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A l’heure où Chat GPT révolutionne l’usage de l’intelligence artificielle, quelles opportunités offre le NLP pour
nos établissements de santé ?
1. Définition
Le TAL, technologie mêlant linguistique, informatique et intelligence artificielle permet la création
d’outils capables de rendre intelligible le langage humain par une machine. Omniprésente dans
notre quotidien à travers nos smartphones et assistants vocaux : nous retrouvons le TAL dans les
agents conversationnels (chatbots), la modération de contenus sur les réseaux sociaux ou encore la
traduction automatique de textes.
A l’instar de Dragon Medical One, solution de reconnaissance vocale distribuée par la société Nuance, le TAL
permet de retranscrire en temps réel le compte-rendu d’un professionnel de santé. Cette technologie
facilement implémentable est déjà utilisée par 40 000 médecins en France et plus de 600 000 dans le monde.
Pour le professionnel de santé, c’est près de 50% de son temps qui est économisé lors de cette tâche, lui
permettant de se recentrer sur la communication avec son patient et mettre à disposition son compte-rendu
immédiatement après la consultation.
Pour l’établissement sanitaire, elle offre un véritable levier en terme de qualité de vie au travail des
professionnels de santé.
Des évolutions majeures sont attendues dans le déploiement du TAL au sein des établissements. Aux Etats-
Unis, une libération progressive de l’ordinateur au profit des assistants médicaux virtuels est en marche afin
de permettre aux médecins d’interagir directement avec le dossier du patient. Le médecin pourra demander
directement l’affichage de n’importe quel document, compte-rendu, imagerie, bilan biologique, etc. C’est
une première étape avant l’usage d’une intelligence conversationnelle ambiante, qui, en écoutant la
conversation entre médecin et patient, pourra analyser son contenu et générer un compte-rendu de la
consultation ou toute autre action en lien avec les données non structurées enregistrées dans le dossier du
patient.
Il existe différents types d’entrepôt de données de santé, le plus répandu à ce jour est de type textuel. En
effet, 80 à 90% des connaissances sont dans les textes libres (données non structurées au moment où elles
sont saisies pour le soin), très peu dans les données structurées à la source. Partant de ce constat, la société
Codoc, spin-off de l’Institut Imagine, développe des entrepôts basés sur des méthodes de TAL afin de
permettre au médecin de chercher dans ses données, de se les réapproprier dans le cadre de la recherche et
du soin pour un usage simplifié dans la pratique courante.
A ce jour, les cas d’usage les plus répandus dans les établissements sanitaires dotés d’entrepôts de données
sont médico-économiques à travers l’optimisation du codage des actes, afin d’améliorer à titre rétrospectif
ou prospectif les recettes issues des soins pour l’établissement, ainsi qu’en data management dans la
recherche clinique. Cette dernière, sur le plan académique ou du soin, a bénéficié d’un passage à l’échelle
grâce au développement des entrepôts de données de santé textuels. En effet, en facilitant le repérage de
traits communs entre les dossiers des patients (prescreening), la constitution de cohortes devient ainsi plus
aisée permettant leur inclusion dans des essais cliniques, ou le partage de connaissances scientifiques entre
acteurs de la santé.
En matière de gestion des données de santé, un travail important d’acculturation et de formation reste à
faire pour l’ensemble des parties prenantes, non seulement dans les établissements (publics ou privés) mais
plus largement sur l’ensemble d’un territoire (médecine de ville, acteurs associatifs, collectivités
territoriales), afin qu’ils comprennent les enjeux et les arbitrages à mener et qu’ils se mobilisent dans la mise
en œuvre d’un projet d’entrepôt de données. C’est la démarche portée par la société Hopsiia sur le territoire
Au-delà de cette démarche d’acculturation, d’autres prérequis sont nécessaires à la réussite d’un projet
d'entrepôt de données de santé :
• Un sponsorship de la direction de l'établissement, des directions médicales et de la recherche.
• Un véritable projet médical et/ou académique : l'entrepôt n'est pas une fin en soi, il faut avoir une
bonne connaissance ou un objectif en termes de structuration des données.
• Choisir le bon partenaire technologique tenant compte du Système d’information de l’établissement
et de sa culture de la donnée afin d’articuler une trajectoire académique, clinique et technique.
• Définir une « grammaire commune » permettant d’embarquer des professionnels qui ont des
cultures différentes : médecins, DSI, ARC, chercheurs, …
Pour aller plus loin en matière de gestion de la donnée de santé et du déploiement d’entrepôts de données
de santé, il est important :
• De promouvoir des solutions techniques qui permettent d'architecturer des organisations humaines
coordonnées, autonomes, travaillant en fédération, valorisant le rôle de chacune des parties.
• De décloisonner la recherche et le soin, réutiliser les entrepôts pour prendre en charge les patients
avec un ROI immédiat sur les entrepôts, ce qui n'est pas pris en compte à ce jour dans le cadre
réglementaire.
• De marier les réussites des données textuelles à d'autres techniques : imagerie, anatomopathologie,
etc. pour enrichir les logiques thérapeutiques et les diagnostics.
• De simplifier, sans déstabiliser, un cadre réglementaire expert qui peut parfois décourager les
initiatives.
• De valoriser ces travaux en temps homme et temps machine, qui mis bout à bout sont porteurs de
valeur pour les patients et les professionnels de santé.
Cette évolution permet à l'établissement de bénéficier de tableaux de bords qui permettent en quelques
clics de repérer des défaillances grâce à une classification des verbatims sur une période donnée, un service
ou une thématique. A titre d’exemple, un verbatim négatif sur le score e-Satis (mesure de la satisfaction et
de l’expérience des patients hospitalisés de l’HAS) en relation avec la sortie de l’hôpital retrouvé dans
différentes disciplines, va faire l’objet d’une analyse fine grâce au TAL, permettant d’élaborer un plan
Pour prendre de l’ampleur, ce sujet doit être porté conjointement par les cadres de l’établissement et les
professionnels de santé, à travers un reporting direct et des plans d’amélioration de la qualité des soins
coconstruit avec les équipes médico-administratives. La technologie n'est bien entendu pas une finalité
L'enjeu se trouve sur la mise en œuvre d’actions sur le terrain, le TAL identifie les grands sujets sur lesquels
s’expriment les patients et fournit des éléments d'explication. Cela permet à l’établissement de comprendre
pourquoi il y a eu une rupture dans le parcours ou une mauvaise expérience et de disposer de clés de lecture
supplémentaires.
Afin d’accélérer le déploiement du NLP en santé, il est nécessaire de promouvoir l’essaimage au sein des
établissements, en soutenant les projets, en valorisant les outils et en promouvant les différents usages. C’est
dans ce champ exploratoire et opérationnel que s’inscrit l’Anap, qui se tient aux côtés des directions
d’établissements sanitaires et médico-sociaux afin d’étudier leurs projets et de les accompagner dans leur
concrétisation.