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« Welcome to the Experience Economy ». Cet article de B. Joseph Pine II et James H. Gilmore paru
dans la Harvard Business Review (juillet-août 1998) a marqué le développement de la pensée centrée
autour de l’expérience, l’« Experience thinking ». Dans une première étape les chercheurs et les prati-
ciens se sont principalement intéressés à l’« expérience client », l’ensemble des interactions perçues
par le client avant, pendant et après l’achat. Les limites de l’approche traditionnelle du marketing ont
conduit à l’émergence d’un marketing expérientiel avec la volonté de s’adapter à l’expérience du nou-
veau consommateur (W. Batat & I. Frochot, Marketing Expérientiel, comment concevoir et stimuler
l’expérience client ? Dunod, 2014). Dans la continuité du marketing expérientiel s’est développé le mar-
keting collaboratif, ou marketing participatif, qui renvoie à la participation du client à la création de valeur
de l’entreprise. Les premiers à s’emparer de l’exploitation des données que les individus et les objets
connectés produisent sont les marketers pour mieux connaître les clients et les consommateurs. Les
usages marketing du Big Data sont développés par les entreprises soucieuses de valoriser les masses
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Intelligence artificielle
Faouzi BENSEBAA, professeur, Université de Paris 8
Transformation profonde de la chaîne de valeur des entreprises, identification de milliers de types
psychologiques permettant d’élaborer des messages précis en adéquation avec les préférences des
clients, envoi de réponses automatiques aux clients via les réseaux sociaux et les mails, gestion des
stocks en temps réel permettant la réception de produits sans passer par des commandes formelles,
reconnaissance faciale pour repérer les clients frustrés ou mécontents dans les files d’attentes dans
les magasins, rédaction automatique d’articles dans les entreprises de presse, outils d’aide à la dé-
cision voire outils de décision par les algorithmes, travail avec des collaborateurs (préalablement
détectés) ayant des profils en correspondante précise avec ce qui est attendu, contrôle très étroit
de ces mêmes collaborateurs par des machines, etc. sont des exemples illustrant les avancées de
l’intelligence artificielle concernant les organisations. Exit ainsi l’outil statistique classique, l’analyse
des données et leur interprétation. Les machines nous permettent de surcroît d’être de plus d’être
dans la tête des clients en amont de leurs envies, de leurs besoins, de préférences comme elles
nous amènent à connaître profondément nos collaborateurs. Foin donc de la surprise ! Les machines
pouvant accomplir n’importe quelle tâche intellectuelle aussi bien (peut-être mieux) que les humains
auraient-elles gagné à la grande joie des transhumanistes et au grand dam des néo-luddites ? Le
consensus est cependant loin d’être acquis sur la place des machines dans les organisations et dans
la société. Quid dans cette veine du libre arbitre ? De l’anonymat ? De l’indéterminisme ? Le système
l’aurait-il emporté au détriment de l’acteur ? La dictature des processus serait-elle irréversible ? Peut-
être que la configuration la plus souhaitable serait une relation apaisée dans laquelle l’humain profi-
terait de l’efficacité de la machine et celle-ci tirerait profit de l’intelligence émotive un peu chaotique
de l’humain.
L’UX de l’IA
Hervé BERAUD, directeur-associé de CollectivZ
La transformation numérique, à la fois, génère de nouveaux comportements des clients – tant particu-
liers qu’entreprises –, et, à la fois, favorise l’émergence de nouveaux outils et modes de travail pour
les collaborateurs. Dans ce contexte de profonde mutation, la notion même d’Intelligence Artificielle
procède d’un choix philosophique qui incombe à chacun : est-ce que je crois que l’avenir de l’huma-
nité est le transhumanisme ? Les clients et les collaborateurs sont alors parties d’un système plus
vaste qui les sert efficacement mais les dépasse jusqu’à les absorber. Ou, alors, ai-je foi en l’humain
et l’alliance des intelligences ? Dans ce cas, clients, collaborateurs et intelligence artificielle coopèrent
au service de rêves, d’intentions et de moments de vie pleinement humains. Il s’agira alors pour col-
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émettent un diagnostic ou anticipent la conclusion d’un dossier pour alerter le collaborateur et aider
sa décision. Dans tous ces cas l’IA les aide à progresser techniquement et opérationnellement dans
trois directions : la qualité de la relation, de la transaction et de la décision. Mais l’IA n’est pas dotée
en elle-même de sens moral ou politique, même si elle fera de plus en plus illusion au point qu’il sera
difficile de distinguer le vrai du faux : 1984 n’est pas si loin avec des robots-agents conversationnels
instruits à écrire de faux avis, des armées de « chat-bot » dressés pour sabrer l’e-réputation d’un
concurrent… Les entreprises ont avec l’IA un outil de relation et de pouvoir à l’éthique indéfinie et
l’apprentissage opaque. Pour grandir en intelligence artificielle autant qu’en confiance, l’entreprise
a trois défis à relever : mettre l’IA au cœur de l’apprentissage, au cœur du collectif et au cœur de
la relation avec pour chacun une valeur éthique. Un collaborateur comme un client vit une expé-
rience réussie quand son vécu se rapproche le plus de ses attentes voire les dépasse. Avec l’IA, les
entreprises ont un nouvel atout pour piloter et améliorer l’expérience client ou collaborateur par une
meilleure qualité de perception, de traitement et de mesure d’atteinte des préférences… à condition
d’honorer le besoin de sens et de transparence. Paradoxalement l’IA va constituer une incitation pour
mettre en avant la responsabilité sociale et sociétale de l’Entreprise récemment mise en valeur dans
la Loi Pacte. Dans ce contexte, le secteur des assurances mutualistes à condition de se réinventer,
dispose d’une carte à jouer pour combiner les progrès de l’IA avec le développement des écologies
des personnes et des collectifs.
de l’expérience. Grace à ses capteurs, elle recueille des données en masse tant de localisation, de
comportement, de sensation, jusqu’aux expressions d’émotions du visiteur ou du chaland. Ces don-
nées sont traitées dans l’instant pour répondre à l’interlocuteur, mais aussi conservées pour servir aux
analystes afin d’obtenir une connaissance clients extrêmement fines qu’aucune étude traditionnelle
n’est en mesure d’offrir à coûts équivalent. Dans ce scenario, le salarié doit apprendre à travailler avec
l’IA et non contre elle. Le défi de l’homme face à l’IA : devenir encore plus humain.