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DROIT ADMINISTRATIF :
GRANDS SERVICES PUBLICS
DE L’ETAT

Professeur : MBOKO DJANDIMA


Chef de Travaux : KOMO YANDA
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PLAN DU COURS

INTRODUCTION

1ère Partie : THEORIE DU SERVICE PUBLIC

Titre I : La notion de service public

Chapitre I : L’émergence du concept de service public

Chapitre II : Les définitions du service public

Chapitre III : Les grandes catégories du service public

Titre II : L’organisation du service public

Chapitre I : La création des services publics

Chapitre II : La gestion des services publics

Chapitre III : Le contrôle des services publics

Chapitre IV : La suppression des services publics

2ème Partie : LES SERVICES PUBLICS D’ETAT

Titre I : Les services centraux d’Etat

Chapitre I : Les services d’Etat dans la coordination de l’action de l’Etat

Chapitre II : Les services d’Etat dans le maintien de l’ordre et la défense nationale

Chapitre III : Les services d’Etat dans la régulation des activités économiques

Titre II : Les services déconcentrés d’Etat

Chapitre I : Les services déconcentrés des ministères du gouvernement central

Chapitre II : Les services déconcentrés d’Etat à l’extérieur du pays


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Textes importants à avoir :

- La Constitution
- La Charte africaine sur les valeurs et principes du service public et de l’administration
- Loi du 7 juillet 2008 portant dispositions générales relatives à la transformation des
entreprises publiques
- Loi du 7 juillet 2008 portant dispositions générales applicables aux établissements
publics
- Loi du 7 juillet 2008 fixant les règles relatives à l’organisation et à la gestion du
portefeuille de l’Etat
- Loi organique du 31 juillet 2008 portant principes fondamentaux relatifs à la libre
administration des provinces
- Loi organique du 7 octobre 2008 portant composition, organisation et
fonctionnement des entités territoriales décentralisées et leur rapport avec l’Etat et
les provinces
- Loi-cadre du 11 février 2014 de l’enseignement national
- Loi organique du 15 octobre 2013 portant organisation et fonctionnement de la Cour
Constitutionnelle
- Loi organique du 11 avril 2013 portant organisation, fonctionnement et compétence
des juridictions de l’ordre judiciaire
- Loi du 17 juillet 1981 portant statut du personnel de carrière des services publics de
l’Etat
- Ordonnance du 11 juin 2012 portant organisation et fonctionnement du
gouvernement, modalités pratiques de collaboration entre le Président de la
République et le Gouvernement ainsi qu’entre les membres du Gouvernement
- Ordonnance du 11 juin 2012 fixant les attributions des Ministères

3 textes importants en cours d’élaboration :

- Le projet de loi organique fixant l’organisation et le fonctionnement des services


publics du pouvoir central, des provinces et des ETD
- Le projet de loi portant statut des agents de carrière des services publics de l’Etat
- La proposition de loi organique portant organisation, compétence et fonctionnement
des juridictions de l’ordre administratif
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INTRODUCTION

§1 La légitimité et la finalité de l’action publique

Le moteur de l’action administrative est essentiellement désintéressé. Le vocable de


« service public » désigne dans toute société un ensemble d’activités considérées
comme étant d’intérêt commun.

Le service public est le phénomène central de la vie administrative. Il traduit le mythe


d’un Etat généreux, bienveillant, uniquement soucieux du bien-être de tous, c’est-à-dire
le mythe d’un Etat Providence.

Le thème du service public sous-entend une vision très différente de l’Etat : un Etat
soumis au droit, c’est-à-dire la conception de l’Etat de police fait place à celle de l’Etat de
droit.

 L’Etat-Providence est un idéal.


 L’Etat de police : la fin justifie les moyens. L’administration se passait du droit et il n’y
avait pas de commission de censure pour l’administration. Or, dans l’Etat de droit, on
se soumet à la loi.
 L’action de l’Etat n’est légitime que lorsqu’elle est destinée à servir le citoyen.

Construisant une nouvelle théorie de l’Etat qui n’est pas fondée sur l’idée de puissance
mais sur celle des services publics, Léon DUGUIT voit l’Etat comme une coopération des
services publics organisés et contrôlés par les gouvernants.

§2 La spécificité du droit des services publics

Le droit des services publics, dénommé, dans le programme officiel des enseignements à
la faculté de Droit, « Grands Services Publics de l’Etat », est une composante du droit
administratif. Il fait partie de ce qu’il convient d’appeler « droits administratifs spéciaux ».

Le droit administratif enseigné en 3ème année est un droit administratif général alors que
le droit de la fonction publique, le droit administratif des biens, le droit des contrats
administratifs, le droit des collectivités locales, le droit du contentieux administratif ou le
droit des services publics sont des droits administratifs spéciaux.

Sous le titre de « Grands services publics de l’Etat », on pourrait être conduit à seulement
examiner les services publics d’Etat, c’est-à-dire les services publics relevant du pouvoir
central. Mais cela est insuffisant car les services publics locaux sont tout aussi grands
(importants) pour les citoyens. Pour les usagers, le service d’hygiène, le service anti-
incendie, le transport urbain, l’enlèvement des ordures ménagères, les cantines scolaires,
etc. sont des services importants, essentiels pour la vie dans la collectivité.
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 L’intitulé du cours pose problème car on est amené à penser qu’aux services publics
de l’Etat, du pouvoir central alors que tous les services publics sont importants. Dès
qu’un service est élevé au rang de « service public », c’est qu’il est important pour la
société.

Les services publics sont certes étudiés sous l’angle classique du droit administratif mais
ils sont également analysés sous l’angle global du droit public, plus particulièrement sous
l’angle du droit constitutionnel.

Un service public, pouvant en outre exercer des activités économiques, il est aujourd’hui
de plus en plus analysé sous l’angle novateur du droit public des affaires ou du droit
public économique.

§3 Les outils méthodologiques

La doctrine juridique définit la méthode comme la manière dont les juristes organisent
leur raisonnement pour parvenir à une solution juridique.

La méthode constitue un instrument ou un moyen pour parvenir à une solution.


Autrement dit, la méthode est l’équipement élémentaire nécessaire pour diverses
modalités du travail juridique.

Une seule et unique méthode qu’on pourrait qualifié de juridique n’existe pas. D’après
certains, la méthode juridique serait le recours aux textes.

Il n’existe pas non plus une seule et unique méthode juridique en droit public. De même,
il n’existe pas une méthode ou encore une méthodologie mais des méthodes et des
méthodologies, en fonction de l’objet de l’étude ou de la recherche.

Le droit administratif, dont le droit des services publics n’est qu’une composante, est plus
existentiel que conceptuel. C’est pourquoi il y a particulièrement recours à l’induction, à
l’emploi des catégories juridiques, à l’usage des fictions et présomptions, et de manière
générale, au type d’interprétation juridique ainsi qu’à la méthode diachronique et à la
méthode comparative.

L’induction consiste, à partir de cas individuels, pour accéder aux énoncés universels. Il ne
s’agit pas de poser la théorie pour en déduire ensuite les conséquences juridiques
pratiques. Il faut partir de la pluralité des solutions d’espèce afin de procéder par
induction à un principe, à une construction ou à une catégorie de portée générale. En
d’autres termes, le procédé inductif consiste en une analyse critique de la pratique
juridique réelle pour en dégager des principes car il n’est pas question en droit
administratif de poser la théorie pour ensuite en déduire les conséquences juridiques
pratiques comme en droit civil.
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Le mot « raisonnement » désigne à la fois une activité de l’esprit et le produit de cette


activité. Le raisonnement en droit administratif suppose de faire entrer une donnée dans
l’une des catégories que connait ce droit (personne morale de droit administratif, acte
administratif unilatéral, service public, agent public, travail public, marché public, etc.).

Une catégorie juridique peut être définie comme une notion à laquelle est attaché un
statut, c’est-à-dire un ensemble de règles. En d’autres termes, mener un raisonnement
en droit administratif revient à classer l’objet étudié dans la bonne catégorie car à ce
moment, on peut lui appliquer les règles qui sont attachées à cette catégorie.

L’usage des fictions et des présomptions ne se fait pas qu’en droit privé vu que le droit
administratif les utilise également.

Les fictions conduisent à considérer comme vrai des situations qui ne correspondent pas
à l’observation des faits. Par exemple, l’acte retiré ou annulé est sensé n’avoir jamais
existé ou encore la théorie du fonctionnaire de fait.

Les présomptions conduisent au début d’un raisonnement à tenir pour établis des faits ou
des propositions dont la preuve n’a pas été apportée. Par exemple, la présomption de la
légalité des actes administratifs.

En droit administratif, l’interprétation juridique est essentielle car on est en face d’une
discipline normative. Les grands types d’interprétation juridique sont souvent utilisés de
manière combinée. La doctrine relève plusieurs types d’interprétation juridique :

- L’interprétation sémiotique : l’interprétation d’un texte ou d’une disposition partant


du langage dans lequel est exprimé le texte ou la linguistique juridique.
- L’interprétation téléologique ou finaliste : on recherche de la raison d’être (ratio
legis).
- L’interprétation génétique : on part de la genèse du texte en recherchant l’intention
de ses auteurs dans les travaux préparatoires, les débats parlementaires, etc.
- L’interprétation systémique : on prend en considération d’autres articles d’un texte
pour se référer au système auquel appartient la règle.
- L’interprétation fonctionnelle : il s’agit d’appliquer la règle en adaptant celle-ci à
l’évolution du contexte historique. Il faut l’appliquer avec réserve.

La méthode diachronique ou historique est d’une importance capitale en droit


administratif. Cette méthode présente un intérêt tant sur le plan de la légistique
(=science et art de l’élaboration des textes juridiques) que du contentieux de la légalité.

Elle permet de faire une application rationnelle du principe de parallélisme de forme et


de compétence. En effet, rebus sic stantibus (Le choses demeurent en l'état).
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Si les règles de compétence sont les mêmes que celles qui étaient en vigueur au moment
où le texte sous examen était édicté, le principe de parallélisme de forme et de
compétence s’accomplit en vue de la théorie de l’acte contraire.

En revanche, si les règles de compétence ont changé depuis lors, le principe de


parallélisme de forme et de compétence ne s’applique plus, seules les règles de
compétence actuelles sont alors applicables.

Pour ce qui est du contentieux de la légalité, la méthode diachronique permet d’identifier


la règle de droit qui s’applique au fond de l’affaire et à la procédure à suivre.

S’agissant du fond de l’affaire, ce sont les textes juridiques en vigueur in illo tempore non
suspecto, c’est-à-dire que ce sont les textes qui sont en vigueur au moment des faits qui
s’appliquent.

Quant à la procédure, ce sont en principe les règles en vigueur au moment du prononcé


de la décision qui s’appliquent sauf en ce qui concerne les actes de procédure déjà
accomplis régulièrement sous l’empire des textes antérieurs.

La méthode comparative permet de mettre en lumière l’originalité du droit national et


les points faibles de celui-ci en vue de son amélioration.

Pour des raisons historiques évidentes, le droit public belge et le droit public français
constituent les principales sources d’inspiration intellectuelle du droit public congolais.

En effet, ces trois systèmes juridiques appartiennent à la même famille juridique


(romano-germanique). En outre, la langue française facilite l’accès à la littérature
juridique belge ou française.

De lege ferenda : le droit à faire

De lege lata : le droit existant

§4 Les sources du droit des services publics

Par l’expression « source », l’on doit viser les sources formelles.

Les sources formelles sont des modes de formation des normes juridiques, c’est-à-dire les
procédés et actes par lequel ces normes accèdent à l’existence juridique, s’insèrent dans
le droit positif et acquièrent validité.

Elles sont différentes des sources matérielles ou sociologiques.

Les sources matérielles sont des éléments qui sont à l’origine du droit tel qu’il existe. Par
exemple, l’histoire, la religion, les données politiques, sociales et culturelles, les données
économiques, etc.
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Il faut faire la part des choses entre les éléments qui font naître les normes juridiques et
celles qui influencent la naissance de ces normes. Les sources formelles font naître les
normes alors que les sources matérielles influencent cette naissance.

Les sources formelles du droit administratif se trouvent dans une hiérarchie. Toutes les
sources formelles n’ont pas la même capacité juridique (ius potestas).

L’ordre hiérarchique, dans l’ordre interne de l’Etat, des sources formelles se présente
comme suit : la Constitution, les traités et accords internationaux, les actes législatifs, la
coutume locale, les principes généraux du droit et les règlements administratifs.

I. La Constitution
Elle se trouve au sommet de l’ordre juridique de l’Etat et apparaît comme la source
des sources, le fondement de la validité de l’ordre juridique tout entier.
La Constitution est la charte de l’Etat. En droit congolais, Constitution et
constitutionnalité coïncident parfaitement. D’où, le contrôle de constitutionnalité
consacre la suprématie de la Constitution par rapport aux autres sources formelles.
 Au commencement du droit est la Constitution.
 En R.D.C., Constitution=Constitutionnalité.

II. Les traités et accords internationaux


Les conventions internationales sont sources du droit administratif dans la mesure où
elles créent des droits ou des obligations pour les particuliers qui sont des
administrés ou des usagers des services publics.
Dans un système juridique moniste, l’insertion du traité ou de l’accord international
dans l’ordre juridique de l’Etat se réalise par la publication au Journal Officiel après
l’accomplissement de toutes les formalités exigées.
La supériorité des accords et traités internationaux par rapport aux actes législatifs
est soumise aux conditions reprises à l’article 215 de la Constitution (ratification ou
approbation régulière par l’autorité compétente, publication régulière, et pour ce qui
est des traités et accords bilatéraux, réciprocité dans l’application).
En revanche, aucune norme du droit international ne donne aux Etats le pouvoir de
faire des traités contraires à leur Constitution. C’est pourquoi la Constitution
congolaise organise le contrôle de compatibilité du traité à la Constitution (article
216 de la Constitution).

La supériorité des traités et accords internationaux sur les actes législatifs est une
supériorité conditionnelle alors que la supériorité de la Constitution sur les actes
législatifs est une supériorité absolue ou encore inconditionnelle.
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III. Les actes législatifs


Les actes législatifs sont les lois formelles, les actes ayant force de loi et les édits.
a) La loi formelle est tout acte édicté par le législateur national suivant la procédure
législative fixée par la Constitution telle que complétée par le règlement intérieur
de l’Assemblée Nationale et du Sénat et promulguée par le Président de la
République.
La loi a un domaine limité dans la Constitution tandis que le règlement bénéficie
d’un domaine réservé. La Constitution a en effet fixé une double limite au champ
d’application de la loi :
 Premièrement, la loi ne peut intervenir que dans les matières limitatives
énumérées par la Constitution en ses articles 122 et 123.
En ces matières, la loi ne pose les règles générales que dans le cadre de
l’article 122 de la Constitution (domaine des lois particulières), sinon elle ne
fixe que les principes fondamentaux où les règles de base en application de
l’article 123 de la Constitution (domaine des lois-cadres).
Une loi-cadre ne peut aller dans les détails, sinon, elle deviendrait une loi
particulière, ce qui est inconstitutionnel.

b) Les actes ayant force de loi sont toute déclaration de volonté émanant de
l’exécutif et destinée à produire, en vertu de la Constitution ou des théories de
circonstance exceptionnelle, des effets juridiques équipollents à ceux d’une loi
(définition du professeur VUNDUAWE T.P.).

Les actes ayant force de loi se trouvent actuellement dans l’article 129 de la
Constitution.

Dans le cadre d’une loi d’habilitation, le gouvernement peut adopter des projets
d’ordonnance qui sont sanctionnés par le Président de la République. Ces
ordonnances entrent en vigueur dès leur publication au Journal Officiel. Dans le
délai prévu par la loi d’habilitation du Gouvernement, les ordonnances-lois
signées doivent être ratifiées par le Parlement par voie de loi.

Lorsqu’un projet de loi est déposé auprès du Gouvernement, il a 40 jours avant


d’approuver ce projet de loi et 60 jours pour déposer la loi autorisant la
ratification auprès de l’une des chambres.

c) L’édit est tout acte édicté par le législateur provincial suivant la procédure
législative ébauchée dans la Constitution et fixée par la loi portant principes
fondamentaux relatifs à la libre administration des provinces telle que complétée
par le règlement intérieur de l’Assemblée Provinciale et promulgué par le
Gouverneur de Province.
L’élément qui fait la différence entre les actes législatifs et les actes non
législatifs d’une Assemblée Parlementaire, c’est la promulgation.
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La promulgation est l’acte par lequel le Président de la République ou le


Gouverneur de Province atteste l’existence de la loi ou de l’édit et donne l’ordre
aux autorités publiques d’observer et de faire observer cette loi ou cet édit.
Les actes non législatifs comprennent les résolutions, les recommandations et les
motions. Exemple : Une motion de censure. Les actes non législatifs ne sont pas
promulgués.
L’infériorité absolue des actes législatifs par rapport à la Constitution est
consacrée par plusieurs dispositions de la Constitution (articles 160 al.1 et article
162, al.2).

IV. La coutume locale


Elle est entendue comme un ensemble d’usages ou de pratiques qui, à force d’être
répétés dans le temps, finissent par être considérés par les membres d’une société
comme étant juridiquement obligatoires.
La coutume suppose un élément matériel et un élément psychologique. Elle doit
répondre à 3 conditions :
- La répétition dans le temps d’un même fait
- La continuité, c’est-à-dire la répétition ne doit pas être interrompue
- La conviction ou l’opinio juris

Il n’existe pas une seule coutume ancestrale mais plusieurs coutumes locales.

La coutume a autorité dans son domaine d’application sur le règlement administratif.


Les coutumes locales constituent une source principale en matière d’administration
des entités territoriales de base dans les milieux ruraux (chefferie, groupement et
village) et de statut juridique des autorités traditionnelles (par exemple, la cooptation
de certains chefs coutumiers en qualité de députés provinciaux).

La coutume locale peut être aussi une source supplétive du droit, spécialement du
droit judiciaire congolais en l’absence de textes législatifs ou réglementaires. En effet,
le recours à la coutume en cas de lacune de la loi s’impose en vertu de l’Ordonnance
législative du 14 mai 1886 de l’Administrateur Général au Congo portant principe à
suivre dans les décisions judiciaires.

V. Les principes généraux du droit


Les principes généraux du droit sont des règles de droit non écrites qui s’imposent au
pouvoir réglementaire et à l’autorité administrative en général. Le juge ne peut
combler les lacunes de la loi qu’en se référant aux principes généraux du droit qui se
développent en marge du droit écrit. Ils sont reconnus comme tel parce qu’ils
constituent des sous-entendus dans le système juridique.

La notion des principes généraux du droit est reçue en droit congolais à travers
l’Ordonnance législative du 14 mai 1886 de l’Administrateur Général au Congo
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portant principe à suivre dans les décisions judiciaires et à travers la jurisprudence de


la Cour Suprême de Justice. L’article 118, al.2 de la Loi organique du 11 avril 2013
portant organisation, fonctionnement et compétence des juridictions de l’ordre
judiciaire constitue la base juridique actuelle des principes généraux du droit dans
notre droit.

S’agissant de leur mode de création, c’est au juge que revient le soin de proclamer
l’existence des principes généraux, d’en déterminer le contenu exact et la portée. Il
s’agit au fond d’une méthode d’interprétation qui tend à présenter chez le législateur
la volonté de respecter les libertés essentielles de l’individu. En d’autres termes, les
principes généraux du droit administratif. En d’autres termes, les principes généraux
du droit administratif tendent à assurer la protection des individus contre l’arbitraire
de l’administration et à assurer l’action des autorités administratives et le bon
fonctionnement des services publics.

La supériorité des principes généraux du droit est acquise sur le pouvoir


réglementaire même dans le silence des textes.

Lorsqu’un principe est consacré par la loi, il n’est plus un principe général de droit
car il a dès lors force de loi, il devient une norme législative.

VI. Les règlements administratifs


Le règlement administratif désigne tout acte unilatéral de l’administration qui crée
des règles juridiques générales et impersonnelles. Autrement dit, le règlement
administratif crée des règles susceptibles de conférer des droits et d’imposer des
obligations.

Parmi les actes administratifs unilatéraux, sont réglementaires les actes qui ont un
caractère normatif et les actes qui ont pour objet l’organisation d’un service public.

 Quand on parle de « portée générale », c’est sur le plan de la compétence


territoriale.
 Tous les actes signés par le Chef de l’Etat ne sont pas des règlements.

Les règlements administratifs subordonné ou autonome au sens technique ont une


autorité inférieure à celle des principes généraux du droit.

La hiérarchie entre les règlements administratifs suit d’abord la hiérarchie des


organes de leur édiction. Exemple : Le décret réglementaire du Premier Ministre a
une autorité supérieure sur l’arrêté réglementaire d’un Ministre ; l’arrêté
réglementaire du Gouverneur de Province a une autorité supérieure sur l’arrêté
réglementaire du Ministre Provincial.
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La hiérarchie entre les règlements administratifs tient aussi compte de la place de


l’entité territoriale dans la pyramide administrative de l’Etat. Exemple : L’arrêté
réglementaire de l’Administrateur du territoire a autorité sur l’arrêté réglementaire
du Chef des chefferies ou de secteur sous réserve du respect des affaires d’intérêt
local.

Une autorité administrative est celui qui relève du pouvoir exécutif de l’Etat et a un
pouvoir de décision.

Pour les actes administratifs pris par une même autorité administrative, l’acte
réglementaire a autorité supérieure à celle de l’acte individuel de la même autorité
en vertu du principe « patere legem quam ipse fecisti » (Respecte la loi que tu as
faite).

Exemple : Le Premier Ministre doit respecter le décret réglementaire qu’il a pris dans
un domaine lorsqu’il veut agir par des actes non réglementaires dans ce domaine.
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Ière PARTIE : LA THEORIE DU SERVICE PUBLIC

Dans cette première partie du cours, nous allons analyser la notion de service
public (Titre Ier) et ensuite l’organisation des services publics (Titre II).

TITRE I : LA NOTION DE SERVICE PUBLIC

La notion de service public relève à première vue de l’ordre de l’évidence car elle
couvre le domaine des activités prises en charge par la collectivité étatique. En d’autres
termes, la notion de service public fait écho au thème du bien commun, de l’intérêt public
ou de l’intérêt général.

A partir du 20ème siècle, avec le développement des services publics et la


constitution d’un secteur public tellement vaste, il y a habitude de dire « intérêt général » au
lieu de « l’intérêt public ».

La notion de service public sera analysée dans trois chapitres :

- L’émergence du concept de service public (Chapitre I)


- Les définitions des services publics (Chapitre II)
- Les grandes catégories des services publics (Chapitre III)

CHAPITRE I : L’EMERGENCE DU CONCEPT DE SERVICE PUBLIC

Le concept de service public s’est construit au fil du temps. Il part de l’idée


d’utilité publique et du bien commun (Section I) pour aboutir à une notion juridique de
service public (Section II).

Le 20ème siècle a bénéficié de la contribution de la doctrine pour


l’épanouissement de la notion de service public (Section III). Cette notion de service public a
également joué un rôle important dans l’identification des notions-clés du droit administratif
(Section IV).

Section I : L’éclosion de l’idée de service public

L’apparition de l’expression « service public ne peut pas être datée avec


précision. En effet, le service public se révèle consubstantiel à l’Etat et sa naissance se
confond avec celle de l’Etat car depuis que l’Etat perçoit des impôts, lève des armées, bat
monnaie ou éduque les citoyens. L’Etat gère des missions qui sont aujourd’hui qualifiés de
service public.
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L’Antiquité grecque puis la Rome républicaine ont connu la distinction entre les
notions d’utilité publique et d’utilité privée, ainsi que l’existence de la notion de police (cité)
et de res publica.

Au Moyen-âge, la religion chrétienne, par l’entremise de l’église catholique, s’est


intéressée à la chose publique et au gouvernement des hommes. L’église catholique a alors
apporté de nouveau au gouvernement des hommes la notion de bien commun comme but
d’un tel gouvernement.

Dès le XIVème siècle, il est préconisé l’idée d’institution de service d’intérêt


collectif en référence à la notion de bien commun.

Section II : L’émergence d’une notion juridique de service public

A la fin du XVIIIème siècle, la période révolutionnaire française marque une étape


essentielle pour l’émergence d’une notion juridique de service public.

L’expression « service public » est fréquemment utilisée dans les débats lors
d’adoption des textes. L’expression « service public » est utilisée essentiellement dans un
sens organique pour désigner un établissement, une agence ou une administration mais
également au sens matériel pour rendre compte de l’activité mise en service pour le citoyen.
Le citoyen devient un sujet de droit.

L’avènement du service public dans le champ du droit administratif sera réalisé


en droit français par l’arrêt du 8 février 1873 du Tribunal de Conflits connu sous le nom de
« l’arrêt Blanco ».

A l’époque de l’Etat libéral classique dominée par le laissez-faire et le laissez-


passer, l’action de l’Etat sur la société était limitée. Tout ce que fait l’Etat est un service
public. L’Etat apparait comme un ensemble ou une fédération de service public. D’où il y
avait identité entre l’Etat, le service public, le droit administratif et la compétence du juge
administratif.

Au Congo, c’est avec l’organisation du gouvernement central basé à Bruxelles et


du gouvernement local basé sur place qu’on connaît les premiers services publics dans leur
notion moderne. En effet, le gouvernement central de l’EIC était formé de trois
départements : les Affaires Etrangères comprenant celui de la justice, des finances et de
l’intérieur. Le gouvernement local était placé sous l’autorité du Gouverneur général du
Congo, la plus haute autorité administrative à la tête de tous les services administratifs et
militaires installés dans l’Etat.
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Section III : L’apport de la doctrine du XXème siècle à l’épanouissement du concept


de service public

Au début du XXème siècle, la doctrine belge et la doctrine française ont œuvré au


renversement du culte de la puissance publique, pour son remplacement par le concept de
service public.

La doctrine a considéré, partant de quelques arrêts rendus par le Conseil d’Etat


et le Tribunal des Conflits français que le droit administratif a trouvé son unité dans la notion
des services publics. La notion de service public remplacerait le concept de souveraineté
comme fondement du droit public.

Pour Léon DUGUIT, la notion de service public devient l’élément fondateur de


toute construction politique et juridique de l’Etat. Le service public constitue alors le
fondement et la limite du pouvoir réglementaire.

Pour Gaston GIEZ, le but de l’Etat est d’organiser et de faire fonctionner des
services publics.

De cette position doctrinale, le service public est vu comme la légitimité et le


critère du droit administratif et de la compétence de la juridiction administrative.

L’idée de construire tout le droit administratif sur l’unique notion de service


public est abandonnée. Force est de constater que deux notions sont au centre du droit
administratif : la notion de service public et la notion de puissance publique. Toutefois, la
notion de service public a acquis la valeur d’une référence constante pour légitimer les
actions, missions et interventions de l’Etat.

La détention des prérogatives des puissances publiques par l’administration ne


doit pas dissimuler qu’elle en dispose que pour assurer au mieux les services d’intérêt
général. D’où le service public apparait comme le principe axiologique qui est sensé
commander la gestion publique, la norme dont dépend la finalité et la légitimité de l’action
des gouvernants.
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Section IV : Le rôle de la notion de service public dans l’identification des notions


clefs du droit administratif

Par notions clefs du droit administratif, nous visons l’acte administratif unilatéral,
le contrat administratif, l’agent public de travail public, le domaine public, la responsabilité
publique.

Premièrement, partant de la présomption selon laquelle les activités des


personnes publiques constituent des activités publiques, les actes unilatéraux de ces
personnes sont qualifiés d’acte administratifs car ces actes sont sensés se rapporter à des
missions des sociétés publiques.

Toutefois, certains actes unilatéraux émanant des personnes privées peuvent


être qualifiés d’actes administratifs lorsqu’une personne privée gère un service public
administratif.

C’est le cas, par exemple, d’un régisseur ou d’un ordre professionnel.

 Les actes unilatéraux posés par l’administration produisent des effets juridiques. La
finalité de l’action publique, c’est l’intérêt général.
 Certaines personnes privées posent des actes administratifs. Elles posent ces actes dans
le cadre des missions des services publiques. C’est l’idée du service public au sens
matériel.

Deuxièmement, en dehors du cas des contrats administratifs par détermination


de la loi, le service public sert de critère du contrat administratif sous réserve que l’une des
parties au contrat soit une personne publique.

Auparavant, le service public était le critère unique. Aujourd’hui, le service public


demeure un des éléments fondamentaux d’identification du contrat administratif dans le
silence de la loi.

 Tout contrat conclu par l’administration n’est pas toujours un contrat administratif.
 Le contrat administratif existe lorsque c’est la loi qui le qualifie comme tel.
 Tout contrat passé pour la gestion des sociétés publiques est qualifié de contrat
administratif.

Troisièmement, est agent public toute personne qui participe directement à


l’évolution d’un service public administratif. C’est le cas du fonctionnaire ou de tout autre
agent public régi par une disposition du droit administratif.

 Autorité administrative : individu ou organe qui prend des actes exécutoires, c’est-à-dire
qui est doté de pouvoirs administratifs. Ex. : Le Ministre.
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 L’agent public : personne visible qui est en relation de travail avec un service public
administratif.
 Tout agent public n’est pas régi par un statut.

Quatrièmement, s’agissant du domaine public, l’affectation à un service public


d’un bien est une source directe de la domanialité publique. Autrement dit, un bien affecté à
un service public est un bien du domaine public. Exemple : les livres d’une bibliothèque
publique, les armes et munitions des forces armées, les bâtiments administratifs du
Ministère de la Santé.

Le domaine public est divisé en deux ensembles : il y a les biens affectés à l’usage
de tous (la route) et les biens affectés au service public. Ces derniers sont insaisissables,
imprescriptibles.

Cinquièmement, le travail public.

Il est établi que constitue un travail public le travail immobilier réalisé par une
personne publique dans le cadre d’une mission de service public. Même si un travail
immobilier est effectué au bénéfice d’une personne privée, il est qualifié de travail public en
cas de sa réalisation dans le cadre d’une mission de service public. Ex. : Les travaux exécutés
d’office par une ETD sur les immeubles privés menaçant ruine en vue d’assurer la sécurité
publique.

 Les travaux publics ne concernent que les travaux sur les immeubles, pas les travaux sur
les biens meubles car ces derniers constituent les services. Donc, dès qu’un travail
s’effectue sur un immeuble, ce n’est pas un travail privé mais un travail public. Même
lorsqu’il s’agit d’un immeuble appartenant à un particulier, dès que la décision est prise
d’effectuer des travaux de rénovation sur ledit immeuble, il s’agit d’un travail public.

Sixièmement, la responsabilité de la puissance publique.

La notion de service public a énormément contribué à l’extension d’application


des règles de la responsabilité patrimoniale de la puissance publique dans des situations où
ces règles ne s’imposaient pas à priori.

Par exemple, le cas des dommages causés par le collaborateur bénévole du


service public ou celui des dommages causés par une personne privée exerçant des
prérogatives de la puissance publique dans le cadre de la gestion d’un service public
administratif.
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CHAPITRE II : LES DEFINITIONS DES SERVICES PUBLICS

La doctrine est aujourd’hui unanime pour admettre que l’expression « service


public » est utilisée au minimum dans deux sens : un sens organique et un sens matériel ou
fonctionnel à partir desquels les caractères du service public peuvent être dégagés.

Le droit positif congolais a également apporté sa définition du terme « service


public ».

Section I : La définition apportée par le législateur congolais

§1 Les raisons de l’intervention du législateur congolais

 Dans d’autres pays, le terme « service public » n’est pas légalement défini parce que
le service public est une notion complexe.

A. Nécessité de mettre fin à la confusion


Les critères légaux en vertu desquels on devrait reconnaître une entreprise publique
suivant la législation du 6 janvier 1978 étaient très critiquables. Suivant cette législation,
tous les services publics personnalisés ou décentralisés ou encore dotés de la
personnalité juridique étaient qualifiés d’entreprises publiques quel que soit l’objet.
Dans ces conditions, tout établissement public, quel que soit son caractère, était une
entreprise publique. En effet, l’entreprise publique était définie comme tout
établissement public créé et contrôlé par les pouvoirs publics pour remplir une tâche
d’intérêt général.
Une telle définition créait beaucoup de confusions car elle ne faisait pas une distinction
très nette entre l’entreprise publique au sens strict du terme c’est-à-dire au sens
économique et les établissements publics administratifs.

B. Recherche d’un critère opératoire de transformation des anciennes entreprises


publiques
A l’occasion de la réforme des anciennes entreprises publiques organisées par la loi-
cadre du 6 janvier 1978, le législateur du 7 juillet 2008 s’est occupé à définir le terme
« service public ». Pour parvenir à une définition des services publics et aussi des
établissements publics, le législateur de 2008 s’est choisi un critère : « le secteur
marchand ». Il fait la distinction entre les anciennes entreprises relevant du secteur
marchand qui doivent être transformées en société commerciale et les autres
entreprises publiques relevant du secteur non-marchand et qui doivent être
transformés soit en établissement public soit en service public.
Il définit le secteur marchand comme le secteur des activités économiques soumis à la
concurrence dont le but est de générer des profits des projets. C’est donc à cette
occasion que le législateur a défini le terme « service public ».
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§2 Les contours de la définition donnée par le législateur congolais

Le législateur congolais définit le service public comme tout organisme ou toute


activité d’intérêt général relevant de l’administration publique (article 3 de la loi n°08/007
du 7 juillet 2008 portant dispositions générales relative à la transformation des entreprises
publiques).

La présente définition synthétise d’abord la double conception que revêt la


notion de service public. L’accent est mis à la fois sur l’organisme (critère organique) et sur
l’activité (critère matériel ou fonctionnel). Le législateur précise ensuite que cet organisme
ou cette activité d’intérêt général doit relever de l’administration publique.

Que faut-il entendre par une administration publique ?

Il y a deux approches : une approche fonctionnelle qui renvoie à l’activité


d’intérêt général et une autre qui est organique et qui renvoie à une structure, à l’appareil
administratif.

Le droit positif congolais a privilégié l’approche organique. Le constituant


congolais dispose que l’administration publique comprend la fonction publique ainsi que
tous les organismes et services assimilés (article 193 al. 2 de la Constitution).

De ce qui précède, il y a lieu de penser que l’administration publique concernée


dans la définition du terme « service public » renvoie au seul service public dépourvu de la
personnalité juridique relevant de l’Etat au sens global (pouvoir central, provinces, ETD).

Le droit congolais définit donc de manière restrictive le terme « service public ».

Section II : La définition formelle ou organique du service public

Dans son sens organique, le service public est entendu comme une institution ou
un organe chargé d’une mission d’intérêt général.

Cela implique une organisation, un appareil administratif. Par exemple, l’Agence


National de Renseignement, le Ministère de l’Intérieur, le Journal Officiel de la RDC, la
Direction Général des Recettes de Kinshasa, etc.

Le service public organique est créé par les pouvoirs publics soit nationaux (par
exemple, l’Agence National de Promotion des Investissements) soit locaux (par exemple, la
Direction Général des Recettes de Kinshasa ou la Direction Générale des Recettes du
Katanga).

Les services publics organiques peuvent être dotés de la personnalité juridique


ou non. Les services publics organiques dotés de la personnalité juridique sont l’Office
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Congolais de Contrôle, la Banque Centrale du Congo, la Commission Electorale Nationale


Indépendante, etc.

Les services publics organiques peuvent également être dépourvus de la


personnalité juridique comme par exemple les différents Ministères du Gouvernement, les
Forces Armées de la République Démocratique du Congo, la Police Nationale Congolaise.

 Tout service public au sens organique doit avoir un créateur. Ils sont toujours créés par le
pouvoir public et par une personne privée. Il n’y a pas de service public au sens organique
sans créateur.

Section III : Définition matérielle ou fonctionnelle du service public

La définition matérielle ou fonctionnelle du service public s’attache à la nature


de l’activité considérée indépendamment de l’organisation par laquelle cette activité
s’exerce.

Elle fait donc ici recours à un élément finaliste ou fonctionnel d’intérêt général.
Dans cette conception naturelle ou fonctionnelle, le service public désigne l’activité qui tend
à satisfaire un besoin d’intérêt général ou toute tâche qui vise à satisfaire un besoin d’intérêt
général indépendamment de la nature de l’organisme qui la rempli ou encore tout
simplement une activité ou une mission ayant le caractère d’intérêt général. Par exemple,
l’enseignement national ou la défense judiciaire sont des services publics au sens matériel
ou fonctionnel.

La jurisprudence a dégagé trois conditions que doit remplir l’activité d’une


personne privée pour qu’elle soit considérée comme un service public.

Première condition, l’intérêt général. Le meilleur moyen d’apprécier si l’activité


d’une personne privée répond ou non à un intérêt général, c’est de faire la différence entre
« activité de plus grand service » et « activité de plus grand profit ». En effet, les activités
d’intérêt général sont donc les activités de plus grand service qui visent davantage à
satisfaire les administrés qu’à réaliser un profit.

Deuxième condition, le contrôle de l’activité par une personne publique.


L’élément organique, critère fondamental de la définition classique du terme « service
public » réapparaît ici au rang de simple condition. Par exemple, l’UPC est soumise au
contrôle du Ministère de l’Enseignement Supérieur et Universitaire, donc sous le contrôle de
l’Etat.

Troisième condition, la présence au moins d’une prérogative de puissance


publique. La prérogative des puissances publiques consiste généralement en un monopole
ou en la possibilité de percevoir des cotisations de caractère fiscal ou d’édicter des actes
unilatéraux. C’est le cas, par exemple, des ordres professionnels ou des fédérations
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sportives. Mais la condition de la présence des prérogatives des puissances publiques n’est
pas indispensable. Il suffit que la personne privée exerce une mission d’intérêt général.

Section IV : Caractères du service public

Le service public se caractérise par deux éléments : l’intérêt général et la


dépendance de l’activité des services publics à l’égard d’une personne publique.

§1 L’intérêt général selon la volonté des gouvernants

L’intérêt général désigne un ensemble de nécessités humaines (auxquelles le jeu


de liberté ne pourvoit pas de façon adéquate) dont la satisfaction conditionne pourtant
l’accomplissement des destinées individuelles. D’où, dans l’intérêt général, il y a des aspects
régaliens (intérêt de la collectivité nationale) et des aspects personnels (des besoins
individuels auxquels l’Etat estime que les activités privées ne suffisent pas à répondre).

 L’intérêt général n’est pas la somme des intérêts privés. C’est plutôt l’ensemble des
nécessités humaines. Il s’agit de besoins que les individus ne peuvent pas prendre en
charge.
 Aspects régaliens : par exemple, la défense des frontières nationales. Il s’agit d’une
nécessité car chaque Etat doit protéger son territoire et ses habitants. Autre exemple,
les services de maintien de l’ordre public (la police), les ressources fiscales, etc.

Il n’y a pas de service public sans intérêt général. Là où il n’y a pas d’intérêt
général, il n’y a pas de service public.

Les services publics n’existent pas par eux-mêmes mais relèvent de la volonté
des gouvernants. D’où la notion de service public est une notion conjoncturelle, de
contingence ou a géométrie variable. Elle évolue avec le vouloir des gouvernements, c’est-à-
dire elle évolue dans le temps et dans l’espace.

§2 La dépendance du service public à l’égard d’une personne publique territoriale

Il y a une différence entre une personne publique territoriale (vocation générale


sur le territoire) et une personne publique spécialisée (caractérisée par le principe de
spécialité).

Tout service public relève en dernier ressort d’une autorité publique ou d’une
personne publique. Même les services publics organiques personnalisés sont rattachés à
l’Etat ou à une autre collectivité territoriale.

Le service public fonctionnel ou au sens matériel reste nécessairement dans


l’orbite des personnes publiques et le cordon ombilical entre ces derniers et l’ensemble des
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missions des services publics n’est jamais totalement rompu. Par exemple, la loi du 7 juillet
2008 fixant les règles relatives à l’organisation et à la gestion du portefeuille précise que
l’Etat a des représentants au sein des entreprises du portefeuille (mandataires publics actifs
ou non actifs). Dans tous les cas où le service public est assuré par une personne privée,
cette dernière est toujours placée sous le contrôle d’une personne publique.

CHAPITRE III : LES GRANDES CATEGORIES DES SERVICES PUBLICS

Section I : Les différentes classifications des services publics

On peut classifier les services publics suivant l’objet, l’approche économique ou


l’approche juridique.

Suivant l’objet, on peut distinguer les services publics sur un plan missionnaire.
Il existe des services publics régaliens, économiques, sociaux, culturels, etc.

Cette classification missionnaire ou fonctionnelle n’aboutit qu’à mettre en valeur


l’extension des domaines d’intervention de l’Etat dans la vie sociale. Il s’agit ici d’une
approche plus politique que juridique.

Suivant l’approche économique adoptée par le législateur du 7 juillet 2008, on


distingue d’un côté les services du secteur marchand ou les services marchands et de
l’autre, les services du secteur non marchand ou les services non marchands.

Exemple des services non marchands : les forces armées, les ministères, les
ambassades, les consulats,…

 Les anciennes entreprises publiques relevant du secteur non marchand sont


transformées en établissements publics alors que les entreprises publiques relevant du
secteur marchand sont transformées en société commerciale.

Suivant l’approche juridique, c’est-à-dire sur le plan du régime juridique


applicable et des règles du contentieux, on distingue d’un côté les services publics
administratifs (SPA) et de l’autre, les services publics industriels et commerciaux (SPIC).
Pour le juriste, c’est cette classification qui est retenue.

Section II : Les services publics administratifs (SPA)

A la fin du XIXème siècle et au début du XXème siècle, le service public n’a été
considéré que comme l’activité des personnes publiques. En ce temps-là, le service public
était presque synonyme du mot « administration » même si l’administration pouvait confier
la gestion d’un service public à une personne privée par contrat de concession. C’est l’arrêt
dit du Bac d’Eloka qui a admit que le service public pouvait avoir un objet industriel et
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commercial. D’où la crise de la notion de service public par l’irruption du droit privé dans le
régime des services publics et l’irruption des personnes privées dans la gestion des services
publics.

§1 Le critère d’identification du service public administratif

Le service public administratif est le service public par excellence, celui auquel
l’usager recourt le plus souvent. La notion de service public administratif est difficile à cerner
lorsque l’élément organique fait défaut.

La définition du service public administratif est en réalité une définition


négative : « Constitue un service public administratif, le service public auquel le caractère
industriel et commercial n’est pas reconnu par les textes ou ne peut pas lui être attribué à
partir de critères jurisprudentiels ».

A. La qualification fondée sur un texte


Suivant le droit positif congolais, il est permis de dire ou d’affirmer que les services
publics constitutionnels et les établissements publics congolais sont des services publics
administratifs. Par exemple, la Police Nationale Congolaise, les Forces Armées de la
République Démocratique du Congo, la Banque Centrale du Congo, le Conseil Supérieur
de la Défense, la Commission Electorale Nationale et Indépendante, le Conseil Supérieur
de l’Audiovisuel et de la Communication sont des services publics administratifs.
En outre, beaucoup d’autres services dépourvus de la personnalité juridique, quel que
soit l’objet (administratif, culturel, financier, social, scientifique ou technique) sont aussi
des services publics administratifs par leur texte de création.
Ex. : RVA, DGDA, l’ANR.

B. La qualification suivant la jurisprudence


Dans le silence des textes, le juge recourt à un faisceau d’indices.
Dans ce domaine, on est aidé par le juge administratif français qui a dégagé trois
critères :
- L’objet du service. La question est de savoir si le service effectue des opérations de
production, d’achat, de vente, de louage qui s’apparente à des activités des
entreprises privées. Si l’objet du service est de ce type économique, on devra ne pas
reconnaître la qualité de service public administratif à ce service mais si l’activité n’est
pas comparable à l’activité d’une entreprise privée, l’indice plaide pour une nature de
service public administratif. Ex. : L’activité consistant à l’octroi de subvention non
remboursable
- Le mode de financement. Si les ressources du service sont essentiellement alimentées
par des subventions, des crédits budgétaires ou des recettes fiscales, ce deuxième
indice penche en faveur du service public administratif.
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- Les modalités de fonctionnement. Lorsque les modalités de fonctionnement du


service public sont profondément dérogatoires aux règles prévues en droit privé (droit
de l’OHADA), elles font pencher ce troisième indice en faveur d’une qualification de
service public administratif. C’est le cas, par exemple, d’une activité soumise aux règles
de la comptabilité publique et non aux règles du système comptable de l’OHADA.

§2 Conséquences juridiques attachés à la qualification d’un service public de service


public administratif

Les services publics administratifs sont de manière générale soumis à une gestion
publique donc au droit administratif. Ils disposent des prérogatives de puissance publique
(privilège du préalable, privilège réglementaire,…) et se trouvent soumis à des sujétions
spéciales.

Le personnel du service public administratif est dans une situation de droit public
c’est-à-dire ses agents sont des fonctionnaires ou du moins des agents publics, ses biens
bénéficient de la protection issue du régime de la domanialité publique (biens
imprescriptibles, insaisissables, inaliénables).

Ses fonds sont des deniers publics soumis au principe posé par la loi du 13 juillet
2011 relative aux finances publiques et au contrôle de l’inspection générale des finances et
de la Cour des Comptes.

Les contrats du service public administratif sont des contrats administratifs


soumis aux règles définis par la loi du 27 avril 2010 relative aux marchés publics à l’exception
des contrats de droit privé passés par l’administration sur les biens relevant du domaine
privé de l’Etat.

Les travaux réalisés pour le compte du service public administratif ont la qualité
de travaux publics.

L’expropriation pour cause d’utilité publique et la réquisition peuvent être mises


en œuvre au profit du service public administratif.

Les usagers du service public administratif sont dans une situation légale et
réglementaire dans la mesure où ce service est régi par les lois et les règlements.

Un service public administratif peut néanmoins être géré par une personne
privée. C’est le cas des ordres professionnels ou des fédérations sportives. Dans ce cas,
l’organisation et le fonctionnement de ces organismes privés relèvent du droit privé mais ces
organismes peuvent poser des actes administratifs unilatéraux et engager la responsabilité
extracontractuelle lorsque les dommages sont liés à la mise en œuvre d’une prérogative
d’une puissance publique.
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Sur le plan fiscal, les services publics administratifs sont exemptés ou exonérés
selon le cas, de l’impôt foncier, de l’impôt sur les véhicules, de l’impôt sur le revenu locatif,
de l’impôt professionnel sur les bénéfices et projets et de l’impôt exceptionnel sur les
rémunérations du personnel expatrié.

Les services publics administratifs demeurent néanmoins redevables de l’impôt


professionnel sur les rémunérations versés aux nationaux ou aux expatriés employés. C’est
dans le domaine de la TVA que la distinction entre le service public administratif et le service
public industriel et commercial présente un caractère moins opérationnel.

En effet, les personnes morales du service public ne sont pas assujetties à la TVA
que pour l’activité de leurs services administratifs, sociaux, éducatifs, culturels et sportifs
sauf si leur non-assujettissement entraîne les distorsions dans les conditions de la
concurrence.

Il y a distorsion à la concurrence lorsque leurs activités se réalisent dans les


mêmes conditions que les personnes privées quant au public visé, aux prix pratiqués et aux
moyens publicitaires utilisés.

Section III : Les services publics industriels et commerciaux (SPIC)

§1 Le critère d’identification du service public administratif

On peut rappeler que les services publics industriels et commerciaux ont été
reconnus à travers la célèbre décision du Tribunal des Conflits français du 22/01/1921 connu
sous le nom de l’arrêt du bac d’Eloka.

A partir de cette décision, l’unique catégorie de service public est scindée en


deux : les services publics administratifs d’un côté et les services publics industriels et
commerciaux d’un autre côté. Les services publics industriels et commerciaux regroupent les
services publics de gaz, d’électricité, de transport, etc.

A. La qualification fondée sur les textes

I. Etat de la question avant la réforme des entreprises publiques de 2008

Avant la loi du 6 janvier 1958 sur les entreprises publiques, l’action économique ou
l’activité industrielle et commerciale de l’Etat était d’abord réalisée sous la forme
juridique de société. C’est le cas des sociétés nationalisées de l’époque (Union Minière
du Haut Katanga devenue en 1967 La Générale Congolaise des Carrières et des Mines,
GECOMINES).

En 1971, la GECOMINES est transformée en société d’Etat sous l’appellation « La


Générale des Carrières et des Mines », la GECAMINES.
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D’autre part, les entreprises créées de toutes pièces par l’Etat ont été instituées sous la
forme de sociétés d’Etat. Ex. : En 1966, la SONAS ; en 1970, la SNEL ; en 1974, la
SOZACOM.

A partir du 6 janvier 1958, l’entreprise publique devient synonyme de l’établissement


public.

Parmi les entreprises publiques de l’époque, on pouvait identifier les entreprises


publiques à caractère commercial et/ou industriel. Ex. : RVF, CMZ, OGEFREM, RVM,
ONATRA, SNCZ, CSFU, OND, SNEL, REGIDESO, GECAMINES, COHYDRO, ONPTZ, OZACAF,
ONT, OZAC, OZRT, FIKIN.

Après la décolonisation de la RDC, l’Etat a gardé certaines activités commerciales et


industrielles comme faisant partie de ses services. La première chose que l’Etat a faite
après l’indépendance : nationaliser les établissements publics.

En 1978, toutes les entreprises publiques sont des établissements publics.

Un service public administratif ou un service public industriel et commercial peut avoir


une personnalité juridique tout comme il peut ne pas en être doté. La distinction ne
relève donc pas de la personnalité juridique.

II. Situation à partir de la réforme des entreprises publiques de 2008

La réforme opérée le 7 juillet 2008 s’inscrit dans un vaste mouvement de sociétisation


des entreprises publiques.

A l’occasion de cette réforme, les anciennes entreprises publiques congolaises relevant


du secteur marchand devaient être transformées en sociétés commerciales soumises
au régime de droit commun (droit de l’OHADA). Mais dans les faits, certaines
entreprises publiques relevant à l’époque du secteur marchand ont été plutôt
transformées en service public (cas de l’ONDE) ou en établissement public (cas de la
RTNC).

La CADECO qui était une entreprise publique à caractère financier a été transformée
en société commerciale.

B. Qualification suivant la jurisprudence

Dans le silence des textes, la jurisprudence recourt au même faisceau d’indices : objet du
service, mode de financement et modalités de fonctionnement du service.
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En ce qui concerne l’objet du service, si l’activité est comparable à celle d’une entreprise
privée, c’est-à-dire une activité tournée vers l’achat et la vente, la production de biens ou
de service, ce premier indice penche en faveur du service public industriel et commercial.

S’agissant du mode de financement des services, si les ressources proviennent


principalement des redevances versées par les usagers, ce deuxième indice plaide en
faveur du service public industriel et commercial. Ainsi, ne pourra être industriel et
commercial qu’un service public dont les ressources proviennent pour l’essentiel d’un prix
perçu par les usagers. Autrement dit, le service public industriel et commercial a toujours
un caractère payant.

Quant aux modalités de fonctionnement du service, lorsque l’originalité par rapport aux
règles de modalité est faible, l’indice plaide pour une nature de service public industriel et
commercial.

§2 Conséquences juridiques attachées à la qualification d’un service public

A. Les conséquences juridiques dans le cas de l’établissement public industriel et


commercial (EPIC)

Dans le cas de l’établissement public industriel et commercial, on est en présence d’un


service public organique. Dans ces conditions, les principes fondamentaux applicables à
tous les services publics s’appliquent à l’établissement public industriel et commercial
(principe de continuité, principe d’adaptation, principe d’égalité, principe de légalité).

L’organisation de l’établissement public industriel et commercial relève du droit public.


L’établissement public industriel et commercial est créé et organisé par le pouvoir public.
C’est ce régime qui s’appliquait sous la législation du 6 janvier 1978. Ex. : ONATRA, SNEL,
REGIDESO, COHYDRO étaient placés sous la gestion publique.

Le fonctionnement de l’établissement public industriel et commercial, notamment les


rapports individuels avec les usagers relèvent du droit privé. Le personnel de
l’établissement public industriel et commercial relève du droit privé, c’est-à-dire du Code
du Travail.

L’activité de l’établissement public industriel et commercial relève du droit commercial


(loi du marché et principe de la concurrence). Toutefois, le droit public s’applique aux
biens relevant du domaine public affectés à l’établissement public industriel et
commercial, c’est-à-dire les biens affectés au fonctionnement du service public.
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B. Les conséquences juridiques dans le cadre de l’entreprise publique (sous forme de société
commerciale)

En droit congolais, l’entreprise publique est une catégorie d’entreprise du portefeuille de


l’Etat. En effet, l’entreprise publique est toute entreprise du portefeuille dans laquelle
l’Etat ou toute personne morale de droit public détient la totalité ou la majorité absolue
des actions ou parts sociales. Ex. : CADECO, COHYDRO, Hôtel KARAVIA, GECAMINES, RVA,
SCTP, SCPT, CVM, SONAS, SNEL, REGIDESO, SNCC, etc.

Le droit de l’OHADA s’applique à ces entreprises publiques. Toutefois, l’article 81 de la


Constitution précise que le Président de la République nomme, relève et le cas échéant,
révoque, sur la proposition du Gouvernement, délibéré en Conseil des Ministres, les
mandataires de l’Etat dans les entreprises publiques à l’exception des commissaires aux
comptes. Ex. : Par Ordonnance n°14/016 du 16 octobre 2014, le Président de la
République a procédé à la nomination d’un DG et des membres du Conseil
d’Administration de la Société Minière du Kivu (SOMI KIVU).

Section IV : L’inexistence d’autres catégories de service public

§1 L’échec des services publics sociaux

La tentative jurisprudentielle française de créer, à côté des services publics


administratifs et des services publics industriels et commerciaux, une troisième catégorie de
services publics, dite sociaux, s’est soldée par un échec.

Cette troisième catégorie s’était développée à partir des activités comme les
colonies de vacances, les centres aérés, les crèches ou les centres de jeunesse. Ces activités
étaient prises en charge par des personnes publiques.

Dans l’arrêt NALIATO du 22 janvier 1955 du Tribunal des Conflits français, le juge
retient le principe selon lequel le but d’intérêt social que visent l’Etat et les collectivités
administratives en organisant les colonies de vacances imprime à cette organisation le
caractère d’un service public. Ce service social ne présente dans son fonctionnement aucune
particularité de nature à le distinguer juridiquement des organisations similaires relevant des
personnes et des institutions de droit privé. Dans ces conditions, le juge conclue qu’il
convient d’appliquer le droit privé et de faire relever tout litige le concernant à la
compétence du juge judiciaire.

Le Conseil d’Etat n’a jamais partagé l’avis du Tribunal des Conflits et c’est en
1987 que le Tribunal des Conflits a fait un revirement en la matière. Il y a lieu de conclure
que tout service est par essence social. La distinction entre les services publics administratifs
et les services publics industriels et commerciaux présente donc un caractère exhaustif.
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§2 La non admission de la catégorie des services publics professionnels ou corporatifs

André de Laubadère a défendu l’existence d’une troisième catégorie des services


publics dits corporatifs partant de la jurisprudence du Conseil d’Etat français.

Suivant cet auteur, les services publics ont la structure corporative dans la
mesure où ils sont dirigés par des membres de la profession et ont le caractère des services
publics du fait qu’ils ont reçu du législateur des véritables prérogatives des puissances
publiques. Pour défendre cette catégorie des services publics, André de Laubadère a
présenté trois arguments :

- Le recrutement du personnel dirigeant dans le milieu professionnel


- L’existence d’un régime juridique mixte applicable à ces services publics
- La nature juridique de l’organisme chargé de la discipline professionnelle.

A ce sujet, la jurisprudence ne qualifie cet organisme ni de public ni de privé.

Au premier argument, on peut faire l’objection suivante : le recrutement du


personnel dirigeant le milieu professionnel relève plus du fait social que de la règle juridique.
Il s’agit là d’une particularité de nature plus sociologique que juridique.

Par rapport au deuxième argument, l’existence d’un régime juridique mixte est
d’ailleurs le principe général du régime juridique applicable aux services publics. S’agissant
du SPIC, le régime juridique est largement mixte (application du droit privé et droit public).

Pour ce qui est des SPA, il y a application du droit privé dans certains cas et pour
quelques aspects. Ex. : Lorsqu’un SPA est confié à la gestion d’une personne privée.

Par rapport au troisième argument, aujourd’hui il y a plus d’ambigüité. Les


organismes professionnels constituent les personnes privées.

Commentaires

Le privé s’applique principalement au SPIC et le droit public au SPA.

Le contentieux né du SPIC relève du juge judiciaire et celui né du SPA relève du


juge administratif. Du point de vue du juriste, le SPIC et le SPA doivent être considérées
comme étant une classification exhaustive.

Les organismes professionnels ne peuvent être qualifiés d’établissements publics


quand bien même ils sont dotés de la personnalité juridique. De ce fait, De Laubadère
argumente en disant qu’il s’agit de l’originalité, d’où la classification nouvelle des services
publics corporatifs.
P a g e | 30

Conclusion

Au plan du régime juridique et des règles du règlement du contentieux, tous les


services publics sont soit des SPA soit des SPIC. Lorsque le législateur français, par exemple,
qualifie les universités publiques d’établissements publics à caractère scientifique, culturel et
professionnel, il n’entend pas nier pour autant que les universités gèrent un SPA. Ou encore,
lorsque l’INSS et l’INPP sont qualifiés d’établissements publics à caractère technique et
social, l’autorité réglementaire n’a ici pour seul but que de préciser la mission du service
sans prétendre constituer une quelconque catégorie de service public.
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TITRE II : L’ORGANISATION GENERALE DES SERVICES PUBLICS

L’organisation générale de tout service public touche pour l’essentiel au principe


afférent aux modalités de création et de suppression des services publics, aux règles
générales auxquelles est soumis tout service public, aux modes de gestion et au contrôle
effectué sur le fonctionnement des services publics.

Etudier l’organisation générale des services publics, c’est comme rechercher et


analyser, dans un cycle biologique, les règles juridiques qui gouvernent leur naissance et leur
création (Chapitre I), leur vie ou leur mode de gestion (Chapitre II), leur pathologie ou leur
contrôle (Chapitre III), leur disparition ou leur suppression (Chapitre IV).

CHAPITRE I : LA CREATION DES SERVICES PUBLICS

La création de service public nécessite au commencement qu’il existe un besoin.


Par exemple, un besoin de sécurité, de justice, de communication, etc.

Un besoin, même à haute teneur d’intérêt général ne devient un service public


que lorsque ce besoin a été homologué ou qualifié de tel par la puissance publique. Il
appartient à l’autorité compétente d’apprécier si un besoin collectif existe et s’il justifie
qu’un service public soit institué pour le satisfaire.

La question de la création de service public concerne principalement le service


public organique. La compétence en matière de création de service public par les pouvoirs
publics ne relève pas de l’arbitraire. Elle tient au principe constitutionnel de la répartition
des compétences entre le pouvoir central et les provinces et à celui de la libre administration
des provinces et des ETD.

Section I : La création des services publics d’Etat

On peut le qualifier des services publics nationaux, mais l’expression « Service


Public d’Etat » possède l’avantage de mettre en évidence la responsabilité de la création de
ces services par les organes de l’Etat. Les organes de l’Etat disposent en principe de la liberté
de création des services publics d’Etat.

§1 Le critère d’identification du service public administratif

Les organes de l’Etat disposent en principe d’une compétence discrétionnaire en


matière de création des services publics. Il leur appartient d’apprécier librement, compte
tenu des considérations politiques, sociales, économiques, techniques ou
environnementales, s’il est opportun ou non d’ériger en service public la satisfaction de tel
ou tel besoin collectif.
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Toutefois, les organes de l’Etat peuvent dans certains cas se trouver dans une
situation de compétence liée en matière de création des services publics. C’est le cas
précisément dans le domaine de la souveraineté nationale et des droits fondamentaux
garantis aux citoyens.

Commentaires

Existe-t-il des besoins d’intérêt général par nature ? Non, dans le sens que c’est
la puissance publique qui qualifie un besoin de besoin d’intérêt général quelle que soit la
teneur d’intérêt publique de ce besoin. D’où, il n’y a pas d’intérêt général lorsque la
puissance publique ne l’a pas qualifié ainsi.

§2 L’organe compétent de création de service public d’Etat

Si les services publics d’Etat peuvent se situer géographiquement au niveau des


trois pouvoirs de l’Etat (législatif, exécutif, judiciaire). La question de la création des services
publics d’Etat intéresse plus le pouvoir exécutif.

En effet, la gestion quotidienne des affaires de l’Etat est précisément de la


responsabilité du gouvernement. En outre, les services administratifs situés au niveau du
pouvoir judiciaire relève en dernière analyse du pouvoir exécutif.

A. La compétence de principe du Premier Ministre


Le Premier Ministre est l’autorité administrative compétente pour créer les services
publics d’Etat. En effet, le Premier Ministre est l’autorité chargée de l’exécution des lois
et est titulaire du pouvoir réglementaire général de l’Etat (article 92, alinéa 1 de la
Constitution).
Il crée les services publics d’Etat par voie de décret. Il crée les services publics dépourvus
de la personnalité juridique comme il crée les établissements publics nationaux en
application de la législation relative aux établissements publics en vertu de l’article
123.2 de la Constitution.
Il peut déléguer certains de ses pouvoirs aux Ministres (article 92, alinéa 5 de la
Constitution. Dans ce cadre, il peut arriver que les Ministres organisent des structures
administratives non permanentes du genre commission, comité ou projet.
Toutefois, le Ministre de l’Enseignement Primaire, Secondaire et Professionnel a le
pouvoir de créer par arrêté les établissements publics d’enseignement maternel,
primaire, secondaire et professionnel d’Etat.

Commentaire
Une loi ne peut créer un service public car le législateur a un pouvoir limité (en fonction
du domaine de la loi).
- Domaine des lois particulières (le législateur peut aller dans les détails)
- Domaine des lois cadres (il ne peut aller dans les détails)
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D’où il faut l’intervention du pouvoir exécutif (Premier Ministre) pour la création d’un
service public.

B. La compétence limitée du Président de la République


Le Président de la République a le pouvoir de créer et d’organiser les services qui
dépendent de son autorité (les services de la Présidence de la République), de fixer
l’organisation et le fonctionnement du gouvernement et par conséquent d’organiser et
de fixer les attributions des différents Ministères du gouvernement de la République. Il a
également le pouvoir de créer les services publics qui relèvent des domaines de
collaboration entre son autorité et le gouvernement (défense, sécurité et affaires
étrangères).
Par exemple, la loi organique du 11 août 2011 portant organisation et fonctionnement
des forces armées dispose que l’organisation et le fonctionnement des corps et services
de la région militaire, du groupe aérien ou du groupement naval sont fixés par
ordonnance du Président de la République.

Commentaire
Le Président de la République est une institution de la République, autorité politique,
mais aussi l’autorité administrative élevée (dédoublement fonctionnel). Il organise les
services se trouvant dans les limites de sa compétence (organisation de son cabinet,
organisation de la maison civile, etc.)

C. La création par le législateur national


Si le législateur n’a pas la compétence générale de création des services publics d’Etat
au cas par cas, il demeure cependant compétent pour créer ou organiser certains
services d’Etat.
En effet, l’article 122.13 de la Constitution dispose que la loi fixe les règles concernant
les forces armées, la police et les services de sécurité. Si les forces armées et la police
nationale sont directement créées par la Constitution, leur organisation et
fonctionnement sont plutôt déterminés par des lois organiques (articles 186 et 191
de la Constitution).
En revanche, les services de sécurité sont créés et organisés par des lois ordinaires. En
pratique, l’ANR et la DGM ont été créées et organisées par des décrets-lois.
Par ailleurs, suivant l’article 222, alinéa 3 de la Constitution, des lois organiques peuvent
instituer d’autres institutions d’appui à la démocratie qui ne sont autre chose que des
institutions administratives. Ex. : La création de la commission nationale des droits de
l’homme par une loi organique.
La création de catégorie d’établissements publics et la détermination des principes
fondamentaux devant conduire à la création des entreprises publiques relèvent
également de la loi (article 123.2 de la Constitution).
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Commentaire
Les services publics sont créés par des règlements signés par le décret du Premier
Ministre, sauf certains dont la création relève du Président de la République et du
Ministre de l’EPSP.
Des services publics sont des institutions administratives.
Le Président de la République intervient dans un domaine encadré et le Ministre de
l’EPSP intervient dans un domaine très limité.

D. La création par le constituant


Les services publics peuvent directement être créés par la Constitution. Dans ce cas, les
services sont considérés comme les services publics constitutionnels. Les services
publics constitutionnels sont exclusivement les services publics nationaux à caractère
administratifs et ne sauraient être transférés au secteur privé ni d’aucune concurrence
du secteur privé.
Il s’agit des services publics organiques ci-après en R.D.C. :
- Le Conseil Supérieur de la Magistrature (article 152 de la Constitution)
- La BCC (article 176 de la Constitution)
- La Cour des Comptes comme service public administratif (article 158 de la
Constitution)
- La Caisse Nationale de Péréquation (article 181 de la Constitution)
- La PNC (article 182 de la Constitution)
- Les Forces Armées de la RDC (article 187 de la Constitution)
- Le Conseil Supérieur de la Défense (article 192 de la Constitution)
- Le Conseil Economique et Social (article 208 de la Constitution)
- La CENI (article 211 de la Constitution)
- Le Conseil Supérieur de l’Audiovisuel et de la Communication (article 212 de la
Constitution)

Commentaire

Le principe est qu’un service public doit être créé par un règlement mais toutefois, il
peut également, dans certains cas être créé par la Constitution. Dans ce cas, il s’agit du
service public constitutionnel.

E. Règles d’organisation des services publics d’Etat


Une fois que le service public est créé, il revient au pouvoir public de l’organiser, de telle
sorte que ce service réalise concrètement la satisfaction du besoin qui l’a justifié. Le
principe est que l’acte de création contient également des règles fondamentales
d’organisation du service. Mais l’acte de création du service public se borne quelquefois
à donner naissance à un service public, renvoyant à des actes juridiques postérieurs le
soin de préciser les règles d’organisation.
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Les actes juridiques relatifs à l’organisation des services publics relèvent du droit public.
Ce sont soit des lois soit des règlements.
Il est de principe que lorsque le constituant lui-même crée un service public, il charge le
législateur d’adopter une loi organique pour fixer l’organisation et le fonctionnement
dudit service.
Dans la majorité des cas, ce sont des ordonnances réglementaires du Président de la
République et des décrets réglementaires du Premier Ministre qui interviennent pour
fixer l’organisation et le fonctionnement des services publics nationaux.

Commentaire
Le principe est que l’acte de création d’un service public doit en fixer également
l’organisation et le fonctionnement. Mais lorsqu’il est créé par le constituant,
l’organisation et le fonctionnement seront fixés par une loi organique (loi qui passe par
un contrôle a priori de la Constitution).
L’adoption d’une loi ordinaire se fait par une majorité simple et le contrôle de sa
constitutionnalité est facultatif alors que pour la loi organique, l’adoption se fait par une
majorité qualifié et doit passer par le contrôle de la constitutionnalité avant sa
promulgation.

Section II : Création des services publics locaux

Les collectivités locales (provinces, villes, ETD) ont la possibilité de créer des
services publics qui correspondent à des besoins locaux dans le respect du ressort
géographique. Elles sont chargées de la gestion des services publics de proximité et de
manière générale, de tous les services publics dont le constituant ou le législateur national
n’a pas entendu réserver la gestion au pouvoir central.

§1 La condition de la compétence territoriale

En règle générale, une autorité publique ou administrative désignée pour exercer


ses attributions doit se limiter pour agir dans le ressort qui lui a été fixé par le texte qui
l’investi, faute de quoi les actes qu’elle poserait tombent sous le coup de l’incompétence
ratione loci.

En effet, la Constitution pose le principe de la délimitation des provinces et de la


ville de Kinshasa par voie des lois organiques (article 2, alinéa 5 de la Constitution).

La délimitation des subdivisions territoriales à l’intérieur des provinces est


déterminée par décret du Premier Ministre. Toutefois, la Constitution a prévu le cas de la
coopération interprovinciale (article 199 et 204, point 2 de la Constitution) et la loi
organique du 7 octobre 2008 sur les ETD a posé le principe de la coopération
intercommunale (article 50.16 de la Constitution).
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Dans le cadre de la coopération interprovinciale ou de la coopération


intercommunale, les organes de ces collectivités locales peuvent participer à la création des
services publics débordant le cadre territorial d’une province ou d’une commune.

§2 La condition de la compétence matérielle

Le principe de la libre administration des provinces et des ETD complique une


autonomie à la fois constitutionnelle et fonctionnelle. Il y a répartition des compétences
entre le pouvoir central et les provinces d’une part et entre le pouvoir central et les ETD
d’autre part. D’où l’existence des compétences exclusives des provinces et des affaires
d’intérêt urbain, communales et d’intérêt local (des secteurs ou des chefferies).

Autrement dit, les organes de l’Etat n’ont pas le pouvoir de créer les services
publics dans domaines de compétence des collectivités locales. A contrario, une collectivité
locale ne peut pas créer de services dans les domaines réservés au pouvoir central.

§3 L’organe compétent de création des services publics locaux

A. Le cas de la province ou de la ville de Kinshasa


La province ou la ville de Kinshasa est dotée de deux organes : l’Assemblée provinciale
et le gouvernement provincial.
Le premier organe est l’organe délibérant qui légifère par voie d’édit, le second est
l’organe exécutif dont les membres ont le pouvoir de faire les actes juridiques
administratifs.
Le principe est que les services publics provinciaux sont créés par voie d’arrêté
provincial du Gouverneur de province ou de la ville de Kinshasa.

Par exemple, la régie provinciale d’encadrement et de recouvrement des recettes de la


province (REPERE) est un service public spécialisé du Bas-Congo dirigé par un Directeur
Général et créé par un arrêté provincial du gouvernement de province du Bas-Congo.
La régie de communication et de publicité de Kinshasa (RCPK) a été créée par l’arrêté
provincial du Gouverneur de la ville de Kinshasa.

Le Gouverneur de la province ou de la ville de Kinshasa a également le pouvoir, en tant


que détenteur du pouvoir réglementaire général de la province ou de la ville de
Kinshasa, de fixer l’organisation et le fonctionnement du gouvernement provincial, les
attributions des Ministères provinciaux ainsi que l’organisation et le fonctionnement de
son propre cabinet et les cabinets ministériels.
En principe, les Ministres provinciaux n’ont pas le pouvoir de créer des services publics
provinciaux. Toutefois, le Gouverneur de la province ou de la ville de Kinshasa peut le
charger d’organiser les structures administratives non permanentes du genre
commission, projet, comité, etc.
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En pratique, il est arrivé que des édits créent des services publics provinciaux. Par
exemple, la DGRK, la DRKAT on été créées par voie d’édit.
Toutefois, la création d’un établissement public provincial par voie d’édit, comme c’est
le cas de la Direction des Recettes du Katanga, est incontestable.
En effet, les provinces doivent créer les services publics sous l’encadrement de la
législation nationale. En la matière, l’on vise la loi du 7 juillet 2008 portant dispositions
générales applicables aux établissements publics.

B. Le cas des entités territoriales décentralisées

Les entités territoriales décentralisées sont administrées par un organe délibérant


(Conseil Urbain, Conseil Communal et Conseil de Secteur ou de Chefferie) et un organe
de gestion de l’entité et d’exécution des décisions de l’organe délibérant, à savoir le
collège exécutif (urbain, communal, de secteur ou de chefferie). Ce deuxième organe est
l’organe exécutif, dirigé par le maire, le bourgmestre, le chef de secteur ou de chefferie
selon le cas. Les deux organes, délibérant et exécutif, sont des organes administratifs,
c’est-à-dire exerçant le pouvoir juridique administratif. Les organes délibérants ne font
pas des lois, ne font pas des actes législatifs.

Du fait que les organes délibérants sont composés des élus locaux, le droit positif a
accordé primauté aux assemblées délibérantes dans la fonction administrative pour la
prise de décision relevant des affaires d’intérêt urbain, communal ou local. Par
conséquent, le principe est que les services publics des ETD sont créés par des décisions
réglementaires des organes délibérants. Les organes exécutifs interviennent pour
prendre des mesures d’exécution des décisions des conseils locaux. Toutefois, c’est par
voie d’arrêtés que les autorités exécutives des ETD organisent et fixent les principes de
fonctionnement des collèges exécutifs et des services rattachés au maire, au
bourgmestre, au chef de chefferie ou de secteur ainsi qu’aux échevins communaux et
locaux.

Section III : La question de la création d’un service public par un établissement public

Traditionnellement, l’établissement public est un mode de gestion et en principe,


un établissement public ne devrait pas créer un service public au nom du principe de la
spécialité. Toutefois, un établissement public étant une personne morale de droit public,
c’est-à-dire doté d’une autonomie de gestion et de décision, l’on pense que l’établissement
public est capable, en tant qu’autorité titulaire d’un pouvoir réglementaire délégué, de
créer, de gérer et de supprimer des services publics.

La pratique fournit quelques exemples de création de services publics dérivés ou


induits par l’organe délibérant de l’établissement public. La solution consiste à considérer
P a g e | 38

que les activités connexes sont le complément de l’activité principale confiée à


l’établissement public par le pouvoir de rattachement.

Enfin, il est établi pour les établissements publics territoriaux nés de la


coopération inter collectivités locales de ces établissements peuvent créer des services
publics dérivés ou induits. Par exemple, les cantines scolaires, le transport scolaire, etc.
peuvent être des services induits d’un service public fondamental en espèce, le service
public scolaire.

CHAPITRE II : LES MODES DE GESTION DES SERVICES PUBLICS

En matière des modes de gestion des services publics, la distinction la plus


pertinente sur le plan juridique est celle de considérer d’une part, les modes faisant appel à
une personne publique, et d’autre part, les modes de gestion faisant appel à une personne
privée. D’où il importera d’analyser les services publics gérés par les personnes publiques,
les services publics gérés par les personnes privées et les lois communes applicables à tous
les services publics quelle que soit la personne qui gère.

Section I : Les services publics gérés par les personnes publiques

La gestion des services publics par les personnes publiques est la solution
classique, normale, ordinaire. En droit positif congolais, nous examinerons successivement la
gestion directe ou la régie, l’établissement public et l’autorité administrative indépendante.

§1 La régie ou la gestion directe

Les administrations qui assurent l’essentiel des tâches étatiques sont organisées
en régie.

La régie est donc le procédé classique ou le mode commun de gestion des


services publics par les personnes publiques ou le pouvoir public.

A. Notions
Un service public est géré en régie lorsque la personne publique créatrice du service
prend elle-même en main la direction et la gestion opérationnelle de celui-ci en le
faisant fonctionner avec ses propres biens et ses propres agents sans reconnaître à ces
services une individualité.
La régie est le mode de gestion naturel d’un service public administratif. Elle n’existe
que si elle n’est pas individualisée au sens organique.
Le terme « régie » est parfois utilisé dans un sens tout autre, c’est-à-dire dans l’usage
d’un vocabulaire imprécis et fantaisiste. Par exemple, le cas de la Régie des Voies
Fluviales qui est un établissement public et non une régie au sens technique du terme. Il
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en est de même de la Régie des Voies Aériennes qui est une entreprise publique ou une
société d’Etat et non une régie.

B. Typologie des régies


La régie ou la gestion directe comporte deux variantes : d’une part, la régie directe et
d’autre part, la régie indirecte.

1. Les régies directes ou simples


Elles sont tout naturellement des services publics à caractère administratif et
dépourvues de la personnalité juridique.
Elles sont placées sous la dépendance directe de l’autorité centrale de la collectivité
territoriale dont elles relèvent.
Les services en régie directe constituent l’élément technique et permanent de
l’administration de la personne publique territoriale. Par exemple, les Ministères
(art.93 de la Constitution) ou le département ministériel placé sous la responsabilité
d’un Ministre du Gouvernement de la République, les ambassades et les consulats. Il
en est de même pour les Ministères ou départements ministériels provinciaux ainsi
que les services publics provinciaux déconcentrés. C’est le cas aussi des services
publics urbains, communaux et locaux (secteur ou chefferie) qui relèvent
directement des autorités exécutives des entités territoriales décentralisées (maire et
échevins urbains, bourgmestres et échevins communaux ainsi que le chef de secteur
ou de chefferie et échevins locaux).
Quoique les Ministères ne jouissent pas de personnalité juridique, ils constituent
néanmoins des centres de droit et d’intérêt individualisé. C’est pourquoi sur le plan
de la législation sur les finances publiques, les Ministères bénéficient d’une
individualité administrative et financière. D’où, certaines conséquences juridiques
doivent être tirées :
- Premièrement, impossibilité des dettes civiles entre départements ministériels
car la personne publique ne peut pas être vis-à-vis d’elle-même à la fois
créancière et débitrice.
- Deuxièmement, interdiction de compensation entre les dettes et les créances
qu’un particulier peut avoir vis-à-vis des différents Ministères.

2. Les régies indirectes


Certains services publics de l’Etat ou provinciaux gérés en régie et institués
principalement au sein d’un Ministère disposent sans bénéficier de la personnalité
juridique d’une relative autonomie administrative et financière pour des raisons de
souplesse et d’efficacité.
Ces services sont désignés sous le vocable de services publics
spécialisés, d’organismes publics spécialisés, d’organismes auxiliaires,
d’administrations spécialisées ou régies indirectes.
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Faute de personnalité juridique, toutes ces régies indirectes ne peuvent pas ester en
justice, en demande ou en défense.
Par exemple, le Journal Officiel de la R.D.C., le Guichet Unique de Création
d’Entreprises, l’Agence Congolaise des Grands Travaux, l’Agence Nationale de
Renseignement, l’Inspection Générale du Travail, la Direction Générale de Douanes et
Accises, la Direction Générale des Impôts, la DGRAD, la Direction Générale de
Migration, la DGRK.
Ces administrations spécialisées ne dépendent pas de l’autorité des secrétaires
généraux des Ministères au sein desquels elles sont instituées.
Ces services en régie indirecte sont plutôt placés sous l’autorité directe du Ministre
compétent comme chef hiérarchique.
Le Journal Officiel de la R.D.C. est en revanche placé sous l’autorité directe du
Directeur de Cabinet du Président de la République.
L’autonomie administrative et financière relative dont bénéficient ces régies
indirectes implique deux choses :
- Une certaine souplesse dans la gestion administrative du personnel si le
recrutement, la promotion et les mesures de fin de carrière des fonctionnaires
relevant des régies indirectes dépendent du Ministère de la Fonction Publique,
les affectations, les mutations et les permutations sont décidées par les
Directeurs Généraux de ces organismes publics spécialisés ou par
l’Administrateur Général de l’ANR sauf exception établie pour une catégorie de
personnels. Le régime des congés statutaires et le régime disciplinaire sont
placés sous la responsabilité des autorités administratives internes de ces
administrations spécialisées. Ces régies indirectes peuvent elles-mêmes, en-
dehors du traitement versé à l’initiative de la direction de la paye du Ministère
du Budget, organiser l’attribution des primes spécifiques à leurs agents ;
- Une certaine autonomie financière se traduisant par une autonomie de
trésorerie. Ces régies indirectes relèvent d’un budget annexe (cas du J.O.) ou
bénéficie soit d’une allocation budgétaire (cas du mécanisme de rétrocession
mensuelle sur les recettes mobilisées au profit de la DGI, DGRAD et DGDA) soit
de l’affectation directe des ressources sur la base de redevances perçues sur les
usagers en contrepartie de services reçus (cas de la DGDA en partie). Les services
publics spécialisés ou les régies indirectes ne recourent à la chaîne de la dépense
de l’Etat que lorsque quelques dépenses de fonctionnement ou d’investissement
sont directement prises en charge par le budget général de l’Etat. Ces services en
régie indirecte assurent eux-mêmes l’entretien et la maintenance des biens
meubles et immeubles acquis sur leur fond public propre ou ces biens mis à leur
disposition par la collectivité territoriale.
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§2 L’établissement public

Les bases juridiques de ce mode de gestion se trouvent, en application de


l’article 123 point 2 de la Constitution, dans la loi n°08/009 du 7 juillet 2008 portant
dispositions générales applicables aux établissements publics et dans la loi-cadre n°14/004
du 11 février 2014 de l’enseignement national.

A. Notion de l’établissement public

I. Conception classique de l’établissement public


C’est seulement au milieu du XIXème siècle que la catégorie d’établissement public se
distingue de l’établissement d’utilité publique.
L’établissement public s’est affirmé dans un premier temps comme une personne
publique par opposition aux personnes privées et dans un deuxième temps comme
une personne différente de l’Etat et des collectivités locales.
Le procédé de l’établissement public implique la création d’une nouvelle personne
morale de droit public distincte de celle de l’Etat ou d’une collectivité locale. Le
procédé de l’établissement public relève donc de la décentralisation sous la forme de
la décentralisation par service, technique, fonctionnelle ou sectorielle.
L’établissement public correspond à une activité spécialisée c’est-à-dire il est une
personne publique spécialisée ou dominée par le principe de la spécialité, à la
différence des personnes publiques territoriales qui ont une compétence générale.

II. Crise de la notion d’établissement public


La crise de la notion d’établissement public est née en droit comparé et même en
droit congolais du fait de la prolifération de la qualification d’établissement public à
des organismes variés. Les pouvoirs publics ont souvent vus dans le vocable
« établissement public » une formule miracle.
Les pratiques sont nombreuses en la matière :
- L’utilisation de la formule d’’établissement public sans véritable décentralisation.
Ex. : En France, le Musée de la Poste est considéré comme un établissement public
alors que ce service n’est qu’un service public déconcentré (dépourvu de la
personnalité juridique)
- L’utilisation de la formule d’établissement public pour l’administration du
territoire. La formule d’établissement public est aussi utilisée pour organiser la
coopération entre collectivités territoriales, c’est-à-dire pour assurer moins la
gestion d’un service public locale que l’administration d’une partie du territoire.
D’où en France, il y a apparition des établissements publics territoriaux d’un type
complètement nouveau qui contribuent à la crise de la notion d’établissement
public. Ces établissements publics sont connus sous le nom des Etablissements
Publics de Coopération Intercommunale (EPCI en sigle). Il est possible qu’en droit
congolais, des établissements publics territoriaux entre communes (article 50
P a g e | 42

point 16 de la loi organique sur les ETD) ou entre provinces (article 199 de la
Constitution) soient organisés à l’avenir.
- L’utilisation de la formule d’établissement public pour la gestion industrielle et
commerciale. L’activité industrielle et commerciale couvre les opérations de
production, de distribution ou d’échange effectués dans les mêmes conditions
qu’un particulier. L’établissement public était uniquement au départ un service
public administratif. C’est depuis 1921, avec l’arrêt dit bac d’Eloka qu’il y a eu
apparition de la catégorie d’établissement public à caractère industrielle et
commerciale.

En conclusion, malgré sa crise, la notion d’établissement public comporte néanmoins


les caractères fondamentaux ci-après :
- Les établissements publics ont chacun une personnalité juridique propre
- Ils jouissent d’une autonomie technique (administrative et financière) et d’une
autonomie organique (organes propres de gestion et de décision)
- Ils sont soumis au contrôle de tutelle de leur pouvoir créateur
- Ils disposent d’un patrimoine propre leur permettant de réaliser la mission
d’intérêt général pour laquelle ils sont constitués

III. Dénomination des établissements publics


Le principe en la matière est que l’acte juridique de création d’un établissement
public donne à celui-ci sa dénomination.
Cette appellation est souvent fonction de la mission confiée au service public érigé en
établissement public. C’est le cas de l’Ecole Nationale d’Administration, de la Radio
Télévision Nationale Congolaise, du Fonds de Promotion de l’Industrie, du Fonds de
Promotion Culturelle ou du Fonds National d’Entretien Routier. Dans ce domaine, la
loi-cadre du 11 février 2014 de l’Enseignement National précise que les
établissements publics de l’enseignement supérieur et universitaire portent la
dénomination qui figure dans les actes de leur création. Cependant, il y a utilisation
des termes « office » ou « agence » dans la dénomination de certains établissements
publics sans signification juridique particulière. En d’autres termes, les mots
« office » et « agence » n’ont aucune signification juridique en droit congolais.
Ex. : L’Agence Congolaise de Presse (établissement public), l’Agence Nationale de
Renseignement (régie indirecte), METELSAT, l’Office des Routes (établissement
public), Office des Voiries et Drainage, l’Office de Gestion de la Dette Publique (régie
indirecte), etc.
Il en est de même du terme « autorité » dans la dénomination de certains
établissements publics. Ex. : L’Autorité de Régulation des Marchés Publics ou
l’Autorité de l’Aviation Civile de la R.D.C.
On pourrait croire que ces autorités sont des autorités administratives
indépendantes alors que ce sont des établissements publics.
P a g e | 43

B. Le cadre général des établissements publics

I. Définition légale de l’établissement public en droit congolais

L’établissement public désigne toute personne morale de droit public créée par l’Etat
en vue de remplir une mission de service public.

Il se dégage de cette définition légale que l’établissement public est une personne
morale, de droit public et qui remplit une mission de service public.

Comme personne morale, l’établissement public est un sujet de droit, ce qui entraîne
comme conséquence la disposition d’un patrimoine propre, des organes propres
pour la gestion de ses affaires et l’autonomie financière marquée par l’existence d’un
budget distinct de la collectivité territoriale créatrice (Etat, provinces, ETD).

Comme personne morale de droit public, l’établissement public est tout d’abord une
personne publique à la différence de l’établissement d’utilité publique qui est une
personne privée.

Les deux types d’établissements font l’objet pour leur création de procédés
juridiques de fondation. L’établissement public remplit une mission de service public,
c’est-à-dire l’établissement public assume la gestion d’un service public au sens
matériel comme au sens organique.

Ce sont ces traits qui distinguent l’établissement public et les personnes publiques
territoriales dont le champ d’action s’étend à l’ensemble des affaires locales ou
nationales.

Si les personnes publiques territoriales sont dominées par le principe de généralité,


l’établissement public est plutôt dominé par le principe de spécialité. En droit
congolais, l’établissement public est donc une personne publique spécialisée à
caractère administratif, le secteur marchand étant notamment exclu du cadre
juridique applicable aux établissements publics. En d’autres termes, la catégorie
d’établissement public à caractère industriel et commercial n’existe plus depuis
2008 en droit congolais. Tout établissement public congolais est administratif et
placé sous la tutelle du Ministre ou de l’échevin ayant dans ses attributions le secteur
d’activité concerné par son objet.

II. Régime administratif de l’établissement public

La création et l’organisation des établissements publics nationaux s’effectuent par


principe en vertu du décret du Premier Ministre.
P a g e | 44

Les établissements publics provinciaux sont créés et organisés par arrêté provincial
du gouverneur de province.

Les établissements publics locaux seront créés par les organes délibérants des ETD,
lesquels exercent le pouvoir réglementaire primaire au niveau local.

En principe, le texte de création des établissements publics fixe également les


statuts de l’établissement public, c’est-à-dire il détermine en même temps le siège
social, l’objet social, le patrimoine, les ressources, les structures, l’organisation des
structures et des travaux, des marchés et des fournitures, la tutelle, les statuts du
personnel ainsi que le régime douanier fiscal et parafiscal de l’établissement public.

Toutefois, il peut arriver qu’un texte législatif ou réglementaire ait créé un


établissement public et qu’un autre texte réglementaire intervienne pour fixer les
statuts de l’établissement public. C’est le cas par exemple de l’OCC, créé par
l’ordonnance-loi du 10 janvier 1974 dont les statuts sont fixés par un décret du 3
décembre 2009 ou encore de l’Institut National de la Statistique, créé par
ordonnance-loi du 3 octobre 1978 dont les statuts sont fixés par un décret du 3
décembre 2009 ou l’Agence Congolaise de Presse (ACP) créé par ordonnance du 3
février 1967 dont les statuts ont été fixés par un décret du 3 décembre 2009.

Les structures organiques d’un établissement public : Conseil d’Administration, la


Direction Générale et le Collège des Commissaires aux Comptes.

Toutefois, dans ce domaine, certains établissements publics ont des structures


atypiques. Ex. : Agence Nationale pour la Promotion des Investissements qui a 4
organes au lieu de 3, à savoir : Conseil d’Administration, Conseil d’Agrément,
Direction Générale et le Collège des Commissaires aux Comptes.

Le Cadastre Minier (CAMI) dispose certes de trois organes, mais avec des appellations
différentes par rapport à la règle générale, à savoir : le Conseil du Cadastre Minier, le
Comité de Direction, le Collège des Auditeurs Externes.

Le Conseil d’Administration, organe délibérant de l’établissement public est


composé au maximum de cinq membres parmi lesquels le Directeur Général. Ces
membres, autres que le Directeur Général, ont le titre d’administrateurs, ils sont
nommés par le Président de la République sur proposition du gouvernement en ce
qui concerne les établissements publics nationaux. Le Conseil d’Administration se
réunit trimestriellement en séances ordinaires sur convocation de son président. Une
séance extraordinaire peut être convoquée par la même autorité à la demande du
Ministre, autorité de tutelle chaque fois que l’intérêt de l’établissement public
l’exige.
P a g e | 45

La Direction Générale, organe exécutif antérieurement appelée Comité de Gestion,


exécute les décisions du Conseil d’Administration. Elle exécute le budget, elle élabore
les états financiers de l’établissement public.

La Direction Générale est assurée par un Directeur Général assisté d’un Directeur
Général Adjoint. Tous nommés en ce qui concerne les établissements publics
nationaux par le Président de la République sur proposition du gouvernement
délibéré en Conseil des Ministres pour un mandat de cinq ans renouvelables une fois.
Le Directeur Général représente l’établissement vis-à-vis des tiers, les actions en
justice tant en demande qu’en défense sont introduites au nom de l’établissement
public par le Directeur Général. A défaut par son remplaçant ou par toute autre
personne mandatée par lui à cette fin.

Le Collège des Commissaires aux Comptes est l’organe de contrôle des opérations
financières. Il est composé de deux personnes.

Les Commissaires aux Comptes sont nommés par décret du Premier Ministre sur
proposition du Ministre, autorité de tutelle pour un mandat de cinq ans
renouvelables.

Fonctionnant en collège, ils ne peuvent prendre individuellement aucune décision, ils


reçoivent à charge de l’établissement public, une allocation fixe dont le montant est
déterminé par décret du Premier Ministre.

Le cadre et le statut du personnel de l’établissement public sont fixés par le Conseil


d’Administration sur proposition de la Direction Générale.

Avant application, le statut est soumis à l’approbation de l’autorité de tutelle.

Le Conseil d’Administration a le pouvoir de nommer, affecter, promouvoir, licencier


ou révoquer le personnel de l’établissement public exerçant un emploi de
commandement.

En revanche, le Directeur Général nomme, affecte, promeut, licencie ou révoque le


personnel de collaboration et d’exécution de l’établissement public.

Concrètement, le personnel de l’établissement public est régi par le Code du Travail


et ses mesures d’application. Dans ces conditions, les employés de l’établissement
public ne doivent pas être des agents publics mais plutôt des travailleurs relevant du
droit privé.

En règle générale, c’est le droit administratif qui s’applique au fonctionnement de


l’établissement public. Ses organes prennent des décisions exécutoires.
L’établissement public conclut des contrats administratifs conformément à la loi du
27/04/2010 relatif aux marchés publics.
P a g e | 46

Les travaux réalisés au profit de l’établissement public sont effectués sous le régime
des travaux publics. L’établissement public possède des biens qui sont soumis au
régime exorbitant de la domanialité publique (insaisissable, inaliénable,
imprescriptible,…).

III. Régime financier et fiscal de l’établissement public

Doté de l’autonomie financière, l’Etat dispose des moyens financiers qui lui sont
propres.

L’établissement public a comme ressources la dotation initiale réalisée par la


collectivité territoriale de rattachement, les produits d’exploitation, les taxes
parafiscales éventuelles, les emprunts, les subventions ainsi que des dons et legs.

Le Conseil d’Administration vote annuellement le budget de l’établissement public.


Les opérations financières de l’établissement public sont comptabilisées selon les
règles de la comptabilité générale, c’est-à-dire selon le système comptable OHADA.

La loi du 7 juillet 2008 portant dispositions générales applicables aux établissements


publics n’ayant pas définis en régime fiscal général des établissements publics, les
statuts de chaque établissement public se charge de le faire.

Concrètement, les établissements publics qui sont des SPA bénéficient du même
traitement que l’Etat au plan fiscal et douanier.

Donc, l’établissement public est exonéré ou exempté d’impôts dans les mêmes
conditions que l’Etat mais il est tenu de collecter les impôts, droits, taxes et
redevances dont il est redevable légal et de les reverser au trésor public ou à l’entité
territoriale concernée ou bénéficiaire.

C. Régime spécifique ou cadre spécifique des établissements publics de l’E.S.U.

La législation congolaise distingue trois types d’établissements publics de l’E.S.U., à


savoir les universités publiques, les instituts supérieurs publics, les écoles supérieurs.

I. Considérations d’ordre général

Par l’enseignement supérieur et universitaire, il faut entendre l’ensemble d’activités


académiques, scientifiques et autres exercées par les universités, instituts supérieurs
et les écoles supérieures.

La loi du 7 juillet 2008 portant dispositions générales applicables aux établissements


publics constitue le régime ou le cadre général de tous les établissements dont les
établissements publics à caractère scientifique.
P a g e | 47

Les universités publiques, les instituts supérieurs publics, les écoles supérieures sont
les établissements publics.

Par ailleurs, la loi-cadre du 11 février 2014 de l’enseignement national fixe le cadre


ou le régime spécifique applicable aux établissements de tous les niveaux de
l’enseignement national.

L’enseignement national comprend les établissements publics et les établissements


privés agréés (article 43, alinéa 2 de la Constitution).

L’administration de l’enseignement supérieur et universitaire est assurée par


plusieurs organes :

- Le Ministère de l’ESU qui dispose de plusieurs services spécialisés, par exemple la


commission permanente des études, les presses universitaires, le centre de
linguistique théorique et appliquée,…
- Plusieurs conseils nationaux, à savoir le Conseil académique supérieur, le Conseil
d’Administration des Universités, le Conseil d’Administration des études
supérieures, le Conseil d’Administration des instituts supérieurs techniques,
artistiques et technologiques, Conseil d’Administration des instituts supérieurs
pédagogiques, Conseil d’Administration des écoles supérieures, Conseil de
l’enseignement supérieur, universités privées agréées.

Les établissements de l’ESU n’ont pas de Conseil d’Administration propre tandis que
les autres établissements publics autres que ceux de l’ESU ont un Conseil
d’Administration.

Contrairement au personnel des établissements publics autres que ceux de


l’enseignement supérieur et universitaire qui est régi par le Code du Travail, l’article
122, point 12 in fine de la Constitution prévoit un statut particulier du personnel de
l’enseignement supérieur, universitaire et de la recherche scientifique fixé par voie
des lois.

Alius verbis, le personnel académique (professeurs, associés, professeurs et


professeurs ordinaires), le personnel scientifique (assistants et chefs de travaux) ainsi
que le personnel administratif technique et ouvrier des universités publiques, des
instituts supérieurs publics et des écoles supérieurs sont formés d’agents publics.

Sur le plan financier et fiscal, on peut noter que l’Etat prend en charge le budget des
établissements publics dans le cadre de son budget général.

Les recettes et les dépenses de ces établissements sont comptabilisées suivant le


règlement général de la comptabilité publique alors que pour les autres
établissements publics, c’est le système comptable OHADA qui s’applique.
P a g e | 48

Quoique la loi-cadre de l’enseignement national ne prévoie pas de régime fiscal, il est


permis de penser que ces établissements publics de l’enseignement supérieur et
universitaire doivent être soumis au même régime fiscal que celui de l’Etat.

L’établissement public de l’ESU dispose également ou tout naturellement d’une


autonomie patrimoniale, son patrimoine spécial est distinct de celui de la collectivité
territoriale de rattachement.

II. Universités publiques

1. Dénomination des universités publiques

Auparavant, les universités devaient porter les noms des villes où elles sont
installées. Par exemple, l’Université de Kinshasa, l’Université de Lubumbashi et
l’Université de Kindu.

Actuellement, la loi-cadre de l’enseignement national indique que tout


établissement public de l’ESU porte la dénomination qui figure dans l’acte de sa
création, par exemple l’Université Pédagogique Nationale.

2. Nature juridique des universités publiques

Les universités sont des personnes morales de droit public à caractère scientifique,
c’est-à-dire les établissements publics à caractère scientifique.

Elles sont placées sous la tutelle du Ministre ayant l’enseignement supérieur et


universitaire dans ses attributions, elles jouissent d’une autonomie de gestion
académique, scientifique, financière, administrative et patrimoniale ; elles
assurent l’enseignement du niveau universitaire et la recherche scientifique
fondamentale et appliquée, orientée vers le développement.

La recherche fondamentale et appliquée est produite par les facultés ou des


centres de recherche rattachés à l’établissement public.

Autrefois, l’enseignement supérieur comprenait trois cycles : le graduat, la licence


et le doctorat.

Actuellement, la loi-cadre de l’enseignement national a institué le système


Licence-Maîtrise-Doctorat, en sigle LMD.

Une université peut organiser deux ou trois cycles : la licence pour une durée de
trois ans de formation, la maîtrise pour une durée de deux ans et le doctorat pour
une durée de trois à cinq ans.
P a g e | 49

Le troisième cycle est décomposé en deux étapes : premièrement, l’obtention


d’un diplôme d’études approfondies (DEA), deuxièmement, la présentation et la
soutenance publique d’une thèse inédite sanctionnée par un diplôme de docteur
et d’agrégé (médecine).

3. Les organes des universités publiques

Une université publique comprend en son sein les organes ci-après :

1) Le Conseil de l’Université composé du recteur, du secrétaire général


académique, du secrétaire général administratif, d’un administrateur du
budget, des doyens des facultés, du bibliothécaire en chef, du conservateur en
chef, du vice-doyen chargé des cliniques universitaires, d’un représentant du
corps académique, d’un représentant du corps scientifique, d’un représentant
du personnel administratif, technique et ouvrier et d’un représentant des
étudiants.
2) Le Comité de gestion qui comprend le recteur, le secrétaire général
académique, le secrétaire général académique, le secrétaire général
administratif et l’administrateur du budget.
3) Le recteur élu par ses paires et investi par ordonnance du Président de la
République pour un mandat de quatre ans renouvelables une fois. Il assure
l’exécution des décisions du Conseil d’Administration, du Conseil de l’Université
et du Comité de Gestion, il exerce le pouvoir de police de l’université, il
représente l’université dans toutes ses relations extérieures officielles avec les
autorités tant nationales qu’internationales.
4) Le Conseil de faculté constitué des professeurs ordinaires, des professeurs et
des professeurs associés, de deux représentants du personnel scientifique et de
deux représentants des étudiants de la faculté, des professeurs à temps partiel,
les professeurs visiteurs et les suppléants peuvent assister aux réunions du
Conseil de la faculté.
Le Conseil facultaire constitué du doyen, du vice-doyen chargé de
l’enseignement, du vice-doyen chargé de la recherche, du secrétaire
académique et des chefs de département prend en cas d’urgence toute mesure
relevant de la compétence du Conseil de faculté.
5) Le Conseil de département constitué du personnel académique, des chefs de
travaux, de deux représentants des assistants et de deux représentants des
étudiants du département.
Il est dirigé par un chef de département assisté de deux secrétaires, l’un chargé
de l’enseignement, l’autre de la recherche.
P a g e | 50

III. Instituts supérieurs publics

1. Nature juridique

Les instituts supérieurs publics sont également des personnes de droit public à
caractère scientifique, c’est-à-dire les établissements publics à caractère
scientifique suivant la loi du 7 juillet 2008 portant dispositions générales
applicables aux établissements publics.

Ils jouissent de l’autonomie de gestion académique, scientifique, administrative,


financière et patrimoniale.

Ils sont placés sous la tutelle du Ministre ayant l’ESU dans ses attributions. Ils
portent la dénomination qui figure dans les actes de leur création.

L’enseignement supérieur comprenait à l’époque deux cycles : le graduat et la


licence.

Actuellement, un institut supérieur ne peut organiser qu’un ou deux premiers


cycles prévus dans le système LMD, c’est-à-dire uniquement la licence et/ou la
maîtrise.

2. Organes des instituts supérieurs

Les instituts supérieurs publics comprennent en leur sein les organes ci-après : le
Conseil de l’Institut, le Comité de Gestion, le Directeur Général, le Conseil de
Section et le Conseil de Département.

IV. Ecoles Supérieures

1. Nature juridique

L’école supérieure est un établissement public de l’ESU. Elle a pour mission de


former des cadres de haut niveau dans divers secteurs en fonction des besoins
réels de la société, par exemple : l’école supérieure de la magistrature, l’école
nationale d’administration dans le domaine de la fonction publique.

L’école supérieure est une personne morale de droit public placée sous la tutelle
du Ministre ayant l’ESU dans ses attributions, elle jouit d’une autonomie
académique, scientifique et administrative, financière et patrimoniale. Elle porte la
dénomination qui figure dans l’acte de sa création.

Les modalités d’organisation et de fonctionnement des écoles supérieures sont


fixées ou déterminées par décret du Premier Ministre.
P a g e | 51

2. Organisation atypique de l’Ecole Nationale de l’Administration

Le décret du 16 avril 2003 portant création de l’ENA montre que celle-ci est un
établissement public à caractère administratif qui a pour objet la formation des
agents de carrière des services publics de l’Etat (fonctionnaires).

L’ENA est placée sous la tutelle du Ministre ayant la fonction publique dans ses
attributions. L’ENA a pour organes le Conseil d’Administration, le Directeur
Général et le Collège des Commissaires aux Comptes.

Son personnel administratif est formé de fonctionnaires.

§3 Autorités administratives indépendantes

La volonté de donner plus de liberté et d’indépendance à certains services de


l’Administration centrale de l’Etat ayant la responsabilité des secteurs sensibles, c’est-à-dire
les secteurs touchant aux droits et libertés des citoyens, a conduit à l’institution des
autorités administratives indépendantes.

En effet, le discrédit du pouvoir politique est devenu tel qu’il ne peut plus obtenir
la confiance du citoyen et des opérateurs économiques qu’en confiant les aspects les plus
délicats de l’administration moderne, à des autorités qui lui échappent.

L’organisation de ces services administratifs d’Etat pose un vrai défi


constitutionnel par rapport à l’organisation traditionnelle dans l’Etat.

A. Les défis constitutionnels posés par les autorités administratives indépendantes

Traditionnellement, l’administration est organisée selon le principe hiérarchique qui


permet aux autorités supérieures de donner les ordres ou instructions aux autorités
subordonnées et de sanctionner les échelons inférieurs en cas d’inobservance.

Or, les autorités administratives indépendantes sont des institutions administratives


placées hors hiérarchie car elles échappent à tout pouvoir d’instruction et de reformation
et disposent d’une liberté d’action juridiquement garantie.

Concrètement, leur indépendance provient du fait qu’elles ne sont pas soumises à


l’autorité hiérarchique d’un Ministre. Alius verbis, la particularité institutionnelle des
autorités administratives indépendantes tient au fait que bien qu’autorités
administratives, elles sont indépendantes organiquement et fonctionnellement du
pouvoir hiérarchique étatique qui est sensé unifier l’appareil administratif sous la
responsabilité du Gouvernement.
P a g e | 52

Toutefois, les autorités administratives indépendantes ne sont pas indépendantes


spécialement du juge administratif qui peut *…+ leurs actes.

B. Les autorités administratives indépendantes en droit congolais

Le constituant congolais ne qualifie pas expressément d’autorités administratives


indépendantes une institution ou un service public du type administratif.

Mais l’identification de ces autorités administratives indépendantes est possible parmi les
institutions administratives congolaises existantes.

I. Cadre juridique des autorités administratives indépendantes congolaises

Le titre V et l’article 202 de la Constitution instituent ou invitent le législateur à


instituer des institutions d’appui à la démocratie.

Lorsque le constituant qualifie le CSAC et la CENI d’institutions d’appui à la


démocratie, cela ne voudrait pas dire que ces institutions deviennent autre chose que
des organismes publics administratifs.

Le qualificatif « administratif » est relatif à la nature juridique des actes édités par ces
organismes de droit public. Ce qui n’exclut nullement que certains de leurs actes
administratifs puissent avoir un caractère politique. Les AAI disposent d’une
compétence propre dans un domaine spécialisé.

Elles disposent souvent d’un pouvoir réel de décisions mais elles peuvent aussi
formuler des avis ou propositions en toute indépendance.

II. L’inventaire des autorités administratives indépendantes congolaises

Les organismes publics de l’Etat ci-après peuvent être qualifiés d’autorités


administratives indépendantes :

- L’autorité de régulation de la poste et de télécommunication (ARPTC)


- La commission électorale nationale indépendante (CENI)
- Le conseil supérieur de l’audiovisuel et de la communication (CSAC)
- La commission nationale des droits de l’homme (CNDH)
- Le conseil économique et social
- La Banque Centrale du Congo

III. L’existence des statuts diversifiés des autorités administratives congolaises

De l’analyse des textes qui organisent les autorités administratives indépendantes


identifiées, l’on constate qu’elles n’ont pas un statut uniforme.
P a g e | 53

Il y a diversité des structures organiques et diversité dans la composition desdits


organes en fonction des besoins multiples poursuivis par lesdites autorités
administratives indépendantes.

Par exemple, la CENI est composée des délégués de la majorité politique, de


l’opposition politique et de la société civile. Le CSAC est composé de délégués des
institutions politiques et nationales, du conseil supérieur de la magistrature, des
associations des professionnels des médias du secteur de publicité, du conseil
national de l’ordre des avocats, des associations des parents d’élèves et d’étudiants
et des associations de défense des droits des professionnels des médias. La CNDH est
composée de représentants des ONG des droits de l’homme, des ordres
professionnels, des syndicats, des confessions religieuses, des universités, des
personnes avec handicap, des personnes vivant avec le VIH Sida et des ONG des
droits spécifiques de la femme. Le Conseil Economique et Social est composé de
représentants des organisations professionnels d’employeurs, des organisations
professionnels des travailleurs, des ONG pour le développement et la protection de
l’environnement, des confessions religieuse, des ordres, associations et corporations
professionnels, des autorités traditionnelles et coutumières, du monde scientifique,
du secteur financier, bancaire et des assurances, de la diaspora congolaise, de
chacune des 25 provinces et de la ville de Kinshasa, ainsi que de trois personnalités
indépendantes désignées intuitu personae par le Président de la République. L’ARPTC
est composé d’un président, d’un vice-président et de cinq conseillers.

Le personnel des Autorités Administratives Indépendantes

Par exemple, le personnel de la BCC est régi par un statut fixé par le Conseil de la
banque. L’ARPTC emploie trois types de personnel : le personnel recruté
conformément au Code du Travail, les fonctionnaires en position de détachement et
les agents en provenance des établissements publics. Toutefois, le principe est que
les agents de l’ARPTC relèvent du droit du travail.

Le statut des membres du secrétariat exécutif de la CENI relève du régime


administratif et financier particulier de la CENI.

Le personnel administratif et technique du CESAC est recruté conformément à la


procédure d’usage dans l’administration publique, c’est-à-dire ce personnel est
formé d’agents publics.

S’agissant du personnel de la CNDH, c’est le règlement intérieur qui fixe le régime


juridique applicable audit personnel.
P a g e | 54

Commentaires

Les autorités administratives indépendantes sont dotées d’une personnalité


juridique. Ce sont des SPA. C’est donc, en principe, le régime public qui est appliqué,
sauf exception.

Ces autorités administratives indépendantes sont créées soit par la Constitution soit
sur proposition.

Le conseil économique et social est un organe auxiliaire de l’Etat qui formule des avis
en toute indépendance dans le domaine économique et social. Il apporte son appui
aux institutions politiques nationales et peut suggérer des réformes tant au niveau du
pouvoir central qu’au niveau des provinces et de la ville de Kinshasa.

La politique budgétaire est gérée par le gouvernement, or la politique monétaire


appartient à la Banque Centrale et échappe au gouvernement. Elle ne reçoit alors
aucune injonction.

Les autorités administratives indépendantes reçoivent une partie des compétences


normalement dues aux Ministères.

La composition de la CENI tient compte de la dimension politique. Bien qu’il s’agisse


d’un organe administratif, on y retrouve des éléments du privé (partis politiques,
société civile).

Les membres des AAI sont des agents publics mais pas forcément des fonctionnaires.
Ils sont alors soumis aux règles du droit du travail.

Section II : Les services publics gérés par les personnes privées

Compétente pour créer le service public, la collectivité territoriale peut décider


de ne pas le gérer elle-même. Elle fait alors appel à une personne de droit privé. L’investiture
de la personne de droit privé à gérer un service public peut découler d’un contrat (régie
intéressée, concession des services publics et affermage) ou d’une situation légale
(entreprise publique en forme de société commerciale et ordre professionnel).

Commentaires

Le principe : la collectivité territoriale qui crée le service gère le service. L’Etat qui
crée le service, gère le service.
P a g e | 55

§1 La régie intéressée

En dépit de sa dénomination trompeuse, la régie intéressée n’est pas à vrai dire


une régie mais un contrat pour la gestion d’un service public.

Régie intéressée : contrat par lequel l’autorité contractante confie la gestion d’un
service public à une personne privée ou publique rémunérée par elle tout en étant
intéressée au résultat d’exploitation du service au regard des économies réalisées, des biens
de productivité ou de l’amélioration de la qualité du service.

Contrairement au droit positif congolais, le régisseur est presque exclusivement


une personne privée. Le régisseur reçoit le service public clé en mains et il ne le gère pas
vraiment à ses risques et périls.

La régie intéressée comporte la conclusion d’un contrat entre la personne


publique créatrice du service public et la personne privée qui est intéressée à la marche du
service.

Cette forme de gestion est très rare. On y fait recours aux spécialistes, aux
artistes dans les domaines très spécifiques. Par exemple, la Bibliothèque Nationale ou les
Archives Nationales peuvent être confiées par contrat à un spécialiste bibliothécaire ou
archiviste.

 La régie intéressée n’est pas à confondre avec la régie indirecte.

Le véritable critère de la régie intéressée est que le régisseur trouve sa


rémunération dans son intéressement dans certains résultats d’exploitation qui ne sont pas
eux-mêmes des bénéfices. En d’autres termes, le régisseur intéressé est rémunérée non par
les bénéfices du service mais par une prime calculée en fonction de la qualité de la gestion.
Le régisseur est donc payé par l’administration contractante et non par les usagers du
service public.

§2 La concession des services publics

a. Notions de concession des services publics

Au XIXème siècle, à l’époque libérale, l’administration ne se mêle pas aux activités


industrielles ou commerciales. Lorsque l’administration doit par nécessité assumer une
activité de cette nature, elle le fait sans s’engager elle-même directement. Elle confie
l’exploitation à une personne privée par voie de contrat à ses risques et périls.

Le contrat par lequel l’administration confie l’exploitation d’une activité industrielle ou


commerciale est un contrat de concession des services publics.
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Le contrat de concession des services publics est un contrat de droit public, c’est-à-dire
un contrat administratif. La loi du 7 juillet 2008 portant dispositions générales relatives
au désengagement de l’Etat définit, en son article 2, la concession des services publics
comme un contrat par lequel une personne morale de droit public confie à une
personne morale de droit privé ou public la gestion et/ou l’exploitation d’une structure
ou d’une activité contre le paiement d’une redevance et la prise en charge totale ou
partielle des risques liés à l’investissement.

Il se dégage de cette définition légale que pour les services nouveaux à créer et qui
comportent en particulier la construction de vastes ouvrages publics, il est avantageux
pour la collectivité territoriale de passer contrat avec un particulier qui s’engage à
construire tout ce qui est nécessaire. C’est ce qui explique que le contrat de concession
des services publics comporte toujours une clause aux termes de laquelle au bout d’un
certain temps, les installations reviendront gratuitement à l’autorité possédante en fin
de concession.

Contrairement au droit positif congolais, la concession des services publics, selon la


doctrine, est un mode de gestion d’un service dans lequel une personne publique, le
concédant, charge par contrat une personne privée, le concessionnaire, de faire
fonctionner le service pendant un certain temps en assumant les charges moyennant le
droit de se rémunérer sur les usagers.

Le critère qui caractérise la concession des services publics est le mode de rémunération
du concessionnaire. Il ne peut y avoir concession que si le contrat prévoit une
rémunération sur les usagers. En effet, le concessionnaire est rémunéré par des
redevances perçues par lui sur les usagers alors que dans le cas de la régie intéressée, le
régisseur est payé par l’administration contractante en fonction de la qualité de la
gestion du service.

b. Obligations et droits du concessionnaire

1. Obligations du concessionnaire

Les obligations du concessionnaire se ramènent toutes à l’obligation de faire


fonctionner personnellement le service public à ses risques et périls. De là, le
concessionnaire doit assurer la continuité du service.

Le principe de continuité du service public peut justifier dans certains cas la mise en
œuvre la théorie de l’imprévision pour le rétablissement de l’équilibre financier par
l’obtention des indemnités compensatoires.

En outre, le concessionnaire a pour obligation de respecter l’égalité des usagers


dans le service.
P a g e | 57

Le concessionnaire est encore tenu de se soumettre au pouvoir qu’a


l’administration de modifier le régime de tout service public pour l’adapter à de
nouveaux aspects de l’intérêt général.

Enfin, les exigences de la mission d’intérêt général obligent le concessionnaire à se


soumettre à des contrôles d’ordre technique et financier de la part de
l’administration.

2. Droits du concessionnaire

Il a deux types de droits : le droit afférant à la gestion du service et le droit


pécuniaire.

D’abord, l’autorité concédante met à la disposition du concessionnaire un ensemble


de moyens, notamment des moyens juridiques permettant au concessionnaire de
réaliser des ouvrages et d’exploiter les services en monopole. Elle met également
des moyens matériels, notamment des dépendances du domaine public.

Ensuite, le droit pécuniaire ou financier. Doivent être accordés au concessionnaire,


qui est un entrepreneur privé, les droits pécuniaires suivants :

- Le concessionnaire se rémunère en conservant pour lui le produit des


redevances perçues sur les usagers, en contrepartie du service rendu
- Au profit du concessionnaire, le contrat prévoit d’autres avantages financiers,
notamment la garantie d’un intérêt minimum accordée à ses emprunts par le
concédant
- Le concessionnaire peut se prévaloir du principe de l’équilibre financier du
contrat en vertu des théories du fait de prince et de l’imprévision
 Fait du prince : aléa administratif. Lorsque l’administration prend une décision
qui aggrave l’équilibre du marché. Cette mesure doit être liée à la puissance
publique. Dans ce cas, le concessionnaire jouit d’une indemnité
compensatoire de l’autorité concédante

c. Fin de la concession

La concession prend normalement fin lorsque la durée pour laquelle elle a été conclue
vient à expirer. Elle peut cependant être renouvelée.

La concession peut aussi se terminer à la suite de la déchéance prononcée par le juge


en cas de faute très lourde.

Le contrat de concession de service public peut également être résilié. La résiliation peut
intervenir soit pour faute grave de l’autorité concédante soit pour cause de force
majeure.
P a g e | 58

Lorsque la concession prend fin, les biens doivent être répartis en trois masses ou trois
catégories :

- Les biens de retour qui reviennent à la personne publique concédante. Il s’agit ici des
immeubles nécessaires à l’exploitation du service public intégrés ab initio, ab ovo
- Les biens de reprise qui sont des biens que le concédant a le droit d’acheter sans que
le concessionnaire puisse s’y opposer. Il s’agit des meubles servant à l’exploitation du
service public qui peuvent revenir au concédant
- Les biens propres qui demeurent la propriété du concessionnaire

§3 L’affermage

L’affermage est défini par le législateur congolais comme un contrat dans lequel
l’Etat, propriétaire, en confie *…+ le produit de cette exploitation et verse au propriétaire un
loyer dont le montant est convenu à l’avance indépendamment des produits de
l’exploitation (article 3.2 de la loi du 17 juin 2014 relative au secteur de l’électricité).

De cette définition légale, il se dégage que l’opérateur ou le fermier ne réalise


pas les dépenses de premier établissement parce que les installations ou équipements sont
construits par la collectivité publique qui en est le propriétaire. En d’autres termes, le
fermier ne doit pas réaliser des investissements à caractère immobilier, sinon cela fera de lui
un concessionnaire.

Par ailleurs, la rémunération du fermier est assurée par les redevances perçues
sur les usagers dont le produit est diminué du loyer dont le montant est convenu entre
parties dans le contrat. Ce loyer est indépendant du résultat des exploitations des ouvrages
par le fermier.

Commentaires

Différence entre la concession des services publics et l’affermage : dans le


premier, le concessionnaire (le cocontractant de l’administration) doit réaliser les
investissements. L’Etat concède sans dépenser. Alors que dans l’affermage, le fermier ne
réalise pas le premier investissement.

Dans l’affermage, le concessionnaire paye un loyer alors que dans la concession


des services publics, l’Etat ne perçoit aucun loyer.

Dans la régie intéressée, le régisseur n’engage pas de frais, il ne fait aucun


investissement. C’est l’Etat qui fait tout. Il s’agit d’un service public à caractère administratif.
Dans la concession et dans l’affermage, c’est un service public à caractère matériel. Dans la
concession des services publics, le concessionnaire finance, il réalise les investissements et la
rémunération n’est pas liée aux produits. Dans l’affermage, l’Etat réalise les premiers
P a g e | 59

investissements. La rémunération est prise sur les redevances perçues par les usagers,
diminuées du loyer.

Point de convergence entre la régie intéressée et l’affermage : l’Etat réalise les


investissements.

Différence : régie intéressée : service public à caractère administratif tandis que


l’affermage est à caractère matériel. Régie intéressée tient compte de la qualité de
l’exploitation alors que la concession et l’affermage ne tiennent pas compte de cette qualité.

§4 Les entreprises publiques en forme de sociétés commerciales

La Constitution indique, en son article 123.2 que les principes fondamentaux


concernant la création des entreprises publiques sont déterminés par la loi. C’est en
application de cette disposition constitutionnelle que la loi n°08/007 du 7 juillet 2008
portant dispositions générales relatives à la transformation des entreprises publiques a été
édictée.

En sus, la loi n°08/008 du 7 juillet 2008 fixe les dispositions générales relatives au
désengagement de l’Etat des entreprises du portefeuille. Cependant, la loi n°08/010 du 7
juillet 2008 fixant les règles relatives à l’organisation et à la gestion du portefeuille de l’Etat
manque de base constitutionnelle.

La notion d’entreprise est indépendante à la fois du caractère public ou privé de


la personne gestionnaire de l’activité. La qualification d’entreprise est attribuée à toute unité
économique qui opère de façon indépendante sur le marché.

La nature économique de l’activité s’entend des activités de caractère industriel


et commercial à offrir des biens ou des services sur le marché. Les entreprises organisées
sous la forme d’établissement public ne rentrent pas dans le cadre de la gestion des services
publics par des personnes privées.

Le droit positif congolais ne retient que les entreprises publiques en forme de


société commerciale. Auparavant, l’expression « entreprise publique » était synonyme du
terme « établissement public ».

Commentaires

Une entreprise publique (une activité économique, industrielle ou commerciale)


a deux formes : établissement public ou société commerciale.

La gestion du portefeuille est du domaine réglementaire, pas du domaine de la


loi.
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Le législateur ne traite pas toutes les questions. Le pouvoir réglementaire prend


le relais.

A. Notions d’entreprise publique

Le champ classique d’application du procédé d’établissement public est celui des


services publics susceptibles d’attirer des libéralités. En revanche, le domaine d’action
d’une entreprise publique est celui de la production des biens et des fournitures de
service. Le droit congolais opte désormais pour une notion stricte d’entreprise publique
en forme de société commerciale.

Le législateur congolais définit l’entreprise publique comme toute entreprise du


portefeuille de l’Etat dans laquelle l’Etat ou toute autre personne morale de droit
public détient la totalité ou la majorité du capital social (article 2 de la loi du 7 juillet
2008 portant dispositions générales relatives au désengagement de l’Etat des
entreprises du portefeuille.

Une entreprise du portefeuille est une société dans laquelle l’Etat ou une collectivité
locale détient la totalité des actions ou une participation. Lorsque la personne publique
détient dans une société commerciale la totalité du capital social ou la majorité absolue
du capital, on est en présence d’une entreprise publique.

B. Typologie d’entreprises publiques

I. Entreprise publique en forme de société à capital public

En droit positif congolais, l’entreprise publique est d’abord une société publique ou
une société à capital public de toute forme prévue par la législation commerciale.
Suivant l’article 385, alinéa 2 de l’AUSCGIE, la Société Anonyme peut comprendre
un seul actionnaire. En pratique, les anciennes entreprises publiques évoluant dans
le secteur marchand ont été transformées et constituées transitoirement en Société
par Action à Responsabilité Limitée mais leurs formes définitives est plutôt la
Société Anonyme, suivant le droit de l’OHADA. Aujourd’hui, la CADECO, la
COHYDRO, la Société Commerciale La Minière de KISENGE MANGANEZE, l’Hôtel
Karavia, la GECAMINES, la REGIDESO, la RVA, la Société Commerciale des Transports
et des Ports (SCTP), la Société Congolaise des Postes et de Télécommunication, la
Congolaise des Voies Maritimes, la SONAS, la SNEL, la SNCC, la SOCIDER sont des
sociétés publiques d’Etat, c’est-à-dire à capital public.
P a g e | 61

II. Société publique en forme de société d’économie mixte

La société d’économie mixte désigne la société dans laquelle certains capitaux sont
publics et d’autres privés.

L’entreprise publique est aussi une société d’économie mixte dans la mesure où les
pouvoirs publics peuvent s’associer à des personnes privées pour assurer le
financement et la gestion de l’entreprise.

Une société d’économie mixte congolaise ne peut être qualifiée d’entreprise


publique que si la personne publique détient la majorité absolue des actions ou
parts sociales. Actuellement, les sociétés ci-après sont des sociétés d’économie
mixte : FINA, CHANIMETAL, CILU, Sucrière de KWILUNGONGO, CINAT, BCDC, Grand
Hôtel, NIBA, MIDEMA, SONAL, SOTESKI, ex-SOCIR, Sucrière de KILIBA, etc.

Commentaires

Actuellement, l’essentiel des entreprises publiques sont des sociétés publiques.

Entreprises du portefeuille de l’Etat = société d’économie mixte + société publique.

Société publique : société commerciale dont le capital appartient qu’aux personnes


publiques.

Société d’économie mixte : société commerciale dans laquelle il y a partage du


capital entre personnes publiques et personnes privées.

Toute société d’économie mixte n’est pas toujours une entreprise publique en droit
congolais.

Une société d’économie mixte devient entreprise publique que lorsqu’on conclue
que la majorité absolue du capital appartient aux personnes publiques.

C. Régime juridique de l’entreprise publique

Le trait commun à toutes les entreprises publiques est leur soumission de principe au
droit privé et particulièrement au droit commercial.

La règle s’applique à tous les aspects de leurs activités, à savoir le statut du personnel,
l’activité de l’entreprise, le régime financier et la situation patrimoniale.

 Le personnel des entreprises publiques est composé des salariés soumis au droit du
travail.
 L’activité de l’entreprise (rapport avec le fournisseur, les clients, les tiers, prise de
participation) s’exerce selon les procédés du droit commercial et éventuellement du
droit civil.
P a g e | 62

 Le régime financier échappe totalement aux règles de la comptabilité publique.


L’entreprise publique n’a pas de budget mais des états de prévision. C’est le
SYSCOHADA qui s’applique aux opérations financières des entreprises publiques. Le
régime fiscal, douanier et parafiscal est celui du droit commun.
 La situation patrimoniale est comparable à celle des entreprises de l’initiative des
particuliers. Elle est donc soumise aux règles du droit civil des biens. Une entreprise
publique peut vendre ses biens, les échanger sous la seule obligation de ne pas
diminuer leur valeur globale qui constitue son capital social.

Commentaires

En principe, le droit privé s’applique pour les SPIC. Et lorsqu’on dit « en principe », c’est
en tenant compte des EPIC et les autres formes de SPIC.

S’agissant des entreprises publiques, c’est nécessairement le droit privé qui s’applique.

§5 Les ordres professionnels

La notion d’ordres professionnels conjugue trois données fondamentales quant à


son organisation :

- l’ordre est une organisation chargée à la fois de représenter la profession auprès des
pouvoirs publics et d’assurer la discipline de ses membres.
- l’ordre est un groupement forcé
- l’ordre a une structure corporative car son personnel dirigeant est issu de la profession
elle-même.

A. L’organisation de la profession

Les ordres professionnels sont des personnes privées exerçant des missions d’intérêt
public.

Les ordres professionnels bénéficient d’une véritable personnalité juridique de droit


public. Cette personnalité juridique est fractionnée à l’intérieur de l’organisation de
l’ordre professionnel. En effet, la personnalité morale est attribuée à l’ordre tant au plan
national qu’au plan local. Par exemple, chaque barreau établi près la Cour d’Appel ou
près la Cour Suprême de Justice ainsi que l’Ordre National des Avocats ont la
personnalité juridique.

La mission confiée aux ordres professionnels par le législateur est d’abord d’organiser la
profession et de la représenter auprès des pouvoirs publics. A cet égard, l’ordre
professionnel organise la profession dans le cadre de la loi de base qui fixe les règles
générales de la profession.
P a g e | 63

L’ordre professionnel dispose du pouvoir administratif qui est réglementaire secundum


legem et aussi non réglementaire pour prendre des actes individuels. Par exemple, le
règlement intérieur ou le règlement d’ordre intérieur de l’ordre, la fixation du taux des
honoraires, la fixation du montant des cotisations sont des actes administratifs
réglementaires.

En revanche, l’inscription au tableau de l’ordre est un acte individuel. Les actes


administratifs des ordres professionnels sont susceptibles de recours en annulation pour
excès de pouvoir.

A contrario, les décisions que les ordres professionnels peuvent prendre sans pour
autant mettre en œuvre une prérogative de puissance publique sont des actes de droit
privé qui concernent le fonctionnement interne. Il s’agit notamment des décisions qui
concernent l’institution qui est privée et non son activité qui est l’exécution d’une
mission de service public. Par exemple, les décisions prises par les ordres professionnels
pour assurer le recouvrement des cotisations impayées. Les agents des ordres
professionnels sont des salariés de droit du travail. Leurs patrimoines sont des biens
privés, leur régime financier échappe à la comptabilité publique.

Commentaires

Le législateur constitue l’ordre par une loi, donne les règles de base pour qu’une telle
profession libérale soit exercée au sein de l’Etat mais la détermination des détails de
l’organisation sont laissés aux organes de l’ordre.

Le lien entre l’ordre professionnel et les services privés ? Lorsque le législateur organise
un ordre, c’est pour prendre en charge un besoin, comme par exemple, le besoin d’une
justice équitable ou encore d’une meilleure défense judiciaire.

B. La discipline au sein de la profession

L’ordre professionnel est ensuite chargé d’assurer la discipline au sein de la profession.


Ils sanctionnent les fautes contre la morale professionnelle telles que définies dans le
Code de Déontologie.

Les fautes professionnelles sont punies de sanctions professionnelles prononcées par


des organes professionnels.

Le principe de droit pénal « nulla poena sine lege » est transposé en matière de
répression professionnelle assurée par les organes de l’ordre (Conseil National ou
Conseil Provincial).
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Le principe du double degré de juridiction s’applique en matière de répression


professionnelle au sein de l’ordre. Contre les décisions de premier ressort (Conseil
Provincial), un appel est ouvert devant les instances supérieures (Conseil National).

Section III : Les principes de base du fonctionnement des services publics

Un régime juridique minimum applicable à tout service public, quel que soit son
mode de gestion, est constitué de quelques principes de base.

Sous l’angle de l’Etat de droit, ces principes de base peuvent être rangés en deux
catégories.

En effet, en raison de l’importance prise par le droit au recours, il paraît judicieux


de distinguer les principes qui sont effectivement invocables par les usagers et ceux qui ne le
sont pas.

Les premiers constituent des lois parfaites ou complètes, les secondes des lois
encore imparfaites ou incomplètes.

§1 Les lois complètes du service public

Les principes de continuité de service public, le principe d’égalité devant le


service public e le principe de neutralité de service public constituent des lois parfaites du
service public.

A. Le principe de continuité du service public

Il s’applique au service public le principe constitutionnel de continuité de l’Etat.

La continuité est l’essence même de l’Etat. Si une activité a été érigée en service public,
c’est parce qu’elle présente un caractère particulièrement impérieux pour la vie
nationale ou la vie locale.

Ainsi, il faut que ce service fonctionne à tout prix. Ce principe de continuité commande
que le service public fonctionne de manière ininterrompue, il commande aussi que le
fonctionnement du service public soit ponctuel et régulier.

Au départ, ce principe interdisait aux agents publics de faire grève.

Dans la pratique des Etats, c’est au milieu du XXème siècle que le droit de grève a été
reconnu aux agents publics. Toutefois, il y a toujours nécessité de concilier le droit de la
grève avec la nécessité de la continuité du service public.
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Suivant l’article 39, alinéa 2 de la Constitution, la loi qui fixe les conditions d’exercice du
droit de grève peut en interdire ou en limiter l’exercice dans certains secteurs de la vie
nationale. Par exemple, le secteur de la défense nationale ou de la sécurité. Dans tous
les cas, lorsqu’il y a grève, il faut tout au moins organiser un service minimum. Le
principe de continuité justifie également la théorie de l’expédition des affaires
courantes.

B. Le principe d’égalité devant le service public

Le principe constitutionnel d’égalité de tous devant la loi (article 12) est la base juridique
du principe d’égalité devant le service public.

Le principe d’égalité se traduit d’abord par l’égal accès des citoyens au service public. Si
cet accès est soumis à des conditions particulières, comme par exemple le paiement du
prix d’accès, il faut que ces conditions soient les mêmes pour chaque candidat usager.

Le principe d’égalité renvoie ensuite à l’égalité de traitement des usagers. Il est question
ici de l’égalité du traitement car à situation de fait égale, l’usager doit s’attendre à un
traitement égal.

Enfin, le principe d’égalité s’interprète aussi comme un principe de non discrimination. Il


s’analyse à cet égard comme un moyen d’assurer effectivement l’égalité par
l’atténuation des inégalités. C’est ici qu’apparaît la notion de la discrimination positive.

La finalité du rétablissement d’égalité par la discrimination positive ne se réalise pas au


détriment de certaines catégories de personnes mais plutôt en favorisant des catégories
qui ne pourraient satisfaire autrement les besoins auxquels répond le service considéré.
Par exemple, le service de garde des enfants, l’assistance aux personnes âgées ou aux
personnes handicapées.

C. Le principe de neutralité du service public

Le principe d’égalité devant le service public a comme complément le principe de


neutralité du service public.

Ce principe de neutralité voudrait que par leur fonctionnement, les services publics
soient idéologiquement neutres.

Le service public doit demeurer apolitique, neutre et impartial. Le service public repose
sur l’idéal d’une solidarité entre les individus par delà leurs différences politiques, d’âge,
de réside, d’appartenance tribale ou à une minorité culturelle ou linguistique.

Le principe de neutralité est donc une garantie de l’existence administrative de services,


c’est-à-dire un frein à une utilisation excessive de l’activité des services publics.
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§2 Les lois incomplètes du service publics

Deux principes peuvent être rangés dans la catégorie des lois incomplètes du
service public : le principe de mutabilité du service public et le principe nouveau de la qualité
du service public.

A. Principe de mutabilité du service public

Le principe de mutabilité du service public ou la loi de changement part de l’idée selon


laquelle la puissance publique a le monopole de la détermination de l’intérêt général et
du fait de l’absence des droits acquis nés des actes réglementaires.

L’administration peut modifier à tout moment l’organisation et le fonctionnement du


service public pour se conformer aux évolutions des besoins collectifs.

L’intérêt général variant dans le temps, les services publics doivent s’adapter à
l’évolution des personnes, de la population, des techniques, de la situation économique
et des choix politiques.

Les administrés ne disposent ni d’un droit acquis au maintien des services publics
exceptés les services imposés par la loi et la constitution ni d’un droit au maintien du
pouvoir réglementaire.

B. Principe de la qualité du service public

Le souci de la qualité du service public est lié à l’idée même du service public.

Si les prestations du gestionnaire d’un service public étaient de très mauvaise qualité, le
service s’éloignerait trop des attentes des usagers ainsi que des nécessités de l’intérêt
général.

Dans le cadre de l’exigence de la qualité du service public, l’administration se trouve


dans l’obligation d’améliorer l’image du service public.

§3 L’inexistence d’un principe général de gratuité de service public

Il n’existe pas de principe général de gratuité du service public. L’existence même


des SPIC exclue un tel principe.

En réalité, ce sont quelques rares services publics qui sont gratuits. Par exemple,
le service public pénitentiaire ou le service public de la voirie.

La Constitution n’impose expressément la gratuité que du seul service public de


l’enseignement national au niveau primaire dans les établissements publics.

 Le service public n’est pas synonyme de gratuité.


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CHAPITRE III : LE CONTRÔLE DES SERVICES PUBLICS

Le contrôle vise à assurer la meilleure exécution possible des services publics.

Plusieurs raisons expliquent la nécessité du contrôle. Premièrement, le


fonctionnement des services publics étant primordial, il faut chaque fois analyser l’activité
des services publics pour en tirer des améliorations.

Deuxièmement, les services publics fonctionnant à l’aide des deniers publics, il


faut veiller à la meilleure utilisation possible des fonds publics.

Troisièmement, les services publics disposant d’importantes prérogatives au nom


de l’intérêt public poursuivi, il faut éviter l’arbitraire ou les excès de pouvoir.

Quatre types de contrôle peuvent alors s’exercer sur les services publics : le
contrôle citoyen, le contrôle politique, le contrôle administratif et le contrôle juridictionnel.

Section I : Le contrôle citoyen

Le contrôle citoyen est l’expression qui rassemble les instruments dont la


caractéristique est de placer la citoyenneté au cœur du dispositif du contrôle.

Ce contrôle s’intègre dans cette notion nouvelle de la citoyenneté administrative


qui répond au désir profond des administrés d’un traitement respectueux de leurs
aspirations, de leurs convictions, intérêts et plus largement de leur dignité.

Le contrôle que peut exercer le citoyen sur le fonctionnement des services


publics peut se faire directement ou indirectement à travers des institutions publiques dans
le cadre d’une procédure non contentieuse.

§1 Le contrôle citoyen direct

Le citoyen peut procéder lui-même à l’investigation par une demande d’accès


aux documents administratifs.

Il s’agit ici du droit du citoyen à la transparence administrative, c’est-à-dire le


droit du citoyen de savoir ce qu’ont fait, font et vont faire les autorités administratives.

Sous un premier angle, la transparence administrative contraint l’administration


à mettre en œuvre une publicité active. Dans ce cadre, beaucoup de services publics
congolais disposent de sites internet donnant au public ou au public concerné un accès
direct aux informations sur leurs activités.

A partir de ces informations, le citoyen peut interroger les élus ou le


gouvernement et son administration sur les politiques publiques menées.
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Sous un second angle, la transparence administrative exige de l’autorité qu’elle


réponde aux demandes d’informations qui lui sont adressées par le citoyen. Dans ce cadre,
on se trouve dans la situation de la publicité passive de l’administration.

§2 Le contrôle citoyen indirect

Le citoyen peut indirectement recourir à l’intervention d’une personnalité ou


d’une institution indépendante.

En R.D.C., le citoyen peut recourir à la commission nationale des droits de


l’homme (CNDH) qui est une institution administrative indépendante créée en application de
la Constitution (article 222, alinéa 3). Cette commission peut recevoir des informations et
mener des investigations sur des cas de violation des droits de l’homme en vue de formuler
des recommandations aux autorités compétentes qui doivent apporter les solutions
appropriées.

Le citoyen saisit la commission par voie de pétition. En effet, tout congolais a le


droit d’adresser individuellement ou collectivement à l’autorité publique qui doit y répondre
dans les trois mois (article 27, alinéa 1er de la Constitution).

Section II : Le contrôle politique

Le contrôle politique vise à assurer que l’administration accomplisse les objectifs


qui lui sont assuré par les organes politiques. Le parlement contrôle le gouvernement, les
entreprises publiques ainsi que les établissements publics (article 100, alinéa 2).

L’Assemblée provinciale contrôle le gouvernement provincial ainsi que les services


publics provinciaux et locaux (article 117).

Le contrôle politique des conseils locaux sur le collège exécutif et les services
publics locaux est organisé par les articles 36, 37, 38, 58 et 81 de la loi organique du 7
octobre 2008 sur les entités territoriales décentralisées.

En dehors de leur rôle normatif ou fonction normative, les assemblées


délibérantes exercent donc un contrôle politique de l’activité gouvernementale et
administrative de l’Etat.

§1 Le contrôle informatif

Dans le cadre du contrôle informatif, les Assemblées délibérantes (Assemblée


nationale, Sénat, Assemblées provinciales et Conseils locaux) disposent de moyens
d’information et de contrôle appropriés.
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Il s’agit des moyens ci-après : la question orale ou écrite avec ou sans débat non
suivie de vote, la question d’actualité, l’interpellation, la commission d’enquêtes et l’audition
par les commissions permanentes.

§2 Le contrôle aboutissant à des sanctions

Le contrôle politique peut aboutir à des sanctions politiques c’est-à-dire au vote


d’une motion de censure ou d’une motion de défiance.

Cette deuxième modalité de contrôle met en réalité en cause la responsabilité


politique des organes exécutifs.

L’engagement de la responsabilité politique par une motion de censure ou une


motion de défiance n’est possible qu’à l’encontre des membres de l’organe exécutif
(Gouvernement de la République, Gouvernement provincial ou Collège exécutif de l’entité
territoriale décentralisée).

A l’encontre des responsables de l’exécutif, le contrôle politique aboutit à la


formulation des recommandations contenues dans le rapport de contrôle. Ces
recommandations peuvent contenir des propositions et sanctions à prendre par les autorités
compétentes dans un délai de trente jours.

Section II : Le contrôle administratif

Le contrôle administratif est exercé par les autorités ou organes administratifs sur
les services publics.

Il peut s’agir d’un chef hiérarchique, d’une autorité de tutelle, d’une commission
ministérielle, d’un organe d’audit ou d’un corps d’inspection.

A la centralisation correspond le contrôle hiérarchique, à la décentralisation, le


contrôle de tutelle.

§1 Le contrôle hiérarchique

Le contrôle hiérarchique s’exerce dans le cadre d’une organisation administrative


centralisée mais sous la forme pratique de la déconcentration.

La déconcentration, à titre de rappel, désigne un mode d’organisation de


l’administration qui tempère la centralisation et qui consiste en la délégation par l’autorité
titulaire d’une compétence, d’une partie de celle-ci à une autorité subordonnée à charge
pour cette dernière de l’exercer sous le contrôle hiérarchique de la première.
P a g e | 70

Le pouvoir hiérarchique exercé par l’autorité supérieure sur ses subordonnés est
la marque de l’organisation déconcentrée de l’Etat.

Le contrôle hiérarchique est défini indirectement en passant par la notion de la


hiérarchie administrative. A chaque niveau de la pyramide administrative se trouve un chef
hiérarchique qui dispose du pouvoir hiérarchique comprenant essentiellement le pouvoir de
contrôle sur ses subalternes et leurs actes.

Le contrôle hiérarchique présente les caractéristiques ci-après :

1. Etant détenu de plein droit par l’autorité supérieure, le contrôle hiérarchique


s’exerce sans qu’un texte ne soit nécessaire ;
2. Le pouvoir hiérarchique étant un pouvoir général, le contrôle hiérarchique est exercé
sans cause déterminée, c’est-à-dire pour des raisons d’opportunités comme pour des
raisons de régularités juridiques ;
3. Le pouvoir hiérarchique étant spécialement un pouvoir de responsabilité, le contrôle
hiérarchique peut se déclencher spontanément sans qu’il y ait nécessairement un
recours administratif à la base.

Le contrôle hiérarchique s’exerce aussi bien sur les personnes que sur les actes des
subalternes.

A. Le contrôle sur les personnes

Le pouvoir hiérarchique permet à l’autorité supérieure de donner des ordres collectifs


(circulaires, ministériels, directives administratives, instructions des services) ou
individuels qui sont obligatoires pour les personnes qui les reçoivent.

Aux instructions qui lui sont adressées, le subordonné doit s’y conformer sous peine de
faire l’objet de poursuites disciplinaires fondées sur la méconnaissance de son devoir
d’obéissance.

Même si le subordonné peut appeler l’attention du supérieur hiérarchique sur l’illégalité


des instructions reçues, il n’est libéré de l’obligation d’y obéir que si ces instructions
sont manifestement illégales de nature à compromettre gravement un intérêt public.

En cas d’insubordination, le pouvoir hiérarchique, transformé en pouvoir disciplinaire,


implique non seulement la prise de la mesure de suspension préventive mais surtout le
prononcé à la clôture de l’instruction des peines disciplinaires.

B. Le contrôle sur les actes

Le contrôle hiérarchique est plus un pouvoir de contrôle sur les actes que sur les
personnes.
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L’autorité hiérarchique peut suspendre ou reformer les actes des subalternes.


L’annulation permet au supérieur hiérarchique de faire disparaître de l’ordonnancement
juridique les décisions ou les actes du subordonné pour raison d’illégalité ou
d’irrégularité juridique. L’annulation produit des effets rétroactifs ou ex tunc (ab ovo, ab
initio, de origine).

La reformation est la possibilité donnée au chef supérieur disposant d’un pouvoir


d’évocation de remplacer la décision ou l’acte du subordonné par une autre décision
émanant de lui et plus ou moins différente de la décision initiale. La reformation n’a pas
d’effet rétroactif, c’es-à-dire elle produit des effets ex nunc (pour le présent et l’avenir).

La suspension est la possibilité donnée au chef hiérarchique de supprimer


provisoirement les effets de l’acte ou de la décision du subordonné en attendant la
décision définitive.

§2 Le contrôle de tutelle

Le contrôle de tutelle s’exerce dans le cadre d’une organisation administrative


décentralisée territorialement ou par services. La tutelle administrative est donc le
contrepoids de la décentralisation.

La tutelle permet de garantir l’intérêt général qui ne peut être méconnu. Le


contrôle de tutelle est exercé par une autorité supérieure appartenant à une autre personne
administrative. Il s’exerce sur les entités territoriales décentralisées et sur les établissements
publics.

On distingue deux sortes de tutelle : la tutelle générale et la tutelle spéciale.

La tutelle générale est un mode de tutelle qui s’exerce à l’égard de n’importe quel
acte administratif émanant d’une autorité décentralisée. Elle a comme procédé la
suspension et l’annulation. En revanche, la tutelle spéciale est un mode de tutelle qui porte
sur les seuls actes administratifs énumérés dans la loi qui institue la tutelle. Elle s’exerce
principalement par les procédés d’avis préalables, d’autorisation et d’approbation.

Le contrôle de tutelle présente les caractéristiques ci-après :

1. La tutelle administrative est différente de la tutelle du droit civil. Entre les deux
institutions, il n’y a absolument rien de commun sauf le nom. La tutelle
administrative est un pouvoir de contrôle de l’Etat dans le but de la protection de
l’intérêt général et de la sauvegarde des droits individuels.
2. Le contrôle de tutelle est exercé sur les seules personnes publiques, territoriales ou
spécialisées à l’exclusion des provinces et tout naturellement des autorités
administratives indépendantes.
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3. Le contrôle de tutelle doit tenir compte de la liberté reconnue à la collectivité locale


ou à l’établissement public car il ne s’exerce qu’en vertu de la loi. En d’autres
termes, le texte est nécessaire pour qu’il y ait contrôle de tutelle. D’où l’adage « pas
de tutelle sans texte ni au-delà du texte ».

La tutelle sur les établissements publics s’exerce par le Ministre en charge du secteur
d’activités. Cette tutelle s’exerce sur les personnes et sur les actes.

A. Contrôle sur les personnes

L’expression de « tutelle sur les personnes » ne désigne rien d’autre que le pouvoir
disciplinaire exercé sur les autorités décentralisées. Elle s’exerce par voie de
suspension ou de révocation d’un membre, d’un organe d’un établissement public.
Ce contrôle s’exerce sur les directions générales des établissements publics en
général ou des comités de gestion des établissements publics de l’enseignement
supérieur et universitaire ainsi que sur les conseils d’administration des
établissements publics.

B. Contrôle sur les actes

La tutelle sur les actes des établissements publics s’exerce généralement a


posteriori. Elle est a priori lorsqu’un texte le pourvoit expressément. La tutelle a
priori s’exerce par voie d’autorisation. L’autorisation suppose nécessairement
l’existence d’une délibération. Les actes ci-après des établissements publics sont
soumis à l’autorisation préalable :

- Les acquisitions et aliénations immobilières


- Les marchés de travaux et de fournitures d’un montant égal ou supérieur à 500
millions de FC
- Les emprunts à plus d’un an de terme
- Les prises et cessions de participation financière
- L’établissement d’agences et bureaux à l’étranger

La tutelle a posteriori sur les actes des établissements publics s’exerce suivant deux
modalités dans notre droit : par voie d’approbation ou par voie d’opposition.

La tutelle s’exerce par voie d’approbation lorsque le caractère exécutoire est


subordonné à l’approbation de l’autorité de tutelle qui rétroagit à la date de la
décision. Ex. : Le cadre organique où le budget arrêté par le Conseil
d’Administration ne peut être exécutoire qu’après approbation par l’autorité de
tutelle.
P a g e | 73

La tutelle s’exerce par voie d’opposition à l’exécution de toute délibération ou


décision jugée contraire à la loi, à l’intérêt général ou à l’intérêt particulier de
l’établissement public prise par le Conseil d’Administration.

Lorsque l’autorité de tutelle fait opposition, celle-ci notifie l’opposition par écrit au
Président du Conseil d’Administration ou au Directeur Général selon le cas, et fait
un rapport au Premier Ministre. Si ce dernier ne rejette pas l’opposition dans le
délai de 15 jours francs à dater de la réception du rapport, l’opposition devient
exécutoire.

Section IV : Le contrôle juridictionnel

Le contrôle juridictionnel des services publics est assuré par le juge. Le juge
renvoie tout simplement aux cours et tribunaux. Les parquets y rattachés formulent
notamment des avis.

§1 Le dualisme juridictionnel congolais

La Constitution du 18 février 2006 a mis fin à la longue tradition de notre droit qui
voulait que les juridictions administratives de droit commun (section administrative de la
Cour Suprême de Justice et section administrative de la Cour d’Appel) relèvent de l’ordre
judiciaire. En lieu et place d’un seul ordre de juridiction, la Constitution actuelle institue deux
ordres de juridiction, à savoir un ordre de juridiction judiciaire chapeauté par la Cour de
Cassation et un ordre de juridiction administrative chapeauté par le Conseil d’Etat. La Cour
Constitutionnelle constitue une juridiction spéciale. Les juridictions de l’ordre administratif
peuvent être regroupées en juridictions administratives de l’ordre ordinaire (Conseil d’Etat
ou administratif d’appel ou tribunaux administratifs) et en juridictions administratives de
l’ordre dit spécialisé (Cour des Comptes comme juge des comptes des comptables publics,
Conseil Supérieur de la Magistrature comme juridiction disciplinaire des magistrats et
juridiction ordinale, c’est-à-dire les conseils nationaux et provinciaux des ordres
professionnels comme juridiction disciplinaire des membres desdits ordres).

§2 Les modalités de contrôle juridictionnel des services publics et de leurs agents

A. Le contrôle par les juridictions de l’ordre judiciaires

Les juridictions de l’ordre judiciaire jouent le rôle soit de juge pénal pour
sanctionner le comportement des responsables et agents des services publics, soit
de juge civil pour examiner les demandes en réparation des dommages ordinaires
provoqués par l’activité des services publics à travers leurs agents. Par ailleurs, sur
pied de l’article 153, alinéa 4 de la Constitution, les juridictions de l’ordre judiciaire
peuvent refuser d’appliquer, dans le cadre de la procédure d’exception d’illégalité,
des actes réglementaires dans un procès si cet acte réglementaire est estimé illégal.
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B. Le contrôle par les juridictions de l’ordre administratif ordinaires

L’existence d’un contentieux administratif constitue une arme de dissuasion


supposée empêcher les agents évoluant dans les services publics de s’affranchir de
la légalité lato sensu.

Elle représente l’un des maillons de l’Etat de droit. Les juridictions de l’ordre
administratif ordinaire comprennent le Conseil d’Etat, la Cour administrative
d’appel et le tribunal administratif. Ces juridictions sont premièrement le juge de
l’annulation des actes administratifs unilatéraux pour illégalité ou excès de pouvoir
(incompétence en raison de la matière (- usurpation des fonctions, usurpation de
pouvoir et empiètement de fonction -, en raison du temps ou en raison du lieu ; vice
des formes, vices de procédure et de forme) ; violation de la loi – (erreur de droit) –
détournement des pouvoirs ou des procédures).

Les juges administratifs de droit commun sont aussi juges à la fois à titre principal
de l’annulation et de la réparation du préjudice ordinaire dans le cadre du
contentieux de pleine juridiction. En outre, le contentieux de réparation pour
dommage exceptionnel relève exclusivement du Conseil d’Etat.

L’annulation produit des effets à l’égard de tous (erga omnes). L’acte administratif
unilatéral annulé est supprimé de l’arsenal juridique dès l’origine (ab ovo, ab initio,
de origine ou ex tunc).

C. Le contrôle par la Cour Constitutionnelle

La Cour Constitutionnelle est juge de la Constitution. L’exercice de la justice


constitutionnelle implique que le juge constitutionnel concentré ou unique contrôle
la conformité des normes infra-constitutionnelles à la Constitution.

A l’exception des traités et accords internationaux, la saisine directe par toute


personne contre les autres actes (actes législatifs, loi formelle, actes ayant force de
loi et édits, règlement intérieur des chambres parlementaires et du Congrès,
règlement intérieur des institutions d’appui à la démocratie et actes réglementaires
des autorités administratives) ne peut se faire que dans les six mois suivants la
publication ou suivant la date de la mise en application d’un règlement intérieur.
S’agissant des traités et accords internationaux, le recours en inconstitutionnalité
d’une loi d’approbation ou d’autorisation de ratification d’un traité n’est recevable
que s’il est introduit dans les 60 jours qui suivent la publication de cette loi dans le
Journal Officiel. Tout acte déclaré non conforme à la Constitution est nul de plein
droit.

Commentaires
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Les juges ordinaires disent le droit sous l’autorité de la loi. Ces derniers n’ont pas le
droit de soulever l’exception d’inconstitutionnalité. Cette compétence est
seulement attribuée au seul juge constitutionnel.

Le juge constitutionnel a aussi le droit d’annuler les actes administratifs


réglementaires seulement et pas des actes administratifs non réglementaires.

Le contrôle d’inconstitutionnalité des actes administratifs non réglementaires est de


la compétence du seul juge judiciaire ou ordinaire.

En conclusion, le contrôle juridictionnel peut aboutir à l’annulation des actes et


décisions des autorités administratives qui sont jugés inconstitutionnels ou illégaux
ou à leur inapplicabilité, à la condamnation des responsables et agents de services
publics à des sanctions pénales, à la condamnation des services publics et de leurs
agents à la réparation du préjudice causé à la victime ainsi qu’à la condamnation
des comptables publics à la réparation du préjudice causé à la collectivité.

CHAPITRE IV : LA SUPPRESSION D’UN SERVICE PUBLIC

L’Etat, les provinces et les entités territoriales décentralisées ont le droit de


supprimer les services publics qu’ils ont créé. Mais ces personnes publiques ne peuvent pas
supprimer des services publics nécessaires à leur action ou des services publics obligatoires
créés par la Constitution ou imposés par elle.

La suppression des services publics présentent en principe un aspect individuel. Le


principe est que la suppression est individuelle, au cas par cas des services publics.

Section I : L’acte juridique portant suppression du service public

La matière de suppression des services publics est dominée par le principe de


parallélisme des compétences et des formes en vertu de la théorie de l’acte contraire (rebus
sic stantibus). En revanche, si les règles de compétence ont changé dans l’entretemps, le
principe de parallélisme des compétences et des formes ne s’applique plus. Les nouvelles
règles de compétence sont dès lors d’application.
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Section II : Les conséquences juridiques de l’acte portant suppression du service public

§1 Les conséquences à l’égard des actes juridiques

A. Les conséquences à l’égard des actes juridiques unilatéraux

La suppression du service public peut appeler l’abrogation ou la modification d’un texte


de loi ou d’un texte réglementaire ou seulement d’une partie d’un texte qui visait
spécialement le service supprimé. Par exemple, la suppression de l’établissement public
« Fonds National d’Entretien Routier », FONER en abrégé, doit appeler l’abrogation de
plusieurs dispositions de la loi du 7 juillet 2008 portant création d’un fonds national
d’entretien routier.

B. Les conséquences concernant les contrats existants

Au moment de la suppression d’un service public, des contrats conclus par ces services
publics peuvent encore être en cours d’exécution.

Si le contrat porte sur l’exécution du service public lui-même (concession, régie


intéressée), la solution juridiquement convenable est la résiliation de plein droit du
contrat puisque la disparition de l’objet du contrat s’analyse comme un fait de prince.

S’agissant des contrats passés par les prestataires ou les fournisseurs, la suppression du
service public comprise comme une résiliation administrative doit entraîner également
l’indemnisation du co-contracté.

§2 Les conséquences à l’égard des agents du service public

Pour les fonctionnaires œuvrant au sein des entreprises publiques administratives,


ils tiennent de leur situation statutaire une protection contre une perte d’emploi en cas de
suppression du service public.

En effet, l’administration ne peut se séparer des agents statutaires ou des


fonctionnaires que dans les conditions prévues par la loi qui fixe leurs statuts.

Dans ces conditions, ces fonctionnaires devront être affectés dans d’autres
services publics de la personne administrative territoriale concernée.

Quant aux agents publics contractuels, ils sont les plus vulnérables car ils sont les
plus exposés au licenciement lorsqu’il y a suppression du service public. Toutefois, il y a un
cas pour lequel l’agent contractuel ne peut pas être licencié : c’est lorsque l’agent est à l’état
de grossesse.

Pour ce qui est des agents travailleurs de droit commun, c’est-à-dire soumis au
Code du Travail, c’est le droit commun qui s’applique en cas de suppression du service
public.
P a g e | 77

§3 Les conséquences à l’égard des biens du service supprimé

Si le service supprimé était géré en régie direct ou régie indirecte, les biens mis à
la disposition du service public sont la propriété de la collectivité territoriale et la
suppression entraîne comme conséquence la réaffectation de ces biens à d’autres services.

Exemple : La DGI est une régie directe. Les biens qui sont mis à la disposition de la
DGI ont comme propriétaire l’Etat congolais, étant donné que la DGI n’a pas de personnalité
juridique (et donc pas de patrimoine). Si jamais on supprime la DGI, tous les biens mis à sa
disposition seront réaffectés selon la volonté de l’Etat.

Si le service supprimé était un établissement public, il y a deux cas à relever :

1. Les biens qui étaient mis à la disposition de l’établissement public reviennent


automatiquement à la collectivité publique de rattachement ;
2. Les biens qui étaient acquis par l’établissement public dans le cadre de son
autonomie financière sont transférés à la collectivité de rattachement lors de
la suppression de l’établissement public.

Exemple : Les biens de l’ancien Office des biens mal acquis (OBMA) ont été
transférés à l’Etat lors de sa dissolution (décret n°09/13 du 24 avril 2009).
P a g e | 78

IIème PARTIE : LES SERVICES PUBLICS D’ETAT

L’étude descriptive des grands services d’Etat donne l’occasion de présenter


l’organisation de l’administration des services publics rattachés à la personne morale de
l’Etat.

Cette organisation administrative apparaît comme un faisceau de services publics,


les uns centraux (Titre I), basés à Kinshasa, les autres déconcentrés, à l’intérieur du pays ou à
l’extérieur du pays (Titre II).

TITRE I : LES SERVICES CENTRAUX D’ETAT

Il sera question d’analyser successivement les grands services dans la coordination


et l’impulsion de l’action de l’Etat dans le maintien de l’ordre et de la défense nationale ainsi
que les services chargés de la régulation de l’activité économique.

CHAPITRE I : LES SERVICES D’ETAT DANS LA COORDINATION ET L’IMPULSION DE


L’ACTION DE L’ETAT

On examinera ici successivement la Présidence de la République et la Primature


comme les services les plus importants qui assistent les deux plus hautes autorités
administratives centrales de l’Etat, à savoir le Président de la République qui est l’arbitre
national chargé d’assurer le fonctionnement régulier des pouvoirs publics et des institutions
(article 69, alinéa 3 de la Constitution) et le Premier Ministre comme le grand entrepreneur
juridique de l’Etat (article 92, alinéa 1er de la Constitution).

Ensuite, il faudra indiquer l’organisation des départements ministériels et les


grands organismes consultatifs nationaux.

Section I : La Présidence de la République

En droit constitutionnel, le mot présidence au mandat ou à la durée au mandat


d’un président de la République ou encore à l’expression sous le règne de.

Dans l’ordre administratif, l’expression « présidence de la République » renvoie à


l’ensemble des services administratifs qui assistent le Président de la République dans
l’exercice de sa tâche constitutionnelle et légale.

Actuellement, la Présidence de la République est constituée du Cabinet du


Président de la République et de la Maison Civile du Président de la République.
P a g e | 79

§1 Le Cabinet du Président de la République

L’organisation du cabinet du Président de la République est principalement


déterminée par cette autorité. Elle est néanmoins complétée par le Directeur de cabinet qui
agit par voie de décisions.

De manière lapidaire (sommaire), le Cabinet du Président de la République


comprend une direction des conseillers spéciaux, des collèges des conseillers, des services
personnels et des services spécialisés.

La direction du cabinet est composée d’un directeur de cabinet et de deux


directeurs de cabinet adjoints.

Le directeur de cabinet assure la liaison entre le cabinet et toutes les institutions


de la République. C’est l’ordonnateur des dépenses du cabinet.

Le Président de la République est assisté de deux conseillers spéciaux, l’un chargé


de sécurité et l’autre de bonne gouvernance et de lutte contre la corruption, le blanchiment
des capitaux et le financement du terrorisme.

Les deux conseillers spéciaux rendent compte de leur mission directement au Chef
de l’Etat.

Le cabinet est formé de 9 collèges de Conseillers. Chaque collège est chargé des
questions spécifiques, par exemple le collège des conseillers chargé des questions juridiques
et administratives. Chaque collège est dirigé par un conseiller principal.

Parmi les services personnels du Chef de l’Etat, on peut trouver le service du


protocole, le service de communication, la presse présidentielle, les ambassadeurs
itinérants, le secrétaire particulier,…

Parmi les services spécialisés, on peut indiquer le Journal Officiel de la République


Démocratique du Congo chargé de la publication et de la diffusion des textes législatifs et
administratifs pris par les autorités centrales, notamment.

Le Directeur de Cabinet est appelé à donner les détails d’organisation concernant


le collège des conseillers et les services personnels du Chef de l’Etat.

Il peut également déterminer les autorités compétentes pour prononcer les


sanctions ou les peines disciplinaires à l’encontre des membres du cabinet, du Président de
la République. Dans ce dernier cas, il sanctionne le règlement intérieur du cabinet du
Président de la République.
P a g e | 80

§2 L’Etat major particulier du Président de la République

La qualité de Chef Suprême des Forces Armées s’attache tout naturellement à la


fonction du Président de la République du fait que le Chef de l’Etat est à la tête de l’Etat et
donc de l’ensemble de l’administration de l’Etat.

Il est donc le chef suprême de l’administration de l’Etat civil et militaire.

De l’époque de l’EIC jusqu’à 1972, le commandement effectif des forces armées


fut assuré par le commandant en chef.

Ce commandant en chef exerçait ses fonctions sous l’autorité de celui qui détenait
le pouvoir civil le plus élevé au sein de l’Etat, en l’occurrence l’Administrateur Général au
Congo, le Gouverneur Général du Congo par la suite, le Chef de l’Etat après l’indépendance
jusqu’en 1963 et enfin le Président de la République de 1963 à 1972.

La situation spécifique du Général des corps d’armée, MOBUTU SESE SEKO,


militaire de son état et Chef de l’Etat, va conduire à la suppression en 1972 de la fonction de
commandant en chef.

Désormais, le titre honorifique de Chef Suprême des Forces Armées implique


également la qualité de Commandant Suprême des Forces Armées.

En sa qualité de Commandant Suprême des Forces Armées, le Président de la


République dispose d’un Etat major particulier.

Ce service joue en réalité le rôle de conseiller militaire du Président de la


République qui est à la tête de la chaîne de commandement des forces armées.

En effet, en temps de guerre, il revient au Président de la République de mettre en


œuvre les forces armées, c’est-à-dire d’organiser leur déploiement et leur engagement sur
pied de guerre.

En attendant l’organisation effective de cet Etat major particulier, la maison


militaire du Chef de l’Etat, institué par un décret du 2 mars 2003, joue ce rôle.

§3 La Maison Civile du Chef de l’Etat

La Maison Civile fait partie de la Présidence de la République. Elle est placée sous
l’autorité directe du Président de la République et a la charge de la gestion de la liste civile
du Chef de l’Etat.

L’article 89 de la Constitution dispose que le Président de la République a droit aux


émoluments et à la liste civile fixée chaque année par la loi des finances.
P a g e | 81

La liste civile est donc une dotation budgétaire pour le Président de la République
destinée à couvrir ses besoins alors que les émoluments constituent sa rémunération.

L’appellation « liste civile » vient du droit belge car dans ce droit, le roi bénéficie
de la liste civile.

La Maison Civile du Chef de l’Etat est donc instituée pour gérer au profit du
Président de la République sa liste civile.

Ce service s’occupe de l’intendance et de la logistique des résidences et sites


présidentiels ainsi que du service médical présidentiel. Il assure également le secrétariat
privé du Chef de l’Etat.

Un décret du 31 janvier 2003 fixe son organisation. De manière sommaire, la


Maison Civile est dirigée par un chef de la Maison Civile du Chef de l’Etat, appuyé par une
administration. Ce chef est nommé par le Président de la République et coordonne
l’ensemble des activités de la maison civile.

L’administration de la Maison Civile comprend les services ci-après : le service


administratif et juridique, le service de l’intendance et de la logistique, le service financier, le
service des sites et domaines privés du Chef de l’Etat, le secrétariat privé du Chef de l’Etat et
le service médical présidentiel.

Section II : La Primature

En Afrique, le mot « primature » renvoie à la fois à la fonction de Premier Ministre


et au siège des services administratifs relevant du Premier Ministre.

Dans le cadre de cet enseignement, la primature est vue simplement comme


l’ensemble des services administratifs placés sous l’autorité directe du Premier Ministre,
chef du Gouvernement.

Le Premier Ministre est assisté d’un cabinet et d’un secrétariat général du


Gouvernement. Il bénéficie également de l’appui d’une administration dénommée
« secrétariat général à la primature ».

Ce secrétariat général à la primature relève de l’administration publique (fonction


publique) mais ce sont le cabinet du Premier Ministre et le secrétariat général du
gouvernement qui forment essentiellement ce qu’on entend par le terme « primature ».
P a g e | 82

§1 Le Cabinet du Premier Ministre

Le cabinet du Premier Ministre comprend une direction des collèges des


conseillers techniques, un secrétariat privé du Premier Ministre et un service administratif.

La direction du cabinet est composée d’un directeur de cabinet et de deux


directeurs de cabinet adjoints.

Le directeur de cabinet a rang de ministre tandis que le directeur de cabinet


adjoint celui ministre délégué.

Le directeur de cabinet statue par voie de décisions, il est également


l’ordonnateur des dépenses sur les crédits alloués au cabinet du Premier Ministre.

Les collèges des conseillers s’occupent des questions spécifiques et sont dirigés
par des conseillers principaux qui ont rang de vice-ministres.

Le Premier Ministre peut également nommer dans son cabinet des conseillers
techniques qui ont rang de conseillers principaux. Un conseiller technique est assisté de
deux conseillers et de deux chargés d’études au maximum.

Le secrétariat privé du Premier Ministre comprend un secrétaire particulier, un


assistant, un secrétaire, un attaché de presse, trois chargés de mission, un intendant privé et
un agent de protocole.

Le cabinet du Premier Ministre comprend aussi un personnel domestique œuvrant


dans la résidence du Premier Ministre. Ce personnel domestique est placé sous l’autorité de
l’intendant privé du Premier Ministre.

 Le Premier Ministre n’a pas une Maison Civile mais une intendance privée.

§2 Le Secrétariat Général du Gouvernement

Le Gouvernement fonctionne d’une manière collégiale et solidaire.

Le cadre de discussion, de concertation et de décision du Gouvernement est le


Conseil des Ministres.

Le Secrétariat Général du Gouvernement assiste donc le Premier Ministre dans la


coordination de l’activité gouvernementale et dans la tenue des réunions du Conseil des
Ministres.

Le Secrétariat Général du Gouvernement et le directeur de cabinet du Président


de la République assistent aux réunions de conseil des ministres sans voie délibérative.
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Le Secrétariat Général du Gouvernement est composé d’un secrétaire général et


de deux secrétaires généraux adjoints ayant respectivement rang de ministre délégué et de
vice-ministre et d’un secrétariat technique.

Le Secrétariat Général du Gouvernement statue par voie de décisions, il est


l’ordonnateur des dépenses sur les crédits budgétaires alloués à ce service public.

Dans le cadre de la tenue des réunions du Conseil des Ministres. C’est le


Secrétariat Général qui tient l’agenda du Conseil des Ministres et la matrice des décisions du
gouvernement.

A ce titre, il prépare les réunions du Conseil des Ministres et des commissions


gouvernementales, élabore des procès verbaux, des Conseils des Ministres et des
commissions interministérielles, assure la logistique et la correction rédactionnelle des
projets des textes légaux et réglementaires, assiste le porte-parole du Gouvernement dans la
rédaction des comptes-rendus du Conseil des Ministres.

Section III : Les départements ministériels du gouvernement central

Le département ministériel constitue l’élément technique et permanent de


l’Administration centrale de l’Etat.

Ils sont les branches d’activité du Gouvernement. Le département ministériel est


désigné constitutionnellement sous le nom de Ministre (article 93).

Le Président de la République dispose d’une liberté de création des départements


ministériels. Il a donc le pouvoir de créer ou supprimer un ministère ou encore son intitulé
lors de la formation du Gouvernement.

§1 La direction d’un département ministériel

Le Ministre est responsable de son département ministériel, il a autorité sur tous


les agents de carrière de son département. A leur égard, il exerce un pouvoir d’affectation et
un pouvoir hiérarchique emportant le pouvoir disciplinaire, il est l’ordonnateur des dépenses
de son département pour le compte de tous les services relevant du secrétariat général de
son Ministère à l’exception des régies indirectes placées sous son autorité mais bénéficiant
d’une certaine autonomie administrative et financière, il détient un pouvoir réglementaire
sectoriel d’exécution des décrets réglementaires du Premier Ministre, il statue par voie
d’arrêts, il signe les contrats pour le compte de son département ministériel, il est donc
l’autorité contractante des marchés publics conclus pour le compte de son département.

S’agissant particulièrement des marchés des travaux réalisés pour le compte de


son département le Ministre et le maître d’ouvrage.
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§2 Les attributions communes des ministères ou des départements ministériels

En dehors des attributions spécifiques, tout département ministériel exerce un


certain nombre d’attributions identiques ou communes :

- Conception, élaboration et mise en œuvre de la politique du Gouvernement dans le


secteur qui lui est confié
- Préparation des projets des traités et accords internationaux, des lois,
d’ordonnances-lois, décrets et arrêts d’exécution
- Contrôle hiérarchique des services publics non personnalisés et contrôle de tutelle
des établissements de son secteur d’activités
- Gestion des relations avec les organisations internationales s’occupant des matières
de son secteur d’activités
- Représentation de l’Etat dans les rencontres nationales et internationales en rapport
avec les matières de son secteur d’activités
- Gestion des agents de carrière des services publics de l’Etat en collaboration avec le
Ministère de la Fonction Publique
- Mise en œuvre de la politique du Gouvernement pour la bonne gouvernance et la
lutte contre la corruption et les antivaleurs
- Mobilisation des recettes assignées aux services relevant du Ministère
- Engagement des dépenses prévues au budget de l’Etat suivant les crédits alloués aux
ministères
- Avis préalable à l’agrément des ONG de son secteur d’activités.

§3 L’organisation d’un département ministériel

Le ministère est épaulé par un cabinet et une administration du Ministère.

Chaque ministère dispose au moins d’un Secrétariat Général et parfois des


services spécialisés ou des régies indirectes.

A. Les cabinets ministériels

Chaque département ministériel a un seul cabinet quelle que soit la composition


du ministère.

Le cabinet remplit une fonction essentielle de coordination en assurant la liaison


avec les autres ministères et en harmonisant l’action des services.

Un cabinet ministériel comprend un directeur de cabinet, un directeur de cabinet


adjoint, sept conseillers dont obligatoirement au moins un conseiller juridique et un
conseiller financier, quatre chargés d’études, des chargés de mission en fonction de la
P a g e | 85

composition du ministère, de secrétaires particuliers dans les mêmes conditions et un


service d’appoint placé sous la responsabilité d’un secrétaire administratif.

Toutefois, sur dérogation accordée par le Premier Ministre, un cabinet peut être
constitué d’un nombre supplémentaire de conseillers et de chargés d’études.

Lorsqu’un fonctionnaire est nommé comme membre d’un cabinet politique, il doit
être placé en position de détachement.

B. Les Secrétariats Généraux des Ministères

I. L’organisation d’un Secrétariat Général

Le Secrétariat Général est subdivisé en directions centrales. Ces directions sont


subdivisées à leur tour en divisions.

Le Secrétariat Général dispose de deux types de divisions :

- Les divisions de l’administration centrale du ministère


- Les divisions provinciales constituant le relai des départements ministériels
dans les chefs-lieux des provinces.

Chaque division est subdivisée en bureaux. Un bureau peut comprendre des cellules
de travail regroupant des agents de collaboration et d’exécution.

Le Secrétariat Général est dirigé par un Secrétaire Général nommé par le Président
de la République.

Le Secrétaire Général est le fonctionnaire le plus élevé en grade au sein du


ministère. A ce titre, il assure la liaison entre le ministre et les services du ministère
en dehors des services spécialisés dirigés généralement par les directeurs généraux.

Une division est dirigée par un directeur nommé par un chef de division nommé par
le Président de la République. Celui-ci est responsable de la division vis-à-vis du
directeur.

Un bureau est dirigé par un chef de bureau nommé par le Président de la


République. Il coordonne donc une cellule administrative de base qui couvre une
activité spécifique.

C. Les services spécialisés des départements ministériels

En marge du Secrétariat Général, un département ministériel peut disposer d’un


ou plusieurs services spécialisés qu’on appelle techniquement « régies indirectes » (ex. :
la commission permanente de réforme du droit congolais, la commission nationale
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OHADA, la commission de gestion des biens saisis et confisqués, le service de


documentation et d’études constituent de services spécialisés du Ministère de la
Justice ; la DGI, DGDA et DGRAD sont les services spécialisés du Ministère des Finances.

La commission permanente des études et la Presse Universitaire du Congo doivent


être vues comme des services spécialisés du Ministère de l’Enseignement Supérieur et
Universitaire.

Les Archives Nationales, la Bibliothèque Nationale et les musées nationaux


constituent des services spécialisés du Ministère de la Culture et des Arts.

La Police Nationale Congolaise, la Direction Générale de Migration et l’Agence


Nationale de Renseignement constituent des services spécialisés du Ministère de
l’Intérieur.

Section IV : Les organismes consultatifs nationaux

L’administration contemporaine ou l’administration actuelle est caractérisée par


une multiplication de consultations pour tenir compte de la dimension bonne gouvernance
ou mieux bonne administration.

§1 Les traits généraux sur les organismes consultatifs

Les organismes publics consultatifs présentent un trait commun d’être des simples
donneurs d’avis sans aucun pouvoir de décision.

Plusieurs organes consultatifs existent tant au niveau du pouvoir central que des
subdivisions personnalisées.

Les organes consultatifs ont un rôle consistant à donner les avis obligatoires ou
facultatifs selon les cas.

Un organe public consultatif peut être doté de la personnalité juridique ou pas.

Certains services jouent le double rôle d’administration active et d’administration


consultative, c’est-à-dire ces services ne sont pas totalement consultatifs. Par exemple, la
cellule nationale de renseignement financier ou mieux le conseil supérieur de la
magistrature qui est un organe de gestion du pouvoir judiciaire mais aussi un organisme
public consultatif pour donner des avis en matière de recours en grâce (présidentielle).

D’autres structures administratives sont totalement des organismes consultatifs.


Par exemple, le Conseil national du travail, le Conseil supérieur de la police, le Conseil
économique et social, le Conseil consultatif de l’agriculture, le Conseil national de
l’environnement et du développement durable.
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§2 Le Conseil Economique et Social

Le Conseil économique et social est un organisme public administratif chargé


d’émettre des avis. Autrement dit, le Conseil économique et social est une assemblée
consultative destinée à assurer au sein des institutions de la République une représentation
spécifique des activités économiques et sociales.

Le C.E.S. est unique à la différence de la période sous la loi fondamentale du 19


mai 1960 et de la Constitution du 1er août 1964.

L’actuel C.E.S. a pour mission de donner des avis consultatifs, sur des questions lui
soumises par le Président de la République, l’Assemblée Nationale, le Sénat ou le
Gouvernement.

De sa propre initiative, le C.E.S. peut appeler l’attention du Gouvernement et des


provinces sur les réformes qui lui paraissent de nature à favoriser le développement
économique et social du pays.

Le Conseil peut aussi être saisi par voie de pétition de toute question à caractère
économique et social. Cette pétition doit être initiée au moins par 10.000 personnes
majeures.

Dans ce cas, le Conseil doit donner son avis dans un délai maximum de 6 mois.

Le Conseil dispose des organes ci-après : l’Assemblée Générale comprenant 68


membres, les bureaux et les commissions. Le Conseil dispose également d’une
administration dirigée par un secrétaire général.

§3 Les sections consultatives des juridictions administratives de droit commun

La proposition des lois organiques sur les juridictions de l’ordre administratif


préconise la création d’une section consultative au niveau du Conseil d’Etat, des cours
administratives d’appel et des tribunaux administratifs dans le but de donner des avis
motivés aux pouvoirs publics sur les textes de tout projet ou proposition d’actes législatifs,
d’actes réglementaires ou décisions réglementaires.

En attendant l’installation des juridictions administratives de droit commun, la


Constitution a prévu l’exercice des attributions dévolues au Conseil d’Etat et à la Cour
administrative d’appel par la Cour Suprême de Justice et la Cour d’Appel.

Seule la C.S.J. disposant d’une section de législation est appelé transitoirement à


donner des avis consultatifs sur les projets ou propositions de lois ou d’actes réglementaires
et sur les difficultés d’interprétation des textes. Aliis verbis, la section de législation de la
P a g e | 88

C.S.J. devra continuer à être le conseiller des pouvoirs publics pour l’ensemble de la
République jusqu’à l’installation des juridictions administratives à compétence générale.

CHAPITRE II : LES SERVICES D’ETAT DANS LE MAINTIEN DE L’ORDRE ET LA DEFENSE


NATIONALE

En droit positif congolais, la défense nationale désigne l’ensemble des moyens


militaires et non militaires ayant pour objet d’assurer la protection et la sauvegarde des
intérêts fondamentaux de la nation en toute circonstance et contre toute forme d’agression
et menace.

La défense nationale comprend donc la défense militaire et la défense civile.

Le maintien de l’ordre touche à la protection des personnes et de leurs biens.


L’ordre public est un état de fait opposé aux désordres, l’état de paix opposé aux troubles.

Section I : La Police Nationale

§1 La mission et l’organisation de la police

A. Les missions de la Police Nationale

La Police Nationale est un service public civil dépourvu de la personnalité


juridique. Elle est unique sur l’ensemble du territoire national. Elle est chargée de la
sécurité et de la tranquillité publique, de la sécurité des personnes et de leurs biens, du
maintien et du rétablissement de l’ordre public ainsi que de la protection rapprochée
des hautes autorités civiles à l’exception du Président de la République, Commandant
Suprême des Forces Armées, protégé par les éléments de l’armée.

La Police Nationale s’occupe tant de la police administrative que de la police


judiciaire.

Le personnel de la Police Nationale comprend d’un côté le corps des policiers de


carrière et de l’autre le personnel administratif.

Les missions de la Police Nationale ont un caractère à la fois préventif et curatif.

I. Les missions ordinaires de la police

Les missions ordinaires de la police congolaise s’exercent dans le cadre du service


normal de la police dans le but de prévenir les troubles à l’ordre public et de
P a g e | 89

recouvrir les infractions, les constater, rechercher leurs auteurs et les déferrer
devant l’autorité judiciaire compétente.

Ces missions ordinaires s’exercent quotidiennement sans qu’il y ait besoin d’une
réquisition de la part de l’autorité administrative de police ou de l’autorité judiciaire
compétente (Ministère Public).

II. Les missions extraordinaires de la Police Nationale

Les missions extraordinaires de la Police Nationale sont celles dont l’exécution n’a
lieu qu’en vertu de la réquisition écrite émanant de l’autorité administrative ou de
l’autorité judiciaire.

Pour ceux qui aident la police administrative, l’action des autorités responsables du
maintien et du rétablissement de l’ordre public s’exercent à l’égard de la Police
Nationale par voie de réquisition. Sauf urgence ou cas de force majeure, la
réquisition doit être écrite.

La réquisition verbale faite en cas d’urgence ou de force majeure doit être


confirmée par écrit dans les 24h.

L’urgence désigne une situation de nécessité d’agir vite. La force majeure est un
évènement imprévisible, irrésistible ou insurmontable.

Dans tous les cas, la Police Nationale vérifie systématiquement la légalité des
opérations qu’elle se propose ou qu’elle compte mener.

Elle ne recourt à la force qu’en cas de nécessité absolue et uniquement pour


atteindre un objectif légitime.

L’usage de la force doit respecter le principe de proportionnalité et de progressivité.

Les agents de la Police Nationale ne peuvent faire usage d’arme blanche qu’en cas
d’absolue nécessité.

Ils ne peuvent faire usage d’arme à feu que sur réquisition préalable de l’autorité
responsable du maintien de l’ordre.

L’usage des armes blanches ou des armes à feu n’est possible que lorsque la police
ne peut défendre autrement les lieux qu’elle occupe ou lorsque les violences ou les
voies de fait sont exercées contre elle ou contre autrui.
P a g e | 90

III. L’Inspection Générale de la Police

L’inspection générale est la structure de contrôle, d’audit, d’enquête et d’évaluation


des services de la Police Nationale.

Elle est dirigée par un Inspecteur Général assisté de deux adjoints. L’Inspecteur
Général dispose d’un cabinet.

IV. Les commissariats provinciaux

Un commissariat provincial est la structure de commandement des unités de la


police nationale au niveau de chaque province et de la ville de Kinshasa.

Un commissariat provincial comprend des unités territoriales et locales de la police


nationale et des unités d’intervention appelées à intervenir en cas de dépassement
des unités territoriales et locales dans leur mission de maintien et de rétablissement
de l’ordre public.

Section II : Les Forces Armées

Les Forces Armées relèvent du Gouvernement de la République. Elles sont un


service public national dépourvu de la personnalité juridique mais bénéficiant d’une certaine
autonomie administrative et financière.

A l’époque de l’E.I.C., les forces combattantes faisaient partie de la force publique.


Il en est de même à l’époque du Congo belge.

Après l’indépendance, les Forces Armées ont été organisées sous l’appellation de
l’Armée Nationale Congolaise (ANC).

Après la débaptisation du pays en 1961, les forces combattantes ont été


organisées sous l’appellation des « Forces Armées Zaïroises (FAZ).

Parallèlement au FAZ, le pays avait également organisé la garde civile du Zaïre qui
était en réalité une force paramilitaire.

A l’entrée de l’AFDL en 1997, les forces combattantes ont été constituées sous
l’appellation des Forces Armées de la République Démocratique du Congo (FARDC).
P a g e | 91

§1 Les missions des Forces Armées

Les Forces Armées ont pour mission première de défendre l’intégrité du territoire
national et les frontières internationalement reconnues. Elles sont une armée nationale
républicaine, apolitique et soumise à l’autorité civile.

Les Forces Armées sont aussi une armée de métier, c’est-à-dire dont les membres
font carrière.

En deuxième lieu, les Forces Armées peuvent participer exceptionnellement aux


opérations de rétablissement de l’ordre public lorsque les forces de l’ordre sont dépassés.

En troisième lieu, les Forces Armées peuvent participer, en temps de paix, au


développement économique, social et culturel.

En quatrième lieu, les Forces Armées peuvent participer aux opérations de secours
en cas de catastrophes et calamités naturelles.

En cinquième lieu, les Forces Armées peuvent effectuer des missions humanitaires
de maintien de paix ou de résolution des conflits dans le cadre des Nations-Unies, de
l’Organisation de l’Union Africaine ou des accords bilatéraux ou multilatéraux liant la R.D.C.

§2 Les institutions et structures de la défense

A. Les institutions et structures politiques

Les institutions et structures politiques ci-après interviennent dans la politique de défense


de l’Etat : Le Président de la République, le Parlement, le Gouvernement et le Conseil
Supérieur de la Défense.

Le Conseil Supérieur de la Défense est une structure de conseil intervenant dans la


définition de la politique de défense par la formulation des avis sur des questions
touchant les Forces Armées. Ex. : Avis avant déclaration de guerre, signature des
ordonnances fixant l’organisation et le fonctionnement du haut commandement militaire
des forces de la zone de défense des corps et services des forces armées, etc.

Outre le Président de la République et le Premier Ministre, le Conseil Supérieur de la


Défense est composé du Ministre de la Défense, du Ministre de l’Intérieur, du Ministre
des Affaires Etrangères, du Chef d’Etat Major Général des Forces Armées, de trois Chefs
d’Etat Major des Forces (terrestre, naval et aérienne) et du Commissaire Général de la
Police Nationale.

Il dispose d’un secrétariat permanent.


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B. Les structures militaires des Forces Armées

I. Le Haut Commandement Militaire

Il est composé exclusivement des officiers généraux responsables des différentes


forces et grands corps de l’armée.

Il est présidé par le Chef d’Etat-major général des Forces Armées.

Il est notamment chargé d’évaluer les capacités opérationnelles des unités de


l’armée, les menaces et les risques ainsi que les contraintes budgétaires et
administratives et fait des propositions concrètes pour le développement de l’armée.

II. L’Etat Major Général

Il est composé d’un Chef d’Etat Major Général, de deux Chefs d’Etat Major Généraux
adjoints et de quatre sous-chefs d’Etat Major (chargés respectivement des
opérations, du renseignement, de l’administration et de la logistique).

III. Les Forces et les grandes unités des Forces Armées

Les forces sont des structures des Forces Armées constituées de moyens en
personnel, en matériel et en infrastructures regroupées en formation de combat et
d’appui au combat.

Selon le milieu où la force opère, la force est terrestre, aérienne ou navale.

Les grandes unités des Forces Armées contiennent trois zones de défense. Une zone
de défense est une entité territoriale inter force dans laquelle des unités terrestres,
aériennes et navales opèrent sous un commandement unique.

Une zone de défense relève en définitive de l’autorité du Chef d’Etat Major Général.

Un corps est une structure des Forces Armées constituées des moyens en personnel
militaire, en matériel et en infrastructures regroupées en formation de soutien
logistique, médical et technique aux unités au combat et d’appui au combat.

 Le corps est différent de la force. Le corps est là pour appuyer, il forme un


soutien logistique, médical et technique alors que la force est composée de ceux
qui vont au combat.

 La base militaire est un domaine militaire inter force regroupant les


infrastructures destinées à abriter un grand nombre d’unités et de matériel aux
fins d’instruction, d’entraînement, de reconditionnement et de pré
positionnement.
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IV. Les circonscriptions militaires

La région militaire, le groupement aérien et le groupement naval constituent des


circonscriptions militaires.

La région militaire est une circonscription militaire comprenant les unités de la force
terrestre. Les régions militaires correspondent à peu près à la configuration
géographique de la ville de Kinshasa et des dix provinces énumérées à l’article 226 de
la Constitution sauf que les provinces du Maniema et du Sud-Kivu ainsi que les
provinces du Kasaï Occidental et du Kasaï Oriental forment une seule région militaire
respectivement.

Le groupement aérien est une circonscription militaire comprenant des unités de la


force aérienne telles que les bases aériennes, les escales aériennes et des unités de
défense aériennes.

Le groupement naval est une circonscription militaire comprenant des unités de la


force navale telles que les bases navales et les unités spéciales.

Commentaires

Le mot « circonscription » renvoie au ressort géographique d’une autorité


administrative.

Les circonscriptions n’ont pas de personnalité juridique.

La région militaire se situe sur une portion du territoire. Cette portion du territoire
correspond à peu près à la dimension ou configuration des provinces actuelles.

V. La Garde Républicaine

La Garde Républicaine est une structure des Forces Armées de la République


Démocratique du Congo. Cette grande unité des Forces Armées a pour mission
d’assurer la garde, la protection du Président de la République et des hauts de
marques de la République, la sécurité des installations résidentielles ainsi que les
escortes et les honneurs à l’échelon du Président de la République.

Elle est commandée par un Officier Général mais celui-ci ne fait pas partie du Haut
Commandement militaire.
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CHAPITRE III : LES SERVICES D’ETAT DANS LA REGULATION DES ACTIVITES


ECONOMIQUES

Section I : La régulation des activités économiques

En provenance du droit administratif américain, le terme « régulation » est venu


en Europe à travers le Royaume-Uni.

La régulation est très proche de la police administrative mais à la différence que la


régulation s’attache plus au fonctionnement optimal d’un marché ou d’un secteur
économique.

La régulation comporte un panel de prérogatives allant de la réglementation a


priori aux décisions particulières, sanctions ou règlement des conflits a posteriori.

Le droit congolais organise la régulation dans plusieurs domaines économiques : la


poste et les télécommunications, l’aviation civile, l’électricité, les marchés publics, la
communication audio-visuelle, la presse écrite, etc.

Dans le domaine des télécommunications, par exemple, le législateur précise que


le but de la régulation est de faciliter, stimuler et impulser le marché des
télécommunications pour rencontrer la demande de la clientèle et permettre aux
utilisateurs de communiquer ou faire des affaires à partir de n’importe quel moment et au
prix le plus bas possible.

Dans le secteur de l’électricité, le législateur désigne la régulation comme le


mécanisme de contrôle a priori et a posteriori de promotions de la concurrence, de la
défense des intérêts des usagers, d’arbitrage de la qualification et de règlements des
litiges entre les opérateurs ainsi qu’entre les opérateurs et les consommateurs.

La régulation présente deux caractéristiques principales :

- Premièrement, la présence d’un régulateur, c’est-à-dire d’un organisme public en


charge de la régulation d’un secteur économique
- Deuxièmement, un panel de prérogatives comportant plusieurs pouvoirs : le
commandement ou l’imposition, la réglementation, la concertation, la persuasion, la
pédagogie, l’exemplarité, l’avertissement, l’arbitrage ou le règlement des conflits.
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Section II : Les autorités de régulation

Les autorités de régulation sont des services publics administratifs dotés de la


personnalité juridique ou non.

Le droit de la régulation est formellement un droit délégué par l’Etat à un


régulateur ou à un organisme chargé de la régulation.

Toute autorité de régulation dotée de la personnalité juridique ou non doit


disposer vis-à-vis de l’Etat d’une complète autonomie fonctionnelle. C’est précisément cette
autonomie, ajoutée à l’expertise technique particulière du régulateur qui donne crédit à son
action.

En droit congolais, ces autorités de régulation sont généralement dotées de la


personnalité juridique. Par exemple, l’autorité de régulation des marchés publics (ARMP) et
l’autorité de l’aviation civile de la R.D.C. (AAC/R.D.C.) sont des établissements publics tandis
que l’autorité de régulation de la poste et des télécommunications (ARPTC) et le conseil
supérieur de l’audiovisuel et de la communication (CSAC) sont des autorités administratives
indépendantes (AAI).

§1 L’autorité de régulation de la poste et des télécommunications

L’importance du secteur des télécommunications dans l’économie congolaise et la


nécessité de garantir les équilibres concurrentiels au sein de ce marché ont amené le
législateur à instituer une autorité de régulation.

L’objectif du législateur est de garantir à chacun une offre de services de base de


qualité à un prix abordable.

L’autorité de régulation de la poste et des télécommunications est un organe


indépendant chargé de réguler le secteur de poste et de télécommunications. Elle est
constituée d’un collège composé de sept membres, à savoir un Président, un Vice-président
et cinq conseillers ainsi que d’une administration. Le collège est investi de tous les pouvoirs
de décision, de gestion et de dispositions nécessaires à la réalisation de la mission de
l’organisme.

Les décisions du collège comme acte administratif sont susceptibles de recours en


annulation pour excès de pouvoir devant le Conseil de l’Etat et transitoirement devant la
Cour Suprême de Justice.

Placée sous l’autorité du Président du collège, l’administration de l’A.R.P.T.C. est


composée de directions, le personnel de l’ARPTC est recruté et soumis au Code du Travail. Le
personnel de carrière des services publics de l’Etat, en détachement auprès de l’A.R.P.T.C.
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sont également soumis à cette législation du travail pendant toute la durée durant leur
détachement.

Commentaires

Pourquoi dit-on que c’est une autorité administrative indépendante ?

- Autorité : détient un pouvoir réel de décision


- Administrative : les actes juridiques que cette autorité édicte sont des actes
administratifs (article 91)
- Indépendante : cet organe est indépendant vis-à-vis du gouvernement.

L’ARPTC dispose des pouvoirs ci-après :

1. Le pouvoir de prendre des décisions exécutoires qui peuvent être des règlements ou
des actes non réglementaires. Par exemple, l’ARPTC a pris des décisions portant fixation
des tarifs d’interconnexion, portant conditions et modalités de promotion des services
de télécommunication ou portant mesures d’encadrement des tarifs de détails des
services « voix et SMS » par les opérateurs des réseaux de téléphonie.
En ce qui concerne les actes non réglementaires, par exemple l’autorisation
d’exploitation du service « Internet », attribution des fréquences, faisceaux hertziens ou
attribution des numéros spéciaux d’appels téléphoniques.
2. Le pouvoir de contrôle du secteur : dans ce cadre, l’ARPTC peut procéder aux visites des
installations et mener des enquêtes. Elle dispose du droit de communication de tout
document et on ne peut lui opposer la clause de confidentialité contenue dans les
contrats.
3. Le pouvoir de règlement des conflits entre opérateurs : saisie d’une demande d’avis sur
un litige né entre opérateurs, l’ARPTC peut initier rapidement et librement la tentative
de conciliation des opérateurs concernés. Si les parties ou les opérateurs concernés
acceptent la conciliation, un PV de conciliation est signé par les parties et les membres
du collège. En cas d’échec de conciliation dans le délai d’un mois de l’introduction de la
demande d’avis, l’ARPTC rend publique une décision motivée qui préserve la continuité
du service et prend, s’il échait, des mesures conservatoires.
4. Le pouvoir de sanction en cas de manquement d’un opérateur : après une mise en
demeure restée infructueuse, l’ARPTC peut prendre des sanctions. Par exemple, la
suspension ou le retrait de l’autorisation d’exploitation des services de
télécommunication.

Ces sanctions sont administratives, c’est-à-dire ce sont des décisions


administratives ou actes administratifs susceptibles de recours en annulation pour excès de
pouvoir par une autorité supérieure. Elle s’applique en fonction de la présomption de la
légalité.
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§2 L’autorité de régulation des marchés publics

L’ARMP est un établissement public. Pourquoi ? Parce qu’il s’agit d’un service
public doté de la personnalité juridique et placé sous l’autorité d’un Ministre.

Comme tout établissement, l’ARMP dispose d’un Conseil d’administration, d’une


Direction Générale et d’un Collège de Commissaires aux Comptes.

L’ARMP a un certain nombre de pouvoirs pour réguler le secteur des marchés


publics. Lorsqu’on parle de marché public, on parle de contrat administratif ou encore de
contrat de délégation des services publics.

Ces pouvoirs sont :

- Le pouvoir d’émettre des avis conformes dans le cadre de la définition des politiques
de l’élaboration ou de la mise à jour de la législation en matière de marché public et
de délégation de services publics.
Le contrat-type des délégations des services publics, c’est le contrat de concession
des services publics.
- Le pouvoir de règlement des litiges : l’ARMP examine les réclamations introduites par
les candidats au marché sur les décisions prises par rapport à la procédure de
passation des marchés publics.
- Le pouvoir de sanctions par des audits indépendants : l’ARMP peut se convaincre et
arriver à infliger des sanctions. Par exemple, l’exclusion temporaire de la commande
publique pour une durée qui ne peut dépasser cinq ans ; le retrait de l’agrément
et/ou du certificat de qualification.
- Le pouvoir d’information et de renforcement des capacités des acteurs de la
commande publique.
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TITRE II : LES SERVICES DECONCENTRES D’ETAT

La déconcentration concerne non seulement l’organisation territoriale mais aussi


l’organisation des services.

L’existence des services déconcentrés de l’Etat à l’intérieur du pays présente des


avantages évidents :

- Allègement des procédures


- Raccourcissement des circuits et des délais
- Meilleure prise en compte des circonstances locales
- Renforcement de l’esprit d’initiative et du sens des responsabilités

D’autres services déconcentrés de l’Etat sont basés à l’extérieur du pays en vue de


permettre l’établissement et la permanence des relations diplomatiques et consulaires.

CHAPITRE I : LES SERVICES DECONCENTRES D’ETAT A L’INTERIEUR DU PAYS

Section I : Les services déconcentrés des ministères du gouvernement central

Ces services sont de deux types, à savoir : les services déconcentrés des
secrétariats généraux des ministères et les services déconcentrés des régies indirectes
créées au sein des ministères.

§1 Les services déconcentrés des secrétariats généraux des ministères

Par services déconcentrés des secrétariats généraux des ministères, on fait


allusion aux divisions provinciales des différents ministères du gouvernement de la
République situés dans les chefs-lieux des provinces.

Ces divisions provinciales sont subdivisés en bureaux, situés les uns au niveau des
chefs-lieux des provinces, les autres au niveau des territoires. Les divisions provinciales sont
dirigées par des chefs de divisions. La coordination primaire de ces chefs de divisions des
différents ministères du gouvernement central dans chaque province est assurée par le
directeur de province, fonctionnaire relevant du Ministère de l’Intérieur.

§2 Les services déconcentrés des régies indirectes créées au sein des ministères

Les régies indirectes sont des services spécialisés des ministères bénéficiant d’une
certaine autonomie administrative et financière, sans pour autant bénéficier de la
personnalité juridique. C’est le cas, par exemple, de la Direction Générale des Migrations, de
la Direction Générale des Impôts, de la Direction Générale des Douanes et Accises, etc.
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Ces directions générales sont plutôt subdivisées en directions centrales et


directions provinciales, lesquelles comprennent en leur sein, des divisions et des bureaux.
Comme on le voit, les structures de ces régies indirectes créent une sorte de dichotomie
(division) dans l’organisation traditionnelle des services des ministères en province.

Lorsque les divisions provinciales sont placées sous la coordination primaire d’un
directeur de province, les directions provinciales desdites régies indirectes dépendent
directement du gouverneur de province et de leurs directeurs généraux respectifs.

Les directions provinciales de la Direction Générale des Migrations sont encore


divisées en subdivisées en sous-directions et puis en divisions.

Section II : La coordination et la supervision des services déconcentrés d’Etat à l’intérieur


du pays

Le gouverneur de province représente le gouvernement de la République dans sa


province. Dans ce cadre, il ordonne et supervise les services déconcentrés des différentes
administrations du pouvoir central.

Dans ce cadre, le gouverneur de province répond de ses actes devant le


gouvernement central. Les actes du gouverneur de province, autorité, peuvent être annulés
par les autorités centrales.

En cas de faute grave commise par le gouverneur de province comme autorité


déconcentré d’Etat. Le pouvoir central peut saisir l’assemblée provinciale pour obtenir le
vote d’une motion de défiance à son encontre, le déférer devant la Cour de Cassation en cas
de commission d’une infraction pénale ou déférer ses actes administratifs devant la Cour
administrative d’appel (article 67 de la loi sur la libre administration des provinces).

L’administrateur du territoire nommé par le Président de la République et affecté


par le Ministre de l’Intérieur, sur proposition du gouverneur de province, est aussi le
représentant de l’Etat et de la province dans sa juridiction. A ce titre, il veille au bon
fonctionnement des services publics. Il dispose des services spécialisés de renseignement
ainsi que des unités territoriales et locales de la police nationale. Il peut requérir les unités
des forces armées après autorisation du gouverneur de province. Il dispose des services et
des agents de carrière de l’Etat et de la province. Il exerce sur ses agents le pouvoir
disciplinaire. Il détient un pouvoir d’inspection sur les services publics de l’Etat de la
province.
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CHAPITRE II : LES SERVICES DECONCENTRES D’ETAT A L’EXTERIEUR DU PAYS

L’administration extérieure d’Etat comprend l’ensemble des services déconcentrés


de l’Etat située en dehors du territoire national. Les ambassades et les représentations
permanentes auprès des organisations internationales forment les missions diplomatiques
tandis que les postes consulaires s’entendent de tous les consulats généraux, consulats, vice-
consulats ou agences consulaires.

Section I : Les missions diplomatiques

La faculté pour chaque Etat d’être en permanence représenter auprès de ses pairs
est un trait fondamental de la société interétatique. Les relations diplomatiques sont à la fois
une manifestation de la coexistence interétatique et la condition même de cette
coexistence.

La mission diplomatique est un service public de l’Etat accréditant installé en


permanence sur le territoire de l’Etat accréditaire. Une mission diplomatique est composée
d’un personnel diplomatique, d’un personnel administratif et technique et d’un personnel
de service.

Plusieurs missions diplomatiques peuvent être fusionnées. Par exemple, à Paris,


l’ambassadeur de la R.D.C. représente le pays auprès de la France et de l’UNESCO ; à
Bruxelles, notre ambassadeur représente le pays auprès du Royaume de Belgique, du
Benelux et auprès de l’Union Européenne.

Section II : Les postes consulaires

Les postes consulaires sont des services publics relevant de leur Etat (Etat d’envoi)
mais installés dans un Etat étranger (Etat de résidence). Les postes consulaires ne sont pas
chargés d’un rôle politique ou d’un rôle de représentation politique. Leurs fonctions
revêtent un caractère purement administratif. La rupture des relations diplomatiques entre
Etats n’entrainent pas nécessairement la rupture des relations consulaires.

Un consulat comprend des fonctionnaires consulaires, des employés consulaires et


le personnel de service.

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