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de René Guénon
Jean-Baptiste Willermoz
(1730-1804)
développe la théurgie, fonde
en 1774 un nouveau chapitre
de l’Ordre de la Stricte
Observance Templière qui
fusionna avec le Rite Ecossais Knigge, fondateur avec Weishaupt des
rectifié et dont Joseph de Illuminés de Bavière
Maistre atteint le degré le plus
haut.
Mirabeau, Skull and Bones
Robespierre…
LA MÉTAPHYSIQUE DE RENÉ GUÉNON 113
Hindouisme
Quatre Vêdas (entre 1500 et Islam
1000 avant J.-C.)
Brâhmana (rites)
Aranyaka branche shadilite du soufisme
Upanishads (commentaires fondée par Sheikh Abul Hasan ash Shâdii
e e
philosophiques des Vêdas), VIII -V e
au VII siècle de l’Hégire; à laquelle appartint
siècle avant J.-C., «moyen Sheikh el-Abkar (Mohyddin Ibn Arabi,
d’approcher la connaissance 1165-1240)
suprême».
Vedânta («fin du Vêda») , un des six Sheikh Elish Abder Rahman el-Kébir,
darshanas (point de vue sur la réalité), dont John Gustaf Agelii (1869-1917, Ivan
système moniste tiré des Upanishads, Aguéli, Abdul-Hâdi) fut moqqadem
doctrine de la non-dualité (adwaita-vâda) (représentant)
La Métaphysique orientale
Nous allons exposer la « métaphysique » de René Guénon, en nous servant
de son unique conférence publique 2, donnée à la Sorbonne en 1925. Noëlle
Maurice-Denis assista à une première version de cette conférence, lors de tra-
vaux pratiques en vue de l’agrégation de philosophie, et ce fut le départ de
son admiration pour René Guénon 3.
Tout ce qui est dit dans cette première partie est un résumé de la pensée de
René Guénon. Nous en ferons la critique seulement dans la partie suivante.
Où se trouve la métaphysique ?
La connaissance métaphysique, nous dit René Guénon, a été perdue en Oc-
cident : il faut se tourner vers l’Orient – notamment vers l’Inde –, et s’adresser
à des représentants qualifiés.
La métaphysique ne se trouve pas qu’en Inde, mais dans ce pays elle a
l’avantage de n’être pas réservée à une élite, du fait qu’on n’y distingue pas
entre ésotérisme et exotérisme.
L’origine de la métaphysique n’est pas historique, elle est non-humaine, et
se trouve dans plusieurs traditions ([bouddhisme 4], taoïsme, cabale, islam).
Elle se trouvait aussi en Occident au Moyen Age.
Définition nominale
On peut donner une définition nominale de la métaphysique comme « la
discipline permettant d’atteindre ce qui est au-delà de la nature » (d’après
l’origine étymologique du mot : « méta-physis », après la nature) : par consé-
quent, ce n’est pas une connaissance naturelle (puisque son objet est au-delà
de la nature). Il faudra donc qu’elle mette en jeu des facultés surnaturelles.
En Orient, on l’appelle « connaissance », mais chez nous ce terme est ré-
servé à la connaissance humaine et rationnelle, c’est-à-dire à la science et à la
philosophie.
René Guénon a veillé soigneusement à s’abstenir d’employer le mot de
« gnose » – « malgré sa parfaite équivalence avec le sanscrit jnâna 5 » – se
e
2 — Elle fut publiée dans la suite sous le titre de La Métaphysique orientale (4 éd., Paris,
Éd. Traditionnelles, 1970 ; 1ère éd. 1939).
3 — Marie-France JAMES, Ésotérisme et christianisme, autour de René Guénon, Paris,
Nouvelles Éditions Latines, 1981, p. 163.
4 — Sur ce point René Guénon a changé d’opinion. Au départ il refusait au bouddhisme
d’être une voie traditionnelle, puis il l’admit par la suite.
LA MÉTAPHYSIQUE DE RENÉ GUÉNON 115
Définition réelle
Si, ne se contentant pas d’une définition nominale, on cherche une
définition réelle, René Guénon nous dit qu’on ne saurait « définir » la
métaphysique, car elle est illimitée : on peut seulement la caractériser en
disant que c’est « la connaissance des principes universels ».
L’intellect
Les conceptions métaphysiques ne sont en rien assimilables aux concep-
tions scientifiques ou philosophiques, ce ne sont pas des abstractions, mais le
fruit d’une connaissance supra-rationnelle, intuitive et immédiate, qu’on peut
appeler intuition intellectuelle : à condition de bien la distinguer de l’intuition
sensible qui ne saisit que le domaine du changement.
e
8 — Extrait de René GUÉNON, L’Homme et son devenir selon le Vêdantâ, 5 éd., Villain et
Belhomme – Éditions traditionnelles, Paris, 1972, p. 36.
LA MÉTAPHYSIQUE DE RENÉ GUÉNON 117
Cet intellect transcendant est lui-même d’ordre universel : il n’est pas une
faculté individuelle 9. Il est au-delà de la raison : il est « non-humain ».
Comment expliquer la présence en nous d’un tel intellect non humain ?
Cela s’explique du fait que notre « moi », notre individualité, n’est que la
manifestation transitoire et contingente du « soi », de notre « personnalité ».
Notre moi n’est pas un système clos : il a le moyen de connaître ce qui dépasse
l’ordre d’existence à laquelle il appartient, et d’atteindre les « états supra-indi-
viduels ».
Guénon distingue, lui aussi, entre l’individu et la personne. Mais cette dis-
tinction n’est pas celle de Maritain. Elle est puisée à la tradition hindoue. Pour
la faire comprendre, Guénon emploie l’image du soleil et du rayon :
L’individu ne représente en ré- Moi (image
alité qu’une manifestation transitoire dans laquelle se
réfléchit le soleil)
et contingente de l’être véritable ; il Intellect
n’est qu’un état spécial parmi une (rayon)
multitude indéfinie d’autres états du
même être ; et cet être est, en soi, ab-
solument indépendant de toutes ses
Soi
(soleil)
manifestations, de même que, pour
employer une comparaison qui re-
vient à chaque instant dans les textes
hindous, le soleil est absolument indépendant des multiples images
dans lesquelles il se réfléchit. Telle est la distinction fondamentale du
« Soi » et du « moi », de la personnalité et de l’individualité ; et, de
même que les images sont reliées par les rayons lumineux à la source
solaire sans laquelle elles n’auraient aucune existence et aucune réalité,
de même l’individualité, qu’il s’agisse d’ailleurs de l’individualité hu-
maine ou de tout autre état analogue de manifestation, est reliée à la
personnalité, au centre principiel de l’être, par cet intellect transcendant
dont il vient d’être question 10 .
La connaissance théorique…
La connaissance théorique (par exemple celle des états multiples de l’être)
n’est encore qu’indirecte et symbolique : ce n’est qu’une préparation (certes
indispensable) à la véritable connaissance.
La connaissance théorique est communicable (en partie), mais elle n’est
qu’une connaissance virtuelle, qui a besoin d’être réalisée effectivement.
9 — On retrouve ici une erreur du philosophe arabe Averroès, réfutée par saint Thomas
d’Aquin.
10 — René GUÉNON, L’Homme et son devenir selon le Vêdantâ, p. 38.
Principales étapes
1° La première étape de cette « réalisation » est une extension indéfinie de
notre individualité, dont l’élément corporel n’est qu’une portion très minime.
On part de ce qui est sensible, et on s’étend grâce à des répercussions dans les
autres modalités de l’être humain.
Difficultés actuelles
La connaissance métaphysique et la réalisation qu’elle implique sont tou-
jours possibles, de façon absolue. Mais pas toujours dans tel ou tel milieu. Il
peut y avoir des circonstances défavorables, comme le monde occidental mo-
derne, qui rendent même ce travail dangereux par l’absence d’appui dans le
milieu. C’est pourquoi, dit René Guénon, « nous n’encourageons personne ».
Il y a des entreprises qui dépassent les forces d’un individu isolé. Or, en
Occident on a oublié et perdu la tradition, on ignore la métaphysique.
En revanche l’Orient offre encore à ses élites les moyens de réaliser les pos-
sibilités que René Guénon a essayé de faire entrevoir, « la connaissance méta-
physique pure dans son absolue transcendance ».
Le développement matériel de l’Occident est excessif et risque de le faire
périr s’il n’envisage pas un « retour aux origines 14 ». Il faut défendre
l’Occident contre lui-même.
Critique
Après avoir exposé, le plus objectivement possible, la pensée de René Gué-
non sur la métaphysique, il nous reste à en faire la critique à la lumière de la
saine philosophie et de la doctrine de l’Église catholique.
14 — D’où l’aspect anti-moderne de René Guénon qui a trompé, et trompe encore, les
naïfs.
LA MÉTAPHYSIQUE DE RENÉ GUÉNON 121
15 — René Guénon a un usage particulier des majuscules. Nous respectons cet usage
dans les citations.
16 — René GUÉNON, L’Homme et son devenir selon le Vêdânta, p. 38-39.
17 — René GUÉNON, Introduction générale à l’étude des doctrines hindoues, Paris, Véga,
« L’anneau d’or », 1976, p. 145.
18 — Bien noter l’accent circonflexe qui le distingue de Brahma, le principe suprême de
René Guénon.
19 — René GUÉNON, Introduction générale à l’étude des doctrines hindoues, p. 201-202.
sens large) de pouvoir recevoir la forme d’une autre réalité sans sa matière :
ainsi le sujet connaissant est « informé » par la réalité qu’il connaît, puisqu’il
en reçoit la forme, mais il ne devient pas physiquement cette réalité, puisqu’il
n’en reçoit pas la matière.
René Guénon renouvelle l’erreur des pré-socratiques pour lesquels la
connaissance ne peut se faire que par une identification réelle.
La philosophie réaliste reconnaît une union entre le connaissant et le
connu, mais davantage entre l’aimant et l’aimé 28. Ici-bas, la plus grande union
possible avec Dieu se réalise par la charité : « Dieu est charité, et celui qui de-
meure dans la charité demeure en Dieu, et Dieu en lui » (1 Jn 4, 16).
La seule connaissance qui réalise une union réelle entre le connaissant et le
connu est la vision béatifique qui n’utilise pas d’espèce (species). Toutefois
cette union n’est pas fusion : l’âme béatifiée connaît Dieu sans aucun intermé-
diaire, mais elle ne devient pas Dieu ; il n’est que le terme de son acte de
connaître.
« L’homme universel »
Au terme de la « réalisation », l’on devient un « homme universel ». Ce se-
rait, nous dit René Guénon, l’état atteint, notamment, par Mahomet et par le
Christ :
« Lorsque l’homme, dans le “degré universel”, s’exalte vers le su-
blime, lorsque surgissent en lui les autres degrés (états non-humains) en
parfait épanouissement, il est l’“Homme Universel”. L’exaltation ainsi
que l’ampleur ont atteint leur plénitude dans le Prophète (qui est ainsi
identique à l’“Homme Universel”). » (Épître sur la Manifestation du Pro-
phète, par le Sheikh Mohammed IBN FADLALLAH EI-HINDI).
Ceci permet de comprendre cette parole qui fut prononcée, il y a
une vingtaine d’années, par un personnage occupant alors dans l’Islam,
même au simple point de vue exotérique, un rang fort élevé « Si les
chrétiens ont le signe de la croix, les musulmans en ont la doctrine. »
Nous ajouterons que, dans l’ordre ésotérique, le rapport de l’« Homme
Universel » avec le Verbe d’une part et avec le Prophète d’autre part ne
laisse subsister, quant au fond même de la doctrine, aucune divergence
40 — René GUÉNON, Le Symbolisme de la croix, 3e éd., Paris, Véga, « L’anneau d’or », 1973,
p. 26.
41 — René GUÉNON, Le Symbolisme de la croix, p. 145, note 4.
42 — Sur la différence entre le satanisme et le luciféranisme,voir Permanences n° 33
« Courants maçonniques actuels » (par Daniel Jacob) et Permanences n° 21 « L’œcuménisme
vu par un franc-maçon de tradition » (par J. M. Jourdan).
43 — Extrait de Les Aspects de Satan, [rédigé par René Guénon sans doute avant ses 20 ans
(voir Marie-France JAMES, Ésotérisme et christianisme autour de René Guénon, p. 70)], Cahiers
de l’Herne « René Guénon » sous la direction de J.P. Laurant aidé de Paul Barbanegra, Paris,
Éd. de l’Herne, 1985, p. 24.
LA MÉTAPHYSIQUE DE RENÉ GUÉNON 131
Annexes
Annexe 1 : Gnose et luciférisme
Extraits de l’article de Daniel Jacob (père Catry, S.J.) : « Courants maçonni-
ques actuels », Permanences nº 33, octobre 1966, p. 19-42.
La gnose
Jean-Marie Jourdan l’a fort bien définie dans Permanences :
Quelle est donc la doctrine profonde que la maçonnerie, en tant
que collège initiatique, et non pas seulement comme officine d’activisme
politique, exploite et fait réaliser à ses membres sans toutefois la pro-
clamer ouvertement ?
Elle serait la connaissance par excellence ; elle apporterait la tradi-
tion primitive ou primordiale, sans doute parce qu’elle se rattache à la
tentation originelle où le Prince de ce monde sollicita l’homme de
l’imiter, c’est-à-dire de se diviniser lui-même, par ses propres moyens, avec
l’assistance de l’inspirateur… Cette tradition permet de tout unifier et
de tout organiser parce qu’elle va au fond de l’être 44 .
Quel est cet être ?… Avant de poursuivre cette remarquable analyse de J.-
M. Jourdan, insistons sur cette idée : la « connaissance » ou gnose. La « gnose
intégrale, révélatrice de tous les secrets », dont parle Oswald Wirth, l’un des
rénovateurs de « l’esprit initiatique » s’acquiert par les propres forces de
l’homme 45. Il se déifie au gré d’initiations successives. « Vous serez comme
des dieux 46. » Acquérir sans l’aide de Dieu, sans le secours gratuit de sa grâce, « la
science du bien et du mal », édifier un « ordre nouveau » dont Dieu serait
exclu, n’est-ce pas la chimère que le démon ne cesse de présenter à l’orgueil
humain depuis le Paradis terrestre ? « Le diable est un singe de Dieu ». Il en-
Le démon
On nous rendra cette justice que nous n’avons guère agité les « diableries »
dans cette étude.
Cependant, il est impossible de nier que la gnose initiatique revêt les ca-
ractères de la pensée diabolique.
Et c’est elle qui, des sectes supérieures aux inférieures, depuis les suprêmes
initiés jusqu’aux arrivistes du Grand-Orient ou de la Grande-Loge, inspire
notre société et lui donne ses caractères de déshumanisation, matérialisme,
athéisme, luxure, ennui… désespoir, avec guerres, révolutions, massacres
périodiques… Les chapitres de Pour qu’il Règne sur la Révolution (deuxième
partie) l’ont démontré succinctement. Et l’action de la synarchie, ne la vivons-
nous pas, en économie, en politique,… en religion ?
Mais quel est donc « l’Être », dans la gnose ?
Nullement le Dieu personnel, Créateur et architecte de l’univers, continue
J.-M. Jourdan 47. La question ne se pose même pas, car il n’est fait aucun usage
de la métaphysique des causes, ni même du principe de raison suffisante, pour
remonter des êtres à l’Être. Il y a le monde, et c’est tout. Dans ce monde, au
cours de l’évolution, les êtres procèdent sur motion intrinsèque, par émana-
tion, sous l’impulsion du Principe. Ce principe reste d’une nature mystérieuse,
encore que son rôle soit capital, ontologiquement et physiquement. Il est
l’énergie universelle, le dieu immanent de l’univers, et aussi son prince, son
prétendant, car il entend en devenir le roi, par l’homme. Ceux qui reçoivent
par l’initiation son « influence spirituelle », s’ajustent sur lui, « s’identifiant
progressivement avec lui… » En somme tout ce Corps mystique spécial, cal-
qué sur celui du Christ, recherche la royauté universelle du démon, que
l’Écriture appelle « le Prince de ce monde », comme pour marquer l’ambition
qui le dévore.
Un maçon, non des moindres, n’a pas hésité à désigner le maître auquel il
obéissait : « Je le veux bien (écrivait le F Lantoine, dans sa Lettre au Souverain
Pontife 48 préfacée par Oswald Wirth) […] possédés de l’esprit d’examen, nous
sommes les serviteurs de Satan. Vous, détenteurs de la Vérité, vous êtes les
47 — Permanences n° 21.
48 — Voir R. VALLERY-RADOT, L’Ordre social chrétien (oct. nov. 1938), p. 21.
LA MÉTAPHYSIQUE DE RENÉ GUÉNON 133
49 — Dans l’article de Permanences n° 25 (p. 58), lire les vers blasphématoires de Stanislas
de Guaïta faisant l’éloge de Lucifer, cité d’après le livre de Pierre VIRION, Mystère d’iniquité,
Éd. Saint-Michel, 1967, p. 15-17. — Pierre Virion écrit à propos de Stanislas de Guaïta : « Son
dieu noir inconnaissable et panthéistique, s’identifiant avec l’Adam Kadmon de la kabbale,
n’a rien du Dieu de la Révélation, et c’est encore par un détour, Lucifer lui-même inspirant
son illuminisme. Il formait le rêve délirant de voir un jour la papauté souscrire à cette
divinité cosmique et à son christianisme occultiste. Fondateur de l’ordre kabbalistique de la
Rose-Croix, il lui assignait pour but : “La lutte pour révéler à la théologie chrétienne les
magnificences ésotériques dont elle est grosse à son insu.” » (VIRION, ibid., p. 16).
50 — Bernard Lazare a écrit p. 340 de l’Antisémitisme : « Les loges martinézistes furent
mystiques, tandis que les autres ordres de la franc-maçonnerie étaient plutôt rationalistes ;
ce qui peut permettre de dire que les sociétés secrètes représentaient les deux côtés de
l’esprit juif : le rationalisme pratique et le panthéisme, ce panthéisme qui, reflet
métaphysique de la croyance du Dieu un, aboutit parfois à la théurgie kabbalistique. On
montrerait facilement l’accord de ces deux tendances, l’alliance de Cazotte, de Cagliostro, de
Martinez, de Saint-Martin, du Comte de Saint-Germain, de Eckartshausen, avec les
Encyclopédistes et les Jacobins, et la façon dont, malgré leur opposition, ils arriveront au
même résultat, c’est-à-dire l’affaiblissement du christianisme. » (Cité par Léon de PONCINS,
La FM contre la France, Beauchesnes, 1941, p. 77).
*
* *
Vers « l’ordre »
Rappelons ce qui a été précisé dans deux articles de Permanences (aux n° 21
et 33 56) : l’action du démon, ange déchu s’exerce tantôt d’une façon violente,
tantôt par l’élaboration subtile d’une théorie propre à séduire les meilleurs.
On a coutume de parler de Satan et du satanisme pour désigner la pre-
mière de Lucifer et du luciféranisme pour désigner la seconde.
Guénon a toujours combattu le satanisme notamment dans L’Erreur spirite.
Peu lui importe que Satan soit personnel ou non. Il reconnaît cependant
que « des influences s’exercent » qui proviennent incontestablement de ce que
certains appellent la sphère « de l’Antéchrist ». Ces influences funestes se re-
connaissent à leur caractère subversif et l’auteur laisse entendre qu’elles inspi-
rent une politique concertée. C’est le domaine de la « contre-Initiation »,
comme il dit dans Le Règne de la quantité.
Quand on y regarde de plus près, on s’aperçoit que Guénon, pourfendeur
du satanisme conscient ou inconscient, ne s’attaque pas tellement à la subver-
sion régnante – ne se soucie guère de conjurer son déchaînement final. Cela
surprend, car enfin les hauts initiés de la « métaphysique », puisqu’ils ont tous
les pouvoirs, pourraient les employer à empêcher guerres et révolutions.
L’estafette des nouveaux mages n’a visiblement qu’une idée : remplacer la