Vous êtes sur la page 1sur 55

– Fascicule de travaux dirigés –

Droit pénal général – L2 – équipe 1


Cours de Madame le Professeur Charlotte Dubois

Équipe enseignante
Monsieur Tom Bruneau
Monsieur Benoît Bruyère
Monsieur Délio Codina
Madame Claire Fornacciari
Madame Myriam Gibelin
Madame Bérangère Maisonnat
Monsieur Nadir Ouchene
Madame Margaux Rachedi
Monsieur Théophile Rospars
Monsieur Quentin Rousselot

Année 2023 - 2024

1
2
– Présentation –

Fonctionnement des Travaux dirigés :

ATTENTION /!\ Durant les séances de TD, l’usage de l’ordinateur (ou de la tablette ou du
smartphone) est interdit. Les prises de notes en TD se font à la main. Les devoirs peuvent être
tapés à l’ordinateur, sous réserve de leur impression (v. infra).

Le cours magistral de Droit pénal général est complété de 5 séances de travaux dirigés (une
séance toutes les deux semaines). Ces TD requièrent un travail continu : la fiche doit être traitée
dans son intégralité (tous les documents doivent être lus et fichés, ce qui implique naturellement
une fiche d’arrêt pour chaque décision de justice, les réponses aux questions posées doivent être
rédigées). L’exercice demandé doit être intégralement rédigé, sauf précision contraire.
Lorsqu’un plan détaillé est demandé, il suppose non seulement de donner des intitulés (I, A…),
mais également de résumer les idées qui seraient développées sous forme de tirets (4 ou 5 tirets
minimum par sous-partie).

Pour que la séance de TD soit constructive, il faut impérativement qu’elle ait été préparée en
amont par les étudiants. Préparer une séance de TD signifie :
- Avoir appris le cours correspondant au thème étudié. Si le thème traité en TD n’a pas
encore été abordé en cours magistral, il est de la responsabilité des étudiants de
l’apprendre par eux-mêmes dans les manuels de la matière.
- Avoir levé les doutes et approfondi les points importants en consultant un ouvrage.
- Avoir traité la fiche. Attention, la préparation d’une fiche prend du temps ; il ne faut pas
s’y atteler la veille de la séance !

Le chargé de TD est libre de ramasser soit les fiches d’arrêts, soit l’exercice final (ou les
exercices finaux), soit à la fois les fiches d’arrêts et les exercices finaux. Les étudiants doivent
donc avoir leur préparation intégrale avec eux à chaque séance. L’envoi par email n’est pas
autorisé. L’excuse « Je n’ai plus d’encre dans mon imprimante », trop utilisée par vos
prédécesseurs, ne fonctionne plus. Ces possibles ramassages-surprises visent à s’assurer du
sérieux du travail fourni ; ils ne donnent pas lieu à une note qui serait intégrée dans la moyenne,
sauf si l’exercice n’est pas réalisé ou n’est pas personnel (il est alors sanctionné d’un 0/10).

Les exercices représentent un travail personnel. La constitution d’équipes pour préparer les
séances, la sous-traitance de l’exercice par une prépa privée, la circulation des corrections par
les camarades qui ont TD en début de semaine,… ne sont pas autorisées et seront donc
sanctionnées. Ces subterfuges ne vous permettent pas de progresser dans la matière.

Assiduité :
La présence au TD est obligatoire. Toute absence non justifiée est sanctionnée d’un 0/10. En
cas d’absence prévisible (Journée Défense et Citoyenneté, Convocation au permis de conduire,
etc.), l’étudiant est invité à contacter son chargé de TD pour demander à changer de créneaux
de façon exceptionnelle pour ne pas rater la séance.
Une absence est justifiée sur présentation d’un justificatif.

Notation :
La matière est l’objet de deux notes.

3
▪ Une note sur 20 sanctionne l’examen terminal (épreuve de partiel de 3 heures). Au
choix, un exercice pratique et un exercice théorique sont proposés.
▪ Une note sur 10 sanctionne le travail fourni en travaux dirigés. Cette note se compose
d’un galop d’essai et d’une interrogation. Le travail fourni pendant l’année, l’assiduité,
la participation en séances de TD seront pris en compte pour affiner cette note.
Le galop d’essai consistera en une épreuve en amphithéâtre.
L’interrogation prendra la forme d’un QCM ou d’un QCU en ligne à une date et selon des
modalités qui seront précisées ultérieurement.

Thèmes des séances de TD :


Séance 1. La loi (1ère partie) – Principe de légalité – Interprétation
Séance 2. La loi (2e partie) – Application dans le temps – Application dans l’espace
Séance 3. L’élément matériel
Séance 4. L’élément moral
Séance 5. Responsabilité et irresponsabilité

4
– Bibliographie indicative –

L’achat du Code pénal 2024, éditions Dalloz ou LexisNexis, est indispensable. Le Code pénal est
autorisé lors de l’examen. Il est possible de le surligner. En revanche, toute annotation personnelle sur
le code ou sur un post-it est strictement interdite et expose l’étudiant à un PV de fraude. Les Codes
empruntés à la bibliothèque doivent donc être également vérifiés par l’emprunteur.

Remarque : aucun ouvrage n’est préféré à l’autre. Chaque étudiant peut consulter l’ouvrage de son choix
en fonction de ses besoins.

Manuels de droit pénal général

X. PIN, Droit pénal général, 14ème édition, 2023, coll. cours, Dalloz.
Y. MAYAUD, Droit pénal général, 7ème édition, 2021, coll. Droit fondamental, PUF.
E. DREYER, Droit pénal général, 6ème édition, 2021, coll. Manuels, LexisNexis.
O. DECIMA, S. DETRAZ et E. VERNY, Droit pénal général, 5ème édition, 2022, coll. Cours, LGDJ.
J. LEROY, Droit pénal général, 9ème édition, 2022, coll. Manuels, LGDJ.
B. BOULOC, Droit pénal général, 27ème édition, 2021, coll. Précis, Dalloz.
P. BONFILS et M. GIACOPELLI, Droit pénal général, 3ème édition, 2021, coll. Synthèse, Cujas.
J. PRADEL, Droit pénal général, 22ème édition, 2019, coll. Préférence, Cujas.
P. CONTE, J. LARGUIER et P. MAISTRE DU CHAMBON, Droit pénal général, 24ème édition, 2022, coll.
Mémentos, Dalloz.

Pour compléter

Y. MAYAUD, Les grands articles du code pénal (mini format), Dalloz, 2023.
J. PRADEL et A. VARINARD, Les grands arrêts de droit pénal général, Dalloz, 12ème édition, 2021.

Revues qui peuvent être consultées en Droit pénal général

• Dalloz
AJ Pénal
Revue de science criminelle et de droit pénal comparé

• LexisNexis
Revue de Droit pénal

• Lexbase Pénal

• Cujas
Revue Pénitentiaire et de droit pénal.

5
– Rappels méthodologiques –

METHODOLOGIE DE LA FICHE D’ARRET

1. Les objectifs de l’exercice

La fiche d’arrêt a pour objectif d’aider à comprendre la décision de justice. Elle constitue l’introduction
du commentaire d’arrêt. Elle implique d’analyser les différents paragraphes de la décision pour
expliquer quels sont les arguments avancés par chaque partie (demandeur/défendeur) et les réponses
apportées par les juges (cour d’appel/Cour de cassation).
Une « fiche d’arrêt » peut être élaborée pour toute décision de justice (jugement de tribunal de grande
instance, arrêt de cour d’appel, etc.). Mais on vous demandera plus fréquemment de traiter des arrêts de
la Cour de cassation. Or, les arrêts de la Cour de cassation ne sont pas rédigés en suivant la même
« structure », selon qu’il s’agit d’arrêts de cassation ou de rejet. La fiche d’arrêt tient compte de cette
différence. Son organisation sera – en partie – différente dans chacun de ces cas. C’est pourquoi il est
indispensable, avant de rédiger une fiche d’arrêt, de regarder si l’on a affaire à un arrêt de cassation ou
de rejet.
La fiche d’arrêt doit être relativement courte. Elle ne comporte aucune part d’analyse ou de critique de
votre part.
D’un point de vue méthodologique, il convient de commencer par lire l’arrêt en entier, au moins une
fois. Ensuite, il n’existe pas de méthode « officielle » pour rédiger la fiche d’arrêt. On constate des
différences selon les enseignants ou les ouvrages. On retrouve le plus souvent les six rubriques suivantes.

2. Les six étapes de la fiche d’arrêt

- Présentation de l’arrêt : il faut préciser la date de la décision, présenter la juridiction qui l’a rendue,
(type de juridiction et lieu ; en précisant la formation s’il s’agit de la Cour de cassation si possible), et
donner le thème général de la décision. Sur ce dernier point, il ne faut pas être ni trop précis, on ne rentre
pas dans les faits (relatif à la complicité de celui qui a fait le gué pendant que…), ni trop vague, car cela
ne permet pas d’identifier le thème de l’arrêt (relatif à la responsabilité pénale).
Vous pouvez ajouter, si possible, la publicité donnée à l’arrêt : arrêt inédit (D), publié au bulletin des
arrêts des chambres (P), au bulletin d’information de la Cour de cassation (B), au rapport annuel de la
Cour de cassation (R), sur le site internet de la Cour de cassation (I), soulignez l’importance d’un arrêt
répertorié P + B + R + I. Depuis 2021, la classification des arrêts a évolué : dorénavant les arrêts publiés
aux bulletins des arrêts des chambres sont marqués par la lettre B, le R désigne toujours les arrêts
sélectionnés pour le rapport annuel, le L indique une publication dans la lettre de la chambre ayant rendu
l’arrêt tandis que le C vise l’existence d’un communiqué.

- Faits : il faut ici décrire les événements ayant conduit au litige. Cette étape doit être succincte, il ne
faut reprendre que ce qui est utile. Il ne faut pas reprendre les noms propres (y compris pour les
personnes morales), ni même les X, Y. Il faut leur préférer les qualifications juridiques (par exemple, en
pénal : le mis en cause, le suspect, le prévenu, l’accusé, le mis en examen, la victime..., d’où l’importance
de connaître le vocabulaire procédural). Nommez les parties constitue une erreur qui est sanctionnée :
elle révèle une méconnaissance de l’exercice (il ne s’agit pas, par la fiche d’arrêt, de savoir si telle ou
telle personne précisément obtient gain de cause, mais bien de tirer un enseignement plus général de la
décision reproduite ; la démarche est donc totalement différente de celle du cas pratique).
L’exposé des faits doit être synthétique et organisé. On demande aux étudiants d’écarter les faits inutiles
en identifiant les faits importants. Suivez la chronologie : on part des éléments de faits les plus anciens
pour arriver aux plus récents (utilisez plus volontiers le rappel des faits proposé par la chambre
criminelle que celui retenu par les juridictions du fond).

- Procédure : il s’agit de retracer le cheminement de l’affaire devant les juridictions. Il ne faut expliquer
que ce que l’on sait (inutile de préciser « on ne sait pas ce qui s’est produit en première instance »). Des

6
indices comme « arrêt confirmatif », « arrêt infirmatif » permettent des déductions sur les étapes
antérieures de la procédure.
À chaque étape, il est utile de préciser le nom de la juridiction, la date de sa décision, et le sens de la
décision retenue (en une phrase : « le prévenu a été condamné en appel pour telle infraction à telle
peine » ; « la cour d’appel a exonéré le mis en cause de responsabilité pénale en retenant la légitime
défense »).
Plus précisément, il faut répondre aux questions suivantes :
- en première instance : qui est demandeur ? ; qui est défendeur ? ; quelle a été la solution retenue ?
Attention à la spécificité de la matière pénale : ne s’opposent pas un demandeur et un défendeur, mais
le Parquet ou ministère public et le prévenu (ou accusé ou mis en cause). Peuvent également intervenir
une ou des partie(s) civile(s) ou une Administration ;
- en deuxième instance : qui a interjeté appel ? ; qui est intimé ? ; quel a été le sens de la décision (l’arrêt
est-il confirmatif ou infirmatif ?) ;
- au stade du pourvoi : qui s’est pourvu en cassation ? ; qui est défendeur au pourvoi ?
N.B. : On ne mentionne que ce qu’on sait, surtout on n’invente jamais.

- Moyens / motifs :
Motifs : Ce sont les arguments des juridictions. « Au motif que... ».
Moyens : Ce sont les arguments du pourvoi, donc ceux qui sont développés par les parties. « Au moyen
que... d’une part, d’autre part, en outre, enfin... ». « Sur moyen unique... ». Décomposez les arguments
développés par chacune des branches du moyen (s’il en contient plusieurs). Évitez de recopier (si vous
le faites, ce sera ponctuel et avec des guillemets) ; préférez reformuler et synthétiser.
C’est là qu’apparaît une différence dans la fiche d’arrêt selon que la Cour de cassation a rendu un arrêt
de cassation ou de rejet.
a) Dans un arrêt de cassation, la Cour de cassation expose d’abord la position adoptée par la cour
d’appel, avant d’énoncer les raisons pour lesquelles elle casse cet arrêt. Par conséquent, il faut expliquer
la position retenue par la cour d’appel et les raisons qui l’ont guidée.
b) Dans un arrêt de rejet, la Cour de cassation expose d’abord la position défendue par le pourvoi en
cassation, avant d’énoncer les raisons pour lesquelles elle n’est pas convaincue par ces arguments et qui
la conduisent à rejeter le pourvoi. Par conséquent, il faut expliquer les arguments invoqués au soutien
du pourvoi. Si le pourvoi comporte plusieurs moyens, il conviendra alors de traiter chaque moyen
successivement.

- Problème juridique ou question de droit : C’est une étape fondamentale de l’introduction. La


question de droit doit être suffisamment générale pour ne pas être un problème de fait, mais
suffisamment précise pour coller à l’arrêt. Par exemple il ne faut jamais se contenter de : « l’individu
est-il coupable ? ». Le problème de droit est celui à laquelle la Cour de cassation donne une réponse.
Comment le formuler ? Le plus souvent, il est possible de reprendre l’attendu qui livre la solution
(parfois un attendu de principe), et de le mettre sous forme interrogative.

- Solution : Il s’agit de donner la réponse apportée, par la Cour de cassation, au problème juridique
précédemment retenu.
Il faut préciser en outre le type d’arrêt rendu. Si c’est un arrêt de rejet, il suffit simplement de dire que
la Cour de cassation « rejette le pourvoi » / « confirme la décision rendue en appel ». Si c’est un arrêt
de cassation : il convient de reprendre le visa « la Cour de cassation casse l’arrêt rendu en appel au
visa de l’article … », le chapeau (qu’il faut citer), puis la solution (attendu qui précède le dispositif).
N’hésitez pas à citer l’arrêt. Vous pouvez éventuellement le reformuler, mais citer l’arrêt (entre
guillemets) vous permet de ne rien oublier et de ne rien modifier. Si la juridiction précise les fondements
(articles du code pénal par exemple) qui servent de support à sa décision, vous devez les mentionner.
Attention à bien vérifier l’ampleur du contrôle opéré par la Chambre criminelle sur les juges du fond :
parfois, la Cour de cassation s’en remet à l’appréciation souveraine des juges du fond ; ne lui prêtez pas
des appréciations qui sont en réalité celles des juges du fond.

7
METHODOLOGIE DU CAS PRATIQUE

Le cas pratique est l’un des exercices rois des études de droit. Nombreux sont les examens (comme l’examen
d’avocat) ou les concours (comme le concours de la magistrature) dont les sujets sont posés sous la forme de
cet exercice. Vous devez maîtriser sa méthode

• Présentation de l’exercice

Le cas pratique est un exercice qui consiste à répondre juridiquement à un problème concret qui vous
est posé. C’est l’exercice le plus proche de la pratique judiciaire et juridique. Il s’agit de trouver la
solution juridique d’un problème concret : les faits sont présentés de manière brute, sans traitement
préalable.
Ce qui compte n’est pas tant la réponse finale à la question posée que l’exposé d’un raisonnement
juridique rigoureux, en détaillant les règles applicables et en étoffant vos argumentations.
La réponse au cas soulevé n’est pas évidente : il vous faut donc l’appuyer, l’étayer, la soutenir. On
cherche à déceler vos capacités à raisonner sur un thème déterminé en appliquant concrètement les règles
juridiques étudiées. Cela suppose donc de connaître et de maîtriser son cours, de savoir utiliser utilement
son code puis d’être capable de raisonner et d’argumenter.
Il s’agit d’un cas pratique donc, par définition, non théorique : ce n’est pas l’occasion ici d’exposer
l’histoire de l’institution en cause ou les justifications politiques d’une règle. Pour autant, vous ne
pouvez pas vous contenter de répondre par oui ou par non, mais vous devez au contraire développer une
véritable argumentation technique.
Rmq : la spécificité du cas pratique (contrairement au commentaire d’arrêt ou à la dissertation) est de
ne pas être un exercice formel. La forme doit être au service de la clarté de l’exposé mais ne doit pas
être une contrainte ; ainsi, si vous avez cinq points à étudier, vous faites cinq parties, cela ne pose aucune
difficulté. Vous devez toujours faire un plan en cherchant à être le plus clair possible et à exposer au
mieux votre raisonnement à votre lecteur.
Il y a peu d’exigences de forme en matière de cas pratique : l’objectif est de résoudre un problème
pratique, un problème concret. Par conséquent, les noms propres peuvent être utilisés, et la réponse à la
question posée doit toujours apparaître clairement.

• Travail préparatoire :

Vous devez lire attentivement l’énoncé en mettant en avant les points importants (en soulignant ou en
surlignant).
Attention : certains détails sont déterminants pour résoudre le cas, vous devez les identifier.
D’autres détails n’ont au contraire aucune importance : vous devez les écarter (certains énoncés
noient les éléments importants dans une multitude de digressions afin de vous mettre dans la
situation d’un avocat face à un client non juriste qui relaterait toute sa vie et non seulement les
éléments importants).

Les parties doivent être qualifiées (l’auteur de l’infraction, la victime, le coauteur, le complice, la
personne poursuivie…). Qualifier les parties n’empêche pas de les nommer. C’est là une différence avec
la fiche d’arrêt et le commentaire d’arrêt (exercices dans lesquels nommer les parties est sanctionné) :
dans le commentaire, peu importe qu’il s’agisse de X ou de Y ; l’important est le sens, la valeur et la
portée de la règle dégagée par la juridiction dans la décision commentée. À l’inverse, dans le cas
pratique, la règle de droit est au service de la résolution des tourments de Madame Michou ou de
Monsieur Pasdebol. On peut donc les nommer.

Au brouillon, n’hésitez pas à faire des schémas pour ne pas commettre de contresens sur la
compréhension de l’énoncé. Par exemple, pour les cas pratiques en matière de conflits de lois dans le
temps, il est indispensable de s’aider d’axes chronologiques au brouillon.

8
L’énoncé du cas pratique vous pose parfois directement la question à laquelle vous devez répondre.
Parfois, une seule question générale vous est posée : « qu’en pensez-vous ? » ou « quid juris » qui
signifie « qu’en est-il en droit ? ». Dans ces hypothèses, c’est vous qui devrez, dès le travail préparatoire,
identifier les questions soulevées.
N.B. : les questions que vous identifiez sont nécessairement liées à votre programme de révision. S’il
advient que vous partez dans des éléments qui n’ont jamais été étudiés en cours et en TD, c’est
probablement que vous faites fausse route.

• Étapes de résolution

Rmq : aérez la présentation de votre réponse. Sautez une ligne entre chaque étape de résolution.
Si le sujet comporte des questions clairement énoncées, traitez chaque question une par une.
S’il s’agit d’un grand pratique, dans lequel vous devez identifier les problèmes à traiter, il convient
d’élaborer un plan pour aborder chaque question que vous avez retenue.

1. Le cas pratique commence par un rappel des faits classés, qualifiés et clarifiés.
Attention : ce rappel des faits doit être aussi bref que possible ; les éléments importants figureront dans
la mineure de votre syllogisme, donc vous reviendrez dessus. Trop d’étudiants perdent un temps
précieux en recopiant, intégralement ou presque, l’énoncé. Ne vous répétez pas. Triez les faits ;
ordonnez-les ; replacez-les par ordre chronologique. Commencez par un rappel général des faits
(extrêmement succinct) puis débutez chaque partie de votre plan par les faits pertinents à la résolution
du problème soulevé.

2. Posez le problème soulevé sous forme de question1. Il s’agit ici d’une question juridique, faisant
appel à des qualification juridiques ; pour autant, à la différence de la fiche d’arrêt, il n’est pas
interdit, à partir du moment où la situation est qualifiée, d’être factuel.

3. La réponse à la question posée doit être donnée sous forme de syllogisme. Pour mémoire, on
distingue trois étapes (attention, ne pas écrire « la majeure » sur la copie : si votre copie est
clairement présentée, le lecteur comprend à quelle étape vous vous situez) :

- La majeure : la règle de droit. Il faut bien sûr hiérarchiser les sources de droit : la loi, la
jurisprudence et enfin seulement la doctrine.
S’il s’agit d’un article du Code, ne le recopiez pas systématiquement intégralement ; isolez ce qui est
utile à la résolution du cas. Une jurisprudence peut également être mentionnée en majeure lorsqu’il s’agit
d’un arrêt de principe2. Alors, il faut toujours donner les références de l’arrêt (quelle chambre de la Cour
de cassation a rendu l’arrêt ? À quelle date ? En revanche, on ne donne jamais dans une copie le numéro
du pourvoi, ou encore les références de publication dans les revues juridiques). Pour trouver la
jurisprudence, l’usage du Code est indispensable. On rappelle que toute citation est obligatoirement
encadrée de guillemets.
ATTENTION : la majeure ne doit en aucun cas se résumer à un article ou à une jurisprudence. Vous devez
systématiquement faire un paragraphe développé. Par exemple : pourquoi la loi pose-t-elle ce principe ?
Quelle est la définition des termes employés ? Quelles sont les conditions d’application de l’article de
loi ? À quelles hypothèses concrètes la loi ou la jurisprudence a-t-elle vocation à s’appliquer ? Si vous
donnez un arrêt, s’agit-il d’un arrêt d’espèce ou d’un arrêt de principe ? D’une jurisprudence constante
ou nouvelle ? Plus généralement, êtes-vous en train d’interpréter la règle de droit que vous énoncer pour
pouvoir l’appliquer au cas qui vous est soumis ? Si oui, s’agit-t-il d’une interprétation a fortiori, par
analogie, a contrario,… ? L’étudiant qui se contente de recopier le fondement (par exemple, tel article

1 Pour mémoire, la syntaxe des questions pose difficulté à beaucoup d’étudiants. Il leur est vivement conseillé de consulter un
Bescherelle pour régler le problème une fois pour toute.
2
Attention à ne citer que les arrêts ayant une réelle portée. De plus, si un arrêt se contente de recopier mot pour mot ce que dit
la loi, citer la loi plutôt que l’arrêt. Enfin, si dix arrêts ont dit exactement la même chose, ne les citez pas tous ! Citez-en un ou
deux grand maximum (l’arrêt de principe de préférence, éventuellement le plus récent si aucun arrêt n’est de principe, ou encore
l’attendu de l’arrêt qui vous semble le plus clair ou le mieux correspondre à l’hypothèse que vous voulez résoudre).

9
du Code pénal) dans la majeure et passe directement à la mineure n’a pas les points parce qu’il ne
démontre pas avoir compris la règle qu’il expose.

- La mineure : il s’agit de la confrontation du droit au fait. Vous devez à ce stade relire l’énoncé,
ne pas hésiter à citer entre guillemets les faits pertinents au soutien de votre démonstration. Vous
devez qualifier les faits juridiquement et les exploiter pour votre démonstration. Des arrêts
d’espèce peuvent figurer dans la mineure afin de soutenir votre qualification des faits. Si la règle
de droit qui sert de fondement à votre raisonnement ne correspond pas parfaitement au cas que
vous traitez, vous devez en proposer une interprétation.

- La conclusion : elle est brève et permet de répondre à la question que vous aviez posée. Cette
dernière étape est essentielle dans un cas pratique. Elle permet de tirer les conséquences des
deux étapes précédentes : si les conditions d’application de la règle sont remplies, elle
s’applique, si elles ne sont pas remplies, elle ne peut s’appliquer. Attention à bien finir par une
phrase qui répond directement à la question que vous aviez posée.

Rmq. : le syllogisme est un raisonnement déductif ; il part du droit (donc d’une règle générale et
impersonnelle) pour aboutir à la résolution d’un cas concret. Attention à ne pas « raisonner à l’envers »
en partant de la conclusion :
Ex. : dire : « la loi s’applique parce que c’est une loi pénale de fond moins sévère car elle crée
une nouvelle cause d’irresponsabilité …» est un mauvais raisonnement qui part de la conclusion
pour remonter à la majeure ; le bon étudiant commencerait par étudier la qualification de la loi
(il définit la loi pénale de fond, confronte sa définition à la loi en cause et démontre en quoi elle
est moins sévère) et continuerait son raisonnement en expliquant le régime dans le temps de
cette loi et en concluant par un raisonnement déductif : « cette loi pénale pouvant être qualifiée
de loi pénale de fond moins sévère, elle s’applique donc à l’infraction commise par Monsieur
Trucnuche ».
Pour vous aider : si vous utilisez « parce que », « puisque », « car », vous ne faites pas de syllogisme ;
vous devez utiliser « « donc », « ainsi », « par conséquent », « de là », « il en résulte que », « en
conséquence »…

Dernière remarque capitale (et que les étudiants peinent parfois à comprendre) : certains points sont soit
justes, soit faux et ne prêtent pas à discussion (ex : la loi plus sévère n’a pas d’effet rétroactif ; en cas de
légitime défense, une personne n’est pas pénalement responsable ; la Constitution a une valeur
supérieure à celle de la loi). Il s’agit là de connaissances qui sont sanctionnées si elles ne sont pas
acquises. En revanche (et c’est là l’un des intérêts du cas pratique), certains points doivent être discutés.
Il n’y a pas de bonne ou de mauvaise réponse ; seuls comptent l’argumentation et le raisonnement
développés par l’étudiant. Le bon étudiant, comme le bon avocat, est celui qui trouve des arguments
juridiques pour convaincre, et ce grâce à un raisonnement bien structuré.
Ex. 1 : savoir si la riposte d’une personne envers son agresseur est proportionnée.
Ex. 2 : savoir si tel comportement est simplement un acte préparatoire d’une infraction ou déjà
un commencement d’exécution de cette infraction.
Ex. 3 : déterminer si, à partir des faits, on peut déduire une intention de tuer ou non.

METHODOLOGIE DU COMMENTAIRE D’ARRET

Le commentaire d’arrêt est un exercice d’analyse d’une décision de justice. Ensemble, nous ne
commenterons que des arrêts de la Chambre criminelle. Attention !! L’objet de l’analyse porte donc sur
l’arrêt de la Chambre criminelle, et en aucun cas sur celui de la cour d’appel. La position des juges du
fond ne sert qu’à éclairer la position de la Cour de cassation. L’étudiant qui, en substance, commenterait
un arrêt avec : « I. La position de la cour d’appel ; II. La position de la Chambre criminelle », ne traiterait

10
le sujet que dans sa deuxième partie. Ne vous laissez pas égarer par la longueur des motifs (les juges du
fond sont souvent bavards, tandis que la Cour de cassation est souvent taiseuse !).

L’introduction -
Le commentaire d’arrêt débute par une phrase d’accroche. Il peut s’agir d’une citation, d’un fait
d’actualité, d’une illustration qui, tout en étant suffisamment proche de l’arrêt (bannir le « de tout temps
les Hommes »), n’en dit pas trop sur son contenu pour ne pas empiéter sur le corps du commentaire.
S’ensuit la fiche d’arrêt (v. supra la méthodologie reproduite).
Puis l’annonce du plan. Attention :
- l’annonce du plan doit être fidèle aux intitulés retenus (attention aux fausses annonces qui
s’éloignent du plan in fine retenu).
- ne pas intervertir les I et II dans l’annonce.
- seuls doivent être annoncés les I et II (et non les A et B). Chaque intitulé doit être suivi entre
parenthèses de la division à laquelle il correspond. Ex. : Cet arrêt invite à préciser les conditions
de la légitimes défense : après un rappel classique de la nécessité (I), la Cour procède à une
approche restrictive de la notion de proportionnalité (II).

Le plan -
À la différence du cas pratique, le commentaire d’arrêt est un exercice très formel. Plusieurs règles doivent
être connues et appliquées :
- les intitulés ne comportent pas de verbes conjugués (les participes passés sont admis ; les participes
présents ne sont pas sanctionnés, mais sont inélégants…).
- les intitulés doivent se suffire à eux-mêmes : ne les prolongez pas de points de suspension pour
assurer une continuité entre les sous-parties.
- le plan est binaire : I/II, A/B. Il est rarissime qu’un arrêt se prête à un plan en trois parties (je n’en ai
jamais croisé pour l’instant…).
- dans l’idéal, la construction des motifs de la Cour de cassation révèle le plan : essayez de les scinder,
en vous aidant de la ponctuation (avant ou après un point-virgule par exemple).
- évitez les jugements de valeur trop sévères (surtout dans les intitulés). Ex. : « I. Une mise en œuvre
laxiste des conditions de la légitime défense » est à proscrire.
Le plan doit être introduit : après le I et le II, un chapeau doit annoncer les sous-parties (A et B). Après le A
et après le I, une phrase de transition doit annoncer la partie suivante. Ces chapeaux et transition ne doivent
pas être négligés : ils permettent de mettre en évidence la démarche suivie, le fil conducteur de la pensée.

Le contenu -
L’exercice consiste à analyser la position des juges.
Avant tout, il faut donc comprendre la décision : définir les notions utilisées, expliciter les fondements
textuels, rappeler les éventuelles évolutions du droit sur la question en jeu.
Ensuite, déterminez la portée de l’arrêt (est-ce un arrêt de principe ou un arrêt d’espèce ? La décision a-t-elle
un rayonnement limité à telle infraction ou s’étendrait-elle à telle autre ?).
Interrogez-vous sur son intérêt (fait-il une application classique de la loi ? Est-il novateur ? Que prévoyait la
jurisprudence antérieure ? L’application de la loi met-elle en œuvre une méthode d’interprétation particulière,
si oui, laquelle ? Est-ce un arrêt qui marque un tournant répressif de la jurisprudence ? Cette décision
s’articule-t-elle avec d’autres décisions rendues dans des domaines proches ? Cet arrêt expose-t-il la France
à une condamnation de la Cour EDH, ou au contraire met-il le droit français en conformité avec les exigences
européennes ?).
Problématisez au maximum : qu’en serait-il si la Chambre criminelle avait décidé autrement ? Quelles sont
les implications théoriques et pratiques de la décision rendue ? La décision commentée est-elle cohérente ?

Pour les commentaires d’arrêts rédigés à la maison, la lecture des notes de doctrine est impérative et vous
aidera à trouver de la substance pour commenter la décision.

Le commentaire d’arrêt ne se solde pas par une conclusion. S’il vous reste des choses à dire, soit elles sont
hors-sujets et donc inutiles, soit elles sont importantes et ont donc leur place dans le corps de votre
commentaire et non dans une conclusion.

11
SEANCE 1 – LA LOI PENALE (1ERE PARTIE)
PRINCIPE DE LEGALITE – INTERPRETATION

Semaine du 2 octobre au 7 octobre 2023.

Doc. n° 1 : Extrait Beccaria, Dei delitti e delle pene (Des délits et des peines).
Doc. n° 2 : Extraits de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen.
Doc. n° 3 : Crim. 19 mars 2019, n° 18-81.748.
Doc. n° 4 : Crim. 17 mars 2020, n° 19-82.117.
Doc. n° 5 : Cons. const. 4 mai 2012, n° 2012-240 QPC.
Doc. n° 6 : Cons. const. 4 avril 2019, n° 2019-780 DC.
Doc. n° 7 : Ass. Plén. 29 juin 2001, Bull. crim. n° 165.
Doc. n° 8 : Proposition de loi (6 févr. 2002), relative à la protection pénale de l’enfant à naître.

Dissertation (introduction et plan détaillé) : L’interprétation par analogie de la loi pénale.

I. LE PRINCIPE DE LEGALITE PENALE

Document 1 - Extrait Beccaria, Dei delitti e delle pene (Des délits et des peines), 1764.

« Toute peine qui ne dérive pas de l’absolue nécessité, dit le grand Montesquieu, est tyrannique ;
proposition qu’on peut généraliser ainsi : tout acte d’homme à homme qui ne dérive pas de l’absolue
nécessité est tyrannique. Voilà donc sur quoi est fondé le droit qu’a le souverain de punir les délits : sur
la nécessité de défendre le dépôt du salut public contre les usurpations particulières ; et les peines sont
d’autant plus justes que plus sacrée et plus inviolable est la sûreté, et que plus grande est la liberté que
le souverain conserve à ses sujets » (§2).
« La première conséquence de ces principes est que les lois seules peuvent décréter les peines des délits,
et que cette autorité ne peut résider qu’en la personne du législateur, qui représente toute la société unie
par un contrat social » (§3).

Document 2 - Extraits de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen du 26 août 1789.

Article 5 : « La Loi n’a le droit de défendre que les actions nuisibles à la Société. Tout ce qui n’est pas
défendu par la Loi ne peut être empêché, et nul ne peut être contraint à faire ce qu’elle n’ordonne pas ».

Article 6 : « La Loi est l’expression de la volonté générale. Tous les Citoyens ont droit de concourir
personnellement, ou par leurs Représentants, à sa formation. Elle doit être la même pour tous, soit qu’elle
protège, soit qu’elle punisse. Tous les Citoyens étant égaux à ses yeux sont également admissibles à
toutes dignités, places et emplois publics, selon leur capacité, et sans autre distinction que celle de leurs
vertus et de leurs talents ».

Article 7 : « Nul homme ne peut être accusé, arrêté ni détenu que dans les cas déterminés par la Loi, et
selon les formes qu’elle a prescrites. Ceux qui sollicitent, expédient, exécutent ou font exécuter des
ordres arbitraires, doivent être punis ; mais tout citoyen appelé ou saisi en vertu de la Loi doit obéir à
l’instant : il se rend coupable par la résistance ».

Article 8 : « La Loi ne doit établir que des peines strictement et évidemment nécessaires, et nul ne peut
être puni qu’en vertu d’une Loi établie et promulguée antérieurement au délit, et légalement appliquée ».

12
Document 3 - Crim. 19 mars 2019, n° 18-81.748, inédit.

Statuant sur le pourvoi formé par :

- M. O... E...,

contre l'arrêt de la cour d'appel de POITIERS, chambre correctionnelle, en date du 26 janvier 2018, qui,
pour poursuite d'une installation classée en violation d'un arrêté de mise en demeure, exploitation non
autorisée d'une installation classée, exploitation d'une installation classée non conforme, privation de
nourriture et d'abreuvement envers des animaux, placement ou maintien d'animaux domestiques dans
un habitat, environnement ou installation pouvant être cause de souffrances, l'a condamné à 3 000 euros
d'amende, trois ans d'interdiction d'exercice de l'activité professionnelle, trois ans d'interdiction de
détenir toute race de chiens, et quatre amendes contraventionnelles de 200 euros ; (…)

Vu l’article 111-3 du code pénal ;

Attendu que, selon ce texte, nul ne peut être puni d’une peine qui n’est pas prévue par la loi ;

Attendu que les juges ont condamné M. Mathieu E..., à titre de peine complémentaire, à trois ans
d’interdiction de détenir toute race de chiens ;

Mais attendu qu’en prononçant ainsi, alors que cette mesure ne figure pas au nombre des peines
réprimant les infractions dont il a été déclaré coupable, la cour d’appel a méconnu le sens et la portée
du texte susvisé et le principe ci-dessus rappelé ;

D’où il suit que la cassation est encourue de ce chef ; qu’elle sera limitée à la peine d’interdiction de
détenir toute race de chiens dès lors que la déclaration de culpabilité et le prononcé des autres peines
n’encourent pas la censure ; qu’elle aura lieu sans renvoi, la Cour de cassation étant en mesure
d’appliquer directement la règle de droit et de mettre fin au litige, ainsi que le permet l’article L.411-3
du code de l’organisation judiciaire ;
Par ces motifs : CASSE et ANNULE.

Document 4 – Crim. 17 mars 2020, n° 19-82.117, publié au bull.

Faits et procédure

1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.

2. Dans la nuit du 27 au 28 avril 2018, un rassemblement de plusieurs milliers de personnes, nommé


"Tecknival 2018 - 25ème anniversaire" , a eu lieu, sans déclaration préalable, sur l'ancienne base
aérienne de l'OTAN à Marigny (51) ; entre le 29 avril et le 1er mai 2018, les gendarmes ont procédé à
la saisie des véhicules appartenant à MM. J... C... et L... B..., ainsi que du matériel de sonorisation s'y
trouvant et de celui transporté par MM. K... E... et D... H.... MM. C..., B..., E... et H... ont été poursuivis
devant le tribunal de police du chef d'organisation sans déclaration d'un rassemblement festif à caractère
musical avec diffusion de musique amplifiée dans un espace non aménagé.

3. Le juge du premier degré a déclaré les prévenus coupables de cette infraction, les a condamnés à 200
euros d'amende avec sursis chacun et, à titre de peine complémentaire, a ordonné la confiscation des
objets saisis. Toutes les parties ont relevé appel de cette décision.

Examen du moyen

Exposé du moyen

13
4. Le moyen est pris de la violation des articles des articles L. 211-15 et R. 211-27 du code de la sécurité
intérieure.

5. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a relaxé MM. E..., C..., B... et H..., alors « qu'il résulte de
la combinaison de l'article L. 211-15 du code de la sécurité intérieure (qui prévoit la saisie du matériel
utilisé) et de l'article R. 211-27 (qui prévoit la confiscation du matériel saisi) que, si le rassemblement
se tient sans déclaration préalable, les utilisateurs de matériel de sonorisation encourent les peines
prévues pour les organisateurs. »

Réponse de la Cour

6. Contrairement à ce que soutient le moyen, seuls les organisateurs encourent les peines prévues pour
l'infraction d'organisation sans déclaration préalable d'un rassemblement exclusivement festif à caractère
musical.

7. Ainsi, le moyen, qui ne critique pas les motifs par lesquels la cour d'appel a, pour relaxer les prévenus,
retenu que ceux-ci n'avaient pas la qualité d'organisateurs, doit être écarté.

8. Par ailleurs l'arrêt est régulier en la forme.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ; (…)

Document 5 – Cons. const. 4 mai 2012, n° 2012-240 QPC.

« Le Conseil constitutionnel a été saisi le 29 février 2012 par la Cour de cassation (chambre criminelle,
arrêt n° 1365 du 29 février 2012), dans les conditions prévues à l’article 61-1 de la Constitution, d’une
question prioritaire de constitutionnalité posée par M. Gérard D., relative à la conformité aux droits et
libertés que la Constitution garantit de l’article 222-33 du code pénal.
[…]
1. Considérant qu’aux termes de l’article 222-33 du code pénal « Le fait de harceler autrui dans le but
d’obtenir des faveurs de nature sexuelle est puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende
»;
2. Considérant que, selon le requérant, en punissant « le fait de harceler autrui dans le but d’obtenir des
faveurs de nature sexuelle » sans définir précisément les éléments constitutifs de ce délit, la disposition
contestée méconnaît le principe de légalité des délits et des peines ainsi que les principes de clarté et de
précision de la loi, de prévisibilité juridique et de sécurité juridique ;
3. Considérant que le législateur tient de l’article 34 de la Constitution, ainsi que du principe de légalité
des délits et des peines qui résulte de l’article 8 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen
de 1789, l’obligation de fixer lui-même le champ d’application de la loi pénale et de définir les crimes
et délits en termes suffisamment clairs et précis ;
4. Considérant que, dans sa rédaction résultant de la loi du 22 juillet 1992 susvisée, le harcèlement
sexuel, prévu et réprimé par l’article 222-33 du nouveau code pénal, était défini comme « Le fait de
harceler autrui en usant d’ordres, de menaces ou de contraintes, dans le but d’obtenir des faveurs de
nature sexuelle, par une personne abusant de l’autorité que lui confèrent ses fonctions » ; que l’article
11 de la loi du 17 juin 1998 susvisée a donné une nouvelle définition de ce délit en substituant aux mots
« en usant d’ordres, de menaces ou de contraintes », les mots : « en donnant des ordres, proférant des
menaces, imposant des contraintes ou exerçant des pressions graves » ; que l’article 179 de la loi du 17
janvier 2002 susvisée a de nouveau modifié la définition du délit de harcèlement sexuel en conférant à
l’article 222-33 du code pénal la rédaction contestée ;
5. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que l’article 222-33 du code pénal permet que le délit de
harcèlement sexuel soit punissable sans que les éléments constitutifs de l’infraction soient suffisamment

14
définis ; qu’ainsi, ces dispositions méconnaissent le principe de légalité des délits et des peines et doivent
être déclarées contraires à la Constitution ;
6. Considérant qu’aux termes du deuxième alinéa de l’article 62 de la Constitution : « Une disposition
déclarée inconstitutionnelle sur le fondement de l’article 61-1 est abrogée à compter de la publication
de la décision du Conseil constitutionnel ou d’une date ultérieure fixée par cette décision. Le Conseil
constitutionnel détermine les conditions et limites dans lesquelles les effets que la disposition a produits
sont susceptibles d’être remis en cause » ; que, si, en principe, la déclaration d’inconstitutionnalité doit
bénéficier à l’auteur de la question prioritaire de constitutionnalité et la disposition déclarée contraire à
la Constitution ne peut être appliquée dans les instances en cours à la date de la publication de la décision
du Conseil constitutionnel, les dispositions de l’article 62 de la Constitution réservent à ce dernier le
pouvoir tant de fixer la date de l’abrogation et reporter dans le temps ses effets que de prévoir la remise
en cause des effets que la disposition a produits avant l’intervention de cette déclaration ;
7. Considérant que l’abrogation de l’article 222-33 du code pénal prend effet à compter de la publication
de la présente décision ; qu’elle est applicable à toutes les affaires non jugées définitivement à cette
date,

DÉCIDE:
Article 1er.- L’article 222-33 du code pénal est contraire à la Constitution.
Article 2.- La déclaration d’inconstitutionnalité de l’article 1er prend effet à compter de la publication
de la présente décision dans les conditions fixées au considérant 7.
Article 3.- La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée
dans les conditions prévues à l’article 23-11 de l’ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée ».

Questions :
1. S’agit-il d’une décision du Conseil constitutionnel rendue dans le cadre d’un contrôle a priori
ou a posteriori ?
2. Quels sont les fondements du contrôle de constitutionnalité invoqués ? Rappelez le contenu de
ces textes. Ont-ils valeur constitutionnelle ?
3. Quels reproches sont adressés à l’incrimination de harcèlement sexuel ?
4. Quelle est la conséquence de cette décision pour « Gérard D… », qui a posé la question ?
5. Quelle est la nouvelle définition du harcèlement sexuel ?
6. La nouvelle définition du harcèlement a-t-elle permis de condamner « Gérard D… » pour les
faits qui avaient justifié qu’il soit jugé par le juge pénal ?

Document 6 – Cons. const. 4 avril 2019, n° 2019-780 DC.

« - Sur l’article 6 :

27. L’article 6 insère dans le code pénal un article 431-9-1 qui punit d’un an d’emprisonnement et de 15
000 euros d’amende le fait pour une personne, au sein ou aux abords immédiats d’une manifestation sur
la voie publique, au cours ou à l’issue de laquelle des troubles à l’ordre public sont commis ou risquent
d’être commis, de dissimuler volontairement tout ou partie de son visage sans motif légitime.

28. Les députés et les sénateurs requérants dénoncent l’imprécision des éléments constitutifs de cette
infraction, dont il résulterait une incompétence négative du législateur et une méconnaissance du
principe de légalité des délits et des peines. Ils critiquent, à ce titre, la difficulté d’appréciation de la
notion de dissimulation partielle du visage. Les députés requérants font par ailleurs valoir une
caractérisation insuffisante de l’élément intentionnel, puisqu’il n’est pas exigé que la personne qui
dissimule son visage participe effectivement aux troubles à l’ordre public dénoncés. En outre, selon eux,
l’infraction méconnaîtrait également le principe de proportionnalité des peines. Enfin, les sénateurs
requérants critiquent quant à eux l’imprécision de la circonstance de troubles à l’ordre public intervenant
« à l’issue » d’une manifestation ou de celle de risque de commission de troubles à l’ordre public.

15
29. En premier lieu, en retenant, comme élément constitutif de l’infraction, le fait de dissimuler
volontairement une partie de son visage, le législateur a visé la circonstance dans laquelle une personne
entend empêcher son identification, par l’occultation de certaines parties de son visage. Il ne s’est ainsi
pas fondé sur une notion imprécise.

30. En deuxième lieu, en visant les manifestations « au cours ou à l’issue » desquelles des troubles à
l’ordre public sont commis ou risquent d’être commis, le législateur a, d’une part, précisément défini la
période pendant laquelle l’existence de troubles ou d’un risque de troubles doit être appréciée, qui
commence dès le rassemblement des participants à la manifestation et se termine lorsqu’ils se sont tous
dispersés. D’autre part, en faisant référence au risque de commission de troubles à l’ordre public, le
législateur a entendu viser les situations dans lesquelles les risques de tels troubles sont manifestes.

31. En dernier lieu, en écartant du champ de la répression la dissimulation du visage qui obéit à un motif
légitime, le législateur a retenu une notion qui ne présente pas de caractère équivoque.

32. Il résulte de tout ce qui précède que l’incrimination contestée ne méconnaît pas le principe de légalité
des délits et des peines.

33. L’article 431-9-1 du code pénal, qui ne méconnaît pas non plus le droit d’expression collective des
idées et des opinions ou le principe de proportionnalité des peines ni aucune autre exigence
constitutionnelle, est conforme à la Constitution ».

II. LE PRINCIPE D’INTERPRETATION STRICTE DE LA LOI PENALE

Document n° 7 – Ass. Plén. 29 juin 2001, Bull. crim, n°165.

LA COUR : - Sur les deux moyens réunis du procureur général près la Cour d’appel de Metz et de Mme
X... : - Attendu que le 29 juillet 1995 un véhicule conduit par M. Calvente Y... a heurté celui conduit par
Mme X..., enceinte de six mois, qui a été blessée et a perdu des suites du choc le fœtus qu’elle portait ;
que l’arrêt attaqué (CA Metz, 3 sept. 1998) a notamment condamné M. Calvente Y... du chef de blessures
involontaires sur la personne de Mme X..., avec circonstance aggravante de conduite sous l’empire d’un
état alcoolique, mais l’a relaxé du chef d’atteinte involontaire à la vie de l’enfant à naître ;

Attendu qu’il est fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir ainsi statué, alors que, d’une part, l’article 221-6 du
code pénal réprimant le fait de causer la mort d’autrui n’exclut pas de son champ d’application l’enfant
à naître et viable, qu’en limitant la portée de ce texte à l’enfant dont le cœur battait à la naissance et qui
a respiré, la cour d’appel a ajouté une condition non prévue par la loi, et alors que, d’autre part, le fait
de provoquer involontairement la mort d’un enfant à naître constitue le délit d’homicide involontaire
dès lors que celui-ci était viable au moment des faits quand bien même il n’aurait pas respiré lorsqu’il a
été séparé de la mère, de sorte qu’auraient été violés les articles 111-3, 111-4 et 221-6 du code pénal et
593 du code de procédure pénale ;

Mais attendu que le principe de la légalité des délits et des peines, qui impose une interprétation stricte
de la loi pénale, s’oppose à ce que l’incrimination prévue par l’article 221-6 du code pénal, réprimant
l’homicide involontaire d’autrui, soit étendue au cas de l’enfant à naître dont le régime juridique relève
de textes particuliers sur l’embryon ou le fœtus ; d’où il suit que l’arrêt attaqué a fait une exacte
application des textes visés par le moyen ;

Par ces motifs, rejette le pourvoi (…).

16
Document 8 – Proposition de loi enregistrée à l’Assemblée nationale le 6 févr. 2022, relative à la
protection pénale de l’enfant à naître.

PRÉSENTÉE
par MM. Claude GAILLARD, René ANDRÉ, Jean-Marc CHAVANNE, Lucien DEGAUCHY, Xavier
DENIAU, Thierry MARIANI, Jean MARSAUDON, Patrice MARTIN-LALANDE, Didier QUENTIN,
Bernard SCHREINER,
Députés.
Droit pénal.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
Le 29 juin 2001, la Cour de cassation, réunie en assemblée plénière, conférant ainsi une portée
particulière à sa décision, énonce que « le principe de la légalité des délits et des peines, qui impose
une interprétation stricte de la loi pénale, s'oppose à ce que l'incrimination prévue à l'article 221-6
du code pénal, réprimant l'homicide involontaire d'autrui, soit étendue au cas de l'enfant à naître dont
le régime juridique relève de textes particuliers sur l'embryon ou le fœtus. »
Le but de la présente proposition est de combler ce vide juridique et d'offrir un statut pénal à
l'enfant à naître. Je précise donc bien que ce texte est à visée exclusivement pénale.
Les faits à l'origine de cette décision sont les suivants : en 1995, le véhicule d'une future maman,
enceinte de six mois, est percuté par celui d'un conducteur sous l'emprise d'un état alcoolique. La
jeune femme, blessée au cours de l'accident, accouche trois jours plus tard d'une petite fille décédée
des suites d'absence d'air dans les poumons et l'estomac et qui n'a pas survécu en raison de lésions
cérébrales. En 1997, le tribunal correctionnel condamne pénalement le conducteur pour homicide
involontaire sur enfant, estimant que le fœtus est un sujet de droit. La cour d'appel, un an plus tard,
infirme ce jugement en posant comme condition l'existence d'un enfant dont le cœur bat et qui
respire. Enfin, la Cour de cassation rejette le pourvoi interjeté contre cet arrêt en se fondant sur le
principe de la légalité des délits et des peines.
L'arrêt de la Cour de cassation, par sa brièveté, vise clairement à placer le législateur devant une
situation humainement choquante. La Cour elle-même, dans son rapport de 1999 (p. 443),
mentionnait déjà « l'absence dans notre droit d'une protection pénale spécifique de l'être humain
contre les atteintes involontaires à la vie avant la naissance ».
La question n'est pas nouvelle et a souvent été soulevée en relation avec l'IVG. Ainsi, aux termes de
ses conclusions sur le pourvoi en cassation contre l'arrêt rendu le 3 septembre 1988 par la cour
d'appel de Metz, M. Sainte-Rose, avocat général, observait que « certes, le libre choix de la femme
qui souhaite recourir à l'IVG doit être respecté. Mais tout aussi respectable est, naturellement, le
choix de la femme qui entend mener sa grossesse à terme. Sa liberté de procréer serait
paradoxalement moins bien protégée que celle d'avorter si, sous le couvert d'une interprétation étroite
de la loi pénale, on tolère qu'en toute impunité le premier venu puisse, fut-ce accidentellement, causer
la mort de son enfant. Le principe solennellement proclamé dans l'article 16 du code civil et repris
dans l'article L. 2211-1 du code la santé publique (la loi assure la primauté de la personne, interdit
toute atteinte à la dignité de celle-ci et garantit le respect de l'être humain dès le commencement de
sa vie) ne serait alors qu'une affirmation de façade, sans portée véritable. Nous sommes au cœur du
problème.
Un des mérites de l'arrêt du 29 juin 2001 est peut-être de mettre un terme à une jurisprudence riche
mais complexe et hésitante. De façon générale, d'ailleurs, le droit (civil ou pénal) reste peu unifié au
sujet des droits de l'enfant à naître.
Pourtant, nous touchons là un aspect sensible de notre humanité, qui nous confronte bien évidemment
aux questions éthiques. C'est en tenant compte de ces multiples éléments que nous proposons une
solution de principe : défendre pénalement la vie de l'enfant à naître in utero, la vie primant les
questions de personnalité juridique ou de viabilité.
M. Sargos, conseiller rapporteur (BICC 540, 31 juillet 2001), s'interroge dans ce sens : « N'est-ce
pas dès lors de la mission du seul législateur, dans le respect du principe de proportionnalité des
peines, d'ériger, s'il le souhaite, une incrimination spécifique à l'atteinte involontaire à la vie humaine
en formation ? ». Dans le même sens, le professeur Jean Pradel, de la faculté de droit de Poitiers (Le
Dalloz, 2001, n° 36, pp. 2907 à 2913), écarte les concepts de personnalité juridique et de viabilité

17
biologique et prône la défense de la vie ab initio au moyen d'une incrimination autonome. Nous nous
inspirons particulièrement de ses commentaires.
La présente proposition vise donc à créer une incrimination autonome protégeant la vie de
l'enfant à naître in utero : il s'agit d'une incrimination parallèle à celle d'homicide involontaire,
dotée de la même cause d'aggravation (mise en danger délibérée). Dans l'exemple cité au début de
ce texte, cette notion permettrait de prendre en compte l'ivresse au volant, élément significativement
aggravant de l'infraction.
Précision importante : il est exclusivement question ici d'interruption involontaire de grossesse,
totalement distincte de « l'interruption volontaire de grossesse », même illégale, régie par le livre II
du code de la santé publique (nouvelle partie législative). Cette précision permet d'éviter que cette
réforme, si elle était adoptée, ne se retourne avec violence contre celles - les mettant à la merci d'un
tiers requérant - qui auraient dépassé le délai légal de douze semaines de grossesse et se rendraient à
l'étranger pour tenter une interruption hors délai. Notre propos n'est pas de juger la détresse.
Une autre précision est que ce texte ne comporte aucun procès d'intention à l'égard du corps médical
et n'a pas pour objet d'interférer avec les questions de responsabilité médicale. Il crée une sanction
de la société et n'aborde pas les questions d'indemnisation. De même, il laisse ouvert le débat sur les
sujets essentiels abordés par les lois sur la bioéthique. Il est volontairement neutre de ce point de
vue.
Son but est de mettre fin, de façon aussi précise que possible, à un vide juridique qui nie totalement
une dimension affective et éthique dont est porteur le futur enfant. Il est incontestable qu'on se sent
parent dès la conception. La science elle-même appréhende parfaitement cet être conçu qui est aussi
un patient aux yeux de la médecine.
Ce texte ne porte donc pas de jugement et ne comporte aucune arrière-pensée « philosophique ». Il
veut simplement défendre l'essentiel sur lequel tout le monde s'accorde : la vie.

PROPOSITION DE LOI
Article unique
Sont insérés, après l'article 223-10 du code pénal, une section 5 bis et un article 223-11 ainsi rédigés :

« Section 5 bis
«De la protection pénale de l'enfant à naître
contre les atteintes involontaires à la vie

« Art. 223-11. - Le fait de causer, dans les conditions et selon les distinctions prévues à l'article 121-
3, par maladresse, imprudence, inattention, négligence ou manquement à une obligation de sécurité
ou de prudence imposée par la loi ou le règlement, la mort d'un enfant à naître constitue une
interruption involontaire de grossesse punie de trois ans d'emprisonnement et de 300000 F (45000€)
d'amende.
« En cas de violation manifestement délibérée d'une obligation particulière de sécurité ou de
prudence imposée par la loi ou le règlement, les peines encourues sont portées à cinq ans
d'emprisonnement et à 500000 F (75 000€) d'amende ».

18
Séance 2 – La loi pénale (2e partie)
Application dans le temps – Application dans l’espace

Semaine du 16 octobre au 21 octobre 2023.

Listes des documents :


Doc. n° 1 : Crim. 16 nov. 2016, n° 16-82.377.
Doc. n° 2 : Crim. 9 nov. 2021, n° 20-87.078.
Doc. n° 3 : Crim. 4 avr. 2023, n° 22-81.195.
Doc. n° 4 : Crim. 16 nov. 2016, n° 14-86.980, publié au bull.

Exercices :
- Rédigez un commentaire d’arrêt de la décision de la Chambre criminelle du 9 nov. 2021
(introduction et plan détaillé).
- Relativement à l’arrêt du 16 nov. 2016 (doc. 4), exposez en cinq lignes les arguments
d’interprétation en faveur de la compétence française sur le fondement de l’article 113-3 du
code pénal et ceux qui lui sont hostiles.
- Résolvez les cas pratiques relatifs à l’application de la loi pénale dans l’espace.

I. APPLICATION DE LA LOI PENALE DANS LE TEMPS

Document n° 1 - Crim. 16 nov. 2016, n° 16-82.377, publié au bulletin.

(…) Mais sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation de l’article 112-1 du code pénal ;
Vu ledit article, ensemble l’article 222-33, I, du code pénal ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation pris des articles 61-1 de la Constitution et 23-5
de la loi organique n° 2009-1523 du 10 décembre 2009 ;
Attendu que le demandeur a posé à l’occasion de son pourvoi la question prioritaire de constitutionnalité,
portant sur l’article 222-33 du code pénal, dont il avait saisi le tribunal correctionnel ; que, par arrêt du
25 mai 2016, la Cour de cassation a dit n’y avoir lieu de renvoyer cette question au Conseil
constitutionnel ; qu’il s’ensuit que le moyen est sans objet ;
Attendu qu’il se déduit du second de ces textes que chacun des propos ou comportements à connotation
sexuelle, imposés de façon répétée à une personne déterminée, retenus pour caractériser le délit de
harcèlement sexuel, doit soit porter atteinte à sa dignité en raison de son caractère dégradant ou
humiliant, soit créer à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante ;
Attendu qu’aux termes du premier de ces textes, sont seuls punissables les faits constitutifs d’une
infraction à la date à laquelle ils ont été commis ;
Attendu qu’il résulte de l’arrêt attaqué et des pièces de procédure que M. X... a été poursuivi devant le
tribunal correctionnel du chef de harcèlement sexuel à l’encontre de Mmes Y..., Z... et A..., ses collègues
de travail ; que le tribunal a déclaré M. X... coupable des faits qui lui étaient reprochés ; que le prévenu
a relevé appel de cette décision ;
Attendu que, pour confirmer le jugement, l’arrêt attaqué relève que M. X... s’est quotidiennement
adressé à chacune de ses collègues de travail en employant un vocabulaire et des gestes relevant de
l’intimité, en ignorant leurs demandes pour qu’il change de comportement ; qu’à l’égard de Mme Y..., il
a employé à plusieurs reprises une expression suggérant son désir d’avoir avec elle une relation sexuelle
et lui a déclaré que si elle voulait voir son contrat de travail renouvelé, il fallait qu’il y ait des rapports
de cette nature entre eux ; qu’il l’a également bloquée contre un mur en lui demandant un baiser ; qu’il
a proposé à Mme Z... de descendre à la cave pour avoir un rapport sexuel avec elle et lui a déclaré qu’elle
lui plaisait et qu’il pourrait lui faire découvrir l’amour ; qu’il a eu envers elle, de façon répétée et

19
insistante, des regards et une attitude destinés à lui faire comprendre ses intentions sexuelles ; qu’il a
déclaré à Mme A... qu’elle avait obtenu son changement de poste grâce à lui et qu’elle lui devait un acte
sexuel ; qu’il lui a demandé de coucher avec lui et a eu des gestes lui rappelant sa volonté d’avoir des
relations sexuelles avec elle ; que les juges retiennent que ces propos ou comportements revêtent une
connotation sexuelle ; que la pression exercée sur Mme Y... pour obtenir des faveurs sexuelles était de
nature à l’offenser ; que le geste de la bloquer contre un mur l’avait placée dans une situation gênante et
intimidante ; que la proposition d’avoir un rapport sexuel à la cave pouvait être ressentie par Mme Z...
comme humiliante ; que la rétribution de nature sexuelle réclamée à Mme A... était dégradante ;
Mais attendu qu’en prononçant ainsi, alors que l’article 222-33 du code pénal, dans sa rédaction issue
de la loi n° 2002-73 du 17 janvier 2002, a été abrogé à compter du 5 mai 2012 et que deux des victimes
ont été employées du mois de mars 2012 au mois d’octobre 2013, soit pour partie avant l’entrée en
vigueur de la loi n° 2012-954 du 6 août 2012 incriminant à nouveau le harcèlement sexuel, la cour
d’appel, qui a retenu à l’encontre du prévenu des propos ou comportements à connotation sexuelle sans
tous les dater, n’a pas mis la Cour de cassation en mesure de vérifier que ceux qu’elle a pris en compte
ont été commis à partir du 8 août 2012 ;
D’où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;
Par ces motifs, et sans qu’il soit besoin d’examiner le deuxième moyen de cassation proposé :

CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l’arrêt susvisé de la cour d’appel de Reims en date du
10 février 2016, et pour qu’il soit à nouveau jugé, conformément à la loi,
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d’appel de Nancy (…).

Document n° 2 - Crim. 9 nov. 2021, n° 20-87.078.

Le procureur général près la cour d'appel de Metz a formé un pourvoi contre l'arrêt de ladite cour d'appel,
chambre correctionnelle, en date du 22 octobre 2020, qui a dit que la peine prononcée contre M. [M]
[X], pour des faits de recel d'apologie d'actes de terrorisme, doit cesser de recevoir exécution.

Des mémoires en demande et en défense ont été produits.

Sur le rapport de M. Barbier, conseiller référendaire, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan,
avocat de M. [M] [X], et les conclusions de M. Lemoine, avocat général, après débats en l'audience
publique du 5 octobre 2021 où étaient présents M. Soulard, président, M. Barbier, conseiller rapporteur,
M. Bonnal, conseiller de la chambre, M. Lemoine, avocat général, et M. Maréville, greffier de chambre,

la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée, en application de l'article 567-1-1 du code de


procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a
rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.

2. Par jugement du 6 juillet 2018, le tribunal correctionnel de Metz a déclaré M. [X] coupable de recel
d'apologie d'actes de terrorisme sur le fondement des articles 321-1 et 421-2-5 du code pénal.

3. Par arrêt du 21 novembre 2018, la cour d'appel de Metz a confirmé cette décision sur le fond et a
condamné le prévenu à deux ans d'emprisonnement, dont un an avec sursis et mise à l'épreuve.

4. La Cour de cassation a rejeté le pourvoi contre cet arrêt, jugeant qu'entre dans les prévisions des
articles 321-1 et 421-2-5 du code pénal le fait de détenir, à la suite d'un téléchargement effectué en toute
connaissance de cause, des fichiers caractérisant l'apologie d'actes de terrorisme (Crim., 7 janvier 2020,
pourvoi n° 19-80.136).

20
5. Par arrêt du 24 mars 2020, concernant une affaire distincte, la Cour de cassation a transmis au Conseil
constitutionnel une question prioritaire portant sur la conformité à la Constitution du délit précité (Crim.,
24 mars 2020, pourvoi n° 19-86.706).

6. Par décision du 19 juin 2020 (n° 2020-845 QPC), le Conseil constitutionnel a jugé que le délit de
recel d'apologie d'actes de terrorisme porte à la liberté d'expression et de communication une atteinte
qui n'est pas nécessaire, adaptée et proportionnée, de sorte que les mots « ou de faire publiquement
l'apologie de ces actes » figurant au premier alinéa de l'article 421-2-5 du code pénal ne sauraient, sans
méconnaître cette liberté, être interprétés comme réprimant un tel délit.

7. Le 21 septembre 2020, M. [X] a saisi la cour d'appel d'une requête en incident d'exécution, sur le
fondement de l'article 710 du code de procédure pénale, faisant valoir que la peine à laquelle il a été
condamné était illégale et qu'en tout cas elle devait cesser de recevoir exécution.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

8. Le moyen est pris de la violation des articles 112-4 du code pénal et 710 du code de procédure pénale.

9. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a appliqué l'article 112-4 du code pénal à la situation
pénale de M. [X], alors :

« 1°/ que la loi pénale étant d'interprétation stricte, la cour d'appel a procédé par une analogie prohibée
au regard du principe fondamental d'interprétation stricte de la loi pénale, d'autant que le Conseil
constitutionnel n'a assorti sa réserve prohibant le recel du délit d'apologie d'actes de terrorisme d'aucune
mention expresse tendant à remettre en cause, de quelque manière que soit, les effets passés des
condamnations prononcées du chef de cette incrimination ;

2°/ que la requête déposée sur le fondement de l'article 710 du code de procédure pénale suppose qu'une
difficulté d'exécution relative à la peine prononcée par la juridiction de jugement existe réellement, ce
qui doit exclure tout moyen tendant à remettre en cause le fond de la condamnation passée en force de
chose jugée. »

Réponse de la Cour

10. Pour dire que la peine prononcée contre M. [X], pour des faits de recel d'apologie d'actes de
terrorisme, doit cesser de recevoir exécution, l'arrêt attaqué relève, notamment, que les dispositions de
l'article 112-4 sont de portée générale en ce qu'elles sont la mise en œuvre d'un principe du droit pénal
relatif à l'application de la loi dans le temps, à savoir l'application immédiate de la loi pénale plus douce
aux situations en cours.

11. Les juges ajoutent que ces dispositions reposent également sur un principe plus général du droit, à
savoir l'égalité de tous devant la loi, en ce que l'article 112-4 a pour effet d'assurer l'égalité entre le
justiciable qui ne peut plus être poursuivi en raison de la suppression de l'incrimination, même pour des
faits commis sous l'empire de la loi ancienne, et celui qui a été définitivement condamné en raison d'une
incrimination qui a été supprimée avant l'exécution de sa peine, celle-ci n'étant que le prolongement et
l'aboutissement des poursuites engagées à son encontre.

12. Ils concluent que la suppression d'une incrimination, que ce soit par l'effet de la loi nouvelle ou d'une
décision du Conseil constitutionnel déclarant l'incrimination contraire à la Constitution dans le corps de
son dispositif ou dans une réserve d'interprétation, s'oppose à la mise à exécution de cette peine.

13. En prononçant par ces motifs, la cour d'appel a justifié sa décision sans encourir les griefs allégués.

21
14. En effet, les décisions du Conseil constitutionnel s'imposant aux pouvoirs publics et à toutes les
autorités administratives et juridictionnelles en vertu de l'article 62 de la Constitution, les déclarations
de non-conformité ou les réserves d'interprétation qu'elles contiennent et qui ont pour effet qu'une
infraction cesse, dans les délais, conditions et limites qu'elles fixent, d'être incriminée doivent être
regardées comme des lois pour l'application de l'article 112-4, alinéa 2, du code pénal.

15. En conséquence, le moyen doit être écarté.

16. Par ailleurs, l'arrêt est régulier en la forme.


PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi (…)

II. L’APPLICATION DE LA LOI PENALE DANS L’ESPACE.

Document n° 3 - Crim. 4 avr. 2023, n° 22-81.195, inédit.

M. [H] [V] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel de Versailles, 9e chambre, en date du 28
janvier 2022, qui, pour homicides involontaires, pratiques commerciales trompeuses et contraventions
de blessures involontaires, l'a condamné à un an d'emprisonnement avec sursis, 1 500 euros d'amende
et a prononcé sur les intérêts civils.

(…) Faits et procédure

1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.

2. La société [2] (la société), dont M. [H] [V] est le président, organise, pour des adolescents, des séjours
touristiques itinérants aux Etats-Unis.

3. Lors de l'un de ces séjours en août 2009, une animatrice, employée de la société, a perdu le contrôle
d'un véhicule transportant plusieurs adolescents. L'accident a causé la mort de deux passagères et
occasionné des blessures à quatre autres.

4. M. [V] et la société ont été renvoyés devant le tribunal correctionnel des chefs d'homicides
involontaires, pratiques commerciales trompeuses et blessures involontaires ayant entraîné une
incapacité inférieure à trois mois.

5. Le tribunal a notamment déclaré M. [V] coupable des infractions ci-dessus mentionnées, l'a condamné
à un an d'emprisonnement avec sursis et à 1 500 euros d'amende et a prononcé sur les intérêts civils.

6. M. [V], des parties civiles et le ministère public ont relevé appel de cette décision.

(…) Enoncé des moyens

8. Le premier moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a rejeté l'exception de nullité de l'ordonnance de
renvoi devant le tribunal correctionnel fondée sur l'incompétence des juridictions répressives françaises,
alors :

« 1°/ que les auteurs ou complices d'infractions commises hors du territoire de la République ne peuvent
être poursuivis et jugés par les juridictions françaises si aucune convention internationale ne leur donne
compétence et si la poursuite exercée à la requête du ministère public n'a pas été précédée d'une plainte
de la victime ou de ses ayants droit, ou d'une dénonciation officielle de l'autorité du pays où le fait a été
commis ; qu'une infraction est commise hors du territoire de la République lorsqu'aucun de ses faits

22
constitutifs n'a eu lieu sur ce territoire ; qu'en considérant que les juridictions françaises auraient été
compétentes pour connaître de l'ensemble des faits reprochés en raison du lieu de situation du siège
social de la société [2] situé à [Adresse 1], quand il était constant et acquis au débat que les faits
reprochés à M. [V] et pour lesquels il était poursuivi au titre des infractions d'homicide et blessures
involontaires, de ne pas avoir fait respecter le principe du repos hebdomadaire, d'avoir permis le
recrutement de Mme [D] et de ne pas avoir exigé la rédaction d'un projet pédagogique et la situation
qu'il lui était reproché d'avoir créée ou d'avoir contribué à créer se sont matérialisés et étaient localisés
aux Etats-Unis, la cour d'appel a violé les articles 689 du code de procédure pénale, 113-2, 113-6, 113-
7 et 113-8 du code pénal, ensemble l'article 591 du code de procédure pénale ;

2°/ que les juridictions répressives françaises sont compétentes pour connaître d'infractions commises à
l'étranger qui entretiennent avec une infraction commise en France et relevant de la compétence des
juridictions répressives françaises, un lien d'indivisibilité résultant de ce que les faits poursuivis sont
rattachés entre eux par un lien tel que l'existence des uns ne pourrait se comprendre sans l'existence des
autres ; qu'en considérant que les faits reprochés aux prévenus formeraient un tout indivisible de sorte
que les juridictions françaises, en raison du lieu de situation du siège social de la société [2], seraient
compétentes pour connaître de l'ensemble des faits qui leur sont reprochés dont ceux commis en partie
à l'étranger, sans établir que l'existence des infractions d'homicide et de blessures involontaires, d'une
part, ne pourraient se comprendre sans l'existence de l'infraction de pratiques commerciales trompeuses,
d'autre part, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision et a violé les articles 689 du code de procédure
pénale, 113-2, 113-6, 113-7 et 113-8 du code pénal, ensemble l'article 593 du code de procédure
pénale. » (…)

Réponse de la Cour

10. Les moyens sont réunis

11. Pour écarter l'exception d'incompétence des juridictions françaises et déclarer le prévenu coupable
d'homicides et blessures involontaires, l'arrêt attaqué énonce que les contrats d'engagement éducatif ne
comportaient pas la mention des jours de repos et que le prévenu a reconnu que ceux de deux animateurs
du séjour ne les mentionnaient pas, alors que, gérant depuis plusieurs années de sociétés chargées
d'organiser des séjours pour enfants, M [V] ne pouvait ignorer l'existence de cette obligation légale en
vigueur depuis 2006.

12. Les juges relèvent que, les 3 et 4 août 2009, M. [V], de permanence pour gérer les appels importants
et les prises de décisions compliquées, qui aurait dû être avisé du courriel de démission de la directrice
du séjour initialement embauchée, ce qui nécessitait un suivi attentif de son organisation, aucun des
salariés de l'équipe ne disposant d'une délégation de pouvoirs, était injoignable en raison de sa
participation à un trek au Kenya.

13. Ils retiennent qu'en ne donnant pas à la directrice du séjour les moyens nécessaires pour qu'elle puisse
rédiger et transmettre un projet pédagogique, ce qui l'a empêchée de s'assurer de la faisabilité des trajets,
des conditions de logement et de la répartition du temps de repos entre les animateurs, le prévenu a
incontestablement commis une faute dans l'organisation du voyage, ces faits étant réputés commis au
siège de la société, situé sur le territoire français.
(…)
17. En l'état de ces seules énonciations, desquelles il résulte que le prévenu a commis, au siège de la
société situé en France, une faute caractérisée, exposant autrui à un risque d'une particulière gravité qu'il
ne pouvait ignorer, la cour d'appel n'a méconnu aucun des textes visés au moyen.

18. Dès lors, le moyen doit être écarté. (…)

PAR CES MOTIFS, la Cour :


REJETTE le pourvoi ; (…)

23
Document n° 4 - Crim. 16 nov. 2016, n° 14-86.980, publié au bull.

(…)
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que le 4 juin 2010, plusieurs militants
du mouvement Greenpeace ont conduit une opération en mer Méditerranée afin de manifester leur
opposition à la pêche au thon rouge ; qu'ils se sont approchés, avec des embarcations battant pavillon
néerlandais, de trois thoniers battant pavillon français qui pratiquaient cette pêche dans les eaux
internationales ; qu'ils ont placé des sacs de sable sur les bords d'un filet de très grande taille, amarré à
l'un des thoniers, flottant sur les eaux, appelé une "senne", afin de déséquilibrer le filet et de libérer les
poissons captifs ; que des heurts ont éclaté entre les militants de Greenpeace et l'équipage des thoniers ;
que le calme est revenu avec l'intervention d'un bâtiment de la marine de guerre français ; que des dégâts
ont été constatés sur la senne ;

Attendu qu'à l'issue de l'enquête, la société "Stichting Greenpeace Council", personne morale de droit
néerlandais ayant son siège aux Pays-Bas, ainsi que Y... et M. X..., organisateurs et animateurs de
l'opération, l'un et l'autre ressortissants britanniques, ont été cités devant le tribunal correctionnel de
Montpellier du chef de dégradation ou détérioration aggravée du bien d'autrui ; que le tribunal a retenu
leur culpabilité, prononcé des peines et statué sur les intérêts civils; que les prévenus, le ministère public
et les parties civiles ont interjeté appel du jugement ;

En cet état :

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 92 et 97 de la Convention de Montego
Bay, de l'article 1er de la Convention de Bruxelles du 10 mai 1952 relative à la compétence pénale en
matière d'abordage et autres événements de navigation, 113-2, 113-3 et 113-12 du code pénal, 689, 591
et 593 du code de procédure pénale ;

"en ce que la cour d'appel a confirmé le rejet de l'exception d'incompétence ;

"aux motifs propres que la cour, comme les premiers juges, se référant aux articles 689, 689-5 et 113 du
code de procédure pénale constate que les infractions poursuivies, si elles ont été commises en haute
mer, l'ont été à l'encontre de navires français ayant à bord des équipages français dont les auteurs
présumés n'ont pas été jugés définitivement par une juridiction étrangère et que les poursuites du
ministère public ont été précédées de plaintes ; qu'ainsi, la compétence des juridictions françaises ne
peut être contestée et la cour confirme le rejet de l'exception d'incompétence soulevée ;

"et aux motifs adoptés que, selon l'article 689 du code de procédure pénale, les auteurs ou complices
d'infractions commises hors du territoire de la République peuvent être poursuivis et jugés par les
juridictions françaises soit lorsque, conformément aux dispositions du livre 1er du code pénal ou d'un
autre texte législatif, la loi française est applicable, soit lorsqu'une Convention internationale donne
compétence aux juridictions françaises pour en connaître ; qu'aux termes de l'article 113-3 du code pénal,
lequel figure dans la section relative aux infractions commises ou réputées commises sur le territoire de
la République, la loi française est applicable aux infractions commises à bord des navires battant pavillon
français ou à l'encontre de tels navires ou des personnes se trouvant à bord en quelque lieu qu'ils se
trouvent ; que ni la Convention sur la haute mer conclue à Genève le 29 avril 1958, ni la Convention
des Nations Unies sur le droit de la mer du 10 décembre 1982, ni, a fortiori, la Convention de Bruxelles
du 10 mai 1952 relative à la seule compétence pénale en matière d'abordage, inapplicable au cas
d'espèce, ne sauraient s'interpréter comme étant de nature à remettre en cause les règles relatives à la
compétence internationale des lois et juridictions pénales françaises ; que, de surcroît, les victimes de
l'infraction ont la nationalité française, que les auteurs de l'infraction n'ont pas été jugés définitivement
à l'étranger et que la poursuite du ministère public a été précédée d'une plainte de la victime ; qu'il en
résulte que les faits poursuivis, commis en mer à l'encontre de navires battant pavillon français, relèvent
de la compétence du tribunal de Montpellier qui doit lui appliquer sa propre loi pénale ;

"1°) alors qu'il résulte des articles 92 et 97 de la Convention de Montego Bay et 1er de la Convention

24
de Bruxelles du 10 mai 1952, qu'en cas d'abordage ou de tout autre événement de navigation concernant
un navire de mer de nature à engager la responsabilité pénale du capitaine ou de toute autre personne au
service du navire, les poursuites ne peuvent être intentées, que devant les autorités judiciaires de l'Etat
dont le navire portait le pavillon ; qu'en rejetant l'exception d'incompétence des juridictions françaises,
lorsque les infractions poursuivies, commises en haute mer, relèvent d'un événement de navigation au
sens de ces textes dont l'application excluait la compétence des juridictions françaises, la loi pénale
française n'étant, en application de l'article 113-12 du code pénal, applicable aux infractions commises
au-delà de la mer territoriale que si les conventions internationales et la loi le prévoient, la cour d'appel
a méconnu les règles gouvernant l'application de la loi pénale dans l'espace ;

"2°) alors qu'en rejetant, au visa de l'article 113-3 du code pénal, l'exception d'incompétence, aux motifs
inopérants que les infractions ont été commises à l'encontre de navires français, lorsque ce texte réserve
la compétence des juridictions nationales aux infractions commises à bord de navires battant un pavillon
français, et que les infractions poursuivies, qui n'ont pas été commises sur les navires, mais en haute
mer, relèvent d'un événement de navigation au sens de la Convention de Bruxelles et de la Convention
de Montego Bay, la cour d'appel a de plus fort méconnu les règles gouvernant l'application de la loi
pénale dans l'espace ;

"3°) alors qu'en relevant "de surcroît, que les victimes de l'infraction ont la nationalité française, que les
auteurs de l'infraction n'ont pas été jugés définitivement à l'étranger et que la poursuite du ministère
public a été précédée d'une plainte de la victime", lorsque les faits poursuivis, commis en haute mer,
relèvent d'un événement de navigation au sens de la Convention de Bruxelles et de la Convention de
Montego Bay qui excluaient la compétence des juridictions françaises, la cour d'appel a une dernière
fois méconnu les règles gouvernant l'application de la loi pénale dans l'espace" ;

Attendu que pour rejeter l'exception d'incompétence des juridictions pénales françaises, l'arrêt prononce
par les motifs repris au moyen ;

Attendu que, en premier lieu, c'est à bon droit que la cour d'appel a écarté l'application des articles 92 et
97 de la Convention de Montego Bay du 10 décembre 1982 sur le droit de la mer, qui attribuent, en cas
d'abordage ou de tout autre incident de navigation maritime en haute mer susceptible d'engager la
responsabilité pénale d'un capitaine ou d'un membre de son équipage, compétence aux juridictions
pénales soit de l'Etat du pavillon, soit de l'Etat dont l'intéressé a la nationalité, dès lors que l'abordage,
au sens de cette Convention, s'entend d'une collision accidentelle entre deux navires, et que les
dégradations volontaires n'entrent pas dans la définition des incidents de navigation ; qu'elle a, par
ailleurs, écarté à juste titre l'application de la Convention de Bruxelles du 10 mai 1952 qui fixe les règles
de compétence juridictionnelle concernant la saisie conservatoire des navires de mer ;

Attendu que, en second lieu, la cour d'appel a fait une exacte application de l'article 113-3 du code pénal,
aux termes duquel la loi française est applicable aux infractions commises à l'encontre des navires
battant pavillon français en quelque lieu qu'ils se trouvent, dès lors que la senne, qui a fait l'objet de
dégradations résultant d'une action volontaire des militants de Greenpeace, constitue l'accessoire et le
prolongement du navire auquel elle est rattachée, et est soumise au même statut juridique que celui-ci ;

D'où il suit que le moyen doit être écarté ; (…)

• Cas pratiques

Pour chacun des cas suivants, vous répondrez à la question suivante : la loi pénale française est-elle
applicable aux faits ?

Cas pratique 1 : Une célèbre vedette de téléréalité et femme d’affaire de nationalité nord-américaine
s’est fait dérober ses bijoux, des diamants d’une valeur de 9 millions d’euros, alors qu’elle séjournait

25
dans un palace parisien. Les voleurs, de nationalité suisse, seront arrêtés alors qu’ils s’apprêtaient à
vendre le butin.

Cas pratique 2 : Alors qu’un ferry italien s’apprête à rentrer dans le port de Toulon, une violente dispute
éclate entre deux ressortissants italiens au cours de laquelle l’un des deux jette volontairement l’autre
par-dessus bord depuis le pont supérieur. Il échappera à la noyade de justesse et restera quelques temps
dans le coma avant de se réveiller.

Cas pratique 3 : Gilbert, homme d’affaire français et dirigeant d’une société à la renommée
internationale, profite de ses déplacements en Europe de l’est pour avoir des relations sexuelles contre
rémunération avec des mineures ressortissantes de cette région.

Cas pratique 4 : Deux riches femmes d’affaire chinoises ont consulté depuis Lyon, à l’occasion d’un
séjour touristique en France, un site internet qui les a horrifiées : le dirigeant, de nationalité chinoise
comme elles, d’une entreprise concurrente située en Corée, affirme, injustement et sans preuve, qu’elles
ont fait fortune en exploitant illégalement des travailleurs.

26
SEANCE 3 – L’ELEMENT MATERIEL

Semaine du 30 octobre au 4 novembre 2023.

Liste des documents :


Doc. n° 1 : Étude d’infractions.
Doc. n° 2 : Crim. 16 mai 2018, n° 17-81.686.
Doc. n° 3 : Crim. 13 janv. 2021, n° 20-85.791.
Doc. n° 4 : Crim. 30 juin 2021, n° 20-84.946.
Doc. n° 5 : Crim. 27 mars 2019, n° 18-82.484

Document 1 - Étude des infractions.

Pour chaque infraction dont le texte d’incrimination vous est fourni, précisez la nature de l’infraction
(commission/omission ; simple/complexe ; instantanée/continue ; formelle/matérielle…), le moment de
sa consommation, et le point de départ du délai de prescription de l’action publique. Précisez également
la nature de l’infraction au sein de la classification tripartite (crime, délit ou contravention).

Article 221-1 c. pén. : « Le fait de donner volontairement la mort à autrui constitue un meurtre. Il est
puni de trente ans de réclusion criminelle ».

Article 221-5 c. pén. : « Le fait d’attenter à la vie d’autrui par l’emploi ou l’administration de substances
de nature à entraîner la mort constitue un empoisonnement.
L’empoisonnement est puni de trente ans de réclusion criminelle.
Il est puni de la réclusion criminelle à perpétuité lorsqu’il est commis dans l’une des circonstances
prévues aux articles 221-2, 221-3 et 221-4. (…) »

Article 223-6 c. pén. al. 2 : Est puni de cinq ans d’emprisonnement et de 75 000 euros d’amende
« quiconque s’abstient volontairement de porter à une personne en péril l’assistance que, sans risque
pour lui ou pour les tiers, il pouvait lui prêter soit par son action personnelle, soit en provoquant un
secours ».

Article 321-1 c. pén. : « Le recel est le fait de dissimuler, de détenir ou de transmettre une chose, ou de
faire office d’intermédiaire afin de la transmettre, en sachant que cette chose provient d’un crime ou
d’un délit.
Constitue également un recel le fait, en connaissance de cause, de bénéficier, par tout moyen, du produit
d’un crime ou d’un délit.
Le recel est puni de cinq ans d’emprisonnement et de 375 000 euros d’amende ».

Article 222-33-2 c. pén. : « Le fait de harceler autrui par des propos ou comportements répétés ayant
pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses
droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir
professionnel, est puni de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 € d’amende ».

Document n° 2 - Crim. 16 mai 2018, n° 17-81.686, publié au Bulletin.

Vu les articles 121-4, 121-5 et 313-1 du code pénal ;

Attendu qu’il résulte de la combinaison de ces textes que la tentative d’escroquerie, manifestée par un
commencement d’exécution, suspendue ou n’ayant manqué son effet qu’en raison de circonstances
indépendantes de la volonté de son auteur, est le fait de tenter, soit par l’usage d’un faux nom ou d’une

27
fausse qualité, soit par l’abus d’une qualité vraie, soit par l’emploi de manœuvres frauduleuses, de
tromper une personne en vue de la déterminer ainsi, à son préjudice ou à celui d’un tiers, à remettre des
fonds, des valeurs ou un bien ou à fournir un service ou, encore, à consentir à un acte opérant obligation
ou décharge ;

Attendu que, pour déclarer le prévenu coupable de tentative d’escroquerie, l’arrêt relève qu’en se
procurant neuf faux chèques et en insérant chacun de ceux-ci dans une enveloppe "lettre suivie" de la
poste portant une adresse à lui remise par un mystérieux donneur d’ordre et en se rendant à [...], loin de
son domicile, pour y poster lesdites enveloppes, M. X... a bien commis le commencement d’exécution
d’une tentative d’escroquerie, lequel n’a manqué son effet que par suite de circonstances indépendantes
de sa volonté, à savoir, la fouille de son véhicule par les douaniers ;

Mais attendu qu’en statuant ainsi, par des motifs qui ne caractérisent nul commencement d’exécution
mais, tout au plus et le cas échéant, des actes préparatoires n’ayant pas pour conséquence directe et
immédiate la consommation d’escroqueries, alors que les faux chèques étaient destinés par le prévenu
non pas directement à des victimes contre remise recherchée de fonds ou de valeurs ou obtention d’un
service ou d’un acte opérant obligation ou décharge mais à des malfaiteurs censés s’en servir comme
moyen pour tirer profit de transactions frauduleuses, la cour d’appel, qui n’a pas recherché si les faits
pouvaient être qualifiés notamment de tentative d’usage, en connaissance de cause, de chèques
contrefaisant, délit visé par le 2 de l’article L163-3 du code monétaire et financier, a méconnu les textes
visés au moyen ;

Par ces motifs et sans qu’il y ait lieu d’examiner l’autre moyen proposé :

CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l’arrêt susvisé de la cour d’appel de Reims, en date du
3 février 2017, et pour qu’il soit à nouveau jugé, conformément à la loi,
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d’appel de Reims, autrement composée, à ce désignée
par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

Document n°3 - Crim. 13 janv. 2021, n° 20-85.791.

Faits et procédure
1. Il résulte de l’arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit.
2. Le 8 décembre 2017, aux alentours de 18 heures 50, Mme W... Q... s’est présentée au commissariat
de Villeparisis pour avertir que son mari, M. M... Q..., avait quitté le domicile afin de se rendre chez
Mme D... B..., avec laquelle elle était associée dans l’exploitation d’une pharmacie, et rencontrait des
difficultés relationnelles et financières.
3. Elle a précisé que son époux n’était pas dans son état normal, qu’elle ne l’avait jamais vu dans un tel
état de fureur et qu’il avait consommé de l’alcool.
4. Les policiers se sont transportés au domicile de Mme B... qui était absente. Ils y ont trouvé M. Q...,
assis au volant de son véhicule. Ils l’ont invité à en descendre. M. Q... les a alors menacés de dégoupiller
une grenade et de la leur jeter.
5. Après l’interpellation, les enquêteurs ont constaté la présence d’une arme de poing de type Manurhin
32 match, approvisionnée de six cartouches létales, dans le véhicule, entre les deux sièges avant. Ils
n’ont pas découvert de grenade.
6. Dans le véhicule de police, M. Q... a déclaré spontanément qu’il était venu pour tuer Mme B....
7. Son taux d’alcool était de 0,30 mg/litre.
8. M. Q... a été mis en examen, notamment, du chef de tentative de meurtre. Il a déclaré qu’il aurait
peut-être sorti son arme mais ne comptait pas l’utiliser. Il a été placé sous contrôle judiciaire.

28
9. Par ordonnance en date du 20 février 2020, le magistrat instructeur a dit n’y avoir lieu à suivre contre
M. Q... du chef de tentative de meurtre et a ordonné son renvoi devant le tribunal correctionnel pour les
délits connexes.
10. La partie civile et le ministère public ont formé appel de cette décision.
Moyens
Examen des moyens
Sur le premier et le second moyens
Enoncé des moyens […]
12. Le second moyen critique l’arrêt attaqué pour avoir infirmé partiellement l’ordonnance entreprise,
requalifié les faits en tentative d’assassinat et dit qu’il résulte des pièces de l’instruction, des charges
suffisantes contre M. Q... d’avoir à Mitry-Mory, le 8 décembre 2017, en tout cas sur le territoire national
et depuis temps non couvert par la prescription, tenté avec préméditation ou guet-apens de donner
volontairement la mort à Mme P... épouse B..., ladite tentative, manifestée par un commencement
d’exécution, en l’espèce en attendant longuement devant le domicile de la victime le retour de celle-ci
en étant munie d’une arme de poing dont il avait vérifié qu’elle était chargée de munitions létales,
n’ayant été interrompue ou n’ayant manqué son objet que par des circonstances indépendantes de la
volonté de son auteur, en l’espèce l’interpellation par les policiers avant le retour de la victime, ainsi que
des délits connexes, alors :
« 1°/ que la chambre de l’instruction ne peut prononcer une mise en accusation devant la cour d’assises
qu’à la condition que les faits dénoncés constituent un crime ou tentative de crime ; que la tentative
d’assassinat n’est pénalement punissable qu’à la condition qu’il y ait eu un commencement d’exécution
au sens des articles 121-5 et 221-3 du code pénal, lequel doit être caractérisé par l’accomplissement
d’actes tendant en eux-mêmes directement et immédiatement et irrévocablement au meurtre ; que le fait
d’attendre une personne devant son domicile, muni d’une arme chargée, sans le moindre commencement
d’exécution ne tend pas directement et immédiatement à la consommation d’un meurtre, et ne caractérise
pas le commencement d’exécution au sens des textes susvisés, ensemble l’article 132-71-1 du code
pénal ;
2°/ que la tentative n’est punissable et n’est caractérisée qu’en l’état d’un commencement d’exécution
et en l’absence de désistement volontaire ; qu’en considérant sans le justifier que M. Q... était entré dans
la phase d’exécution de son crime, et que ce commencement d’exécution n’a été suspendu ou n’a
manqué son effet qu’en raison de circonstances indépendante de la volonté de l’auteur, l’intervention
des policiers et l’absence prolongée de Mme B... avant leur intervention, la chambre de l’instruction qui
n’a relevé que de simples actes préparatoires et non un commencement d’exécution n’ayant été suspendu
ou n’ayant manqué son effet qu’en raison de circonstances indépendantes de la volonté de son auteur,
n’a pu justifier légalement sa décision au regard des articles 121-5 et 221-3 du code pénal ;
3°/ qu’au demeurant, la chambre de l’instruction n’a absolument pas caractérisé la moindre intention
homicide en faisant état de simples propos émanant de tiers et de l’« expression voilée » utilisée
auparavant par M. Q... relatifs à ses origines du Sud de l’Italie, aucun élément suffisamment explicite
contemporain aux faits et propre au prévenu ne permettait tant d’accréditer une quelconque intention
d’homicide au moment des faits, en sorte que les motifs de l’arrêt attaqué ne caractérisent pas
l’incrimination de tentative d’homicide volontaire avec guet-apens au sens de l’article 221-3 du code
pénal qui a été violé. »
Motivation
Réponse de la Cour
13. Les moyens sont réunis.
14. Pour infirmer partiellement l’ordonnance attaquée et ordonner le renvoi de M. Q... devant la cour
d’assises du chef, notamment, de tentative d’assassinat, l’arrêt attaqué relève que la personne mise en
examen, en proie à un profond ressentiment envers Mme B... en raison des relations difficiles de celle-

29
ci avec son épouse et d’une insatisfaction financière, s’est rendue devant le domicile de celle-ci où elle
a attendu son retour, une arme de poing entre les deux sièges avant de sa voiture.
15. Les juges énoncent que son intention se déduit des menaces de s’en prendre physiquement à Mme
B... formulées, tant avant son interpellation, lors de son passage à la pharmacie, que devant l’adjoint de
sécurité qui le gardait.
16. Ils ajoutent que M. Q... a spontanément décrit lors de sa garde à vue comment il avait ordonné à son
épouse et à sa fille de repartir, lorsqu’elles étaient venues le voir devant le domicile où il attendait, en
pointant l’arme en main dans leur direction, manifestant ainsi une intention de s’en servir.
17. Ils retiennent que M. Q... a déclaré lors de sa garde à vue être spécialement allé à son domicile pour
prendre l’arme de poing, et qu’il a de même expliqué s’être assuré que cette arme était chargée en
munitions qu’il savait létales.
18. Ils déduisent de ces circonstances que M. Q... n’avait pas seulement l’intention de menacer, comme
il aurait pu le faire avec une arme non chargée, ou d’exercer des violences physiques sur Mme B..., mais
bien d’attenter à sa vie et ceci de façon irrévocable, compte tenu de la longueur de son attente devant le
domicile.
19. En statuant ainsi, la chambre de l’instruction a justifié sa décision. […]
Dispositif
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi.

Document n° 4 - Crim. 30 juin 2021, n° 20-84.946, inédit.

(…) Faits et procédure

1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.

2. M. [F] a été renvoyé devant le tribunal correctionnel de Toulon du chef de vingt-six faits de vol, vols
aggravés ou tentatives, commis entre le 3 juillet 2015 et le 6 décembre 2016, outre des faits de
dégradation de bien public, refus d'obtempérer et usurpations de plaque d'immatriculation commis le 12
avril 2016, des faits postérieurs d'usurpation de plaque d'immatriculation, et deux faits de rébellion
commis le 6 décembre 2016, jour de son interpellation.

3. Par jugement du 10 mai 2019, ce tribunal l'a relaxé du chef de huit vol, vols aggravés et tentative, l'a
déclaré coupable du surplus des chefs de poursuite, l'a condamné à six ans d'emprisonnement, et a
prononcé sur les intérêts civils.

4. M. [F] a formé appel principal de ce jugement le 20 mai 2019, et le ministère public appel incident le
lendemain.

Examen des moyens


(…)
Sur le troisième moyen
Enoncé du moyen
9. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a déclaré M. [F] coupable de tentative de vol avec
effraction dans un lieu d'entrepôt le 6 décembre 2016 à [Localité 1] au préjudice de la société Intermed
exportation représentée par Mme [I] [W] alors :
« 1°/ que la tentative est constituée dès lors que, manifestée par un commencement d'exécution, elle
n'a été suspendue ou n'a manqué son effet qu'en raison de circonstances indépendantes de la volonté de

30
son auteur ; qu'en se bornant à relever les circonstances qui seraient de nature à établir la participation
de M. [F] à une tentative de vol, sans procéder à aucune constatation relative aux conditions de cette
tentative, à savoir un commencement d'exécution et une absence de désistement volontaire, la cour
d'appel a entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard des articles 121-5 et 311-1 du code
pénal ;
2°/ qu'en omettant de préciser la nature de l'effraction retenue, la cour d'appel a entaché sa décision
d'un défaut de base légale au regard de l'article 311-5, 3°, du code pénal. »

Réponse de la Cour

10. Pour déclarer le prévenu coupable d'une tentative de vol aggravé, commise à [Localité 1], le 6
décembre 2016, au préjudice de l'établissement Intermed exportation, la cour d'appel énonce qu'il a été
interpellé le même jour, à proximité, ayant commis un vol aggravé, qu'il a reconnu, au préjudice du
magasin Bob carrelage. Elle ajoute que la tentative de vol précitée a été commise dans le même créneau
de temps, soit vers 4 heures du matin, par un auteur dont l'exploitation des images de vidéo-surveillance
a établi qu'il utilisait un véhicule du même modèle que celui à bord duquel circulait le prévenu ce jour-
là. Elle déclare ainsi établie la prévention, rappelée par l'arrêt attaqué, qui indique que cette tentative a
été manifestée par un commencement d'exécution, soit l'effraction du barillet d'une serrure, et qu'elle n'a
été interrompue que par une circonstance indépendante de son auteur, soit le déclenchement d'une
alarme.

11. En l'état de ces motifs dénués d'insuffisance, la cour d'appel a justifié sa décision, laquelle n'encourt
pas le grief allégué.
(…)

Document n° 5 - Crim. 27 mars 2019, n° 18-82.484.

(…)
Attendu qu’il résulte de l’arrêt attaqué et de l’ordonnance qu’il infirme partiellement que Mme M. a
déposé plainte pour violences aggravées à l’encontre de M. K., commises entre 2010 et 2014 ; qu’elle a
dénoncé un climat de violences habituelles et décrit plusieurs scènes précises, parmi lesquelles celle
survenue le 2 juillet 2010, au cours de laquelle M. K., après des gestes violents, s’est muni d’une
bouteille d'alcool à brûler, dont il l’a aspergée, a pris un premier briquet qui ne fonctionnait pas, puis un
second, l'a allumé et approché la flamme de la victime qui a immédiatement pris feu ; que la plaignante
a précisé que son compagnon, après l’avoir regardée se débattre, lui a arraché le pyjama en flammes, lui
a dit de ne pas appeler les pompiers et de ne pas le dénoncer, ce qu’elle lui a promis, suite à quoi il a
finalement appelé les secours ; qu’au cours de l’information, Mme M. a dénoncé, en outre, des faits de
viols aggravés ; que M. K. a été mis en examen pour l’ensemble de ces faits; qu’à l’issue de l’instruction,
le magistrat, d’une part, a considéré qu'il ne ressortait pas du dossier charges suffisantes de l’existence
d’une intention homicide du mis en examen lors de la scène du 2 juillet 2010, a requalifié les faits en
violences aggravées et constaté l’acquisition de la prescription pour les violences antérieures au 13
septembre 2010, dont celles du 2 juillet 2010, d’autre part, a prononcé un non lieu du chef de viols
aggravés et renvoyé le mis en examen devant le tribunal correctionnel pour les faits de violences
aggravées commises entre le 3 février 2011 et le 20 janvier 2012 et entre le 29 novembre 2012 et le 3
février 2014 ; que la partie civile a interjeté appel ;

Attendu que, pour confirmer l’ordonnance du juge d’instruction, requalifier les faits de tentative de
meurtre aggravé en violences aggravées par deux circonstances, suivies d’incapacité supérieure à 8
jours, constater l’extinction de l’action publique du fait de la prescription et dire n’y avoir lieu à suivre
contre M. K. de ce chef, l'arrêt attaqué relève que l’existence d’un acte positif de violence est avérée et
non contestée, que, s’agissant de l'intention de donner la mort, la quantité de liquide inflammable
projetée sur la victime aurait pu entraîner sa mort et que les faits se sont déroulés dans un climat de

31
violences et de menaces pouvant être des menaces de mort, que M. K. a indiqué que son geste n'avait
pas eu pour but d'attenter à la vie de la victime mais de lui faire peur et de mettre fin à l'escalade de
violence ; que les juges ajoutent que cet acte était davantage destiné à faire souffrir la victime, voire à
lui occasionner un préjudice esthétique définitif, que le fait que l’intéressé a enlevé le pyjama enflammé
de la victime, s'occasionnant par la-même des blessures, tend à démontrer qu'il ne souhaitait pas que
l'issue soit fatale et que ses tergiversations avant l'appel des secours et le fait qu’il incite la victime à
mentir sur l'origine des brûlures s'expliquent par la volonté de la faire souffrir et de ne pas faire face à
ses responsabilités, notamment pénales au regard d’un acte d'une gravité extrême, dont il avait tout à
fait conscience ; que les juges retiennent enfin que la personne mise en examen n'a prononcé aucune
parole évoquant le souhait de la mort de Mme M. ; que la chambre de l’instruction en a déduit qu’il
n'existe pas charges suffisantes contre M. K. d'avoir eu, par cet acte de violence précis, l'intention de
donner la mort à la victime ;

Mais attendu qu’en se déterminant ainsi, alors que, d’une part, le fait de projeter à plusieurs reprises un
produit inflammable sur le corps de la victime et d’y mettre le feu délibérément est de nature à
caractériser une intention homicide, d’autre part, la circonstance que la personne mise en examen ait
aidé la victime à enlever son vêtement en flamme relève davantage du repentir actif que du désistement
volontaire, la chambre de l’instruction n’a pas justifié sa décision ;

D’où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;

Par ces motifs, et sans qu’il y ait lieu d’examiner le second moyen proposé :

CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l’arrêt susvisé de la chambre de l’instruction de la cour
d’appel de Rennes, en date du 23 mars 2018 (…)

***

Cas n° 1. Jean vient d’apprendre que son employeur, Bruno, avait décidé de le licencier. Jean ne supporte
pas cette décision : après 30 ans de bons et loyaux services, si proche de la retraite, il va se retrouver au
chômage. Jean n’a pourtant pas hésité à s’investir dans son travail, lui vouant tout son temps, au
détriment de sa vie de famille. Il se sent trahi.
De retour chez lui, après avoir bu quelques verres de vin, il se confie à sa femme : « je crois que je vais
le tuer ».
Son épouse a beau tenter de le calmer, de lui dire que ce n’est pas si grave, Jean sent son idée se renforcer,
sa résolution est faite. Avant de se coucher, il commence à échafauder un plan. Dès le lendemain, il
profite de sa pause déjeuner pour commander sur internet de faux papiers d’identité qu’il trouve plutôt
convaincants. Quelques jours plus tard, muni de ses faux papiers fraîchement reçus, il se rend dans un
magasin spécialisé dans la vente d’articles de chasse et achète une carabine.
Le jour suivant est le jour J : Jean se rend à son travail comme à son habitude et, à la fin de la journée,
se poste, bien dissimulé, près de la sortie. Il sait que Bruno est toujours le dernier à quitter les lieux. Dès
qu’il le voit sortir du bâtiment, il vise en direction de sa tête. Après une légère hésitation, il tire. Rien ne
se passe. Bruno poursuit son chemin et s’éloigne en marchant.
Très choqué, Jean constate que la carabine s’est enrayée. Il est extrêmement soulagé, et réalise peu à
peu qu’il aurait bien pu commettre l’irréparable. Il se hâte de regagner sa voiture et de rentrer chez lui.
Qualifiez, au regard de l’iter criminis, chacun des stades du projet de Jean. Précisez à chaque étape si
sa responsabilité pénale peut être engagée.

Cas n° 2 (cas récapitulatif).

Précision préliminaire : l’article 226-1 du Code pénal incrimine les atteintes à l’intimité de la vie privée.
En substance, le texte sanctionne le fait d’enregistrer l’image d’une personne sans son consentement.
Ce délit est puni d’un an d’emprisonnement et de 45.000€ d’amende.

32
Monsieur Vicieux a élaboré une technique pour regarder les jeunes filles se déshabiller. En juillet 2018,
il se rend à la piscine municipale ; quand il voit Micheline entrer dans une cabine pour y enfiler son
maillot, il se précipite alors dans la cabine voisine. Discrètement, il passe une main sous la paroi de
séparation des deux cabines, un petit miroir dans la paume. Sans que Micheline ne réalise rien, Monsieur
Vicieux l’observe qui se déshabille.
Certes, le texte ne punissait que l’enregistrement des images et non le simple fait de regarder. Cependant,
Micheline considère que le résultat est le même si bien que le juge devrait sanctionner Monsieur Vicieux
malgré tout.
Le 3 août 2018, une réforme est intervenue pour introduire un nouvel article dans le Code pénal : l’article
226-3-1 aux termes duquel « le fait d'user de tout moyen afin d'apercevoir les parties intimes d'une
personne que celle-ci, du fait de son habillement ou de sa présence dans un lieu clos, a caché à la vue
des tiers, lorsqu'il est commis à l'insu ou sans le consentement de la personne, est puni d'un an
d'emprisonnement et de 15 000€ d'amende ». Micheline considère que ce texte pourrait servir de
fondement à une condamnation de Monsieur Vicieux.
Monsieur Voyeur, ami de Monsieur Vicieux, a décidé de suivre son exemple. Il s’est rendu à la piscine
la semaine dernière avec une petite caméra qu’il comptait installer dans les cabines. Alors qu’il était
monté sur un tabouret avec sa caméra et son tournevis à la main, il est surpris par le maître-nageur.
Quid juris ?

33
SEANCE 4 – L’ELEMENT MORAL

Semaine du 13 novembre au 18 novembre 2023.

Liste des documents :


Doc. n° 1 : Cons. const., 16 juin 1999 (extrait).
Doc. n° 2 : Crim. 10 janv. 2018, n° 17-80.816.
Doc. n° 3 : Crim. 18 juin 1991, n° 91.82-033
Doc. n° 4 : Crim. 23 août 2006, n° 06-84.446.
Doc. n° 5 : Crim. 5 oct. 2004, n° 03-86.169.
Doc. n° 6 : Crim. 6 sept. 2022, n° 21-86.511.
Doc. n° 7 : Crim., 6 sept. 2005, n° 04-87.778.
Doc. n° 8 : Crim. 8 juin 2022, n° 21-84.643.

Travail demandé :
Lire tous les documents. Répondre aux questions posées.
Réaliser les fiches d’arrêts des documents 5, 6, 7 et 8.
Préparer une plaidoirie sur l’exercice reproduit.

Rappel - Art. 121-3 c. pén. : « Il n’y a point de crime ou de délit sans intention de le commettre.
Toutefois, lorsque la loi le prévoit, il y a délit en cas de mise en danger délibérée de la personne d’autrui.
Il y a également délit, lorsque la loi le prévoit, en cas de faute d’imprudence, de négligence ou de
manquement à une obligation de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement, s’il est établi
que l’auteur des faits n’a pas accompli les diligences normales compte tenu, le cas échéant, de la nature
de ses missions ou de ses fonctions, de ses compétences ainsi que du pouvoir et des moyens dont il
disposait.
Dans le cas prévu par l’alinéa qui précède, les personnes physiques qui n’ont pas causé directement le
dommage, mais qui ont créé ou contribué à créer la situation qui a permis la réalisation du dommage ou
qui n’ont pas pris les mesures permettant de l’éviter, sont responsables pénalement s’il est établi qu’elles
ont, soit violé de façon manifestement délibérée une obligation particulière de prudence ou de sécurité
prévue par la loi ou le règlement, soit commis une faute caractérisée et qui exposait autrui à un risque
d’une particulière gravité qu’elles ne pouvaient ignorer.
Il n’y a point de contravention en cas de force majeure ».

I. L’INTENTION

Document n° 1 - Cons. const., 16 juin 1999, n° 99-411 DC, JO 19 juin, p. 9018.

« Il résulte de l’art. 9 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, s’agissant des crimes et
délits, que la culpabilité ne saurait résulter de la seule imputabilité matérielle d’actes pénalement
sanctionnés ; en conséquence, et conformément aux dispositions combinées de l’art. 9 précité et du
principe de légalité des délits et des peines affirmé par l’art. 8 de la même Déclaration, la définition
d’une incrimination, en matière délictuelle, doit inclure, outre l’élément matériel de l’infraction,
l’élément moral, intentionnel ou non, de celle-ci. »

34
Document n° 2 - Crim. 10 janv. 2018, n° 17-80.816, inédit :

Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;


Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 222-32 du code pénal, 591 du code de
procédure pénale, violation de la loi ;
Vu les articles 222-32 du code pénal et 593 du code de procédure pénale ;
Attendu que selon le premier de ces textes, est constitutive d’un délit l’exhibition sexuelle imposée à la
vue d’autrui dans un lieu accessible aux regards du public ;
Que, selon le second, tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision ;
que l’insuffisance ou la contradiction de motifs équivaut à leur absence ;
Attendu qu’il résulte de l’arrêt attaqué et des pièces de procédure que, le 5 juin 2014, Mme A... Z... s’est
présentée au musée Grévin à Paris, dans la salle des chefs d’Etat, rassemblant plusieurs statues de cire
de dirigeants mondiaux ; que, se dévêtant le haut du corps, sa poitrine étant nue, laissant apparaître
l’inscription "Kill Y...", la prévenue a fait tomber la statue du président B..., M. X... Y..., dans laquelle
elle a planté à plusieurs reprises un pieux métallique partiellement peint en rouge, en déclarant "Fuck
dictator, Fuck X... Y..." ; qu’elle a été interpellée et s’est revendiquée membre du mouvement "Femen",
donnant à son geste un caractère de protestation politique ; qu’elle a été poursuivie devant le tribunal
correctionnel des chefs d’exhibition sexuelle et de dégradations volontaires du bien d’autrui ; que, par
jugement, en date du 15 octobre 2014, le tribunal l’a déclarée coupable de ces deux délits, l’a condamnée
à une amende de 1 500 euros et a prononcé sur les intérêts civils ; que la prévenue et le ministère public
ont interjeté appel de cette décision ;
Attendu que, pour infirmer partiellement le jugement lui étant déféré et relaxer Mme Z... du délit
d’exhibition sexuelle, l’arrêt retient que l’exposition du torse nu d’une femme à la vue d’autrui, en
dehors de tout élément intentionnel de nature sexuelle, ne peut, au regard des circonstances dans
lesquelles cette exposition s’est déroulée le 5 juin 2014, recouvrir la qualification d’exhibition sexuelle,
s’agissant de l’utilisation par la prévenue de sa poitrine dénudée portant un message écrit à des fins de
manifestation d’une expression en dehors de toute connotation sexuelle ;
Mais attendu qu’en prononçant ainsi, alors qu’elle relevait, indépendamment des motifs invoqués par la
prévenue, sans effet sur les éléments constitutifs de l’infraction, que celle-ci avait exhibé volontairement
sa poitrine dans un musée, lieu ouvert au public, la cour d’appel a méconnu le sens et la portée du texte
susvisé ;
D’où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l’arrêt susvisé de la cour d’appel de Paris, en date du
12 janvier 2017, et pour qu’il soit à nouveau jugé, conformément à la loi,
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d’appel de Paris, autrement composée, à ce désignée
par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

Questions :
1. Présentez l’infraction qui a été commise en l’espèce (définition, classification, matérialité).
Décrivez précisément l’élément moral.
2. Expliquez juridiquement la position de la cour d’appel.
3. Expliquez juridiquement la position de la Cour de cassation. Critiquez (positivement ou
négativement) la solution retenue.
4. Dégagez la portée de cette décision.

35
Document 3 - Crim. 18 juin 1991, n° 91.82-033, inédit.

(…) Attendu qu'il appert de l'arrêt attaqué que, pour renvoyer Adrien X... devant la cour d'assises sous
l'accusation d'homicide volontaire sur la personne de Jean-Marie X..., la chambre d'accusation, outre les
motifs repris au moyen, énonce "qu'en dépit des dénégations d'Adrien X... qui a toujours affirmé ne pas
avoir eu l'intention de tuer son frère" et en considération des positions respectives et relativement
rapprochées des deux antagonistes, des caractéristiques techniques de l'arme utilisée, de la dualité des
coups de feu tirés et de la vulnérabilité de la région du corps de la victime vers laquelle le tir s'est trouvé
dirigé, les faits reprochés à l'inculpé "ne peuvent être qualifiés d'homicide involontaire" et que "c'est
bien la qualification d'homicide volontaire qui doit être retenue" ;

Attendu qu'en l'état de ces énonciations exemptes d'insuffisance, les juges ont justifié leur décision ; que
les chambres d'accusation, en statuant sur les charges de culpabilité, apprécient au point de vue des faits
tous les éléments constitutifs des crimes, notamment les questions d'intention et que la Cour de Cassation
n'a d'autre pouvoir que de vérifier si la qualification qu'elles ont donnée aux faits justifie le renvoi de
l'inculpé devant la juridiction de jugement ;
Que, dès lors, le moyen doit être écarté ;

Et attendu que la chambre d'accusation était compétente, qu'il en est de même de la cour d'assises devant
laquelle le demandeur est renvoyé ; que les faits objet de la poursuite sont qualifiés crime par la loi ;

REJETTE le pourvoi ; (…)

Document 4 - Crim. 23 août 2006, n° 06-84.446, inédit.

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 591 et 593 du code de procédure
pénale ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que le juge d'instruction a ordonné le renvoi devant la cour
d'assises d'Ovidio X... sous l'accusation d'avoir volontairement donné la mort à son épouse, Christine
Y... ;

Attendu que, pour infirmer partiellement cette décision et le mettre en accusation du chef de coups
mortels aggravés, les juges énoncent que, s'il résulte des constatations médico-légales qu'il a porté des
coups et fait heurter violemment à plusieurs reprises la tête de sa femme sur une surface dure, cet élément
reste en soi insuffisant pour caractériser une intention homicide ;

Attendu qu'en l'état de ces motifs, exempts de contradiction, la chambre de l'instruction, qui a répondu
aux articulations essentielles des réquisitions et du mémoire dont elle était saisie, a justifié sa décision ;

Qu'en effet, les chambres de l'instruction, en statuant sur les charges de culpabilité, apprécient
souverainement à cet égard tous les éléments constitutifs des crimes, objet des poursuites, y compris
l'intention coupable ; que la Cour de cassation n'a d'autres pouvoirs que de vérifier si les qualifications
qu'elles donnent aux faits poursuivis justifient le renvoi de la personne mise en examen devant la cour
d'assises ;

Et attendu que la procédure est régulière et que les faits, objet principal de l'accusation, sont qualifiés
crime par la loi ;

REJETTE le pourvoi ; (…)

***

36
PLAIDOIRIE – Pour mémoire, la plaidoirie est un exercice juridique. Les éléments factuels doivent
impérativement être rattachés à vos connaissances en droit pénal général.

Répartition : les étudiants nés entre janvier et juin inclus défendront la position du Ministère public ; les
étudiants nés entre juillet et décembre inclus défendront André. Chaque présentation s’interrogera sur le
fondement des poursuites et sur la preuve de l’intention, mais aussi sur la place du repentir actif et des
mobiles en droit pénal.
Préparez-vous pour un passage oral de 4 à 5 minutes (ni plus ni moins). Les qualités oratoires sont
vivement appréciées.
Remarque : les documents 3 et 4 sont reproduits afin de vous permettre d’argumenter, la réalisation des
fiches d’arrêts n’est pas demandée.

André et Maryvonne se sont mariés en juin 1977. Cela va faire 40 ans qu’ils vivent heureux. Toutefois,
un matin d’octobre 2023, la police est alertée par un appel affolé d’André. Les propos sont confus mais
le policier parvient néanmoins à comprendre qu’un drame s’est produit à leur domicile. Arrivés sur les
lieux, les policiers trouvent le cadavre de Maryvonne dans la cuisine, près de l’évier.
Interrogé au commissariat, André reconnaît qu’une dispute a éclaté ; alors que Maryvonne le menaçait
du rouleau à pâtisserie, il s’est emporté et s’est saisi une casserole. Il l’a frappée violemment à la tête à
plusieurs reprises. Il assure, devant les policiers, regretter son geste ; il a d’ailleurs essayé de contenir
l’hémorragie avec des torchons de cuisine et a lui-même appelé les secours avant d’appeler la police.
Lors d’un examen médical, André présente de légères ecchymoses au bras qu’il impute à la dispute.
L’enquête révèle qu’André n’a jamais été poursuivi ou condamné pour des faits de violences.
Le voisinage n’a d’ailleurs jamais entendu de cris ou soupçonné de conflits conjugaux.
On retrouve des billets pour Venise au nom d’André et Maryvonne cachés dans le tiroir d’André. Il
assure qu’il préparait une surprise pour son épouse afin de célébrer leurs quarante ans de mariage.
Toutefois, André aurait confié à un camarade qu’il aimerait avoir une voiture de sport mais que son
épouse s’y refusait et se contentait de la vieille 2 CV de leur jeunesse. L’étude des comptes bancaires
des époux révèle que, à la suite du décès de Maryvonne, André percevra une forte somme, comme seul
héritier de sa défunte épouse (ils n’ont pas d’enfants de telle sorte que la fortune de Maryvonne reviendra
à André).
Enfin, la fameuse casserole qui a servi à asséner les coups se révèle être une casserole à double fond
achetée la veille par André dans une quincaillerie du quartier. Le vendeur se rappelle d’ailleurs
parfaitement du visage de cet homme qui avait demandé « à acheter la casserole la plus solide de la
boutique ».

Le juge d’instruction qualifie les faits d’homicide volontaire. Un appel est formé devant la chambre de
l’instruction. Le Ministère public prépare un réquisitoire tendant à démontrer qu’André avait une
intention homicide. L’avocat d’André tente au contraire de démontrer qu’André n’a jamais souhaité
donner la mort à Maryvonne, sans nier qu’il a donné les coups mortels. Il entend obtenir la
requalification des faits en violences volontaires ayant entrainé la mort sans intention de la donner.

***

II. LA NON-INTENTION

Document n° 3 - Crim. 5 oct. 2004, n° 03-86.169, Bull. crim. n° 230 :

Vu les articles 221-6 du Code pénal, ensemble l’article 593 du Code de procédure pénale ;
Attendu que tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision ; que
l’insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ;
Attendu que l’article 221-6 du Code pénal exige, pour recevoir application, que soit constatée l’existence
certaine d’un lien de causalité entre la faute du prévenu et le décès de la victime ;

37
Attendu qu’il résulte de l’arrêt attaqué qu’au volant de son véhicule, Gaston X... a heurté Augustin Y...
qui traversait dans un passage protégé ; que la victime, atteinte de trois plaies superficielles et d’une
fracture du calcanéum droit ayant nécessité une intervention chirurgicale, est décédée 10 jours après des
suites d’une infection nosocomiale ; que Gaston X... a été poursuivi pour homicide involontaire et
omission de céder le passage à un piéton régulièrement engagé ;
Attendu que, pour déclarer le prévenu coupable du délit d’homicide involontaire, par suite de
l’aggravation de l’état de la victime, l’arrêt confirmatif attaqué retient qu’en omettant de céder le passage
dans ces circonstances, il a heurté le piéton et a créé la situation ayant permis la réalisation du dommage,
commettant ainsi une faute caractérisée, en relation de causalité indirecte avec le décès, exposant autrui
à un danger qu’il ne pouvait ignorer ;
Mais attendu qu’en se déterminant ainsi, la cour d’appel, qui a constaté que l’existence des blessures
trouvait sa cause directe dans le heurt du piéton et qui a attribué son décès à une maladie nosocomiale
ultérieurement contractée par la victime sans rechercher si cette infection n’était pas le seul fait en
relation de causalité avec le décès, n’a pas justifié sa décision ;
D’où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs,
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l’arrêt susvisé de la cour d’appel d’Aix-en-Provence,
en date du 19 septembre 2002, et pour qu’il soit à nouveau jugé, conformément à la loi,
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d’appel de Lyon, (…).

Document n° 4 – Crim. 6 sept. 2022, n° 21-86.511, inédit.

Faits et procédure

1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.

2. M. [C] [M] a été poursuivi devant le tribunal correctionnel du chef d'homicide involontaire pour avoir
percuté un plongeur avec l'embarcation qu'il pilotait.

3. Les juges du premier degré l'ont déclaré coupable et ont prononcé sur les intérêts civils.

4. Le prévenu et le ministère public ont relevé appel de cette décision.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

5. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a condamné M. [M] à une peine d'emprisonnement de
trois mois, intégralement assortie du sursis simple, alors « que la faute d'imprudence est pénalement
sanctionnée s'il est établi que l'auteur du dommage n'a pas accompli les diligences normales compte
tenu, le cas échéant, de la nature de ses missions ou de ses fonctions, de ses compétences ainsi que du
pouvoir et des moyens dont il disposait ; qu'en retenant à la charge du prévenu une faute d'inattention
pour la raison que, du fait de l'éblouissement du soleil et de l'obstacle visuel de l'avant du bateau, il «
aurait dû adapter sa vigilance et faire preuve de prudence dans la conduite du bateau puisqu'une personne
en situation de pêche sous-marine, dont il avait repéré la bouée, se trouvait sur le site peu de temps
auparavant », sans autrement caractériser les diligences normales que le prévenu n'aurait pas accomplies,
tout en constatant qu'il n'existait aucune interdiction ou restriction réglementaire de navigation autour
d'une bouée flottant en mer et que le conducteur du bateau naviguait dans le chenal à petite vitesse
évaluée à trois nœuds, déduisant ainsi la faute d'inattention qu'elle lui imputait de la seule circonstance
que, aveuglé par le soleil de face, il n'avait pas vu la bouée dont le chasseur sous-marin était équipé, la
cour d'appel n'a pas justifié légalement sa décision au regard des articles 121-3 et 221-6 du code pénal. »

38
Réponse de la Cour

6. Pour confirmer le jugement ayant déclaré le prévenu coupable, l'arrêt attaqué énonce que la zone de
l'accident est située à environ 100 mètres de la plage et que la vitesse y est limitée.

7. Les juges retiennent que le prévenu, qui avait le soleil dans les yeux et dont l'avant légèrement relevé
du bateau constituait un obstacle visuel, aurait dû adapter sa vigilance et faire preuve de prudence dans
la conduite de son embarcation, dès lors qu'une personne en situation de pêche sous-marine, dont il avait
repéré la bouée peu de temps auparavant, se trouvait sur ce site.

8. Ils en concluent que la faute d'inattention est caractérisée.

9. En l'état de ces motifs relevant de son appréciation souveraine, la cour d'appel qui a mis en évidence,
d'une part, un ensemble de circonstances qui imposaient au prévenu une attention particulière, d'autre
part, le manquement de ce dernier aux diligences normales qui en découlaient, a justifié sa décision.

10. Ainsi, le moyen n'est pas fondé.

11. Par ailleurs l'arrêt est régulier en la forme.

PAR CES MOTIFS, la Cour :


REJETTE le pourvoi ; (…)

Document n° 5 - Crim., 6 septembre 2005, n° 04-87.778, Bull. crim. n° 218.

(...) Attendu qu’il résulte de l’arrêt et des pièces de procédure qu’à l’issue de la récréation, Sarah Y...,
âgée de dix ans, qui, avec les autres élèves du cours moyen, venait de regagner la salle de classe située
au deuxième étage de l’école, est tombée à la renverse du rebord de l’une des fenêtres demeurée ouverte,
où elle s’était assise quelques instants à l’insu de son instituteur, Philippe X..., absorbé par la préparation
d’un départ en classe de neige ; qu’elle est décédée des suites de ses blessures ;

Attendu que, pour déclarer Philippe X... coupable d’homicide involontaire, l’arrêt relève que,
connaissant la dangerosité de la situation résultant de l’ouverture des fenêtres pour les enfants, il n’a pas
pris à leur arrivée dans la classe les mesures de fermeture permettant d’éviter le dommage et a ainsi
commis une faute caractérisée exposant les élèves à un risque d’une particulière gravité qu’il ne pouvait
ignorer ;
Attendu qu’en l’état de ces énonciations procédant de son appréciation souveraine, d’où il résulte que
le prévenu n’a pas accompli les diligences normales qui lui incombaient, compte tenu de ses fonctions,
de ses compétences ainsi que du pouvoir et des moyens dont il disposait, la cour d’appel a justifié sa
décision ;

D’où il suit que le moyen doit être écarté ; Et attendu que l’arrêt est régulier en la forme ; REJETTE le
pourvoi ; (…)

Document n° 6 – Crim. 8 juin 2022, n° 21-84.643, inédit (faute délibérée)

Faits et procédure

1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.

2. Lors d'une néphrectomie réalisée sous anesthésie générale, M. [W] [M] s'est réveillé, ressentant
l'ensemble des actes opératoires sans pouvoir effectuer un mouvement. Alerté par une hypertension

39
artérielle et une majoration des saignements, le chirurgien a constaté que le médecin anesthésiste, M.
[C] [T], était alors absent du bloc opératoire, introuvable et injoignable.

3. Une infirmière anesthésiste appelée en urgence a constaté que le débit du gaz anesthésiant était fermé
et a pris les dispositions nécessaires.

4. L'expertise réalisée dans le cadre de l'enquête préliminaire a notamment conclu que le réveil du patient
était la conséquence d'une faute de M. [T] et que le médecin anesthésiste ne peut s'absenter du bloc
opératoire que de manière très brève, en avisant les autres soignants, et uniquement lorsque l'anesthésie
est stable, conditions qui n'ont pas été respectées en l'espèce.

5. L'intéressé a été poursuivi devant le tribunal correctionnel, qui l'a déclaré coupable de blessures
involontaires avec incapacité totale de travail n'excédant pas trois mois par violation manifestement
délibérée d'une obligation de sécurité ou de prudence prévue par la loi ou le règlement.

6. M. [T] et le ministère public ont relevé appel de la décision.

Examen des moyens (…)

Sur le second moyen


Enoncé du moyen

14. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a déclaré M. [T] coupable de blessures involontaires
avec incapacité temporaire totale (ITT) n'excédant pas trois mois par violation manifestement délibérée
d'une obligation particulière de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou le règlement, alors « que
les dispositions des articles D. 6124-91 à D. 6124-103 du code de la santé publique ne créent des
obligations qu'à la charge des seuls établissements de santé, et non à la charge des médecins
anesthésistes, pris personnellement, lesquels n'en sont pas les destinataires ; qu'en considérant,
cependant, que ces textes étaient des dispositions réglementaires s'imposant personnellement aux
praticiens anesthésistes, dont la méconnaissance, par ceux-ci, serait de nature à engager leur
responsabilité pénale pour violation manifestement délibérée d'une obligation particulière de sécurité ou
de prudence imposée par la loi ou le règlement, et en retenant M. [T], médecin anesthésiste, dans les
liens de la prévention de ce chef, en raison d'une prétendue méconnaissance desdites dispositions, la
cour d'appel a violé l'article 222-20 du code pénal. »

Réponse de la Cour

15. Pour déclarer le prévenu coupable du délit de blessures involontaires, l'arrêt attaqué énonce que
l'article D. 6124-93 du code de la santé publique met à la charge des médecins anesthésistes l'obligation
de participer à l'élaboration de la programmation des interventions, et que l'article D. 6124-94 du même
code dispose que l'anesthésie est mise en œuvre sous la responsabilité d'un médecin anesthésiste-
réanimateur qui doit assurer une surveillance clinique continue à l'aide des moyens mis à sa disposition
par l'établissement conformément à l'article D. 6124-91, 2°.

16. Les juges ajoutent qu'il incombe au médecin anesthésiste, sous la responsabilité duquel l'anesthésie
est pratiquée, d'assurer, directement ou par la fourniture de directives à ses assistants, un contrôle
permanent des données fournies par les instruments afin d'adapter la stratégie anesthésique.

17. Ils relèvent qu'en s'absentant de la salle d'opération sans prévenir quiconque, alors qu'il venait de
constater une hypotension artérielle l'ayant conduit à décider une suspension momentanée de l'arrivée
de gaz anesthésiant qu'il savait entraîner une situation précaire devant faire l'objet d'une vigilance
constante, M. [T] a violé de manière délibérée les obligations particulières de prudence qui lui
incombaient au titre des dispositions précitées.

18. En se déterminant ainsi, la cour d'appel n'a pas méconnu le texte visé au moyen.

40
19. En effet, elle a, par des motifs relevant de son appréciation souveraine, caractérisé des manquements
délibérés à des obligations de prudence et de sécurité imposées par les textes précités au médecin
anesthésiste
lui-même.

20. Dès lors, le moyen doit être écarté.

21. Par ailleurs l'arrêt est régulier en la forme.


PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; (…)

41
SEANCE 5 – RESPONSABILITE ET IRRESPONSABILITE

Semaine du 27 novembre au 2 décembre 2023.

Doc. n° 1 : Crim. 5 juin 2019, n° 18-80.783.


Doc. n° 2 : Crim. 28 juin 2016, n° 15-83862.
Doc. n° 3 : Extraits du Code pénal et du Code de la justice pénale des mineurs.
Doc. n° 4 : Crim. 14 avril 2021, n° 20-80.135, affaire dite Halimi.
Doc. n° 5 : Crim. 22 sept. 2021, n° 20-85.434.
Doc. n° 6 : Crim. 15 juin 2022, n° 21-82.392.

I. LA RESPONSABILITE PENALE DU COMPLICE

Document n° 1 - Crim. 5 juin 2019, n° 18-80.783.

Attendu qu’il résulte de l’arrêt attaqué que, le 11 février 2013, à l’occasion d’une fouille réalisée au
centre de détention de [...], dont la préparation avait été tenue secrète, ont été découverts, dans la cellule
occupée par M. Z..., un téléphone mobile, une carte SIM, un kit "mains libres", de la résine de cannabis,
une clé USB ainsi que, dans la cuvette des toilettes, un morceau de papier supportant la mention
manuscrite "Planque ton tél. fouille" ; qu’une enquête a aussitôt été ouverte ; que M. Y..., surveillant
pénitentiaire, a reconnu être l’auteur du message d’alerte retrouvé dans la cellule et affirmé avoir agi à
l’instigation de son collègue M. X... ; que ce dernier a admis être à l’origine de la mise en garde adressée
au détenu et déclaré avoir agi par reconnaissance envers M. Z... qui avait rendu service aux personnels
de surveillance en permettant de retrouver un tournevis volé ; qu’à l’issue de l’instruction, M. Z... a été
renvoyé devant le tribunal correctionnel pour recel d’objets dont la remise est interdite à un détenu, ces
objets provenant, selon lui, d’un autre détenu ; que MM.Y... et X... ont été renvoyés pour complicité de
recel ; que le tribunal correctionnel a relaxé les deux surveillants au motif que les éléments constitutifs
de la complicité n’étaient pas caractérisés ; que le ministère public a interjeté appel de cette décision ;
En cet état ;
Sur le premier moyen de cassation proposé par la société civile professionnelle Piwnica et Molinié pour
M. X..., pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l’homme, 121-4,
121-5, 121-6, 121-7, 321-1 et 434-35 du code pénal, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut et
contradiction de motifs, manque de base légale ;
“en ce que l’arrêt infirmatif attaqué a déclaré M. X... coupable de complicité de recel de remise non
autorisée d’objets à détenu et l’a condamné à la peine de six mois d’emprisonnement avec sursis, à
l’interdiction d’exercer une fonction publique pendant cinq ans et a rejeté sa demande de non-
inscription au bulletin numéro 2 du casier judiciaire ;
“aux motifs que sur les faits de complicité de recel reprochés à MM. X... et Y..., il n’est pas contesté
qu’à la demande de M. X..., M. Y... a alerté M. Z... d’une fouille prochaine de sa cellule en lui enjoignant
précisément, aux termes du mot glissé sous la porte, de dissimuler son téléphone ; que M. X..., en
donnant des instructions à son collègue surveillant, et M. Y..., en rédigeant l’avertissement destiné à
M. Z... et en le lui faisant parvenir, ont tous deux accompli un acte positif favorisant le recel, délit
continu, d’objets illicites par ce détenu, en l’informant du caractère imminent d’une fouille et en lui
donnant le temps nécessaire à la dissimulation de ces objets, environ trois quart d’heure ayant séparé la
fin de la ronde habituelle effectuée par M. Y... et les opérations de fouille avec le concours des Eris, peu
important que les objets aient finalement été découverts ; qu’il est établi par les termes de l’avertissement
écrit délivré au détenu que les deux surveillants savaient que M. Z... était en possession d’un téléphone
portable, M. Y... ayant toujours affirmé, jusqu’à son revirement survenu seulement à hauteur de cour,
que M. X... avait précisément fait référence à cet objet lors de leur conversation ; que la qualité de
surveillant pénitentiaire des deux prévenus et leur connaissance des règlements applicables à la vie

42
carcérale conduit à retenir qu’ils avaient parfaitement conscience de l’illicéité du fait principal imputable
à M. Z... et qu’ils ont cependant sciemment fait le choix de s’y associer ; qu’au vu de l’ensemble de ces
éléments, il convient d’infirmer le jugement et de déclarer MM. X... et Y... coupables des faits qui leur
sont reprochés ;
“1°) alors que la complicité nécessite la commission d’un acte positif d’aide ou d’assistance, antérieur
ou concomitant à l’infraction principale afin d’en faciliter sa consommation ; que la complicité de recel
ne peut être caractérisée que s’il est établi que l’aide ou l’assistance a permis la consommation du recel ;
que la détention par le détenu des objets recélés ayant précédé la remise du mot du surveillant l’alertant
de la fouille, ce mot n’était pas antérieur ni concomitant à la perpétration du recel ; qu’en se bornant à
énoncer que les surveillants ont accompli un acte positif favorisant le recel tandis qu’il résulte des
constatations de l’arrêt qu’un tel acte n’était pas antérieur ni concomitant et n’a pas permis la
consommation du recel qui préexistait, la cour d’appel n’a pas justifié sa décision ;
“2°) alors qu’en outre lorsqu’un acte, manifesté par un commencement d’exécution, a été suspendu ou
a manqué son effet en raison de circonstances indépendantes de la volonté de son auteur, cet acte ne
constitue qu’une tentative ; que l’article 121-4 du code pénal prévoit que la tentative n’est réprimée que
dans les cas prévus par la loi ; que ni la tentative de complicité ni la tentative de recel ne sont
punissables ; que la prévention reprochait, à titre principal, au détenu un recel d’objets et reprochait, au
titre de la complicité, au prévenu de l’avoir averti pour qu’il dissimule cet objet ; que le détenu a tenté
de cacher les objets recelés qui ont cependant été découverts lors de la fouille, ce dont il résulte que
l’infraction de recel a manqué son effet en raison de circonstances indépendantes de la volonté de son
auteur, de sorte que seule la tentative était caractérisée ; qu’en retenant néanmoins ces éléments sans
constater que le projet de recel aurait abouti, la cour d’appel n’a pas caractérisé l’existence d’un acte,
différent d’une simple tentative non punissable, par lequel le prévenu aurait permis que le recel ait pu
être continué ;
“3°) alors que tout jugement ou arrêt doit contenir les motifs propres à justifier la décision ; que la
contradiction entre les motifs et le dispositif équivaut à un défaut de motifs ; que l’infraction principale
est le recel par un détenu d’un téléphone et d’une carte SIM ; qu’il est reproché à M. X... de s’être rendu
coupable par aide ou assistance à l’auteur principal, M. Z..., pour l’avoir alerté d’une fouille ; que
cependant pour déclarer le prévenu coupable, la cour d’appel a énoncé que M. X... a « donné des
instructions à son collègue surveillant » ; que la cour d’appel ne pouvait, sans se contredire, déclaré le
prévenu coupable d’avoir alerté le détenu d’une fouille tandis qu’elle a constaté que c’est un autre
surveillant qui y a procédé” ;
Sur le premier moyen de cassation proposé par M. Y..., pris de la violation des articles 111-4, 121-4,
121-5, 12166, 121-7,321-1 du code pénal, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut et
contradiction de motifs, manque de base légale ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu que pour infirmer le jugement et déclarer les prévenus coupables, l’arrêt retient qu’à la demande
de M. X..., M. Y... a alerté M. Z... et lui a enjoint, aux termes du mot glissé sous la porte, de dissimuler
son téléphone, que les surveillants, en informant le détenu du caractère imminent d’une fouille et en lui
donnant le temps nécessaire à la dissimulation des objets, ont tous deux accompli un acte positif
favorisant le recel, délit continu, d’objets illicites par ce détenu, peu important que les objets aient
finalement été découverts ; que les juges ajoutent que les termes de l’avertissement démontrent que les
deux surveillants savaient que M. Z... était en possession d’un téléphone portable et que leur qualité de
surveillants pénitentiaires et leur connaissance des règlements applicables à la vie carcérale établissent
qu’ils avaient parfaitement conscience de l’illicéité du fait principal imputable au détenu et ont
cependant sciemment fait le choix de s’y associer ;
Attendu qu’en l’état de ces énonciations, la cour d’appel a justifié sa décision dès lors que, d’une part,
le délit de recel étant continu, l’avertissement fourni par les deux prévenus a contribué à faciliter une
dissimulation visant à permettre, même sur une courte période et malgré la découverte des objets durant
la fouille, la poursuite de la détention illicite caractérisant la complicité du délit de recel retenue par la
cour et, d’autre part, l’aide ou l’assistance apportée, en connaissance de cause, à l’auteur du délit, même

43
par l’intermédiaire d’un autre complice, constitue la complicité incriminée par l’article 121-7 du code
pénal ;
D’où il suit que les moyens doivent être écartés ; (…)

***

Cas n° 1. Jeanne, Sandrine et Gabrielle sont amies depuis toujours. Pour fêter l’anniversaire de Jeanne,
Sandrine et Gabrielle ont décidé de lui offrir un magnifique scooter, d’une marque italienne de luxe.
Cependant, le prix du scooter étant exorbitant, elles ont décidé de le subtiliser dans un garage
automobile, à la nuit tombée. Leur plan est très sommaire : Sandrine est chargée de faire le guet, et de
prévenir Gabrielle par SMS si quelqu’un s’approche. Gabrielle s’est introduite dans le garage, a repéré
le deux-roues tout neuf, et a commencé à chercher la clef permettant de le démarrer.
Malheureusement, elle n’avait pas anticipé la présence d’un vigile, qui se dirige droit vers elle. Alors
qu’il ouvre la bouche pour l’interpeller, Gabrielle lui assène un violent coup sur la tête avec un casque
de moto. Le vigile s’écroule sur le coup. Gabrielle court vers le scooter et s’en empare.
Sandrine, alertée par le bruit, a appelé Jeanne qui les a rejointes en voiture. Elles s’enfuient toutes les
trois, Jeanne prenant la tête de la fuite afin d’échapper à la police.
Quelques jours après, elles apprennent que le vigile a subi une incapacité totale de travail d’un mois, et
que Gabrielle a été identifiée grâce aux images de vidéo surveillance.
Sandrine et Jeanne peuvent-elles être considérées comme complices de vol avec violences ?

***

II. LA RESPONSABILITE PENALE DE LA PERSONNE MORALE

Document n° 2 - Crim. 28 juin 2016, n° 15-83862, Bull. crim. n° 201.

Les moyens étant réunis ;


Attendu qu’il résulte de l’arrêt attaqué et des pièces de procédure que le 5 septembre 2010, au cours
d’une kermesse organisée par la commune d’Anor, une structure gonflable type toboggan a basculé sur
le côté, provoquant la chute des enfants qui y jouaient dans un fossé situé en contrebas où coulait un
petit ruisseau ; que le jeune Xavier Z... a été grièvement blessé à la tête, et a dû subir plusieurs
interventions chirurgicales en raison de corps étrangers rentrés dans la plaie, probablement à l’origine
d’une surinfection récalcitrante ; que le tribunal correctionnel a déclaré M. Bernard X..., adjoint aux
affaires culturelles de la commune d’Anor et la commune d’Anor coupables de blessures involontaires
et tenus de réparer le préjudice des victimes constituées parties civiles, que ces prévenus ont interjeté
appel principal de la décision, le ministère public ayant formé un appel incident ;
Attendu que, pour déclarer M. X...et la commune d’Anor coupables des délits de blessures involontaires,
l’arrêt retient que la cause de l’accident est la résultante de l’absence d’arrimage de la structure au sol,
de son emplacement sur un terrain en pente ayant favorisé son basculement à proximité d’un fossé
expliquant la gravité des blessures de Xavier Z., ainsi que l’insuffisance du personnel de surveillance ;
qu’en l’absence d’un seul de ces facteurs l’accident ne se serait pas produit ou n’aurait pas eu ces
conséquences ; que les juges relèvent que M. X..., qui disposait d’une délégation du conseil municipal
pour organiser cette kermesse en sa qualité d’adjoint aux affaires culturelles de la commune, s’était
rendu sur le site et avait assisté aux opérations d’installation de la structure gonflable, qu’il a déclaré
aux gendarmes qu’il avait estimé que la structure n’avait pas besoin d’être fixée au sol en l’absence de
vent ce jour-là, et qu’il avait lui-même désigné l’emplacement du toboggan alors que les moniteurs de
la société SARL Air Ambiance Animation, qui avait fourni cette attraction, lui avaient conseillé un autre
lieu d’implantation sur un terrain plat et à distance suffisante des obstacles, ce qui en aurait aussi facilité
la surveillance ; que la juridiction du second degré en a déduit l’existence d’une faute caractérisée de M.

44
X...engageant sa responsabilité personnelle ainsi que celle de la commune pour avoir exposé les enfants
utilisateurs du toboggan à un risque d’une particulière gravité qu’il ne pouvait ignorer au regard des
préconisations des moniteurs ainsi que de la configuration des lieux ;
Attendu qu’en l’état de ces énonciations, d’où il résulte que l’accident est survenu à l’occasion d’une
activité de loisirs susceptible d’une délégation de service public, mise en œuvre par la commune au
moyen d’un contrat de prestation de service conclu avec une société privée, et pouvant donner lieu à
responsabilité pénale de la collectivité territoriale du fait de la faute caractérisée de son représentant en
application de l’article 121-2 du code pénal, la cour d’appel, qui, dans l’exercice de son pouvoir
souverain, a, sans insuffisance ni contradiction, caractérisé en tous ses éléments les infractions dont elle
a déclaré les prévenus coupables, a justifié sa décision ;
D’où il suit que les moyens doivent être écartés ; Et attendu que l’arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE les pourvois ; (…)

III. La minorité

Document 3 – Extraits du code pénal et du code de la justice pénale des mineurs.

Le code de la justice pénale des mineurs est venu remplacer l’ordonnance du 2 février 1945 relative à
l’enfance délinquante. Ce code est entré en vigueur le 30 septembre 2021.

• Droit antérieur :

Art. 122-8 du code pénal : « Les mineurs capables de discernement sont pénalement responsables des
crimes, délits ou contraventions dont ils ont été reconnus coupables, dans des conditions fixées par une
loi particulière qui détermine les mesures de protection, d’assistance, de surveillance et d’éducation dont
ils peuvent faire l’objet.
Cette loi détermine également les sanctions éducatives qui peuvent être prononcées à l’encontre des
mineurs de dix à dix-huit ans ainsi que les peines auxquelles peuvent être condamnés les mineurs de
treize à dix-huit ans, en tenant compte de l’atténuation de responsabilité dont ils bénéficient en raison
de leur âge ».

• Droit positif :

Art. 122-8 du code pénal : « Les mineurs capables de discernement sont pénalement responsables des
crimes, délits ou contraventions dont ils ont été reconnus coupables, en tenant compte de l’atténuation
de responsabilité dont ils bénéficient en raison de leur âge, dans des conditions fixées par le code de la
justice pénale des mineurs ».

Art. L. 11-1 du code de la justice pénal des mineurs : « Lorsqu’ils sont capables de discernement, les
mineurs, au sens de l’article 388 du code civil, sont pénalement responsables des crimes, délits ou
contraventions dont ils sont reconnus coupables.
Les mineurs de moins de treize ans sont présumés ne pas être capables de discernement. Les mineurs
âgés d’au moins treize ans sont présumés être capables de discernement ».

Question : Comparez les deux versions de la législation et relevez les changements opérés par la
réforme quant aux conditions d’engagement de la responsabilité pénale d’un mineur.
Qu’en pensez-vous ?

45
IV. LE TROUBLE MENTAL

Document n° 4 - Crim. 14 avril 2021, n° 20-80.135, affaire dite Halimi.

Faits et procédure
1. Le 4 avril 2017 à 5 heures 35, des fonctionnaires de police du 11ème arrondissement de Paris sont
intervenus au domicile de la famille P..., [...], à la suite d’un appel téléphonique avertissant que cette
famille était victime d’une séquestration. Après avoir forcé la porte, les policiers ont interpellé M. H...
Z... dans la pièce principale, en train de réciter des versets du Coran.
2. Dans le même temps, les policiers ont découvert le corps sans vie d’une femme, Mme J... X... née
Y.... Les premiers éléments ont montré qu’elle était tombée du balcon d’un appartement situé dans
l’immeuble contigu.
3. Une information judiciaire a été ouverte le 14 avril 2017 des chefs d’homicide volontaire et
d’arrestation, enlèvement, détention ou séquestration avec absence de libération volontaire avant le
septième jour.
4. Le 10 juillet 2017, M Z... a été mis en examen de ces chefs. Après la délivrance d’un réquisitoire
supplétif, la circonstance que les faits ont été commis à raison de l’appartenance vraie ou supposée de
la victime à une race ou une religion déterminée a été notifiée à l’intéressé.
5. Par ordonnance de transmission de pièces aux fins de saisine de la chambre de l’instruction, en date
du 12 juillet 2019, les juges d’instruction, après avoir écarté la circonstance aggravante précitée, ont
estimé qu’il existait contre M. Z..., d’une part, des charges suffisantes d’avoir commis les faits
d’homicide volontaire et de séquestration qui lui étaient reprochés et d’autre part, des raisons plausibles
d’appliquer le premier alinéa de l’article 122-1 du code pénal.
6. Les parties civiles et le ministère public ont interjeté appel de cette ordonnance.[…]
Enoncé des moyens
18. Le troisième moyen proposé aux intérêts de Mmes E... Y..., D... Y... et de M. F... Y... critique l’arrêt
en ce qu’il a déclaré M. Z... irresponsable pénalement en raison d’un trouble psychique ou
neuropsychique ayant aboli son discernement ou le contrôle de ses actes au moment des faits, alors :
« 1°/ que l’article 122-1, alinéa 1er, du code pénal prévoit l’irresponsabilité pénale d’une personne
atteinte « d’un trouble psychique ou neuro-psychique » ; que par cette disposition, sont visées les
maladies mentales ; que les articles 706-119 et suivants du code de procédure pénale prévoyant que la
chambre de l’instruction peut prendre un arrêt « d’irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental
», ne renvoie qu’aux dispositions du code de la santé publique relatives à la « lutte contre les maladies
mentales » et non aux dispositions relatives à la « lutte contre la toxicomanie » ; que la consommation
de stupéfiants n’est pas une maladie mentale ; qu’en considérant cependant que M. Z..., consommateur
régulier de cannabis, pouvait bénéficier de cette cause d’irresponsabilité, la chambre de l’instruction a
méconnu les articles 6 et 7 de la convention européenne des droits de l’homme, 111-4 et 122-1 alinéa
1er du code pénal, 591, 593 et 706-119 et suivants du code de procédure pénale ;
2°/ que l’acte volontaire de consommation de stupéfiants, prohibé par l’article L. 3421-1 du code de la
santé publique, est constitutif d’un comportement fautif qui exclut l’irresponsabilité ; que le mis en
examen ayant volontairement consommé du cannabis, la chambre de l’instruction ne pouvait pas en
déduire son irresponsabilité ; que dès lors la chambre de l’instruction a méconnu les articles 6 et 7 de
la Convention européenne des droits de l’homme, L. 3421-1 du code de la santé publique, 122-1, alinéa
1er, du code pénal, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
3°/ que la consommation de cannabis a pour but d’obtenir une modification de l’état de conscience ;
que le fait qu’une personne n’ait pas encore personnellement connu tel trouble psychique précis lié à la
consommation de stupéfiants n’exclut pas sa conscience des risques encourus par cette consommation ;
qu’en déduisant l’irresponsabilité pénale du mis en examen du seul fait qu’il n’avait pas encore eu de

46
bouffée délirante à la suite de sa consommation de stupéfiants, la chambre de l’instruction a méconnu
les articles 121-1, alinéa 1er, du code pénal, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
4°/ que la chambre de l’instruction ne peut pas constater que les propos tenus par le mis en examen «
avant et après de défenestrer J... X... » « illustrent un reste de conscience », constater également que le
mis en examen a « volontairement » précipité la victime de son balcon, a agi en ayant « conscience du
judaïsme de Mme X... », et en déduire cependant l’abolition de son discernement au moment des faits ;
qu’en se prononçant par ces motifs contradictoires, la chambre de l’instruction n’a pas justifié sa
décision et a méconnu les articles 121-1 alinéa 1er du code pénal, 591 et 593 du code de procédure
pénale. »
19. Le quatrième moyen proposé aux intérêts de Mme E... Y..., de Mme D... Y... et de M. F... Y... fait
valoir qu’il est reproché à la chambre de l’instruction d’avoir déclaré M. Z... irresponsable pénalement
en raison d’un trouble psychique ou neuropsychique ayant aboli son discernement ou le contrôle de ses
actes au moment des faits, alors « qu’à supposer que la consommation de stupéfiants ne fasse pas
obstacle à l’application de l’alinéa 1er de l’article 122-1 du code pénal dès lors qu’elle a eu pour effet
d’abolir le discernement du consommateur, encore faut-il que celui-ci n’ait pas eu conscience que
l’usage de stupéfiants puisse produire un tel effet ; qu’en retenant que le fait que la bouffée délirante
aiguë, entrainée par la consommation récemment accrue de cannabis, est d’origine exotoxique et due à
la consommation régulière de cannabis ne faisait pas obstacle à ce que soit reconnue l’existence d’un
trouble psychique ou neuropsychique ayant aboli le discernement de M. Z... ou le contrôle de ses actes
dès lors qu’aucun élément du dossier d’information n’indiquait que la consommation de cannabis par
l’intéressé avait été effectuée avec la conscience que cet usage de stupéfiants puisse entraîner une
bouffée délirante, la chambre de l’instruction, qui a ainsi seulement relevé que l’absence d’une telle
conscience n’était pas exclue là où elle devait en constater le caractère certain, a méconnu les articles
121-1, alinéa 1er, du code pénal, 591, 593 et 706-120 du code de procédure pénale. »
20. Le moyen unique proposé aux intérêts de Mme A... X..., M. C... X... et Mme B... X..., repris pour
le compte de Mme E... Y..., de Mme D... Y... et de M. F... Y..., pris en ses six premières branches critique
l’arrêt en ce qu’il a, statuant en application de l’article 706-120 du code de procédure pénale, et après
avoir dit notamment qu’il existe des charges suffisantes contre M. Z... d’avoir à Paris, le 4 avril 2017,
volontairement donné la mort à J... X..., avec la circonstance que les faits ont été commis à raison de
l’appartenance ou de la non-appartenance, vraie ou supposée, de la victime à une prétendue race, une
ethnie, une nation ou une religion déterminée, déclaré ce dernier irresponsable pénalement en raison
d’un trouble psychique ou neuropsychique ayant aboli son discernement ou le contrôle de ses actes au
moment des faits, alors :
« 1°/ que dès lors qu’il résulte de la prise volontaire de stupéfiants, constitutive d’une faute, le trouble
psychique ou neuropsychique susceptible de conduire à l’abolition du discernement, n’est pas
exonératoire de responsabilité ; qu’en retenant que la circonstance que la bouffée délirante aigüe,
entrainée par la consommation récemment accrue de cannabis, soit d’origine exotoxique et due à la
consommation régulière de cannabis ne faisait pas obstacle à ce que soit reconnue l’existence d’un
trouble psychique ou neuropsychique ayant aboli le discernement de M. Z..., la chambre de l’instruction
a violé les articles 122-1 du code pénal, 706-120 et 706-125 du code de procédure pénale ;
2°/ que le seul fait pour une personne de consommer des stupéfiants, même sans avoir la conscience
des effets potentiels sur son discernement, exclut la prise en considération de l’abolition du
discernement en résultant ; qu’en se fondant, pour retenir l’existence chez M.Z... au moment des faits
d’un trouble psychique ou neuropsychique ayant aboli son discernement ou le contrôle de ses actes, sur
la circonstance inopérante qu’il ne résultait d’aucun élément du dossier d’information qu’il avait
consommé du cannabis avec la conscience que cet usage puisse entraîner une bouffée délirante aigüe,
la chambre de l’instruction a violé les articles 122-1 du code pénal, 706-120 et 706-125 du code de
procédure pénale ;
3°/ que la consommation de stupéfiants, qui constitue un délit et une circonstance aggravante
d’infractions, ne peut dès lors constituer une cause d’exonération de la responsabilité pénale ; qu’en
retenant que la circonstance que la bouffée délirante soit d’origine exotoxique et due à la consommation
régulière de cannabis ne faisait pas obstacle à ce que soit reconnue l’existence d’un trouble psychique

47
ou neuropsychique ayant aboli le discernement de M. Z..., la chambre de l’instruction a violé les articles
122-1 du code pénal, 706-120 et 706-125 du code de procédure pénale ;
4°/ qu’en tout état de cause, lorsqu’elle rend un arrêt d’irresponsabilité pénale pour cause de trouble
mental, la chambre de l’instruction constate le trouble psychique ou neuropsychique ayant aboli le
discernement ou le contrôle des actes ; qu’en jugeant que la circonstance que la bouffée délirante aigüe,
entraînée par la consommation récemment accrue de cannabis, soit d’origine exotoxique et due à la
consommation régulière de cannabis ne faisait pas obstacle à ce que soit reconnue l’existence d’un
trouble psychique ou neuropsychique ayant aboli le discernement de M. Z... ou le contrôle de ses actes,
puisqu’aucun élément du dossier d’information n’indiquait que sa consommation du cannabis eût été
effectuée avec la conscience que cet usage de stupéfiants pût entraîner une telle bouffée délirante, la
chambre de l’instruction qui n’a ainsi pas constaté que l’auteur des faits avait consommé des stupéfiants
sans avoir conscience des effets susceptibles d’abolir son discernement n’a pas caractérisé l’abolition
de son discernement et a ainsi violé les articles 122-1 du code pénal et 706-125 du code de procédure
pénale ;
5°/ qu’en retenant l’existence de charges suffisantes de commission des faits à raison de l’appartenance
de la victime à la religion juive ce dont il résultait que l’auteur des faits avait conscience de donner à
son acte un mobile antisémite tout en jugeant néanmoins l’existence d’un trouble psychique ou
neuropsychique ayant aboli son discernement ou le contrôle de ses actes, la chambre de l’instruction
n’a pas légalement justifié sa décision et ainsi violé les articles 122-1 du code pénal, 706-120 et 706-
125 du code de procédure pénale ;
6°/ qu’en tout état de cause, en retenant, d’une part, que les déclarations de M. Z... disant qu’il s’était
senti plus oppressé à cause de la torah et du chandelier, qu’il pensait que le démon était Mme X...,
associées aux cris qu’il avait poussés « Allah Akbar, c’est le sheitan, je vais la tuer », « j’ai tué le sheitan
», « j’ai tué un démon » et aux constatations expertales selon lesquelles la conscience qu’il avait eue du
judaïsme de Mme X... avait associé cette dernière au diable et avait déclenché le déchainement de
violence contre elle constituaient des charges suffisantes de commission des faits à raison de
l’appartenance de la victime à la religion juive, tout en jugeant, d’autre part, qu’il n’existe pas de doute
sur l’existence, chez M. Z..., au moment des faits, d’un trouble psychique ou neuropsychique ayant
aboli son discernement ou le contrôle de ses actes, la chambre de l’instruction s’est contredite, privant
ainsi sa décision de tout motif en violation de l’article 593 du code de procédure pénale. »
Réponse de la Cour
21. Les moyens sont réunis.
22. Pour dire qu’il existe des charges suffisantes contre M. Z... d’avoir arrêté, enlevé, détenu ou
séquestré la famille P..., et donné la mort à Mme X..., l’arrêt énumère les éléments matériels réunis
contre l’intéressé, constitués de ses déclarations, des constatations expertales et des différents
témoignages recueillis.
23. Les juges retiennent également que les déclarations de M. Z..., disant qu’il s’était senti plus oppressé
après avoir vu la torah et le chandelier, et qu’il pensait que le démon était Mme X..., jointes aux
témoignages indiquant l’avoir entendu crier « Allah Akbar, c’est le sheitan, je vais la tuer », puis « j’ai
tué le sheitan » et « j’ ai tué un démon », et aux constatations des experts selon lesquelles la connaissance
du judaïsme de Mme X... a conduit la personne mise en examen à associer la victime au diable, et a
joué un rôle déclencheur dans le déchaînement de violence contre celle-ci, constituent des charges
suffisantes de commission des faits à raison de l’appartenance de la victime à la religion juive.
24. Pour dire que le discernement de la personne mise en examen était aboli au moment des faits, l’arrêt
relève que le récit de M. Z..., corroboré par celui des membres de sa famille et de la famille P..., montre
que ses troubles psychiques avaient commencé le 2 avril 2017, et ont culminé dans la nuit du 3 au 4
avril 2017, dans ce que les experts psychiatres ont décrit de manière unanime comme une bouffée
délirante.
25. Les juges relèvent que seul le premier expert saisi a estimé qu’en dépit du caractère indiscutable du
trouble mental aliénant, le discernement de M. Z... ne pouvait être considéré comme ayant été aboli, au
sens de l’article 122-1, alinéa 1er, du code pénal, du fait de la consommation volontaire et régulière de

48
cannabis ; que le deuxième collège d’experts a estimé que la bouffée délirante s’est avérée inaugurale
d’une psychose chronique, probablement schizophrénique et que ce trouble psychotique bref a aboli
son discernement, que l’augmentation toute relative de la prise de cannabis s’est faite pour apaiser son
angoisse et son insomnie, prodromes probables de son délire, ce qui n’a fait qu’aggraver le processus
psychotique déjà amorcé ; que le troisième collège d’experts a estimé que le sujet a présenté une bouffée
délirante caractérisée d’origine exotoxique orientant plutôt classiquement vers une abolition du
discernement au sens de l’article 122-1, alinéa 1er, du code pénal, étant précisé qu’au moment des faits
son libre arbitre était nul et qu’il n’avait jamais présenté de tels troubles antérieurement.
26. Les juges ajoutent que la circonstance que cette bouffée délirante soit d’origine exotoxique et due à
la consommation régulière de cannabis, ne fait pas obstacle à ce que soit reconnue l’existence d’un
trouble psychique ou neuropsychique ayant aboli son discernement ou le contrôle de ses actes,
puisqu’aucun élément du dossier d’information n’indique que la consommation de cannabis par
l’intéressé ait été effectuée avec la conscience que cet usage de stupéfiants puisse entraîner une telle
manifestation.
27. Ils concluent qu’il n’existe donc pas de doute sur l’existence, chez M. Z..., au moment des faits,
d’un trouble psychique ou neuropsychique ayant aboli son discernement ou le contrôle de ses actes.
28. En l’état de ces énonciations, déduites de son appréciation souveraine des faits et des preuves, la
chambre de l’instruction a, sans insuffisance ni contradiction, et en répondant aux chefs péremptoires
des conclusions dont elle était saisie, exposé les motifs pour lesquels elle a déclaré, d’une part, qu’il
existait à l’encontre de M. Z... des charges d’avoir commis les faits reprochés, d’autre part, qu’il était
irresponsable pénalement en raison d’un trouble psychique ou neuro-psychique ayant aboli son
discernement ou le contrôle de ses actes au moment des faits.
29. En effet, les dispositions de l’article 122-1, alinéa 1er, du code pénal, ne distinguent pas selon
l’origine du trouble psychique ayant conduit à l’abolition de ce discernement.
30. Les moyens doivent, en conséquence, être rejetés.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE les pourvois ;

V. LA LEGITIME DEFENSE.

Cas n° 2 : Armand est désespéré. Alors qu’il accueillait sa fille, son gendre, et sa petite-fille chez lui,
pour le week-end, dans sa belle maison de campagne de Normandie, un drame s’est produit.
Armand a le sommeil léger, et au milieu de la nuit, il a entendu un bruit inhabituel au salon. Il n’a pas
réfléchi et est descendu voir ce qui se tramait dans cette pièce. Il est alors tombé nez à nez avec un
cambrioleur, l’air très jeune, et muni d’un pistolet. Armand, chasseur aguerri s’est immédiatement rendu
compte qu’il s’agissait d’une arme factice. Rassuré sur ce point, il a sauté sur l’intrus, l’invectivant et
lui portant des coups.
Alors que le jeune homme battait en retraite, prêt à s’enfuir, un coup de feu a été tiré, et le cambrioleur
s’est écroulé au sol. Stupéfait, Armand s’est retourné et a découvert son gendre, l’air terrifié, un de ses
fusils de chasse à la main.
Le cambrioleur n’est pas décédé, mais restera infirme. Les gendarmes ont convoqué Armand et son
gendre, qui craignent tous deux des poursuites pénales pour violences volontaires.

En partant du postulat que l’infraction de violences volontaires est bien caractérisée dans tous ses
éléments constitutifs, les responsabilités pénales d’Armand d’une part, et de son gendre d’autre part,
pourront-t-elles être engagées ?

VI. ÉTAT DE NECESSITE (ET CONTROLE DE PROPORTIONNALITE IN CONCRETO)

49
Document n° 5 - Crim. 22 sept. 2021, n° 20-85.434.

Faits et procédure
1. Il résulte de l’arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.
2. Le 28 mai 2019, les portraits officiels du président de la République accrochés dans les mairies de
[Localité 2], [Localité 1], [Localité 4] et [Localité 3] (Gironde) ont été dérobés par plusieurs individus
agissant en réunion, à visage découvert, qui ont ensuite accroché, à la place du cadre, une affiche figurant
la silhouette du chef de l’Etat avec la formule « Urgence sociale et climatique – où est [K] ? ».
3. L’enquête a permis d’identifier M. [J] [O], Mmes [S] [T], [Z] [N], M. [A] [H], Mme [F] [I], MM. [U]
[B], [X] [M], et Mme [Y] [G] comme ayant pris part à ces faits.
4. Au cours de leur garde à vue, MM. [O], [H], [B] et Mme [N] ont refusé de se soumettre à un
prélèvement biologique, et M. [O] de se soumettre aux opérations de relevés signalétiques.
5. Par jugement du 20 décembre 2019, le tribunal correctionnel de Bordeaux a notamment déclaré les
huit prévenus coupables de vol en réunion, a déclaré MM. [O], [H], [B] et Mme [N] coupables de refus
de se soumettre à un prélèvement biologique, a déclaré M. [O] coupable de refus de se soumettre aux
opérations de relevés signalétiques, a ajourné le prononcé des peines, et a prononcé une mesure de
confiscation.
6. Les prévenus et le ministère public ont relevé appel de cette décision.
Moyens
Examen des moyens
Sur le premier moyen
Enoncé du moyen
7. Le moyen critique l’arrêt attaqué en ce qu’il a déclaré les prévenus coupables du chef de vol aggravé
ou de complicité de vol aggravé, alors :
« 1°/ que l’état de nécessité suppose que l’acte accompli face au danger soit être nécessaire à la
sauvegarde de la personne ou du bien ; qu’en retenant que l’état de nécessité ne pouvait être invoqué «
car, à supposer qu’il existe un «danger actuel ou imminent» menaçant les prévenus, résultant de
«l’urgence climatique», dont il n’appartient pas toutefois à la justice de dire s’il est réel ou supposé,
comme s’est aventuré à le dire le tribunal correctionnel, il n’existe aucun élément qui permette de
considérer que le vol des portraits du président de la République dans des mairies permette de
sauvegarder les prévenus du danger qu’ils dénoncent » cependant qu’elle ne pouvait statuer sur le
caractère nécessaire de l’acte accompli face au danger sans se prononcer sur l’existence et les
caractéristiques de ce dernier, la cour d’appel a violé l’article 122-7 du code pénal ;
2°/ que le caractère nécessaire, pour la sauvegarde des personnes et des biens, d’un acte consistant à
soustraire publiquement un portrait du président de la République accroché dans la salle des mariages
d’une mairie afin d’interpeller les pouvoirs publics et l’opinion sur la nécessité, avérée au regard
notamment des rapports du Haut conseil sur le climat, de rattraper le retard pris dans la mise en œuvres
des mesures permettant d’atteindre les objectifs fixés par les engagements internationaux de la France
en matière de lutte contre le dérèglement climatique, ne peut s’apprécier sans tenir compte du caractère
strictement proportionné des moyens mis en œuvre et de leurs effets ; qu’en se bornant à constater qu’il
n’existe aucun élément qui permette de considérer que le vol des portraits du président de la République
dans des mairies permette de sauvegarder les prévenus du danger qu’ils dénoncent et en refusant ainsi
de tenir compte de ce que les moyens employés, exempts de toute violence, ainsi que leurs effets,
demeuraient proportionnés et adaptés au regard de la nécessité précitée, la cour d’appel a violé l’article
122-7 du code pénal. »
Motivation
Réponse de la Cour

50
8. Pour rejeter le fait justificatif tiré de l’état de nécessité invoqué par les prévenus, l’arrêt attaqué énonce
qu’il n’existe aucun élément qui permette de considérer que le vol des portraits du président de la
République dans des mairies soit de nature à prévenir, au sens de l’article 122-7 du code pénal, le danger
climatique qu’ils dénoncent.
9. En l’état de ces énonciations, la cour d’appel, qui a souverainement estimé, par des motifs exempts
de contradiction et d’insuffisance, répondant à l’ensemble des chefs péremptoires des conclusions des
prévenus, qu’il n’était pas démontré que la commission d’une infraction était le seul moyen d’éviter un
péril actuel ou imminent, a justifié sa décision.
10. Ainsi, le moyen doit être écarté.
Moyens
Mais sur le deuxième moyen
Enoncé du moyen
11. Le moyen critique l’arrêt attaqué en ce qu’il a déclaré les prévenus coupables du chef de vol aggravé
ou de complicité de vol aggravé, alors « que nul ne peut être condamné pénalement pour un
comportement qui s’inscrit dans l’exercice de la liberté d’expression à l’égard d’un sujet d’intérêt
général et pour l’expression d’un propos qui n’est pas dépourvu d’une base factuelle suffisante, dès lors
que, compte tenu de la nature et du contexte de l’agissement en cause et du caractère limité de ses
incidences sur l’intérêt protégé au titre de l’infraction poursuivie, que cette dernière relève ou non de la
législation propre à l’exercice de la liberté de la presse, l’incrimination de l’agissement en cause
constituerait une ingérence disproportionnée dans la liberté d’expression ; qu’en retenant que la liberté
de la presse ne peut jamais justifier la commission d’un délit pénal, et en refusant ainsi de rechercher,
comme elle y était invitée, si l’action ayant consisté à soustraire publiquement des portraits du président
de la République accrochés dans les salles de mariages de différentes mairies et à les remplacer par des
affiches sur lesquelles figuraient l’ombre du président de la République et l’inscription «Urgence sociale
et climatique : - où est [K] ?», dans une démarche de protestation politique ayant pour objet de contester
la politique du chef de l’État, d’informer et de sensibiliser le public et le gouvernement sur l’urgence à
agir en matière de changement climatique et de dénoncer l’inaction des pouvoirs publics, ceci dans des
conditions ayant eu pour objet et pour effet de ne causer aucune atteinte aux personnes et de n’entraîner
au droit de propriété des collectivités publiques concernées qu’une atteinte négligeable, ne s’inscrivait
pas dans l’exercice de la liberté d’expression à l’égard d’un sujet d’intérêt général et pour l’expression
d’un propos qui n’était pas dépourvu d’une base factuelle suffisante et si son incrimination n’entraînait
pas, compte tenu de la nature et du contexte des comportements en cause et du caractère limité de ses
incidences sur l’intérêt protégé au titre de l’infraction de vol poursuivie, une ingérence disproportionnée
dans l’exercice de la liberté d’expression, la cour d’appel a violé l’article 10 de la Convention
européenne des droits de l’homme. »
Motivation
Réponse de la Cour
Vu les articles 10 de la Convention européenne des droits de l’homme et 593 du code de procédure
pénale :
12. Il résulte du premier de ces textes que toute personne a droit à la liberté d’expression, et que
l’exercice de cette liberté peut être soumis à certaines formalités, conditions, restrictions ou sanctions
prévues par la loi, qui constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, notamment
à la défense de l’ordre et à la prévention du crime, à la protection de la santé ou de la morale.
13. Selon le second, tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision.
L’insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence.
14. Ainsi que l’a déjà jugé la Cour de cassation, l’incrimination d’un comportement constitutif d’une
infraction pénale peut, dans certaines circonstances, constituer une ingérence disproportionnée dans
l’exercice de la liberté d’expression, compte tenu de la nature et du contexte de l’agissement en cause

51
(Crim., 26 octobre 2016, pourvoi n°15-83.774, Bull. n°278 ; Crim., 26 février 2020, pourvoi n°19-
81.827).
15. Pour déclarer les prévenus coupables de vols aggravés ou complicité de ces vols, l’arrêt attaqué
énonce que tous les prévenus ont eu l’intention d’appréhender ou d’aider à appréhender les portraits du
président de la République, se comportant à leur égard, durant le temps de cette appropriation, comme
leur véritable propriétaire.
16. Les juges ajoutent que la liberté d’expression, garantie par notre droit positif, ne peut être invoquée
en l’espèce, car elle ne peut jamais justifier la commission d’un délit pénal. Ils précisent que si la notion
juridique de lanceur d’alerte existe effectivement, elle ne peut trouver ici aucune application.
17. En se déterminant ainsi, sans rechercher, ainsi qu’il le lui était demandé, si l’incrimination pénale
des comportements poursuivis ne constituait pas, en l’espèce, une atteinte disproportionnée à la liberté
d’expression des prévenus, la cour d’appel n’a pas justifié sa décision.
18. La cassation est donc encourue de ce chef. […]
PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu d’examiner le quatrième moyen proposé, la Cour :
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l’arrêt susvisé de la cour d’appel de Bordeaux, en date
du 16 septembre 2020, et pour qu’il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ;

Questions :
1. Réalisez la fiche d’arrêt de la décision.
2. Les conditions de l’état de nécessité vous semblaient-elles réunies en l’espèce ? Que pensez-
vous des positions de la cour d’appel et de la Cour de cassation sur ce point ?
3. Quel élément est retenu par la Cour de cassation pour casser la décision rendue par la cour
d’appel ?
4. Les prévenus sont-ils d’ores et déjà exonérés de responsabilité pénale pour vol aggravé ?

VII. CONTROLE DE PROPORTIONNALITE IN CONCRETO

Document 6 – Crim. 15 juin 2022, n° 21-82.392, inédit.

Mme [Z] [K], Mme [N] [R] et Mme [L] [O] ont formé des pourvois contre l'arrêt de la cour d'appel de
Paris, chambre 2-9, en date du 7 avril 2021, qui a condamné, les deux premières, pour exhibition
sexuelle, à un mois d'emprisonnement avec sursis, la dernière, pour exhibition sexuelle, faux et usage,
à deux mois d'emprisonnement avec sursis et a ordonné une mesure de confiscation. (…)

Faits et procédure

1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.

2. Le 11 novembre 2018, Mmes [Z] [K], [N] [R] et [L] [O], militantes du mouvement dit « Femen », ont
été interpellées après avoir franchi la barrière de sécurité disposée sur l'[Adresse 1], à l'approche de la
délégation de nombreux chefs d'Etat se rendant à la cérémonie de commémoration du centenaire de
l'armistice de la première guerre mondiale. Elles avaient dénudé leurs poitrines, sur lesquelles étaient
inscrits les slogans : « Hypocrisy party », « Gangsta party » et « Fake peacemakers », et ont expliqué
qu'elles entendaient ainsi manifester leur opposition à l'invitation de ces chefs d'Etat au forum de Paris
sur la Paix.

3. Elles ont fait l'objet de poursuites du chef d'exhibition sexuelle, Mme [O] faisant également l'objet de
poursuites du chef de prise du nom d'un tiers, faux et usage de faux, en raison des circonstances de son
interpellation.

52
4. Par jugement du 13 novembre 2019, le tribunal correctionnel les a notamment relaxées du chef
d'exhibition sexuelle et a ordonné une mesure de confiscation.

5. Le procureur de la République a relevé appel de ce jugement.

Examen des moyens (…)

Sur le deuxième moyen

Enoncé du moyen

7. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a déclaré Mmes [O], [K] et [R] coupables d'exhibition
sexuelle, en répression les a respectivement condamnées à la peine de deux mois d'emprisonnement
avec sursis, un mois d'emprisonnement avec sursis, et un mois d'emprisonnement avec sursis et a
confirmé la confiscation des scellés, alors :

« 1°/ que la déclaration d'inconstitutionnalité et l'abrogation de l'article 222-32 du code pénal que ne
manquera pas de prononcer le Conseil constitutionnel à la suite de la question prioritaire de
constitutionnalité soulevée dans un mémoire séparé et motivé entraînera l'annulation de l'arrêt attaqué
par application des articles 61-1 et 62 de la Constitution ;

2°/ que l'article 222-32 du code pénal, dans sa version applicable aux faits, punit l'exhibition sexuelle
imposée à la vue d'autrui dans un lieu accessible aux regards du public d'un an d'emprisonnement et de
15 000 euros d'amende ; qu'en déclarant les prévenues coupables sur le fondement de ce texte, qui ne
définit pas clairement et précisément les actes susceptibles d'être poursuivis ainsi que l'élément moral,
la cour d'appel a violé les articles 111-3 du code pénal et 7 de la Convention européenne des droits de
l'homme ;

3°/ que dans le cas du délit prévu à l'article 222-32 du code pénal, la culpabilité ne peut être retenue si
le comportement du prévenu ou de la prévenue s'inscrit dans une démarche de protestation politique, et
que son incrimination, compte tenu de la nature et du contexte de l'agissement en cause, constituerait
une ingérence disproportionnée dans l'exercice de la liberté d'expression ; qu'en l'espèce, les prévenues
ont participé à une action militante pour protester contre l'invitation par le Président de la République
de quatre-vingt chefs d'État et de gouvernement à Paris afin de participer à la première édition du Forum
de Paris sur la Paix prévu les 11, 12 et 13 novembre 2018, qui coïncidait avec la cérémonie du centenaire
de l'armistice de la première guerre mondiale ; que les trois militantes, qui avaient le corps recouvert de
slogans, « Hypocrisy party », « Gangsta party » et « Fake peacemakers », inscrits sur leurs torses nus et
le logo Femen dans le dos, en rapport direct avec l'invitation des chefs d'Etat et de gouvernement au
Forum de la Paix, ont manifesté quelques instants sur l'[Adresse 1] lors du passage du cortège de la
délégation américaine ; que la condamnation prononcée du chef d'exhibition sexuelle, compte tenu de
la nature et du contexte de l'agissement en cause, constitue une ingérence disproportionnée qui ne répond
pas à un besoin social impérieux, en violation des articles 10 de la Convention européenne des droits de
l'homme, 222-32 du code pénal, 591 à 593 du code de procédure pénale ;

4°/ que dans le cas du délit prévu à l'article 222-32 du code pénal, la culpabilité ne peut être retenue si
le comportement du prévenu ou de la prévenue s'inscrit dans une démarche de protestation politique, et
que son incrimination, compte tenu de la nature et du contexte de l'agissement en cause, constituerait
une ingérence disproportionnée dans l'exercice de la liberté d'expression ; qu'en l'espèce, pour justifier
la déclaration de culpabilité des prévenues, la cour d'appel a relevé que s'il n'est pas contestable que leur
exhibition participait d'une démarche politique destinée à alimenter le débat public l'action menée
apparaît contrevenir à un autre droit garanti par la Convention européenne des droits de l'homme en ce
qu'elle s'est déroulée le 11 novembre 2018, date à laquelle les chefs d'Etat participaient en ce même lieu,
à la cérémonie de commémoration du centenaire de l'armistice de 1918 remontant les Champs-Elysées
pour se recueillir sur la tombe du soldat inconnu à l'Arc de Triomphe, que le devoir de mémoire postule
l'obligation morale de se souvenir d'un événement historique tragique et de ses victimes, afin de faire en

53
sorte qu'un événement de ce type ne se reproduise pas, qu'il a été promu aux lendemains de la première
guerre mondiale par des associations de victimes, puis par des collectivités territoriales et par des Etats
et qu'il peut se rattacher au droit à la vie ; que la cour en déduit que dans le cas d'espèce, l'atteinte à la
pudeur résultant de la demi-nudité s'étant produite non pas lors d'une manifestation culturelle mais à
l'occasion de la célébration d'un événement historique qui requérait une nécessaire dignité et en présence
de familles des défunts, ou de représentants d'associations de victimes de la première guerre mondiale,
d'officiel et de chefs d'Etat de la communauté internationale, les poursuites diligentées du chef
d'exhibition sexuelle ne constituent pas une atteinte disproportionnée à leur liberté d'expression, le but
légitime de protection de l'ordre public et des personnes présentes sur la voie publique pour la
commémoration confrontées à la nudité d'autrui correspondant, en ce jour particulier de centenaire du
11 novembre 1918, à un besoin social impérieux ; qu'en se prononçant par de tels motifs ni pertinents,
ni suffisants pour justifier l'entrave à la liberté d'expression des manifestantes, la cour d'appel n'a pas
légalement justifié sa décision au regard des articles 10 de la Convention européenne des droits de
l'homme et 222-32 du code pénal, et ainsi violé les articles 591 à 593 du code de procédure pénale. »

Réponse de la Cour

Sur le moyen, pris en sa première branche

8. Par arrêt du 16 février 2022, la Cour de cassation a dit n'y avoir lieu de transmettre au Conseil
constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité portant sur l'article 222-32 du code pénal. Il
en résulte que le grief est devenu sans objet.

Sur le moyen, pris en sa deuxième branche

9. Pour caractériser l'infraction d'exhibition sexuelle, la cour d'appel énonce que l'élément matériel de
l'infraction, même s'il est contesté par la défense, réside dans le dénudement des seins.

10. Les juges ajoutent que la Cour de cassation a jugé que la nudité partielle peut caractériser le délit
d'exhibition sexuelle et que l'exposition des seuls seins nus d'une femme entre dans les prévisions de
l'article 222-32 du code pénal, l'infraction ne nécessitant pas une « connotation sexuelle » particulière
ou une intention sexuelle.

11. Ils en concluent que la contestation des prévenues quant à l'intention sexuelle de leur acte est
indifférente, dès lors que la seule réalisation volontaire de l'acte suffit à caractériser l'élément
intentionnel.

12. En l'état de ces motifs qui détaillent chacun des éléments constitutifs de l'infraction poursuivie, la
cour d'appel a justifié sa décision sans encourir le grief allégué.

Sur le moyen, pris en ses deux dernières branches

13. Pour écarter l'argumentation des prévenues relative à l'atteinte disproportionnée à leur liberté
d'expression que constitue leur condamnation, la cour d'appel énonce qu'il appartient au juge national,
juge de droit commun des droits et principes définis par la Convention européenne des droits de
l'homme, tels qu'interprétés par la Cour européenne des droits de l'homme, de vérifier la conformité des
normes internes à ces droits et principes en mettant en balance les intérêts en présence sur la base d'une
appréciation acceptable des faits pertinents et, le cas échéant, d'en écarter l'application en cas
d'incompatibilité.

14. Les juges ajoutent que la nudité en public peut être considérée comme une forme d'expression
relevant de l'article 10 de la Convention européenne des droits de l'homme, et que l'article 222-32 du
code pénal, qui présente l'accessibilité, la clarté et la prévisibilité requises par l'article 10 précité,
constitue néanmoins une ingérence prévue par la loi dans l'expression de cette liberté.

54
15. Ils précisent que, à l'occasion d'une précédente affaire concernant une militante « Femen », la Cour
de cassation n'a pas censuré un arrêt de relaxe, car il résultait des énonciations des juges du fond que le
comportement de la prévenue s'inscrivait dans une démarche de protestation politique, et que son
incrimination, compte tenu de la nature et du contexte de l'agissement en cause, aurait constitué une
ingérence disproportionnée dans l'exercice de la liberté d'expression, et en déduisent qu'il reste donc la
possibilité aux juges du fond d'apprécier cette nature et ce contexte de l'agissement.

16. Ils relèvent qu'au cas présent, l'action des trois prévenues n'a duré qu'un bref instant, si bien que le
trouble à l'ordre public a très rapidement cessé, mais que cette brièveté est liée à l'efficacité des
gendarmes mobiles.

17. Ils ajoutent que les prévenues se sont concertées pour agir simultanément, l'une profitant de ce que
l'autre était interceptée par les gendarmes pour agir à son tour, et que malgré la simultanéité de ces
actions, qui étaient de nature à déstabiliser la sécurité assurée par les services d'ordre, aucune n'a réussi
à atteindre le cortège officiel.

18. Ils relèvent encore que leur exhibition participait d'une démarche politique destinée à alimenter le
débat public, mais que l'action menée apparaît contrevenir à un autre droit garanti par la Convention
européenne des droits de l'homme en ce qu'elle s'est déroulée le 11 novembre 2018, date à laquelle les
chefs d'Etat participaient, en ce même lieu, à la cérémonie de commémoration du centenaire de
l'armistice de 1918, remontant les Champs-Elysées pour se recueillir sur la tombe du soldat inconnu à
l'Arc de Triomphe.

19. Ils observent que l'atteinte à la pudeur résultant de la demi-nudité s'est produite non pas lors d'une
manifestation culturelle mais à l'occasion de la célébration d'un événement historique qui requérait une
nécessaire dignité, et en présence de familles des défunts, ou de représentants d'associations de victimes
de la première guerre mondiale, de personnalités officielles et de chefs d'Etat de la communauté
internationale, et en concluent que dans le cas d'espèce, la mesure contestée ne porte pas une atteinte
excessive à la liberté d'expression des prévenues, indépendamment du but légitime poursuivi.

20. En l'état de ces motifs dénués d'insuffisance, la cour d'appel a justifié sa décision sans encourir les
griefs allégués, pour les motifs qui suivent.

21. En premier lieu, elle a constaté que le comportement des prévenues a causé un trouble à l'ordre
public en raison de leur irruption au cours d'une cérémonie patriotique devant se dérouler dans le calme
et la dignité.

22. En second lieu, elle a relevé que si ce trouble n'a duré que peu de temps, c'est uniquement en raison
de l'intervention rapide des forces de l'ordre, alors que les prévenues s'étaient concertées pour échapper
à cette intervention.

23. Dès lors, le moyen doit être écarté. (…)

Question : sans faire la fiche d’arrêt, après avoir lu attentivement cette décision, prenez position pour ou
contre l’arrêt. Énumérez les arguments, sous forme de tirets, au soutien de votre position afin de nourrir un
débat durant la séance de TD.

55

Vous aimerez peut-être aussi