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INTRODUCTION

I. NECESSITE D’UN REGIME MATRIMONIAL

La nécessité de régler les relations pécuniaires des conjoints découle en


premier lieu, de ce que le mariage entraine une certaine confusion des biens
des époux. Le ménage est à la tête d’une masse de biens apportés par
chacun des époux au jour du mariage ou acquis par eux au jour le jour.
Pendant leur union, le mélange des biens des conjoints, surtout en ce qui
concerne les meubles est presque inéluctable. Or le jour de la dissolution du
régime, il faudra procéder au partage des biens conjugaux et, à cette
occasion, dire à quel époux appartient tel ou tel bien.

La nécessité de régler les relations pécuniaires des conjoints procède en


second lieux de la volonté du législateur de procéder l’affectation des biens
de l’association conjugale, ainsi que le régime de leur gestion. Aussi bien
l’objet du régime matrimonial est-il de régler la question de la répartition
des biens conjugaux ou acquis par eux pendant le mariage.

Il convient en effet de déterminer la situation de ces biens pendant le


mariage. Plus précisément, il faut définir si ces biens devront être affectés
aux besoins du ménage et des enfants ou laissés à la libre disposition des
époux. C’est ainsi qu’il faut déterminer si ces biens seront mis en commun
et tomberont dans une masse de biens qu’on appelle « la communauté  » ou
s’ils demeurent propres à chacun des conjoints. Mais il faudra ainsi fixer le
sort des biens conjugaux à la fin du régime. Il faut définir comment ils
seront partagés.

Mais le régime matrimonial réglemente aussi les droits et les pouvoirs


respectifs des époux, droits sur leurs propres biens, pouvoirs sur les biens
de l’autre conjoint ou sur les biens communs dont ils ont l’administration. Il
s’agit en effet de définir comment et par qui seront administrés les biens du
ménage. Sera-ce le mari ? Sera-ce par la femme ou par les deux
conjointement ?

II. DEFINITION DU REGIME MATRIMONIAL

La vie commune ne fait pas seulement surgir le problème de la subsistance


commune et de la répartition des charges ; apparaitront aussi les problèmes
relatifs à l’administration et à la gestion des biens d’usage commun que les
2

époux vont ensemble et qui de ce fait devront être soumis à un statut


particulier.

La vie commune donne naissance dans la grande majorité des cas à


certaines économies communes, provenant du concours que l’un des époux
apportera à l’autre, sous la forme d’une aide dans son activité
professionnelle ou sous la forme de son activité domestique.

L’équité aussi bien qu’un sentiment naturel d’égalité et de solidarité entre


conjoints rend souhaitable sinon nécessaire qu’existe un règlement adéquat
de la gestion de ces économies et de leur répartition entre conjoints ou
leurs ayant-cause à la dissolution du mariage ou du régime.

Les divers problèmes que nous d’évoquer doivent trouver une solution
juridique. Pour certains d’entre eux, et notamment ceux qui concernent la
contribution aux charges du ménage, m’affectation des biens des époux aux
besoins communs, le sort des économies faites ensemble, on ne voit pas
comment il serait possible de les régler adéquatement sans tenir compte de
la communauté d’existence que le mariage établit entre les époux, de ce fait
le recours à la technique des régimes matrimoniaux (droit patrimonial de
l’association conjugale) s’impose. Pour d’autre, spécialement, le sort du
conjoint survivant, on peut songer à la technique du droit successoral.

En ce qui concerne le droit patrimonial de l’association conjugale qui nous


intéresse pour le moment, l’on entend par régime matrimonial l’ensemble
des règles relatives aux rapports pécuniaires des époux entre eux et avec
les tiers (1). C’est donc l’aspect économique de l’état du mariage. Le régime
matrimonial détermine le sort des biens des époux et les règles de leur
gestion en fixant les pouvoirs des époux à cette fin. Il organise ainsi la
satisfaction des besoins du ménage et éventuellement des époux dans les
gains.

L’analyse montre que parmi les problèmes que nous venons de relever
certains peuvent et doivent recevoir une solution identique pour tous les
ménages. C’est le cas de la contribution aux charges du ménage. Par contre,
d’autres problèmes peuvent recevoir des solutions différentes selon les
convenances particulières des époux.

1
G. Marty et P. Raynaud, les régimes matrimoniaux, Paris, Sirey, 1986, p.7, n°1 ; voir aussi R. Dekkers,
Précis du droit civil belge, III, 1953, Bruxelles, Bryulant, 1955, p.è,n°
3

On est ainsi amené à distinguer dans la catégorie des régimes


matrimoniaux, le régime primaire, d’une part, et les régimes secondaires
d’autre part.

III. PLACE DU DROIT DES REGIMES MATRIMONIAUX

a) le droit des régimes matrimoniaux fait partie du droit des personnes et


de la famille

 Son appartenance au droit de la famille est évidente puisqu’il est une


pièce importante du droit du mariage(1). Ainsi, le régime matrimonial
précise la figure du mariage suivant qu’il complète ou non l’union des
personnes par une communauté de leurs biens, suivant qu’il place les
époux sur un pied d’égalité ou de subordination, suivant qu’il leur laisse
l’indépendance ou organise leur collaboration dans la gestion des biens.
 Le droit des régimes matrimoniaux est aussi celui de la personne.
L’incapacité de la femme mariée influence ses pouvoirs découlant du
régime matrimonial. Celui-ci fixe les pouvoirs de chacun des époux dans
la gestion des biens. Il pourra consacrer soit la suprématie maritale soit
l’égalité des époux.

b) le droit des régimes matrimoniaux fait aussi partie du droit de


patrimoine

Il réglemente les droits patrimoniaux des époux, c'est-à -dire, le statut de


leurs biens et le sort de leurs créances et de leurs dettes.

c) le droit des régimes matrimoniaux est aussi des actes juridiques et


spécialement des contrats

Il apport des aménagements au droit des contrats lorsqu’ils sont conclus


entre époux.

d) le droit des régimes matrimoniaux est distinct de celui des successions


et des libéralités

Il n’est pas sans entretenir avec celui-ci des rapports étroits. Les libéralités
entre époux ou aux époux sont soumises à des règles particulières à raison
de leurs rapports avec le régime matrimonial.

1
G. Marty et P. Raynaud, Op.cit, p.8, n°2
4

Enfin, le droit des régimes matrimoniaux n’est pas indifférent à celui des
successions. A la mort d’un époux, le survivant peut prétendre à des droits
de nature successorale et au partage des biens communs. Le problème des
droits successoraux du conjoint survivant a toujours été traité en
considération des droits matrimoniaux de celui-ci(1).

IV. SOURCES DU DROIT DES REGIMES MATRIMONIAUX

L’ancien code civil congolais ne comportait aucune disposition relative aux


régimes matrimoniaux. Les congolais de l’époque étaient régis par leurs
coutumes.

La loi n°87-010 du 1er Aoû t 1987 portant code de la famille prévoit une
législation appropriée dans ce domaine. Il s’agit d’une législation très
simple destinée à être appliquée aux Congolais qui jusqu’à présent n’ont
guère envisagé cet aspect du mariage(2).

CHAPITRE PREMIER. LE REGIME MATRIMONIAL PRIMAIRE

SECTION 1 : NOTIONS GENERALES

§1. Définition du régime matrimonial primaire

Le choix du régime matrimonial ne saurait faire oublier les dispositions qui


constituent ce que l’on appelle le régime matrimonial primaire ou le statut
fondamental du ménage. Ces dispositions ont été étudiées en première
année sous la rubrique les effets du mariage. Il s’agit des règles relatives aux
intérêts pécuniaires des époux. Mais ces règles sont intangibles. On y trouve
le ménage, la direction du ménage, les charge du mariage, l’incapacité de la
femme mariée, la résidence conjugale, le droit d’exercer une profession,
etc(3).

Le régime matrimonial primaire comprend l’ensemble des règles qui


définissent impérativement et d’une manière identique pour tous les
ménages, le statut économique du foyer dans les relations entre époux et à
l’égard des tiers(4).
1
F. Terré et P. Simler, Droit civil, les régimes matrimoniaux, 3ème édition, Paris, Dalloz, 2001, p.p.1-7.
2
Voir exposés généraux et commentaires analytiques des articles du code de la famille, art. 487.
3
J.C. Montagnier, Les régimes matrimoniaux, le droit en plus, Presses Universitaires de Grenoble,
1992, p.p.15 et ss.
4
J. Renauld, Droit patrimonial de la famille, T.I., régimes matrimoniaux, Ferdinand Larcier, 1971,
p.83, n°85.
5

Il comprend les règles fondamentales des régimes matrimoniaux qui


s’appliquent indifféremment à tout ménage quelconque(1).

Le régime matrimonial primaire traite des droits et devoirs respectifs des


époux.

§2. Importance des règles du régime matrimonial primaire

Les règles du régime matrimonial primaire sont importantes. Beaucoup de


foyers sont d’ailleurs régis par ce régime matrimonial. C’est le cas des
foyers sans fortune, qui vivent au jour le jour et pour lesquels l’organisation
précise du régime matrimonial est sans intérêt(2).

§3. Caractère des règles du régime matrimonial primaire

Le régime matrimonial primaire étant un effet du mariage, ses règles


empruntent aux règles du mariage leur double caractère général et
impératif.

Elles sont générales parce qu’elles s’appliquent à tous les ménage quel que
soit le régime matrimonial particulier qui les complète.

Elles le sont d’autant plus que leur caractère impératif ne permet pas de s’y
soustraire ou de les modifier.

§4. Objet du régime matrimonial primaire

Les règles du régime matrimonial primaire ont pour objet à la fois la


satisfaction des fins essentielles du mariage et le minimum d’indépendance
que celui-ci doit réserver à chacun des époux.

SECTION 2 : ORGANISATION ECONOMIQUE DU MENAGE DANS LE CODE


DE LA FAMILLE

Dans l’état actuel de la législation, l’organisation économique du ménage


repose sur les articles 441 et suivants du code de la famille. Ces articles
organisent la direction du ménage, la contribution aux charges du ménage
et l’incapacité de la femme mariée.

§1. Création du ménage

1
G. Marty et P. Raynaud, Op.cit, p.27, n°19.
2
F.Terré et P. Simler, Op.cit, p.45.
6

Le mariage crée le ménage (art. 442). Le terme ménage désigne les époux,
leurs enfants non mariés à charge ainsi que tous ceux envers qui les époux
sont tenus d’une obligation alimentaire, à condition que ces derniers
demeurent régulièrement dans la maison conjugale et soient inscrits au
livret de ménage(art. 443).

Il n’est donc pas nécessaire qu’il y ait des enfants pour qu’il y ait ménage. Le
ménage peut comporter des personnes autres que les père et mère ainsi
que des enfants.

§2. Direction du ménage

La direction du ménage est confiée au mari, dit la loi, est le chef du ménage.
Il doit protection à sa femme et celle-ci lui doit obéissance (art. 444).

Dire que le mari est le chef du ménage ne signifie pas que celui-ci prendra
seul toutes les décisions concernant le ménage comme si la femme n’existait
pas. L’homme et la femme doivent concourir à la direction morale et
matérielle du ménage. Ils se concertent pour prendre en commun les
décisions relatives aux intérêts matériels ou moraux du ménage.

Toutefois, la direction du ménage n’étant pas collégiale, c’est à l’homme


qu’est confié un rô le prépondérant, non pas dans son propre intérêt, mais
dans celui du ménage (art. 445).

Le pouvoir de direction du ménage est confié à l’autre époux en cas


d’incapacité, d’absence, d’abandon volontaire de la vie commune, de
démence ou pour toute autre cause (art. 446).

§3. Choix de la résidence conjugale

Il appartient au mari de fixer la résidence conjugale. La femme doit suivre


son mari partout et celui-ci est tenu de la recevoir (art. 454). Toutefois, la
femme peut exercer un recours devant le tribunal de paix contre la décision
du mari lorsque la résidence familiale est fixée de façon manifestement
abusive ou en violation des stipulations convenues entre époux (art. 455).

Le tribunal devra apprécier les motifs invoqués, en fonction des intérêts


matériels et moraux du mariage, l’expression visant également l’intérêt des
enfants faisant partie du foyer.
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§4. Contribution aux charges du ménage

a) Principe

L’article 447 du code de la famille stipule que « les époux contribuent aux
charges du ménage selon leurs facultés et leur état ». Le code de la famille
consacre donc l’égalité dans l’obligation de contribuer aux charges du
ménage compte tenu des facultés et possibilités de chacun des conjoints.

Le code ne précise pas, selon modalités chaque époux s’acquittera de son


obligation. Le terme selon leurs facultés et leur état, est tout à fait général et
peut englober les prestations en nature fournies par l’épouse, dans le cadre
de son activité domestique ou de la collaboration qu’elle apporterait à la
profession de son époux(1).

b) Objet de la contribution aux charges du ménage

on peut définir d’une manière générale l’objet de la contribution aux


charges du ménage, comme étant tout ce qui est nécessaire aux époux et
aux enfants vivant avec eux(2).

Rentrent dans cette catégorie, les frais de logement commun et d’entretien


de la maison habitée par les époux, les frais médicaux des conjoints ainsi
que les frais d’entretien et d’éducation des enfants, même s’ils sont majeurs
mais aux études.

c) Obligation aux charges du ménage et mandat domestique de la


femme mariée

Le mari dispose du pouvoir de conclure des contrats relatifs aux charges du


ménage ; la femme, en application de la théorie du mandat domestique
tacite peut aussi conclure le même contrat.

Les époux répondent solidairement des dettes ainsi contractées. Cette


solidarité n’a pas lieu lorsque les dépenses ainsi réalisées présentent un
caractère manifestement exagéré par rapport au train de vie du ménage
(art. 447).

1
J. Renauld, Droit patrimonial de la famille, T.I., régimes matrimoniaux, Bruxelles, Larcier, 1971,
p.110.
2
Voir art. 476 du Code de la famille.
8

d) Défaut de contribuer aux charges du ménage : paiement d’une


pension alimentaire

L’action en obtention d’une pension alimentaire constitue une règle logique


sanctionnant la violation de l’obligation de contribuer aux charges du
ménage (art. 480).

Comme dans la pratique, cette action en obtention d’une pension


alimentaire s’avérera complexe, le législateur a mis sur pied la technique de
la délégation et de la perception des revenus et des créances.

e) Délégation de la perception des revenus et des créances

 Principe

La technique de la délégation et de la perception des revenus et des


créances oblige, ceux qui ont des dettes, envers l’époux qui manque à ses
devoirs, de payer cette dette entre les mains de l’autre conjoint. Ce dernier
acquiert, par décision judiciaire, le droit de représenter l’époux créancier
lors du paiement des dettes. Ainsi, l’époux demandeur peut toucher
directement certains revenus et certaines créances de son conjoint (art.
481).

Cette formule a l’avantage d’éviter tout contact entre les deux époux, le
conjoint demandeur recevra directement un montant déterminé de
l’employeur ou de tout autre débiteur de son conjoint.

 Procédure

Sur requête verbale ou écrite de l’époux intéressé, les époux sont


convoqués devant le tribunal de paix par un avertissement du greffier
précisant l’objet de la demande (art. 482).

Le tribunal peut ordonner aux époux et même à l’administration des


contributions directes, la communication des renseignements en vue
d’établir le montant des revenus et produits du travail des parties.

Le jugement est opposable à tout tiers débiteurs actuel dès la notification


que lui a faite le greffier à la requête de l’époux demandeur (art. 483).

§5. Incapacité de la femme mariée


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a. Principe

Par le ménage, la capacité de la femme mariée subit certaines limitations. La


femme mariée doit obtenir l’autorisation de son mari pour tous les actes
juridiques dans lesquels elle s’oblige à une prestation qu’elle doit effectuer
en personne (art. 448).

L’article 450 du code de la famille énumère, à titre exemplatif, un certain


nombre d’actes importants que la femme mariée ne peut accomplir sans
l’autorisation de son mari : ester en justice en matière civile, acquérir,
aliéner ou s’obliger. L’autorisation d du mari peut être générale, mais il
conserve toujours le droit de la révoquer.

b. Intervention du tribunal

L’article 449 du code de la famille énumère les cas dans lesquels la femme
peut recourir à la justice pour obtenir l’autorisation dont il est question à
l’article 448 ; d’abord en cas de recours de la femme contre le refus de son
mari de l’autoriser à s’obliger à une prestation qu’elle doit effectuer en
personne ; ensuite, lorsque le mari est incapable ou est dans l’impossibilité
de l’autoriser notamment lorsque le mari est interdit ou placé sous
curatelle.

c. Dérogation à l’autorisation maritale

Après avoir posé le principe de l’incapacité de la femme mariée, le code de


la famille prévoit à l’article 451, des dérogations à cette incapacité, c'est-à -
dire, des cas dans lesquels la femme est pleinement capable. L’autorisation
du mari n’est pas nécessaire à la femme :

- Pour ester en justice contre son mari ;

- Pour disposer à cause de mort ;

- Si le mari est absent ;

- Si le mari est condamné à une peine d’au moins six mois de servitude
pénale pendant la durée de sa peine.

CHAPITRE II. LES DIVERS REGIMES MATRIMONIAUX


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SECTION 1 : DIVERSITE DES REGIMES MATRIMONIAUX

§1. Existence de divers régimes matrimoniaux

On pourrait concevoir que le régime matrimonial primaire suffise à fixer le


statut patrimonial du ménage. On peut même concevoir que la loi
s’abstienne d’organiser un véritable régime matrimonial.

Malgré leur développement dans les législations récentes, les règles


communes à tous les régimes sont loin de fixer tous le régime matrimonial.
A cô té d’elles, il en est d’autres qui dépendent d’un choix que les futurs
époux expriment ou que la loi fait pour eux, s’ils s’abstiennent de le faire
eux-mêmes.

§2. Diverses conceptions du régime matrimonial

Tout régime matrimonial a pour objet, d’une part, la détermination de la


situation des biens des époux pendant la vie de celle-ci et d’autre part, la
réglementation de l’activité juridique des époux par la définition de leurs
pouvoirs.

Mais si l’objet de tout régime matrimonial est le même, les moyens de le


réaliser sont divers et le choix qui peut être fait entre eux est significatif
d’une conception de la famille en générale et des rô les respectifs que jouent
l’un et l’autre des époux et singulièrement la femme.

A travers la variété extrême des régimes matrimoniaux, on peut découvrir


quelques types caractéristiques et c’est ainsi que traditionnellement on
distingue les régimes communautaires et les régimes séparatistes.

SECTION 2 : REGIME COMMUNAUTAIRES

§1. Etendue variable de la communauté

Les régimes communautaires se caractérisent par l’existence d’une


communauté, c'est-à -dire, d’un ensemble de biens qualifiés de communs et
répondant d’un passif qualifié également de commun(1).

Pendant le cours du régime, les biens communs sont affectés à la


satisfaction des besoins communs et, à dissolution du régime, ils sont

1
G. Marty et P. Raynaud, Op.cit, p.81, n°91.
11

normalement partagés entre les époux ou anciens époux de sorte que


chacun est associé aux gains et aux pertes du ménage.

Mais la communauté n’a pas toujours été et n’est pas toujours comprise de
la même manière quant à son étendue.

§2. Nature juridique de la communauté

Quelle est la nature juridique de la masse formée par l’ensemble des biens
communs ?

L’on s’accorde à lui refuser le caractère d’une personne, c'est-à -dire d’un
patrimoine distinct, ayant son passif propre. Si la communauté forme une
masse à part dans les relations entre époux, par contre les cloisons établies
entre la communauté et les biens propres des époux n’ont rien d’étanche.

La communauté n’est pas la propriété du mari. Les larges pouvoirs de


gestion du mari, il les exerce au nom et pour le compte des deux époux.
Malgré son état d’infériorité, la femme a des droits sur la communauté.

La théorie dominante érige la communauté en copropriété des époux ou


propriété collective. Car elle est une masse formée expressément ; en vue
de la prospérité du ménage ; elle est pourvue d’une organisation minutieuse
et traditionnelle ; et il n’est pas question de la partager aussi longtemps
qu’elle remplit sa fonction(1).

SECTION 3 : REGIMES SEPARATISTES

Un régime séparatiste peut se définir d’abord négativement par opposition


aux régimes communautaires. C’est un régime dans lequel les biens des
époux demeurent personnels quant à la propriété s’il ne comporte pas de
communauté.

Un régime séparatiste équivaudrait à une absence de régime matrimonial,


le mariage ne changeant rien à la situation patrimoniale des époux. La
réalité est plus complexe car on ne doit pas oublier que le mariage donne
toujours naissance au régime matrimonial primaire.

SECTION 4 : REGIMES MIXTES

1
R. Dekkers, Op.cit, p.52, n°73. Voir aussi G. Marty et P. Raynaud, Op.cit, p.82, n°92.
12

L’incertitude de la notion de communauté peut faire naitre des doutes


quant à la qualification de certains régimes. En outre, la liberté des
conventions matrimoniales, dans certains pays, permet d’imaginer des
régimes composés des règles empruntées aux deux types principaux qui
s’opposent par leurs principes, mais qui ne sont pas nécessairement
incompatibles par leurs modalités.

Enfin, même dans leur réglementation légale, les régimes qualifiés de


séparatistes et de communautaires ne se présentent pas toujours à l’état
pur.

SECTION 5 : ANALYSE DE DIVERS REGIMES MATRIMONIAUX

§1. Régime de communauté

a. Caractère essentiel du régime de communauté : la masse commune

Le régime de communauté, appelé aussi parfois, régime en communauté, se


caractérise aisément par la circonstance qu’il établit durant le mariage, une
masse des biens commune aux deux époux.

Il s’agit d’une fusion, durant le mariage, de tout ou partie des biens des
conjoints en une masse dans laquelle les époux ont ensemble des droits.
Cette masse est affectée aux besoins de la vie commune, notamment aux
charges du mariage. Elle est soumisse, de ce fait, à un régime adéquat
d’administration et de gestion et sera partagée à la dissolution du régime.

b. Classification du régime de communauté en fonction de la masse

- La communauté universelle

Dans ce régime, la masse commune comprend en principe tous les biens des
époux, ceux dont ils étaient propriétaires lors du mariage et ceux qu’ils vont
avoir par la suite, à quelque titre que ce soit sous réserve de certaines
exceptions.

- La communauté des meubles et acquêts

La caractéristique de ce régime est la masse comprend tous les meubles


appartenant aux époux lors du mariage et ceux qu’ils acquerront dans la
suite pour quelque cause que ce soit, tandis que seuls tombent en
communauté les immeubles acquis à titre onéreux durant le mariage.
13

Tombent aussi en communauté les fruits et produits de l’activité des époux,


ainsi que les fruits et revenus de leurs biens propres et communs.

L’origine de ce régime a été le souci de conserver dans la famille d’origine


de chacun des époux le patrimoine immobilier provenant de d’une et
l’autre. Ainsi s’explique que ce régime maintienne propres aux conjoints les
immeubles qu’ils acquièrent durant le mariage à titre de succession et ceux
qu’ils avaient en se mariant, ceux-ci étant présumé provenir de la famille.

- La communauté réduite aux acquêts

Ce régime se caractérise par le fait que la communauté ne comprend que les


revenus des propres, les revenus du travail des époux et les biens acquis
par eux à titre onéreux durant le mariage.

c. Classification des régimes de communauté en fonction des règles


applicables à l’administration des biens communs et des propres de
la femme

 Problème

L’une des caractéristiques essentielles de tout régime de communauté est


l’existence, durant le mariage, d’une masse des biens commune aux deux
époux.

Ceci pose le problème de la gestion de cette masse. Sur ce problème s’en est
greffé un autre, celui de la gestion et de l’administration des propres de
l’épouse.

 Régime attribuant au mari la gestion de la communauté et


l’administration des propres de l’épouse

Cette forme centralisée du régime de communauté a trouvé sa réalisation


dans le code civil de 1804 qui l’a combinée avec l’incapacité de la femme
mariée.

 Solutions mixtes donnant à l’épouse certains pouvoirs dans le cadre de la


communauté classique à gestion centralisée

L’épouse s’est d’abord vue reconnaitre des droits d’administration et même


de disposition sur certaines catégories de biens provenant de son activité
professionnelle.
14

L’épouse s’est vue reconnaitre ensuite le droit d’intervenir aux cô tés de son
mari pour certains actes de disposition particulièrement importants.

Enfin, l’épouse s’est vue s’ouvrir pour elle de nouvelles possibilités d’action
relativement à la gestion de ses propres.

 Régime de communauté avec réparation du pouvoir d’administration


entre les époux

Certaines législations contemporaines ont délibérément rompu avec le


principe de l’unité de gestion et de la primauté du mari. On y trouve
diverses solutions tendant à équilibrer le principe moderne de l’égalité des
époux et l’idée d’association qui caractérise la communauté(1).

d. Avantages et inconvénients des régimes de communauté

 Avantages

Le régime de communauté traduit le mieux, sur le plan patrimonial, l’idée


que le mariage crée entre époux une communauté de vie et d’efforts.
L’existence de la masse commune appellera spécifique d’administration et
de gestion.

La présomption communautaire résout le problème de la preuve des biens.

 Inconvénients

Les régimes de communauté ont été conçus dans l’optique du mari chef de
famille. Ces régimes ne correspondent plus aux conceptions modernes sur
l’égalité des époux ni au rô le économique de la famille2.

§2. Régime de l’union des biens

Dans ce régime, il n’existe pas de masse commune ; chaque époux conserve


la propriété de ses biens mais les biens de la femme sont administrés par le
mari qui en perçoit les revenus à charge de supporter les frais du ménage,
sauf les biens que l’épouse se serait réservés par conventions
matrimoniales.

1
Voir Bompaka Nkeyi Makanyi, Droit civil comparé, Kinshasa, 2011, inédit.
2
J. Renaud, Op.cit, p. 204, n°289-292.
15

D’une manière générale, on considère que ce régime est de tous, le moins


adapté aux conceptions contemporaines de l’égalité des époux. Il cumul en
effet l’inégalité dans la gestion avec l’inégalité dans les profits.

§3. Régime de séparation des biens

a. Caractères essentiels des régimes de séparation

A l’époque contemporaine, le régime de séparation des biens est plus


fréquemment défini d’une manière autonome, comme étant celui dans
lequel chacun des époux conserve l’administration, la jouissance et la
disposition de ses biens ou plus exactement la propriété, l’administration et
la jouissance de tous ses biens(1).

Le régime de séparation des biens se caractérise donc en ceci. Il maintient


en principe les patrimoines des époux rigoureusement séparés. Il exclut que
le mariage ait une incidence sur les biens des conjoints sous réserve
évidemment des dispositions qui réglementent la contribution des époux au
charges du mariage.

On observera cependant que ces principes doivent être modérés dans la


réalité par l’intervention de divers facteurs. Il se peut que les époux
établissent entre eux en marge de leur séparation de biens une société
d’acquêts accessoire ou même qu’ils combinent séparation des biens ou
communauté d’acquêts.

b. Modalités principale des régimes de séparation

 La séparation pure et simple

Parmi les régimes de séparation, le type le plus élémentaire et aussi le plus


fondamental est la séparation des biens pure et simple.

Sur cette structure de base, viennent se greffer les régimes de séparation


des biens avec communauté d’acquêts et le régime de séparation des biens
avec droit d’administration du mari.

 Le régime dotal

1
J. Renaud, Op.cit, p. 208, n°297.
16

On peut aussi rattacher aux régimes de séparation, le régime dotal. Dans ce


régime, la propriété de ses biens mais en outre, l’administration et la
disposition de tous ceux qui n’ont pas été constitué en dot.

Sont dotaux les biens que la femme se constitue elle-même en dot, par
contrat de mariage ou qui lui sont donnés par un tiers dans le contrat de
mariage.

La femme n’en perd pas la propriété mais les fait passer sous
l’administration et la jouissance de son mari s’acquittant ainsi
forfaitairement de sa contribution aux charges du ménage.

Ces biens sont soumis en outre en principe à un régime particulier


d’inaliénabilité qui protège les intérêts de la femme et tend à disparaitre. Il
n’est plus usité.

 Le régime d’union des biens et de participation

L’union des biens laisse à chaque époux la propriété de tous ses biens. Il y a
donc séparation quant à la propriété. Mais le mari est investi de
l’administration et de la jouissance de tous les biens de la femme.

Quant aux régimes dits de participation, ils font participer chaque époux à
la fortune et aux acquêts de l’autre.

c. Avantages et inconvénients du régime de séparation des biens

Il est manifestement reconnu à l’époque contemporaine que ce régime peut


être extrêmement défavorable et même injuste pour l’époque, si celle-ci n’a
pas de fortune personnelle et si elle n’exerce pas une activité lucrative
propre(1).

Le fonctionnement normal du régime exige que, de part et d’autre, les


époux tiennent une comptabilité précise de l’état de leur fortune et de leurs
acquisitions, précaution qu’ils prennent rarement.

Enfin, il est assez remarquable de constater que dans la plupart des pays
qui ont le régime légal, il a été soit abandonné soit aménagé de manière à
assurer une participation des deux époux aux économies réalisées par eux
durant le mariage.

1
J. Renaud, Op.cit, p. 214, n°306 et ss.
17

L’avantage du régime de séparation des biens est qu’il stimule les époux à
travailler. Par ailleurs, en matière de commerce, en cas de faillite de l’époux
commerçant, les biens de son conjoint seront sauvegardés.

§4. Régime de participation

a. Caractéristiques essentielles

le système dit de participation aux acquêts est né du désir d’assurer la plus


grande efficacité possible au statut de la capacité de la femme mariée sans
pour cela priver celle-ci d’une participation aux gains et aux économies
réalisées par les époux pendant le mariage.

Dans ce but, le régime de participation consacrent sous des modalités


diverses les deux principes suivants :

- Pendant le régime, chaque époux conserve le droit d’administrer ses


biens, d’en disposer et d’en jouir ;

- A la dissolution du régime, il est procédé à une égalisation, soit des


patrimoines des époux, soit de leurs acquêts soit encore de la plus-value de
leurs patrimoines respectifs(1).

b. Appréciation des régimes de participation

L’appréciation des avantage des avantages et inconvénients des régimes de


participation est difficile. Ces régimes ont l’avantage d’éviter les injustices
liées à un régime de séparation. Par ailleurs, ils laissent à chaque époux une
liberité de gestion. Cependant, ces régimes concrétisent moins bien que les
régimes de communauté, l’esprit d’association qui est essentiel à la solidité
du mariage et de la famille en ce qu’ils instituent une gestion séparée qui
doit normalement favoriser une conception individualiste(2).

CHAPITRE III. LE CHOIX DU REGIME MATRIMONIAL

SECTION 1 : ROLE DE LA LOI ET DE LA VOLONTE DANS


L’ETABLISSEMENT DU REGIME MATRIMONIAL
1
J. Renaud, Op.cit, pp. 219-217, n°307 et ss.
2
J. Renaud, Op.cit, p.229, n°331.
18

Parmi les législations contemporaines, certaines reprennent l’idée que le


régime matrimonial est de droit impératif et ne permet pas aux conjoints
d’adopter un régime fondamental, différent de celui qui est organisé au titre
du droit commun.

Par contre, d’autres législations de type supplétif, tout en laissant aux époux
une liberté de choix, parmi les régimes organisés, prévoient un régime de
droit commun ou légal qui s’impose aux conjoints en l’absence de tout
choix.

La liberté des conventions matrimoniales s’étend parfois aussi dans


l’aménagement particulier du régime choisi, soit pour modifier les règles
légales de ce régime soit pour les compléter en introduisant, par exemple
les règles relatives à l’évaluation des biens.

Dans le code de la famille, le législateur retient trois régimes matrimoniaux


entièrement et limitativement organisées par la loi. Cette option
fondamentale et originale constitue un système réglementaire limitant la
liberté de volonté des époux à l’option qu’ils peuvent faire entre ces trois
régimes statutaires.

Les motifs de cette option sont les suivants :

- Ce système est simple et facile parce qu’il se réalise directement dans


l’acte de mariage ;

- Il introduit l’organisation des régimes matrimoniaux à partir des règles


légales bien définies pour l’ensemble des Congolais qui jusqu’à présent
n’ont guère envisagé cet aspect du mariage(1).

Toutefois, l’autonomie de la volonté des époux trouve cependant de larges


possibilités, non seulement dans le choix du régime légal mais aussi dans la
possibilité de modifier à l’intérieur du régime opté la règle présumée mais
non impérative de la gestion maritale qui peut être modifiée expressément
pour la gestion séparée des propres et dans la faculté de modifier une fois
durant l’union, le régime matrimonial établi au moment de l’acte de
mariage(2).

SECTION 2: CHOIX DU REGIME MATRIMONIAL


1
Exposés généraux et commentaires analytiques des articles du code de la famille, art. 487.
2
Lire articles 494 et 495 du code de la famille.
19

§1. Procédure

Le code de la famille n’organise pas le contrat de mariage. Celui-ci a pour


objet de régler le statut patrimonial des époux dans le mariage et les
libéralités que leur nature ou la volonté des parties rattache à ce statut(1).

Le code de la famille fixe la procédure du choix du régime matrimonial dans


l’acte de mariage et le rô le que doit jouer à cet effet l’officier de l’état civil
(article 488).

Au moment où les époux se présentent pour la célébration ou pour


l’enregistrement de leur mariage célébré en famille, l’officier de l’état civil
est tenu de les avertir de l’existence de trois régimes matrimoniaux et la
faculté qu’ils ont d’opter et, qu’à défaut pour eux de se prononcer, le régime
qui leur sera applicable sera celui de la communauté réduite aux acquêts.

Le code prévoit l’obligation pour l’officier de l’état civil d’expliquer ces


régimes aux futurs conjoints au moment de la publication des bans. Au
moment de la célébration du mariage ou de l’enregistrement de celui-ci,
l’officier de l’état civil leur demandera de fixer leur choix. Il actera leur
réponse dans l’acte de mariage (article 488).

En cas de défaut d’option, le régime de la communauté réduite aux acquêts


leur sera applicable. De même, si le mariage est annulé, le régime
matrimonial choisi sera considéré comme inexistant et celui de la
communauté réduite aux acquêts leur sera applicable (article 489).

§2. Consentement des parents ou assistance du curateur

Le consentement des personnes titulaires de l’autorité parentale ou


tutélaire est requis pour l’exercice de l’option lorsque le futur époux est
mineur non émancipé (art. 491). Ainsi, l’assistance du curateur du mineur
émancipé ou du majeur sous curatelle est requise(2).

SECTION 3 : MODIFICATION VOLONTAIRE DU REGIME MATRIMONIAL


PENDANT L’UNION

§1. Rappel du principe de l’immutabilité des régimes matrimoniaux


1
J. Renaud, Op.citcit, p. 273, n°391. Pour les états sur le contrat de mariage, voir J. Renaud, Op.cit, p.
271 et ss.
2
Lire l’article 48 de la loi n°09/001 du 10 janvier 2009 portant protection de l’enfant qui déclare  : « les
fiançailles et les mariages d’enfants sont interdits ».
20

La règle de l’immutabilité a dominé pendant longtemps la matière des


régimes matrimoniaux.

Les époux ne pouvaient modifier conventionnellement leur régime


matrimonial ni directement ni indirectement et ce même si toutes les
parties sont d’accord.

Ce principe répondait au souci d’éviter les donations indirectes ou déguisés


entre époux et à l’idée que le contrat de mariage est pacte de famille. L’on a
insisté également sur la nécessité de protéger les tiers contre les fraudes(1).

Le principe de mutabilité des régimes matrimoniaux est de plus en plus


retenu par les législateurs modernes. L’on admet, dans l’état actuel de
l’évolution du mode contemporain, la grande mobilité de la vie économique
et professionnelle des individus de telle sorte que les prévisions qui ont été
faites au début d’une union peuvent être dépassées par le processus des
événements ultérieurs.

La modification peut être totale ou partielle. Elle peut aussi porter sur les
règles de gestion prévues dans le régime matrimonial antérieure.

§2. Mutabilité des régimes matrimoniaux

Dans son article 494, le code de la famille prévoit la réglementation de la


mutabilité totale ou partielle des régimes matrimoniaux durant le mariage.

« A la demande des époux et une dois durant le mariage, le régime


matrimonial peut être modifié ».

La mutabilité est subordonnée à des conditions rigoureuses :

- Une demande conjointe de deux époux ;

- La demande doit être motivée d’une façon sérieuse pour l’intérêt du


ménage, ou à raison d’une modification importante intervenue dans la
situation des époux ou de l’un d’entre eux.

Sous les mêmes conditions, les époux peuvent demander de modifier le


régime de gestion de leurs biens propres ou communs.

§3. Tribunal compétent

1
F. Terré et P. Smler, Op.cit, pp. 164 et ss ; Exposés généraux… art. 494 et ss.
21

Le tribunal de paix compétent est celui de la dernière résidence conjugale


des époux. Au cas où cette demande n’est pas accueillie, celle-ci ne peut être
renouvelée qu’après deux ans, à dater de la décision devenue définitive
pour autant qu’elles s’appuient sur des éléments nouveaux (art. 494).

§4. Mesures de publicité

Dans le délai d’un mois à compter de la date à laquelle la décision de


modification est intervenue et n’est plus susceptible de recours, le dispositif
du jugement est envoyé par les soins du greffier à l’officier de l’état civil du
lieu de célébration ou de l’enregistrement du mariage pour transcription
par mention en marge de l’acte de mariage. Il sera également procédé à la
publicité du dispositif dans le même délai, par les soins du greffier au
journal officiel.

Lorsque l’un des époux est commerçant, mention du dispositif du jugement


de modification est portée au registre de commerce dans le même délai (art.
496).

CHAPITRE IV. EXAMEN DES REGIMES MATRIMONIAUX RETENUS DANS


LE CODE DE LA FAMILLE

SECTION 1 : OPTION DU CODE DE LA FAMILLE

L’ancien code civil ne comportait aucune disposition relative aux régimes


matrimoniaux. Le code de la famille prévoit une législation appropriée dans
ce domaine en instaurant trois régimes : la séparation des biens, la
communauté réduite aux acquêts et la communauté universelle entre
lesquels les époux doivent choisir.

Le code de la famille limite ainsi, la liberté de volonté des époux à l’option


qu’ils peuvent faire entre ces trois régimes matrimoniaux(1).

SECTION 2 : DISPOSITIONS COMMUNES A TOUS LES REGIMES


MATRIMONIAUX

Le code de la famille renferme dans un seul paragraphe des dispositions


communes à tous les régimes matrimoniaux. Ces dispositions traitent des
matières diverses :

1
Exposés généraux et commentaires analytiques des articles du code de la famille : les effets
patrimoniaux : dispositions générales.
22

1. Nombre d’options

2. déclaration de l’option devant l’officier de l’état civil

3. défaut d’option

4. gestion maritale des biens

5. consentement des parents à l’assistant en cas d’option

6. présomption d’indivision

7. convention entre époux

8. modification du régime matrimonial

9. activités professionnelles de la femme mariée

10. représentation entre époux

11 limitations des droits des époux sur leurs biens

12. causes de partage des biens.

Il est indiqué de développe ces matières qui sont d’une importance capitale
pour les régimes matrimoniaux. Néanmoins, l’on se limitera aux rubriques
qui n’ont pas encore été abordées jusqu’ici.

§1. Défaut d’option

L’article 489 du code de la famille établit que le régime de la communauté


réduit aux acquêts constitue le régime légal supplétif. Cet article imagine
l’hypothèse du défaut d’option et également de celle ou par inadvertance ou
négligence de l’officier de l’état civil a omis d’acter l’option.

Le cas de nullité de mariage a été aussi réglementé. Il fallait nécessairement


conférer aux effets pécuniaires du mariage annulé un régime précis et ce
sera évidemment le régime de communauté réduite aux acquêts.

§2. Gestion maritale des biens

L’article 490 alinéa 2 du code de la famille instaure dans le mariage l’unité


de gestion. Celle-ci découle de la notion du chef de famille. « Quelque soit le
régime matrimoniale qui régit les époux, la gestion des patrimoines
commun et propre est présumée être confiée au mari ».
23

La gestion englobe les trois pouvoirs classiques d’administration, de


jouissance et de disposition.

Le mari peut accomplit tous les actes d’administration provisoire ou


ordinaire (donner à bail les biens communs, exercer des actions en justice).
Il a les pouvoirs de jouissance, le droit de louer les biens, de résilier les
baux. Enfin, il a les pouvoirs de disposition. Le mari peut vendre, aliéner les
biens.

Le mari gère son patrimoine propre en qualité de propriétaire ; le


patrimoine commun et les propres de la femme en qualité de chef de la
femme, en qualité de chef de l’association conjugale et représentant légal de
la femme(1). Les pouvoirs du mari sur les biens de la femme rentrent dans
les règles générales de la gestion des biens d’autrui. Les pouvoirs de gestion
du mari sont d’ailleurs limités. Au moment de leur déclaration d’option d’un
régime matrimonial, les époux peuvent convenir que chacun gérera ses
biens propres (art. 490 al 3).

En conformément à l’article 495 du code de la famille, les époux peuvent


demander de modifier le régime de gestion de leurs biens propres ou
communs selon les mêmes modalités que celles précisées à l’article 491(2).

§3. Présomption d’indivision

L’article 492 du code de la famille stipule ce qui suit : « quel que soit le
régime choisi, lorsque l’un des époux ne peut justifier de la propriété ou de
la concession exclusive d’un bien, celui-ci est présumé indivis. Les
avantages matrimoniaux qui découlent de la répartition des charges entre
les époux sont réputés, quel que soit le régime adopté, biens indivis. La
qualité des biens propres ne peut, être opposée à une tierce personne que si
celle-ci connaissait ou devait connaitre cette qualité ».

1
R. Dekkers, Op.cit, p.119, n°103.
2
Lire l’article 48 de la loi n°09/001 du 10 janvier 2009 précitée
24

La règle de présomption d’indivision inscrite dans la loi s’impose pour


n’importe quel régime pour régler d’une façon simple les cas précis et
complexes des biens dont on ne peut connaitre exactement l’origine(1).

Le terme employé est de qualifier ces biens non pas de communs mais
d’indivis, de telle sorte que cette qualification intéressée aussi bien le
régime de la séparation des biens que le régime de communauté.

On a également estimé nécessaire de constater le caractère indivis des


avantages matrimoniaux, c’est-à -dire, des bénéfices qui résulteraient
directement de la gestion de la communauté conjugale.

En effet, la qualité de biens propres ne peut être oppose à une tierce


personne que si celle-ci connaissait ou devrait connaitre cette qualité vis-à -
vis des tiers, il était nécessaire également pour les protéger, de permettre à
ceux-ci de pouvoir récupérer leurs doits contre les deux époux, sauf
cependant s’ils pouvoir récupérer leurs droits contre les deux époux, sauf
cependant s’ils connaissaient que le bien était un propre ou qu’ils devaient
le connaitre.

§4. Convention entre époux

L’article 493 du code de la famille permet en principe aux époux de passer


des conventions notamment de donation ou de vente.

« Les conventions entre époux sont valables pour autant qu’elles ne nuisent
pas aux droits et intérêts des personnes faisant partie de la famille, aux
intérêts pécuniaires de époux, ainsi qu’à l’ordre légal des successions ».

Cette liberté d’agir est cependant limitée dans le cas où cette convention
pourrait porter atteinte aux droits fondamentaux de la famille, plus
particulièrement aux droits des enfants issus de cette union qui bénéficient
d’un droit à l’éducation et à l’entretien.

De même les intérêts pécuniaires des époux doivent être protégés comme
par exemple le droit à un standing de vie conforme à leur état de fortune.

1
Exposés générau… art 492.
25

Enfin, il fallait également protéger l’avenir des patrimoines en limitant cette


liberté des conventions entre les époux, au respect dû par eux à l’ordre légal
des successions(2).

§5. Activités professionnelles de la femme mariée

Les biens sont, comme le sait, gérés par le mari. Toutefois, il a été jugé
opportun de détacher et de laisser au pouvoir de la femme, dans le cadre de
tous les régimes matrimoniaux, un ensemble des biens qui sont qualifiés
réservées (art. 497).

L’alinéa 1er de l’article 497 du code de la famille retient les biens que la
femme acquiert par l’exercice d’une profession séparée et donne d’ailleurs à
cette catégorie de biens une extension assez importante puisque les
économies qui en découlent y sont également comprises.

La conséquence de cette disposition est qu’elle pourra gérer ces biens et les
administrer. En d’autres termes, ceux-ci sont retirés de la gestion maritale.

Toutefois, la femme mariée, à l’égard des biens réservés restera sous le


contrô le de son mari. Celui-ci reprendra l’administration des biens réservés
de la femme, s’il estime que par sa mauvaise gestion et administration, elle
porte atteinte à l’harmonie et aux intérêts pécuniaires du ménage.

La qualité des biens réservés est attribuée à certains biens attachés d’une
manière très intime à la femme non seulement les vêtements, les bijoux, les
instruments de travail mais aussi les indemnités découlent d’un dommage
dont elle a été victime à l’association de son travail séparé.

§6. Représentation entre époux

Quel que soit le type de gestion qui gouverne le régime matrimonial, un


époux peut donner mandat à m’autre de la représenter dans l’exercice des
pouvoirs que le régime matrimonial lui attribue (art 498).

Si un des époux se trouve hors d’état de manifester sa volonté, l’autre peut


se faire autoriser par ordonnance du président du tribunal de paix de leur
2
Exposés généraux… article 493.
26

domicile, à le représenter ou en partie, dans l’exercice des pouvoirs


résultant du régime matrimonial.

A défaut de mandat et d’autorisation judiciaire, les actes faits par un époux


en représentation de l’autre ont effet à l’égard de celui-ci, suivant les règles
de la gestion d’affaire.

§7. Limitation des droits des époux sur leurs biens

L’article 499 du code de la famille est une disposition très importante. En


voici le contenu.

« Quels que soient le régime matrimonial et les modalités de la gestion de ce


régime, l’accord des deux époux est nécessaire pour :

a. Transférer une concession foncière commune ou propre, ordinaire ou


perpétuelle ou la grever d’un droit d’emphytéose de superficie, d’usufruit,
d’usage, d’habitation, d’hypothèque ou d’une servitude :

b. Aliéner, par incorporation, un immeuble commun ou propre ou le grever


d’un droit réel d’emphytéose, de superficie, d’usufruit, d’usage, d’habitation,
d’hypothèque ou d’une servitude et d’un bail de plus de neuf ans ;

c. Aliéner un immeuble commun dont la valeur est supérieur à 50. 000


zaïres ou des titres inscrits de cette valeur au nom du mari et de la femme ;

d. Contracter un emprunt de plus de 10.000 zaïres sur les biens communs


ou propres de l’autre époux ;

e. Faire une donation de plus de 500 zaïres au cautionner la dette d’un tiers
pour un montant supérieur à 5.000 zaïres, sur les biens communs ou
propres de l’autre époux ».

La gestion maritale ou toute gestion séparée est une beaucoup de points


sévèrement contrô lée par cette disposition pour empêcher des actes
inconsidérés en faveur de tiers ou contre le ménage.

L’article 499 du code de la famille permet au conjoint qui n’a pas le pouvoir
de gestion de bénéficier d’une réelle cogestion là où les actes s’avèrent
importants (aliénation, donation, emprunt…)(1).

1
Exposés généraux…art 499.
27

Les actes réclamant l’accord des deux époux sont présumés avoir obtenu
l’accord de l’autre époux si, dans les six mois après qu’ils aient été passés, il
n’y a pas eu manifestation écrite du désaccord notifié à la partie tierce
contractante (art. 500).

Un époux peut être autorisé par le président du tribunal de paix à passer


seul ou à se voir ratifier un acte pour lequel le concours de l’autre conjoint
était nécessaire, si le refus de ce dernier n’est justifié par l’intérêt du
ménage ou s’il est hors d’état de manifester sa volonté (art. 501).

§8. Causes de partage des biens

Les causes de dissolution du mariage et les effets de celle-ci sont les mêmes
quant au partage de biens (art. 502).

En effet, conformément à l’article 539 du code de la famille, le mariage se


dissout par la mort de l’un des époux, le divorce et le nouveau mariage du
conjoint de l’absent. En ce qui concerne le régime de communauté, la
dissolution de la communauté peut se produire sans dissolution du
mariage. Il en est ainsi en cas de séparation des biens judiciaire.

Le partage de l’actif et du passif se réalisera quant aux biens communs ou


présumés indivis par moitié (art. 503).

SECTION 3 : SEPARATION DES BIENS

§1. Définition

Le régime de la séparation des biens consacre l’existence de deux


patrimoines propres formés par tous les biens acquis à titre onéreux ou à
titre gratuit par chacun des époux ainsi que par leurs dettes (art. 505).

En principe, les époux ont chacun leur patrimoine, tant en actif qu’en passif.
Peu importe l’origine de celui-ci avant ou pendant le mariage, que ce soit à
partir d’actes gratuits ou onéreux.

§2. Inventaire des biens u moment du mariage

Conformément à l’article 506 du code de la famille, au moment de la


célébration ou de l’enregistrement du mariage, si les époux optent pour la
séparation des biens, ils peuvent établir et remettre à l’officier de l’état civil
un inventaire signé par eux et précisant les biens meubles et immeubles
28

dont ils ont la propriété ou la possession légale antérieurement au mariage


(art. 506).

Cet inventaire est facultatif mais il constitue, s’il est fait une preuve de
valeur absolue sauf le respect dû aux titres immobiliers(1).

Le texte a distingué propriété et possession légale parce que très souvent,


dans le patrimoine de l’un des époux, il peut y avoir un droit préalable à la
propriété ou à la concession, surtout en matière foncière et immobilière,
qui, comme l’occupation préalable et provisoire d’un fonds, constitue un cas
de possession légale.

Enfin, l’inventaire est signalé dans l’acte de mariage et fait plein foi de
l’appartenance de biens (art. 506).

§3. Preuve de la propriété des biens

Tant à l’égard de son conjoint que des tiers, un époux peut prouver qu’il a
la propriété ou possession d’un bien par tous les moyens sauf évidemment
les cas des biens immobiliers(2).

Les biens meubles qui ont un caractère personnel et les droits


exclusivement attachés à la personne sont présumés appartenir à l’un ou à
l’autre des époux.

La preuve contraire se fait par tout moyen propre à établir que lesbiens
n’appartiennent pas au conjoint que la loi désigne.

Il peut également être prouvé que le bien a été acquis par une libéralité du
conjoint (art. 507).

§4. Gestion des biens

a. Principe

Quelques soit le régime matrimonial qui régit les époux, la gestion des
patrimoines commun et propre est présumée être confiée au mari.

1
Exposés généraux…art 506.
2
Exposés généraux…art 507.
29

Cependant, lorsque par la volonté des époux, la gestion des biens n’est pas
attribuée au mari, chacun des époux administres ses biens, en perçoit les
revenus et en dispose librement(3).

b. Mandant

Conformément à l’article 509 du code de la famille, un époux peut donner


librement mandant à son conjoint de gérer tout ou partie de ses biens
personnels.

Il y a donc responsabilité contractuelle entre les époux, sur base des règles
de droit commun. Toutefois, les alinéas 2 et 4 de l’article 509 donnent
certaines dispositions spéciales inhérentes au caractère propre du mandant
dans le cadre de l’exécution des régimes matrimoniaux. L’époux assurent la
gestion est dispensé de rendre compte des fruits si la procuration ne l’y
oblige pas expressément.

Par ailleurs, quand l’un des époux gère les biens de l’autre aux sus de celui-
ci mais sans opposition de sa part, il est présumé avoir reçu mandat pour
les seuls actes d’administration à l’exclusion de tout acte de disposition.

Il est comptable des fruits existant et peut être tenu dans la limite des cinq
dernières années pour ceux qu’il aurait négligé de percevoir ou qu’il aurait
consommés frauduleusement.

Si l’un des époux s’immisce dans la gestion des biens du conjoint, malgré
l’opposition de celui-ci, il est responsable de toutes les suites de son
immixtion, et comptable sans limitation de tous les fruits, tant existants que
consommés.

§5. Modification judiciaire de la gestion maritale

Il peut arriver que les propres de l’épouse gérés par le mari soient mis en
péril par un comportement fautif et grave du mari tel que le désordre des
affaires du mari dû à une faillite, une déconfiture, une mauvaise gestion, par
prodigalité, l’inconduite notoire…

En pareil cas, il est opportun de retirer au mari le bénéfice de la gestion


pour la remplacer par la gestion séparée par l’épouse de son patrimoine
(art. 515).
3
Lire les réserves de l’article 499 du code de la famille.
30

Mention du jugement de modification de gestion sera portée en marge de


l’acte de mariage à la diligence de l’épouse. Le jugement prend effet entre
les époux au jour de la demande et vis-à -vis des tiers à la date de
l’inscription marginale à l’acte de mariage.

§6. Gestion maritale et dissolution du mariage

En cas de gestion maritale, à la dissolution du mariage, chacun des époux


reprend ses biens propres en nature.

La gestion maritale place l’épouse quelles que soient les limites prévues par
la loi dans l’exercice de cette gestion dans une situation d’infériorité qui
nécessite des contrepoids sérieux. Ainsi l’article 510 alinéa 1 organise le
bénéfice de prélèvement en faveur de l’épouse ou de ses héritiers.

Le même article établit la règle d’indemnité en cas d’enrichissement d’un


patrimoine propre au détriment de l’autre : par exemple si dans la gestion
l’un des partenaires a payé les dettes dues par l’autre.

Enfin, l’article 511 du code de la famille donne une autre garantie spéciale à
l’épouse et à ses héritiers sur le patrimoine de l’homme à savoir
l’hypothèque légale foncière et immobilière. Le patrimoine vise est celui qui
existe au moment de la dissolution déduction toutefois des donations qui
ont été faites par le mari à son épouse.

§7. Gestion séparée et dissolution du mariage

En cas de gestion séparée, une indemnité est accordée à un époux à ses


héritiers, s’il établit que les biens propres de son conjoint se sont enrichis
au détriment de ses biens propres (art. 512).

Par ailleurs, les dettes des époux contractés avant ou nées pendant le
mariage restent propres. En cas de dissolution du mariage, l’époux qui aura
payé sur ses biens une dette de l’autre a droit au remboursement.

§8. Biens indivis

A la dissolution du mariage, s’il existe une masse des indivis, le règlement


des dettes et les enrichissements dus par les biens propres d’un des époux à
l’autre seront opérés par préférence sur cette masse (art. 514).
31

Ce privilège spécial sur la masse indivise est justifié par le fait qu’elle a été
créée en raison de la vie conjugale que le patrimoine défavorisé doit dans
ces conditions avoir e bénéfice d’une créance privilégiée, vu qu’on peut
présumer que ce fut un service rendu par un patrimoine en faveur de
l’autre(1).

SECTION 4 : COMMUNAUTE REDUITE AUX ACQUETS

§1. Répartition des biens

Le régime de la communauté réduite aux acquêts est caractérisé par


l’existence, d’une part, des biens propres de chacun des époux et d’autre
part des biens communs.

Pendant la durée du régime, la distinction des biens communs et des biens


propres est essentielles cas elle permet de définir le gage des créanciers des
époux.

A la dissolution du régime, les biens communs seront partagés tandis que


les biens propres seront repris par l’époux auquel ils appartiennent.

La distinction des biens communs et des biens propres est donc capitale à
ce moment.

§2. Biens propres

L’article 516 alinéa 2 établit le principe qui détermine la qualité de propre à


certains biens, à savoir leur origine étrangère à l’existence de la
communauté conjugale.

Sous cet angle, les biens de chacun des époux avant le mariage sont propres.

Le principe s’applique aux meubles comme aux immeubles.

En effet, suivant la conception traditionnelle, le biens d’origine familiale


doivent rester dans la famille en dehors des alliés(2).

De même, les donations et legs acquis pendant l’union sont présumés


propres et c’est la stipulation de la donation ou de legs conjointe qui pourra
renverser la présomption. Restent propres à chacun des époux les liens
acquis à titre onéreux pendant le mariage, en échange d’un bien propre ou
1
Exposés généraux…art 514
2
Exposés généraux…art 516.
32

avec des deniers propres ou provenant de l’aliénation d’un bien propre (art
517).

Cette disposition est très importante lors de la liquidation en vue de la


correcte détermination des trois masses à savoir les propres des deux
époux et la masse commune qui sera partagée comme indivision(1).

§3. Biens communs : acquêts

L’article 516 du code de la famille définit suit les biens communs. Sont
communs et comme tels que qualifiés acquêts, les biens que les époux
acquièrent pendant le mariage par leur activité commune ou séparée ainsi
que les biens conjointement acquis par les deux époux par donations,
successions ou testaments.

Le terme «  acquêts » a reçu ainsi une définition étendue. On peut se rendre


compte combien l’idée de communauté s’avère capitale et conforme à une
tendance actuellement admise d’avoir en ménage une caisse commune(2).

§4. Inventaire des biens au moment du mariage

Les époux peuvent établir et remettre à l’officier de l’état civil qui célèbre
ou enregistre le mariage un inventaire signé par eux précisant les biens
meubles et immeubles dont ils ont la propriété ou la possession
antérieurement au mariage (art. 518).

L’opération de l’inventaire n’est pas obligatoire, car cela pourrait, pour


certains époux constituer un acte de méfiance. L’inventaire est mentionné

dans l’acte de mariage et fait pleine foi de l’appartenance des biens(3).

Tout bien non inventorié comme bien propre est présumé commun.
Toutefois, chacun des époux peut prouver par tous moyens qu’il en a la
propriété exclusive.

§5. Gestion séparée des biens propres

1
Exposés généraux…art 517.
2
Exposés généraux…art 516.
3
Exposés généraux…art 518.
33

Au cas où par la volonté des époux ou par l’effet de la loi, la gestion des
biens propres n’est pas attribuée au mari et est confié à chacun des époux,
ceux-ci administrent leurs biens personnels et en perçoivent les revenus ;
ils peuvent en disposer librement.

§6. Modification du régime matrimonial pour la communauté réduite


aux acquêts

Dans le cas de la mutation de la séparation des biens ou de la communauté


universelle vers la communauté réduite aux acquêts, le problème de la
répartition des biens se pose nécessairement.

Les époux sont invités à établir un état général de leur actif commun et de
leurs actifs propres ainsi que des dettes communes ou propres ; cet état est
homologué par le tribunal (art. 521).

A défaut par les époux d’établir cet état, les biens acquis ainsi que les dettes
contractés pendant l’union seront présumés communs.

§7. Dettes des époux

Dans son article 523, le code de la famille consacre la règle de la


contribution aux dettes, cette constitue une des caractéristiques du régime
de la communauté réduite aux acquêts.

En effet, l’article 523 stipule  « les dettes dont l’un des époux est tenu grève
ses biens propres et les biens communs ». Ici, l’esprit de la communauté
doit également se manifester pour le passif et constitue, par le fait que deux
patrimoines y répondent, une garantie sérieuse pour les créanciers des
deux époux. On aurait pu cependant la gestion maritale qui constitue le
régime supplétif en matière de gestion décide que, seule le mari est tenu sur
ses propres(1).

Les dettes personnelles des époux, contractés avant et pendant le mariage


sur leur patrimoine restent propres. En cas de dissolution, si ces dettes ont
été payées par les biens communs, elles seront prises en compte dans le
partage des biens communs. En cas des dettes solidaires et si celles-ci ont
été payées par un patrimoine propre, le patrimoine commun assurera le

1
Exposés généraux…art 523.
34

remboursement. Si le patrimoine commun ne parvient pas à apurer la dette,


celle-ci sera payée par moitié par le patrimoine propre de l’autre époux.

§8. Dissolution du mariage-gestion maritale

a) Sort des biens propres

Avant de procéder au partage de la communauté, il est nécessaire d’établir


la consistance de chacune des trois masses, opération souvent difficile en
raison de la confusion de fait qui s’est produite entre les mains du mari.
Chacun des époux reprend à titre de propriétaire ses biens propres qui
subsistent. On dit qu’il exerce ses reprises.

b) Prélèvement sur les biens communs

L’article 525 du code de la famille organise le droit aux récompenses dû par


les patrimoines séparés des époux. En effet, si l’un des époux établit qu’un
de ses biens propres a été aliéné et que le prix en est tombé en
communauté, il prélève sur les biens communs la valeur correspondant à ce
prix. La femme exerce ses prélèvements avant le mari.

c) Enrichissement d’un patrimoine propre au détriment d’un


patrimoine propre

Le patrimoine appauvri doit être directement indemnisé par le patrimoine


enrichi, soit en nature, soit en équivalent. Si l’enrichissement résulte d’une
mauvaise gestion du mari, une indemnité compensatoire peut être
demandée en justice (art. 526).

d) Partage

Une fois les reprises effectuées et les prélèvements opérés, la consistance


de la masse commune se trouve définitivement établie. Il suffit de procéder
au partage de l’actif et du passif. Le partage de la communauté s’effectue par
moitié. Mais il ne s’agit pas d’une règle d’ordre public, les époux peuvent
convenir d’un partage inégal(1).

1
Exposés généraux… art 530.
35

e) Hypothèque légale

En cas de gestion par le mari, le patrimoine foncier et immobilier du mari


est gravé d’une hypothèque pour sû reté du patrimoine de son épouse (art.
527).

§9. Liquidation anticipée par séparation judiciaire des biens-gestion


maritale

L’article 531 du code de la famille organise la liquidation du régime de la


communauté réduite aux acquêts en cas de gestion maritale. Si le désordre
des affaires du mari, la mauvaise gestion ou son inconduite notoire donnent
lieu de crainte que la continuation du régime de la communauté réduite aux
acquêts avec gestion par le mari en compromettre les intérêts de l’épouse,
seule celle-ci pourra poursuivre en justice la séparation des biens (art. 531).

En effet, dans le cas de la liquidation anticipée par séparation judiciaire de


la communauté réduite aux acquêts avec gestion maritale, les problèmes de
la liquidation s’avèrent être les mêmes que ceux qui se posent lors de la
liquidation de la séparation des biens à la dissolution du mariage.

Par légaux et bijoux et souvenirs de famille, il faut entendre une série de


biens mobiliers que leur possession prolongée à l’intérieur d’un même
cercle familial, et leur valeur extrapatrimonial ou sentimentale supérieure à
leur valeur vénale font échapper aux règles de droit commun sur
l’appropriation et la transmissions des bien(1).

§10. Dissolution du mariage-gestion séparée

L’article 532 du code de la famille précise les règles à suivre dans le cas de
gestion séparée. L’article 532 stipule : « en cas de dissolution du mariage, si
la gestion des biens est organisée conformément aux dispositions de
l’article 520, les articles 524, 525, 526 alinéa premier, 528, 529 et 530
restent d’application ».

SECTION 5 : LA COMMUNAUTE UNIVERSELLE


1
F. Boulanger, Droit civil de la famille, Aspects internes et internationaux, economica, Paris, 1990, p.
114.
36

§1. Définition

La communauté universelle comprend tous les biens des époux, meubles et


immeubles ainsi que leurs dettes présentes et à venir (art. 533). Ce régime
est le plus simple et le plus communautaire.

§2. Exception au principe

Malgré le caractère universel de la communauté, les époux peuvent avoir


exceptionnellement des biens propres. L’article 533 alinéa 2 du code de la
famille déclare :

Resteront cependant propres aux époux :

- Les biens mobiliers et immobiliers qu’ils recueilleront à titre gratuit sans


communauté  ;

- Les biens qui leur sont strictement personnels : bijoux, souvenirs de


famille, lettres, diplô mes, habillement(1) ;

- Les indemnités compensatoires d’un préjudice physique ou moral ;

- Les rentes alimentaires ;

- La pension de retraite et d’invalidité.

Le tribunal doit être saisi par l’épouse vu que, jusqu’à présent, les règles

énoncées sont uniquement celles qui règlementent la liquidation du régime


matrimonial de la communauté réduite aux acquêts, gérés par l’époux(2).

§3. Modification volontaire de la communauté

La modification du régime de la communauté universelle vers les deux


autres régimes doit être assimilée au partage en cas de dissolution. Ainsi, la
communauté universelle sera partagée par moitié tant activement que
passivement (art. 534). Les dettes contractées avant la modification du
régime pourront être poursuivies par les tiers solidairement sur le

1
Par bijoux et souvenirs de famille, il faut entendre une série de biens mobiliers que leur possession
prolongée à l’intérieur d’un même cercle familial, et leur valeur extrapatrimonial ou sentimentale
supérieure à leur valeur vénale font échapper aux règles de droit commun sur l’appropriation et la
transmission des biens. F. Boulanger, Droit civil de la famille, aspects interne et internationaux,
economica, Paris, 1990, p. 114.
2
Exposés généraux… 531.
37

patrimoine des époux et éventuellement après partage sur ce qui subsiste


du patrimoine commune(1).

§4. Dissolution du mariage

a. Liquidation et partage de la communauté

A la dissolution du mariage, l’actif et le passif de la communauté sont


partagés par moitié entre les anciens époux ou entre le conjoint survivant et
les héritiers de l’autre époux

En cas de créance non encore apurée, l’alinéa 2 de l’article 535 du code de la


famille oblige les débiteurs de payer par moitié cette dette aux deux
patrimoines. En matière de dettes, l’alinéa 3 de l’article 535 du code de la
famille maintient la solidarité au profit du tiers créancier. Le patrimoine qui
a payé la dette dispose d’un droit de recours contre le titulaire de l’autre
patrimoine.

b. Sort des biens propres

On sait que malgré la portée générale de la communauté universelle,


certains biens restent propres. D’où lors de la dissolution, ceux-ci resteront
propres, s’ils restent identifiables.

§5. Séparation judiciaire

En cas de gestion maritale de la communauté universelle, la séparation


judiciaire peut être organisée suite au désordre des affaires du mari, à la
mauvaise gestion ou à son inconduite notoire (art. 537).

La séparation des biens entraine la liquidation des biens de la communauté.

SECTION 6. L’APPRECIATION CRITIQUE DES REGIMES MATRIMONIAUX

S’il faut caractériser d’un mot les régimes matrimoniaux, tels qu’ils sont
réglementés dans le code de la famille, le Professeur BOMPAKA NKEYI
dit : « qu’ils concentrent tous les pouvoirs entre les mains du mari chef de
famille, chef de ménage, chef de l’association familiale ; mais par contre, ils
multiplient les garanties en faveur de la femme. Celle-ci ne doit pas souffrir
de la mauvaise gestion de son mari. Outre l’hypothèque légale qui lui est
reconnue, la femme mariée peut mettre fin aux pouvoirs de gestion de son
1
Sur le règlement des dettes entre époux, lire l’article 529 du code de la famille.
38

mari et solliciter la séparation judiciaire des biens ou le changement du


régime matrimonial ».

DEUXIEME PARTIE :
LES SUCCESSIONS

INTRODUCTION

 Définition de la succession
39

En droit civil, succéder signifie remplacer une personne à la tête de ces


biens. On peut la remplacer à la tête de tous ses biens (héritier universel),
ou seulement de certains d’entre eux (héritier à titre universel)(1).

On peut la remplace entre vifs (à la suite d’une vente) ou pour cause de


mort, c'est-à -dire par suite de la mort de la personne qu’on remplace.

Quand on parle de succession tout court, on entend par là le remplacement


à titre universel pour cause de mort. Le mot succession, désigne aussi par
dérivation, ensemble des biens ainsi recueilli par le successeur ou héritier.

Les biens se transmettent, pour cause de mort, de trois manières en vertu


de la loi ou par testament ou par contrat.

 Composition de la succession

Les successions sont considérées comme mode d’acquisition de la


propriété(2). Cette conception souligne le caractère exclusivement
patrimonial de la succession. Quiconque recueille une succession ne
recueille par-là que des biens au sens économique du terme.

La succession comprend les biens et dettes du défunt au moment du décès.


Ce sont tout d’abord les biens mobiliers et tous les biens immobiliers que le
défunt possédait au moment du décès. La succession comprend encore
toutes les donations que le défunt a faites de son vivant. La succession ne
comprend pas seulement des biens. On peut également y trouver des dettes,
il arriver parfois que le montant des dettes dépasse celui des biens de telle
sorte qu’il voudrait peut être mieux renoncé à l’héritage.

 Prérogatives de la parenté

Le défunt laisse parfois d’autre valeurs encore que des biens au sens
économique. Ce sont des droits exclusivement attachés à la personne.

Par exemple : les actions en contestation d’état, le droit de décider si son


œuvre peut être publiée, règlement des funérailles, succession au pouvoir à
la dignité au trô ne.

1
Dekkers, Op.cit, p.251, n°390. Voir aussi Mupila Ndjike, Les succession en droit congolais, Kinshasa,
Pax. Congo, 2003, J. Yav Katshung, Les successions en droit congolais, New Voices Publishing, 2008.
2
Article 40 de la loi foncière  « La propriété des biens s’acquiert et se transmet par donation entre
vifs, par testament, par succession et par convention.
40

Ces prérogatives appartiennent aux héritiers du sang et au conjoint


survivant. C’est ce que le professeur TSHIBANGU TSHIASU KALALA appelle
la succession au sens sociologique. La succession sociologique est accueillie
par un seul héritier qui vient en ordre utile dans la hiérarchie familiale(1).

 Ouverture de la succession

L’on appelle ouverture d’une succession, le fait qui entraine la dévolution de


biens d’une personne à ses héritiers. Ce fait est le décès du de cujus. Il se
prouve en principe, par l’acte de décès. Dès l’ouverture de la succession, le
patrimoine du défunt se transmet de plein droit à ses héritiers (art. 756).

C’est donc à l’ouverture de la succession qu’il faut se placer pour


déterminer la vocation et la capacité des héritiers à recueillir la succession.

Dès l’ouverture de la succession, court le délai accordé à l’héritier pour


opter entre l’acceptation et la renonciation (art. 801). C’est à ce moment
encore que commence l’indivision entre les successeurs et que remontera
plus tard l’effet rétroactif du partage.

 Lien d’ouverture de la succession

La succession s’ouvre au domicile du défunt ou à sa principale résidence


(art. 755). Ce lieu permet de déterminer le tribunal compétent pour
connaitre des contestations relatives à la succession notamment les
problèmes de compétence de liquidation, de conseil de famille, d’investiture
des biens immobiliers.

 Terminologie

Le terme héritier peut être compris au sens large, successeur universel ou à


titre universel, sans distinction entre le successeur appelé par la loi et le
successeur institué par le défunt. On appelle de cujus la personne décédée.

 Source du droit des successions

Le droit de succession est organisé actuellement par le code de la famille. La


volonté du législateur de 1987 est d’assurer la protection des enfants et du
conjoint survivant. Le code de la famille s’est écarté quelque peu des
1
F. Tshibangu Tshiasu Kalala, Droit civil, Régime matrimoniaux, succession et libéralités, 2ème éd,
Kinshasa, CADICEC, 2006.
41

coutumes pour faire droit aux impératifs du développement et de


l’évolution(1). Ce mouvement en faveur des enfants a été annoncé depuis la
circulaire du gouverneur général du 10 avril 1923 relative aux successions
indigènes (2) et du décret du 10 février 1953 relatif à la succession des
congolais à la propriété immobilière individuelle(3).

CHAPITRE PRELIMINAIRE : GENERALITES

SECTION 1 : POURQUOI-Y-A-T-IL UN PROBLEME DE SUCCESSIONS

Pourquoi un problème de succession se pose-t-il en tant que mode de


transmission des biens délaissés par un défunt ? Comment ce problème se
pose-t-il ?

- Remarquons tout d’abord que le problème de la succession n’existe pas


dans un régime de propriété collective. Cette collectivité est propriétaire
des biens. Le chef du groupe ne fait qu’en diriger l’utilisation et la gestion.
Son décès laisse vacante la place du directeur de la gestion des biens du
groupe.

- Il faut un amade de propriété privée ou individuelle pour qu’il y ait le


problème d’une éventuelle transmission.

- La notion de transmission implique l’existence de quelque chose qui ne


s’éteint pas et qui est l’objet de la transmission. Or par le décès du sujet de
droit, tous les droits subjectifs tant patrimoniaux qu’extrapatrimoniaux
s’éteignent. Les prérogatives reconnues au sujet de droit qui sont les droits
subjectifs devraient donc logiquement prendre fin avec le décès du sujet de
droit. Il ne peut y avoir dès lors transmission de quelque chose qui s’éteint.

- La stricte logique amène donc à la conclusion que les droits patrimoniaux


prennent fin avec la mort et que tous les biens du défunt deviennent à ce
moment des biens sans maitre. Certains vivants se les approprièrent par un
mode originaire d’acquisition de la propriété, l’occupation.

1
Voir exposés des motifs du code de la famille.
2
Codes et lois du Congo belge, Larcier, Bruxelles, 1960, p. 216.
3
Codes et lois du Congo belge, I, p. 208 à 210, devient actuellement abrogé par l’article 399 de la loi
du 10 1973
42

On voit tout de suite qu’en pratique une telle solution occasionnerait en


direction des mortuaires un rush d’amateur nombreux, avec les troubles
sociaux profonds qui en résulteraient.

Il apparait donc nécessaire que l’Etat intervienne afin de régler avant tout
décès le sort des biens des défunts d’une part et d’autre part, il y a lieu de
tenir compte de certains besoins humains imposées par des données
psychologiques et économiques. La prévoyance, par une personne de la
transmission de ses biens, après mort, à des personnes qui lui sont chères,
est un moteur de l’activité économique et de l’épargne. La suppression de
tout droit successoral sèmerait l’inquiétude chez les uns et l’égoïsme chez
les autres. Les répercussions de la succession se feront sentier même sur le
plan économique(1).

SECTION 2 : L’EVOLUTION DES DROITS DES SUCCESSIONS AU CONGO

Le code civil congolais n’a pas organisé certaines matières notamment les
successions. Le législateur colonial a estimé que, dans ce domaine,
extrêmement complexe, devant se reposer sur une longue tradition, il
importait, avant de légiférer, de posséder des éléments sur lesquels on
pouvait solidement construire. Il a préféré en conséquence laisser d’abord
agir les coutumes ainsi que la jurisprudence plutô t que de devoir agir par
tâ tonnement et retouches successives(2).

Dans les droits traditionnels, un grand principe domine la matière des


successions. Les biens de la famille restent dans la famille ; ils ne peuvent
pas être possédés par des étrangers. La transmission successorale s’opère
d’une manière différente selon que l’on considère le système patrilinéaire
ou le système matrilinéaire(3).

Dans le système patrilinéaire, ce sont les parents de la ligne paternelle, les


enfants et les petits enfants qui sont héritiers. Par contre, dans le système
matrilinéaire, la succession est dévolue aux parents de la ligne maternelle :
la mère, les frères et sœurs, les neveux et petits-enfants.

1
Voir Université libre de Bruxelles, les Successions, p. 6 et 7.
2
M. Vertraete, Droit civil du Congo belge, I, Bruxelles, Larcier, 1956, p. 21.
3
Kalala Tshibangu-Tshiasu wa Mwamba, Le régime successoral chez les Baluba et les Bakongo du
zaïre, Thèse, 1975, p. 47.
43

Dans les deux cas, l’ancien du groupe était chargé de partager, mieux de
gérer la succession entre les héritiers qui se répartissent comme suit : les
oncles, les frères et sœurs, les enfants et les petits enfants. Au début de la
colonisation, les successions ne soulevaient pas beaucoup de difficultés. Les
Congolais de l’époque n’avaient pas des biens importants. Les femmes et les
enfants constituaient leurs seules richesses, la propriété foncière étant
d’ailleurs collective. Ainsi, à la mort d’une personne, l’attention des oncles
et des frères et sœurs du de cujus était tournée vers la protection de ces
femmes et de ces enfants. Les oncles, les frères et sœurs du défunt ne
recueillaient pratiquement rien faute des biens à partager.

Les Congolais analysent la famille commune une institution fondamentale


composée uniquement des parents par le sang. Le conjoint survivant, la
veuve n’est pas membre de la famille par le sang. C’est un étranger. Son
attachement au groupe de la famille de son mari résulte seulement du
mariage qui n’a pas pour effet de l’y faire entrer. Sur base de ce principe,
dans la société traditionnelle, la veuve n’héritait pas des biens de son
conjoint.

La création des villes a provoqué de grandes mutations des personnes et


des biens. Beaucoup de Congolais ont quitté leurs milieux traditionnels
pour s’établir en milieu urbain. Dès lors, l’autonomie de la petite famille vis-
à -vis de la grande famille s’est renforcée.

La circulaire de 1923 et le décret de 1953 ont fixé comme suit les catégories
d’héritiers : les enfants du défunt et le conjoint survivent. L’accession de
notre pays à l’indépendance. C’est alors que la vocation héréditaire des
héritiers traditionnels surtout celle des oncles s’est élargie en ce sens qu’ils
recueillent désormais une partie de toute succession.

Dans la pratique, les héritiers traditionnels commettent actuellement


beaucoup d’abus en s’accaparant tous les biens du de cujus et tout en
oubliant le sort du conjoint survivant. Le code de la famille a réagi contre
cette situation.

CHAPITRE I. LA DEVOLUTION DES SUCCESSIONS

SECTION 1 : DEFINITION DE LA DEVOLUTION


44

La dévolution des successions est l’ensemble des règles qui déterminent les
personnes appelées à recueillir les biens du défunt(1).

La succession peut être :

- Légale, ou

- Testamentaire, ou

- Contractuelle.

§1. La succession légale

La succession légale est celle dans laquelle la loi désigne elle-même les
personnes appelées à recueillir les biens du défunt. Les règles de la
succession légale s’appliquent lorsque le défunt n’a pas fait de testament, ou
n’a prévu que partiellement la dévolution de ses biens. C’est pourquoi la
succession légale est le plus souvent désignée sous le nom de succession ad
intestat. Les successeurs sont appelés héritiers ou héritiers ab intestat. Les
héritiers intestat ont vocation à recueillir tantô t l’universalité du
patrimoine du de cujus ; ils sont alors ayant-cause universels, tantô t une
fraction seulement de ce patrimoine ; ce sont alors des ayant-cause à titre
universel.

§2. La succession testamentaire

La succession testamentaire est celle qui est réglée par la volonté du défunt
exprimée dans un testament valable. Les personnes désignées par le
testateur pour recevoir ses biens s’appelles légataires. Le légataire
universel est celui qui a vocation à recueillir l’ensemble du patrimoine. Le
légataire à titre universel est celui qui n’a vocation qu’à une quotte part du
patrimoine. Comme pour les héritiers ad intestat, on considère que les
légataires universels ou à titre universel sont les continuateurs de la
personne du défunt ; à ce titre, ils recueillent tout l’actif et tout le passif et
sont tenues au paiement des dettes. Enfin, le légataire particulier ne reçoit
qu’un ou plusieurs biens déterminés ; aussi n’est-il pas tenu au passif.

§3. La succession contractuelle

1
R. Dekkers, Op. cit, p. 261, n°404.
45

La succession contractuelle est celle qui nait d’une convention passée entre
une personne et celle qu’elle y désigne comme ses successeur. Ce mode de
transmission est en principe interdit car il va à l’encontre du principe de la
prohibition des pactes sur succession future. Cependant, la prohibition de la
succession contractuelle connait trois dérogations, que sont :

- L’institution contractuelle (art. 904)

- La donation-partage

- La substitution fidéicommissaire (art. 911).

SECTION 2 : APTITUDE REQUISE POUR SUCCEDER

§1. Notion

L’aptitude à succéder ne se confond pas avec la vocation héréditaire. La


vocation héréditaire d’une personne résulte du fait que cette personne
appartient à l’une des catégories de successibles admises par la loi.

L’aptitude à succéder s’entend de la réunion, dans le chef du successible de


certaines conditions préalables dont l’absence rendrait inopérant la
vocation la mieux établie, etc….

Il faut exister au moment de l’ouverture de la succession et ne pas être


indigne de succéder.

§2. Analyse des conditions

a. Existence

Pour succéder, il faut nécessairement exister à l’instant de l’ouverture du


décès du de cujus. Deux catégories de personnes se trouvent par-là exclues :

1° Celle qui n’existera que plus tard ;

2° Celle qui est déjà mortes.

1. Personnes qui n’existent pas encore

L’enfant qui n’est pas encore conçu est incapable de succéder, c'est-à -dire
celui qui n’est pas encore conçue au moment de l’ouverture de la
succession. Un individu conçu postérieurement au décès ne peut jamais
prétendre à la qualité d’héritier.
46

Il se dégage de ce qui précède que pour pouvoir succéder, il suffit d’être


conçu au moment du décès du de cujus sous la condition de naitre plus tard
vivant et viable. Ce n’est là que l’application du principe traditionnelle :
infans conceptus pro nato habetur, quoties de ejus commodis agitur.

Mais comment savoir si l’enfant qui nait après l’ouverture d’une succession
était déjà conçu au moment où cette succession s’est ouverte ? Le fardeau
de la preuve incombe à l’enfant ou à ses représentants conformément au
droit commun. La preuve de la conception se fera alors par tous les moyens.

2. Personnes qui n’existent plus

La mort met naturellement fin à tout ici-bas. Les personnes décédés avant le
de cujus ne peuvent donc jamais figurer parmi ses successeurs.

Le système de la représentation atténue les conséquences pratiques de ce


principe(1).

3. Hypothèse des comourants

Il peut arriver que des personnes, dont l’une était appelée à succéder à
l’autre ou qui avaient une vocation héréditaire réciproque, soient décédées
le même jour, à peu près en même temps. La détermination exacte de
l’ordre dans lequel les décès ont eu lieu est d’une importance considérable
sur l’acquisition et la transmission du droit héréditaire. En principe, cette
détermination de la priorité des décès n’est gouvernée par aucune règle
propre à la matière des successions. Il faut appliquer le droit commun, c'est-
à -dire, les modes ordinaires de preuve, témoins et présomptions humaines
tirées des circonstances de fait(2).

4. L’absent

L’absence, c'est-à -dire, celui dont l’existence est douteuse est inapte de
succéder. En effet, l’article 202 déclare : « s’il ouvre une succession à
laquelle est appelée une personne dont au moins la présomption d’absence
a été judiciairement constatée, elle est dévolue exclusivement à ceux qui
l’auraient recueillie à son défunt… ».

b. Conditions de la non-indignité du successible

1
Lire l’article 758 du code de la famille.
2
A défaut des modes de preuves ordinaires, lire présomptions légales en droits français et belge.
47

- Définition

L’indignité est une déchéance du droit héréditaire prononcée contre le


successeur qui s’est rendu coupable envers le défunt ou sa mémoire de
certains faits limitativement déterminées par la loi(1).

- Causes d’indignité

L’article 765 du code de la famille précise les causes d’indignité. Est


indiqués de succéder et comme te exclut de l’hérédité, l’héritier légal ou le
légataire :

 Qui, a été condamné pour avoir causé intentionnellement la mort ou


voulu attenter à la vie du de cujus ;
 Qui, a été condamné pour dénonciation calomnieuse ou faux témoignage,
lorsque cette dénonciation calomnieuse ou ce faux témoignage aurait pu
entrainer à l’encontre du de cujus, une condamnation à peine de cinq ans
de servitude pénale au moins ;
 Qui, du vivant du de cujus, a volontairement rompu les relations
parentales avec ce dernier, cette situation devant être prouvée devant le
tribunal de paix, le conseil de famille entendu ;
 Qui, au cours des soins à devoir apporter au de cujus lors de sa dernière
maladie, a délibérément négligé de les donner, alors qu’il y était
conformément à la loi ou à la coutume ;
 Qui, abusant de l’incapacité physique ou mentale du de cujus, excepté
dans les trois mois qui ont précédé son décès, tout ou partie de
l’héritage ;
 Qui, a intentionnellement détruit, fait disparaitre ou altéré le dernier
testament du de cujus sans l’assentiment de celui-ci ou qui s’est prévalu,
en connaissance de cause, d’un faux testament ou d’un testament devenu
sans valeur.

Ces causes d’indignité concernent aussi bien les héritiers légaux que les
héritiers testamentaires qualifiés légataires(2).

- Comment l’indignité est encourue ?

1
R. Dekkers, Op.cit, p. 265, n°408.
2
Exposés généraux… art.765.
48

L’indignité est-elle encourue de plein droit par cela seul que le successeur
s’est rendu coupable de l’un des faits déterminés par la loi ou bien faut-il
qu’elle soit prononcée par la justice à la requête des intéressés, c'est-à -dire
de ceux qui doivent profiter de la déchéance de l’indigne ?

L’opinion générale est que l’indignité n’existe et ne produit ses effets que
lorsqu’elle a été prononcée par une sentence judiciaire(1).

- L’effet de l’indignité

Le titre héréditaire de l’indignité est réputé non avenu. La sentence


d’indignité entraine une extinction rétroactive de son droit ; une extinction
en terme.

L’indigne est exclue de la succession depuis le moment où elle s’est ouverte.

En conséquence de son exclusion de la succession ab initio, il est tenu de


restituer non seulement tous les biens qu’il avait reçus mais encore tous les
fruits que ses biens ont produits entre ses mains. Il est traité comme un
possesseur de mauvaise foi.

Les enfants de l’indigne conservent le droit de venir à la succession dont


leur père est exclu à la condition qu’ils y soient appelés de leur propre chef
sans le secours de la représentation. Mais en pareil cas, leur père ne peut
pas réclamer sur les biens de cette succession le droit de jouissance légale,
qui est un des attributs de l’autorité parentale(2).

SECTION 3 : LES HERITIERS LEGAUX

§1. Principe du code de la famille. Importance de la succession

Le code de la famille prévoit des catégories d’héritiers en tenant compte de


l’importance de la succession(3).

Tout héritage qui ne dépasse pas 100.000 zaïres sera attribué


exclusivement aux enfants et à leurs descendants par voie de
représentation.

1
Voir position contraire, dans R. Dekkers, Op.cit, p. 266, n°410.
2
L. Bach, Op.cit, p. 242.
3
Lire article 786 du code de la famille.
49

Si l’héritage dépasse 100. 000 zaïres, les héritages légaux sont appelés à la
succession.

§2. Qui sont héritiers légaux ?

a. Catégories d’héritiers

Si le de cujus n’a pris aucune disposition, son héritage sera partagé entre les
personnes qui y ont droit à savoir :

 Les enfants du de cujus nés dans le mariage ou hors mariage mais affiliés
du vivant du de cujus et les enfants adoptifs (art. 758)
 Le conjoint survivant, les père et le mère, les frères et sœurs germains ou
consanguins ou utérins (art. 758, b)
 Les oncles et les tantes parentales ou maternels constituent la troisième
catégorie des héritiers de la succession (art. 758, c)
 A défaut d’héritiers de la troisième catégorie, tout autre parent ou allié
viendra à la succession pour autant que son lien de parenté ou d’alliance
soit régulièrement constaté par le tribunal de paix (art. 760)
 A défaut d’héritiers des quatre catégories, la succession est dévolue à
l’Etat. La situation créée par l’absence des successeurs s’appelle de
déshérence(1).

Comme on peut le constater, le code de la famille protège les enfants du de


cujus et le conjoint survivant. En effet, le mari et la femme édifient de leur
vivant un patrimoine commun.

En adoptant cet ordre des héritiers, le code de la famille s’est écarté des
coutumes. Cette réaction est le résultat du spectacle scandaleux et affligeant
auquel on assiste dans les villes et dans la plupart des centre urbains où la
mort du chef du ménage, la femme et les enfants sont jetés dans la rue
pendant que les oncles, les tantes, les neveux et les nièces se partagent
tranquillement les biens que les époux ont acquis en commun(2).
1
A défaut d’héritiers, la succession est acquise à l’Etat. On dit qu’elle est en déshérence. Il ne faut
pas confondre la succession en déshérence avec la succession vacante. Une succession est vivante
lorsqu’elle n’est acceptée par aucune des personnes désignées par la loi pour la recevoir pas même
par l’Etat. Il s’agit, le plus souvent d’une succession déficitaire ; c'est-à-dire dans laquelle le passif
dépasse l’actif. Ici, la succession n’est qu’en déshérence, c'est-à-dire qu’il n’existe pas d’héritiers au
degré successible pour la recueillir. Dans les deux cas, que la succession soit en déshérence ou
qu’elle soit vacante, c’est à l’administration des domaines qu’est confiée la liquidation de la
succession. L. Bach, Op.cit, pp. 174-175.
2
Lire exposé des motifs du code de la famille.
50

b. Jeu de la représentation

- Manière de succéder

On succède de deux manières, de son chef ou par représentation. On


succède de son chef lorsqu’on est appelé à la succession à raison de son
propre degré de parenté avec le défunt. Ce premier mode est la règle
générale. On succède par représentation quand on est appelé à la
succession à raison du degré de parenté d’une personne précédée à laquelle
on se trouve substitué par une faveur de la loi ; alors que, par son degré
propre, on ne succéderait pas du tout, ou on succéderait pour une portion
moindre.

- Défunt et motif

On peut donner à la représentation la définition suivante. C’est un bénéfice


légal par lequel les descendants d’un héritier présomptif précédé sont
appelés à prendre, dans la succession, la place que leur ascendant aurait eu
s’il avait survécu. Bref, c’est succéder à un degré proche que celui que l’on
occupe effectivement(1). C’est une subrogation successorale.

L’institution de la représentation est tout à fait en harmonie avec les


affections légitimes du défunt. Lorsque le législateur prend soin d’en limiter
l’application aux descendants d’enfants ou de frères et sœurs du défunt.
C’est par le fait que celui qui à perdu son fils ou sa fille, son frère ou sa sœur
reporte d’ailleurs sur leurs enfants toute l’affectation qu’il avait pour le père
ou la mère.

- Parents qui peuvent succéder par représentation

Si les enfants ou l’un des enfants du de cujus sont morts avant lui et qu’ils
ont laissé des descendants, ils sont représentés par ces derniers dans la
succession (art. 758, al 2).

Par ailleurs, lorsque les père et mère du de cujus ou l’un d’eux sont décédés
avant lui mais que leurs père et mère ou l’un d’eux sont encore en vie, ceux-
ci viennent à la succession en leur et place (art. 758, al 4). De même, lorsque
les frères et sœurs du de cujus ou l’un d’eux sont décédés avant lui mais

1
R. Dekkers, Op.cit, p.269, n°416.
51

qu’ils ont laissé des descendants, ils sont représentés par ceux-ci dans la
succession (art. 758, al 4).

Enfin, lorsque les oncles et tantes paternels ou maternels du de cujus ou


l’un d’eux sont décédés avant lui mais qu’ils ont laissé des descendants, ils
sont représentés par ceux-ci dans la succession (art. 758, al 7).

 Conditions de la représentation

Il faut que la personne ou les diverses personnes à représenter soient


prédécédées. On ne représente pas les personnes vivantes mais seulement
celles qui sont mortes avant l’ouverture de la succession.

Il faut que le représenté ait possédé une vocation à la succession s’il avait
survécu.

En enfin, il faut que le représentant ait vivant ou tout au moins conçu au


jour de l’ouverture de la succession, qu’il soit né vivant et viable et ne soit
pas indigne(1).

 Effet de la représentation

La représentation a pour effet capital : le représentant obtient la vocation


héréditaire que la représenté aurait eu qu’il avait survécu. Il acquiert toutes
les obligations qui avaient découlé de cette vocation.

§3. Droits des héritiers légaux

a. Héritage dépassant 100. 000 zaïres

Les héritiers de la première catégorie reçoivent les 3/4 de l’hérédité. Le


partage s’opère par égales portions et par représentation entre leurs
descendants (art. 759).

Ceux de la deuxième catégorie reçoivent le solde de l’hérédité, si les


héritiers de la première catégorie sont présents et l’hérédité totale, s’il n’y
en à pas (art. 760, al 1).

Les trois groupes reçoivent chacun un douzième de l’hérédité. S’il n’y a que
deux groupes, chaque groupe reçoit un huitième de l’hérédité. Enfin, s’il un
seul groupe est représenté, celui-ci reçoit un huitième de l’hérédité, le solde

1
R. Dekkers, Op.cit, p. 272, n°418 et ss.
52

étant dévolu aux héritiers de la première catégorie. Lorsque le de cujus ne


laisse pas d’héritiers de la première et de la deuxième catégorie, les oncles
et tantes paternels ou maternels sont appelés à la succession. Le partage
s’opère entre eux par égales portions (art. 761).

A défaut d’héritiers d la troisième catégorie, tout autre parent ou allié


viendra à la succession pour autant que son lien de parenté ou d’alliance
soit régulièrement constaté (art. 762).

b. Héritage ne dépassant pas 100. 000 zaïres

En ce qui concerne les petits héritages, ceux-ci sont attribués exclusivement


aux enfants et à leurs descendants par représentation (art. 786).

Dans le cas des petits héritages, chacun des enfants par ordre de
primogéniture, a la faculté de reprendre la succession en tout ou pour une
part supérieur à la quote-part légale.

Si cette faculté n’est pas exercée par l’ainé, elle peut l’être par le deuxième
et ainsi de suite.

Celui qui a exercé le droit de reprise est tenu d’assurer les charges prévues
par la coutume en faveur d’autres enfants. Le droit de reprise est
homologué par le tribunal de paix dans le ressort duquel la succession est
ouverte. La demande d’homologation du droit de reprise devra ê tre
introduite dans les trois mois après l’ouverture de la succession.

Ce droit de reprise est prévu pour maintenir l’unité du patrimoine, solution


conforme à la coutume. En outre, elle tend à éviter la division et
l’éparpillement d’un bien, ce qui serait nuisible sur le plan économique et
décourageant pour le développement de la petite et moyenne entreprise.

Ce droit de reprise n’est pas une délégation mais une faculté qui sera
surtout utile dans l’hypothèse où le patrimoine est constitué par un seul
immeuble. Il devra, par ailleurs, se concilier avec le droit spécial d’usufruit
du conjoint survivant, droit qui maintient aussi l’unité partielle du
patrimoine familial pour ce qui concerne la maison habitée par les époux et
les enfants en bas â ge. L’obligation d’aide qui incombe à l’héritier favorisé
c'est-à -dire celui qui a exercé le droit de reprise est conforme à l’esprit de la
coutume. Toutefois, l’art. 789 pourra être mis au point par le tribunal qui
53

tiendra compte dans chaque cas d’espèce, à l’occasion du droit de reprise,


des coutumes des parties et de l’équité(1).

Comme nous l’avons dit plus haut, la dévolution successorale peut se faire
conformément à la loi (succession ab intestat) ou selon la volonté du défunt
(testament). Il est donc question de voir les règles de forme organisant les
testaments.

SECTION 4 : DES REGLES DE FORME ORGANISANT LES TESTAMENTS

§1. Notion du testament

L’article 766 du code de la famille définit comme suit le testament : « un


acte personnel du cujus par lequel il dispose, le temps où il ne sera plus de
son patrimoine, le répartit, détermine ses héritiers et fixe les dispositions
tutélaires, funéraires ou de dernier volonté que la loi n’interdit pas et
auxquelles des effets juridiques sont attachés ».

Monsieur Dekkers définit le testament comme un écrit contenant


l’expression des dernières volontés de son auteur(2).

L’auteur d’un testament s’appelle testateur. Le testament peut contenir :

- Des legs ; c’est son objet principal (art. 775) ;

- Le choix d’un tuteur quand le testament émane du dernier mourant des


père et mère ;

- La nomination d’un exécuteur testamentaire (art. 778) ;

- Le partage de la succession entre les descendants ;

- La révocation des dispositions testamentaires antérieures (art. 775) ;

- L’exhérédation de ses héritiers ab intestat ;

- Les dispositions relatives aux funérailles.

§2. Caractères fondamentaux du testament

Le testament est un acte unilatéral, futur (quant à ses effets) personnel et


solennel.
11
Exposés généraux…art 787-789.
2
R. Dekkers, Op.cit, p. 658, n°1060.
54

a. Acte unilatéral

Le testament est un acte unilatéral puisqu’il dépend de la seule volonté du


testateur. Il s’oppose, à ce titre au contrat, qui exige le consentement du
débiteur et du créancier.

Certes, le testament ne produit d’effet que si l’héritier ou le légataire


l’accepte. Mais cette acceptation n’est pas requise ou la validité du
testament.

b. Acte futur

Le testament est un acte à effet futurs différés. Il n’entre en vigueur


qu’après la mort du testateur. Jusqu’à ce moment, il est moins un acte qu’un
projet. Le testament ne crée aucun droit, ni aucune obligation du vivant du
testateur. Le testateur peut toujours révoquer son testament, ou une
disposition contenue dans son testament en détruisant matérielle ou en
déchirant ou en biffant les énonciations de celui-ci (art. 775).

La révocation du testament tient à l’essence même de cet acte. Elle a pour


but d’assurer, jusqu’à la dernière minute, la liberté du testateur. Aussi un
testament conjonctif est interdit, c'est-à -dire, un testament ne pourra être
fait dans le même acte par deux ou plusieurs personnes.

c. Acte personnel

Le testament est un acte rigoureusement personnel. Voilà les rares actes de


la vie civile qui ne peuvent s’accomplir par mandataire.

d. Acte solennel

Le testament est un acte solennel en ce sens qu’il doit se faire dans les
formes prescrites par la loi à savoir la forme authentique, la forme
olographe et la forme orale.

§3. Formes de testament

La loi donne au testament le choix entre trois procédés : le testament


authentique, le testament olographe et le testament oral.

a. Testament authentique
55

Le testament authentique est celui qui est établi par le testateur soit devant
le notaire, soit devant l’officier de l’état civil de son domicile ou de sa
résidence.

Le testament authentique est prévu sous deux formes : l’acte notarié


traditionnel et l’option nouvelle d’un testament authentique devant
l’officier de l’état civil. Cette innovation a pour but de faciliter et partant de
favoriser la rédaction des testaments authentiques qui formellement sont
plus sû rs et donc moins contestés. De plus, les officiers de l’état civil se
trouvant au siège de la collectivité locale seront facilement accessibles.

- Testament authentique devant notaire

Le testament établi devant notaire est soumis au décret du 17 novembre


1953 modifié par l’ordonnance-loi n°66-334 du 9juin 1966 qui prévoit les
formalités pour les actes authentiques :

1. Le testament doit être écrit en un seul texte lisiblement, sans


abréviations, blanc, lacune ou intervalle. Les surcharges, renvois, addition
ou radiation sont réputés nuls s’ils ne sont paraphés par les témoins, le
notaire et les parties (art. 7, Ord.-L)

2. Le notaire doit s’abstenir de rédiger un testament dans lequel lui-même


aurait intérêt direct ou indirect (art. 12)

3. Le testament est rédigé en français ou en une autre langue que le français.


Dans ce cas, une traduction certifiée conforme par un traducteur juré est
jointe à la diligence des parties (art. 2)

4. Le testament doit être daté et signé par les parties, témoins si leur
concours est requis et le notaire (art. 6).

- Testament authentique établi devant l’officier de l’état civil

L’article 767 du code de la famille reconnait aussi le pouvoir à de rédiger le


testament authentique à l’officier de l’état civil.
56

Le texte ne précise pas les formalités que l’officier de l’état civil doit
respecter. Néanmoins, il déclare que si un testament authentique est établi
devant l’officier de l’état civil, celui-ci garde dans ses archives un des deux
originaux et inscrit en outre dans un registre spécial des testaments la date
à laquelle celui-ci a été établi ainsi que les noms et le domicile et la
résidence du testateur.

Le testament authentique fait foi de ses dispositions ou de son contenu


jusqu’à preuve littérale contraire. Il appartient à la personne qui se prévoit
d’un testament de prouver l’existence et le contenu de celui-ci. Il appartient
à celui qui conteste un testament connu d’apporter la ou les preuves de son
irrégularité ou de sa caducité.

- Avantages et inconvénients du testament authentique

Il présente l’avantage d’assurer la liberté du testateur, la conservation de


l’acte, la précision du langage et sa production au moment du décès. En
outre, il peut être fait paru une personne ne sachant pas écrire. Cependant,
il présente l’inconvénient de ne pas être secret et d’entrainer des frais dès
sa rédaction(1).

b. Testament olographe

- Définition

Le testament olographe est celui qui est écrit en entier, daté et signé de la
main du testateur (art. 768). C’est la forme de testament la plus simple et la
plus répandue et le plus commode. Elle peut être employée en tout temps et
en tout lieu, sans que testateur ait besoin du concours de qui ce soit.

Le testament olographe demande certaines précautions quant aux


conditions de validité.

- Raisons d’être des conditions

1
L. Bach, Op.cit, p.189.
57

Pourquoi la loi ne se contente-t-elle pas d’un écrit quelconque ? Pourquoi,


exige-t-elle en outre l’écriture en entier, la date et la signature ? L’exigence
de la signature va de soi. Elle répond, dans le testament olographe, aux
mêmes préoccupations que dans les autres actes sous seing privé  : garantir
la provenance de l’acte, l’appropriation du texte par l’auteur.

L’écriture en entier de la main du testateur a pour but d’assurer la fidélité


du testament quant à son contenu. Le mélange d’écriture fait craindre que
le testateur n’ait subi une influence étrangère. L’écriture en entier de sa
main est la garantie que l’acte est l’œuvre de sa seule volonté. Un seul mot
qui serait écrit d’une main étrangère rendrait le testament nul quand même
ce mot soit superflu dans le testament.

Quant à la mention de la date, elle remplit, les fonctions ci-après : elle


permet de distinguer le testament d’un avant-projet qu’on laisse s’habitude
sans date ; de classer des testaments successifs, le dernier révoquant les
précédents. La date permet de vérifier si le testateur était capable à
l’époque où le testament a été fait.

En disant que le testament doit être daté, la loi veut dire qu’il doit contenir
l’indication précise des jour, mois et année ou il a été signé(1).

- Analyse des conditions de l’écriture

Le testament olographe ne sera point valable, s’il n’est écrit en entier de la


main du testateur (art. 768). Néanmoins, l’article 769 du code de la famille
précise que le testament olographe peut être écrit à la machine par le
testateur à condition que sur chacune des feuilles et ce, à peine de nullité, le
testateur indique par une mention manuscrite cette circonstance et qu’il
date et signe le testament de sa main.

Par ailleurs, si une personne ne sait pas écrire ou se trouve dans l’incapacité
physique de rédiger ou de signer un testament, les formes prescrites aux
articles 768 et 769 et dressées par un tiers seront admises pour autant que
l’officier de l’état civil du lieu de la rédaction du testament légalise le
testament ainsi rédigé en présence du testateur (art. 770).

1
R. Dekkers, Op.cit, p. 674, n°1088.
58

Dès qu’un écrit émane en entier de la main du testateur, il peut contenir un


testament quelle que soit la nature ou la forme de cet écrit, une lettre
missive, un carnet, un livre de compte, un texte écrit sur un linge,…

Les altérations au testament par d’autres que le testateur a pour effet


d’annuler le testament.

- De la signature

La signature est un trait habituel, arbitrairement choisi par son auteur et


reproduisant son nom. Elle sert d’éléments d’identification de l’auteur d’un
texte. Elle signifie que l’auteur s’approprie le contenu du texte.

La signature doit se détacher du corps de l’acte. Elle se place normalement à


la fin pour certifier le contenu de ce qui précède. Mais la jurisprudence fait
preuve d’une large tolérance. Elle admet la signature en tête, en marge,
après un blanc de plusieurs lignes, sur l’enveloppe même.

- De la date

La date comprend la mention du jour, du mois et de l’année, celle de l’heure


ou du lieu n’est pas nécessaire. La date doit être écrite de la main du
testateur.

L’emplacement de la date en tête, en marge, à la fin, sur l’enveloppe,


importe peu.

Un testament olographe non daté n’a aucune valeur. Et sa nullité ne saurait


être rachetée, si même on pouvait déterminer la date exacte à l’aide
d’autres éléments(1).

- Conservation du testament olographe

Le code de la famille ne parle pas de la conservation du testament


olographe. Avant la mort, il incombe au testateur lui-même de prendre ses
précautions.

- Force probante du testament olographe

Le testament olographe est un acte sous seing privé. Celui auquel on


l’oppose est en droit de dire qu’il reconnait ou non l’écriture et la signature.

1
R. Dekkers, Op.cit, p. 679, n°1094.
59

Les héritiers ou les ayants-cause peuvent déclarer qu’ils ne reconnaissent


pas l’écriture ou la signature de leur auteur. Dans ce cas, la vérification
d’écriture et de signature est ordonnée.

En ce qui concerne la date du testament, il faut retenir que celui-ci fait foi de
sa date si l’écriture se révèle reconnue ou vérifiée.

- Avantages et inconvénient du testament olographe

Les avantages de cette forme de testament sont les suivants :

 Le testament olographe présente l’avantage d’être facile à établir ;


 D’être facile à révoquer. Il suffit de détruire la feuille de papier qui le
contient ou d’en confectionner un autre qui annule le précédent ;
 Il peut rester secret ;
 Il n’entraine aucun frais, du moins jusqu’à son ouverture par le notaire.
Mais le testament olographe présente aussi des inconvénients :
 Etant rédigé, hors la présente d’un notaire, il laisse le testateur exposé à
l’influence des tiers, et, par conséquent, l’héritage exposé à une
éventuelle captation ;
 Par ailleurs, le testament olographe est exposé aux risques de destruction
accidentelle ou volontaire de la part de ceux qui seraient exhérédés, ou
s’estimeraient insuffisamment avantagés ;
 Enfin, il est exposé au risque de ne pas être connu au moment de décès(1).

c. Testament oral

- Définition

Le testament oral est celui qui est fait verbalement par une personne
sentant sa mort imminente et en présence d’au moins deux témoins
majeurs (art. 771). L’article 771 qui organise la possibilité d’un testament
oral au moment proche de la mort tout en limitant les points sur lesquels il
peut s’exercer permet au de cujus d’assurer surtout une modification des
règles successorales en matière de partage et d’organisation de la tutelle de
ses enfants mineurs. Nonobstant le danger et l’imprécision que revêt
nécessairement un testament oral, il était nécessaire de le prévoir et même

1
L. Bach, Op.cit, p.188.
60

de lui conférer de larges pouvoirs vu qu’il y a encore beaucoup


d’analphabètes(2).

- Contenu du testament oral

Dans le testament oral, le testament ne peut que :

 Formuler des prescriptions relatives aux funérailles ;


 Faire des legs particuliers dont le montant ne peut dépasser 10. 000
zaïres pour chaque legs ;
 Prendre des dispositions relatives à la tutelle de ses enfants mineurs ;
 Assurer en cas d’héritage inférieur à 100. 000 zaïres, l’exercice du droit
de reprise ;
 Fixer entre les héritiers de la première et de la deuxième catégorie une
règle de partage différente de celle du partage égal prescrit par la loi en
cas de succession ab intestat.

Toute autre disposition prise dans un testament oral est nulle et les legs
supérieurs à 10. 000 zaïres sont réduits à cette somme.

§4. Exécution testamentaires

Le testateur pourra désigner un ou plusieurs exécuteurs testamentaires qui


seront chargés d’assurer la liquidation de la succession conformément ceux
dispositions testamentaires et à défaut conformément aux dispositions
légales (art. 778).

CHAPITRE II. LES REGLES RELATIVES A LA RESERVE SUCCESSORALE

SECTION 1 : NOTIONS DE RESERVE HEREDITAIRE ET DE QUOTITE


DISPONIBLE

§1. Réserve héréditaire

Le rédacteur du code de la famille qui organise la matière n’en donne pas


une définition. Il s’est limité à m’énoncer dans la loi. Techniquement, le
Professeur BOMPAKA NKEYI définit la reserve successorale comme une
fraction de la succession dont personne ne peut disposer à titre gratuit au
détriment de certains héritiers, appelés réservataires.

2
Exposés généraux …art. 771.
61

C’est un instrument de protection familiale. Elle est organisée pour


empêcher une partie du patrimoine de sortir de la famille du défunt en
limitant la liberté pour celui-ci de gratifier des étrangers à la famille ; elle
est un instrument d’égalité entre les héritiers ; enfin elle limite aussi le droit
de disposer à titre gratuit à l’intérieur de la famille. Elle évite que certains
héritiers soient favorisés au détriment des autres(1).

La réserve se conçoit comme une portion du patrimoine d’une personne


dont elle ne peut pas disposer par donation ou testament en présence
d’héritiers réservataires ascendants ou descendants.

Il se dégage de ces définitions que la liberté de disposer de ses biens


reconnue à tout propriétaire se trouve limitée à une quote-part, qui ne peut
être entamée par des libéralités exagérées. Le législateur se méfie des
libéralités car elles appauvrissent la famille. Mais il n’a pas voulu les
prohiber.

§2. Quotité disponible

Le législateur s’est limitée à énoncer la matière de la quotité disponible et


n’a pas donné une définition précise. La portion disponible est la partie du
patrimoine dont le titulaire peut disposer comme il l’entend(2).

SECTION 2 : LES BENEFICIAIRES DE LA RESERVE HEREDITAIRES

§1. Héritiers de la première catégorie

Dans son article 852, le code de la famille attribue une réserve aux héritiers
de la première catégorie :

« Les héritiers réservataires comprenne les enfants nés pendant le mariage


ou hors mariage, les enfants adoptifs ainsi que leurs descendants, à quelque
degré que ce soit ; ceux-ci ne sont comptés que pour l’enfant qu’ils
représentent dans la succession du disposant ».

Par ailleurs, l’article 759 du code de la famille précise :

« Les héritiers de la première catégorie reçoivent les trois quarts de


l’hérédité. Le partage s’opère par égales portions entre eux et par
représentation entre leurs descendants ».
1
R. Dekkers, Op.cit, p.795, n°1320.
2
R. Dekkers, Op.cit, p.795, n°1320.
62

Enfin, l’article 779 stipule : « la quote-part revenant aux héritiers de la


première catégorie ne peut pas être entamée par les dispositions
testamentaires du de cujus établies en faveur d’héritiers des autres
catégories ou d’autres légataires universels ou particuliers ».

Ces articles sont importants car ils respectent la tendance actuelle de


favoriser avant tout et surtout les enfants, c'est-à -dire, les enfants du de
cujus nés dans le mariage et ceux nés hors mariage mais affiliés de son
vivant ainsi que les enfants qu’il a adoptés(1).

Les enfants adoptifs apparaissent comme les plus favorisés du code de la


famille, en ce sens que d’une part, ils sont héritiers réservataires dans leur
famille adoptive, venant en concours avec les enfants nés dans celle-ci
(art.779 et 852, C.F) et que d’autre part, ils conservent eux et leurs
descendants tous leurs droits héréditaires dans leur famille d’origine
(art.690, al 1).

Il s’ensuit que le code de la famille privilégie les enfants adoptés au


détriment des enfants nés dans le mariage et rompt ainsi l’égalité qui doit
exister entre les héritiers de la première catégorie.

§2. Héritiers réservataires de la 2ème catégorie

Les héritiers de la 2ème catégorie sont aussi héritier réservataires. Mais ils le
seront uniquement à défaut d’héritiers de la première catégorie.

En effet, l’article 853 du code de la famille stipule : « Si le disposant n’a pas
d’enfants, la quotité disponible ne peut excéder la moitié des biens, s’il y a
des héritiers d’au moins deux groupes de la deuxième catégorie ou les deux
tiers, s’ils n’y a que d’un seul groupe »

§3. Droits spéciaux des héritiers de la première catégorie

Les héritiers réservataires de la première catégorie bénéficient également


d’une réserve en nature prévue par l’article 780 du code de la famille qui
décide que lorsque la succession comporte une maison, celle-ci est
exclusivement attribuée aux héritiers de la première catégorie.

Lorsqu’elle comporte plusieurs maisons dit l’alinéa 2, l’une d’elles est


exclusivement attribuée aux héritiers de la première catégorie.
1
Exposés généraux…art. 779.
63

L’aliénation éventuelle de cette maison ne peut être opérée qu’avec l’accord


unanime des enfants tous devenus majeurs et à condition que l’usufruit
prévu au bénéfice du conjoint survivant ait cessé d’exister (art. 780 al 3).

§4. Droits du conjoint survivant

Les auteurs du code de la famille ont tout mis en œuvre pour assurer la
protection du conjoint survivant. Le conjoint survivant est retenu comme
héritier de la deuxième catégorie. Il est héritier réservataire.

L’article 785 du code de la famille lui accorde certains droits spéciaux :

 Le conjoint survivant a l’usufruit de la maison habitée par les époux et


des meubles meublant ;
 Il a en outre droit à la moitié d’usufruit des terres attenantes que
l’occupant de la maison exploitait personnellement pour son propre
compte ainsi que du fonds de commerce y afférent. L’autre moitié
revenant aux héritiers de la première catégorie ;
 Enfin, l’usufruit du conjoint survivant cesse par le convole de ce dernier
ou sa méconduite dans la maison conjugale, s’il existe des héritiers de la
première ou de deuxième catégorie.

Lors de la rédaction du code de la famille, il a été constaté que ce droit


spécial accordé au conjoint suivant a reçu une complète adhésion. De plus,
on a estimé que le droit d’usufruit devait être préféré au droit d’occupation
de la maison parce que, en réalité, en dehors des dispositions relatives aux
régimes matrimoniaux, le sort du conjoint survivant qui sera plus souvent
la même que le veuf, devrait être efficacement protégé par la loi d’autant
plus que l’opinion publique congolaise souhaite de plus en plus
l’amélioration des prérogatives du conjoint survivant lors du décès. Par
ailleurs, par l’exercice de ce droit, on lui reconnait une communauté de
jouissance sur la maison familiale acquise durant le mariage de deux
conjoints et pour laquelle il a apporté son concours(1).

SECTION 3 : LES PRINCIPES FONDAMENTAUX DE LA RESERVE

§1. Principe

1
Exposés généraux… art 785.
64

La réserve est gouvernée par le principe ci-après. Elle est une part de la
succession légale . Elle ne protège les héritiers réservataires que contre les
libéralités (donation ou legs). La loi se désintéresse du sort du disponible.

§2. La réserve, une part de la succession légale et un droit

L’héritier réservataire ne doit pas solliciter la réserve. Il y a droit par le fait


qu’il accepte la succession à laquelle la loi l’appelle. Cela ne signifie
d’ailleurs pas qu’il ne puisse y renoncer. La réserve s’impose au de cujus,
mais nullement aux héritiers qu’elle protège. Certes la renonciation ne peut
intervenir avant le décès, car on ne peut renoncer à la succession d’un
homme vivant.

La réserve est un droit propre. C’est de la loi que le réservataire tient son
droit à la réserve non du défunt. Bien mieux, en invoquant la réserve,
l’héritier réservataire s’oppose au défunt qui l’a compromise.

§3. La réserve est un droit en nature

L’héritier réservataire étant un héritier légal a droit à sa part constituée ou


divers liens qui composent la succession. Ainsi, le testateur ne peut
remplacer la réserve par une créance.

§4. La réserve est un droit intangible

Le disposant ne peut toucher à la réserve, non seulement le disposant ne


peut faire de libéralités qui diminuent la réserve, mais encore il ne peut
directement ou indirectement compromettre les droits des réservataires
sur la réserve supposée entière.

La réserve est intangible. Elle est d’ordre public. Ainsi, sont nulles les
clauses d’insaisissabilité insérées dans les donations ou les legs(1).

SECTION 4 : LIBERTE D’ATTRIBUTION DU DISPONIBLE

§1. Principe

Du disponible, le de cujus fait ce qu’il veut. Il peut l’épuiser en libéralités de


toute nature, en vifs ou pour cause de mort. C’est en cela que cette portion
de la succession est véritablement disponible. Les libéralités auxquelles le
disposant consacre son disponible, il peut les faire même à ses héritiers
1
R.Dekkers, Op.cit, p. 806, n°1340.
65

réservataires, ou à l’un d’eux. Rien n’interdit de le disponible avec le


réserve. La seule chose que la loi interdit est de méconnaitre la réserve.

§2. Importance de la quotité disponible

La quotité disponible varie selon les héritiers légaux en présence.

a. Quotité disponible en présence des héritiers de la première


catégorie

L’article 781 du code de la famille dispose : « Lorsque les biens dont le père
ou la mère a disposé dépassent en valeur les trois quarts de la succession
qui revient à ses enfants, les parts testamentaires seront réduites à la
quotité disponible ».

Il s’ensuit que la quotité disponible en présence des héritiers réservataires


est au quart de la succession. Par ailleurs, l’article 851 de code de la famille
stipule que : « La portion de biens disponible soit par acte entre vifs soit par
testament est la portion des biens du disposant ».

b. Quotité disponible en présence des héritiers de la deuxième


catégorie

Les héritiers de la deuxième catégorie sont aussi héritiers réservataires.


Mais ils le seront uniquement à défaut d’héritiers de la première catégorie.

En effet, l’article 782 du code de la famille dispose que : « Si le testateur n’a
pas d’enfant, la quotité disponible ne peut excéder la moitié des biens, s’il y
a au moins deux groupes de la deuxième catégorie à se présenter à la
succession et les deux tiers, s’il n’y a qu’un seul. La réduction se fera entre
les légataires proportionnellement aux legs dont ils ont été déclarés
bénéficiaires ».

C. Défaut d’héritiers des deux premières catégories

A défaut d’héritiers des deux premières catégories, les libéralités par acte
entre vifs ou testamentaires peuvent épuiser la totalité des biens (art. 854).

SECTION 5 : MECANISME DE LA RESERVE

Le fonctionnement de la réserve se décompose en trois questions :


66

 La reconstitution du patrimoine du défunt en vue du calcul de la réserve


et de la masse disponible ;
 L’imputation des libéralités sur la réserve ou sur la quotité disponible ;
 La réduction des libéralités qui dépasserait le disponible(1).

§1. Reconstitution du patrimoine du défunt

La reconstitution du patrimoine du défunt, au jour du décès, en vue du


calcul de la réserve et du disponible, se fait en trois temps. L’on détermine
d’abord les biens existants au décès (art. 869). L’on y joint les biens donnés
entre vifs. L’on déduit de la masse ainsi détenue les dettes. C’est là une
opération complexe, qui comprend l’estimation des biens existants au décès
du de cujus et des biens donnés entre vifs.

a. Biens existant

Dans la formation de la masse, il faut tenir compte :

 De tous les biens délaissés par le défunt au jour du décès : meubles,


immeubles, créance de toute nature ;
 Des biens légués : ces biens existent au jour du décès dans le patrimoine
du défunt ;
 Les fruits de tous ces biens, échus avant l’ouverture de la succession.

La masse ne comprend pas les droits viagers (usufruit, rente viagère,


pension alimentaire, pension frais retraite) qui s’éteignent au décès du
bénéficiaire, les fruits postérieures au décès. Ces biens existant doivent être
estimés d’après leur état et leur valeur au jour de l’ouverture de la
succession. Il n’y a pas à tenir compte des augmentations ou des
diminutions de valeur qu’ils ont pu subir depuis le décès par quelque cause
que ce soit. Il est clair qu’on doit négliger les créances devenues
irrécouvrables par l’insolvabilité absolue.

b. Biens donnés

Les biens que le défunt avait donnés par acte entre vifs entrent aussi en
compte. Car il s’agit précisément de savoir s’il a pu les donner et à
concurrence de quel montant. Il faut donc inclure dans la masse
indistinctement :

1
R. Dekkers, Op.cit, p. 812, n°139.
67

 Les donations par acte notarié ;


 Les donations indirectes ;
 Les donations déguisées ;
 Les avantages indirects ;
 Les dons manuels ;
 Les donations partages ;
 Les donations faites à des réservataires.

L’estimation des biens meubles et immeubles doit se faire conformément à


l’article 869 alinéa 2 stipule : « Après la déduction des dettes, la masse
comprend les biens dont le défunt a disposé entre vifs, d’après leur état à
l’époque des donations et leur valeur au temps du décès, sous réserve des
dispositions de l’article 865 ».

c. Dettes

Pour déterminer les montants respectifs de la réserve et du disponible, il


faut encore en déduire les dettes du défunt. En d’autres termes, la réserve et
le disponible ne se calculent que sur l’actif net.

§2. Imputation des libéralités sur la quotité disponible et sur la


réserve

a. Principe

Pour savoir si la quotité disponible a été dépassée, il faut recherche quelles


sont, parmi les libéralités du défunt, celles qui doivent s’imputer sur la
réserve et qui par conséquent ne la diminuent pas et celles qui doivent
s’imputer sur la quotité disponible et qui par conséquent doivent être
réduites si elles dépassent cette quotité.

Le principe est que toutes les libéralités du défunt s’imputent sur la quotité
disponible. Doivent seules s’imputer sur la réserve, les libéralités que le
défunt a faites sans dispense d’imputation à un réservataire qui accepte la
succession.

En effet, l’article 870 stipule : « Les diverses libéralités sont imputées, eu


égard à la qualité des héritiers, les unes sur la réserve, les autres sur la
quotité disponible ».
68

Le rapport et la réduction s’expliquent par le fait que certaines libéralités se


réduisent à une avance sur succession ; ce qu’on appelle un avancement
d’hoirie. Les libéralités au profit de successible doivent être en principe
rapportées à la succession du disposant.

b. Libéralités imputables sur la réserve

- Condition

Pour qu’une libéralité s’impute sur la réserve, il faut :

 Qu’elle soit faite à un héritier réservataire ;


 Qu’elle ne le dispense pas du rapport ;
 Qu’il accepte la succession.

La première condition n’appelle pas de commentaire.

- Libéralités non dispensées du rapport

Le rapport est la règle, la dispense de rapport l’exception. Du fait que la


libéralité ne constitue qu’une avance sur la succession, il résulte que
l’héritier ne peut cumuler la libéralité et la réserve. En effet, en ne
dispensant pas sa libéralité du rapport, le défunt a voulu maintenir l’égalité
entre les réservataires.

- Libéralités excédant la réserve

La libéralité faite au réservataire, sans dispense de rapport, doit donc


s’imputer sur sa réserve. L’excédent ne peut forcément se prendre sur la
réserve des autres, qui doit demeurer intacte, elle aussi. Il doit se prendre
sur le disponible aux dépens des autres donataires et légataires. La
libéralité sujette à rapports entre dans la masse à partager. Tous les
réservataires en auraient leur part.

- Réservataire renonçant

Pour que la libéralité faite à un réservataire s’impute sur la réserve, il faut,


non seulement qu’elle reste sujette à rapport, mais encore que le
réservataire accepte la succession ; car s’il y renonce, il est censé n’avoir
jamais été héritier. Il est assimilé à un étranger. Il n’a plus de réserve et
toutes les libéralités s’imputent sur le disponible.
69

- Réservataire indigne

Quand l’héritier réservataire est exclu de la succession comme indigène,


presque toujours les donations et les legs qu’il aurait reçus du défunt sont
révoqués. S’ils ne l’étaient pas, il faudrait les imputer sur le disponible,
l’héritier exclu n’ayant plus de réserve.

c. Imputation sur le disponible

Les disponibles faites à des étrangers à la succession s’imputent


naturellement sur le disponible. Les libéralités faites à des successibles. Les
libéralités faites à des successibles renonçant se rend étranger à la
succession et par là même à la réserve qui en fait partie. La donation faite à
un réservataire présomptif s’impute aussi sur le disponible, lorsque le
donataire est venu à mourir avant le donateur sans laisser d’enfant.

Doivent encore s’imputer sur le disponible, les libéralités faites par préciput
à un héritier réservataire.

§3. De l’action en réduction

a. Principe

on a dit que le droit à la réduction est pour l’héritier réservataire une arme
à la fois défensive en ce sens qu’il peut l’opposer aux donataires ou
légataires qui viennent lui demander l’exécution d’une disposition
entamant la réserve, offensive, en ce sens qu’il a une action contre le
donataire nanti pour le forcer à restituer ce qui lui a été donné au-delà de la
quotité disponible.

C’est l’action en réduction ou en retranchement comme le dit l’article 866


du code de la famille. On appelle réduction, l’anéantissement d’une
libéralité dans la mesure où elle excède la portion disponible(1).

b. Quant s’ouvre le droit à la réduction et à qui il appartient ?

- Ouverture du droit

La réserve &tant un droit de succession et la réduction n’étant que la


sanction de la réserve, il en résulte :

1
R. Dekkers, Op.cit, p. 831, n°1385.
70

1. Que le droit de demander la réduction ne peut prendre naissance qu’au


moment où s’ouvre le droit à la réserve elle-même, c'est-à -dire au décès
du disposant. Du vivant de celui-ci, ses réservataires n’ont qu’un droit
éventuel, c'est-à -dire une simple espérance ;
2. Qu’avant l’ouverture de la succession, les réservataires présomptifs ne
peuvent pas renoncer valablement au droit de demander la réduction des
donations qui porteraient atteinte à leur réserve.

- A qui appartient le droit à la réduction ?

La réduction ne s’opère pas de plein droit. Elle ne peut être demandée que
par ceux au profit desquels, est faite la réserve dit l’article 867. Celui-ci
stipule que : « L’action en réduction ou en retranchement n’appartient
qu’aux héritiers réservataires, à leurs héritiers ou ayant cause, à l’exclusion
des donataires, des légataires et des créanciers du défunt. Le droit de
demander la réduction est un droit pécuniaire qui n’est pas attaché
exclusivement à la personne des réservataires. Il est transmissibles à leurs
héritiers et aux autres ayants cause ».

Les héritiers réservataires qui demandent la réduction n’agissent point du


chef du défunt comme leurs représentants. Ils agissent de leur chef, en
vertu d’état de droit qui leur est propre.

- Ordre à suivre dans la réduction des dons

 Principe

Les legs doivent être réduits tous ensemble avant les donations entre vifs.
En effet, l’article 871 du code de la famille dispose que les donations entre
vifs ne peuvent être réduites qu’après avoir épuisé la valeur de tous les
biens compris dans les dispositions testamentaires.

Quand il y a lieu de réduire les donations entre vifs, il faut les réduire
successivement les unes après les autres, par ordre des dates, en
commençant par la dernière (art. 871 in fine).

Cette double règle est une conséquence du principe de l’irrévocabilité des


donations entre vifs : le donateur ne peut avoir un moyen indirect de ravir à
son donataire ce qu’il a donné pour en gratifier d’autres.

 Mode de la réduction
71

La réduction s’opère en nature et non en argent. Il n’y a pas à distinguer si la


donation a eu pour objet des meubles ou des immeubles.

Le réservataire peut donc exiger la restitution totale ou partielle de la chose


donnée.

 Conséquence de réduction quant aux actes de disposition du


donataire sur les biens donnés

Le code de la famille n’aborde pas cette question. En droit belge, le bien


revient à la succession libre de toutes les charges qui l’avaient grevé du chef
du donataire.

En cas d’aliénation à titre onéreux ou gratuit, si le donataire est solvable, les


réservataires doivent se contenter d’une somme d’argent représentative de
la valeur du bien donné de la portion de ce bien nécessaire pour compléter
leur réserve. C’est seulement lorsque le donataire est insolvable, hors d’état
de subir la réduction en argent que les héritiers exerceront, une action en
revendication contre le tiers acquéreur ou ses ayant-cause(1).

CHAPITRE III. LA TRANSMISSION DE LA SUCCESSION

SECTION 1 : POSSESSION DE LA SUCCESSION

§1. Saisine des héritiers

Lorsqu’une personne vient à décéder, la succession de cette personne est


ouverte (art. 756). Les droits et obligations du de cujus constituant
l’hérédité ( objet de la succesion) passent à ses héritiers (art. 756).

La saisine est l’investiture par le seul fait du décès de la possession de tous


les biens successoraux. Elle donne droit à la possession matérielle ainsi
qu’aux actions possessoires sans que l’hérédité saisi ait à faire le moindre

1
R. Dekkers, Op.cit, p. 842, n°1410.
72

acte d’appréhension. C'est-à -dire que la saisine concerne essentiellement


l’acquisition de la possession et non celle de la propriété(1).

Les principaux effets de la saisine sont :

L’hérédité saisie peut prendre possession des biens de la succession. Il peut


appréhender ces biens et se comporter sur eux comme un véritable
possesseur sans avoir besoin d’une autorisation quelconque.

L’hérédité saisi a qualité pour exercer les actions qui appartenaient au


défunt et pour être défendeur à celles que les tiers auraient eu contre le de
cujus et en particulier aux poursuites des créanciers de celle-ci(2).

§2. Caractère de la saisine

La saisine a les caractères suivants :

- Elle est individuelle. Elle ne profite qu’à ceux qui viennent en ordre utile à
la succession ;

- Elle est successive, en ce sens qu’à défaut des héritiers appelés au premier
rang, elle passe à ceux du rang subséquent. En vertu de la règle, le mort saisi
les vifs, ceux-ci doivent être considérés comme saisis dès le jour du décès ;

- Elle joue de plein droit, indépendamment de l’acceptation de la


succession. Cette acceptation fait acquérir non pas le droit à la possession
(la saisine), mais la propriété,

- Elle est indivisible. Elle porte sur toute la succession. L’héritier saisi peut
donc appréhender n’importe quel bien de la succession, sans que les tires
détenteurs puissent lui opposer l’existence d’autres héritiers saisis ;

- Elle est d’ordre public. En assurant la continuité dans la possession des


biens du défunt en déterminant à qui cette communauté profite, la saisine
prévient les troubles que l’appréhension des biens pourrait provoquer(3).

SECTION 2 : PETITION D’HEREDITE

§1. Notion

1
R. Dekkers, Op.cit, p.317, n°499, civil.
2
G. Marty et P. Raynaud, Droit, les successions et les libéralités, par P. Raynaud, Paris, Sirey,
1983 ,p.111.
3
R. Dekkers, Op.cit, p. 362, n°577.
73

Le code de la famille ne contient aucune disposition concernant la pétition


d’hérédité. Néanmoins, l’article 817 du code de la famille stipule : « Toutes
contestations d’ordre successoral sont de la compétence du tribunal de paix
lorsque l’héritage ne dépasse pas 100.000 zaïres et celle du tribunal de
Grande instance lorsque celui-ci dépasse ce montant… ».

La pétition d’hérédité est une action par laquelle une personne réclame la
reconnaissance de son droit héréditaires et en conséquence la restitution
de tout ou partie des biens du défunt, contre une personne qui, les détient
sans titre ou qui les possède illégalement(1).

§2. Comparaison avec la revendication

La pétition d’hérédité suppose que le demandeur conteste au défendeur la


qualité d’hérédité et demande la restitution des biens litigieux.

La revendication suppose que le défendeur ne conteste pas la qualité du


demandeur mais soutient que les biens dont la restitution lui est réclamée
ne dépendent de la succession. Dans la pétition de l’hérédité, le demandeur
ne doit justifier que sa qualité d’héritier. Dans la revendication, l’héritier
demandeur doit justifier que le défunt était propriétaire des choses
particulières en litige.

§3. Comparaison avec l’action en partage

Il y a action en partage quand l’un des successeurs du défunt demande sa


part divise et que son titre de successeur et le montant de sa part indivise
ne sont pas contestés par les défendeurs.

§4. Durée de la pétition d’hérédité

La pétition d’hérédité ne peut pas s’étendre par présomption extinctive,


conformément au principe que la propriété ne se perd par simple non
usage(2).

1
Idem.
2
Sur la controverse sur ce point, voir R. Dekkers, Op.cit, p. 368, n°588.
74

§5. Tribunal compétent et preuve de la qualité d’héritier

Le tribunal compétent est celui du domicile ou de la résidence du défunt


(art. 817). Devant ce tribunal, le demandeur devra établir sa parenté au
degré successible avec le de cujus ou sa qualité du conjoint survivant. Pour
le premier cas, il s’agit donc de dresser un arbre généalogique et de montrer
que le demandeur occupe dans cet ordre une place meilleure que celle de
son adversaire. Pour le second cas, c'est-à -dire, pour la qualité de conjoint
survivant, celle-ci prouve par l’acte de mariage (art. 436).

§6. Les résultats de l’action en pétition d’hérédité

a. Principe

Si le demandeur triomphe dans son action, sa qualité d’héritier sera établie


et il pourra exercer les droits qui en découlent. Mais, il y aura peut-être lieu
à un règlement de comptes entre les parties voire avec les tiers qui auraient
pu entrer temps contracter avec le faux héritier évincé.

b. Les rapports de l’héritier véritable et du faux héritier évincé

si le faux héritier détenait les biens et la succession, il doit les restituer,


ainsi que leurs fruits, s’il était de mauvaise foi. Dans ce dernier cas, il devra
en outre indemniser l’héritier véritable des détériorations subies par les
biens restitués même si elles ne lui étaient pas imputables.

Le défendeur de bonne foi garderait les fruits acquis et ne serait


responsable des dégradations que si elles lui avaient profité. De son cô té,
l’héritier qui a triomphé à la pétition d’hérédité devrait indemniser son
adversaire si celle-ci avait fait des impenses et s’il avait acquitté des dettes
de la succession.

c. Les rapport de l’héritier véritable et des tiers ayant traité avec le


faux héritier évincé

Si avant son éviction, le faux héritier avait traité avec des tiers et leur avait
consenti des droits sur la succession ou sur un élément de celle-ci, ces
droits seront remis nécessairement en question puisqu’ils ont été acquis,
d’une personne dont il est jugé qu’elle ne pouvait les consentir ; l’héritier
véritable ne saurait souffrir des actes de celui qui avait usurpé la succession
et celle-ci doit être retrouvée intacte par lui.
75

Mais on ne saurait négliger les intérêts des tiers qui ont pu contracter de
bonne foi avec quelqu’un qu’ils croyaient héritier. Il faut concilier des
intérêts contraires mais qui peuvent être également respectables.

Le conflit peut être réglé si le tiers a acquis un meuble corporel de la


succession. Ce titre est protégé par le principe en fait de meuble de bonne
foi possession vaut titre.

Pour les autres cas, la jurisprudence soutient la validité des actes de


l’héritier apparent. Les tiers qui ont traité de bonne foi avec quelqu’un qui
paraissait héritier ne peuvent être inquiétés par l’héritier véritable.

SECTION 3 : PROPRIETE DE LA SUCCESSION

§1. Principe

Il ne suffit pas du décès pour conférer la propriété de la succession à ceux


que la loi y appelle. Il faut encore que ceux-ci l’acceptent (art. 800).

L’ouverture de la succession ne lui donne qu’un droit à la propriété, c’est-à -


dire, le droit de se porte propriétaire par préférence à tout autre. La mort
donne à l’héritier placé en ordre utile, une vocation successorale. Il ne
dépend plus que de lui de devenir successeur, en acceptant la succession.
C’est ce qu’on appelle le droit héréditaire.

Le droit héréditaire appartient à quiconque appelé à une succession soit par


la loi soit par le testament.

§2. Option du successible

a. Contenu

L’ouverture de la succession investit le successible d’une option (art. 814).


L’acceptation rend le successible propriétaire de tout l’actif et débiteur de
tout le passif. Elle ne présente aucun danger quand l’actif excède le passif(1).

La renonciation rend le successible entièrement étranger à la succession


(actif et passif). Elle le dispense de rapporter les libéralités qu’il aurait
reçues du défunt. Il est vrai qu’elles restent sujettes à réduction.

1
Le code de la famille ne parle pas de l’acceptation sous bénéfice d’inventaire.
76

Le successible peut transmettre son droit héréditaire entre vifs (vente ou


donation). Au contraire quand un successeur vient à mourir sans avoir levé
l’option sur la succession, son droit héréditaire est transmis à ses propres
successibles comme un élément de sa succession.

b. Caractères de l’option

L’acquisition d’une succession n’intéresse pas seulement le successible. Elle


touche encore aux intérêts des tiers. C’est pourquoi le successible doit
exercer son option d’une manière ferme, totale et irrévocable(1).

 Forme : on ne saurait opter à terme ou sous condition. Toute modalité ou


réserve serait nulle.
 Totale indivisible : on ne peut accepter pour partie, puisqu’on est appelé
au tout. En cas de pluralité d’héritiers, il y aura certes de multiples
options. Mais chacune d’elles se fera pour le tout.
 Irrévocable : en principe, l’acceptation et la renonciation sont irrévocable
de la part du successible. Cela est vrai d’une manière absolue pour
l’acceptation. Il y a une exception au principe de l’irrévocabilité pour la
renonciation.
 Rétroactivité : quel que soit l’option adoptée par le successible, la
détermination qu’il prend rétroagit au jour de l’ouverture de la
succession (art. 803).
 Enfin, la faculté d’accepter ou de renoncer à une succession est
strictement personnelle. Cette faculté revient seulement à l’héritier (art.
801).

§3. Délais accordés à l’héritier pour délibérer

a. Principe

L’héritier a pour renoncer à la succession un délai de trois mois à partie du


jour où le liquidateur lui a signalé sa vocation successorale ou même à
partir du moment où il s’est manifesté personnellement en qualité
d’héritier.

b. Situation de l’héritier pendant les délais

1
R. Dekkers, Op.cit, p. 326, n°507 et ss.
77

Du point de vue actif, il a qualité pour accomplir les actes conservatoires et


les actes d’administration provisoire de la succession (vente de récoltes, le
bail, les réparations d’entretien).

Du point de vue passif, l’action des créanciers successoraux en paiement de


leurs créances, celle des légataires en délivrance de leurs legs, enfin celles
des cohéritiers en partage de la succession peuvent être valablement
intentées contre lui. C’est une des conséquences de la saisine. Mais tant que
les délais pour délibérer ne sont pas expirés, l’héritier n’est pas tenu aux
demandes dirigées contre lui.

§4. Règles particulières à chacune des options

Comme nous l’avions dit plus haut, le code de la famille ne distingue pas
l’acceptation pure et simple et l’acceptation sous bénéfice d’inventaire du
fait que l’accepte sans bénéfice d’inventaire entraine des problèmes de
liquidation et de partage exagérément complexe(1).

 Principe

L’acceptation est pure et simple quand le successible manifeste l’intention


d’acquérir tout l’actif et d’assumer la charge de tout le passif laissé par le
défunt. L’on appelle « Héritier pur et simple », le successible qui accepte
purement et simplement la succession.

 Formes

A la différence de la renonciation, l’acceptation pure et simple de la


succession n’est soumise à aucune condition de forme. Ce n’est pas un acte
solennel. Il résulte de l’article 802 qu’elle peut être expresse ou tacite.

 Acceptation expresse

L’acceptation est expresse quand on prend le titre ou la qualité d’héritier,


dans un acte authentique ou privé. L’acceptation est expresse lorsqu’elle est
contenue dans un acte écrit. L’essentiel est que cet écrit exprime
formellement et sans réserve la volonté de prendre la qualité d’héritier.

 Acceptation tacite

1
Exposés généraux… art. 806.
78

Il y a acceptation tacite dit la loi lorsque l’héritier accomplit un acte qui


manifeste de façon non équivoque son intention d’accepter ou lorsque,
après le délai pour renoncer l’héritier ne l’a pas fait (art. 802 alinéa 2).

L’acceptation tacite suppose donc un acte ou plus généralement une


conduite qui sont normalement ceux d’un héritier et en outre l’intention
d’accepter impliquée par cet acte ou cette conduite.

Les actes pouvant être considérés comme acceptation tacite sont divers :

- Affecter un bien de la succession à son usage exclusif ;

- Aliéner les droits successoraux ou les biens de la succession ;

- Poser des actes d’administration ou des actes conservatoires.

 Conditions de fond de l’acceptation pure et simple

L’acceptation est soumise aux conditions de fond des actes juridiques.


L’acceptation est un acte unilatéral ; mais un acte juridique. Elle n’est donc
valable que si les conditions de validité des actes juridiques sont réunies
notamment la capacité et la volonté.

Toute acceptation crée des obligations pour l’héritier. L’acceptation


entraine l’obligation illimitée aux dettes et charges de la succession et celle
de rapporter les libéralités reçues du défunt.

Il en qui concerne la volonté, les règles relatives aux vices du consentement


subsistent.

 Effet de l’acceptation pure et simple

L’acceptation pure et simple déchéance de la faculté de renoncer, d’accepter


bénéficiairement. Le patrimoine du défunt et le patrimoine de l’héritier
continuateur de la personne du défunt se trouvent confondus d’une
manière définitive.

Les conséquences de l’acceptation pure et simple se résument comme suit :


les créances du défunt deviennent les créanciers personnels de l’héritier. Ils
ont dès lors, action lui et sur ses biens qui forment désormais leur gage. Les
droits de créance ou réels que l’héritier avait contre le défunt ou sur ses
biens ont éteints par confusion.
79

c. Acceptation sous bénéfice d’inventaire

- Principe

L’acceptation sous bénéfice d’inventaire également appelée acceptation


bénéficiaire a pour but principal de n’obliger le successeur à payer les
dettes et charges de la succession qu’à concurrence de la valeur des biens
qu’il recueille. Aussi peut-on la définir : l’acceptation de tout l’actif
successoral et du passif à concurrence de l’actif(1).

Le code de la famille n’organise pas l’acceptation sous bénéfice d’inventaire.


En droit belge, l’acceptation bénéficiaire doit être toujours expresse. Elle est
soumise à des conditions de forme : la déclaration au greffe et l’inventaire.
L’acceptation sous bénéfice d’inventaire doit être déclarée au greffe du
tribunal de première instance. Cette formalité qui a pour but d’informer les
créanciers de la succession est une formalité substantielle dont dépend la
validité de l’acceptation bénéficiaire.

La déclaration au greffe de l’intention d’accepter sous bénéfice d’inventaire


n’a d’effet qu’autant qu’elle est précédée ou suivie d’un inventaire fidèle et
exact des biens de la succession dans les formes prescrites par la loi.

- Effet du bénéfice d’inventaire

Le bénéfice d’inventaire sépare le patrimoine du défunt d’avec le


patrimoine de l’héritier. En d’autres termes, il empêche la confusion des
patrimoines que produit l’acceptation pure et simple.

L’héritier n’est tenu du passif de l’hérédité (dettes et legs) que jusqu’à de


l’actif et n’est tenu de ce passif que sur les biens mêmes de l’hérédité.

L’héritier conserve tous les droits, tant réels que de créance qu’il peut avoir
contre la succession, et réciproquement la succession conserve tous les
droits tant réels que de créance qu’elle peut avoir contre lui.

Comme on peut le constater, l’héritier bénéficiaire est à la tête de deux


patrimoines distincts. Du sien propre, il est resté maitre tel qu’il était
auparavant. De celui du défunt, il est propriétaire sans doute mais il en est

1
Voir à ce sujet, P. Varin, Droit civil, T.2, 17e éd, par G. Gouleaux, LGDJ, 1992, p. 167 ; J.L. Renchon,
Droit patrimonial, les successions, Université Catholique de Louvain, Faculté de droit, 1994-1995, p.
94.
80

constitué administrateur et liquidateur au regard des créanciers et des


légataires.

d. Renonciation

 Notion

La renonciation à la succession est l’acte par lequel le successible répudie le


droit de devenir successeuer(1). En effet, nul n’est tenu d’accepter la
succession ou de legs auquel il est appelé (art. 800).

En tant que branche de l’option du successible, la renonciation doit être


ferme, totale et irrévocable.

 Forme

A la différence de l’acceptation, la renonciation à une succession est un acte


solennel. Elle ne se présume pas. En d’autres termes, elle n’est jamais tacite.

La renonciation doit être faite à peine de nullité par écrit et être signifiée au
liquidateur avant le délai fixé à l’article 801 alinéa 2.

Si l’héritier ne sait pas écrire, il peut le déclarer verbalement au liquidateur


dans le délai fixé à l’article 801 alinéa 2 en présence de deux témoins qui
constateront en signant avec le liquidateur cette renonciation verbale (art.
805).

 Effets de la renonciation

L’héritier qui renonce est censé n’avoir jamais été héritier (art. 806). Sa part
est dévolue aux autres légaux ou testamentaires qui ont accepté la
succession. La renonciation enlève au renonçant tout avantage qu’il pouvait
retirer de la succession et l’affranchit de toutes les charges qui y étaient
attachées.

Ainsi, le renonçant est étranger à l’actif comme au passif héréditaire. Il ne


peut rien prendre ou retenir de ces biens de la succession. Les fruits qu’il a
perçus, il doit les restituer. Les droits soit réels, soit de créance contre
l’héritier ou réciproquement ne sont pas éteints par confusion. L’héritier est
affranchi de l’obligation du rapport à laquelle il aurait été soumis.

1
R. Dekkers, Op.cit, p. 355, n°558.
81

La renonciation ne devient irrévocable qu’au jour où le délai de trois mois


prévu à l’article 801 alinéa 2 est écoulé, à moins que cette renonciation n’ait
été obtenue par dol, violence ou menace d’un autre héritier.

 Rétraction de la renonciation

A la différence de l’acceptation, la renonciation à une succession n’est pas


irrévocable.

En effet, avant l’expiration du délai de trois mois prévu à l’article 801 alinéa
2 du code de la famille, l’héritier qui a renoncé peut se raviser.

Il s’agit d’une situation irrationnelle car les cohéritiers du renonçant ont été
par suite de la renonciation investis de l’hérédité. En droit français, la
rétractation n’est possible que si la succession n’a pas été acceptée par
d’autres héritiers. L’acceptation de la succession par un autre héritier
postérieurement à la renonciation rendrait celle-ci irrévocable(1).

Par ailleurs, la renonciation obtenue par dol, violence ou menace d’un autre
héritier, ne devient irrévocable qu’un an après la cessation de la violence ou
de la menace ou de la découverte du dol. Ainsi dans l’année de renonçant
peut rétracter sa renonciation.

La rétractation de la renonciation permet à son auteur d’accepter la


succession et cette acceptation résultera normalement de la renonciation
même : elle ne nécessite aucune formalité particulière.

La rétractation, comme l’acceptation qu’elle implique est irrévocable et elle


est rétroactive en ce que ses effets remontent à l’ouverture de la succession.

§5. Succession vacante

La succession est vacante lorsqu’elle n’est réclamée par personne. Les


successions non réclamées sont conservées par l’autorité administrative ou
militaire du domicile ou de la résidence du de cujus.

Par le moyen d’un inventaire, l’administration civile ou militaire distingue


les biens susceptibles de dépérissement de ceux qui ne le sont pas. Ceux-là
seront vendus de gré à un prix raisonnable destiné aux ayants droit ou au
chef du groupement d’origine.

1
G. Marty et P. Reynaud, Droit civil, les successions, p. 136, n°188.
82

Les biens non susceptibles de dépérissement feront l’objet de liquidation.


Le produit sera en principe, transmis à l’administration du territoire
d’origine à charge de la remettre aux ayants droits(1).

CHAPITRE IV. LIQUIDATION DE LA SUCCESSION

SECTION 1 : NOTION DE LA LIQUIDATION

§1. Définition

Au sens restreint, liquider signifie transformer des biens en argent pour


payer les dettes qui les grèvent(2). En matière de succession, la notion de
liquidation est plus large. Elle désigne, d’une façon générale et sans
supposer forcement une réalisation pécuniaire, le règlement des droits et
des obligations attachés à une succession.

La succession étant ouverte, les héritiers étant connus, et ayant accepté, il


s’agit de déterminer ce que la succession apporte à chacun d’eux activement
et passivement.

La façon la plus simple de liquider une succession semble bien de


considérer celle-ci comme un patrimoine propre et d’en régler les droits et
les obligations avant qu’ils entrent dans le patrimoine des divers
successeurs.

Le code de la famille précise d’ailleurs que tant que la succession n’est pas
liquidée, elle constitue un patrimoine distinct (art.794).

§2. Désignation du liquidateur

En cas de succession ab intestat, le plus â gé des héritiers sera chargé de la


liquidation de la succession ou en cas de désistement, celui qui sera désigné
par les héritiers. Si les liquidateurs ont été désignés par le testament ou s’il
y a un légataire universel, la liquidation de la succession leur sera attribuée.

Lorsque le testament désigne plusieurs légataires universels, le liquidateur


sera le plus â gé d’entre eux.

1
Comparer avec la déshérence.
2
R. Dekkers, Op.cit, p. 371, n°589.
83

Si les héritiers légaux et testamentaires mineurs ou interdits sont présents


à la succession, le liquidateur de la succession devra être confirmé soit par
le tribunal de paix, soit par le tribunal de grande instance.

Lorsque les héritiers ne sont pas encore connus ou sont très éloignés ou
qu’ils ont tous renoncé à l’hérédité ou en cas de contestation grave sur la
liquidation, le tribunal compétent désigne d’office ou à la requête du
ministère public ou d’un des héritiers, un liquidateur judiciaire parent ou
étranger à la famille (art. 795).

Enfin, signalons que nul n’est tenu d’accepter les fonctions de liquidateur.
Le liquidateur ne peut se démettre de ses fonctions que lorsqu’il invoque de
justes motifs acceptés par le tribunal compétent.

Le désistement ne devient effectif qu’à partir du moment où il est accepté


par le tribunal et qu’un nouveau liquidateur a été désigné.

§3. Fonctions du liquidateur

Les fonctions du liquidateur peuvent se résumer comme suit (art. 797).

 Fixer d’une manière définitive ceux qui doivent venir à l’hérédité,


administrer la succession ;
 Payer les dettes de la succession qui sont exigibles ;
 Payer les legs particulières faits par le défunt et assurer toutes les
dispositions particulières du testament ;
 Assurer les propositions de partage et veiller à leur exécution dès qu’un
accord ou une décision est intervenue ;
 Rendre compte final de sa gestion à ceux qui sont venus à l’hérédité ou au
tribunal compétent, s’il s’agit d’un liquidateur judiciaire.

§4. Ordre de règlement des charges de la succession

Dans le règlement des charges de la succession, le liquidateur doit respecter


l’ordre suivant (art. 798). :

- Les frais des funérailles de défunt ;

- Les salaires et traitements dus par le de cujus ;

- Les frais d’administration et de liquidation de la succession ;


84

- Les dettes du de cujus ;

- Les legs particuliers faits par le de cujus.

§5. Rémunération du liquidateur

Le liquidateur a droit à une rémunération si le travail qu’il a accompli


justice celle-ci soit d’accord avec les héritiers légaux ; soit dans les
conditions déterminés par le de cujus, soit par décision du tribunal en cas
de liquidation judiciaire (art. 799).

SECTION 2 : LIQUIDATION D’UNE SUCCESSION ACQUISE PAR UN SEUL


HERITIER

§1. Principe

L’héritier acquiert le patrimoine du défunt, une universalité comprenant un


actif et un passif, c’est-à -dire, des droits et des obligations.

§2. Droits de l’héritier

Tout successeur universel qui accepte jouit des droits suivants : il devient
propriétaire des biens du défunt pour autant qu’ils se transmettent pour
cause de mort. Comme les effets de l’acceptation remontent au jour de
l’ouverture de la succession, le successeur a droit aux fruits de ce jour. Bref,
l’héritier a un droit sur les biens et les créances du défunt.

§3. Obligations de l’héritier

L’héritier recueille une universalité, c’est-à -dire, un ensemble comprenant


un actif et un passif. Il succède aux dettes en même temps qu’aux droits. Ces
solutions ont été expliquées par l’idée de continuation de la personne du
défunt.

Le principe de la continuation de la personne du défunt par l’héritier a cette


conséquence logique que l’héritier est tenu indéfiniment du passif de la
succession dont ses biens personnels seront tenus au même titre que ceux
qu’il recueille dans la succession. La continuation de la personne implique
la confusion des patrimoines du défunt et de l’héritier. C’est le principe de
l’obligation ultra vires.
85

Les conséquences de l’idée de continuation de la personne sont les


suivantes :

a. Obligation aux dettes

L’héritier est personnellement tenu des dettes du défunt. Les créanciers du


défunt peuvent donc poursuivre l’héritier. Les dettes transmises à l’héritier
sont toutes les dettes, même si elles sont nées d’un fait ou d’un engagement
personnel du défunt.

Cependant, certains contrats sont conclus en considération de la personne


et cessent de produire effet pour l’avenir à la mort d’un contractant (louage
de services). Certaines obligations sont exceptionnellement
intransmissibles à cause de mort à raison de leur caractère strictement
personne (obligation alimentaire).

b. Obligation aux legs

L’obligation d’exécuter les legs aque celle d’acquitter les dettes de défunt.
Elle pèse sur l’héritier.

c. Obligation aux charges

On désigne sous le nom de charges de la succession des dettes qui


incombent à l’héritier alors qu’elles n’existaient pas encore du vivant du de
cujus. Elles s’apparentent aussi aux legs qui sont lato sensu des charges de
la succession, mais elles sont par leur nature des dettes. Il en résulte
qu’elles doivent être acquittées avant les legs en vertu de la règle memo
liberalis, nisi liberatus.

Ces charges comprennent les frais funéraires, dans la mesure où ils sont
proportionnés à la fortune du défunt, les frais de gestion des biens de la
succession et de liquidateur de celle-ci.

La confusion du patrimoine successoral et du patrimoine personnel de


l’héritier qui est la conséquence logique de la confusion des patrimoines
peut avoir des inconvénients graves.

Ces inconvénients sont d’abord pour l’héritier qui est tenu utra vires. Il va
donc devoir acquitter de ses derniers les dettes d’une succession insolvable.
La confusion des patrimoines est dangereuse pour les créanciers
86

personnels de l’héritier car leur débiteur peut accepter une succession


déficitaire et se rendre ainsi insolvable alors qu’il ne l’était pas.

Enfin, la confusion des patrimoines peut être préjudiciable aux créanciers


du défunt lorsqu’un héritier insolvable recueille une succession solvable.
Ces créanciers qui du vivant de leur débiteur avaient un gage suffisant sont
désormais exposés au concours des créanciers personnels de l’héritier qui
va le diminuer.

Comme on peut le constater, l’héritier bénéficiaire se trouve quant à lui à la


tête de deux patrimoines, le sien et la succession. Il en résulte qu’il n’est
tenu des dettes et charges de la succession que sur les biens qui la
composent et non sur ses biens personnels.

Les créanciers du défunt et les légataires qui n’ont d’action que sur ces
biens ont donc intérêt à ce que le patrimoine successoral soit aussi
important que possible. Aussi l’héritier ne peut donc l’administrer
librement. Il doit rendre compte aux créanciers et légataires. Il répond de
ses fautes graves. Il ne peut vendre les biens du défunt qu’en observant des
formalités destinées à procurer le plus haut prix.

SECTION 3 : LIQUIDATION D’UNE SUCCESSION ACQUISE PAR


PLUSIEURS HERITIERS : INDIVISION

§1. Indivision

Le fait que plusieurs héritiers deviennent simultanément propriétaires à la


place du défunt seul crée entre eux une indivision dont ils ne peuvent sortir
que par le partage.

Jusqu’au partage, les biens héréditaires se trouvent dans l’indivision.


L’indivision soulève trois questions : la composition, le fonctionnement et la
cessation de l’indivision. L’indivision comprend des biens laissés par le de
cujus, ceux que ce dernier a donnés et qui par l’effet du rapport et de la
réduction rentrent dans la masse successorale. Les biens compris dans
87

l’indivision successorale constituent un ensemble, une masse à laquelle a


été reconnue une certaine autonomie. La nature de la masse indivise est
discutée dans la doctrine. Est-elle un patrimoine autonome ; est-elle une
personne morale ?

Quant à son fonctionnement, l’indivision à une vie économique propre qui


est animée par les héritiers sous la direction du liquidateur.
Traditionnellement, la masse successorale est la propriété collective et
indivise des cohéritiers. La gestion de l’indivision est en principe soumise à
la règle de l’unanimité du moins pour les actes de disposition et
d’administration. Les cohéritiers doivent se mettre d’accord sur
l’accomplissement de tout acte sur les biens indivis.

§2. Les droits individuels de l’héritier

- Les droits de l’héritier sur les biens de la succession

Sur les biens de la succession, chaque héritier a les droits d’un propriétaire
indivis. Ce sont essentiellement des droits d’usage et de jouissance que
chacun peut exercer dans la mesure compatible avec les droits des autres et
celui de concourir avec les autres aux actes de disposition qui requièrent
l’unanimité.

- Les droits de l’héritier sur sa quote-part idéale

En dehors de ses droits sur les biens compris dans la succession, chaque
héritier a un droit sur sa quote-part idéale, qu’il est difficile de définir
exactement mais dont l’existence n’est pas douteuse. C’est ainsi qu’un
héritier a droit à la moitié, au tiers, au quart de la succession.

Tant que le partage n’a pas déterminé les biens entrant dans cette fraction,
le droit de chaque Co indivisaire est celui de se faire attribuer dans le
partage un droit privatif sur un ou des éléments de la masse héréditaire
représentant la valeur de sa quote-part. Ce droit privatif n’est que futur, la
vocation à acquérir est actuelle. Dès l’ouverture de la succession, l’héritier a
un droit qu’il peut défendre et qu’il peut céder.

Il droit d’un cohéritier sur sa quote-part est transmissible et c’est ainsi qu’il
peut être transmis à ses propres héritiers en cas de décès. Il peut aussi faire
l’objet d’une cession entre vifs, c’est la cession de droits successifs. Cette
cession aurait pour effet, si elle était consentie au profit d’un étranger,
88

d’introduire celui-ci dans la communauté d’héritiers, ce que les cohéritiers


risqueraient de mal accepter.

§3. Durée de l’indivision

L’indivision héréditaire est un état précaire auquel il peut être mis fin à tout
moment dès l’instant qu’un Co indivisaire demande le partage.

En effet, nul ne peut être contraint à demeurer dans l’indivision et le


partage peut être toujours provoqué nonobstant prohibition et conventions
contraires.

Néanmoins, certaines dispositions du code de la famille (art. 780 et 81O)


maintiennent l’indivision lorsque parmi les successibles, il y a des enfants
mineurs ou des interdits(1).

SECTION 4 : LIQUIDATION D’UNE SUCCESSION ACQUISE PAR


PLUSIEURS HERITIERS PARTAGE

§1. Définition du partage

Le partage est la convention amiable ou judiciaire par laquelle les


indivisaires mettent fin à l’indivision en substituant des parts
matériellement distinctes, appelées parts divises aux parts indistinctes,
appelées parts indivises qu’ils avaient jusque-là .

Le partage est donc l’acte par lequel les indivisaires substituent à leurs
droits de copropriété sur tous les biens indivis des droits de propriété
exclusive sur certains de ces biens(2). On appelle action en partage le droit
de chaque indivisaire de contraindre les autres au partage. Si ceux-ci ne s’y
prêtent pas, de bonne grâ ce, le partage se fera néanmoins malgré eux et par
autorité de justice. Le juge substituera sa volonté à celle des récalcitrants.

Le partage a lieu en principe en nature, chacun des héritiers recevant les


biens de la succession. Toutefois, lorsqu’il y a impossibilité d’établir l’égalité
des parts en nature, l’inégalité de celle-ci se compense par l’attribution
d’une soulte due par les héritiers ayant reçu une part supérieure à leur part
légale ou testamentaire à l’hérédité en faveur de ceux qui ont reçu une part
inférieure (art. 791).

1
Lire articles 780 et 910 du code de la famille.
2
R. Dekkers, Op.cit, p. 401, n°639.
89

Dans la mesure du possible, les héritiers reçoivent des lots ayant la même
composition ou qui sont les plus utiles. En cas de désaccord sur la
répartition de l’héritage, un arbitrage du conseil de famille proposera une
solution. Si la solution n’est pas accueillie, le tribunal de paix pour les
héritages ne dépassant pas 100.000 zaïres et le tribunal de grande instance
792).

§2. Espèces de partage

a. Quant à l’objet

Le partage peut être définitif ou provisionnel. Le partage définitif fait cesser


l’indivision d’une manière définitive. Les droits des indivisaires sont
délimités une fois pour toutes

Au contraire, le partage provisionnel ne fait cesser l’indivision que d’une


manière provisoire, les droits des indivisaires ne sont délimités que quant à
la jouissance. La propriété des biens reste indivise entre les héritiers. Le
partage provisionnel, n’étant qu’un partage de jouissance, a uniquement
pour effet de permettre à chacun de contractants de faire siens les fruits des
biens mis dans son lot. Le partage provisoire est un partage définitif qui est
subordonné à une condition résolutoire ou à une révision des lots.

Le partage total embrasse l’indivision entière.

Le partage partiel embrasse une partie de l’indivision. Le partage


complémentaire porte sur des biens qui n’avaient pas été compris dans un
premier partage.

Le partage est complémentaire quand il porte sur des biens qui n’avaient
été compris dans un premier partage.

Le partage est complémentaire quand il porte sur des biens qui n’avaient
été compris dans le premier partage.

Le partage est conjoint quand il porte à la fois sur plusieurs masses


indivises entre les mêmes parties.

b. Quant aux formes

Le partage peut être fait de deux manières : à l’amiable ou en justice. Le


partage peut avoir lieu à l’amiable toutes les fois que les parties le font dans
90

la forme qu’elles jugent convenables. Les parties peuvent dresser un acte


authentique ou privé pour constater le contrat voire n’en dresser aucun(1).
Le partage judiciaire intervient en cas de désaccord dans la répartition de
l’héritage.

Dans la mesure du possible, les héritiers reçoivent les lots ayant la même
composition. En cas de désaccord sur la répartition de l’héritage, et après
arbitrage du conseil de famille, le tribunal de paix ou le tribunal de grande
instance fixera d’une manière définitive l’attribution des parts (art. 792).

§3. Personnes admises au partage

Le partage peut être demandé par tout successeur venant à la succession,


légataire universel ou légataire à titre universel, institué contractuel
universel ou à titre universel. Le partage est demandé contre les mêmes
personnes que celles qui peuvent le demander. Le partage est d’ailleurs un
droit réciproque et indivisible.

§4. Qualités requises pour exercer l’action en partage

Le partage est par sa nature un acte de disposition. Il consiste en effet en un


échange de parts indivises. Chaque héritier abandonne sa part dans les
biens attribues aux autres, moyennant l’abandon, par ceux-ci de leur part
dans les biens attribués au premier. Le partage exige la capacité ou le
pouvoir d’aliéner.

Quand un partage a été provoqué ou consenti par une personne qui n’avait
pas la capacité ou le pouvoir requis, il est entaché de nullité relative.

§5. Retrait successoral

Le retrait successoral est le droit pour chacun des copartageants d’écarter


du partage toute personne qui n’aurait d’autre titre à y participer qu’une
cession de droits successifs qu’elle aurait obtenue d’un autre
copartageant(2).

Cette institution a pour but d’empêcher que des étrangers s’immiscent dans
des affaires et les secrets de famille, de faciliter le partage, opération

1
G. Galopin, Cours de droit civil, les successions, notes de cours par Dejace, U.O.C, 1971, p.80.
2
R. Dekkers, Op.cit, p.425, n°682.
91

souvent épineuse et de combattre la spéculation, une vente des droits


successifs est souvent aléatoire.

Le retrait successoral a été du critique du fait qu’il porte atteinte au droit de


propriété et à la liberté des conventions. L’on estime que l’on ne doit pas
admettre l’expropriation pour cause d’utilité privée(1).

Le code de la famille n’organise pas le retrait successoral. Néanmoins, ce


litige peut être tranché par les cours et tribunaux conformément aux
dispositions générales de l’article 817 du code de la famille.

a. Caractères du retrait successoral

le retrait successoral est un droit unilatéral. Il ne dépend que de la volonté


de l’héritier. Il est un droit titre onéreux. Le retrayant doit rembourser au
retrayé le prix de la cession entière.

Le retrait successoral est un droit individuel, c’est-à -dire, le droit de


demander le retrait appartient à chacun des successeurs. Enfin, le retrait
successoral est un droit personnel qui s’attache au titre de successeur. Ce
droit est incessible.

b. Cessions soumises au retrait

le retrait successoral atteint toute cession des droits universels ou à titre


universel. Car seuls des droits à la totalité ou à une quotité de l’actif et du
passif successoraux donnent accès au partage dans une succession à
partager.

c. Qui peut exercer le retrait

le cessionnaire non successible peut être écarté du partage par tout


cohéritier du cédant, c’est-à -dire, par tout successeur universel pour autant
qu’il vienne à la succession.

d. Procédure et effet

1
G. Galopin, Op.cit, p. 76.
92

Si le retrayant et le cessionnaire ne s’accordent pas, soit sur le principe soit


sur les conditions du retrait successoral, celui-ci doit être demandé en
justice.

Le retrait successoral obéit au même principe que l’expropriation pour


cause d’utilité publique. Le cessionnaire est un exproprié. Aussi, le
retrayant lui doit une indemnisation complète et préalable, comprenant le
prix de la cession, les intérêts du prix les frais et loyaux de la cession.

Le retrayé doit restituer au retrayant les droits successifs, objet de la


cession et les fruits de ces droits.

L’application de la notion du retrait successoral a suscité beaucoup de


critiques et n’a pas toujours été heureuse. C’est pourquoi la loi française a
mis sur pied le droit de préemption du Co indivisaire.

Le droit de préemption appartient à tout indivisaire, c’est-à -dire, à tout


cohéritier du cédant. Il ne peut jouer que contre un non successible. Il ne
s’ouvre qu’en cas de cession. Le droit de préemption s’ouvre en cas de
cession à titre onéreux. Il s’ouvre dès l’instant que la cession projetée porte
en tout ou en partie sur les droits indivis du cédant.

L’exercice du droit de préemption se présente comme suit : En cas de


cession amiable, le cédant doit notifier par acte extra-judiciaire, la cession
projetée à ses Co indivisaires, en indiquant les conditions de cette cession et
notamment le prix ainsi que les nom, domicile et profession de la personne
qui se propose d’acquérir. Tout Co indivisaire peut alors exercer son droit.
Il dispose d’un délai d’un mois pour faire connaitre sa décision et il peut
opter pour l’exercice de son droit de préemption aux conditions
déterminées par le projet qui lui a été notifié, auquel cas il dispose d’un
délai de deux mois à compter de l’envoi de sa réponse au vendeur pour
réaliser l’acte de vente. Passé ce délai, le vendeur pourrait lui adresser une
mise en demeure et la déclaration de préemption serait nulle de pleins droit
quinze jours après cette mise en demeure restée sans effet.

En cas de vente par adjudication, m’avocat ou le notaire du cédant doit


informer les Co indivisaires de la vente projetée, un mois avant la date
prévue pour elle et un Co indivisaire peut se substituer à l’adjudication par
93

une déclaration au greffe ou au notaire dans le délai d’un mois à compter de


l’adjudication(1).

§7. Rapport des libéralités

a. Définition du rapport

Le mot rapport évoque l’acte par lequel on remet dans la masse une valeur
qui en était sortie(2).

C’est l’obligation pour chaque héritier de remettre dans la masse à partager


tous les dons entre vifs ou testamentaires qui lui ont été faits par le défunt
et toutes les sommes qu’il devrait au défunt. L’obligation du rapport
suppose la pluralité d’héritiers (art. 856-857).

b. Fondement

L’obligation du rapport repose sur une simple présomption de volonté de la


part du disposant. Lorsqu’il n’a rien dit, lors de la libéralité, il est réputé
n’avoir pas eu l’intention de rompre l’égalité entre ses successeurs légaux. Il
est censé avoir imposé à son donataire ou légataire l’obligation du
rapport(3).

c. Caractères du droit au rapport

Pour le cohéritier auquel il est dû , le rapport est un droit :

- Individuel, chacun des héritiers peut le demander en ce qui le concerne ;

- Réciproque entre cohéritiers venant au partage ;

- Propre, le cohéritier qui demande le rapport agit de son propre chef et non
du chef du défunt ;

- Accessoire au partage.

d. Personnes tenues au rapport

1
G. Marty et P. Raynaud, Les successions, p.198, n°252.
2
R. Dekkers, Op.cit, p.430, n°694.
3
R. Dekkers, Op.cit, p.431, n°695.
94

L’article 856 du code de la famille stipule : « L’héritier venant à la


succession du donateur ne peut bénéficier des dons et legs recueillis avec
dispense de rapport que jusqu’à concurrence de la quotité disponible,
l’excédent est sujet à rapport ».

L’article 857 déclare que : « Les dons ou legs faits avec dispense de rapport
sur la réserve successoral doivent être restitués à l’hérédité et sont par
portions égales partagées entre tous les cohéritiers ».

Comme on peut le constater, le rapport a pour but de ramener chacun des


héritiers à sa part de succession ab intestat. Il peut donc être exigé de tout
héritier venant à la succession de celui qui a fait un don ou un legs.

Pour être soumis à l’obligation du rapport, il faut :

1. Etre héritier ab intestat

Ce rapport n’est pas dû par les légataires mêmes universels, saufs clause
contraire expresse du legs. Le rapport est donc dû par tout successeur.

2. Venir à la succession

Est seul tenu au rapport, l’héritier qui accepte, qui vient à la succession.
L’héritier appelé qui renonce peut retenir le don entre vifs ou le legs à lui
fait jusqu’à concurrence de la quotité des biens dont le défunt aurait pu
disposer au profit d’un étranger(1).

3. Etre donataire ou légataire du défunt

L’héritier qui n’est pas personnellement donataire ou légataire du défunt ne


doit pas le rapport, lors même que la libéralité aurait été faite à un de ses
parents en ligne directe ou à son conjoint. Ainsi, le fils venant à la
succession de son chef ne doit pas le rapport de ce qui a été donné à son
père. Le père venant à la succession du donateur ne doit pas rapporter de ce
qui a été donné à son fils. Le conjoint du donataire venant à la succession du
donataire ne doit pas le rapport de ce qui a été donné à son conjoint.

4. N’être pas dispensé du rapport

L’obligation du rapport étant fondée sur l’intention présumée du disposant,


qui est réputé n’avoir pas voulu rompre l’égalité entre ses successibles,
1
L. Bach, Op.cit, p.260.
95

cesse lorsqu’il a manifesté une volonté contraire en dispensant son


successible du rapport.

La dispense du rapport ne produit d’effets que dans la limite de la quotité


disponible.

e. Personnes ayant droit au rapport

Le rapport ne se fait qu’à la succession du donateur. Le rapport n’est dû que


par le cohéritier à son cohéritier (art. 862). En effet, le rapport n’a pour but
que de maintenir l’égalité des parts héréditaires. Il ne doit avoir lieu que
dans l’intérêt de cette égalité, c’est-à -dire, uniquement entre les héritiers. Il
n’est pas dû aux légataires ni aux créanciers de la succession.

Le droit de demander le rapport fait partie du patrimoine de l’héritier


auquel il appartient.

f. Moment du rapport et preuve

Le rapport du legs ou dons ne peut avoir lieu qu’à l’ouverture de la


succession du disposant. Celui qui réclame le rapport d’une libéralité doit
prouver l’existence de cette libéralité. Il peut recourir à la preuve
testimoniale et à la preuve par présomptions humaines.

C’est au donataire qui prétend avoir été dispensé du rapport à faire la


preuve de la dispense qu’il invoque.

g. Libéralités sujettes à rapport

L’héritier doit rapporter tout ce qu’il a reçu du défunt sans distinction. Tous
les legs sans aucune restriction sont sujets à rapports. Il n’y a pas à
distinguer si le legs est à titre universel ou à titre particulier.

Quant aux donations entre vifs, la règle est également qu’elles sont
rapportables. Tout héritier doit rapport à ses cohéritiers tout ce qu’il a reçu
du défunt, par donation entre vifs directement ou indirectement peu
importe la nature ou l’importance des biens donnés(1).

1
L. Bach, Op.cit, p.258.
96

Le rapport comprend tout ce qui a été employé pour l’établissement d’un


des cohéritiers ou pour le paiement de ses dettes (art. 859).

Conformément à l’article 860 du code de la famille, sont dispensés de


rapport :

« Les frais de nourriture, d’entretien, d’éducation, d’apprentissage, les frais


ordinaires d’équipement, ceux de nous et des présents d’usage ne doivent
pas être rapportés ».

Sont dispensés aussi de rapport :

 Les fruits des biens soumis au rapport. Ces fruits ne sont dus qu’à
compter du jour de l’ouverture de la succession
 De même ; en cas d’assurance sur la vie, le capital, la rente payable au
décès du contractant à un bénéficiaire déterminé(1).

h. Comment s’effectue le rapport ?

Le rapport des libéralités peut se faire (art. 863 et ss) :

- En nature

Le rapport a lieu en nature d’abord si le donateur l’a prévu. Le rapport a lieu


aussi en si l’héritier choisit de rapport en nature le bien donné, ce qu’il ne
peut faire qu’à la double conditions que le bien lui appartienne encore et
qu’il soit libre de toute charge ou occupation. Le rapport en nature vise à
reconstituer la masse, non plus dans sa seule valeur ainsi que des fruits qu’il
a produits depuis l’ouverture de la succession. Tout se passe comme si le
gratifié n’avait jamais été propriétaire du bien qu’il rapporte. En nature
opère comme une condition résolutoire. Tous les droits nés d’un acte de
disposition et consentis par le donataire tombent. De ce que la donation est
anéantie, il résulte que le donataire doit rendre la chose dans l’état même
où il a reçue(2).

- En moins prenant

Tout rapport se fait en moins prenants, qu’il s’agisse de donations ou de


legs et quel que soit l’objet de la libéralité meubles ou immeubles. Le
rapport en moins prenant a en fait l’avantage de laisser la propriété de
1
L. Bach, Op.cit, p.258.
2
L. Bach, Op.cit, p. 262.
97

l’objet de la libéralité au bénéficiaire de celle-ci et les constitutions de droit


réel qu’il a pu consentir restent valables ; mais le bénéficiaire supporte les
risques de la chose, c’est-à -dire qu’il doit le rapport même si la chose a péri
par cas fortuit. Le rapport en moins prenant s’effectue en prenant en
considération la valeur du bien à l’époque du partage. Et si le bien a été
aliéné avant le partage, on tient compte de la valeur qu’il avait à l’époque de
l’aliénation(1).

- En récompense

Rien n’empêche le donataire de payer à ses cohéritiers la valeur de la


donation.

- Par compensation

Le rapport se fait par compensation, quand tous les héritiers doivent


rapporter des sommes égales.

Le rapport des biens meubles se fait en principe en moins prenant ; et celui


des immeubles se fait en principe en nature (art. 864).

i. Rapport des dettes

le mot rapport des dettes manque tout à fait l’exactitude quand il s’agit de
dettes. Il qualifie ici un mode spécial de recouvrement des dettes dont l’un
ou l’autre des cohéritiers peut être tenu envers la succession.

Le rapport des dettes est établi dans l’intérêt des cohéritiers de l’héritier
débiteur. Il a paru équitable que l’héritier, qui est débiteur de la succession,
ne puisse venir au partage quand il est libéré de sa dette, même avant
l’échéance, soit par un paiement effectif soit par un rapport en moins
prenant. Tout héritier doit faire rapport à la masse des sommes dont il est
débiteur envers elle à un titre quelconque.

Le rapport des dettes a pour but de respecter comme le rapport des


libéralités, l’égalité entre les héritiers. Il donne aux cohéritiers créanciers de
l’héritier débiteur, une situation préférentielle aux autres créanciers de cet
héritier. Les dettes de toute nature, contractuelle ou délictuelle, échues ou à
terme à l’égard du de cujus ou de la succession sont soumis au rapport(2).

1
L. Bach, Op.cit, p. 261.
2
L. Bach, Op.cit, p. 263.
98

Le rapport des dettes n’est dû que par l’héritier venant à la succession.


L’obligation du rapport des dettes n’est qu’un complément de l’obligation
du rapport des dons. Le rapport des dettes ne se fait qu’à la succession du
créancier. Le rapport des dettes ayant pour objet de l’argent se fait en
moins prenant, c’est-à -dire, le prélèvement d’une somme égale sur la masse
par chacun des cohéritiers.

j. Effets du partage

l’attribution des lots aux copartageant crée pour ceux-ci des droits et des
obligations. L’héritier devient propriétaire des biens compris dans son lot. Il
est même censé l’être devenu non seulement du jour du partage, mais dès
l’ouverture de la succession (effet déclaratif du partage).

En cas de partage avec soulte, notamment le partage attribuant un


immeuble qui vaut plus que sa part, l’héritier doit compenser le surplus par
une soulte.

En ce qui concerne le prélèvement des parts, celles-ci se fait comme suit :

- En cas de concours d’héritiers des première et deuxième catégories, les


héritiers de la première catégorie choisissent leur part ;

- En cas de concours d’héritiers de la deuxième catégorie uniquement, le


conjoint survivant choisit d’abord sa part, puis le père et la mère et enfin les
frères et sœurs (art. 790).

k. Dissolution du partage

Le partage amiable est une convention. Il devrait être annulé chaque fois
qu’il présente un des défauts qui peuvent affecter une convention (vice de
consentement, incapacité fraude des droits des créanciers). De même, le
partage judiciaire devrait être annulé pour vices de forme, incompétence du
magistrat.

SECTION 5 : LIQUIDATION D’UNE SUCCESSION ACQUISE PAR


PLUSIEURS HERITIERS : DIVISION DES CREANCES ET
DES DETTES

§1. Principe
99

En cas de pluralité d’héritiers, si les biens corporels compris dans la


succession sont soumis au régime de l’indivision, les éléments incorporels,
c’est-à -dire, les créances et les dettes du défunt se divisent de plein droit
entre les héritiers.

§2. Justification du principe de la division et sa portée

La règle de la division de plein droit des créances et des dettes du défunt est
une conséquence de la continuation de la personne du défunt.

Les créances et les dettes du défunt deviennent des créances et des dettes
des héritiers et elles se divisent entre eux s’ils sont plusieurs. Chaque
héritier devient créancier pour sa part des débiteurs du défunt et débiteur
pour sa part des débiteurs du défunt et débiteur pour sa part des créanciers
du de cujus.

Un cohéritier ne peut demander le paiement total d’une créance du de cujus


et un créancier du défunt doit diviser ses poursuites contre les héritiers de
son débiteur.

Ce système n’est pas sans inconvénients. En cas d’insolvabilité d’un héritier,


ces créances risquent de n’obtenir qu’un paiement partiel. Aussi, la division
des dettes a été sensiblement atténuée dans sa portée.

Aussi, la succession peut être liquidée comme un patrimoine autonome : les


créances de la succession poursuivent leur paiement sur les biens
successoraux et c’est la succession qui poursuite les débiteurs du défunt.
Les héritiers n’interviennent pas personnellement ; les créances et les
dettes leur demeurent étrangères et ils ne se partageront que l’actif net.

Par ailleurs, s’agissant d’une dette indivisible, chaque héritier peut être
poursuivi pour le tout. S’agissant d’une créance indivisible, chaque
cohéritier peut exiger l’exécution en totalité.

La division est aussi écartée lorsque l’un des héritiers est chargé seul par le
titre de l’exécution de l’obligation.

§3. Les rapports des cohéritiers entre eux


100

Dans les rapports des cohéritiers entre eux, il s’agit de savoir dans quelle
proportion, chacun doit en définitive bénéficier d’une créance ou supporter
le poids d’une dette héréditaire.

En principe, un recours ne doit pas être envisagé car chaque héritier


intervient proportionnellement à ses droits.

Mais un recours est justifié lorsqu’exceptionnellement un des héritiers a


perçu plus que sa part une dette de la succession notamment puisque
l’obligation était indivisible.

Le recours du cohéritier qui a payé plus que sa part d’une dette


successorale peut se justifier par l’enrichissement sans cause ou par la
gestion d’affaire.

SECTION 6 : QUELQUES REGLES SPECIALES EN MATIERE DE MUTATION


DES BIENS FONCIERS ET D’HERITIERS MINEURS OU
INTERDITS

§1. Mutation des biens fonciers ou immobiliers

La requête en investiture, en vue d’opérer la mutation par décès des biens


fonciers et immobiliers de la succession sera introduite par le liquidateur
au tribunal de paix pour les héritages ne dépassent pas 100.000 zaïres et au
tribunal de grande instance pour les autres héritiers en indiquant ceux qui
viennent à la succession, la situation des fonds, des immeubles et leur
composition (art. 807).

§2. Héritiers mineurs ou interdits

Lorsque les héritiers mineurs ou interdits viennent à la succession, le


tribunal de paix ou le tribunal de grande instance convoque à ce cô té du
liquidateur un conseil de famille composé de trois membres de la famille du
de cujus ou à défaut de ceux-ci de toute personne étrangère à la famille et
désignée par le tribunal (art. 808). Le conseil de famille surveillera
l’administration de la succession, approuvera les actes de disposition tels
que le paiement des dettes et des legs ; il donnera son avis lors de
l’approbation de clô ture des comptes du liquidateur par le tribunal. En cas
101

de désaccord entre le liquidateur et le conseil de famille, le tribunal


décidera en dernier ressort des mesures à prendre (art. 806).

§3. Bureau administratif des successions

Il est institué en milieu rural à l’échelon de la zone et en milieu urbain à


l’échelon de la ville, un bureau administratif des successions chargé d’aider
les liquidateurs dans leurs fonctions. Le bureau sera tenu par un agent de
l’Etat désigné, selon le cas, par le commissaire de zone, le commissaire sous
régional ou le gouverneur de la ville de Kinshasa (art. 812).

En cas de petit héritage, l’établissement de l’actif net, la détermination des


héritiers légaux et testamentaires et de leurs parts testamentaire seront
arrêtés par le liquidateur avec le concours du bureau des successions
compétent (art. 813).

En cas de grands héritages, le bureau des successions peut être consulté aux
mêmes fins à la demande expresse du liquidateur et en cas de présence du
conseil de famille et sur avis conforme de celui-ci (art. 814).

Indépendamment des droits de succession, il est dû au bureau des


successions une taxe rémunératoire au profit de l’Etat fixée à 1% de la
valeur de la succession (art. 816).
102

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