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DELIBERATION N°… DE L'ASSEMBLEE DE CORSE

SEANCE DU 4 JUILLET 2023

L'an , le , l'Assemblée de Corse, convoquée, s'est réunie au nombre


prescrit par la loi, dans le lieu habituel de ses séances sous la présidence de Mme
Marie-Antoinette MAUPERTUIS, Présidente de l'Assemblée de Corse.

VU la Constitution de la Vème République du 4 octobre 1958 ;

VU le Code général des collectivités territoriales ;

VU le règlement intérieur de l’Assemblée de Corse disposant que « L’Assemblée de


Corse et le Conseil exécutif de Corse sont les garants des intérêts matériels et
moraux du Peuple Corse » ;

VU la proposition de l’Assemblée de Corse en date du 8 juillet 1983, ayant « pris acte


du caractère fondamental de la langue comme ciment de la culture et de
l’urgence de mettre en œuvre une réelle politique de réappropriation culturelle
qui traduise la volonté de l’assemblée de rendre sa langue à son peuple.
Consciente du caractère historique de ses responsabilités, l’Assemblée de Corse
a décidé de s’engager dans une politique de bilinguisme dans le cadre d’un plan
triennal qui sera élaboré en concertation avec l’État, ce bilinguisme étant compris
de la maternelle à l’université [...] l’enseignement de la langue fera l’objet d’une
modulation horaire sur la base du principe de l’enseignement obligatoire »,
adressée au Premier ministre ;

VU la délibération n° 88/59 de l'Assemblée de Corse du 13 octobre 1988 relative à la


notion de peuple corse, défini comme : « une communauté historique et culturelle
vivante, regroupant les Corses d’origine et les Corses d’adoption » ;

VU la délibération n° 2000/31 de l'Assemblée de Corse du 19 mars 2000 relative aux


principes, objectifs et calendrier du processus de réforme engagé par le
Gouvernement avec les élus de la Corse ;

VU la délibération n° 013/96 de l’Assemblée de Corse en date du 17 mai 2013, en


faveur de la coofficialité ;

VU la délibération n° 14/042 de l’Assemblée Corse du 24 avril 2014 sur la protection


du patrimoine foncier ;

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VU la délibération n° 18/042 de l’Assemblée de Corse du 8 mars 2018 proposant
l’inscription dans la Constitution d’un article spécifique consacré à la Corse ;

VU la délibération n° 18/043 de l'Assemblée de Corse du 8 mars 2018 portant adoption


d'une résolution pour la reconnaissance des droits du peuple corse ;

VU le rapport « Vers l’autonomie - pour une évolution institutionnelle de la Corse » de


la Professeure Wanda Mastor, commandé par le Conseil exécutif de Corse en
septembre 2021, dont l’Assemblée de Corse a pris acte par délibération n°21/175
AC en date du 28 octobre 2021 ;

VU la prise d’acte par le ministre de l’Intérieur et le Président du Conseil exécutif de


Corse du compte-rendu des réunions du 16 mars 2022 entre le ministre de
l’Intérieur et les élus et forces vives de Corse ;

VU la délibération n°22/110 de l'Assemblée de Corse du 28 juillet 2022 prenant acte


de la contribution de la Présidente de l'Assemblée de Corse au débat sur
l'autonomie : « Autonomia è Benistà » ;

VU la délibération n° 23/057 de l’Assemblée de Corse du 28 avril 2023 adoptant une


résolution relative à la langue corse, et notamment en faveur d’un statut de
coofficialité dans le cadre d’une révision constitutionnelle ;

VU le rapport d’information de la commission des compétences législatives et


réglementaires et pour l’évolution statutaire de la Corse « Vers un statut
d’autonomie pour la Corse », présenté en commission le 31 mai 2023, dont
l’Assemblée de Corse a pris acte par délibération n° 23/085 AC en date du 30
juin 2023 ;

VU le rapport du Président du Conseil exécutif de Corse « Autonomia » déposé le 27


juin 2023 et présenté lors de la session extraordinaire du 04 juillet 2023 ;

VU les échanges intervenus en sessions du vendredi 30 juin 2023 et du mardi 04 juillet,


en application du principe d’oralité des débats ;

VU la contribution du groupe Fà Populu Inseme, en soutien au rapport du Conseil


exécutif de Corse, présentée lors de la séance du 04 juillet 2023 ;

VU la contribution « Un statut d’autonomie pour la Corse » de Monsieur Pierre


Ghionga, Conseiller à l’Assemblée de Corse, en date du 02 juillet 2023 ;

VU la contribution « Proposition Titre XIIBis et statut d’autonomie » du groupe Core in


Fronte, en date du 03 juillet 2023 ;

VU la contribution « Prughjettu d'autunumia pà a Corsica » du groupe Avanzemu, en


date du 03 juillet 2023 ;

VU la contribution de Madame Josepha Giacometti-Piredda, Conseillère à l’Assemblée


de Corse, en date du 04 juillet 2023 ;

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VU l’avis du CESEC 2023-251 relatif au rapport du Président du Conseil Exécutif «
Autonomia » du 03 juillet 2023 ;

VU l’avis AdG 2023-01 de l’Assemblea di a Giuventù, réunie en inter-commissions,


relatif au rapport du Président du Conseil Exécutif « Autonomia », du 03 juillet
2023 ;

SUR rapport du Président du Conseil exécutif de Corse ;

CONSIDERANT que l’Assemblée de Corse affirme solennellement sa volonté que la


Corse soit dotée d’un statut d’autonomie dans le cadre de la République française ;

CONSIDERANT que l’Assemblée de Corse demande que cette revendication


d’autonomie et les propositions en découlant soient prises en compte par le
Gouvernement, le Président de la République et l’Etat dans le cadre du processus en
cours ;

CONSIDERANT que ce processus a vocation à mettre un terme à une longue période


de conflit, à déboucher sur une solution politique globale et à construire une relation
apaisée entre l’Etat et la Corse autonome ;

CONSIDERANT les travaux menés par le Conseil exécutif de Corse et l’Assemblée


de Corse, dans le cadre de leurs prérogatives respectives, permettant une clarification,
une définition de l’autonomie et l’identification d’un chemin constitutionnel vers la mise
en œuvre de ce statut ;

CONSIDERANT que l’autonomie est la règle, depuis des décennies, pour les îles de
Méditerranée, pour les archipels des Açores, de Madère, des Canaries et de
nombreuses autres régions européennes ;

CONSIDERANT d’une part, que la Constitution française autorise déjà le principe de


l’autonomie et, d’autre part, que le droit positif français reconnaît également, comme
l’ont notamment démontré les échanges intervenus entre les élus de la Corse et le
Ministre Darmanin, plusieurs citoyennetés (française, européenne, kanak) ou plusieurs
régimes différents entre citoyens français (Alsace-Moselle) ;

CONSIDERANT que l’ensemble de ces éléments démontre que les « lignes rouges »
évoquées par le Président de la République et le ministre de l’Intérieur sont sans objet
dans le cadre de la demande d’autonomie formulée par l’Assemblée de Corse ;

CONSIDERANT que le statut d’autonomie devra notamment permettre, conformément


aux délibérations susvisées :
- la reconnaissance de l'existence du peuple corse et de ses droits ;
- un statut de coofficialité de la langue corse ;
- un statut de résident, conformément à la délibération n° 14/042 AC du 24 avril 2014
de l’Assemblée de Corse portant sur la protection du patrimoine foncier.

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CONSIDERANT que le transfert de compétences demandé dans le cadre du statut
d’autonomie a vocation à s’organiser par application d’un principe de progressivité,
lequel est la règle dans toute avancée institutionnelle de ce type ;

CONSIDERANT qu’un tel principe de progressivité permet de s’assurer que ces


transferts s’opèrent, selon des modalités convenues entre l’Etat et la Collectivité
autonome, dans le cadre d’un dialogue associant toutes les parties concernées
(collectivités et personnels concernés ou impactés par les transferts) et dans des
conditions garantissant leur effectivité et leur efficacité ;

CONSIDERANT que les règles fondamentales de la démocratie impliquent


notamment que les Corses soient consultés, par voie de referendum, sur le principe
d’un statut d’autonomie et ultérieurement sur son évolution ;

CONSIDERANT que le choix du peuple, exprimé par le suffrage universel, s’impose à


tous et doit être respecté par tous ;

APRES EN AVOIR DELIBERE

CHAPITRE I : LA DEMANDE SOLENNELLE D’UN STATUT D’AUTONOMIE

ARTICLE PREMIER :

AFFIRME que l’accession à un statut d’autonomie permettra d’inscrire la Corse dans


le droit commun de la plupart des grandes îles ou grands archipels de l’Union
Européenne, en Méditerranée comme dans l’Arc Atlantique.
Le critère de l’insularité apparaît, à l’examen du droit comparé, comme une donnée
objective et centrale, corrélée sur le plan institutionnel avec l’autonomie.
Le caractère insulaire légitime le choix institutionnel de l’autonomie pour deux sortes
de raisons :
- Des raisons d’ordre géographique : l’insularité génère des contraintes
permanentes objectives et des traits structurels spécifiques qui appellent à
l’émergence de normes spécifiques.
- La seconde raison identifie un lien entre insularité et identité : Le Professeur
Gaetano Armao souligne que « la condition d’insularité est un élément qui
transcende la donnée géographique et naturelle pour devenir histoire, économie,
culture (littérature, théâtre, musique), identité, et, dans certains cas, langue ».
Dans le sens le plus strict, l’insularité désigne bien évidemment ce qui est relatif à
une île ou un archipel ; mais cette donnée géographique façonne aussi l’identité
collective des peuples insulaires : Montesquieu a consacré un chapitre de l’Esprit
des Lois aux « peuples des îles », tandis que le statut des Açores évoque les «
immémoriales aspirations à l’autonomie des populations insulaires ».
Qu’il existe donc un lien avéré et constant entre insularité et autonomie.

ARTICLE 2 : Définition de l’autonomie

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DIT que l’autonomie se définit comme le statut juridique permettant à un territoire
d’adopter ses propres lois dans tous les domaines, à l’exception de ceux relevant des
prérogatives régaliennes de l’Etat.
Que ce statut implique le transfert irréversible de certaines compétences, l’octroi d’un
pouvoir législatif dans le champ de celles-ci, une autonomie fiscale et financière non
exclusive des transferts financiers de l’Etat et des moyens nécessaires à l’exercice de
ces compétences.
Que ces compétences sont exercées, dans le respect du principe de légalité et
conformément à la hiérarchie des normes, sous le contrôle du juge constitutionnel, qui
vérifie la conformité des lois du territoire autonome aux principes fondamentaux du
droit, à la Constitution, et aux traités européens et internationaux.

ARTICLE 3 : Les objectifs de l’autonomie

DECLARE que l’accession de la Corse a un statut d’autonomie vise à répondre à cinq


catégories d’enjeux :

3.1. Un enjeu historique de reconnaissance : il s’agit aujourd’hui de sortir


définitivement de la logique du conflit pour que s’ouvre une nouvelle ère dans
les relations entre la Corse et l’Etat.
Pour le faire sereinement, il est indispensable d’avoir le courage politique
d’assumer ensemble l’histoire du conflit, dans sa genèse comme dans ses
conséquences.
Ceci inclut nécessairement le règlement des suites pénales et civiles liées aux
poursuites ou condamnations pour des faits en relation avec le conflit.
Le processus de discussion en cours doit ainsi intégrer cette problématique
dans toutes ses dimensions (retour à la liberté, condamnations pécuniaires,
inscription des condamnés au Fijait, arrêt des poursuites en relation avec des
faits liés à la situation politique, économique et sociale de l’île), dans le cadre
d’un Pacte de paix exprimant la volonté commune des parties d’enraciner la
Corse dans l’apaisement.
Dans l’Histoire, cela a été le cas pour toutes les situations conflictuelles
comparables à celle de la Corse.
Cet enjeu historique de reconnaissance concerne également la prise en compte
par le droit de revendications fondamentales :
- Le peuple corse : le peuple corse est une réalité historique, politique,
culturelle, sociologique ; une communauté humaine ouverte, vivante, qui a
évolué au fil du temps, mais qui reste singulière en ce qu’elle est identifiable
et s’identifie elle-même par sa langue, sa culture, son rapport à sa terre, sa
volonté de se doter d’institutions propres et de se projeter dans un destin
commun. La question de la reconnaissance juridique du peuple corse est
centrale. Elle est d’ailleurs partagée bien au-delà de la famille nationaliste.
- Un statut de coofficialité de la langue corse : la langue corse fait, comme
toutes les langues, partie du patrimoine commun de l’humanité.
Elle est, depuis des temps immémoriaux, l’idiome utilisé par les Corses,
permanence affirmée malgré la présence voire la prééminence, au gré des
situations politiques, écrite et/orale, d’autres langues ou idiomes. Elle doit
avoir un statut de langue coofficielle sur le territoire de l’Île de Corse.
- Le lien entre le peuple corse et sa terre : il est proposé de
constitutionnaliser le lien entre les Corses et leur terre, cette

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constitutionnalisation ouvrant par exemple la voie juridique à la mise en
œuvre d’un statut de résident.

3.2. Un enjeu sociétal : la société corse est dans une situation de crise et de
difficultés structurelles. Elle est affectée par une perte de repères et de sens.
Le statut d’autonomie doit impulser un élan novateur et collectif, de nature à
dynamiser l’ensemble de nos forces vives et ressources, dans l’Île comme au
sein de la diaspora.

3.3. Un enjeu économique et social : les indicateurs dressent globalement le


tableau d’une situation économique et sociale marquée par de fortes disparités,
et des contraintes importantes. L’autonomie permettra à l’Assemblée de Corse
d’intervenir par voie législative ou réglementaire dans ces secteurs, pour
construire une économie de production, génératrice de richesses.
Elle permettra également des dispositifs de solidarité entre les citoyens ou entre
les territoires.
Elle instituera un nouveau pacte budgétaire, financier et fiscal entre l’Etat, la
Collectivité autonome et les autres collectivités, de façon à financer les grandes
infrastructures et la connexion de la Corse à son environnement méditerranéen,
européen, et international.

3.4. Un enjeu démocratique : les débats intervenus avec les citoyens comme avec
les élus, qu’ils soient territoriaux, communaux, et intercommunaux ont dégagé
une forte aspiration commune: que l’accession à un statut d’autonomie ait pour
corollaire le refus de toute logique de pression ou dérive mafieuse et le
renforcement de la vitalité démocratique de la société corse (cf délibération n°
22/162 en date du 18 novembre 2022, le Conseil exécutif de Corse et
l’Assemblée de Corse adoptant une résolution relative aux dérives mafieuses).

3.5. Un enjeu d’organisation administrative et d’équilibre des pouvoirs


internes : le statut d’autonomie a vocation à transférer à la Collectivité
autonome de Corse la compétence de principe pour statuer sur l’organisation
administrative et institutionnelle infra-territoriale. Il doit s’accompagner de
garanties concernant le champ de compétences des communes,
intercommunalités et territoires, ainsi que leurs ressources, en suscitant leur
implication dans tout projet de modification sur ces points, ainsi que sur le
devenir de la carte administrative.
Sera également conduite une réflexion partagée sur le rôle, les attributions et
les moyens de la Chambre des Territoires.

CHAPITRE II : LE CHEMIN CONSTITUTIONNEL VERS L’AUTONOMIE

ARTICLE 4 :

PROPOSE à l’Etat que le chemin constitutionnel se décline en trois volets :


- Un Accord politique, soumis à l’approbation en Corse dans le cadre d’un
referendum ;

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- L’insertion d’un Titre dans la Constitution se référant à cet Accord, Titre
consacrant l’autonomie de la Corse ;
- Une loi organique déclinant cet accord et les principes du statut d’autonomie de
la Corse, avec transfert du pouvoir législatif dans le périmètre des compétences
reconnues à la Collectivité autonome de Corse.

ARTICLE 5 : Un Accord politique

DEMANDE que l’Accord à formaliser dans le cadre du processus en cours comporte :

5.1. Un préambule rappelant l’histoire de la Corse, les éléments principaux


constitutifs de la question corse dans toutes ses dimensions, le choix d’y répondre
par une solution politique globale, qui intégrera la référence à l’histoire, au peuple
corse, au lien des Corses de l’île comme de la diaspora à leur terre et sera porteuse
d’une logique d’apaisement irréversible ;

5.2. Un document d’orientation (similaire en la forme et l’esprit à l’accord de


Nouméa, quand bien même la solution institutionnelle envisagée pour la Corse sera
différente de celle de la Nouvelle-Calédonie Kanaky) énumérant les éléments
essentiels qui seront repris par le Titre de la Constitution, la loi organique précisant :
• Les symboles (hymne, drapeau, fête, éventuellement nom de la Collectivité
autonome) ;
• Les principales institutions de la Collectivité autonome ;
• Les compétences (compétences régaliennes de l’Etat ; compétences de
principe de la Collectivité autonome) ;
• Le calendrier et les modalités du transfert des compétences de principe ;
• Le calendrier du transfert à la Collectivité autonome de Corse des moyens
humains et des moyens financiers et fiscaux ;
• L’évolution de l’organisation institutionnelle de la Corse (caractère évolutif
du statut, clause d’évaluation à 15 ans) ;
• L’application de l’accord ;
• Les signataires.

5.3. Une clause de bonne fin, par laquelle le Gouvernement et l’Etat s’engagent à
préparer les textes nécessaires à la mise en œuvre de l’Accord, et notamment ceux
relatifs à la révision constitutionnelle et à la présentation de la loi organique.

ARTICLE 6 : La nécessité d’un titre consacrant l’autonomie de la Corse

AFFIRME qu’un titre consacré à la Corse dans la Constitution, plutôt qu’un simple
article, permet de réinscrire la Corse dans son destin méditerranéen et présente un
double avantage :
- Un avantage de cohérence juridique, l’autonomie n’étant ni du même degré ni
de la même nature que la décentralisation la plus poussée qui soit, elle doit être
singularisée dans le texte constitutionnel.
- Un avantage d’efficacité politique : celui de souligner clairement, à travers un
Titre spécifique de la Constitution, radicalement distinct de l’article 72 de la
Constitution, le caractère spécifique de la Corse (histoire, fait insulaire, fait

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politique concrétisé notamment par les résultats des élections territoriales) et
éviter ainsi tout éventuel effet mécanique de contagion institutionnelle
concernant les régions métropolitaines.

ARTICLE 7 : L’insertion du Titre XII bis: De l’Île de Corse, dans la Constitution

PROPOSE La rédaction suivante :

« Titre XII bis : De l’Île de Corse

Article 75-2 :
En application de l’accord approuvé par consultation en date du (…), la Corse est
dotée d’un statut d’autonomie au sein de la République française, qui tient compte de
son histoire, de son insularité dans l’environnement méditerranéen, de son relief
montagneux, de ses aspirations politiques, de son identité culturelle et linguistique, et
de ses spécificités géographiques, économiques et sociales.
Elle est titulaire de l’autonomie fiscale et financière.
La loi organique détermine les matières dans lesquelles le transfert des compétences
de l’Etat vers la Collectivité autonome de Corse s’exerce de façon définitive et pour
lesquelles l’Assemblée de Corse adopte des textes de forme législative, ainsi que
l’échelonnement et les modalités de ces transferts, ainsi que la répartition des charges
résultant de ceux-ci.
La loi organique détermine les conditions dans lesquelles des mesures justifiées par
les nécessités locales peuvent être prises par la Collectivité en faveur de sa population,
en matière de protection du foncier, de statut d’officialité de la langue corse et d’accès
à l’emploi.
Elle précise les conditions de participation de la Collectivité autonome de Corse à
l’exercice de certaines compétences de l’Etat, sous le contrôle du juge constitutionnel,
ainsi que la répartition des charges dans le cadre de ces compétences partagées.
Article 75-3

La loi organique détermine les principes d’organisation et de fonctionnement des


institutions de la Collectivité autonome de Corse, et les conditions dans lesquelles les
lois adoptées par l’Assemblée de Corse pourront être soumises avant publication au
contrôle du Conseil Constitutionnel.
La loi organique relative à la Corse précise les conditions, les délais et la composition
du corps électoral selon lesquels les Corses seront à nouveau consultés par voie de
référendum concernant l’éventuelle évolution du statut d’autonomie vers davantage de
dévolution, dans un délai qui ne peut excéder quinze ans ».

ARTICLE 8 : Une loi organique déclinant l’Accord et les principes du statut


d’autonomie
RAPPELLE que les dispositions que mentionne une loi organique instituant un statut

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d’autonomie sont classiquement les suivantes :
- Un préambule ;
- Les dispositions générales : hymne, drapeau, fête du 8 décembre, définition et
objectifs de l’autonomie ;
- La présentation des principales institutions de la Collectivité autonome (Gou-
vernement autonome ; Assemblée parlementaire ; instances consultatives ; re-
lations entre les différents organes) ;
- Droits de la Collectivité autonome
- La répartition des compétences entre l’État et la Collectivité autonome ;
- Les dotations financières garanties, permettant notamment la compensation
des contraintes liées à l’insularité, y compris la Dotation de Continuité Territo-
riale, les fonds de péréquation et mécanismes de compensation nécessaires ;
- La répartition des ressources fiscales ;
- Les modalités de contrôle de la répartition des compétences entre l’Etat et l’île
autonome de Corse, impliquant un pouvoir de saisine de celle-ci ;
- La présence du représentant de l’Etat dans le territoire autonome.

CHAPITRE III : LA MISE EN ŒUVRE PROGRESSIVE ET CONCERTEE DU STATUT


D’AUTONOMIE

ARTICLE 9 : La répartition des compétences

RAPPELLE que la répartition des compétences entre l'État et la Collectivité autonome


implique une distinction juridique entre compétence de principe et d’attribution.
Que la compétence de principe revient à la Collectivité autonome de Corse.
Que le transfert des compétences de principe reconnues à la Collectivité autonome de
Corse se fera en application des principes de progressivité et de soutenabilité,
essentiels pour la réussite de l’autonomie.

ARTICLE 10 : Les compétences régaliennes de l’Etat

DIT que la loi organique a vocation à préciser les compétences expressément


réservées à l’Etat (compétences régaliennes), qui sont clairement identifiées à
l’examen du droit comparé. Il s’agit notamment de :
- Politique étrangère et relations internationales de l'État ;
- Nationalité ;
- Droits civiques ;
- Droits civils, état et capacité des personnes, notamment actes de l'état civil ;
- Justice ;
- Défense et forces armées ;
- Sécurité de l’État ;
- Entrée et séjour des étrangers ;
- Ordre public et sécurité, à l'exclusion de la police locale ;

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- Monnaie.

ARTICLE 11 : La compétence de principe de la Collectivité autonome dans les


autres domaines

AFFIRME que toutes les autres compétences ont vocation à être transférées, à titre
de principe, à la Collectivité autonome, qui devra, pour les exercer, disposer d’un
pouvoir législatif effectif. Pour chaque compétence, un transfert de propriété, de droits
et de moyens (humains et financiers) devra être déterminé.

11.1. Qu’il est notamment envisageable de transférer, dès l’entrée en vigueur du


statut d’autonomie à la Collectivité autonome de Corse, plusieurs des compétences
suivantes :
- L’organisation politique et administrative de la Collectivité autonome
- Le pouvoir de modifier, de règlementer la totalité des impôts et des taxes
actuellement en vigueur ; d’en créer ultérieurement d’autres en définissant leur
assiette, leur taux, leur liquidation, leur perception ; d’en supprimer
- La production et la diffusion légistique
- La production de données statistiques économiques, sociales et
environnementales
- La politique de l’agriculture et de la sylviculture
- La politique de la pêche des ressources marines et domaine public maritime
- La politique du tourisme
- La politique de l’industrie
- La politique de l’énergie
- La politique de l’eau
- La politique du commerce et de l’artisanat
- La politique des transports intérieurs et extérieurs
- La politique des communications
- La politique de l’environnement
- La politique du social, de la solidarité et de l’égalité
- La politique de l’urbanisme et de l’aménagement du territoire
- La politique du travail et de la formation professionnelle
- La politique de la culture et de la langue
- La politique de l’éducation, y compris l’enseignement secondaire.
- La politique du sport et de la jeunesse
- La politique de la santé
- La politique de la recherche et de l’innovation
- La politique de la chasse et de la pêche
- La politique de sécurité publique et de protection civile
- La politique de solidarité avec la diaspora Corse
- La politique de coopération territoriale européenne et les accords
internationaux qui concernent l’Île de Corse et son espace maritime

11.2. Que pourront s’y ajouter :


- Celles mentionnées dans la délibération n°18/042 du 8 mars 2018 : protection
du patrimoine foncier, statut fiscal, préservation des particularités linguistiques
et culturelles de l’île, donc le statut de la langue, développement économique
et social, l’emploi, la santé et l’éducation.

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- La compétence de l’organisation institutionnelle interne (notamment carte
administrative de l’Île de Corse, organisation et compétences des collectivités
infra insulaires), l’adéquation entre le transfert de compétences et le transfert
de moyens humains et financiers permettant de les exercer concrètement et
efficacement.
- Les compétences à ce jour partagées :
• Langue corse et politique linguistique
• Aménagement du territoire
• Développement économique
• Tourisme
• Agriculture et forêt
• Energie
• Culture et patrimoine culturel
• Logement
• Environnement
• Déchets
• Affaires sociales et sanitaires, y compris santé environnementale,
compétence en matière d’hébergement d’urgence, d’insertion
professionnelle
• Politique de la montagne
• Politique de la mer et domaine public maritime
• Education, formation, enseignement
• Jeunesse et sport
• Infrastructures routières, ferroviaires, portuaires et aéroportuaires
• Egalité femmes-hommes
• Urbanisme
• Emploi
• Formation.

ARTICLE 12 :

PRECISE que le choix des compétences transférées à titre immédiat sera arrêté en
fonction de l’expertise fiscale, budgétaire et financière à intervenir, au terme des
discussions qui seront conduites dans le cadre de la deuxième partie du processus en
cours entre la Corse et l’Etat. Et que, dans les domaines pour lesquels la compétence
de principe n’aura pas encore été transférée à la Collectivité autonome, celle-ci
disposera d’un pouvoir d’habilitation permanente.

ARTICLE 13 : La mise en œuvre des transferts de compétences et des moyens

EXIGE que tout transfert de compétence implique les transferts de moyens humains
et financiers correspondants.

ARTICLE 14 : Le principe de progressivité

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ENONCE que le transfert de la totalité des compétences ne peut se faire que de façon
progressive, dans le cadre d’un calendrier arrêté en son principe par la loi organique,
aménagé ultérieurement par accord entre les parties, par exemple sur proposition de
l’Assemblée de la Collectivité autonome, la loi organique pouvant définir le nombre de
phases triennales de transfert de compétences.
Que la progressivité porte également sur le transfert des biens de l’Etat, qui devront
être transférés, après évaluation, à titre gratuit à la Collectivité autonome de Corse,
ainsi que l’ensemble des ouvrages et infrastructures sous régime de concession, les
biens des Etablissements Publics de l’Etat situés en Corse et le domaine public
maritime, incluant le domaine public naturel.

14.1. Le transfert des moyens humains, qui accompagne nécessairement chaque


transfert de compétences : au vu de l’enjeu statutaire, social et par leurs
implications individuelles et collectives, les transferts de personnels seront
précédés d’un cycle de discussions sectorielles, avec les membres,
organisations syndicales et professionnelles, et institutions, notamment
consulaires, représentant chaque domaine concerné.

14.2. Le transfert des moyens financiers, doit correspondre nécessairement à


chaque compétence ou bloc de compétences transféré : il est essentiel de
chiffrer le coût de chaque compétence, lequel doit ensuite être couvert par la
combinaison, si nécessaire évolutive, des ressources propres, notamment
fiscales, de la Collectivité de Corse, et des transferts financiers provenant de
l’Etat, soit par une combinaison des deux.
De même, la soutenabilité globale de la construction budgétaire et fiscale
inhérente à un statut d’autonomie de la Corse doit intégrer le financement des
compétences reconnues aux communes, intercommunalités et territoires et les
ressources fiscales doivent être transférées.

14.3. Corollaire du principe de progressivité, le principe de capabilité permettra la


formation légistique et l’accompagnement de l’Etat nécessaires pour exercer
concrètement et efficacement les compétences transférées.

ARTICLE 15 :

DEMANDE, dans le cadre de la déclinaison opérationnelle du principe de progressivité


dans le transfert des compétences, des moyens humains, et des moyens financiers :
- La communication de toutes les données chiffrées permettant un état des lieux
précis ;
- La mise en place, dans les six mois à venir, de groupes de travail incluant les
personnels et représentants des secteurs d’activité concernés par les transferts
de compétence.
- Des commissions de travail spécifiques avec les acteurs concernés sur le
triptyque de trois droits fondamentaux financés par des cotisations sociales,
dont le statut d’autonomie aura vocation à renforcer le périmètre et l’effectivité :
Droit du travail, santé et protection sociale.

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CHAPITRE IV : L’AUTONOMIE FISCALE ET FINANCIERE

ARTICLE 16 :

DEMANDE la consécration, dans le Titre de la Constitution consacré à la Corse, de


l’autonomie fiscale et financière de la Collectivité autonome de Corse, ouvrant la
possibilité de décliner plusieurs modalités d’exercice de la compétence fiscale, là
encore en application du principe de progressivité.

ARTICLE 17 :

PRECISE, qu’en référence à la taxonomie de l’OCDE sur le degré d’autonomie fiscale


des administrations territoriales, l’autonomie fiscale et financière implique que :
- La Collectivité autonome dispose du pouvoir de décider librement d’un impôt,
de déterminer l’assiette de calcul et le taux, pour lequel elle accomplit les tâches
de calcul et de recouvrement ;
- La Collectivité autonome décide du taux et des exemptions et suppression sans
consultation du gouvernement central ;
- La Collectivité autonome décide du taux et le gouvernement central n’impose
pas de corridor ;
- La Collectivité autonome décide des exemptions fiscales et des crédits d’impôt ;
- La Collectivité autonome dispose d’une part fixe des impôts d’Etat, et cette
répartition ne peut être modifiée que par accord entre les parties.

ARTICLE 18 :

AFFIRME que la fiscalité sera ainsi mieux adaptée aux objectifs politiques qui seront
fixés par les élus de la Corse :
18.1. La fiscalité comme outil de lutte contre la spéculation : exemple de la taxe
sur les résidences secondaires non patrimoniales ou sur les transactions
spéculatives dont le produit est affecté à des opérations vertueuses : fonds
foncier agricole, Office foncier de la Corse, financement des infrastructures
communales ;
18.2. La fiscalité comme outil d’équité territoriale : fiscalité préférentielle en
faveur des contribuables résidents permanents en zones de montagne ou
entreprises de l’intérieur ; fonds de péréquation en faveur des communes les
plus contraintes ;
18.3. La fiscalité comme outil de justice sociale ;
18.4. La fiscalité comme outil de protection environnementale ;
18.5. La fiscalité comme outil d’interventionnisme économique, pourrait par
exemple être orientée dans un sens favorable à la production et à l’attractivité
(réduction de l’IS pour des entreprises de production industrielle dans les
secteurs innovants et/ou technologiques, crédits d’impôt à l’investissement
productif, aux opérations de recherche, aux opérations d’innovation, réfaction
de la taxe sur salaires pour des entreprises de production industrielle dans les
secteurs innovants et/ou technologiques, etc) ou encore en faveur de l’emploi

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et des garanties sociales et avantages accordés aux salariés, etc.

ARTICLE 19 :

RAPPELLE que tout statut d’autonomie implique nécessairement la garantie de


transferts financiers en provenance de l’Etat, affirmation de la solidarité nationale, et
prévoit les modalités de leur mise en œuvre. Dans tout statut d’autonomie, outre les
ressources propres des collectivités, le financement des compétences transférées doit
également intégrer des transferts financiers à destination de la Collectivité autonome
de Corse et en provenance de l’Etat, destinés à corriger ou compenser :
19.1. Un déséquilibre vertical, quand les ressources propres des collectivités
territoriales sont insuffisantes pour financer les dépenses qui découlent des
compétences qui leur sont dévolues ;
19.2. Un déséquilibre horizontal, pour traiter les disparités de ressources et/ou de
besoins en dépenses entre les territoires et rapprocher de la moyenne les
ressources financières de la collectivité. En pareil cas, les transferts ont lieu
entre collectivités territoriales ;
19.3. Des effets externes : correction de l’impact d’effets externes identifiés comme
générant des surcoûts. Différents critères peuvent être pris en compte :
population, superficie du territoire local, concentration de résidents à besoins
particuliers (familles précaires, personnes âgées, nombre d’enfants en âge de
scolarité…), etc.

ARTICLE 20 :

AFFIRME que l’autonomie financière repose sur les principes suivants :


- Soutenabilité financière : il s’agit de garantir dans la durée une équation
financière viable. D’un point de vue méthodologique, une concertation est à
mener à travers les groupes de travail mentionnés précédemment. Dans ce
cadre, il est indispensable que soient communiquées les données chiffrées
susmentionnées.
- Suffisance financière : il convient dès lors de garantir les ressources de la
Collectivité autonome, ainsi que celles des EPCI et des collectivités infra-
insulaires.

CHAPITRE V : LES GARANTIES A CONSACRER DANS LE FUTUR STATUT


D’AUTONOMIE DE LA CORSE

ARTICLE 21 :

S’ENGAGE à garantir les libertés publiques et droits fondamentaux, dans le respect


de l’ordre juridique constitutionnel, communautaire, et international ;

ARTICLE 22 :

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S’ENGAGE à introduire le principe de clauses de non-régression sociale et non-
régression environnementale, à travers la mise en place de mécanismes juridiques et
politiques instituant des effets cliquets, afin que la production normative de la
Collectivité autonome ne conduise pas à une régression des acquis sociaux mais qu’ils
soient préservés voire améliorés ;

ARTICLE 23 :

S’ENGAGE à consacrer le principe de subsidiarité interne, y compris dans le cadre de


l’exercice de la compétence d’organisation administrative des échelons infra-
territoriaux, tenant compte des spécificités des territoires et permettant un
développement territorial équilibré ;

ARTICLE 24 :

DIT que devra s’appliquer un principe de supplétivité de la législation nationale les


normes légales en vigueur s’appliquant dans la Collectivité autonome en l’absence de
législation propre.

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