue sur les pages Facebook ou ré-
sitifs, aucune recherche ne s’est intéressée, seaux sociaux, observation). La troisième partie
à notre connaissance, aux perceptions des est composée de courts textés qui présentent
consommateurs quant aux dispositifs d’écoute des scénarios possibles où le consommateur
de l’entreprise. peut donner son avis. Les caractéristiques so-
ciodémographiques étaient mesurées dans une
2. Choix méthodologiques quatrième et dernière partie.
Pour répondre à ces questions, une étude Pour veiller au réalisme des scénarios, une
quantitative a été conduite auprès des consom- marque de transport en commun a été insérée
mateurs. Les transports en commun ont été dans le questionnaire. Pour choisir cette marque,
choisis comme champ d’application pour cette trois étapes ont été nécessaires. Tout d’abord,
recherche. Trois principales raisons permettent une séance de brainstorming a permis de géné-
de justifier ce choix. Premièrement, l’usage rer une dizaine de noms de marque. Dans un se-
des transports est largement encouragé par cond temps, 30 consommateurs (10 hommes,
les pouvoirs publics avec un double objectif 20 femmes) devaient indiquer la probabilité
– limiter la pollution et décongestionner la cir- que cette marque évolue dans le secteur des
culation routière des villes. Les entreprises de transports en commun en ayant connaissance
transport ont bien compris que pour atteindre ce uniquement du nom de l’entreprise (échelle en
double objectif, l’écoute client était nécessaire. 7 degrés). Le tableau 1 résume les moyennes
Deuxièmement, du point de vue du consomma- obtenues. L’entreprise Transco a été présentée
teur, les transports en commun peuvent appa- dans les scénarios de l’étude quantitative.
raître sans réelle alternative : le client peut ne pas Le questionnaire a été auto-administré auprès
se sentir libre dans sa consommation et s’expri- de 125 consommateurs de transports en com-
mer peut alors lui donner l’impression de parti- mun par voie électronique. Ce mode de col-
ciper à l’amélioration du service. Troisièmement, lecte est tout à fait compatible avec la cible.
les transports en commun sont des services 20 répondants ont été écartés de l’analyse car
quotidiens qui ont vocations à s’inscrire dans les ils ont déclaré ne pas avoir pris les transports
parcours de vie du client. en commun dans les trois mois précédents
Le questionnaire est composé de quatre l’administration du questionnaire. De plus, 3
grandes parties. Afin de s’assurer d’une expé- réponses n’ont pas été prises en compte dans
rience de consommation récente, une première l’analyse compte tenu du faible taux de remplis-
question filtre permettait d’écarter les répon- sage (abandon des répondants). Cet échantillon
dants n’ayant pas eu recours aux transports en de convenance est essentiellement composé
commun au cours des trois derniers mois. Dans d’étudiants issus d’une ville française moyenne
une première partie, les répondants étaient mais les étudiants correspondent à une des
cibles essentielles de la société de transport
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interrogés sur leurs comportements, leurs at-
tentes vis-à-vis d’une écoute de l’entreprise et en commun. Il est constitué principalement de
leurs motivations à participer. Dans un second jeunes âgés de 21 à 30 ans, 56 femmes et 46
temps, les répondants devaient décrire l’image hommes. Notre échantillon est constitué de
des principaux dispositifs d’écoute auxquels les 82 % d’étudiants. La majorité (83 %) utilise fré-
entreprises ont recours (questionnaire par mail, quemment les moyens de transport : au moins
questionnaire courrier, téléphone, discussion in- 2 à 3 fois par semaine.

Tableau 1. Résultats du pré-test pour le choix du nom de l’entreprise

Marque proposée Moyenne Marque proposée Moyenne


Transco 5,87 2RTC 2,60
Cotav 2,23 Mobility 5,07
CBR 2,07 Transnational 5,13
Rapides de France 5,33 CTF 2,50
TransRap 5,10 Zen Trans 4,80

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Dans la mesure du possible, les échelles de 3.1. Le profil des consommateurs


mesure mobilisées dans cette recherche sont
Il est intéressant de souligner que les consom-
issues de la littérature et ont été adaptées au
mateurs se sentent impliqués dans l’activité
contexte de l’étude. Pour les motivations à faire
« donner/partager son avis avec une entre-
partager son avis avec l’entreprise, a été adap-
prise ». La moyenne de l’implication, mesurée
tée l’échelle proposée par Füller (2006) pour
à l’aide d’une échelle à trois items, est de 3,6
identifier les motivations qui expliquent l’enga-
(échelle en 5 degrés). Ceci se retrouve dans les
gement des consommateurs dans le développe-
motivations à ce comportement : la première rai-
ment virtuel de nouveaux produits initiés par des
son est « parce que j’ai des idées que je veux
industriels. Six motivations sont ainsi estimées :
présenter aux entreprises ».
la curiosité, l’intérêt intrinsèque dans l’innova-
Une analyse en composantes principales a été
tion, le partage de ses idées, l’insatisfaction par
conduite sur l’ensemble des items mesurant les
rapport aux produis existants, l’amélioration de
motivations au comportement de donner son avis.
sa connaissance et l’obtention de récompenses
Cette analyse fait ressortir trois facteurs : le fac-
monétaires.
teur 1 correspond aux motivations intrinsèques,
le facteur 2 aux motivations extrinsèques et le
3. Résultats
facteur 3 reprend le facteur « parce que je suis
La présentation des résultats se structure en insatisfait de l’offre actuelle des entreprises », qui
trois parties et répond aux trois questions de pourrait s’analyser davantage comme une cause
recherche posées en introduction. Tout d’abord, (et qui corrélée positivement avec les motivations
le profil des consommateurs est étudié : les extrinsèques, 0,258, p=.009). Les motivations in-
motivations à communiquer son avis en fonction trinsèques et l’implication dans le partage d’avis
du profil d’implication vis-à-vis de cette tâche. vis-à-vis de l’entreprise sont corrélées positive-
Ensuite, l’image des différents dispositifs ma- ment (0,508, p=.000).
nagériaux est présentée. Enfin, les probabilités Pour étudier le profil des consommateurs, les mo-
d’avoir recours aux différents dispositifs mana- tivations à communiquer/partager son avis sont
gériaux en fonction du message à délivrer sont analysées en fonction du profil d’implication vis-à-
discutées. vis de cette tâche. La dichotomie répondants peu

Tableau 2. Analyse en composantes principales des motivations

KMO = 0,77 Com. Fact. 1 Fact. 2 Fact. 3


Parce que j’espère obtenir une compensation financière 0,852 0,852
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Parce que je veux être payé pour cela 0,898 0,881

Parce que j’attends une compensation en retour 0,785 0,857


Parce que j’ai des idées que je veux présenter aux
0,596 0,713
entreprises
Parce que je veux entrer en contact avec les entreprises 0,738 0,758

Pour être reconnu comme un consommateur expert 0,511 0,655

Pour améliorer mes connaissances 0,728 0,753

Pour tester mes compétences 0,687 0,850

Parce que j’apprécie donner mon avis Item supprimé

Pour suivre l’évolution des entreprises 0,589 0,652


Parce que je suis insatisfait de l’offre actuelle des
0,740 0,758
entreprises
Parce que je suis juste curieux 0,581 0,633

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impliqués / répondants fortement impliqués a été dispositifs managériaux t(6) = 13,3, p < 0,001.
obtenue en fonction de la moyenne du construit. L’application mobile est considérée par notre
Les résultats sont présentés dans le tableau 2. échantillon comme le dispositif le plus inno-
vant. A l’inverse « courrier » et « téléphone »
3.2. Images des différents dispositifs sont considérés comme les moins innovants.
managériaux d’écoute client L’application mobile est considérée également
Dans un deuxième temps, l’image des diffé- comme la plus pratique. .La rencontre de convi-
rents dispositifs managériaux d’écoute client vialité (rencontre informelle entre l’entreprise et
est examinée. Les dispositifs étudiés sont les les consommateurs) telle que des petits-déjeu-
enquêtes postales, téléphoniques ou par mail, ners entreprises/consommateurs pour connaître
les messages postés sur Facebook ou sur les l’avis des usagers est considérée comme la plus
applications mobiles et enfin un moyen moins conviviale, la plus plaisante, permettant d’avoir
courant la rencontre de convivialité. une idée précise sur les caractéristiques des
Des tests de comparaison de moyennes ont consommateurs, et à ceux-ci d’exprimer pré-
été effectués sur chaque modalité de la variable cisément leur avis. Cependant les consomma-
indépendante, c’est-à-dire pour chaque disposi- teurs considèrent « la rencontre de convivialité »
tif d’écoute du consommateur. Etant donné que comme le dispositif le plus cher à mettre en
toutes les p-value calculées étaient inférieures place.
au niveau de signification alpha=0,05, on peut En ce qui concerne les deux critères « caracté-
ainsi rejeter l’hypothèse nulle H0, et retenir l’hy- ristique des consommateurs » et « avis précis
pothèse alternative Ha. C’est-à-dire qu’il existe de consommateur », le test de Student t montre
une différence entre les différentes images des qu’il n’y a qu’une faible différence entre les dis-
dispositifs managériaux utilisés par l’entreprise. positifs utilisés par l’entreprise pour communi-
Le test de Student montre que pour le critère quer avec ses clients.
« innovant », on peut observer une augmenta- Nous avons effectué également une analyse fac-
tion significative de la FC entre les différents torielle des correspondances (AFC). L’AFC est

Tableau 3. Motivations en fonction du profil d’implication

Faible Forte
Echantillon Sig.
implication implication
Parce que j’espère obtenir une compensation financière 2,86 (1,2) 2,74 (1,2) 2,78 (1,2) ,626

Parce que je veux être payé pour cela 3,00 (1,3) 2,59 (1,1) 2,74 (1,2) ,094
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Parce que j’attends une compensation en retour 3,03 (1,2) 2,80 (1,2) 2,88 (1,2) ,384
Parce que j’ai des idées que je veux présenter aux
3,39 (0,9) 3,9 (0,8) 3,72 (0,9) ,003
entreprises
Parce que je veux entrer en contact avec les entreprises 2,94 (1,2) 3,80 (0,9) 3,50 (1,1) ,000

Pour être reconnu comme un consommateur expert 2,53 (1,1) 2,97 (1,1) 2,81 (1,0) ,055

Pour améliorer mes connaissances 2,94 (1,0) 3,79 (0,9) 3,49 (1,0) ,000

Pour tester mes compétences 2,75 (1,1) 3,42 (1,0) 3,19 (1,1) ,002

Parce que j’apprécie donner mon avis 3,08 (1,1,) 3,79 (0,6) 3,54 (0,9) ,000

Pour suivre l’évolution des entreprises 2,75 (1,0) 3,68 (0,8) 3,35 (1,0) ,000
Parce que je suis insatisfait de l’offre actuelle des
3,25 (1,3) 3,02 (0,9) 3,10 (1,1) ,299
entreprises
Parce que je suis juste curieux 2,78 (0,9) 3,59 (0,9) 3,30 (1,0) ,000

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L’ÉCOUTE CLIENT : QU’EN PENSENT LES INTÉRESSÉS ?

une méthode multidimensionnelle qui permet de La rencontre est considérée comme « convi-
repérer à la fois les similitudes, mais aussi les op- viale » mais comme l’utilisation du courrier, est
positions entre les modalités. Elle révèle des cor- considérée comme « chère à mettre en œuvre
respondances entre les modalités des variables par l’entreprise ». Ce dernier permet d’avoir les
indépendantes et les modalités des observations caractéristiques et l’avis précis des consomma-
sur les axes factoriels les plus significatifs. teurs. Les répondants trouvent que le téléphone

Tableau 4. Image des différents dispositifs managériaux d’écoute client

Différence t (Valeur
  Courrier Mail Tel Facebook Application Rencontre
FC observée)
Cher 3,4 2,1 3,1 2,1 3,6 3,9 2,6 24,1
Rapide 2,8 3,9 2,9 4,1 4,0 3,1 3,5 14,7
Innovant 2,3 3,4 2,3 4,1 4,3 3,7 3,6 10,3
Info 3,6 3,8 3,4 3,8 4,0 4,1 3,4 13,2
Intrusif 3,0 3,1 3,9 2,9 2,8 3,0 3,1 19,5
Liberté 3,4 3,7 3,0 3,5 3,9 3,7 3,5 29,2
Plaisant 3,0 3,5 2,4 3,6 3,8 4,1 3,4 13,3
Avis 3,1 3,4 3,2 3,3 3,8 3,9 3,5 25,7
Pratique 3,1 3,8 2,9 3,9 3,9 3,9 3,6 20,6
Convivial 2,6 2,9 2,7 3,5 3,3 4,3 3,2 12,6
Moderne 2,3 3,6 2,5 4,1 4,2 3,6 3,4 10,5
Carac.Cons 3,2 3,4 3,2 3,4 3,6 4,0 3,5 28,9

Graphique. Analyse factorielle


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Béatrice SIADOU-MARTIN, Naouel MAKAOUI, Smaïl BENZIDIA et Omar BENTAHAR

Tableau 5. Les probabilités d’avoir recours aux outils en fonction des scénarios

Enquête
  Postale Téléphonique Facebook Application Responsable Rencontre rien
électronique
Situation 1 0,43 0,48 0,65 0,65 0,73 0,78 0,65 0,55
Situation 2 0,38 0,40 0,44 0,54 0,57 0,48 0,52 0,63
Situation 3 0,55 0,53 0,70 0,58 0,66 0,33 0,69 0,66
Situation 4 0,53 0,55 0,65 0,71 0,77 0,42 0,75 0,60
Situation 5 0,58 0,56 0,71 0,68 0,71 0,51 0,73 0,61

est l’outil le plus intrusif mais le moins innovant. nisée par l’entreprise. Dans le cas où le client
Parmi les nouveaux outils de communication, le est très satisfait des prestations de l’entreprise
mail est considéré comme « rapide » et « pra- (jugée fiable et rendant des services de qualité)
tique » ; Facebook, comme « moderne » et « in- ou bien souhaite suggérer des améliorations
novant » ; quant à l’Application elle est perçue bénéfiques à la fois pour l’entreprise et pour les
comme plaisante, conviviale et pratique. usagers, soit il utilise l’application mobile pour
On constate sur le graphique un système d’op- partager son avis, soit il attend les rencontres de
position symétrique entre dispositifs « clas- convivialités organisées par l’entreprise.
siques » tels que le téléphone, le courrier et la Nous pouvons ainsi conclure que Facebook et
rencontre, et dispositifs « plus moderne » utili- les applications sont utilisés quand le consom-
sant la nouvelle technologie tels que Facebook, mateur veut partager/communiquer un avis favo-
mail, application. L’axe 1 pourrait résumer le rable à l’entreprise. En cas de problème, le client
degré d’efficience des dispositifs d’écoute client préfère s’adresser à un responsable et avoir une
et l’axe 2 s’intéresse davantage à ses capacités communication directe.
d’adaptation à l’environnement (technologie et Pour une bonne communication avec les clients,
consommateur).  les rencontres de convivialité sont préférables.
Il existe une complémentarité des dispositifs
3.3. Quels dispositifs managériaux d’écoute managériaux.
client en fonction du message à délivrer ?
Dans un troisième temps, l’étude exploratoire
le dispositif que le consommateur utiliserait en CONCLUSION
fonction de situations étudiées. 5 scénarios ont
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été proposées et pour chacun d’entre eux, les Cette recherche avait pour objectif de mesure
consommateurs ont évalué la probabilité d’avoir les perceptions et attitudes des consomma-
recours aux différents dispositifs d’écoute client. teurs à l’égard des dispositifs d’écoute aux-
Dans la première situation où le client peut ren- quels une entreprise a recours. Les principaux
contrer un problème (retard dû à une panne enseignements de cette recherche s’articulent
mécanique…) dont il estime que l’entreprise en trois axes. Tout d’abord, les consommateurs
est responsable, le client aura tendance à entrer semblent impliqués dans ce comportement
directement en contact avec un responsable de « partager son avis » pour des motivations intrin-
l’entreprise. En second recours il utilisera l’appli- sèques ou extrinsèques. Ensuite, les dispositifs
cation mobile de l’entreprise. Dans le cas où le d’écoute du marché ont des images différentes
client a rencontré un problème qui n’est pas dû à aux yeux des consommateurs. Enfin, les dis-
l’entreprise (retard dû aux mauvaises conditions positifs d’écoute client que pourrait mobiliser
météorologiques ou à un embouteillage suite à un consommateur apparaissent contingents
un accident de la route), il ne contacte pas l’entre- à la nature du message qu’il veut faire passer.
prise. Si au contraire le client est satisfait de son Visiblement, le consommateur sera enclin à ne
voyage, il aura tendance à attendre la prochaine rien faire si l’attribution d’un incident généra-
enquête électronique de satisfaction, ou bien il teur d’insatisfaction est attribuée à l’environne-
profitera d’une rencontre de convivialité orga- ment alors qu’il manifestera son insatisfaction

© Éditions EMS Question(s) de Management ? / N°14 / Novembre 2016 / 61


L’ÉCOUTE CLIENT : QU’EN PENSENT LES INTÉRESSÉS ?

en rentrant en contact avec le responsable ou BIBLIOGRAPHIE


en postant un message sur l’application mobile
de l’entreprise. Ce résultat rejoint les travaux Amit R. et Zott C.H. (2001), Value Creation in E-Bu-
antérieurs sur le pardon du consommateur et siness, Strategic Management Journal, 22, 493-520.
sur son besoin de transparence. Les dispositifs Florès L. (2008), Web 2.0 et études de marché :
d’écoute client apparaissent complémentaires Vers une nouvelle génération d’études de marché ?,
et suggèrent aux entreprises d’investir sur tous Revue Française de Marketing, n° 220, p. 7-16.
les moyens de communication possible avec les Füller J. (2006), « Why consumers engage in virtual
consommateurs, qu’ils soient actifs ou passifs. new product developments initiated by producers »,
Cette recherche permet également de prendre Advances in Consumer Research, n° 33, 1, 639-646.
du recul par rapport aux pratiques managériales
Galan J.P. et Vernette E. (2000), Vers une 4ième gé-
et d’entrevoir des recommandations quant
nération : les études de marché « on line », Décisions
à l’utilisation de ces outils. Développer une marketing, 19, p. 39-52.
culture orientée client apparaît important pour
Gotteland D. (2002), La relation orientation mar-
assurer un avantage concurrentiel : le rôle du
ché – performance d’un produit nouveau : nouvelles
manager semble essentiel lorsque le consom-
variables médiatrices et modératrices, Thèse de Doc-
mateur attribue la faute à l’entreprise. Pour ce
torat, UPMF.
faire, les entreprises se doivent d’adapter leur
mix-RH (recrutement, rémunération…) pour Graham P. (1993), “Marketing’s domain: A critical
que celui-ci encourage les vendeurs à être review of the development of the marketing concept”,
Marketing Bulletin, 4(1), 1-11.
orientés clients (Humphreys et William, 1996).
Cela rejoint les travaux de Hartline et al, (2000) Hartline M.D., Maxham J.G.III, McKee D.O. (2000),
qui positionnent l’implication organisationnelle Corridors of influence in the dissemination of custo-
et la socialisation des employés comme de mer-oriented strategy to customer contact service
bons moyens de diffusion d’une « culture orien- employees, Journal of Marketing, 64(2), p.35.
tée client » propice à une meilleure qualité de Humphreys M.A. et Williams M.R. (1996), Explo-
service. ring the relative effects of salesperson interpersonal
Malgré ses apports, cette recherche comporte process attributes and technical product attributes on
plusieurs limites qui dessinent autant de voies customer satisfaction, Journal of Personal Selling and
de recherche intéressantes. Outre les limites Sales Management, 16(3), p.47-57.
classiques inhérentes d’une part à la nature de Kohli A.K., Jaworski B.J. (1990), “Market orienta-
l’échantillon et d’autre part au secteur d’acti- tion: The construct, research propositions, and mana-
vités, il est à noter qu’aucune attention n’a gerial implications”, Journal of Marketing, vol. 54, n° 2,
été portée aux caractéristiques linguistiques p. 1-18, April.
des messages (traces d’énervement…). Par Kozinets R.V. (2002), The field behind the screen:
ailleurs, les réseaux sociaux ont également using netnography for marketing research in on-line
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une caractéristique que les autres dispositifs communities, Journal of Marketing Research, 39(1),
d’écoute client, tels que le sondage quantitatif, 61-72.
n’ont pas : ils offrent une audience (les autres Levitt T. (1960), “Marketing Myopia”, Harvard
internautes). L’absence ou la présence d’autres Business Review, 38(4), 45-56.
consommateurs conduisent-elles des compor- Narver J.C., Slater S.F., (1990), “The effect of mar-
tements et opinions ? ket orientation on business profitability”, Journal of
La présente étude porte sur les dispositifs Marketing, vol. 54, n° 54, p. 20-35, October.
d’écoute client mais ne s’intéresse aux per- Ramsey R.P, et Sohi R.S, (1997), Listening to your
formances commerciales de l’entreprise alors customers: The impact of perceived salesperson liste-
même que Ramsey et Sohi (1991) montrent un ning behavior on relationship outcomes. Journal of the
lien entre l’écoute du vendeur et la qualité de la Academy and Marketing Science, 25(2), p. 127-135.
relation (confiance et satisfaction à l’égard du Viot C. (2010), « Toi aussi, deviens moi ami », Inté-
vendeur). Ceci constitue également une piste grer le Web 2.0 dans sa stratégie de communication,
de recherche intéressante. Décisions Marketing, Rubrique « Stratégies », n° 58,
Des recherches tant qualitatives que quantita- p. 77-82,
tives sont nécessaires pour mieux comprendre Viot C., Bressolles G. (2012), Les agents virtuels
l’appropriation des dispositifs d’écoute client intelligents : quels atouts pour la relation client ?, Déci-
par les consommateurs. sions Marketing, n° 65, p. 45.

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